N° 3363 annexe 1 - Rapport de M. Jérôme Chartier sur le projet de loi de finances pour 2007 (n°3341)



N
° 3363

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2006

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2007 (n° 3341),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 1

ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT 

Rapporteur spécial : M. Jérôme CHARTIER

Député

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INTRODUCTION 9

I.– UN MINISTÈRE RÉSOLUMENT RÉFORMATEUR 11

A.– MODERNISATION, RATIONALISATION ET EFFICACITÉ 11

1.– Le contrat de modernisation, une démarche novatrice 11

2.– Le renforcement de la cohérence de l’action de l’État à l’étranger 13

3.– La rationalisation des réseaux 16

B.– UNE GESTION DES CRÉDITS DYNAMISÉE GRÂCE À LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES 16

1.– 2005, année de préparation à la mise en œuvre de la LOLF 16

2.– 2006, première année de gestion en mode LOLF 22

II.– UN PROJET DE BUDGET VERTUEUX QUI ASSURE LE FINANCEMENT DES PRIORITÉS 29

A.– LE PROGRAMME ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE 31

1.– La maîtrise des dépenses de fonctionnement et d’investissement 32

2.– La consolidation des crédits en faveur de l’action européenne 37

3.– La priorité accordée aux contributions internationales 39

4.– La contraction des crédits de coopération militaire et de défense 45

B.– LE PROGRAMME RAYONNEMENT CULTUREL ET SCIENTIFIQUE 46

1.– La légère hausse des crédits destinés à la promotion de la langue et de la culture françaises 48

2.– Le maintien des moyens en faveur des échanges scientifiques, techniques et universitaires 54

3.– La priorité accordée à l’AEFE 56

C.– LE PROGRAMME FRANÇAIS À L’ÉTRANGER ET ÉTRANGERS EN FRANCE 60

1.– La légère progression des crédits d’animation du réseau consulaire 61

2.– Une priorité : la mise en place de la biométrie 66

3.– La baisse des moyens consacrés à la prise en charge des réfugiés 69

III.– L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE DÉLIVRANCE DES VISAS SCHENGEN : UNE IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ 75

A.– DES OBJECTIFS AMBITIEUX ONT PRÉSIDÉ À LA CRÉATION DE L’ESPACE SCHENGEN 76

1.– La lente mise en œuvre des accords de Schengen 76

2.– La France, acteur majeur de l’espace Schengen 79

B.– L’EXPLOITATION SYSTÉMATIQUE DES FAILLES DU SYSTÈME NÉCESSITE UNE REMISE À PLAT DU DISPOSITIF 81

1.– Une collaboration insuffisante entre les différents acteurs 81

2.– Une pression très forte, source de dérives 88

3.– Des effectifs insuffisants et parfois démotivés 95

4.– Les effets pervers du dispositif de retour sur recettes 96

EXAMEN EN COMMISSION 99

AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 101

ANNEXE 103

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 98 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial qui a pu, in fine, travailler avec la totalité des réponses.

Votre Rapporteur spécial remercie les services du ministère pour leur efficacité et leur disponibilité.

Votre Rapporteur spécial tient plus particulièrement à remercier, pour leur accueil chaleureux et leur collaboration précieuse :

– M. Serge Telle, Ambassadeur de France à Monaco ;

– M. Bernard Émié, Ambassadeur de France au Liban ;

– M. Nicolas Suran, Premier conseiller, alors Chargé d’affaires de l’Ambassade de France en Syrie ;

– M. Gérard Araud, alors Ambassadeur de France en Israël ;

– M. Alain Rémy, Consul général à Jérusalem ;

– Mme Joëlle Bourgois, Ambassadeur de France en Belgique ;

– M. Pierre Sellal, Ambassadeur Représentant permanent de la France auprès de l’Union européenne ;

– M. Patrick Fers, Consul général à Liège ;

– Mme Jocelyne Caballero, Consul général à Anvers ;

– M. Jean-Christophe Peaucelle, Consul général à Istanbul ;

– M. Jean Cadet, alors Ambassadeur de France en Russie ;

– Mme Édith Guyot-Nowak, Consul à Moscou ;

– M. Gilles Bienvenu, Consul général à Casablanca,

ainsi que leurs collaborateurs.

Synthèse

Les crédits inscrits sur la mission Action extérieure de l’État s’élèvent à 2.264,3 millions d’euros en crédits de paiement et 2.565,7 millions d’euros en autorisations d’engagement. Si les crédits de paiement apparaissent en baisse de 4,7 % par rapport à 2006, à structure constante, les crédits de la mission progressent de 3,6 %.

Les crédits de fonctionnement, d’intervention et d’investissement augmentent de 6 % tandis que les crédits de personnel sont réduits de 0,6 %.

Après avoir diminué de 76 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2006, les effectifs inscrits dans le plafond d’autorisation des emplois devraient baisser de 109 ETPT (122 ETPT supprimés dans le cadre du contrat de modernisation et 13 ETPT transférés depuis la mission Direction de l’action du Gouvernement), pour atteindre 13.480 ETPT. 80 d’entre eux devraient ainsi être supprimés sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde, 21 ETPT sur le programme Rayonnement culturel et scientifique et 8 ETPT sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France.

Hors dépenses de personnel, les crédits du programme Action de la France en Europe et dans le monde s’établissent à 917,6 millions d’euros, en hausse de 7,2 % à structure constante. Cette progression bénéficie à titre principal aux contributions que la France verse aux organisations internationales, qui augmentent de 60 millions d’euros, tandis que la maîtrise des dépenses de fonctionnement et d’investissement de l’administration centrale et du réseau s’inscrit dans le cadre des engagements du contrat de modernisation et que les crédits de coopération militaire et de défense diminuent.

La progression des crédits du programme Rayonnement culturel et scientifique à 436 millions d’euros (+ 1,8 % à structure constante et hors dépenses de personnel) devrait principalement bénéficier à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, qui voit sa dotation passer de 324,3 à 332,6 millions d’euros. Les crédits destinés à la promotion de la langue et de la culture françaises devraient légèrement progresser (+ 1 %), pour dépasser 57 millions d’euros, tandis que ceux demandés au titre des échanges scientifiques, techniques et universitaires devraient être consolidés à hauteur de 43,5 millions d’euros. Un effort particulier devrait être mené en faveur des bourses destinées aux étudiants, qui devraient être dotées de 18,4 millions d’euros.

Enfin, si l’on exclut les dépenses de personnel, les crédits demandés au sein du programme Français à l’étranger et étrangers en France connaissent une forte progression, de l’ordre de 15 %, pour s’établir à près de 98 millions d’euros. La priorité est accordée à la mise en place des visas biométriques : 16 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour l’équipement des postes consulaires. Si les crédits destinés à la protection et à l’aide sociale aux Français établis hors de France sont consolidés, ceux consacrés à la prise en charge des réfugiés reculent, en particulier la subvention versée à l’OFPRA, qui passe de 49 à 45,56 millions d’euros.

Ce n’est qu’après la réunion de votre commission des Finances que votre Rapporteur spécial a appris qu’une nouvelle correction devait être apportée, très prochainement, à la répartition de la masse salariale entre les différents programmes relevant du ministère des Affaires étrangères, si bien que certains chiffres mentionnés dans le compte rendu de la réunion de la Commission peuvent différer de ceux figurant dans le présent rapport.

INTRODUCTION

Les crédits demandés dans le projet de loi de finances au titre de la mission Action extérieure de l’État traduisent les engagements pris dans le cadre du contrat triennal de modernisation du ministère conclu avec le ministère délégué au Budget et à la réforme de l’État le 18 avril dernier. Reflétant la poursuite des efforts d’économies du ministère ainsi que la mise en place de mécanismes de gestion plus vertueux et efficaces, ils devraient permettre d’assurer le financement des priorités, en particulier l’équipement de nouveaux postes consulaires dans la perspective de la généralisation de la délivrance des visas biométriques.

Votre Rapporteur spécial s’est particulièrement intéressé en 2006 aux conditions de délivrance des visas Schengen, qui représentent 92 % des visas délivrés par les consulats français. Afin de mieux cerner les difficultés rencontrées, votre Rapporteur spécial s’est rendu dans plusieurs postes consulaires, à Istanbul, Moscou et Casablanca.

La délivrance des visas constitue un enjeu de première importance. L’objectif est de concilier la lutte contre les détournements de procédure conduisant à l’immigration clandestine et le développement des échanges humains, culturels et économiques de la France avec ses partenaires. À cet égard, la procédure actuelle de délivrance des visas Schengen est loin d’être satisfaisante : ses modalités de mise en œuvre conduisent à l’engorgement des services consulaires français, avec comme conséquence le mécontentement de nombreux demandeurs de visas et une inefficacité dans la lutte contre les détournements de procédure à des fins d’immigration clandestine. Face aux nouveaux défis auxquels la France est confrontée, le dispositif actuel doit impérativement évoluer vers une plus grande rigueur et une coopération accrue.

Votre Rapporteur spécial formule donc plusieurs propositions afin d’améliorer les conditions de délivrance des visas, parmi lesquelles le rapprochement des services d’instruction des visas des pays de l’espace Schengen et une plus grande association des personnels du ministère de l’Intérieur au travail d’instruction des demandes de visas.

Votre Rapporteur spécial tient tout particulièrement à remercier M. Philippe Douste-Blazy, ministre des Affaires étrangères, de l’attention qu’il a bien voulu accorder à ses travaux et se félicite de la création d’une mission de réflexion, composée d’un ambassadeur et d’un préfet, dont l’objet sera d’organiser une coopération accrue entre les services du ministère des Affaires étrangères et ceux du ministère de l’Intérieur.

S’inscrivant dans la suite de la stratégie ministérielle de réforme menée depuis 2004, le contrat triennal de modernisation du ministère des Affaires étrangères, conclu le 18 avril 2006 entre le ministre des Affaires étrangères et le ministre délégué au Budget et à la réforme de l’État résulte d’une démarche particulièrement innovante. Si des contrats similaires ont été conclus dans le passé entre des directions du ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie et la direction du Budget, c’est la première fois qu’un tel contrat est passé entre deux ministères.

Ce contrat définit le cadre budgétaire dans lequel va s’inscrire l’action du ministère des Affaires étrangères entre 2006 et 2008. Pluriannuel, il donne au ministère une meilleure visibilité sur l’évolution de ses effectifs et de ses moyens financiers, celui-ci s’engageant par ailleurs à mener des réformes essentielles pour le bon fonctionnement des réseaux de l’État à l’étranger.

Seuls sont concernés les moyens consacrés aux dépenses de personnel, de fonctionnement et d’investissement. Si les crédits d’intervention sont exclus, ceux relatifs aux contributions obligatoires aux organisations internationales font néanmoins l’objet d’un traitement particulier, qui consiste notamment en une opération de « rebasage » de ces crédits. Votre Rapporteur spécial y reviendra.

Le contrat de modernisation présente ainsi seize réformes structurelles que le ministère s’engage à mener sur la période 2006-2008, assorties de quatre axes de développement. Les deux parties s’engagent par ailleurs sur quatre accords de gestion spécifiques relatifs aux dépenses ou aux recettes de l’État à l’étranger.

LE CONTRAT DE MODERNISATION DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

* 16 réformes structurelles :

– Développer une gestion prévisionnelle et consolidée des ressources humaines

– Moderniser la politique de l’emploi local

– Dynamiser la gestion de l’encadrement supérieur du ministère

– Relancer le pilotage interministériel de l’action de l’État à l’étranger

– Créer des services administratifs et financiers uniques interministériels

– Externaliser les tâches d’impression et de fonctionnement de la valise fret

– Professionnaliser la politique domaniale et immobilière

– Maîtriser les fonctions de soutien et de contrôle (mutualisation des achats)

– Moderniser la chaîne de la dépense au sein de l’administration centrale

– Mettre en place un nouveau modèle de sécurité active pour les postes diplomatiques et consulaires

– Simplifier les démarches auprès des consulats et rationaliser le travail consulaire

– Adapter le réseau consulaire dans l’Union européenne

– Moderniser les services d’aide à l’expatriation

– Adapter le réseau culturel dans l’Union européenne à 15

– Rénover le dispositif de coopération dans la zone de solidarité prioritaire et mettre en œuvre la réforme de l’assistance technique

– Accroître l’efficacité de l’exercice de la tutelle sur les opérateurs relevant du ministère

* 4 axes de développement :

– Améliorer la gestion des carrières et revoir les critères de rémunération des agents

– Renforcer la présence française dans les institutions européennes

– Moderniser le système d’information

– Accroître l’attractivité de la France dans les domaines universitaire et scientifique

* 4 accords de gestion portant sur :

– La couverture du risque de change sur les rémunérations

– La couverture du risque de change sur les contributions obligatoires aux organisations internationales et la réévaluation des crédits destinés aux OMP

– L’intéressement aux produits de cessions immobilières

– Le retour sur recettes issues des frais de traitement des demandes de visas

Votre Rapporteur spécial reviendra sur le détail de ces mesures.

Ces réformes, toutes assorties d’objectifs et d’indicateurs précis, devront être conduites dans le cadre budgétaire suivant :

– réduction des dépenses de personnel (hors pensions) de 909,8 millions à 879,4 millions d’euros (soit une baisse de 3,34 %) et des effectifs inscrits dans le plafond d’autorisation d’emploi du ministère de 504 ETPT (739 ETPT si l’on tient compte de la baisse enregistrée en 2006) entre 2006 et 2008. Une bonne part de la réduction des effectifs (320 sur 2005-2008) résulte toutefois du transfert des assistants techniques à l’Agence française de développement ;

– reconduction d’une enveloppe de crédits de fonctionnement et d’investissement de 271,8 millions d’euros.

L’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires étrangères dresseront pour le début de l’année 2008 le bilan chiffré, en termes de coût et de performance, de chacune des réformes sur laquelle le ministère s’est engagé.

Les réformes proposées constituent le prolongement des chantiers lancés dans le cadre de la stratégie ministérielle de réforme du ministère. L’intérêt de l’exercice est donc principalement de donner au ministère une visibilité plus grande sur les moyens à sa disposition ainsi que d’instaurer certains mécanismes de gestion qui s’avéraient indispensables, comme les dispositifs de couverture du risque de change ou l’intéressement aux produits de cessions immobilières.

À la suite du rapport remis par M. Raymond-François Le Bris au Premier ministre (1) et des conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur les services de l’État à l’étranger (2), un certain nombre de mesures ont récemment été prises afin de renforcer la cohérence et la lisibilité de l’action des services de l’État à l’étranger.

Pour la représentation nationale, les efforts menés par le ministère des Affaires étrangères et les ministères possédant un réseau à l’étranger trouvent leur première traduction dans le document de politique transversale Action extérieure de l’État, qui propose une vision consolidée et interministérielle de l’action extérieure française. Par rapport à la première version qui avait été présentée l’année dernière, le DPT Action extérieure de l’État apparaît nettement enrichi et comporte, enfin, des données budgétaires ! Il apparaît désormais comme un document plus complet que l’ancien « jaune » budgétaire, lequel, récapitulant les crédits de toute nature concourant à l’action extérieure de l’État, a été supprimé. Si la fusion des deux documents répond au souhait de mise en cohérence des documents budgétaires formulé par la MEC, elle ne peut constituer une alternative acceptable à la proposition de création d’une mission interministérielle regroupant l’ensemble des moyens consacrés par la France à son action extérieure, formulée par la mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (3), la MEC et votre Rapporteur spécial (4).

Ainsi que l’a souligné la mission d’évaluation et de contrôle sur les services de l’État à l’étranger, la principale faiblesse de notre dispositif de représentation à l’étranger réside dans l’absence « d’instance en charge de la définition des priorités politiques et de l’allocation des moyens [ainsi que] de la coordination de l’action extérieure de la France » (5).

À cet égard, la mise en sommeil du Comité interministériel des moyens de l’État à l’étranger (CIMEE) (6) dès 1997, soit trois ans seulement après sa création, témoignait d’un manque manifeste de volonté politique. Aussi, votre Rapporteur spécial ne peut-il que se réjouir de la réactivation de ce comité, qui s’est de nouveau réuni, le 25 juillet dernier, sous la présidence du Premier ministre.

Lors de cette réunion, le CIMEE a adopté un ensemble de mesures afin de renforcer l’unité, la cohérence et la rationalisation de l’action de l’État à l’étranger.

Tout d’abord, pour assurer l’unité de l’action de l’État à l’étranger, il a été décidé d’une part, de regrouper au sein d’un document unique, le plan d’action de la France (ou de l’ambassade), tous les plans d’action qui peuvent être actuellement produits par les différents services de l’État représentés à l’étranger et de garantir sa cohérence avec les documents cadres de partenariat, lorsqu’ils existent ; d’autre part de favoriser l’implantation des services de l’État sur un site unique, le campus diplomatique.

Ensuite, pour garantir la cohérence de l’action des services de l’État à l’étranger, les services administratifs et financiers uniques, qui ne concernent actuellement que les services relevant du ministère des Affaires étrangères, devraient devenir interministériels (7). Les systèmes d’information et les messageries des différents services devront faire l’objet d’une interconnexion. Enfin, le CIMEE a décidé de relancer la réalisation de l’enquête annuelle sur les moyens de l’État à l’étranger. Coordonnée par le ministère des Affaires étrangères, elle devra être réalisée chaque année et soumise au Parlement en même temps que le document de politique transversale (DPT) sur l’action extérieure de l’État. Chaque ministère sera tenu de fournir une synthèse de ses moyens consacrés à l’action extérieure en incluant les opérateurs dont il a la tutelle, ce qui constitue un progrès par rapport au précédant champ d’action de l’enquête.

En dernier lieu, dans un souci de rationalisation et de meilleure gestion, le CIMEE a adopté la directive nationale d’orientation des ambassades (DNO), qui a pour objectif de proposer une typologie des postes diplomatiques en fonction des enjeux politiques et d’allouer les moyens humains, financiers et techniques en conséquence. Ce document précise également le rôle et la mission des ambassades de France. Votre Rapporteur spécial salue l’élaboration de ce document, fort utile, inspiré des directives nationales d’orientation relatives aux préfectures qui ont été mises en place dès 2002 par le ministère de l’Intérieur. La directive nationale d’orientation des ambassades devrait en effet contribuer à renforcer la lisibilité et la cohérence de l’action de l’État à l’étranger. Surtout, elle apparaît comme un outil indispensable à une meilleure allocation des moyens, en fonction des priorités de la politique étrangères de la France. Un premier travail de classement a été réalisé à partir de l’identification de sept catégories de postes (8) ont ainsi été identifiés. Votre Rapporteur spécial espère que le ministère parviendra à tirer parti au mieux de ce nouvel outil, qui lui servira effectivement à assurer une allocation optimale des moyens humains et financiers.

Un plan pluriannuel de redéploiement géographique des effectifs de l’État à l’étranger a également été approuvé, qui a pour objet d’alléger le dispositif dans les pays de l’Union européenne à quinze et de redéployer les moyens ainsi libérés vers les pays émergents. Sont concernés les réseaux diplomatique et consulaire (9), économique (10), culturel et de coopération (11), ainsi que ceux des ministères de l’Intérieur et de la Défense (12).

Bon nombre de ces mesures répondent aux propositions formulées par la MEC sur les services de l’État à l’étranger, ce dont se félicite votre Rapporteur spécial.

Votre Rapporteur spécial ne reviendra pas sur la présentation des réseaux diplomatiques, consulaires et culturels du ministère des Affaires étrangères, qui a fait l’objet d’un travail approfondi de la MEC sur les services de l’État à l’étranger.

Il convient toutefois de souligner que l’année 2006 a été marquée par la décision d’ouvrir deux ambassades, une à Monrovia (Libéria) et une au Monténégro, ainsi que deux antennes diplomatiques, l’une à Juba (Soudan) et l’autre à Erbil (Irak). De nouveaux postes consulaires ont été transformés en consulats généraux à gestion simplifiée à Édimbourg (Royaume-Uni), Atlanta, Houston, Los Angeles, Miami, San Francisco (États-Unis) et à Séville (Espagne).

En 2007, il est de nouveau prévu de transformer des postes consulaires en consulats généraux à gestion simplifiée à Naples et Turin-Gênes en Italie ainsi qu’à Saint-Louis au Sénégal.

À la suite de la mission qu’il a menée en Belgique les 7 et 8 septembre derniers, votre Rapporteur spécial doute de l’opportunité de maintenir deux consulats généraux à gestion simplifiée à Anvers et Liège. Compte tenu de la géographie de la Belgique et de son organisation politique, des missions dévolues aux consuls généraux en place, qui s’acquittent remarquablement bien de leur tâche, et des coûts générés par le maintien de deux représentations françaises, votre Rapporteur spécial suggère de supprimer ces consulats généraux et de placer à Bruxelles, auprès de l’Ambassadeur de France en Belgique, deux consuls, l’un en charge du suivi de la Wallonie, l’autre de la Flandre.

L’année 2005 a été caractérisée par l’extension et l’approfondissement de l’expérimentation lancée en 2004, afin de préparer les services du ministère à l’entrée en vigueur des nouvelles règles budgétaires, le 1er janvier 2006. Les postes diplomatiques de dix pays ont ainsi participé à l’expérimentation, ce qui a permis de mettre en évidence certaines difficultés (notamment les limites de la mise en œuvre de la fongibilité des crédits au sein d’un « budget pays ») et de souligner la nécessité de mener un effort particulier en faveur de la formation des gestionnaires. Un nouveau dialogue de gestion s’est mis en place : un calendrier strict (détermination des budgets initiaux par poste et par programme en début de gestion, puis rendez-vous de mi-gestion) s’est substitué à l’examen des décisions « au fil de l’eau » et des arbitrages ont été rendus au niveau des responsables de programme pour déterminer les propositions auxquelles, dans un contexte d’enveloppe limitative, il devait être donné suite par redéploiement, conformément aux priorités définies.

Au-delà des expérimentations menées, la perspective de l’entrée en vigueur de l’intégralité des dispositions de la LOLF le 1er janvier 2006 a eu des conséquences sur la gestion de l’ensemble des crédits du ministère.

Après avoir rencontré des difficultés de gestion manifestes en 2003, au point de se retrouver en cessation de paiement sur plusieurs postes budgétaires, le ministère des Affaires étrangères a été épargné par les mesures de régulation budgétaire en 2004. En revanche, le ministère a été concerné par de nombreuses mesures de régulation budgétaire en 2005, qui n’ont toutefois pas eu les mêmes conséquences qu’en 2003.

Après les difficultés rencontrées en 2003, le ministère des Affaires étrangères avait obtenu en 2004, conformément aux instructions du Président de la République, le report de la totalité des crédits non consommés en 2003, soit 167,1 millions d’euros, et avait été exonéré de toute mesure de régulation budgétaire.

En revanche, en 2005, le ministère a fait l’objet de mesures de régulation budgétaire tout au long de l’année.

Les crédits votés en loi de finances initiale ont été complétés à hauteur de 222,3 millions d’euros par voie de reports (64,6 millions d’euros), de fonds de concours (15,6 millions d’euros), d’ouvertures de crédits à titre d’avance (103,3 millions d’euros) et au titre de dépenses accidentelles (11,2 millions d’euros) ainsi que par loi de finances rectificative (27,6 millions d’euros). Dans le même temps, 156,1 millions d’euros ont été annulés et 70,2 millions d’euros transférés vers d’autres ministères.

GESTION DES DÉPENSES ORDINAIRES ET DES DÉPENSES EN CAPITAL
CRÉDITS DE PAIEMENT – 2005

(en millions d’euros)

 

LFI 2005

Reports

Transferts/
répartitions

Annulations

Fonds de concours

Décrets d’avance et dépenses accidentelles

LFR

Crédits
disponibles

Titre III

1.488,11

8,75

– 70,24

– 1,11

3,03

0,13

1.428,67

Titre IV

1.913,59

22,00

1,62

– 133,96

3,50

114,46

1.921,21

Total dépenses ordinaires

3.401,70

30,75

– 68,62

– 135,07

6,53

114,46

0,13

3.349,88

Titre V

92,94

18,40

– 1,55 

– 5,25

7,75

112,29

Titre VI

917,25

15,48

– 15,46

1,34

27,50

946,11

Total dépenses en capital

1.010,19

33,88

– 1,55

– 20,71

9,09

27,50

1.058,40

Total crédits de paiement

4.411,89

64,64

– 70,18

– 155,78

15,63

114,46

27,63

4.408,28

Source : rapport annuel du contrôleur financier.

 Alors que le ministère avait demandé le report de 89,8 millions d’euros de 2004 sur 2005, seuls 64,6 millions d’euros ont été reportés.

Ces crédits disponibles, à l’exception des crédits ouverts en collectif de fin d’année et au titre de rattachement de fonds de concours tardifs, ont fait l’objet d’une mise en réserve à hauteur de 38,5 millions d’euros. Par ailleurs, les crédits du budget général ouverts en loi de finances initiale ont été concernés par une première mise en réserve, constituée « à titre de précaution » dès le mois de février (à hauteur de 87,8 millions d’euros), puis par un second gel en juillet (25 millions d’euros). La plupart de ces crédits ont in fine été annulés.

 Outre ces reports, les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2005 ont été complétés à hauteur de 157,7 millions d’euros.

Des crédits ont ainsi été ouverts par décrets portant ouverture pour dépenses accidentelles les 13 et 25 janvier (13), afin de participer au financement des secours d’urgence intervenus à la suite du tsunami en Asie, à hauteur de 10,2 millions d’euros, et, le 3 novembre, à la suite de la catastrophe aérienne intervenue au Venezuela (0,96 million d’euros). 103,3 millions d’euros ont par ailleurs été ouverts par décret portant ouverture à titre d’avance : 10 millions d’euros le 25 février (14), pour abonder le fonds destiné à financer les dépenses d’action humanitaire en faveur des pays d’Asie du Sud-Est touchés par le tsunami survenu le 26 décembre 2004 (15), et 93,3 millions d’euros le 1er décembre au titre des contributions obligatoires versées pour le financement des opérations de maintien de la paix, le montant inscrit en loi de finances initiale ayant été, comme chaque année, largement sous-estimé. Ce montant représente en effet près de 68,5 % de la dotation initiale, inscrite à l’article 12 du chapitre 42-31. Les crédits destinés aux opérations de maintien de la paix sont difficilement évaluables, compte tenu du caractère généralement soudain des crises auxquelles la communauté internationale doit faire face ainsi que des variations liées au taux de change par rapport au dollar. Il n’en demeure pas moins que le montant inscrit chaque année en loi de finances initiale mériterait d’être réévalué.

27,63 millions d’euros ont été ouverts par le collectif de fin d’année. Il s’est tout d’abord agi d’honorer le dernier appel de fonds du Fonds européen de développement (FED) pour 2005. Celui-ci, d’un montant de 53,46 millions d’euros, ne pouvait en effet être couvert par les crédits disponibles, qui s’élevaient à 39,74 millions d’euros. Ensuite, 14 millions d’euros ont été destinés à l’Agence française de développement (AFD), afin de lui permettre d’assurer le financement de ses aides à projets. En dernier lieu, 129.806 euros ont été inscrits sur le chapitre regroupant les prestations sociales versées par l’État, afin d’ajuster les crédits aux besoins.

Enfin, 15,63 millions d’euros issus de fonds de concours ont été rattachés au budget du ministère des Affaires étrangères, dont plus de la moitié (8,61 millions d’euros) correspondent aux prélèvements effectués sur les émoluments des personnels du ministère et des établissements d’enseignement logés par l’État à l’étranger.

 Le montant total des crédits annulés en cours d’année s’est élevé à 156,1 millions d’euros.

Une première annulation a porté, le 25 février, sur 2 millions d’euros inscrits sur le chapitre 42-13 relatif à l’appui à des initiatives privées ou décentralisées. Cette annulation a permis de gager partiellement l’ouverture de 10 millions d’euros sur le chapitre 42-15.

Une deuxième annulation est intervenue le 29 avril 2005, pour un montant de 22,34 millions d’euros, se répartissant entre les crédits destinés aux contrats de désendettement-développement (20 millions d’euros), les subventions aux opérateurs de l’action audiovisuelle (1,4 million d’euros), les crédits destinés à la coopération militaire et de défense (0,6 million d’euros) et les moyens généraux des services (0,34 million d’euros).

