N° 2096 - Proposition de résolution de M. Léonce Deprez sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux services dans le marché intérieur (COM[2004]2 final, E 2520)




 

N° 2096

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 février 2005.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la proposition de directive du Parlement européen
et du Conseil relative aux
services dans le marché intérieur
(COM[2004]2 final, E 2520),

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Léonce DEPREZ, Jean CHARROPPIN, Roland CHASSAIN, Mme Arlette FRANCO, MM. Jean-Marc LEFRANC, Dominique LE MÈNER, Pierre MICAUX et Jean-Marc NUDANT

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La proposition de directive sur les services s'inscrit dans un processus politique lancé en 2000 par le Conseil européen de Lisbonne.

A cette occasion, la Commission et les Etats membres se sont engagés à mettre en œuvre une stratégie visant à supprimer les obstacles à la libre circulation des services.

En décembre 2000, la Commission a défini « Une stratégie pour le Marché intérieur des services » ayant pour objectif de permettre aux services d'être fournis à travers l'Union européenne aussi facilement qu'à l'intérieur d'un même Etat membre.

Dans cette perspective, la Commission européenne a présenté le 13 janvier 2004 une proposition de directive dite « Bolkestein » relative aux services dans le marché intérieur.

Ce texte a fait l'objet de controverses. Si le principe d'une meilleure intégration des services dans l'Union européenne n'est pas contesté, la méthode retenue a provoqué de nombreuses critiques.

La commission ne s'est pas souciée des conséquences pratiques d'une concurrence entre législations qui conduirait à un nivellement par le bas des normes de protection des salariés et des consommateurs.

Elle a ainsi rompu avec la conception européenne de cohésion et de convergence, par l'effort indispensable de rapprochement des législations.

En intégrant dans le champ d'application du texte une partie des services d'intérêt général, et en mettant en avant le principe du pays d'origine, la Commission européenne semble renoncer à progresser dans la voie de l'harmonisation progressive du droit et de la préparation d'un cadre juridique spécifique pour les services publics.

En conseil des ministres, le 2 février 2005, le Président de la République, Jacques Chirac, a rappelé la nécessité d'une très grande vigilance sur cette directive et s'est prononcé pour une remise à plat.

C'est dans ce contexte que la Délégation pour l'Union européenne de notre Assemblée a adopté à l'unanimité le mercredi 4 février dernier une proposition de résolution soutenant la position exprimée par le Président de la République sur la Directive et rappelée par le Premier Ministre, Jean-Pierre Raffarin, à l'occasion de la séance des questions d'actualité du 2 février.

A l'initiative du Président Pierre Lequiller, il a été ajouté un alinéa à la proposition de résolution marquant fermement la volonté de la délégation de s'opposer à l'adoption de cette directive.

La proposition de résolution qui vous est présentée reprend le dispositif proposé par notre Délégation pour l'Union européenne.

Elle montre ainsi la volonté de ses auteurs de marquer fermement leur opposition à l'adoption de la proposition de directive relative aux services dans le marché intérieur et de soutenir le Président de la République et le Gouvernement dans leurs démarches.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

L'Assemblée nationale,

- vu l'article 88-4 de la Constitution,

- vu les articles 47, 55, 71 et 80 du traité instituant la Communauté européenne,

- vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux services dans le marché intérieur (COM[2004] 2 final, document E 2520),

1. Approuve l'initiative du Conseil européen et de la Commission de créer un marché intérieur des services dans le but d'insuffler une nouvelle dynamique à la croissance économique, à la création d'emplois et à la cohésion sociale en Europe, conformément aux objectifs décidés à Lisbonne en mars 2000.

2. Demande résolument l'abandon du principe du pays d'origine qui, en l'absence d'un niveau d'harmonisation suffisant des secteurs concernés, et compte tenu des disparités de l'Europe élargie, présente un risque de dumping social et juridique qui favoriserait la concurrence déloyale et la baisse de qualité de l'offre de service.

3. Estime que la Commission doit s'engager dans un processus d'harmonisation par le haut du droit applicable aux services, en prenant mieux en compte les particularités de chaque secteur, et en procédant au préalable à une étude d'impact approfondie.

4. Considère que les services d'intérêt général doivent être clairement exclus du champ d'application de la proposition et souhaite que l'Union européenne prenne rapidement l'initiative de préparer une loi européenne sur les services publics, comme l'y invite l'article III-122 du traité constitutionnel européen.

5. Recommande que, pour des raisons d'intérêt général, aucune directive horizontale visant à mettre en œuvre le marché intérieur ne s'applique aux professions juridiques réglementées, aux services culturels et audiovisuels, aux services de santé, d'aide sociale et médico-sociale et aux jeux d'argent.

6. Demande le maintien de la déclaration préalable au détachement des salariés, afin de conserver le contrôle, par l'Etat d'accueil, des conditions de détachement et de réalisation de l'activité.

7. Se félicite des mesures de simplification administrative et d'allégement des formalités préconisées par la Commission qui sont, pour beaucoup, déjà mises en œuvre en France.

8. Suggère que la limitation du nombre de régimes d'autorisation s'accompagne d'un contrôle renforcé de la qualification professionnelle des prestataires et de la qualité des services offerts, dans l'intérêt des consommateurs.

9. Souhaite que toute directive visant à mettre en œuvre le marché intérieur ne remette pas en cause la primauté des instruments actuels ou en cours d'élaboration concernant le droit international privé communautaire, afin que le régime des obligations non contractuelles applicable aux biens soit le même que celui applicable aux services.

10. Considère que l'adoption d'une directive assurant la libre-circulation des services dans l'Union européenne ne doit pas empêcher l'application du droit pénal de chaque Etat membre.

11. Insiste sur la nécessité de mieux définir l'articulation entre la directive relative aux services dans le marché intérieur et d'autres directives horizontales, et en particulier la directive concernant la reconnaissance des qualifications professionnelles.

12. Souhaite voir clairement inscrire, à l'article 3, la primauté des instruments communautaires sectoriels sur les dispositions de la directive relative aux services.

13. En conséquence, considère que ce projet de directive est inacceptable et demande résolument son retrait pour une remise à plat.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118988-X
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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