N° 403 - Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre




Document
mis en distribution
le 4 décembre 2002
No  403
ASSEMBLÉE  NATIONALE
CONSTITUTION  DU  4  OCTOBRE  1958
DOUZIÈME  LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 novembre 2002.
P R O J E T   D E   L O I

autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présenté
au nom de M. Jean-Pierre RAFFARIN,
Premier ministre,
par M. Dominique de VILLEPIN,
ministre des affaires étrangères.

            Traités et conventions.
    

EXPOSÉ  DES  MOTIFS

                Mesdames, messieurs,
        L'accord franco-australien relatif à l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre est l'aboutissement de longs efforts : l'Australie en a pris l'initiative la première il y a près de quinze ans, mais les discussions sont longtemps demeurées en suspens. Des négociations ont véritablement repris à partir de 1997 et la mise au point du texte définitif n'est intervenue qu'à la fin de l'année 2000. L'accord a finalement été signé à Adélaïde le 2 novembre 2001.
        Cet accord de réciprocité a pour objectif de permettre aux personnes à charge des agents des missions diplomatiques ou consulaires, essentiellement les conjoints, d'exercer une activité professionnelle salariée dans le pays d'accueil. Cette possibilité leur est normalement fermée en raison de leur statut de résident dérogatoire au droit commun, et du fait des privilèges et immunités dont ils bénéficient au titre des conventions de Vienne de 1961 et 1963, et qui y font obstacle. Alors que les évolutions de la société font que l'exercice d'une profession par les deux membres d'un couple constitue aujourd'hui la règle, les administrations des affaires étrangères doivent prendre en considération, dans toute la mesure du possible, les aspirations croissantes des conjoints de leurs agents à pouvoir continuer d'exercer leur métier lors d'une affectation à l'étranger. La conclusion d'accords sur l'emploi des conjoints de diplomates est donc destinée à répondre au souhait légitime des conjoints d'agents de ne pas interrompre leur carrière professionnelle pendant la durée de leur séjour à l'étranger, et tout en facilitant les affectations à l'étranger des personnels servant dans les postes diplomatiques et consulaires, ou leurs services annexes. Ces accords sont donc des instruments utiles pour la politique des ressources humaines du ministère des affaires étrangères et des administrations détachant des personnels à l'étranger.
        La France est liée par des accords comparables avec le Canada (accord du 24 juin 1987) et l'Argentine (accord du 26 octobre 1994). Des accords ont été signés avec le Brésil (1996) et la Nouvelle-Zélande (1999), mais ne sont pas encore entrés en vigueur. Des négociations ont été proposées à une dizaine d'autres pays.