La troisième annulation, intervenue le 3 novembre, s’est élevée à 103,78 millions d’euros. Ont ainsi été annulés :

– 77,50 millions d’euros sur les crédits destinés aux contrats de désendettement-développement ;

– 14,14 millions d’euros sur le Fonds de solidarité prioritaire ;

– 5,25 millions d’euros sur les investissements exécutés par l’État ;

– 3,30 millions d’euros destinés à l’appui à des initiatives privées ou décentralisées ;

– 1,32 million d’euros sur les subventions d’investissement destinées à l’action extérieure et à l’aide au développement. ;

– 1,16 million d’euros sur le chapitre relatif à la coopération militaire et de défense ;

– 1,11 million d’euros sur les frais de réception et de voyages.

La dernière annulation, du 1er décembre 2005, a porté sur 28 millions d’euros, 24 millions d’euros sur le chapitre regroupant les crédits destinés à la coopération internationale et au développement et 4 millions d’euros sur les concours financiers. Ces annulations ont eu pour objet de gager en partie une ouverture de crédits à hauteur de 744,60 millions d’euros, destinés à assurer le financement de dépenses urgentes, parmi lesquelles la contribution de la France aux opérations de maintien de la paix.

 Les différentes opérations de transferts et virements se sont soldées par une diminution des crédits de 70,18 millions d’euros. 20 millions d’euros ont notamment été transférés au ministère en charges des affaires sociales, afin d’assurer l’hébergement des demandeurs d’asile.

Les crédits ouverts, soit 4.408,26 millions d’euros, ont été utilisés à hauteur de 98,4 %, reflétant ainsi les efforts menés par le ministère afin de gérer au mieux les crédits mis à sa disposition. Le taux de consommation des crédits, en progression constante depuis 2003, est ainsi passé de 97,5 % en 2004 à 98,4 % en 2005.

Si les mises en réserve et annulations intervenues en cours d’année ont conduit les services gestionnaires à adopter une attitude de précaution, elles n’ont eu qu’un impact limité sur la gestion. Il est vrai que le ministère n’a pas été aussi fortement touché par la régulation qu’en 2003.

Aussi, au cours de l’exercice 2005, le ministère a pu solder une grande partie de ses arriérés courants à l’égard des autres administrations, en particulier la dette à l’égard des écoles militaires. Toutefois, certains reports de charge n’ont pu être couverts. C’est notamment le cas d’une contribution de 14 millions d’euros due au CERN au titre du remboursement de la fiscalité des agents français relevant de cet organisme, dont la charge a été transférée, dans le cadre de la nouvelle nomenclature budgétaire, à la mission Recherche et enseignement supérieur. Par conséquent, le ministère n’a conservé d’arriérés qu’à l’égard du ministère de la Défense, se répartissant entre 6,9 millions d’euros relatifs aux déplacements ministériels effectués par vol ETEC et 3,5 millions d’euros correspondant aux déplacements des gendarmes de sécurité des ambassades.

Par ailleurs, certains chapitres se sont caractérisés par la faiblesse de l’utilisation des crédits initialement inscrits, tandis que d’autres se signalaient par une sous-dotation manifeste. Cela a notamment été le cas respectivement du chapitre 41-43 regroupant les concours financiers destinés aux aides budgétaires d’urgence et aux contrats de désendettement-développement et du chapitre 42-31 relatif aux contributions obligatoires de la France. Le premier, doté en loi de finances initiale de 123 millions d’euros, n’a vu ses crédits consommés qu’à hauteur de 24,20 millions d’euros, soit un peu plus que les 20 millions d’euros initialement inscrits pour les aides budgétaires d’urgence, tandis que les 103 millions d’euros initialement prévus pour honorer les contrats de désendettement-développement ont été principalement annulés et pour partie transférés, la négociation des contrats avec les pays bénéficiaires, Cameroun et Côte d’Ivoire, n’ayant pu aboutir. En sens inverse, le chapitre regroupant les crédits relatifs aux contributions obligatoires de la France à des organisations internationales, a été, comme chaque année, largement sous-doté en loi de finances initiale et a dû être abondé à hauteur de 93,3 millions d’euros en fin d’année.

Compte tenu du taux élevé de consommation des crédits, les reports de crédits de l’exercice 2005 sur l’exercice 2006 ont été très limités, en particulier au regard des reports enregistrés les années précédentes : ils se sont élevés à 34,73 millions d’euros pour l’ensemble des crédits relevant du ministère (dont 17,74 millions d’euros pour la mission Action extérieure de l’État), contre 64,64 millions d’euros entre 2004 et 2005 et 167,11 millions d’euros entre 2003 et 2004. Cette diminution respecte l’article 15 de la LOLF, qui précise que les crédits de paiement disponibles sur un programme à la fin de l’année peuvent être reportés sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs, dans la limite de 3 % des crédits initiaux, ce plafond pouvant être majoré par une disposition de loi de finances dans le cas des titres qui ne concernent pas les dépenses de personnel. Les reports effectués, qui représentent 0,7 % des crédits ouverts en loi de finances initiale, correspondent, dans leur intégralité, à des reports de charges réelles engagées à la fin de l’année mais dont la liquidation n’avait pu intervenir avant la clôture de l’exercice.

La baisse du nombre des emplois budgétaires engagée depuis 2003 s’est encore accentuée en 2005. Ceux-ci se sont élevés à 9.141 emplois, contre 9.293 emplois en 2004 et 9.409 emplois en 2003. 152 emplois budgétaires ont donc été supprimés en 2005 (– 1,63 %). Depuis 2003, la baisse est de 268 emplois (– 2,85 %).

La réduction nette de 152 emplois budgétaires résulte de différentes opérations : suppression de 110 postes s’inscrivant dans le cadre de la restructuration du réseau à l’étranger et de 2 postes en administration centrale, création de 12 emplois (dont 7 en administration centrale afin de préparer la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances) et transfert de 52 emplois (37 au bénéfice de l’OFPRA, 14 vers l’AEFE et 1 au profit du ministère de la Défense).

4 emplois de volontaires internationaux ont par ailleurs été supprimés et 2 emplois de cadres contractuels créés, afin de renforcer l’équipe en charge du contrôle de gestion au ministère.

Par rapport à 2004, la répartition des emplois entre l’administration centrale (3.881) et l’étranger (5.260) s’est légèrement modifiée en faveur de l’administration centrale.

Il convient d’ajouter à ces emplois environ 12.000 recrutés locaux, parmi lesquels 4.773 sont affectés dans les centres culturels et 295 dans les instituts de recherche.

Au niveau de l’administration centrale, le découpage en programmes, avec la désignation, à leur tête, de « responsables de programme », a eu des effets structurants : l’organisation de la Direction générale de l’administration, de la Direction générale de la coopération internationale et du développement et de la Direction des Français à l’étranger et des étrangers en France a été modifiée par un arrêté en date du 8 mars 2006.

La création de deux documents de politique transversale, l’un relatif à l’action extérieure de l’État, l’autre à l’aide publique au développement, a contribué à accroître le rôle de coordonnateur du ministère des Affaires étrangères, chargé de la confection de ces deux documents, et à renforcer la collaboration interministérielle.

La définition des objectifs et des indicateurs de performance ainsi que leur déclinaison sur le terrain ont contraint l’ensemble des services du ministère à réfléchir sur le sens de leur action et les moyens d’atteindre une plus grande efficience. La LOLF a ainsi permis de sensibiliser aux enjeux budgétaires des services qui en étaient jusqu’à présent éloignés, comme les directions politiques et géographiques du ministère.

En revanche, les ambassadeurs ont eu le sentiment qu’ils disposaient de moins de marge de manœuvre que lorsque les premiers « budgets pays » avaient été mis en place, du fait de la « verticalisation » des moyens générée par l’absence de fongibilité des crédits entre programmes.

Les délégations de crédits ont pu être totalement mises en place par voie électronique dès le mois de janvier 2006. Aucun incident de paiement n’a donc gêné le versement de la paie des agents de droit local. Des difficultés sont en revanche apparues pour la mise en place des dépenses assimilées comptablement par la LOLF à des immobilisations – qui appellent des délégations de crédits spécifiquement identifiées. Elles ont nécessité en début d’année des reprises de crédits et de nouvelles délégations.

Afin de tenir compte des difficultés rencontrées, le dialogue de gestion avec les postes est actuellement revu : la programmation est allégée et les rendez-vous de gestion en cours d’année remplacent peu à peu le système plus « préventif » de préparation budgétaire approfondie.

S’agissant des outils informatiques et comptables, le passage d’ACCORD 1 bis à ACCORD LOLF n’a pas soulevé de difficultés majeures en administration centrale. En revanche, le ministère déplore que le système d’information sur les ressources humaines (SIRH) n’ait pu encore être mis en place. Il serait fort utile pour assurer le suivi de la masse salariale du ministère qui présente la double difficulté d’être particulièrement hétérogène et répartie entre quatre programmes. Au niveau des ambassades, l’outil COREGE de gestion et de comptabilité des postes à l’étranger, sous maîtrise d’œuvre du ministère des Affaires étrangères, poursuit le développement de son cahier des charges avec notamment la mise en place prochaine de mandats « multitiers » et le déblocage de saisie des rétablissements de TVA. L’incapacité de l’application NDL (qui sert de passerelle entre Accord et Corege) à permettre le suivi des engagements juridiques a occasionné pour les ambassades les mêmes inconvénients de saisie et les mêmes rigidités que dans les services déconcentrés de la métropole.

C’est au niveau des postes à l’étranger, en particulier les plus petits et les moins bien équipés en personnel de gestion, que les spécifications comptables de la LOLF ont entraîné les accroissements de charges les plus lourds. La création, proposée dans le présent projet de loi de finances, d’une action Réseau diplomatique au sein du programme Action de la France en Europe et dans le monde devrait permettre d’alléger la nomenclature d’exécution du programme. Il n’en reste pas moins qu’une interrogation demeure sur la nécessité d’exiger des plus petites régies diplomatiques le renseignement de nomenclatures comptables complexes. C’est dans cet état d’esprit que le ministère aborde les discussions sur la définition du périmètre du futur progiciel CHORUS, successeur d’ACCORD, dont l’application sans réserve particulière aux régies à l’étranger pourrait s’avérer contre-productive.

Enfin, il convient de souligner que les différents impératifs liés à la certification des comptes de l’État ont entraîné une collaboration accrue avec le département comptable ministériel, notamment pour établir le bilan d’ouverture ou encore le plan de développement du contrôle interne comptable.

Depuis l’entrée en vigueur de la totalité des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances le 1er janvier 2006, le champ de compétences de votre Rapporteur spécial couvre la mission Action extérieure de l’État, dont le périmètre diffère sensiblement de celui de la section budgétaire « Affaires étrangères ».

Sur cette mission, 2.377,24 millions d’euros ont été ouverts en loi de finances initiale pour 2006, se répartissant entre 1.417,95 millions d’euros pour le programme Action de la France en Europe et dans le monde, 517,65 millions d’euros pour le programme Rayonnement culturel et scientifique, 281,46 millions d’euros pour le programme Français à l’étranger et étrangers en France et, enfin, 160,18 millions d’euros pour le programme Audiovisuel extérieur.

GESTION DES DÉPENSES
CRÉDITS DE PAIEMENT – AU 30 SEPTEMBRE 2006

(en millions d’euros)

 

LFI 2006

Reports

Gels

Transferts/
répartitions

Annulations

Fonds de concours

Décrets d’avance et dépenses accidentelles

Crédits
disponibles

Programme Action de la France en Europe et dans le monde

1.417,95

15,87

– 36,58

– 38,12

7,46

1.366,58

Programme Audiovisuel extérieur

160,18

– 3,46

– 1,12

155,60

Programme Français à l’étranger et étrangers en France

281,46

1,38

– 6,92

0,12

276,04

Programme Rayonnement culturel et scientifique

517,65

0,50

– 17,39

– 3,01

0,28

498,03

Total Mission Action extérieure de l’État

2.377,24

17,75

– 57,43

– 49,17

7,86

2.296,25

Source : documents budgétaires et ministère des Affaires étrangères.

• Ces crédits ont été complétés à hauteur de 17,74 millions d’euros par arrêté en date du 28 mars portant report de crédits. C’est le programme Action de la France en Europe et dans le monde qui a bénéficié du report le plus important (15,87 millions d’euros), suivi du programme Français à l’étranger et étrangers en France (1,38 million d’euros) et du programme Rayonnement culturel et scientifique (0,50 million d’euros).

• Ainsi qu’il était précisé dans l’exposé des motifs de la loi de finances pour 2006 (16), le Gouvernement a constitué une réserve de crédits à titre de précaution, afin de faire face aux aléas de gestion et de respecter l’autorisation parlementaire, à hauteur de 5,5 milliards d’euros, en appliquant à chaque programme du budget général doté de crédits limitatifs les taux suivants :

– 0,1 % sur les crédits de paiement et autorisations d’engagement ouverts sur le titre des dépenses de personnel ;

– 5 % sur les crédits de paiement et autorisations d’engagement ouverts sur les autres titres.

La constitution de cette réserve de précaution a concerné la mission Action extérieure de l’État à hauteur de 76,85 millions d’euros, se répartissant entre 43,17 millions d’euros pour le programme Action de la France en Europe et dans le monde, 21,43 millions d’euros pour le programme Rayonnement culturel et scientifique, 8 millions d’euros pour le programme Audiovisuel extérieur et 4,24 millions d’euros pour le programme Français à l’étranger et étrangers en France.

Après la constitution de la réserve de précaution, un nouveau gel est intervenu au mois de juin, à hauteur de 1,25 million d’euros, sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France, afin de compenser un « dégel » d’un montant équivalent sur les crédits du ministère de l’Intérieur destinés à la mise en place du système européen de visas biométriques.

Afin de faire face aux besoins de financement intervenus en cours de gestion, le ministère des Affaires étrangères a obtenu, au 30 septembre 2006, le dégel de 14,51 millions d’euros. Dès le 1er janvier, un « dégel » est intervenu, à hauteur de la contribution des programmes au plan en faveur des banlieues, soit 8,07 millions d’euros. Puis, 0,46 million d’euros, correspondant aux indemnités des parlementaires européens, ont été rendus disponibles sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde. Au mois de juin, 2 millions d’euros destinés à TV5 et 1 million d’euros destinés à Radio France Internationale ont été « dégelés » sur le programme Audiovisuel extérieur, afin de permettre aux opérateurs publics de faire face à leurs engagements, 0,17 million d’euros l’ont été sur le programme Rayonnement culturel et scientifique, afin de soutenir le développement des nouveaux centres pour les études en France (CEF) et, enfin, 2,81 millions d’euros ont été rendus disponibles sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France pour assurer le financement de la mise en place des visas biométriques.

• Au cours des neuf premiers mois de l’année, 49,15 millions d’euros ont été annulés sur la mission Action extérieure de l’État, soit 2,07 % des crédits votés en loi de finances initiale. 2,72 millions d’euros ont tout d’abord été annulés le 27 mars 2006 (17), afin d’assurer le financement des actions de lutte contre la grippe aviaire. L’annulation a porté à titre principal sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde (1,52 million d’euros), puis sur les programmes Rayonnement culturel et scientifique (0,81 million d’euros), Audiovisuel extérieur (0,30 million d’euros) et Français à l’étranger et étrangers en France (0,08 million d’euros). Il s’agissait de crédits mis en réserve au début de l’année au titre de la réserve de précaution.

Une deuxième annulation est intervenue le 1er août pour un montant de 46,65 millions d’euros (18). 43 millions d’euros ont ainsi été annulés sur le titre 2 des programmes Action de la France en Europe et dans le monde (36,60 millions d’euros) et Français à l’étranger et étrangers en France (6,40 millions d’euros), afin de gager l’ouverture de 43 millions d’euros sur le titre 2 du programme Solidarité à l’égard des pays en développement de la mission Aide publique au développement. Il s’est ainsi agi de corriger le calcul initial des enveloppes de masse salariale destinées à chaque programme, qui ne tenait pas compte des différences de coûts salariaux selon les emplois occupés et les zones géographiques d’affectation. En effet, le mode de calcul retenu consistait à considérer des coûts moyens par catégorie d’emplois identiques pour tous les programmes rattachés au ministère des Affaires étrangères, ce qui a entraîné un déficit de crédits de l’ordre de 20 % sur le programme Solidarité à l’égard des pays en développement, tandis qu’un excédent équivalent était constaté sur les programmes Action de la France en Europe et dans le monde et Français à l’étranger et étrangers en France.

Par ailleurs, 3,44 millions d’euros ont été annulés afin de participer à l’indemnisation des victimes de la Shoah. C’est le programme Rayonnement culturel et scientifique qui a subi la plus forte annulation (2,18 millions d’euros), puis le programme Audiovisuel extérieur (0,82 million d’euros) et le programme Français à l’étranger et étrangers en France (0,44 million d’euros). Il s’agissait de crédits bloqués au titre de la réserve de précaution.

Compte tenu de ces annulations et des gels intervenus depuis le début de l’année, 57,43 millions d’euros demeuraient encore gelés au début du mois d’octobre.

Sur ces 57,43 millions d’euros, 4,5 millions d’euros viennent d’être rendus disponibles, dont 2,8 millions d’euros sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France et 1,70 million d’euros virés du programme Audiovisuel extérieur vers le programme Français à l’étranger et étrangers en France (décret du 6 octobre). Il s’agit ainsi de permettre le financement de la mise en place des visas biométriques dans le réseau consulaire français. Le coût de l’extension prévue en 2006, qui concerne 16 consulats au-delà des 5 équipés en 2005, est en effet évalué à 4,5 millions d’euros.

• Au 29 septembre 2006, 7,86 millions d’euros avaient été rattachés à la mission par voie de fonds de concours : 7,46 millions d’euros sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde, 0,28 million d’euros sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France et 0,12 million d’euros sur le programme Rayonnement culturel et scientifique. Il s’agit principalement des prélèvements réalisés sur les émoluments des personnels du ministère des Affaires étrangères et des établissements d’enseignement logés par l’État à l’étranger.

Par ailleurs, si aucune ouverture de crédit n’est encore intervenue par décret d’avance, 9,3 millions d’euros viennent d’être ouverts sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France, par un décret d’ouverture pour dépenses accidentelles en date du 3 octobre. Il s’agit ainsi de couvrir les dépenses engagées dans le cadre des opérations d’évacuation des Français présents au Liban.

Enfin, le ministère des Affaires étrangères vient d’indiquer à votre Rapporteur spécial qu’il est encore prévu de transférer 10 millions d’euros du programme Action de la France en Europe et dans le monde vers les programmes Rayonnement culturel et scientifique (3 millions d’euros) et Solidarité à l’égard des pays en développement (7 millions d’euros), afin de parachever l’opération de correction des enveloppes de masse salariale de chaque programme inscrites en loi de finances initiale.

Compte tenu des besoins, le ministère estime par ailleurs nécessaire d’ouvrir de nouveaux crédits d’ici à la fin de l’année, en particulier pour assurer le financement de nos contributions aux organisations internationales (les besoins sont estimés à au moins 145 millions d’euros) ainsi que l’action humanitaire menée au Liban, pour laquelle 8 millions d’euros seraient nécessaires.

• À la fin du mois de septembre, le taux de consommation des crédits de la mission Action extérieure de l’État était relativement élevé. C’est sur les programmes Action de la France en Europe et dans le monde et Rayonnement culturel et scientifique que la consommation des crédits a été la plus élevée : près de 84 %, tandis que le taux de consommation s’élève à 78 % sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France et à 79 % sur le programme Audiovisuel extérieur. L’objectif poursuivi est en effet de limiter au maximum les reports de crédits, conformément aux règles posées par l’article 15 de la loi organique relative aux lois de finances.

Toutefois, les crédits de certains BOP ou unités opérationnelles se caractérisent par un faible niveau de consommation. C’est notamment le cas des unités opérationnelles du programme Action de la France en Europe et dans le monde regroupant les crédits destinés aux archives diplomatiques (32 %) et au protocole (48 %). La faiblesse de la consommation des crédits s’explique, dans le premier cas, par l’attente du lancement du chantier de la Courneuve et, dans le second cas, par des déplacements officiels du Président de la République et du Premier ministre à l’étranger et des chefs d’État étrangers en France moins importants que prévu. La faiblesse des taux de consommation des unités opérationnelles relatives aux dépenses informatiques des programmes Action de la France en Europe et dans le monde (38 %), Français à l’étranger et étrangers en France (9 %) et Rayonnement culturel et scientifique (29 %) s’explique principalement par la lenteur des procédures de passation des marchés.

ÉVOLUTIONS DES CRÉDITS DE PAIEMENT DE LA MISSION ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

 
 

LFI 2006

LFI 2006 corrigée

PLF 2007

PLF 2007 corrigé

Évolution apparente
(en %)

Évolution réelle
(en %)

Action de la France en Europe et dans le monde

Dépenses de personnel

554,50

507,90

506,19

506,16

– 8,71

– 0,34

Autres catégories de dépenses

863,45

855,58

944,61

917,61

+ 9,40

+ 7,25

Total des crédits

1.417,95

1.363,48 (1)

1.450,80

1.423,77 (2)

+ 2,32

+ 4,42

Rayonnement culturel et scientifique

Dépenses de personnel

89,06

92,06

89,90

89,90

+ 0,94

– 2,35

Autres catégories de dépenses

428,59

428,59

436,49

436,49

+ 1,84

+ 1,84

Total des crédits

517,65

520,65 (3)

526,39

526,39

+ 1,69

+ 1,10

Français à l’étranger et étrangers en France

Dépenses de personnel

196,60

190,20

189,47

189,47

– 3,63

– 0,38

Autres catégories de dépenses

84,86

84,86

97,66

97,66

+ 15,08

+ 15,08

Total des crédits

281,46

275,06 (4)

287,13

287,13

+ 2,01

+ 4,4

Audiovisuel extérieur

Dépenses de personnel

Autres catégories de dépenses

160,18

   

Total des crédits

160,18

– (5)

– (5)

– (5)

– 

– 

Mission Action extérieure de l’État

Dépenses de personnel

840,17

790,17

785,57

785,57

– 6,50

– 0,58

Autres catégories de dépenses

1.537,07

1.369,02

1.478,76

1.451,76

– 3,79

+ 6,00

Total des crédits

2.377,24

2.159,19 (6)

2.264,33

2.237,33 (2)

– 4,75

+ 3,62

(1) Compte tenu du transfert, proposé par le présent projet de loi, des indemnités des parlementaires européens vers la mission Pouvoirs publics et du transfert, intervenu en cours de gestion, de crédits de personnels vers le programme Solidarité à l’égard des pays en voie de développement, qui devrait être complété prochainement par un nouveau transfert vers les programmes Solidarité à l’égard des pays en voie de développement et Rayonnement culturel et scientifique.

 

(2) Compte tenu des loyers budgétaires supplémentaires.

(3) Compte tenu du transfert des crédits de personnel qu’il est prévu d’opérer d’ici à la fin de l’année depuis le programme Action de la France en Europe et dans le monde.

(4) Déduction faite des crédits de personnels transférés en cours de gestion vers le programme Solidarité à l’égard des pays en développement.

(5) Le projet de loi de finances propose d’inscrire ce programme dans la mission Médias et de la doter de ceux qu’il est prévu de transférer, de 160,24 millions d’euros.

(6) Déduction faite des indemnités des parlementaires européens, des crédits de personnels transférés et de ceux qu’il est prévu de transférer et, enfin, des crédits du programme Audiovisuel extérieur.

Source : projet annuel de performance et ministère des Affaires étrangères.

À structure constante, il apparaît que les programmes Action de la France en Europe et dans le monde et Français à l’étranger et étrangers en France bénéficient principalement de l’augmentation des crédits (respectivement + 4,42 % et + 4,4 %), tandis que le programme Rayonnement culturel et scientifique voit ses crédits augmenter, dans une moindre mesure, de 1,1 %.

Si les crédits de fonctionnement, d’intervention et d’investissement augmentent de 6 %, les crédits de personnel diminuent de 0,58 %. Plusieurs facteurs contribuent à la progression des dépenses de personnel parmi lesquels :

– l’évolution de la masse salariale engendrée par le mécanisme de glissement-vieillesse-technicité – GVT– (+ 0,76 million d’euros) ;

– les augmentations du point d’indice fonction publique (+ 2,46 millions d’euros) ;

– les mesures catégorielles : dispositif de fin d’activité pour les ministres plénipotentiaires et les conseillers hors classe, revalorisation indemnitaire des agents d’administration centrale, revalorisation de certaines fonctions à l’étranger et des rémunérations des agents de droit local (+ 3,08 millions d’euros).

Les facteurs de progression des dépenses de personnel ne peuvent toutefois masquer l’ampleur de l’effort mené par le ministère en termes de réduction des effectifs. Après avoir diminué de 76 ETPT en 2006, ceux-ci devraient en effet baisser de 109 ETPT (122 ETPT supprimés dans le cadre du contrat de modernisation et 13 ETPT transférés depuis la mission Direction de l’action du Gouvernement), pour atteindre 13.480 ETPT. La contraction des effectifs devrait se traduire par une baisse des dépenses de personnel de l’ordre de 5 millions d’euros.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA MISSION
ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT

(en équivalents temps plein travaillés)

 

LFI 2006

PLF 2007

Variation

Action de la France en Europe et dans le monde

8.812

8.732

– 80

Français à l’étranger et étrangers en France

3.406

3.398

– 8

Rayonnement culturel et scientifique

1.371

1.350

– 21

Total

13.589

13.480

– 109

Source : projet annuel de performance.

En termes relatifs, c’est le programme Rayonnement culturel et scientifique qui devrait enregistrer la plus forte baisse (– 1,53 %), suivi du programme Action de la France en Europe et dans le monde (– 0,9 %) puis du programme Français à l’étranger et étrangers en France (– 0,23 %).

Les efforts louables menés par le ministère depuis plusieurs années pour réduire ses effectifs et améliorer la gestion de son personnel trouvent leur prolongement dans les engagements pris dans le contrat de modernisation en faveur de la mise en place d’une gestion prévisionnelle des ressources humaines, de l’évolution de la structure d’encadrement, de la modernisation des régimes de rémunération et de la réforme de la politique de l’emploi local. Au-delà de ces actions, votre Rapporteur spécial se félicite de l’introduction de deux dispositifs, l’un préventif, l’autre incitatif.

Le premier mécanisme mis en place concerne la couverture de l’impact des variations des taux de change sur les rémunérations des agents. Si celui-ci peut bénéficier au ministère des Affaires étrangères, il peut également entraîner une charge supplémentaire, comme c’est le cas en 2006, où l’impact en gestion est négatif à hauteur de 12 millions d’euros. Aussi, l’accord de gestion en vertu duquel le ministère du Budget s’engage à couvrir, sans mise en réserve additionnelle, les variations de la masse salariale au titre des mécanismes change-prix et des évolutions des taux de chancellerie, au-delà d’une part fixée à 2,5 millions d’euros à la charge du ministère des Affaires étrangères, apparaît comme une mesure de saine gestion.

Le second dispositif prévoit que le ministère bénéficie d’un taux de retour de 50 % de la masse salariale correspondant aux emplois supprimés. Il conviendra de surveiller avec attention la mise en œuvre de ce mécanisme particulièrement novateur.

Le programme Action de la France en Europe et dans le monde regroupe la plupart des crédits de l’administration centrale et du réseau, ainsi que les contributions de la France aux organisations internationales et les dotations en faveur de la coopération militaire et de défense. Les crédits de paiement devraient s’élever à 1.450,8 millions d’euros et les autorisations d’engagement à 1.752,3 millions d’euros. À structure constante (19), les crédits de paiement progressent de 4,4 %.

