N° 53 - Rapport de M. Christian Estrosi sur le projet de loi , après déclaration d'urgence, d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (36)




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le 15 juillet 2002

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N°53

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 juillet 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (N° 36) d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure,

PAR M. CHRISTIAN ESTROSI,

Député.

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Police.

INTRODUCTION 5

I. - L'ÉCHEC DE LA XIe LÉGISLATURE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ 6

1. Des réformes inachevées 6

a) La police de proximité 6

b) Le partenariat 9

c) Les autres réformes 10

2. Une très forte progression de la délinquance 11

a) Evolution générale 12

b) La criminalité par catégories d'infractions 13

c) L'impunité et la délinquance des mineurs 17

II. - LES MESURES D'URGENCE DU NOUVEAU GOUVERNEMENT 19

1. Des réformes structurelles 19

a) Le Conseil de sécurité intérieure 19

b) Le ministère de la sécurité intérieure 20

2. Des initiatives innovantes 21

a) Les groupes d'intervention régionaux 21

b) Les autres réformes 22

III. - DES ORIENTATIONS NOUVELLES, UN EFFORT BUDGÉTAIRE CONSIDÉRABLE 24

1. Les orientations de la politique de sécurité intérieure 24

2. La programmation budgétaire 25

3. Des dispositions connexes 26

AUDITION de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales 27

DISCUSSION GÉNÉRALE 39

EXAMEN DES ARTICLES 49

Article premier et annexe I : Orientations de la politique de sécurité intérieure 49

Article 2 et annexe II : Programmation des moyens 2003-2007 59

Article 3 (Art. L. 34-3-1 et L. 34-7-1 du code du domaine de l'Etat, art. L. 1311-2, L. 1311-4-1 et L. 1615-17 du code général des collectivités territoriales) : Assouplissement des règles de la gestion immobilière de la police et de la gendarmerie nationales 65

Article 4 (Loi n° 72-662 du 13 juillet 1972, art. L. 10 et L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Prolongation d'activité de certains personnels de la gendarmerie 72

Article additionnel après l'article 4 (art. L. 135-L du livre des procédures fiscales) : Transmission à la police et à la gendarmerie nationales de certaines informations détenues par les agents du Trésor public, des douanes et des impôts 73

Article 5 : Évaluation annuelle 73

Article 6 : Application à l'outre-mer 74

TABLEAU COMPARATIF 79

ANNEXE I : Rapport sur les orientations de la politique de sécurité intérieure 93

ANNEXE II : Rapport sur la programmation financière de la police nationale et de la gendarmerie nationale pour les années 2003 à 2007 107

TEXTES CITÉS EN RÉFÉRENCE DANS L'ANNEXE I DU PROJET DE LOI 113

MESDAMES, MESSIEURS,

Consacrée comme un droit naturel et imprescriptible par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, pierre angulaire du contrat républicain, la sécurité n'est pourtant plus assurée sur l'ensemble de notre territoire. La délinquance progresse de façon inquiétante. Des individus de plus en plus jeunes se rendent coupables d'actes de plus en plus violents. Des « zones de non droit » apparaissent aux marges de nos cités. Toute une économie souterraine se développe dans certains quartiers, alimentée par des réseaux mafieux, des trafics de drogue, d'armes et de marchandises volées, le racket ou la prostitution.

Cette situation n'est plus tolérable. Elle révolte nos concitoyens, notamment les plus modestes qui en sont les premières victimes.

Or, les comportements violents et délictueux, ainsi que la délinquance des mineurs, n'auraient pu se développer avec une telle ampleur sans une forme de démission de la part des pouvoirs publics. Au cours des cinq dernières années, un manque de volonté politique, des réformes contreproductives et une certaine
« naïveté » dans l'approche des phénomènes de délinquance, ont entravé l'action des forces de police et de gendarmerie.

A l'occasion des dernières consultations électorales, le Président de la République et les députés qui le soutiennent ont proposé aux Français de rompre avec ce fatalisme : leur volonté d'agir avec fermeté, mais sans excès ni outrance, et de faire prévaloir le principe de « l'impunité zéro », pour que tout délit fasse l'objet d'une sanction juste et proportionnée, a été approuvée sans ambiguïté.

Le Gouvernement mis en place à l'issue de l'élection présidentielle a rapidement procédé à un certain nombre de réformes urgentes. Dans le même temps, il a élaboré, dans des délais extrêmement brefs, deux projets de loi d'orientation et de programmation, l'un pour la sécurité intérieure, l'autre pour la justice : le premier est donc aujourd'hui soumis au vote de l'Assemblée nationale ; le second sera prochainement déposé sur le bureau du Sénat.

De fait, sécurité et justice sont deux questions intrinsèquement liées, car l'aboutissement du travail des policiers suppose aussi une politique pénale cohérente, une augmentation des moyens des juridictions, des réformes de procédure et la prise en compte de phénomènes délictuels qui, aujourd'hui, ne trouvent pas de réponse adaptée. Au total, les moyens alloués à ces deux fonctions régaliennes seront majorés de plus de neuf milliards d'euros sur la période 2003-2007.

Dans cet ensemble, l'effort consacré à la police et à la gendarmerie est considérable : 5,6 milliards d'euros et 13 500 créations d'emplois. Le présent projet de loi a pour objet de programmer et de répartir ce montant et ces effectifs. Corrélativement, il procède à une refonte de l'architecture institutionnelle de la sécurité intérieure et à une réforme de la doctrine d'emploi des forces disponibles, centrée sur la complémentarité des services, la recherche de synergies et le renforcement des prérogatives des policiers et des gendarmes.

Certes, ce texte ne contient guère de dispositions « normatives ». Mais ce choix est volontaire : les réformes législatives nécessaires à sa mise en _uvre seront intégrées dans un second projet de loi, que le Gouvernement s'engage à déposer dès l'automne 2002. Il convenait, au préalable, de fixer les orientations et les moyens qui structureront et accompagneront la politique de sécurité au cours des cinq années à venir.

Les priorités ainsi définies sont ambitieuses. La situation l'exigeait.

I. - L'ÉCHEC DE LA XIe LÉGISLATURE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

La précédente majorité a échoué sur le terrain de la sécurité : la volonté politique a trop souvent fait défaut au stade de l'engagement des réformes, les moyens matériels et humains alloués à la police et à la gendarmerie ont été très insuffisants et d'autres priorités que la sécurité ont finalement prévalues. Ainsi notre pays a connu une progression de la délinquance extrêmement forte au cours des dernières années.

1. Des réformes inachevées

a) La police de proximité

Le concept de police de proximité a été formalisé, initialement, par la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité. Le premier rapport annexé, approuvé par son article 2, indique que : « Il importe que la police retrouve toute sa place dans la cité. Renouant avec la tradition républicaine, elle doit redevenir une police de proximité, présente sur la voie publique, plus qu'une police d'ordre. Elle doit se faire reconnaître par son aptitude à se mobiliser au service de tous et à s'adapter de façon immédiate à toutes les situations ». L'article 3 fait de son extension à l'ensemble du territoire une orientation permanente de la politique de sécurité.

De fait, ce concept peut répondre aux besoins et aux évolutions de notre société : il tend à rapprocher les forces de l'ordre du terrain, à renforcer leurs contacts avec la population, à accroître la polyvalence et la responsabilisation des agents... Trop concentrée dans des commissariats centraux, l'implantation des effectifs de police n'a pas suivi, au fil du temps, la carte de l'urbanisation ni celle du développement des banlieues : la police de proximité devait y remédier, endiguer les phénomènes de violences urbaines et résoudre le découplage ville-police qui sévit en France depuis plus de trente ans.

Pourtant, la façon dont cette réforme a été mise en _uvre, conformément aux lignes directrices fixées à l'occasion du colloque de Villepinte en octobre 1997, a considérablement amoindri, au final, l'efficacité de l'action policière.

En premier lieu, l'accompagnement matériel et humain nécessaire à la mise en place de la police de proximité n'a pas été à la hauteur des besoins. Cette difficulté a été accrue, au cours de la période récente, par des charges supplémentaires qui ont mobilisé davantage encore la police et la gendarmerie : pression migratoire en hausse, application du plan « Vigipirate renforcé », mesures de protection liées au passage à l'euro, réduction du temps de travail.

Sur le plan des moyens, malgré les discours officiels sur la progression des crédits du ministère de l'intérieur, la sécurité n'a pas bénéficié d'une attention suffisante. Ainsi, dans son rapport sur L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, la Cour des comptes constatait que : « Entre 1997 et 2000, les dépenses de l'agrégat police ont progressé de près de 10 % (+ 9,5 %) en francs courants. Hors effet des dépenses liées aux emplois jeunes (adjoints de sécurité), la hausse de l'agrégat n'est plus, cependant, que de 4,4 % sur la période, ce qui représente une quasi stagnation en francs constants ». On relève que, dans le même temps, les crédits d'équipement de la gendarmerie ont diminué en valeur réelle.

La Cour des comptes a également régulièrement relevé que si les moyens de fonctionnement étaient fortement majorés en apparence, une proportion croissante de crédits restait inutilisée en fin d'exercice.

L'année dernière, ce n'est que sous la pression des manifestations de policiers et de gendarmes que le Gouvernement s'est finalement résolu à abonder certains crédits à l'évidence sous-évalués dans le budget des ministères de l'intérieur et de la défense. Ce rattrapage n'est intervenu qu'à la fin de la discussion budgétaire, soit au Sénat puis à l'Assemblée nationale en nouvelle lecture de la loi de finances initiale pour 2002 (crédits de rémunération, dans le contexte du passage aux 35 heures, et indemnités diverses), soit dans le collectif pour 2001 (moyens de fonctionnement et équipements matériels et immobiliers). Il aura donc fallu que les policiers descendent dans la rue pour que le Gouvernement s'engage à les équiper de gilets pare-balles !

Enfin, le manque de programmation budgétaire, sur le modèle de celle qui fut conduite en 1995, a pesé sur la mise en _uvre de la réforme. De fait, la Cour des comptes a également critiqué la méthode utilisée par le précédent Gouvernement, qui s'est contenté de prévoir, chaque année, au coup par coup, des enveloppes budgétaires forfaitaires pour la police de proximité, indépendamment des charges supplémentaires induites par son développement, sans explicitation préalable des besoins ni schéma directeur pour traduire ses conséquences immobilières, malgré l'état déjà déplorable et l'exiguïté des commissariats et des gendarmeries.

En ce qui concerne les effectifs, les recrutements ont été, de manière générale, trop comptés, et les objectifs fixés par la loi d'orientation et de programmation du 21 janvier 1995 oubliés. Pourtant, la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale avait confirmé la pertinence de ces objectifs ainsi que leur faisabilité, notamment en ce qui concerne les emplois administratifs : « Le respect de l'engagement pris en 1995 par la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité - la création de 5 000 emplois administratifs et techniques de 1995 à 1999 - peut être tenu sans que cela n'entraîne un surcoût budgétaire. En profitant des départs à la retraite attendus au cours des prochaines années, les différences de coûts salariaux permettent, en effet, de gager la création des 3 200 emplois administratifs manquants par la transformation de seulement 2 200 emplois de policiers actifs. A budget constant, une telle transformation permettrait donc d'affecter un millier de policiers supplémentaires dans les zones prioritaires » (1). Dans les faits, quelques centaines d'emplois administratifs seulement ont été créés.

Sans doute des adjoints de sécurité (ADS) ont-ils été recrutés en grand nombre, mais ils ont trop souvent servis de « substituts budgétaires à moindre coût » pour la mise en _uvre de la réforme de la police de proximité : des ADS ont parfois remplacé des personnels titulaires sans que les effectifs globaux du commissariat concerné n'évoluent. Le même phénomène s'est produit dans certaines brigades avec les gendarmes-adjoints. Or, des emplois-jeunes, peu formés et, par définition, inexpérimentés, ne peuvent pas constituer une alternative sérieuse au recrutement de policiers. De surcroît, certains dysfonctionnements de ce dispositif ont été dénoncés, y compris par les inspections générales de l'administration (IGA) et de la police nationale (IGPN) : niveau de recrutement en baisse, tuteurs démobilisés, intégration difficile dans les quartiers sensibles.

D'autres faiblesses relevées, notamment, par les évaluations successives de l'IGPN, n'ont pas davantage été corrigées au cours de la phase de généralisation de la police de proximité : manque de communication interne et, corrélativement, d'adhésion et de motivation des personnels de base à l'égard des réformes, polyvalence trop limitée, accueil du public inégal, présence nocturne insuffisante, implication incertaine des différents partenaires.

La réforme a également souffert de carences graves en termes de politique des ressources humaines. Dans les quartiers sensibles de notre pays, la rotation trop rapide des personnels contredit certains fondements essentiels de la police de proximité, notamment la connaissance du territoire et de ses habitants : il aurait été souhaitable de prévoir des mesures incitatives plus fortes pour favoriser la durée en poste des agents affectés dans ces zones défavorisées. Ailleurs, le problème est inverse : l'enracinement des effectifs, conjugué avec des instructions exclusivement centrées sur la prévention au détriment de la répression, ont démotivé la police de proximité. Enfin, la mauvaise gestion des arrivées et des départs (affectations, mutations ou retraites) ainsi que des congés a eu des conséquences graves sur le fonctionnement de commissariats - et de brigades - qui souffrent, à certaines périodes de l'année, d'un manque d'effectifs évident.

Au total, la police de proximité n'a pas bénéficié des moyens nécessaires et sa mise en _uvre a pesé, concomitamment, sur ceux de la police judiciaire, des brigades anticriminalité et de la police de nuit. La prévention a pris le pas sur la dimension répressive du métier de policier, qui a été dévalorisée. La politesse a remplacé l'action. Déconsidérées, sans soutien de leur hiérarchie, la police comme la gendarmerie, symboles forts de notre République, ont été considérablement affaiblies.

b) Le partenariat

Le succès de la démarche partenariale entreprise à travers les contrats locaux de sécurité (CLS), corollaires de la police de proximité, a été, quant à lui, plus quantitatif que qualitatif.

Certes, le suivi de ces contrats a été de qualité et l'évaluation constante, le partenariat local s'est approfondi, des initiatives et des expériences innovantes ont foisonné.

Mais les points faibles de la démarche n'ont pas trouvé de réponse satisfaisante : mode d'élaboration des CLS trop institutionnel occultant les corps intermédiaires et les agents de première ligne, mauvaise articulation avec les contrats de ville, insuffisance des diagnostics et des plans d'action, défaut d'association et de participation de la population.

De plus, les engagements pris en contrepartie, notamment en termes de moyens et d'effectifs, n'ont pas été respectés, ce qui a accru la démobilisation des partenaires. Comme l'écrivait notre collègue Jean Leonetti à la fin de l'année dernière : « La complémentarité des actions de la police et de la justice, ainsi que de la sécurité et de la prévention, la mise en jeu de la responsabilité des détenteurs de l'autorité parentale, la nécessité d'accompagner les familles en difficulté : les CLS n'ont guère contribué à relever ces défis. A travers un partenariat déséquilibré, souvent factice, l'Etat s'est défaussé de ses responsabilités sans remplir ses obligations » (2).

Enfin, l'articulation des CLS avec les conseils communaux de prévention de la délinquance (CCPD), mis en place au début des années 1980 conformément aux recommandations de la « commission Bonnemaison (3) », n'a pas fait l'objet d'une réflexion suffisante. A lui seul, le bilan mitigé des CCPD aurait justifié, pourtant, une refonte plus globale du dispositif local ; dans un article publié par Regards sur l'actualité en novembre 2001 (« La politique de lutte contre l'insécurité »), M. Eric Chalumeau écrivait ainsi : « Privilégiant une politique d'animation et de prévention sociale, les CCPD n'ont pas toujours su ou pu définir de stratégie claire ni contrôler et évaluer les programmes mis en _uvre. De plus, les représentants de l'Etat et de l'autorité judiciaire admettent difficilement que le maire puisse coordonner une instance qui soit autre chose qu'un simple lieu de concertation et de programmation financière ».

Au total, la coordination au niveau local, déjà insuffisante, a été encore affaiblie. Seul le maire, élu du suffrage universel, dont les citoyens attendent qu'il règle l'ensemble des problèmes de leur vie quotidienne, aurait pu exercer ce rôle. Mais, pour des raisons plus idéologiques que de fond, le Gouvernement s'est constamment opposé à tout renforcement, aussi minime soit-il, de ses prérogatives en matière de police.

c) Les autres réformes

Les autres réformes ne sont pas appliquées, n'ont pas été menées à leur terme ou ont été reportées.

Une loi sur les polices municipales a été adoptée (n° 99-291 du 15 avril 1999), mais il ne s'agit que d'une législation timorée, votée presque à contre-c_ur pour éviter un renforcement plus substantiel de leurs moyens et de leurs prérogatives. Il est d'ailleurs significatif que tous ses décrets d'application n'aient pas déjà été publiés.

Une loi sur les chiens dangereux a été promulguée (n° 99-5 du 6 janvier 1999), mais ces animaux, parfois utilisés comme des armes, ont continué à proliférer dans les banlieues, sans laisse, sans muselière, y compris dans les lieux publics qui leur sont théoriquement interdits.

Une loi relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage a été élaborée (n° 2000-614 du 5 juillet 2000) mais, en dépit de son entrée en vigueur, les occupations illégales de terrains publics ou privés ne sont pas sanctionnées.

Une loi sur la sécurité du transport de fonds a été adoptée (n° 2000-646 du 10 juillet 2000), mais elle n'a pas empêché les attaques de fourgons blindés, de plus en plus nombreuses et violentes.

Un projet de loi relatif aux activités de sécurité privées a été déposé au Sénat le 17 mai 2000 : il n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour du Parlement !

S'agissant, plus spécifiquement, des réformes de l'organisation de la police et de la gendarmerie, le redéploiement géographique des personnels, pourtant préconisé par MM. Roland Carraz et Jean-Jacques Hyest, parlementaires en mission, dès 1998, afin de remédier à la sous-représentation des forces de sécurité dans les zones les plus peuplées et marquées par la délinquance, a été très insuffisant.

Ainsi, le Gouvernement s'était engagé à redéployer plusieurs milliers de policiers vers les 26 départements les plus sensibles. Selon le rapport précité de la Cour des comptes, tous fonctionnaires de police confondus, les départements concernés n'ont augmenté leurs effectifs réels, en 2000, année supposée centrale pour ce mouvement, que de 132 personnes ! (4)

La mise en _uvre du principe de la fidélisation des forces mobiles, largement surdimensionnées, qui devait s'échelonner sur trois ans à compter de 1999 (décret du 19 novembre), n'a pas conduit à affecter un nombre significatif de compagnies de CRS et d'escadrons de gendarmes mobiles à des missions de sécurisation. Pourtant, le maintien de l'ordre ne représente plus qu'une proportion réduite de leurs missions, et la police de proximité a souffert, dans le même temps, d'un manque évident de personnels.

Les projets de redécoupage des zones de police et de gendarmerie, destinés à organiser de façon plus rationnelle et satisfaisante la sécurité et la paix publiques sur l'intégralité du territoire national, ont provoqué de vives réactions, par manque de concertation, d'explication et de prise en compte des réalités locales. La réforme a été limitée par rapport aux ambitions initiales.

Le renforcement du caractère incitatif des régimes indemnitaires, pour compenser les charges supportées dans les secteurs difficiles, s'est également heurté à de fortes résistances : récemment, la mise en place d'une « nouvelle bonification indiciaire ville » (NBI-Ville) pour certains personnels de la police nationale affectés dans les zones urbaines sensibles a suscité un sentiment d'incompréhension, voire de dévalorisation de la part des catégories de personnels exclues du dispositif : l'opacité des choix et l'absence de critères précis et reconnus pour fonder les décisions ont une part de responsabilité dans cet échec.

Enfin, l'action des forces de sécurité a été entravée par les contraintes procédurales supplémentaires induites par la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence et aux droits des victimes, notamment pour la mise en oeuvre des mesures de garde à vue et pour la rédaction de nouveaux éléments qui doivent figurer dans les procès-verbaux. Certaines dispositions, telles que la création du juge des libertés et de la détention, la juridictionnalisation de l'application des peines et l'instauration de l'appel en matière criminelle, ont entraîné des charges supplémentaires de gardes, transfèrements et escortes judiciaires. L'augmentation des seuils permettant le placement d'une personne en détention provisoire a provoqué une baisse significative des mandats de dépôt, plus importante encore que celle des gardes à vue. Dans un certain nombre de départements, on peut considérer qu'elle a affecté directement le niveau de la délinquance. Il est d'ailleurs significatif que, à la fin de l'année dernière, le Gouvernement ait tenté, dans la précipitation, de corriger les dispositions de cette loi les plus pénalisantes pour la police, notamment en ce qui concerne les critères permettant le placement d'une personne en garde à vue, la notification et l'exercice de certains droits ainsi que les conditions de détention provisoire (5).

Tous ces éléments se sont bien sûr conjugués pour aboutir, au cours des dernières années, à une progression sans précédent de la criminalité dans notre pays.

2. Une très forte progression de la délinquance

L'augmentation de la délinquance est un phénomène que l'on retrouve, de façon tendantielle, dans la plupart des pays industrialisés depuis le début des années 1970. Ses causes sont d'ailleurs assez bien identifiées : urbanisation non maîtrisée, chômage, difficultés d'insertion et d'intégration, consommation de drogues, perte de respect et de considération pour l'autorité...

Toutefois, cette évolution a été particulièrement marquée dans notre pays, où le nombre de faits constatés a dépassé le cap des quatre millions l'année dernière, contre 2,8 millions à peine il y a vingt ans (+ 40 %).

Surtout, alors que la tendance était à l'amélioration depuis 1992, les statistiques ont de nouveau révélé une forte et rapide détérioration à partir de 1997.

a) Evolution générale

Entre 1997 et 2001, le nombre de crimes et délits constatés par les services de police et de gendarmerie a augmenté de 16 %. Au cours de la seule année 2001, 4 061 792 crimes et délits ont été enregistrés, soit 289 943 faits supplémentaires par rapport à l'année précédente (+ 7,69 %). La hausse était déjà de l'ordre de 6 % l'année précédente ; elle est d'environ 5 % sur les quatre premiers mois de l'année en cours... Aucune autre démocratie européenne n'a connu une telle évolution !

Plus de 54 % de ces crimes et délits ont été commis dans quatre régions qui ne représentent, pourtant, que les deux cinquièmes de la population nationale : la Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Rhône-Alpes, le Nord-Pas-de-Calais et, surtout, l'Ile-de-France, où un peu plus d'une infraction sur quatre a été commise.

ÉVOLUTION DE LA CRIMINALITÉ GLOBALE

Année

Nombre de crimes et délits

Variation

(en %)

1992

3 830 996

+ 2,32

1993

3 881 894

+ 1,33

1994

3 919 008

+ 0,96

1995

3 665 320

- 6,47

1996

3 559 617

- 2,88

1997

3 493 442

- 1,86

1998

3 565 525

+ 2,06

1999

3 567 864

+ 0,07

2000

3 771 849

+ 5,72

2001

4 061 792

+ 7,69

La progression a été plus forte en zone de gendarmerie (+ 11,89 %), bien que plus de 73 % des infractions soient encore constatées là où la sécurité publique est de la compétence de la police nationale (6). Cette distorsion, qui reflète une évolution très préoccupante de la délinquance en milieu rural et dans la périphérie des agglomérations, s'est encore amplifiée au cours des premiers mois de l'année 2002.

CRIMINALITÉ GLOBALE SELON LES SERVICES DE CONSTATATION

Services de
constatation

Nombre de crimes et délits constatés

Variation
(en %)

2000

2001

2000/2001

Police nationale

2 798 906

2 973 207

+ 6,23

Gendarmerie nationale

972 943

1 088 585

+ 11,89

Total tous services

3 771 849

4 061 792

+ 7,69

b) La criminalité par catégories d'infractions

Une analyse des actes de délinquance par type d'infraction révèle une augmentation particulièrement marquée des violences contre les personnes, qui progressent sensiblement plus que les atteintes aux biens : coups et blessures, menaces et chantage, violences gratuites voire d'humiliation, exploitation sexuelle des êtres humains, pédophilie... autant de phénomènes qui provoquent des réactions profondes dans la population.

Les jeunes sont de plus en plus impliqués dans la criminalité, tant comme auteurs que comme victimes d'ailleurs.

Derrière la criminalité ordinaire et quotidienne se développe, enfin, toute une économie souterraine, ou parallèle, appuyée par des organisations mafieuses locales et internationales (7).

CRIMINALITÉ PAR TYPE D'INFRACTION

CATÉGORIES D'INFRACTIONS
(par ordre croissant de variation)

2000

2001

VARIATION
(en %)

1. Infractions économiques et financières

352 164

366 208

+ 3,99

2. Autres infractions (dont stupéfiants)

830 475

893 628

+ 7,60

3. Vols (y compris recels)

2 334 696

2 522 346

+ 8,04

4. Crimes et délits contre les personnes

254 514

279 610

+ 9,86

TOTAL

3 771 849

4 061 792

+ 7,69

· Les infractions économiques et financières (9 % du total) ont augmenté, mais de façon modérée (+ 3,99 %).

Ainsi, après une très forte hausse en 2000 (+ 22,74 %), la progression des escroqueries, faux et contrefaçons s'est ralentie (+ 5,37 %). Au sein de cette rubrique, les escroqueries et abus de confiance (notamment, les utilisations frauduleuses de numéros de cartes bancaires lors d'achats téléphoniques ou sur Internet) ont augmenté de 8,08 % et les falsifications et usages de chèques volés de 9,93 % ; à l'inverse, les falsifications et usages de cartes de crédit ont reculé de 11,55 %.

La délinquance économique et financière proprement dite a diminué de 8,92 %, la plupart de ses composantes étant en régression. Les infractions à la législation sur les chèques, qui recouvrent un périmètre sensiblement plus réduit depuis la dépénalisation des chèques sans provision intervenue en décembre 1991, enregistrent, en 2001, une baisse de près de 8 %.

ÉVOLUTION DES INFRACTIONS ÉCONOMIQUES ET FINANCIÈRES

NATURE DE L'INFRACTION

2000

2001

VARIATION
(en %)

-  Escroqueries, faux et contrefaçons

317 044

334 064

+ 5,37

dont : escroqueries, et abus de confiance

142 583

154 107

+ 8,08

falsifications et usages de chèques volés

114 346

125 704

+ 9,93

falsifications et usages de cartes de crédit

48 997

43 340

- 11,55

-  Délinquance économique et financière

18 501

16 851

- 8,92

-  Infractions à la législation sur les chèques (sauf usages de chèques volés)

16 619

15 293

- 7,98

TOTAL

352 164

366 208

+ 3,99

· Les autres infractions, dont les infractions à la législation sur les stupéfiants, qui représentent environ 22 % du total, ont progressé de 7,6 %.

Les infractions à la législation sur les stupéfiants diminuent, globalement, de 11,68 %. Mais le trafic de drogues, qui s'étend à de nouvelles substances, génère, en amont comme en aval, de multiples formes de délinquance et contribue à la montée en puissance, dans certains quartiers, de l'économie souterraine ; il s'agit, également, d'un véritable fléau sanitaire, en particulier dans la jeunesse. Le rapporteur approuve pleinement, dans ce contexte, la position du Gouvernement, qui considère que : « La nocivité de toutes les drogues doit être reconnue et la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants doit être rejetée » (extrait de l'annexe I au projet de loi).

Les délits à la police des étrangers sont en hausse de 3,47 %.

Les destructions et dégradations de biens augmentent, globalement, de 10,91 %.

Les délits divers progressent de 10,54 %. Au sein de cette rubrique on relève, en particulier, l'augmentation des violences et outrages à dépositaires de l'autorité (respectivement + 12,86 % et + 11,28 %), et de la fabrication de faux documents d'identité et autres documents administratifs (+ 4,56 %).

ÉVOLUTION DES AUTRES INFRACTIONS

NATURE DE L'INFRACTION

2000

2001

VARIATION
(en %)

-  Infractions à la législation sur les stupéfiants

103 731

91 618

- 11,68

-  Destructions et dégradations de biens

518 439

574 994

+ 10,91

dont : destructions et dégradations de biens publics

39 557

45 127

+ 14,08

-  Délits à la police des étrangers

45 869

47 462

+ 3,47

dont : conditions générales d'entrée et de séjour

38 802

40 887

+ 5,37

-  Délits divers

162 436

179 554

+ 10,54

dont : faux documents d'identité et administratifs

11 238

11 751

+ 4,56

TOTAL

830 475

893 628

+ 7,60

· Les vols et recels de vols, qui constituent 62 % des infractions et dont les Français se plaignent particulièrement, ont augmenté de plus de 8 % en 2001.

Cette progression s'explique, notamment, par la recrudescence des vols « à la roulotte » ou d'accessoires sur véhicules immatriculés (26,97 % de la hausse globale des vols), des vols avec violences sur la voie publique (12,48 % de la hausse globale) (8) et des cambriolages (11,15 % de la hausse globale). Ces trois types d'infractions sont responsables, à eux seuls, de plus de la moitié de la hausse de cette rubrique. Les autres progressions concernent : les vols à main armée (+ 8,71 %) ; les autres vols avec violence mais sans arme à feu (+ 23,41 %) ; les vols avec ruse (+ 5,6 %) ; les cambriolages (+ 12,21 %) ; les vols liés à l'automobile et aux deux roues à moteur (+ 6,4 %) ; les autres vols simples (+ 6,49 %) ; les recels (+ 2,43 %).

ÉVOLUTION DES VOLS (Y COMPRIS RECELS)

NATURE DE L'INFRACTION

2000

2001

VARIATION
(en %)

-  Vols à main armée

8 613

9 363

+ 8,71

-  Autres vols violents (sans arme à feu)

101 223

124 918

+ 23,41

-  Vols avec entrée par ruse

14 670

15 492

+ 5,60

-  Cambriolages

370 993

416 297

+ 12,21

-  Vols liés à l'automobile et aux deux roues à moteur

1 071 234

1 139 762

+ 6,40

dont : vols d'automobiles

301 539

313 382

+ 3,93

vols à la roulotte et d'accessoires

670 177

720 779

+ 7,55

-  Autres vols simples

735 337

783 096

+ 6,49

-  Recels

32 626

33 418

+ 2,43

TOTAL

2 334 696

2 522 346

+ 8,04

· Les atteintes volontaires contre les personnes (6,88 % du total), qui sont des infractions particulièrement traumatisantes pour les victimes, ont connu la plus forte progression : + 9,86 %.

Cette augmentation résulte essentiellement des coups et blessures volontaires (+ 10 084 faits), ainsi que des menaces et chantages (+ 6 699 faits). Les atteintes aux m_urs sont globalement en hausse de 5,7 % : le proxénétisme est relativement stable si l'on s'en tient au nombre d'infractions constatées, qui ne reflète que partiellement la réalité (+ 0,82 %), mais les viols progressent fortement (+ 13,19 %), ainsi que les harcèlements et autres agressions sexuelles (+ 7,08 %). Les infractions contre la famille et l'enfant sont en progression de 7,37 %.

ÉVOLUTION DES ATTEINTES VOLONTAIRES CONTRE LES PERSONNES

NATURE DE L'INFRACTION

2000

2001

VARIATION
(en %)

-  Homicides

1 051

1 046

- 0,48

-  Tentatives d'homicides

1 115

1 243

+ 11,48

-  Coups et blessures volontaires

106 484

116 568

+ 9,47

-  Autres atteintes volontaires contre les personnes

70 026

79 885

+ 14,08

-  Atteintes aux m_urs

33 538

35 451

+ 5,70

dont : viols

8 458

9 574

+ 13,19

harcèlements sexuels et autres agressions sexuelles

14 263

15 273

+ 7,08

-  Infractions contre la famille et l'enfant

42 300

45 417

+ 7,37

dont : non-versement de pension alimentaire

12 404

13 031

+ 5,05

TOTAL

254 514

279 610

+ 9,86

· La délinquance de voie publique, enfin, a connu une progression de 9,3 % en 2001.

On rappellera que cet agrégat regroupe des infractions très diverses mais qui ont pour caractéristique commune d'incommoder fortement les particuliers dans leur vie quotidienne : cambriolages, vols d'automobiles et de véhicules de transport avec fret, d'accessoires automobiles, de deux roues, vols à la roulotte, à la tire, destructions et dégradations de biens et de véhicules publics et privés, vols avec violence et à main armée.

La part de la délinquance de voie publique dans le total des crimes et délits est désormais de 57,55 %, contre 56,7 % en 2000. L'augmentation a été également plus marquée dans les zones où la sécurité publique est de la compétence de la gendarmerie nationale (+ 16,57 %) que dans celles qui relèvent de la police nationale (+ 7,04 %).

Sans doute les données statistiques précitées doivent-elles être appréciées avec prudence.

En effet, le mode de comptabilisation des crimes et délits n'est pas à l'abri de tout reproche, comme l'ont montré MM. Christophe Caresche et Robert Pandraud dans le rapport qu'ils ont remis au précédent Premier ministre le 23 janvier dernier. D'ores et déjà, le ministre de l'intérieur a décidé de publier ces statistiques selon une périodicité mensuelle, et non plus semestrielle voire annuelle.

De plus, tous les indicateurs ne sont pas « au rouge » ; certaines composantes enregistrent même des évolutions favorables : la délinquance économique et financière (- 8,92 %), comme on l'a vu, les délits des courses et jeux (- 36,04 %) et les ports et détentions d'armes sans autorisation (- 1,21 %). De même, si les vols à main armée continuent de progresser, le nombre de faits constatés en 2001 (9 363) demeure inférieur au niveau de 1993 (11 211) et 1994 (10 243).

Enfin, la hausse de la délinquance est une tendance lourde qui doit aussi être appréciée sur une période de longue durée.

Pourtant, même ceux qui relativisent les évolutions conjoncturelles de la délinquance en se fondant sur une analyse historique de long terme constatent, depuis le milieu des années 1980, la forte recrudescence des violences interpersonnelles et des violences collectives en milieu urbain (9). De plus, les données fournies par le ministère de l'intérieur sont sans doute très en deçà de la réalité et l'accélération constatée depuis quelques années est tout à fait atypique. Enfin, les Français sont révoltés par le fait que les délinquants sont de plus en plus jeunes et, surtout, qu'ils bénéficient d'une certaine impunité.

c) L'impunité et la délinquance des mineurs

Les statistiques du ministère de l'intérieur démontrent que l'impunité n'est pas seulement un sentiment, mais bien une réalité : parmi les 4 061 792 crimes et délits constatés en 2001, 1 012 163 seulement ont été élucidés par la police ou la gendarmerie. Le taux global d'élucidation (tous services de police et de gendarmerie confondus) s'établit donc à 24,92 % seulement, contre 26,8 % en 2000 et 27,6 % en 1999.

De plus, cette moyenne recouvre de fortes disparités selon la nature des infractions. Ainsi, le taux d'élucidation annoncé est proche de 100 % en matière d'infractions à la législation sur les stupéfiants, de vols à l'étalage et de proxénétisme, car pour ce type d'infractions, le fait est souvent élucidé en même temps qu'il est constaté. Il est élevé lorsque participent à l'identification des auteurs les moyens techniques de la police scientifique ou les victimes et leur entourage : le taux d'élucidation, est, ainsi, de 75,43 % pour les homicides, de 69,64 % pour les coups et blessures volontaires et de 71,66 % pour les viols. Mais il est inférieur à 10 % pour les actes « courants » de délinquance dénoncés par des victimes qui n'en connaissent pas les auteurs : vols à la roulotte et d'accessoires (environ 5 %), vols d'automobiles (7 %), cambriolages (8 %), etc.