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        L'économie générale de l'accord, fondé sur l'accord modèle français mis au point dans un cadre interministériel en 1998, repose sur la délivrance par les autorités compétentes du pays d'accueil d'une autorisation de travail à titre dérogatoire aux personnes à charge des membres des missions officielles qui ont obtenu une proposition d'emploi salarié, la contrepartie étant que le bénéficiaire de cette autorisation renonce à ses privilèges et immunités pour les questions liées à l'emploi exercé.
        L'accord franco-australien comprend seize articles :
        L'article 1erprécise l'objectif général de l'accord qui consiste, sur la base de la réciprocité, à autoriser les personnes à charge des agents des missions officielles de l'Etat d'envoi à exercer une activité professionnelle salariée dans l'Etat d'accueil, s'ils remplissent les conditions en vigueur dans ce dernier Etat pour l'exercice de la profession en question. Une clause protectrice de l'ordre public et de la sécurité nationale a été insérée.
        L'article 2 précise les définitions :
        -  des « missions officielles », qui sont les ambassades, les consulats de plein exercice et les représentations permanentes auprès des organisations internationales ;
        -  des « agents », qui sont les membres des missions officielles ayant la nationalité de l'Etat d'envoi et bénéficiant d'un titre de séjour dérogatoire délivré par le ministère des affaires étrangères de l'Etat d'accueil ;
        -  des « personnes à charge », qui sont les conjoints et les enfants à charge s'ils sont âgés de moins de vingt et un ans ou sans condition d'âge s'ils sont handicapés et célibataires ;
        -  de « l'activité rémunérée » qui s'entend comme l'exercice d'une activité professionnelle salariée liée à la conclusion d'un contrat de travail.
        Les articles 3 et 4 fixent le contenu et les modalités de dépôt de la demande d'autorisation : celle-ci est présentée par l'ambassade de l'Etat d'envoi au service du protocole du ministère des affaires étrangères de l'Etat d'accueil, qui est invité à rendre une réponse dans les meilleurs délais possibles. Une fois l'autorisation accordée, l'ambassade dispose de trois mois pour fournir la preuve que le bénéficiaire de l'autorisation et son employeur se conforment à la législation locale en matière de sécurité sociale. Pour l'exercice des professions dites réglementées, les personnes visées par l'accord doivent remplir les mêmes conditions que celles exigées des ressortissants du pays d'accueil.
        Les articles 5 à 8, les plus importants, concernent les immunités de juridiction. S'agissant des immunités de juridiction et d'exécution en matière civile et administrative, elles ne s'appliqueront pas aux personnes à charge pour les questions liées à l'exercice de leur emploi (article 5). Dans le cas d'une infraction pénale commise en relation avec l'emploi exercé, l'immunité de juridiction pénale est levée par l'Etat accréditant si l'Etat d'accueil le demande, dans la mesure où l'Etat accréditant juge que la levée de l'immunité n'est pas contraire à ses intérêts essentiels (article  6). Toute procédure judiciaire doit être menée sans qu'il soit porté atteinte à l'inviolabilité de la personne ou de la demeure du ménage (article 7). Enfin, la renonciation à cette immunité ne sera pas interprétée comme une renonciation à l'immunité d'exécution de la sentence (article 8).
        Les personnes à charge autorisées à occuper une activité professionnelle salariée cessent de bénéficier des privilèges douaniers prévus par les conventions de Vienne (article 9) et sont imposables dans l'Etat d'accueil sous réserve des dispositions pertinentes de la convention fiscale franco-australienne du 13 avril 1976 (article 10).
        Elles sont soumises au régime de sécurité sociale en vigueur dans l'Etat d'accueil (article 11) et peuvent transférer à l'étranger les salaires tirés de l'emploi exercé dans le pays d'accueil (article 12).
        La personne autorisée à exercer une activité professionnelle salariée est exemptée de toute obligation prévue par les lois et règlements de l'Etat de résidence relatifs à l'immatriculation des étrangers et au permis de séjour (article 13).
        L'article 14 précise que l'autorisation d'occuper un emploi peut être délivrée à la personne à charge d'un membre de mission officielle au plus tôt à la date de prise de fonction de ce dernier. Elle cesse dès que le bénéficiaire cesse d'avoir la qualité de personne à charge, ou à la date de la fin du contrat de travail, ou lors de la cessation des fonctions du membre de mission officielle en tenant compte d'un délai raisonnable comme le prévoient les conventions de Vienne. Cette autorisation est matérialisée par la délivrance à l'intéressé d'une autorisation provisoire de travail par les services de main-d'œuvre étrangère des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
        L'article 15 vise à préciser que les Etats peuvent, lors de la signature ou ultérieurement, conclure un accord dans lequel ils définissent les territoires où s'applique l'accord et ceux où il ne s'applique pas. En l'absence d'un tel accord, dont la conclusion n'est pas obligatoire, l'accord s'applique à la totalité du territoire des deux Etats.
        L'article 16 contient enfin les clauses habituelles d'entrée en vigueur et de dénonciation.

