N° 1802 - Proposition de loi de Mme Maryse Joissains-Masini autorisant les communes et leurs groupements à proposer aux demandeurs d'emplois et aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, un emploi correspondant à leur niveau de qualification pour réaliser des activités d'intérêt général




 

N° 1802

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 septembre 2004.

PROPOSITION DE LOI

autorisant les communes et leurs groupements
à
proposer aux demandeurs d'emplois
et aux
bénéficiaires du revenu minimum d'insertion,
un
emploi correspondant à leur niveau de qualification
pour réaliser des activités d'intérêt général,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par Mme Maryse JOISSAINS-MASINI, MM. Jean AUCLAIR, René ANDRÉ, Jean-Claude BEAULIEU, Jacques-Alain BÉNISTI, Marc BERNIER, Jean-Michel BERTRAND,
Mme Maryvonne BRIOT, MM. Dominique CAILLAUD, Roland CHASSAIN, Louis COSYNS, Charles COVA, Olivier DASSAULT, Lucien DEGAUCHY, Jean-Pierre DECOOL, Léonce DEPREZ, Olivier DOSNE, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Pierre-Louis FAGNIEZ, André FLAJOLET, Jean-Claude FLORY, Jean-Michel FOURGOUS, Marc FRANCINA,
Mme Arlette FRANCO, MM. Daniel GARD, Franck GILARD, François GROSDIDIER, Jean-Claude GUIBAL, Mme Pascale GRUNY, MM. Emmanuel HAMELIN, Henri HOUDOUIN, Denis JACQUAT, Christian JEANJEAN, Didier JULIA, Jacques KOSSOWSKI, Thierry LAZARO, Edouard LANDRAIN, Jean-Marc LEFRANC, Jean-Claude LEMOINE, Gérard LÉONARD, Mme Geneviève LEVY, MM. Lionnel LUCA, Daniel MACH, Richard MALLIÉ, Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, M. Philippe-Armand MARTIN, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Alain MARTY, Alain MARLEIX, Jean MARSAUDON, Bernard MAZOUAUD, Christian MÉNARD, Alain MERLY, Gilbert MEYER, Mme Nadine MORANO, MM. Etienne MOURRUT, Alain MOYNE-BRESSAND, Jean-Pierre NICOLAS, Yves NICOLIN, Mmes Bérengère POLETTI, Josette PONS, MM. Didier QUENTIN, Frédéric REISS, Jean-François RÉGÈRE, Jacques REMILLER, Mme Juliana RIMANE, MM. Jean ROATTA, Bernard SCHREINER, Daniel SPAGNOU, Michel SORDI, Mmes Michèle TABAROT, Irène THARIN, MM. Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Léon VACHET, Christian VANNESTE, Philippe VITEL et Michel VOISIN

Additions de signatures :
MM. Bernard Brochand et François Scellier
M. René-Paul Victoria
M. Guy Geoffroy

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays compte quatre millions de personnes sans emploi et ce seul chiffre suffirait à démontrer l'échec des dispositifs de traitement social et celui des politiques de partage ou de réduction du temps de travail.

Certes depuis deux ans, malgré un contexte économique difficile, de nouveaux dispositifs ont esssayé de rompre avec cette tendance qui ne pouvait qu'accentuer les risques d'éclatement de notre société.

Les résultats des diverses enquêtes sur la situation des allocataires du RMI laissent tous apparaître qu'à peine la moitié d'entre eux s'engagent à effectuer des démarches nécessaires à leur insertion sociale et professionnelle. De plus, très peu ont pu s'engager dans une véritable action de retour vers l'emploi. Les résultats révèlent, s'il en était encore besoin, l'inefficacité de cette allocation pour inciter à la reprise d'une activité et à la recherche de moyens de subsistances autonomes.

La loi du 1er décembre 1988 voulait répondre à des préoccupations nobles et louables. Son application largement détournée par les effets du système de gestion et l'insuffisance de l'accompagnement n'a fait que renforcer les dispositifs d'assistance aux personnes et inciter largement à recourir d'une manière durable à cette source de revenu.

Cette allocation est devenue au fil du temps, une ressource injustement répartie alors qu'elle aurait dû constituer une ressource susceptible d'aider les bénéficiaires à surmonter une période difficile de leur existence.