Cette faiblesse des taux d'élucidation résulte en partie du manque de moyens des forces de sécurité. Ces dernières sont, de surcroît, découragées lorsque l'action ou l'inaction des magistrats annihilent leurs efforts. Les statistiques annuelles publiées en octobre 2001 par le ministère de la justice sur l'activité du parquet (en 2000) sont, à cet égard, éloquentes. 5 039 643 procès-verbaux ont été reçus cette année là, dont 3 141 172 pour des infractions concernant des auteurs inconnus. 4 606 961 affaires ont été traitées. Dans cet ensemble, 3 317 874 affaires (72 %) ont été jugées « non poursuivables », dont 2 997 153 (65,1 %) pour défaut d'élucidation. Le nombre des affaires dites « poursuivables » n'était donc plus que de 1 289 087, soit 28 % seulement du total des procès-verbaux reçus ; 32,1 % d'entre elles (413 876) ont été classées sans suite. Des procédures alternatives aux poursuites n'ont été engagées que pour 19,2 % des affaires poursuivables (247 481), soit 5,4 % du total des procès-verbaux reçus. 627 730 affaires seulement ont donné lieu à des poursuites.

Les chiffres précités sont consternants : le nombre trop élevé de classements sans suite encourage les délinquants à poursuivre leurs actes coupables. L'attention du Gouvernement a été attirée à de nombreuses reprises sur ce problème (10) mais celui-ci avait fait le choix de se priver des moyens de mener sur l'ensemble du territoire une politique pénale cohérente, et n'a pas entendu les avertissements qui lui étaient adressés.

Ainsi, les Français constatent que leurs agresseurs ne sont que rarement inquiétés et que lorsqu'ils le sont, la sanction est rarement proportionnée aux dommages qu'ils ont subis.

Ils observent également que les délinquants sont de plus en plus jeunes. Globalement, en 2001, le nombre de mineurs mis en cause à l'occasion de crimes ou de délits a été de 177 017, soit 21,2 % de l'ensemble, contre 20 % en 2000. La part des mineurs dans le total des mis en cause pour des faits de délinquance de voie publique est encore supérieure et progresse également : 36,13 % en 2001, contre 35,15 % en 2000.

Pourtant, le précédent Gouvernement a constamment évité de débattre du rôle et de la place que doit occuper la sanction dans le dispositif de répression des crimes et délits, le délinquant étant d'abord considéré comme une sorte de victime sociale : son refus de modifier l'ordonnance du 2 février 1945 sur l'enfance délinquante ou de sanctionner pénalement les occupations indues et agressives des halls d'immeubles, par exemple, était, de ce point de vue, très significatif. Il s'est également opposé à toutes les initiatives prises par l'opposition parlementaire pour mettre fin à l'impunité des auteurs de certains délits : on pensera, en particulier, aux multiples amendements déposés dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité quotidienne, ainsi qu'aux propositions de loi présentées, à la fin de l'année dernière, par nos collègues Henri Cuq (11) et Jean Leonetti (12), dont les articles n'ont même pas été examinés en séance publique, et au début de l'année en cours par le rapporteur (13). Sa majorité parlementaire était d'ailleurs tout aussi hésitante et divisée, comme l'a montré le « psychodrame » des rave et des free parties : ce n'est qu'après des mois de tension que celle-ci accepta le principe, pourtant de bon sens, d'un encadrement juridique de ces évènements musicaux, au même titre que les autres manifestations festives, pour défendre la tranquillité des riverains et la propriété privée.

Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que les mois de novembre et décembre 2001 aient été marqués par une série de manifestations de la part des forces de police et de gendarmerie, qui sont de plus en plus souvent les cibles des délinquants et qui ont payé, l'année dernière, un trop lourd tribu à la cause de la défense de leurs concitoyens. De même, il était prévisible que la sécurité s'imposerait comme un enjeu majeur à l'occasion des dernières consultations électorales.

II. - LES MESURES D'URGENCE DU NOUVEAU GOUVERNEMENT

Les Français sont révoltés par cette progression de la délinquance. De fait, comme l'observait récemment le ministre de l'intérieur : « On n'est pas libre lorsque l'on a peur, et c'est le cas aujourd'hui de millions de nos concitoyens, au premier rang desquels sont les plus modestes (...). On ne vit pas normalement si pour rentrer chez soi on doit traverser des attroupements hostiles dans le hall de son immeuble. On n'est pas respecté dans sa dignité d'homme lorsque l'on doit baisser la tête pour rentrer chez soi de peur d'attirer l'attention des bandes du quartier. On n'est pas dans un Etat de droit lorsque celui-ci semble tolérer des zones qui justement n'en font plus partie » (14).

Dès son entrée en fonction, le nouveau Gouvernement a fait de la sécurité son dossier prioritaire. Plusieurs réformes importantes et urgentes ont déjà été mises en _uvre.

1. Des réformes structurelles

a) Le Conseil de sécurité intérieure

Dès lors que la question de la sécurité est reconnue comme un enjeu majeur et comme la première priorité du Gouvernement, il est normal que le chef de l'Etat soit appelé à exercer un rôle central en la matière : c'est dans cette perspective que le décret n° 2002-890 du 15 mai 2002 a modifié, au niveau national, l'organisation du Conseil de sécurité intérieure (CSI), cette réforme étant le prélude à une refonte plus générale de l'architecture institutionnelle du dispositif de lutte contre la délinquance dans notre pays.

Désormais, le CSI est présidé par le Président de la République. Il comprend, outre le Premier ministre et le ministre de la sécurité intérieure, le garde des sceaux, le ministre de la défense, le ministre de l'économie et des finances, le ministre du budget et le ministre chargé de l'outre-mer. Les ministres des affaires sociales, de la solidarité, de la ville, de l'éducation nationale, de la jeunesse, des sports, de l'équipement, des transports et de la santé, notamment, participent à ses travaux s'ils sont intéressés par un point figurant à l'ordre du jour.

Les missions du CSI sont fixées par l'article 2 du décret du 15 mai 2002 de la façon suivante : définir les orientations et les priorités de la politique menée dans le domaine de la sécurité intérieure ; s'assurer de la cohérence des actions engagées, procéder à leur évaluation et veiller à l'adéquation des moyens mis en _uvre ; examiner les projets de loi de programmation intéressant la sécurité intérieure.

Le secrétaire général du CSI est nommé par le Président de la République et placé auprès de lui (15) : il est spécifiquement chargé de préparer les travaux du conseil, en liaison avec les départements ministériels intéressés et le secrétariat général de la défense nationale, et de suivre l'exécution des décisions prises dans ce cadre.

b) Le ministère de la sécurité intérieure

Conformément, toujours, aux engagements pris durant la campagne présidentielle et s'inscrivant également dans le cadre d'une refonte générale de l'architecture institutionnelle du dispositif de lutte contre la délinquance, un grand ministère de la sécurité intérieure, ayant autorité tant sur la police que sur la gendarmerie, a été créé.

Jusqu'à présent, le ministre de l'intérieur ne dirigeait que les seuls effectifs de la police nationale, qui sont aujourd'hui de l'ordre de 145 000. Les 100 000 gendarmes relevaient du ministère de la défense.

L'idée de rapprocher l'action de ces deux forces, dont les missions sont analogues, est une orientation à la fois essentielle et de bon sens. Alors que le concept de sécurité intérieure, avancé au milieu des années 1980 par référence à celui de sécurité extérieure, s'est progressivement imposé dans le discours politique et administratif ainsi que dans le champ des sciences sociales, il était anachronique que la direction opérationnelle de la police et de la gendarmerie demeure marquée par cette séparation traditionnelle entre les deux ministères.

Bien sûr, l'existence d'une gendarmerie ne saurait être remise en cause. Héritière des compagnies de la maréchaussée, structurée en brigades depuis 1720, marquée par la Révolution et par Napoléon qui ont organisé son service selon des principes toujours d'actualité, elle est étroitement liée à l'histoire de notre pays. Son rôle est primordial pour la sécurité du pays et elle participe de façon active au maintien de la paix publique. Force militaire façonnée autour de deux grandes subdivisions, la gendarmerie départementale et la gendarmerie mobile (16), elle doit conserver son rattachement organique au ministère de la défense : cette spécificité lui permet d'être, dans l'ensemble des forces de sécurité intérieure, un élément de continuité avec la défense du pays. Le maintien du statut militaire des gendarmes a d'ailleurs été confirmé, récemment, tant par le ministre de la défense (le 28 juin) que par le ministre de l'intérieur (le 5 juillet). Recevant les responsables territoriaux de la gendarmerie, ce dernier a déclaré : « Je connais votre spécificité, je l'apprécie et j'entends la respecter. Je l'ai déjà dit, votre statut militaire demeure et demeurera. (...) Chacun reste soi-même et nous travaillons tous ensemble. Voilà la signification de la réforme actuelle ». Par ailleurs, la disponibilité et l'implication personnelle des gendarmes au service de la République doit être soulignée.

Il reste que la dualité du commandement des forces de sécurité est devenue incompréhensible pour les Français et, surtout, négative en termes d'efficacité.

C'est donc dans le respect des prérogatives et des spécificités des deux forces que le Gouvernement a engagé une unification de la chaîne de commandement : l'objectif affiché est de faire travailler ensemble des services qui n'en avaient pas suffisamment l'habitude. Comme l'a souligné le ministre de la sécurité intérieure, il s'agit d'« un changement des réalités et des mentalités » (17). Plus largement, il justifiait cette réforme de la façon suivante : « L'ère des divisions entre corps, entre objectifs, entre hiérarchies, est un temps révolu. Nous n'avons plus de temps à y consacrer, car aujourd'hui nous devons être entièrement tournés vers l'action et vers les résultats. Notre seul ennemi, c'est la délinquance. Notre seul objectif, c'est de la faire reculer. Notre arme, ce sera notre cohésion dans l'effort, notre ténacité dans la durée » (18).

En conséquence, l'article 3 du décret n° 2002-889 du 15 mai 2002 prévoit que, pour l'exercice de ses fonctions, le ministre de la sécurité intérieure est responsable de l'emploi des services de la gendarmerie nationale. Toutefois, il définit ses missions, les conditions de leur accomplissement ainsi que les modalités d'organisation qui en résultent « en concertation » avec le ministre de la défense.

Plus largement, il convient de souligner que cette recherche de synergies entre les différents acteurs de la sécurité intérieure ne concerne pas uniquement la police et la gendarmerie : ainsi, l'article 4 du décret du 15 mai 2002 prévoit également que le ministre de la sécurité intérieure peut faire appel aux directions générales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, des impôts et des douanes et droits indirects. Ces orientations nouvelles ont d'ailleurs déjà trouvé leur prolongement en termes d'action à travers la mise en place des groupes d'intervention régionaux.

2. Des initiatives innovantes

a) Les groupes d'intervention régionaux

La création des groupes d'intervention régionaux (GIR), dont l'organisation et les modalités d'intervention ont été définies par une circulaire du 22 mai 2002, fait aussi partie des réformes emblématiques engagées par le Gouvernement pour l'éradication des zones de non-droit.

Mis en place, en principe, au niveau des régions, les GIR sont rattachés, pour dix-huit d'entre eux, aux services régionaux de police judiciaire (SRPJ), et pour huit d'entre eux aux sections de recherche de la gendarmerie nationale (SRGN) : ils sont donc dirigés, selon les cas, soit par un commissaire de police, soit par un officier de la gendarmerie nationale, deux personnalités ayant été récemment désignées au sein des directions centrales de la police judiciaire et de la gendarmerie nationale pour assurer leur coordination. Ils interviennent au niveau départemental à l'initiative conjointe du préfet et du procureur de la république (le cas échéant, notamment en cas de requêtes multiples, sur décision conjointe du préfet de région et du procureur général près la cour d'appel). En matière d'enquêtes judiciaires, les fonctionnaires et les militaires regroupés en leur sein agissent selon les objectifs définis par l'autorité judiciaire. On signalera, toutefois, que des GIR sont institués dans les départements de l'Ile-de-France (hors celui de Paris) et rattachés au SRPJ de Versailles ou ses antennes ou aux SDPJ de la petite couronne.

Les 28 GIR possèdent une structure permanente restreinte (le chef de groupe et son adjoint, des policiers dont un issu des renseignements généraux, des militaires de la gendarmerie, un fonctionnaire des impôts et des douanes) appelée l'unité d'organisation et de commandement (UOC). Celle-ci chapeaute le corps opérationnel, composé d'agents dont l'effectif et l'origine peuvent varier selon les régions : au total, 1 582 agents sont ainsi susceptibles d'être mobilisés, toutes administrations confondues, dont 262 au titre des structures permanentes.

L'action des GIR est prioritairement dédiée à la lutte contre l'économie souterraine et les différentes formes de délinquance organisée qui l'accompagnent (trafics locaux de stupéfiants, d'objets ou de véhicules volés ou recelés, actions violentes concertées, incendies répétés de véhicules, criminalité organisée...), notamment dans les secteurs urbains sensibles. De fait, ils apparaissent comme des structures particulièrement adaptées pour lancer dans les secteurs urbains ou péri-urbains difficiles des opérations en profondeur, associant réellement et dans la durée l'ensemble des disciplines répressives et mobilisant tous les moyens législatifs et réglementaires, aux plans pénal, fiscal, douanier ou administratif.

b) Les autres réformes

Le Premier ministre a, par ailleurs, annoncé, le 13 mai dernier, la création d'une police régionale pour la sécurité des transports en Ile-de-France. Cette mesure, importante pour la vie quotidienne des six millions de personnes qui empruntent quotidiennement les transports en commun dans la région parisienne, est intervenue après des années de tergiversation.

En effet, les agressions, vols et dégradations se comptent par dizaines de milliers chaque année dans le métro parisien et la situation ne cesse de s'aggraver (+ 23 % en 2001, la hausse étant de l'ordre de 20 % sur l'ensemble du réseau des transports d'Ile-de-France).

Or, la dispersion des forces de sécurité a fragilisé la prise en compte de ce phénomène, tant sont nombreux les intervenants en la matière : services de la préfecture de police, du ministère de l'intérieur, gendarmerie, police aux frontières, douanes, services de sécurité de la SNCF (la Surveillance générale), de la RATP (le groupe de protection et de sécurité des réseaux)...

Le précédent Gouvernement n'a cependant jamais voulu s'engager au-delà de la mise en place, décidée en 1998, d'une « coordination opérationnelle », destinée à assurer l'information de la préfecture de police sur le seul réseau ferré de la RATP (métro et RER). Le 11 février dernier, le ministre de l'intérieur a étendu cette coordination aux services de sécurité de la SNCF, mais cette mesure ne concernait toujours pas la brigade des chemins de fer (qui dépend de la police aux frontières) et n'allait pas au-delà d'une simple coordination (19).

Le nouveau Gouvernement a donc décidé de placer sous commandement unique du préfet de police de Paris l'ensemble des services qui concourent à la sécurité du métro, du RER et des trains de banlieue en Ile de France. Cette mesure concerne les agents qui couvrent le réseau de la RATP et ceux qui sont en charge de celui de la SNCF, y compris les membres de la brigade des chemins de fer. Les services de police « de surface », qui ont aussi compétence dans les gares et les stations de métro, continueront de dépendre, bien sûr, de la direction de la police urbaine à Paris et des directions départementales de la sécurité publique dans les communes limitrophes. Des effectifs supplémentaires ont été corrélativement annoncés par le Gouvernement, notamment pour la couverture du réseau de la RATP.

Le Gouvernement s'est aussi préoccupé de l'équipement des personnels en charge de la sécurité intérieure et, en particulier, des policiers de proximité présents dans les cités sensibles. Ainsi, dès le 16 mai, le ministre de l'intérieur a autorisé l'usage par la police de proximité de flash-balls - ou lanceurs de balles de défense -, qui permettent de neutraliser d'éventuels agresseurs. Ces armes de défense classées en quatrième catégorie, qui projettent des balles de caoutchouc non perforantes, équipent depuis 1995 plusieurs brigades anti-criminalité.

Par ailleurs, le ministre de l'intérieur a multiplié les initiatives, par exemple pour relancer les accords relatifs à la coopération, dans les zones transfrontalières, entre les autorités de police et les autorités douanières : le 10 juin dernier, il a annoncé, à Lille, à l'occasion d'une rencontre avec son homologue belge, l'ouverture d'un centre commun de coopération policière et douanière (CCPD) à Tournai (20). Il s'est attaché, plus largement, a remobiliser et à conforter les personnels de la police et de la gendarmerie, auxquels il s'est adressé à de nombreuses reprises.

Le nouveau Gouvernement est donc passé à l'action très rapidement. Les dernières statistiques de la délinquance révèlent, d'ailleurs, un début d'amélioration (- 0,69 % au mois de mai ; - 7,3 % en juin dans la « zone police » par rapport à la même période de l'année dernière, - 12,3 % pour la seule délinquance de voie publique et - 8,5 % pour la préfecture de police de Paris). Mais les mesures précitées ne faisaient que préfigurer le dépôt du présent projet de loi, présenté en conseil des ministres dès le 29 mai et adopté par celui-ci à l'issue des élections législatives, le 10 juillet dernier.

III. - DES ORIENTATIONS NOUVELLES, UN EFFORT BUDGÉTAIRE CONSIDÉRABLE

Le projet de loi compte six articles, ainsi que deux rapports annexés portant sur les orientations de la politique de sécurité intérieure et la programmation financière police-gendarmerie pour les années 2003-2007. Il définit une nouvelle architecture institutionnelle pour la sécurité intérieure et une doctrine d'emploi des forces disponibles plus efficace, porte les effectifs et les moyens de la police et de la gendarmerie au niveau des besoins en matière de sécurité, et facilite certaines opérations immobilières considérées comme urgentes.

Le procédé consistant à faire approuver par le Parlement des rapports annexés, sans portée normative intrinsèque et dont le contenu est, de surcroît, en partie réglementaire, peut susciter des interrogations.

On observera, cependant, qu'un tel procédé n'est pas nouveau, notamment en matière de programmation militaire et d'organisation de la justice, mais aussi de sécurité, la loi du 21 janvier 1995 ayant également eu recours à une telle solution.

Il permet d'associer le Parlement à la politique gouvernementale, ce qui n'avait pas été le cas sous la précédente législature : ce n'est qu'à la fin de l'année 2001, en effet, dans le cadre de la loi relative à la sécurité quotidienne, qu'ont été consacrés des concepts aussi importants que la coproduction et les contrats locaux de sécurité, qui servaient pourtant de socle à la politique mise en _uvre depuis 1997.

Enfin, il est patent que ces annexes contiennent des dispositions qui intéressent directement le Parlement, comme le confirment d'ailleurs les deux dernières lignes du premier rapport : « Un projet de loi traduisant les orientations mentionnées ci-dessus qui nécessitent des dispositions d'ordre législatif sera déposé dès l'automne 2002 ».

Les orientations ainsi définies constituent donc une charte de l'action gouvernementale, voire une sorte de contrat entre le Gouvernement, d'une part, et le Parlement, c'est-à-dire le peuple à travers ses représentants, d'autre part.

Dans l'immédiat, on soulignera que, pour la première fois, c'est une approche intégrée de la programmation et de la gestion des moyens humains, financiers et immobiliers de la police et de la gendarmerie qui est soumise à l'approbation de la représentation nationale.

1. Les orientations de la politique de sécurité intérieure

L'objet de l'article premier est d'approuver les orientations de la politique de sécurité intérieure telles qu'elles sont définies dans un rapport annexé au projet de loi (annexe I).

· La nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure repose, à l'échelon national, sur le Conseil de sécurité intérieure (CSI) et le ministre chargé de la sécurité intérieure. Le CSI sera prolongé, à l'échelon territorial, par des conférences départementales de sécurité, des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance présidés par les maires ou les présidents d'EPCI, et les groupes d'intervention régionaux. Les synergies, les complémentarités et la pluridisciplinarité sont recherchées à tous les niveaux.

Est également fixée une nouvelle doctrine d'emploi pour les forces de sécurité, notamment en ce qui concerne : l'utilisation des forces mobiles en appui des missions de sécurité quotidienne, les redéploiements entre les zones de compétence de la police et de la gendarmerie et à l'intérieur de celles-ci, la réduction des tâches administratives qui incombent aux personnels actifs, la consolidation de la police de proximité par un renforcement de ses capacités judiciaires et de la présence nocturne des effectifs ainsi que le développement de l'action judiciaire.

Sont décrites, enfin, les adaptations que le Gouvernement entend apporter à l'organisation et à l'administration des services pour optimiser les moyens disponibles, notamment à travers la mise en commun de certains moyens de la police et de la gendarmerie et la décentralisation des outils de gestion, ainsi que les mesures envisagées pour conforter le rôle de la France dans les négociations européennes et internationales relatives à la sécurité.

· La deuxième partie du rapport est consacrée aux moyens juridiques nécessaires pour permettre aux forces de sécurité de lutter plus efficacement contre la délinquance : création d'un nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite, nouveaux pouvoirs d'intervention et de recherche de preuves, accès réciproque aux fichiers de la police et de la gendarmerie, amélioration de la protection des témoins et des victimes, aggravation des sanctions pénales pour non respect des arrêtés municipaux, etc.

De manière générale, le niveau des sanctions sera adapté pour tenir compte de l'évolution de la délinquance et appréhender certains phénomènes tels que la consommation de drogues, le racolage, la mendicité agressive, les regroupements hostiles dans les halls d'immeubles, l'absentéisme scolaire, l'envahissement des propriétés privées par les gens du voyage, le défaut de permis de conduire ou le refus d'obtempérer.

Ces dispositions, qui seront présentées au Parlement à l'automne, s'articuleront avec celles qui sont d'ores et déjà inscrites dans la loi d'orientation et de programmation relative pour la justice.

2. La programmation budgétaire

L'article 2 du projet de loi est destiné à approuver une annexe II consacrée à la programmation des moyens de la police et de la gendarmerie.

Il est prévu, en particulier, d'attribuer aux deux forces concernées une enveloppe de 5,6 milliards d'euros au cours des cinq prochaines années (2,75 milliards pour la police et 2,85 milliards pour la gendarmerie) et de créer 13 500 emplois supplémentaires (7 000 dans la gendarmerie et 6 500 dans la police, en plus de la consolidation des 2 162 « surnombres » existants).

Un effort d'investissement considérable sera dédié, notamment, au parc immobilier, à l'achèvement du système de communications cryptées appelé ACROPOL (21) et à l'interconnexion des réseaux des deux forces, au parc automobile et à l'équipement individuel de protection des personnels.

3. Des dispositions connexes

Par ailleurs, le projet de loi comporte cinq articles de natures diverses mais également très importants pour la police et la gendarmerie.

L'article 3 prévoit une série de dispositions de nature à faciliter la construction de bâtiments destinés aux besoins de la justice, de la gendarmerie et de la police, afin de faire face dans l'urgence à des besoins considérables et légitimes.

L'article 4 permet à certains officiers et sous-officiers de la gendarmerie de bénéficier d'une prolongation d'activité d'un an lorsqu'ils atteignent la limite d'âge de leur grade. Cette mesure est destinée à introduire une certaine souplesse dans la gestion des effectifs afin d'accompagner, de façon progressive, la montée en puissance des recrutements annoncés par le Gouvernement.

La portée de l'article 5, en apparence plus modeste, ne doit pas être sous-estimée : en prévoyant que l'action de la police et de la gendarmerie sera évaluée chaque année et rapportée aux moyens engagés, il tend à introduire une « culture de résultat » qui a trop fait défaut jusqu'à présent, et qui est légitimée par les nouveaux moyens que la nation consacre aux forces de sécurité.

L'article 6, enfin, habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures législatives nécessaires à l'extension des dispositions de l'article 3 du projet de loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

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Avant d'examiner le projet de loi, la Commission a procédé à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Le ministre a salué la présence à ses côtés de M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, soulignant qu'elle témoignait du rôle assigné aux collectivités locales dans la politique de sécurité. Il a présenté le projet de loi, adopté ce jour en Conseil des ministres, comme l'armature de la politique de sécurité intérieure dans notre pays pour les cinq années à venir, soulignant que les deux volets d'orientation et de programmation, matérialisés par deux annexes détaillées, étaient indissociables. Il a ajouté qu'il traduisait le caractère prioritaire que le Gouvernement entendait donner à la lutte contre l'insécurité. A cet égard, il a souligné que l'insécurité était une préoccupation majeure pour les Français et jugé qu'elle ne reposait pas sur un simple fantasme ou un sentiment diffus, la délinquance ayant augmenté de 40 % depuis vingt ans et de 16 % depuis cinq ans. Il a précisé que 4 millions de crimes et de délits avaient été enregistrés en 2001, tandis que, durant les cinq dernières années, les atteintes aux personnes avaient progressé de 30 % et les dégradations et destructions de biens privés de 19 %.

Il a rappelé que l'objectif du Gouvernement n'était pas de contrôler l'augmentation de la délinquance, mais d'en interrompre la progression avant d'en amorcer le recul, pour éviter que l'exaspération de nos concitoyens ne devienne telle qu'aucun républicain sincère ne puisse ensuite y faire face. Considérant que la République, avec ses valeurs et ses moyens, se devait d'apporter à ce problème une réponse complète, efficace et rapide, il a jugé que le projet de loi permettrait de le faire en dépassant l'éternelle oscillation entre la condamnation aveugle de la délinquance et la recherche stérile et sans fin d'explications sociologiques à son développement.

Il a ajouté que le caractère multiforme du phénomène interdisait de se contenter, comme par le passé, d'une simple augmentation des effectifs et des moyens des forces de sécurité, qui, pour être nécessaire et inscrite d'ailleurs dans le projet de programmation, ne saurait constituer une fin en soi, mais a souligné que le combat devait être mené sur tous les fronts. A cet égard, il a indiqué que les six articles et les deux annexes du projet de loi formaient un texte ambitieux, clair et ramassé, susceptible d'ouvrir un débat lisible qui placera chacun devant ses responsabilités.

Puis, le ministre a fait remarquer que les dispositions proposées permettraient, en premier lieu, de construire une nouvelle architecture du dispositif de lutte contre la délinquance, fondée sur une ligne hiérarchique claire, avec, à sa tête, le Conseil de sécurité intérieure, présidé par le chef de l'Etat, qui devrait se réunir tous les mois pour définir les objectifs, donner l'impulsion, favoriser la coordination et mettre en place l'évaluation. Il a ajouté que le ministre de l'intérieur serait chargé de mettre en _uvre la politique ainsi définie, réunissant sous son autorité la police et la gendarmerie, afin d'assurer un emploi optimal des forces et de faire naître un véritable esprit d'équipe, sans que les traditions et les qualités spécifiques de chaque service ne soient pour autant reniées. Soulignant que la délinquance ignorait les barrières administratives, il a jugé qu'il convenait de mettre fin aux intérêts corporatistes pour organiser de nouveaux moyens : le renforcement, au niveau national, des offices centraux de police judiciaire, qui interviennent notamment contre le trafic des êtres humains, des stupéfiants ou des armes ; la création, sur le modèle de ce qui existe à l'étranger, d'un office chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite - au nombre de 4 000 aujourd'hui - qui font l'objet d'un mandat d'arrêt ; la transformation de la cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante en office central, pour lutter contre de véritables bandes organisées qui agissent maintenant sur tout le territoire.

Il a observé que cette organisation centrale trouverait sa déclinaison locale, au plus près du terrain, dans les conférences départementales de sécurité, réunissant responsables de la police, de la gendarmerie, des douanes et des services fiscaux, sous la présidence conjointe du préfet et du procureur de la République, qui seraient chargées d'appliquer, dans chaque département, les objectifs fixés par le Conseil de sécurité intérieure et le ministère de l'intérieur. Il a précisé que ce dispositif serait complété par la création des groupes d'intervention régionaux (GIR), qui devraient permettre de répondre aux problèmes particuliers posés par les réseaux de délinquants et l'économie souterraine.

Il a complété cette présentation de la nouvelle architecture de la politique de sécurité intérieure en précisant que le Gouvernement, marquant, à cet égard, un très profond changement, confierait aux maires deux nouveaux pouvoirs : d'une part, d'information sur l'état de délinquance et, d'autre part, de coordination de la prévention. Il a ainsi précisé que les maires seraient informés, obligatoirement, par le commissaire ou le commandant de brigade, des statistiques de la délinquance, de la commission d'un crime ou délit grave en temps réel, ainsi que des moyens que l'État met à disposition de la sécurité sur le ressort du territoire de leur commune. Il a ajouté que les maires, qui connaissent mieux que quiconque les spécificités du terrain et les attentes de la population, présideraient, à cet effet, des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. S'agissant des nouveaux pouvoirs ainsi reconnus aux élus, il a jugé souhaitable de faire un sort au fantasme de la « municipalisation » des forces de l'ordre, qui n'appartient pas à la tradition de notre pays et ne correspond pas à son intérêt, les élus ne demandant pas d'ailleurs un droit de commandement opérationnel sur ces forces.

En outre, le ministre a indiqué que l'institution d'une nouvelle architecture de la politique de sécurité devait être accompagnée par un changement des méthodes, trop souvent calées sur des situations anciennes.

À ce titre, il a jugé indispensable de donner à la police de proximité, qui a pris corps dans la loi d'orientation pour la sécurité du 21 janvier 1995, les moyens nécessaires à l'exercice de ses missions, ce qui implique que les forces mobiles, composées des agents des compagnies républicaines de sécurité et des escadrons mobiles de gendarmerie, soient engagées non seulement au service de l'ordre public mais aussi de la sécurité publique, que leur capacité de disponibilité soit renforcée et que le mouvement de fidélisation soit poursuivi au travers d'une réduction des déplacements et d'une nouvelle organisation des casernements, notamment dans la région parisienne. Il a précisé que ces mesures permettraient de mieux équilibrer le développement de la police de proximité et l'action judiciaire des forces de sécurité, la mise en _uvre de la première ne devant pas se faire au détriment de la seconde.

Il a fait remarquer que cette politique serait renforcée par l'augmentation du nombre des officiers de police judiciaire et par l'extension de leur compétence territoriale au niveau du département, les délinquants ayant manifestement compris le profit qu'ils peuvent tirer de la complexité de l'organisation administrative, judiciaire et policière.

Le ministre a également annoncé la rénovation et la modernisation des services territoriaux, grâce à la création de directions interrégionales, seules susceptibles de donner une vue synthétique de l'économie souterraine, et à une meilleure répartition des zones de compétence de la police et de la gendarmerie nationale, ce qui implique l'abrogation des protocoles confiant à cette dernière certaines zones relevant normalement du ressort de la première. Il a relevé que la rationalisation de l'organisation reposait également sur une meilleure répartition des effectifs, qui devrait tenir compte des besoins et non plus résulter de l'histoire, alors que le maillage territorial de la gendarmerie date, par exemple, de 1850. Il a souligné qu'un échelon nouveau de communautés des brigades serait créé, en vue de mutualiser, sur la base de la réunion de trois brigades, les moyens et le commandement de certaines brigades actuelles, qui ne peuvent isolément, au grand mécontentement des élus et de la population, organiser des permanences de nuit. Il a précisé que les brigades seraient conservées en l'état mais mises en réseau, de telle sorte que des patrouilles de nuit puissent être plus fréquemment organisées. Pour rompre avec la tendance consistant à imposer un schéma idéologique centralisé, il a annoncé l'engagement de concertations départementales sur cette question. Tout en réaffirmant la volonté du Gouvernement d'agir, il a insisté sur la souplesse et la concertation qu'impliquerait cette réforme d'organisation, ajoutant qu'elle ne devait pas constituer un alibi pour masquer une diminution des effectifs, ce qui a fait échouer toutes les réformes précédentes, mais s'accompagner, au contraire, d'une progression des emplois facilitant la modernisation et la réorganisation des services. Il a souligné que cette réforme serait confortée par l'automatisation ou le transfert des gardes statiques à d'autres catégories de personnels, tandis qu'une réflexion serait engagée sur la dévolution à l'administration pénitentiaire des transferts de détenus ou de leur garde en milieu hospitalier.

Le ministre a complété son propos en précisant que serait créée une réserve civile de la police et que la coopération européenne et internationale serait renforcée, les frontières n'apparaissant vraiment efficaces que pour les seules forces de l'ordre.

Puis, il indiqué que la seconde partie de l'annexe consacrée aux orientations annonçait l'apport de nouveaux moyens juridiques aux services de la sécurité intérieure, pour lutter notamment contre : la « cyber-criminalité » ; le vol de portables constitutif, au même titre que le vol de voiture, d'une délinquance de proximité traumatisante ; la délinquance des mineurs ; le proxénétisme et les réseaux modernes d'esclavagisme, phénomène contre lequel il n'existe pas de solution simple qui exonérerait la société de toute responsabilité.

Il a ensuite considéré que la question du stationnement des gens du voyage, qui exaspère souvent les riverains, devrait trouver des réponses, ce qui exige que des discussions avec certains pays d'émigration soient engagées, mais aussi, par exemple, que les voitures acquises frauduleusement puissent être confisquées. Il a cependant tenu à se garder de tout amalgame, soulignant que certains rassemblements, notamment à vocation religieuse, ne soulevaient aucun problème. Il a, par ailleurs, envisagé que de nouvelles incriminations destinées à sanctionner les actes agressifs de mendicité ou le rassemblement de groupes hostiles dans les halls d'immeubles soient créées, ajoutant que toutes les mesures nécessaires au respect de l'autorité des agents publics, des décisions de justice et de l'action des forces de l'ordre devraient être prises.

Enfin, le ministre a souligné que l'ensemble de ces orientations s'appuieraient sur une enveloppe de 5,6 milliards d'euros supplémentaires pour la période 2003-2007 et sur la création de 7 000 emplois dans la gendarmerie et 6 500 dans la police, les deux priorités que constituent le renforcement des capacités d'investigation et la sécurité de proximité bénéficiant, respectivement, de 2 000 créations d'emplois dans la police et 4 800 dans la gendarmerie et de 1 000 postes nouveaux dans la police et 400 dans la gendarmerie. Il a ajouté que deux articles étaient consacrés à la modernisation de la gestion immobilière, la police bénéficiant d'une augmentation de 93 % de ses autorisations de programme par rapport à 2002 et la gendarmerie d'une hausse de 81 %, étant précisé que le logement des gendarmes relève d'une nécessité de service. Il s'est engagé, par ailleurs, à résoudre les problèmes d'interconnexion des réseaux de transmission, aujourd'hui distincts, de la police et de la gendarmerie et à favoriser l'externalisation de l'entretien du parc automobile des services. Enfin, il a promis de rendre publique chaque mois l'évolution de la délinquance, mais aussi le résultat des services de police et de gendarmerie, tandis qu'une réflexion sur le moyen équitable de récompenser celles et ceux qui seront plus productifs, quelle que soit leur place dans la hiérarchie, devrait être engagée. Il a conclu son intervention en soulignant que seule une évaluation rigoureuse des résultats permettrait de déterminer les mérites réels du projet de loi.

M. Christian Estrosi, rapporteur, s'est félicité de ce que le projet de loi présenté par le ministre de l'intérieur ne laisse de côté aucun des problèmes qui portent aujourd'hui atteinte au pacte républicain, puisqu'il donne aux forces de l'ordre des moyens juridiques et financiers sans précédent, tout en prévoyant de les organiser de manière plus adaptée aux évolutions de la délinquance et de leur assigner des objectifs extrêmement précis. Il a jugé qu'il répondait, de ce fait, parfaitement aux difficultés et aux désagréments qu'affronte la société française. Evoquant la mise en place des groupes régionaux d'intervention, dont il a rappelé qu'ils s'inscrivaient dans un mouvement de rénovation des actions visant à démanteler les réseaux d'économie souterraine et à mettre fin à la prééminence de caïds locaux, il a souhaité savoir s'il était possible de porter à la connaissance du Parlement les premiers résultats de leur action. S'agissant, par ailleurs, des difficultés juridiques invoquées dans certains départements ou régions par les services des impôts et des douanes en matière de transmission d'informations aux forces de police et de gendarmerie, il a demandé au ministre s'il pourrait accepter un amendement au projet de loi sur ce point.

