N° 236 - Rapport de M. Jean-Pierre Decool sur la proposition de loi de M. Jean-Pierre DECOOL relative à la création d'un chèque-emploi associatif (180)




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mis en distribution

le 7 octobre 2002

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N° 236

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 octobre 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 180) de M. Jean-Pierre DECOOL relative à la création d'un chèque-emploi associatif ,

PAR M. Jean-Pierre DECOOL,

Député.

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Emploi.

INTRODUCTION 5

I.- LE SOUTIEN AU MOUVEMENT ASSOCIATIF, UNE PRIORITÉ DE L'ACTION PUBLIQUE FAVORISANT L'EMPLOI 7

A. LE MOUVEMENT ASSOCIATIF, UNE RICHESSE IRREMPLAÇABLE 7

1) Un phénomène de masse 7

2) Un rôle social majeur 8

3) Un rôle économique essentiel 8

B) METTRE CETTE DYNAMIQUE AU SERVICE DE L'EMPLOI 9

1) Des difficultés à compenser par un soutien actif des politiques publiques 9

2) Un besoin spécifique des associations en matière d'emploi 10

II.- UNE MESURE SIMPLE ET CIBLÉE 11

A. UN DISPOSITIF ÉTROITEMENT INSPIRÉ DU SUCCÈS DU CHÈQUE-EMPLOI SERVICE 11

1) La reprise d'une expérience réussie 11

2) Des traits communs avec le chèque-emploi service 11

B. DES ADAPTATIONS LIÉES À LA SPÉCIFICITÉ DES ASSOCIATIONS 13

1) Des adaptations prévues par le texte initial 13

2) Un complément apporté au texte sur la nature des emplois 14

TRAVAUX DE LA COMMISSION 15

Article 1er (articles L. 128-1 et L. 128-2 nouveaux du code du travail) : Création du chèque-emploi associatif 17

Article 2 : Gage 17

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 18

INTRODUCTION

Nul ne saurait contester la vitalité et la richesse de la vie associative dans notre pays. On estime le nombre des associations à près de 900 000, le rythme de leurs créations va croissant, le nombre des bénévoles approche les 11 millions. Leur impact en termes économiques et sur la création d'emplois est évidemment déterminant.

Pour autant, au-delà de ce constat consensuel, force est de constater que la réalité du monde associatif est encore mal appréhendée, sinon par nos concitoyens, du moins par des règles de droit qui ne font que malaisément la distinction entre entreprises et associations. Le droit élaboré pour les premières se révèle parfois inadapté aux secondes. Les discussions qui ont entouré la clarification du régime fiscal des associations à la fin de la précédente décennie en constituent un bon exemple. Le droit du travail n'est pas exempt de ce défaut.

Comme le soulignait M. Jean Bastide, alors président du Conseil national de la vie associative (CNVA), lors des Assises nationales de la vie associative de 1999, « (...) on s'intéresse à ce que  font les associations pas à ce qu'elles sont ».

La présente proposition de loi entend rompre avec cette approche éloignée des préoccupations de ceux qui font vivre nos associations, les animent, les portent. Il n'est pas question de leur permettre de s'affranchir des règles du droit du travail ou de la protection sociale. En revanche, il s'agit de permettre à celles qui n'ont pas encore véritablement franchi le cap du passage au statut d'employeur de surmonter les réticences psychologiques qui l'accompagnent. De ce point de vue, les petites et moyennes associations sont bien plus proches dans leur comportement des particuliers que des entreprises. Comment embaucher ? Comment rédiger un contrat de travail ? Comment faire un bulletin de paie ? Comment calculer les cotisations sociales ? Les questions sont innombrables. Si elles ne sont pas insolubles, elles découragent souvent l'embauche en bonne et due forme de salariés.

Le texte dont est saisie la commission des affaires culturelles, familiales et sociales tente donc de lever cet obstacle psychologique, de simplifier l'embauche et la gestion de salariés par les associations. Il s'inspire pour ce faire du dispositif du chèque-emploi service destiné aux particuliers employeurs. Il prévoit également, dans le même esprit d'incitation à l'embauche, de mettre en place un allégement des charges patronales dues pour les salariés embauchés par le biais de ce dispositif.

