N° 3366 tome VII - Avis de M. Jean-Jacques Guillet sur le projet de loi de finances pour 2007 (n°3341)



N
° 3366

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2006

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2007 (n° 3341),

TOME VII

ÉCOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

PAR M. Jean-Jacques GUILLET,

Député

——

Voir le numéro 3363 (annexe n° 14)

INTRODUCTION 5

I – LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE : UNE RESPONSABILITÉ MONDIALE, AU CœUR D’UNE DIPLOMATIE ENVIRONNEMENTALE EN PLEIN ESSOR 7

A. LE DISPOSITIF MIS EN PLACE PAR LE PROTOCOLE DE KYOTO EST DÉSORMAIS UNE RÉALITÉ 7

1) Un dispositif novateur au plan international 7

2) Les premières mesures concrètes 9

a. Les politiques nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre 9

b. Les échanges de permis d’émission de gaz à effet de serre 10

c. La mise en œuvre conjointe (MOC) et le mécanisme de développement propre (MDP) 12

3) Les premiers enseignements 13

a. Le renforcement des mesures domestiques 13

b. Les aménagements envisageables du marché européen du carbone 14

c. Une meilleure répartition géographique des projets « Kyoto » 16

B. LES INTERROGATIONS SUR « L’APRÈS KYOTO » AU-DELÀ DE 2012 17

1) Les États signataires vont-ils respecter leurs engagements ? 17

2) Comment élargir le processus de Kyoto ? 20

II - LA PROMOTION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE : UN EFFET DE LEVIER PUISSANT POUR LA COOPÉRATION INTERNATIONALE 23

A. UNE INTÉGRATION CROISSANTE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DANS LES ACTIONS MULTILATÉRALES DE COOPÉRATION 23

1) Une plus grande mobilisation des instruments de l’aide multilatérale en faveur du développement durable 24

a. Le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) 24

b. Les autres instruments internationaux 26

2) La contribution de la France à l’aide multilatérale 27

B. UNE POLITIQUE BILATÉRALE VOLONTARISTE AU SERVICE D’UN DÉVELOPPEMENT DURABLE 30

1) Le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) 30

2) Le rôle de l’Agence française de développement (AFD) 32

3) Les autres instruments d’appui bilatéraux 33

4) Un savoir-faire à valoriser davantage pour renforcer la coopération française en matière environnementale 34

III - LA GOUVERNANCE EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE RESTE INSUFFISANTE AU REGARD DES ENJEUX 37

A. UN MANQUE DE COHÉRENCE AU NIVEAU MONDIAL 37

1) Une multiplication des initiatives et des acteurs 37

2) Le projet de création d’une Organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE) 39

3) La mobilisation européenne en faveur du développement durable 41

B. UN DÉFAUT DE COORDINATION AU PLAN NATIONAL 43

1) Les acteurs du développement durable 43

a. Les instances nationales directement impliquées dans la promotion du développement durable 43

b. Les projets territoriaux de développement durable 46

2) Au niveau international, une présence française paradoxalement insuffisante 47

a. Un dispositif institutionnel dispersé 47

b. Un rôle clé de coordination joué par la MIES dans la lutte contre le réchauffement climatique 49

3) Préparer la Présidence française de l’Union européenne 52

IV – LA MISSION DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE 55

A. LES CRÉDITS INSCRITS DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2007 55

B. LES CRÉDITS DÉVOLUS À L’ACTION INTERNATIONALE 57

CONCLUSION 61

EXAMEN EN COMMISSION 63

LISTE DES PERSONNALITÉS ENTENDUES 67

Mesdames, Messieurs,

Depuis le début de la décennie 90 et, en particulier, le « Sommet de la Terre » de Rio, l’écologie et le développement durable constituent des préoccupations croissantes de la communauté internationale, qui les inscrit désormais à l’ordre du jour de ses différentes rencontres – dont celles du G8 –, après les avoir intégrés dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), adoptés en 2000.

Ces thèmes font l’objet d’une mobilisation importante, à l’origine d’un foisonnement d’initiatives, émanant aussi bien de la société civile que des Etats, au niveau international comme au niveau régional. Au cœur de cette mobilisation, la lutte contre le réchauffement climatique est, aujourd’hui, un thème central, auquel l’opinion publique est, chaque jour, plus sensibilisée, à la suite notamment des films d’Al Gore et de Yann Arthus Bertrand et de publications de plus en plus nombreuses sur ce sujet. Le très récent rapport de Sir Nicholas Stern, commandé par le gouvernement britannique, s’inquiète ainsi des risques de récession économique, en l’absence de politique résolue de réduction des émissions de gaz à effet de serre et « met la responsabilité de l’action fermement dans le camp des artisans de la politique étrangère et économique ».

Dans ce domaine, comme dans celui de la préservation de la biodiversité, la France entend jouer un rôle actif, en soutenant la mise en place d’un « mécanisme international d’expertise scientifique sur la biodiversité » ainsi que la création d’une organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE). Ces initiatives attestent de la place croissante qu’occupent désormais les questions environnementales, dans la conduite de notre politique étrangère et nos actions de coopération.

Mais, si la promotion du développement durable constitue une priorité visible pour la diplomatie française, qu’en est-il dans notre pays ? En d’autres termes, la France s’est-elle véritablement donnée les moyens de traduire efficacement ses paroles en actes et de peser, en montrant l’exemple, sur les grands débats qui dominent aujourd’hui la scène internationale ?

La proposition, formulée par certaines personnalités, de créer un poste de vice-Premier ministre chargé de l’environnement, tend à faire penser que, malgré les efforts engagés, beaucoup reste à faire. Or, la France, qui fait preuve de volontarisme, se doit d’être exemplaire, tant dans les politiques qu’elle met en œuvre pour préserver l’environnement que par sa contribution au fonctionnement et aux interventions des organisations internationales qui oeuvrent pour le développement durable. Il en va de sa crédibilité dans les enceintes internationales.

A cet égard, la Présidence de l’Union européenne que la France doit assurer au second semestre 2008 constituera une occasion décisive pour prendre des initiatives, à une période charnière dans les négociations internationales multilatérales qui traiteront de l’avenir climatique de la planète.

Soucieux des retombées effectives des politiques mises en œuvre et de leur efficacité, votre Rapporteur s’attachera à examiner trois questions dans le présent rapport :

− quels enseignements tirer de la mise en place anticipée des mécanismes prévus par le protocole de Kyoto, au moment où s’engagent les réflexions sur l’avenir du régime multilatéral du climat, après 2012 ?

− comment le développement durable est-il intégré dans les actions de coopération internationale, tant au plan multilatéral que bilatéral ?

− quels sont les objectifs d’un renforcement de la gouvernance internationale de l’environnement ?

I – LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE :
UNE RESPONSABILITÉ MONDIALE, AU C
œUR D’UNE
DIPLOMATIE ENVIRONNEMENTALE EN PLEIN ESSOR

Au niveau international, le changement climatique est inscrit à l’agenda du développement durable.

Les dérèglements du climat constituent, en effet, une source de préoccupations, non seulement pour l’environnement mondial, mais également pour le développement des pays. Les effets néfastes du réchauffement de la planète affectent, particulièrement, les pays les plus pauvres, qui dépendent essentiellement des ressources naturelles et des secteurs économiques s’y rattachant comme l’agriculture, l’exploitation des forêts et la pêche. Mais, ils touchent également les pays qui disposent d’une économie plus diversifiée. En réalité, la lutte contre les changements climatiques est de l’intérêt de l’ensemble des pays ; il s’agit d’une responsabilité mondiale.

L’adoption de la Convention climat et du protocole de Kyoto a témoigné, il y a déjà plus de dix ans, d’une prise de conscience croissante des enjeux de ce phénomène. Mais, au-delà de cette prise de conscience et des textes qui en ont résulté, où en est-on concrètement des efforts de lutte contre le réchauffement de la planète ?  

A. Le dispositif mis en place par le Protocole de Kyoto est désormais une réalité

En 1992, lors du Sommet de Rio, la communauté internationale, de plus en plus consciente de la réalité du phénomène de réchauffement de la planète, a adopté la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Cette convention fixe un objectif de stabilisation des concentrations de gaz à effet de serre à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Si les pays industrialisés se sont donnés pour objectif de ramener leurs émissions au niveau de celles de 1990, cet objectif n’était pas contraignant. Ce n’est qu’en 1995, au cours de la conférence des Parties de Berlin que la logique des quotas l’a finalement emporté, ouvrant la voie à l’adoption du protocole de Kyoto.

1) Un dispositif novateur au plan international

Signé en 1997, le protocole de Kyoto, qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre des pays industrialisés, durant la période 2008-2012, en deçà des niveaux de 1990, est entré en vigueur le 16 février 2005(1), après avoir été ratifié par 141 Etats (2). Le protocole prévoit que 34 pays industrialisés, dits « pays de l’annexe I », seront dans l’obligation de réduire de 5,2% leurs émissions de gaz carbonique et de cinq autres gaz réchauffant l’atmosphère, sur cette période. Cet objectif global est décliné individuellement, certains pays ou ensembles ayant des objectifs à la baisse (−8% pour l’Union européenne, −7% pour les Etats-Unis, −6% pour le Japon) d’autres, de stabilisation (Russie et Ukraine, par exemple).

Au niveau européen, cet objectif est partagé entre les quinze Etats membres de l’Union européenne, au 31 mai 2001(3), dans le cadre d’un accord contraignant de répartition de la charge(4). Cette répartition va de –28 % pour le Luxembourg à +27 % pour le Portugal, avec un objectif de stabilisation pour la France.

A ce jour, ni les Etats-Unis, ni l’Australie, qui n’ont pas ratifié le protocole, ne participent à ce dispositif. Pour leur part, les 107 pays en développement, qui ont ratifié le protocole, ne sont soumis à aucune obligation contraignante afin de ne pas compromettre leur développement économique.

Au total, les émissions de gaz à effet de serre proviennent pour :

- 39,7% de pays qui n’appartiennent pas à l’annexe I, c’est-à-dire n’ayant pas d’engagements contraignants de maîtrise de leurs émissions dans le cadre du protocole (parmi ces pays, les plus importants en termes d’émissions ont tous ratifié le protocole) ;

- 33,9% de pays de l’annexe I ayant ratifié le protocole ;

- 26,4% de pays de l’annexe I n’ayant pas ratifié le protocole (24,8% pour les Etats-Unis et 1,6% pour l’Australie).

Les mécanismes de réduction ne s’appliquent donc qu’à un tiers des émissions. Le dispositif mis en place par le protocole est tout à fait novateur en ce qu’il vise à l’établissement d’un prix unique pour la tonne de carbone, destiné à être internalisé dans les coûts de production. Il se caractérise également par sa flexibilité en conjuguant mesures domestiques et mécanismes additionnels afin d’offrir une certaine souplesse, aux pays signataires, dans leurs efforts de réduction des émissions de CO2. Enfin, il repose sur des procédures de surveillance, jusqu’alors inédites en droit international de l’environnement.

Au cours de la 7ème conférence des Parties à la convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), réunie à Marrakech en 2001, des procédures et mécanismes de contrôle ont, en effet, été adoptés afin de garantir le respect des obligations définies par le protocole de Kyoto. Ainsi, un pays qui dépasse ses engagements de réduction verra son obligation reportée et augmentée de 30 % sur la période suivante d’engagements. Il devra également élaborer un plan d’action structurel d’observance afin de respecter son engagement en trois ans, tandis que son droit d’accès au marché des permis négociables sera suspendu. Par ailleurs, en cas de non-respect de ses obligations d’inventaire et de communications régulières, le pays devra mettre en place les mesures nécessaires pour remédier à cette défaillance, dans un délai d’un an. Enfin, si le pays ne respecte pas les critères d’éligibilité aux mécanismes de flexibilité (marché des permis d’émission, mise en œuvre conjointe et mécanisme de développement propre), l’éligibilité sera suspendue.

Le Comité de contrôle du respect des obligations du protocole de Kyoto a été formellement créé lors de la première réunion des Parties, en décembre 2005, et officiellement installé, le 3 mars 2006. La question de la force juridique des sanctions reste, toutefois, en suspens et a été renvoyée à la conférence des Parties de 2007.

2) Les premières mesures concrètes

Le protocole de Kyoto prévoit que les mesures prises au niveau national doivent constituer une part « significative » de l’effort de réduction. Par ailleurs, il met en place des mécanismes de flexibilité auxquels les pays ne peuvent recourir qu’en complément de leurs efforts au plan domestique : les échanges internationaux de permis d’émission, la mise en œuvre conjointe (MOC) et le mécanisme de développement propre (MDP). Enfin, un fonds d’adaptation, abondé par un prélèvement sur le MDP, a été créé pour financer les projets et programmes d’adaptation au changement climatique des pays qui ont ratifié le protocole.

a. Les politiques nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre

En France, la lutte contre le changement climatique constitue un axe essentiel de la Stratégie nationale du développement durable (SNDD). Elle a fait l’objet d’un plan d’action gouvernemental de maîtrise du changement climatique, le Plan Climat, présenté en juillet 2004. Ce plan a pour objectif de permettre à la France de remplir ses engagements de réduction de gaz à effet de serre, découlant du protocole de Kyoto. Il regroupe des actions dans tous les secteurs de l’économie et de la vie quotidienne des Français en vue d’économiser 54 millions de tonnes équivalent CO2 par an, à l’horizon 2010.

Le Plan Climat présente huit orientations : campagne nationale sur le changement climatique ; transports durables ; bâtiment et écohabitat ; industrie, énergie, déchets ; agriculture durable et forets ; climatisation durable (étiquette énergie sur les climatiseurs) ; Plans Climat territoriaux et État exemplaire ; recherche et prospective après 2010. Ce Plan consacre également un chapitre aux questions d’adaptation du pays aux effets du changement climatique.

Un premier bilan de mise en œuvre a été rendu public lors du Rendez-Vous Climat, de novembre 2005, et a décidé d’une actualisation du Plan Climat en 2006. Des projections à 2010 et 2020 ont permis de préciser que l’engagement de Kyoto peut être respecté sous réserve d’une mise en œuvre résolue des mesures engagées : l’impact de chaque mesure n’est, en effet, pas totalement garanti en raison de facteurs variables dans les différents secteurs concernés. Ces projections ont alimenté le rapport de la France sur les mesures qu’elle a prises contre le changement climatique qui a été adressé, à la Commission européenne, début 2006.

En termes budgétaires, les différents ministères et leurs établissements publics concourent à la politique « climat », dans le cadre d’actions poursuivant plusieurs finalités comme la maîtrise de l’énergie, par exemple. Dans ce domaine, les principaux postes budgétaires sont les crédits d’intervention de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) pour le soutien aux énergies renouvelables et à l’utilisation rationnelle de l’énergie, le programme sur les nouvelles technologies de l’énergie et l’action « lutte contre le changement climatique ». Il convient également d’y ajouter les déductions fiscales, destinées à soutenir l’utilisation des biocarburants et le bois-énergie, ainsi que le crédit d’impôt aux particuliers pour les économies d’énergie et les équipements utilisant des énergies renouvelables.

b. Les échanges de permis d’émission de gaz à effet de serre

Suite à un déplacement à Bruxelles, votre Rapporteur souhaite insister sur le marché européen de permis d’émissions qui, mis en place il y a un peu plus d’un an, s’est rapidement imposé au niveau mondial, et auquel les entreprises françaises participent.

