N° 645 - Proposition de résolution de M. Guy Lengagne sur la sécurité maritime en Europe. (COM[2002] 780 final/E-2186, COM[2003] 001 final/E-2201)


Document

mis en distribution

le 6 mars 2003

   

N° 645

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 mars 2003

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la sécurité maritime en Europe
(COM [2002] 780 final / E 2186, COM [2003] 001 final / E 2201)

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement)

PRÉSENTÉE,

en application de l'article 151-1 du Règlement,

par MM. Guy LENGAGNE ET Didier QUENTIN

Rapporteurs de la Délégation

pour l'Union européenne,

Députés.

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Voir le numéro : 644.

Transports par eau.

EXPOSE DES MOTIFS

Le naufrage du pétrolier Prestige, survenu le 13 novembre 2002 au large des côtes espagnoles, trois ans seulement après le naufrage de l'Erika, souligne de nouveau la vulnérabilité de l'Union européenne face aux marées noires, d'autant qu'en l'espèce, pour la première fois, les dommages causés par la pollution affectent trois Etats membres : l'Espagne, la France et le Portugal.

Il serait injuste d'imputer cette catastrophe à l'insuffisance des mesures proposées par la Commission en 2000 et 2001, dans ce que l'on appelle les paquets Erika I et Erika II. En effet, non seulement leur transposition n'est pas pleinement achevée, mais cette catastrophe vient aussi rappeler la persistance des dysfonctionnements qui perturbent le transport maritime international.

Dans ce contexte, il incombe aux Etats membres de parvenir d'urgence à l'élaboration d'une politique européenne de la sécurité maritime, en vue de porter remède à de tels dysfonctionnements et de répondre aux attentes fortes de l'opinion publique.

Cette politique européenne de la sécurité maritime devrait ainsi conduire l'Europe à jouer un rôle analogue à celui qui lui a permis de mieux réguler le commerce international au travers de la création de l'Organisation mondiale du commerce, ou de faire respecter la notion de développement durable grâce au protocole de Kyoto.

C'est dans cette perspective que la présente proposition de résolution formule diverses recommandations.

PROPOSITION DE RESOLUTION

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 417/2002 du Parlement européen et du Conseil du 18 février 2002 relatif à l'introduction accélérée des prescriptions en matière de double coque ou de normes de conception équivalentes pour les pétroliers à simple coque, et abrogeant le règlement (CE) n° 2978/94 (document E 2186),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/25/CE du Parlement européen et du Conseil concernant le niveau minimal de formation des gens de la mer (document E 2201),

I. Au titre de la prévention :

1. Considère que l'obligation de recourir aux pétroliers à double coque, tout en présentant l'avantage de permettre le renouvellement des flottes, ne préserve pas les navires de tous les risques, en particulier ceux pouvant résulter d'une explosion ou d'un incendie ;

2. Estime que les mesures prévues par la proposition de règlement susvisée, dont l'objet est d'imposer le transport du pétrole par des navires à double coque à compter de 2005, doivent être modifiées afin :

- d'en étendre le champ d'application à tous les navires transportant des matières dangereuses ;

- d'imposer des détecteurs de gaz, pour prévenir les risques d'explosion, notamment pour les navires à double coque ;

3. Approuve le principe des mesures contenues dans la proposition de directive relative à la formation des gens de mer, en particulier l'instauration d'une procédure harmonisée de vérification des qualifications des professionnels des pays tiers recrutés par les Etats membres ;

4. Souhaite que la Commission présente une proposition de règlement imposant aux navires de disposer d'un plan visant à faire face à tout accident susceptible de provoquer une pollution ;

5. Demande que le futur projet de réglementation communautaire, destinée à contrôler l'entrée d'un navire dans la zone économique exclusive d'un Etat membre ou en escale dans un port de l'Union européenne, prévoie l'obligation de présenter un certificat européen de conformité de structure, délivré, sous sa responsabilité, par un Etat membre de l'Union européenne et opposable aux autres Etats durant sa période de validité ;

6. Suggère que les plans destinés à accueillir des navires en détresse dans les eaux territoriales des Etats membres, conformément aux dispositions de la directive 2002/59/CE du 27 juin 2002, soient établis de façon coordonnée ;

7. Soutient le projet de création de zones particulièrement vulnérables, en raison d'un trafic intense ;

8. Souhaite que l'Union européenne et les Etats membres développent une coopération active :

- avec certains Etats tiers dont ils importent des hydrocarbures, afin qu'ils puissent appliquer les règles communautaires en cours de discussion ;

- avec certains Etats tiers figurant sur la liste noire du Mémorandum d'entente de Paris, afin de lutter contre les navires sous-normes ;

- en vue d'instaurer un système international de validation des connaissances des gens de mer.

II. Au titre de l'indemnisation :

1. Souhaite :

- que la conférence diplomatique prévue en mai 2003 à l'Organisation maritime internationale puisse porter à un milliard d'euros le montant du fonds complémentaire du FIPOL ;

- qu'elle parvienne à améliorer la convention internationale de 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, dite CLC :

l afin de responsabiliser tous les acteurs de la chaîne du transport et d'élargir le cercle des responsables ;

l afin d'en élargir le champ d'application à tous les dommages directs et indirects.

2. Considère qu'en cas d'échec de la conférence diplomatique précitée, les Etats membres devraient adopter la proposition de règlement de la Commission créant un troisième niveau d'indemnisation.

III. Au titre des sanctions :

1. Approuve le projet de la Commission visant à ce que les Etats membres infligent des sanctions pénales à toute personne physique ou morale responsable d'une pollution, en raison de sa négligence grave et de sa violation des dispositions concernant les déversements illicites en mer, notamment à l'occasion des dégazages et déballastages ;

2. Demande que les autorités françaises présentent un mémorandum à la Commission et à l'Organisation maritime internationale, en vue d'engager d'urgence une réflexion sur la notion de crime contre l'environnement, ainsi que sur la création d'un tribunal pénal maritime international ;

IV. Au titre du contrôle :

1. Se félicite des efforts accomplis par les autorités françaises en vue de porter le plus rapidement possible le taux des contrôles à celui prévu par la directive 2001/106/CE du 19 décembre 2001, relative au contrôle par l'Etat du port ;

2. Demande que la directive 2001/105/CE du 19 décembre 2001 fixant les modalités d'agrément des sociétés de classification soit modifiée, afin d'assujettir ces dernières à un régime de responsabilité illimitée et de dissocier clairement leur rôle de classification et celui de contrôle.

V. Au titre des mesures générales :

1. Souhaite que les autorités françaises achèvent le plus rapidement possible la transposition des directives des paquets Erika I et II ;

2. Demande aux autorités françaises de saisir la Commission d'un mémorandum en vue de la création d'un corps de garde-côtes européen.

VI. Dans l'immédiat :

Demande au Gouvernement français d'être très attentif à la mise en application rapide des normes proposées par la Commission, compte tenu des déclarations préoccupantes de la Présidence grecque.