I.- LE SOUTIEN AU MOUVEMENT ASSOCIATIF,
UNE PRIORITÉ DE L'ACTION PUBLIQUE FAVORISANT L'EMPLOI

A. LE MOUVEMENT ASSOCIATIF, UNE RICHESSE IRREMPLAÇABLE

1) Un phénomène de masse

Le centenaire de la loi de 1901 a fourni l'an dernier de multiples occasions de rappeler la richesse et le dynamisme constant du mouvement associatif français. Le prochain bilan triennal réalisé par le Conseil national de la vie associative confirmera sans aucun doute cette tendance. Il semble opportun pour mesurer l'impact de la présente proposition de loi de rappeler quelques grands traits de la vie associative.

La loi de 1901 relative au contrat d'association a mis fin à une tradition remontant à plusieurs siècles qui enserrait la liberté d'association dans un régime oscillant entre le déni d'existence, l'interdiction et la mise sous tutelle. A cette époque, il se créait quelques centaines d'associations par an dont l'activité était corsetée, étroitement surveillée. La loi de 1901, parfois critiquée pour sa souplesse, a libéré le mouvement associatif puisque se créent en France chaque année près de 70 000 associations. Ce dynamisme va d'ailleurs croissant : on ne comptait que 20 000 déclarations de création en préfecture dans les années 1970.

Il est difficile de parvenir à un décompte précis des associations existantes, compte tenu de ce mouvement incessant de créations, de dissolutions opérées souvent de fait mais plus rarement déclarées ou de mise en sommeil. Ce n'est pas par hasard que l'on se réfère couramment à la « vie » associative ou au « mouvement » associatif. Il s'agit d'un monde en perpétuelle évolution. Toutefois, les estimations convergent pour situer le nombre d'associations existantes et actives autour de 900 000.

Tout aussi impressionnant est le nombre des Français membres d'une ou plusieurs associations : parmi les personnes âgées de plus de 14 ans, ils sont près de 20 millions, avec ces dernières années une augmentation significative de la part des plus jeunes (les moins de vingt-cinq ans) et des plus de 49 ans. Dans ces tranches d'âge, près d'un Français sur deux est membre d'au moins une association.

Il convient par ailleurs de noter que l'engagement associatif concerne de façon à peu près homogène tous les Français. Il n'y a guère de distinctions par exemple entre les zones rurales et les zones urbaines, sinon dans l'objet des associations : celles dont l'objet est sportif, religieux ou centré sur le troisième âge sont plus présentes en zones rurales. On notera cependant la vitalité particulière des régions les plus peuplées : près de 20 % des associations créées chaque année le sont dans les départements de la région parisienne, des Bouches du Rhône, du Rhône ou du Nord. Ce dernier département entretient donc la longue tradition qui est la sienne d'un engagement associatif très vivace : on n'y dénombre pas moins de 70 000 associations actives.

La santé du mouvement associatif, lieu de sociabilité et de solidarité, intéresse donc chacun d'entre nous.

2) Un rôle social majeur

Cette évolution quantitative du phénomène associatif est à relier avec l'une des caractéristiques majeures du mouvement associatif : la diversification de ses actions. Le mouvement associatif est en effet particulièrement réactif aux évolutions de la société. Il arrive fréquemment qu'il s'approprie de nouveaux champs de réflexion et mette en place de nouveaux modes d'action avant même que les pouvoirs publics ne s'en saisissent. Le mouvement associatif est un lieu privilégié de l'innovation en matière d'action collective.

On a pu constater au fur et à mesure de son développement une mutation progressive de l'objet associatif. Centré à l'origine sur la défense d'intérêts communs  -  on ne peut passer sous silence les liens étroits qui ont uni la défense de la liberté syndicale et celle de la liberté d'association -, l'objet associatif tend de plus en plus au développement d'activités en commun : associations sportives, culturelles, d'aides à la personne, ...

Le dynamisme de l'activité associative est de fait particulièrement perceptible dans les secteurs suivants :

- les activités culturelles avec près du quart des créations annuelles et cette part va croissant depuis 1990 ;

- le sport avec plus de 15 % des créations annuelles ;

- le domaine de la santé et de l'action sociale avec plus de 8 % des créations entre 1995 et 1997 ; cette part a chuté depuis le milieu des années 80 : cette baisse tient à l'évolution des dispositifs publics en la matière (décentralisation, nouvelles prestations, ...) ;

- éducation, formation et logement restent stables autour de 7 à 8 % des créations annuelles.