A la suite du lancement du Programme européen sur le changement climatique (PECC) (5), un système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre a été proposé et mis en place par la directive 2003/87/CE (6). Couvrant environ 46% du total des émissions de CO2 des pays de l’Union et plus de 12 000 installations (7), le marché européen du carbone fonctionne effectivement depuis le 1er janvier 2005. Ce marché repose sur le principe suivant : les entreprises concernées se voient allouer un montant donné de quotas, pour chaque année de la période 2005-2007. En fin d’année, chaque entreprise doit disposer d’un montant de quotas équivalent à ses émissions. Les entreprises sont libres d’acheter ou de vendre leurs quotas, elles peuvent également les mettre en réserve pour un usage ultérieur.

Préalablement à l’ouverture du marché, chaque Etat membre devait notifier à la Commission européenne son « plan national d’affectation des quotas » (PNAQ) dans lequel l’Etat concerné précise le montant global de quotas alloué à ses entreprises ainsi que les règles d’allocation par installation. Le premier plan d’affectation français (PNAQ I), validé par la Commission européenne en décembre 2004, a été adopté par décret (8) et concerne 1.085 installations dans les secteurs industriels et énergétiques suivants : acier, ciment, chaux, verre, céramique, papier, raffinage, etc. Le montant total de quotas du PNAQ, pour la première période d’échange, est de 156 millions de tonnes de CO2 (MtCO2) par an.

L’élaboration de ces plans nationaux peut s’avérer délicate dans la mesure où l’effort demandé aux entreprises des secteurs industriels et énergétiques risque de porter atteinte à leur compétitivité. A cet égard, la Déléguée générale de l’Association des entreprises pour la réduction de l’effet de serre (AERES) a fait part à votre Rapporteur de la nécessité d’allonger les périodes d’engagements, afin de donner aux entreprises une meilleure visibilité pour réaliser les investissements nécessaires dans les technologies sobres en carbone.

Le marché européen du carbone, Powernext carbone, est actuellement en plein essor (9). Toutefois, ce marché a accusé, fin avril 2006, une chute des cours de 35%, la tonne de carbone passant de 24,3 euros à 15,7 euros. Cet effondrement des cours a été provoqué par l’annonce d’émissions nationales de CO2 inférieures aux plans nationaux d’affectation par six pays (République tchèque, Pays Bas, Estonie, Belgique, Espagne et France). Il a mis en lumière les risques d’une attribution trop généreuse de quotas de CO2 aux entreprises présentes sur ce marché, ce qui devrait inciter les pays concernés à réviser, à la baisse, leurs allocations dans les plans nationaux, prévus pour la deuxième période (2008-2012).

Le marché européen du carbone n’en constitue pas moins un instrument innovant dans la lutte contre le changement climatique, qu’il importe d’améliorer et de renforcer dans les années à venir.

c. La mise en œuvre conjointe (MOC) et le mécanisme de développement propre (MDP)

L’objectif de ces deux mécanismes est de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre au travers de projets réalisés, par les pays signataires ou leurs entreprises, dans les pays en transition (MOC) ou en développement (MDP).

A titre d’exemple, la MOC concerne les projets industriels ou forestiers visant à lutter contre l’effet de serre, lancés en Russie et dans les pays d’Europe centrale et orientale (par exemple, un projet de modernisation des centrales thermiques en Pologne dans le cadre d’un accord intergouvernemental ou de modernisation, par une entreprise française, d’une cimenterie en République tchèque). Ces projets permettent de générer des crédits d’émission de gaz, utilisables par les investisseurs.

Le MDP constitue un élément de réponse, aux demandes des pays en développement, de disposer d’un mécanisme financier qui permettre d’appuyer leur développement économique, en adoptant des méthodes de production plus « propres ». Ce mécanisme génère donc des crédits d’émission, sur la base de projets d’investissement dans un pays en développement (par exemple, la France – ou une entreprise française – modernise une cimenterie ou finance un projet d’économie d’énergie en Inde).

Ces deux types de projet connaissent un fort développement (10), en particulier depuis le début de l’année. Les entreprises françaises sont assez actives dans ce domaine : à l’été 2006, on recensait 208 projets « Kyoto », majoritairement au titre du MDP (91%), impliquant 45 entreprises françaises dans 50 pays. Le volume de réduction d’émissions de CO2, grâce à ces projets, est estimé à 298 Mte CO2. Les projets qui concernent les entreprises françaises relèvent majoritairement d’une logique industrielle (l’achat de crédits carbone ne représente que 14% du total) et concernent principalement la valorisation de la biomasse, des déchets, les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.

Le graphique ci-après illustre la répartition des projets « Kyoto », impliquant des entreprises françaises, par tonne de carbone évitée par pays :

TeCO2 = tonnes équivalent CO²

Source : DGTPE, Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie (MINEFI)

3) Les premiers enseignements

Entré en vigueur il y a un peu plus d’un an et demi, le protocole de Kyoto connaît un début de réalisation significatif avec le fonctionnement de marchés du carbone et l’essor du mécanisme de développement propre (MDP). Votre Rapporteur a néanmoins constaté la nécessité de certains aménagements afin que les efforts engagés puissent réellement porter leurs fruits.

a. Le renforcement des mesures domestiques 

Malgré les premières mesures qui ont été mises en œuvre, avant même l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto, et une moindre contribution aux émissions mondiales, du fait de la spécificité de son parc énergétique, la France enregistre une croissance de ses émissions dans certains secteurs, comme les transports et le bâtiment.

La préparation de l’actualisation du Plan Climat 2004 a débuté, au printemps 2006, avec la constitution de sept groupes de travail (transports, bâtiment, agriculture-forêts, industrie, énergie, collectivités locales, sensibilisation et communication) dont le responsable de la Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES) assure la fonction de rapporteur. La finalité de cette actualisation est de « sécuriser » le respect, par la France, des engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto.

Les propositions des groupes de travail ont permis d’élaborer un projet de plan actualisé qui fait l’objet, depuis juillet, de concertations au niveau interministériel en vue de sa finalisation à l’automne 2006.

Sur une plus longue perspective, l’objectif poursuivi est celui dit du « facteur 4 » qui vise une réduction par quatre de nos émissions de gaz à effet de serre, d’ici à 2050. Cet objectif est inscrit dans la loi de programme du 13 juillet 2005, fixant les orientations de la politique énergétique, et rappelé dans le Plan Climat.

En septembre 2005, un groupe de travail a été mis en place sur ce thème, qui vient de rendre ses conclusions. Ce groupe préconise une mobilisation générale qui doit concerner tous les secteurs d’activité (transports, bâtiment, industrie, agriculture, production d’énergie) et tous les acteurs économiques (Etat, collectivités locales, entreprises et les citoyens, dans leur ensemble). Il recommande également d’utiliser tous les outils de politique publique : recherche, réglementation, incitations financières et fiscales, communication et information.

Au niveau international, le groupe « facteur 4 » préconise notamment que la France, en tant que bailleur important de la Banque mondiale et des banques régionales de développement, incite ces institutions à privilégier les investissements favorables à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables. En ce qui concerne les échanges de permis d’émissions, le groupe de travail recommande, au niveau européen, un plan d’investissement de long terme, permettant d’acheter des quotas d’émissions post 2012, sans attendre la mise en place des dispositifs institutionnels qui sont, actuellement, au cœur des négociations internationales.

b. Les aménagements envisageables du marché européen du carbone

Le « mini krach » du marché européen du carbone a mis en évidence le risque que peut faire courir une sur-allocation de quotas d’émissions aux entreprises (11), de crainte de menacer leur compétitivité. Il s’agit d’une préoccupation légitime qui nécessite la recherche d’un équilibre afin de ne pas compromettre, dans le même temps, les efforts indispensables de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Au niveau européen, ce premier enseignement doit être pris en compte dans l’élaboration et la validation des plans nationaux d’affectation des quotas pour la deuxième période (2008-2012). Avec un peu de retard, la France a soumis, le 15 septembre dernier, son PNAQ II qui prévoit un taux d’effort de 2,71% pour l’ensemble des secteurs couverts par la directive « quotas », contre 2% prévus dans le projet initial. L’enveloppe de quotas, proposée par ce plan, est de 149,6 millions de tonne de CO2 (MtCO2) par an, en réduction par rapport à celle du premier plan qui s’élevait à 156 MtCO2/an. Par ailleurs, le périmètre de ce plan est étendu, avec l’inclusion de nouvelles installations (installations de fabrication d’éthylène et de polypropylène en pétrochimie, par exemple) tandis que la prise en compte des émissions de protoxyde d’azote de certaines activités de l’industrie chimique est proposée.

Afin de prévenir le risque de sur-allocation, la Commission européenne (12) envisage deux critères d’examen des plans. D’une part, ces plans doivent constituer des instruments crédibles pour atteindre les objectifs de Kyoto, souscrits par chaque État membre, et seront confrontés aux progrès accomplis au cours de la période précédente. D’autre part, l’enveloppe de quotas sera examinée, au regard des projections d’émissions de l’État membre, afin de garantir une demande soutenue sur le marché du carbone et éviter ainsi un nouvel effondrement des cours : un marché où la tonne de carbone s’échangerait à quelques euros perdrait, en effet, toute sa crédibilité.

Par ailleurs, les pistes suivantes d’amélioration du système d’échanges de permis d’émissions sont envisagées :

– L’assimilation des enveloppes trop généreuses de quotas, allouées gratuitement aux entreprises, à une aide d’État ;

– L’harmonisation du type d’installations couvertes, notamment dans le secteur chimique ;

– L’allongement de la période d’affectation des enveloppes de quotas à quinze années, par exemple, avec un système de révision tous les cinq ans, ce qui offrirait une meilleure visibilité aux entreprises ;

– L’exclusion du système, des petites installations, qui ne représentent que 5 à 6% des émissions ;

– La vente de quotas au lieu de leur distribution à titre gratuit. A l’heure actuelle, sur les quinze plans soumis à la Commission européenne, sept proposent la vente d’environ 10% de leurs quotas aux grandes entreprises énergétiques. La somme perçue peut être recyclée dans un fonds pour le développement des énergies renouvelables, par exemple.

Une piste intéressante serait de relier le marché européen à d’autres marchés de permis d’émissions, tels que les marchés suisse, canadien, japonais ou norvégien, déjà en place ou en construction. Jusqu’à présent, de telles coopérations n’étaient envisagées qu’entre les marchés des États qui ont ratifié le protocole de Kyoto. Toutefois, cette condition pourrait être levée afin de bénéficier d’un effet de levier important sur les échanges de permis. A cet égard, il est intéressant de relever qu’en août dernier, un accord de coopération a été signé entre Tony Blair et Arnold Schwartzenegger, qui prévoit la possibilité de développer des liens entre les mécanismes de marché britannique et californien afin d’accélérer la transition vers une économie limitant les émissions de carbone. La promotion de projets de coopération transatlantiques pourrait venir utilement renforcer le dispositif.

Enfin, le Gouvernement britannique a récemment proposé d’étendre le système d’échanges de quotas d’émissions au secteur aérien d’ici 2008, au lieu de 2010, comme initialement envisagé par la Commission européenne.

c. Une meilleure répartition géographique des projets « Kyoto »

Le recensement des premiers projets MPD impliquant des entreprises françaises (voir ci-dessus) met en évidence une forte concentration de ces initiatives au Brésil (20%), en Inde (18%) et en Chine (11%). A l’opposé, le continent africain (13) n’accueille que 11% des projets.

Cette inégale répartition des projets MDP se retrouve au niveau mondial. D’après une évaluation récente du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) (14), l’Asie et l’Amérique latine représentent 95 % des projets avec une forte concentration en Inde et au Brésil (15), tandis seuls quatre des quarante pays les moins avancés qui ont ratifié le Protocole, bénéficient de projets confirmés dans le cadre du MDP (Bangladesh, Bhoutan, Cambodge et Népal).

Certes, la problématique de la lutte contre le réchauffement climatique se décline différemment selon la contribution des régions du monde aux émissions de gaz à effet de serre. L’enjeu est clairement de réduire ces émissions pour les pays gros émetteurs de CO2 alors que pour les pays faiblement émetteurs, sur le continent africain notamment, il s’agit davantage de mettre en œuvre des mesures d’adaptation aux risques environnementaux, qui découlent des dérèglements du climat.

Toutefois, au-delà de son intérêt environnemental et économique pour les pays dits « de l’annexe I », ce mécanisme a, en principe, également pour finalité le développement économique et social des pays qui accueillent ces projets. Il est donc indispensable de favoriser une meilleure répartition géographique des projets grâce, notamment, aux trois Fonds pour le développement durable, créés en 2001, pour répondre aux besoins spécifiques des pays en développement.

B. Les interrogations sur « l’après Kyoto » au-delà de 2012

Le protocole de Kyoto met en place un cadre à la fois ambitieux, en ce qu’il fixe des objectifs quantifiés de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et limité dans la mesure où il ne porte que sur la période 2008-2012. A la défection américaine en 2001 et l’absence de participation des pays en développement aux objectifs contraignants s’ajoutent, aujourd’hui, les difficultés rencontrées par certains États signataires à respecter leurs engagements. Ces incertitudes constituent autant d’éléments d’interrogations sur l’avenir du régime multilatéral du climat, au-delà de 2012.

Toutefois, la conférence de Montréal, qui s’est tenue fin 2005, a amorcé une réflexion sur l’évolution du régime climat après 2012, avec la mise en place de deux processus parallèles : d’une part, un dialogue sur les modalités possibles de renforcement de l’action à long terme, dans le cadre de la Convention climat ; d’autre part, l’examen des engagements des pays développés pour la période post 2012, au titre du protocole de Kyoto. Les premières réunions sur ces sujets ont eu lieu à Bonn, en mai 2006, et se poursuivront, à Nairobi, en novembre prochain. La plus grande attention doit être portée au dialogue, engagé dans le cadre de la Convention climat, pour préparer au niveau politique les négociations ultérieures, en 2008 ou en 2009.

1) Les États signataires vont-ils respecter leurs engagements ?

A l’heure actuelle, un certain nombre d’incertitudes plane sur la position des pays dits « de l’annexe I », quant à leur possibilité de respecter leurs engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

A cet égard, la position du Canada constitue un réel sujet de préoccupation. Le pays ne serait, en effet, d’ores et déjà pas en mesure d’atteindre la cible fixée par Kyoto (réduction de 6% des émissions par rapport à 1990), ses émissions ayant progressé de 30% du fait, principalement, de l’exploitation des sables bitumeux, dans la province de l’Alberta. Certes, des initiatives fortes sont prises par certaines provinces, comme celle du Québec, qui a adopté un plan indépendant de lutte contre le réchauffement climatique prévoyant une réduction de 4,8% de ses émissions de GES (16). Mais, il n’est pas certain que le Gouvernement fédéral souhaite s’engager plus avant dans le processus de Kyoto en raison des objectifs contraignants qu’il impose.

Votre Rapporteur considère l’hypothèse d’un éventuel retrait canadien du dispositif comme extrêmement préoccupante pour la pérennité des efforts concertés de lutte contre le réchauffement climatique et appelle de ses vœux une mobilisation forte de la France pour convaincre les autorités canadiennes de l’importance du processus en cours.

Si le Japon ne semble pas remettre en cause le dispositif de Kyoto, il a néanmoins souscrit d’importants engagements de réduction des émissions de GES (17) (-6%) qui pourraient le conduire à demander des aménagements et militer en faveur d’un mécanisme plus flexible.