Les dépenses de personnel devraient s’élever à 506,2 millions d’euros (soit 64,4 % des dépenses de personnel inscrites dans la mission Action extérieure de l’État). À structure constante, il apparaît qu’elles font l’objet d’une quasi-reconduction. Les principales évolutions les affectant sont :

– la suppression nette de 80 ETPT (– 2,29 millions d’euros), solde de la suppression de 93 ETPT réalisée dans le cadre du contrat de modernisation
(– 3,43 millions d’euros) et du transfert de 13 ETPT d’administrateurs civils depuis la mission Direction de l’action du Gouvernement, qui sont des fonctionnaires français intervenant en tant qu’experts auprès des institutions européennes (+ 1,14 million d’euros) ;

– l’évolution de la masse salariale liée au GVT « glissement vieillesse technicité » (+ 0,49 million d’euros) ;

– les augmentations du point d’indice de la fonction publique (+ 1,55 million d’euros) ;

– les mesures catégorielles (+ 2,08 millions d’euros) ;

– les variations du compte d’affectation spéciale Pensions notamment dues à la variation des effectifs et des taux de cotisations (+ 1,41 million d’euros).

Il convient de souligner que, cette année, aucun crédit n’est inscrit au titre de l’effet taux de change-prix, grâce au nouveau mécanisme de couverture prévu par le contrat de modernisation.

Les 8.732 emplois exprimés en ETPT inscrits sur le programme se répartissent entre les différentes directions de l’administration centrale, l’état-major du ministère et les 156 ambassades et 20 représentations permanentes du réseau. 2.389 emplois sont inscrits en administration centrale, 1.709 dans le réseau, 732 concernent des contractuels sous CDD et des volontaires internationaux, 780 des personnels militaires et 3.122 des recrutés locaux.

La réduction des ETPT entre 2006 et 2007 concerne à titre principal les militaires (– 4,18 %), puis les agents de droit local (– 1,14 %) et les titulaires en poste en administration centrale (– 1,05 %), tandis que le nombre d’ETPT de titulaires dans le réseau augmente de 1,12 %.

Hors dépenses de personnel, les crédits du programme s’établissent à 917,6 millions d’euros. À structure constante (20), ils augmentent de 7,25 %. Cette forte hausse bénéficie à titre principal aux contributions que la France verse aux organisations internationales, qui progressent de 60 millions d’euros, tandis que la maîtrise des dépenses de fonctionnement et d’investissement de l’administration centrale et du réseau s’inscrit dans le cadre des engagements du contrat de modernisation et que les crédits de coopération militaire et de défense diminuent.

Les moyens destinés au bon fonctionnement du ministère et du réseau sont inscrits, à titre principal, au sein des actions Coordination de l’action diplomatique et Soutien, qui existaient déjà en 2006, ainsi que de l’action Réseau diplomatique. Il convient de souligner que l’analyse de l’évolution des crédits entre 2006 et 2007 est parfois rendue difficile par les modifications intervenues dans le classement des dépenses en catégories (fonctionnement, intervention, investissement).

Les dépenses de fonctionnement courant devraient s’élever à près de 130 millions d’euros. Un peu plus de 26 millions d’euros devraient notamment être consacrés à l’organisation des conférences internationales et des voyages officiels (18,58 millions d’euros contre 18,74 millions d’euros prévus en 2006), des déplacements des délégations ministérielles (4,7 millions d’euros contre 4,56 millions d’euros) et des réceptions des ministres (2,88 millions d’euros en 2007 contre 2,74 millions prévus en 2006). Les dépenses de fonctionnement courant, au sens strict, de l’administration centrale devraient s’élever à environ 9 millions d’euros de même que celles liées à la valise diplomatique. Un peu plus de 3,5 millions d’euros devraient être consacrés à la formation des personnels. Enfin, 48,5 millions d’euros devraient être affectés au fonctionnement des postes à l’étranger et 15 millions d’euros consacrés aux frais de voyages et de déménagements des agents du ministère affectés à un nouveau poste.

Par ailleurs, un peu plus de 50 millions d’euros sont prévus au titre des dépenses d’informatique et de télécommunication. En particulier, le programme triennal de modernisation 2005-2007, doté d’un montant total de plus de 15 millions d’euros (5,5 millions d’euros en 2005, 8,8 millions d’euros en 2006 et 1,3 million d’euros en 2007), pourra être mené à son terme. La refonte du télégramme diplomatique, l’augmentation des débits du réseau mondial, la modernisation des applications et la mise en place d’un site de secours devraient ainsi être effectives en 2007.

Enfin, la politique particulièrement novatrice du ministère en matière immobilière est poursuivie. Ainsi, l’expérimentation relative aux loyers budgétaires est étendue cette année à de nouveaux bâtiments.

Le ministère des Affaires étrangères est en effet l’un des trois premiers ministères, avec le ministère de la Justice et celui de l’Économie et des finances, à s’être engagé, dès 2006, dans la mise en place des loyers budgétaires. L’objectif de cette expérimentation est de sensibiliser les occupants du parc domanial de l’État au coût de leur occupation et d’améliorer la gestion en matière d’immobilier.

En contrepartie de l’occupation des locaux, les responsables doivent verser un loyer, qui est censé refléter le coût pour l’État de la mise à disposition de ces locaux. Il est calculé par application du coût moyen de l’endettement à long terme de l’État à la valeur des immeubles concernés telle qu’elle figure dans le bilan d’ouverture des immobilisations de l’État.

Le lancement de cette expérimentation s’est traduit, dans la loi de finances pour 2006, par l’inscription de 11,58 millions d’euros sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde. Elle a concerné à la fois l’administration centrale, le réseau bilatéral et notre représentation à Bruxelles.

Sont ainsi entrés dans le champ de l’expérimentation :

– pour l’administration centrale, deux immeubles à Paris, rue Monsieur et boulevard des Invalides, et neuf immeubles à Nantes, soit toutes les implantations du ministère dans cette ville ;

–  au sein du réseau bilatéral, d’une part, les postes de Grèce, avec la chancellerie, la résidence, le service culturel et le consulat à Athènes, l’annexe de l’IFA à Larissa, les anciennes annexes de l’IFA à Corfou et au Pirée et l’agence consulaire de Rhodes et, d’autre part, le poste de Bruxelles avec le service culturel, la chancellerie, la résidence bilatérale, le logement de fonction ainsi que les locaux et la résidence de la représentation auprès de l’OTAN ;

– pour les représentations permanentes, les locaux de la Représentation permanente auprès de l’Union européenne et de la résidence correspondante ainsi que la résidence du représentant français au Comité de politique et de sécurité (COPS).

Le projet de loi de finances propose d’inscrire 27,11 millions d’euros supplémentaires, afin d’étendre cette expérimentation et de tenir compte de la revalorisation des loyers. En effet, en 2007 le périmètre de l’expérimentation devrait englober 6 nouveaux bâtiments situés à Paris et le montant des loyers passer de 5,12 % à 5,4 % de la valeur vénale des biens (estimée à 716,51 millions d’euros).

Au-delà de la participation à l’expérimentation des loyers budgétaires, le ministère poursuit la mise en œuvre de sa nouvelle politique immobilière, qui se traduit par une réduction des dépenses d’investissement immobilier inscrites au sein de la mission Action extérieure de l’État. Après avoir diminué de 50 % entre 2005 et 2006, les crédits demandés pour 2007 baissent en effet de près d’un tiers, pour atteindre 7,8 millions d’euros. Ces crédits devraient être complétés à hauteur de 8,84 millions d’euros par voie de fonds de concours. Au total, 16,64 millions d’euros devraient donc être disponibles, dont 9 millions d’euros pour les opérations immobilières concernant le réseau diplomatique et l’administration centrale, 1,37 million d’euros pour les opérations relatives au réseau culturel et 6,28 millions d’euros pour des opérations d’entretien.

La baisse des crédits correspond aux engagements pris dans le cadre du contrat de modernisation. Celui-ci stipule en effet que, sur la période 2006-2008, le ministère bénéficie d’un mécanisme de rétrocession à hauteur de 100 % des produits de cessions immobilières réalisées à l’étranger et que ces crédits, exonérés de toute mesure de régulation, ont vocation à être affectés aux opérations immobilières courantes du ministère. Par ailleurs, il est prévu d’inscrire chaque année 7,9 millions d’euros sur le budget du ministère au titre des investissements immobiliers. Ainsi, le ministère s’est-il engagé à asseoir l’essentiel du financement de sa politique immobilière sur les recettes issues des cessions réalisées à l’étranger.

À cet égard, les objectifs affichés par le ministère apparaissent très ambitieux. Il ne peut en être autrement dès lors que le montant des opérations immobilières en cours ou envisagées est compris dans une fourchette de 120 à 150 millions d’euros sur les trois prochaines années. Selon le ministère, les opérations de cession devraient ainsi rapporter, dans le meilleur des cas, près de 63 millions d’euros en 2007, un peu plus de 56 millions d’euros en 2008 et 78 millions d’euros en 2009. Or, mis à part « l’année exceptionnelle » qu’a été 2005, où des ventes ont été conclues pour un montant de 66,27 millions d’euros, grâce à la cession de la résidence de l’Ambassadeur de France à Monaco pour 49,5 millions d’euros, les années 2001-2004 ont été marquées par des cessions annuelles comprises entre 6 et 12 millions d’euros. En 2006, parmi les ventes qui pouvaient être programmées (pour un montant de 22,5 millions d’euros), seule la moitié (10,86 millions d’euros) a été conclue au mois d’octobre.

Votre Rapporteur spécial s’inquiète de la capacité du ministère à remplir les objectifs fixés, en particulier en raison du caractère souvent très spécifique des biens à céder. Lors des missions qu’il a effectuées à Monaco, Bruxelles, Beyrouth, en Syrie, en Israël et en Turquie, votre Rapporteur spécial a pu constater que, face à un patrimoine particulièrement hétéroclite (cela va du tombeau des Rois à Jérusalem à des terrains vagues à Beyrouth), les ambassadeurs et consuls généraux cherchent par tous les moyens à valoriser les biens domaniaux de l’État à l’étranger, qu’il s’agisse de les aménager ou de les vendre. Toutefois, très pris par leurs missions traditionnelles, ils ne peuvent consacrer à ces questions le temps nécessaire et se heurtent souvent à la complexité des procédures immobilières, dont seuls des professionnels peuvent maîtriser les subtilités, ainsi qu’aux contraintes locales (occupations sans titres, expropriations…). Aussi, votre Rapporteur spécial encourage le type de collaboration mis en place à Monaco entre l’Ambassadeur, le directeur des services fiscaux des Alpes-maritimes et de France Domaines, qui a permis la vente de la villa Trotty, résidence de l’Ambassadeur, dans des conditions très favorables.

La création, au sein du ministère, d’un service chargé de l’ensemble des opérations relatives à son patrimoine immobilier et mobilier va dans le bon sens. Toutefois, les ventes de biens à l’étranger étant souvent atypiques et compliquées, il serait souhaitable de trouver une forme d’association efficace entre les postes diplomatiques et consulaires et France Domaines et, le cas échéant, des cabinets de conseil en immobilier, selon des modalités expérimentées par le ministère pour les services d’administration centrale, comme on le verra ci-après.

Votre Rapporteur spécial s’étonne par ailleurs du caractère lacunaire des informations concernant le programme Dépenses immobilières du compte d’affectation spéciale Gestion du patrimoine immobilier de l’État, qui indique simplement le montant global des crédits inscrits (425 millions d’euros).

En complément des 7,8 millions d’euros inscrits dans le présent projet au titre des crédits de paiement, 203,24 millions d’euros le sont au titre des autorisations d’engagement. Ces autorisations se répartissent entre :

– 8,45 millions d’euros pour les opérations précédemment mentionnées ;

– 156,6 millions d’euros pour le lancement de la construction du centre des archives diplomatiques à La Courneuve ;

– 38,19 millions d’euros pour des opérations diverses, dont la réalisation d’un campus diplomatique à Tokyo (25 millions d’euros devraient y être affectés en 2007).

Ces deux dernières opérations, à Tokyo et à La Courneuve, reflètent la volonté du ministère de dynamiser la gestion de son patrimoine immobilier. En effet, ces deux projets sont des partenariats public-privé.

L’opération de La Courneuve s’inscrit dans le cadre d’une procédure d’autorisation temporaire d’occupation du domaine public puis de location avec option d’achat (AOT-LOA), qui se traduira par le versement, à partir de 2008 et pendant une période de 30 ans, d’un loyer annuel de l’ordre de 6 millions d’euros. Les 156,6 millions d’euros demandés dans le projet de budget devraient permettre de signer le bail locatif.

L’objectif de l’opération de Tokyo, qui est comparable au montage réalisé par l’État italien à Tokyo, est de permettre une reconstruction à coût nul (hors frais d’études préalables) de l’ambassade par la valorisation du terrain actuel. Le principe est le suivant : une partie de ce terrain serait louée sur une longue durée à un partenaire privé qui pourrait y construire des locaux destinés à être commercialisés, en contrepartie de la reconstruction de l’ambassade.

En dernier lieu, il convient de préciser que l’ambitieux projet de « site unique », regroupant les 11 implantations immobilières du ministère à Paris, étudié en 2004 et 2005, est définitivement abandonné. Toutefois, le ministère des Affaires étrangères souhaite, dans le cadre du schéma pluriannuel de stratégie immobilière qu’il a présenté au ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie le 3 mai dernier, regrouper ses implantations autour de trois sites (le « 37, Quai d’Orsay », le centre des archives diplomatiques à La Courneuve et un bâtiment regroupant les autres services administratifs). L’opération de regroupement pourrait concerner les services aujourd’hui implantés dans les immeubles de la rue la Pérouse, du boulevard Saint-Germain, de l’avenue de Lowendal, de la rue de Talleyrand, du boulevard des Invalides et de la rue Monsieur, soit environ 2.000 agents sur les 3.000 exerçant leurs fonctions à Paris. Une superficie de 35.000 mètres carrés serait nécessaire.

Dans cette perspective, le ministère a décidé de faire appel à un expert en programmation immobilière ainsi qu’à un conseil immobilier pour l’assister lors de la phase de recherche et de sélection du site de regroupement. Un appel d’offres est en cours, en vue de choisir le cabinet d’experts.

Les crédits regroupés dans l’action Action européenne devraient s’élever à 53,77 millions d’euros en crédits de paiement et 64,79 millions d’euros en autorisations d’engagement. Ils sont toutefois loin de refléter l’effort financier de la France en faveur de l’Europe, qui se traduit également par la participation de la France au Fonds européen de développement (692 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2007), rattachée à la mission Aide publique au développement, et par la contribution de notre pays au budget de l’Union européenne, qui prend la forme d’un prélèvement sur recettes (18,7 milliards d’euros en 2007).

Hors dépenses de personnel, les crédits prévus en 2007 pour l’action européenne s’élèvent à 49,74 millions d’euros. Leur baisse par rapport à 2006, où 59,44 millions d’euros avaient été votés, n’est qu’apparente. Elle résulte en effet principalement du transfert des crédits relatifs aux indemnités des parlementaires européens vers la mission Pouvoirs publics, conformément au souhait exprimé par votre Rapporteur spécial l’année dernière. D’un montant de 7,87 millions d’euros en 2006, ils devraient s’élever à 8,02 millions d’euros en 2007. Il convient également de préciser que les crédits inscrits en 2006 au titre des dépenses de fonctionnement des Représentations permanentes auprès de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe ainsi que de l’expérimentation relative aux « loyers budgétaires », qui concernait les immeubles domaniaux de la Représentation permanente, de la Résidence du Représentant permanent auprès de l’Union européenne et de la Résidence du Représentant auprès du COPS, ont été transférés vers la nouvelle action Réseau diplomatique.

Il faut en outre souligner que les comparaisons dans les évolutions de crédits entre 2006 et 2007 sont, pour certaines, encore délicates cette année, dans la mesure où, à la suite de nouvelles instructions de la Direction générale de la comptabilité publique, certaines dépenses, classées parmi les dépenses de fonctionnement en 2006, relèvent désormais des dépenses d’investissement et où certaines dépenses d’intervention sont dorénavant considérées comme des dépenses de fonctionnement. Ainsi, les actions d’information et de communication soutenant la politique d’intervention du cabinet de la ministre chargée des Affaires européennes (1,27 million d’euros), qui étaient comprises parmi les dépenses d’intervention en 2006, relèvent des dépenses de fonctionnement en 2007.

Au total, les crédits destinés à notre action européenne s’inscrivent en hausse. Cette augmentation résulte principalement de la progression d’un million d’euros des crédits prévus pour les contributions aux organisations internationales à vocation européenne, qui devraient s’établir à 41,75 millions d’euros. La répartition devrait en être la suivante.

CONTRIBUTIONS DE LA FRANCE AUX ORGANISATIONS EUROPÉENNES EN 2007

(en millions d’euros)

Organisation bénéficiaire

Contribution

Conseil de l’Europe

34

Fonds d’expertise Union européenne

0,70

Fonds d’expertise Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)

2,36

Autres contributions européennes

6,15

Total

41,75

Source : ministère des Affaires étrangères.

Malgré l’augmentation consentie, le montant inscrit pour 2007 pourrait se révéler insuffisant, compte tenu de l’augmentation des besoins financiers du Conseil de l’Europe, qui devrait consacrer davantage de moyens cette année à la Cour européenne des droits de l’homme, afin de lui permettre de résorber les stocks de requêtes en instance, de l’ordre de 82.000 actuellement.

Après avoir diminué d’un million d’euros en 2006, la subvention d’exploitation pour la desserte aérienne de Strasbourg devrait progresser de 3,82 millions d’euros à 4,75 millions d’euros en 2007. Par ailleurs, 15,9 millions d’euros sont demandés en autorisations d’engagement.

La subvention d’exploitation correspond à la prise en charge par l’État d’une partie du déficit d’exploitation de la desserte aérienne de la ville pour des vols en provenance de métropoles européennes. Ce financement s’inscrit dans le cadre du contrat triennal État-régions conclu avec l’Alsace, qui a pour objectif de développer les conditions d’accès, le rayonnement et les capacités d’accueil de la ville de Strasbourg, afin de renforcer sa vocation européenne.

Le contrat conclu pour la période 2003-2005 prévoit que l’État assure une participation à hauteur de 12,5 millions d’euros (64 % du total), les collectivités territoriales alsaciennes prenant en charge le solde (7 millions d’euros). 3,01 millions d’euros sont ainsi demandés dans le projet de budget, pour couvrir les engagements pris dans le cadre de ce contrat de plan. En effet, la desserte aérienne actuelle relève encore de ce contrat en raison du décalage de 15 mois existant entre les contrats triennaux et la mise en place des dessertes.

Tandis que six liaisons avaient été mises en place avec Copenhague, Madrid, Vienne, Amsterdam, Milan et Munich en 2003, les liaisons entre Strasbourg et Munich, Amsterdam et Milan ont dû être arrêtées en février 2005, à la suite du dépôt de bilan de leur exploitant, Air Exel. Elles ont été reprises depuis octobre 2005, la liaison avec Munich étant désormais assurée sur une base commerciale par la Lufthansa. Par conséquent, actuellement, cinq liaisons sont financées par l’État et Strasbourg. Il convient par ailleurs de souligner que sur la destination de Madrid, la compagnie Air Nostrum a réduit la fréquence de ses vols hors session parlementaire à partir d’avril 2005 pour réduire les pertes commerciales liées au coût du carburant.

Il est en outre demandé 1,74 million d’euros dans la perspective de la conclusion du contrat de plan État-régions Alsace 2006-2008. Le programme de dessertes aériennes pour la période allant de mars 2007 à mars 2009, lié à ce nouveau contrat triennal, n’est pas encore arrêté. Compte tenu de la participation constante de l’État (12,5 millions d’euros) et du renchérissement du coût de la facture énergétique, le réseau actuel devra nécessairement évoluer. Un arbitrage devra notamment être rendu entre, d’une part, l’ouverture d’une ou plusieurs lignes vers les nouveaux États de l’Union et, d’autre part, le renforcement des liaisons avec l’Allemagne et le Royaume-Uni.

Par ailleurs, les 130.000 euros demandés pour le Centre d’information sur les institutions européennes (CIIE) constituent une dotation prévue dans le cadre du contrat de plan État-régions. Reconduite entre 2006 et 2007, cette dotation, qui n’est pas, bien entendu, une subvention à la desserte aérienne de Strasbourg, gagnerait à ne pas être présentée parmi les subventions d’exploitation pour la desserte aérienne de Strasbourg dans le projet annuel de performance.

Enfin, la dotation totale en faveur des interventions du ministre délégué aux Affaires européennes devrait s’inscrire en très légère baisse, à 3,07 millions d’euros en 2007.

La priorité donnée par la politique étrangère française au règlement des problèmes internationaux dans un cadre multilatéral implique la participation de notre pays à un grand nombre d’organisations internationales. La France est ainsi membre d’un peu plus de 150 organisations, qui interviennent dans de multiples domaines : environnement (Programme des Nations Unies pour l’environnement –PNUE – et ses conventions liées sur la protection de la couche d’ozone, les produits chimiques et pesticides, la diversité biologique, etc.), santé (Organisation mondiale de la santé, Office international des épizooties), agriculture et alimentation (FAO, UPOV, OIV), culture (UNESCO), tourisme (Organisation mondiale du tourisme), normes sociales (Bureau international du travail), etc.

Ces organisations font l’objet d’attentes croissantes de la part des États membres, qui reflètent ainsi les préoccupations des opinions publiques en faveur d’une meilleure régulation de la mondialisation. En réponse à ces attentes, les organisations internationales développent des programmes d’action plus ambitieux, ce qui se traduit par une progression souvent rapide de leurs budgets.

En outre, la France fait partie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies et doit, à ce titre, assurer une contribution majorée au budget des Opérations de maintien de la paix (OMP) qui correspond à une quote-part de 7,32 %.

À l'exception des contributions au Conseil de l’Europe et à d’autres organisations à vocation européenne qui demeurent au sein de l’action Action européenne, les contributions versées par la France aux organisations internationales sont regroupées en 2007 au sein de l’action Contributions internationales. Ce regroupement est heureux : la distinction opérée en 2006 entre les contributions destinées à la régulation de la mondialisation et celles consacrées à la sécurité internationale ne présentait pas un grand intérêt.

Il convient de rappeler que si toutes les contributions obligatoires relèvent du programme Action de la France en Europe et dans le monde, seule une minorité des contributions volontaires y est inscrite (5,84 millions d’euros, soit 5,6 % du montant total des contributions volontaires), l’essentiel des contributions volontaires (105 millions d’euros) étant rattaché au programme Solidarité à l’égard des pays en développement.

Le choix du rattachement de l’ensemble des contributions obligatoires à ce programme, y compris lorsque les dépenses de l’organisation relèvent de l’aide publique au développement, est justifié par l’évolution de la structure du budget de ces organisations. En effet, les programmes de coopération technique sont désormais financés à partir des contributions volontaires tandis que les dépenses de fonctionnement sont couvertes par les contributions obligatoires. Leur paiement correspond, par conséquent, à l’obligation de la France de s’acquitter de sa quote-part du budget.

Toutefois, cette présentation est peut-être encore appelée à évoluer, le ministère ayant lancé un audit, afin de mieux identifier les finalités des contributions versées, le suivi dont elles font l’objet et la pertinence de leur rattachement au programme Action de la France en Europe et dans le monde. Il semble en effet que certaines contributions auraient vocation à être inscrites sur d’autres programmes, comme ceux relevant du ministère en charge de l’environnement ou encore de l’outre-mer.

La nouvelle présentation distingue trois sous-actions, la première relative aux opérations de maintien de la paix (OMP), la deuxième aux contributions payables en euros et, enfin, la troisième aux contributions versées en devises, soumises à l’effet change.

Afin d’assurer le financement des contributions internationales de la France, 544,96 millions d’euros sont demandés dans le présent projet de loi de finances, en hausse de 59 millions d’euros. Ainsi, l’essentiel de la progression des crédits du programme Action de la France en Europe et dans le monde bénéficie aux contributions internationales. Correspondant à près de 93 % du montant total des contributions internationales inscrites sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde, les contributions destinées aux organisations internationales autres qu’européennes représentent désormais le quart (24 %) des crédits de la mission (21 % l’an dernier) et plus du tiers (37,6 %) des crédits du programme (34 % en 2006).

Compte tenu de la spécificité des crédits relatifs aux contributions internationales obligatoires, le contrat de modernisation du ministère des Affaires étrangères prévoit que ces crédits, rassemblés au sein d’un seul BOP, ne peuvent être rendus fongibles sans l’accord du contrôleur financier. Surtout, ces crédits bénéficient des dispositions propres aux programmes sur lesquels l’État ne dispose pas de pouvoirs discrétionnaires d’attribution, annoncées dans l’exposé des motifs de la loi de finances pour 2006 et visées dans la circulaire du ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie du 12 décembre 2005 (21) relative à la régulation budgétaire en 2006. Ainsi, les crédits relatifs aux contributions internationales obligatoires mis en réserve ont vocation à être libérés en cours d’exercice. Votre Rapporteur spécial s’en félicite. Compte tenu de la part prépondérante des crédits destinés aux contributions internationales obligatoires dans le programme Action de la France en Europe et dans le monde, il apparaît en effet nécessaire que ces crédits soient entièrement ouverts dans l’année.

La forte progression des crédits prévue en 2007 devrait bénéficier à titre principal (50 millions d’euros) aux opérations de maintien de la paix (OMP), le solde étant destiné aux autres contributions internationales.

358,74 millions d’euros sont demandés dans le projet de budget, afin de d’assurer le versement des contributions de la France aux organisations internationales dont elle est membre.

Seuls 5,84 millions d’euros sont prévus au titre des contributions volontaires, les plus importantes étant destinées au programme des « Jeunes experts associés » (22) (2,88 millions d’euros) et au fonds fiduciaire de l’OSCE afin de permettre l’envoi d’observateurs français lors de la tenue d’élections (0,9 million d’euros).

Les principaux destinataires des crédits prévus au titre des contributions obligatoires devraient être les organisations du système des Nations Unies, qui en absorbent plus de la moitié.

PRINCIPALES INSTITUTIONS BÉNÉFICIAIRES DES CONTRIBUTIONS DE LA FRANCE

Organisation

Montant inscrit dans le projet de loi de finances

(en millions d’euros)

Part de la France dans le budget de l’organisation en 2006

(en  %)

Rang de la France en 2006

Organisation des Nations Unies (ONU)

104 (1)

6,03

5

Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN)

28

13,75

n.c.

Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)

25

n.c.

n.c.

Organisation mondiale de la santé (OMS)

23

6,03

5

Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)

20

6,15

5

Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE)

18

n.c.

n.c.

Organisation internationale du travail (OIT)

15

6,04

5

Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA)

13

6,04

5

Cour pénale internationale

11

11,99

4

Institut du monde arabe

9

n.c.

n.c.

Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO)

7

6,06

5

(1) 14 millions d’euros devraient également être versés au titre du plan cadre d’équipement de l’ONU.

Source : ministère des Affaires étrangères.

La France est passée du rang de quatrième à celui de cinquième contributeur au budget de l’ONU (derrière les États-Unis – 22 %, le Japon – 19,5 %, l’Allemagne – 8,7 % et le Royaume-Uni – 6,1 %) en 2004 à la suite d’une modification des périodes de référence. Sa quote-part pourrait légèrement augmenter dans l’avenir, un nouveau barème devant être adopté cette année.

165,95 millions d’euros sont demandés dans le présent projet afin d’assurer le versement des contributions internationales de la France qui sont réglées en euros. Non soumis à l’effet change, les montants prévus ne soulèvent pas de problème particulier. En revanche, 192,79 millions d’euros sont inscrits dans le projet de loi de finances au titre des contributions internationales versées en devises, principalement en dollars, mais également en francs suisses. Les taux de change retenus sont de 1 euro contre 1,21 dollar et 1 euro contre 1,53 franc suisse. Si l’on tient également compte des crédits destinés aux OMP, le montant prévu pour les contributions en devises s’élève à 379 millions d’euros, ce qui représente près de 65 % des contributions inscrites sur le programme Action de la France en Europe et dans le monde.

Au regard de la part prépondérante des contributions libellées en devises, votre Rapporteur spécial a regretté, à plusieurs reprises, l’absence de mécanisme de provision ou d’assurance. En effet, traditionnellement, l’effet change était calculé a posteriori, en fin d’année, par différence entre les montants versés en devises et les montants qui auraient été versés au taux du 1er janvier de l’année considérée. Si l’année 2003 s’était conclue par un gain de 15,7 millions d’euros, il n’en a pas été de même en 2004, où une perte de 2,5 millions d’euros a été constatée, et encore moins en 2005, où la perte s’est élevée à 18,7 millions d’euros (23). Aussi, votre Rapporteur spécial avait-il souligné la nécessité de la mise en place d’un mécanisme de couverture du risque de change et suggéré que la responsabilité de sa gestion soit confiée à l’Agence France Trésor.