Enfin, alors qu'elles auraient dû permettre aux bénéficiaires d'augmenter leurs chances de retour à la vie active, les modalités d'application du dispositif du RMI, n'ont fait que contribuer à les maintenir dans l'isolement social et en dehors du monde du travail de manière durable.

Il convient donc, avec la plus grande urgence, de casser ce cercle vicieux et de créer un véritable système fortement incitatif à la reprise d'activité.

De surcroît, le niveau de l'allocation, les exemples criants, même s'ils restent marginaux, d'utilisations frauduleuses, le nombre croissant d'allocataires, le niveau actuel de l'allocation ne font que renforcer le sentiment de ceux qui travaillent, qu'ils contribuent au financement de personnes inactives et pourtant médicalement aptes à assumer un emploi.

Ce véritable gâchis doit être rapidement transformé et un nouveau dispositif mis en place, pour contribuer au développement de notre société et permettre ainsi aux allocataires de retrouver toute leur dignité grâce à un travail rémunéré.

Nous devons reconnaître que les besoins collectifs sont considérables. Ceux-ci doivent cependant être d'abord satisfaits par l'initiative privée, préférable, chaque fois que possible, à toute intervention de la puissance publique.

Les collectivités territoriales assument l'organisation de la cité et de la vie collective. Elles doivent répondre à une sollicitation de plus en plus exigeante de ceux qui y habitent. Là encore, les collectivités ne doivent pas se substituer à la responsabilité individuelle.

Mais, la nature et l'importance des missions confiées aux collectivités territoriales ne cessent de se développer et certaines collectivités ne parviennent plus ou ne sont plus dans la capacité de faire face à ce que l'on attend d'elles. Il s'agit là pour nos concitoyens de contribuer directement à la réalisation d'activités d'intérêt général.

C'est pourquoi nous proposons que les communes ou leurs groupements de communes, devant faire face souvent à une charge salariale trop importante, puissent offrir des activités aux demandeurs d'emplois qui en ont le désir.

La présente proposition permettrait donc d'offrir aux bénéficiaires du RMI, dans le cadre du RMA, à ceux qui perçoivent une allocation chômage ou une aide sociale à participer à la réalisation d'une mission d'intérêt général tout en conservant leur allocation, de percevoir une rémunération au moins équivalente au SMIC ou à un salaire correspondant le plus proche possible des compétences offertes.

Cette participation à la vie de la cité ne doit pas leur ouvrir de droit spécial ou réservé pour accéder à un emploi public. Elle est simplement une solution immédiate, valorisante pour ceux qui souhaiteraient s'y engager.

Les collectivités détermineraient les activités d'intérêt général qui pourront être localement confiées à ces demandeurs d'emplois. Les domaines de l'environnement, de la propreté urbaine, des services aux personnes dépendantes, âgées ou handicapées ouvrent des possibilités considérables pour parfaire ou même réaliser ce qui ne peut l'être par l'action directe des services publics ou par manque de moyens.

Il est important de mesurer l'ampleur des champs d'intérêt général qui peuvent être ainsi abordés : la protection et l'entretien des paysages, la préservation et la surveillance des forêts, l'accompagnement des personnes handicapées ou à mobilité réduite, l'éducation, l'aide à l'éducation et à l'enseignement, le développement du sport, l'encadrement des loisirs, la protection des animaux, l'apprentissage de comportements citoyen et respectueux de la vie en société, l'éducation à la santé et la participation aux campagnes de prévention, la préparation et l'encadrement d'événements, la prévention des risques...

Les personnes sans emploi peuvent également participer aux missions habituelles dévolues aux collectivités territoriales. L'offre qui leur est ainsi faite est un moyen direct, efficace et immédiat de retrouver une place dans la vie professionnelle.

Toutefois les domaines d'intervention des collectivités territoriales ne doivent pas amener à concurrencer un service proposé ou rendu par le secteur privé.

Si le secteur associatif ou concurrentiel est en mesure d'offrir ces services ou de couvrir ces besoins, la collectivité locale devra cesser d'offrir une prestation qui serait identique et comparable. C'est même là l'occasion de proposer l'expérience des personnes ayant effectué une mission d'intérêt général à la structure qui prendrait le relais dans la même activité.