Après avoir fait observer que les polices municipales n'étaient évoquées que de manière restreinte à l'article 1er du projet de loi, il a souhaité connaître la position du ministre sur la possibilité de compléter leurs compétences pour répondre aux attentes des administrés, de même qu'il s'est demandé quand seraient pris les derniers décrets d'application de la loi du 15 avril 1999. Il a également demandé si les programmes immobiliers en cours de la gendarmerie pourraient bénéficier des dispositions inscrites dans le projet de loi ou si seuls seraient concernés ceux dont le principe aurait été décidé après la promulgation de la loi. Il a estimé, enfin, que le complément nécessaire à ce projet de loi très ambitieux était la mise en _uvre d'une politique pénale nouvelle allant à l'encontre de celle qui a prévalu jusqu'alors, marquée par des différences très importantes d'un parquet ou d'une juridiction à l'autre et entraînant, par là même, des modalités d'intervention non unifiées de la part des forces de police et de gendarmerie.

Rappelant que les Français avaient fait de la lutte contre l'insécurité une priorité, M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la commission de la Défense nationale et des forces armées, a estimé que le projet de loi montrait qu'ils avaient été compris, comme ils avaient eux-mêmes compris les projets du Gouvernement. Il a relevé que l'état des lieux présenté par le ministre de l'intérieur faisait apparaître certes des forces, mais également des faiblesses dans le dispositif existant et s'est donc réjoui du caractère ambitieux, mais réaliste du projet de loi, qui se caractérise par des moyens, une autorité et une fermeté de nature à atteindre les objectifs recherchés. Il a, par conséquent, assuré le ministre de l'entier soutien des députés de la majorité. Evoquant ensuite le problème de la simplification administrative, il a rappelé qu'aujourd'hui, les brigades de gendarmerie, de même que les commissariats de police d'ailleurs, étaient surchargés de demandes multiples de compte rendus, de rapports ou d'études dont le poids est pénalisant pour leur activité. Il a relevé, à ce propos, l'insuffisance du taux d'encadrement de la gendarmerie, notamment par rapport aux autres armées et a souhaité savoir de quelle manière le projet de loi entendait favoriser l'émergence d'une meilleure capacité de contrôle et d'encadrement dans ce corps.

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des Finances, de l'économie générale et du plan, a tout d'abord salué la force du projet de loi présenté par le ministre de l'intérieur, qui prévoit d'importants moyens matériels et humains, engage des réformes et pose le principe d'une évaluation de la politique menée. Il a souhaité savoir quel serait l'avenir des adjoints de sécurité et des gendarmes adjoints, les annexes du projet ne loi n'y faisant pas allusion. Estimant que l'article 5 du projet de loi relatif à l'évaluation de la politique de sécurité intérieure était trop succinct, il a demandé des précisions sur les objectifs de cette évaluation et sur l'organisme qui sera chargé de la conduire. Il s'est aussi interrogé sur la possibilité de prévoir que les résultats de l'évaluation fassent l'objet d'une présentation au Parlement.

Il a ensuite demandé au ministre s'il serait favorable à un amendement qui permette d'inscrire, dans l'annexe I du projet de loi, l'aggravation des sanctions financières pour stationnement irrégulier des gens du voyage et la confiscation des véhicules volés.

Enfin, il a souhaité savoir quels seraient les effectifs de la réserve civile, dont la constitution est annoncée dans l'annexe I et quelles seraient les circonstances dans lesquelles elle pourrait être mobilisée.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des Finances, a salué la démarche consistant à prévoir que la politique de sécurité intérieure serait évaluée régulièrement. Rappelant que la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des Finances avait, en relation avec la Cour des comptes, procédé, en 1999, à une analyse approfondie de la gestion des effectifs et des moyens de la police nationale, et que le rapport de MM. Roland Carraz et Jean-Jacques Hyest, parlementaires en mission, avait conclu à la nécessité de revoir l'organisation de la police et de la gendarmerie, il a observé que dans les deux cas les résultats avaient été décevants. Soulignant que le rapport de la MEC avait dénoncé les horaires pratiqués par les policiers et appelé de ses v_ux un meilleur contrôle, il a souhaité savoir ce qui était envisagé pour assurer la transparence sur cette question. Il a également demandé s'il serait vraiment possible de recruter le grand nombre de policiers et de gendarmes annoncé et demandé dans quel budget seraient inscrits les crédits destinés aux gendarmes.

M. Pascal Clément, président, a souhaité savoir comment serait organisée la coordination au sein des groupes régionaux d'intervention entre les forces de la police et de la gendarmerie.

M. André Vallini a dénoncé les conditions d'examen des projets de loi inscrits à l'ordre du jour de la commission des Lois durant la session extraordinaire, qui ne permettent pas aux parlementaires de travailler sérieusement. Evoquant les propos du ministre dans son intervention générale, il a d'ailleurs observé que, de son aveu même, de nombreuses questions, telles que le statut des adjoints de sécurité ou les missions imparties aux polices municipales, n'avaient pu - faute de temps - trouver de réponses dans ce projet de loi, ce qui démontre la précipitation excessive du Gouvernement.

En réponse aux propos de M. André Vallini, M. Jean-Jacques Descamps a, au contraire, salué la rapidité du Gouvernement, qui doit combler dans l'urgence cinq ans d'inaction en matière de sécurité. Il a néanmoins engagé le ministre à renforcer davantage la réglementation du stationnement des gens du voyage, jugeant indispensable de restaurer l'autorité de l'Etat. Il a ainsi estimé que les propositions autorisant la confiscation des véhicules manifestement volés étaient justifiées, bien qu'elles risquent de se heurter au nomadisme des gens du voyage.

S'insurgeant à son tour contre les délais impartis à la commission pour procéder à l'examen du projet de loi, délais dont l'extrême rapidité a même été reconnue par le ministre, M. Christophe Caresche a estimé que, quelle que soit l'appartenance politique des uns et des autres, on ne pouvait que reconnaître que de telles conditions nuisaient à la qualité du travail législatif. S'agissant du contenu du projet, il a observé, pour s'en féliciter, que de nombreuses propositions s'inscrivaient dans le sillage de l'action menée par le précédent Gouvernement. Il a également exprimé sa satisfaction en constatant que, contrairement aux souhaits réitérés du rapporteur du projet de loi sous la précédente législature, le Gouvernement n'avait pas donné suite à la proposition d'une municipalisation de la police. Il a néanmoins regretté que le projet s'en tienne à des généralités et ne propose aucune mesure précise.

Après une intervention du président de la commission des Lois demandant à l'orateur de limiter son intervention compte tenu du nombre de parlementaires désirant interroger le ministre et des contraintes horaires liées à la tenue de la séance publique, M. André Vallini a émis une vive protestation sur la façon dont étaient menés les débats au sein de cette commission et dénoncé l'attitude partiale de son président. Il a ensuite invité les députés socialistes, qui l'ont suivi, à quitter la réunion.

M. Daniel Garrigue a souhaité interroger le ministre sur les dispositions relatives à la qualification d'officier de police judiciaire ; il a ainsi évoqué les difficultés des maires et de leurs adjoints pour se faire reconnaître les prérogatives liées à cette qualité, alors même que nombre d'entre eux sont amenés à intervenir sur le terrain. Il a également fait état du déséquilibre existant entre police et gendarmerie, les gendarmes étant beaucoup moins nombreux à obtenir la qualification d'OPJ. Il a ensuite plaidé pour une meilleure collaboration entre les polices municipales et la police nationale, qui passerait notamment par la reconnaissance au chef de la police municipale de la qualité d'officier de police judiciaire.

Considérant qu'après l'inquiétante augmentation de la délinquance observée au cours de ces dernières années les Français ne comprendraient pas que le Gouvernement fasse preuve d'un quelconque attentisme en la matière, M. Thierry Mariani s'est réjoui de la célérité avec laquelle le ministre de l'intérieur a élaboré ce projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Il a ensuite interrogé le ministre sur une éventuelle réforme des indicateurs de mesure de la délinquance. Par ailleurs, il a souhaité savoir si les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance se superposeraient aux conseils communaux de prévention et aux contrats locaux de sécurité ou si l'ensemble de ces structures seraient fusionnées en leur sein.

Après avoir fait part de ses craintes quant à l'adoption par le Gouvernement d'une politique exclusivement « sécuritaire » en matière de lutte contre la délinquance, M. André Gerin a déploré la stigmatisation de certaines catégories de la population et, notamment, celle manifestée à l'encontre des jeunes. Evoquant les dispositions proposées par le Gouvernement tendant à permettre le placement en détention provisoire des mineurs de 13 ans, auxquelles il a précisé qu'il demeurait résolument défavorable, il a considéré que la réponse au problème de la délinquance des mineurs ne saurait passer exclusivement par des mesures répressives, sans volet préventif. Après avoir fait état de son expérience de rapporteur pour avis sur les crédits de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse sous la précédente législature, il a affirmé que la prison renforçait la dangerosité des délinquants et jugé qu'il était donc souhaitable de privilégier le développement de mesures alternatives à l'incarcération. Puis, réagissant aux propos tenus par le ministre sur les « zones de non-droit », il a estimé qu'il serait préférable d'évoquer l'existence de « zones de sans-droits », regroupant des personnes que leur situation de précarité et de pauvreté prive de la possibilité de faire respecter leurs droits les plus élémentaires. Faisant ensuite référence à la volonté affichée par le Gouvernement de lutter contre la délinquance organisée, il a émis le souhait que ces efforts permettent effectivement l'interpellation des commanditaires, et non pas uniquement des seuls exécutants de second ordre. A cet égard, il a déploré avec vigueur la faiblesse des moyens alloués à la police judiciaire, qu'il a qualifiés de dérisoires. Puis il a conclu son intervention en interrogeant le ministre sur les éventuelles mesures de revalorisation salariales qui pourraient être prises en faveur des agents de la police de proximité.

Après avoir évoqué les très nombreuses évaluations de l'activité de la police et, notamment, celle conduite en 1999 par des parlementaires et la Cour des comptes, M. Michel Bouvard a jugé que le temps était désormais venu de mettre en _uvre les réformes nécessaires. A cet égard, il a émis le souhait que les membres de la commission des Finances soient, en application des dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, davantage associés à leur élaboration. Il a fait référence, en particulier, à la réforme du temps de travail des agents et des modalités de calcul des repos compensateurs, qui constituent un facteur de rigidité certain dans la gestion du personnel. Puis, s'agissant de l'augmentation des moyens immobiliers de la police et de la gendarmerie évoquée par le ministre, il a indiqué que les responsables des collectivités locales concernées, s'ils étaient disposés à contribuer à leur financement, souhaiteraient cependant que l'Etat s'acquitte enfin des très nombreux loyers impayés dus au titre de l'hébergement des personnels de la gendarmerie. Par ailleurs, il a précisé que la sectorisation du commandement de la gendarmerie, d'ores et déjà entreprise dans sa circonscription, n'avait pas abouti à des résultats très concluants en termes de délais de réponse aux sollicitations des citoyens. Faisant ensuite référence aux centres commun de coopération policière et douanière, il a souhaité savoir si le ministre entendait renforcer les moyens mis à leur disposition et, notamment, le nombre d'agents des services des douanes, qui sont particulièrement à même de lutter contre la contrefaçon et le trafic de stupéfiants qui se développent considérablement dans les régions frontalières.

Après s'être exprimé en faveur d'un renforcement des pouvoirs détenus par les maires au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, M. Gérard Hamel s'est interrogé sur la composition de ces instances, souhaitant qu'elles comptent des représentants locaux de la gendarmerie et de la police. En effet, il a jugé que l'absence de ces derniers réduirait ces conseils à des « coquilles vides », alors qu'ils sont les seuls organes susceptibles d'être opérationnels, les conférences départementales de sécurité n'ayant qu'un rôle d'évaluation et de transmission de l'information.

Après avoir salué la rapidité avec laquelle ce projet de loi avait été élaboré, M. Gérard Léonard s'est félicité que, à l'instar de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 dont il était le rapporteur, ce texte privilégie une approche globale de l'insécurité, qu'il tienne compte de l'évolution de la délinquance, précise un calendrier de mise en _uvre des mesures proposées et prévoie de rendre effectives certaines dispositions de la loi de 1995 qui ont été privées d'effet faute de texte d'application. Interrogeant ensuite le ministre sur les moyens envisagés pour renforcer la lutte contre la délinquance internationale, il a souhaité que soit engagée une réflexion sur l'avenir d'Europol.

Après s'être félicité de la « révolution copernicienne » opérée par le Gouvernement en matière de sécurité intérieure, M. Bernard Carayon s'est interrogé, d'une part, sur les moyens qui seront consacrés à la lutte contre l'immigration clandestine et le trafic de stupéfiants et, d'autre part, sur les conditions de rémunération des indicateurs.

Mme Brigitte Bareges a interrogé le ministre sur la possibilité d'une participation de l'Etat au financement des investissements engagés par les communes pour tenir compte de l'augmentation des effectifs des polices municipales.

M. François Grosdidier a salué l'action du ministre en matière de lutte contre l'insécurité et souhaité que l'examen, à l'automne prochain, d'un projet de loi sur la sécurité permette de clarifier le statut des policiers municipaux ainsi que la réglementation qui leur est applicable en matière d'usage d'armes. Enfin, soulignant l'importance des problèmes posés par l'accueil des gens du voyage, il a insisté sur l'urgence de demander aux préfets d'engager des discussions en vue d'une révision des schémas départementaux prévus à cet effet.

M. Xavier de Roux a souligné l'importance du rôle joué par le maire en matière de sécurité, notamment dans les villes de taille moyenne, et jugé nécessaire de préciser le contenu des nouveaux conseils locaux de sécurité.

M. Manuel Aeschlimann s'est félicité du rôle de coordination dévolu aux maires au sein de ces instances et a souhaité connaître l'opinion du ministre sur les initiatives susceptibles d'être prises localement en matière de sécurité, telles que la mise en place d'une surveillance électronique des sorties d'écoles ou l'édiction d'arrêtés restreignant la circulation des mineurs après vingt-deux heures.

En réponse aux différents intervenants, le ministre a apporté les précisions suivantes :

-  Un premier bilan de l'action des groupes d'intervention régionaux, qui réunissent effectivement des policiers et des gendarmes, ainsi que des représentants d'autres administrations impliquées dans la lutte contre la délinquance, sera établi avant la fin du mois de juillet. Des problèmes juridiques semblent entraver, en leur sein, la communication d'informations confidentielles détenues par les agents du Trésor public, des douanes et des impôts : il serait donc opportun que des mesures soient prises pour remédier à cette difficulté, le formalisme ne devant pas nuire à l'efficacité des actions entreprises. Sous cette réserve, il demeure que les résultats obtenus par les GIR sont, dans l'ensemble, très positifs, notamment pour lutter contre l'économie souterraine et les trafics organisés ; des populations trop longtemps délaissées réalisent aujourd'hui, grâce à eux, qu'elles ne sont plus oubliées par l'Etat.

-  Le rôle et les prérogatives des élus locaux en matière de sécurité seront renforcés. Les maires présideront les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance ; les sanctions prévues en cas d'infraction à leurs arrêtés seront majorées.

-  Les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance se substitueront aux conseils communaux de prévention de la délinquance et aux comités de pilotage des contrats locaux de sécurité. Ils garantiront l'information des maires sur l'état de la délinquance et leur permettront de coordonner les actions engagées en matière de prévention des crimes et des délits.

-  La question des polices municipales n'est pas évoquée directement par le projet de loi, mais elle est sous-jacente au renforcement programmé des compétences des élus locaux. Leur rôle et leur place pourront également faire l'objet d'un large débat dans le cadre du projet de loi qui sera présenté au Parlement à l'automne : le Gouvernement fera preuve, à cette occasion, d'une très grande ouverture. Le clivage établi entre la police et la gendarmerie nationales, d'une part, et les polices municipales, d'autre part, est archaïque.

-  Les maires sont officiers de police judiciaire. Il n'est pas souhaitable, cependant, qu'ils exercent effectivement le rôle opérationnel attaché à cette qualité.

-  Le nombre des officiers de police judiciaire sera augmenté, leur statut revalorisé et leur compétence territoriale élargie. Les prérogatives des gardiens de la paix seront également revues à la hausse.

-  Le Gouvernement entend bien définir une politique pénale plus cohérente et plus ferme que celle qui prévalait jusqu'à présent. Le garde des Sceaux aura l'occasion de présenter prochainement au Parlement ses orientations en la matière.

-  Répression et prévention ne doivent pas être opposées. Le Gouvernement précédent n'a cessé de parler de prévention sans agir concrètement et en occultant totalement la question de la répression. Le nouveau Gouvernement est convaincu que la répression est la meilleure des préventions.

-  L'encadrement des unités de gendarmerie est effectivement inférieur à celui qui prévaut dans les autres corps d'armée ainsi que dans la police. Il devra être renforcé de façon substantielle.

-  La formation fait aussi partie des domaines sur lesquels un effort important est nécessaire. Une bonne formation conditionne l'efficacité des actions et la sûreté des procédures engagées par la police et la gendarmerie.

-  Les adjoints de sécurité et les gendarmes adjoints sont une force d'appoint indispensable. Leurs emplois seront pérennisés, sous une forme qui reste, toutefois, à définir, ce qui explique que ce dossier ne soit pas abordé de façon plus précise dans le projet de loi. Le Gouvernement pourrait décider soit de reconduire les contrats en cours, soit de les fondre dans un nouveau corps exerçant des missions spécifiques. En toute hypothèse, le nombre de postes existant ne sera pas diminué et les emplois qui seront créés dans les cinq ans à venir s'ajouteront aux effectifs actuels.

-  Les horaires de travail dans la police doivent faire l'objet d'une transparence accrue. Tout ce qui va dans le sens de l'opacité nuit à l'efficacité. Il demeure que la police est soumise à des contraintes spécifiques, notamment en termes de travail de nuit et durant les week-ends : ces sujétions doivent être prises en compte, ce qui n'est pas toujours le cas lorsque des comparaisons sont établies avec d'autres administrations.

-  Des mesures seront prises pour revaloriser le rôle de l'ensemble des policiers. Il serait aussi souhaitable que le mérite soit mieux récompensé, ce qui supposerait de réviser la grille indiciaire qui encadre les rémunérations. Cette problématique concerne la fonction publique dans son ensemble.

-  La constitution de communautés de brigades est nécessaire pour tenir compte des évolutions des territoires et de la délinquance. L'exigence de proximité ne sera pas affectée dès lors qu'une communauté de brigades ne pourra pas couvrir un territoire de plus de 20 000 habitants.

-  Les dispositions prévues par l'article 3 du projet de loi pour faciliter la construction des casernes et des gendarmeries pourront s'appliquer aux « programmes engagés ». La définition précise de cette dernière notion reste cependant à établir.

-  Le dossier de la rétribution des informateurs sera abordé de façon ouverte et pragmatique. La collecte de renseignements est essentielle, en particulier en matière de lutte contre le terrorisme. Une démocratie doit se défendre.

-  L'évaluation prévue par le projet de loi permettra de vérifier que les moyens programmés seront bien inscrits dans les lois de finances des cinq années à venir et les réformes budgétaires annoncées, notamment dans le sens de la déconcentration des crédits, suivies d'effet. Ce travail devra être confié à une instance extérieure aux services concernés : le choix de cet organisme n'a pas encore été fait.

-  Les crédits de la gendarmerie demeureront inscrits au budget du ministère de la défense. Le statut militaire de ce service n'est pas remis en cause. Cependant, le ministère de l'intérieur sera compétent pour la définition des missions et de l'emploi des forces de gendarmerie.

-  Le système actuel de comptabilisation des crimes et des délits sera conservé. L'indice utilisé est fiable et il ne serait pas juste de modifier l'outil statistique sous prétexte que les résultats qu'il révèle ne sont pas satisfaisants. Le Gouvernement a décidé, cependant, de rendre publiques les statistiques de la délinquance selon une périodicité mensuelle, par souci de transparence.

-  Il n'est pas justifié de reprocher au Gouvernement de céder à une « tentation sécuritaire ». La seule tentation à laquelle celui-ci risque de céder, c'est de donner aux Français la sécurité qu'ils sont en droit d'exiger.

-  Le terme de « zone de non droit », qui fait peur à certains, recouvre pourtant une réalité concrète. Celle-ci est plus inquiétante que le mot lui-même.

-  En renforçant la sécurité des Français, le Gouvernement ne stigmatise pas certaines catégories de la population : il améliore, au contraire, la situation des plus faibles, qui sont les premières victimes de l'insécurité.

-  Le problème posé par les occupations illégales de terrains, privés et publics, par des gens du voyage est réel. Cette infraction n'est aujourd'hui appréhendée que sous l'angle du stationnement irrégulier, qui relève de la compétence des tribunaux civils, alors qu'elle devrait faire l'objet de sanctions pénales. Il conviendrait également d'instaurer une procédure permettant de confisquer les véhicules manifestement volés qui sont parfois utilisés par les gens du voyage. Des dispositions seront prévues à cet effet dans le projet de loi que le Gouvernement présentera au Parlement à l'automne.

-  Le dossier de la coopération dans les zones transfrontalières entre les autorités de police et les autorités douanières, laissé en jachère par le Gouvernement précédent, a d'ores et déjà été relancé. Les contacts bilatéraux établis ont été fructueux et permettront de conférer un contenu réel au « droit de suite ».

-  700 policiers supplémentaires viendront renforcer les effectifs dédiés à la protection des frontières, à la maîtrise des flux migratoires et la lutte contre l'immigration clandestine.

-  Le Gouvernement était et demeure résolu à agir vite dans le domaine de la sécurité, ce qui explique que ce projet de loi soit examiné en urgence dans le cadre de la session extraordinaire. Ce choix est justifié par l'exaspération des Français face à la progression de la délinquance. Le fait que 5 millions de Français accordent leur suffrage au Front national est un motif d'inquiétude suffisant pour ne plus perdre de temps. Il est regrettable que les députés socialistes n'en aient pas conscience et qu'ils aient préféré se livrer à une man_uvre médiatique en quittant cette audition avant son terme.

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* *

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

M. Jean-Pierre Blazy s'est de nouveau élevé contre les conditions d'examen du projet de loi, alors même que les questions de sécurité constituent la première préoccupation des Français. Il a regretté qu'aucune audition n'ait pu être organisée sur ce texte important, estimant qu'une telle précipitation était dommageable pour les droits du Parlement. Il a noté que le Gouvernement lui-même reconnaissait le caractère précipité de sa démarche, puisqu'il renvoyait aux mois à venir l'adoption de textes mettant en application les orientations ainsi définies. Après avoir observé que, sur les six articles que comporte le projet de loi, seuls quatre étaient normatifs, il a jugé abusif l'intitulé du projet de loi, ce dernier s'apparentant davantage à un texte portant diverses dispositions relatives aux affaires immobilières et aux problèmes de retraite des gendarmes.

Il a exprimé la crainte que les dispositions proposées ne soient un simple trompe-l'_il, faisant valoir qu'elles reprenaient, dans une large mesure, des réformes engagées par le Gouvernement précédent. Il a cité, à cet égard, la coproduction en matière de sécurité, la police de proximité et le rapprochement entre les services de police et de gendarmerie. Il a estimé que la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure reprenait également des structures existantes, comme le Conseil de sécurité intérieure, ajoutant que le droit d'information des maires s'exerçait déjà à travers les conseils locaux de sécurité. Il a rappelé également que des opérations ciblées pour lutter contre l'économie souterraine avaient été mises en _uvre avant la création des groupes d'intervention régionaux et estimé que la baisse de 7,6 % de la délinquance en juin dans les zones relevant de la compétence de la police nationale résultait de la politique mise en _uvre par le précédent Gouvernement et non des récentes mesures prises par le nouveau ministre de l'intérieur. Il a, en outre, souligné que l'annexe II était une simple traduction chiffrée des propositions élaborées par le précédent ministre de l'intérieur après une large concertation. Il s'est ensuite interrogé sur l'application effective de la programmation proposée, alors même que le Gouvernement s'est engagé à baisser les impôts, citant l'exemple de la dernière loi d'orientation et de programmation sur la sécurité qui n'a pas été appliquée. En conclusion, il a souligné que si tout le monde s'accordait à reconnaître que la sécurité devait être une priorité gouvernementale, elle ne pouvait être dissociée de la politique judiciaire et de la politique de la ville.

M. Pascal Clément, président, a estimé excessif de prétendre que les parlementaires n'avaient pas eu les moyens d'examiner le projet de loi, rappelant qu'il avait, pour la première fois et contre tous les usages antérieurs fait distribuer aux membres de la commission des Lois le texte que le ministre avait bien voulu lui communiquer avant son examen par le Conseil des ministres. Rappelant le précédent de 1981 où l'Assemblée avait siégé tout le mois de juillet ainsi qu'en septembre, il a indiqué qu'il était traditionnel, après une élection présidentielle, de faire adopter des textes traduisant les principaux engagements pris par le candidat élu. Il a fait valoir que le calendrier législatif un peu précipité permettrait d'éviter de siéger tout le mois d'août, ce qui semblerait correspondre au souhait de l'ensemble des parlementaires. Il a enfin souligné que dès la reprise de la session ordinaire en octobre, il veillerait à ce que les conditions d'examen des textes soient moins précipitées.

Après s'être félicité de l'inscription rapide à l'ordre du jour de ce projet de loi qui répond à l'augmentation continue de la délinquance, M. Thierry Mariani a observé que le texte fixait une ligne claire en matière de sécurité intérieure pour les cinq ans à venir, même s'il ne comportait pas de dispositions normatives. Il a souligné l'effort budgétaire sans précédent consenti par le nouveau Gouvernement, qui porte à la fois sur les moyens matériels et humains des forces de sécurité, et s'est réjoui de la volonté affichée par le nouveau ministre de l'intérieur d'attaquer de front les problèmes de sécurité. Il a néanmoins exprimé le regret que le texte ne souligne pas l'importance de la police municipale, qui a beaucoup changé depuis les années 1970. Après avoir approuvé la simplification de l'architecture institutionnelle de la sécurité intérieure, il a insisté sur le fait que les maires ne disposaient actuellement d'aucune information à travers les conseils locaux de sécurité. Il a, enfin, regretté que le projet de loi ne prenne pas suffisamment en compte le phénomène de l'immigration clandestine, rappelant que le taux d'exécution des mesures de reconduite à la frontière était inférieur à 20 %.

M. Xavier de Roux a salué la méthode retenue par le ministre de l'intérieur consistant à présenter immédiatement un projet de loi définissant les grandes orientations de la politique de sécurité intérieure tout en renvoyant à l'automne le dépôt d'un nouveau projet de loi qui permettra de les mettre en _uvre. S'interrogeant sur la portée juridique des annexes du projet de loi, il a souhaité avoir confirmation du fait que des amendements pouvaient y être apportés. Il a, en effet, estimé qu'il serait souhaitable de mieux définir, dans l'annexe I, non seulement le rôle, les moyens et l'emprise territoriale des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, mais également la place des maires dans ces instances et de façon générale dans le dispositif de lutte contre l'insécurité. Il a également souhaité que soient précisées les relations entre les maires, officiers de police judiciaire, et les procureurs et insisté notamment pour que le maire, lorsqu'il informe le procureur de faits qualifiables de crime ou délit qui ont été portés à sa connaissance, en application de l'article 40 du code de procédure pénale, soit tenu au courant par le procureur des suites qu'il entend leur donner.

M. André Gerin a dénoncé la démarche sécuritaire du Gouvernement et réfuté les propos tenus, la veille, par le ministre de l'intérieur, selon lesquels la répression était la première des préventions. Il a exprimé la crainte que la démarche du Gouvernement ne s'explique essentiellement par des considérations électoralistes et ne contribue à valoriser les idées de l'extrême-droite. Reconnaissant que l'angélisme avait trop souvent prévalu dans le passé, il a cependant mis en garde contre les dangers de la répression et déploré que le Gouvernement insiste trop sur la délinquance des mineurs et stigmatise ainsi certaines catégories de la population. Il a souhaité que des efforts soient entrepris pour interpeller les chefs de réseaux et lutter contre la délinquance des « cols blancs ». Par ailleurs, il a réaffirmé que selon lui, les « zones de non droit » étaient plutôt des « zones de sans-droits » regroupant des personnes en situation de précarité extrême. Appelant le Gouvernement à choisir entre l'humanisme ou l'autoritarisme impérial, il a indiqué qu'il était défavorable à l'adoption du projet de loi.

M. Gérard Léonard a jugé que les reproches tenant aux conditions d'examen précipité du projet de loi étaient injustifiés et a salué l'initiative prise par le président de la commission des Lois consistant à communiquer aux commissaires l'avant-projet. Il a par ailleurs estimé que le projet de loi présentait le mérite de mettre fin à la dérive tendant à faire prévaloir une police de proximité sur une police d'investigation. Il a rappelé, à ce propos, que le taux d'élucidation des affaires était particulièrement bas en France et avait chuté depuis les années 1960, passant de deux tiers à un quart. Il a ensuite fait observer que la question de la police municipale était délicate puisqu'il fallait tenir compte de la diversité des situations et notamment de l'existence de l'intercommunalité. Il a indiqué, à titre d'exemple, que si la communauté urbaine du grand Nancy avait conclu un contrat local de sécurité, son président n'avait pourtant aucun pouvoir de police.

M. Guy Geoffroy s'est félicité de la volonté du Gouvernement d'agir rapidement contre l'insécurité et a estimé que le projet de loi d'orientation et de programmation traçait une direction politique claire et courageuse en cette matière. Il s'est également réjoui des propos tenus par M. Jean-Pierre Blazy reconnaissant, contrairement aux déclarations du candidat socialiste au cours de la dernière campagne présidentielle, que la sécurité constituait la première préoccupation des Français. Puis, s'adressant au rapporteur, il lui a demandé d'insister auprès du Gouvernement pour que des dispositions fermes et précises soient prises en matière de lutte contre les violences en milieu scolaire. Après avoir fait état de son expérience de chef d'établissement et avoir décrit avec précision l'aggravation des violences subies par les élèves et par les enseignants, il a considéré qu'il était désormais nécessaire de renforcer, sans états d'âmes, la répression de ces agissements et non plus de se contenter de mener des actions de prévention. Dénonçant avec véhémence les propos lénifiants tenus par le précédent ministre de l'éducation nationale tendant à nier la réalité et la brutalité des violences en milieu scolaire, il a réagi aux propos de son collègue André Gerin en expliquant que la majorité n'avait nullement l'intention de stigmatiser le comportement des jeunes, qui sont parmi les premières victimes de la violence. Il a néanmoins jugé impérieux de réprimer les quelques élèves fauteurs de troubles qui instillent la peur autant parmi leurs camarades que parmi les enseignants.

M. Bruno Le Roux s'est interrogé sur les raisons conduisant le Gouvernement à faire adopter par le Parlement, dans des délais aussi brefs, un projet de loi dont aucune disposition n'est normative. En conséquence, exprimant la crainte que les Français ne soient déçus de l'absence d'effets concrets du projet de loi, il a déploré cette précipitation en n'y voyant qu'une vaste opération de communication. Evoquant ensuite les objectifs poursuivis par le projet, il a indiqué que les membres de l'opposition souscrivaient à nombre d'entre eux puisqu'ils prenaient acte du bien fondé de l'action menée par le précédent Gouvernement, et notamment de la création de la police de proximité dont les moyens devraient être renforcés. Il a cependant observé que le texte proposé, rédigé hâtivement, comportait nombre de poncifs et d'omissions qui devraient conduire les membres du groupe socialiste à proposer des amendements lors de sa discussion en séance publique. Puis, faisant référence à la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité du 21 janvier 1995, il a rappelé qu'en dépit d'objectifs ambitieux elle n'avait pas bénéficié des moyens nécessaires pour être pleinement appliquée. Il a donc invité les parlementaires de la majorité à ne pas se réjouir prématurément des annonces faites par l'actuel gouvernement. Par ailleurs, il a indiqué qu'il apporterait son soutien au ministre de l'intérieur dans son refus de céder à la volonté de certains membres de la majorité de renforcer les prérogatives des élus locaux et des polices municipales en matière de sécurité publique. Après avoir déploré que le projet de loi ne mette prématurément fin à la discussion sur des questions complexes qui mériteraient pourtant d'être largement débattues, comme celle concernant l'usage de certains stupéfiants et son éventuelle dépénalisation, il a conclu son intervention en interrogeant le rapporteur sur l'éventualité du dépôt par le Gouvernement d'un projet de loi relatif aux activités privées de sécurité.

M. Etienne Blanc a considéré, en premier lieu, qu'il était nécessaire, pour revenir sur l'idéologie dépassée de l'excuse quasi systématique des fautes et restaurer la place de la sanction, d'adopter rapidement un projet de loi comportant des orientations fortes, quand bien même les délais d'examen apparaîtraient relativement courts. Il a souligné, en second lieu, qu'il était indispensable de prévoir une politique efficace de suivi des véhicules volés dès lors qu'ils sont souvent utilisés pour commettre d'autres infractions et s'est réjoui, à cet égard, du dépôt d'un amendement par M. Jérôme Rivière.

M. Alain Vidalies s'est déclaré surpris que la dimension européenne des problèmes posés par la lutte contre les réseaux mafieux ne soit pas prise en compte par le projet de loi. Après avoir relevé que le ministre de l'intérieur, lors de son audition par la Commission, avait d'ailleurs semblé douter de l'efficacité des instruments européens, il a estimé que la réorientation de la politique pénale, qui se manifeste à travers l'annonce du rétablissement d'un délit de racolage passif et de la reconduite à la frontière systématique des prostituées étrangères, allait à l'encontre de la création du délit de traite, approuvé dans une proposition de loi votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en première lecture, le 24 janvier 2002, en conformité avec le protocole de Palerme et avec une directive-cadre. Il a souhaité rappeler que la commission d'enquête sur l'esclavage moderne avait largement démontré le statut de victime des prostituées et mis en évidence l'existence de véritables réseaux de trafics d'êtres humains.

Considérant que les carences dont l'État avait fait preuve ces dernières années dans la lutte contre la délinquance de proximité avaient rendu les décisions de certains maires en la matière inopérantes, M. Manuel Aeschlimann s'est félicité des initiatives annoncées par le ministre de l'intérieur et le ministre délégué aux libertés locales tendant à confier aux maires de nouveaux pouvoirs en matière de sécurité. Puis il s'est élevé contre le prétendu amalgame entre jeunesse et délinquance, exploité par certains groupements et associations pour justifier leur opposition au projet de loi.

M. Richard Dell'Agnola a exprimé sa satisfaction devant un projet de loi qui correspond exactement aux engagements pris durant la campagne électorale et devrait répondre aux attentes des Français et des forces de l'ordre. S'agissant plus particulièrement de la réglementation concernant les gens du voyage, il s'est félicité des orientations prises par le Gouvernement ; souhaitant néanmoins qu'un travail plus approfondi puisse être mené sur le sujet, il a préconisé la création d'une commission d'enquête parlementaire, qui aurait pour mission de connaître les filières d'immigration et de mieux appréhender les problématiques spécifiques à ces populations, telles que l'exploitation des jeunes victimes de réseaux de prostitution.

M. Xavier de Roux a jugé cette proposition excellente.

M. Christian Decocq a salué le courage du ministre de l'intérieur, qui a déclaré fonder son action sur l'efficacité et la recherche concrète de résultats. Après avoir observé que le projet de loi présenté illustrait parfaitement cette logique, avec notamment la mise en place d'un dispositif d'évaluation, il s'est déclaré très favorable aux dispositions relatives au droit à l'information des maires en matière de sécurité ; il s'est également félicité que le projet de loi fasse référence à une obligation de résultat pour les forces de l'ordre et s'est interrogé sur la possibilité de préciser par amendement ce concept très novateur.