Ce sont donc des domaines essentiels de la vie quotidienne qui dépendent largement de la vie associative

3) Un rôle économique essentiel

Le budget cumulé des associations s'élève à près de 50 milliards d'euros, soit entre 3,5 et 4 % du PIB. Le secteur associatif, loin de l'amateurisme qui lui est parfois prêté, est l'un des premiers employeurs de France. Loin derrière l'Etat, il emploie presque autant de salariés que l'artisanat. Au 31 décembre 1995, plus de 120 000 associations employaient près de 1,2 millions de personnes soit un équivalent de 960 000 emplois à temps plein.

Ces emplois se concentrent essentiellement dans les associations du secteur de la santé et de l'action sociale qui emploient 560 000 salariés (380 000 équivalent temps plein), de l'éducation avec 167 000 salariés et de la culture et du sport avec 85 000 salariés.

L'emploi associatif joue un rôle essentiel dans le dynamisme de certains dispositifs de la politique de l'emploi, avec par exemple 35 % des contrats emplois solidarité et 92 000 emplois jeunes créés fin 2001, mais aussi dans l'embauche de certains publics. On ne saurait passer sous silence sa contribution à l'emploi des femmes qui occupent plus de 70 % des emplois associatifs.

A la lecture de ces éléments, on perçoit l'intérêt qu'il y a à développer une politique favorable à l'embauche par les associations, intérêt pour les associations mais également pour la collectivité.

B) METTRE CETTE DYNAMIQUE AU SERVICE DE L'EMPLOI

1) Des difficultés à compenser par un soutien actif des politiques publiques

On ne reviendra pas en détail sur les difficultés que connaissent encore parfois les associations dans leurs relations avec l'administration fiscale en dépit des clarifications apportées ces dernières années au régime qui leur est applicable.

En revanche, il semble indispensable de rappeler les difficultés qu'elles rencontrent dans le versement des subventions publiques. Les associations déplorent souvent la lourdeur des procédures préalables à l'octroi d'une subvention. On ne saurait négliger l'impact négatif de procédures tatillonnes, de la multiplicité des courriers et demandes complémentaires, de l'abondance des pièces réclamées. Tout cela concourt souvent à freiner l'activité des associations et finit aussi trop souvent par saper l'énergie des adhérents. Les réponses apportées ces dernières années avec la mise en place de procédures dites de dossier unique voire de guichet unique méritent d'être poursuivies et amplifiées.

Il en va de même pour le paiement des subventions souvent tardif dans l'année : la généralisation de procédures de paiement simplifié, sans visa préalable du comptable public, pour les subventions inférieures à un certain montant, un traitement prioritaire en début d'année des reconductions de subventions, le développement des conventions pluriannuelles entre associations et financeurs constituent des pistes à explorer de façon impérative. Les associations souffrent de ces retards : comment escompter qu'elles s'engagent dans une démarche d'embauche quand l'avenir des financements est aussi incertain ?

Les dispositifs publics de soutien aux associations doivent être confortés et prendre leur part à ce soutien à l'emploi, notamment dans les petites associations.

Ainsi, le Fonds national de développement de la vie associative (FNDVA), chargé d'aider à la formation des bénévoles, illustre quelques-uns des travers de l'aide aux associations : il n'existe aujourd'hui pas d'assurance sur l'évolution du montant de ce fonds ; il n'en existe pas davantage sur sa pérennité qui semble menacée par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances ; il semble de fait davantage profiter aux grandes associations, généralement parisiennes, du fait de sa faible déconcentration. Autre instrument essentiel, le Fonds national pour le développement du sport (FNDS) attribue ses aides dans des conditions qui défavorisent également de fait les petites associations. Quant au dispositif issu du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP), il reste trop lourd à manier et se caractérise par une attribution centralisée, insuffisamment transparente quant aux critères d'attribution retenus.

Ce ne sont là que quelques exemples d'instruments indispensables sur le fond, généreux dans leurs principes et qu'il convient de conforter, mais en partie inadaptés dans leur mise en _uvre, notamment pour les petites associations. Une réflexion s'impose sur la prise en compte de l'usage du chèque-emploi associatif dans ces dispositifs. Pourquoi ne ferait-on pas des associations qui recruteront par chèque-emploi associatif, qui s'engagent ainsi doublement à créer des emplois et à faire _uvre de transparence, des destinataires privilégiés de ces financements ? Sans en faire un critère essentiel, l'usage du chèque-emploi associatif devrait donner lieu à un préjugé favorable dans l'attribution des aides versées dans le cadre de ces dispositifs.

