N° 712 - Proposition de résolution de M. Christian Philip sur le deuxième paquet ferroviaire (documents E-1932, E-1936, E-1937 et E-1941)


Document

mis en distribution

le 24 mars 2003

   

N° 712

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 19 mars 2003

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur le deuxième paquet ferroviaire
(documents E 1932, E 1936, E 1937 et E 1941)

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement)

PRÉSENTÉE,

en application de l'article 151-1 du Règlement,

par M. Christian PHILIP

Rapporteur de la Délégation

pour l'Union européenne,

Député.

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Voir le numéro : 711.

Transports ferroviaires.

EXPOSE DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Un ensemble constitué de trois directives de 2001, appelé encore premier paquet ferroviaire, est entré en vigueur le 15 mars 2003. Son objectif est - par la constitution progressive d'un espace ferroviaire européen - de revitaliser le rail et de porter remède à la dégradation continue des parts du marché du fret ferroviaire, en prévoyant une ouverture à la concurrence du réseau transeuropéen de fret ferroviaire, et, à partir de 2008, celle des services internationaux de fret.

Jugeant que ces dispositions ne permettraient pas de transférer rapidement vers le fret ferroviaire une part significative du transport de marchandises actuellement effectué par la route, la Commission a présenté en 2002 un ensemble de quatre textes - appelé deuxième paquet ferroviaire - qui comporte un double objet :

- l'ouverture totale et immédiate à la concurrence des réseaux de fret internationaux et nationaux. La Commission préconise ainsi la suppression de la période transitoire prévue dans le premier paquet ferroviaire, entre le 15 mars 2003 - date de sa transposition - et le 15 mars 2008, date à laquelle les services internationaux devaient être ouverts totalement à la concurrence ;

- la création d'une Agence ferroviaire européenne qui jouera un rôle-clé dans l'élaboration des normes de sécurité et d'interopérabilité nécessaires au bon fonctionnement de cet espace ferroviaire européen désormais intégré.

La France a été un catalyseur dans l'élaboration des textes sur la sécurité et l'interopérabilité.

Au cours des discussions qui se déroulent actuellement, les textes
- en particulier celui relatif à la sécurité - ont été sensiblement améliorés dans le sens souhaité par la France, hormis une disposition qui a pour effet de soumettre tout projet de norme nationale nouvelle en matière de sécurité à l'autorisation préalable de la Commission. Une telle disposition est contestable et inutile.

Le maintien de cette disposition s'avère d'autant moins nécessaire qu'en tant que gardienne des traités en matière de concurrence, la Commission pourrait poursuivre devant la Cour de justice des Communautés européennes un Etat qui se verrait soupçonné d'utiliser son pouvoir normatif à des fins protectionnistes.

Sous cette réserve, deux raisons conduisent à ne pas s'inquiéter des mesures préconisées par la Commission, malgré les craintes de notre opérateur historique. D'une part, l'ouverture à la concurrence des réseaux ne menace pas la SNCF. Même en Allemagne où, depuis plusieurs années déjà, de nombreux nouveaux entrants ont accès aux réseaux, ces derniers n'ont guère entamé la position dominante de l'opérateur historique. De surcroît, le potentiel technique et humain dont dispose la SNCF lui offre suffisamment d'atouts pour ne pas craindre la concurrence.

D'autre part et surtout, il y a urgence pour la France à cesser de donner l'image d'un pays fermé et timoré, alors que son intérêt lui commanderait, dans le cadre de la discussion des textes concernés, de montrer qu'elle accepte le principe de l'ouverture à la concurrence, même s'il est normal de chercher à en améliorer les conditions de mise en œuvre.

Mais, si ce deuxième paquet ferroviaire et l'ouverture du marché européen sont nécessaires, ces textes ne suffisent pas à créer un véritable espace ferroviaire, en l'absence d'une volonté politique forte se traduisant, en particulier, par des investissements importants de l'Union européenne et des Etats membres, à la fois pour avoir de nouvelles infrastructures et pour accélérer l'interopérabilité.

Sous le bénéfice de ces considérations, il vous est demandé d'adopter la proposition de résolution ci-jointe.

PROPOSITION DE RESOLUTION

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la sécurité des chemins de fer communautaires et modifiant la directive 95/48/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires, ainsi que la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (COM [2002] 21 final / E 1932),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 96/48/CE sur l'interopérabilité du système ferroviaire transeuropéen (COM [2002] 22 final / E 1936),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une agence ferroviaire européenne (COM [2002] 23 final / E 1937),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires (COM [2002] 25 final / E 1941).

I. Sur le document E 1932 :

Demande aux autorités françaises de s'opposer à l'adoption de la disposition actuellement en discussion au sein du Conseil, aux termes de laquelle, tout Etat membre doit faire parvenir un projet de règle nouvelle en matière de sécurité à la Commission et exposer les motifs qui en justifient l'introduction. Une telle disposition est contestable et inutile.

II. Sur le document E 1936 :

Demande aux autorités françaises de soutenir les amendements adoptés par le Parlement européen qui ont le mérite de bien souligner les enjeux techniques et économiques de l'interopérabilité.

III. Sur le document E 1937 :

Demande aux autorités françaises d'obtenir que soit consacrée la représentation de l'Association européenne pour l'interopérabilité ferroviaire (AEIF), au sein de l'Agence ferroviaire européenne.

IV. Sur le document E 1941 :

1. Approuve l'objectif d'ouverture à la concurrence des services internationaux et nationaux de fret poursuivi par la proposition de directive concernée ;

2. Demande que, comme c'est le cas dans de nombreux Etats membres, les autorités françaises acceptent d'accorder aux candidats autorisés des droits d'accès identiques à ceux dont bénéficient les entreprises ferroviaires ;

3. Souhaite que l'on examine si l'ouverture à la concurrence du transport aux voyageurs suggérée par un amendement du Parlement européen ne pourrait pas débuter par les TER (Transport express régional) et les transports périurbains. Un tel débat devra être mené avec les régions qui sont aujourd'hui les autorités organisatrices de transport. C'est à ces niveaux que l'apport de l'Europe ferroviaire peut être le plus rapidement visible, au travers notamment des améliorations de l'offre de transport.

V. Autres dispositions :

1. Demande qu'un cadre de financement adéquat soit instauré. Ce cadre est nécessaire pour que la mise en œuvre de l'interopérabilité des réseaux puisse être menée à bien et que puissent être réduites les disparités existant actuellement en matière de redevances ; pour que soit aussi aidée par l'Union européenne la réalisation de nouvelles infrastructures ;

2. Demande que, dans cette perspective, les autorités françaises saisissent la Commission d'un mémorandum destiné à promouvoir l'idée d'une émission d'un emprunt européen et celle visant à instaurer des orientations communes à l'instauration d'une taxe sur les poids lourds pour l'utilisation des routes et autoroutes ;

3. Juge indispensable que les directives définissent des normes sociales élevées, sans lesquelles la crédibilité de l'objectif de l'espace ferroviaire intégré risque d'être entamée.