Soulignant que le projet de loi était en parfaite cohérence avec les engagements pris par le Président de la République pendant la campagne électorale et réitérés dans le discours de politique générale du Premier ministre, M. Jérôme Bignon s'est réjoui que puisse être proposé, avec ce projet de loi, un véritable cadre d'action pour les années à venir ; observant qu'il répondait à une logique tout à fait nouvelle, fondée sur les résultats, il a fait référence à l'annexe du projet de loi précisant que la présence renforcée de forces de police devait avoir pour premier objectif d'accroître le nombre d'interpellations. Estimant que cette précision définissait bien ce que devait être une bonne politique de sécurité, fondée sur le devoir de présenter à la justice tout auteur d'infraction, il a réfuté l'argument d'un retour à une politique sécuritaire. Soulignant l'urgence qu'il y avait à agir en ce domaine, qui justifiait les délais d'examen impartis au Parlement, il a fait état, pour s'en féliciter, des moyens budgétaires exceptionnels dégagés par le Gouvernement. Il a indiqué que les forces de police et de gendarmerie avaient paru sensibles à cet effort dans un contexte particulièrement difficile pour les finances publiques. Rappelant qu'il était élu d'une circonscription rurale, il s'est déclaré très attentif aux dispositions relatives au regroupement de brigades de gendarmerie et à la mise en place d'une politique de collaboration avec la police ; après avoir précisé qu'aucune ville de sa circonscription ne dépassait 5 000 habitants et qu'aucun contrat local de sécurité n'y avait été signé, il a émis le souhait que les zones de gendarmerie ne soient pas oubliées. Exprimant, en effet, sa crainte que la lutte contre la délinquance urbaine ne se traduise par un déplacement de la violence vers les zones rurales, il a suggéré que soit menée une réflexion sur l'organisation des forces de police en milieu rural, notamment dans le cadre d'une intercommunalité renforcée.

Faisant référence au raisonnement selon lequel une meilleure efficacité des forces de l'ordre dans la zone de compétence de la police nationale reporte les problèmes en zone de gendarmerie, M. Jérôme Lambert a considéré, au vu de l'augmentation récente des infractions constatée dans les zones placées sous la responsabilité de la gendarmerie nationale qu'il fallait en conclure à la grande efficacité du précédent Gouvernement dans la lutte contre l'insécurité en milieu urbain. Evoquant ensuite les propos du ministre de l'intérieur lors de son audition par la Commission, selon lesquels un réexamen du maillage territorial de la gendarmerie était nécessaire, sans que soit, pour autant, modifiée l'implantation des lieux de domiciliation des gendarmes, il s'est demandé si le projet de loi ne se traduirait pas cependant par des fermetures de brigades. A cet égard, il a souligné que celles-ci étaient aussi des lieux d'accueil du public, mobilisant à ce titre des effectifs importants de fonctionnaires, placés de fait en situation d'attente et non d'activité. Il a rappelé que le précédent Gouvernement, suivant en cela les propositions contenues dans le rapport établi par MM. Jean-Jacques Hyest et Roland Carraz, avait souhaité pour cette raison réformer l'implantation territoriale de la gendarmerie, mais n'avait pu mener à bien cette réforme, au grand regret de certains membres de l'opposition de l'époque. Il a, par conséquent, demandé au rapporteur si le Gouvernement actuel avait l'intention de reprendre les propositions du rapport Hyest-Carraz.

Reconnaissant ensuite que le projet de loi fixait des orientations et témoignait d'une volonté certaine, il a fait observer néanmoins qu'il s'apparentait à de la « poudre aux yeux », puisque, malgré l'apparente célérité du processus législatif en cours, de très nombreuses lois ultérieures seraient en réalité nécessaires pour adapter le système juridique français à ses préconisations. Puis, revenant sur les compétences dévolues aux polices municipales, il a rappelé, en s'appuyant sur l'exemple des attroupements dans les cages d'escaliers des immeubles d'habitation, qu'en cas d'échec d'une dispersion par la discussion sous l'égide des policiers municipaux, il fallait recourir à l'usage de la force, prérogative essentielle qui appartient aux seuls agents de l'Etat, sauf cas de légitime défense. Il a, par conséquent, mis en exergue les risques de dérapage liés à l'attribution éventuelle de capacités de maintien de l'ordre aux agents de police municipale, soulignant notamment le problème de formation qui ne manquerait pas de se poser dans un domaine qui requiert une technicité et une mise à niveau permanentes. En écho aux propos de M. Alain Vidalies sur cette forme moderne d'esclavage que représente la prostitution de jeunes femmes étrangères, il a jugé que, sur ce point, le projet de loi passait totalement à côté du problème. Il s'est enfin élevé contre la manière dont le texte abordait la question des gens du voyage, estimant qu'il était porteur d'amalgames dangereux. Il a rappelé, à cet égard, que les véhicules automobiles étaient souvent le seul bien que possédait cette catégorie de la population et jugé, en conséquence, hâtif d'établir un lien systématique entre la possession de grosses cylindrées et la commission d'infractions.

M. André Thien Ah Koon a souhaité apporter un éclairage venu de l'outre-mer sur les problèmes soulevés par l'insécurité, en affirmant tout d'abord que, dans ces zones non métropolitaines, le maintien de l'ordre, qu'il soit assuré par les forces de police ou par la gendarmerie, était globalement un échec, à relier au déclin général de l'autorité de l'Etat. Il a estimé que l'une des premières causes de cette situation tenait à l'absence de dispositif juridique apte à traiter le problème de la délinquance des mineurs, la seule solution pour protéger la majorité des jeunes étant bien souvent le recours à des médiateurs socio-culturels placés sous l'autorité du maire. Citant l'exemple de sa commune, il a souligné que, en l'absence de systèmes de rééducation et d'insertion, une minorité infime de délinquants commettant des infractions en tout genre suffisait à perturber la vie de plusieurs dizaines de milliers d'habitants. Il a ajouté que, dans le contexte d'un Etat affaibli, les forces de l'ordre avaient perdu la motivation nécessaire à la conduite de leur mission, observant en outre qu'avec la réduction à 35 heures hebdomadaires de leur temps de travail, leur capacité de réponse n'était pas immédiate. Il a jugé, en conséquence, que, pour répondre à ce fléau dans les zones d'outre-mer, marquées, comme c'est le cas à la Réunion, par un taux de chômage élevé (36 %) et par la proportion importante de la jeunesse dans la population totale (50 %), il était nécessaire d'avoir le courage de mettre en place un dispositif adéquat, notamment dans les lieux où, par exemple, aucune création de commissariat n'était intervenue depuis trente ans. Il s'est dit convaincu que, dans ce contexte, les atermoiements étaient secondaires en regard de ce qui constituait l'objectif essentiel.

Saluant l'action entreprise par le Gouvernement afin de lutter contre la délinquance et la rapidité avec laquelle ce projet de loi a été présenté au Parlement, M. Didier Quentin s'est félicité qu'y soit évoquée la question de l'accueil des gens du voyage. Mettant en garde contre tout angélisme en la matière, il a fait part de l'exaspération des élus locaux et des habitants face aux nuisances accompagnant parfois l'accueil de ces populations et exprimé la crainte que ne se constituent des groupes d'auto-défense en l'absence de réaction des pouvoirs publics. Critiquant certaines dispositions de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, et notamment le montant - qu'il a jugé excessif - de l'aide consentie annuellement par l'Etat pour la gestion des aires de stationnement, il a fait observer que la mise en place de tels emplacements pouvait précisément constituer une incitation à stationner pour les populations concernées. Au-delà des mesures urgentes déjà évoquées, telles que le séquestre de véhicules ou la délivrance d'instructions aux préfets, il a donc souhaité que soit créée une commission d'enquête parlementaire consacrée à l'analyse précise de ce phénomène, dont les travaux pourraient permettre d'éviter tout amalgame entre les différentes catégories de populations concernées - certaines stationnant de façon transitoire et sereine dans les communes - et ouvrir la voie à une réforme de la loi du 5 juillet 2000. Par ailleurs, il a souhaité que le Gouvernement prenne l'engagement solennel de ne fermer aucune brigade de gendarmerie, notamment dans les zones rurales, jugeant que, si elles devaient survenir, ces fermetures ne pourraient que favoriser la délinquance.

Regrettant le caractère très théorique de certaines interventions qu'elle a jugées, en conséquence, peu utiles, Mme Maryse Joissains-Masini s'est interrogée sur la possibilité d'encadrer le temps de parole de chacun des commissaires. Elle a souhaité que cette législature permette, conformément aux engagements pris lors de la campagne électorale, d'apporter, sans idéologie ni culpabilité, des réponses concrètes aux problèmes posés par la délinquance.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

-  Ce projet de loi est effectivement examiné selon une procédure d'urgence, mais ce choix est justifié par la gravité de la situation. Les Français, et notamment les plus modestes qui sont les premières victimes de la délinquance, attendent depuis trop longtemps que soit mise en _uvre une véritable politique de lutte contre l'insécurité : ils ne comprendraient pas que le Gouvernement et le Parlement diffèrent dans le temps les mesures qu'ils attendent.

-  Les interventions fermes et répétées du ministre de la sécurité intérieure, ainsi que l'annonce de moyens matériels et humains considérables pour la police et la gendarmerie, ont déjà contribué à remobiliser les forces de sécurité.

-  Les groupes d'intervention régionaux agissent contre l'économie souterraine et la délinquance organisée. Les difficultés d'ordre juridique qui empêchent en leur sein la transmission de certaines informations aux forces de police et de gendarmerie par les services financiers, auxquelles le rapporteur entend apporter une solution dans le cadre de ce projet de loi, témoignent du caractère novateur de la démarche engagée.

-  Les moyens de fonctionnement et d'équipement de la police et de la gendarmerie nationales seront considérablement revalorisés. Les crédits d'équipement de la police nationale, qui ont progressé de 11 % entre 1997 et 2002, augmenteront de plus de 30 % dans les cinq années à venir ; ceux de la gendarmerie, qui sont restés stables en euros constants et ont donc reculé en valeur réelle, augmenteront de plus de 50 %. A cet égard, la sincérité du budget de la gendarmerie peut même être mise en doute, les moyens nécessaires au paiement de certaines rémunérations et des loyers des gendarmes n'étant plus assurés.

-  Il sera également remédié au sous-équipement observé outre-mer. La réhabilitation ou la construction de 10 000 bâtiments est programmée ; des dispositions juridiques sont prévues pour faciliter la réalisation de ces travaux.

-  L'action judiciaire sera développée à travers une augmentation : du nombre d'officiers de police judiciaire et de leur compétence territoriale ; des moyens de la police technique et scientifique et des sections de recherche ; des capacités d'investigation, au profit desquelles seront recrutés 1 000 policiers et 400 gendarmes supplémentaires.

-  Au total, la dynamique dans laquelle s'inscrit ce projet de loi, ainsi que les mesures qu'il tend à mettre en _uvre, ont déjà eu des effets concrets sur la vie quotidienne des Français. Les dernières statistiques de la délinquance font apparaître, au mois de juin, un recul de plus de 7 % du nombre de crimes et délits commis dans les zones où la sécurité publique relève de la police nationale. Il est exact, toutefois, que la délinquance progresse plus fortement en milieu rural et péri-urbain, c'est-à-dire dans la « zone gendarmerie ».

-  La réorganisation des zones de police et de gendarmerie se traduira par la fermeture de certaines brigades mais, dans le même temps, d'autres brigades seront créées. Il convient concomitamment d'adapter l'organisation administrative aux évolutions de la délinquance et de renforcer les effectifs engagés dans la lutte contre l'insécurité.

-  Le projet du Gouvernement de regrouper des brigades de gendarmerie répond à des spécificités de terrain et à l'évolution de la délinquance. Il s'agit de mettre certaines d'entre elles « en réseau » ; ce projet n'aura pas d'incidence sur l'accueil du public.

-  Des formules de partenariat entre les différents acteurs de la lutte contre la délinquance devront être imaginées, y compris dans les zones couvertes par la gendarmerie, de façon à mobiliser toutes les énergies.

-  La place et les prérogatives des maires dans le dispositif de lutte contre l'insécurité seront renforcées. Il s'agit d'une orientation défendue depuis des années par l'actuelle majorité, qu'il est temps de mettre en _uvre. La force attachée à leurs arrêtés de police sera accrue.

-  Les polices municipales ont été injustement traitées sous la précédente législature : il est significatif que, dans le cadre de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, la majorité d'alors les ait autorisées à pénétrer dans les halls d'immeubles, tout en refusant de leur donner des moyens d'action identiques à ceux de la police et de la gendarmerie nationales pour disperser les rassemblements hostiles qui s'y tiennent parfois. La situation des polices municipales n'est pas satisfaisante : il conviendra de renforcer la complémentarité de leur action avec celle des forces nationales de sécurité.

-  La jeunesse ne fait l'objet d'aucune forme de stigmatisation de la part du Gouvernement. Ce sont au contraire les jeunes qui demandent aux élus d'agir pour pouvoir vivre et étudier en paix, sans être terrorisés par des délinquants et des caïds locaux. Des réponses devront être trouvées en partenariat avec les responsables de l'éducation nationale.

-  Il n'est pas contestable que nombre de prostituées et de mendiants sont des victimes, voire des esclaves. Cette réalité n'implique pas qu'il faille les accueillir sur notre sol lorsqu'ils sont étrangers, de surcroît avec ceux qui les exploitent et contre lesquels rien n'a été fait au cours des dernières années.

-  Le Gouvernement est également résolu à agir contre l'immigration clandestine : cette question est explicitement abordée parmi les orientations définies dans le projet de loi. Des effectifs supplémentaires seront affectés à cette mission.

-  La coopération dans les zones transfrontalières entre les forces de police et les autorités douanières a d'ores et déjà été relancée. Le ministre de l'intérieur a indiqué, à plusieurs reprises, qu'il accordait une grande importance aux accords transfrontaliers et à la coopération bilatérale. Cette pratique rompt avec une certaine forme d'inertie qui s'était manifestée avec évidence, par exemple, sur le dossier, laissé en jachère, du centre de réfugiés de Sangatte.

-  La création d'une commission d'enquête sur les gens du voyage pourrait être une initiative intéressante. Ces personnes doivent pouvoir être contrôlées comme les autres et l'origine de leurs revenus vérifiée. Aucune catégorie de la population n'a le droit de bafouer les règles élémentaires de la propriété privée et de vivre aux dépens du plus grand nombre. La loi du 5 juillet 2000 relative à leur accueil et à leur habitat mériterait d'être réexaminée.

-  Il convient également d'agir avec fermeté contre la pénétration des mafias et les trafics d'armes de guerre qui se développent. Le rapporteur avait demandé, sous la précédente législature, la création de commissions d'enquête sur ces deux questions mais s'était heurté à un refus de la part de la majorité d'alors.

-  Le « tout répressif » n'est pas une expression adaptée pour caractériser la politique mise en _uvre. Il s'agit simplement de ne plus faire preuve d'angélisme et de rééquilibrer la place occupée par la prévention et la répression, au profit de cette dernière.

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EXAMEN DES ARTICLES

Article premier et annexe I

Orientations de la politique de sécurité intérieure

Le présent article tend à approuver les orientations de la politique de sécurité intérieure, définies dans une annexe I, que le Gouvernement a décidé de mettre en _uvre au cours des cinq prochaines années.

Sur la forme, la technique du renvoi à un rapport annexé s'inspire du précédent de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995, dont les principes et les orientations sont considérés comme des acquis. L'annexe I débute, d'ailleurs, par une référence implicite à cette loi, à travers une reprise du texte de son article 1er, qui définissait le concept de sécurité et les missions prioritaires des pouvoirs publics de la façon suivante : « La sécurité est un droit fondamental et l'une des conditions de l'exercice des libertés individuelles et collectives. L'Etat a le devoir d'assurer la sécurité en veillant sur l'ensemble du territoire de la République à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre public, à la protection des personnes et des biens » (22).

Toutefois, une étape nouvelle doit aujourd'hui être franchie, qui implique de reformuler les orientations de l'Etat en matière de sécurité.

Cette démarche est rendue nécessaire, bien sûr, par la progression sans précédent de la délinquance dans notre pays. A cet égard, le Gouvernement rappelle que, derrière les chiffres, il y a des victimes : « La prise en compte par l'Etat de cette dimension humaine de la délinquance, à tous les stades de la procédure, est aussi un devoir ». Il fait donc de l'accueil, de l'information et de l'aide aux victimes une priorité - cette question a d'ailleurs été abordée par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale - et annonce qu'une « charte de qualité » en fixant les modalités sera établie pour la police et la gendarmerie nationales (23). D'autres mesures seront prises dans le cadre de la loi d'orientation pour la justice.

La reformulation des orientations de l'Etat s'impose également du fait des bouleversements induits par le regroupement des forces engagées dans la lutte contre l'insécurité et des synergies recherchées entre les différents acteurs intervenant dans ce domaine. Il est d'ailleurs significatif que l'annexe I fasse référence, dès sa partie introductive, aux moyens nouveaux résultant de la complémentarité opérationnelle créée entre la police et la gendarmerie, et au fait que le ministre de l'intérieur pourra désormais faire appel, comme le rapporteur l'a déjà souligné, à d'autres services de l'Etat, tels que les directions des douanes, des impôts et de la concurrence (décret du 15 mai 2002).

Ces nouvelles orientations s'articulent autour de deux grands objectifs :

-  fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure et en tirer les conséquences sur les missions et l'organisation de la police et de la gendarmerie nationales, ainsi que sur le rôle des autres acteurs publics ou privés ;

-  donner aux services de sécurité un cadre juridique rénové pour lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance, les dispositions correspondant à cet objectif qui ne figurent pas dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice devant faire l'objet dès l'automne prochain d'un second projet de loi.

1. Une organisation plus cohérente du dispositif de lutte contre l'insécurité

La première partie du rapport annexé est consacrée à la réorganisation du dispositif de lutte contre l'insécurité. Les choix du Gouvernement traduisent un certain nombre d'orientations fortes : la mobilisation de tous les acteurs de la sécurité et le renforcement de leurs prérogatives ; l'élargissement des compétences territoriales des services et des hommes ; le décloisonnement des administrations et la recherche de synergies ; la déconcentration de la gestion et une recherche de proximité au stade de la prise de décision et de l'analyse des phénomènes de délinquance.

a) Une architecture repensée : synergies, complémentarités et pluridisciplinarité

· La nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure fait intervenir :

-  au niveau national : le Conseil de sécurité intérieure et le ministre en charge de ces questions ;

-  au niveau départemental : le préfet, qui assure la coordination du dispositif et préside, avec le procureur de la République, des conférences départementales de sécurité ;

-  au niveau local : les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

La création des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, lieux de concertation et d'information sur l'insécurité et les moyens mis en _uvre pour y remédier, est particulièrement importante : elle s'inspire des propositions formulées, depuis plusieurs années, par l'opposition, notamment dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité quotidienne ; notre collègue, M. Jean Leonetti, avec également préconisé la mise en place de ces instances locales dans sa proposition de loi sur le renforcement de la lutte contre l'impunité (rapport n° 3419, 28 novembre 2001).

Les conseils locaux doivent permettre, tout d'abord, de réunifier les volets « prévention » et « sécurité » des politiques locales, séparés artificiellement, comme le rapporteur l'a déjà souligné, du fait de la superposition des instances que sont les conseils communaux de prévention de la délinquance (CCPD) et les comités de pilotage des contrats locaux de sécurité (CLS).

Par ailleurs, la création de ces conseils participe d'une démarche tendant à renforcer la place et les prérogatives des maires ou des élus intercommunaux, qui seront chargés de les présider bien que cette précision ne figure pas dans le rapport annexé : ils seront désormais informés en temps réel de l'état de la délinquance et pourront coordonner les actions entreprises en matière de prévention, ce qui requiert, de fait, une bonne connaissance des réalités locales.

La portée de cette mesure a été clairement explicitée, le 26 juin dernier, par le ministre de l'intérieur, devant les directeurs et responsables de la police nationale : « Il ne s'agit pas de donner des responsabilités de commandement des forces de l'ordre au maire. Ce ne serait conforme ni à nos traditions, ni à l'exigence d'efficacité, ni même à leurs demandes. Il s'agit de faire en sorte qu'ils soient informés par vous des indicateurs de la délinquance et de l'ensemble des moyens mis en _uvre. La transparence est une exigence à laquelle nous ne pouvons nous dérober. Il s'agit aussi qu'ils soient en mesure d'exprimer les attentes de la population en matière de sécurité de proximité, attentes qui sont très différentes d'une ville à l'autre, et parfois, d'un quartier à l'autre. Il s'agit enfin que les élus proposent une politique de prévention qui soit davantage en cohérence avec les caractéristiques de la délinquance locale ».

Dans le même temps, la complémentarité des forces nationales de sécurité et des polices municipales sera encouragée au moyen de conventions de coopération entre le préfet et le maire.

Il conviendrait, toutefois, d'aller plus loin en renforçant également les moyens, les effectifs et les compétences des polices municipales. La précédente majorité a toujours abordé cette question de façon défensive : ainsi, dans le cadre de la loi relative à la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001, elle leur a permis de bénéficier d'une autorisation de pénétrer dans les halls des immeubles d'habitation (article 51), tout en refusant de les doter des mêmes prérogatives que la police et la gendarmerie nationales pour dissiper les occupations indues et hostiles desdits espaces communs (article 52).

La Commission a examiné un amendement du rapporteur ayant pour objet de faire figurer, parmi les orientations de la politique de sécurité intérieure pour la période 2003-2007, le renforcement des moyens d'action des polices municipales. Le rapporteur a précisé que cette initiative répondrait aux attentes exprimées par un grand nombre de députés lors de l'audition, la veille, du ministre de l'intérieur.

M. Alain Marsaud a indiqué qu'il était favorable à l'adoption de cet amendement tout en regrettant que le projet de loi reste ambigu sur le rôle des polices municipales et des maires, dont il a souligné l'importance.

Estimant que le projet de loi n'apportait rien au droit existant en ce qui concerne les polices municipales, M. Jean-Pierre Blazy a interrogé le rapporteur sur la portée de son amendement tandis que M. Christophe Caresche, faisant part de son attachement aux prérogatives de la police nationale, s'y est déclaré défavorable.

M. Gérard Léonard a considéré que l'amendement du rapporteur ne risquait aucunement de déstabiliser la police nationale.

La Commission a ensuite adopté cet amendement (amendement n° 1).

· Sur le plan opérationnel, l'accent est porté sur la pluridisciplinarité.

La mise en place, déjà évoquée dans l'exposé général du présent rapport, des groupes d'intervention régionaux (GIR), est bien sûr emblématique, à l'échelon local, de cette orientation.

Celle-ci se traduira, également, au niveau national, par un renforcement des offices centraux de police judiciaire existants. On rappellera que ces offices, où des gendarmes travaillent déjà aux côtés des policiers, sont des services à vocation interministérielle et à compétence nationale, qui sont chargés de lutter contre des phénomènes sensibles revêtant fréquemment une dimension internationale. Ils ont un rôle de centralisation de l'information, d'analyse et de recommandation, ainsi que des fonctions opérationnelles (24).

Sont également annoncés la création d'un nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite et la transformation de la cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante en office central.

b) Une utilisation des forces sous le signe de l'efficacité

· Une redéfinition du mode opératoire de l'usage des effectifs est amorcée.

L'aspect le plus innovant a trait à la nouvelle définition de la doctrine d'emploi des forces mobiles (compagnies républicaines de sécurité et escadrons de gendarmerie mobile). Esquissée de façon maladroite depuis plusieurs années, elle est désormais exposée sans ambiguïté : dans le respect de leur identité, de leur spécialisation et de leur statut, l'essentiel des forces mobiles sera employé en appui des missions de la direction centrale de la sécurité publique et de la gendarmerie départementale, dans leur région d'implantation.

L'annexe I reprend, par ailleurs, deux orientations préconisées de longue date mais dont la mise en _uvre demeure, au mieux, partielle.

Elle plaide, tout d'abord, pour un redéploiement rationnel et équilibré des zones de compétence de la police et de la gendarmerie et des effectifs à l'intérieur de celles-ci, afin de prendre en compte la montée de l'insécurité hors des grandes agglomérations. Récemment, le ministre de l'intérieur a justifié cette révision du maillage territorial des forces de sécurité de façon simple et pédagogique : « La délinquance s'est déplacée, l'organisation doit s'adapter ».

Elle prévoit, ensuite, de mettre un terme à l'emploi des policiers et des gendarmes dans des fonctions qui ne sont pas strictement liées à la sécurité. Cette intervention suppose, conformément aux recommandations déjà formulées il y a trois ans par la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale, de ne pas mobiliser des effectifs de voie publique pour des tâches administratives, d'externaliser certaines fonctions techniques - l'entretien du parc automobile par exemple - et de réduire les gardes statiques (25). Il est également indiqué qu'une réflexion sera lancée sur les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements ainsi que la surveillance des détenus hospitalisés ; cette orientation est appuyée par un engagement précis : « Des premières propositions devront être faites dans le délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi ».

· L'objectif d'instaurer une police de proximité, fixé par la loi d'orientation du 21 janvier 1995, est réaffirmé. Toutefois, il conviendra d'apporter à cette réforme les inflexions nécessaires pour remédier aux défauts de sa mise en _uvre, déjà analysés par le rapporteur dans la partie générale de ce rapport : l'amoindrissement des capacités judiciaires de la police et de la présence nocturne des forces, ainsi que la place excessive réservée à la prévention par rapport à la répression, notamment.

D'ores et déjà, l'annexe I annonce un renforcement des capacités d'action judiciaire des forces de sécurité : il est proposé d'accélérer l'orientation mise en _uvre, parfois de façon désordonnée, dans la police, depuis 1998, tendant à augmenter le nombre des officiers de police judiciaire - notamment dans le corps des agents de maîtrise et d'application - et d'étendre la compétence territoriale de ces derniers (26; cette orientation sera élargie à la gendarmerie, dans laquelle le nombre d'agents de police judiciaire tend à décroître depuis plusieurs années.

Un développement des moyens de la police technique et scientifique est par ailleurs programmé. Dans ce cadre, on doit se féliciter de l'annonce, attendue, du rapprochement des fichiers de police criminelle de la police et de la gendarmerie : tout ce qui peut favoriser la complémentarité des outils et des installations des deux forces va dans le bon sens.

· La modernisation de l'organisation administrative des services fait l'objet de plusieurs engagements :

-  Un regroupement des 19 services régionaux de police judiciaire (SRPJ) existants autour de neuf directions interrégionales, toujours dans une perspective d'élargissement de la compétence territoriale des enquêteurs.

-  Une réorganisation de la gendarmerie en zone périurbaine et dans les zones rurales. Ainsi, en fonction des réalités de terrain, des communautés de brigades de gendarmerie, travaillant « en réseau », dotées d'un commandement unique, agissant sur une circonscription plus cohérente, pourront être constituées.

-  La mise en commun de certains moyens de la police et de la gendarmerie (fonctions logistiques, formation, recherche et information), qui prolonge de façon concrète le caractère désormais unique du commandement des deux forces.

-  L'adaptation et la modernisation de la formation des personnels.

-  La déconcentration des pouvoirs de gestion. Il est envisagé, par exemple, que les achats de véhicules légers puissent être intégrés dans la dotation globale déconcentrée des services.

· La coopération européenne et internationale en matière de sécurité n'est pas oubliée : l'annexe I affirme la nécessité de la renforcer et annonce que la France est prête à exercer un rôle moteur dans ce domaine.

Cette coopération est particulièrement nécessaire dans des domaines tels que la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et le blanchiment.

Elle s'impose également, comme l'ont montré les récentes rencontres entre les ministres de l'intérieur de l'Union européenne et, surtout, des chefs d'Etat, à l'occasion du sommet de Séville, pour combattre l'immigration irrégulière et les filières criminelles qui exploitent les clandestins.

Dans cette perspective, le ministre français de l'intérieur s'est déjà efforcé de bâtir des positions communes avec ses homologues de l'Union européenne. Sur la question du centre de réfugiés de Sangatte, qui n'a pas été traitée par le précédent Gouvernement, il s'est attaché à renouer le dialogue avec les autorités britanniques. Il a également abordé, à plusieurs reprises, les questions de l'asile et de l'immigration avec le ministre allemand de l'intérieur, notamment le 27 mai dernier. Plus récemment, il s'est entretenu, le 1er juillet, avec son homologue italien et a affirmé, à cette occasion, qu'il fallait « accentuer la coopération entre les deux pays pour lutter contre l'immigration clandestine ». « Il faut faire en sorte que la lutte contre la délinquance et l'immigration clandestine ne s'arrête pas à la frontière entre la France et l'Italie », a-t-il ajouté à l'occasion d'une visite du centre de coopération policière et douanière (CCPD) de Vintimille qui illustrait la volonté du Gouvernement, déjà évoquée, de relancer les accords bilatéraux transfrontaliers.

· La création d'une réserve civile de la police nationale est annoncée, sur le modèle de celle qui existe déjà dans les forces armées.

On rappellera que la réserve militaire a été instaurée par la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999, dans le contexte de la professionnalisation des armées. Elle a pour objet de renforcer les capacités des forces armées, dont elle est une des composantes, d'entretenir l'esprit de défense et de contribuer au maintien du lien entre la nation et ses forces armées. Elle est constituée d'une réserve opérationnelle (comprenant des volontaires et d'anciens militaires) et d'une réserve dite citoyenne (comprenant les autres réservistes).

Les modalités de mise en place de la réserve civile de la police nationale ne sont guère précisées. Il conviendra, à cet égard, de veiller à ne pas reproduire les erreurs commises dans le cadre de l'instauration de la réserve militaire, les besoins en termes de formation et de dotations budgétaires ayant été sous-évalués ; son démarrage est d'ailleurs particulièrement lent : l'objectif initial, qui était de réunir 100 000 réservistes à la fin de l'année 2002, dont 50 000 pour la gendarmerie et 50 000 pour les armées, ne sera pas atteint, loin s'en faut (27).

La réserve civile de la police nationale doit permettre d'appeler des fonctionnaires actifs de la police nationale durant les cinq années suivant leur départ à la retraite - ces départs étant particulièrement nombreux dans la police nationale, compte tenu du déséquilibre de sa pyramide des âges - lorsque les circonstances ou des évènements exceptionnels l'exigent. Les « réservistes » pourront soit renforcer les forces en activité soit, sur la base du volontariat cette fois, concourir à des missions de solidarité (aide à l'insertion locale des jeunes policiers, transmission des connaissances, médiation...).

Un décret en Conseil d'Etat devra préciser les modalités de cette réforme qui participe d'une volonté générale de mobiliser toutes les forces dans la lutte contre l'insécurité.

· Différentes mesures sont annoncées dans le sens d'un meilleur accompagnement social, médical et psychologique des personnels et de leurs familles.

L'amélioration des conditions de logement, qui sont particulièrement difficiles en région parisienne, est également considérée comme une priorité.

Enfin, il est précisé que des mesures incitatives seront prévues pour prolonger la durée en poste des agents affectés dans les zones sensibles : il s'agit, comme on l'a vu, d'un élément essentiel pour le succès de la police de proximité.

· Le renforcement de la lutte contre l'insécurité routière fait l'objet d'un chapitre spécifique. Les intentions du Gouvernement dans ce domaine ne sont pas définies de façon précise, si ce n'est l'annonce de la parution du décret d'application de l'article 14 de la loi du 21 janvier 1995 (voir infra). Cela étant, le fait que cette problématique soit abordée dans un texte d'orientation sur la sécurité est significatif en soi : l'incivilité routière est considérée comme une forme de délinquance.

· Le chapitre de la prévention et de l'insertion sociale, qui ont un rôle majeur à jouer, notamment pour lutter contre la délinquance des mineurs, ne fait pas non plus l'objet d'annonces particulières. On relève, surtout, la réaffirmation du caractère essentiel du dialogue entre les travailleurs sociaux et les forces de l'ordre et la nécessité de renforcer, au sein des instances locales, le partenariat initié au travers des contrats locaux de sécurité. Cette question sera, par ailleurs, traitée de façon concrète dans le projet de loi d'orientation et de programmation relatif à la sécurité.

2. Un cadre juridique conforté

La seconde partie de l'annexe I est consacrée aux nouveaux moyens juridiques qui doivent permettre aux services de sécurité de lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance.

· On relève, en préalable, l'annonce de la parution de textes d'application, jamais publiés, de certaines dispositions de la loi précitée du 21 janvier 1995. Sont particulièrement visés :

-  L'article 11, relatif aux études de sécurité préalables à la réalisation de certains projets d'aménagement, d'équipements collectifs et de programmes de construction.

-  Les articles 14 et 15, portant, respectivement, sur l'intégration de dispositifs techniques dans les infrastructures et équipements routiers pour prévenir et constater les infractions au code de la route, et de dispositifs de sécurité ou de marquage sur les véhicules eux-mêmes.

La parution du décret d'application de l'article 14 a été retardée, notamment, en raison de ses conséquences financières : son application aux routes départementales et communales se traduirait, en effet, par des charges conséquentes pour les gestionnaires de ces réseaux, c'est-à-dire les départements et les communes. Nécessaire sur le plan de la sécurité routière, cette mesure soulève donc des questions qui mériteraient d'être également abordées dans le cadre de la réflexion en cours sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales.

L'article 15 s'est heurté à la réglementation européenne, qui ne permet pas à un pays membre de subordonner la circulation de véhicules sur son sol à des contraintes techniques non prévues au niveau communautaire. C'est la raison pour laquelle il est indiqué, dans l'annexe I, que la France prendra une initiative pour faire aboutir ce dossier, qui relève désormais de la réglementation européenne.

En toute hypothèse, on soulignera, de manière générale, que le procédé consistant à annihiler les effets de mesures votées par le législateur en ne publiant pas leurs textes d'application est particulièrement choquant. A cet égard, il conviendrait également de veiller à ce que l'ensemble des décrets prévus par la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 sur les polices municipales soient au moins publiés dans les plus brefs délais (28).

La Commission a été saisie de l'amendement n° 1 présenté par M. Jérôme Rivière tendant à préciser, dans l'annexe I du projet de loi, que la mise en place du dispositif permettant la localisation des véhicules volés serait opérée en partenariat avec les constructeurs et les compagnies d'assurance mais également avec les opérateurs conventionnés. Son auteur a précisé que certains opérateurs spécialisés avaient investi des moyens importants pour mettre au point des dispositifs de localisation des voitures volées dont ils avaient pu démontrer l'efficacité. La Commission a adopté cet amendement, avec l'avis favorable du rapporteur.

· Surtout, des dispositions nouvelles sont annoncées pour conforter l'action des forces de sécurité : ces mesures devraient structurer le futur projet de loi que le Gouvernement s'engage à déposer dès l'automne prochain.

Comme le rapporteur l'a déjà indiqué, le Gouvernement formulera plusieurs propositions destinées à restaurer l'autorité et la capacité des agents de l'Etat à agir, notamment la création d'un nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite et l'élargissement de la compétence territoriale des OPJ. Il prévoit, également, de simplifier les contraintes procédurales qui pèsent sur les enquêtes, de sanctionner plus sévèrement les violences, menaces et outrages envers les dépositaires de l'autorité publique (29) et d'aggraver les sanctions pénales pour non respect des arrêtés municipaux.

Pour renforcer l'efficacité des investigations, le Gouvernement envisage, notamment : de favoriser l'implantation de caméras vidéos dans les zones sensibles, afin d'établir des preuves en matière de violences urbaines ; de permettre aux OPJ d'accéder directement à certains fichiers informatiques, sans passer par les opérateurs chargés de leur gestion (notamment les établissements financiers et les opérateurs de téléphonie), afin d'avoir accès plus rapidement à des renseignements nécessaires à la manifestation de la vérité. Un cadre juridique nouveau permettra l'utilisation de biens saisis dans le cadre de procédures, voire leur attribution à l'administration qui a mené l'enquête. Des dispositions seront adoptées pour améliorer le taux d'élucidation des enquêtes. En matière de police technique et scientifique, le fichier national des empreintes digitales sera étendu aux empreintes palmaires, ce qui contribuera à l'amélioration de l'élucidation des petits et moyens délits.

Afin de mieux prendre en compte certaines formes nouvelles de criminalité, des dispositions seront proposées pour bloquer l'usage des téléphones portables
- dont les vols, souvent avec violence, ont fortement progressé au cours des dernières années - et localiser les véhicules volés. La législation sur les armes sera actualisée pour renforcer la sécurité des Français et contenir les trafics illégaux (30).

