N° 1850 - Proposition de loi de M. Philippe Cochet visant à promouvoir l'emploi au travers du temps partagé et du multisalariat




N° 1850

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

PROPOSITION DE LOI

visant à promouvoir l'emploi
au travers du
temps partagé et du multisalariat,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Philippe COCHET

Additions de signatures :
MM. Jean-Claude Beaulieu, Jacques-Alain Bénisti, Jean-Michel Bertrand, Jérôme Bignon, Claude Birraux, Étienne Blanc, Mmes Chantal Bourragué, Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Ghislain Bray, Mme Chantal Brunel, MM. François Calvet, Pierre Cardo, Jean-Louis Christ, Dino Cinieri, Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Alain Cortade, Louis Cosyns, Édouard Courtial, Alain Cousin, Jean-Yves Cousin, Jean-Michel Couve, Olivier Dassault, Jean De Gaulle, Jean-Pierre Decool, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Jean-Jacques Descamps, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Olivier Dosne, Jean-Michel Dubernard, Philippe Dubourg, Nicolas Dupont-Aignan, Christian Estrosi, Yannick Favennec, Georges Fenech, Jean-Michel Ferrand, Daniel Fidelin, Jean-Claude Flory, Marc Francina, Daniel Gard, Claude Gatignol, Guy Geoffroy, Franck Gilard, François Grosdidier, Mme Arlette Grosskost, MM. Pascale Gruny, Christophe Guilloteau, Michel Heinrich, Pierre Hellier, Francis Hillmeyer, Jean-Yves Hugon, Édouard Jacque, Éric Jalton, Aimé Kergueris, Patrick Labaune, Yvan Lachaud, Jacques Lafleur, Robert Lamy, Jean Lassalle, Jean-Marc Lefranc, Céleste Lett, Gérard Lorgeoux, Lionnel Luca, Thierry Mariani, Alain Marleix, Jean Marsaudon, Philippe Armand Martin, Mme Henriette Martinez, MM. Christian Ménard, Damien Meslot, Pierre Morange, Étienne Mourrut, Alain Moyne Bressand, Jacques Myard, Jean-Pierre Nicolas, Mme Bernadette Païx, MM. Jacques Pélissard, Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, MM. Daniel Prévost, Christophe Priou, Didier Quentin, Jacques Remiller, Mme Juliana Rimane, MM. Jean Roatta, Serge Roques, Philippe Rouault, Michel Roumegoux, Joël Sarlot, Jean-Marie Sermier, Yves Simon, Michel Sordi, Mmes Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Guy Teissier, Michel Terrot, Mme Irène Tharin, MM. Dominique Tian, Alfred Trassy-Paillogues, Jean Ueberschlag, René-Paul Victoria, Philippe Vitel, Gérard Voisin, Michel Voisin et Michel Zumkeller
MM. Jean-Pierre Abelin, Jean-Paul Anciaux, Jean Auclair, Gabriel Biancheri, Marc Bernier, Emile Blessig, Jean-François Chossy, Yves Coussain, Bernard Debré, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Diefenbacher, Stéphane Demilly, Philippe Feneuil, André Flajolet, Jean-Paul Garraud, Jean-Jacques Gaultier, Jacques Godfrain, Mme Claude Greff, MM. Jean-Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Emmanuel Hamelin, Pierre Hériaud, Mmes Maryse Joissains-Masini, Nathalie Kosciusko-Morizet, MM. Jacques Kossowski, Marc Le Fur, Jean-Pierre Le Ridant, Pierre Lequiller, Daniel Mach, Bernard Mazouaud, Alain Merly, Denis Merville, Mme Béatrice Pavy, MM. Christian Philip, Frédéric Reiss, Jean-Luc Reitzer, Jean-Marc Roubaud, Francis Saint-Léger, Daniel Spagnou, Léon Vachet, Christian Vanneste, Gérard Weber et Mme Marie-Jo Zimmermann
M. Patrick Herr

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Comme l'a rappelé le président Jacques Chirac lors de son allocution du 14 juillet dernier, l'action gouvernementale dans le domaine de l'emploi est prioritaire pour les années à venir.

Notre pays, comme vous le savez, connaît une crise importante en matière d'emploi puisqu'à l'heure actuelle, près d'une personne active sur dix est inscrite comme demandeur d'emploi.

