N° 330 tome 2 - Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale , après déclaration d'urgence, de financement de la sécurité sociale pour 2003 (250)




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mis en distribution

le 28 octobre 2002

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N° 330

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 octobre 2002.

RAPPORT

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALESSUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n° 250),

TOME II


ASSURANCE MALADIE ET ACCIDENTS DU TRAVAIL

PAR M. Jean BARDET,

Député.

Sécurité sociale.

INTRODUCTION 7

I.- LES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE : MIEUX ÉVALUER POUR ÉVITER LES DÉRAPAGES 9

A. LE MODE DE CALCUL DE L'ONDAM 9

B. UNE CROISSANCE NON MAÎTRISÉE DEPUIS 1997 CAR NON MÉDICALISÉE 11

II.- LES SOINS DE VILLE HORS MÉDICAMENT : RENOUER LES FILS DU DIALOGUE 15

A. LE DIALOGUE ENTRE LES ACTEURS A ÉTÉ RESTAURÉ 15

1. La revalorisation de la profession de médecin généraliste a constitué un acte fondateur 15

a) Un premier accord, insuffisant, a été conclu le 24 janvier 2002 entre les généralistes et les caisses nationales 15

b) Un deuxième accord est intervenu le 5 juin 2002 16

c) L'accord entre les caisses et les organisations représentatives des pédiatres libéraux 17

2. Le retour de la confiance est passé par d'autre type de mesures 17

a) Les professions concernées 17

b) La généralisation des ordonnances sécurisées 17

3. Promouvoir le rôle du Parlement dans le contrôle des finances sociales 18

B. VERS UNE RÉGULATION FONDÉE SUR LA CONFIANCE PARTAGÉE ET LA PROMOTION DE LA QUALITÉ DES SOINS 18

1. Mettre fin à la maîtrise comptable 18

2. Vers l'optimisation médicalisée des dépenses de soins de ville d'assurance maladie 19

a) L'organisation des négociations 19

b) Le pari d'une optimisation médicalisée grâce à la confiance partagée 19

III.- LES DÉPENSES DE MÉDICAMENT : ÉVALUER POUR MIEUX RÉGULER 21

A. LE CARACTÈRE VIGOUREUX DE LA CROISSANCE DES DÉPENSES DE MÉDICAMENT, CONFIRMÉ EN 2001, TEND À SE RÉDUIRE EN 2002 21

1. Les dépenses 2001 de remboursements de médicaments ont atteint 15 milliard d'euros 21

a) Présentation des chiffres pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie 21

b) Enseignements de l'étude réalisée par la CNAM sur la période 2000-2001 22

2. La dépense pour 2002 se maintient à un haut niveau 23

3. Le marché des médicaments génériques augmente mais reste trop faible 23

a) Une part de marché limitée 23

b) Les conditions du développement des génériques ne sont pas encore toutes remplies 24

B. LE « PLAN MÉDICAMENT » DOIT FAIRE PARTIE D'UN ENSEMBLE PLUS VASTE VISANT À PROMOUVOIR LE BON USAGE DU MÉDICAMENT 25

1. Tirer les conclusions de la réévaluation de l'efficacité des médicaments 25

2. La promotion du bon usage : « le juste soin au juste prix » 27

IV - L'HÔPITAL : MODERNISER LA GESTION 29

A. DE LA TARIFICATION À LA PATHOLOGIE À LA TARIFICATION À L'ACTIVITÉ 29

B. LE MÉDICAMENT À L'HÔPITAL : UN COÛT MAL MAÎTRISÉ 33

1. La réserve hospitalière 34

2. Les autorisations temporaires d'utilisation 36

V.- LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL : PRÉPARER L'AVENIR 39

A. UNE SITUATION FINANCIÈRE SAINE ET STABILISÉE 39

B. LES ACTIONS DE PRÉVENTION ET L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE 40

C. DES RÉFORMES DE STRUCTURE ET DE FOND 41

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION 43

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE ET AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL 48

TITRE 1ER : ORIENTATIONS ET OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE 48

Article 2 (article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997) : Création d'une annexe sur la médicalisation de l'ONDAM 48

TITRE III : DISPOSITIONS RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE 50

Article 10 (articles L. 162-222, L. 162-22-3, L. 162-22-8 du code de la sécurité sociale et L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles) : Mode de calcul de l'objectif quantifié national des cliniques privées 50

Article 11 (article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 et article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal) : Création d'une mission d'audit et d'expertise hospitalier 56

Article 12 (article L. 6122-19 du code de la santé publique) : Expérimentation du financement des hôpitaux en fonction de leur l'activité 58

Article 13 (article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et L. 6161-9 du code de la santé publique) : Fusion du Fonds de modernisation des établissements de santé avec le Fonds de modernisation des cliniques privées 61

Article 14 (article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique) : Extension des missions du Fonds pour l'emploi hospitalier 63

Article 15 (articles L. 162-5-9, L. 162-15-2, L. 162-15-3, L. 162-5-13, L. 162-15, L. 322-5-1, L. 162-12-16, L. 315-3, L. 615-13 du code de la sécurité sociale et article L. 732-5 du code rural) : Suppression du mécanisme dit des « lettres-clefs flottantes » et des comités médicaux régionaux 66

Article 16 (article L. 228-1 du code de la sécurité sociale) : Missions du conseil de surveillance de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés 69

Article 17 (article L. 162-16 du code de la sécurité sociale) : Spécialités délivrées sur la présentation d'une prescription rédigée en dénomination commune internationale 70

Article 18 (articles L. 183-1, L. 315-1, L. 315-1-1 nouveau, L. 615-13 du code de la sécurité sociale et article L. 732-5 du code rural) : Dénomination et missions du service médical de l'assurance maladie 73

Article 19 (article L. 162-5 du code de la sécurité sociale) : Mesures et procédures applicables aux médecins en cas de pratiques abusives 75

Article 20 (article L. 162-17-8 nouveau du code de la sécurité sociale) : Inscription accélérée sur la liste des médicaments remboursables 77

Article 21 (articles L. 162-17-4 et L. 162-17-9 nouveau du code de la sécurité sociale) : Pénalités financières applicables aux entreprises exploitant des médicaments 79

Article 22 (articles L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, L. 3411-2 et L. 3311-2 du code de la santé publique et L. 174-9-1 du code de la sécurité sociale) : Transfert à l'assurance maladie du financement des dépenses des centres spécialisés dans la prise en charge des toxicomanes 81

Article 23 (article L. 132-1 du code de la sécurité sociale) : Transfert à l'assurance maladie du financement des dépenses d'interruption volontaire de grossesse 83

Article 24 (article L. 6312-5 du code de la santé publique et articles L. 161-34 et L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale) : Financement du forfait de garde pour les entreprises de transports sanitaires 84

Article 25 (article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles et article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001) : Prolongation du délai pour la signature des conventions tripartites par les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes 85

Article 26 (article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles) : Réintégration des médicaments remboursables dans les tarifs de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur 87

Article 27 (articles L. 162-17-6 nouveau et L. 162-16 du code de la sécurité sociale) : Tarif forfaitaire de remboursement pour les médicaments 87

Article 28 (article 4 de la loi n°88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale) : Fin du mécanisme de cessation anticipée d'activité 90

Article 29 (articles L. 161-22 et L. 643-2 du code de la sécurité sociale) : Incitation à la poursuite et à la reprise d'activité pour les médecins et les infirmières 92

Article 30 : Dotation de financement de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux 94

Article 31 (article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999) : Missions et dotation de financement du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville 95

Article 32 : Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2003 96

Article 33 : Fixation de l'objectif de dépenses de la branche maladie pour 2003 97

Article 34 : Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie révisé pour 2002 99

TITRE IV : DISPOSITIONS RELATIVES AUX AUTRES BRANCHES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 101

Section 1 : Branche accidents du travail et maladies professionnelles 101

Article 35 (article 43 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002) : Dotation de financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante 101

Article 36 (article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002) : Dotation de financement du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante 102

Article 37: Montant du versement de la branche accidents du travail à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles 103

Article 38 (articles L. 221-4, L. 221-5, L. 227-1, L. 227-2, L. 227-3, L. 228-1 et L. 231-5-1 du code de la sécurité sociale) : Autonomisation de la gestion de la branche accidents du travail 104

Article 39 : Fixation de l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail pour 2003 106

INTRODUCTION

Il n'y avait pas de ministère de la santé de plein exercice depuis le 15 novembre 1995. La nomination de M. Jean-François Mattei à la tête d'un ministère de la santé autonome constitue une décision politique significative, que le rapporteur salue, en souhaitant que cette nomination contribuera à ce que les considérations sanitaires soient mieux prises en compte dans la définition de la politique gouvernementale dans son ensemble. En outre, le Président de la République a rendu public le 14 juillet dernier les trois chantiers de son deuxième mandat, chantiers, qui, à des degrés divers, concernent directement le système de santé : la lutte contre l'insécurité routière, la lutte contre le cancer et l'intégration des personnes handicapées.

Si la croissance des dépenses de santé est largement inéluctable, il faut identifier les soins et les produits de santé dont l'efficacité médicale justifie la prise en charge par l'assurance maladie. A cet égard, la fixation d'un taux de progression enfin réaliste de l'ONDAM et l'analyse des activités de soins au regard de la croissance de l'ONDAM vont dans le bon sens.

Dès sa nomination, le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, après avoir annoncé sa volonté de restaurer la confiance de tous les acteurs, particulièrement des médecins, a procédé à quelques décisions significatives en augmentant les ressources allouées aux hôpitaux et la rémunération des professionnels de santé. Compte tenu du calendrier électoral, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, qui n'a pas pu être précédé de la tenue de la conférence nationale de la santé, porte nécessairement les traces des choix passés.

Mais il porte déjà l'empreinte du futur. Le Ministre a annoncé l'engagement de mesures structurelles : un projet de loi de programmation de santé publique et un autre de réforme de la gouvernance du système de santé et d'assurance-maladie seront déposés au premier semestre de l'année 2003.

Dans ces conditions, l'examen du présent projet sera l'occasion de marquer l'attachement de tous à notre système de santé et d'assurance maladie, afin de garantir sa pérennité, renouant les fils brisés d'un dialogue pourtant indispensable entre l'Etat, les gestionnaires, les professionnels de santé et les patients.

I.- LES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE : MIEUX EVALUER POUR ÉVITER LES DÉRAPAGES

L'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale précise que « chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ». Le contenu de cet ONDAM, dont la définition est conventionnelle et ne résulte d'aucun texte, comprend, pour la métropole et les départements d'outre-mer, les dépenses de soins remboursées par les régimes obligatoires de base (prestations en nature et en espèces) pour les risques maladie et accidents du travail et les prestations en nature pour le risque maternité. En sont donc exclues les indemnités journalières maternité et les rentes d'accidents du travail. Cette définition ne prend pas non plus en compte les indemnités journalières versées directement par l'employeur aux agents des services et entreprises publics, des collectivités locales et de l'Etat.

