N° 224 - Proposition de loi de M. Jean-Pierre Abelin relative à la répression de la conduite sous l'empire de produits stupéfiants




N° 224
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 septembre 2002.
PROPOSITION DE LOI
relative à la répression de la conduite
sous l'empire de produits
stupéfiants.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE
par M. Jean-Pierre ABELIN,

Additions de signatures :
M. Bernard Schreiner,
M. Gérard Cherpion
MM. Pierre Albertini, René André, François d’Aubert, Jean Auclair, Bertho Audifax, Pierre-Christophe Baguet, Jean- Claude Beaulieu, Jean-Louis Bernard, Jean Besson, Gabriel Biancheri, Claude Birraux, Roland Blum, Jacques Bobe, Loïc Bouvard, Michel Bouvard, François Calvet, Richard Cazenave, Mme Joëlle Ceccaldi- Raynaud, M. Philippe Cochet, Mme Geneviève Colot, MM. Charles de Courson, Marc-Philippe Daubresse, Lucien Degauchy, Francis Delattre, Stéphane Demilly, Jean Dionis du Séjour, Renaud Donnedieu de Vabres, Dominique Dord, Nicolas Dupont-Aignan, André Flajolet, Philippe Folliot, Mme Arlette Franco, MM. René Galy-Dejean, Gilbert Gantier, Daniel Garrigue, Maurice Giro, Jean Grenet, François Grosdidier, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, Michel Heinrich, Laurent Hénart, Denis Jacquat, Éric Jalton, Olivier Jardé, Yves Jego, Didier Julia, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Patrick Labaune, Pierre Lasbordes, Jean-Louis Léonard, Arnaud Lepercq, Thierry Mariani, Patrice Martin- Lalande, Alain Marty, Pierre Micaux, Pierre Morange, Mme Nadine Morano, MM. Georges Mothron, Étienne Mourrut, Dominique Paillé, Christian Philip, Michel Piron, Jean-Luc Préel, Jean Proriol, Didier Quentin, Michel Raison, Jean-François Régère, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Jean Roatta, Vincent Rolland, Joël Sarlot, Alain Suguenot, André Thien Ah Koon, Jean Ueberschlag, Léon Vachet, Christian Vanneste, François Vannson, Francis Vercamer, Gérard Vignoble, Philippe de Villiers, Gérard Voisin, Michel Voisin et Michel Zumkeller
M. Dino Cinieri


Députés.

Sécurité routière.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
L'année 2001 a malheureusement de nouveau inversé la tendance des tués sur les routes de France.
Avec 8 060 tués, notre pays est le plus mauvais élève de l'Union européenne. Parmi les victimes de cette insécurité routière grandissante, les jeunes de quinze à vingt-quatre ans payent un lourd tribut.
Malgré toutes les campagnes mises en place et diffusées plusieurs fois par jour sur tous les médias français, rien n'y fait, près d'un quart de jeunes de moins de vingt-quatre ans décèdent dans un accident de la route alors qu'il représentent 13 % de la population totale. Cette situation alarmante doit rapidement trouver une solution.
La vitesse et l'alcool au volant, qui représentent les principales causes d'accident en France, font l'objet de sanctions. En revanche, tel n'est pas le cas de la conduite sous l'empire de stupéfiants, alors même qu'il est aujourd'hui admis que la drogue est présente dans 10 à 15 % des accidents mortels.
Depuis le 1er octobre 2001 et le 16 novembre 2001, tous les conducteurs impliqués dans un accident mortel ou dans un accident corporel de la circulation font l'objet d'un dépistage systématique de stupéfiants.
Le refus de se soumettre aux analyses et autres examens est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende. En revanche, aucune sanction n'est pour le moment prévue en cas de test positif.
De plus, du fait que la conduite sous l'empire d'une drogue n'est pas pas considérée comme une infraction spécifique, il est souvent difficile de poursuivre les contrevenants.
Malgré cette lacune, l'article L. 3421-1 du nouveau code de la santé publique, qui prévoit que l'usage illicite de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d'une peine d'emprisonnement et 255 000 F d'amende, peut servir de fondement aux poursuites dirigées contre un conducteur automobile sous l'empire de stupéfiants.
En revanche, l'article 223-1 du code pénal relatif à la mise en danger de la vie d'autrui s'applique difficilement au cas des personnes qui conduisent sous l'empire de stupéfiants.
Pour répondre plus efficacement à ces problèmes de procédure, la conduite sous l'empire de stupéfiants doit constituer un délit. Il faudrait interdire la conduite à toute personne qui aurait consommé des substances illicites démontrées par un test.
Afin de prendre pleinement en compte ce délit, la législation française devrait également appliquer la directive européenne 91/439/CEE du Conseil du 29 juillet 1991 qui, dans son article 7 de l'annexe III, précise que « le permis de conduire ne doit être ni délivré, ni renouvelé à tout candidat ou conducteur en état de dépendance vis-à-vis de substances à action psychotrope ou qui sans être dépendant en abuse régulièrement, quelle que soit la catégorie de produit sollicitée ».
Lorsque les analyses seront terminées, des seuils devront être fixés pour éviter tout problème d'appréciation. En effet, après avoir consommé un tel produit, les traces de stupéfiant consommé mettent du temps avant d'être éliminées par l'organisme.
Les effets peuvent durer de deux à sept heures pour le cannabis et plusieurs jours pour les drogues dures sans avoir la même incidence sur la conduite.
S'agissant des assurances, l'article L. 211-6 du code des assurances prévoit qu'« est réputée non écrite toute clause stipulant la déchéance de la garantie de l'assuré en cas de conduite en état d'ivresse ou sous l'empire d'un état alcoolique ». On pourrait compléter ce dispositif en visant « sous l'empire de stupéfiants ».

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

I. - Après l'intitulé du chapitre V du titre III du livre II du code de la route, il est inséré un article L. 235-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 235-1. - I. - Le fait de conduire sous l'empire de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende.
« En cas d'application des articles L. 221-6 et L. 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'infraction définie à l'alinéa précédent, les peines prévues par ces articles seront doublées.
« II. - L'immobilisation peut être prescrite dans les conditions définies aux articles L. 325-1 à L. 325-3.
« III. - Ce délit donne lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre de points initial du permis de conduire.
« IV. - Les dispositions du présent article sont applicables à l'accompagnateur d'un élève conducteur. »
II. - En conséquence, l'article L. 235-1 est intitulé article L. 235-2.

Article 2

Dans le premier alinéa de l'article L. 235-1, après les mots : « classées comme stupéfiants », sont insérés les mots : « ou de médicaments classés comme tranquillisants et antidépresseurs susceptibles d'altérer la conduite ».

Article 3

Après l'article L. 235-2, il est inséré un article L. 235-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 235-3. - I. - Toute personne coupable du délit défini à l'article L. 235-1 encourt également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suppression pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
« 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'une nouveau permis pendant trois ans au plus ;
« 3° La peine de travail d'intérêt général selon des modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l'article 20-5 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
« II. - La suppression du permis de conduire prévue au présent article ne peut être assortie du sursis, même partiellement. »

Article 4

L'article L. 211-6 du code des assurances est complété par les mots : « , de substances ou plantes classées comme stupéfiants ou de médicaments classés comme tranquillisants et antidépresseurs susceptibles d'altérer la conduite ».

224 - Proposition de loi de M. Jean-Pierre Abelin : répression de la conduite sous l'emprise de stupéfiants


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