Quant à l’Union européenne, « leader » dans la lutte contre le changement climatique, elle est confrontée à une augmentation des émissions de ses États membres qui doivent, aujourd’hui, intensifier leurs efforts pour respecter la cible fixée par le protocole de Kyoto, soit une réduction de 8% des émissions par rapport à l’année de référence, 1990. En 2004, les émissions des quinze États membres de l’UE – à la date de la ratification du protocole – ont, en effet, progressé de 11,5 millions de tonnes par rapport à 2003, soit une hausse de 0,3% (18). Du fait de cet accroissement, la réduction des émissions de l’UE-15 par rapport à l’année de base a été ramenée de 1,2% en 2003 à 0,9% en 2004. Les émissions de l’UE-25, pour lesquelles le protocole de Kyoto n’a pas fixé d’objectif commun, ont progressé de 0,4% entre 2003 et 2004, en restant toutefois inférieures de 7,3% aux niveaux de 1990.

Le tableau ci-après retrace les évolutions différenciées des émissions des États membres entre 2003 et 2004 et les rapporte aux objectifs de réduction souscrits dans le cadre du protocole de Kyoto.

Ce tableau montre que les émissions ont augmenté dans dix des États membres de l’UE-15 et diminué dans les cinq autres : l’Espagne (+4,8%) et l’Italie (+0,9% contre un objectif de réduction de 6,5%) sont les deux pays à avoir enregistré les plus fortes hausses ; à l’inverse, l’Allemagne (-0,9%), le Danemark (-8,1%)(19) et la Finlande (-4,9%) ont réduit leurs émissions. Avec une progression de 0,3%, il n’est pas certain que la France parvienne à atteindre son objectif de stabilisation, sans un renforcement significatif de ses efforts, au plan domestique (dans les secteurs du bâtiment et des transports, notamment).

Émissions de gaz à effet de serre de l’UE-25 pour 2004 en équivalents CO2

et objectifs du protocole de Kyoto pour 2008-2012

État membre

Année de référence (1990)

2004

Évolution 2003-2004

Évolution 2003-2004

Évolution 1990-2004

Objectifs Kyoto

2008-2012

Partage UE

(millions tonnes)

(millions tonnes)

(millions tonnes)

(%)

(%)

(%)

Autriche

78,9

91,3

-1,2

-1,3 %

15,7 %

-13,0 %

Belgique

146,9

147,9

0,3

0,2 %

0,7 %

-7,5 %

Chypre (1)

6,0

8,9

-0,3

-3,0 %

48,2 %

-

République tchèque

196,3

147,1

-0,5

-0,3 %

-25,1 %

-8,0 %

Danemark

69,3

68,1

-6,0

-8,1 %

-1,8 %

-21,0 %

Estonie

42,6

21,3

0,1

0,7 %

-50,0 %

-8,0 %

Finlande

71,1

81,4

-4,2

-4,9 %

14,5 %

0,0 %

France

567,1

562,6

1,5

0,3 %

-0,8 %

0,0 %

Allemagne

1.230,0

1.015,3

-9,1

-0,9 %

-17,5 %

-21,0 %

Grèce

111,1

137,6

0,3

0,3 %

23,9 %

25,0 %

Hongrie

122,2

83,1

-0,2

-0,2 %

-32,0 %

-6,0 %

Irlande

55,8

68,5

0,1

0,1 %

22,7 %

13,0 %

Italie

518,9

582,5

5,1

0,9 %

12,3 %

-6,5 %

Lettonie

25,9

10,7

0,0

0,4 %

-58,5 %

-8,0 %

Lituanie

50,9

20,3

3,1

17,9 %

-60,1 %

-8,0 %

Luxembourg

12,7

12,7

1,3

11,3 %

0,3 %

-28,0 %

Malte (1)

2,2

3,2

0,1

4,2 %

45,9 %

-

Pays-Bas

214,3

217,8

2,5

1,1 %

1,6 %

-6,0 %

Pologne

565,3

386,4

3,7

1,0 %

-31,6 %

-6,0 %

Portugal

60,0

84,5

0,9

1,0 %

41,0 %

27,0 %

Slovaquie

73,2

51,0

-0,1

-0,1 %

-30,3 %

-8,0 %

Slovénie

20,2

20,1

0,4

-2,0 %

-0,8 %

-8,0 %

Espagne

289,4

427,9

19,7

4,8 %

47,9 %

15,0 %

Suède

72,5

69,9

-1,1

-1,5 %

-3,6 %

4,0 %

Royaume-Uni

767,9

659,3

1,3

0,2 %

-14,1 %

-12,5 %

EU-15

4.265,7

4.227,4

11,5

0,3 %

-0,9 %

-8,0 %

(1) Il n’y a pas d’objectifs de Kyoto pour Chypre ni pour Malte

Source : Agence européenne de l’environnement

Si ce risque ne semble pas devoir se concrétiser à l’horizon 2012, il invite, néanmoins, à s’interroger sur l’intérêt d’un fonds gouvernemental du carbone qui permettrait, notamment, de provisionner suffisamment en cas de dépassement des émissions, au cours de la seconde période d’engagements. La mise en place d’un tel fonds permettrait également d’aider les entreprises qui souhaitent monter un projet « MDP » et bénéficier des crédits d’émissions correspondants. De tels fonds existent chez la plupart de nos voisins européens ; en France, cette perspective a été évoquée mais ne s’est pas concrétisée à ce jour.

Au niveau européen, la Commission a appelé les États membres à redoubler d’efforts pour inverser les tendances en matière d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union. Elle a, par ailleurs, adopté une communication, le 9 février 2005, définissant les éléments essentiels d’une stratégie d’action après 2012, à savoir la nécessité d’une plus large participation des pays et des secteurs, le développement des technologies à faibles émissions de carbone, le maintien et le renforcement du recours aux instruments fondés sur le marché ainsi que la nécessité de s’adapter aux inévitables conséquences du changement climatique.

Votre Rapporteur estime que, si les difficultés à respecter les engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont réelles, elles ne doivent, cependant, pas conduire à remettre en cause un dispositif, unique, d’efforts communs pour lutter contre le réchauffement climatique. La pérennité de cette démarche constitue, en effet, la garantie qu’un développement durable pour tous devienne une réalité tangible.

2) Comment élargir le processus de Kyoto ?

En 2001, les États-Unis d’Amérique se sont retirés du protocole de Kyoto, en raison des coûts qui y sont associés (20) et de l’absence de participation des pays en développement à ses mécanismes contraignants. Or, les Etats-Unis sont, de loin, le principal émetteur de gaz à effet de serre dans le monde.

Privilégiant une approche technologique, fondée sur les avancées de la recherche dans ce domaine, les Etats-Unis ont lancé un « partenariat Asie Pacifique » regroupant l’Australie (21), la Chine, le Japon, la Corée et l’Inde, qui, à la différence du protocole de Kyoto, ne fixe aucun objectif contraignant de réduction des émissions de CO(22). Pour autant, les autorités américaines ne peuvent rester totalement indifférentes aux efforts engagés par les pays signataires du protocole : elles ont, ainsi, accepté de revenir à la table des discussions, lors de la conférence de Montréal qui s’est tenue en décembre 2005, dans le cadre non pas de Kyoto, mais de celui, moins contraignant, de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 1992.

Au-delà du niveau fédéral, il existe, en réalité, de nombreuses initiatives américaines de lutte contre le changement climatique, lancées par les États et les villes. Comme cela a été évoqué précédemment, la Californie – douzième émetteur mondial – a signé, fin août 2006, un accord avec le Royaume-Uni pour développer des liens entre les mécanismes de marché britanniques et californiens. Cet État a, par ailleurs, adopté, le 30 août 2006, le « Global warming solutions act » qui prévoit l’adoption, avant le 1er janvier 2008, de dispositions permettant de réduire de 25% ses émissions à l’horizon 2020, afin de retrouver leur niveau de 1990. Les États du Nord Est sont également actifs dans ce domaine comme en témoigne le « Regional greenhouse gas initiative » (23) aux termes duquel les États du Connecticut, de Delaware, du Maine, de New Hampshire, de New Jersey, de New York et du Vermont se sont engagés à réduire de 10% leurs émissions d’ici 2019. Enfin, l’initiative lancée par le maire de Seattle, Gregory Nickels, a été signée, à la date du 26 septembre 2006, par 307 maires représentant 50 millions d’Américains. Son objectif est l’adoption, au niveau local, des « mêmes engagements » que les signataires du protocole de Kyoto.

De telles initiatives témoignent d’une réelle prise de conscience de la nécessité de réduire les émissions de CO2 pour atténuer les effets du changement climatique. Si, pour l’heure, ces initiatives ne sont pas relayées au niveau fédéral, elles laissent néanmoins augurer une évolution de la position des autorités américaines dont il faut espérer qu’elle se concrétisera par des efforts partagés de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Le protocole de Kyoto repose sur le principe d’une responsabilité commune mais différenciée. Conformément à ce principe, les pays en développement (PED) sont restés en dehors du mécanisme d’encadrement par quotas d’émissions de CO2, en raison des responsabilités historiques des pays industrialisés en la matière et afin de ne pas compromettre leur développement économique.

Des projections indiquent, cependant, que les pays émergents devraient représenter 55% des émissions totales en 2025 et 70% des augmentations d’émissions d’ici là. Les efforts de lutte contre le changement climatique, au niveau mondial, ne peuvent donc être pleinement efficaces sans une implication plus forte des pays en développement, notamment des pays émergents dans ce processus.

Pour leur part, les pays émergents expriment une attente forte en matière de transferts de technologies, plus économes en énergie, mais ils considèrent que les mécanismes existants (MDP et MOC) sont encore insuffisamment développés pour permettre des projets de développement plus sobres en carbone.

Ces positions militent en faveur d’un approfondissement de la question du transfert de technologies et de la coopération étatique en direction des pays en développement, notamment, des grands pays émergents. Elles invitent également à imaginer des modalités de participation de ces pays aux efforts de réduction des émissions de CO2, adaptées à leur situation. A cet égard, plusieurs pistes sont actuellement à l’étude comme la fixation d’objectifs d’efficacité énergétique, la conclusion d’accords sectoriels (dans le domaine de la sidérurgie, par exemple) ou la déforestation.

Dans l’attente d’un accord, l’accent est mis, en particulier en France, sur la mise en œuvre de projets bilatéraux qui s’attachent, en plus des changements techniques, à modifier le cadre législatif ou règlementaire en vue de le rendre plus incitatif et favorable à l’utilisation de technologies moins émettrices de CO2.

II - LA PROMOTION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE : UN EFFET DE LEVIER PUISSANT POUR LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

La convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et le protocole de Kyoto ont établi le lien entre environnement et développement. Sur un plan global, l’épuisement des ressources naturelles et la dégradation de l’environnement ont une incidence directe sur le développement économique des pays les plus pauvres qui, bien souvent, vient contrecarrer les efforts de réduction de la pauvreté. Ces interdépendances militent en faveur d’une intégration croissante de la dimension environnementale et des préoccupations de développement durable dans les actions de coopération internationale multilatérales, comme bilatérales.

A. Une intégration croissante du développement durable dans les actions multilatérales de coopération

Le développement durable occupe une place croissante dans les actions de coopération internationale, menées au plan multilatéral. Les organisations internationales intègrent d’ailleurs, de plus en plus fréquemment, cette dimension dans la définition de leurs programmes d’intervention.

En matière de lutte contre le réchauffement climatique, les initiatives se multiplient. Au-delà des acteurs traditionnels que sont le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) ou le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), d’autres institutions s’approprient cette problématique pour orienter leurs actions. A titre d’exemple, la Banque mondiale a mis en place le Fonds prototype carbone (FPC), qui réunit capitaux publics et privés, pour les investir dans des projets « propres » dans les pays en développement et les pays en transition. Quant au Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD), il met en œuvre des actions en faveur de l’environnement et du développement des énergies renouvelables dans le but de réduire la consommation d’énergies fossiles.

Ces exemples témoignent d’une intégration croissante du développement durable dans l’aide multilatérale, dont les moyens sont renforcés, notamment, pour la préservation de la biodiversité et la lutte contre les changements climatiques.

1) Une plus grande mobilisation des instruments de l’aide multilatérale en faveur du développement durable

Depuis le « Sommet de Rio » en 1992, différents Fonds ont été institués pour financer des aspects spécifiques du développement durable. On ne peut naturellement que se féliciter de ces initiatives. Toutefois, elles contribuent à une multiplication des sources de financement, souvent source de confusion, qui pourrait, à terme, nuire à la lisibilité de l’ensemble du dispositif.

a. Le Fonds pour l’environnement mondial (FEM)

Le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), créé en 1991, est une organisation financière internationale qui compte 176 pays membres. Depuis sa création, le FEM a accordé des financements d’un montant de 5 milliards de dollars et mobilisé plus de 16 milliards de dollars de cofinancement – en partenariat avec des agences comme le PNUD(24), le PNUE(25) ou la Banque mondiale – pour la mise en œuvre d’environ 1.500 projets dans plus de 140 pays. Le FEM est, par ailleurs, le mécanisme financier officiel des conventions internationales sur la diversité biologique, les changements climatiques, les polluants organiques persistants et la désertification.

De 1991, date de sa création, à 2005, ce Fonds a été doté de 6.617,7 millions de dollars, abondés d’un montant de 3,13 milliards de dollars pour la période 2006-2010 (FEM-4).

Le tableau ci-après retrace l’évolution des dotations associées :

Phase pilote (1991-1994)

1,06 milliard de dollars, dont :

- 841 millions de dollars de contributions de base ;

- 223 millions de dollars de cofinancement parallèle.

FEM-1 (1994-1998)

2,02 milliards de dollars

FEM-2 (1998-2002)

2,75 milliards de dollars, dont :

- 1,99 milliard de nouvelles ressources ;

- 0,69 milliard de reports du FEM-1 ;

- 0,07 milliard de besoin de financement (funding gap).

FEM-3 (2002-2006)

2,92 milliards de dollars, dont :

- 2,22 milliards de nouvelles ressources ;

- 0,57 milliard de reports du FEM-2 ;

- 0,13 milliard de revenus d’investissement.

FEM-4 (2006-2010)

3,13 milliards de dollars, dont :

- 2,28 milliards de nouvelles ressources ;

- 0,48 milliard de reports du FEM-3 ;

- 0,37 milliard de revenus d’investissement.

Source : Ministère de l’écologie et du développement durable

Au-delà de ces ressources, le niveau de cofinancement des projets soutenus par le FEM atteint le ratio de 3 pour 1, sur la période 1991-2003. Autrement dit, un effet de levier non négligeable. Ainsi, dans le domaine de la biodiversité, le Fond a accordé une somme globale de 1,89 milliard de dollars et mobilisé, dans le même temps, 3,8 milliards de dollars supplémentaires en cofinancements, émanant des agences nationales de coopération, des pays bénéficiaires, des organisations internationales de développement, du secteur privé, etc. L’effet de levier a été encore plus important pour les projets portant sur le changement climatique puisque le FEM a accordé 1,74 milliard de dollars de financement et mobilisé 9,29 milliards de cofinancements(26).

En termes de répartition géographique des projets soutenus par le FEM, un quart des fonds a été affecté en Asie, 23% en Afrique et 20% en Amérique.

Pour la période 2006-2010, le tableau ci-après présente la répartition programmée des sommes allouées aux différents domaines d’intervention du Fonds :

Montant programmé des ressources allouées aux domaines d’intervention, aux programmes institutionnels et au budget de fonctionnement pour FEM-4

(révisé que la base du montant approuvé pour FEM-4)

Domaines d’intervention et programmes institutionnels du FEM

Allocation programmée

(en million de dollars)

Part des ressources à programmer

(en %)

Diversité biologique

1.000

33 %

Changements climatiques

1.000

33 %

Eaux internationales

355

12 %

Dégradation des sols

300

10 %

Appauvrissement de la couche d’ozone

40

1 %

Polluants organiques persistants

300

10 %

Programmes institutionnels

15

1 %

Sous total : ressources programmées

3.010

100 %

Budget de fonctionnement

120

 

TOTAL

3.130

 

Source : Fonds pour l’environnement mondial

(Document relatif au dispositif d’allocation des ressources du FEM, 15 septembre 2006)

Cette répartition montre que les actions de préservation de la biodiversité et de lutte contre le réchauffement climatique constitueront près des deux tiers des projets que le FEM entend soutenir, au cours des cinq prochaines années.