Cette situation de détérioration du marché de l'emploi est très préoccupante. Elle l'est d'autant plus pour les travailleurs de plus de 50 ans que l'on qualifie sous le terme générique de « seniors ». Les entreprises préfèrent, en effet embaucher deux jeunes travailleurs en lieu et place d'un travailleur expérimenté, afin de réduire leurs charges salariales.

Le multisalariat en temps partagé pourrait être une des solutions possibles aux problèmes actuels tant pour les employés que pour les employeurs :

· Les employés pourraient y trouver une réponse à la difficulté croissante de retrouver un emploi qualifié à temps plein ou à temps partiel dans une entreprise au-delà d'une certaine limite d'âge.

· Les employeurs pourraient grâce à cette méthode (aujourd'hui peu utilisée) capitaliser l'expérience dont ils ont besoin sans pour autant amoindrir leur compétitivité et trouver une réponse à la nouvelle donne économique imposant aux entreprises une plus grande flexibilité, sans pour autant augmenter les coûts salariaux.

· En outre, les PME/PMI qui ne disposent pas toujours de ressources suffisantes pour embaucher des cadres à temps plein, ont pourtant besoin de leurs compétences et de leur expérience pour assurer un développement harmonieux de leur activité.

Le multisalariat en temps partagé pourrait ainsi être une solution flexible et financièrement viable dans les sociétés de type PME/PMI qui constituent le noyau économique de notre pays.

A mon grand regret, la France connaît un taux d'emploi des 55-64 ans qui atteint péniblement 33,8 %. Les pays ayant appliqué depuis longtemps le multisalariat en temps partagé (et notamment les pays d'Europe du Nord) affichent un taux d'emploi des 55-64 ans nettement supérieur à celui de la France : 68,3 % pour la Suède, 57,3 % pour le Danemark, ou encore 53,3 % pour le Royaume-Uni. La moyenne du taux d'emploi des 55-64 ans dans les 15 pays de l'UE est, quant à elle, de 39,8 %, soit très largement au-dessus de celle de notre pays.

Une proposition de loi relative au multisalariat en temps partagé avait été déposée au Sénat par le sénateur du Jura, André Jourdain, en 1998. Cette proposition de loi a été adoptée par le Sénat le 11 mars 1999, mais n'a malheureusement jamais été examinée par notre assemblée malgré son dépôt le 17 juillet 2002 !

Aussi, je me propose, compte tenu du faible développement du multisalariat en France, de reprendre et de compléter le texte de notre collègue sénateur, afin de donner toute la portée nécessaire à une politique de l'emploi ayant fait ses preuves dans de nombreux autres pays.

PROPOSITION DE LOI

Chapitre Ier

Définition du multisalariat en temps partagé

Article 1er

Après l'article L. 212-4-11 du code du travail, il est inséré une division, un titre et deux articles ainsi rédigés : « Paragraphe 2 bis - Travail à temps partagé ».

« Art. L. 212-4-11-1. - Le travail à temps partagé est l'exercice par un salarié pour le compte de plusieurs employeurs de ses compétences professionnelles dans le respect des dispositions applicables à la réglementation de la durée du travail.

« Le contrat de travail du salarié à temps partagé est un contrat écrit à durée déterminée ou indéterminée. Il mentionne notamment :

« - la qualification du salarié ;

« - les éléments de la rémunération ; le contrat peut prévoir les modalités de calcul de la rémunération mensualisée indépendamment du temps accompli au cours du mois lorsque le salarié à temps partagé est occupé sur une base annuelle ;

« - la convention collective éventuellement appliquée par l'employeur et, le cas échéant, les autres dispositions conventionnelles applicables ;

« - la durée du travail hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle ou annuelle ;

« - la répartition de cette durée entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois ou de l'année ; quand cette répartition ne peut être préalablement établie, un avenant au contrat de travail la définit ultérieurement ;

« - la possibilité de modifier cette répartition ou la durée du travail par accord entre les parties ;

« - la procédure selon laquelle le salarié à temps partagé pourra exercer son droit à congés annuels ;

« - la liste des autres contrats de travail dont le salarié est titulaire ; toute modification de cette liste est portée à la connaissance de chacun des employeurs par lettre recommandée avec accusé de réception ; il en est de même de toute modification d'un contrat de travail portant sur la durée du travail ou sa répartition ou sur tout élément de nature à entraver l'exécution d'un autre contrat de travail ; le salarié à temps partagé doit obtenir l'accord de ses autres employeurs préalablement à la conclusion d'un nouveau contrat de travail avec un employeur concurrent d'un précédent ;