2) Un besoin spécifique des associations en matière d'emploi

Il existe de véritables besoins d'embauche non satisfaits dans le secteur associatif.

La première raison tient évidemment au dynamisme de ce secteur. Si les 70 000 associations qui voient le jour chaque année n'embauchent pas toutes, surtout dès leur constitution, il n'existe pas moins une réelle demande.

La deuxième raison tient à la technicité croissante d'un certain nombre d'activités qui suppose l'appui de professionnels. On peut citer par exemple l'animation, l'entraînement de sportifs, l'encadrement, la gestion de personnel, la comptabilité, la réponse aux appels d'offres dans le cadre de marchés publics, la mise en place et la gestion de sites Internet,... On a longtemps opposé ce besoin en personnel qualifié à la pratique du bénévolat. L'essence de l'activité associative reposerait sur l'engagement et s'opposerait donc à une sorte d'institutionnalisation dont l'embauche de personnel salarié serait le signe. Cette vision est surannée, comme le soulignait lors des Assises nationales de la vie associative le rapporteur de l'atelier sur la valorisation des ressources humaines dans les associations : « L'opposition bénévole-salarié est un outil conceptuel dépassé. Le bénévolat crée de l'activité qui permet le développement de l'emploi, lequel soutient l'engagement bénévole dans l'association ».

La troisième raison, plus circonstancielle, tient à l'inévitable venue à terme du dispositif Nouveaux services - Emplois jeunes. De fait, ces emplois n'ont pas créé dans nombre d'associations le sentiment d'être de véritables employeurs : pas de prise en charge financière, pas d'obligation de formation ; bref, le sentiment d'un emploi livré clef en main. Il n'en demeure pas moins que la fin de ce dispositif va créer un besoin d'embauche sur de véritables emplois auquel certaines associations, notamment les plus petites, ne donneront pas suite sous la forme d'un contrat de travail classique, assorti des obligations liées au statut d'employeur.

De fait, les associations préfèrent parfois développer certaines pratiques pour s'affranchir des contraintes liées à l'embauche et à la gestion de personnel : parmi celles-ci, on peut mentionner la remise de cadeaux, la prise en charge de l'activité sous forme de frais de déplacement (y compris lorsque l'activité a lieu dans la commune de résidence), la conclusion de contrats de prestations de service avec des indépendants qui n'en ont parfois que le nom. Toutes ces solutions, parfois mises en _uvre en toute bonne foi et en parfaite méconnaissance de leur éventuelle illégalité, ne servent ni l'intérêt général, ni celui des salariés potentiels ainsi dépourvus de couverture sociale, ni même celui des associations trop souvent confrontées à leurs conséquences en termes juridiques (procès intentés par d'anciens « salariés », éventuelle interdiction d'activité), financiers (amendes, rappels de cotisations, ...) et sur leur crédibilité auprès des adhérents, des partenaires et des financeurs.

Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de donner aux associations un signe fort qui les incite à sauter le pas en devenant employeur.

II.- UNE MESURE SIMPLE ET CIBLÉE

A. UN DISPOSITIF ÉTROITEMENT INSPIRÉ DU SUCCÈS DU CHÈQUE-EMPLOI SERVICE

1) La reprise d'une expérience réussie

Les difficultés que rencontrent les petites associations face à l'embauche sont comparables à celles auxquelles sont confrontés les particuliers employeurs. Dès lors, il semble utile de s'inspirer du dispositif de chèque-emploi service mis en place au profit de ceux-ci.

Le chèque-emploi service a d'abord été, en vertu de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, mis en _uvre à titre expérimental du 1er décembre 1994 au 31 décembre 1996 puis pérennisé par la loi du 29 janvier 1996 en faveur du développement des emplois de services aux particuliers, qui en a par ailleurs étendu le champ.

Nul ne conteste l'intérêt de cette mesure : par sa simplicité, elle a généré l'afflux d'environ 200 000 nouveaux employeurs soit une création d'environ 20 000 équivalents temps plein. Il a en outre contribué à une réduction significative du travail illégal. Dès lors, la solution d'un dispositif similaire pour les associations s'imposait de façon logique.