Votre Rapporteur spécial se félicite donc de la conclusion, le 5 juillet dernier, d’une convention entre le ministère des Affaires étrangères et l’Agence France Trésor dont l’objectif est de mettre en place un mécanisme de couverture du risque de change. En vertu de cette convention, la définition de la politique de couverture (notamment les modalités relatives au montant, au calendrier ou encore à la devise) relève de la compétence du ministère des Affaires étrangères, tandis que la mise en œuvre de cette politique échoit à l’Agence France Trésor, qui est chargée de négocier les contrats d’achat à terme ainsi que d’assurer le suivi des opérations.

La mise en œuvre du mécanisme de couverture a été permise par la création, par la loi de finances pour 2006, du compte spécial Couverture des risques financiers de l’État, sur lequel sont retracées les opérations de couverture du risque de change menées pour le compte du ministère des Affaires étrangères. Une première opération, lancée le 10 juillet, a servi de test afin d’identifier les éventuelles difficultés, avant la généralisation du dispositif en 2007.

Enfin, le contrat de modernisation du ministère des Affaires étrangères prévoit que, au-delà de la tenue, en juin et en septembre, de réunions destinées au suivi de l’évolution du taux de change entre l’euro et le dollar ainsi que de l’engagement éventuel de nouvelles dépenses décidées par les Nations Unies, le ministère des Affaires étrangères s’engage à saisir le ministère du Budget en cas de mesures nouvelles et à informer le Parlement de l’évolution des contributions obligatoires aux organisations internationales.

Le nombre et l’ampleur des opérations de maintien de la paix se sont fortement accrus ces dix dernières années : le nombre de civils et de soldats affectés à des OMP est ainsi passé de moins de 20.000 à plus de 80.000 personnes et le budget de l’ensemble des OMP a augmenté de 1,25 à plus de 5 milliards de dollars. Les quinze opérations actuellement en cours concernent essentiellement l’Afrique subsaharienne où sont déployés plus des trois quarts des effectifs.

Malgré l’augmentation du coût des OMP, en particulier depuis 2004, les crédits inscrits en loi de finances sont demeurés stables, à 136,22 millions d’euros, depuis 2003.

L’inscription des crédits nécessaires au financement des OMP constitue un exercice délicat, soumis à deux inconnues : l’évolution du taux de change et le caractère généralement soudain des crises auxquelles la communauté internationale doit faire face. D’ailleurs, sous le régime de l’ordonnance organique de 1959, les crédits destinés aux OMP étaient provisionnels.

Néanmoins, l’insuffisance flagrante des montants inscrits en loi de finances depuis 2003 au regard des besoins estimés nuisait à la qualité de la gestion, les crédits nécessaires devant être ouverts en collectif de fin d’année, ainsi qu’à la sincérité des documents budgétaires soumis aux parlementaires. À titre d’exemple, en 2005, avant même l’adoption de la loi de finances pour 2006, le manque de crédits était estimé entre 160 et 180 millions d’euros.

Il apparaissait d’autant plus indispensable de procéder à une inscription de crédits plus proche des besoins estimés que, d’une part, dans le nouveau cadre budgétaire mis en place par loi organique relative aux lois de finances, les crédits destinés aux OMP n’étaient plus provisionnels et que, d’autre part, le ministère de la Défense s’était engagé dès 2004 dans une démarche de « rebasage » des crédits destinés aux opérations extérieures (OPEX)  (24).

La forte progression, de l’ordre de 50 millions d’euros, des crédits inscrits dans le projet de budget au titre des OMP, qui devraient donc s’élever à 186,22 millions d’euros, traduit enfin un engagement en faveur de la réévaluation de l’enveloppe finançant les OMP. Elle s’inscrit dans le cadre du contrat de modernisation 2006-2008, qui stipule que le ministère du Budget et de la réforme de l’État s’engage à procéder au « rebasage » des OMP dans les trois prochaines années. Si le contrat précise que la première tranche, celle prévue pour 2007, s’élèvera à « au moins 50 millions d’euros », aucun engagement n’a été pris sur le montant des deux tranches suivantes.

Malgré l’inscription de 50 millions d’euros supplémentaires dans le projet de loi de finances, les crédits demandés demeurent insuffisants au regard des besoins estimés pour 2007. Selon le ministère des Affaires étrangères, il manquerait au moins 200 millions d’euros, nécessaires au financement de la FINUL renforcée au Liban et des opérations menées au Soudan, en Côte d’Ivoire et au Timor.

Enfin, il convient de souligner que le contrat de modernisation précise que le contrôle des dépenses générées par les OMP sera renforcé, notamment avec la mise en place de missions interministérielles, éventuellement menées en partenariat avec les principaux contributeurs des Nations Unies. Le ministère des Affaires étrangères s’engage également à accroître les échanges de vues avec ses partenaires.

Le montant total des crédits inscrits dans le présent projet pour la coopération militaire et de défense s’élève à 106,4 millions d’euros en crédits de paiement et 108,3 millions d’euros en autorisations d’engagement. Les crédits de paiement se répartissent en 57,1 millions d’euros en dépenses de personnel et 49,3 millions d’euros en dépenses de fonctionnement et d’intervention.

La contraction des crédits destinés à la coopération militaire et de défense touche davantage les dépenses de personnel (de l’ordre de 8 %) que les autres catégories de dépenses (un peu plus de 1 %).

La baisse des crédits relatifs aux dépenses de personnel traduit notamment la réduction des effectifs rattachés à l’action Coopération militaire et de défense, qui passent de 479 à 451 équivalents temps plein. La baisse concerne uniquement les personnels militaires, dont les effectifs diminuent de 28 ETPT pour atteindre 417, tandis que le nombre de titulaires en administration centrale (6) et de recrutés locaux (28) demeure stable.

Ainsi, le montant inscrit dans le projet de budget devrait permettre d’assurer les missions de courte durée nécessaires à l’appui des projets de coopération (missions de renfort temporaire de moins de six mois réalisées par du personnel militaire), mais il devrait entraîner une réduction du réseau des coopérants militaires de longue durée (deux à trois ans) en service dans les pays bénéficiaires de notre coopération, qui devrait passer de 355 à 345 postes.

La quasi-reconduction des crédits relatifs aux dépenses de fonctionnement et d’intervention devrait permettre d’atteindre les objectifs fixés pour 2007 dans les trois domaines prioritaires suivants.

S’agissant de la formation en France et à l’étranger des élites et des cadres militaires et du renforcement de la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales, l’objectif est de renforcer les capacités militaires africaines de prévention et de résolution des conflits, ce qui suppose une évolution du réseau d’écoles nationales à vocation régionale (ENVR) en pôles d’excellence, ouverts aux financements internationaux et dédiés plus particulièrement au domaine du soutien de la paix, et en centres de formation spécifiques qui devront répondre aux besoins de l’ensemble des pays abonnés.

Alors que l’appui aux projets de restructuration des forces armées et de soutien à l’État de droit a souffert en 2006 de la priorité accordée à l’achèvement des travaux de construction de l’École de maintien de la paix de Bamako, il devrait bénéficier, en 2007, des moyens nécessaires pour achever certains projets et répondre aux nouveaux besoins.

Enfin, l’effort en faveur de l’enseignement de la langue française dans le milieu militaire sera poursuivi, afin d’entretenir un vivier d’officiers francophones et francophiles, atout majeur de notre politique d’influence, mais également pour favoriser l’usage du français dans les instances internationales ou régionales.

Le programme Rayonnement culturel et scientifique a pour objet la coopération avec les pays développés et le service d’enseignement public français à l’étranger. Le périmètre retenu dans le projet de loi de finances pour 2007 résulte de deux modifications : les crédits de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) ont été transférés depuis le programme Français à l’étranger et étrangers en France lors du vote du budget pour 2006 et il est proposé dans le présent projet de loi de finances de transférer les crédits destinés à l’audiovisuel extérieur vers la mission Médias. Par ailleurs, il convient de souligner que la liste des pays développés retenus cette année a été modifiée par rapport à celle de l’année dernière (par exemple, l’Ukraine en a été retirée, tandis que Bahrein a été ajouté), ce qui entraîne des transferts de crédits, dont les montants, qui n’ont pas été portés à la connaissance de votre Rapporteur spécial, doivent toutefois être limités au regard des enveloppes financières globales en jeu.

Votre Rapporteur spécial se félicite de l’attention qui a été apportée cette année à la rédaction de partie consacrée à la « justification au premier euro » du programme, qui permet désormais de mieux éclairer la représentation nationale sur l’évolution et l’affectation des crédits demandés en loi de finances. C’est en particulier vrai pour l’action Langue et culture française, diversité linguistique et culturelle qui fait cette année l’objet d’une présentation détaillée permettant de cerner l’évolution des crédits, alors que, l’année dernière, les montants inscrits étaient le plus souvent globaux et, surtout, correspondaient à des prévisions d’exécution pour 2005.

En 2007, il est prévu d’ouvrir 526,4 millions d’euros en crédits de paiement et autorisations d’engagement, ce qui représente une augmentation de 1,1 % par rapport au montant des crédits ouverts en loi de finances pour 2006 (25).

Les dépenses de personnel devraient s’élever à 89,9 millions d’euros (soit 11,4 % des dépenses de personnel inscrites dans la mission Action extérieure de l’État), en baisse de 2,35 % par rapport à 2006. Leur évolution résulte de plusieurs facteurs, dont les plus importants sont :

– la suppression de 21 ETPT réalisée dans le cadre du contrat de modernisation : – 2,56 millions d’euros ;

– l’évolution de la masse salariale liée au GVT (glissement vieillesse technicité) :+ 0,10 million d’euros ;

– les augmentations du point d’indice de la fonction publique : + 0,36 million d’euros ;

– les mesures catégorielles : + 0,10 million d’euros ;

– les variations du compte d’affectation spéciale Pensions notamment dues à la variation des effectifs et des taux de cotisations : + 0,37 million d’euros.

Sur les 1.350 emplois exprimés en ETPT inscrits sur le programme et inclus dans le plafond ministériel d’autorisation des emplois, 94 emplois sont en administration centrale, 60 dans le réseau, 950 concernent des contractuels et des volontaires internationaux et 246 sont des recrutés locaux. Cette année, la baisse des ETPT a concerné uniquement les contractuels et volontaires internationaux
(– 21 ETPT).

6.614 emplois, rémunérés par les opérateurs relevant du programme mais non inclus dans le plafond d’autorisation des emplois du ministère, contribuent par ailleurs au rayonnement scientifique et culturel de la France. Il s’agit d’EDUFRANCE (23 emplois), de CulturesFrance (99) et de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger – AEFE – (6.492). Votre Rapporteur spécial s’étonne que la somme de ces données ne corresponde pas au montant total, tous ces chiffres figurant dans le projet annuel de performance. Afin d’avoir une vision plus complète des effectifs concourant au rayonnement culturel et scientifique, il convient de préciser que, au sein du réseau de l’AEFE, 3.484 agents de recrutement local sont rémunérés par les établissements en gestion directe à partir des droits de scolarité et que 10.073 recrutés locaux seraient en poste dans les établissements conventionnés. Enfin, votre Rapporteur spécial se félicite qu’il soit désormais fait mention dans les documents budgétaires du nombre de recrutés locaux des établissements à autonomie financière, centres et instituts culturels, qui s’élève donc à 1.140 ETPT.

Malgré les efforts réalisés, il semblerait, à la lecture du projet annuel de performance, que les données relatives aux emplois des opérateurs manquent encore de fiabilité et que certaines informations portent encore sur des effectifs réels et non sur des ETPT. Au-delà des problèmes de décompte des emplois, la présentation des emplois des opérateurs demeure perfectible. En effet, si une distinction est opérée entre les personnels rémunérés par l’opérateur et ceux mis à disposition, il n’est toujours pas précisé quel est le nombre d’emplois rémunérés à partir de la subvention versée par l’État et celui relatif aux emplois rémunérés à partir des ressources propres de l’organisme. C’était pourtant l’esprit qui a présidé à l’adoption de la loi organique du 12 juillet 2005 modifiant la loi du 1er août 2001.

Hors dépenses de personnel, les crédits du programme devraient progresser de 1,84 %, pour atteindre 436,49 millions d’euros. Cette progression devrait bénéficier principalement à l’AEFE, qui voit sa dotation augmenter de 324,30 millions d’euros à 332,57 millions d’euros. Les crédits destinés à la promotion de la langue et de la culture françaises devraient légèrement progresser tandis que ceux demandés au titre des échanges scientifiques, techniques et universitaires devraient être consolidés.

L’action du ministère des Affaires étrangères en faveur de la langue et de la culture françaises dans les pays développés s’appuie principalement sur 59 centres et instituts culturels et 73 Alliances françaises. Ces établissements ont pour principales missions :

– l’enseignement du français, suivi, en 2005, par 69.098 personnes dans des établissements culturels. À cet égard, votre Rapporteur spécial regrette que le même indicateur ne soit pas disponible, dans le projet annuel de performance, pour les Alliances françaises ;

– la mise à la disposition du public local d’informations sur la France et sa culture ;

– la diffusion de la création culturelle française par l’organisation de manifestations culturelles ;

– la promotion de l’enseignement supérieur français et l’orientation des étudiants souhaitant effectuer des études en France.

Lancée en 1999, la rationalisation du réseau culturel a eu pour principal objectif de réduire le nombre d’établissements culturels en Europe occidentale. Ainsi, selon le ministère des Affaires étrangères, plus d’un tiers des centres et instituts culturels ont été fermés en Europe occidentale entre 1999 et 2006, leur nombre passant de 52 à 35. Après la fermeture des instituts français de Porto, Sarrebruck et Graz en 2004, de la Délégation culturelle de Gand et de l’Institut français de Gênes en 2005, ce sont les Instituts français de Séville, Cologne et Dresde qui ont été fermés en 2006.

Toutefois, ces fermetures n’ont pas abouti à la disparition de la présence française. Dans tous les cas, il a été procédé soit à une extension géographique des compétences d’un autre institut (Mayence dans le cas de Sarrebruck, Innsbruck dans le cas de Graz, Leipzig dans le cas de Dresde, Düsseldorf dans le cas de Cologne), soit au transfert des activités vers une Alliance française (création d’une Alliance à Gênes, développement de l’Alliance de Séville), soit, encore, à la création d’une structure nouvelle (consulat d’influence à Porto).

Selon le ministère, les moyens économisés, dont aucune évaluation n’a pu être obtenue par votre Rapporteur spécial, ont été consacrés au développement du réseau dans les grands pays émergents (comme la Chine ou la Russie) ainsi qu’à la réouverture du réseau algérien. Ainsi, sur le présent programme, les économies réalisées ont été redéployées afin de permettre l’ouverture d’Alliances françaises à Oufa et Kazan et d’accroître les moyens consacrés aux Alliances d’Irkoutsk, Nijni-Novgorod et Novossibirsk.

Parallèlement, l’autonomie financière a été redonnée à l’Institut français de Saragosse, antenne de l’Institut français de Madrid depuis 1999, dont l’importance croissante justifiait, selon le ministère, une autonomie à part entière.

Enfin, il convient de souligner la création du centre culturel français d’Amsterdam, né de la fusion du SCAC de La Haye et de la Maison Descartes d’Amsterdam.

Votre Rapporteur spécial se félicite de la réduction du nombre de centres et instituts culturels en Europe occidentale, qui lui apparaît pleinement justifiée. Ainsi que l’a souligné la mission d’évaluation et de contrôle sur les services de l’État à l’étranger, « compte tenu des liens unissant ces États, du rôle joué par l’AFAA, et bientôt par CulturesFrance, en matière de promotion de la culture française, de l’influence des réseaux télévisés et du développement de l’Internet, le maintien des instituts et centres culturels dans leurs fonctions classiques semble de moins en moins justifié. Le rôle de l’État français n’est pas d’entretenir des salles de spectacles dans les quatorze anciens États membres. Il convient plutôt de mettre l’accent sur le développement des partenariats et des échanges avec les institutions locales, ce qui relève davantage de la compétence du conseiller culturel que d’un directeur de centre ou d’institut culturel » (26).

Les efforts doivent être poursuivis et accentués, malgré les obstacles politiques auxquels peuvent se heurter les décisions de fermetures ou de transformations d’établissements culturels. Surtout, les fermetures ne doivent pas, in fine, se traduire, par la mise en place d’une, voire de plusieurs nouvelles structures, comme cela semble être le cas à Porto, où, non seulement un consulat d’influence a été créé, mais où un projet de mise en place de centre culturel franco-allemand est actuellement à l’étude.

À ce sujet, si votre Rapporteur spécial est convaincu de l’intérêt que présente le renforcement de la collaboration avec les partenaires européens s’agissant de la représentation consulaire, il est plus réservé sur la coopération en matière culturelle. Au-delà de l’anomalie que constitue la présence d’un centre culturel franco-allemand à Luxembourg, capitale d’un pays frontalier dont les langues officielles sont le luxembourgeois, l’allemand et le français, votre Rapporteur spécial a pu constater lors de sa mission effectuée à Ramallah que la création d’un centre culturel franco-allemand, si elle était justifiée en l’espèce pour des raisons politiques, n’entraînait pas nécessairement des économies.

Traduction budgétaire de la restructuration du réseau des établissements culturels dans les pays développés, la dotation de fonctionnement inscrite dans le présent projet s’élève à 17,04 millions d’euros, contre 18,07 millions d’euros dans le projet de budget pour 2006 et 17,36 millions d’euros finalement ouverts. Ces crédits devraient être complétés à hauteur de 4,96 millions d’euros par des crédits d’intervention destinés à l’organisation de manifestations culturelles. Après avoir diminué de 10 % entre 2005 et 2006, ces crédits progresseraient de 10,2 % entre 2006 et 2007.

Votre Rapporteur spécial estime toutefois que les informations figurant dans le projet annuel de performance relatives à ces établissements ne sont pas complètes. Alors que le nombre de recrutés locaux est indiqué (1.140 ETPT), le nombre de personnels expatriés affectés dans ces établissements et inclus dans le plafond d’autorisation d’emplois est curieusement absent. Par ailleurs, on ne connaît pas exactement le coût de ces personnels pour le budget de l’État. Enfin, contrairement à la logique de coût complet prônée par la loi organique relative aux lois de finances, les crédits d’investissement destinés aux établissements culturels sont désormais rattachés au programme Action de la France en Europe et dans le monde.

Pour leur part, les Alliances françaises devraient bénéficier de subventions à hauteur de 4 millions d’euros, en hausse de 1,8 % par rapport à 2006. Ces crédits incluent des subventions d’appui à plusieurs projets immobiliers, dont ceux menés à New York (100.000 euros) et Madrid (300 000 euros). Par ailleurs, 69 agents expatriés sont mis à la disposition des Alliances françaises pour en assurer la direction ou l’animation.

Comme votre Rapporteur spécial l’a souligné à plusieurs reprises, il est impératif que la réorganisation de notre réseau culturel à l’étranger se fasse au bénéfice des Alliances françaises, dont l’action se révèle être très efficace et moins coûteuse que celle menée par les établissements culturels. En effet, ce réseau d’établissements de droit local, unique au monde, tire sa force de l’initiative privée et de la coopération entre des partenaires locaux et français, ce qui lui confère un rayonnement généralement plus large que celui des établissements culturels à autonomie financière. Surtout, le soutien financier du ministère des Affaires étrangères se traduit par des détachements de personnels et des subventions sur projets d’un coût inférieur à celui généré par le soutien apporté aux établissements culturels, qui couvre fréquemment des coûts de structure. En outre, le taux d’autofinancement des Alliances françaises, supérieur à 60 %, est, en moyenne, plus élevé que celui des établissements à autonomie financière (51 % hors coût des expatriés ; 42 % y compris coût des expatriés). Il convient toutefois de souligner que les taux d’autofinancement des établissements présents dans les pays développés sont supérieurs, puisqu’ils s’élèvent respectivement à 62 % et 51 %.

Si votre Rapporteur spécial se félicite de la présence de cet indicateur relatif à l’autofinancement des établissements culturels dans le projet annuel de performance, ainsi que de l’ambitieux objectif-cible qui y est attaché (60 % en 2010), il souhaiterait que le même indicateur figure pour les Alliances françaises.

Une subvention de 9 millions d’euros est enfin inscrite dans le projet de loi de finances pour la nouvelle agence culturelle « CulturesFrance ». Issue de la fusion, le 22 juin dernier, de l’Association française d’action artistique (AFAA) (27) et l’Association pour la diffusion de la pensée française (ADPF) (28), CulturesFrance a ainsi reçu pour mission de :

– valoriser l’action culturelle française à l’étranger (promotion de la création contemporaine française, organisation des saisons culturelles en France et à l’étranger, conception et diffusion de produits culturels) ;

– promouvoir les coopérations en faveur de la diversité culturelle (actions de formation dans le secteur de l’ingénierie culturelle et échanges entre artistes) ;

– contribuer à l’émergence d’une Europe de la culture ;

– favoriser les partenariats financiers avec les collectivités territoriales, les fondations et les mécènes.

L’objectif poursuivi par la création de cette agence est d’accroître la lisibilité et l’efficacité du dispositif de promotion de la culture française dans le monde. Cet établissement devrait être doté d’un budget de 30 millions d’euros, notamment alimenté par deux subventions, une du ministère des Affaires étrangères, l’autre du ministère de la Culture. M. Olivier Poivre d’Arvor, directeur de la nouvelle entité, avait indiqué à la mission d’évaluation et de contrôle sur les services de l’État à l’étranger que le simple rapprochement de l’AFAA et de l’ADPF devait permettre de réduire de 25 à 30 % les frais de fonctionnement (29). Votre Rapporteur spécial note que le montant des crédits demandés dans le projet de budget correspond à la reconduction des deux dotations votées l’année dernière (soit 8 millions d’euros pour l’AFAA et 1 million d’euros pour l’ADPF).

Alors que la MEC avait proposé, dans un souci de clarté et d’efficacité, d’intégrer, dans un premier temps à titre expérimental, les centres et instituts culturels ainsi que les Alliances françaises au sein de l’opérateur CulturesFrance et de créer une « marque » de référence de l’action culturelle française à l’étranger, par exemple à partir du nom « CulturesFrance », le ministère a indiqué que CulturesFrance n’inclura ni les établissements culturels, ni les Alliances françaises. En revanche, si le sigle « CulturesFrance » sera réservé à l’agence, une réflexion sur la création d’une signature unique du réseau culturel français à l’étranger sera lancée.

b) Les bourses, invitations et missions d’experts

Les crédits prévus pour les bourses linguistiques et de stage pédagogique devraient diminuer de 12,8 % par rapport à 2006, pour s’établir à 1,83 million d’euros, ce qui représente 1.639 mois de bourse, tandis que les crédits prévus pour les invitations et les missions d’experts devraient baisser de 9,5 % pour s’élever à 1,9 million d’euros, destinés à 1.200 bénéficiaires.

c) Les opérations de promotion de la langue et de la culture françaises

18,26 millions d’euros sont demandés dans le présent projet au titre des opérations d’intervention spécifiques en faveur de la diffusion de la langue et de la culture françaises, contre 16,2 millions d’euros en 2006, soit une augmentation de 12,7 %.

Parmi ces 18,26 millions d’euros, 8,82 millions d’euros devraient tout d’abord permettre le financement d’opérations de promotion, de diffusion et de valorisation de la langue française. Ils se répartiraient entre des actions de formation, d’expertise et de développement des technologies de l’information et de la communication (1,21 million d’euros), de partenariat avec les systèmes éducatifs nationaux (1,71 million d’euros), de diffusion du français auprès de nouveaux publics (0,47 million d’euros) et de soutien au français dans les pays en transition (0,1 million d’euros). Surtout, 5,33 millions d’euros seraient consacrés à la promotion du français auprès de publics privilégiés que sont les journalistes, les diplomates et les fonctionnaires des pays de l’Union européenne. À cet égard, il convient de souligner le succès du « plan pluriannuel pour le français dans l’Union européenne », dont l’objet est de renforcer la place du français dans les institutions européennes, en organisant la formation à la langue française de fonctionnaires, diplomates et journalistes non francophones appelés à travailler à Bruxelles.

Lancé en 2003, il réunit les gouvernements français et luxembourgeois, le gouvernement de la Communauté française de Belgique et l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). Depuis 2004, les efforts de formation sont plus particulièrement orientés vers les ressortissants des nouveaux États membres, de la Bulgarie et de la Roumanie. Ce plan connaît un succès croissant : près de 8.800 personnes ont ainsi suivi des sessions de formation au ou en français.

En 2005 et 2006, l’action menée en faveur de la promotion de la langue française dans l’Union européenne s’est considérablement développée. Les actions de formation ont été étendues et diversifiées. Plusieurs mémorandums d’entente avec les gouvernements de pays européens membres et observateurs de l’OIF (30) ont été signés afin de renforcer les compétences de travail en français. Enfin, des accords ont été conclus avec des instituts de formation aux questions européennes (31) (écoles nationales d’administration européennes, instituts diplomatiques des ministères des Affaires étrangères, collèges européens), afin d’y améliorer le statut du français.

Après avoir bénéficié de 1,9 million d’euros en 2004 et de 1,4 million d’euros en 2005, le plan pluriannuel pour le français dans l’Union européenne devrait recevoir 2,3 millions d’euros en 2006. Les crédits demandés pour 2007 devraient permettre d’approfondir l’effort de formation et de conclure de nouveaux mémorandums d’entente.

Parmi les 18,26 millions d’euros demandés pour 2007 au titre de la diffusion de la langue et de la culture françaises, 9,44 millions d’euros devraient être consacrés à la coopération culturelle et audiovisuelle, qui prend des formes très variées.

Ainsi, le soutien aux exportations de biens audiovisuels prendra la forme de subventions à Unifrance, TVFI, Bureau export de la musique et Francophonie diffusion pour un montant total de 1,04 million d’euros. 1,17 million d’euros seront destinés à des actions de promotion des produits culturels français et d’appui à la jeune création, comme les festivals de cinéma et de documentaire français, la diffusion des films français en salles via le réseau Europa Cinémas ou encore l’attribution des bourses Louis Lumière et l’organisation des deuxièmes rencontres internationales des médias numériques. 1,67 million d’euros seront consacrés à la mise à disposition des établissements culturels et de leurs partenaires d’un catalogue de 300 films et 3.000 documentaires français.

Il est également prévu de consacrer 5,52 millions d’euros à la diffusion de la pensée et de la culture françaises. Ces crédits seront plus particulièrement affectés à des programmes d’aide à la publication, d’encouragement à la mobilité et à la formation des artistes et des professionnels de la culture, à des échanges de jeunes et à la coopération. Le programme d’appui aux projets culturels franco-allemands en pays tiers, lancé en 2003 à l’occasion de la célébration du 40ème anniversaire du Traité de l’Élysée, sera poursuivi. Il se caractérise par un fonds de financement, doté à part égale par les gouvernements français et allemands de 500.000 euros en 2005 et 600.000 euros en 2006. Un nouveau versement de 600.000 euros devrait intervenir en 2007, pour lequel sont demandés 120.000 euros sur le programme Rayonnement culturel et scientifique et 180.000 euros sur le programme Solidarité à l’égard des pays en développement.

Enfin, 38.870 euros devraient être consacrés à la mise en œuvre de la convention de l’UNESCO sur la promotion de la diversité des expressions culturelles adoptée le 20 octobre 2005.

Après une baisse de l’ordre de 8 % dans la loi de finances pour 2006, les crédits destinés au soutien des échanges scientifiques, techniques et universitaires sont reconduits à hauteur de 43,48 millions d’euros. Ces crédits poursuivent trois objectifs : renforcer l’attractivité du territoire auprès des étudiants et des chercheurs étrangers (près de la moitié des crédits, 20,95 millions d’euros devraient y être consacrés), promouvoir la science française à l’étranger (14,41 millions d’euros) et contribuer à la gouvernance et aux échanges techniques (8,1 millions d’euros).

Les centres de recherche qui, contrairement aux établissements culturels, ne disposent pas de capacité d’autofinancement, devraient bénéficier d’une dotation de fonctionnement de 1,36 million d’euros, contre 1,4 million d’euros en 2006.