Les permanences de nuit des brigades des mineurs et de protection sociale de la police nationale seront étendues dans certains quartiers pour améliorer l'appréhension de la délinquance des mineurs ; des mesures, y compris répressives, permettront de mieux assurer le respect de l'obligation scolaire. Le partenariat entre les services de l'éducation nationale, l'institution judiciaire et les forces de sécurité sera développé.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Guy Geoffroy prévoyant la mise à disposition, auprès des proviseurs de lycée ou des principaux de collège, d'un fonctionnaire de la police nationale ou d'un militaire de la gendarmerie, lorsque leurs établissements présentent un risque de violence particulier, et précisant que des directives précises seront adressées aux chefs d'établissements pour définir le cadre nouveau dans lequel pourront s'inscrire les règlements intérieurs afin de mieux prévenir et réprimer les dérives du comportement de certains élèves.

M. Jean-Pierre Blazy s'est déclaré défavorable à la présence permanente de personnels des forces de l'ordre dans les établissements scolaires en soulignant qu'il pouvait y être fait appel en cas de situation de crise.

S'appuyant sur l'exemple de Bobigny, M. Georges Fennech a précisé que des expériences pilotes avaient déjà permis de renforcer les liens entre les parquets et les établissements scolaires.

Tout en reconnaissant le bien-fondé de la démarche des auteurs de l'amendement, le rapporteur a suggéré qu'elle soit approfondie et que la question de la sécurité des établissements scolaires soit abordée lors de la prochaine réunion que la Commission tiendra en application de l'article 88 du Règlement. Il a souligné que le projet de loi prévoyait de mettre un terme à l'emploi des policiers dans des tâches administratives et techniques et jugé que la mise à disposition de policiers dans les établissements scolaires n'allait pas forcément dans ce sens. Il a insisté sur la nécessité de mieux évaluer la portée de la mesure proposée, en liaison avec le ministère de l'éducation nationale.

M. Guy Geoffroy a alors précisé que la rédaction de son amendement était peut être à revoir, précisant qu'il n'avait pas pour objet de prévoir la présence permanente de forces de l'ordre dans les établissements scolaires, mais d'aider ponctuellement les chefs de ces établissements lorsqu'ils sont confrontés à des risques de violence. Faisant part de son expérience de proviseur, il a ajouté que les établissements scolaires n'étaient plus des lieux sanctuarisés et que les élèves eux-mêmes souhaitaient la présence des forces de l'ordre.

M. Alain Marsaud, cosignataire de l'amendement, a fait observer qu'une soixantaine d'établissements seulement étaient concernés, ce qui ne remettait pas en cause la programmation budgétaire prévue par le projet de loi.

Tout en partageant les préoccupations des auteurs de l'amendement, Mme Maryse Joissains-Masini a estimé qu'il était prématuré et suggéré son retrait, tandis que M. Georges Fennech a souhaité qu'il soit réécrit.

M. Pascal Clément, président, a fait valoir que l'amendement proposé par M. Guy Geoffroy mettrait le ministre de l'éducation nationale dans une situation embarrassante puisqu'il risquait de susciter une réaction négative des syndicats enseignants et, par là-même, de retarder l'adoption du projet de loi.

M. Guy Geoffroy a alors retiré son amendement en souhaitant qu'une solution soit trouvée lors d'une réunion ultérieure.

Le projet de loi prévoit également que les étrangers coupables de racolage actif ou passif feront l'objet de mesures d'éloignement systématiques. La répression sera renforcée pour contenir certains comportements tels que la consommation de drogues, la mendicité agressive, les regroupements dans les halls d'immeubles et l'envahissement des propriétés privées par des gens du voyage.

La Commission a, par ailleurs, adopté un amendement du rapporteur, tendant à préciser que le Gouvernement s'efforcera de mieux réprimer l'occupation par les gens du voyage des propriétés non seulement privées mais également publiques (amendement n° 3).

La mise en _uvre des orientations précitées impliquera de nombreuses modifications des textes, réglementaires et législatifs, qui encadrent l'activité de la police et de la gendarmerie. Mais elle suppose aussi un renforcement très substantiel de leurs effectifs et de leurs équipements : celui-ci est effectivement annoncé, conformément à la programmation établie dans le second rapport annexé au projet de loi.

La Commission a adopté l'article 1er et l'annexe I ainsi modifiés.

Article 2 et annexe II

Programmation des moyens 2003-2007

Le présent article tend à approuver la programmation des moyens de la police et de la gendarmerie nationales pour les années 2003 à 2007 proposée par le Gouvernement et détaillée dans un rapport annexé (annexe II).

Cette programmation porte sur :

-  les effectifs : 13 500 emplois supplémentaires seront créés au cours de la période considérée, dont 6 500 dans la police et 7 000 dans la gendarmerie.

-  les moyens : le montant des crédits prévus pour l'exécution de la programmation est fixé à 5,6 milliards d'euros sur cinq ans, dont 2,75 milliards dans la police et 2,85 milliards dans la gendarmerie, en plus de la reconduction annuelle des crédits 2002, de l'effet du « point fonction publique » et du glissement-vieillesse-technicité (GVT) (31) sur les dépenses de rémunération (32).

1. Les effectifs : 13 500 créations d'emplois

La nouvelle doctrine d'emploi des forces de sécurité décrite dans l'annexe I suppose des effectifs supplémentaires, pour renforcer les capacités opérationnelles de la police et de la gendarmerie nationales et mettre un terme à l'emploi des personnels actifs dans des fonctions qui ne sont pas strictement liées à la sécurité (tâches administratives, fonctions techniques, extractions et transfèrements, surveillance de détenus hospitalisés).

· Comme on l'a vu, les effectifs de la police sont aujourd'hui de l'ordre de 145 000, y compris les adjoints de sécurité.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS RÉELS DE LA POLICE NATIONALE

(au 1er décembre 2001)

CORPS

EFFECTIFS

Conception et direction

1 965

Commandement et encadrement

15 518

Maîtrise et application

98 306

Sous-total personnels actifs

115 789

Administratifs, techniques, scientifiques et autres

13 055

Adjoints de sécurité

16 153

TOTAL

144 997

· Ceux de la gendarmerie sont d'environ 95 000, essentiellement répartis entre la gendarmerie départementale et la gendarmerie mobile.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS RÉELS DE LA GENDARMERIE

(au 1er décembre 2001)

CORPS

EFFECTIFS

Officiers

3 771

Sous-officiers

76 633

Volontaires

11 915

Civils

1 776

TOTAL

94 095

Au total, 13 500 emplois seront créés sur la période 2003-2007, dont 6 500 dans la police et 7 000 dans la gendarmerie.

Ce renforcement des effectifs est très important.

Ainsi, s'agissant de la gendarmerie, 3 210 emplois seulement ont été créés sous la précédente législature : le rythme sera donc plus que doublé au cours des cinq années à venir. De plus, les dispositions prévues par l'article 4 du projet de loi permettront également de renforcer la capacité opérationnelle de la gendarmerie (voir supra).

En ce qui concerne la police, 15 266 emplois budgétaires ont été créés entre 1997 et 2002. Cependant, le bilan annoncé par le précédent Gouvernement n'intègre pas les effets de la réduction du temps de travail sur les capacités opérationnelles de la police (équivalent d'une perte nette de 4 000 emplois malgré les mesures prises en 2002) ni le fait que tous les postes réservés aux ADS n'ont pas été pourvus (déficit de 5 000 emplois environ).

On observera, par ailleurs, que les 6 500 postes supplémentaires annoncés dans la police pour la période 2003-2007 correspondent, en réalité, à plus de 11 000 emplois : il convient d'y ajouter, en effet, la décision de pérenniser les « surnombres » autorisés en gestion par le précédent Gouvernement (2 162), et d'intégrer l'effet des « rachats de jours » destinés à compenser pour partie l'impact de la réduction du temps de travail (équivalent de 2 500 emplois).

Concrètement, les nouveaux effectifs devraient se répartir de la façon présentée ci-après.

· Environ 2 000 emplois seront créés dans la police et 4 800 dans la gendarmerie pour mieux assurer la « sécurité de proximité », en particulier pour achever la mise en place de la police de proximité, renforcer les effectifs dans les zones périurbaines ou urbaines prioritaires caractérisées par un niveau élevé de délinquance ou par une forte croissance de la population et améliorer l'accueil des victimes.

· 1 000 emplois seront créés dans la police et 400 dans la gendarmerie pour renforcer la capacité d'investigation des forces de sécurité, dont l'insuffisance se répercute, comme on l'a vu, sur le taux d'élucidation des crimes et des délits.

· 300 emplois seront créés dans la police et autant dans la gendarmerie au titre de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée.

· 700 emplois seront créés dans la police au titre de la protection des frontières, pour la maîtrise des flux migratoires et la lutte contre l'immigration clandestine (présence renforcée dans les zones les plus exposées).

· 500 emplois seront créés dans la police et 700 dans la gendarmerie pour la lutte contre l'insécurité routière (surveillance accrue des routes et autoroutes).

· 2 000 emplois seront créés dans la police et 800 dans la gendarmerie au titre des missions d'administration, de formation et de contrôle.

Ces créations d'emploi s'ajouteront, bien sûr, au remplacement des effectifs dont le départ est programmé, en particulier les départs à la retraite qui resteront très nombreux dans les années à venir, notamment dans la police. De même, elles n'ont pas vocation à remplacer les adjoints de sécurité (ADS) et les gendarmes adjoints, dont les effectifs seront conservés, sous une forme et pour des missions qui restent à définir.

RENFORCEMENT DES EFFECTIFS DANS LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE
(2003-2007)

POLICE

GENDARMERIE

-  Sécurité de proximité

2 000

4 800

-  Renforcement des capacités d'investigation

1 000

400

-  Lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée

300

300

-  Protection des frontières

700

-

-  Lutte contre l'insécurité routière

500

700

-  Administration, formation et contrôle

2 000

800

TOTAL

6 500

7 000

2. Les moyens : 5,6 milliards d'euros

Le Gouvernement annonce un renforcement des moyens de la police et de la gendarmerie de 5,6 milliards d'euros sur la période considérée. Ce montant prend en compte :

-  700 millions d'euros au titre du « rebasage des crédits 2002 de la police nationale ».

Cette enveloppe de 140 millions d'euros par an est destinée à corriger la sous-évaluation systématique de certaines lignes du budget de la gendarmerie au cours des dernières années. Elle comprend : le recrutement de 1 400 gendarmes adjoints volontaires prévus au budget mais « gelés » à la demande du ministère des finances (16 millions d'euros en rémunérations et 8 millions en fonctionnement) ; l'apurement des arriérés de loyers (51 millions d'euros) ; une budgétisation plus sincère des indemnités accordées en contrepartie de l'absence de réduction du temps de travail dans les armées (41 millions d'euros) ; une remise à niveau d'autres crédits de fonctionnement (24 millions d'euros).

-  2,7 milliards d'euros au titre de l'emploi et des mesures catégorielles, dont 1,57 milliard d'euros pour la police et 1,13 milliard d'euros pour la gendarmerie.

Le rythme prévisionnel des recrutements dans la gendarmerie devrait être légèrement croissant au cours de la période considérée. A l'inverse, les recrutements dans la police seront plus concentrés sur le début de la période, certains pouvant intervenir par anticipation dès 2002. Cette différence de rythme explique en partie pourquoi l'enveloppe budgétaire allouée à la police est plus importante que celle prévue pour la gendarmerie. De plus, les 1,57 milliard d'euros réservés à la police intègrent une enveloppe de 230 millions d'euros qui est destinée à « contribuer au rétablissement de ses capacités opérationnelles », c'est-à-dire à compenser par des « rachats de jours » l'effet de la réduction du temps de travail.

Les montants précités sont également destinés à financer des mesures catégorielles. Conformément aux orientations définies dans le premier rapport annexé, celles-ci devront notamment favoriser le maintien en poste des agents affectés dans certaines zones sensibles, améliorer la rémunération liée à la qualification d'officier de police judiciaire et conforter l'autorité des gradés au sein du corps des agents de maîtrise et d'application.

Le solde, soit 2,2 milliards d'euros, correspond au programme d'équipement : 1,18 milliard d'euros ira à la police et 1,02 milliard d'euros à la gendarmerie.

Cet effort de fonctionnement et d'équipement est également incomparablement supérieur à celui observé sous la onzième législature.

En 2002, les crédits d'équipement de la gendarmerie étaient, en effet, en euros courants, au même niveau qu'en 1997 (329 millions d'euros environ), ce qui correspond, bien sûr, à un recul en valeur réelle. Sur la période 2003-2007, l'augmentation devrait être supérieure à 50 % par rapport à 2002.

S'agissant de la police, en prenant en compte le chapitre de fonctionnement 34-41, la hausse a été d'environ 11 % sous la précédente législature. Elle sera, en moyenne, de l'ordre de 30 % au cours des cinq exercices à venir par rapport à 2002.

Le contenu du programme d'équipement élaboré par le Gouvernement est détaillé ci-après, en crédits de paiement (CP).

· L'état général des locaux de la police et de la gendarmerie et, dans certains cas, des modes d'hébergement proposés aux familles, suppose un effort soutenu en termes de remise à niveau et d'investissement au cours des prochaines années.

-  Pour la police, les surfaces mises en chantier seront progressivement portées de 45 000 m2 à 100 000 m2 par an. Les principales priorités seront la rénovation et l'entretien du patrimoine de la police nationale, l'immobilier de la préfecture de police, les écoles de formation, l'hébergement des CRS en Ile-de-France et l'amélioration des moyens logistiques de la police nationale.

-  Pour la gendarmerie, l'effort sera concentré sur le logement des gendarmes et de leurs familles ; 3 500 unités seront remises à niveau (en 2000, 43 % des logements en caserne avaient plus de 25 ans) et la capacité de logement domaniale augmentée de 4 000 « équivalent-unités de logement » à l'horizon 2007.

Des crédits supplémentaires sont donc programmés à hauteur, chaque année, d'environ 75 millions d'euros pour la police et 95 millions pour la gendarmerie.

La mise en _uvre de ce programme repose également sur des dispositions juridiques nouvelles : les articles 3 et 4 du projet de loi permettront ainsi d'accélérer l'exécution des opérations envisagées (voir supra).

· Au chapitre des transmissions, qui est essentiel pour renforcer la coordination entre les forces de sécurité, l'effort sera concentré sur le programme ACROPOL et, plus précisément, sur l'achèvement de son déploiement, prévu en 2008, sa connexion avec le réseau de la gendarmerie (RUBIS) (33) et son extension aux lieux souterrains et couverts (34).

Les crédits supplémentaires sont évalués, pour la police nationale, à 45 millions d'euros en moyenne annuelle.

Un objectif ambitieux est affiché à plus long terme sous la forme d'une convergence des réseaux actuels vers une « infrastructure de réseau partagé » : celle-ci pourrait prendre la forme d'une extension du réseau ACROPOL, dont la couverture serait étendue pour répondre aux besoins de l'ensemble des acteurs de la sécurité (police, gendarmerie et sécurité civile).

· Les besoins sont également considérables en ce qui concerne l'informatique : câblage des bâtiments et mise en réseau des postes de travail, développement d'un système Intranet dans la gendarmerie, modernisation et informatisation des centres d'information et de commandement, remise à niveau des matériels de la police technique et scientifique et des technologies utilisées en matière de maîtrise du flux migratoire et de lutte contre la fraude documentaire.

Les crédits supplémentaires atteindront, en moyenne annuelle, de l'ordre de 40 millions d'euros pour la police et 30 millions pour la gendarmerie.

· En ce qui concerne le parc automobile (véhicules légers et véhicules spécifiques nécessaires au maintien de l'ordre) dont le rythme de renouvellement a été, jusqu'à présent, très insuffisant, les crédits supplémentaires atteindront, en moyenne annuelle, environ 20 millions d'euros pour la police et 40 millions pour la gendarmerie.

· L'annexe II réaffirme, par ailleurs, plusieurs objectifs déjà présents dans l'annexe I : la mise en commun des capacités logistiques de la police et de la gendarmerie, l'externalisation d'une partie de l'entretien et de la réparation, la déconcentration des crédits de renouvellement aux gestionnaires locaux.

· Pour adapter l'équipement et la protection individuelle de leurs personnels (uniformes, armement, équipements de protection), la police et la gendarmerie recevront, respectivement, 55 millions et 40 millions d'euros en moyenne annuelle.

· Afin d'utiliser pleinement les potentialités du regroupement opérationnel des services de police et de gendarmerie, l'annexe II réaffirme l'opportunité d'un développement des programmes logistiques communs.

· Un renforcement du soutien aux personnels et de l'action sociale est également envisagé, conformément aux orientations fixées par l'annexe I : une partie des moyens supplémentaires prévus par le volet programmation du projet de loi sera spécifiquement allouée à cette politique.

RENFORCEMENT DES MOYENS DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE
(2003-2007)

POLICE

GENDARMERIE

-  « Rebasage » budgétaire

-

700

-  Emploi et mesures catégorielles

1 570

1 130

-  Programme d'équipement

dont environ :

1 180

1 020

- la modernisation de la gestion immobilière

375

475

- les systèmes de transmission

225

-

- la modernisation des services et du traitement de l'information

200

150

- le parc automobile

100

200

- l'équipement et la protection individuelle des personnels

275

200

TOTAL

2 750

2 850

La Commission a adopté l'article 2 et l'annexe II sans modification.

Article 3

(Art. L. 34-3-1 et L. 34-7-1 du code du domaine de l'Etat,
art. L. 1311-2, L. 1311-4-1 et L. 1615-17 du code général des collectivités territoriales)

Assouplissement des règles de la gestion immobilière
de la police et de la gendarmerie nationales

En complément de l'effort financier prévu par l'article 2, l'article 3 du présent projet de loi prévoit une série de dispositions juridiques de nature à faciliter et à accélérer les constructions immobilières destinées aux besoins de la gendarmerie, de la police et de la justice. Il comporte trois paragraphes : les deux premiers adaptent les règles applicables à l'Etat, le troisième concerne les collectivités territoriales.

1. Adapter les règles applicables à l'Etat

a) Autoriser les marchés de conception-réalisation-maintenance

Le premier paragraphe de cet article autorise l'Etat à passer avec une personne ou un groupement de personnes, de droit public ou privé, un marché unique portant à la fois sur la conception, la construction, l'aménagement, l'entretien et la maintenance d'immeubles affectés à la police ou à la gendarmerie nationales. Il s'agit de permettre à l'Etat de construire plus vite et à moindre coût, tout en assurant une gestion plus performante de ses bâtiments.

Cette disposition s'inspire, en les élargissant, des possibilités ouvertes au ministère de la justice par la loi n° 87-432 relative au service public pénitentiaire (35). Elle déroge à l'article 7 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique, qui dispose que la mission de maîtrise d'_uvre est distincte de celle de l'entrepreneur, mais également à son article 18, qui restreint le droit du maître d'ouvrage de passer des marchés portant à la fois sur les études et l'exécution des travaux.

Le recours à de tels marchés n'est, en effet, possible que si « des motifs d'ordre technique rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage ». Selon le décret d'application du 29 novembre 1993 (36), ces motifs techniques doivent être liés à la destination de l'ouvrage ou à sa mise en _uvre. Les opérations concernées sont celles « dont la finalité majeure est une production dont le processus conditionne la conception, la réalisation et la mise en _uvre ainsi que les opérations dont les caractéristiques intrinsèques (dimensions exceptionnelles, difficultés techniques particulières) appellent une exécution dépendant des moyens et de la technicité des entreprises ». Si les stations d'épuration ou les usines d'incinération répondent à ces conditions, tel n'est pas le cas des immeubles affectés aux besoins de la police ou de la gendarmerie.

Il convient de souligner, par ailleurs, que l'article 18 de la loi du 12 juillet 1985 ne prévoit la passation de contrat de conception-réalisation qu'avec un groupement de personnes de droit privé ou, pour les seuls ouvrages d'infrastructures, avec une personne de droit privé, alors que la disposition proposée par cet article ouvre à l'Etat la faculté de contracter avec une personne ou un groupement de personnes de droit public ou privé. Surtout, elle ne porte pas uniquement sur la conception et la réalisation des bâtiments : elle englobe opportunément dans son champ d'application leur entretien et leur maintenance. Les bâtiments destinés à la police et à la gendarmerie nationales, qui sont utilisés de façon intensive, engendrent des coûts d'entretien et de maintenance très importants (37). Très souvent, ces coûts sont sous-estimés par l'administration et il arrive que celle-ci fasse des économies en investissement qui engendrent des dépenses de fonctionnement bien plus importantes.

En confiant à son cocontractant une mission globale portant sur la conception, la construction, l'entretien et la maintenance des bâtiments, l'administration sera en mesure, sur la base d'un programme technique détaillé, d'apprécier la pertinence des solutions proposées et l'impact financier de ses choix sur les charges ultérieures de maintenance. Elle gagnera également un temps précieux : le découpage de l'opération de construction d'un bâtiment en plusieurs phases distinctes et les procédures particulières de choix du maître d'_uvre, puis des entreprises, ne permettent pas actuellement de livrer un ouvrage immobilier dans un délai inférieur à cinq ou six ans selon la taille du projet.

Les marchés de conception-réalisation-entretien-maintenance prévus par cet article seront soumis au code des marchés publics. Toutefois, par dérogation à l'article 10 de ce code, si ces marchés sont allotis, l'Etat conservera le droit de choisir son ou ses contractants, en tenant compte de l'équilibre économique de l'ensemble du marché et non pas lot par lot. Cette dérogation paraît parfaitement justifiée : le recours à l'allotissement permettra à de petites entreprises d'avoir accès aux marchés de conception-réalisation-maintenance sans remettre en cause l'unicité de ces marchés.

b) Favoriser la maîtrise d'ouvrage privé

Le deuxième paragraphe de cet article a pour objet de permettre le préfinancement privé des bâtiments construits pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales sur le domaine public de l'Etat. A cette fin, il introduit deux nouveaux articles dans le code du domaine de l'Etat : l'article L. 34-3-1, qui crée un dispositif spécifique de location avec option d'achat, et l'article L. 34-7-1, qui autorise le recours au crédit bail.

· La location avec option d'achat

L'article L 34-1 du code du domaine de l'Etat autorise la délivrance d'autorisations d'occupation temporaire du domaine public conférant à leurs titulaires des droits réels sur les constructions immobilières réalisées pour l'exercice de l'activité autorisée par le titre d'occupation. Sur la base de cet article, l'Etat délivre à des opérateurs privés une autorisation d'occupation temporaire de son domaine public en les chargeant de construire des bâtiments qu'il prend ensuite à bail avec une option d'achat (38). Le ministère de l'intérieur a eu recours à ce type de montage pour la construction de la zone d'attente de Roissy et pour celle du centre de rétention de Coquelles par exemple.

Le 1° du deuxième paragraphe de l'article 3 du projet de loi crée un nouvel article L. 34-3-1 dans le code du domaine de l'Etat, qui autorise explicitement l'Etat à accorder des autorisations d'occupation temporaire de son domaine public à des personnes privées pour conclure ensuite avec elles des baux portant sur des bâtiments à construire pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie. Il précise que ces baux comporteront une option d'achat permettant à l'Etat d'acquérir les bâtiments avant le terme fixé par l'autorisation d'occupation. Cette précision est nécessaire puisque, à l'heure actuelle, l'article L. 34-3 du code du domaine de l'Etat prévoit uniquement la remise gratuite à l'Etat des constructions édifiées par le titulaire de l'autorisation temporaire à l'échéance de ce titre.

Le loyer versé par l'Etat pour la location des bâtiments construits pourra être fixé en tenant compte de l'amortissement financier et de l'investissement effectué par le bailleur, et non seulement par référence au marché locatif local. La valeur de rachat des bâtiments sera égale au coût global de l'opération moins les loyers déjà versés. Ces nouvelles possibilités de calcul du loyer versé par l'Etat vont rendre le recours aux autorisations temporaires d'occupation du domaine public beaucoup plus incitatif.

Enfin, dans le but de protéger les intérêts de l'Etat, il est prévu que la conclusion du bail à construire sera précédée d'une procédure de publicité et de mise en concurrence préalable. Cette précision est essentielle puisque ni la loi du 12 juillet 1985 sur la maîtrise d'ouvrage publique, ni le code des marchés publics, qui ne concerne pas les contrats de location, n'auront vocation à s'appliquer. La procédure de publicité et de mise en concurrence sera définie par décret en Conseil d'Etat comme les autres modalités d'application du dispositif prévu, ce qui constitue une garantie supplémentaire.

· Le recours au crédit bail

Le 2° du deuxième paragraphe de cet article insère, dans le code du domaine de l'Etat, un nouvel article L. 34-7-1 qui autorise à financer par crédit bail les constructions qui seront édifiées sur la base du nouvel article L. 34-3-1 de ce code. Cette disposition déroge à l'article L. 34-7 qui interdit le recours au crédit bail pour les ouvrages affectés à un service public et aménagés à cet effet ou directement affectés à l'usage du public ainsi que pour les travaux exécutés pour une personne publique dans un but d'intérêt général. Ainsi, il est prévu que le contrat de crédit-bail devra comporter des clauses permettant de préserver les exigences du service public.

Cette disposition permettra à l'Etat de charger directement un organisme de crédit bail de la construction des bâtiments destinés aux besoins de la justice, de la gendarmerie et de la police nationales. Elle autorise également une entreprise privée chargée de la construction de ces bâtiments à recourir au crédit bail.

2. Encourager l'initiative des collectivités territoriales

Le troisième paragraphe de cet article vise à encourager les collectivités territoriales à prendre part au financement et à la construction d'opérations immobilières concernant des bâtiments affectés à l'usage de la police et de la gendarmerie nationales afin de démultiplier l'effort de l'Etat. Il prévoit des mesures temporaires qui prendront fin le 31 décembre 2007. Ces mesures feront l'objet d'une évaluation avant d'être éventuellement pérennisées.

a) Une contribution notable à la construction de casernes

Si les collectivités territoriales participent de façon encore exceptionnelle à la réalisation de bâtiments affectés à l'usage de la police nationale, elles prennent déjà une part active dans la construction de casernes de gendarmerie qu'elles louent ensuite à l'Etat. Le ministère de l'intérieur possède 65 % des bâtiments qu'il occupe et en loue 10 %. Un peu plus d'un quart de ses locaux est mis à sa disposition par les collectivités locales, mais il s'agit essentiellement de bâtiments affectés à l'administration territoriale. En revanche, sur les 4 222 casernes qu'occupe la gendarmerie en métropole et dans les départements d'outre-mer, 3 477 sont des ensembles locatifs dont 70 % sont pris à bail auprès des diverses collectivités territoriales (la moitié environ auprès des départements, l'autre auprès des communes et de leurs groupements).

L'intervention des collectivités pour la construction des casernes de gendarmerie repose sur le décret n° 93-130 du 28 janvier 1993 (39) et sur la circulaire du Premier ministre du 29 janvier 1993 (40). Ces textes prévoient que les collectivités qui s'engagent à assurer la construction de casernes peuvent bénéficier de subventions d'investissements, inscrites au titre VI du budget du ministère de la défense, et percevoir ensuite de la part de l'Etat un loyer plafonné.

L'aide à l'investissement est déterminée en fonction des coûts plafonds des unités logements. Elle est calculée selon les taux suivants :

-  20 % du montant des coûts plafonds pour les opérations réalisées par les communes dont la population est égale ou inférieure à 10 000 habitants et qui ne bénéficient pas du concours financier d'autres collectivités territoriales. Ces communes ne peuvent construire que 20 unités logement ;

-  18 % de ce même montant pour les opérations réalisées par les communes dont la population est inférieure ou égale à 10 000 habitants et qui bénéficient du concours financier d'autres collectivités territoriales, par les communes dont la population est supérieure à 10 000 habitants et par les groupements de communes et les départements. Ces collectivités ne peuvent construire que 40 unités logement.

Le coût de référence utilisé pour le calcul de la subvention est le coût plafond de l'unité logement. Il correspond à un logement nu (75 % de l'unité logement) et à une quote-part de locaux de services et techniques (25 % de l'unité logement). La valeur du coût de référence est fixée depuis le 19 avril 2002 à 131 400 euros dans le cas général et à 143 500 euros pour les opérations réalisées en Ile-de-France, dans les îles non reliées au continent et dans les départements d'outre-mer. Elle est actualisée trimestriellement par le directeur général des impôts en fonction des variations de l'indice du coût de la construction publié par l'INSEE.

Le loyer annuel versé par l'Etat aux collectivités territoriales pour la location des bâtiments qu'elles ont fait construire est plafonné à 6 % du coût plafond ou des dépenses réelles toutes taxes comprises, si celles-ci sont inférieures à ce coût plafond, pendant la durée du premier bail d'une durée invariable de neuf ans. La poursuite de la location est possible par baux successifs de même durée et le loyer est alors estimé par les services fiscaux selon la valeur locative réelle des bâtiments concernés, sans pouvoir excéder la variation de l'indice du coût de la construction.

b) Un cadre juridique incitatif

Le troisième paragraphe de l'article 3 modifie et complète le code général des collectivités territoriales pour développer leur intervention. Pour des raisons de codification, la disposition posant le principe de l'intervention des collectivités figure dans le 2° de ce paragraphe.

· Le 2° du troisième paragraphe créé un nouvel article L. 1311-4-1 dans le code général des collectivités territoriales, qui s'insère dans livre III relatif au régime de leurs biens. Il conforte la base juridique de l'intervention des collectivités territoriales pour les opérations immobilières relatives aux bâtiments affectés à l'usage de la police et de la gendarmerie nationales et de la justice, en s'inspirant du dispositif prévu par la l'article 18 de la loi n° 90-587 du 4 juillet 1990 (41) pour les bâtiments de l'enseignement supérieur. Ainsi, il autorise les collectivités territoriales et les EPCI à construire, acquérir ou rénover, y compris sur leur domaine public, des bâtiments destinés à être mis à disposition de l'Etat pour les besoins de la justice, de la police et de la gendarmerie nationales.

Une convention entre l'Etat et la collectivité devra préciser les engagements financiers des parties, le lieu d'implantation des constructions projetées, le programme technique de construction ainsi que la durée et les modalités de mise à disposition des constructions. Les travaux devront commencer avant le 31 décembre 2007. Il convient de souligner que le nouvel article L. 1311-4-1 déroge à l'article 2 de loi de 1985 sur la maîtrise d'ouvrage publique, selon laquelle le maître de l'ouvrage est la personne morale pour laquelle l'ouvrage est construit.

Par parallélisme avec les dispositions introduites pour les opérations réalisées sur le domaine public de l'Etat, le dernier alinéa de l'article L. 1311-4-1 précise que les constructions initiées par les collectivités territoriales pourront faire l'objet de contrats de crédit bail. Ces contrats devront également comporter des clauses permettant de préserver les exigences du service public.

· Le 1° du troisième paragraphe de l'article 3 procède à la réécriture du premier aliéna de l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales, qui permet aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics de conclure, avec des personnes privées, des baux emphytéotiques sur des dépendances du domaine public, en vue de l'accomplissement, pour leur compte, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de leur compétence. Il ouvre aux collectivités territoriales la faculté de recourir à ces baux, à titre transitoire, jusqu'au 31 décembre 2007, pour des opérations immobilières liées aux besoins de la justice, de la police et de la gendarmerie nationales.

Il s'agit, là encore, de faciliter le préfinancement privé des opérations immobilières envisagées par les collectivités territoriales et de permettre le recours au crédit bail. En effet, les baux emphytéotiques prévus à l'article L.  451-1 du code rural, dont la durée est comprise entre 18 et 99 ans, confèrent au preneur privé un droit réel sur une dépendance du domaine public qu'il peut hypothéquer pour garantir les emprunts contractés en vue de financer la réalisation ou l'amélioration des ouvrages qu'il est chargé de construire.

· Enfin, le 3° du troisième paragraphe, qui insère un nouvel alinéa à l'article L. 1615-17 du code général des collectivités territoriales, ouvre aux collectivités le droit à une attribution du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pour les travaux réalisés sur la base du nouvel article L. 1311-4-1, à condition que ces bâtiments soient mis à disposition de l'Etat à titre gratuit. Il s'agit d'une dérogation temporaire aux règles d'éligibilité du FCTVA.

Il convient de rappeler que le FCTVA, créé par l'article 13 de la loi de finances rectificative pour 1975 (42) a pour objet de compenser, de manière forfaitaire et globale, les versements de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que les collectivités territoriales et les établissements publics bénéficiaires sont amenés à effectuer en raison de leurs investissements. En effet, les collectivités territoriales, comme les autres personnes morales de droit public ne sont pas en principe assujetties à la TVA. En conséquence, elle ne peuvent pas récupérer cette taxe sur la plupart de leurs investissements et conservent ainsi la charge de la TVA ayant grevé leur achat.

En principe, ne sont éligibles au FCTVA que les dépenses réelles d'investissement grevées de TVA, réalisées par les collectivités bénéficiaires, directement ou par l'intermédiaire d'un mandataire légalement autorisé, pour leur propre compte et dans le but d'accroître leur patrimoine pour les besoins d'une activité non assujettie à la TVA. Les immobilisations mises à disposition au profit d'un tiers qui ne répondent pas au principe de la patrimonialité de l'opération ne sont pas éligibles au FCTVA.

Le deuxième alinéa de l'article 49 de la loi de finance rectificative pour 1993 avait prévu un régime dérogatoire à ce principe général d'exclusion. Ainsi ouvraient droit au bénéfice du FCTVA, les dépenses liées à des constructions mises en chantier, acquises à l'état neuf ou ayant fait l'objet d'une rénovation en 1992 ou 1993, pour lesquelles les travaux étaient achevés au plus tard le 31 décembre 1994 (43) et qui étaient affectées à l'usage de la gendarmerie, à l'habilitation principale ou destinées au tourisme social, mais ce mécanisme n'a pas été prorogé.

La dérogation proposée est moins large puisqu'elle vise les constructions mises en chantier, acquises à l'état neuf ou ayant fait l'objet d'une rénovation avant le 31 décembre 2007 qui sont mises à disposition de l'Etat à titre gratuit uniquement.

Il est difficile d'apprécier le nombre de projets de construction auxquels les collectivités territoriales décideront de participer dans le cadre des dispositions proposées par l'article 3. Selon l'étude d'impact du projet de loi : « En se fondant sur l'observation des propositions faites à l'Etat au cours des trois dernières années, il est raisonnable d'estimer que ce sont quatre à cinq opérations de taille modeste ou moyenne - entre 1 et 5 millions d'euros - qui sont susceptibles d'être réalisés pendant cinq ans. La contribution des collectivités locales apporterait dans cette hypothèse un financement global de l'ordre de 75 à 100 millions d'euros sur la durée de la loi, hors le cas particulier de l'immobilier de la préfecture de police. »

La Commission a adopté l'article 3 sans modification.

Article 4

(Loi n° 72-662 du 13 juillet 1972,
art. L. 10 et L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite)

Prolongation d'activité de certains personnels de la gendarmerie

Le présent article prévoit que certains sous-officiers - du grade de gendarme à adjudant-chef inclus - et officiers - du grade de capitaine - de la gendarmerie pourront, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, bénéficier, lorsqu'ils atteignent la limite d'âge de leur grade, 55 ans en l'occurrence, d'une prolongation d'activité d'une année (44).

Une disposition analogue a déjà été mise en _uvre, dans la loi de finances rectificative pour 2001, en ce qui concerne certains fonctionnaires des corps de surveillance de l'administration pénitentiaire et des corps actifs de la police nationale (article 88, paragraphes I et II, de la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001).

Ce maintien en position d'activité sera pris en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension. Certes, il ne permettra pas aux bénéficiaires de prétendre à une durée d'activité supérieure à celle qui était la leur à la date de leur limite d'âge d'activité pour le calcul du montant de la pension : la période complémentaire s'ajoutera bien aux annuités déjà effectuées mais cet effet sera neutralisé par une réduction à due concurrence de la bonification, dite du cinquième, prévue à l'article L. 12 i) du code des pensions civiles et militaires de retraite (45). Toutefois, au cours de cette période d'activité complémentaire, ils poursuivront un déroulement de carrière normal sur les plans indiciaire et indemnitaire : leur droit à pension sera donc bien relevé, les traitements permettant de calculer ledit droit étant, dans la fonction publique, ceux constatés au cours des six derniers mois d'activité.