2) Des traits communs avec le chèque-emploi service

L'article L. 128-1 créé dans le code du travail par l'article 1er de la proposition de loi s'apparente au chèque-emploi service sur quatre points.

a) Il s'agit d'abord de faciliter l'embauche.

A cet effet, le dispositif prévoit (premier alinéa de l'article L. 128-1), d'une part, que l'employeur est, grâce au volet social annexé au chèque-emploi, dispensé de se déclarer auprès des organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale comme employeur dans les huit jours suivant l'embauche, ainsi que de demander l'immatriculation du salarié ; il prévoit, d'autre part, que l'usage du chèque-emploi associatif dispense l'employeur de rédiger un contrat de travail, obligation prévue pour les contrats à durée déterminée par l'article L. 122-3-1 du code du travail et pour les contrats à temps partiel par l'article L. 212-4-3 du même code.

Sur ce dernier point, il est à noter que, comme pour le chèque-emploi service, le bénéfice de la disposition est réservé aux emplois de courte durée, moins de huit heures par semaines et moins de quatre semaines consécutives.

b) Il s'agit ensuite de faciliter le paiement du salarié.

Le chèque-emploi associatif permettra (premier alinéa de l'article L. 128-1) à l'employeur de payer le salarié qui sera ainsi réputé avoir répondu à l'obligation faite par l'article L. 143-1 du code du travail de payer le salaire en espèces, par chèque ou par virement. Ce chèque peut être rédigé facilement puisque l'employeur ne règlera que le salaire net ; le salarié n'aura pas besoin d'attendre que l'employeur inexpérimenté ait fait le calcul de l'ensemble des charges salariales à déduire.

Le chèque-emploi associatif dispensera également de l'établissement d'un bulletin de salaire (deuxième alinéa de l'article L. 128-1), se substituant ainsi à l'obligation posée à l'article L. 143-3 du code du travail.

La rémunération portée sur le chèque-emploi associatif comprend une indemnité de congés payés égale à un dixième de la rémunération (quatrième alinéa de l'article L. 128-1).

c) Il s'agit enfin de simplifier les déclarations et le calcul des cotisations et contributions sociales.

La simplification des déclarations relatives aux cotisations sociales (maladie, maternité, vieillesse, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, allocations familiales) et contributions à l'assurance chômage et aux institutions de retraites complémentaires passe par les dispositions suivantes (premier alinéa de l'article L. 128-1) :

- la transmission du volet social annexé au chèque-emploi associatif se substituera à l'obligation pour l'employeur de transmettre le montant total des salaires versés par catégories de risques d'accidents du travail prévue à l'article L. 242-6 du code de la sécurité sociale et à celle d'envoyer la déclaration nominative trimestrielle à l'URSSAF ;

- il devrait y avoir un interlocuteur unique pour la transmission et le traitement de toutes ces déclarations avec la création d'un organisme centralisateur, comme l'URSSAF de Saint-Etienne pour les chèques-emploi service ;

- les calculs seront effectués par l'organisme de recouvrement : l'employeur n'aura aucun calcul de cotisations à effectuer.

d) Usage et nature du chèque-emploi

On rappellera que la possibilité d'utiliser le chèque-emploi associatif est soumise à l'accord du salarié (deuxième alinéa de l'article L. 128-1).

Il semble par ailleurs utile de rappeler quelques éléments sur la nature du contrat ainsi conclu. La référence, faite par l'article L. 129-2 du code du travail définissant les caractéristiques du chèque-emploi service et reprise dans le présent dispositif, à la dispense de contrat de travail écrit, ne suffit pas à elle seule à préciser si le contrat est conclu pour une durée déterminée ou indéterminée. La circulaire ministérielle DE/DSS n° 96-25 du 6 août 1996 a apporté les précisions suivantes.

Le contrat est à durée déterminée :

- lorsque le salarié est employé moins de quatre semaines consécutives par an, indépendamment de la durée hebdomadaire du travail ;

- ou lorsqu'il est employé plus de quatre semaines consécutives dans l'année, moins de huit heures par semaine, sur un emploi occasionnel, temporaire.

En revanche, le contrat est à durée indéterminée :

- lorsque le salarié est employé plus de quatre semaines consécutives dans l'année, moins de huit heures par semaine, sur un emploi non occasionnel, durable ;

- ou lorsque le salarié est employé plus de quatre semaines consécutives dans l'année et plus de huit heures par semaine.