Pour sa part, EDUFRANCE, qui mène des actions de promotion de l’enseignement supérieur français auprès des étudiants étrangers, voit sa dotation baisser de près de 20 %, pour atteindre 0,31 million d’euros. Toutefois, cette dotation devrait être complétée à hauteur de 1,1 million d’euros en provenance du programme Solidarité à l’égard des pays en développement (soit le même montant que l’année dernière) et de 1,6 million d’euros inscrits sur le programme Formations supérieures et recherche universitaire (contre 1,56 million d’euros en 2006). Ainsi, malgré la baisse des crédits rattachés au programme Rayonnement culturel et scientifique de 77.185 euros, la subvention globale destinée à EDUFRANCE devrait progresser. Un plan d’action pluriannuel est en cours de négociation avec EDUFRANCE, qui devrait donner lieu à la définition d’indicateurs de résultat et de performance.

Par ailleurs, 169.115 euros sont prévus afin de financer la création de trois nouveaux centres d’études en France (CEF) au Canada, aux États-Unis et en Russie. Mis en place à titre expérimental en Chine, au Maghreb, au Sénégal et au Vietnam, les CEF offrent un guichet unique aux jeunes étrangers souhaitant poursuivre leurs études en France. Les CEF permettent aux étudiants de disposer d’un interlocuteur unique répondant à leurs questions via leur espace personnel sur Internet, et de faciliter les différentes formalités à accomplir, en particulier d’accélérer la procédure d’examen des dossiers de demande de visa. Forts de leur succès auprès des jeunes et des établissements français d’enseignement supérieur mais également au regard des objectifs fixés en matière d’accueil des étudiants étrangers, les CEF sont appelés à se développer.

Un effort particulier sera consacré en 2007 aux bourses, auxquelles 18,4 millions d’euros devraient être consacrés, contre 16,5 millions d’euros en 2006. Ainsi, 16.757 mois de bourse devraient pouvoir être attribués. Des programmes de bourses d’excellence sont par ailleurs mis en œuvre sur crédits centraux : les bourses « Major » (0,6 million d’euros) destinées à prendre le relais des bourses d’excellence de l’AEFE, le programme Eiffel de bourses d’excellence (2,2 millions d’euros) destiné aux futurs décideurs dont le nouveau programme Eiffel Doctorat (0,25 million d’euros) qui finance des bourses de mobilité dans le cadre de thèses en cotutelle ou en codirection.

Les crédits prévus pour les invitations et missions d’experts devraient fortement baisser, pour s’élever à 4,4 millions d’euros (contre 7,34 millions d’euros en 2006).

Le ministère des Affaires étrangères soutient par ailleurs les établissements de recherche qui agissent comme maître d’œuvre et d’ouvrage de projets de recherche correspondants à des thématiques et à des enjeux d’actualité en sciences humaines et sociales. 1,2 million d’euros devraient leur être versés en 2007, contre 0,98 million d’euros en 2006. Les crédits destinés au financement de programmes de recherche locaux (notamment sur l’innovation et la culture scientifique et technique), de partenariats universitaires et de grands organismes de recherche devraient s’élever à 10,6 millions d’euros, contre 14,6 millions d’euros en 2006.

Dotés de 2,8 millions d’euros en 2006, les programmes d’échanges scientifiques, qui visent à accompagner la construction de l’Espace européen de la recherche et à favoriser l’internationalisation de la recherche française, devraient bénéficier d’une forte hausse de leurs crédits, qui devraient s’établir à 4,6 millions d’euros en 2007.

Le soutien aux réseaux universitaires bilatéraux (structures universitaires conjointes, comme les universités franco-allemande ou franco-italienne, et formations supérieures délocalisées, notamment dans les pays d’Europe centrale et orientale et en Russie) devrait diminuer. De 14,5 millions d’euros en 2006, les crédits devraient passer à 10,61 millions d’euros.

Les collectivités territoriales, notamment depuis la loi du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République qui les autorise à avoir des relations avec leurs équivalents étrangers, ont fait une entrée en force sur la scène internationale. Depuis lors, en effet, la coopération décentralisée n’a cessé de prendre de l’importance et les collectivités deviennent des partenaires incontournables de notre politique extérieure. L’État accompagne cette action, pour laquelle les besoins ont été évalués à 1,01 million d’euros en 2007, contre 0,5 million d’euros en 2006.

Les subventions versées aux organisations non-gouvernementales (ONG) concernent l’appui à des plates-formes et à des collectifs porteurs de projets significatifs (l’enfance en Roumanie, par exemple). Ces appuis visent aussi le plaidoyer international quand les ONG adhèrent aux politiques définies par le gouvernement. Les actions en direction de la société civile des pays européens seront soutenues pour mieux faire connaître les positions françaises et percevoir les attentes de nos partenaires. Le volontariat et la mobilisation de la jeunesse recevront une attention particulière. 1,29 million d’euros devraient leur être consacrés en 2007, contre 1,4 million d’euros en 2006.

Premier réseau scolaire dans le monde avec 429 écoles et lycées présents dans 130 pays et 235.000 élèves scolarisés, le réseau des établissements français d’enseignement à l’étranger joue un rôle essentiel pour la présence, l’influence et le rayonnement de la France à l’étranger.

Très attractif (les effectifs ont augmenté de 10 % en quinze ans), ce réseau assure aux jeunes Français la continuité du service public d’enseignement à l’étranger et permet à notre pays de participer à la formation des élites étrangères.

Au sein de ce réseau, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) occupe une place primordiale : les 251 établissements relevant de l’agence – 73 établissements en gestion directe et 178 établissements conventionnés – accueillent 160.000 élèves, dont 56 % sont d’origine étrangère.

Le réseau des établissements scolaires liés à l’agence n’a pas connu de grands bouleversements au cours de l’année 2005-2006. Seuls deux changements de statut sont intervenus : d’une part, le passage en gestion directe de l’établissement de Pékin et, d’autre part, le conventionnement du lycée de Tokyo, dont la gestion sera assurée par une fondation de droit local. Ces aménagements sont justifiés, dans le premier cas, par le projet de construction d’un nouvel établissement sur un terrain dont la France est propriétaire et, dans le second cas, par la nécessité de donner un statut juridique au lycée.

Il convient de noter que les changements de statut, les entrées et les sorties des établissements dans le réseau n’ont pas de conséquence directe sur le budget de l’agence qui est amenée à redéployer, à moyens constants, les postes dont elle dispose au titre de son plafond d’emplois ainsi que les aides de fonctionnement, d’équipement ou d’investissement.

Le soutien apporté par le ministère à l’agence se traduit par la prise en charge de personnels titulaires (6.450 emplois), l’attribution de bourses, la formation continue des enseignants et la réalisation de projets immobiliers.

Après avoir diminué de manière continue entre 2003 et 2006, la subvention destinée à l’AEFE devrait progresser de 2, 6 % en 2007, pour atteindre 332,6 millions d’euros.

La dotation de l’État constitue la principale recette du budget de l’AEFE (77 % des produits prévus en 2006), le solde étant financé principalement par les contributions des parents d’élèves. La contribution des parents d’élèves à la rémunération des enseignants résidents devrait ainsi atteindre 90,7 millions d’euros en 2006, en hausse de près de 6 % par rapport au montant inscrit dans le budget prévisionnel pour 2005 (85,58 millions d’euros). En 2006, l’agence a dû de nouveau opérer un prélèvement sur son fonds de roulement, à hauteur de 15,4 millions d’euros, pour équilibrer son budget de fonctionnement.

Du côté des dépenses, les charges de personnel inscrites dans le budget prévisionnel pour 2006 augmentent de 4,7 %, pour s’élever à 356,1 millions d’euros. Cette hausse correspond d’abord aux charges financières résultant des dispositions inscrites dans le décret du 18 juin 2004 relatif au régime additionnel obligatoire de la fonction publique et de la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, ensuite à la progression de l’effectif « résidents » rémunéré (+ 207 postes) et, enfin, à la création de 3 postes de résidents, de 2 postes dans les services centraux et au transfert de 11 postes. Rappelons que l’agence comptait, en 2005-2006, 1.270 emplois de personnels expatriés, 4.919 emplois de personnels résidents et 12.737 ETPT de recrutés locaux. Les frais de voyage et de déménagement devraient progresser de 1,3 million d’euros par rapport à 2005. L’aide aux élèves français, en augmentation constante depuis 1997, devrait progresser de 3,3 % (après une hausse limitée à 0,7 % en 2005) pour atteindre 42,36 millions d’euros, tandis que celle aux élèves étrangers, dite « bourses d’excellence », devrait s’établir à 2,4 millions d’euros, en hausse de 6 % par rapport à 2005.

Dans la mesure où les bourses attribuées par l’AEFE bénéficient principalement aux élèves français, votre Rapporteur spécial estime plus pertinent de rattacher les crédits correspondants au programme Français à l’étranger et étrangers en France.

La progression de 8,3 millions d’euros demandée pour 2007 devrait contribuer à couvrir, d’une part, l’évolution des rémunérations des personnels de l’agence (3,4 millions d’euros) et, d’autre part, la revalorisation des bourses scolaires (4,6 millions d’euros).

Ainsi, les 3,4 millions d’euros supplémentaires ont pour objet de couvrir l’évolution de l’indice du point fonction publique, revalorisé à hauteur de 0,5 % le 1er juillet 2006, de 1 % le 1er novembre 2006 et de 0,5 % le 1er février 2007, ainsi que la progression de la masse salariale résultant du GVT. Cette hausse ne permettra toutefois pas de répondre à la demande formulée par l’AEFE d’un abondement supplémentaire de 15,4 millions d’euros, montant du prélèvement sur son fonds de roulement en 2006, afin de faire face à l’évolution de la masse salariale.

Les 4,6 millions d’euros supplémentaires destinés aux bourses scolaires devraient contribuer à couvrir l’augmentation des frais de scolarité, les besoins étant estimés à 6 millions d’euros.

Par ailleurs, 340.00 euros, inscrits au sein du programme Action de la France en Europe et dans le monde (32), devraient contribuer au financement des études relatives l’opération immobilière concernant l’école française de Damas.

S’agissant des investissements immobiliers, le ministère des Affaires étrangères s’est engagé, dans le cadre du contrat de modernisation, à « appuyer le développement d’une politique immobilière autonome de l’AEFE », par deux initiatives :

– la remise progressive en dotation des lycées, notamment ceux en gestion directe ;

– l’expérimentation de formules de financements innovants, comme les partenariats public-privé.

La remise des locaux des établissements d’enseignement en gestion directe à l’agence, sous la forme d’une dotation, a été rendue possible par le décret n° 2005-551 du 19 mai 2005, qui modifie le statut de l’agence, afin de lui donner de nouvelles prérogatives en matière de gestion domaniale (mises à disposition des immeubles des établissements en gestion directe, aménagement, entretien, réparation et construction).

Grâce à cette réforme, l’AEFE peut mieux répondre aux besoins des établissements en gestion directe en matière d’investissement. L’établissement peut en effet mobiliser des crédits d’investissement pour réaliser des travaux de mise aux normes, notamment en matière de sécurité ; lisser dans le temps les charges entraînées par des investissements lourds de construction, grâce au recours à l’emprunt ; faire appel aux moyens dégagés par le recours à l’autofinancement des établissements et recueillir les participations financières issues du mécénat. Les nouvelles compétences confiées à l’agence en matière immobilière doivent ainsi favoriser une meilleure gestion et garantir aux parents d’élèves, qui assurent une bonne part du financement des établissements, l’existence de règles claires quant à la solidarité liant les établissements et l’agence centrale.

Depuis 2005, huit établissements ont été remis en dotation à l’agence à Barcelone, Bruxelles, Buenos Aires, Dakar, Francfort, Lisbonne, Valence et Vienne. Tous les immeubles remis en dotation devraient faire l’objet d’investissements immobiliers, qu’il s’agisse de reconstruction sur les sites existants ou d’opérations de remise aux normes ou de rénovation. Ainsi, à Dakar, un projet de reconstruction du lycée Jean Mermoz sur le site déjà occupé par cet établissement est engagé. Des opérations de rénovation sont par ailleurs menées à Barcelone, Bruxelles, Lisbonne, Valence et Vienne.

L’agence finance également des opérations en biens propres à :

– Ho Chi Minh-Ville, où un projet de construction, dont le coût est évalué à 4 millions d’euros, va être engagé prochainement sur un terrain loué pour une durée de 50 ans aux autorités locales ;

– Munich, où l’agence s’apprête à acheter une école existante pour y réinstaller une partie du lycée français actuellement installé à grands frais dans un immeuble en location. Le coût total du projet est estimé à 19 millions d’euros ;

– Sousse, où l’agence recherche un terrain pour reconstruire le collège français ;

– Londres, où l’agence, face à l’accroissement des besoins, doit créer une école primaire sur un nouveau site.

Des montages financiers innovants sont par ailleurs développés au Caire, où la construction du nouveau lycée français sur un terrain appartenant à l’État français fait l’objet d’un contrat de partenariat public-privé, et à Abou Dhabi, où un projet d’extension du lycée Louis Massignon doit être financé par les Émirats Arabes Unis dans le cadre d’un accord sur la scolarisation d’enfants émiriens.

Enfin, les immeubles non remis en dotation restent gérés par le ministère des Affaires étrangères qui continue d’en assurer l’entretien immobilier. Ainsi, alors que la construction du lycée de Milan vient de s’achever, devraient être engagés la construction de nouveaux bâtiments à l’école Robert Desnos à Tunis et divers projets de rénovation de moyenne importance (notamment au lycée français de Rome et au lycée de Niamey).

Les établissements conventionnés, dont l’état matériel est très variable, reçoivent seulement des subventions de l’AEFE, lesquelles devraient être, comme chaque année, de l’ordre de 6 à 7 millions d’euros en 2007. Ces subventions devraient contribuer à l’acquisition des terrains pour la construction des lycées d’Ankara, Brasilia, Amman et Hanoï.

Les crédits inscrits sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France ont pour objet de fournir aux Français établis hors de France ou de passage à l’étranger une protection et un certain nombre de services administratifs, d’instruire les demandes de visas des étrangers et d’assurer le traitement des demandes d’asile et la protection des réfugiés. Ces missions sont assurées par les consulats, la Direction des Français à l’étranger et des étrangers en France ainsi que par l’OFPRA.

Les crédits de paiement et autorisations d’engagement demandés pour 2007 s’élèvent à 287,1 millions d’euros, en hausse de 2 % par rapport à 2006. À structure constante (33), la progression des crédits est de 4,4 %.

Les dépenses de personnel devraient s’élever à 189,5 millions d’euros, ce qui représente 24,11 % des dépenses de personnel inscrites dans la mission Action extérieure de l’État. À structure constante, elles enregistrent une légère baisse, de l’ordre de 0,38 %. Les principales évolutions affectant les dépenses de personnel sont les suivantes :

– la suppression de 8 ETPT (– 0,21 million d’euros) ;

– l’évolution de la masse salariale liée au glissement vieillesse technicité (+ 0,17 million d’euros) ;

– les augmentations du point d’indice de la fonction publique (+ 0,55 million d’euros) ;

– les mesures catégorielles (+ 0,90 million d’euros) ;

– les variations du compte d’affectation spéciale Pensions, notamment dues à la variation des effectifs et des taux de cotisations (+ 0,31 million d’euros).

Parmi les 3.398 emplois exprimés en ETPT inscrits sur le programme et inclus dans le plafond ministériel d’autorisation des emplois, 715 sont en administration centrale, 973 dans le réseau, 95 concernent des contractuels et des volontaires internationaux et 1.615 sont des agents de droit local. Les 8 emplois supprimés entre 2006 et 2007 concernent les titulaires en administration centrale (4) et les agents de droit local (4).

À ces 3.398 emplois s’ajoutent les 608 emplois de l’OFPRA, qui ne sont pas inclus dans le plafond d’autorisation d’emplois du ministère. Le nombre de ces emplois devrait être stable entre 2006 et 2007. Ainsi, ce sont 4.006 ETPT qui participent à l’action du programme Français à l’étranger et étrangers en France.

Si l’on exclut les dépenses de personnel, les crédits inscrits au sein du programme connaissent une forte progression, de l’ordre de 15 %, pour s’établir à 97,66 millions d’euros. La priorité est accordée à la mise en place des visas biométriques : 16 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour l’équipement des postes consulaires. Si les crédits destinés à la protection et à l’aide sociale aux Français établis hors de France sont consolidés, ceux consacrés à la prise en charge des réfugiés reculent, en particulier la subvention versée à l’OFPRA, qui passe de 49 à 45,56 millions d’euros.

Un peu plus de 2 millions de Français seraient établis hors de France. Toutefois, leur nombre n’est pas connu exactement. Il est estimé par les postes, à partir du nombre d’immatriculés, qui s’établit à près d’1,27 million à la fin de l’année 2005. Cette population est en forte augmentation, puisqu’elle a crû d’un peu plus de 40 % sur les dix dernières années. Si, en 10 ans, la population française établie hors de France recensée a augmenté au rythme de 3,5 % par an, sa progression semble enregistrer un léger fléchissement depuis 2003.

Les évolutions divergent par ailleurs sensiblement entre les régions : la population française diminue en Europe occidentale et en Amérique du Nord tandis qu’elle augmente fortement en Afrique du Nord, en Asie, en Océanie et au Proche Orient. Plus de 50 % des ressortissants français immatriculés vivent en Europe, moins de 20 % en Amérique, et environ 15 % en Afrique.

Au total, les pays accueillant les communautés françaises les plus importantes sont la Suisse (128.700 immatriculés en 2005), les États-Unis d’Amérique (106.100), le Royaume-Uni (102.470), l’Allemagne (101.390) la Belgique (79.830), l’Espagne (68.500) et le Canada (62.760). Alors que le nombre d’immatriculés a augmenté entre 2004 et 2005 au Royaume Uni (+ 8,4 %), en Espagne (+ 4 %) et aux États-Unis (+ 2 %), il a diminué en Belgique (– 7,3 %), en Allemagne (– 5 %), en Suisse (– 3,3 %) et au Canada (– 2,6 %).

Hors dépenses de personnel, les crédits inscrits sur l’action Offre d’un service public de qualité aux Français à l’étranger sont en légère hausse et s’élèvent à 35,91 millions d’euros (contre 35,7 millions d’euros en 2006).

Outre l’instruction des demandes de visas des étrangers et l’activité d’analyse et d’influence dans le pays d’accueil, les consulats ont pour mission d’offrir aux Français établis hors de France une protection et de nombreux services administratifs.

Dans un souci d’amélioration de la qualité du service rendu aux Français établis à l’étranger et d’efficience, le ministère s’est engagé de manière résolue dans la modernisation de l’administration et du réseau consulaires.

Les axes de réforme privilégiés sont la simplification des procédures, le regroupement des compétences, l’externalisation de certaines tâches et le développement de l’administration électronique. De nombreux progrès ont déjà été réalisés. La réforme de l’immatriculation consulaire, la suppression du notariat consulaire en Europe, la fusion des listes électorales concomitante à la simplification des formulaires administratifs, l’introduction du vote électronique, la mise en place du passeport électronique, le développement de partenariats avec les comités consulaires en matière d’aide sociale et le recours croissant à l’administration électronique (accès par Internet au service central de l’état-civil et transmission électronique des données nécessaires à la fabrication des passeports) s’inscrivent dans la recherche d’une gestion plus efficace, ce dont se félicite votre Rapporteur spécial.

Ainsi, en 2006, le vote par voie électronique a été utilisé pour la première fois à l’échelle de l’ensemble des circonscriptions électorales concernées par le renouvellement triennal (Europe, Asie, Levant), ce qui représente 525.000 électeurs. Depuis mai 2006, le serveur ELECTIS permet à tout Français établi hors de France de se remémorer sa situation au regard du droit électoral. Un registre mondial des Français établis hors de France a également été constitué, qui doit notamment permettre à tout Français possédant un numéro d’identification de se mettre en rapport avec n’importe quel poste consulaire pour effectuer ses formalités administratives, où qu’il se trouve dans le monde.

Afin de poursuivre dans la voie de l’informatisation, 2 millions d’euros sont inscrits dans le projet de loi de finances, qui devraient permettre de poursuivre le développement :

– du logiciel de gestion consulaire Racine, destiné à la gestion du registre des Français établis hors de France et à la mise en place de téléprocédures (0,65 million d’euros) ;

– des applications permettant la transcription et la délivrance des actes d’état-civil des Français nés à l’étranger (0,7 million d’euros) ;

– d’un nouvel outil de gestion des crises (0,65 million d’euros).

Mais l’essentiel des dépenses consacrées au fonctionnement de l’administration et du réseau consulaires concerne les frais de tournée et de représentation consulaires (3,11 millions d’euros, soit le même montant que l’année dernière), les achats de documents auprès de l’Imprimerie nationale (2,77 millions d’euros), les dépenses courantes du service chargé de l’état-civil (1,29 million d’euros) et de la Direction des Français à l’étranger (0,46 million d’euros).

S’ajoute la dotation prévue pour les consuls honoraires (1,22 million d’euros, soit le même montant que l’année dernière), qui exercent leur activité à titre bénévole. Pouvant être amenés à exercer trois types de fonctions (intermédiaire pour les formalités administratives ; protection consulaire de premier niveau ; influence politique, économique et culturelle), ils sont simplement autorisés à conserver, à titre de frais de bureau, une partie des droits de chancellerie qu’ils perçoivent (34). Toutefois, dans les faits, la plupart des consuls honoraires ne perçoivent pas ou peu de droits de chancellerie, si bien que, souvent, ils ne peuvent supporter la charge financière inhérente au fonctionnement de leur agence. Aussi, la subvention qui leur est versée constitue la contrepartie normale des services rendus à notre pays et à nos compatriotes.

Le ministère s’était fixé comme objectif en 2006 de réduire le réseau des consuls honoraires tout en augmentant les moyens mis à leur disposition. Or, si le nombre d’agences consulaires est passé de 525 en 2004 à 507 en 2005, cette réduction semble marquer un infléchissement, dans la mesure où le nombre d’agences consulaires n’a baissé que de 4 entre 2005 et 2006.

Votre Rapporteur spécial estime nécessaire de s’appuyer davantage sur ce réseau, qui constitue un relais précieux pour notre réseau consulaire. Afin de renforcer l’efficacité de ce réseau, il convient de poursuivre sa modernisation selon quatre axes :

– rééquilibrer le réseau en faveur de pays à la géographie spécifique (vastes superficies, archipels…) ou à forte activité touristique ;

– clarifier les compétences des consuls honoraires ;

– mieux associer les consuls honoraires à l’animation du réseau consulaire ;

– passer d’une logique de subvention à une logique d’indemnité de fonction qui permettrait de mieux tenir compte des charges et des besoins réels des consuls honoraires.

Tout d’abord, 1,59 million d’euros sont inscrits dans le présent projet de loi de finances pour assurer la sécurité des Français à l’étranger. Cette dotation est reconduite depuis 2005, où elle avait fait l’objet d’une hausse de 14,4 %. L’objectif est d’améliorer les équipements de sécurité des postes, ce qui suppose le renouvellement des stocks de rations alimentaires et de survie pour un coût de 289.000 euros, des matériels de sécurité (tentes, lits, kits de potabilisation d’eau, pelles, etc.) et des réseaux radios pour 1 million d’euros. 300.000 euros sont également prévus pour assurer le service de réponse téléphonique mis en place en cas de crise et confié en partie à une société privée.

Cette enveloppe ne comprend pas les crédits nécessaires à la gestion d’éventuelles crises, comme celle intervenue cette année au Liban, qui a nécessité l’ouverture de 9,3 millions d’euros au mois d’octobre pour couvrir les frais de rapatriement de 14.009 personnes (dont 10.806 Français) depuis Beyrouth. Cette somme a notamment permis de couvrir les frais de transport aérien (5,89 millions d’euros), d’affrètement du bateau Iera Petra qui a effectué cinq rotations (1,98 million d’euros) et de service d’assistance téléphonique (0,29 million d’euros).

Ensuite, l’évolution des crédits destinés à l’aide sociale, à l’emploi et à la formation est marquée par une forte augmentation des crédits en faveur du dispositif d’aide à l’accès à l’assurance maladie de la Caisse des Français de l’étranger.

• La contribution à la couverture sociale des Français de l’étranger devrait s’élever à 1,4 million d’euros, soit plus du quadruple du montant inscrit en 2006. Créé par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, le dispositif d’aide à l’assurance volontaire maladie-maternité de la CFE en faveur des Français vivant à l’étranger et disposant de revenus modestes se traduit par un financement public d’une partie, actuellement le tiers, de leurs cotisations. Ce dispositif devait être financé dans un premier temps par un prélèvement de 7,6 millions d’euros sur les réserves de la Caisse, puis par le ministère des Affaires étrangères. Les réserves de la Caisse étant épuisées, il revient désormais au seul ministère de supporter le coût de ce dispositif. Une première avance de 250.000 euros a ainsi été versée en décembre 2005. Pour 2006, un acompte de 300.000 euros devait être versé en août mais, compte tenu des besoins urgents en crédits engendrés par la crise au Liban, il ne pourra l’être qu’au mois de novembre. Le solde sera versé au début de l’année 2007, au vu des dépenses constatées à la clôture de l’exercice 2006. Si le nombre de bénéficiaires du dispositif, qui a progressé jusqu’à 4.058 personnes en avril 2004, il tend à décroître progressivement (3.743 bénéficiaires en novembre 2005). Toutefois, compte tenu de la montée en puissance de la contribution du ministère des Affaires étrangères, il convient de rester vigilant quant à l’évolution du taux de participation de l’État, alors qu’une nouvelle convention doit prochainement être conclue avec la Caisse.

• La dotation prévue pour les aides sociales en faveur de nos compatriotes les plus démunis résidant à l’étranger devrait s’élever à 16,09 millions d’euros. Ces aides prennent la forme d’allocations pour les personnes âgées et pour les personnes handicapées, de secours occasionnels et d’une aide aux Français de passage en difficulté. 5.176 allocations ont été versées en 2005 (68 % de personnes âgées, 30 % de personnes handicapées et 2 % d’aides ponctuelles). Elles sont attribuées par les missions diplomatiques et consulaires, sur proposition des 209 comités consulaires pour la protection et l’action sociale.

• 1,12 million d’euros sont demandés pour le soutien à l’emploi et à la formation professionnelle des Français établis hors de France en 2007. Rappelons qu’en 2005, ce dispositif a permis à 3.840 Français établis à l’étranger de trouver un emploi. Ce sont les comités consulaires pour l’emploi et la formation professionnelle (de l’ordre d’une cinquantaine) qui supervisent le fonctionnement des bourses d’emploi, l’organisation de stages locaux et la sélection de candidats à des formations professionnelles en France.

• La dotation pour les dépenses de rapatriement devrait s’établir à 366.000 euros. En 2005, le nombre de rapatriements pris en charge par le ministère des Affaires étrangères s’est élevé à 287, en nette diminution par rapport à 2004 (401 rapatriements). Les rapatriements ont principalement bénéficié aux personnes indigentes (209).

• Les crédits prévus pour les associations œuvrant en faveur de l’assistance aux Français de l’étranger devraient s’élever à 238.000 euros, 800.000 euros étant en outre inscrits au bénéfice d’associations locales de bienfaisance (35).

Par ailleurs, les crédits destinés à l’adoption internationale devraient s’établir à 300.000 euros. La réforme de l’adoption a conduit au remplacement de la Mission de l’adoption internationale (MAI) par l’Agence française de l’adoption, chargée d’accueillir et de renseigner les candidats à l’adoption, et par le Secrétariat général de l’autorité centrale, qui assure un soutien financier aux organismes autorisés pour l’adoption et met en œuvre un programme d’invitations au profit des autorités centrales étrangères.

Enfin, il convient de souligner que la dotation prévue pour les maisons des Français à l’étranger s’élève à 140.000 euros et celle destinée à l’entretien des cimetières français à l’étranger à 200.000 euros.

L’Assemblée des Français de l’étranger, créée par la loi du 9 août 2004 (36) afin de succéder au Conseil supérieur des Français de l’étranger, est l’assemblée représentative des Français établis hors de France.