L’année 2006 voit la mise en place d’un dispositif d’allocation des ressources (DAR) qui permet au FEM d’allouer les moyens disponibles, non plus « au fil de l’eau », mais en fonction des priorités environnementales, au niveau mondial, ainsi que des résultats au niveau des pays. En application du DAR, les ressources affectées à la diversité biologique et aux changements climatiques (un milliard de dollars respectivement) sont attribuées, individuellement, à un certain nombre de pays, puis, collectivement aux pays restants. Les pays faisant partie d’un groupe n’ont pas accès à des allocations individuelles mais peuvent soumettre des projets à financer sur l’enveloppe collective. Dans le domaine d’intervention « diversité biologique », le groupe se compose de 93 pays et l’enveloppe collective est de 146,8 millions de dollars. Il est de 115 pays, pour une enveloppe de 148,6 millions de dollars, dans le domaine d’intervention « changements climatiques ».

b. Les autres instruments internationaux

Afin de répondre aux demandes de financements spécifiques émanant des pays en développement, trois nouveaux Fonds contribuant au développement durable ont été créés, en 2001, lors de la 7ème Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques:

− le Fonds spécial sur le changement climatique (crée dans le cadre de la convention) : ce fonds doit être complémentaire du volet « changement climatique » du FEM dans les domaines de l'adaptation, des transferts de technologies, de l'énergie, des transports, de l'industrie, de l'agriculture, de la foresterie, de la gestion des déchets et des activités permettant d'assister, dans la diversification de leurs économies, les pays en développement particulièrement vulnérables aux mesures de riposte, prévues à l'article 4.8 h de la Convention, et susceptibles d’être prises principalement par les pays en développement exportateurs de pétrole et de charbon. A ce stade, la France n’a pas contribué à ce nouveau fonds, géré par le FEM ;

− le Fonds pour les pays les moins avancés (créé dans le cadre de la convention) : ce fonds doit soutenir le programme de travail des pays les moins avancés, notamment leurs programmes d'actions nationaux d'adaptation (PANA) ;

− le Fonds pour l’adaptation du Protocole de Kyoto : non opérationnel à ce jour, ce fonds doit permettre de financer des programmes et des projets concrets d'adaptation, pour les pays en développement qui deviendront Parties au Protocole. Jusqu’à présent, le FEM ne finance, en effet, que des études de vulnérabilité et les plans d'adaptation des pays Parties à la Convention. Ce fonds doit être complémentaire au fonds spécial qui, dans le cadre de la Convention, peut aussi financer l’adaptation. Il sera abondé par des prélèvements à hauteur de 2% de la valeur des crédits carbone générés par les projets, faisant appel au mécanisme de développement propre, ainsi que par d'autres financements, notamment des contributions volontaires des pays industrialisés. A ce titre, les pays de l'annexe I du protocole de Kyoto – pays industrialisés – qui ont l'intention de ratifier le protocole, sont invités à fournir des ressources financières pour alimenter ce fonds. Il n’est pas exclu que ces contributions prennent la forme de parts de quantités attribuées ou d’autres crédits d’émissions. Actuellement, le choix du gestionnaire du fonds fait l’objet de discussions au niveau international, les pays en développement ne souhaitant pas que le FEM soit désigné.

2) La contribution de la France à l’aide multilatérale

Au plan multilatéral, la France est un bailleur de fonds important qui se situe au 5ème rang parmi les plus grands donateurs du Fonds pour l’environnement mondial (FEM) et qui contribue, pour 25 %, au budget du Fonds européen de développement (FED).

Historique de la contribution française au FEM

 

Montant

(en million d’euros)

Phase pilote (1991–1994)

122,00

FEM-1 (1994–1998)

123,00

FEM-2 (1999–2002)

131,50

FEM-3 (2002–2006)

164,03

FEM-4 (2006–2010)

129,00

Total

669,53

Source : ministère de l’Ecologie et du développement durable

Les négociations de reconstitution du FEM, pour la période 2006-2010, se sont achevées lors du Conseil du Fonds à Washington, le 5 juin 2006. La contribution française au FEM-4 est fixée à 129 millions d’euros au total, soit une diminution de 35 millions d’euros de notre effort, en monnaie nationale, par rapport à l’enveloppe allouée au FEM-3. Toutefois, l’appréciation de l’euro face au dollar, qui constitue la monnaie principale du panier de référence du DTS(27), conduit, en réalité, à une stabilité de la contribution française, en valeur relative, sur le terrain.

Dans le cadre du FEM-4, la contribution française augmente, en valeur relative et passe de 6,8% à 8,3% des nouvelles contributions au FEM-4. Cette progression s’explique par le fait que les Etats-Unis ont baissé leur contribution et que le Royaume-Uni a augmenté la sienne. Au total, la France reste au 5ème rang parmi les plus grands contributeurs au FEM.

La contribution française à la reconstitution du FEM-4 est inscrite au programme d’aide économique et financière au développement du Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie et sera versée, sur plusieurs années, à partir de fin 2006 (programme 110 de la LOLF).

Votre Rapporteur rappelle que, dans la plupart des cas, les contributions aux différents fonds internationaux pour l’environnement ne sont pas versées par le Ministère de l’écologie et du développement durable. Selon les cas, c’est le Ministère des affaires étrangères ou le Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie qui sont à l’origine des versements. A titre d’exemple, la contribution volontaire non affectée versée, chaque année, au Fonds pour l’environnement du Programme des Nations Unies pour l’environnement, provient du budget du Ministère des affaires étrangères. Quant au Fonds pour l’environnement mondial (FEM), qui constitue l’instrument pour financer des projets de mise en œuvre des conventions issues de Rio, ainsi que de la Convention sur les polluants organiques persistants, c’est le Ministère de l’économie et des finances qui finance la participation française.

− En ce qui concerne les Fonds mis en œuvre au titre de la Convention climat et du protocole de Kyoto, la France soutient le Fonds pour les pays les moins avancés, géré par le FEM. En 2003, elle a contribué, à hauteur de 850.000 dollars à ce fonds et prévoit, pour 2007, de verser une contribution de l’ordre de 10 millions de dollars.

− La France contribue également au Fonds pour l’environnement qui finance le programme d’actions du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) et est abondé par des contributions volontaires, non affectées, versées par les Etats.

De 1990 à 1994, la contribution de la France à ce Fonds s’est maintenue à environ 2 millions d’euros mais a chuté, en 1996, à 240.000 euros. Depuis le lancement de l’initiative française sur la gouvernance internationale de l’environnement, qui vise à transformer le PNUE en ONUE, la contribution volontaire française au Fonds pour l’environnement a été substantiellement réévaluée. Elle est ainsi passée de 910.000 euros, en 1999, à 1 million d’euros, en 2001, et à 2 millions d’euros, en 2002, grâce à une contribution exceptionnelle du Ministère de l’écologie et du développement durable (MEDD) d’un million d’euros. En 2003, cette contribution a atteint, en application du barème adopté à Carthagène, 3,1 millions, imputés, pour partie, sur le budget du MEDD et, pour partie, sur le budget du Ministère des affaires étrangères. Cette contribution, qui s’est stabilisée au niveau de 3 millions d’euros en 2004 et 2005, a été intégralement versée par le Ministère des affaires étrangères. En 2006, le Ministère a versé une contribution de 3,4 millions d’euros.

L’évolution de la contribution de la France au Fonds pour l’environnement du PNUE est retracée dans le tableau ci-après :

Evolution de la contribution française

au Fonds pour l’environnement du PNUE

Année

Montant

(en millions d’euros)

1993

2,15

1994

2,15

1995

0,61

1996

0,24

1997

0,61

1998

0,76

1999

0,91

2000

1,14

2001

1,00

2002

2,00

2003

3,10

2004

3,10

2005

3,04

2006

3,47

Source : Ministère de l’écologie et du développement durable

A cette contribution est venue d’ajouter la mise à disposition, à Nairobi, d’un expert associé pour renforcer le programme sur le droit de l’environnement en 2002.

Enfin, le Ministère de l’écologie et du développement durable soutient également des programmes menés par la Division technologie, industrie et économie (DTIE), du PNUE, basée à Paris. En 2006, le Ministère soutient ainsi un programme portant sur le tourisme durable. Le montant de sa contribution s’élève à 300.000 euros, comme en 2005 (en 2002, année du Sommet mondial du développement durable, elle avait atteint 385.000 euros).

− Enfin, il convient de mentionner les facilités accordées pour l’énergie, par l’Union européenne, à destination des pays de l’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), qui pourront, à l’avenir, comptabiliser de nouveaux engagements en faveur de la lutte contre le changement climatique. La dotation allouée à ces facilités est abondée par la tranche additionnelle du IXème Fonds européen de développement (FED), elle-même alimentée, pour 24,6%, par la France.

B. Une politique bilatérale volontariste au service d’un développement durable

Les principes du développement durable occupent également une place de plus en plus importante, dans les actions de coopération menées par la France, au plan bilatéral.

A la suite de la 6ème conférence des parties à la Convention climat qui s’est tenue à Bonn, en juillet 2001, l’engagement de la France s’est accru dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique. Au cours de cette conférence, les Etats membres de l’Union européenne et cinq autres pays (Canada, Islande, Norvège, Nouvelle-Zélande et Suisse) se sont, en effet, engagés à augmenter leurs financements de 410 millions de dollars par an, à partir de 2005. Une répartition de ces engagements conduit la France à assurer 9,95% de l’objectif global, soit un accroissement de ses financements de 40,8 millions de dollars par an, à partir de 2005.

Pour respecter cet objectif, la France s’appuie, au plan multilatéral, sur le FEM et, au plan bilatéral, sur le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) ainsi que sur les actions menées par l’Agence française du développement (AFD) et les instruments d’appui du Ministère des affaires étrangères (DGCID) et du Ministère de l’économie et des finances et de l’industrie (DGTPE).

1) Le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM)

Le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) est un fonds public bilatéral qui a été créé, en 1994, par le Gouvernement français, à la suite du Sommet de Rio. Il a pour objectif de favoriser la protection de l'environnement mondial en mettant en place des projets de développement durable, dans les pays en développement et en transition. Ces projets portent sur les domaines suivants: la biodiversité, les changements climatiques, les eaux internationales, la désertification et la dégradation des terres, les polluants organiques persistants (POP), la couche d'ozone (protocole de Montréal).

Le FFEM a également pour mission de gérer la Facilité d’appui aux activités exécutées conjointement (FAAEC), dans la perspective de la mise en œuvre des mécanismes de Kyoto (mise en œuvre conjointe – MOC – et mécanisme de développement propre – MDP –). Fin 2005, la France a décidé de soutenir le Comité exécutif du MDP avec une contribution de 200.000 euros, dont 100.000 euros imputés sur le budget du FFEM/FAAEC.

Pour la période 2003-2006, les ressources du Fonds ont été abondées par une dotation de 67 millions d’euros. La subvention moyenne du FFEM par projet est de 1,1 million d’euros et représente, en moyenne, 18% du coût total des projets.

En 2005, le Fonds a approuvé l’engagement de 18 projets, dont une majorité en Afrique (61%), pour un montant de 21,28 millions d’euros. Huit projets ont été approuvés dans le domaine de la biodiversité, pour un engagement représentant 9,4 millions d’euros, et trois projets dans le domaine de l’effet de serre, pour un montant de 5,25 millions d’euros. Quatre projets « mixtes », recouvrant ces deux domaines, ont également été validés pour un montant de 4,03 millions d’euros.

Les projets du portefeuille « biodiversité » porte, pour 70%, sur l’exploitation durable des ressources naturelles en dehors des parcs, sur le développement socio-économique des communautés locales et sur le mode de gouvernance d’espaces, hors parcs nationaux. 30% des projets soutiennent la gestion de parcs nationaux. Cette proportion, inverse de celle du Fonds pour l’environnement mondial (FEM), traduit le choix de traiter systématiquement les aspects économiques et sociaux de la protection de la biodiversité.

Dans le domaine du changement climatique, les secteurs d’intervention du FFEM portent sur les énergies renouvelables, l’utilisation rationnelle de l’énergie, l’utilisation de la biomasse, la préservation des réservoirs naturels de carbone, la capture et la séquestration des gaz à effet de serre ainsi que le développement des fonds d’investissements spécialisés et des mécanismes de flexibilité prévus par le protocole de Kyoto.

Au total, de 1994 – date de sa création – à 2005, le FFEM a commencé ou achevé l’instruction de 146 projets, soit une capacité potentielle d’engagements de 161,83 millions d’euros. Parmi ces projets, 139 ont été évalués et engagés pour un montant de 146,15 millions d’euros.

Le tableau ci-après retrace la répartition de ces projets par domaine d’intervention depuis 1994 :

Répartition des projets soutenus par le FFEM par domaine d’intervention

Domaine

Nombre de projets

Montant

(en million d’euros)

%

Objectifs du cadre de programmation stratégique 2005-2006 (en %)

Biodiversité

68

63,06

39 %

36 %

Effet de serre

33

43,68

27 %

35 %

Eaux internationales

20

23,16

14 %

20 %

Mixte

(biodiversité/effet de serre)

22

28,13

17 %

5 %

Nouvelle fenêtre

3

3,80

2 %

4 %

Total

146

161,83

100 %

100 %

Source : FFEM, rapport annuel 2005

2) Le rôle de l’Agence française de développement (AFD)

L’Agence française de développement (AFD) intègre désormais les défis environnementaux dans sa stratégie d’intervention, en se concentrant plus particulièrement sur deux volets : la lutte contre les changements climatiques et la préservation de la biodiversité.

En décembre 2005, l’agence a adopté un cadre d’intervention stratégique « climat », pour la période 2006-2008, qui vise à renforcer l’impact de ses activités sur le changement climatique. Dans les pays émergents et les pays à revenus intermédiaires, l’AFD cherche à encourager l’adoption de schémas propres de développement économique. Ainsi, en 2005, plusieurs projets d’efficacité énergétique et d’énergies renouvelables et/ou moins émissives en carbone ont été soutenus, en Chine, en Thaïlande, en Algérie (transports et stockage), et au Maroc (développement urbain), par exemple.

L’agence contribue également au renforcement des capacités d’adaptation dans les zones les plus vulnérables aux impacts environnementaux résultant du changement climatique. L’objectif est d’aider les pays concernés à prendre davantage en compte le besoin d’adaptation aux changements climatiques dans l’élaboration de leurs politiques, afin de réduire leur vulnérabilité.

Au total, un montant de 328,4 millions d’euros a été consacré à ces interventions en 2005. Au 1er octobre 2006, le montant de ce type d’interventions est estimé à près de 200 millions d’euros.

Dans le domaine de la biodiversité, l’AFD intervient, depuis plusieurs années, pour la préservation et la valorisation économique des ressources renouvelables de la forêt du bassin du Congo. En partenariat avec le FEM et d’autres organisations internationales, l’agence finance, notamment, les schémas de gestion durable des espaces forestiers des entreprises bénéficiaires de concessions de longue durée.