Dans un cas comme dans l'autre, les règles de droit commun relatives à la rupture du contrat de travail sont applicables.

Il semblerait logique de retenir les mêmes critères pour les contrats de travail auxquels s'appliqueront les chèques-emploi associatif.

Enfin, dans un souci d'incitation à l'embauche, de même que les particuliers utilisant le chèque-emploi service bénéficient d'une déduction fiscale, la proposition comporte (dans le dernier alinéa de l'article 1er créant un article L. 128-2 du code du travail) un allégement des charges patronales des associations qui paieront par chèque-emploi associatif. Cet allégement prend la forme d'un abattement sur les cotisations sociales patronales d'assurances sociales, des accidents du travail et d'allocations familiales, dont le taux sera fixé par décret.

B. DES ADAPTATIONS LIÉES À LA SPÉCIFICITÉ DES ASSOCIATIONS

1) Des adaptations prévues par le texte initial

a) La première de ces adaptations réserve le bénéfice du dispositif aux associations à but non lucratif (premier alinéa de l'article L. 128-1).

Il ne s'agit en effet pas de créer des distorsions de concurrence entre les employeurs du secteur concurrentiel. Dès lors, le chèque-emploi associatif pourra être utilisé par les associations répondant à un faisceau de critères utilisé par l'administration fiscale :

- l'association couvre des besoins non pris en compte par le marché ou pris en compte de façon insatisfaisante ;

- son activité est essentiellement tournée vers les personnes rencontrant des difficultés économiques ou sociales ;

- les éventuels bénéfices sont réinvestis dans l'activité de l'association ;

- les prix pratiqués sont inférieurs à ceux proposés par les entreprises pour des prestations comparables ;

- l'association n'a pas recours à des méthodes commerciales comme la publicité même si elle peut procéder des opérations d'information pour recueillir des dons ou informer sur ses activités.

b) La seconde adaptation limite le bénéfice du dispositif aux petites et moyennes associations.

 En vertu du troisième alinéa de l'article L. 128-1, il ne sera pas possible d'utiliser le chèque-emploi associatif dans les associations employant au plus un équivalent temps plein. Il s'agit en effet de faciliter l'embauche dans les petites associations, pas de prévoir un assouplissement des obligations pour les associations qui sont familières du statut d'employeur.

Cette limitation doit être clarifiée. Le droit d'usage du chèque-emploi associatif sera ouvert aux associations employant un ou plusieurs salariés dès lors que le total des heures de chaque contrat de travail n'excède pas la durée légale du travail. Il s'agit là d'une condition d'accès au dispositif. Cette condition devra en outre être respectée de façon constante par l'association, c'est-à-dire que le nombre d'heures rémunérées par chèque-emploi associatif sera plafonné au niveau d'un équivalent temps plein.

2) Un complément apporté au texte sur la nature des emplois

Outre les adaptations précédemment évoquées prévues par le texte initial, le rapporteur propose un amendement portant sur le champ du dispositif afin de l'élargir à l'ensemble de l'emploi associatif. On rappellera que les chèques-emploi service sont eux réservés à l'emploi de personnel à domicile pour des tâches ménagères ou familiales.

Le texte initial de la proposition de loi n'autorisait l'usage du chèque-emploi associatif que pour les emplois d'animation. Cette rédaction présentait deux inconvénients :

- la référence aux emplois d'animation semblait renvoyer à la seule convention collective relative à l'animation socioculturelle laquelle, si elle couvre une large palette d'emplois, ne régit pas la situation de l'ensemble des animateurs au sens où les associations utilisent couramment ce mot ;

- elle interdisait le recours au dispositif pour les autres emplois, notamment ceux d'aide à la gestion dont la technicité requiert justement de façon fréquente l'embauche de salariés.

L'aménagement proposé suscite naturellement une interrogation sur les conventions collectives applicables dont la détermination est nécessaire pour le calcul de certaines cotisations ou contributions. Cette information pourrait facilement figurer sur le volet social transmis à l'organisme gestionnaire des chèques-emploi associatif. Là encore, le dispositif se caractérise donc par sa simplicité.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné, sur le rapport de M Jean-Pierre Decool, la présente proposition de loi au cours de sa séance du 2 octobre 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Le rapporteur a par ailleurs annoncé qu'il présenterait un amendement élargissant le champ du dispositif, qui ne concerne que les emplois d'animation dans le texte initial, à l'ensemble des emplois associatifs.