L'ONDAM voté par le Parlement est décomposé librement par le Gouvernement, dans les quinze jours suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, en quatre enveloppes :

· L'enveloppe des soins de ville comprend les honoraires des professionnels de santé libéraux (y compris lorsqu'ils exercent à titre privé à l'hôpital), les prescriptions (médicaments et dispositifs médicaux) et les prestations en espèces (à l'exception des indemnités journalières de maternité et des prestations d'incapacité permanente).

· L'enveloppe des hôpitaux publics regroupe les versements sous forme de dotation globale aux établissements publics de santé, aux établissements privés participant au service public hospitalier (PSPH), y compris les établissements dont le financement relevait du prix de journée préfectoral et qui ont opté pour le régime de la dotation globale à compter du 1er janvier 1998, et aux hôpitaux militaires.

· L'enveloppe des cliniques privées comprend les dépenses des établissements à tarification conventionnelle, entrant ou non dans le champ de l'objectif quantifié national (OQN) relatif aux établissements privés d'hospitalisation.

· L'enveloppe médico-sociale comprend les dépenses des établissements prenant en charge les personnes âgées et/ou dépendantes, l'enfance inadaptée et les adultes handicapés.

Les départements d'outre-mer et les ressortissants français à l'étranger sont traités à part compte tenu de l'imprécision des données statistiques les concernant.

A. LE MODE DE CALCUL DE L'ONDAM

Le taux de croissance de l'ONDAM dépend de la base de calcul choisie (le dénominateur) : pour un même montant de l'objectif en euros, le taux sera plus faible si la base (de l'année précédente) est plus élevée. Le rebasage consiste à prendre en compte, pour calculer l'évolution de n-1 à n, la base égale non pas à l'objectif n-1 voté par le Parlement, mais le montant réalisé prévisionnel pour n-1 constaté pour la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre de cette année.

L'ONDAM est également défini en retranchant aux dépenses d'assurance maladie les remises conventionnelles versées par les entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au titre du dépassement de l'objectif d'évolution de leur chiffre d'affaires, dans le cadre des accords signés avec le Comité économique des produits de santé. Ces remises, ainsi que la clause de sauvegarde fiscale pour les entreprises non conventionnées (moins d'une quinzaine en 2001 sur les 200 entreprises du secteur), correspondent à un remboursement de dépenses excédentaires par rapport à l'objectif fixé. Cette diminution de dépenses est enregistrée sur l'enveloppe des soins de ville, qui comprend le poste médicaments.

Le passage des agrégats de la loi de financement de la sécurité sociale en droits constatés en 2002 a aussi entraîné un certain nombre de modifications comptables. Pour l'ONDAM, cela a consisté à calculer les dépenses d'assurance maladie non plus en date de remboursement (avec la fluctuation des retards de liquidation des feuilles de soins) mais en date de soins, ce qui est beaucoup plus conforme à la réalité. Il a ainsi fallu créer, pour la première fois, une base de dépenses en droits constatés sur laquelle asseoir l'objectif 2002. Pour ce faire, le ministère chargé de la sécurité sociale a appliqué aux réalisations 2000 en droits constatés le taux d'évolution prévisionnel des dépenses 2001. Les objectifs 2002 établis à partir de la base de dépenses en droits constatés ont ensuite été fixés en appliquant les taux d'évolution choisis pour chacun des secteurs, de manière purement comptable sans aucune prise en compte de la réalité des besoins sanitaires.

Ces objectifs 2002 prenaient en compte une enveloppe destinée au financement des trente-cinq heures, de 482 millions d'euros dans les établissements publics de santé et de 50 millions d'euros dans les établissements médico-sociaux. Ces objectifs ont également intégré les amendements suivants, adoptés lors de la discussion de projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 :

- 50 millions d'euros pour l'examen bucco-dentaire obligatoire ;

- 20 millions d'euros de crédits supplémentaires pour améliorer la prise en charge des enfants et des adultes autistes ;

- 80 millions d'euros correspondant à la création de la nouvelle branche accidents du travail du régimes des exploitants agricoles ;

- 27 millions d'euros pour la rétrocession de médicaments à l'hôpital.

Sur l'ONDAM 2002 ainsi fixé à 112,79 milliards d'euros en droits constatés, 23 millions d'euros ont été destinés au financement des réseaux de soins (11 millions d'euros sur l'enveloppe soins de ville et 12 millions d'euros sur l'enveloppe des établissements), en application de l'article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Pour calculer les taux de progression des différentes enveloppes composant l'ONDAM, il faut enfin tenir compte des transferts internes opérés par le gouvernement en fin d'année. Ces modifications de champ sont intégrées pour la détermination de la base de l'objectif de l'année suivante.

Chaque année, on enregistre en effet des transferts d'enveloppe : d'une part des transferts dits de fongibilité, qui correspondent à des changements de statut des établissements ou à des modifications de prise en charge de certaines prestations d'assurance maladie, et d'autre part des transferts statistiques, liés à l'amélioration de l'information statistique qui permet le reclassement d'un certain nombre de dépenses à l'intérieur de l'ONDAM.

Les principaux transferts à observer sont :

- en 2001, 76 millions d'euros transférés de l'enveloppe soins de ville vers l'enveloppe médico-sociale « personnes âgées » au titre de la mise en _uvre de la réforme de la tarification des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui met à la charge des budgets des établissements certaines dépenses de soins remboursées auparavant à l'acte ;

- en 2002, 107 millions d'euros transférés au titre de la réforme de la tarification des EHPAD et 352 millions d'euros transférés au sein de l'enveloppe hôpitaux publics, les établissements de santé des armées quittant le poste des autres établissements sanitaires pour être comptabilisés dans le poste de la dotation globale.

Le tableau ci-après récapitule les transferts réalisés entre enveloppes.

Transferts entre enveloppes de l'ONDAM

(en millions d'euros)

2001

2002

Soins de ville

- 31

- 110

Hôpitaux publics

- 109

- 33

Cliniques privées

+ 49

- 13

Etablissements médico-sociaux

+ 90

+ 158

pour enfants et handicapés

+ 12

+ 58

pour personnes âgées

+ 78

+ 100

Marge résiduelle

+ 1

- 2

NB : le solde des transferts est nul.

B. UNE CROISSANCE NON MAÎTRISÉE DEPUIS 1997 CAR NON MÉDICALISÉE

Depuis le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, le taux d'évolution de l'ONDAM a été fixé par référence à l'objectif de l'année précédente, en fonction des préoccupations budgétaires du gouvernement, indépendamment des besoins sanitaires réels de la population que les dépenses d'assurance maladie permettent justement de couvrir. Il ne faut dès lors pas s'étonner qu'il ait été systématiquement dépassé.

Comparaison entre les taux de croissance : ONDAM voté/ONDAM exécuté

ONDAM voté

ONDAM exécuté

Ecart

Moyenne 1997/2002

2,1 %

3,9 %

+ 1,8 %

1997

1,7 %

1,5 %

- 0,2 %

1998

2,4 %

4,0 %

+ 1,6 %

1999

1,0 %

2,6 %

+ 1,6 %

2000

2,9 %

5,6 %

+ 2,7 %

2001

2,6 %

5,6 %

+ 3,0 %

2002

4,0 %

7,2 %

+ 3,2 %

Ces dépassements systématiques ont atteint 12,8 milliards d'euros depuis 1998. Ils ont été croissants sur la période : le dépassement minimum a été de 1,5 milliards d'euros en 1998 et il devrait atteindre 3,9 milliards d'euros en 2002. Les taux d'évolution retenus étaient faibles les premières années, supérieurs à 2,5 % en 2000 et 2001 et il a même atteint 4 % en 2002. Toutefois, les taux d'évolution affichés ont toujours été en moyenne de 1,8 % minorés par rapport aux taux d'évolution réels.

Au sein de l'ONDAM, en moyenne sur les cinq dernières années, les soins de ville ont crû le plus (+ 5,3 % par an) et, au sein de cette enveloppe, notamment les médicaments, prothèses et indemnités journalières (+ 7,8 %) ; cette croissance annuelle des soins de ville atteint même 7 % sur les trois dernières années, preuve de l'accélération tendancielle de cette croissance. En revanche, les hôpitaux (+ 2,5 %) et les cliniques privées (+ 2 %) ont dû subir de strictes restrictions budgétaires, qui explique leur situation actuelle très difficile. Enfin, l'enveloppe médico-sociale a augmenté de 4,5 % en moyenne, ce qui reflète la priorité accordée à ce secteur depuis 1999.

Cette dérive et cette insincérité des objectifs, dénoncées par la Cour des Comptes, par les parlementaires et par l'ensemble des acteurs du système de santé, ont porté atteinte à la crédibilité même de la politique de régulation des dépenses d'assurance maladie. Il y a certes une hausse tendancielle des dépenses de santé, liée notamment à l'évolution de la demande de soins et au vieillissement de la population. Mais il faut aussi tenir compte de la mise en _uvre des trente-cinq heures à l'hôpital (pour un coût d'un milliard d'euros en 2002). Et il n'est pas possible de savoir si l'argent ainsi dépensé a bien été dépensé pour la santé des Français. C'est pourquoi les dépenses d'assurance maladie doivent être désormais fondées en priorité sur l'évolution de l'activité des soins dans notre pays.

Tel est le chantier de la médicalisation de l'ONDAM.

Dès cette année, le gouvernement propose ainsi un ONDAM beaucoup plus réaliste, avec + 5,3 % pour 2003 : cet objectif devrait pouvoir raisonnablement être respecté car il est crédible et réaliste, tenant compte de l'évolution tendancielle des dépenses de santé. De plus, dans le courant de l'année prochaine, un groupe de travail, créé au sein de la Commission des comptes de la sécurité sociale et dont l'animation des travaux a été confiée à M. Alain Coulomb, délégué général de la Fédération hospitalière de France (FHF), permettra d'associer tous les acteurs de l'assurance maladie à la définition d'un ONDAM médicalisé. Enfin, un nouveau rapport sera annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui analyse l'évolution, au regard des besoins de santé, des soins financés au titre de l'ONDAM.

Grâce à des indicateurs chiffrés et concrets, le débat sur l'ONDAM ne se limitera plus à une discussion « budgétaire » sur un taux de croissance permettant d'équilibrer les comptes de l'assurance maladie. Le Parlement pourra mieux apprécier l'utilité « médicale » de l'augmentation des dépenses de santé. A partir d'un inventaire des besoins sanitaires et d'une estimation des coûts correspondants, il fera un choix de dépenses à rembourser et arbitrera en fonction des financements disponibles.

A terme, l'utilisation de nouveaux outils comme les comptes par pathologie permettra de disposer d'une information détaillée sur l'ONDAM, non plus seulement par enveloppe en fonction de l'offre de soins (une enveloppe par prescripteur) mais véritablement en fonction de la demande (besoins de santé de la population répartis par catégories diagnostiques). Des travaux ont déjà été menés dans ce sens dans le cadre de la Commission des comptes de la santé, qui a pris connaissance pour la première fois cette année de l'analyse de la dépense nationale de santé (concept plus large que les dépenses remboursées d'assurance maladie) par pathologies. Il a ainsi été possible de répartir l'essentiel des dépenses (83 %) par grand chapitre de la classification internationale des maladies et donc de savoir à quelles pathologies les dépenses de santé sont allouées. A titre d'illustration, on sait ainsi que la catégorie diagnostique la plus importante en termes de dépenses engagées est celle des maladies cardio-vasculaires (10,7 % de la consommation de soins et biens médicaux), suivie par les troubles mentaux (9,4 %) et les affections de la bouche et des dents (6,3 %).