En complément de ses propres financements, l’AFD peut également mobiliser les ressources du FFEM, dans ses secteurs et zones d’intervention. En 2005, huit projets, représentant un montant de 9,4 millions d’euros, ont été engagés par le FFEM, au titre de la biodiversité, dont trois ont été présentés par l’AFD (Fondation pour les aires protégées et la biodiversité à Madagascar, appui aux réserves naturelles au Liban, conservation de l’écosystème des Cardamomes au Cambodge).

3) Les autres instruments d’appui bilatéraux

Dans le domaine climatique, la coopération bilatérale française s’appuie également sur les leviers d’actions dont disposent le Ministère des affaires étrangères ainsi que le Ministère des finances.

Cette Direction du Ministère des affaires étrangères intervient, notamment, en faveur des pays les moins avancés (PMA) en soutenant la préparation et la mise en œuvre des Plans d’action nationaux pour l’adaptation (PANA) ainsi que l’intégration de l’adaptation au changement climatique dans les politiques sectorielles.

Elle participe également, conjointement avec le Fonds français pour l’environnement mondial et l’AFD, à des projets dans les forêts et les sols dont la mise en œuvre est prévue dans différentes régions d’Afrique. Par ailleurs, l’accent est mis sur le renforcement des capacités en matière de négociations sur les changements climatiques. Dans ce domaine, la DGCID apporte son appui au processus de concertation régionale et sous-régionale en Afrique et participera à l’initiative européenne de renforcement des capacités (28). Enfin, la coopération en matière de recherche est également développée avec des projets collectifs comme le projet FSP RIPIESCA (Recherche interdisciplinaire et participative sur les interactions entre les écosystèmes, le climat et les sociétés d’Afrique de l’Ouest).

Le FASEP-Etudes, qui s’inscrit dans l’aide publique française aux pays émergents et aux pays en transition, a vocation à financer des études en amont de projets, des prestations d’assistance technique ou des actions de coopération institutionnelle à finalité économique ou financière.

Les études financées par le FASEP de projets ayant un impact positif dans la lutte contre le changement climatique se sont montées, en moyenne, à près de 4 millions d’euros par an, entre 2001 et 2005 (29). Ces études ont porté sur des projets dans des secteurs tels que la valorisation de la biomasse pour la production d’énergie, l’amélioration de l’efficacité énergétique urbaine ou industrielle, la séquestration de carbone par le développement de plantations forestières, etc.

La Réserve pays émergents (RPE) est un crédit d’aide destinée à des projets participant au développement économique des pays emprunteurs. Le montant des projets participant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui ont bénéficié de financements RPE, s’est élevé, en moyenne, à près de 72 millions d’euros par an, entre 2001 et 2005 (30). Ces projets relèvent de trois secteurs principaux : l’amélioration de la gestion des déchets urbains et leur valorisation pour la production d’énergie, le développement d’infrastructure de production d’énergie photovoltaïque et le développement de nouveaux systèmes.

4) Un savoir-faire à valoriser davantage pour renforcer la coopération française en matière environnementale

Les secteurs de l’énergie, de la forêt, des transports, de l’industrie, des bâtiments et des déchets représentent l’essentiel des émissions de gaz à effet de serre de la planète. Dans ces secteurs, la France dispose d’une expérience institutionnelle et industrielle importante en matière d’économies d’énergie et d’actions favorables à la lutte contre le changement climatique. Cette expérience pourrait s’avérer utile pour aider les pays émergents à mettre en œuvre un développement plus sobre en carbone.

Toutefois, il n’existe pas, à ce jour, de recensement exhaustif des savoir-faire institutionnel, technique et industriel dont dispose la France, en matière environnementale. Une étude a donc été lancée afin d’identifier ce savoir-faire, le valoriser et le mobiliser dans le cadre d’actions de coopération en direction des pays émergents.

Cette étude permettra de présenter aux pays émergents l’offre française en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Elle servira à tous les opérateurs cherchant à s’informer sur l’expérience française et à identifier des partenaires en France. L’objectif est, à terme, de renforcer la coopération institutionnelle et industrielle française avec les pays émergents, dans des secteurs ayant un impact important sur le changement climatique.

Les résultats de cette étude devraient être disponibles d’ici le début de l’année prochaine.

Votre Rapporteur se félicite vivement de cette initiative qui démontre l’effet de levier important de la promotion du développement durable dans les actions de coopération internationale.

III - LA GOUVERNANCE EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT
DURABLE RESTE INSUFFISANTE AU REGARD DES ENJEUX

Le développement durable et la préservation de l’environnement font aujourd’hui l’objet d’un nombre croissant d’accords internationaux dont il faut maintenant s’assurer qu’ils vont être effectivement appliqués par leurs signataires.

Coordonner les accords régionaux et thématiques, développer les savoir-faire au bénéfice de l’ensemble de la communauté internationale et regrouper les structures chargées de la mise en œuvre des accords existants ; telles sont les actions prioritaires à mener pour mettre en place au niveau mondial un ensemble de règles efficaces pour protéger l’environnement.

A. Un manque de cohérence au niveau mondial

La multiplication des conventions et des accords internationaux sur l’environnement, facteur de complexité croissante, conduit à une dispersion des efforts, susceptible de nuire à l’efficacité des mécanismes mis en place.

Afin de renforcer l’expertise scientifique au bénéfice de tous, la France soutient les consultations en cours pour la mise en place d’un « mécanisme international d’expertise scientifique sur la biodiversité » (IMoSEB(31)), sur le modèle de l’expertise apportée, dans le domaine climatique, par le GIEC(32).

A une échelle plus globale, notre pays cherche à améliorer l’architecture de la gouvernance internationale en soutenant le projet de création d’une Organisation des Nations Unies pour l’Environnement (ONUE).

1) Une multiplication des initiatives et des acteurs

On estime qu’il existe plus de 500 traités et autres accords internationaux relatifs à l’environnement, dont 323 ont un caractère régional. L’inventaire des accords multilatéraux dans le domaine de la protection de l’environnement prouve que ce thème constitue désormais une préoccupation prioritaire tant au niveau mondial qu’au niveau communautaire. La France joue un rôle actif dans ce domaine, tant par le nombre élevé des accords auxquels elle est partie – même si certaines procédures d’adhésion restent à mener à bien –, que par les efforts qu’elle accomplit sur les plans bilatéral et multilatéral pour encourager leur mise en œuvre par ses partenaires du Sud.

Ce très grand nombre d'accords conduit à une regrettable dispersion des moyens, sans compter que la portée réelle de certains accords est faible. A titre d’exemple, il existe une structure internationale de gestion pour chacun des biens publics mondiaux (BPM), excepté pour la gestion des ressources naturelles qui relève du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE).

Cette dernière institution joue, en principe, un rôle central en matière d’environnement mondial ; toutefois, malgré les réformes engagées, le fonctionnement du PNUE pâtit de la faiblesse de ses ressources humaines et financières.

Le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) a été créé par la résolution 2.997 (XXVII) de l'Assemblée générale du 15 décembre 1972. Ses missions principales sont de promouvoir la coopération internationale dans le domaine de l'environnement et recommander, le cas échéant, des politiques orientées dans ce sens ; d’étudier la situation de l'environnement dans le monde afin de s’assurer que les problèmes de portée internationale dans ce domaine font l'objet, de la part des gouvernements, d'un examen approprié et, enfin, de gérer l’utilisation des ressources du Fonds pour l'environnement qui finance le programme d'actions du PNUE.

Dans le cadre de ce mandat, le PNUE intervient dans des domaines aussi divers que l'information, la surveillance et l'évaluation de l'environnement, la coordination de la mise en œuvre des conventions, la mise au point des instruments d'intervention écologique et la mobilisation du secteur privé et d’autres partenaires. Il conduit également des programmes régionaux et sectoriels, tels que le Programme des mers régionales, notamment le Plan d'action pour la Méditerranée, l’Initiative internationale sur les récifs coralliens ou le Plan d'évaluation mondiale du mercure et de ses dérivés.

En outre, un certain nombre de conventions environnementales sont rattachées administrativement au PNUE, bien que leurs secrétariats soient localisés hors de Nairobi (où est situé le siège de l’institution), notamment : la convention sur le commerce des espèces en danger (CITES), à Genève ; la convention sur la conservation des espèces migratoires, à Bonn ; la convention de Bâle sur les transports de déchets dangereux, à Genève, et la convention sur la diversité biologique, à Montréal.

Enfin, le PNUE est l'une des trois agences exécutives du Fonds pour l’environnement mondial (les deux autres agences exécutives sont la Banque mondiale et le PNUD(33)).

Pour l’heure, le programme de travail 2008-2009 de l’institution met l’accent sur le plan stratégique de Bali, adopté en février 2005, qui vise à renforcer les objectifs et les activités du PNUE au niveau local et régional et à aider, de manière concrète, les pays du sud dans l’acquisition de savoirs technologiques.

Depuis la fin des années 1990, la communauté internationale essaie d’améliorer la gouvernance internationale de l’environnement (GIE) en s’appuyant sur le PNUE :

− en 1999, le PNUE a été chargé d’assurer le secrétariat du Groupe de gestion de l’environnement, qui a pour mission de coordonner l’action des agences et organismes bailleurs de fonds dans le domaine environnemental ;

− en 2001, la création du Forum Mondial des Ministres de l’Environnement, qui permet de nouer un dialogue ne se limitant plus aux 58 membres du Conseil d’administration, visait à donner au PNUE une légitimité plus grande ;

− en 2002, le Conseil d’administration a arrêté un ensemble de mesures, dit « paquet de Carthagène » ayant, notamment, pour objectif de renforcer la base scientifique du PNUE, de le doter de ressources budgétaires plus stables, de lui donner un rôle accru dans l’assistance aux pays en développement.

Toutes ces mesures, qui ont été diversement appliquées, apparaissent insuffisantes par rapport aux besoins. Malgré les efforts engagés, l’actuel PNUE ne remplit pas toutes les fonctions que l’on pourrait en attendre dans la mesure où les contributions des Etats sont facultatives et où il ne rassemble qu’un nombre limité d’Etats.

De ce constat est né le projet de transformer le PNUE en Organisation des Nations Unies pour l'environnement (ONUE), afin de disposer d’une meilleure compétence scientifique et d’une capacité d'alerte et d'information sur les problèmes d'environnement.

2) Le projet de création d’une Organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE)

La multiplication des accords internationaux et des enceintes de négociations font courir le risque de double emploi et s’avèrent source de confusion. Dans ce contexte, une organisation mondiale de l'environnement permettrait de renforcer et de rationaliser les efforts en matière de gouvernance internationale de l’environnement. L'actuel PNUE pourrait servir de point de départ et être progressivement transformé en une véritable organisation spécialisée des Nations Unies.

La proposition de créer une ONUE est défendue par la France et l'Allemagne, mais suscite de sérieuses réticences chez certains partenaires. Les Etats-Unis s'interrogent notamment sur la valeur ajoutée de cette nouvelle structure. Ils s’inquiètent également d’une possible concurrence entre la future ONUE et l’OMC, préférant que certaines questions environnementales, notamment celles liées aux échanges, soient traitées directement au sein de l'OMC. Enfin, les autorités américaines sont réticentes à l’idée que cette organisation puisse imposer des contraintes, susceptibles de peser sur leur développement technologique.

Pour leur part, les pays du Sud craignent que l'action d'une ONUE ne vienne freiner leur développement en imposant des normes « vertes » trop sévères. La notion de développement durable, qui fait le lien entre croissance économique et protection de l'environnement, devrait permettre de dissiper ces craintes. Il est par ailleurs important de maintenir une implantation de cette future organisation à Nairobi, où se trouve actuellement le siège du PNUE (qui dispose aussi de bureaux à Genève et à Paris).

Un groupe de travail informel regroupant 26 pays a été mis en place pour engager une réflexion collective sur ce projet, présenté par la France. Cette initiative a, par ailleurs, été soutenue par l’Union européenne, lors du Sommet du 16 juin 2005. Grâce à cette mobilisation, le renforcement de la gouvernance internationale de l’environnement (GIE) a été inscrit à l’ordre du jour de la 60ème Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU).

Des consultations informelles se sont déroulées entre mi-avril et fin juin 2006. Elles ont permis d’ouvrir un large débat sur les insuffisances actuelles de la gouvernance internationale de l’environnement et d’aboutir à un diagnostic assez largement partagé.

Les consultations informelles se sont poursuivies lors de la 61ème AGNU, qui s’est tenue en septembre 2006. Au cours de cette assemblée générale, l’Union européenne a rappelé qu’à ses yeux, le renforcement de la gouvernance mondiale de l’environnement constitue une priorité et soutenu la transformation du PNUE en agence spécialisée (ONUE), qui disposerait d’un mandat renforcé et de ressources non seulement stables mais adaptées.

La France souhaite que les consultations informelles débouchent le plus rapidement possible sur la création d’un groupe formel chargé d’étudier la transformation du PNUE en une ONUE. L’organisation d’une conférence sur ce thème a, par ailleurs, été souhaitée par le Président de la République afin de promouvoir ce projet.

3) La mobilisation européenne en faveur du développement durable

En juin 2001, le Conseil européen de Göteborg a adopté une stratégie de développement durable pour l'Union européenne, dite "SEDD". Cette stratégie intégrait :

− le texte adopté le 16 juin 2001, par le Conseil européen de Göteborg, qui ajoute une dimension environnementale au processus de Lisbonne pour l’emploi, la réforme économique et la cohésion sociale ;

− la stratégie de Lisbonne, sur laquelle le texte précédemment cité s’appuie ;

− le 6ème Programme d’action européen pour l’Environnement complété, en 2002, à Barcelone, par un volet international.

La révision de cette stratégie, amorcée fin 2004, s’est appuyée sur les travaux suivants :

− un premier bilan de la stratégie de Göteborg (communication CE du 25 mai 2005) résultant d’une évaluation d’Eurostat fondée sur un ensemble d’indicateurs de développement durable ayant donné lieu à une communication du 09 février 2005 ;

− une déclaration sur les principes directeurs du développement durable (communication CE du 25 mai 2005, adoptée au conseil de juin 2005) ;

− « une plate-forme pour l’action » (communication CE du 13 décembre 2005), qui constitue la proposition de texte de la Commission pour la SEDD révisée de 2006.

Le Conseil européen de Bruxelles (22 et 23 mars 2005) a souligné, en plus de la révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, la nécessité de lier la croissance, l'emploi et la gestion de la qualité de l'environnement. Il a, par ailleurs, souligné les liens entre ce processus et celui de la révision de la stratégie européenne de développement durable.

Enfin, le Conseil européen des 16 et 17 juin 2005 a approuvé une déclaration relative aux principes directeurs du développement durable. Cette déclaration précise les objectifs du développement durable : protection de l'environnement, équité sociale et cohésion, prospérité économique et responsabilité internationale. Viennent, ensuite, dix principes d'élaboration des politiques qui vont de principes très généraux (équité inter-générationnelle) à des principes appliqués (exploitation des meilleures connaissances disponibles).

Au cours du premier semestre 2006, la présidence autrichienne a eu la charge de mener à bien la révision de la Stratégie européenne du développement durable et d’élaborer un nouveau texte.

Cette nouvelle stratégie, adoptée au Conseil européen des 15-16 juin 2006, présente l’avantage de reposer sur un document unique, abordant simultanément les trois piliers du développement durable et englobant les dimensions interne et externe.

Le nouveau texte prévoit un processus de suivi et de mise en œuvre. Des rapports de suivi sont prévus tous les deux ans, articulés avec les rapports nationaux. Une corrélation sera établie avec les indicateurs de développement durable établis par Eurostat. Un processus d’examen par les pairs, inspiré de l’expérience pilote française, est introduit. Le suivi de la nouvelle stratégie sera mené en articulation avec les diverses institutions de l’Union européenne (Parlement, Conseil économique et social, comité des Régions…).