Afin d’accroître la représentativité de cette assemblée, il a été décidé d’augmenter progressivement, d’ici à 2009, le nombre de circonscriptions électorales de 48 à 52 et le nombre de membres élus de 150 à 155 et, dans le même temps, de diminuer le nombre de personnalités désignées de 21 à 12. Ainsi, le renouvellement triennal de juin 2006 a été l’occasion de porter le nombre d’élus à 153 et le nombre de personnalités désignées à 16. Par ailleurs, depuis l’année dernière, le nombre de sessions plénières est passé à deux sessions par an, avec comme souci d’assurer une plus grande continuité dans les travaux de l’assemblée. Enfin, les représentants des Français de l’étranger, dont les indemnités n’avaient pas été revalorisées depuis 1997, ont obtenu en 2006 une réévaluation de leurs émoluments. Ainsi, à l’ancienne indemnité, variable en fonction de l’éloignement du pays de résidence et de l’étendue de la circonscription, que les membres de l’Assemblée perçoivent au titre du remboursement partiel des frais occasionnés lors des déplacements pour assister aux réunions auxquelles ils sont convoqués par le Président de l’Assemblée, s’est ajoutée une nouvelle indemnité mensuelle d’un montant de 800 euros pour chaque élu.

Initialement inscrite à hauteur de 1,82 million d’euros et portée à 2,84 millions d’euros au cours de l’examen des crédits au Sénat, la dotation ouverte au titre de l’année 2006 a donc été principalement consacrée aux indemnités des membres de l’assemblée (2,02 millions d’euros), à l’organisation des élections du 18 juin 2006 relatives au renouvellement triennal de l’assemblée (165.000 euros) ainsi qu’à l’organisation des sessions (134.000 euros).

Alors que la dotation est quasi-reconduite, à hauteur de 2,8 millions d’euros, dans le présent projet, les membres de l’Assemblée souhaiteraient que l’indemnité obtenue en 2006 soit portée de 800 à 1.000 euros, ce qui entraînerait un coût supplémentaire de 368.000 euros au titre de l’exercice 2007.

En 2005, 2.051.915 visas ont été délivrés par les postes diplomatiques et consulaires français tandis que 359.455 demandes de visas ont été refusées.

La baisse du taux de refus (13 % aujourd’hui contre 32 % en 2002) résulte en grande partie du passage, en 2003, de la perception de frais de chancellerie lors de la délivrance des visas au paiement de frais de dossiers lors du dépôt des demandes de visa, consécutif à la décision du Conseil de l’Union européenne du 20 décembre 2001.

Actuellement, les délais de traitement des demandes de visas sont inférieurs à trois jours pour les visas Schengen non soumis à consultation, compris entre huit et quatorze jours pour les visas Schengen soumis à consultation et entre un et huit jours pour les visas nationaux. L’objectif fixé et affiché comme atteint dans le projet annuel de performance est que 80 % des décisions relatives à la délivrance des visas de court séjour soient prises en moins de onze jours. Après avoir observé les conditions de délivrance des visas dans plusieurs consulats, votre Rapporteur spécial doute de la pertinence de cet objectif, qui pousse à un rendement qui ne peut que nuire à l’attention apportée à l’examen des dossiers, et souhaiterait qu’il ne figure plus dans les documents budgétaires. Votre Rapporteur spécial reviendra plus en détail sur les faiblesses du dispositif de délivrance des visas Schengen.

Dans le projet de loi de finances, 63,07 millions d’euros sont inscrits sur l’action Instruction des demandes de visas, dont 47,07 millions d’euros au titre des dépenses de personnel. Les 16 millions d’euros supplémentaires prévus pour cette année ont pour objectif de financer la mise en place des visas biométriques dans les postes consulaires.

L’introduction de la biométrie dans les visas résulte de la décision n° 2004/512/CE du Conseil du 8 juin 2004, portant création du système d’information sur les visas (VIS), qui doit constituer une base européenne des demandeurs de visas, et de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France, qui autorise la collecte des données biométriques des demandeurs de visas et autorise le traitement automatisé de ces données.

Cette réforme devrait permettre une prévention plus efficace de la fraude (conservation pendant plusieurs années des empreintes digitales permettant des comparaisons ; garanties accrues sur l’identité des demandeurs), un suivi des déplacements des porteurs de visas biométriques et un meilleur contrôle des retours dans les pays d’origine.

La délivrance de visas biométriques implique la comparution personnelle de tous les demandeurs pour la prise des empreintes digitales et d’une photographie, alors que, aujourd’hui, 40 % seulement des demandeurs comparaissent personnellement : le temps de traitement de la demande devrait augmenter selon un coefficient multiplicateur compris entre 1,5 et 3. L’introduction de la biométrie a un coût, estimé à 145 millions d’euros, sur la période 2006-2008. Il convient en effet d’augmenter et de former les effectifs en charge du traitement des dossiers, d’accroître ou d’aménager les locaux d’accueil et d’installer un équipement spécifique.

Après une première expérimentation menée auprès de 5 postes (37) en 2005, le comité interministériel de contrôle de l’immigration a arrêté, le 27 juillet 2005, une liste de 29 postes consulaires (38) devant être équipés en 2006. Seuls 16 d’entre eux auront toutefois fait l’objet de premiers travaux et équipements en 2006.

Il convient de souligner, à cet égard, qu’aucun financement n’avait été prévu dans la loi de finances pour 2006 pour la mise en place des visas biométriques dans le réseau consulaire français. Votre Rapporteur spécial s’en était d’ailleurs inquiété.

Conclu le 18 avril 2006, le contrat de modernisation a précisé que le ministère des Affaires étrangères devait bénéficier, à partir de 2006, de la moitié du produit de la recette des frais de dossiers de demandes de visas, soit 40 millions d’euros cette année. Il a ajouté que le « retour sur recettes » était intégré à hauteur de 24 millions d’euros par la loi de finances initiale pour 2006 dans le périmètre de fonctionnement courant et d’investissement du ministère des Affaires étrangères.

Sur les 16 millions d’euros censés compléter cette dotation, seuls 4,5 millions d’euros ont été ouverts jusqu’à présent : 2,80 millions d’euros faisant l’objet d’une mesure de dégel de la réserve de précaution sur le programme Français à l’étranger et étrangers en France en juin et 1,70 million d’euros provenant d’un virement de crédits prélevés sur la réserve de précaution du programme Audiovisuel extérieur en octobre.

En revanche, 16 millions d’euros supplémentaires sont demandés pour 2007 dans le présent projet, afin :

– de poursuivre l’aménagement des locaux lancé en 2006 pour 16 postes consulaires et d’engager de nouvelles opérations auprès des consulats d’Alger et d’Annaba (10 millions d’euros) ;

– de mener les travaux nécessaires pour connecter le RMV au VIS (3,5 millions d’euros) ;

– de continuer d’équiper les postes consulaires en matériel de capture de données biométriques (2 millions d’euros) ;

– de former les agents des consulats aux nouvelles procédures induites par la biométrie et aux nouvelles technologies mises en place (0,5 million d’euros).

Lors de la signature du contrat, le ministère s’était par ailleurs engagé à plaider auprès de ses partenaires européens pour le relèvement des frais de dossiers de demande de visa de 35 à 60 euros. Cette hausse, raisonnable au regard des tarifs pratiqués par les pays de l’OCDE (39) et rendue nécessaire par la mise en place de la biométrie, a été adoptée par le Conseil (40) le 27 avril 2006. Effective à compter du 1er janvier 2007, elle devrait apporter à la France des recettes d’au moins 120 millions d’euros.

Tout en étant conscient de l’ampleur des besoins des postes en moyens humains et financiers, votre Rapporteur spécial désapprouve le mécanisme de « retour sur recettes » introduit par le contrat de modernisation, même si celui-ci apparaît moins pernicieux que les systèmes mis en œuvre entre 2003 et 2005 (41).

Au 31 décembre 2005, la population placée sous la protection de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) est estimée à 120.000 personnes, soit 18 % de plus qu’en 2003. L’Asie est le premier continent d’origine des réfugiés (44 %), suivi de l’Europe (28 %), l’Afrique (25 %) et l’Amérique (3 %). Tandis que le nombre de réfugiés en provenance d’Europe, d’Afrique et d’Amérique a progressé entre 2003 et 2005 (respectivement de 42 %, 36 % et 25 %), ceux originaires d’Asie restent stables (– 0,2 %).

Les crédits destinés à la prise en charge des réfugiés, inscrits sur l’action Garantie de l’exercice du droit d’asile, devraient s’élever à 45,75 millions d’euros (49,49 millions d’euros si l’on inclut les dépenses de personnel). Correspondant à la subvention versée à l’OFPRA ainsi qu’aux subventions d’assistance aux réfugiés, ils diminuent de 7,2 % par rapport à 2006.

a) La subvention versée à l’OFPRA

La réforme du traitement des demandes d’asile prévue par la loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d’asile avait pour objectif de rationaliser l’organisation de l’examen des demandes d’asile afin de remédier à plusieurs dérives :

– allongement des délais de traitement des dossiers des demandeurs ;

– accroissement de l’immigration irrégulière facilitée par la coexistence de deux procédures assurées par deux acteurs (asile conventionnel relevant de l’OFPRA et asile territorial du ministère de l’Intérieur) ;

– explosion du coût de la prise en charge des demandeurs d’asile (270 millions d’euros en 2002 contre 150 millions d’euros en 2000).

L’OFPRA a ainsi vu ses compétences élargies, pour devenir le guichet unique de l’asile en France. Outre la reconnaissance de la qualité de réfugié et d’apatride et l’organisation de leur protection juridique et administrative, il est désormais chargé d’accorder le bénéfice de la protection subsidiaire (42) à toute personne qui ne remplit pas les conditions d’octroi du statut de réfugié mais qui établit qu’elle est exposée dans son pays à la peine de mort, à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ou, dans le cas d’un civil, à une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence généralisée résultant d’un conflit armé interne ou international.

Par ailleurs, une liste de pays d’origine sûrs a été établie, les demandeurs de ces pays étant traités selon une procédure accélérée. Cette liste qui comportait initialement douze pays (43), a été complétée cette année par cinq nouveaux pays (Albanie, Macédoine, Madagascar, Niger et Tanzanie). Une mission de liaison avec le ministère de l’Intérieur a également été créée auprès de l’OFPRA.

Afin de renforcer l’efficacité du dispositif, plusieurs mesures ont été prises à l’initiative du Comité interministériel de contrôle de l’immigration (CICI), créé par décret en date du 26 mai 2005. Ainsi, l’OFPRA a pour la première fois ouvert une antenne, en Guadeloupe, en janvier 2006, pour répondre à l’afflux de demandeurs d’asile haïtiens (+ 61,5 % entre 2004 et 2005). Ensuite, une expérimentation de visioaudition des demandeurs d’asile par l’OFPRA est actuellement menée auprès de plusieurs préfectures départementales éloignées du siège de l’office. Enfin, le comité a souhaité que le délai de recours devant la Commission des recours des réfugiés (CRR) soit réduit à 15 jours.

Par ailleurs, le secrétaire général du comité a reçu mandat d’étudier, d’une part, les procédures d’examen des demandes d’asile et d’éloignement d’une personne déboutée en vigueur dans les autres pays de l’Union européenne, dans la perspective d’une harmonisation des délais de ces procédures et, d’autre part, l’opportunité d’introduire les concepts de « pays tiers sûrs » et de « premier pays d’asile » en France.

Ces différentes mesures, conjuguées à un contexte géopolitique favorable et à un accroissement des moyens financiers et humains destinés à l’OFPRA, commencent à porter leurs fruits : les demandes d’asile diminuent, le traitement des demandes est plus rapide et le stock de dossiers en souffrance a été réduit.

ACTIVITÉ DE L’OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION
DES RÉFUGIÉS ET APATRIDES

État des dossiers

2003

2004

2005

1er semestre 2006

 

Demandes

61.993

65.614

59.221

21.321

dont premières demandes

52.204

50.547

42.578

14.055

dont demandes mineurs accompagnants

7.564

7.998

7.155

2.339

dont demandes de réexamen

2.225

7.069

9.488

4.927

Décisions

66.344

68.118

51.272

20.863

dont rejets

59.818

61.760

47.088

19.433

Admissions globales

9.790 (1)

11.292 (2)

13.770 (3)

3.908 (4)

(1) dont 3.264 à la suite d’annulations par la CRR de décision de refus.

(2) dont 4.934 à la suite d’annulations par la CRR de décision de refus.

(3) dont 9.586 à la suite d’annulations par la CRR de décision de refus.

(4) dont 2.478 à la suite d’annulations par la CRR de décision de refus.

Source : Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Alors que l’OFPRA était confrontée depuis plusieurs années à une forte hausse du nombre de demandes d’asile, l’inflexion constatée depuis 2003 se confirme. Ainsi, en 2005, la demande d’asile globale s’est élevée à 59.221 demandes, en baisse de 9,7 % par rapport à 2004. Cependant cette tendance reflète deux réalités différentes : une diminution de 15,8 % des premières demandes, qui repassent sous la barre des 50.000 pour la première fois depuis 2001, et une hausse de 34,2 % des demandes de réexamen. La progression des demandes de réexamen s’effectue toutefois à un rythme moins soutenu qu’en 2004, année qui avait été marquée par un triplement de ces demandes par rapport à 2003.

La tendance à la baisse est confortée au cours du premier semestre 2006, où le nombre de demandeurs d’asile s’élève à 18.209, en baisse d’environ 30 % par rapport au premier semestre 2005. Là encore, les premières demandes diminuent tandis que les demandes de réexamen progressent.

En conséquence, le nombre de décisions prises par l’OFPRA en 2005 (51.272) s’inscrit en recul de près de 25 % par rapport à 2004, montrant que la crise de l’asile est passée. L’office a prononcé 4.184 admissions au statut de réfugié, soit 34 % de moins qu’en 2004. Toutefois, le nombre total d’admissions a progressé de 22 % pour atteindre 13.770, car le nombre de demandes acceptées à la suite d’une annulation de la Commission des recours des réfugiés (CRR) a presque doublé, pour s’élever à 9.586. Le nombre de dossiers traités par la CRR a en effet fortement augmenté grâce aux moyens humains supplémentaires qui lui ont été accordés.

En effet, afin d’améliorer le fonctionnement de l’OFPRA et de la CRR, leurs moyens humains et financiers supplémentaires ont été fortement accrus depuis 2003. La subvention et les effectifs budgétaires qui leur étaient destinés ont ainsi plus que doublé entre 2002 et 2005.

ÉVOLUTION DE LA DOTATION BUDGÉTAIRE DESTINÉE À L’OFPRA

(en millions d’euros)

 

2003

2004

2005

2006

2007

Crédits inscrits en loi de finances initiale

28,50

38,20

46,35

49,00

45,56

Crédits ouverts en cours de gestion

4,00

5,80

– 4,30

Total

28,50

38,20

52,15

44,70 (1)

45,56

(1) Il s’agit d’une prévision haute. Compte tenu des différentes mesures de régulation budgétaire intervenues, 36,9 millions d’euros ont été effectivement versés à l’OFPRA au 30 septembre. Une dernière tranche devrait être versée d’ici à la fin de l’année. Son montant s’élèverait au maximum à 7,8 millions d’euros.

Source : documents budgétaires et ministère des Affaires étrangères.

Grâce à ces moyens supplémentaires, l’OFPRA a pu résorber une partie des dossiers de demandes en instance de traitement, notamment les plus anciens. Ainsi, le stock de dossiers en attente a été divisé par trois depuis 2001, pour atteindre 11.755 en 2005, ce qui représente un peu plus de deux mois d’activité.

En 2005, l’OFPRA a pu faire face à la demande sans trop accroître le nombre de dossiers en instance (11.755 contre 11.600 à la fin de l’année 2004), tout en accordant une attention particulière à l’audition des demandeurs, dont les taux de convocation (83 %) et d’entretien (61 %) ont chacun augmenté de 10 points par rapport à 2004.

Si l’office a atteint son objectif de réduction du nombre de dossiers en souffrance, il doit encore veiller à ce que ce stock ne représente pas plus de deux mois d’activité tout en continuant à diminuer l’âge moyen des dossiers en attente de décision.

Les moyens supplémentaires accordés à l’OFPRA et à la CRR ont en particulier bénéficié à cette dernière, dont l’activité s’est fortement accrue grâce au recrutement de 125 contractuels en 2005. Ainsi, la commission, qui a enregistré une forte baisse des recours en 2005 (38.563 contre 51.707 en 2004), a rendu 62.262 décisions en 2005 (contre 39.160 en 2004 et 29.502 en 2003). Le stock de dossiers en attente est ainsi passé de 47.746 en 2004 à 21.301 en 2005. Il représente désormais quatre mois d’activité, contre quinze mois à la fin de l’année 2004.

Pour sa part, le délai moyen de traitement des dossiers par l’OFPRA a diminué de 20 % entre 2004 et 2005, pour atteindre 108 jours (contre plus de 320 jours en 2002). L’objectif prévu pour 2005 (qui était de 101 jours) est donc pratiquement atteint. De même, la Commission des recours des réfugiés, a réduit son temps de traitement des dossiers de 292 à 283 jours (l’objectif était de 284). Cette baisse est positive à tous égards : elle permet aux demandeurs de connaître plus rapidement l’évolution de leur situation ; elle entraîne des économies pour les finances publiques, la prise en charge des demandeurs étant plus courte ; et, enfin, elle contribue à décourager les demandes d’asile infondées. Toutefois, les résultats enregistrés sont encore loin des objectifs fixés pour 2006 : 60 jours pour l’OFPRA et 90 jours pour la CRR. Plus inquiétant, les délais de traitement des dossiers ont eu tendance à augmenter au premier semestre 2006 : ils étaient de 212 jours pour l’OFPRA et 299 jours pour la CRR.

Les crédits demandés dans le présent projet s’élèvent à 45,6 millions d’euros, contre 49 millions d’euros inscrits en loi de finances pour 2006. Cette diminution d’un peu plus de 7 % tient compte à la fois des gains de productivité réalisés par l’office et par la commission, ainsi que de la baisse du nombre de demandeurs d’asile. Elle s’inscrit dans l’évolution engagée dès cette année.

En effet, alors que les crédits inscrits en loi de finances pour 2006 étaient supérieurs à ceux inscrits en loi de finances pour 2005 (49 millions d’euros contre 46,35 millions d’euros), ceux finalement disponibles devraient être bien inférieurs à ceux ouverts en 2005 (44,7 millions d’euros au maximum en 2006 contre 52,1 millions d’euros en 2005). La diminution de la subvention versée en 2006 a principalement résulté de la suppression, à la fin de l’année 2005, des 125 postes de contractuels auxquels il avait été fait appel dans le cadre du plan de résorption des stocks de dossiers en instance à la Commission de recours des réfugiés.

Ainsi, entre 2005 et 2006, les dépenses de fonctionnement inscrites au budget initial devraient baisser de 9 %, pour s’établir à 48,2 millions d’euros. Reflet de l’évolution du nombre de demandes d’asile, les dépenses liées à la demande d’asile (imprimés, frais postaux, interprétariat…) devraient diminuer de plus du quart, mais elles ne représentent que 10 % du total des dépenses. L’essentiel des dépenses de fonctionnement (60 %) est en effet constitué des dépenses de personnel, qui devraient baisser de 6 %. Pour 2006, l’effectif budgétaire est de 716 emplois, dont 424 titulaires, auxquels s’ajoutent 40 agents du ministère des Affaires étrangères affectés à l’établissement. Les dépenses d’investissement inscrites au budget initial devraient demeurer stables, à 1,1 million d’euros.

Compte tenu de l’objectif de réduction des délais de traitement des dossiers à six mois fixé par le Président de la République lors de son allocution du 14 juillet dernier, du soin qui doit être apporté à l’examen des dossiers et, enfin, de la nécessité de pouvoir faire face à toute modification du contexte géopolitique et d’éviter tout nouvel engorgement, votre Rapporteur spécial estime que l’effort budgétaire en faveur des réfugiés ne doit pas faiblir.

b) Les subventions d’assistance aux réfugiés

Les subventions d’assistance aux réfugiés connaissent une baisse régulière depuis 2004, qui se poursuit cette année, puisque les crédits demandés dans le projet de budget diminuent de 37,5 %, pour atteindre 200.000 euros.

L’essentiel de cette dotation (185.000 euros) est destiné au versement d’allocations à des personnes originaires d’Afrique du Nord, qui ont rendu des services éminents à la France. Après avoir été reconduite en 2006 à hauteur de 305.000 euros, elle accuse une forte baisse, de près de 40 %.

Le solde (15.000 euros) est attribué à des associations ou organismes qui participent à des opérations d’assistance aux réfugiés ou bien recueillent et diffusent des informations les concernant.

À la suite des abus constatés au début des années 2000 (44), le ministère s’était engagé à être plus exigeant dans le choix des projets présentés par les associations. Pourtant, en 2006, parmi les deux associations retenues, figurait de nouveau l’AVRE, qui a bénéficié de 7.000 euros.

Le ministère a précisé à votre Rapporteur spécial, qui s’étonnait que l’AVRE bénéficie de nouveau d’une subvention, que la dotation ne serait pas reconduite en 2007. En effet, dans la mesure où l’aide du ministère a vocation à se concentrer sur des associations dont l’action présente un fort intérêt au regard de la défense des principes du droit d’asile, il ne lui appartient pas de subventionner des associations qui œuvrent dans le domaine strictement médical ou social où, par définition, un contrôle rigoureux de l’utilisation des fonds ne peut être exercé que par un département ministériel possédant les compétences techniques dans ce domaine. Votre Rapporteur spécial, qui estime que les subventions attribuées ne doivent jamais constituer des rentes de situation au profit de quelques-uns, souhaiterait que la vigilance du ministère dans la sélection des projets soit renforcée.

La seconde association retenue en 2006 a été l’association Forum Réfugiés qui mène des actions de sensibilisation sur la défense du droit d’asile. La somme versée, 15.000 euros, devait permettre l’ouverture d’un bureau à Paris, afin de rapprocher cette association, actuellement basée à Lyon, des centres de décisions parisiens et bruxellois.

III.– L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE DÉLIVRANCE
DES VISAS SCHENGEN : UNE IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ

Les services du ministère des Affaires étrangères, tout particulièrement les consulats, sont en première ligne de l’action du Gouvernement pour prévenir l’immigration illégale. En effet, en charge de la délivrance des visas, le réseau diplomatique et consulaire est, par définition, aux avant-postes de notre politique migratoire. Tout en assurant la maîtrise de l’accès au territoire français, ce qui suppose une action énergique pour prévenir les entrées frauduleuses, le ministère doit également favoriser l’attractivité de notre pays auprès des ressortissants étrangers qui concourent à la vitalité des relations de leur pays avec la France, mais également auprès des millions de visiteurs qui font de notre pays une des principales destinations touristiques dans le monde.

Actuellement, 92 % des demandes de visas concernent des visas de court séjour (d’une durée de moins de trois mois), qui relèvent de la procédure communautaire mise en place par la Convention d’application de l’accord de Schengen. La perspective de l’entrée des dix nouveaux États membres de l’Union européenne dans l’espace Schengen (45) va entraîner des bouleversements, ne serait-ce que dans la collaboration entre les consulats. De plus, le programme de La Haye, qui définit les axes prioritaires de la construction de l’espace de liberté, de sécurité et de justice entre 2005-2010, évoque la création de bureaux communs chargés de la délivrance des visas. Aussi, votre Rapporteur spécial a-t-il choisi d’étudier plus particulièrement les conditions de délivrance des visas Schengen, sans s’interdire toutefois des observations plus générales sur la délivrance des visas.

Afin de mener à bien sa mission, votre Rapporteur spécial s’est rendu dans trois consulats généraux : à Istanbul, Moscou et Casablanca. Le choix s’est porté sur ces trois consulats, car ils présentent des caractéristiques communes (importance du nombre de visas délivrés ; écart important entre leur PIB/habitant et celui des pays de l’espace Schengen ; grande disparité de revenus entre l’élite et le reste de la population ; existence de communautés organisées dans les pays de l’espace Schengen et qualité des relations diplomatiques entretenues avec les pays de l’espace Schengen) mais également complémentaires. Ainsi, la Russie est le seul pays du G8 soumis à la procédure du visa Schengen, la Turquie est candidate à l’entrée dans l’Union européenne et le Maroc entretient des relations privilégiées avec notre pays.

La délivrance des visas constitue un enjeu de première importance : il s’agit à la fois de lutter contre les détournements de procédure conduisant à l’immigration clandestine, tout en assurant la richesse des échanges humains, culturels et économiques de la France avec ses partenaires.

À cet égard, la procédure actuelle de délivrance des visas Schengen est loin d’être satisfaisante : ses modalités de mise en œuvre conduisent à l’engorgement des services consulaires français, avec comme conséquences le mécontentement de nombreux demandeurs de visas et une certaine inefficacité dans la lutte contre les détournements de procédure à des fins d’immigration clandestine. Face aux nouveaux défis auxquels la France est confrontée, le dispositif actuel doit impérativement évoluer vers une plus grande rigueur et une coopération accrue.

Dans les années 1980, un débat s’est ouvert sur la signification de la notion de « libre circulation des personnes ». Selon certains États membres, elle devait s’appliquer aux seuls citoyens européens, ce qui impliquait de conserver les contrôles aux frontières pour distinguer citoyens européens et ressortissants de pays tiers. Pour d’autres, au contraire, il fallait établir une libre circulation pour tous, ce qui impliquait la suppression des contrôles frontaliers.

Ces derniers, à savoir la France, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas ont décidé, avec la signature, le 14 juin 1985, de l’Accord de Schengen relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, de créer un territoire sans frontières, l’espace « Schengen ». Ils ont été progressivement rejoints par l’Italie (1990), l’Espagne et le Portugal (1991), la Grèce (1992), l’Autriche (1995) et le Danemark, la Finlande et la Suède (1996). L’Irlande et le Royaume-Uni participent à une partie des dispositions, tandis que l’Islande, la Norvège (2001) et la Suisse (2005) ont une position de membres associés. Depuis le traité d’Amsterdam, l’acquis de Schengen a été intégré dans les politiques de l’Union européenne.

Signée en 1990 et entrée en vigueur en 1995, la convention d’application a permis d’abolir les contrôles aux frontières intérieures entre les États signataires et de créer une frontière extérieure unique où sont effectués les contrôles d'entrée dans l’espace Schengen selon des procédures identiques. Des règles communes en matière de visas, de droit d’asile et de contrôle aux frontières externes ont été adoptées afin de permettre la libre circulation des personnes au sein des pays signataires sans perturber l’ordre public.

La délivrance des visas Schengen est régie par une règle essentielle : il revient soit au pays de destination principale, soit au pays de première entrée dans l’espace Schengen, de délivrer le visa à un ressortissant étranger. Tirant partie de l’ambiguïté de la formulation, les consulats ont tendance à mener une politique de renvoi des dossiers que personne ne veut traiter. La France, souvent pays de principale destination du fait de son potentiel touristique, fait régulièrement les frais de ce dispositif en acceptant la délivrance en lieu et place du pays de première entrée.

Afin de concilier liberté et sécurité, la mise en place de la libre circulation s’est accompagnée de mesures dites « compensatoires ». Il s’agissait, en effet, d’améliorer la coordination entre les services de police, des douanes et de justice, et de prendre les mesures nécessaires pour lutter le terrorisme et la criminalité organisée. Pour ce faire, un système d’information a été mis en place pour échanger des données concernant l’identité des personnes et la description des objets recherchés : le système d’information Schengen (SIS).

Le système d’information Schengen (SIS), créé par la Convention d’application de l’Accord de Schengen du 19 juin 1990 et opérationnel depuis le 26 mars 1995, est une base de données informatiques commune aux États participants aux accords de Schengen (46).

Fichier commun à l’ensemble des États membres de l’espace Schengen, le SIS a pour objet de centraliser et de faciliter l’échange d’informations détenues par les services chargés de missions de police afin de préserver l’ordre et la sécurité publics. Ce fichier est présenté comme une mesure compensatoire à la suppression des contrôles aux frontières intérieures des États participants et à la libre circulation des personnes.