Le développement de ces analyses médicalisées de l'évolution des dépenses de santé nécessite de se donner les moyens de connaître les pathologies. Cela concerne à la fois l'hôpital, avec le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) et la tarification par l'activité dont l'expérimentation est généralisée par l'article 12 du présent projet de loi, et le codage des actes de médecine ambulatoire, qui attend encore une valorisation des actes médicaux classifiés.

II.- LES SOINS DE VILLE HORS MÉDICAMENT : 

RENOUER LES FILS DU DIALOGUE

L'agrégat « soins de ville » comprend les honoraires des professionnels de santé libéraux (regroupés au sein de l'objectif de dépenses déléguées), les prescriptions et les prestations en espèces (y compris les indemnités journalières maternité).

Dans le domaine de la régulation du secteur des soins de ville, qui ressort largement à la compétence conventionnelle, il est temps de changer de logique. Il faut compter sur les bénéfices d'un pari sur la qualité des soins, sur la responsabilisation des assurés et la confiance envers les professionnels.

A. LE DIALOGUE ENTRE LES ACTEURS A ÉTÉ RESTAURÉ

Les professionnels de santé, et particulièrement les professionnels libéraux, connaissent depuis quelques années une crise matérielle et morale profonde. Il en résultait une absence de dialogue entre ces professionnels, l'Etat, les caisses et les patients. Des accords conventionnels, « fruit de la volonté politique et du dialogue social » (expression employée par M. Mattei lors de sa première audition par la commission), approuvés par les ministres compétents, ont permis de rétablir le dialogue, particulièrement en ce qui concerne la profession de médecin généraliste.

1. La revalorisation de la profession de médecin généraliste a constitué un acte fondateur

Les mesures destinées aux médecins généralistes ont été le fruit des négociations entre les caisses et les organisations représentatives. En raison de la longueur et de l'intensité du conflit qui les a précédés, ces accords sont très emblématiques. Approuvés par les ministres compétents, ils représentent un pas important dans la résolution des problèmes de notre système de santé et sont exemplaires à beaucoup d'égards. La revalorisation du statut des omnipraticiens s'est réalisée en deux étapes conventionnelles.

a) Un premier accord, insuffisant, a été conclu le 24 janvier 2002 entre les généralistes et les caisses nationales.

Ce protocole d'accord baptisé « contrat de progrès », devenu l'avenant n°8 à la convention des généralistes, a conduit notamment à revaloriser le tarif de la consultation (dit « le C ») de 17,53 euros à 18,50 euros à compter du 1er février 2002, à créer une consultation dite « approfondie » concernant les patients atteints d'affectation de longue durée et à renforcer les incitations à l'installation dans certaines zones.

b) Un deuxième accord est intervenu le 5 juin 2002

Ce protocole a augmenté le tarif du « C » à 20 euros et a modifié la tarification des indemnités de déplacement des visites. Cette dernière réforme, qui a fait ultérieurement l'objet d'un accord de bon usage de soins (acBUS) signé le 1er juillet, est entrée en vigueur le 1er octobre (lire infra). Le protocole contient en contrepartie des engagements chiffrés en termes de prescription en dénomination commune internationale (DCI) et de médicaments génériques.

Une annexe à l'accord comporte un accord de bon usage de soins relatif à l'utilisation des tests de diagnostic rapide d'angine. Les signataires s'engagent à conclure d'autres acBUS ou contrats de bonne pratique sur d'autres thèmes, notamment sur la prise en charge des conduites addictives ou la prescription de médicaments à service médical rendu (SMR) insuffisant. Les dispositions du protocole ont été intégrées à la convention sous la forme de l'avenant n°10, signé le 14 juin.

Le financement de l'accord repose en partie sur les économies résultant de l'augmentation de la délivrance de médicaments génériques (lire infra) et sur la diminution escomptée du nombre de visites. En effet, la réforme de la tarification de la visite des médecins généralistes prévoit que le tarif du « V » peut atteindre 30 euros à la condition que les visites soient médicalement justifiées. Seules ces visites permettront à l'assuré de bénéficier du remboursement de la majoration de déplacement (MD) de 10 euros ; un référentiel de soins à domicile défini conventionnellement permet aux médecins d'apprécier le caractère médicalement justifié de la visite.

Au 1er octobre dernier, huit régions ont signé un acBUS relatif à la réforme de la tarification de la visite. A titre de rappel, la France reste le pays d'Europe où il subsiste un grand nombre de déplacements de médecins généralistes hors cabinet. En 2001, 65 millions de visites (V) ont été remboursées par l'assurance maladie.

Selon les données fournies par le ministère au rapporteur, les conséquences financières de l'accord du 5 juin et de ses suites sont les suivantes (en année pleine) :

- revalorisation de la consultation : 337 millions d'euros, dont 249 à la charge des régimes de base ;

- revalorisation de la visite : 175 millions d'euros, dont 135 à la charge des régimes de base ;

- rémunération de l'astreinte dans le cadre de la permanence des soins : 15 millions d'euros à la charge des régimes de base ;

- prescription en DCI : économies de 260 millions d'euros ;

- mise à disposition du test de diagnostic d'angine : économies de 100 millions d'euros.

c) L'accord entre les caisses et les organisations représentatives des pédiatres libéraux

Le protocole d'accord, conclu en juin 2002, prévoit également un accord de bonne pratique et de bon usage des soins sur les consultations et les visites spécifiques. Cet acBUS a été publié au Journal officiel du 2 août 2002.

Le protocole a pour objet de majorer les consultations spécifiques réalisées en cabinet et certains types de visites. Une majoration forfaitaire s'ajoute dans certains cas à la consultation ou à la visite.

Les praticiens s'engagent à libeller leurs prescriptions en dénomination commune ou en génériques et à intégrer dans leurs pratiques les références professionnelles et recommandations élaborées par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) et l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES). Ils doivent tenir à la disposition des caisses et du service médical les éléments attestant le respect de ces engagements.

Selon les données fournies au rapporteur, les conséquences financières brutes (c'est-à-dire sans décompter les économies liées aux effets de la prescription en DCI) en année pleine de l'accord et de ses suites atteignent 23 millions d'euros dont 18,4 millions d'euros à la charge des régimes de base.

2. Le retour de la confiance est passé par d'autre type de mesures

a) Les professions concernées

Le ministre a approuvé une série de revalorisations issues d'accords conventionnels. Les actes infirmiers ont été revalorisés par le précédent gouvernement à la suite d'un accord signé le 15 février 2002 entre les trois caisses nationales et une organisation représentative. L'accord prévoit une revalorisation des honoraires de 10 % en moyenne. La revalorisation de certains actes des radiothérapeutes permet également de mieux prendre en compte la complexité de certaines techniques. L'accord signé avec les masseurs-kinésithérapeutes portant sur la lettre-clef AMK de 1,98 euros à 2,04 euros a représenté un coût pour l'assurance maladie en 2002 de 0,1 % de l'ensemble des soins de ville (montant comparable aux conséquences de l'augmentation du forfait pour les transporteurs sanitaires). Un arrêté du 25 juin 2002 modifiant la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux (Journal officiel du 26 Juin 2002) permet de revaloriser la profession d'orthoptiste en matière de bilans, de rééducation et d'enregistrement. Enfin, un arrêté du 28 juin 2002 (Journal officiel du 3 juillet 2002) a modifié la nomenclature des actes de biologie médicale.

b) La généralisation des ordonnances sécurisées

La généralisation des ordonnances sécurisées se heurte à de grandes difficultés. C'est en en tenant compte que le ministère de la santé a décidé le 2 octobre dernier de reporter pour une durée d'un an l'entrée en vigueur de la généralisation. En conséquence, jusqu'au 1er octobre 2003, les ordonnances sécurisées seront obligatoires uniquement pour la prescription des médicaments stupéfiants.

3. Promouvoir le rôle du Parlement dans le contrôle des finances sociales

Selon le ministre, le total des mesures nouvelles pour la médecine de ville recensées lors de sa première audition par la commission en juillet dernier représente 800 millions d'euros. Certaines mesures s'autofinanceront en 2003 si les engagements de prescriptions de génériques sont tenus.

En cas de divergences significatives en cours d'année entre les prévisions et les réalisations, aucun gouvernement n'a utilisé jusqu'ici la faculté de faire adopter par le Parlement une loi de financement de la sécurité sociale rectificative. Pourtant, l'article LO.111-3 du code de la sécurité sociale en prévoit la possibilité. Cette procédure permet de rendre pleinement au Parlement son droit de contrôle des finances sociales tout au long de la session parlementaire. Actuellement, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année n+1 est aussi un projet de loi rectificative de l'année n. Or, même si il le souhaitait, le Parlement ne peut présenter une proposition de loi de financement, l'article 39 de la Constitution disposant qu'elles sont exclusivement d'initiative gouvernementale.

Compte tenu de ces considérations, le rapporteur salue l'engagement du ministre de proposer au Parlement « en temps utile » le vote d'un collectif social, dans le cas où les prévisions ne seraient pas significativement respectées.

B. VERS UNE RÉGULATION FONDÉE SUR LA CONFIANCE PARTAGÉE ET LA PROMOTION DE LA QUALITÉ DES SOINS

Au-delà de la confirmation des résultats obtenus par la négociation conventionnelle depuis juin dernier, le présent projet de loi pose les marques d'un changement du mode de régulation : le pari de la confiance partagée, de la qualité des soins et du dialogue retrouvé.

1. Mettre fin à la maîtrise comptable

Les années précédentes ont apporté la preuve que la régulation par le système dit des « lettres-clefs flottantes », qui est une dénomination inexacte en droit comme en fait, est un échec. Ce système n'a pas prouvé sa capacité à maîtriser les dépenses et a découragé les professionnels. L'article 15 du présent projet (lire infra) propose la suppression de ce système. L'effort en direction des professionnels de santé se fonde également sur trois dispositions du projet : la promotion de l'évaluation via le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV), le dialogue entre professionnels et caisses grâce à la réforme du service médical et l'incitation à la poursuite de l'activité des médecins et des infirmières au-delà de l'âge de la retraite. Enfin, les comités médicaux régionaux étant supprimés, le projet confie aux partenaires conventionnels le soin de définir les outils visant à prévenir les pratiques abusives.

2. Vers l'optimisation médicalisée des dépenses de soins de ville d'assurance maladie

a) L'organisation des négociations

La loi du 6 mars 2002 portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions libérales de santé et les organismes de sécurité sociale prévoit la conclusion d'un accord-cadre interprofessionnel, de conventions par métiers et enfin d'options individuelles. Les négociations relatives à l'accord-cadre entre la CNAMTS et le Centre national des professions de santé ont commencé en juillet dernier.