Ce dispositif a une portée transitoire, bien que cet aspect ne ressorte pas du texte de la loi : il est destiné à réduire les flux de départ à la retraite de certaines catégories de personnels afin de « lisser » les recrutements prévus dans la gendarmerie (7 000 emplois sur la période 2003-2007) ; il sera donc utilisé, en tant que de besoin et à titre subsidiaire, en complément des créations d'emploi à venir.

Selon des estimations recueillies auprès du ministère de la Défense, 20 à 30 % des effectifs concernés solliciteront et obtiendront un maintien en service d'une année supplémentaire (soit entre 200 et 300 fonctionnaires chaque année). Sa portée est donc plus limitée que la mesure précitée votée, pour la police et l'administration pénitentiaire, dans le cadre du collectif budgétaire pour 2001, qui autorisait d'ailleurs un maintien en activité durant plusieurs annuités jusqu'à l'âge de 60 ans.

La Commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article additionnel après l'article 4

(art. L. 135-L du livre des procédures fiscales)

Transmission à la police et à la gendarmerie nationales
de certaines informations détenues par les agents du Trésor public,
des douanes et des impôts

La Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à créer une procédure permettant aux agents du trésor public, des douanes et des impôts de transmettre aux policiers et aux gendarmes les informations qu'ils détiennent dans le cadre de la lutte contre les activités lucratives non déclarées portant atteinte à l'ordre public et à la sécurité publique, M. Jean-Pierre Blazy ayant toutefois exprimé ses réserves sur cette disposition (amendement n° 4).

Article 5

Évaluation annuelle

Le présent article prévoit que les dispositions du projet de loi feront l'objet d'une évaluation annuelle par une instance extérieure aux services concernés, afin de mesurer les résultats obtenus par la police et la gendarmerie et de les rapporter aux moyens engagés. L'importance de cette mesure ne doit pas être mésestimée : la « culture de résultat » est une notion qui n'est pas suffisamment présente dans l'administration en général.

La nécessité de renforcer l'évaluation des politiques publiques est d'autant plus justifiée dans le cas de la sécurité intérieure que son coût, qui excède largement les seuls montants inscrits au bénéfice de la police dans le budget du ministère de l'intérieur (environ 5 milliards d'euros en 2002), est d'ores et déjà considérable. Dans un article récemment publié sur la question, M. Cyrille Pierre, conseiller référendaire à la Cour des comptes, l'évaluait à 2 % du produit intérieur brut. Il incluait, en effet, tous les crédits des administrations contribuant à une mission de protection des personnes et des biens, de défense de l'ordre public et des institutions, soit environ 14,18 milliards d'euros en 2001. Il observait, par ailleurs, que l'Etat n'est pas le seul acteur de la sécurité intérieure : en prenant en compte les actions conduites par les collectivités locales et certaines personnes privées (RATP, SNCF), le total des dépenses directement liées à la sécurité intérieure dépasserait les 16 milliards d'euros par an. En intégrant dans ce bilan le chiffre d'affaires global de la sécurité privée, qui avoisinait les 9,91 milliards d'euros en 1999 (dont 1,98 milliard au titre de la sécurité humaine stricto sensu), on aboutit bien à un ordre de grandeur, avant même la mise en _uvre des dispositions prévues par le présent projet de loi, de 26 milliards d'euros, soit près de 2 % du PIB.

Certes, l'évaluation commence à se développer : ainsi, depuis quelques années, au travers de la mise en _uvre du plan d'action « Gendarmerie 2000 », la gendarmerie s'est constituée une expérience en matière de gestion par objectif et d'engagement de résultats à atteindre. Mais elle demeure très insuffisante. Il est d'ailleurs significatif qu'aucun document d'évaluation de la sécurité intérieure ne soit joint aux projets de lois de finances, alors même que d'autres grandes politiques publiques comparables font l'objet d'un fascicule d'information annuel (la défense de la Nation, la politique de la ville, l'action extérieure de la France...).

A cet égard, il est certain que la loi organique n° 2001-692 relative aux lois de finances du 1er août 2001 va progressivement rénover l'usage des crédits consacrés à la sécurité intérieure. Elle prévoit, notamment, que les crédits de chaque ministère seront regroupés par mission et par programme, chacun d'entre eux devant présenter un rapport annuel de performance. Cette nouvelle présentation, axée sur les résultats plutôt que sur une revue détaillée des moyens, favorisera le développement dans l'administration d'un management par objectif. La mutation est donc d'ores et déjà prise en compte par le présent projet de loi, l'annexe I relative aux orientations de la politique de sécurité intérieure indiquant que : « Les résultats obtenus en matière de lutte contre l'insécurité seront régulièrement évalués et comparés aux objectifs fixés. Les responsables locaux de la police et de la gendarmerie rendront compte de ces résultats, chacun pour ce qui les concerne, et il en sera tenu compte dans leur progression de carrière ».

A terme, la réforme de l'ordonnance organique relative aux lois de finances impliquera bien de regrouper l'ensemble des crédits concourant à la réalisation de la mission spécifique que constitue la sécurité intérieure. La Cour des comptes le relevait d'ailleurs déjà dans son rapport précité sur L'exécution des lois de finances pour l'année 2000 : « Dans ce cadre, la question du rapprochement (au moins budgétaire) des programmes et sous-programmes de la police et de la gendarmerie se posera vraisemblablement ». Dans l'immédiat, dès lors que la Nation réalise pour sa sécurité un effort aussi considérable que celui programmé par le projet de loi, il est normal d'introduire une procédure d'évaluation pour apprécier l'efficacité des actions consécutivement engagées et, en quelque sorte, mesurer leur rapport « qualité-prix ».

La Commission a adopté un amendement du rapporteur, tendant à prévoir la transmission au Parlement de l'évaluation des actions de la police et de la gendarmerie (amendement n° 5).

Puis elle a adopté l'article 5 ainsi modifié.

Article 6

Application à l'outre-mer

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'extension et à l'adaptation des dispositions de l'article 3 du projet de loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles de Wallis et Futuna, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Il doit s'apprécier au regard des principes qui régissent l'application des lois métropolitaines dans ces territoires et des règles qui encadrent le recours à l'article 38 de la Constitution.

· Les territoires d'outre-mer, la Polynésie française et les îles de Wallis et Futuna, ainsi que la Nouvelle Calédonie sont régis par le principe de spécialité législative : à l'exception des lois de souveraineté (46), les lois édictées pour la France métropolitaine ne leur sont applicables qu'en vertu d'une disposition expresse. Par ailleurs, les assemblées territoriales de ces territoires doivent être consultées pour les lois touchant à leur organisation particulière (47).

La symétrie entre le principe de spécialité et la procédure de consultation n'est pas totale et il semble, en l'état actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qu'il existe trois types de lois applicables dans les territoires d'outre-mer : les lois de souveraineté, qui ne nécessitent ni mention d'applicabilité, ni consultation préalable ; les lois ne modifiant pas l'organisation particulière des territoires, qui doivent comporter une disposition spécifique d'applicabilité, mais n'impliquent pas de consultation de l'assemblée territoriale ; enfin, les lois qui modifient cette organisation particulière et nécessitent à la fois une mention spécifique et une consultation préalable.

La collectivité territoriale de Mayotte relève désormais d'un statut proche de celui des départements d'outre-mer. En effet, la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2000 a fortement atténué le principe de spécialité législative qui lui était applicable. A l'instar des conseils généraux des départements d'outre-mer, le conseil général de Mayotte doit être consulté sur les projets de texte comportant des dispositions d'adaptation du régime législatif ou de l'organisation administrative de la collectivité. Le régime législatif de Saint-Pierre-et-Miquelon, dont le statut est également très proche de celui d'un département d'outre-mer, repose sur le principe de l'assimilation ; les lois métropolitaines, éventuellement adaptées, sont applicables de plein droit. La consultation préalable du conseil général sur les avant-projets de loi ou sur les projets de décret portant dispositions spéciales pour l'archipel est obligatoire en application de l'article 24 de la loi n° 85-595 du 11 juin 1985 relative au statut de Saint-Pierre-et-Miquelon.

La nouvelle politique de sécurité intérieure définie par le Gouvernement doit bien évidemment s'appliquer outre-mer. Cependant, les articles 1, 2 et 5 du présent projet de loi n'ayant pas d'effets normatifs directs, il n'est pas nécessaire de prévoir leur extension dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les dispositions de l'article 4, qui permettent à certains militaires de la gendarmerie atteignant la limite d'âge de leur grade de bénéficier d'une prolongation d'activité, s'appliqueront à l'ensemble de ces territoires sans qu'il soit besoin de le spécifier. En effet, elles concernent le statut de la fonction publique et relèvent, à ce titre, de la définition jurisprudentielle des lois de souveraineté. En revanche, il est nécessaire de prévoir des mesures d'extension et d'adaptation des dispositions de l'article 3 visant à faciliter les constructions immobilières pour les besoins de la justice, de la gendarmerie et de la police nationales.

Il est sans doute préférable d'insérer dans chaque projet de loi les dispositions d'extension et d'adaptation à l'outre-mer : cela permet aux parlementaires de mesurer pleinement la portée des dispositions étendues outre-mer dans le contexte global des dispositions proposées et évite tout décalage dans le temps. Néanmoins, compte tenu de l'engagement pris par le Gouvernement de déposer le présent projet de loi sur le bureau de notre assemblée au début de cette session extraordinaire, il était impossible de respecter les procédures spécifiques à l'outre-mer et d'obtenir l'avis des assemblées territoriales concernées en temps utile, c'est-à-dire avant l'examen du texte par le Conseil d'Etat.

· Dans ce contexte, permettre au Gouvernement de recourir à des ordonnances pour prendre les mesures législatives nécessaires à l'extension et à l'adaptation des dispositions de l'article 3 paraît parfaitement opportun. Cette utilisation de l'article 38 de la Constitution répond par ailleurs tout à fait aux impératifs constitutionnels.

L'article 38 de la Constitution permet au Gouvernement « pour l'exécution de son programme, de demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Ainsi, à la demande du Gouvernement, le Parlement peut se dessaisir momentanément de sa compétence, sous réserve du respect de certaines conditions précisées par le Conseil constitutionnel. Le Gouvernement doit d'abord « indiquer avec précision au Parlement, lors du dépôt d'un projet de loi d'habilitation et pour la justification de la demande présentée par lui, quelle est la finalité des mesures qu'il propose de prendre » (48). Ensuite, le domaine de l'habilitation est limité à celui des lois ordinaires. Le juge constitutionnel a ainsi estimé qu'une loi d'habilitation ne permettait pas l'intervention d'ordonnances dans des domaines relevant de lois organiques.

A ces égards, cet article ne soulève pas de difficultés. Le domaine de l'habilitation est précisément déterminé et sa finalité clairement établie. Il est, par ailleurs, indiqué que les autorités compétentes des territoires concernées seront consultées sur les projets d'ordonnance. Enfin, le calendrier retenu pour l'habilitation proposée est précisé : les ordonnances seront prises au plus tard le dernier jour du neuvième mois suivant la promulgation de la loi tandis que le projet de loi portant ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement, au plus tard, le dernier jour du douzième mois suivant sa promulgation.

La Commission a adopté l'article 6 sans modification.

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* *

La Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (n° 36) modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte de référence

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Texte du projet de loi

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Propositions de la Commission

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Article 1er

Les orientations de la politique de sécurité intérieure figurant à l'annexe I sont approuvées.

Article 1er

(Sans modification) (1).

(1) La Commission a adopté trois amendements : cf. amendements nos 2 et 3, et amendement n° 1 de M. Jérôme Rivière dans l'annexe I.

Article 2

La programmation des moyens de la sécurité intérieure pour les années 2003 à 2007 figurant à l'annexe II est approuvée.

Article 2

(Sans modification).

Les crédits prévus pour l'exécution de la programmation prévue par la présente loi sont fixés à 5,6 milliards d'euros sur cinq ans. Ils couvrent le coût des créations d'emplois et des programmes d'équipement de la gendarmerie nationale et de la police nationale, les mesures relatives à la situation des personnels et les mesures urgentes prises pour rétablir la capacité opérationnelle des forces. Ils s'ajoutent à la reconduction annuelle des moyens ouverts en 2002, à l'évolution du point fonction publique et aux effets du glissement-vieillesse-technicité sur le coût des rémunérations.

La loi de programmation militaire intégrera dans les ressources de la gendarmerie nationale la dotation supplémentaire prévue par la présente loi.

13 500 emplois seront créés dans la police nationale et la gendarmerie nationale entre 2003 et 2007.

Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985
relative à la maîtrise d'ouvrage
publique et à ses rapports avec la maîtrise d'_uvre privée

Art. 7. -  La mission de maîtrise d'_uvre que le maître de l'ouvrage peut confier à une personne de droit privé ou à un groupement de personnes de droit privé doit permettre d'apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme mentionné à l'article 2.

Pour la réalisation d'un ouvrage, la mission de maîtrise d'_uvre est distincte de celle d'entrepreneur.

Article 3

I. -  Par dérogation aux dispositions des articles 7 et 18 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'_uvre privée, l'Etat peut confier à une personne ou à un groupement de personnes, de droit public ou privé, une mission portant à la fois sur la conception, la construction, l'aménagement, l'entretien et la maintenance d'immeubles affectés à la police ou à la gendarmerie nationales.

Article 3

(Sans modification).

Le maître de l'ouvrage peut confier au maître d'oeuvre tout ou partie des éléments de conception et d'assistance suivants :

1° Les études d'esquisse ;

2° Les études d'avant-projets ;

3° Les études de projet ;

4° L'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation du contrat de travaux ;

5° Les études d'exécution ou l'examen de la conformité au projet et le visa de celles qui ont été faites par l'entrepreneur ;

6° La direction de l'exécution du contrat de travaux ;

7° L'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier ;

8° L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.

Toutefois, pour les ouvrages de bâtiment, une mission de base fait l'objet d'un contrat unique. Le contenu de cette mission de base, fixé par catégories d'ouvrages conformément à l'article 10 ci-après, doit permettre :

-  au maître d'_uvre, de réaliser la synthèse architecturale des objectifs et des contraintes du programme, et de s'assurer du respect, lors de l'exécution de l'ouvrage, des études qu'il a effectuées ;

-  au maître de l'ouvrage, de s'assurer de la qualité de l'ouvrage et du respect du programme et de procéder à la consultation des entrepreneurs, notamment par lots séparés, et à la désignation du titulaire du contrat de travaux.

Art. 18. - I.  -  Nonobstant les dispositions du titre II de la présente loi, le maître de l'ouvrage peut confier par contrat à un groupement de personnes de droit privé ou, pour les seuls ouvrages d'infrastructure, à une personne de droit privé, une mission portant à la fois sur l'établissement des études et l'exécution des travaux, lorsque des motifs d'ordre technique rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage. Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa en modifiant, en tant que de besoin, pour les personnes publiques régies par le code des marchés publics, les dispositions de ce code.

II -  Un décret fixe les conditions dans lesquelles le maître de l'ouvrage peut adapter les dispositions découlant des articles 7, 8, 10 et 11 inclus lorsqu'il confie à des personnes de droit privé des missions portant sur des ouvrages réalisé à titre de recherche, d'essais ou d'expérimentation.

L'exécution de cette mission résulte d'un marché passé entre l'Etat et la personne ou le groupement de personnes selon les procédures prévues par le code des marchés publics. Si le marché est alloti, les offres portant simultanément sur plusieurs lots peuvent faire l'objet d'un jugement global.



Code général des collectivités
territoriales

Art. L. 1311-2. -  cf. infra.

Les marchés passés par l'Etat pour l'exécution de cette mission ne peuvent comporter de stipulations relevant des conventions mentionnées aux articles L. 34-3-1 et L. 34-7-1 du code du domaine de l'Etat et à l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales.

II.- Le code du domaine de l'Etat est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 34-3, il est inséré un article L. 34-3-1 ainsi rédigé :

« Article L. 34-3-1.- L'Etat et le titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public peuvent conclure un bail portant sur des bâtiments à construire par le titulaire pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales et comportant, au profit de l'Etat, une option lui permettant d'acquérir, avant le terme fixé par l'autorisation d'occupation, les installations ainsi édifiées. Dans ce cas, le bail comporte des clauses permettant de préserver les exigences du service public.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. Il précise les conditions de passation du bail ainsi que les conditions suivant lesquelles l'amortissement financier peut être pris en compte dans la détermination du montant du loyer ».



Code du domaine de l'Etat

Art. L. 34-7. -  Dans le cadre des titres d'occupation prévus par les articles L. 34-1 et L. 34-5, la réalisation des ouvrages, constructions et installations, à l'exclusion de ceux affectés à un service public et aménagés à cet effet ou affectés directement à l'usage du public ainsi que des travaux exécutés pour une personne publique dans un but d'intérêt général, peut donner lieu à la conclusion de contrats de crédit-bail par le titulaire du droit d'occupation.

2° Après l'article L. 34-7, il est inséré un article L. 34-7-1 ainsi rédigé :

« Article L. 34-7-1. -  Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 34-7, le financement des constructions mentionnées à l'article L. 34-3-1 peut donner lieu à la conclusion de contrats de crédit-bail. Dans ce cas, le contrat comporte des clauses permettant de préserver les exigences du service public.

La conclusion de tels contrats de crédit-bail au bénéfice d'organismes dans lesquels l'Etat ou l'établissement public gestionnaire du domaine apporte un concours financier ou détient, directement ou indirectement, une participation financière permettant d'exercer un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion est soumise à un agrément de l'Etat. Cet agrément peut être refusé si l'opération se traduit par un accroissement des charges ou une diminution des ressources de l'Etat. Les modalités de cet agrément sont précisées par décret en Conseil d'Etat.

« Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 34-7 sont applicables. »

III. -  Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :


Code général des collectivités
territoriales

1° Le premier alinéa de l'article L. 1311-2 est remplacé par les dispositions suivantes :

Art. L. 1311-2. -  Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet, en faveur d'une personne privée, d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence.

« Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l'objet d'un bail emphytéotique prévu à l'article L. 451-1 du code rural, en vue de l'accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d'une mission de service public ou en vue de la réalisation d'une opération d'intérêt général relevant de sa compétence ou, jusqu'au 31 décembre 2007, liée aux besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales. »

Un tel bail peut être conclu même si le bien sur lequel il porte, en raison notamment de l'affectation du bien résultant soit du bail ou d'une convention non détachable de ce bail, soit des conditions de la gestion du bien ou du contrôle par la personne publique de cette gestion, constitue une dépendance du domaine public, sous réserve que cette dépendance demeure hors du champ d'application de la contravention de voirie.

Code rural

Art. L. 451-1. -  Le bail emphytéotique de biens immeubles confère au preneur un droit réel susceptible d'hypothèque ; ce droit peut être cédé et saisi dans les formes prescrites pour la saisie immobilière.

Ce bail doit être consenti pour plus de dix-huit années et ne peut dépasser quatre-vingt-dix-neuf ans ; il ne peut se prolonger par tacite reconduction.

2° Après l'article L. 1311-4, il est inséré un article L. 1311-4-1 ainsi rédigé :

« Article L. 1311-4-1. - Jusqu'au 31 décembre 2007, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale peuvent construire, y compris sur les dépendances de leur domaine public, acquérir ou rénover des bâtiments destinés à être mis à la disposition de l'Etat pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales.

« Une convention entre l'Etat et la collectivité ou l'établissement propriétaire précise notamment les engagements financiers des parties, le lieu d'implantation de la ou des constructions projetées et le programme technique de construction. Elle fixe également la durée et les modalités de la mise à disposition des constructions.

« Les constructions mentionnées au présent article peuvent donner lieu à la conclusion de contrats de crédit-bail. Dans ce cas, le contrat comporte des clauses permettant de préserver les exigences du service public. »

Code général
des collectivités territoriales

Art. L. 1615-7. -  Les immobilisations cédées ou mises à disposition au profit d'un tiers ne figurant pas au nombre des collectivités ou établissements bénéficiaires du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée ne peuvent donner lieu à une attribution dudit fonds.

3° Avant le dernier alinéa de l'article L. 1615-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

Toutefois, constituent des opérations ouvrant droit à une attribution du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée les constructions mises en chantier, acquises à l'état neuf ou ayant fait l'objet d'une rénovation en 1992 ou en 1993, pour lesquelles les travaux sont achevés au plus tard le 31 décembre 1995 :

a) Affectées à l'usage de gendarmerie et appartenant à une collectivité territoriale ;

b) Affectées à l'habitation principale, dans les conditions suivantes :

-  les constructions appartiennent à une commune ou à un groupement de communes situés en dehors d'une agglomération urbaine ;

-  la population de la commune sur le territoire de laquelle sont érigées les constructions est inférieure à 3 500 habitants ;

-  les constructions sont érigées sur le territoire de la commune ou du groupement de communes auxquels elles appartiennent et ne regroupent pas plus de cinq logements ;

-  les constructions font l'objet d'un conventionnement par l'Etat ;

c) Données en gestion par des communes de moins de 3 500 habitants à des organismes à but non lucratif et destinées au tourisme social.

« Constituent également des opérations ouvrant droit à une attribution du Fonds de compensation pour la taxe pour la valeur ajoutée, les constructions mises en chantier, acquises à l'état neuf ou ayant fait l'objet d'une rénovation, mentionnées à l'article L. 1311-4-1, pour lesquelles les travaux ont reçu un commencement d'exécution au plus tard le 31 décembre 2007 et qui sont mises à disposition de l'Etat à titre gratuit. »

Par dérogation, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale bénéficient des attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses d'investissement exposées sur leurs immobilisations affectées à l'usage d'alpage.















Code des pensions civiles
et militaires de retraite

Art. L. 10. -  Les services accomplis postérieurement à la limite d'âge ne peuvent être pris en compte dans une pension, sauf dans les cas exceptionnels prévus par une loi.

Art. L. 26 bis. -  Le fonctionnaire maintenu en fonctions temporairement et dans l'intérêt du service et qui, au moment de sa radiation des cadres, occupe un emploi de l'Etat même en position de détachement, ne peut entrer en jouissance de sa pension qu'à compter du jour de la cessation effective du traitement. La période de maintien en fonctions ne donne pas droit à supplément de liquidation.

Article 4

Nonobstant les dispositions de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires relatives aux limites d'âge des militaires de la gendarmerie, les sous-officiers de gendarmerie du grade de gendarme à adjudant-chef inclus et les officiers de gendarmerie du grade de capitaine atteignant la limite d'âge de leur grade, peuvent, sur leur demande et sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en position d'activité pour une année supplémentaire.

Nonobstant les dispositions des articles L. 10 et L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, cette prolongation d'activité est prise en compte dans la liquidation du droit à pension. Toutefois, la bonification obtenue au titre du i) de l'article L. 12 du même code est réduite à due concurrence de la durée des services accomplis au-delà de la limite d'âge.

Article 4

(Sans modification).

Art. L. 12. -  Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par règlement d'administration publique, les bonifications ci-après :

a) Bonification de dépaysement pour les services civils rendus hors d'Europe ;

b) Bonification accordée aux femmes fonctionnaires pour chacun de leurs enfants légitimes, de leurs enfants naturels dont la filiation est établie ou de leurs enfants adoptifs et, sous réserve qu'ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt et unième année révolue, pour chacun des autres enfants énumérés au paragraphe II de l'article L. 18 ;

c) Bénéfices de campagne, notamment en temps de guerre et pour services à la mer et outre-mer.

Les fonctionnaires et agents féminins ayant servi en qualité d'infirmières ou d'ambulancières pendant les guerres 1914-1918 et 1939-1945, les campagnes d'Indochine et de Corée bénéficient des avantages réservés aux fonctionnaires anciens combattants.

Cette disposition est étendue aux agents féminins dont la pension a déjà été liquidée ou a fait l'objet d'une péréquation ;

d) Bonification pour l'exécution d'un service aérien ou sous-marin commandé. Le décompte des coefficients applicables aux heures de vol ou à la durée des services sous-marins est effectué conformément aux dispositions en vigueur au moment où s'est ouvert le droit à ces bonifications ;

e) Bonification accordée aux fonctionnaires demeurés dans les régions envahies ou les localités bombardées au cours de la guerre 1914-1918 ;

f) Bonification accordée aux agents des postes et télécommunications ayant servi en temps de guerre à bord des navires câbliers ;

g) Bonification accordée aux déportés politiques ;

h) Bonification accordée aux professeurs d'enseignement technique au titre du stage professionnel exigé pour avoir le droit de se présenter au concours par lequel ils ont été recrutés ;

i) Une bonification du cinquième du temps de service accompli est accordée dans la limite de cinq annuités à tous les militaires à la condition qu'ils aient accompli au moins quinze ans de services militaires effectifs ou qu'ils aient été rayés des cadres pour invalidité ; le maximum de bonifications est donné aux militaires qui quittent le service à cinquante-cinq ans ; la bonification est diminuée d'une annuité pour chaque année supplémentaire de service jusqu'à l'âge de cinquante-huit ans.

Livre des procédures fiscales

Titre II.  Le contrôle de l'impôt

Chapitre III. -  Le secret professionnel en matière fiscale

Section II. -  Dérogations à la règle du secret professionnel

II. - Dérogations au profit de certaines administrations, autorités administratives, collectivités, services et organismes publics

Article additionnel

Après l'article L. 135 K du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 135 L ainsi rédigé :

« Art. L. 135 L. -  Dans le cadre de la lutte contre les activités lucratives non déclarées portant atteinte à l'ordre public et à la sécurité publique, les agents de la direction générale de la comptabilité publique, de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction générale des impôts doivent répondre aux demandes formulées par tout moyen par les services de police et de gendarmerie concernant les renseignements et documents de nature financière ou fiscale, sans que puisse être opposée l'obligation au secret. »

(amendement n° 4)

Article 5

L'application de la présente loi fera l'objet d'une évaluation annuelle par une instance extérieure aux services concernés permettant de mesurer les résultats obtenus par la police et la gendarmerie nationales et de les rapporter aux moyens engagés.

Article 5

Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement un rapport d'évaluation, réalisé par une instance extérieure aux services concernés, portant sur la mise en _uvre des dispositions de la présente loi. Ce bilan fera apparaître, notamment, les résultats obtenus par la police et la gendarmerie nationales et les rapportera aux moyens engagés.

(amendement n° 5)


Constitution du 4 octobre 1958

Art. 38. - Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Les ordonnances sont prises en Conseil des Ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation.

Article 6

Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution et sous réserve de la compétence de la loi organique, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnance, les mesures de nature législative permettant de rendre applicable, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de l'article 3 de la présente loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon.

Article 6

(Sans modification).

A l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif.

Les projets d'ordonnance sont soumis pour avis :




Loi organique n° 96-312
du 12 avril 1996
portant statut d'autonomie
de la Polynésie française

Art. 32. -  Le conseil des ministres est obligatoirement consulté suivant le cas par le ministre chargé des territoires d'outre-mer ou par le haut-commissaire sur les questions ou dans les matières suivantes :

1° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte, aux institutions compétentes prévues respectivement par la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et par l'article L. 3551-12 du code général des collectivités territoriales ;

1° Définition et modification de l'implantation des établissements d'enseignement qui relèvent de l'Etat et des formations qui y sont assurées ainsi que des adaptations de leurs programmes pédagogiques ;

2° Préparation des plans opérationnels de secours nécessaires pour faire face aux risques majeurs et aux catastrophes et coordination des moyens concourant à la sécurité civile ;

3° Conditions de la desserte aérienne entre la Polynésie française et tout autre point du territoire national ;

4° Contrôle de l'entrée et du séjour des étrangers, y compris la délivrance de visas pour un séjour supérieur à trois mois ; pour l'application du présent alinéa, il est institué un comité consultatif composé à parts égales de représentants de l'Etat et de représentants du territoire, dont les modalités de fonctionnement sont fixées par décret ;

5° Création, suppression, modification des subdivisions administratives territoriales, et nomination par le gouvernement de la République des chefs de subdivision ;

6° Dispositions réglementaires prises par l'Etat dans le cadre de sa compétence et touchant à l'organisation particulière de la Polynésie française.

Le conseil des ministres dispose d'un délai d'un mois pour émettre son avis.

Art. 69. -  Dans tous les cas où son avis doit être recueilli, l'assemblée de la Polynésie française dispose d'un délai de deux mois pour se prononcer. Ce délai est réduit à un mois dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article 73 de la présente loi.

Loi organique n° 99-209
du 19 mars 1999
relative à la Nouvelle-Calédonie

Art. 90. -  Le congrès est consulté par le haut-commissaire, avant leur examen par le Conseil d'Etat, sur les projets de loi et sur les projets d'ordonnance, lorsqu'ils introduisent, modifient ou suppriment des dispositions spécifiques à la Nouvelle-Calédonie.

Le congrès dispose d'un délai d'un mois pour rendre son avis. Ce délai est réduit à quinze jours, en cas d'urgence, à la demande du haut-commissaire. Le délai expiré, l'avis est réputé avoir été donné.

Le congrès est également consulté, dans les mêmes conditions, avant leur adoption en première lecture par la première assemblée saisie, sur les propositions de loi comportant de telles dispositions.

En dehors des sessions, la commission permanente émet, dans les délais mentionnés au deuxième alinéa, les avis prévus par le présent article.

Code général
des collectivités territoriales

Art. L. 3551-12. -  Le conseil général est consulté sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret comportant des dispositions d'adaptation du régime législatif ou de l'organisation administrative des départements ou sur les projets de décret pris pour l'application du présent livre.

L'avis du conseil général est réputé acquis dans un délai d'un mois à compter de la saisine. Ce délai est réduit à quinze jours en cas d'urgence sur demande du représentant de l'Etat.

2° Lorsque leurs dispositions sont relatives aux îles Wallis et Futuna ou à Saint-Pierre et Miquelon, respectivement à l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna et au conseil général de Saint-Pierre et Miquelon. L'avis est alors émis dans le délai d'un mois ; ce délai expiré, l'avis est réputé avoir été donné.

Les projets d'ordonnance comportant des dispositions relatives à la Polynésie française sont en outre soumis à l'assemblée de ce territoire.

Les ordonnances seront prises, au plus tard, le dernier jour du neuvième mois suivant la promulgation de la présente loi. Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement, au plus tard, le dernier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi.

ANNEXE I

RAPPORT SUR LES ORIENTATIONS
DE LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

La sécurité est un droit fondamental et l'une des conditions de l'exercice des libertés individuelles et collectives.

L'Etat a le devoir d'assurer la sécurité en veillant sur l'ensemble du territoire de la République à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre public, à la protection des personnes et des biens.

Or de 1981 à 2001, l'ensemble des faits constatés par la police nationale et la gendarmerie nationale ont augmenté de 40 % et pour la première fois, la barre des quatre millions de crimes et de délits a été franchie en 2001.

Deux tendances se dégagent de cette période de vingt ans :

-  l'une quantitative, l'augmentation exponentielle de la délinquance, que les chiffres illustrent de manière éloquente ;

-  l'autre qualitative, l'importance prise par les violences contre les personnes, qui ne sont pas seulement liées à la classique délinquance d'appropriation mais qui prennent de plus en plus la forme de violences gratuites, voire de violences d'humiliation.

Cette situation qui frappe particulièrement les personnes les plus faibles porte atteinte aux principes fondamentaux de liberté, d'égalité et de fraternité et constitue une menace pour la cohésion nationale.

Ce constat de la réalité quotidienne doit conduire à la définition de priorités opérationnelles s'agissant notamment de :

-  la montée de l'insécurité hors des grandes agglomérations. C'est l'indication nette que certains malfaiteurs n'hésitent pas à frapper loin de leurs bases en tirant profit de l'amélioration des réseaux de transport. C'est surtout le signe que de nouvelles catégories de la population ont basculé dans la délinquance et que des comportements délictuels qui se manifestaient presque exclusivement en milieu très urbanisé ont gagné les petites villes, voire les zones rurales. Ceci constitue une situation nouvelle à laquelle notre pays est confronté. Elle impose de revoir la répartition des zones de compétences entre les forces de sécurité intérieure et d'adapter l'organisation ainsi que les modes de fonctionnement des services ;

-  la multiplication des zones où l'Etat n'exerce plus de façon suffisante la protection à laquelle nos concitoyens ont droit. L'éradication des zones de non-droit livrées à l'économie souterraine et à la loi des bandes constitue un devoir prioritaire ;

-  la montée de la délinquance des mineurs dont la part dans la délinquance de voie publique est passée de 28 % en 1995 à 36 % en 2001. Cette délinquance dont les auteurs sont de plus en plus jeunes et de plus en plus violents s'alimente du sentiment d'impunité. Il importe de donner aux services enquêteurs les moyens nécessaires pour mettre un terme à cette situation inacceptable ;

-  le développement du trafic de drogues qui génère en amont comme en aval, de multiples formes de délinquance et constitue un fléau sanitaire qui frappe en priorité les jeunes. Dans ce contexte, la nocivité de toutes les drogues doit être reconnue et la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants doit être rejetée.

Derrière les faits constatés de criminalité et de délinquance, il y a d'abord des victimes. Lorsqu'on indique que les faits constatés ont globalement progressé de 13,92 % entre 1998 et 2001, cela signifie qu'il y a eu 487 267 victimes supplémentaires, soit plus que la population de la ville de Lyon. La prise en compte par l'Etat de cette dimension humaine de la délinquance, à tous les stades de la procédure, est aussi un devoir. L'accueil, l'information et l'aide aux victimes sont donc pour les services de sécurité intérieure une priorité. Une « charte de qualité » en fixant les modalités sera établie pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale.

La loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 a, pour la première fois, posé les principes et les orientations permanents de la politique de sécurité.

Ces principes et ces orientations constituent des acquis, sur le fondement desquels une nouvelle étape doit être franchie.

En effet, la création, voulue par le Président de la République d'un ministère en charge de la sécurité intérieure, donne à l'Etat des moyens d'action nouveaux dont il importe de tirer les conséquences.

Pour exercer sa mission de sécurité intérieure, l'Etat dispose, à titre principal, d'une part de la police nationale et d'autre part de la gendarmerie nationale dont les personnels ont le statut militaire et qui conserve son rattachement organique au ministère de la défense.

Cette spécificité permet à la gendarmerie nationale de constituer, au sein des forces de sécurité intérieure un élément de continuité de l'action de l'Etat avec le domaine de la défense.

Le ministre en charge de la sécurité intérieure bénéficie du concours d'autres services de l'Etat, notamment de la direction générale des douanes et des droits indirects, de la direction générale des impôts et de la direction générale de la concurrence et de la consommation.

Les orientations qui sont présentées ci-après constituent le programme d'action en matière de sécurité intérieure que le Gouvernement se propose, avec le concours du Parlement de mettre en _uvre dans les cinq prochaines années.

Il s'articule autour de deux objectifs principaux :

-  celui de fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure et d'en tirer les conséquences sur les missions et l'organisation des forces de sécurité intérieure et le rôle des autres acteurs publics ou privés ;

-  celui de donner aux services de sécurité intérieure un cadre juridique rénové leur permettant de lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance. Certaines des dispositions correspondant à cet objectif figurent dans la loi d'orientation et de programmation relative à la justice.

Un code de la sécurité intérieure regroupant l'ensemble des textes qui intéressent la sécurité publique et la sécurité civile sera préparé.

PREMIÈRE PARTIE : PRINCIPES GÉNÉRAUX

I. Fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure

Les orientations présentées ci-après fixent la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure.

Au niveau national, le Conseil de Sécurité Intérieure, présidé par le Président de la République, détermine les orientations générales de la politique menées dans le domaine de la sécurité intérieure et fixe les grandes priorités.

Les objectifs nationaux, approuvés par le Gouvernement, sont définis et mis en _uvre par le ministre en charge de la sécurité intérieure.