Le SIS, composé d’un système central installé à Strasbourg et de systèmes nationaux – « reflets » de la base centrale – implantés dans chaque pays, comporte deux grandes catégories d’informations : l’une concerne les personnes recherchées, placées sous surveillance ou jugées « indésirables » dans l’espace Schengen (articles 95 à 99 de la convention), l’autre concerne les véhicules ou les objets recherchés (article 100 de la convention). Parmi les personnes mentionnées par la convention figurent les individus recherchés à des fins d’extradition ; les personnes à l’encontre desquelles un mandat d’arrêt européen a été délivré ; les individus disparus, en particulier les mineurs en fugue ou enlevés ; les individus nécessitant une surveillance discrète et un contrôle spécifique et, surtout, les ressortissants de pays tiers déclarés non admissibles sur le territoire national. Entrent dans cette catégorie les personnes en situation irrégulière ainsi que celles représentant une menace pour l’ordre public. 90 % des personnes inscrites sont signalées sur ce fondement.

Le SIS permet aux autorités compétentes de disposer en temps réel des informations introduites dans le système par l’un des États membres grâce à une procédure d’interrogation automatisée. Seules ont le droit d’interroger le SIS les autorités nationales compétentes chargées des contrôles frontaliers et des vérifications d’identité à l’intérieur du territoire national. Les services chargés de la délivrance des visas ont également accès au SIS, mais uniquement en ce qui concerne les signalements correspondant aux ressortissants de pays tiers déclarés non admissibles sur le territoire national. Europol, Eurojust, les services chargés de délivrer les titres de séjour ainsi que les autorités responsables en matière d’asile peuvent aussi interroger le système. Le système relie actuellement 500.000 utilisateurs.

En France, 15.000 terminaux d’ordinateurs répartis entre police nationale, gendarmerie, douanes, préfectures et consulats, permettent l’accès au SIS. En 2005, le SIS, qui contient plus de 15 millions de signalements, a ainsi été consulté par des utilisateurs français près de 35 millions de fois.

Ce système est appelé à évoluer. En effet, la technologie sur laquelle repose le SIS, conçu pour 18 États membres au maximum, est dépassée. En outre, aujourd’hui, les exigences du maintien de l’ordre public dans un espace de libre circulation rendent indispensables l’accroissement des fonctionnalités du SIS (en particulier la mise en relation de signalements), l’enregistrement de nouvelles informations (nouvelles catégories de signalements de personnes et d’objets, éléments biométriques, etc.), le prolongement des durées de conservation des signalements ainsi que la consultation des données par un plus grand nombre d’autorités.

Aussi, le système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II), opérationnel au plus tôt en juillet 2008, devrait pouvoir concerner 30 pays (47). Plus puissant, cet outil sera doté de nouvelles fonctionnalités, dont l’une des plus importantes consistera à intégrer au signalement des personnes des données biométriques, telles que leur photographie et leurs empreintes digitales. Il est aussi envisagé de développer des synergies et une « interopérabilité » entre le SIS II et les autres bases de données européennes, telles que le système EURODAC (qui comporte les empreintes digitales des demandeurs d’asile) ou le futur système d’information sur les visas (VIS). La diffusion des mandats d’arrêt européens sera effectuée par l’intermédiaire du SIS II, auquel Europol et Eurojust auront un accès élargi.

Lors du sommet d’Athènes de juin 2003, il a été décidé de créer un « système d’information sur les visas » (VIS), dont l’objectif est d’améliorer la mise en œuvre de la politique commune en matière de visas, la coopération consulaire entre les représentations des États de l’espace Schengen et la consultation préalable à l’octroi d’un visa. Cet outil, qui concerne les visas de court séjour (trois mois), doit ainsi contribuer à la sécurité intérieure des États membres et à la lutte contre le terrorisme, la fraude et l’immigration clandestine.

Grâce à un meilleur échange d’informations sur l’octroi et les demandeurs de visas et à l’introduction de données biométriques, le VIS doit permettre de lutter contre l’obtention frauduleuse de visas, le « visa shopping » (qui consiste à déposer des demandes de visas auprès de consulats d’État membres différents) et la falsification de visas. Il a également pour objectif de mieux identifier les sans-papiers par la confrontation des empreintes digitales (s’ils ont déjà déposé une demande de visa). Il doit enfin faciliter la consultation des consulats des États de l’espace Schengen avant l’octroi d’un visa.

Les consulats, les polices et les autorités de surveillance des frontières des États de l’espace Schengen seront ainsi reliés par une banque de données centrale, qui comprendra des données personnelles sur le demandeur de visa (dont des photos et les empreintes digitales), ainsi que des informations sur le visa (visa demandé, accordé, annulé ou prolongé, demande refusée ou retirée).

La mise en œuvre du VIS est prévue pour 2008.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE VISAS DEMANDÉS ET DÉLIVRÉS ENTRE 2000 ET 2005

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Nombre de visas demandés

2.643.523

2.913.302

2.989.996

2.508.052

2.514.429

2.411.370

Nombre de visas délivrés

2.114. 608

2.117.056

2.036.282

2.024.179

2.059.460

2.051.915

Taux de refus (en %)

20,00

27,33

31,90

19,29

15,95

13,01

Nombre de visas de court séjour

1.782.975

1.785.582

1.693.155

1.690.997

1.737.176

1.741.626

dont visas de circulation

184.195

191.745

181.261

209.981

246.022

251.082

Visas de long séjour

108.038

131.085

143.289

133.791

125.686

122.593

dont visas pour études

46.345

57.811

65.0176

69.568

64.045

61.320

dont visas pour regroupement familial

20.479 (1)

25.465

35.967

21.405

21.672

21.196

dont visas pour salariés

14.609

14.671

14.260

(1) Données non disponibles de manière distincte pour ces deux catégories.

Source : ministère des Affaires étrangères

La politique actuellement suivie par le ministère a pour but de trouver un juste équilibre entre deux objectifs.

Il s’agit tout d’abord de faciliter la venue des ressortissants étrangers qui concourent à la vitalité des relations de leur pays avec la France. Ainsi, le nombre de visas délivrés à des étudiants étrangers a augmenté de plus de 10 % entre 2001 et 2004. Les acteurs des relations économiques, professionnelles, scientifiques, universitaires et culturelles avec notre pays figurent désormais sur des listes d’attention positives, mises à jour régulièrement par les consulats. Ces personnes, qui doivent pouvoir circuler sans formalités entre la France et leur pays d’origine, ont vocation à se voir délivrer un visa de circulation dont la durée peut varier de un à cinq ans, en fonction de la qualité du dossier présenté.

Mais, il convient également de lutter contre l’immigration irrégulière, ce qui suppose un contrôle efficace dans l’instruction des visas.

Certes, l’immigration irrégulière ne passe pas nécessairement par une demande de visa. La majorité des étrangers en situation irrégulière entre clandestinement sur le territoire par les frontières terrestres ou maritimes, en l’absence de tout visa. Rappelons par ailleurs que certaines nationalités qui posent parfois des problèmes en matière d’asile et d’immigration (Roumanie, Bulgarie, Bolivie, Brésil par exemple) ne sont pas soumises à l’obligation de visa.

Néanmoins, le risque d’immigration irrégulière à partir de l’obtention d’un visa Schengen ne peut être exclu. Ainsi, une enquête effectuée auprès de 40 postes situés dans des pays d’où sont originaires un nombre important de personnes éloignées de notre territoire en 2005, a révélé que 16,5 % d’entre elles s’étaient vu délivrer un visa par les consulats français.

La responsabilité et la charge de travail pesant sur les services consulaires français sont d’autant plus lourdes que, compte tenu de l’étendue de son réseau consulaire, la France est l’État partie à la Convention de Schengen qui assure le plus de représentation de ses partenaires. Début 2006, 305 représentations en matière de visas Schengen sont ainsi exercées par 66 des postes consulaires français. Une dizaine des postes français représentent entre dix et treize partenaires ! Les pays que la France représente le plus sont le Portugal, l’Espagne, la Grèce et l’Autriche.

Si, officiellement, la France délivre aujourd’hui 20 % des visas octroyés par l’ensemble des pays de la zone Schengen, la charge de travail pesant sur les consulats français va très certainement s’accroître avec l’intégration des nouveaux États membres de l’Union européenne dans l’espace Schengen.

Un objectif de coopération locale est fixé aux consulats des pays de la zone Schengen, afin de veiller à l’application harmonisée des règles de délivrance des visas. Il est prévu que cette coopération se traduise par des réunions régulières, l’apposition du cachet Schengen sur toutes les demandes de visas de court séjour et des échanges de statistiques.

Toutefois, lors de ses déplacements à l’étranger, votre Rapporteur spécial a été frappé par l’absence d’harmonisation des règles présidant à l’organisation de la délivrance des visas entre les consulats des différents pays ainsi que par le manque de concertation et l’insuffisance des échanges d’informations lors du traitement des dossiers. Ces failles sont, bien entendu, largement exploitées par les demandeurs de visas, en particulier par ceux qui ont pour objectif final d’émigrer.

Ainsi, la conjugaison de la possibilité offerte par l’accord de Schengen de présenter une demande de visa auprès du pays d’entrée ou du pays de destination principale et de l’insuffisance d’harmonisation des règles dans le traitement des dossiers de demandes de visas a pour conséquence le développement du « visa shopping ». Cette pratique consiste à présenter sa demande à un consulat réputé « facile d’accès » plutôt qu’à celui du pays qui est la destination principale du demandeur. Il suffit pour cela de prendre un billet d’avion pour le pays pour lequel l’obtention du visa apparaît la plus aisée, puis de se rendre dans le pays souhaité. S’il ne s’agit pas à proprement parler d’un détournement de procédure, on peut néanmoins qualifier cette pratique, de plus en plus courante, de « détournement de guichet ».

Les consulats les moins bien équipés et/ou recevant des instructions favorables à la délivrance de visas attirent le plus : les contrôles y sont en effet supposés moins poussés et la procédure plus rapide.

La France apparaît ainsi aux yeux de nombreux étrangers comme le pays de la zone Schengen auquel il faut adresser sa demande de visas, car les conditions de délivrance, en termes de facilité d’accès et de rapidité de réponse, apparaissent plus favorables.

L’exemple du consulat général de France à Moscou est à cet égard particulièrement instructif. Plusieurs consulats de pays de la zone Schengen sont présents dans la capitale russe, mais la coordination de leur travail apparaît très faible. Une réunion de coordination est organisée chaque mois, mais elle est surtout formelle et ses retombées sont plus que limitées. En réalité, si minimum de coordination existe s’agissant du respect des fichiers d’opposition et des échanges d’information sur la fraude documentaire, chaque pays préfère conserver sa propre organisation de délivrance des visas, adaptée à ses problèmes spécifiques et aux moyens dont il dispose.

Il en résulte une forte disparité entre les consulats, qu’il s’agisse des délais d’obtention d’un rendez-vous et de traitement des dossiers, des exigences requises en termes de comparution personnelle (48) ou encore des conditions d’accréditation des agences de voyages. Ainsi, pour les demandeurs individuels, le délai d’obtention d’un rendez-vous pour déposer un dossier est de 4 jours pour la France, 14 jours pour l’Allemagne et 25 jours pour l’Italie. Une comparution personnelle est exigée par l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne dans pratiquement tous les cas, alors que la France n’impose pas une telle condition aux personnes demandant un visa dans le cadre d’un voyage organisé. 180 agences de voyages russes sont accréditées auprès de notre consulat, là où 60 agences le sont auprès des Allemands, des Espagnols et des Italiens. Enfin, le taux de refus du consulat français est parmi les plus faibles de ceux des partenaires Schengen.

Offrant les conditions les plus favorables à une demande de visa, le consulat de France à Moscou détient ainsi deux records. Avec 272.000 visas accordés en 2005, il est le premier poste de délivrance au sein du réseau consulaire français et le premier consulat de délivrance parmi ceux des pays de l’espace Schengen représentés à Moscou. L’engouement des Russes pour notre consulat entraîne un engorgement des services qui ne peut que nuire à la qualité du contrôle exercé sur les dossiers soumis, avec, à la clé, un risque migratoire qui, s’il n’est pas parmi les plus élevés, ne peut être négligé.

En effet, au-delà du développement des relations économiques et culturelles entre nos deux pays et de l’attirance des Russes pour la Côte d’Azur ou les stations huppées des Alpes françaises, force est de constater que la pression permanente et croissante qui s’exerce sur le service des visas à Moscou provient d’une catégorie de demandeurs de plus en plus nombreux : des Russes au niveau de vie moyen ou faible qui viennent en France en bus dans le cadre de voyages bon marché. Des agences de voyage, qui se sont spécialisées dans ces « tours », distribuent ainsi devant le consulat français des prospectus proposant ces voyages au tarif défiant toute concurrence de 199 dollars (visa inclus) qui consistent en un premier trajet en train jusqu’en Pologne où les Russes montent alors dans des cars (moins chers) pour se rendre en France via l’Allemagne. Alors que l’Allemagne est, de fait, le pays d’entrée de ces touristes, elle refuse de leur délivrer des visas, à tout le moins dans des conditions aussi favorables que les Français, puisque le consulat allemand exige une comparution personnelle.

Ces voyages en bus posent trois problèmes. Tout d’abord, ils constituent, avec les séjours touristiques de moyenne gamme, la cause principale de l’engorgement du service des visas : ils représentent entre 80.000 et 100.000 des visas délivrés chaque année. En août 2006, chaque semaine, 7 à 8 bus de 50 personnes se dirigeaient vers la France, ce qui représentait près de 400 visas à délivrer. Ensuite, s’il n’y a pas lieu d’exercer de discrimination, ces touristes apportent peu à notre pays en termes de recettes touristiques. Enfin, ces « tours en bus » constituent une solution simple d’émigration : une fois le pied posé en France, il est très facile de disparaître dans la nature, aucun contrôle n’étant exercé au retour. Le touriste devient alors un travailleur clandestin !

Autre exemple de « visa shopping » à Moscou : au mois de septembre, plusieurs hommes d’affaires russes, qui souhaitaient se rendre à la foire de Hanovre et avaient vu leurs demandes de visa refusées par le consulat d’Allemagne en raison d’un dépôt tardif des dossiers, ont demandé l’intervention de la mission économique française pour obtenir un visa délivré par la France.

Mais la pratique du « visa shopping » n’est pas propre à Moscou. Comment expliquer, sinon, que le nombre de visas délivrés par le consulat général de France à Istanbul dépassera, cette année, le nombre de visas délivrés par le consulat d’Allemagne à Istanbul, alors que la communauté turque est bien plus nombreuse en Allemagne qu’en France (2,5 millions de Turcs seraient présents en Allemagne contre 500.000 Turcs ou Franco-Turcs en France) ? Certes, la Turquie connaît une forte croissance économique qui favorise le développement des échanges avec la France. Toutefois ce dynamisme économique ne peut expliquer à lui seul l’explosion de la délivrance des visas, qui sont passés de près de 39.000 en 2001 à plus de 102.000 en 2005 !

En sens inverse, alors que le poste de Casablanca recevait les demandeurs dans l’ordre de présentation au guichet, ce qui se traduisait par des files d’attente dans la rue pouvant aller jusqu’à 1.000 personnes en période estivale, la mise en place d’un système de prise de rendez-vous en juillet 2006 a conduit à une diminution, dans les deux premiers mois de sa mise en œuvre, de près de 25 % des demandes de visas par rapport à l’année précédente. Cette réduction ne s’est pas accompagnée d’un transfert de charge vers les autres consulats généraux de France au Maroc, mais d’un transfert partiel vers le consulat général d’Espagne. Selon M. Gilles Bienvenu, Consul général à Casablanca, une bonne part de ce transfert correspond à des demandes qui étaient précédemment adressées au consulat général de France en raison de sa rapidité de traitement, alors que les demandeurs se rendaient en réalité en Espagne.

Ainsi, faute d’harmonisation dans l’organisation de la délivrance des visas, les consulats français sont victimes de « leur efficacité dans le traitement des dossiers ». Un cercle vicieux s’enclenche alors : lorsqu’ils offrent des conditions d’examen des dossiers souvent plus favorables que leurs partenaires de la zone Schengen, ils supportent un report de charge de travail qui devrait normalement revenir aux autres consulats des pays la zone Schengen. Cet accroissement de la charge de travail contribue à l’engorgement des services qui exercent un contrôle moins approfondi, ce qui attire de nouveaux demandeurs…

Cette situation n’est plus acceptable. En l’absence de coordination entre les consulats, chacun risque, dans une logique de surenchère, de poser des conditions de plus en plus strictes, reportant ainsi la responsabilité et la charge de travail sur les autres. Dans cette logique, les consulats soumis à une forte pression de la part des milieux économiques et politiques de leur pays et du pays d’accueil, comme c’est le cas de la France, risquent d’être systématiquement perdants.

À l’insuffisante harmonisation de l’organisation de la délivrance des visas s’ajoute le manque de collaboration et de concertation des consulats lors du traitement des dossiers.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’existe aucune procédure formalisée de collaboration entre les consulats français situés au sein d’un même pays. S’il existe un fichier d’attention locale, il ne peut être consulté qu’au sein d’un consulat et non d’un poste consulaire à l’autre ! La coopération, qui dépend essentiellement de la conscience professionnelle des agents, consiste donc en « un échange artisanal d’informations » par téléphone, télégramme diplomatique, messagerie électronique et télécopie, qui a lieu au coup par coup.

« Artisanale » entre les consulats d’un même pays, la collaboration entre les consulats de pays de la zone Schengen est encore plus difficile. Lorsqu’elles ont lieu, les réunions de coopération locale sont davantage considérées comme un exercice de routine purement formel plutôt que comme une occasion d’organiser une véritable collaboration, en échangeant des informations et en diffusant les meilleures pratiques.

Afin de lutter contre les demandes multiples ou successives de visa auprès d’une représentation diplomatique ou consulaire ou de plusieurs d’entre elles, un cachet portant la mention « visa demandé le… à… » doit être apposé dans le document de voyage de tout demandeur d’un visa de court séjour, lors de la présentation de la demande au guichet. Si ce cachet n’est pas recouvert par le visa, cela signifie que le consulat a refusé la délivrance. Toutefois, ce système présente des limites : le demandeur qui n’a pas obtenu le visa auprès d’un consulat peut très bien déclarer avoir perdu son document de voyage, en faire établir un nouveau, puis présenter sa demande à un autre consulat.

Autre faiblesse du dispositif actuel : le manque d’échanges d’information entre les consulats des différents pays de la zone Schengen présents dans un même pays, qui résulte de l’absence d’interopérabilité entre les différents systèmes d’information, mais également des lacunes du dispositif commun actuel.

Tout d’abord, les consulats de nos partenaires de l’espace Schengen n’ont pas accès au fichier d’attention locale et, inversement, nos consulats n’ont pas accès aux fichiers que nos partenaires établissent.

Ensuite, le système d’information Schengen présente un certain nombre de limites. Aux défauts précédemment soulignés par votre Rapporteur spécial, il convient d’ajouter le fait que le SIS est une interconnexion de fichiers nationaux rassemblant des données communes, alimentée et consultée par les autorités des différents États membres en fonction de leurs propres règles. Ainsi, bien que le système soit européen, les données demeurent nationales et les États sont seuls juges de l’opportunité de l’inscription d’un signalement dans une base. Chaque État a l’entière maîtrise des informations qu’il souhaite signaler, pourvu que ces informations soient prévues par la Convention d’application de l’Accord Schengen. Un État peut donc très bien inscrire une personne dans le fichier pour un motif qui ne justifierait pas, aux yeux de la France, une inscription. La conjugaison de cette liberté laissée aux États membres et de l’absence de connaissance du motif d’inscription lors de la consultation de la base de données rend l’utilisation du SIS parfois délicate.

Les faiblesses du dispositif actuel en matière d’harmonisation de l’organisation de la délivrance des visas et de coopération entre les services consulaires sont largement utilisées par les demandeurs de visas, candidats non avoués à l’émigration. Consistant en une succession de détournements de guichet et d’objet du visa demandé, l’exemple suivant, observé à Casablanca, est particulièrement révélateur de l’exploitation qui peut être faite des failles du système actuel. Titulaire d’un diplôme d’ingénieur obtenu au Maroc, une jeune femme marocaine, après avoir essuyé un refus de visa de tourisme auprès du consulat général de Casablanca, l’obtient finalement auprès du consulat d’Espagne au mois d’avril. Depuis l’Espagne, elle se rend en France, afin de passer des entretiens d’embauche, ce qui constitue manifestement un détournement d’objet du visa. À la suite d’une réponse favorable, elle lance auprès de la Direction départementale du travail et de l’emploi compétente une procédure de reconnaissance de travailleur étranger, puis retourne au Maroc via l’Espagne. Bien que relevant de la circonscription de Casablanca, elle demande alors un visa de long séjour étudiant au consulat de Rabat, qui lui est accordé fin août et se rend en France. Elle quitte la France le 30 septembre pour le Maroc, afin de passer une visite médicale et attend de voir aboutir sa demande de visa de travailleur permanent. Pour parfaire le tableau, il convient d’ajouter que cette jeune personne était partie en France en 2004 dans le cadre d’une procédure mise en place par l’ANAPEC (Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences), qui permet à de jeunes gens brillants de bénéficier d’une expérience à l’étranger qu’ils doivent ensuite valoriser au Maroc.

Au regard des différents dossiers de demandes de visa, qui consistaient en autant de détournements de procédure, que votre Rapporteur spécial a pu examiner lors de ses déplacements, cinq pistes de réflexion lui paraissent mériter d’être étudiées avec le plus grand soin.

La première, la plus ambitieuse, consiste à mettre en place des services de délivrance des visas communs pour les pays de l’espace Schengen. L’établissement d’un consulat commun serait l’aboutissement de la logique européenne. Elle supposerait l’adoption d’un Traité constitutionnel européen et une révision de la Constitution française.

Si le programme de La Haye, adopté par le Conseil européen le 4 novembre 2004, qui définit les priorités devant présider à la construction de l’espace de liberté, sécurité et justice au cours de la période 2005-2010, évoque la création d’un service consulaire européen commun, les projets en cours d’examen apparaissent peu ambitieux. Ainsi, le projet de proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire des visas évoque des « centres communs de traitement de visa », qui consistent en un simple regroupement dans un même bâtiment des représentations diplomatiques et consulaires de plusieurs États membres, les demandeurs de visa étant orientés vers l’État membre responsable du traitement de sa demande.

Votre Rapporteur spécial n’est pas convaincu par l’intérêt de ce projet, qui ne confirme pas la fusion des services d’instruction, alors qu’elle est la pierre angulaire d’une délivrance efficace des visas Schengen. Le partage de locaux n’entraînera pas nécessairement une plus grande coopération entre consulats.

Observant, au niveau européen, de fortes réticences au projet de création d’un service commun de délivrance des visas, votre Rapporteur spécial recommande une solution de repli, néanmoins plus ambitieuse que le projet de centre commun de traitement de visa. Au-delà d’un simple partage de locaux, il conviendrait en effet de rapprocher les services d’instruction de demande de visa, tout en laissant à chaque consul le soin de parapher le visa.

Les échanges de personnel constituent un premier pas allant dans ce sens. Les premières expérimentations, lancées en 2005, ont consisté en des échanges de personnel entre la France et l’Allemagne à Ankara, Toronto, San Salvador et Jakarta. Si votre Rapporteur spécial salue cette démarche, elle n’est encore qu’expérimentale et bien éloignée de l’objectif de services d’instruction communs.

Aussi, votre Rapporteur spécial insiste-t-il sur la nécessité de procéder à un véritable rapprochement des services d’instruction, ce qui suppose, en premier lieu, d’harmoniser l’application des instructions consulaires ainsi que de préciser, dans un souci de clarté, les règles définissant le pays de délivrance du visa, qui devrait être celui de destination principale.

Enfin, dans l’attente de la mise en place du système d’information sur les visas et du système d’information Schengen de deuxième génération, ainsi que de leur interopérabilité avec le système EURODAC, votre Rapporteur spécial estime urgent de mettre en ligne les fichiers d’attention locale.

Ainsi, l’union des forces consulaires, l’harmonisation de l’application des instructions consulaires, le partage des fichiers et des expériences limiteraient les risques d’abus de procédure et renforceraient la légitimité des décisions de refus ou de délivrance des visas.

Malgré la volonté affirmée des deux ministères de travailler de concert dans la lutte contre l’immigration clandestine et la détection des demandes de visas « à risque », force est de constater que la collaboration repose surtout sur la bonne volonté des fonctionnaires de police détachés en ambassade et des services consulaires.

Ici encore, les systèmes d’information présentent des faiblesses, en particulier en matière d’interconnexion. Si des liaisons sécurisées existent entre les consulats et les préfectures (messageries interconnectées via le réseau interministériel sécurisé « ADER »), la police aux frontières n’y a, pour l’instant, pas accès. Par ailleurs, les demandes d’informations complémentaires ne sont pas systématisées et les informations fournies par le ministère de l’Intérieur ne sont pas toujours exploitées.

Compte tenu des lacunes des systèmes d’information, l’efficacité de la collaboration entre les services des ministères de l’Intérieur et des Affaires étrangères dépend beaucoup de la qualité des relations personnelles entre agents. Ainsi, alors que les contacts entre les attachés de sécurité intérieure et les services consulaires peuvent s’avérer très fructueux pour détecter les fraudeurs, ils sont parfois inexistants.

L’absence de collaboration peut aboutir à des situations courtelinesques, comme celle où deux services relevant d’une même préfecture, consultés par le consulat de Casablanca, ont rendu des avis contradictoires sur l’opportunité de délivrer un visa ! Il s’agissait d’une demande de visa présentée dans le cadre de la procédure d’introduction de travailleur étranger, dont l’objet était de faire venir en France un prédicateur marocain, bénéficiaire d’un contrat de travail portant un avis favorable de la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle compétente. Consulté par le consulat, le bureau des étrangers de la Direction de la réglementation a donné un avis défavorable, la personne requérante étant connue des services de police et d’immigration.

Des efforts sont néanmoins menés, afin de rapprocher les services du ministère des Affaires étrangères et du ministère de l’Intérieur. Le développement, par le ministère de l’Intérieur, de la base nationale de visas biométriques « VISABIO », qui sera alimentée et consultable par les deux ministères, s’inscrit dans la logique de complémentarité recherchée entre les deux ministères. Si cette base ne constitue pas un système intermédiaire dans l’attente de la mise en place du VIS – elle concernera notamment les visas nationaux de long séjour – votre Rapporteur spécial s’interroge néanmoins sur son articulation avec le VIS.

Lefficacité de la collaboration entre les deux ministères ne peut reposer seulement sur la bonne volonté des agents ou sur une base de données commune. Aussi, alors que de nouveaux risques apparaissent, notamment en matière de terrorisme, et que la pression migratoire devient plus forte, votre Rapporteur spécial juge nécessaire d’impliquer davantage les services du ministère de l’Intérieur dans l’instruction des demandes de visas, afin de mieux tirer parti de leur expertise et de faciliter les échanges d’informations.

Une plus grande association des personnels du ministère de l’Intérieur au travail d’examen des visas constituerait, en outre, une piste intéressante pour éviter les situations de conflits d’intérêt auxquelles les représentants diplomatiques et consulaires peuvent se trouver confrontés et les pressions dont ils font régulièrement l’objet.

La création de l’espace Schengen a accentué la pression autour de la délivrance du visa pour les populations qui y sont soumises. Aussi, un nouveau marché est apparu : celui de l’obtention du visa Schengen. Afin de répondre à la demande, une nouvelle profession, très en vogue, est née : celle de « facilitateur d’obtention de visa ». Comme dans tout métier, la qualité du service rendu est très variable et les prix des prestations proposées peuvent s’envoler, notamment dans des pays marqués par le pouvoir de l’argent et où la conviction « qu’en payant, on obtient plus rapidement et plus facilement un visa » est largement partagée.

Le système le plus rudimentaire se trouve dans la file d’attente à l’entrée des services consulaires. Ainsi, à Casablanca, des Marocains vendent pour une poignée de dirhams des informations permettant de remplir le dossier de demande de visa.

Mais des systèmes beaucoup plus sophistiqués existent. À Moscou, ce sont de véritables agences dites « de visas » qui proposent, notamment sur Internet, des visas de circulation pour la France pour des tarifs compris entre 800 et 1.200 euros.