La régulation conventionnelle est à un tournant : les caisses d'assurance maladie et les organisations représentatives de médecins doivent aboutir à la conclusion d'un accord avant la fin de l'année 2002. La convention des médecins généralistes, qui a fait l'objet de multiples recours devant le Conseil d'Etat, arrive à échéance à la fin de l'année, alors que des parties importantes du dispositif conventionnel ont été annulées (formation professionnelle, régulation). Les spécialistes, sans convention depuis son annulation intervenue en 1998, se trouvent sous règlement conventionnel minimal.

b) Le pari d'une optimisation médicalisée grâce à la confiance partagée

L'optimisation médicalisée des dépenses de santé utilise deux outils principaux.

Les accords de bon usage de soins

Le premier outil est l'emploi accru d'outils conventionnels, sur le modèle des accords de bon usage de soins (acBUS). Un bon exemple est la réforme de la tarification de la visite des médecins généralistes.

En octobre 2001, pour la première fois, les caisses d'assurance maladie et des organisations représentatives signaient un acBUS relatif à la mammographie, qui étendait à tous les actes de mammographie le cahier des charges négocié par l'assurance maladie et la Fédération nationale des médecins radiologues qui prévoyait des engagements de qualité.

Il a manqué jusqu'à présent une volonté politique forte pour soutenir les acBUS, nationaux ou régionaux, dont l'élaboration est pénalisée par les mauvaises relations entre les caisses et les organisations représentatives de professionnels libéraux. Le nombre d'acBUS régionaux est jusqu'à présent limité.

La CNAM ainsi qu'une organisation représentative de médecins libéraux a indiqué sa volonté d'aboutir à des résultats sur la prescription d'arrêts de travail grâce à un accord conventionnel. Compte tenu de la croissance de ce poste qui est considéré par certains comme une forme de préretraite médicalisée, les possibilités d'économies sont significatives.

L'excellence des soins

La deuxième condition du succès de l'optimisation médicalisée repose sur l'engagement des professionnels de santé, et particulièrement des médecins, dans une démarche visant à promouvoir la qualité des soins. Cette démarche doit les conduire à prendre part à de véritables actions de formation, à se coordonner avec d'autres professionnels, notamment dans le cadre de réseaux, et à se soumettre régulièrement à des actions d'évaluation. La réforme du service médical réalisée par l'article 18 du présent projet permettra de soutenir efficacement les professionnels dans cette démarche.

III.- LES DÉPENSES DE MÉDICAMENT : ÉVALUER
POUR MIEUX RÉGULER

Selon l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE), la France est l'un des pays au monde dont la dépense de médicaments par habitant est la plus élevée. L'année 2001, comme les deux années précédentes, a connu une forte augmentation des dépenses de médicaments. Cette croissance connaît pourtant une certaine décélération en 2002.

La politique du médicament s'inscrit dans un partenariat conventionnel, qui se trouve à un tournant. Les négociations entre les laboratoires et le Comité économique des produits de santé (CEPS) doivent aboutir à la signature d'un nouvel accord sectoriel quadriennal avant le 1er janvier 2003.

L'augmentation des dépenses de médicament a des facteurs largement incontrôlables, en particulier l'arrivée de nouvelles molécules, le vieillissement de la population et la prévalence des pathologies chroniques. Une évaluation adéquate permettrait de bien réguler le secteur, en posant comme préalable les questions suivantes : en quoi les dépenses remboursées de médicament ont-elles été efficaces pour les patients et les futurs patients ? Ont-elles été utiles à la collectivité ? Avec quel rapport coût/efficacité ? Les réponses à ces questions dessineront les contours d'une solidarité adaptée, sans négliger la juste rémunération des coûts de la recherche thérapeutique.

Un exposé de la tendance de la consommation de médicaments sur la période 2000-2002 précèdera des développements sur la politique du médicament.

A. LE CARACTÈRE VIGOUREUX DE LA CROISSANCE DES DÉPENSES DE MÉDICAMENT, CONFIRMÉ EN 2001, TEND À SE RÉDUIRE EN 2002

La croissance des dépenses de remboursement, qui s'était accélérée en 2001, tend à se stabiliser en 2002. Les génériques représentent encore une faible part du marché.

1. Les dépenses 2001 de remboursements de médicaments ont atteint 15 milliards d'euros

a) Présentation des chiffres pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie

Les médicaments

Selon le rapport du Comité économique des produits de santé sur l'année 2001, l'ensemble des ventes de médicaments pris en charge par la collectivité a cru en 2001 de 7,7 %, soit un chiffre comparable à l'année 2000. La croissance des médicaments en ville est de 7,2 % contre 8,9 % en 2000, année marquée par le déploiement du dispositif de la couverture maladie universelle. Les ventes aux établissements de santé augmentent de 10 % (+ 7,2 % pour les ventes en officines). Selon les données du comité, la dépense de remboursement de médicaments a augmenté de 8,5 % en 2001, année où les régimes d'assurance maladie ont remboursé 2,5 milliards de boîtes, flacons ou autres présentations de médicaments. L'écart entre les progressions des ventes aux officines (+ 7,2 %) et des montants de remboursement (+ 8,5 %) est lié à la croissance du taux de remboursement effectif moyen, à l'effet de la rétrocession hospitalière (lire infra) et à l'écart entre les dates de comptabilisation.

Les dispositifs médicaux

Le rapport 2001 du comité économique des produits de santé indique que les dépenses de remboursement ont atteint 2,65 milliards d'euros (sur 5,1 milliards de dépenses remboursables). Les remboursements ont cru en moyenne annuelle de 15 % sur la période 1998 - 2000.

b) Enseignements de l'étude réalisée par la CNAM sur la période 2000-2001

La quatrième étude « MEDICAM » (juin 2002) relative aux médicaments remboursés par le régime général d'assurance maladie au cours des années 2000 et 2001, réalisée par les services de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, fournit des informations précieuses. Le champ de l'étude effectuée à partir des données collectées grâce au codage correspond aux prestations du régime général en métropole hors sections locales mutualistes, soit environ 70 % des remboursements de médicaments de l'assurance maladie.

Les produits à service médical rendu jugé « insuffisant » représentent des volumes importants

Parmi les médicaments les plus prescrits et les plus remboursés en valeur, on trouve un antiulcéreux. Les antalgiques et les psychotropes sont les plus prescrits en volume, ce qui correspond aussi à une meilleure prise en charge de la douleur. La consommation se concentre sur quelques produits : 10 produits représentent 12,2 % des montants de remboursement. Sur les 100 premiers produits (classés par quantité), 23 ont été considérés comme rendant un service médical insuffisant (voir infra). Or, ces produits affichent des progressions importantes en volume.

Le rôle des effets de structure de la consommation

Les dépenses de remboursement ont augmenté de 8,6 %, dont + 3,5 % au titre de l'augmentation des quantités de médicaments, + 0,7 % au titre de l'augmentation du prix (- 0,5 % dû à l'effet « baisse du taux de remboursement ») et + 4,8 % en raison de l'effet structure. Ce dernier effet est l'impact de la modification structurelle des prescriptions sur l'évolution des remboursements. Il regroupe un effet « classe » et un effet « produits chers ». L'effet « classe » traduit l'incidence de la modification des parts relatives des classes thérapeutiques données sur les remboursements. Certaines classes ont des unités moyennes de remboursements plus élevés que d'autres. Les produits « chers » représentent une proportion croissante des remboursements. Ainsi, les produits de plus de 15 euros (prix public) représentent 42 % de l'ensemble des montants prescrits en 2000 et 45 % en 2001.

Les produits nouveaux sont très chers et contribuent de manière importante à la croissance des remboursements : les produits de moins de un an de commercialisation contribuent à 12,5 % de la croissance. Les auteurs de l'étude s'interrogent sur l'évolution des prescriptions des spécialités dites « coxibs » (inhibiteurs de la cyclo-oxygénase2), supposées entraîner une moindre co-prescription avec les protecteurs gastriques, et notamment avec les inhibiteurs de la pompe à protons, compte tenu de la diminution du risque d'ulcération gastrique. Or, les auteurs du rapport relèvent « une augmentation globale de ces co-prescriptions ce qui conduit l'assurance maladie à s'interroger sur les prix et le coût résultant de la prise en charge de ces produits ».

2. La dépense pour 2002 se maintient à un haut niveau

Selon le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002, les dépenses de médicament connaîtront en 2002 une croissance « relativement modérée », modération à imputer :

- à l'application en année pleine des mesures tarifaires intervenues à la fin de l'année 2001 ;

- au ralentissement observé de la consommation de certains médicaments coûteux dont les statines ;

- à la baisse des taux de remboursement de 65 % à 35 % de médicaments dont le service médical rendu a été jugé « insuffisant » ;

- à l'application progressive des accords entre caisses et médecins en matière de politique de prescription médicamenteuse.

3. Le marché des médicaments génériques augmente mais reste trop faible

a) Une part de marché limitée

En 2001, la part de marché des génériques croît de 0,9 % et se monte à 6,7 % (en volume total du marché des médicaments remboursables en ville) et à 3,1 % du chiffre d'affaires hors taxe réalisé par les laboratoires. Le Comité économique des produits de santé indique que la part en valeur du marché potentiel des génériques (médicaments de référence et génériques) par rapport au marché global a diminué de 5 % en 2001, évolution liée au fait que les spécialités génériques correspondent à des classes thérapeutiques anciennes à taux de croissance réduits. En revanche, la part en valeur prise par les médicaments génériques au sein de leur marché potentiel a augmenté de 20 % et atteint 22,3 % en 2001.

Même si les définitions différentes nuisent à la qualité des comparaisons, il est avéré que la part de marché des génériques en France est relativement faible par rapport à ses voisins européens, particulièrement l'Allemagne.

L'étude MEDICAM met en évidence la baisse des montants remboursés des produits princeps génériqués. L'étude montre que sur les 100 premiers produits prescrits et remboursés en montants en 2001, 20 sont les produits de référence de groupes génériques pouvant donner lieu à substitution.

Sur la base des données 2001, l'Association française des génériqueurs a estimé que le champ des répertoires pourrait doubler entre 2000 et 2006. L'impact sera d'autant plus fort que les produits concernés dans les prochaines années sont chers.

b) Les conditions du développement des génériques ne sont pas encore toutes remplies

Le protocole d'accord conclu entre les trois caisses nationales d'assurance maladie et l'organisation MG France le 24 janvier 2002 comprend un paragraphe intitulé « la prescription pharmaceutique », qui indique que « l'implication des médecins généralistes pourrait être valorisée dans le cadre conventionnel ». En outre, le protocole d'accord signé le 5 juin 2002 porte notamment sur la prescription en dénomination commune internationale (DCI) via l'avenant n°10 qui a transposé cet accord dans la convention. Les généralistes doivent s'engager dans un premier temps à rédiger en DCI 25 % (en moyenne nationale) des lignes de prescription dont la moitié au moins entre dans le champ du répertoire des génériques. Pour cette dernière partie, le médecin peut préférer la prescription en génériques.

L'accord, qui ne comporte aucun objectif individuel et n'est pas opposable à chaque médecin, a permis de faire progresser la délivrance de médicaments génériques dès le mois de juin 2002, selon les données fournies par la publication de la CNAMTS « Point de conjoncture » (septembre 2002).