Cette organisation nationale est transposée au niveau départemental où le Préfet assure la coordination de l'ensemble du dispositif de sécurité intérieure, sans préjudice des compétences de l'autorité judiciaire.

Les objectifs nationaux sont déclinés par les conférences départementales de sécurité co-présidées par le Préfet et le Procureur de la République, en tenant compte des caractéristiques de chaque département.

Une politique de gestion par objectifs sera instaurée. Les résultats obtenus en matière de lutte contre l'insécurité seront régulièrement évalués et comparés aux objectifs fixés. Les responsables locaux de la police et de la gendarmerie rendront compte de ces résultats, chacun pour ce qui les concerne, et il en sera tenu compte dans leur progression de carrière.

Enfin, l'ancrage des forces de sécurité intérieure dans la démocratie locale sera assuré grâce à la mise en place de conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, qui constituent l'instance de concertation sur les priorités de la lutte contre l'insécurité. Informés régulièrement des indicateurs de la délinquance et de l'ensemble des moyens mis en _uvre par les services de police et les unités de gendarmerie, ils seront en mesure d'exprimer les attentes de la population en matière de sécurité de proximité. En matière de prévention de la délinquance, cette action de proximité sera conduite en coordination avec le conseil départemental de prévention.

Sur le plan opérationnel, l'accent sera mis sur les formes d'action permettant d'associer tous les services de l'Etat concernés :

-  d'une part, au niveau national, par le renforcement des offices centraux de police judiciaire déjà existants, chargés de lutter contre les formes spécialisées de délinquance, et par la création d'un nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite, ainsi que la transformation de la cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante (CILDI) en office central ;

-  d'autre part, au niveau local, grâce aux groupes d'interventions régionaux (GIR), destinés à lutter contre la délinquance violente, les trafics illicites et l'économie souterraine, en particulier dans les zones sensibles. Ces groupes permettront de conjuguer l'action des services de police et de gendarmerie avec celle des douanes, des services fiscaux et des services de la concurrence et de la répression des fraudes ainsi que des directions du travail et de l'emploi.

Par ailleurs, il appartient aussi à l'Etat de veiller à ce que les maires et leurs services exercent leurs fonctions dans un cadre qui organise la complémentarité avec les services de l'Etat.

La conclusion de conventions de coopération entre le représentant de l'Etat et le Maire au sujet des rapports entre les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale d'une part et les polices municipales d'autre part sera encouragée.

En Polynésie française, les agents de la police municipale feront l'objet d'un agrément conjoint du Haut-commissaire et du Procureur de la République et seront assermentés pour exercer leurs fonctions d'agent de police judiciaire.

[De manière plus générale, les moyens de renforcer l'action des polices municipales seront recherchés (amendement n° 2).]

Enfin, l'Etat veillera à ce que les autres acteurs de la sécurité que sont les professions de sécurité exercent leurs activités dans des conditions qui permettent les complémentarités. C'est ainsi que la loi du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds sera étendue à la collectivité départementale de Mayotte.

Il incombe également à l'Etat de veiller à ce que les différentes réglementations en vigueur incluent la dimension relative à la sécurité. Dans ce domaine, seront proposées notamment, dans le respect des normes européennes, des dispositions prévoyant la neutralisation des téléphones portables volés ainsi que l'immobilisation automatique des véhicules pour faire obstacle aux vols.

II. Utiliser de manière plus cohérente et efficace les forces de sécurité intérieure pour faire face aux nouvelles exigences de la sécurité

Le présent programme d'action gouvernementale vise à mieux garantir le droit des citoyens à la sécurité en faisant reculer la délinquance. Tous les moyens humains et matériels nécessaires seront mis en _uvre pour faire disparaître les zones de non-droit du territoire français.

A- Définir la nouvelle doctrine d'emploi des forces mobiles.

Les forces mobiles ont été créées dans un contexte historique particulier marqué par des périodes d'émeutes et de troubles collectifs.

La démocratie apaisée que notre pays connaît depuis de nombreuses années permet aujourd'hui un changement radical de la doctrine d'emploi des forces mobiles.

Cette politique systématique rompant avec la priorité de l'ordre public permet de mettre les 30 000 hommes qui constituent aujourd'hui les forces mobiles au service de la sécurité quotidienne.

Les orientations présentées prévoient que, sans rien perdre de leur identité, ni de leur spécialisation dans le maintien de l'ordre, la plus grande partie des forces mobiles, compagnies républicaines de sécurité et escadrons de gendarmerie mobile, sera employée en appui des missions de la direction centrale de la sécurité publique et de la gendarmerie départementale, dans leurs régions d'implantation. Les CRS et EGM seront prioritairement déployés dans les zones de compétence respective des deux forces.

Ces forces supplémentaires seront mises à la disposition des services locaux, pendant toute la durée nécessaire, afin de leur permettre d'effectuer les opérations de sécurisation que la situation impose.

La vocation de ces forces à intervenir pour les besoins de l'ordre public, ainsi que le régime indemnitaire spécifique lié à cette spécialisation, seront naturellement préservés sous réserve des ajustements éventuellement nécessaires.

B- Parvenir à un redéploiement rationnel et équilibré, d'une part, entre les zones de compétence de la police nationale et de la gendarmerie nationale, d'autre part, au sein même de celles-ci.

Une répartition plus rationnelle sera recherchée entre les zones de compétence de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Il conviendra ainsi de corriger, par le biais d'échanges compensés, les situations qui présentent au plan local un manque de logique opérationnelle. Chaque force devra s'organiser pour prendre effectivement en charge les missions de sécurité publique dans l'ensemble de la zone de responsabilité qui lui est confiée.

Au sein même des zones attribuées à chaque force, la répartition des effectifs devra tenir compte de la réalité des besoins de sécurité. Dans la zone de gendarmerie, le maillage territorial, confirmé dans son principe, pourra toutefois faire l'objet d'adaptations locales afin d'optimiser l'offre de sécurité au regard de l'évolution de la démographie et de la délinquance. Afin de mieux mutualiser les moyens, l'organisation du service sera développée autour du concept de communauté de brigades.

Cet effort de rationalisation aura pour objectifs d'assurer une meilleure qualité du service offert à la population et d'améliorer les performances des deux forces, notamment, s'agissant du taux d'élucidation des crimes et délits.

C- Mettre un terme à l'emploi des policiers et des gendarmes dans des fonctions qui ne sont pas strictement liées à la sécurité.

L'efficacité des forces de gendarmerie et de police impose qu'elles se consacrent à leurs métiers et ne soient pas immobilisées par des tâches administratives. Les dispositions nécessaires seront prises pour que les tâches administratives et techniques actuellement remplies par des policiers et des gendarmes soient confiées à des agents relevant d'autres statuts. Certaines de ces tâches techniques telles que l'entretien du parc automobile, seront, à chaque fois que possible, transférées au secteur privé.

Dans le même esprit, les gardes statiques confiées aux policiers et gendarmes seront réduites au strict minimum. Il sera plus largement fait appel à l'externalisation de cette mission et aux moyens techniques de surveillance.

Une réflexion sera lancée sur les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements de détenus ainsi que la surveillance des détenus hospitalisés. Des premières propositions devront être faites dans le délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.

III. Mieux équilibrer la police de proximité et l'action judiciaire des forces de sécurité intérieure

A- Consolider la police de proximité

L'objectif d'instaurer une police de proximité, initialement fixé par la loi d'orientation pour la sécurité du 21 janvier 1995, sera maintenu. Cependant, sa mise en _uvre ne doit pas se faire au détriment des capacités d'action judiciaire et de la présence nocturne des forces. Ces capacités, affaiblies au cours des dernières années, doivent être remises à niveau.

De même, la doctrine d'emploi de la gendarmerie nationale, qui a toujours été marquée par l'importance de la proximité, sera confirmée, adaptée et poursuivie.

B- Développer l'action judiciaire

Une présence accrue sur la voie publique n'a de sens que si elle est prolongée par la recherche active et systématique des auteurs d'infractions afin qu'ils soient, dans les meilleurs délais, interpellés et mis à disposition de l'autorité judiciaire.

Les capacités d'action de la police nationale et de la gendarmerie nationale dans le domaine judiciaire doivent donc être développées.

a) Augmenter le nombre des officiers de police judiciaire et revaloriser cette compétence

Le nombre des agents ayant la qualification d'officiers de police judiciaire sera sensiblement augmenté sur la durée de la loi de programmation, notamment dans le corps de maîtrise et d'application de la police nationale. A cet effet, le dispositif de formation à la qualification d'officier de police judiciaire sera rénové. Cette qualification sera mieux prise en compte dans la progression de carrière. Dans les deux corps les indemnités liées à cette qualification seront revalorisées.

b) Etendre la compétence territoriale des officiers de police judiciaire

La compétence territoriale des officiers de police judiciaire sera étendue. Les officiers de police judiciaire en fonction dans les circonscriptions de sécurité publique de la police nationale et les brigades de la gendarmerie nationale verront leurs compétences élargies à l'ensemble du département dans lequel ils exercent leurs attributions.

Pour certains agents et militaires spécialisés dans des missions de police judiciaire particulières, cette compétence pourra être étendue à la zone de défense.

L'exercice permanent des attributions d'agent de police judiciaire sera redonné aux gendarmes mobiles et CRS pour valoriser leur emploi dans les missions de sécurisation.

Les fonctionnaires affectés au service de sécurité des transports de la région Ile-de-France recevront une habilitation correspondant à la compétence géographique de leur service.

c) Développer les moyens de la police technique et scientifique

Les moyens de la police technique et scientifique seront renforcés. Le développement d'outils d'investigation performants sera poursuivi afin d'obtenir par la généralisation de nouveaux modes d'administration de la preuve, une amélioration du taux d'élucidation des faits constatés.

L'utilisation, l'alimentation et le rapprochement des grands fichiers de police technique et scientifique seront développés.

L'efficacité du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) sera renforcée par une accélération de la mise en place des équipements des laboratoires, qui conditionne l'extension du champ d'application de la prise d'empreintes à de nouvelles infractions ou à de nouveaux stades de l'enquête judiciaire.

Le rapprochement des grands fichiers de police criminelle de la police et de la gendarmerie nationale (STIC, JUDEX) sera favorisé, au besoin en conférant une base législative aux échanges d'informations indispensables à l'efficacité des enquêtes judiciaires.

Le système de traitement uniformisé des produits stupéfiants (fichier STUP) fera l'objet d'un rapprochement entre les bases de données de la police, de la gendarmerie et des douanes sous la forme d'une mise en réseau des informations détenues par ces trois services.

Pour faciliter le déroulement des investigations, une architecture intégrée des fichiers informatiques de la sécurité intérieure sera mise en place. Les fichiers de la police nationale et de la gendarmerie nationale seront mis en cohérence. A terme, tous les agents de la sécurité intérieure habilités devront avoir accès à toutes les bases documentaires de recherches criminelles liées à la sécurité intérieure.

Une meilleure complémentarité des installations de police technique et scientifique, et notamment des laboratoires, des deux forces sera recherchée.

d) Adapter l'organisation des services de la gendarmerie nationale à l'exigence judiciaire

Les moyens des sections de recherches seront accrus.

Des brigades de recherches seront constituées dans chaque compagnie de gendarmerie et des plates-formes judiciaires dans chaque groupement. Dans chaque région seront développées des capacités d'appui aux unités de recherche et notamment à la section de recherche, spécialisée dans la lutte contre la moyenne et la grande délinquance.

IV. Adapter l'organisation, l'administration et la gestion aux nouveaux enjeux de la sécurité

L'organisation administrative des services sera modernisée.

a) Restructuration des services relevant de la direction centrale de la police judiciaire

L'adaptation du maillage territorial des services relevant de la direction centrale de la police judiciaire par le regroupement des dix-neuf services régionaux de police judiciaire existants autour de neuf directions interrégionales, permettra d'élargir la compétence territoriale des enquêteurs, de répondre aux défis de la coopération transfrontalière, et par la mutualisation de certains effectifs et équipements, d'accroître le potentiel opérationnel à la disposition des enquêteurs.

b) Réorganisation de la gendarmerie en zone périurbaine

Un renforcement et une réorganisation des unités de gendarmerie situées en zone périphérique des agglomérations, seront mis en _uvre afin de permettre à ces unités d'adapter leurs structures et leurs modes de fonctionnement aux attentes spécifiques de la population ainsi qu'à l'évolution de la délinquance et de l'urbanisation.

c) Nouvelle organisation de la gendarmerie dans les zones rurales

La où, du fait des évolutions du territoire, les brigades de gendarmerie ne disposent plus de moyens leur permettant de fonctionner de façon autonome, il sera possible de les regrouper en communautés de brigades dotées d'un commandement unique agissant sur une circonscription cohérente. Comme en zone périurbaine, sans sacrifier la proximité avec la population qui, où qu'elle habite, a droit à une présence active des forces de sécurité, il convient que celles-ci disposent d'une véritable capacité opérationnelle à la mesure des besoins.

d) Mise en commun de moyens

L'efficacité de la police nationale et de la gendarmerie sera renforcée par des dispositions leur permettant de mettre en commun certains moyens, sous réserve des contraintes liées au déploiement territorial particulier de la gendarmerie nationale et à ses missions militaires : fonctions logistiques (passation de marchés publics, utilisation réciproque des moyens d'entretien automobile) et actions de formation, de recherche et d'information. Les gains d'efficacité qui en résulteront traduiront de manière concrète les avantages qui découlent de la création d'un ministère unique chargé de la sécurité intérieure.

e) Adapter et moderniser la formation des personnels

La formation tant initiale que continue, constitue un outil de management indispensable dans toute organisation moderne, d'autant plus que les technologies progressent à une vitesse sans précédent. C'est pourquoi la formation devra constamment évoluer et s'adapter aux nécessités opérationnelles.

Les règles de déontologie, le perfectionnement des connaissances en matière de droit et de procédure, les techniques d'intervention dans les quartiers sensibles, le renseignement, les technologies nouvelles, ainsi que la gestion des ressources humaines et budgétaires constituent les grands axes de cette action de formation.

f) Déconcentration des pouvoirs de gestion

Des pouvoirs de gestion accrus seront transférés aux gestionnaires déconcentrés, soit à titre expérimental, soit à titre définitif. Ils s'appuieront, notamment, sur une plus grande globalisation de leurs moyens. Par exemple, pour la police nationale, les achats de véhicules légers pourront être intégrés dans la dotation globale déconcentrée des services et, au moins dans certains départements, l'affectation des effectifs au sein du département pourra être effectuée par le Préfet.

Ces nouveaux pouvoirs de gestion s'accompagneront d'une responsabilisation accrue des gestionnaires : à ce titre, le dialogue de gestion sera rénové entre le niveau central et les niveaux déconcentrés, et des outils de contrôle de gestion seront mis en place.

La déconcentration de gestion déjà entreprise au sein de la gendarmerie nationale sera développée.

Dans les deux services l'accent sera mis sur un management des ressources humaines qui engage fortement la hiérarchie, en permettant la participation des agents à la détermination des objectifs comme aux méthodes de travail.

Seront recherchées les modalités d'une meilleure adéquation du code des marchés publics avec les impératifs de déconcentration de la gestion et d'externalisation de certaines tâches.

V. Donner à la France un rôle moteur dans la coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure

Dans le cadre des orientations politiques fixées par le gouvernement et particulièrement le ministre des affaires étrangères, et sous réserve des compétences spécifiques du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre en charge de la sécurité intérieure coordonne les actions de coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure.

Il dispose à cette fin d'une ligne budgétaire spécifique et des emplois de policiers et de gendarmes seront créés pour être spécialement dédiés aux actions extérieures de la France en matière de sécurité intérieure.

Le terrorisme, le crime organisé et le blanchiment, les filières criminelles qui exploitent les candidats à l'immigration clandestine sont par nature des phénomènes transnationaux contre lesquels on ne peut lutter efficacement que grâce à la coopération entre les Etats.

La lutte contre ces phénomènes constitue une priorité qui implique le renforcement de la coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure.

Le réseau des attachés de sécurité intérieure à l'étranger, formé de policiers et de gendarmes sera développé.

La France doit tout particulièrement jouer un rôle moteur dans la création et la mise en place de l'espace européen de sécurité, de liberté et de justice.

Elle prendra des initiatives pour parvenir à l'adoption de règles communes aux Quinze en matière d'immigration et d'asile et participera activement au développement des autres réalisations de l'Union européenne telles qu'EUROPOL, la composante police de gestion civile des crises, le collège européen de police, la gestion intégrée des frontières extérieures, les accords de coopération transfrontalière créant les centres de coopération policière et douanière, et la future police européenne aux frontières.

Au plan national, les différents canaux de coopération opérationnelle de police (INTERPOL, SCHENGEN, EUROPOL, officiers de liaison bilatéraux, centres de coopération policière et douanière) seront mis en synergie au profit de l'ensemble des services de sécurité intérieure.

VI. Créer une réserve civile de la police

A l'occasion d'événements exceptionnels ou de situations de crise, l'Etat doit pouvoir faire appel à des réservistes si les forces de sécurité intérieure s'avèrent insuffisantes.

Ce concept existe déjà dans les forces armées et donc dans la gendarmerie nationale.

Les orientations présentées ci-après serviront de base à la création de la réserve civile de la police nationale qui sera financée sur les moyens dégagés au titre de la présente loi.

Pendant les cinq années suivant leur départ à la retraite, les fonctionnaires actifs de la police nationale sont susceptibles d'être appelés, si les circonstances l'exigent, pour venir renforcer les forces de sécurité intérieure en activité.

Ce dispositif de réserve civile de la police nationale constitue l'un des éléments de la défense civile de notre pays.

Les missions confiées aux réservistes de la police nationale tiennent compte des compétences acquises par les fonctionnaires concernés pendant leur période d'activité. Elles consistent en des tâches de soutien aux forces de sécurité intérieure en activité.

Pendant le temps de réserve de cinq ans, les fonctionnaires actifs de la police nationale peuvent également participer, sur la base du volontariat, à des missions de solidarité relevant :

-  soit du soutien social de proximité en assurant une permanence dans des services notamment pour faciliter l'insertion locale de leurs collègues, particulièrement les plus jeunes ;

-  soit de la transmission des connaissances, lorsque les fonctionnaires ont acquis pendant leur activité une technicité particulière ;

-  soit de la médiation, notamment en direction des jeunes en difficulté.

Un texte réglementaire précisera les modalités d'organisation et de mise en _uvre de la réserve civile de la police nationale.

VII. Développer l'accompagnement social au sein de la police et la gendarmerie

Il convient d'assurer aux forces de police et de gendarmerie, la reconnaissance et le soutien dont elles ont besoin en tenant compte de la pénibilité des métiers.

La gestion des ressources humaines sera améliorée par un renforcement de l'accompagnement social, médical et psychologique des personnels.

Une attention particulière sera portée à l'amélioration des conditions de logement des agents confrontés à des difficultés dans ce domaine. Un plan d'amélioration de la qualité des hébergements sera lancé dans la gendarmerie nationale. Pour la police nationale, les moyens destinés aux réservations de logements, en particulier pour les personnels affectés dans les grandes agglomérations, seront renforcés.

Des mesures d'accompagnement seront par ailleurs prévues en direction des familles (crèches, aide à l'emploi des conjoints...) pour tenir compte des obligations liées aux contraintes professionnelles.

L'efficacité des forces de sécurité intérieure exige que les personnels affectés dans les zones sensibles y restent assez longtemps pour acquérir les compétences spécifiques permettant de lutter contre une délinquance particulièrement difficile. Des mesures incitatives seront prévues pour prolonger la durée en poste des agents affectés dans ces zones. De la même façon, des mesures analogues s'appliqueront aux personnels dans les secteurs défavorisés en raison de l'environnement géographique ou humain.

Au sein de chaque force, les structures chargées de cet accompagnement social seront développées et modernisées.

VIII. Mieux lutter contre l'insécurité routière

Avec près de 8 500 morts et plus 150 000 blessés par an, les accidents de la route constituent un véritable fléau national.

Si les défaillances des véhicules et les défectuosités des infrastructures routières peuvent être à l'origine de certains accidents, dans la plupart des cas c'est le comportement de l'automobiliste qui est en cause.

Malgré de multiples campagnes d'information et de prévention, aucune baisse significative du nombre de victimes n'a pu être obtenue durablement dans la période récente.

Dans ce contexte, le rôle des services de police et de gendarmerie prend toute son importance.

Dans un souci d'efficacité le ministère de l'intérieur, dont relève l'ensemble des forces chargées des contrôles et de la constatation des infractions, doit renforcer la politique qui est la sienne dans ce domaine.

En complément de l'action sur le terrain des agents des forces de sécurité intérieure, des mesures seront prises pour inciter les gestionnaires publics et privés du réseau routier à implanter de manière permanente des équipements de constatation automatique des infractions.

IX. Prévention et insertion sociale

La politique de sécurité intérieure doit être appréhendée dans sa globalité et ne se limite pas à la seule action des forces de l'ordre.

Si les forces de sécurité intérieure n'ont pas à se substituer aux services sociaux, en revanche, elles ont la légitimité pour intervenir dans le champ de la prévention en particulier en milieu scolaire.

Les forces de sécurité interviennent en amont de la commission de l'infraction dans le cadre de l'action préventive. L'augmentation de la délinquance et notamment celle des mineurs, constatée au cours des vingt dernières années, a justifié la mise en place de dispositifs institutionnels adaptés à la prévention des conduites déviantes et à la montée des incivilités.

La prévention situationnelle qui recouvre l'ensemble des mesures d'urbanisme, d'architecture ou techniques visant à prévenir la commission d'actes délictueux, où à les rendre moins profitables, a déjà connu une large application pratique dans de nombreux pays européens. Il est, en effet, désormais admis que certains types de réalisations urbaines ou d'activités économiques peuvent se révéler criminogènes et qu'il est possible d'y prévenir ou d'y réduire les sources d'insécurité en agissant sur l'architecture, et l'aménagement de l'espace urbain.

En liaison avec les autorités organisatrices de transports et les entreprises exploitantes, un effort particulier devra être entrepris pour renforcer les dispositifs d'humanisation des réseaux et développer la mise en place d'équipements de sécurité.

Depuis de nombreuses années, la police nationale comme la gendarmerie nationale ont réalisé de multiples actions de prévention tout particulièrement en direction des jeunes.

Le dialogue entre les travailleurs sociaux et les forces de l'ordre demeure essentiel dans un souci d'approche globale et cohérente des problèmes de prévention et d'insertion. Aussi, est-il nécessaire de renforcer au sein des instances locales le partenariat initié au travers des contrats locaux de sécurité.

DEUXIÈME PARTIE : MOYENS JURIDIQUES

I. Achever la mise en application des dispositions de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995

Un certain nombre de dispositions de la loi précitée, notamment parmi celles relatives à la prévention de l'insécurité n'ont toujours pas été mises en _uvre, faute de textes en précisant les modalités d'application.

Il s'agit des articles suivants :

-  article 11 relatif aux études préalables à la réalisation des projets d'aménagement des équipements collectifs et des programmes de construction ;

-  articles 14 et 15 relatifs aux dispositifs techniques de prévention et de constatation des infractions au code de la route. S'agissant plus particulièrement de l'article 15, la France prendra une initiative pour faire aboutir ce dossier qui relève désormais de la réglementation européenne.

Par ailleurs, les articles 1er et 23-1 de la loi du 21 janvier 1995 modifiée seront rendus applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et à Mayotte.

II. Donner aux services de sécurité intérieure les moyens juridiques nouveaux dont ils ont besoin pour lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance

La délinquance a changé ces dernières années. Si elle a évolué quantitativement d'une manière inacceptable, elle a également changé de nature en devenant toujours plus violente, plus mobile, plus organisée. C'est ainsi que le droit élémentaire de nos concitoyens à la sûreté est trop souvent bafoué.

Le trafic de produits stupéfiants quant à lui, a continué à se développer et s'étendre à de nouvelles substances. Il a contribué à la montée en puissance dans certains quartiers de l'économie souterraine, à l'exaspération de leurs habitants et à un grand nombre de dommages sociaux et sanitaires.

Enfin l'implication de mineurs de plus en plus nombreux dans la commission d'infractions graves ne peut qu'inquiéter.

Sans préjudice des dispositions contenues dans la loi d'orientation et de programmation relative à la justice, les présentes orientations prévoient de mettre à la disposition des forces de sécurité intérieure les nouveaux moyens juridiques nécessaires à l'accomplissement de leur mission, à savoir rétablir et garantir la sécurité des français dans le respect des lois.

Pour ce faire, les dispositions nouvelles permettront :

1° De rétablir l'autorité des agents de l'Etat dans l'exercice de leurs missions et d'améliorer leur efficacité dans l'identification et l'incrimination des auteurs des faits dont ils ont connaissance ;

2° De mieux assurer les devoirs que l'Etat a à l'égard de tous ceux qui souhaitent apporter leur aide au travail des enquêteurs, en protégeant notamment les témoins et victimes de tout risque de représailles ;

3° De moderniser notre droit afin de mieux appréhender certaines formes nouvelles de délinquance, causes de graves dommages à notre société, et mal supportées par nos concitoyens.

1. Mesures tendant à restaurer l'autorité et la capacité des agents de l'Etat à agir

L'Etat se doit de renforcer la protection et la crédibilité de ceux qui travaillent dans des conditions souvent difficiles au service de la communauté. L'importance de la mission assignée aux forces de sécurité suppose que celles-ci ne soient pas distraites de leur mission par d'autres tâches. Elle suppose aussi que la protection des personnels soit assurée plus efficacement.

De trop nombreux délinquants sont recherchés sans succès dans le cadre d'une enquête, d'une instruction ou pour exécuter une peine. Il paraît évident que la crédibilité de notre système répressif dépend notamment de notre capacité à faire exécuter ses décisions. C'est pourquoi, la mission de rechercher activement les criminels et délinquants en fuite sera confiée à un office central. De nouvelles dispositions de procédure pénale seront mises en place afin de lui permettre d'exécuter ses missions.

Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de faciliter et de simplifier les modalités des enquêtes judiciaires, d'élargir la compétence territoriale des officiers de police judiciaire et de sanctionner plus sévèrement les violences, menaces et outrages envers les dépositaires de l'autorité publique.

Enfin, les sanctions pénales pour non respect des arrêtés municipaux seront aggravées.

2. Mesures tendant au renforcement de l'efficacité des investigations policières

L'augmentation de la délinquance comme son changement de nature nécessitent d'alléger un certain nombre de contraintes procédurales. Afin de pouvoir réagir dans les meilleurs délais et sur tout le territoire, face à une délinquance de plus en plus violente et de plus en plus organisée, il convient d'étendre les capacités d'action des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie, de simplifier les procédures et de faciliter le travail des enquêteurs.

a) Faciliter le travail des enquêteurs

Les dispositions suivantes seront proposées :

1° Afin de faciliter la recherche de preuves en matière de violences urbaines, des dotations de caméras vidéo seront prévues dans les zones sensibles ;

2° Un trop grand nombre d'enquêtes judiciaires est paralysé par l'incapacité des institutions publiques ou privées (établissements financiers, opérateur de téléphonie, administrations ...) à répondre dans des délais raisonnables aux réquisitions effectuées par les officiers de police judiciaire à la demande de l'autorité judiciaire. Le plus souvent, la raison invoquée par les personnes requises pour justifier ce retard est la difficulté d'extraire, de traiter et de faire parvenir les renseignements demandés au service de police ou de gendarmerie requérant. C'est pourquoi, il sera élaboré un texte permettant aux officiers de police judiciaire, agissant dans le cadre d'une enquête judiciaire, sur autorisation d'un magistrat, d'accéder directement à des fichiers informatiques et de saisir à distance par la voie télématique ou informatique, les renseignements qui paraîtraient nécessaires à la manifestation de la vérité ;

3° Dans le but d'augmenter les moyens mis à disposition des services d'enquête et d'éviter le gaspillage des deniers de l'Etat, un cadre juridique permettant l'utilisation des biens saisis appartenant directement ou indirectement aux auteurs de certaines infractions sera mis en place sous le contrôle de l'autorité judiciaire qui pourra, en cas de condamnation définitive, attribuer définitivement l'objet saisi à l'administration qui a mené l'enquête ou, en cas de déclaration d'innocence, décider de procéder à la restitution et à l'indemnisation du propriétaire ;

Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de donner plus d'efficacité aux investigations des officiers de police judiciaire, notamment pendant la phase de flagrant délit et d'enquête préliminaire.

b) La mise en place de moyens nouveaux pour lutter contre les formes nouvelles de délinquance et améliorer le taux d'élucidation des enquêtes

Des dispositions seront proposées dans les domaines suivants :

-  les textes nécessaires seront adoptés dans le but d'autoriser sous contrôle judiciaire l'emploi des techniques les plus modernes indispensables à l'interception des messages et à la mise en place de dispositifs de surveillance élaborés rendus nécessaires en raison du recours de plus en plus systématique des délinquants aux possibilités de brouillage de leurs échanges ou au camouflage de leurs rencontres ;

-  le rôle de la police technique et scientifique sera étendu et développé notamment pour permettre de découvrir les responsables des faits de petite et moyenne délinquance. C'est pourquoi, afin d'augmenter l'utilité du fichier national automatisé des empreintes dans l'élucidation des enquêtes, celui-ci sera étendu aux empreintes palmaires ;

-  afin de favoriser l'échange de renseignement, les possibilités d'accès réciproque des policiers et des gendarmes aux fichiers mis en place de manière spécifique par le ministère de l'intérieur ou le ministère de la défense seront améliorées ;

-  dans chaque département, des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie seront désignés afin de veiller à ce que la sécurité des témoins soit préservée avant et après le jugement des procédures dans lesquelles ils seront intervenus.

Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectif d'étendre le champ d'application des livraisons surveillées et des infiltrations.

3. Une meilleure prise en compte des formes nouvelles de criminalité

Certains types de comportements apparus depuis quelques années dans notre pays sont de moins en moins supportés par nos concitoyens. Le développement de l'utilisation des téléphones portables a entraîné une augmentation très importante des vols dits «à l'arraché». L'ouverture de nos frontières a facilité le vol de véhicules. L'utilisation d'enfants dans le cadre de la mendicité, le racolage en nombre dans des lieux paisibles d'habitations, la commission d'infractions sous l'emprise de la drogue ou de l'alcool se sont malheureusement généralisées.

La violence routière et ses conséquences dramatiques se développent également à nouveau de manière inacceptable.

Plusieurs moyens devront être développés afin d'enrayer la progression de ces phénomènes.

C'est ainsi que :

-  le développement de la téléphonie mobile a été assorti d'une augmentation très importante du vol et du trafic de téléphones portables. Les discussions entamées avec les opérateurs et les constructeurs n'ont pas permis en l'état d'aboutir à la mise en place des dispositifs techniques permettant de bloquer l'usage des téléphones volés. C'est pourquoi, il appartiendra au Gouvernement de prendre si besoin est les mesures nécessaires pour obtenir à bref délai ce résultat ;

-  le dispositif permettant la localisation des véhicules volés reste une nécessité du fait de l'augmentation de ce type délinquance. Sa mise en place sera opérée dans les meilleurs délais en partenariat avec les constructeurs [et] les compagnies d'assurances [ou les opérateurs conventionnés. (adoption de l'amendement n° 1 de M. Jérôme Rivière)] ;

-  les infractions commises avec l'utilisation d'arme se développent. L'usage et la détention d'armes par des personnes malhonnêtes ou qui ne peuvent pour diverses raisons en détenir favorisent le climat d'insécurité. C'est pourquoi la législation actuelle, souvent obscure et ancienne, sera actualisée. Un fichier national automatisé des personnes interdites d'acquisition ou de détention d'armes sera mis en place. Des propositions d'amnistie seront faites aux détenteurs irréguliers d'armes qui les remettront aux autorités. Une obligation d'information sera expressément prévue afin de permettre aux personnels soumis au secret professionnel d'informer les autorités qu'une personne dangereuse pour elle-même ou la société détient une arme ;

-  l'explosion du trafic portant sur les drogues synthétiques demande une adaptation de notre dispositif de lutte contre le trafic de stupéfiant. C'est pourquoi les objectifs de la Mission Nationale de Contrôle des Précurseurs Chimiques (MNCPC) seront précisés et étendus à la lutte contre le commerce illicite des produits précurseurs des drogues ;

-  le développement de la violence routière relève d'un traitement insuffisant et trop complexe de ce type de délinquance. L'amélioration du dispositif réglementaire sera entreprise afin d'augmenter le déploiement des moyens automatiques de constatations des infractions et d'accélérer leur traitement pénal ;

-  l'abandon d'une politique dynamique de lutte contre l'usage de certaines drogues a conduit à brouiller le message sur la nocivité de celle-ci. Une politique ambitieuse de prévention sera menée dans ce domaine. Des actions coordonnées avec l'autorité judiciaire seront par ailleurs menées notamment pour enrayer l'usage de stupéfiants chez les mineurs ;

-  la délinquance des mineurs, outre une prise en compte judiciaire que le Gouvernement veut plus rapide et plus effective, demande de nouvelles réponses en termes de prévention et d'action. C'est pourquoi les permanences de nuit des brigades des mineurs et de protection sociale de la police nationale seront étendues dans les quartiers sensibles ;

-  afin de lutter contre l'absentéisme scolaire qui contribue à faciliter le passage à la délinquance, les sanctions encourues par les parents qui ne respectent pas l'obligation scolaire afin de lutter contre l'absentéisme seront aggravées. Il en sera de même pour les responsables de lieux publics qui accueillent les mineurs pendant les horaires scolaires ou pour les personnes qui les emploient ou les rémunèrent illégalement pendant ces mêmes horaires. A cet égard le partenariat entre les services de l'éducation nationale, l'institution judiciaire et les forces dépendant du ministère de la sécurité intérieure sera étendu et développé ;

-  dans le cadre de la lutte contre le développement du proxénétisme, les auteurs de racolage actif ou de racolage passif feront l'objet de mesures systématiques d'éloignement lorsqu'ils seront de nationalité étrangère;

-  afin de stigmatiser leurs auteurs et d'indiquer clairement que la consommation d'alcool ou de drogue ne peut en aucun cas être présentée comme excuse par l'auteur d'une infraction, il sera proposé par le Gouvernement de créer une circonstance aggravant la sanction pénale encourue chaque fois qu'une infraction sera commise sous l'effet de l'alcool ou de produits stupéfiants.

Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de mieux réprimer des comportements qui affectent particulièrement la vie quotidienne de nos concitoyens et se sont multipliés au cours des dernières années tels que la mendicité agressive, les regroupements dans les parties communes des immeubles et l'envahissement des propriétés [publiques et (amendement n° 3)] privées par des gens du voyage agissant en réunion, ainsi que le défaut de permis de conduire et le refus d'obtempérer.

*

* *

Un projet de loi traduisant les orientations mentionnées ci-dessus qui nécessitent des dispositions d'ordre législatif sera déposé dès l'automne 2002.

ANNEXE II

RAPPORT SUR LA PROGRAMMATION FINANCIÈRE
DE LA POLICE NATIONALE
ET DE LA GENDARMERIE NATIONALE
POUR LES ANNÉES 2003 À 2007

Les orientations de la politique de sécurité intérieure présentées à l'annexe I exigent, pour être mises en _uvre, de doter la gendarmerie nationale et la police nationale des effectifs et des équipements adaptés à leurs missions.

La programmation des moyens décrite dans le présent rapport correspond à des moyens supplémentaires fixés à 5,6 milliards d'euros pour les années 2003 à 2007, y compris les mesures urgentes nécessaires pour rétablir le budget de la gendarmerie nationale au niveau nécessaire à ses besoins (700 M€) et pour contribuer au rétablissement des capacités opérationnelles de la police nationale (230 M€).

Les moyens décrits dans le présent rapport s'ajoutent à la reconduction annuelle des crédits 2002, à l'effet du point fonction publique et à l'effet du glissement-vieillesse-technicité sur les dépenses de rémunération.