Par ailleurs, l’accent est davantage porté sur l’« intégration verticale » en tentant d’articuler, notamment lors de l’élaboration des rapports de suivi et de mise en œuvre, les actions aux échelles européenne, nationale et même territoriale. En particulier, les rapports de suivi de la SEDD s’appuieront sur les rapports de mise en oeuvre des stratégies nationales et des résultats des revues par les pairs des SNDD. Par ailleurs, un effort de cohérence horizontale est encouragé afin d’articuler la SEDD avec les autres processus européens et avec les processus internationaux auxquels participe l’Union européenne.

Parmi les initiatives dans ce domaine, on peut relever :

− le paquet « mieux légiférer », présenté en juin 2002, qui vise notamment à simplifier et rendre plus efficace la législation européenne en matière environnementale qui est extrêmement complexe ;

− la stratégie thématique pour une gestion durable des ressources naturelles dont les conclusions devraient être soumises au Conseil environnement de décembre 2006 ;

− la préparation d’un plan d’action européen pour les technologies environnementales visant à promouvoir les éco-technologies, en amont, par la recherche et l’innovation mais également à assurer leur viabilité économique sur les marchés ;

− l’adoption, en mai 2006, de la directive sur la taxation des infrastructures visant à lutter contre la congestion et les dommages environnementaux, financer des infrastructures alternatives, rendre transparent la tarification des péages et promouvoir les partenariats public-privé pour financer les infrastructures ;

− la finalisation du second programme Marco Polo qui portera, sur la période 2007-2013, sur les actions à effet catalyseur, les autoroutes de la mer, le transfert modal, l’évitement de trafic et l’apprentissage en commun ;

− la préparation du nouveau programme « Energies intelligentes pour l’Europe » destiné à renforcer les volets « énergies renouvelables » (Altener) et « efficacité énergétique » (Save). Ce programme doit également réorienter l’action internationale existante « promotion internationale des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique dans les pays en voie de développement » (Coopener). Enfin, il introduit un nouveau volet « énergie dans les transports » (Steer) ;

− l’adoption du programme cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013) qui devrait bénéficier d’une enveloppe de plus de 4 milliards d’euros sur la période.

B. Un défaut de coordination au plan national

Compte tenu de ses initiatives en faveur de l’environnement et du développement durable, au plan international, la France se doit d’être exemplaire. Malheureusement, les moyens mobilisés pour soutenir et concrétiser ces prises de position ne sont, bien souvent, pas à la hauteur des déclarations et des ambitions affichées.

Ce décalage est préoccupant car il affaiblit la crédibilité de la France sur la scène environnementale mondiale ainsi que la portée de ses messages. A cet égard, la Présidence de l’Union européenne, que la France va assurer au second semestre 2008, moment charnière dans les négociations internationales sur le futur régime multilatéral du climat, sera une période décisive pour transformer les paroles en actes.

1) Les acteurs du développement durable

a. Les instances nationales directement impliquées dans la promotion du développement durable

En France, quatre instances sont particulièrement concernées par les affaires traitant du développement durable :

Au titre du développement durable, le Ministère exerce les compétences suivantes :

− veiller à l'évaluation environnementale des politiques publiques ;

− contribuer au développement de la politique destinée à associer les citoyens à la détermination des choix concernant les projets ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ;

− proposer toute mesure propre à améliorer la qualité de la vie et contribuer au développement de l'éducation à l'environnement à tous les niveaux de la formation, à la formation et à l'information des citoyens en matière d'environnement ;

− veiller à la prise en compte du développement durable dans les politiques contractuelles de l'Etat.

Dans le cadre de la réorganisation de l’administration centrale du MEDD, une Délégation au développement durable a été créée, par décret du 16 mai 2005. Cette délégation, dirigée par le Délégué interministériel au développement durable, est chargée d’assurer la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation de la stratégie nationale de développement durable (SNDD). A ce titre elle assure le secrétariat du Comité interministériel pour le développement durable. La directive nationale d’orientation du Ministère demande aux services déconcentrés, relevant de son autorité, de faire la promotion du développement durable, conformément à l’article 6 de la Charte de l’environnement, notamment dans les domaines des Agendas 21 locaux, de l’éco-responsabilité, de l’éducation, de l’innovation notamment grâce à des approches partenariales avec les associations et les milieux économiques.

Il est à noter que certains ministères, comme le ministère des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer ou celui de l’agriculture et de la pêche, ont mis en place une structure d’animation et de pilotage en matière de développement durable.

Créé par décret du 21 février 2003, le Comité interministériel pour le développement durable se substitue à trois instances dissoutes depuis : le Comité interministériel de l’environnement (CIEN), la Commission interministérielle de lutte contre l’effet de serre (CIES) et le Comité interministériel de prévention des risques naturels majeurs (CIPRNM).

Outre les missions du CIES et du CIPRNM, il est chargé de définir, d’animer, de coordonner et de veiller à la mise en oeuvre de la politique conduite par le Gouvernement en faveur du développement durable. A ce titre, il a adopté la stratégie nationale de développement durable (SNDD) en juin 2003. En juin 2006, près de 85% des actions prévues dans la SNDD, qui couvre la période 2003-2008, étaient engagées et 40% déjà réalisées. Il est à noter que la révision de la stratégie européenne de développement durable (SEDD), intervenue le 16 juin 2006, implique une mise en cohérence des stratégies nationales, voire locales. Les Etats membres doivent rendre compte de cette articulation avant juin 2007. Une actualisation de la stratégie française a été effectuée à l’automne 2006.

Le Comité interministériel pour le développement durable est présidé par le Premier ministre ou, par délégation de celui-ci, par le Ministre chargé du développement durable. Il comprend l’ensemble des membres du Gouvernement.

Chaque Ministre désigne un haut fonctionnaire chargé de préparer la contribution de son administration à la stratégie nationale de développement durable, de coordonner l’élaboration des plans d’actions correspondants et d’en suivre l’application. Ces hauts fonctionnaires constituent un comité permanent qui prépare les délibérations du CIDD. Ce Comité permanent est présidé par le Délégué interministériel au développement durable. Il se réunit tous les deux mois environ.

Le Délégué interministériel au développement durable a été institué par le décret du 24 juin 2004. Sa mission consiste à animer et coordonner, au nom du Premier ministre, l'action des administrations de l'Etat en faveur du développement durable. Il contribue également à la coordination de l'action des établissements publics de l'Etat dans ce domaine. Il prépare les délibérations du CIDD, en assure le suivi et veille à leur mise en œuvre.

En outre, le Délégué interministériel met en œuvre des actions d'évaluation, de formation et de communication et participe à la définition des programmes de recherche en matière de développement durable. A cet égard, il a animé, cette année, un groupe de travail sur le « charbon propre » qui a publié un rapport sur cette question. L’une des conclusions essentielles de ce rapport est que la France dispose d’un réel savoir-faire et des technologies nécessaires pour participer à des projets de coopération destinés à développer des centrales de charbon « propres ».

Le Délégué au développement durable est également associé à la définition du programme des travaux du Conseil national du développement durable. Il anime et coordonne l'action des hauts fonctionnaires chargés du développement durable.

Enfin, le Délégué dirige la Délégation au développement durable. Pour l'exercice de ses missions, il dispose des autres services de l’administration centrale du Ministère de l’écologie et du développement durable et de la Mission interministérielle de l'effet de serre. Il fait appel, en tant que de besoin, aux services des autres ministres. Son secrétariat est assuré par le Ministère chargé du développement durable.

Le Conseil national du développement durable (CNDD) a été créé par le décret n°2003-36 du 13 janvier 2003. Sa création répond au souhait du Gouvernement d’une participation concrète des acteurs à l’enrichissement des politiques publiques de développement durable, en les associant à leur élaboration, leur suivi et à leur évaluation, notamment au travers de la stratégie nationale de développement durable. Celle-ci s’inscrit dans le cadre des engagements pris à Rio, réaffirmés à Johannesbourg, et de la stratégie européenne de développement durable.

Rattaché au Premier ministre, ce Conseil est composé de 90 membres, nommés pour trois ans, issus de la société civile et des collectivités territoriales. 300 personnes sont également associées aux groupes de travail. Il est présidé par Michel Ricard, nommé par arrêté du Premier ministre en date du 4 juillet 2006.

Le CNDD constitue l’instance privilégiée de consultation de la société civile en matière de développement durable. A ce titre, il est principalement associé à l’élaboration, au suivi et à l’évaluation de la stratégie nationale de développement durable et peut aussi être saisi par le Premier ministre sur toute question relative au développement durable, être consulté sur les projets de textes législatifs et réglementaires ayant une incidence dans ce domaine ou s’auto-saisir et émettre des propositions ou des recommandations. Le Délégué interministériel est associé à la définition du programme des travaux du Conseil national du développement durable.

Le CNDD bénéficie de mises à disposition de personnel. Les membres et les coordinateurs ne sont pas rémunérés ni indemnisés. Depuis son installation en janvier 2003, le CNDD s’est réuni 13 fois en séance plénière et a réuni divers groupes de travail, organisés par thèmes, avec un coordinateur pour chacun d’eux, choisi parmi ses membres.

b. Les projets territoriaux de développement durable

La France s’est engagée, lors de la conférence sur l’environnement et le développement, à mettre en œuvre l’Agenda 21 (Actions 21) de Rio. La Stratégie nationale de développement durable (SNDD), adoptée en 2003, retient comme objectif de « favoriser en cinq ans la mise en place de 500 agendas 21 locaux, notamment sur les territoires bénéficiant d’une aide publique comme les Grands projets urbains, les parcs naturels régionaux, les groupements de communes, les pays ou agglomérations dans le cadre de contrats territoriaux ».

Pour faciliter la mise en place de cet objectif, un cadre de référence pour les projets territoriaux de développement durable a été élaboré qui vise cinq finalités : la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources, la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations, l’épanouissement de tous les êtres humains et, enfin, une dynamique de développement suivant des modes de production et de consommation responsables.

La question du changement climatique qui constitue une des cinq finalités du cadre de référence peut être envisagée à travers les plans climat territoriaux. Cette question est centrale dans les futurs contrats de projets Etat-régions pour lesquels une conditionnalité de neutralité vis à vis des émissions de gaz à effet de serre a été décidée.

Par circulaire du 13 juillet 2006, la Ministre de l’écologie et du développement durable a fait parvenir aux préfets ce cadre de référence ainsi que l’appel à reconnaissance des projets territoriaux de développement durable ou agendas 21 locaux. Cette circulaire décrit le dispositif de reconnaissance et incite les préfets à mettre en place des comités régionaux « agendas 21 », chargés d’encourager et d’accompagner les porteurs de projets dans leurs démarches.

Le projet de loi de finances pour 2007 consacre un montant de 2,88 millions d’euros de crédits aux frais liés à l’animation de la SNDD, dont 2,7 millions d’euros destinés à appuyer l’élaboration des projets territoriaux de développement durable dont les agendas 21 locaux.

En plus de ces crédits d’intervention, le Ministère de l’écologie et du développement durable consacrera un montant de 200.000 euros à la réalisation d’études relatives à la prise en compte de la dimension territoriale du changement climatique afin d’accélérer l’émergence de plans locaux. Enfin, un montant total de 320.000 euros en AE-CP est prévu pour la mise en œuvre du dispositif de reconnaissance et d’évaluation des plans territoriaux de développement durable dont 10.000 euros permettant de compléter la mise au point du modules de formation, 10.000 euros pour l’organisation d’un forum de présentation et 300.000 euros destinés à la mise en place de ce dispositif de reconnaissance correspondant, en moyenne, à l’examen de 150 dossiers en 2007.

2) Au niveau international, une présence française paradoxalement insuffisante

a. Un dispositif institutionnel dispersé

Le traitement des questions environnementales et leur articulation avec les négociations internationales posent le problème de la coordination des structures nationales impliquées dans le suivi de ces questions. En France, les compétences dans ce domaine relèvent, principalement, du Ministère des affaires étrangères – où plusieurs directions interviennent – mais aussi de différents ministères techniques dont le Ministère de l’écologie et du développement durable qui assure, notamment, un suivi de l’adoption et de la mise en œuvre des directives communautaires relatives à l’environnement.

Chacune de ces structures traite d’un aspect des questions environnementales dans une perspective propre, ce qui ne favorise naturellement pas l’émergence d’une approche globale, pourtant indispensable dans ce domaine. Ainsi, la Direction des Nations Unies est en charge des aspects de gouvernance, avec le projet de création d’une Organisation des Nations Unies pour l’Environnement, tandis que la mise en œuvre des conventions de Rio relève de la Direction économique et de la sous-direction pour l’environnement du même Ministère. A l’inverse, le Ministère de l’écologie et du développement durable, fragilisé par l’absence de personnels propres (les fonctionnaires de ce Ministère sont essentiellement mis à disposition par d’autres), joue un rôle limité dans le suivi des négociations internationales. Cette dispersion des structures s’accompagne d’une gestion éclatée des moyens dans la mesure où le versement de la contribution française aux différents fonds internationaux pour l’environnement dépend, selon les cas, du Ministère des affaires étrangères ou du Ministère des finances.

Cette organisation administrative nous distingue de la majorité de nos partenaires, européens en particulier, qui ont mis en place des structures transversales étoffées (le plus souvent, au sein d’un département des affaires globales), capables d’apporter une réelle expertise et de participer activement aux réunions de travail et aux négociations qui se déroulent à l’échelle internationale.

Autrement dit, si la France joue un rôle d’impulsion indéniable lors des négociations internationales, elle n’est pas vraiment en mesure de traduire concrètement ses paroles en actes, ce qui, à terme, menace la crédibilité de ses prises de position en matière d’environnement, au niveau international.

Plusieurs initiatives ont toutefois été prises en vue de renforcer la coordination dans le traitement des questions environnementales avec, notamment, la création du poste d’Ambassadeur itinérant délégué à l’environnement.

Cet Ambassadeur représente la France dans les négociations internationales et contribue à l’élaboration de la position française sur les questions internationales liées à l’environnement. Il dépend du Ministère des affaires étrangères, dont il est, par ailleurs, le haut fonctionnaire chargé du développement durable, ainsi que du Ministère de l’écologie. Toutefois, si l’Ambassadeur délégué à l’environnement a permis de renforcer la présence de la France dans les négociations internationales, il ne dispose d’aucune autorité sur les services impliqués dans leur suivi, ce qui complique, une fois encore, les efforts de coordination.

La création de ce poste a été relayée par la mise en place d’un réseau de « Correspondants environnement » dans les postes diplomatiques. Ces correspondants sont chargés de faciliter l’échange d’informations régulières, de contribuer à la préparation des négociations internationale, et de soutenir les actions françaises dans le domaine de l’environnement, au niveau bilatéral, régional et multilatéral.

En définitive, c’est sans doute dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique que de réels efforts de coordination ont été réalisés grâce à la Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES).

b. Un rôle clé de coordination joué par la MIES dans la lutte contre le réchauffement climatique

La Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES), créée en 1992, est chargée de coordonner et d’organiser, en concertation avec les associations et les partenaires économiques et sociaux, le travail de préparation et de mise en œuvre du programme national d’action contre le changement climatique. Elle participe aux travaux communautaires conduits dans ce domaine et prépare les positions françaises dans le cadre des négociations internationales concernant le changement climatique (Convention Climat et Protocole de Kyoto), pour lesquelles elle est chef de délégation, hors sessions ministérielles. La MIES assume aussi la fonction d’Autorité nationale désignée (AND) pour le mécanisme de développement propre (MDP). Initialement rattachée au Premier ministre, la MIES dépend désormais du Ministère de l’écologie et du développement durable.