Le rapporteur se réjouit que le décret d'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 autorisant la prescription en dénomination commune, dont l'élaboration avait pris un grand retard, ait été publié au Journal officiel du 2 octobre dernier (décret n°2002-1216 du 30 septembre 2002 relatif à la prescription en dénomination commune et modifiant le code de la santé publique). Le décret précise que la prescription comprend au moins le principe actif du médicament, le dosage en principe actif et la voie d'administration et la forme pharmaceutique. L'article 17 du projet de loi vise à favoriser la prescription en dénomination commune et fait l'objet d'une étude à part. Selon les informations fournies par le gouvernement, l'avenant à la convention d'objectifs et de gestion avec la CNAMTS cherchera à développer d'autres outils afin d'accélérer le développement du générique.

En matière de médicaments génériques, le rapporteur estime indispensable de mener au plus tôt une action d'information et de sensibilisation du grand public. Le bilan des expérimentations locales réussies (par exemple celle menée par la CPAM de la Marne) doit se traduire par l'élaboration de bonnes pratiques. Promouvoir la prescription en DCI et de génériques suppose des efforts importants en termes de formation des médecins (formation initiale et continue) et de développement des outils d'aide à la prescription, notamment grâce à des logiciels adaptés.

B. LE « PLAN MÉDICAMENT » DOIT FAIRE PARTIE D'UN ENSEMBLE PLUS VASTE VISANT À PROMOUVOIR LE BON USAGE DU MÉDICAMENT

Le ministre de la santé a dessiné les contours d'une nouvelle politique du médicament, reposant notamment sur une responsabilisation accrue des assurés. Il faut aller plus loin en garantissant le bon usage du médicament.

1. Tirer les conclusions de la réévaluation de l'efficacité des médicaments

Le mardi 24 septembre dernier, lors de la présentation du projet de loi devant la commission des comptes de la sécurité sociale, M. Mattei a annoncé une politique du médicament « moderne et équilibrée ». Le projet de loi comprend des mesures examinées dans des études à part (voir infra), notamment une mesure destinée à mieux rémunérer l'innovation thérapeutique (article 20) et une disposition visant à créer un forfait de remboursement pour les médicaments figurant dans un groupe générique, reposant sur la responsabilisation des assurés (article 27).

Le Ministre a également annoncé qu'il fallait tirer les conséquences de la réévaluation du service médical rendu. Ce processus ne prend pas place dans le dispositif du présent projet de loi ; mais, mentionné dans le rapport annexé et annoncé par le Ministre, il constitue un pan important de la politique du médicament et mérite à ce titre d'être explicité.

Le processus de réévaluation de 4 490 spécialités remboursées a été lancé par le précédent gouvernement en février 1999. La réévaluation a été conduite par la Commission de la transparence, qui a sollicité des groupes d'experts et s'est appuyée sur les ressources de la direction des études médico-économiques et de l'information scientifique (DEMEIS, unité réévaluation) de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. L'Agence française de sécurité sanitaire d'accréditation et d'évaluation en santé (AFSSAPS) avait fixé en juin 2001 une liste de 835 médicaments dont le service médical rendu avait été évalué « insuffisant ».

Des baisses de taux de remboursement de 65 % à 35 % et des baisses de prix ont été ensuite arrêtées par le gouvernement :

Les baisses de taux de remboursement de 65 % à 35 %

Trois étapes ont été nécessaires :

- arrêté d'août 2000 prévoyant la baisse du taux de remboursement pour certains produits, annulé pour vice de forme par le Conseil d'Etat ;

- arrêté de septembre 2001 reprenant ces produits ;

- arrêté de décembre 2001 portant sur la majorité des produits encore remboursables à 65 %.

Les baisses de prix

Conformément au plan annoncé en 2000, le Comité économique des produits de santé a fixé une liste de médicaments à service médical rendu insuffisant devant être soumis à de baisses de prix. Ces baisses sont intervenues en 2000, 2001 et 2002 (pour 2002, l'arrêté est paru au Journal officiel du 30 juillet 2002 pour une application sur les derniers mois de l'année). Selon les données du comité économique des produits de santé, l'impact des baisses de spécialités à SMR insuffisant aurait représenté 83 millions d'euros en 2001.

A noter que le Comité économique des produits de santé a également procédé à des baisses de prix de médicaments dont le SMR n'était pas insuffisant, pour un montant estimé à 202 millions d'euros.

La poursuite du processus

A titre indicatif, dans le champ de l'étude MEDICAM, sur l'ensemble des spécialités remboursables, les présentations de spécialités à SMR insuffisant représentent 10,9 % des montants présentés au remboursement, 7,3 % des remboursements et 20,3 % des unités prescrites. Le volume des ventes dépend non seulement de l'utilité ressentie par les patients (différente du service médical rendu) mais aussi des dépenses de promotion engagées par les laboratoires.

Le Ministre a annoncé une poursuite du processus engagé depuis 2000, sous la forme du déremboursement en trois ans des 650 produits encore commercialisés. L'écart avec le chiffre de 835 s'explique par le fait que des industriels ont procédé d'eux même à des déremboursements.

Le rapporteur salue cette décision courageuse de déremboursement, qui aurait dû suivre la publication de la liste de produits à SMR insuffisant. Le Parlement devra être étroitement informé de l'ensemble de la procédure, des critères adoptés, des mesures prises, des résultats attendus et de tout travail d'évaluation effectué.

Les services du ministère de la santé constitueront trois groupes :

- ceux qui n'ont plus leur place dans les stratégies thérapeutiques actuelles, en raison de leur effet sanitaire potentiellement néfaste ou de la « perte de chance » subie par les patients consommant ces médicaments en lieu et place de produits efficaces ; certains de ces médicaments se verront retirer leur autorisation de mise sur le marché ;

- ceux qui peuvent rentrer dans une logique d'automédication sans risque de santé publique ; il est en effet nécessaire de développer l'automédication en France ;

- ceux ayant une « utilité sociale sans alternative crédible » et ne pouvant faire l'objet d'une automédication.

Le classement dans les deux derniers groupes n'est pas synonyme d'exclusion du marché, les médicaments pouvant encore faire l'objet de prescription ou d'achat en officine. Le risque parfois évoqué et réel de report sur d'autres médicaments remboursés ne serait avéré que pour les médicaments du premier groupe, qui feraient l'objet de déremboursements lors de la première année. Un effort intense de pédagogie sera indispensable.

La procédure de déremboursement doit être « cadencée » et accompagnée. Il faut informer progressivement tous les acteurs (prescripteurs, patients, caisses et laboratoires) afin que la décision prenne place dans un processus plus large de réajustement de l'effort de solidarité. Peut-on se permettre de rembourser des médicaments dits « de confort » alors que le prix de nouveaux traitements contre le SIDA ou le cancer risque à terme de les rendre indisponibles ?

On peut enfin noter que le protocole d'accord signé le 5 juin 2002 entre les trois caisses nationales d'assurance maladie et les organisations nationales représentatives de médecins comporte en annexe un accord national de bon usage des soins destiné à étendre l'utilisation du test de l'angine permettant de prescrire des antibiotiques à bon escient. Les signataires ont souhaité que ce type d'accord puisse également limiter les prescriptions de produits à service médical rendu jugé insuffisant. Un groupe de travail a été constitué entre la CNAMTS et les laboratoires pharmaceutiques à cet effet.

2. La promotion du bon usage : « le juste soin au juste prix »

La promotion du « bon usage » du médicament a non seulement un effet « économique » (optimiser l'utilité par euro dépensé dans le médicament et prélevé par cotisation), mais aussi et surtout une vertu sanitaire. La CNAMTS a consacré une partie de son rapport "Faits marquants 2002" aux effets iatrogènes des médicaments, notant que la forte hausse de la consommation médicamenteuse entraîne une croissance des risques. La complexité des indications, contre-indications et l'existence d'effets indésirables, qui concerne particulièrement les sujets âgés, soulignent la nécessité de développer la formation des prescripteurs et les sources d'information indépendantes. A cet égard, l'article 21 du projet de loi (voir infra) va dans ce sens en adaptant les dispositifs de sanction à l'encontre des comportements contraires à la déontologie en matière de transparence des informations transmises par les laboratoires pharmaceutiques.

En matière de promotion de bon usage, il est nécessaire de noter le travail sérieux d'acteurs associatifs qui parviennent à délivrer des informations de nature médico-économique considérées comme indépendantes des laboratoires. En revanche, il faut déplorer la mise en place extrêmement lente du Fonds pour la promotion de l'information médico - économique du médicament (FOPIM).

Ce fonds a pour vocation de fournir aux professionnels de santé une information publique claire, précise et concise, validée scientifiquement, utilisable dans leur pratique quotidienne, sur le bon usage des médicaments (décret du 19 novembre 2001). L'« information » des prescripteurs se fonde surtout sur le réseau des visiteurs médicaux. L'information publique, notamment produite par l'Agence française de sécurité sanitaire et d'évaluation des produits de santé (AFSSAPS), qui reprend l'état de la science, n'arrive pas jusqu'au prescripteur sous une forme facilement utilisable.

Le comité d'orientation du FOPIM regroupe les pouvoirs publics (Direction générale de la Santé, AFSSAPS, Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins) et les caisses nationales d'assurance maladie. Il définit les thèmes prioritaires, décide d'actions de communication à destination des professionnels de santé, et prévoit l'évaluation de leur impact. Ces actions de communication sont élaborées avec le concours d'un groupe de médecins et de pharmaciens, dit " groupe confraternel". Géré par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, le fonds dispose d'un budget annuel de 20 millions d'euros correspondant à une fraction de la contribution prévue aux articles L. 245-1 à L. 245-6 du code de la sécurité sociale, déterminée par arrêté dans la limite d'un plafond de 10 %.

La création de ce fonds avait été prévue par l'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Il a fallu dix-huit mois pour qu'il soit enfin constitué en mars 2002, à la veille d'échéances électorales majeures.

Le rapporteur souhaite que le FOPIM puisse rapidement être en mesure de mener à bien ses missions d'information des prescripteurs.

Le « bon usage » suppose également l'utilisation d'une base de données administratives et scientifiques sur les médicaments et les dispositifs médicaux, base accessible au grand public. Cette base est en cours d'élaboration par l'AFSSAPS.

IV - L'HÔPITAL : MODERNISER LA GESTION

A. DE LA TARIFICATION À LA PATHOLOGIE À LA TARIFICATION À L'ACTIVITÉ

Il est courant aujourd'hui d'entendre dire que l'hôpital est malade. Il n'en reste pas moins qu'il ne faillit pas à sa mission première : soigner les patients. Cette mission, les établissements de soins, qu'ils soient publics ou privés, la remplissent avec professionnalisme et dévouement. Certes, de graves questions se posent, souvent héritées de choix politiques passés contestables. Des réformes positives et porteuses d'espoir sont annoncées prochainement. Dans ce contexte, la régulation des coûts, à travers la tarification à l'activité des établissements constitue un choix qui va dans le bons sens. La maîtrise des dépenses de médicaments constitue un autre axe de réforme nécessaire. Le rapporteur, s'est donc attaché à examiner certains des mécanismes et procédures conduisant à gonfler ces dépenses à l'excès.