Les mesures relatives à la situation des personnels qui seront prises durant la période de programmation répondront principalement à quatre priorités : améliorer les capacités d'action judiciaires des services grâce à l'extension et à la revalorisation de la qualification d'officier de police judiciaire ; mieux inciter les personnels à rester en poste dans les zones les moins attractives ; reconnaître la pénibilité accrue des métiers de la sécurité intérieure ; et renforcer l'encadrement supérieur des forces.

I. LE BON ACCOMPLISSEMENT DES MISSIONS DE LA POLICE NATIONALE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALE EXIGE DE FIXER LEURS EFFECTIFS AU NIVEAU QUE JUSTIFIENT LES BESOINS DE SÉCURITÉ

1° Réduire les charges administratives des agents actifs et les tâches non prioritaires de l'ensemble des agents

Les militaires de la gendarmerie nationale et les personnels actifs de la police nationale doivent pouvoir se consacrer prioritairement à la lutte contre la délinquance, les violences urbaines et l'insécurité routière. Le temps consacré par ces agents à des tâches administratives ou à des missions non prioritaires sera donc réduit.

Grâce aux créations d'emplois administratifs prévues par la présente programmation, au moins 1 000 emplois actuellement occupés par des personnels de statut actif de la police nationale, pourront être transférés à des agents administratifs. Les personnels actifs seront redéployés sur des postes opérationnels.

Afin de réduire les charges dues aux gardes statiques, les dispositifs de vidéosurveillance des bâtiments seront accrus ; le transfert de ces gardes au secteur privé et à des agents relevant d'autres statuts sera développé partout où cela sera possible.

Sous réserve des nécessités de la permanence opérationnelle, les militaires de la gendarmerie et les personnels de statut actif seront déchargés des tâches d'entretien et de réparation des matériels pouvant être confiées au secteur privé ou à d'autres catégories d'agents publics.

Une réflexion sera lancée sur les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements de détenus et la surveillance des détenus hospitalisés.

2°  Garantir la sécurité de proximité

Pour mieux assurer la sécurité quotidienne de l'ensemble de la population, la gendarmerie nationale et la police nationale doivent être en mesure d'améliorer leur rapidité de réaction, de renforcer leur présence nocturne et de consacrer plus de temps à l'information de la population et des plaignants : améliorer l'accueil des victimes, participer aux conseils locaux de sécurité et à des réunions de proximité, informer systématiquement les plaignants sur l'état de leur dossier. Ces objectifs exigent notamment une augmentation des effectifs.

En outre, la présence des forces de sécurité sera renforcée dans les zones périurbaines ou urbaines qui connaissent une délinquance exceptionnelle et dans les zones où une forte croissance de la population est attendue au cours des prochaines années.

Des effectifs supplémentaires permettront d'améliorer la qualité des services rendus dans le cadre de la sécurité de proximité, conforter l'assise territoriale des forces de sécurité intérieure, corriger les écarts entre les territoires et prendre en compte les besoins spécifiques des départements et territoires d'outre-mer.

L'augmentation des effectifs au titre de la sécurité de proximité représentera environ 2.000 emplois dans la police nationale et 4.800 emplois dans la gendarmerie nationale.

3°  Renforcer les capacités d'investigation

L'efficacité de la politique de sécurité intérieure repose sur la capacité des services à procéder aux constatations, à mener les enquêtes, à identifier les auteurs des délits et crimes et à les déférer à la justice. Le taux d'élucidation des délits et crimes est le principal indicateur de réussite de cet objectif.

Les services de la police judiciaire (services d'investigation et de recherche, sûretés départementales, services interrégionaux et régionaux de police judiciaire, services de documentation et d'identité judiciaires), ainsi que les unités de recherche et les plates-formes techniques judiciaires de la gendarmerie nationale, seront renforcés. Un plan de formation, visant à accroître le nombre de gardiens et gradés accédant à la qualification d'officier de police judiciaire et à perfectionner les connaissances des agents en procédure pénale, sera mis en _uvre.

Afin d'accélérer les expertises indispensables à la bonne fin des enquêtes, les moyens de la police technique et scientifique seront également renforcés.

L'augmentation des effectifs au titre du renforcement des capacités d'investigation représentera environ 1.000 emplois dans la police nationale et 400 emplois dans la gendarmerie nationale.

4°  Renforcer la lutte contre la menace terroriste et la criminalité organisée

Le poids de la menace terroriste et le développement de la criminalité organisée exigent d'intensifier l'action des services au plan national, en rendant plus efficaces la recherche et l'exploitation du renseignement et en renforçant la collaboration entre services et la formation au renseignement. Au plan international, les nouvelles menaces exigent de développer les coopérations institutionnelles avec nos partenaires. Enfin, la gendarmerie des transports aériens sera renforcée.

L'augmentation des effectifs au titre de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée représentera environ 300 emplois dans la police nationale et 300 emplois dans la gendarmerie nationale.

5°  Protéger plus efficacement les frontières

La maîtrise des flux migratoires et la lutte contre l'immigration clandestine nécessitent de renforcer la présence des forces de sécurité intérieure dans les zones les plus exposées, qui connaîtront en outre une recrudescence d'activité au cours de la période de programmation.

Ainsi, l'extension du trafic aérien et l'agrandissement programmé de plusieurs aéroports internationaux, au premier rang desquels Roissy-Charles-de-Gaulle, exigeront un renforcement des effectifs. Certaines frontières particulièrement sensibles, notamment le tunnel trans-Manche et la frontière guyanaise, exigent des renforts urgents. Enfin, le réseau ferré dans son ensemble fera l'objet d'une attention spécifique.

L'augmentation des effectifs au titre de la protection des frontières représentera environ 700 emplois dans la police nationale.

6°  Lutter contre l'insécurité routière

Les résultats de la France en matière de sécurité routière sont inférieurs à ceux des autres grands pays industriels et exigent une action résolue pour améliorer le dépistage et la sanction des infractions et de l'alcoolémie au volant. Ces résultats ne pourront être obtenus que par une surveillance renforcée des routes et autoroutes, effectuée notamment par les unités autoroutières et les unités motocyclistes de la gendarmerie nationale et de la police nationale.

L'augmentation des effectifs au titre de la sécurité routière représentera environ 500 emplois dans la police nationale et 700 dans la gendarmerie nationale.

7°  Renforcer les capacités d'administration, de formation et de contrôle

La police nationale et la gendarmerie nationale souffrent d'une insuffisance des fonctions d'administration, de formation et de contrôle. Il en résulte, pour les deux forces, une inadéquation des compétences juridiques, budgétaires, de contrôle de gestion et de gestion des ressources humaines, ainsi que l'immobilisation d'effectifs opérationnels qui se voient assigner des tâches d'administration et de formation. Les groupements de la gendarmerie nationale souffrent tout particulièrement des vacances d'emplois provoquées par l'affectation à la formation de sous-officiers et d'officiers.

L'augmentation des effectifs au titre des missions d'administration, de formation et de contrôle représentera environ 2 000 emplois dans la police nationale et 800 dans la gendarmerie nationale.

II. DONNER AUX FORCES DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE LES MOYENS MATÉRIELS DE L'EFFICACITÉ

1°  Moderniser la gestion immobilière

La gendarmerie nationale et la police nationale connaissent toutes deux des besoins immobiliers importants : réhabilitation d'un parc dégradé, mise à niveau des écoles et unités de formation, amélioration des conditions d'hébergement des gendarmes et des compagnies républicaines de sécurité, amélioration des conditions de garde à vue, augmentation du nombre de places dans les centres de rétention administrative.

Pour la police nationale, dont le parc immobilier atteint plus de 3,5 millions de mètres carrés, les principales priorités seront la mise en _uvre du plan de rénovation et de construction du parc immobilier de la préfecture de police de Paris, l'intensification de l'effort de réservation de logements pour les agents en zone urbaine, la rénovation et l'augmentation des capacités des écoles de formation, l'amélioration des conditions d'hébergement des CRS en Ile-de-France et la mise à niveau des crédits de maintenance immobilière. Au cours de la période de programmation, les surfaces mises en chantier seront progressivement portées de 45.000 m2 à 100.000 m2 par an.

Pour la gendarmerie nationale, le principal objectif est de fournir à tous les gendarmes et à leurs familles des conditions de logement conformes aux normes actuelles. A cette fin, 3 500 unités de logement seront remises à niveau et la capacité de logement domaniale sera augmentée d'environ 4 000 équivalent-unités de logement à l'horizon 2007. Un effort particulier sera par ailleurs engagé en faveur des unités de formation.

Les adaptations législatives proposées au Parlement par la présente loi ont pour objet d'accélérer l'exécution des opérations immobilières nécessaires à la sécurité intérieure. En particulier, le recours aux maîtrises d'ouvrage privées ou de collectivités locales, la passation de marchés avec des groupements d'entreprise couvrant l'ensemble des phases de conception, de réalisation et d'exploitation, le conventionnement avec les collectivités territoriales souhaitant participer aux investissements, seront encouragés et leur régime juridique sera précisé.

Les crédits supplémentaires destinés à ce programme immobilier représenteront, en moyenne annuelle et en crédits de paiement, environ 75 M€ pour la police nationale et 95 M€ pour la gendarmerie nationale.

2°  Déployer et mettre en cohérence les systèmes de transmissions

Le déploiement du programme de transmission ACROPOL est une priorité opérationnelle pour la police nationale. Il doit être entièrement achevé en 2008, avec un rythme moyen de déploiement de 14 départements par an. Or, les crédits prévus au démarrage de l'opération en 1999 sont désormais insuffisants pour couvrir les besoins des services utilisateurs et notamment pour garantir une couverture de zone suffisante pour assurer en toute circonstance la sécurité des personnels. Des besoins complémentaires en postes mobiles et portatifs sont ainsi apparus avec la mise en place de la police de proximité et l'augmentation du parc de véhicules.

Le développement de la coopération entre les services de la sécurité intérieure exige que les solutions techniques soient étudiées et mises en place pour établir des communications entre les réseaux ACROPOL de la police nationale et RUBIS de la gendarmerie nationale. Des passerelles locales permettront l'interconnexion des deux réseaux.

Enfin, le programme actuel n'intègre pas le déploiement et l'utilisation d'ACROPOL dans les lieux souterrains et couverts, qui sont parfois très sensibles en matière de sécurité et de délinquance : réseaux de transports urbains souterrains, centres commerciaux par exemple. Les travaux nécessaires seront engagés, en concertation avec les exploitants, pour assurer la couverture de ces lieux. Pour l'avenir, une disposition législative sera présentée au Parlement afin d'intégrer le pré-équipement nécessaire dans les constructions dont l'importance et la sensibilité en matière de sécurité le justifient.

A plus long terme, l'objectif est de parvenir à une architecture unique des transmissions, qui devrait concerner non seulement la police nationale et la gendarmerie nationale, mais également la sécurité civile.

Les crédits supplémentaires destinés à ce programme représenteront, en moyenne annuelle et en crédits de paiement, 45 M€.

3°  Moderniser les services et mieux utiliser les technologies de traitement de l'information

Dans le domaine de l'informatique, la gendarmerie nationale et la police nationale ont accumulé un retard incompatible avec les exigences de la sécurité intérieure. Pour permettre l'accès des personnels habilités aux fichiers de police, accélérer la prise et le traitement des plaintes et permettre la mise en _uvre d'outils de suivi et de contrôle de l'activité, l'équipement informatique des services doit être complété et renouvelé à un rythme suffisant. La première priorité sera donc d'achever dans les meilleurs délais le câblage des bâtiments et la mise en réseaux de postes de travail.

Pour la gendarmerie nationale, la modernisation des systèmes d'information et de communication constitue une priorité pour accroître la capacité d'échanges et réduire la fragilité et la vulnérabilité de ces systèmes. En particulier, le développement d'un réseau intranet jusqu'à l'échelon des brigades doit permettre la mise en réseau des unités élémentaires.

Les centres d'information et de commandement de la police et de la gendarmerie seront modernisés et informatisés afin d'améliorer significativement l'efficacité et la qualité des interventions et la sécurité des fonctionnaires. Cette modernisation repose notamment sur le développement d'outils de traitement des appels au numéro d'urgence, d'une cartographie associée à des systèmes experts et de gestion de ressources déployées sur le terrain et de la radiolocalisation des unités engagées dans des opérations.

La modernisation des laboratoires de police technique et scientifique nécessite également une remise à niveau des matériels contribuant aux analyses et aux expertises dans le domaine de la physique, de la chimie, de la biologie et du traitement informatique des données recueillies. L'accroissement des capacités de traitement des traces et indices est la condition première de l'alimentation des fichiers (fichier national des empreintes génétiques, fichier automatisé des empreintes digitales) et de leur efficacité.

Les nouvelles technologies devront également être développées dans le domaine de la maîtrise du flux migratoire et de la lutte contre la fraude documentaire (lecture automatique de passeports et CNI, mise en _uvre des technologies de biométrie aux contrôles transfrontières...).

Afin de faciliter le déroulement des investigations, une architecture intégrée des systèmes d'information sera mise en place. A terme, tous les fonctionnaires et militaires, dans la limite de leur habilitation, doivent avoir accès dans le cadre de leurs missions de sécurité, à tout endroit et dans toutes circonstances, à toutes les applications de sécurité intérieure. Des adaptations juridiques aux règles législatives et réglementaires pourront être nécessaires pour permettre l'utilisation efficace de ce système d'information.

Les crédits supplémentaires destinés à la modernisation des services atteindront, en moyenne annuelle en dépenses ordinaires et crédits de paiement, 40 M€ pour la police nationale et 30 M€ pour la gendarmerie nationale.

4°  Mettre à niveau le parc automobile et améliorer sa gestion

Pour leurs véhicules légers comme pour les véhicules spécifiques nécessaires au maintien de l'ordre, la police nationale et la gendarmerie nationale ont souffert au cours des dernières années du vieillissement de leur parc. Celui-ci se traduit par des taux excessifs d'indisponibilité des véhicules, nuisant à l'efficacité des services.

Les principaux objectifs de gestion du parc automobile sont la réduction du taux d'indisponibilité des véhicules et le respect des critères de réforme. Ces objectifs exigeront de remettre à niveau le parc actuel, d'augmenter la réserve automobile des services (afin de pouvoir remplacer instantanément les véhicules immobilisés) et d'améliorer la maintenance des véhicules. Cette amélioration sera effectuée grâce à la mise en commun des capacités logistiques de la gendarmerie et de la police nationale et grâce au recours à l'externalisation d'une partie de l'entretien et de la réparation. Les textes législatifs et réglementaires seront ajustés à cette fin lorsque cela sera nécessaire.

Afin d'adapter les objectifs généraux à la réalité de chaque service, les crédits nécessaires au renouvellement annuel des véhicules légers seront déconcentrés aux gestionnaires locaux, qui fixeront le niveau de renouvellement nécessaire à l'intérieur d'une enveloppe globale accrue et adaptée aux missions réelles des services.

Les crédits supplémentaires destinés aux moyens en véhicules atteindront, en moyenne annuelle en dépenses ordinaires et crédits de paiement, 20 M€ pour la police nationale et 40 M€ pour la gendarmerie nationale.

5°  Adapter l'équipement et la protection individuelle des personnels

Face à la montée des violences et des agressions, les personnels seront dotés d'équipements adaptés aux conditions d'exécution de leurs missions.

Des programmes d'équipement seront donc lancés pour les tenues et uniformes, l'armement et les équipements de protection individuelle. Ils auront pour objet d'adapter l'équipement des personnels aux contraintes actuelles d'intervention et d'utilisation des matériels et d'améliorer leur protection en cas de danger (lanceurs de balles de défense, gilets pare-balles, protection nucléaire, biologique et chimique) avec l'accompagnement nécessaire en matière de formation.

Les crédits supplémentaires destinés à l'équipement et à la protection des personnels atteindront, en moyenne annuelle en dépenses ordinaires et crédits de paiement, 55 M€ pour la police nationale et 40 M€ pour la gendarmerie nationale.

6°  Développer les programmes logistiques communs à la police nationale et à la gendarmerie nationale

Afin d'améliorer l'efficacité des forces de sécurité intérieure et la qualité de leur gestion et de faciliter la bonne coordination de leurs actions, une évaluation commune de certains besoins en matériels sera engagée en vue d'homogénéiser les équipements là où cela est possible et de définir les modalités d'une acquisition groupée. Une coopération systématique dans ce domaine sera instituée dès l'élaboration des cahiers des charges des programmes d'équipement.

En outre, une réflexion sera conduite sur l'utilisation croisée des services de soutien logistique des deux forces, afin d'utiliser au mieux dans le cadre d'actions communes les deux systèmes de maintenance et de réparation.

7°  Développer le soutien aux personnels et l'action sociale

Les fonctionnaires et les militaires qui participent à la politique de sécurité intérieure doivent bénéficier d'une politique sociale adaptée aux contraintes et aux difficultés de leur métier.

Une partie des moyens décrits plus haut sera donc spécifiquement destinée à la politique sociale. Ainsi, les moyens destinés à la réservation de logements, en particulier dans la région parisienne, seront fortement augmentés au bénéfice des fonctionnaires de police ainsi que des personnels civils de la gendarmerie et des militaires ne bénéficiant pas d'un logement concédé. Une partie des recrutements prévus permettra d'améliorer le soutien médical, psychologique et social des personnels, notamment pour l'assistance aux personnels ou aux familles victimes d'agression, l'aide à l'emploi des conjoints et l'accompagnement social de la mobilité.

Enfin, des dispositions seront prévues pour renforcer la protection juridique des personnels : accélération de la mise en place de l'assistance juridique, extension aux ascendants directs de l'assistance juridique accordée aux personnels et à leurs familles en cas de violences, voies de fait, diffamation et outrages.

RÉCAPITULATIF GÉNÉRAL 2003-2007

Police
nationale

Gendarmerie
nationale

Total

Emplois créés 2003-2007

6 500

7 000

13 500

Crédits supplémentaires (M€) :

- Rebasage des crédits 2002 de la gendarmerie nationale

-

700

700

- Emplois et mesures catégorielles

1 570

1 130

2 700

- Programme d'équipement (DO + CP)

1 180

1 020

2 200

TOTAL (M€)

2 750

2 850

5 600

TEXTES CITÉS EN RÉFÉRENCE
DANS L'ANNEXE I DU PROJET DE LOI

Loi n° 95-73 d'orientation et de programmation
relative à la sécurité du 21 janvier 1995

Art. 1. -  La sécurité est un droit fondamental. Elle est une condition de l'exercice des libertés et de la réduction des inégalités.

A ce titre, elle est un devoir pour l'Etat, qui veille, sur l'ensemble du territoire de la République, à la protection des personnes, de leurs biens et des prérogatives de leur citoyenneté, à la défense de leurs institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre publics.

L'Etat associe, dans le cadre des contrats locaux de sécurité, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale, qui participent également à la politique de sécurité. D'autres personnes, morales et privées, et notamment les associations, les bailleurs sociaux et les entreprises de transport, peuvent concourir à l'élaboration et à la mise en _uvre de ces contrats.

Art. 11. -  Il est inséré, après l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, un article L.111-3-1 ainsi rédigé :  

« Art. L. 111-3-1. -  Les études préalables à la réalisation des projets d'aménagement, des équipements collectifs et des programmes de construction, entrepris par une collectivité publique ou nécessitant une autorisation administrative et qui, par leur importance, leur localisation ou leurs caractéristiques propres peuvent avoir des incidences sur la protection des personnes et des biens contre les menaces et les agressions, doivent comporter une étude de sécurité publique permettant d'en apprécier les conséquences. Sans préjudice de circonstances particulières, l'importance du projet est appréciée notamment par référence à la surface des catégories de locaux dont la construction est envisagée, à la densité des constructions avoisinantes, aux caractéristiques de la délinquance et aux besoins en équipements publics qu'ils génèrent.

« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article. Il détermine :

« -  les conditions dans lesquelles les préoccupations en matière de sécurité publique sont prises en compte dans les procédures réglementaires existantes ;

« -  les projets d'aménagement, les équipements collectifs et les programmes de construction soumis à l'obligation mentionnée au premier alinéa ;

« -  le contenu de l'étude de sécurité publique, portant au minimum sur les risques que peut entraîner le projet pour la protection des personnes et des biens contre la délinquance et sur les mesures envisagées pour les prévenir. »

Art. 14. -  Il est inséré, après le chapitre VI du titre Ier du code de la voirie routière un chapitre VII ainsi rédigé : « Chapitre VII. -  Dispositifs techniques de prévention et de constatation des infractions au code de la route » :

« Art. L. 117-1. -  Des dispositifs techniques destinés à assurer le respect du code de la route ou permettant aux fonctionnaires et agents habilités de constater les infractions audit code sont intégrés aux infrastructures et équipements routiers. Leurs caractéristiques sont fixées par arrêtés des ministres compétents.

« Un décret en conseil d'Etat précise les modalités selon lesquelles cette disposition s'applique aux différentes catégories de voies routières existantes ou à créer, en tenant compte notamment de l'importance du trafic, et les conditions de financement de ces dispositifs par les gestionnaires du domaine public routier et leurs concessionnaires. »

Art. 15. -  En vue de prévenir les infractions contre les véhicules et leurs équipements, l'installation sur ces biens de dispositifs de sécurité ou leur marquage, y compris par des procédés électroniques, peuvent être rendus obligatoires. Toutefois, cette obligation ne peut en aucun cas s'appliquer à des dispositifs ou procédés permettant de localiser à distance des véhicules non signalés comme volés.

Les constructeurs et importateurs seront tenus d'y procéder sur les véhicules construits ou importés, à compter de l'entrée en vigueur du présent article, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

Le fait de détourner les dispositifs ou procédés de sécurité ou de marquage des véhicules pour localiser à distance des véhicules non volés est puni des peines prévues au VI de l'article 10 de la présente loi.

Art. 23-1. -  Les rassemblements exclusivement festifs à caractère musical, organisés par des personnes privées, dans des lieux qui ne sont pas au préalable aménagés à cette fin et répondant à certaines caractéristiques fixées par décret en Conseil d'Etat tenant à leur importance, à leur mode d'organisation ainsi qu'aux risques susceptibles d'être encourus par les participants, doivent faire l'objet par les organisateurs d'une déclaration auprès du préfet du département dans lequel le rassemblement doit se tenir. Sont toutefois exemptées les manifestations soumises, en vertu des lois ou règlements qui leur sont applicables, à une obligation de déclaration ou d'autorisation instituée dans un souci de protection de la tranquillité et de la santé publiques,

La déclaration mentionne les mesures envisagées pour garantir la sécurité, la salubrité, l'hygiène et la tranquillité publiques. L'autorisation d'occuper le terrain ou le local où est prévu le rassemblement, donnée par le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage, est jointe à la déclaration.

Lorsque les moyens envisagés paraissent insuffisants pour garantir le bon déroulement du rassemblement, le préfet organise une concertation avec les responsables destinée notamment à adapter lesdites mesures et, le cas échéant, à rechercher un terrain ou un local plus approprié.

Le préfet peut imposer aux organisateurs toute mesure nécessaire au bon déroulement du rassemblement, notamment la mise en place d'un service d'ordre ou d'un dispositif sanitaire.

Le préfet peut interdire le rassemblement projeté si celui-ci est de nature à troubler gravement l'ordre public ou si, en dépit d'une mise en demeure préalable adressée à l'organisateur, les mesures prises par celui-ci pour assurer le bon déroulement du rassemblement sont insuffisantes.

Si le rassemblement se tient sans déclaration préalable ou en dépit d'une interdiction prononcée par le préfet, les officiers de police judiciaire et, sous leur responsabilité, les agents de police judiciaire peuvent saisir le matériel utilisé, pour une durée maximale de six mois, en vue de sa confiscation par le tribunal.

Est puni de l'amende prévue pour les contraventions de 5e classe le fait d'organiser un rassemblement visé au premier alinéa sans déclaration préalable ou en violation d'une interdiction prononcée par le préfet. Le tribunal peut prononcer la confiscation du matériel saisi.

Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article.

N° 0053 - Rapport de M. Christian Estrosi sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure

1 () La gestion des effectifs et des moyens de la police nationale, Annexe 2 au rapport d'information n° 1781 présenté, le 7 juillet 1999, au nom de la Mission d'évaluation et de contrôle, par M. Tony Dreyfus.

2 () Rapport n° 3419 de M. Jean Leonetti sur la proposition de loi relative au renforcement de la lutte contre l'impunité des auteurs de certaines infractions, 28 novembre 2001.

3 () Commission des maires sur la sécurité, Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité, rapport au Premier ministre, La Documentation française, 1982.

4 () L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, Cour des comptes, Juin 2001, op. cit.

5 () Loi du 21 février 2002 complétant la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.

6 () La « zone gendarmerie » représente environ 95 % du territoire national et 50 % de la population française.

7 () Sur la question de la pénétration des mafias des pays de l'Est en France, on pourra se reporter à la proposition de résolution (n° 2120) tendant à la création d'une commission d'enquête présentée, le 27 janvier 2000, par le rapporteur (voir également le rapport n° 2246 présenté par M. Raymond Forni, 15 mars 2000).

8 () La recrudescence des vols avec violences contre les particuliers s'observe spécifiquement dans le cas des vols de téléphones portables.

9 () Voir, par exemple : Eric Chalumeau, « La politique de lutte contre l'insécurité », Regards sur l'actualité, Novembre 2001, op. cit.

10 () Le rapporteur a adressé deux questions à la garde des sceaux sur l'insuffisance de la réponse pénale apportée aux procédures engagées dans les juridictions de Grasse et de Nice. En 2000, le parquet de Grasse a traité 59 164 procédures : 48 505 n'étaient pas en état de faire l'objet d'une suite utile, dont 44 986 pour défaut d'élucidation ; 1 502 ont donné lieu à la mise en _uvre d'une mesure alternative ; 5 500 seulement ont fait l'objet d'une poursuite ; 3 657 ont fait l'objet d'un classement sans suite. La même année le parquet de Nice a traité 49 432 procédures : 33 723 n'étaient pas en état de faire l'objet d'une suite utile ; 2 172 ont donné lieu à la mise en _uvre d'une mesure alternative ; 6 205 ont fait l'objet d'une poursuite ; 7 332 ont fait l'objet d'un classement sans suite. Les réponses de la garde des sceaux (publiées au Journal officiel des 10 et 17 septembre 2001) n'apportent aucune réponse de fond : le taux de réponse pénale, qui ne prend pas en compte les procédures jugées sans suite pour défaut d'élucidation, est même jugé satisfaisant.

11 () Proposition de loi tendant à modifier l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 ainsi qu'à renforcer la protection des mineurs, rapport n° 3300, J.O. Assemblée nationale, séance du 11 octobre 2001.

12 () Proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre l'impunité des auteurs de certaines infractions, op. cit., rapport n° 3419, J.O. Assemblée nationale, séance du 29 novembre 2001.

13 () Proposition de loi relative aux droits et devoirs des mineurs et de leurs parents (n° 3638).

14 () Intervention du ministre de l'intérieur devant les directeurs et responsables de la police nationale, 26 juin 2002.

15 () M. Philippe Massoni a été nommé secrétaire général du CSI le 18 mai 2002.

16 () La gendarmerie départementale (63 % de l'effectif total) a une structure territoriale ; elle est journellement au contact des populations. La gendarmerie mobile (17 % de l'effectif) est constituée en escadrons ; sa principale mission est d'assurer le maintien de l'ordre sur l'ensemble du territoire national.

17 () Intervention du ministre de la sécurité intérieure devant les préfets, 28 mai 2002.

18 () Intervention du ministre de la sécurité intérieure devant les responsables territoriaux de la police et de la gendarmerie, 30  mai 2002.

19 () Dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité quotidienne, le ministre de l'intérieur a réaffirmé sa préférence pour un renforcement de la seule coopération opérationnelle et du partenariat. Voir, par exemple, sa réponse à un amendement présenté par M. Roger Karoutchi : J.O. Sénat, séance du 17 octobre 2001, page 4177.

20 () Les fondements juridiques des centres de coopération policière et douanière résident dans les accords de Schengen. Le premier accord a été signé le 9 octobre 1997 entre les gouvernements français et allemand (centre d'Offenburg). L'annonce de la mise en place d'un commissariat franco-belge à Tournai « marque la concrétisation de l'accord entre la France et la Belgique signé le 5 mars 2001 et resté jusque là lettre morte », a souligné le ministre de l'intérieur français le 10 juin dernier.

21 () Automatisation des communications radio-électriques opérationnelles de la police.

22 () On rappellera que cette proclamation solennelle a été inopportunément modifiée par l'article 1er de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, introduit par voie d'amendement : le rapporteur de ce texte, M. Bruno Le Roux, a jugé utile, notamment, d'inverser l'ordre des priorités précitées en faisant primer la défense des personnes sur celle des institutions et des biens.

23 () Cette priorité à l'aide aux victimes a été affirmée par le ministre de la sécurité intérieure dès le 20 mai 2002. Une attention particulière sera portée à l'enregistrement et au suivi des plaintes. Désormais, la victime pourra connaître la suite réservée à son dossier en s'adressant à des fonctionnaires identifiés (le nom, la qualité et les coordonnées de la personne qui a reçu la plainte, ainsi que celles de la personne du service chargée du suivi du dossier, lui seront communiquées).

24 () Neuf de ces offices centraux sont placés au sein de la direction centrale de la police judiciaire ; ils sont chargés de lutter contre : le faux-monnayage ; le trafic de stupéfiants ; la traite des êtres humains ; le grand banditisme ; le trafic de biens culturels et d'objets d'art ; le trafic d'armes, d'explosifs et de matières nucléaires ; la grande délinquance financière ; la criminalité liée aux technologies de l'information ; la recherche des personnes disparues. Un dernier office, chargé de lutter contre l'immigration irrégulière et l'emploi d'étrangers sans titres, relève de la direction centrale de la police aux frontières.

25 () La gestion des effectifs et des moyens de la police nationale, Annexe 2 au rapport d'information n° 1781 présenté, le 7 juillet 1999, au nom de la Mission d'évaluation et de contrôle, par M. Tony Dreyfus.

26 () Le renforcement des prérogatives de police judiciaire des agents de la police nationale a été initié par la loi n° 98-1035 du 18 novembre 1998 (extension de la qualité d'OPJ au corps de maîtrise et d'application). Ce mouvement a été approfondi par la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne (reconnaissance de la qualité d'APJ aux fonctionnaires du corps de maîtrise et d'application dès leur titularisation et extension de la qualité d'APJA aux adjoints de sécurité).

27 () L'objectif de 100 000 hommes a été fixé par l'article 3 de la loi n° 96-589 du 2 juillet 1996 relative à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002. Toutefois, dans son avis présenté au nom de la commission de la Défense sur le projet de loi de finances pour 2002 (rapport n° 3323), M. Aloyse Warhouver indiquait que : « Même si les effectifs progressent d'année en année, les objectifs sont encore loin d'être atteints, notamment pour ce qui concerne les militaires du rang pour lesquels un effort particulier devra être consenti. L'armée de terre, par exemple, ne compte que 1 200 militaires du rang réservistes. Au total, l'état-major des forces terrestres se fixe pour 2002 l'objectif de 12 000 réservistes sur les 28 000 prévus par la loi, avec l'espoir de réaliser 80 % des droits ouverts pour les officiers, 60 % pour les sous-officiers mais seulement 15 % pour les militaires du rang ».

28 () On pensera, en particulier, aux décrets prévus par les articles 9 et 10 de la loi du 15 avril 1999, relatifs à l'équipement des polices municipales et au code de déontologie.

29 () On observera, dès à présent, que les délits de violences, outrage, rébellion, diffamation et injures commises à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ont été écartés du champ couvert par le projet de loi portant amnistie, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2002.

30 () Le rapporteur avait déposé, sous la précédente législature, une proposition de résolution (n° 3259) tendant à la création d'une commission d'enquête sur les trafics d'armes en provenance des anciennes zones de conflits des pays de l'Est, mais celle-ci n'a même pas été examinée par la commission des Lois de l'Assemblée nationale.

31 () Le GVT résulte de la combinaison des effets induits par les avancements d'échelons et les promotions de grades ou de corps, ainsi que par les entrées et les sorties des effectifs.

32 () La nouvelle loi de programmation militaire que le Gouvernement devrait déposer avant la fin de l'année en cours intégrera dans les ressources de la gendarmerie nationale la dotation prévue par le présent projet de loi. On rappellera qu'un premier projet de programmation couvrant la période 2003-2008 a été déposé le 31 juillet 2001 sur le bureau de l'Assemblée nationale : ce projet, qui n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour, est devenu caduc à la fin de la onzième législature.

33 () Le déploiement du réseau de communication radio de la gendarmerie RUBIS a été achevé en 2000. Certaines solutions techniques d'interopérabilité avec le réseau ACROPOL ont déjà été mises en _uvre.

34 () Le ministre de la sécurité intérieure s'est particulièrement engagé pour une amélioration de l'efficience du système ACROPOL. C'est dans cette perspective qu'il a reçu, dès le 12 juin dernier, les dirigeants du groupe EADS-Télécom pour faire le point sur le déploiement et les performances du système à Paris et dans les départements de la petite couronne.

35 () Le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice devrait modifier cette loi afin d'introduire le même dispositif que celui qui est proposé par le présent projet de loi pour la police et la gendarmerie.

36 () Décret n° 93-1270 du 29 novembre 1993 portant application de l'article 18 de la loi du 12 juillet 1985.

37 () En outre, il convient de souligner que dans le coût global d'un bâtiment exploité pendant trente ans, les dépenses d'investissement ne représentent qu'un tiers tandis que les charges d'entretien et de maintenance absorbent les deux tiers restants.

38 () Dans l'avis n° 356960 du 31 janvier 1995, le Conseil d'Etat a estimé que l'Etat pouvait confier, au titulaire d'une occupation temporaire de son domaine public, la réalisation d'un ouvrage pour le prendre à bail avec option d'achat, sur la base de l'article L. 34-1 du code du domaine de l'Etat.

39 () Décret relatif aux modalités d'attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie.

40 () Circulaire relative aux conditions de prise à bail par l'Etat des locaux destinés aux unités de gendarmerie départementale édifiés par les collectivités territoriales.

41 () Loi relative aux droits et obligations de l'Etat et des départements concernant les IUFM, à la maîtrise d'ouvrage des constructions d'établissements d'enseignement supérieur et portant diverses dispositions relatives à l'éducation nationale, à la jeunesse et aux sports.

42 () Loi n° 75-853 du 13 septembre 1975.

43 () Le délai d'achèvement des travaux a été reporté au 31 décembre 1995 par l'article 72 de la loi n° 95-115 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 ,février 1995.

44 () Les grades visés sont les suivants : lieutenant, capitaine, adjudant-chef, adjudant, maréchal des logis-chef, gendarme.

45 () Une bonification du cinquième du temps de service accompli est accordée, en effet, dans la limite de cinq annuités, à tous les militaires à la condition qu'ils aient accompli au moins quinze ans de services effectifs. Le maximum de bonifications est donné aux militaires qui quittent le service à 55 ans. On observe, toutefois, que l'article L. 12 i) précité du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit déjà que la bonification est diminuée d'une annuité pour chaque année supplémentaire de service jusqu'à l'âge de 58 ans.

46 () Il n'existe pas de définition juridique précise de ces lois. La circulaire du 21 avril 1988 relative à l'applicabilité des textes législatifs et réglementaires outre-mer a essayé de définir cette notion sans réussir à fixer une délimitation précise de son champ d'application.

47 () Le Conseil constitutionnel a jugé que la notion d'organisation particulière devait être entendue, en principe, comme visant l'extension aux TOM, sous réserve d'adaptations, d'une législation qui n'y est pas applicable de plein droit (décision de principe n° 80-122 DC du 22 juillet 1980). S'agissant de la Nouvelle Calédonie, l'article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 Mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie dispose que : « Le congrès est consulté par le haut commissaire, avant leur examen par le Conseil d'Etat, sur les projets de loi et sur les projets d'ordonnance, lorsqu'ils introduisent, modifient ou suppriment des dispositions spécifiques à la Nouvelle-Calédonie »

48 () Décision 76-72 DC du 12 janvier 1977.


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