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        Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre et qui, comportant des dispositions à caractère législatif, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET  DE  LOI

        Le Premier ministre,
        Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
        Vu l'article 39 de la Constitution,
                    Décrète :
        Le présent projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté à l'Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères qui est chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article  unique

        Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre, signé à Adélaïde le 2 novembre 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi.
        Fait à Paris, le 27 novembre 2002.

Signé :  Jean-Pierre  Raffarin        

            Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,
Signé :
  Dominique de  Villepin

    

A C C O R D
entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement de l'Australie
sur l'emploi des personnes à charge
des membres des missions officielles
d'un Etat dans l'autre

    Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie,
    Souhaitant satisfaire aux aspirations légitimes des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre à exercer une activité professionnelle, lesquelles bénéficient du même statut que le membre de la mission à la charge duquel elles se trouvent,
sont convenus de ce qui suit :

Article 1er

    Les Parties s'accordent, sur la base de la réciprocité, à autoriser les personnes à charge des agents de chaque Etat affectés dans une mission officielle du Gouvernement de cet Etat dans l'autre Etat à exercer toute forme d'activité rémunérée dans l'Etat d'accueil, sous réserve qu'elles remplissent les conditions législatives et réglementaires exigées pour l'exercice de l'activité envisagée, et sauf si des considérations d'ordre public ou de sécurité nationale s'y opposent.

Article 2

    Aux fins du présent accord, on entend :
    -  par « missions officielles », les missions diplomatiques, les postes consulaires et les représentations permanentes de chacun des Etats auprès des organisations internationales ayant conclu un accord de siège avec l'autre Etat ;
    -  par « agents », les membres du personnel des missions diplomatiques et les membres du personnel des postes consulaires, ainsi que les membres du personnel des représentations permanentes ci-dessus mentionnés, bénéficiant du titre de séjour dérogatoire délivré par le ministère des affaires étrangères ;
    -  par « personnes à charge » :
    a)  Le conjoint ;
    b)  Les enfants à charge handicapés physiques ou mentaux célibataires ;
    c)  Les enfants à charge célibataires titulaires du titre de séjour dérogatoire délivré par le ministère des affaires étrangères ;
    -  par « activité rémunérée », toute activité, emportant rémunération, découlant d'un lien contractuel régi par la loi de l'Etat d'accueil.

Article 3

    Dans le cas de la personne à charge désirant exercer une activité rémunérée en France ou en Australie, une demande officielle doit être présentée, suivant le cas, par l'ambassade de la République française en Australie à la section du Protocole du ministère des affaires étrangères et du commerce, ou par l'ambassade d'Australie en France au Protocole du ministère des affaires étrangères.
    La demande devra indiquer l'identité complète du postulant, ainsi que la nature de l'activité sollicitée. Après avoir vérifié si la personne répond aux conditions du présent accord et accomplit les formalités nécessaires, les services respectifs du Protocole doivent faire savoir à l'ambassade concernée, dans les meilleurs délais, si la personne à charge est autorisée à exercer l'activité rémunérée sollicitée.
    Dans les trois mois qui suivent la date de réception de l'autorisation d'exercer une activité rémunérée, l'ambassade fournit aux autorités de l'Etat d'accueil la preuve que la personne à charge et son cocontractant se conforment aux obligations que leur impose la législation dudit Etat relative à la couverture sociale.

Article 4

    L'autorisation pour une personne à charge d'exercer une activité rémunérée n'implique pas une exemption des conditions régissant son exercice telles que les diplômes et les qualifications professionnelles. Dans le cas des professions dites « réglementées », dont l'autorisation d'exercice ne peut être accordée qu'en fonction de certains critères, la personne à charge n'est pas dispensée de l'exigence de ces critères.