De façon liminaire, le rapporteur souhaite saluer une évolution sémantique heureuse. En effet, le terme « pathologie » fait, depuis trop longtemps, l'objet d'un mésusage puisqu'il est couramment substitué au terme de « maladie » : certes, le terme de « pathologie » peut se parer de couleurs plus savantes ! Au demeurant, il n'est qu'à se reporter à la définition du terme que donne le dictionnaire Robert : « Pathologie : science qui a pour objet l'étude et la connaissance des maladies, des effets qu'elles provoquent (lésions, troubles) ». Enfin, cette évolution se révèle d'autant plus judicieuse que les modes de tarification évoqués prennent en compte un nombre d'éléments qui excède largement la simple maladie dont peut être atteint un patient.

Le système actuel de tarification et de financement des établissements de soins publics et privés a fait la preuve de ses limites. Dans son rapport sur la sécurité sociale pour 2002, la Cour des comptes en rappelle les faiblesses.

Elle relève, en premier lieu, la relative déconnection entre l'évolution de la dotation globale de fonctionnement et l'évolution de l'activité réelle des établissements qu'elle finance. La dotation globale de fonctionnement des établissements publics et privés participant au service public hospitalier (PSPH) représente plus de 90 % de leurs ressources financières. En tout état de cause, elle ne reflète qu'imparfaitement l'activité réelle des établissements. Malgré l'apport du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), certaines rentes de situation existant au profit de certains établissements n'ont pu être éliminées. Ainsi, les établissements dont l'activité décroît peuvent connaître une relative aisance financière ; à l'inverse, les établissements dont l'activité croît, souvent en raison de meilleures pratiques, peuvent être pénalisés financièrement.

La complexité de la tarification des établissements privés à but lucratif a eu des effets pervers. Les établissements privés régis par l'objectif quantifié national (OQN) reçoivent des forfaits par journée et par prestation délivrée, ce qui assure un financement en fonction des actes réalisés. Mais les données issues de leur comptabilité analytique ne permettent pas aux ARH de déterminer précisément le coût de chacun des actes. De plus, les tarifs, qui sont complexes à arrêter et à actualiser en fonction de l'évolution des techniques et des pratiques, ne peuvent être suffisamment détaillés pour distinguer chaque type d'acte. En conséquence, ils ne reflètent qu'imparfaitement la réalité des coûts des établissements et peuvent conduire les établissements à se spécialiser dans les domaines les plus rémunérateurs. Dès lors, ils peuvent se traduire par des choix de spécialisation inadaptés aux besoins.

La coexistence de deux tarifications distinctes pour les secteurs public et privé ne concourt pas à la clarification de la situation. Les patients étant libres de choisir le recours à tel ou tel établissement public ou privé, il est difficile de justifier l'existence de deux modes de tarification différents, engendrant de fortes inégalités dans les moyens de fonctionnement des établissements et de réelles inégalités dans l'offre de soins proposée aux patients.

Le professeur Dominique Henriet a évoqué les avantages attendus de la tarification à la pathologie1 (TAP). Il expose que le système de tarification à la pathologie est un système dont l'objectif principal est de réconcilier la répartition budgétaire avec les incitations à l'efficacité. C'est d'abord un système de prix (dit prospectif) : chaque établissement fait face, pour une pathologie donnée, à un prix a priori indépendant de ses conditions propres de production. La rémunération étant fixe, chaque établissement a, au moins théoriquement, une forte incitation à réduire ses coûts. Le caractère « prospectif » du prix est un élément essentiel du dispositif : c'est l'instrument principal d'incitation à la bonne gestion. C'est, ensuite, un mécanisme de concurrence. Le prix n'est pas fixé de manière arbitraire ou négociée ; il ne correspond pas non plus à une logique de remboursement de coût. L'originalité de ce type de mécanisme est d'être un mécanisme de concurrence par comparaison : le prix s'établit en fonction des performances de l'ensemble des établissements. Il s'agit donc, en quelque sorte, d'un mécanisme d'enchère ; dans sa version la plus radicale, le prix qui s'impose à tous est le coût minimal annoncé.

La tarification à la pathologie est un système intermédiaire entre le mécanisme de remboursement des coûts et le paiement à la capitation. Dans un système de capitation ce n'est plus un épisode de soin qui justifie le paiement mais la prise en charge d'un patient pour l'ensemble de ses séjours à l'hôpital. Le paiement se fait dans ce cas en fonction des caractéristiques du patient : âge, sexe mais aussi antécédents et affections chroniques.

Les attentes des pouvoirs publics à l'égard de la tarification à la pathologie sont les suivantes :

- fonder le financement de chaque établissement sur une mesure juste de son activité, en volume et en structure ;

- rapprocher les modes de financement et de régulation des deux secteurs d'hospitalisation.

Ces objectifs doivent être atteints dans le cadre de l'ONDAM. Cela signifie que l'institution de la TAP suppose la définition de nouveaux modes de régulation, capables de garantir cet impératif.

Le rapport de la mission d'expérimentation d'une tarification à la pathologie des établissements de santé, présenté en avril dernier au ministre chargé de la santé, rappelle que, dès son introduction au début des années 1980, le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) est apparu, aux yeux de certains de ses promoteurs, comme un possible outil de tarification à la pathologie. C'est d'ailleurs, à la même époque, l'utilisation qui en est faite aux Etats-Unis par le système MEDICARE (le PMSI étant une adaptation française d'un modèle américain).

La loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, autorisait le Gouvernement à expérimenter, dans des conditions fixées par voie réglementaire, à compter du 1er janvier 1992 et pour une période n'excédant pas cinq ans :

« 1° L'élaboration, l'exécution et la révision de budgets présentés en tout ou partie par objectifs tenant compte notamment des pathologies traitées ;

2° L'établissement de tarifications tenant compte des pathologies traitées.

Cette expérimentation pouvait avoir lieu dans les établissements de santé, publics ou privés, avec leur accord ».

Comme le souligne la Cour des comptes, l'absence d'outil de mesure des coûts par pathologie n'a pas permis, à l'époque, de progresser significativement sur le sujet. Une importante expérimentation a toutefois été menée en 1994-1995 en Languedoc-Roussillon, démontrant que le recueil des informations médicales et financières utilisées par le PMSI et nécessaires à l'évaluation des coûts par pathologie était possible quels que soient la taille et le statut des établissements.

Ce dispositif, créé pour une période de cinq ans à compter du 1er janvier 1992, étant devenu caduc, l'article 55 de la loi n° 99-641 du 11 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle en reprenait l'esprit.

C'est dans cette perspective que fut créé le Comité de pilotage d'une tarification à la pathologie en janvier 2000. Celui-ci comprend, outre des représentants des directions intéressées du ministère chargé de la santé, des représentants des fédérations de l'hospitalisation publique et privée, des conférences de présidents de commissions médicales d'établissements et de directeurs de centres hospitaliers, des ARH et des régimes d'assurance maladie.

Assisté par un comité d'expert et des groupes de travail, il bénéficie également de l'aide d'un panel d'économistes. Enfin, le ministère a mis en place quatre commissions consultatives regroupant des représentants des usagers, des syndicats de personnel, des médecins hospitaliers publics et des médecins libéraux. Un consensus s'est établi assez rapidement sur l'utilisation du PMSI comme outil de référence (cela sous réserve d'aménagements et de compléments) et sur les objectifs généraux à atteindre.

A cet égard, le rapporteur s'interroge sur la pertinence de ce choix : le recueil des données du PMSI, qui est très variable d'un établissement à l'autre, constitue-t-il un instrument assez fiable pour servir de base à la tarification à l'activité ?

En effet, de sérieuses questions restent en attente de réponse.

Ainsi, le système à élaborer ne peut se limiter au financement de l'activité de soins de court séjour mais doit également couvrir les autres activités de soins (moyen séjour, psychiatrie) et aussi les autres missions d'intérêt général (accueil des urgences, formation, recherche, accueil social, permanence des soins, activités de support, etc.) non ou mal prises en compte par le PMSI. Il doit en outre comporter des dispositifs propres à éviter tout effet non désiré, telle l'éviction des patients les plus lourdement atteints ou l'externalisation d'une partie des coûts.

L'objet de l'expérimentation est précisément d'étudier les préalables techniques et les conditions d'application d'un système de tarification à la pathologie que sont :

- l'amélioration du modèle de description de l'activité médicale : avant d'utiliser le PMSI à des fins de tarification, il est nécessaire de perfectionner le modèle des groupes homogènes de malades (GHM) pour mieux prendre en compte les séjours s'écartant de la moyenne (poly-pathologies, prises en charges non programmées, etc.) ou certaines activités médicales telles les activités de pointe ;

- l'élaboration des principes de tarification des séjours : la détermination d'un tarif par séjour, notamment dans l'hypothèse d'une tarification commune aux établissements publics et privés, suppose de traiter les différences structurelles entre les deux secteurs (écarts de rémunération liés aux différences de statut des personnels, rémunération à l'acte des professionnels de santé exerçant en clinique) ;

- le financement des activités d'intérêt général : des modalités de financement particulières doivent être trouvées pour les activités liées aux exigences de service public ou à des missions d'intérêt général.

Au terme de son rapport, le Comité de pilotage d'une tarification à la pathologie envisage quatre options, dont deux sont particulièrement intéressantes :

· La première vise « la recherche d'objectifs d'efficience et d'équité au service d'une politique forte de rééquilibrage de l'offre de soins, voire du système de santé ». Elle repose sur un financement de l'activité des soins de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) via des forfaits par GHM auxquels viendrait s'ajouter une enveloppe correspondant aux missions spécifiques d'intérêt général (dotation spécifique modulable). L'écart entre l'addition de la dotation d'activité (forfait par GHM) et de l'enveloppe liée aux « missions de service public » d'une part, et la dotation globale perçue par un établissement d'autre part, serait réalloué par l'ARH soit à cet établissement (s'il s'engage à développer de nouveaux services), soit à d'autres établissements ou services dont les besoins sont mal couverts (personnes âgées ou handicapées). Dans ce schéma, la TAP serait donc utilisée non pas pour rééquilibrer les ressources entre public et privé ou entre établissements d'un même secteur mais pour contribuer « au rééquilibrage de l'offre de soins au profit de services ambulatoire, de services en réseau ».

· La troisième, est celle du « choix d'un système de double tarification (l'un public, l'autre privé), qui pourrait reposer sur une échelle commune de pondération des coûts des deux secteurs ». Elle permettrait de passer assez rapidement du PMSI, qualifié d'outil de correction à la marge, à un financement de l'activité mais cela ne serait pas possible avant 2004 ou 2005 pour le secteur privé. Pour l'hospitalisation privée, il pourrait être fait application d'une TAP selon le schéma initial « mais hors honoraires et par référence au coût moyen constaté dans ce secteur ». L'objectif serait de rechercher une réduction des inégalités constatées entre cliniques privées à enveloppe OQN constante. Ce schéma autoriserait également une péréquation entre hôpitaux pour lesquels les données de comptabilité analytique montrent des dispersions de performance particulièrement grandes.

Cette situation a conduit le gouvernement à décider d'engager une nouvelle étape en vue d'aboutir à la généralisation d'un système de financement à l'activité à partir de 2004, dans une démarche à la fois progressive et pragmatique ; c'est l'objet de l'article 12 du présent projet de loi.