« - l'engagement de l'employeur de ne prendre aucune mesure qui serait de nature à entraver l'exécution par le salarié de ses obligations à l'égard de ses autres employeurs ;

« - l'engagement du salarié de respecter, pendant la durée du contrat comme après sa rupture, une obligation de discrétion sur toutes informations concernant chaque employeur ;

« - l'engagement du salarié à temps partagé de respecter les limites fixées par l'article L. 212-7. »

« Art. L. 212-4-11-2. - L'abattement de cotisations patronales prévu à l'article L. 322-12 est applicable, sous réserve des autres conditions définies par cet article, à chaque employeur d'un salarié à temps partagé dont les contrats de travail répondent aux conditions définies par l'article L. 212-4-11-1 sans préjudice des articles L. 212-4-2 et L. 212-4-3 quelle que soit la durée minimale du travail convenue contractuellement. »

Article 2

Les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage, les organismes de sécurité sociale et les institutions de retraite complémentaire sont appelés, en tant que de besoin, à adapter ou à modifier les dispositifs en vigueur afin de faciliter l'exercice des emplois à temps partagé.

Article 3

Après le 24e alinéa de l'article L. 133-5 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« g) Pour les salariés à temps partagé, l'adaptation, en tant que de besoin, des dispositions de la convention collective à cette catégorie de salariés. »

Article 4

I. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 411-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1° bis) les différents lieux de travail fréquentés par un salarié répondant aux conditions de l'article L. 212-4-11-1 du code du travail. »

II. - Après le troisième alinéa de l'article L. 751-60 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « 1° bis) les différents lieux de travail fréquentés par un salarié répondant aux conditions de l'article L. 212-4-11-1 du code du travail. »

Chapitre II

Le Comité National du Temps Partagé

Article 5

Un décret en Conseil d'Etat crée un Comité National du Temps Partagé chargé de répartir les fonds publics alloués au multisalariat.

Article 6

Le Comité National du Temps Partagé dépend du Ministère de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion Sociale.

Article 7

Le Comité National du Temps Partagé est en charge de la réflexion et du développement du multisalariat en temps partagé.

Article 8

Le Comité National du Temps Partagé peut recevoir des dotations publiques et privées sous forme de mécénat, afin de permettre son financement et celui des actions qu'il doit mener.

Article 9

Un décret en Conseil d'Etat définit les critères auxquels doivent répondre les associations s'occupant de multisalariat et pouvant bénéficier des fonds alloués par le Comité National du Temps Partagé.

Article 10

Le Comité National du Temps Partagé apporte son soutien financier et sa caution aux associations s'occupant de multisalariat et répondant aux critères définis par décret en Conseil d'Etat.

Les associations en temps partagé reçoivent caution et soutien financier de l'Etat par le biais du Comité National du Temps Partagé et conformément aux dispositions prévues par l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

Article 11

Lorsqu'une association de temps partagé se constitue, l'inspection du travail et le comité pour le temps partagé en sont informés. La liste des membres du groupement est tenue en permanence à disposition de l'inspecteur du travail et du Comité National du Temps Partagé.

Article 12

Une personne physique possédant plusieurs entreprises juridiquement distinctes ou une personne morale possédant plusieurs établissements distincts, enregistrés soit au registre du commerce, soit au registre des métiers, soit au registre de l'agriculture, peut, au titre de chacune de ces entreprises ou établissements, appartenir à un groupement différent.

Il n'existe aucune restriction concernant le nombre d'associations de temps partagé à laquelle une personne physique peut adhérer. Le nombre de membres d'une association de temps partagé est illimité.

Article 13

Le Comité National du Temps Partagé se compose du Ministre de l'Emploi et de la Cohésion Sociale, d'un représentant de l'Etat désigné par le Premier Ministre, d'un représentant des associations de temps partagé élu en leur sein, d'un représentant des groupements d'employeurs et d'un représentant des syndicats d'employés.

Article 14

Le Comité National du Temps Partagé peut prendre à sa charge la formation des membres des associations qui le souhaitent.

Article 15

Les employeurs qui adhèrent à une association de temps partagé sont tenus d'informer les institutions représentatives du personnel existant dans leur entreprise de la constitution et de la nature de l'association.

Article 16

Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées par l'augmentation à due concurrence des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE

11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118785-2
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 1850 - Proposition de loi sur la promotion de l'emploi au travers du temps partagé et du multisalariat (M. Philippe Cochet)


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