Article 5

    En ce qui concerne les personnes à charge qui ont obtenu l'autorisation d'exercer une activité rémunérée et qui bénéficient des immunités de juridiction en matière civile et administrative en application des articles 31 et 37 de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques, l'Etat d'envoi renonce à cette immunité pour toutes les questions liées à leur activité rémunérée. Dans de tels cas, l'Etat d'envoi renonce aussi à l'immunité d'exécution d'un jugement, pour laquelle une renonciation distincte est nécessaire.

Article 6

    Au cas où une personne à charge qui bénéficie de l'immunité de juridiction en application de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques est accusée d'avoir commis une infraction pénale en relation avec son activité rémunérée, l'immunité de juridiction pénale est levée par l'Etat d'envoi, si l'Etat d'accueil le demande et lorsque l'Etat d'envoi juge que la levée de cette immunité n'est pas contraire à ses intérêts essentiels.

Article 7

    Toute procédure judiciaire doit être menée sans qu'il soit porté atteinte à l'inviolabilité de la personne ou de la demeure du ménage.

Article 8

    La renonciation à l'immunité de juridiction pénale n'est pas interprétée comme une renonciation à l'immunité d'exécution de la sentence, pour laquelle une renonciation distincte est demandée. L'Etat d'envoi prend en considération une telle demande de renonciation.

Article 9

    Les personnes à charge autorisées à exercer une activité rémunérée cessent, à compter de la date de l'autorisation, de bénéficier des privilèges douaniers prévus par les articles 36 et 37 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, l'article 50 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, ou les accords de siège.

Article 10

    Sous réserve des dispositions pertinentes de la convention franco-australienne destinée à éviter les doubles impositions, les revenus que les personnes à charge tirent de leur activité rémunérée dans l'Etat d'accueil sont imposables dans cet Etat selon la législation fiscale de ce dernier.

Article 11

    La personne à charge qui exerce une activité rémunérée est soumise au régime de couverture sociale en vigueur dans l'Etat d'accueil.

Article 12

    Les personnes à charge autorisées à exercer une activité rémunérée dans le cadre du présent accord sont admises à transférer leurs rémunérations et accessoires dans les mêmes conditions que celles prévues par la réglementation de l'Etat d'accueil en faveur des travailleurs étrangers.

Article 13

    La personne à charge autorisée à exercer une activité rémunérée en vertu du présent accord est exemptée de toute obligation prévue par les lois et règlements de l'Etat d'accueil relatifs à l'immatriculation des étrangers et au permis de séjour.

Article 14

    L'autorisation d'exercer une activité rémunérée prévue par le présent accord est octroyée à une personne à charge à compter de la date de prise de fonctions du membre de la mission officielle. Elle prend fin dès que le bénéficiaire de l'autorisation cesse d'avoir la qualité de personne à charge, à la date de fin d'exécution de l'activité et, en tout état de cause, à la date de cessation des fonctions du membre de la mission officielle, en tenant compte, cependant, du délai raisonnable visé aux articles 39.2 et 39.3 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et à l'article 53.3 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires.

Article 15

    Chacun des Etats pourra, au moment de la signature ou ultérieurement, au moyen d'un échange de lettres, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera son consentement à être lié par le présent accord.

Article 16

    1.  Chacun des Etats notifiera à l'autre l'accomplissement des procédures requises pour l'entrée en vigueur du présent accord, qui interviendra le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière de ces notifications.
    2.  Le présent accord restera en vigueur jusqu'à l'expiration d'un délai de cent quatre-vingts jours après la date de notification écrite de l'un ou l'autre Etat exprimant son intention d'y mettre fin.
    En foi de quoi les soussignés, dûment autorisés par leur Gouvernement respectif, ont signé le présent accord.
    Fait à Adelaïde, le 2 novembre 2001, en deux exemplaires originaux, en langues française et anglaise, les deux textes faisant également foi.

Pour le Gouvernement
de la République française :
Pierre  Viaux
Ambassadeur

Pour le Gouvernement
de l'Australie :
Alexandre  Downer
Ministre
des affaires étrangères

N° 403 - Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre


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