Certaines officines proposent également d’établir de faux documents (comme de fausses invitations d’entreprises) pour pouvoir déposer un dossier de demande de visa complet. Mieux encore, des agences, prétendument spécialisées dans l’obtention de visas, ont monté toute une affaire à partir d’un faux du tampon de refus de visa…

La double mission confiée au consul est source de conflits d’intérêts : l’exercice de son rôle d’influence politique, économique et culturelle est parfois rendu difficile par les plaintes et les pressions dont il fait l’objet, afin de faciliter la délivrance des visas.

C’est notamment le cas des hommes d’affaires qui, réticents aux exigences de comparution personnelle et agacés par les formalités relatives à la prise de rendez-vous ainsi que par les délais de traitement des dossiers, se tournent vers des intermédiaires, qui déposent leur dossier en dehors du circuit habituel, ou s’adressent directement au consul ou à l’ambassadeur.

La pression exercée sur les consuls, très forte, est le fait des élites, mais également de l’opinion publique. En témoigne le tollé médiatique provoqué l’été dernier en Russie à l’annonce, par le consul, de la réduction du nombre d’agences de voyages accréditées auprès du consulat. Face à l’ampleur des réactions et afin de ne pas entacher la qualité des relations diplomatiques avec la Russie, le consul a dû faire marche arrière.

Les trois consulats généraux visités, à Istanbul, Moscou et Casablanca, ont en commun d’être situés dans des pays dont la société est caractérisée par la coexistence d’une élite très riche et d’une population aux revenus majoritairement faibles et par l’importance de l’argent et du pouvoir dans les relations quotidiennes.

Aussi, afin de répondre au mieux au double défi du développement des relations avec les décideurs du pays et de la lutte contre l’immigration clandestine, apparaît-il nécessaire de mettre en place un système de délivrance différencié selon la qualité du demandeur et les informations dont les services disposent à son propos.

On ne saurait en effet sous-estimer l’impact négatif de procédures trop longues auprès d’une population dont le risque migratoire est inexistant. Il convient donc de généraliser le système déjà mis en place dans certains consulats, qui consiste en une procédure dite « VIP », qui permet une délivrance rapide de visa aux personnes ne présentant aucun risque migratoire.

Inversement, il faut impérativement assurer un meilleur suivi des populations à risques, en rendant obligatoires les visites de retour, qui doivent être suivies par un indicateur régulièrement renseigné.

Au-delà des pressions subies, les services consulaires sont confrontés, dans certains pays, à la complaisance, la corruption ou encore la défaillance des autorités locales, qui participent, directement ou indirectement, à la fraude documentaire. Les agents chargés de la délivrance des visas doivent en effet faire face à la production croissante de faux actes d’état-civil, notamment lors des demandes de visas au titre du regroupement familial. La fraude à l’état-civil est particulièrement élevée dans certains pays d’Afrique, de l’Océan indien et des Caraïbes, où 30 à 80 % des actes vérifiés sont déclarés frauduleux ! Face à cette situation, les postes consulaires vérifient aussi souvent que possible l’authenticité des actes produits. Ils se heurtent toutefois à deux types de difficultés : d’une part, l’inertie, le manque de coopération voire des pratiques de corruption dans les administrations locales ; d’autre part, le manque de fiabilité de l’état-civil local, qui favorise la multiplication des jugements supplétifs d’actes de naissance (49) et les reconnaissances mensongères.

Aussi, votre Rapporteur spécial se félicite-t-il que la loi relative au contrôle de la validité des mariages, en cours d’examen par le Conseil constitutionnel, prévoit de conférer une plus grande latitude aux services consulaires dans la vérification des actes d’état-civil. Afin de lutter efficacement contre les « vrais-faux » jugements supplétifs d’acte de naissance, votre Rapporteur spécial propose que, à l’instar de plusieurs pays européens, le recours aux tests génétiques soit généralisé.

Les services peuvent enfin se heurter aux particularités du droit local, comme la kafala (50) au Maroc, à laquelle un recours subtil peut générer des dérives quant à la possibilité de se rendre sur le territoire français.

Mais la tension que l’on relève au sein des services consulaires n’est pas uniquement due à « l’amicale influence » exercée par les autorités locales, elle résulte également d’attitudes de complaisance voire de complicité en France.

Des interventions en tous genres (notables locaux, responsables d’administration centrale…) viennent de France et compliquent souvent la tâche des services consulaires. Si ces interventions sont utiles en ce qu’elles permettent d’attirer l’attention des services sur des situations particulières, elles ont parfois pour conséquence de mettre en porte à faux les responsables consulaires. Partant souvent d’une bonne intention, elles peuvent en outre se retourner contre leurs auteurs. Ainsi, un responsable du ministère des Affaires étrangères est récemment intervenu en faveur d’un dossier de demande de visa dont la lettre d’invitation à un salon était un faux manifeste.

Votre Rapporteur spécial estime qu’il convient de sensibiliser les publics susceptibles d’intervenir, sur l’engagement de leur responsabilité personnelle en cas de dépassement de la durée de séjour autorisé, de constat de falsification de documents ou d’abus de confiance. Cette mesure, qui pourrait trouver écho dans notre code pénal, serait probablement de nature à responsabiliser les auteurs des interventions, qui partent le plus souvent d’un bon sentiment.

Aux interventions personnelles s’ajoutent les pressions exercées par les autorités françaises au plus haut niveau ainsi que par les différents groupes de pression. Ainsi, lorsque le consulat de Moscou a souhaité réduire le nombre d’accréditations accordées aux agences de voyage russes, un membre du cabinet du ministre délégué au Tourisme est intervenu. De manière plus générale, le consulat subit la pression des agences de voyage russes soutenues par les autorités locales et la presse, mais également celle de Maison de la France et de l’Association des agences françaises de voyage et des hôteliers, qui demandent constamment un accroissement du nombre de visas délivrés et une réduction des délais. Dans de telles situations, il apparaît nécessaire de définir, au niveau interministériel, une ligne directrice sur laquelle le poste consulaire puisse s’appuyer.

Par ailleurs, les demandeurs de visas, qu’ils soient ou non candidats à l’émigration, bénéficient souvent d’une grande complaisance voire de complicités en France. Au-delà des certificats médicaux de complaisance fournis par des médecins français, les procédures qui relèvent de la responsabilité de l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) font l’objet de détournements de plus en plus fréquents, avec la complicité des employeurs français.

C’est notamment le cas de la procédure d’introduction de travailleurs salariés étrangers en France (51). Ce dispositif est en effet de plus en plus souvent détourné, afin de faciliter l’entrée dans notre pays, par le biais d’un recrutement de complaisance, de personnes ayant un lien avec l’employeur. En fixant des critères non justifiés pour occuper le poste à pourvoir ou en rejetant systématiquement les candidatures proposées par les agences de placement françaises, l’employeur indélicat argue de l’impossibilité de trouver un salarié dont le profil convient pour demander à la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) compétente, la validation de la candidature du travailleur étranger qu’il souhaite recruter. Si les DDTEFP sont chargées d’effectuer un contrôle, celui-ci ne peut être que limité dans la mesure où elles ne peuvent auditionner les salariés étrangers et doivent se contenter de documents écrits, aisément falsifiables. Le cas, observé au consulat général de Casablanca, d’une demande de visa formulée pour occuper un emploi d’esthéticienne en France est révélateur : comment imaginer que l’employeur français ne soit pas en mesure de trouver la main-d’œuvre compétente en France ?

Et que penser des employeurs qui accueillent chaque année, en Haute-Corse, de nouveaux travailleurs saisonniers alors que la plupart des employeurs français font appel aux mêmes travailleurs saisonniers marocains ? Les chiffres sont éloquents : sur les 6.000 à 8.000 contrats établis chaque année, le pourcentage de nouveaux travailleurs saisonniers est de 80 % en Haute-Corse, contre 5 à 10 % dans les autres départements, et le taux de « déperdition », c’est-à-dire de personnes ne se présentant pas à la visite de retour, est de 50 % pour les travailleurs saisonniers envoyés en Haute-Corse contre 10 % en moyenne en France. On ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit, pour certains d’entre eux, de recrutements de complaisance. Facturés 5.000 euros, ils se solderaient par la disparition des travailleurs ainsi recrutés. Sous couvert du visa délivré dans le cadre de la procédure relative aux travailleurs saisonniers, ces personnes demeureraient donc en France en situation irrégulière.

Votre Rapporteur spécial estime que de tels comportements ne peuvent qu’être sanctionnés et s’étonne que des contrôles plus approfondis ne soient pas menés par les services compétents.

 

2001

2002

2003

2004

2005 (1)

Évolution 2001/2005 (en %)

Ensemble du monde

39.351

39.239

42.504

44.727

48.870

24,2

Algérie

6.203

4.819

6.501

7.846

12.543

102,2

Maroc

5.276

6.285

7.640

7.865

6.623

25,5

Tunisie

2.563

2.414

2.487

3.169

2.915

13,7

Ensemble Maghreb

14.042

13.518

16.628

18.880

22.081

57,2

Turquie

2.677

3.091

2.886

2.730

2.633

– 1,6

Allemagne

1.189

1.091

1.127

1.097

1.045

– 12,1

Belgique

1.054

904

1.100

638

727

– 31

Grande-Bretagne

1.261

1.123

1.114

1.191

1.001

– 20,6

Suisse

2.151

2.001

1.767

1.577

1.458

– 32,2

Cameroun

416

463

448

609

613

47,3

Côte d’Ivoire

414

445

430

487

469

13,3

Mali

263

277

394

341

332

26,2

Sénégal

853

790

678

1.038

1.319

54,6

Viêtnam

442

527

506

511

492

11,3

(1) Le fléchissement du nombre d’actes de mariage établis en 2005 dans un certain nombre de pays, dont le Maroc, ne traduit pas une inversion de tendance ; il s’explique par un allongement des délais de transcription, lié à l’application des nouvelles dispositions visant à lutter contre les mariages simulés, en particulier l’audition des conjoints. Inversement, l’augmentation du nombre d’actes établis pour des mariages célébrés en Algérie tient, pour une bonne part, à la résorption d’un grand nombre de dossiers en instance à la « cellule état-civil Algérie », installée à Nantes et qui intervient par délégation de nos consuls en Algérie, dont les moyens humains ont été très sensiblement renforcés au début de l’année 2005.

Source : ministère des Affaires étrangères.

La forte augmentation de la demande de transcriptions de mariages dans les pays d’émigration traditionnelle vers la France (pays du Maghreb, de l’Afrique francophone, de l’Océan indien, etc.) correspond en partie à la volonté des ressortissants français issus de l’immigration et de leurs descendants de revenir se marier dans leur pays d’origine. Elle résulte également, et de manière non exclusive, des détournements de procédure que constituent les mariages de complaisance et les mariages forcés. À cet égard, les services consulaires reçoivent de plus en plus fréquemment des couples qui se sont rencontrés sur Internet, présentent une grande différence d’âge ou encore dont la personne de nationalité française souffre de troubles mentaux ou physiques.

D’ailleurs, force est de constater que l’augmentation très rapide de la demande de transcriptions de mariage coïncide, dans certains pays, avec un ralentissement de la progression de la délivrance de visas. C’est ainsi le cas, par exemple, à Casablanca, où le nombre de visas délivrés a diminué de 65.229 en 2003 à 63.153 en 2005, tandis que le nombre de demandes de transcription d’actes de mariage a manifestement progressé.

Une série de mesures législatives et réglementaires ont été prises ces dernières années pour lutter contre les mariages simulés et les mariages forcés. Ainsi, la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité a prévu la possibilité pour le consul d’entendre les futurs époux ou les époux dans le cadre des formalités préalables au mariage ou dans le cadre de la demande de transcription. La loi n° 2006-399 du 4 avril 2006, renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, a enrichi les outils de contrôle dont disposent l’autorité consulaire et les autorités judiciaires françaises pour examiner les demandes de transcription des unions contractées à l’étranger.

Pour sa part, la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration a allongé de deux à quatre ans (52) la durée minimale de communauté de vie ouvrant la voie à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger. Enfin, la loi relative au contrôle de la validité des mariages, dont le Conseil constitutionnel est saisi, renforce le dispositif de prévention (en incitant au respect de la procédure de délivrance du certificat de capacité à mariage) et de contestation des mariages de complaisance.

Afin de favoriser l’unité de la jurisprudence et compte tenu de l’expérience dont disposait le Parquet de Nantes en la matière, l’examen des actions relatives à l’annulation des mariages célébrés à l’étranger a par ailleurs été centralisé auprès du Tribunal de grande instance de Nantes par le décret n° 2005-170 du 23 février 2005.

Toutefois, l’absence de motivation et le caractère parfois contradictoire des décisions du Procureur de la République de Nantes ainsi que les divergences entre les instructions du Gouvernement, qui incitent à la rigueur et à une saisine automatique du Parquet dès qu’un doute apparaît, et le rejet quasi-systématique des saisines par le Procureur de la République, déstabilisent les services d’état-civil. Ainsi, sur les 2.000 demandes de transcription de mariages examinées en 2005 par le service de l’état-civil du consulat général de France à Casablanca, environ 15 % des dossiers ont été transmis au Procureur de la République de Nantes. Parmi ces 300 dossiers, à propos desquels les services d’état-civil avaient un doute sérieux quant à leur validité, seuls 50 % ont été annulés.

À cet égard, il convient de souligner le fait que les décisions du Procureur de la République se fondent en grande partie sur les résultats d’une enquête de police diligentée auprès du conjoint français. Votre Rapporteur spécial doute de la pertinence d’une telle démarche : l’audition d’un seul des époux, qui plus est détenteur de la nationalité française, semble insuffisante pour se forger une opinion sur la réalité des intentions des conjoints. Compte tenu du développement croissant des mariages de complaisance, votre Rapporteur spécial juge nécessaire que la police mène une enquête davantage approfondie qui, au minimum, concerne les deux époux.

Par ailleurs, les effets conjugués de l’augmentation de la demande et de l’application des dispositions visant à déjouer les mariages simulés et les mariages forcés, en particulier les auditions des conjoints, rendent indispensable un renforcement des moyens humains de ces postes. Le nombre de postes à créer ou à redéployer à cet effet est estimé à environ une trentaine pour les trois prochaines années.

La facilité d’accès et la rapidité de délivrance de nombreux consulats français entraînent un afflux de demandes, qui a pour conséquence, compte tenu du caractère souvent insuffisant des effectifs, que les dossiers ne peuvent pas toujours être examinés avec l’attention nécessaire. Ainsi, alors que le consulat général de France à Istanbul va délivrer davantage de visas que le consulat d’Allemagne en 2006, ses effectifs sont limités à 13 tandis que ceux du consulat d’Allemagne s’élèvent à plus du double (33) !

Le temps moyen d’examen d’un dossier apparaît ainsi nettement insuffisant. Jusqu’en juillet dernier, les agents du consulat général de Casablanca consacraient 2 minutes en moyenne à l’examen d’un dossier ; avec la mise en place du système de prise de rendez-vous, ils bénéficient désormais de 4 minutes pour examiner un dossier ! À Moscou, les rendez-vous sont fixés toutes les 7 minutes depuis les difficultés rencontrées par le poste ; auparavant des rendez-vous étaient pris toutes les trois minutes ! Ces temps d’examen constituent une moyenne : si certains dossiers sont très simples à traiter, d’autres requièrent un travail approfondi que les agents, pressés par les objectifs de rendement, ne peuvent mener. En outre, purement théoriques, ces temps d’examen, sont certainement inférieurs dans la réalité. Or, ce qui importe dans le traitement des dossiers de visas, ce n’est pas la rapidité de délivrance, mais la qualité de l’examen du dossier qui, seule, permet de lutter contre une immigration clandestine qui se développe à partir de l’obtention d’un visa.

La brièveté des délais accordés pour l’étude des dossiers est un non-sens. Elle traduit le fait que le consulat, censé être une cellule de contrôle efficace, est devenu une simple chambre d’enregistrement.

La pression constante exercée sur les agents, l’insuffisance des effectifs et la charge de travail constituent autant de facteurs de démotivation des personnels. S’y ajoutent les tensions existant parfois entre les titulaires et les recrutés locaux, dont les écarts en termes de salaires et de garanties sociales peuvent provoquer les jalousies. Ainsi, à Moscou, les recrutés locaux se trouvent dans une situation juridique particulièrement floue au regard du droit du travail : ils ne sont couverts ni par le droit français, ni par le droit russe. Certains d’entre eux éprouvent même un sentiment d’insécurité plus générale, notamment dû aux agressions dont ils peuvent faire l’objet à la sortie du consulat. Enfin, il convient de souligner que les recrutés locaux, s’ils assurent très souvent un travail de grande qualité, ne sont pas aussi sensibilisés au risque migratoire que les titulaires. Ils possèdent en effet souvent la double nationalité ou sont mariés avec des ressortissants du pays.

L’insuffisance des effectifs, l’importance du recours aux recrutés locaux, la démotivation des agents et les pressions constantes dont ils font l’objet constituent un cocktail explosif qui, dans certains consulats, peut conduire à des malversations.

En ce domaine, l’imagination est sans borne : « cours du soir » sur la bonne manière de remplir un dossier, traitements de faveur accordés en termes de délais, accréditations de complaisance accordées à des agences de voyages, délivrance répétitive de visas sur la base d’un dossier constitué à partir d’une fausse invitation d’entreprise, délivrance de vignettes de visas sans dépôt de dossier avec la complicité d’un coursier et établissement des quittances de paiement des visas…

Face à ces risques, dont la survenance a été malheureusement constatée dans plusieurs postes, il convient d’être particulièrement vigilant dans le recrutement du personnel et de pouvoir exercer un contrôle fin de l’activité des agents.

Ce n’est malheureusement pas toujours le cas. C’est ainsi que, dans un même pays, un agent recruté local, après une démission « pour raisons personnelles » du service des visas d’un consulat français, s’est vu recruté au service des visas d’un autre consulat français, sans que le responsable du service consulaire ne consulte son homologue sur la manière de servir de cet agent. Cet agent, soupçonné d’avoir commis des irrégularités, vient de nouveau de démissionner.

Au-delà de cet exemple particulier qui illustre la nécessité d’une gestion des personnels plus efficace, votre Rapporteur spécial recommande, compte tenu de la tension exercée sur les services d’instruction des visas, de recourir de manière exclusive à du personnel titulaire pour la délivrance des visas et souligne de nouveau la nécessité de confier l’instruction des demandes de visas à des personnels relevant du ministère de l’Intérieur, en lieu et place des personnels recrutés locaux dont la nationalité française ne constitue pas une garantie suffisante contre les risques de divulgation d’information ou de corruption.

Enfin, votre Rapporteur spécial souhaite que le ministère des Affaires étrangères donne aux responsables des services consulaires les moyens de mieux contrôler le travail des agents. Le logiciel informatique à la disposition des consuls (logiciel RMV2) ne leur permet en effet pas actuellement de connaître la liste des visas délivrés quotidiennement par poste de travail et par agent. Le renforcement de ce contrôle apparaît d’autant plus nécessaire que lorsque des poursuites sont engagées, ce qui est peu fréquent, les procès intentés contre les personnes soupçonnées de corruption aboutissent rarement à une condamnation.

S’il apparaît indispensable de renforcer les moyens attribués aux services consulaires, afin d’accroître leur efficacité à la fois en termes de rapidité de délivrance des visas pour ceux dont le séjour en France est souhaité et de soin minutieux dans l’examen des demandes présentées par les personnes susceptibles de présenter un risque migratoire, le système de retour sur recettes actuellement mis en place ne permet pas véritablement de poursuivre cet objectif.

Le contrat de modernisation conclu le 18 avril 2006 entre le ministère des Affaires étrangères et le ministère du Budget et de la réforme de l’État pour la période 2006-2008 prévoit en effet que le ministère des Affaires étrangères reçoive l’équivalent de 50 % du produit de la recette des frais de dossiers de demandes de visas(53), ce qui représente 40 millions d’euros en 2006. Ces crédits seront notamment destinés à financer l’équipement des postes consulaires en matière de biométrie, dont le coût est actuellement évalué à plus de 145 millions entre 2006 et 2008.

Tout en étant conscient de l’ampleur des besoins des postes en moyens humains et financiers, votre Rapporteur spécial juge le mécanisme retenu particulièrement pernicieux : il a pour conséquence de considérer les frais de dossier comme une ressource témoignant de l’excellence du travail conduit par un poste fier de faire progresser une ressource dont le ministère est assuré de conserver une partie, quitte à apparaître localement comme le consulat où la délivrance du visa Schengen est la plus facile.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de la séance du mercredi 18 octobre, votre commission des Finances a examiné les crédits de la mission Action extérieure de l’État.

Après l’exposé de votre Rapporteur spécial, M. Yves Bur a tenu à rappeler que la gestion de cette forte augmentation du nombre des candidats à l’immigration nuit à la prise en compte des visas économiques qui sont, eux, nécessaires. Par ailleurs, les conditions d’accueil dans certains consulats sont déplorables. Qu’est-il entrepris pour améliorer les conditions d’accueil dans les consulats et les conditions de travail des agents, et pour éviter de jeter la suspicion sur l’ensemble des demandeurs de visas ?

Votre Rapporteur spécial a considéré qu’il convient, dans ce domaine, de concilier le principe d’égalité de traitement avec une remise des visas en fonction du public et, en ce sens, un certain nombre de consulats ont mis en place de telles procédures d’évaluation des dossiers en fonction des publics concernés. Il a cité le cas particulier d’un imam qui avait déjà été expulsé, que le bureau des étrangers avait identifié comme un vecteur d’islamisme, et pour lequel une telle procédure aurait permis d’éviter d’emblée le retour en France, sous couvert d’un séjour de tourisme.

M. Alain Rodet a soulevé le problème des filières bulgares, dont les flux sont permanents dans le sud de la France et dont l’immigration est clairement non maîtrisée.

M. Philippe Auberger a, quant à lui, appelé l’attention sur les risques de corruption dans la délivrance des visas et sur les solutions qui devraient être trouvées pour éviter le renouvellement de telles situations.

M. Éric Woerth a estimé qu’il convient d’améliorer les mesures de rétorsion concernant le problème des « visas–bus ». En effet, les consulats s’organisent sur cette question tout comme ils le font pour éviter les mariages blancs. Il faut néanmoins rappeler la qualité des locaux de certains consulats, comme notamment celui de Montréal, où la durée moyenne d’attente pour l’obtention d’un visa est de deux heures, par comparaison avec le consulat américain à Montréal, où les conditions d’accueil sont moins bonnes. On peut donc estimer que la qualité d’accueil est suffisante dans les consulats français, mais que c’est la fermeté sur les conditions de délivrance des visas qu’il convient de revoir. Le visa biométrique est, à cet égard, une idée importante qui demande à être développée.

M. Pascal Terrasse a rappelé que la France est la première destination touristique au monde. En tant que Rapporteur spécial des crédits du tourisme, son attention est souvent appelée par les agences de voyages et le ministre du tourisme sur les difficultés d’accès à la France. Il serait en effet paradoxal de vouloir freiner l’arrivée des touristes tout en cherchant à attirer le tourisme comme le font les maisons de la France à l’étranger. En effet, la France ne peut pas vivre avec des barrières. Il a rapporté les propos d’un responsable d’une chambre de commerce et d’industrie d’Alger qui estime que l’accès des hommes d’affaires algériens à la France est de plus en plus difficile et que ceux-ci ont donc tendance à se tourner désormais vers l’Espagne, voire les États-Unis, ce qui conduit à une perte des parts de marché de la France au Maghreb.

Votre Rapporteur spécial a souligné que dans le domaine du tourisme, la France, en effet, ne doit pas se fermer, mais qu’il convient toutefois de différencier les publics, dans la mesure où il est aujourd’hui facile d’identifier le public dès l’origine et de croiser les différents fichiers. Concernant la comparaison des consulats américain et français à Montréal, la différence tient au fait qu’aux États-Unis, les consulats dépendent du ministère de l’Intérieur et les ambassadeurs du ministère des Affaires étrangères. Ces derniers n’interviennent donc pas dans l’obtention des visas. Or, en France, c’est l’ambassadeur qui donne des directives pour l’obtention des visas. Ainsi, en Russie, les mesures consulaires prises à l’encontre des « visas-bus » ont provoqué une levée des boucliers, qui a conduit à l’intervention de l’ambassadeur pour revenir à l’ordre antérieur. Un autre point concerne l’amélioration des conditions d’accueil dans les consulats. L’exemple de Casablanca peut être cité : il existe en effet une « filière VIP » et une prise de rendez-vous est prévue pour améliorer la qualité de la délivrance du visa. Il n’y a donc plus de file d’attente dans les locaux du consulat français. Par ailleurs, l’activité des « facilitateurs de visas » est de plus en plus développée comme au Maroc ou en Russie. Enfin, concernant la corruption, le principal obstacle demeure la difficulté à prouver celle-ci. Un agent corrompu du consulat d’Istanbul, licencié, ayant fait appel à la justice, l’affaire va se conclure au conseil des prud’hommes avec une probable condamnation de l’autorité consulaire pour licenciement abusif. La seule solution, dans un cas de corruption, reste la délocalisation de l’agent. Il faut également souligner que le fichier informatique RMV2, qui sert à instruire les visas, ne permet pas au consul général de croiser les différentes informations et donc, de caractériser les cas de corruption.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par votre Rapporteur spécial tendant à transférer les crédits relatifs aux bourses attribuées et gérées par l’AEFE du programme Rayonnement culturel et scientifique au programme Français à l’étranger et étrangers en France, où ces crédits, majoritairement destinés à des élèves d’origine française, trouveront une imputation budgétaire plus pertinente.

La Commission a adopté cet amendement (amendement n° II-34).

La Commission a ensuite adopté, suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial, les crédits de la mission Action extérieure de l’État ainsi modifiés, et vous demande d’émettre un vote favorable à leur adoption.

AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Article 34

État B

Amendement n° II-34    présenté par M. Jérôme Chartier, Rapporteur spécial, au nom de la commission des Finances :

Mission "Action extérieure de l'État"

Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :

Programmes

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

0

0

Rayonnement culturel et scientifique

dont titre 2

0

49 000 000

0

Français à l'étranger et étrangers en France

dont titre 2

49 000 000

0

0

TOTAUX

49 000 000

49 000 000

SOLDE

0

ANNEXE

Liste des personnes entendues par votre Rapporteur spécial

– M. Serge Telle, Ambassadeur de France à Monaco ;

– M. Bernard Émié, Ambassadeur de France au Liban, et ses collaborateurs ;

– M. Roger Ourset, Directeur de l’École supérieure des affaires à Beyrouth ;

– M. René Chamussy, Directeur de l’Université Saint Joseph à Beyrouth ;

– M. Nicolas Suran, Premier conseiller, alors Chargé d’affaires de l’Ambassade de France en Syrie et les responsables des services consulaire, économique et culturel de l’ambassade ;

– M. Jean-Yves L’Hopital, Directeur de l’Institut français du Proche-Orient à Damas ;

– M. Gérard Delestre, Proviseur de l’école française de Damas ;

– M. Patrick Chevallier, Proviseur du lycée français d’Alep ;

– M. Gérard Araud, alors Ambassadeur de France en Israël ;

– M. Tobie Nathan, Directeur de l’Institut français de Tel-Aviv ;

– Mme Thi Kim Loan Forgeron, Consul à Haïfa ;

– M. Alain Rémy, Consul général à Jérusalem ;

– Mme Joëlle Bourgois, Ambassadeur de France en Belgique ;

– M. Pierre Sellal, Ambassadeur Représentant permanent de la France auprès de l’Union européenne ;

– M. Patrick Fers, Consul général à Liège ;

– Mme Jocelyne Caballero, Consul général à Anvers ;

– M. Jean-Christophe Peaucelle, Consul général à Istanbul ;

– M. André Servant, Proviseur du lycée français d’Istanbul ;

– M. Jean Cadet, alors Ambassadeur de France en Russie, ainsi que l’ensemble des responsables des services diplomatique, consulaire, culturel, économique et de défense ;

– M. Vallecillo, Proviseur du lycée français de Moscou ; 

– M. Gilles Bienvenu, Consul général à Casablanca, et Mme Claire Debabeche, Consul adjoint.

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