La mise en œuvre de la Convention climat et du protocole de Kyoto implique de fréquentes réunions, aux niveaux européen et international, auxquelles la MIES participe activement, au nom du Gouvernement français.

Pour mieux prendre la mesure du rôle essentiel de la MIES à ce niveau – et de sa charge de travail –, il n’est pas inutile de rappeler que la mise en œuvre de la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC) se traduit par un cycle annuel de réunions : une réunion de deux semaines des organismes subsidiaires de la convention, au niveau des experts de tous les gouvernements, au premier semestre ; et une conférence de deux semaines, avec segment ministériel, au second semestre (les plus connues étant celles de Kyoto, en décembre 1997, de La Haye, en novembre 2000, et de Marrakech, en juillet 2001).

La participation à ce cycle s'accompagne d'un travail intense de préparation de textes, notamment au niveau européen. Dans le même temps, d'autres organismes des Nations Unies, associés à la Convention climat, ont leurs propres sessions de travail, sous des formes diverses (PNUE(34), GIEC(35), etc.) Certaines institutions interviennent également de manière active sur le sujet, notamment l'OCDE et l'Agence internationale de l'énergie. Enfin, l'importance croissante des questions, en relation avec le commerce international, ses règles et le droit de la concurrence conduit à s'intéresser aux activités de l'OMC.

Le niveau européen comporte deux types principaux de travaux : d’une part, la préparation des positions européennes pour les négociations internationales sus mentionnées ; d'autre part, la mise en place de la politique européenne propre en matière de changement climatique.

Pour la première catégorie de travaux, la MIES assure la concertation interministérielle sur les positions à défendre, met au point les consensus nécessaires ou, s'il n'y en a pas, prépare les dossiers pour les réunions du Secrétariat Général des Affaires Européennes (SGAE). Elle suit le déroulement des travaux dans l'intervalle, entre deux conseils des ministres (au sein du groupe ad hoc climat, émanation du conseil des ministres de l'environnement, où elle dirige la représentation française).

Pour la deuxième catégorie de travaux, le même processus est applicable pour les questions dont peut être saisi le groupe ad hoc climat. On notera ici le travail de coordination intersectorielle des conseils des ministres (et de la Commission) pour les questions relatives aux transports, à l’énergie, à l’agriculture, à la fiscalité. Leur mise en place s'accompagne, pour la France, d'un rôle de la MIES, analogue à celui qu'elle joue pour le programme français.

Enfin, la MIES n’est pas absente des initiatives prises par la France, dans le domaine des relations Nord-Sud, qui constitue l'enjeu le plus important de l'action sur le changement climatique et de l'avenir de la Convention. Elle s’implique, en effet, dans les actions d’information, de formation aux négociations et à la gestion des projets menées, en particulier, dans les pays francophones. C'est une des raisons pour lesquelles la MIES assume, entre autres, la fonction d'Autorité nationale désignée (AND), pour le mécanisme de développement propre, mis en place pour les pays en développement, par le Protocole de Kyoto.

§ Les moyens de la MIES, en progression, doivent être renforcés dans une perspective de long terme

Hors dépenses de fonctionnement courantes, la loi de finances initiale pour 2006 a alloué, à la MIES, une dotation de 635.000 euros en autorisation d’engagement, destinée, pour l’essentiel, à la réalisation d’études ainsi qu’à des dépenses de préparation et de logistique, afférentes au rôle interministériel de la structure, dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention climat.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2007, les moyens, hors dépenses de fonctionnement courantes, inscrits pour la MIES, s’élèvent à 830.000 euros destinés à financer, d’une part, la mise en place d’outils permettant, dans le cadre du suivi du Plan Climat, d’élaborer des projections en matière d’émission de gaz à effet de serre et, d’autre part, comme en 2006, à couvrir des dépenses d’études et des dépenses de préparation et de logistique afférentes au rôle interministériel de la MIES.

En raison de son caractère interministériel et de la transversalité de ses activités, la MIES a vocation à bénéficier de mises à disposition de personnels, par les principaux ministères concernés et leurs établissements publics. Les ministères, mis à contribution actuellement dans leurs effectifs budgétaires, sont le Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le Ministère chargé de l'équipement et le Ministère chargé de l'agriculture. Pour sa part, le Ministère de l'écologie et du développement durable met à disposition de la Mission, quatre agents. La MIES bénéficie, par ailleurs, de la mise à disposition d'un cadre à temps partiel (à 50 %) par Météo France ainsi que d'un cadre, provenant de la Caisse des dépôts et consignations, pour les questions économiques et financières liées à la définition et à la mise en œuvre de la politique climat.

Conformément aux recommandations de votre Rapporteur, renouvelées, chaque année, depuis 2003, et des conclusions du rapport de la Mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'effet de serre d'avril 2006, une demande de renforcement, auprès de certains ministères, du nombre de mises à disposition de fonctionnaires, en faveur de la MIES, va être effectuée.

Votre Rapporteur estime que ces évolutions vont dans la bonne direction. Il souhaite néanmoins appeler l’attention sur trois points :

− en premier lieu, la MIES a au moins autant besoin de personnels techniques que de personnels ayant une expérience dans les négociations internationales. Actuellement, elle ne dispose véritablement que d’une seule personne totalement impliquée dans ces négociations, là où nos partenaires européens disposent d’équipes d’une dizaine de personnes, voire plus ;

− en second lieu, le recours à la procédure de mise à disposition n’est pas sans risques. Si cette procédure peut constituer un élément de souplesse pour étoffer les équipes, en tant que de besoin (ce qui n’est d’ailleurs pas toujours le cas), elle n’offre pas à l’institution un personnel stable, ce qui menace, à terme, la mémoire des dossiers. Dans un domaine aussi important que la lutte contre le changement climatique et à une échelle plus globale, il serait fort utile que la France bénéficie, sans tarder, d’un corps de spécialistes des questions environnementales ;

− enfin, des efforts restent à accomplir, notamment dans la perspective de la Présidence française de l’Union européenne, au deuxième semestre 2008.

3) Préparer la Présidence française de l’Union européenne

La France assurera la Présidence de l’Union européenne à un moment charnière des discussions sur l’avenir du protocole de Kyoto. Afin d’éviter toute interruption à la fin de la première période d’engagements (2008-2012), il importe, en effet, que les négociations sur le futur régime multilatéral du climat s’achèvent d’ici fin 2009 afin de disposer du temps nécessaire au processus de ratification et d’entrée en vigueur du nouveau dispositif.

Notre pays aura, notamment, à gérer la 14ème conférence des parties à la Convention climat et la 4ème réunion des parties au protocole de Kyoto. Compte tenu des enjeux, un investissement conséquent sera nécessaire dans des processus parallèles à ces rencontres afin d’identifier les éléments de consensus possible ainsi que des « paquets de négociations », pour les discussions sur le future régime multilatéral du climat. A ces démarches s’ajouteront certainement les discussions qui auront lieu lors de la réunion du G8, présidée par le Japon en 2008, dont un des objectifs sera de faire progresser les négociations sur le climat.

Au niveau communautaire, la France devra fournir un effort important de coordination auquel la Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES) sera associée en animant le groupe « environnement international – changements climatiques » (préparation de la position communautaire sur tous les thèmes de négociations, des conclusions du Conseil environnement sur le climat, etc.). Ce groupe supervise lui-même un dizaine de groupes d’experts (36) dont il faut assurer la coordination, ce qui implique, non seulement la présidence de ces groups, mais aussi la préparation d’un grand nombre de documents ainsi qu’un travail purement logistique. La Présidence implique également la préparation de la position de l’Union européenne sur ses propres objectifs et actions pour la période post 2012.

Par ailleurs, comme cela a été évoqué précédemment, deux sessions principales de négociations internationales sur le climat se tiendront en 2008 :

− d’une part, la réunion des organes subsidiaires de la Convention climat et du protocole de Kyoto, qui se déroulera, à Bonn, du 2 au 13 juin. Cette session se tiendra sous présidence slovène, mais l’équipe française devra être en poste et pleinement opérationnelle afin de pouvoir prendre la relève, le 1er juillet 2008 ;

− d’autre part, la 14ème conférence des parties à la Convention climat et la quatrième réunion des parties au protocole de Kyoto, avec segment ministériel et réunion parallèle des organes subsidiaires.

En plus de ces sessions principales, plusieurs réunions préparatoires sont à prévoir (dont celles liées aux travaux du G8 sur le climat), des ateliers sur des sujets techniques, etc. Durant ces deux sessions, la Présidence aura à assurer la coordination de l’Union européenne, sur place, l’organisation de toutes les réunions d’experts ainsi qu’à diriger les négociations clef sur l’évolution du régime climatique.

Enfin, la France aura à fixer sa propre position – préparée habituellement par la MIES et le Ministère des affaires étrangères et validée par une réunion interministérielle – avant la conférence des parties à la Convention climat.

La concordance de la Présidence française de l’Union européenne avec ces négociations majeures sur l’évolution du régime multilatéral du climat nécessite que le noyau de l’équipe de coordination soit en place au moins un an avant le 1er juillet 2008. Il importe que les experts de cette équipe puissent participer aux conférences qui se tiendront, fin 2007, afin de renforcer leurs capacités de négociations.

A l’heure actuelle, peu d’experts français sont présents à ces négociations et président des groupes de négociations au sein de la Convention climat et du protocole de Kyoto, ce qui est pour le moins paradoxal et regrettable.

Votre Rapporteur estime qu’un plus grand engagement des experts français dans les réunions multilatérales sur le régime climatique est souhaitable, non seulement dans la perspective de la Présidence française de l’Union européenne, mais également au-delà de ce calendrier. Dans cette perspective, il suggère que la MIES puisse disposer d’un « droit de tirage » sur les experts d’autres services pour être en mesure d’assurer la Présidence française dans les meilleures conditions ou que la solution de son renforcement soit véritablement mise en œuvre. Plus généralement, le budget de la MIES doit permettre une participation active aux réunions de travail et aux conférences internationales ainsi qu’une coordination efficace, au niveau européen.

IV – LA MISSION DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Afin de renforcer la visibilité des moyens mis en œuvre en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique, un Document de politique transversale (DPT) relatif à la politique « climat » sera prochainement proposé au Parlement, dans le cadre du Plan Climat 2006.

Votre Rapporteur se félicite de cette initiative dans la mesure où, selon une première estimation, réalisée par la MIES, le coût budgétaire (exonération fiscale comprise) de l’ensemble des politiques sectorielles, dont une partie des bénéfices contribue à la politique « climat », est évalué, en 2006, à plus de 2 milliards d’euros.

A. Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007

La mission « écologie et développement durable » est intégralement placée sous la responsabilité du Ministère correspondant. Cette mission comprend, pour 2007, 698 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 637 millions d’euros de crédits de paiements ; le nombre d’emplois correspondant est de 3.775 en équivalent temps plein.

La mission est composée de trois programmes :

– le programme 181 « prévention des risques et luttes contre les pollutions » (133,4 millions d’euros en CP), qui regroupe les crédits destinés à la lutte contre les pollutions, les risques technologiques et naturels, la gestion des crues et la gestion des déchets ;

– le programme 153 « gestion des milieux et biodiversité » (187,7 millions d’euros en CP), qui correspond aux dépenses liées à la préservation de la biodiversité et des espaces naturels ;

– le programme 211 « conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable » (315,8 millions d’euros en CP), qui regroupe les fonctions de soutien, les crédits liés à la mise en œuvre de la stratégie nationale du développement durable, les crédits d’expertise et de connaissances environnementales, les crédits relatifs à l’action internationale et à la communication.

Le tableau ci-après retrace la répartition de ces crédits par politique :

Répartition des crédits inscrits dans le PLF 2007 par politique

(en millions d’euros)

 

PLF 2007

PITE (1)

Total

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Risques

80,67

80,66

0,07

0,09

80,75

80,75

Eau

109,28

96,28

12,99

12,99

122,27

109,27

Biodiversité

150,76

144,23

3,10

3,13

153,86

147,36

Soutien et développement durable

357,38

315,88

0

0

357,38

315,88

Total MEDD

698,09

637,05

16,16

16,21

714,26

653,26

(1) Programme des interventions territoriales de l’Etat

Source : Ministère de l’écologie et du développement durable

Au total, les crédits budgétaires inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007 – programme « recherche dans le domaine des risques et des pollutions » inclus – s’élèvent à 915 millions d’euros en crédits de paiement contre 893 millions d’euros en 2006.

Ces dotations budgétaires ne reflètent cependant pas l’intégralité de l’effort financier consenti pour la protection de l’environnement. Il convient, en effet, d’y ajouter les taxes affectées qui s’élèvent à 376 millions d’euros, le programme des interventions territoriales de l’Etat (PITE), à hauteur de 16 millions d’euros et la contribution supplémentaire du fonds de prévention des risques naturels majeurs – dit fonds Barnier –, pour un montant de 50 millions d’euros. Le total des crédits mis en œuvre en 2007 sera ainsi de 1.357 millions d’euros, en augmentation de 9,3% par rapport à 2006.

Votre Rapporteur relève que les crédits consacrés à la lutte contre le changement climatique – qui s’élevaient à 10 millions d’euros en LFI 2006 – ont été transférés du programme 181 au programme 211 (action « développement durable »). Ces crédits sont destinés à financer les moyens de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) qui intervient, dans ce domaine, via des projets de maîtrise de l’énergie et d’utilisation des énergies renouvelables.

Par ailleurs, les moyens affectés à la MIES connaissent une progression, pour s’établir à 830.000 euros contre 635.000 euros, l’année dernière. Il s’agit d’un effort significatif qu’il conviendra sans doute de renforcer compte tenu des tâches de coordination croissantes que la MIES sera appelée à assumer dans la perspective de la Présidence française de l’Union européenne et des futures négociations internationales sur l’avenir du régime multilatéral du climat.

B. Les crédits dévolus à l’action internationale

Les crédits, regroupés dans l’action internationale du programme 211 intitulé « soutien aux politiques environnementales et développement durable », financent les activités ayant pour finalité de contribuer à élaborer, servir et porter les positions françaises au plan international en matière d’environnement et de développement durable, tout en confortant l’approche européenne, et en renforçant les liens avec les pays du Sud.

Les crédits consacrés à cette action sont stables, s’élevant à 2,5 millions d’euros environ, hors titre 2, en 2006 :

 

Total Hors titre 2

Autorisations d’engagement

2.453.551

Crédits de paiement

2.544.659

Les crédits de fonctionnement courant – hors personnel – s’élèvent à 726.008 euros. Ces crédits sont destinés à mener des actions d’information et de concertation avec les représentants du public et de la société civile, en conduisant un effort pour la préparation des grandes échéances internationales et présidences prises par la France. En outre, ces crédits financent les obligations statutaires et contractuelles (rapports nationaux…), le recours à des études et expertises et différents frais de fonctionnement du service des affaires internationales (traduction, documentation, représentation ou projet de service).

Plus précisément, les opérations suivantes sont programmées :

− Programme LIFE+ (L’Instrument Financier pour l’Environnement) : financement de l’agence nationale qui gère le nouveau programme LIFE+, à hauteur d’environ 400.000 euros ;

− Réalisation d’une étude d’identification de projets du Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) pour un montant de 50.000 euros ;

− Mise en place d’une équipe dédiée au tourisme durable (50.000 euros) ;

− Information et valorisation des actions françaises dans le cadre des réunions des programmes et conventions internationales ;

− Mobilisation d’experts pour assister le ministère dans la préparation ou la conduite de la présidence de quatre conventions internationales : Convention alpine, Union européenne, Convention de Carthagène et Équipe spéciale de la Convention d’Aarhus (environ 200.000 euros) ;

− Les dépenses liées au projet de service prévoient, en particulier, la conduite d’une enquête pluriannuelle d’opinion auprès des principaux interlocuteurs du MEDD dans le cadre de son action internationale (26.008 euros par an pour un panel d’une trentaine d’experts audités sur site).

