N° 1842 - Proposition de loi de M. Jean-Marc Nesme visant à favoriser le développement en milieu hospitalier de services de maternologie prenant en compte les difficultés de la relation mère-enfant




 

N° 1842

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

PROPOSITION DE LOI

visant à favoriser le développement en milieu hospitalier
de services de
maternologie prenant en compte
les difficultés de la relation mère-enfant,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Jean-Marc NESME, Pierre-Christophe BAGUET, Patrick BALKANY, Patrick BEAUDOUIN, Jacques-Alain BÉNISTI, Bruno BOURG-BROC, Loïc BOUVARD, François CALVET, Pierre CARDO, Philippe COCHET, Georges COLOMBIER, Alain CORTADE, Alain COUSIN, Jean-Michel COUVE, Jean-Pierre DECOOL, Léonce DEPREZ, Olivier DOSNE, Jean-Michel DUBERNARD, Philippe DUBOURG, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Christian ESTROSI, Jean-Michel FERRAND, Daniel FIDELIN, Mme Cécile GALLEZ, MM. Daniel GARD, Claude GATIGNOL, Guy GEOFFROY, Franck GILARD, Mme Claude GREFF,
MM. François GROSDIDIER, Pierre HELLIER, Aimé KERGUERIS, Patrick LABAUNE, Yvan LACHAUD, Pierre LASBORDES, Dominique LE MÈNER, Jean-Marc LEFRANC, Lionnel LUCA, Thierry MARIANI, Philippe-Armand MARTIN, Mme Henriette MARTINEZ,
MM. Christian MÉNARD, Pierre MICAUX, Mme Nadine MORANO, MM. Alain MOYNE-BRESSAND, Jean-Marc NUDANT, Dominique PAILLÉ, Jacques PÉLISSARD, Pierre-André PÉRISSOL, Bernard PERRUT, Mme Bérengère POLETTI, MM. Daniel PRÉVOST, Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Eric RAOULT, Jean-François RÉGÈRE, Jacques REMILLER, Michel ROUMEGOUX, Mme Hélène TANGUY, MM. Guy TEISSIER, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Léon VACHET, Christian VANNESTE et Michel VOISIN

Additions de signatures :
MM. Manuel Aeschlimann, Dominique Juillot, Mmes Béatrice Pavy, Juliana Rimane et Irène Tharin
M. Dominique Richard
Mme Christine Boutin

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Aujourd'hui, un grave problème de santé publique demeure encore presque méconnu : il s'agit de la fréquence des difficultés maternelles qui se développent après l'accouchement de l'enfant et peuvent avoir des répercussions graves sur son développement.

Depuis toujours, l'accouchement est synonyme de naissance alors qu'il est important de distinguer ces deux termes.

Les soins qu'impliquent la grossesse et l'accouchement relèvent de l'obstétrique alors que ceux que nécessite la naissance relèvent de la parentalité.

Il est important de souligner que selon de nombreuses études médicales, 10 % des enfants qui viennent au monde, même s'ils sont bien accouchés « naissent mal », au point de présenter des maladies psychiques ou somatiques qui se traduiront ensuite par des troubles durables du développement et du comportement.

Bien souvent notre société ne s'inquiète des mères que sur le plan des modalités médicales et sociales habituelles, réduisant les problématiques maternelles à la dépression et à la maltraitance. La dimension psychique de la maternité et de la naissance nécessite cependant un autre abord et une approche médicale spécifique.

C'est dans ce cadre clinique qu'a été ouverte en 1987 la première unité de recherche et de soins en maternologie à St-Cyr-l'Ecole, dirigée par le Docteur Jean-Marie Delassus. La maternologie est définie selon le grand Robert de la langue française comme la démarche thérapeutique qui s'attache à la dimension psychique de la maternité et qui prend en compte les difficultés de la relation mère-enfant.

Ces difficultés sont différentes du baby-blues considéré comme un syndrome transitoire de réajustement émotionnel de la mère à la venue de l'enfant.

Il s'agit, malheureusement, d'un état bien plus préoccupant et tout à fait particulier : une femme constate et souffre cruellement, sans pouvoir le dire, en raison de la honte qu'elle ressent car elle n'éprouve pour son bébé ni l'émotion, ni la tendresse, ni la sollicitude qu'une maman devrait vivre tout naturellement. Elle éprouve comme une sorte de paralysie du cœur face au bébé qu'elle vient de mettre au monde. Elle se sent accablée par un sentiment d'incapacité, d'impuissance et d'indignité face à son enfant.

Ce désespoir maternel et cette souffrance psychique non détectés ou mal soignés peuvent avoir des répercussions graves sur le développement du bébé. De nombreuses morts subites du nourrisson sembleraient avoir un lien manifeste avec ce problème, de même certaines maltraitances comme le syndrome du bébé secoué. Le lien émotionnel étant inexitant, l'enfant risque d'être considéré tel un objet dans moment de colère incontrôlée, lorsque celui-ci pleure ou refuse de s'alimenter. Certains enfants vont développer une forme d'autisme ou d'état dépressif en raison de ce trouble relationnel avec leur mère.

Les difficultés maternelles graves, prises chez les mères pour des dépressions, ne peuvent pas être soignées comme telles, sous peine de soigner les conséquences et non les causes, laissant la maladie se développer et déplacer ses effets.

Les affections du nourrisson sont également encore malheureusement insuffisamment repérées et donc mal soignées.

Une réorientation des soins précoces est nécessaire. Elle doit être basée sur le champ médical relatif aux questions de parentalité, de maternité et de naissance vue sous son angle psychique.

Pour développer cette nouvelle spécialité médicale, il apparaît important :

- de promouvoir l'enseignement de la maternologie.

C'est pourquoi nous proposons de valoriser le Certificat de maternologie clinique qui comporte aujourd'hui 160 heures de cours sur un an. Il serait souhaitable de le rendre obligatoire pour tous les professionnels de périnatalité : sages-femmes, médecins généralistes, obstétriciens et pédiatres ;

- de développer des consultations maternologiques dès le séjour en maternité. Elles devraient pouvoir se substituer aux consultations psychiatriques classiques. Il ne s'agit pas d'évincer la psychiatrie mais de l'inviter à une nouvelle forme de sa pratique clinique ; forme adaptée à la spécificité de la maternité et de la naissance et non plus au repérage et au soin des maladies mentales ;

- de créer des unités de maternologie dans chaque département. On peut envisager comme c'est actuellement le cas, des maternités, des institutions de périnatalité et des maisons maternelles qui incluent dans leurs activités un pôle maternologique assuré par un personnel ayant une réelle pratique professionnelle de ces questions.

La maternologie peut être considérée après 20 ans de recherche pratique et en raison de ses résultats positifs, dans 95 % des cas, comme une médecine d'avenir qu'il est urgent de mettre en place sur tout le territoire national. Son développement contribuera à la réduction des troubles de la petite enfance et des difficultés scolaires de l'enfant. Elle réduira les risques de matraitance infra-familiale et permettra d'apporter des solutions positives à bien des problèmes parentaux et sociaux.

C'est pourquoi il vous est demandé, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante :

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après le 8e alinéa de l'article L. 1411-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 5obis L'organisation de la prise en charge périnatalogique et la prévention des risques de maltraitance de l'enfant, par le développement de la maternologie dans des conditions prévues par décret. »

Article 2

Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées par l'augmentation à due concurrence des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118772-0
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 1842 - Proposition de loi : Développement de services de maternologie en milieu hospitalier (Jean-Marc Nesme)


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