Pour y parvenir, il convient, bien entendu, de poursuivre, en les accélérant, les travaux entrepris depuis 2000, mais aussi d'impliquer plus fortement les établissements de santé publics et privés dans l'expérimentation. A cette fin, il sera fait appel - dès 2003 - à des établissements volontaires pour tester les dispositifs techniques et les modalités pratiques d'une tarification à l'activité. La simulation du nouveau dispositif s'effectuera, dans cette phase expérimentale, sans modification des ressources de ces établissements mais leur permettra notamment de tester l'organisation interne à mettre en place pour produire et analyser l'information sur leur activité dans des délais compatibles avec le fonctionnement du nouveau système de financement.

B. LE MÉDICAMENT À L'HÔPITAL : UN COÛT MAL MAÎTRISÉ

Dans sa présentation des grandes lignes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées a évoqué l'impérieuse nécessité d'améliorer les procédure d'achat de médicaments à l'hôpital.

Les achats de médicaments par les hôpitaux représentent 3,5 milliards d'euros TTC en 2001, soit 6 % de leur budget total. Ces dépenses sont en forte augmentation : les ventes à l'hôpital représentent 16 % du chiffre d'affaire HT de l'industrie pharmaceutique en France pour 2001, contre 12 % en 1991.

Dans son dernier rapport sur la sécurité sociale la Cour des comptes se livre à un examen très critique des « modalités de régulation du marché du médicament à l'hôpital ». Elle note que plus d'un tiers des médicaments achetés par les hôpitaux font l'objet de « rétrocession » à des patients non hospitalisés, généralement pris en charge à 100 % par l'assurance maladie. Deux pratiques concourent à cet état de fait : la réserve hospitalière (RH) et les autorisations temporaires d'utilisation (ATU).

Le rapporteur reprend à son compte les critiques formulées, en insistant sur la nécessité d'une distribution nominative du médicament et d'un codage rigoureux de ces médicaments, opération qui exige un personnel nombreux et formés à ces tâches.

La Cour des comptes attribue à trois facteurs le manque de maîtrise du marché hospitalier du médicament :

- l'insuffisance de l'évaluation indépendante de l'apport thérapeutique du médicament qui nuit à la capacité de négociation des acheteurs hospitaliers ;

- la maîtrise par l'industrie du circuit de commercialisation de ses médicaments, et donc du mode de fixation de leurs prix, qui expliquerait le gonflement incontrôlé de la réserve hospitalière ;

- la rétrocession par l'hôpital de médicaments aux patients non hospitalisés, conséquence de la réserve hospitalière, qui est un moyen détourné d'appliquer en ville la liberté des prix.

1. La réserve hospitalière

Le recours à la réserve hospitalière est souvent justifié par la nécessité de poursuivre à l'hôpital l'évaluation d'un nouveau médicament. La Cour des comptes estime cependant que les insuffisances de l'évaluation ne sauraient expliquer l'importance de cette réserve ainsi que les conditions de son développement.

La liberté de prescription est restreinte par plusieurs dispositifs d'ordre réglementaire :

- la réserve hospitalière ;

- la prescription initiale hospitalière ;

- la prescription sous surveillance particulière.

Les médicaments classés en réserve hospitalière ne sont prescrits et délivrés qu'à l'hôpital ; ceux classés en prescription initiale hospitalière sont d'abord prescrits et délivrés à l'hôpital pour une durée déterminée (6, 12 ou 18 mois), avant de pouvoir l'être en ville.

Au premier février 2000, 20 % des 8 861 spécialités vendues aux hôpitaux étaient inclues dans la RH. La Cour estime que les chiffres fournis par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAP) sont en dessous de la réalité puisqu'ils ne prennent en compte que les médicaments classés en réserve hospitalière par l'autorisation de mise sur le marché (« RH de droit »). Il faudrait y ajouter les médicaments non classés en réserve hospitalière qui s'y trouvent cependant de facto (« RH de fait »), lorsque l'industriel concerné n'a pas demandé le remboursement en ville. Le nombre de médicaments concernés n'est pas connu.

Le classement d'un médicament en réserve hospitalière obéit, en principe, à des impératifs de santé publique. L'éventuel classement d'un médicament dans l'une des catégories de prescription restreinte est réalisé au sein d'un groupe de travail rattaché à la commission d'autorisation de mise sur le marché : le groupe sur les conditions de prescription et de délivrance (CPD). Officiellement constitué en février 2001, ce groupe avait été progressivement mis en place à partir de 1998. Il décide du circuit de commercialisation d'un médicament et donc de son régime de prix (prix libres à l'hôpital, prix administrés en ville. La Cour relève que l'assurance maladie n'y est pas représentée alors qu'un représentant du syndicat national de l'industrie pharmaceutique en est membre. L'AFSSAPS définit plusieurs critères, relevant tous de la santé publique justifiant, selon elle, de réserver un médicament à l'hôpital : conditions particulières d'utilisation, risque de mésusage, risque toxique de manipulation, risque de pénurie, faible recul de pharmacovigilance. Pour des raisons historiques, le CPD a adopté le principe selon lequel, lorsqu'un médicament est « insuffisamment évalué », il reste en réserve hospitalière.

La Cour des comptes s'interroge sur la pertinence de ce classement pour répondre de façon adéquate au manque d'évaluation ou aux risques présentés par un médicament. En effet, la prescription et la délivrance d'un médicament à l'hôpital étant rarement nominatives, elles ne constituent pas nécessairement un gage de plus grande sécurité.

Ainsi, le classement en RH dépendrait assez largement des industriels eux-mêmes qui préfèreraient, dans l'ensemble, un classement en réserve hospitalière puisque le marché hospitalier est moins encadré que le marché en ville. Actuellement, les autorités sanitaires n'ont pas les moyens juridiques de contraindre une firme à demander qu'un médicament précis soit commercialisé et remboursé en ville.

La durée des séjours en hôpital allant décroissant, les traitements à domicile se développent, ce qui augmente de façon mécanique le gonflement de la RH et, par voie de conséquence, le recours croissant à la rétrocession.

La rétrocession se définit comme la vente à des patients non hospitalisés par des pharmacies hospitalières de médicaments qui ne sont pas disponibles en ville.

La Cour qualifie cette pratique de « moyen de contourner les règles de fixation des prix ».

La rétrocession dissocie le lieu de dispensation (hôpital) du lieu d'administration du médicament (ville). Elle représente aujourd'hui environ 30 % des achats de médicaments de l'hôpital et croît rapidement du fait de l'apparition de médicaments coûteux : 795 millions d'euros en 200, 930 millions d'euros en 2001.

Cette pratique avantage les laboratoires, qui bénéficieraient ainsi à la fois de la liberté des prix et du remboursement par l'assurance maladie, mais aussi les hôpitaux qui peuvent transférer une partie de la charge de financement des médicaments à l'assurance maladie.

Au demeurant, la rétrocession est une procédure complexe, source de contentieux, qui complique la gestion des hôpitaux et de l'assurance maladie ; cette dernière doit rembourser un même médicament à des tarifs différents selon le lieu de délivrance, puisque les hôpitaux achètent les médicaments à des prix différents.

La Cour souligne que le cadre juridique de la rétrocession demeure incertain. En effet, la loi n° 92-1279 du 8 décembre 1992 modifiant le livre V du code de la santé publique et relative à la pharmacie et au médicament interdit la rétrocession tout en prévoyant la possibilité de déroger à ce principe par décret en Conseil d'Etat (décret non publié à ce jour).

La rétrocession a été régularisée par l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002. Cet article dispose que : « Préalablement à la publication de la liste mentionnée à l'article L. 5126-4 du code de la santé publique, les médicaments vendus au public à la date de la publication de la présente loi et ceux qui viendraient à être vendus sur décision des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale par les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé sont pris en charge par l'assurance maladie ».

Le projet de décret sur la rétrocession est en cours d'élaboration et en serait à sa 37ème version. Il prévoit que la RH sera réduite à des médicaments uniquement dispensés à l'hôpital, mais il prévoit en même temps de créer une nouvelle catégorie de prescription restreinte, la « prescription hospitalière » qui concernerait des médicaments prescrits à l'hôpital mais administrés en ville.

2. Les autorisations temporaires d'utilisation

Dès avant la fin des essais cliniques, une molécule peut faire l'objet d'un classement en autorisation temporaire d'utilisation (ATU) si elle traite des maladies graves ou rares lorsqu'il n'existe pas de traitement approprié et que son efficacité et sa sécurité sont fortement présumées (ATU de cohorte). Par ailleurs, de telles molécules peuvent être prescrites à des patients nommément désignés sous la responsabilité de leur médecin traitant (ATU administrative). La Cour des comptes relève que l'ATU a été créée en 1994 à la demande d'associations de patients et qu'elle constitue « une particularité française ».

En 2000, 35 produits et 60 000 patients ont été concernés par les ATU de cohorte et 213 produits pour 27 000 patients par les ATU nominatives.

Cependant, cette possibilité d'entrée sur le marché très rapide place la France, avec l'Allemagne et les Etats-Unis, parmi les pays où les délais d'accès aux nouveaux médicaments à l'hôpital sont les plus brefs.

La Cour note que le prix d'un médicament ATU échappe à tout contrôle. L'AFSSAPS délivre l'ATU pour des motifs de santé publique uniquement, les coûts ne relevant pas de sa responsabilité.

Les médicaments concernés ne peuvent faire l'objet des procédures d'achat déterminées par le code des marchés publics en raison du monopole du produit, de la pression exercée par les malades souffrent d'une grave affection ainsi que par les laboratoires auxquels les hôpitaux font des « demande de prix » qui leur sont ainsi imposées.

Ces prix feront généralement référence, après l'obtention de l'AMM. La Cour des comptes estime que, dans ces conditions, l'ATU constitue une simple facilité de lancement commercial d'une nouvelle molécule.

En outre, un médicament sous ATU est automatiquement « agréé aux collectivités ». Il peut ainsi être vendu aux établissements de santé sans évaluation par la commission de la transparence du service médical rendu et de la population cible. La connaissance des prix et des quantités vendues aux hôpitaux des médicaments ATU est rendue difficile par le fait qu'ils ne sont pas soumis à l'obligation de déclaration des ventes à l'AFSSAPS par les fabricants et que les systèmes d'information des hôpitaux et des caisses d'assurance maladie ne les repèrent pas.

Un laboratoire peut donc demander simultanément l'admission au remboursement par la sécurité sociale et l'agrément aux collectivités dont l'obtention est obligatoire pour vendre un médicament à l'hôpital. Il peut encore ne demander que cet agrément. La Cour observe que, dans ce dernier cas, la commission de la transparence n'a pas l'obligation juridique d'évaluer le gain thérapeutique.

Devenu automatique pour les médicaments sous ATU, l'agrément tendrait à le devenir pour les autres, pratiquement aucun refus n'ayant été prononcé par la commission de transparence en un an.