M. Jean-Marie Geveaux s'est réjoui d'un texte qui offrira aux petites associations une plus grande souplesse dans leur fonctionnement. Il a ensuite rappelé que le FNDS est d'abord dévolu au développement des équipements sportifs des clubs. Il ne paraît donc pas une bonne chose de puiser dans ce fonds alors même qu'il connaît de perpétuelles difficultés d'approvisionnement. En revanche, il existe des associations pour l'emploi sportif qui seraient mieux en mesure, par le personnel dont elles disposent, de répondre aux besoins des petites associations.

M. Jean-Marie Le Guen a observé que cette proposition de loi était d'un apport limité. En effet, en février 2002, un projet de loi étendant l'emploi du chèque-emploi service aux petites et moyennes entreprises et à l'artisanat, donc bien au-delà du seul milieu associatif, avait été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale.

S'il n'y a donc pas d'hostilité de principe à cette proposition, elle soulève cependant un certain nombre de problèmes, notamment celui de l'évolution des charges sociales liées à ces emplois et de la compensation par l'Etat des exonérations qui y seront attachées. Surtout cette mesure, quoique techniquement utile, ne répond pas aux véritables difficultés que rencontrent aujourd'hui les associations. Ces difficultés résultent des décisions prises par le gouvernement de ne pas reconduire les emplois-jeunes et de remettre en cause les contrats d'emplois aidés.

M. Alain Néri s'est inquiété du risque d'atteinte au fonctionnement du FNDS. Les recettes de ce fonds ont été augmentées l'année dernière par l'accroissement de la part du produit de la Française des jeux qui lui est affectée. Cela a permis d'accroître les aides aux clubs sportifs. Il ne faut donc pas porter atteinte au FNDS et à son mode de gestion paritaire. Il en est de même pour le dispositif FONJEP dont le gouvernement précédent a augmenté le nombre de postes et l'aide accordée pour chaque poste. Enfin, remettre en cause les emplois-jeunes, les CES et les CEC prive de nombreuses associations d'un ballon d'oxygène indispensable.

Mme Martine Aurillac a estimé que cette proposition de loi permet de donner un signal fort aux associations, qui jouent un rôle irremplaçable, notamment dans l'aide à domicile. Deux points restent toutefois à éclaircir : à quelle convention collective seront rattachés les emplois ainsi créés et de quels régimes de retraite et de prévoyance bénéficieront ces salariés ?

M. Jean Besson a rappelé que le précédent gouvernement avait créé un titre de travail simplifié pour les entreprises de moins de onze salariés dans les départements d'outre-mer mais qu'il n'avait pas pour autant étendu les chèques emploi-service. L'intérêt de cette proposition de loi consiste à lutter contre les pratiques existant dans certaines associations, le travail illégal ou le versement d'indemnités de déplacement ou de bons d'essence. Cela permettra de donner une véritable couverture sociale aux animateurs et gestionnaires des associations. L'usage de ce moyen de paiement simplifié facilitera la gestion d'un personnel parfois dispersé sur un vaste territoire, la gestion centralisée du dispositif étant assurée par l'organisme de recouvrement. On ne peut par ailleurs nier l'utilité d'une formule générale facilitant l'embauche et la gestion pour tous les petits employeurs (particuliers, associations, artisans, commerçants) mais, dans l'attente d'un tel texte, le dispositif spécifique proposé à un réel intérêt. Enfin, il convient de noter que la proposition ciblée ne constituera en aucun cas une aide aux associations qui détournent le statut associatif à but non lucratif pour exercer une activité économique.

M. Jean-Marie Le Guen a rappelé que l'Assemblée nationale a adopté en première lecture, en février dernier, le projet de loi relatif aux petites entreprises et à l'artisanat dont la discussion pourrait être poursuivie et qui permettrait de simplifier l'embauche pour l'ensemble des petits employeurs. Il est indispensable d'obtenir du gouvernement des éclaircissements sur le montant de l'abattement de cotisations qui sera retenu et sur son mode de compensation aux régimes de sécurité sociale.