Cette proposition n'aboutit pas à créer des emplois artificiels comme malheureusement ce fut trop souvent le cas pour les emplois jeunes, les CES et CEC, mais permet de répondre à un besoin réel tout en participant à l'élévation du pouvoir d'achat des personnes qui l'ont vu diminuer et qui ont connu les difficultés qui en résultent.

Le dispositif qui vous est proposé dans la présente proposition de loi génèrera de multiples effets positifs et constitue une perspective concrète d'insertion professionnelle ouverte à tous ceux qui ont une démarche active de recherche d'emploi.

Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir l'adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Les communes ou leurs groupements n'ayant pas de service en régie, dont les dépenses affectées aux traitements et charges sociales de personnel sont supérieures à 145 % de leur budget annuel de fonctionnement ou supérieures à 50 % pour celles ayant un ou plusieurs services en régie pourront proposer des activités rémunérées aux demandeurs d'emploi et aux allocataires, domiciliés sur leur territoire percevant l'allocation chômage ou le revenu minimum d'insertion.

Dans les mêmes conditions, les entreprises attributaires de marchés publics susceptibles de répondre aux besoins collectifs ou d'intérêt général, ou susceptibles d'apporter des services complémentaires ou nouveaux à la population, pourront avoir recours à ce dispositif pendant une durée fixée par décret et si elles n'ont procédé à aucun licenciement économique dans les 12 mois précédents.

Article 2

Tout demandeur d'emploi et toute personne percevant une allocation chômage depuis plus de 6 mois, ainsi que tout allocataire du revenu minimum d'insertion, dès l'ouverture de son droit à allocation, doit être disponible pour exercer une activité correspondant à ses capacités à condition d'en être reconnu médicalement apte.

Article 3

Pour effectuer un travail relevant des missions de service public des collectivités locales ou effectuer un travail d'intérêt général dans des domaines d'activités fixés par décret, les personnes visées à l'article 2 seront mises à la disposition des maires des communes de leur lieu de résidence, des présidents des groupements de communes, ou des établissements publics qui en dépendent.

La nature des tâches qui pourront leur être confiées est définie par délibération et décision des assemblées territoriales concernées.

Le refus de deux propositions d'activités, dans les quinze jours suivant la réception de la proposition entraînera l'exclusion immédiate et automatique du bénéfice de l'allocation chômage ou du revenu minimum d'insertion sauf pour un motif réel et légitime, notamment si aucune de ces propositions ne correspond à leurs capacités.

En cas de contestation, il appartient au Préfet de département d'apprécier le bien-fondé de ce refus, après avis d'une commission départementale dont la composition sera fixée par décret. Celle-ci devra impérativement statuer dans les 15 jours du refus et sera saisie soit par l'allocataire, soit par la collectivité concernée. Ce recours est préalable à tout recours juridictionnel et suspend la mesure d'exclusion.

Article 4

Ce travail sera rémunéré par un salaire compensant la différence entre ce qui est perçu au titre du RMI ou de l'allocation chômage et le traitement équivalent au SMIC ou au salaire perçu par un salarié de la collectivité à compétence égale.

Les personnes affectées à ces travaux d'intérêt général seront salariés de droit privé et n'auront pas vocation à être intégrées à la fonction publique territoriale en dehors des modalités statutaires qui la régissent.

Le salarié bénéficiera du temps nécessaire pour rechercher un emploi et pourra cesser avec un préavis de 8 jours maximum l'activité qui lui a été confiée pour occuper un autre emploi à durée déterminée ou indéterminée qui lui conviendrait.

Article 5

Les cotisations « retraite » sont, pour la part patronale à la charge de la collectivité qui les emploie pour la durée totale de l'activité.

Article 6

Les charges éventuelles qui résulteraient pour les collectivités locales de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement et de la dotation générale de décentralisation.

Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par l'augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118500-0
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 1802 - Proposition de loi autorisant les communes et leurs groupements à proposer aux demandeurs d'emplois et aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, un emploi correspondant à leur niveau de qualification pour réaliser des activités d'intérêt général (Mme Maryse Joissains-Masini)


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