En ce qui concerne les crédits d’intervention, ils s’élèvent à 1 727 543 euros en autorisation d’engagement et 1 818 651 euros en crédits de paiement. Ces crédits sont destinés à financer les activités suivantes :

− Elaboration des positions du MEDD sur les dossiers internationaux traitant d’environnement et de développement durable (350.000 euros en AE-CP) : travaux liés à la création d’une Organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE) et appui apporté à l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) ;

− Animation du débat national sur les dossiers internationaux relevant de la compétence du MEDD (350.000 euros en AE-CP) : soutien à l’association 4D (Dossiers et Débats pour le Développement Durable), au collectif français pour l’éducation à l’environnement, au réseau action climat ou à l’association des Amis de la terre ;

− Présentation au plan international des positions françaises et européennes (500.000 euros en AE-CP) : appui à des ONG spécialisées (Ligue de protection des oiseaux, Office international de l’eau (OIEau), Fédération nationale des parcs régionaux (FNPR) ou Agropolis) ou subventions à des organismes européens de protection pour l’environnement dans le cadre de la préparation de la Présidence française de l’UE ;

− Mise en œuvre par la France des orientations politiques arrêtées aux plans européen et international (527.543 euros en AE et 618.651 euros en CP) : la mise en œuvre des accords conclus par la France ou des décisions arrêtées aux plans européen et international se traduit notamment par la mise en place ou la reconduction des appuis financiers prévus (secrétariat de la Convention d’Aarhus, Groupe international d’experts sur le climat (GIEC) de la Convention climat, contribution au Carbon Finance Assist de la Banque mondiale, appui au comité français de l’UICN, division technologie du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) Paris, Plan d’action pour la Méditerranée, secrétariats des conventions liées aux mers régionales…).

Les crédits prévus au projet de loi de finances pour 2007 pour l’action internationale restent stables, pour s’établir à 2,45 millions d’euros en AE et 2,55 millions d’euros en CP.

Dans son précédent avis budgétaire, votre Rapporteur avait exprimé le souhait de disposer d’un tableau regroupant l’ensemble des contributions, versées par l’Etat, aux différentes organisations internationales. Le tableau qui est actuellement transmis ne comporte que les contributions du Ministère de l’écologie et du développement durable et du Ministère des Affaires étrangères au titre du dernier exercice, alors même que d’autres ministères contribuent également au financement de ces organisations et fonds internationaux, au premier rang desquels le Ministère des finances.

Votre Rapporteur réitère donc son souhait de disposer, à l’avenir, d’un tel tableau permettant de vérifier que les pouvoirs publics français mettent leurs actes en conformité avec leurs paroles prononcées dans les enceintes internationales.

CONCLUSION

Le thème du développement durable s’invite chaque jour un peu plus dans le débat public, à la faveur de la mobilisation de scientifiques et d’ONG, mais aussi, de la communauté internationale. Il est, aujourd’hui, de plus en plus présent dans les politiques publiques ainsi qu’au niveau international où la défense des principes du développement durable apporte un début de réponse aux effets pervers de la mondialisation.

La France a fait de la promotion du développement durable et du renforcement de la gouvernance internationale dans ce domaine, un axe important de sa politique étrangère. Si on ne peut que se féliciter de cette détermination à s’engager sur le plan international, il est, dans le même temps, difficile de se défaire d’un sentiment de malaise lorsqu’il s’agit de mesurer concrètement la portée des efforts effectivement mis en œuvre dans ce domaine.

Notre organisation administrative, qui repose sur un traitement essentiellement vertical et sectoriel des questions environnementales, ne favorise pas la prise en compte prioritaire de tette question, par nature transversale, du développement durable. Il en résulte un manque de coordination qui nuit à l’efficacité des initiatives prises dans ce domaine.

Dans ce contexte, votre Rapporteur est favorable à la mise en place d’une approche globale, afin de dépasser les cloisonnements administratifs actuels et permettre une plus grande réactivité aux problèmes non seulement environnementaux mais également sanitaires ou de terrorisme qui, du fait de la mondialisation, appellent désormais une réponse commune des Etats.

Votre Rapporteur propose donc que le Conseil des Affaires étrangères, qui vient d’être créé, soit saisi de la question de la création d’un département des affaires globales, au sein du Ministère des affaires étrangères. Le Conseil aurait notamment pour tâche de définir le rôle de ce département qui aurait pour une approche transversale sur des questions complexes, comme les questions environnementales, dont le traitement dépasse les cadres d’intervention traditionnels et appelle, bien souvent, une réponse globale.

Parallèlement, comme votre Rapporteur l’avait suggéré l’année dernière, une implication plus forte sur ces questions est nécessaire, au niveau parlementaire. Cette implication pourrait être encouragée par la création d’une délégation ou d’un office parlementaire, chargé de la mondialisation et du développement durable, qui aurait pour mission d’exercer une veille et de peser pour que la dimension transversale du développement durable prime sur l’approche sectorielle qui prévaut actuellement.

Sous réserve de ces observations, votre Rapporteur recommande un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « écologie et développement durable ».

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du mardi 31 octobre 2006, la Commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Jacques Guillet, les crédits de l’écologie et du développement durable pour 2007.

Le Rapporteur a tout d’abord souligné qu’en quelques années, l’écologie et le développement durable sont devenus des éléments essentiels des relations internationales ainsi qu’un levier important de notre propre action en faveur de l’aide multilatérale. Il a rappelé les principales étapes qui ont jalonné la prise de conscience, au niveau international, de la nécessité de promouvoir un développement durable pour tous : le « Sommet de la terre » de Rio, en 1992 ; la définition des Objectifs du Millénaire, en 2000 ; le Sommet de Johannesburg en 2002 et les rencontres du G8, en particulier, la rencontre de Gleneagles, en 2005, qui a été marquée par un volontarisme fort de la présidence britannique dans ce domaine. Aujourd’hui, la lutte contre le changement climatique est au cœur des préoccupations et suscite une forte mobilisation de l’opinion publique, sensibilisée par des initiatives comme les films d’Al Gore et de Yann Arthus-Bertrand ou le récent rapport de Sir Nicholas Stern, ancien économiste en chef de la Banque mondiale, qui met « la responsabilité de l’action fermement dans le camp des artisans de la politique étrangère et économique ». Cette mobilisation montre que la lutte contre le réchauffement climatique devient un axe majeur de la politique étrangère, ce qui conforte la légitimité d’un avis de la Commission des affaires étrangères sur les crédits de l’écologie et du développement durable.

Le Rapporteur a insisté sur le rôle actif joué par la France dans cette diplomatie environnementale en plein essor tout en regrettant l’existence d’un décalage entre les discours et les actes dans ce domaine. Bien que ce décalage ne soit pas propre à la France, il reste préoccupant. Notre attitude volontariste et notre participation active aux négociations internationales doivent en effet obliger la France à être exemplaire et à passer aux actes. Cette exigence est renforcée au cours de la période actuelle qui est une période charnière à mains égards :

− en premier lieu, certains pays, comme le Canada, rencontrent des difficultés à respecter leurs engagements de réduction des gaz à effet de serre. Dans le même temps, certains pays émergents comme la Chine et l’Inde expriment une attente forte en matière de transferts de technologies sobres en carbone ;

− en second lieu, une réflexion est d’ores et déjà engagée sur l’avenir du régime multilatéral du climat, après 2012 c’est-à-dire au-delà de la période d’engagements visée par le protocole de Kyoto ;

− enfin, la question des changements climatiques est étroitement liée à celles de la sécurité et de l’efficacité énergétiques qui sont au cœur des préoccupations actuelles.

Il est, par ailleurs, nécessaire de se préparer à des échéances importantes pour l’avenir comme la présidence française de l’Union européenne, au second semestre 2008, qui coïncidera avec les négociations internationales sur ces thèmes.

M. Jean-Jacques Guillet a précisé que, dans cette perspective, le rapport qu’il présentait à la Commission avait pour objet de dresser un bilan d’étape de l’activité de la France en faveur du développement durable, autour de trois aspects :

− les avancées en matière de lutte contre le changement climatique ;

− la promotion du développement durable comme effet de levier puissant pour la coopération internationale ;

− les insuffisances de la gouvernance en matière de développement durable au regard des enjeux.

Dans ces perspectives, il a souhaité faire plusieurs observations.

En premier lieu, les efforts de la France en matière de développement durable et, plus particulièrement de lutte contre le changement climatique obéissent à une logique transversale que ne reflètent pas les crédits de la mission « écologie et développement durable » qui recouvrent strictement le périmètre d’intervention du Ministère de l’écologie et du développement durable. En outre, les crédits consacrés à l’action internationale du Ministère sont limités dans la mesure où l’essentiel des actions est mené par le Ministère des affaires étrangères ou par le Ministère des finances. Toutefois, l’élaboration d’un « Document de politique transversale » (DPT) a été annoncée qui portera sur la politique « climat » et devrait éclairer la représentation nationale sur les efforts engagés dans ce domaine, qui ont été évalués à 2 milliards d’euros en 2006, par la Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES).

S’agissant des crédits prévus pour 2007, le Rapporteur a ajouté que le projet de budget progresse de 2,5% - hors ressources financières résultant du « fonds Barnier » et des taxes affectées – ce qui, dans un contexte budgétaire exigeant, n’est pas négligeable. Le Ministère bénéficiera, par ailleurs, d’une création nette de 40 emplois mais reste fragilisé par l’absence d’un corps spécialisé et, son corollaire, le recours à des personnels d’autres ministères, mis à disposition. Enfin, les moyens de la MIES s’établiront à 830.000 euros contre 635.000 euros en 2006, ce qui représente une progression significative que le Rapporteur avait appelé de ses vœux, l’année dernière, en présentant un amendement en ce sens.

En second lieu, le dispositif, mis en place par le protocole de Kyoto, est désormais une réalité. Les mécanismes de flexibilité que sont le système d’échanges de quotas d’émissions, la mise en œuvre conjointe (MOC) et le mécanisme de développement propre (MDP) fonctionnent de manière satisfaisante, même si certains aménagements s’avèrent nécessaires. Il apparaît notamment nécessaire d’encourager une meilleure répartition géographique des projets « MDP », actuellement concentrés au Brésil, en Inde et en Chine, tandis que l’Afrique sub-saharienne est quasiment absente du dispositif. En outre, le mini-krach qu’a connu le marché européen du carbone en cours d’année a démontré la nécessité de ne pas procéder à des allocations trop généreuses de quotas aux entreprises, ce qui devrait être pris en compte dans la deuxième « génération » de plans nationaux d’affectation des quotas (PNAQ II). Un renforcement des efforts domestiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre est, par ailleurs, indispensable à l’heure où les premiers relevés d’émissions témoignent de la difficulté de certains Etats à atteindre les objectifs que leur assigne le protocole de Kyoto. Enfin, la participation du plus grand nombre d’Etats à cet effort est nécessaire, notamment, celle des Etats-Unis, premier émetteur mondial de CO2. Les initiatives prises par certains Etats, comme la Californie, ou par certaines collectivités montrent que la lutte contre le réchauffement climatique constitue une préoccupation importante pour une grande majorité de la population même si elle n’est pas, à ce jour, relayée par les autorités fédérales.

En troisième lieu, la promotion du développement durable constitue un effet de levier puissant pour la coopération internationale. A titre d’exemple, deux tiers des fonds alloués au Fonds pour l’environnement mondial (FEM) seront consacrés, au cours de la période 2006-2010, à la préservation de la biodiversité ainsi qu’à la lutte contre les dérèglements climatiques. La France contribue à l’aide multilatérale dans ces domaines tout en mettant en œuvre ses propres actions, au plan bilatéral, grâce au Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) et à l’Agence française de développement (AFD). Notre pays dispose, en effet, d’un savoir faire non seulement technique mais également industriel et institutionnel qu’il importe de valoriser. Une étude est d’ailleurs en cours dont les résultats devraient permettre de présenter une offre structurée dans ce domaine, aux pays émergents.

En quatrième lieu, la gouvernance internationale de l’environnement doit être renforcée, ce que s’attache à promouvoir le projet, soutenu activement par la France, de création d’une organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE). Malgré certaines réticences, exprimées notamment par les Etats-Unis, cette initiative bénéficie du soutien de l’Union européenne.

En cinquième lieu, la promotion du développement durable constitue également une priorité au niveau européen, comme en témoigne la nouvelle stratégie européenne du développement durable (SEDD) qui a été adoptée par le Conseil européen des 15 et 16 juin 2006.

Enfin, si les efforts engagés au plan national sont importants, ils souffrent d’un défaut de coordination entre les différentes instances en charge du développement durable que sont le Ministère de l’écologie et du développement durable, le Comité interministériel pour le développement durable (CIDD), la Délégué interministériel au développement durable et le Conseil national du développement durable (CNDD). Au niveau international, la présence de la France est paradoxalement insuffisante, malgré l’instauration d’un poste d’Ambassadeur itinérant délégué à l’environnement et le rôle actif joué par la Mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES).

Le Rapporteur a conclu que, si la France manifeste une réelle ambition en matière de promotion du développement durable, les moyens mobilisés ne sont pas toujours à la hauteur des déclarations. L’action de notre pays souffre d’une absence d’approche transversale dans ce domaine ce qui nuit à l’efficacité des efforts engagés. La perspective de la prochaine présidence française doit constituer l’occasion de remédier à ces lacunes dans les meilleurs délais afin que notre pays puisse jouer un rôle non seulement actif mais également effectif en faveur d’une meilleure prise en compte des priorités du développement durable dans la conduite des politiques publiques.

Sous réserve de ces observations, le Rapporteur a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « écologie et développement durable ».

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de l’écologie et du développement durable pour 2007.

LISTE DES PERSONNALITÉS ENTENDUES

A l’Assemblée nationale :

- Mme Sylvie Bermann, Directrice des Nations Unies et des organisations internationales, Ministère des affaires étrangères

- M. Christian Brodhag, Délégué interministériel au développement curable

- M. Henry de Cazotte, Directeur de la Communication, Agence française de développement (AFD)

- M. Denys Gauer, Ambassadeur itinérant délégué à l’environnement, Ministère des affaires étrangères

- M. Jean-Claude Gazeau, Président de la mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES)

- M. Franck Jésus, Chef de bureau de l’Environnement et de l’Agriculture (POLSEC4), Conseiller Environnement du Directeur des relations internationales, Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie

- M. Mustapha Kleiche, Département des relations stratégiques, Agence française de développement (AFD)

- Mme Aline Kuster Menager, Chef du service des relations internationales au Ministère de l’écologie et du développement durable

- Mme Emmanuelle Muhlenhover, conseillère diplomatique de la Ministre de l’écologie et du développement durable

- Mme Claire Tutenuit, Déléguée générale de l’Association des entreprises pour la réduction de l’effet de serre (AERES)

- M. Paul Watkinson, Chargé de mission international, mission interministérielle sur l’effet de serre (MIES)

A Bruxelles :

- M. François Gave, Conseiller sur l’écologie et le développement durable, Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne

- Mme Eleni Kopanezou, Chef d’unité « développement durable » à la DG énergie et transports, Commission européenne

- M. Pierre Schellekens, Directeur adjoint du cabinet de M. Stavros Dimas, Commissaire pour l’environnement

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