M. Jean Besson a souligné que les exonérations de charges sociales seront compensées par la hausse des cotisations induites sur les nouveaux déclarants, comme l'illustre l'exemple des chèques emploi-service qui ont créé 200 000 emplois.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a formulé les observations suivantes :

- le dispositif proposé permet à la fois une transparence accrue et une simplification des procédures ce qui servira l'emploi ;

- comme le ministre des affaires sociales l'a rappelé hier lors de la séance des questions au gouvernement, les CEC et les CES ne sont aucunement remis en cause ;

- il n'entre pas dans le but de la proposition de loi de remettre en cause les outils précieux que constituent le FNDS, le FNDVA ou le dispositif FONJEP, bien au contraire. Il ne s'agit pas d'en restreindre l'usage ou les moyens mais de réfléchir à la prise en compte du recours au chèque-emploi associatif comme paramètre dans l'attribution des aides ;

- une mise en _uvre volontariste de ce nouveau dispositif par les associations facilitera l'embauche ;

- les exonérations de cotisations prévues seront compensées aux organismes de sécurité sociale en application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.

Mme Marie-Françoise Clergeau a observé que les chèques-emploi service sont réservés à des emplois à domicile du type garde d'enfants, jardinier ou femme de ménage et ne peuvent être utilisés pour rémunérer un plombier ou un serrurier.

M. Jean Besson s'est opposé à cette interprétation en expliquant que les chèques emploi services permettent d'employer tout travailleur indépendant relevant de la convention collective des gens de maison. C'est sur le fondement de cette convention que l'URSSAF calcule les cotisations sociales à verser pour ce type d'emploi.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er 

(articles L. 128-1 et L. 128-2 nouveaux du code du travail) 

Création du chèque-emploi associatif

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur.

Elle a adopté un amendement du rapporteur étendant le bénéfice du dispositif du chèque-emploi associatif à tous les types d'emplois susceptibles d'être exercés pour le compte d'une association, la rédaction antérieure visant les seuls emplois d'animation.

La commission a adopté un amendement de précision et deux amendements rédactionnels du même auteur.

La commission a ensuite adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 2

Gage

La commission a adopté l'article 2 sans modification.

Elle a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi rédigée.

En conséquence, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l'Assemblée nationale d'adopter la proposition de loi dont le texte suit.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Proposition de loi relative à la création d'un chèque-emploi associatif

Article 1er

Le chapitre VIII du titre II du livre Ier du code du travail est ainsi rédigé :

« Chapitre VIII

« Associations à but non lucratif

« Art. L. 128-1. - Un chèque-emploi associatif peut être utilisé par les associations à but non lucratif pour rémunérer des salariés et pour simplifier les déclarations et paiements afférents aux cotisations et contributions dues au régime de sécurité sociale, au régime d'assurance chômage et aux institutions de retraites complémentaires et de prévoyance.

« Le chèque-emploi associatif ne peut être utilisé qu'avec l'accord du salarié. Sa remise se substitue à celle du bulletin de paie, prévue par l'article L. 143-3.

« Le chèque-emploi associatif s'adresse aux associations employant au plus un équivalent temps plein. Pour les emplois dont la durée de travail n'excède pas huit heures par semaine ou ne dépasse pas quatre semaines consécutives dans l'année, l'employeur et le salarié qui utilisent le chèque-emploi associatif sont réputés satisfaire aux obligations mises à la charge de l'un ou de l'autre par les articles L. 122-3-1 et L 212-4-3.

« La rémunération portée sur le chèque inclut une indemnité de congés payés dont le montant est égal au dixième de la rémunération totale brute due au salarié pour les prestations effectuées.

« Les chèques-emploi associatif sont émis et délivrés par les établissements de crédit, ou par les institutions ou services énumérés à l'article L. 518-1 du code monétaire et financier, qui ont passé convention avec l'Etat.

« Les mentions figurant sur le chèque-emploi associatif ainsi que ses modalités d'utilisation sont fixées par décret.

« Art. L. 128-2. - Les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales qui sont assises sur les rémunérations versées sous la forme de chèques-emploi associatif font l'objet d'un abattement dont le taux est fixé par décret. »

Article 2

Les pertes de recettes résultant pour la sécurité sociale de l'application des dispositions du dernier alinéa de l'article 1er de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

N° 0236 - Rapport  de M. Jean-Pierre Decool sur la proposition de loi créant le chèque-emploi associatif


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