Ainsi, si la croissance très rapide de la dépense de médicament à l'hôpital est due à de vraies innovations thérapeutiques, elle est surtout due aux effets de la liberté des prix appliquée à des produits en situation de monopole. Les hôpitaux n'utilisent pas assez les procédures de groupement d'achat. A cet égard, le rapporteur déposera un amendement modifiant le code des marchés public et tendant à permettre le recours effectif à des groupements d'achat pour l'acquisition des médicaments par les hôpitaux.

Il faudrait, en outre développer la mise en place des procédures d'encadrement des prescriptions et la distribution nominative.

Le rapporteur souhaite une clarification rapide des conditions de classement des médicaments en réserve hospitalière et de leur maintien dans ce statut. La commission de transparence devrait pouvoir évaluer tous les médicaments, même ceux classés en réserve hospitalière. Enfin, il serait opportun de confier au comité économique des produits de santé une compétence a posteriori de suivi et d'alerte en ce qui concerne le niveau des prix des médicaments rétrocédés.

V.- LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL : PRÉPARER L'AVENIR

A. UNE SITUATION FINANCIÈRE SAINE ET STABILISÉE

L'objectif de dépenses de la branche des accidents du travail et maladies professionnelles de l'ensemble des régimes obligatoires de base, fixé à 8,53 milliards d'euros par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, a été de peu dépassé puisque l'objectif révisé à 9,02 milliards d'euros, tel qu'issu de l'article 46 du présent projet, inclut un versement complémentaire au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) de 104 millions d'euros et au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) de 100 millions d'euros supplémentaires.

Pour 2003, le gouvernement propose de fixer cet objectif à 9,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 4,2 % par rapport aux dépenses effectives de l'année 2002, afin notamment d'assumer financièrement la montée en charge de l'indemnisation des victimes de l'amiante.

Les dépenses du régime général représentant 93 % de l'ensemble des dépenses de la branche, il est possible d'envisager l'équilibre global de la branche à travers l'équilibre correspondant au sein du seul régime général. Depuis la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, l'équilibre de la branche des accidents du travail et maladies professionnelles doit être réalisé distinctement de celui de la branche maladie, les deux trésoreries étant séparées. La branche a été excédentaire de 20 millions d'euros en 2001. Cette situation devrait perdurer, avec un excédent prévisionnel de 70 millions d'euros en 2002 et de 152 millions d'euros en 2003, après prise en compte des mesures nouvelles du présent projet de loi.

Les prestations versées par le régime général devraient s'élever à 6,4 milliards d'euros en 2003, soit une progression de 3,4 % par rapport à 2002. Les indemnités journalières et autres dépenses dans le champ de l'ONDAM devraient augmenter de 6 %, en phase avec l'évolution des dépenses d'assurance maladie, alors que les rentes d'incapacité permanente ne progresseraient que de 1,5 %, pour atteindre 3,4 milliards d'euros. Cette faible croissance des dépenses liées à l'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles est due à une stagnation tendancielle en volume confirmée des rentes servies, qui est juste contrebalancée par l'ensemble des nouvelles dispositions introduites dans le droit de l'indemnisation par les dernières lois de financement : revalorisation des rentes d'ayants droit, majoration des rentes pour tierces personnes, indemnisation des accidents successifs, indexation de l'indemnité en capital, extension du système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles,...

Ces bons résultats financiers peuvent donc être obtenus avec une modération des cotisations, qui n'augmentent pas. Pour l'année 2003, la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles délibérera en novembre 2002 sur les majorations à retenir, et en décembre 2002 sur le taux brut à retenir. Elle communiquera au ministre chargé de la sécurité sociale, au plus tard le 31 janvier 2003, sa proposition de taux net pour 2003 (avec ses éléments constitutifs : taux brut et majorations), dans le respect des conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale déterminées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Conformément aux souhaits exprimés par cette commission lors de sa réunion du 4 juillet dernier portant sur la tarification 2003, le gouvernement propose de reconduire en 2003 le taux net retenu en 2002 (2,185 %), ce taux ayant baissé chaque année depuis 1998 où il était de 2,262 %.

B. LES ACTIONS DE PRÉVENTION ET L'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

Selon les chiffres provisoires de la CNAM pour l'année 2001, le nombre des accidents du travail survenus serait de 1,36 million, autant qu'en 2000, et celui des maladies professionnelles constatées et reconnues de 26 545. La fréquence des accidents du travail est stable, malgré l'accroissement des effectifs salariés cette année, et le nombre de maladies professionnelles reconnues augmente en raison des nouveaux droits ouverts aux victimes (révision des tableaux, nouvelles procédures).

Il faut hélas signaler que les accidents de la route ont représenté, en 2001, 61 % des accidents du travail mortels, en tant qu'accidents de trajet entre le domicile et le lieu de travail ou accidents de mission. Dans ce domaine aussi, il faut se donner les moyens de mettre en _uvre l'une des trois priorités énoncées par le Président de la République le 14 juillet dernier, la lutte contre l'insécurité routière. On pourrait par exemple envisager de réglementer l'usage des véhicules légers lors d'un usage professionnel, car les professions « mobiles » comme les services aux personnes à domicile, les livreurs ou les visiteurs médicaux sont les plus touchées à ce titre.

Le Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles de la CNAM peut mener des actions pour éviter la survenue de ces accidents, avec un budget de 348 millions d'euros en 2002 qui figure dans l'objectif de dépenses de la branche. Ce fonds finance notamment les actions propres de la CNAM en matière de prévention, les services de prévention et de tarification des caisses régionales d'assurance maladie (CRAM) et l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), à hauteur de 68 millions d'euros. Parmi les actions les plus importantes, on peut citer les sessions de sensibilisation à la sécurité pour les organisations syndicales, les actions nationales d'information en direction des écoles d'ingénieurs et la prévention du risque routier, notamment avec la signature d'une charte nationale de partenariat entre la CNAM et la sécurité routière.

S'agissant des personnes atteintes plus spécifiquement de maladies professionnelles provoquées par l'amiante, il existe deux dispositifs d'indemnisation.

L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a créé un Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. (FCAATA). Ce fonds est destiné à financer une allocation de cessation anticipée d'activité versée, soit aux victimes des maladies professionnelles des tableaux n° 30 et n° 30 bis (y compris les plaques pleurales depuis un arrêté du 3 décembre 2001), soit aux travailleurs des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante ou ayant travaillé dans la construction et la réparation navale et âgés de plus de cinquante ans. Le nombre de bénéficiaires de la cessation anticipée d'activité augmente rapidement et le dispositif est encore en phase de montée en charge : 3 785 allocataires le 31 décembre 2000, 9 152 le 31 décembre 2001, environ 14 800 en mai 2002. Il apparaît dès lors indispensable de prévoir une majoration importante de la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles à ce titre dans les années à venir.

L'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a créé un Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), afin d'assurer aux personnes ayant été exposées à l'amiante et à leurs ayants droit la réparation intégrale des préjudices qu'ils ont subis. L'indemnisation par le fonds se substitue, pour les préjudices liés à l'amiante, à l'indemnisation de droit commun qui peut être allouée à la victime par une juridiction (tribunal des affaires sanitaires et sociales ou commissions d'indemnisation des victimes d'infractions). Le nombre total de bénéficiaires était évalué, lors du vote de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, à 100 000 personnes. Pour financer les dépenses correspondantes, le FIVA a déjà reçu des dotations qui s'élèveront au total à 808 millions d'euros en 2003. Le dispositif est encore en train de se mettre en place.

C. DES RÉFORMES DE STRUCTURE ET DE FOND

Compte tenu du développement de systèmes de réparation de « droit commun » calés sur la responsabilité civile (indemnisation des victimes de l'amiante ou d'aléas thérapeutiques) et de l'évolution de la jurisprudence sur l'obligation de sécurité de résultat (Cour de cassation, arrêts du 28 février et du 11 avril 2002), la législation des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui repose encore sur le « compromis historique » de 1898 avec une indemnisation automatique mais limitée, mérite un réexamen approfondi.

Deux rapports sur ce sujet ont déjà été rendus : le rapport de M. Roland Masse en juillet 2000 et celui de M. Michel Yahiel en avril 2002. L'évolution vers la réparation dite « intégrale » est ainsi une possibilité, mise en avant par les associations de victimes. Toutefois, comme l'a souligné le rapport Yahiel, « la pauvreté des informations disponibles pour éclairer d'éventuelles décisions » et l'absence d'éléments d'analyse sérieux sur les incidences économiques des choix possibles « d'un point de vue général, mais aussi au regard des gains et pertes à anticiper pour les victimes » montre « l'extrême incertitude entourant les conditions de réalisation et les conséquences de la réparation intégrale, à commencer par son coût ».

Il apparaît ainsi impossible de s'avancer dans la voie de la réparation intégrale avant d'en avoir mesuré les conséquences, notamment financières. Le rapport Yahiel préconise ainsi une méthodologie pour concevoir la réforme, basée sur trois axes :

- confier à la CNAM le soin de réaliser une série d'études et de simulations économiques portant sur un certain nombre de situations concrètes afin de mesurer les enjeux financiers du passage à la réparation intégrale, ainsi que les écarts moyens d'indemnisation entre le régime accidents du travail et le régime de droit commun ;

- examiner, sous l'égide du Haut comité médical de la sécurité sociale, les conditions dans lesquelles le barème habituellement utilisé dans le régime d'indemnisation de droit commun pourrait être appliqué, en matière de préjudice physiologique, aux accidents du travail et maladies professionnelles ;

- mettre en place un comité de pilotage associant la direction de la sécurité sociale, la direction des relations du travail et la CNAM, chargé d'approfondir l'expertise sur la réparation intégrale en ce qui concerne ses aspects juridiques, financiers et organisationnels.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a confirmé le mandat confié à M. Michel Yahiel par le précédent gouvernement de conduire ce comité de pilotage, qui devra lui remettre ses premiers éléments de réflexion d'ici la fin de l'année 2002 et ses conclusions dans le courant de l'année 2003. Une fois l'évaluation du coût du passage à une réparation intégrale des préjudices liés aux risques professionnels connue, il sera possible de lancer une large concertation sur ce sujet, notamment avec les partenaires sociaux.

En attendant une telle réforme du fond du droit applicable aux accidents du travail, l'article 38 du présent projet de loi promeut une véritable modernisation de la gestion de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui lui permettra de mieux faire face à ses défis futurs tout en s'inscrivant dans la continuité de la loi du 25 juillet 1994 qui a reconnu l'autonomie de la branche.

Il est ainsi proposé la mise en place, dès 2003, d'une convention d'objectifs et de gestion et d'un conseil de surveillance, outils qui permettront d'améliorer le contrôle du Parlement sur la gestion de la branche, et une modification du mode de désignation des membres de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui seront désormais nommés directement par les partenaires sociaux. Le rapporteur se félicite de cette réforme, qui offre à chacun, Parlement, gouvernement et partenaires sociaux, un rôle précis afin de mieux gérer, prévenir et réparer le risque professionnel.

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION

La commission a examiné le rapport de M. Jean Bardet sur l'assurance maladie et les accidents du travail au cours de sa séance du mardi 22 octobre 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean-Marie Le Guen a jugé que dans ce projet de loi, surtout pour l'assurance maladie, l'essentiel ne réside pas dans le texte des articles. Ceux-ci feront évidemment l'objet d'une discussion point par point et l'on peut noter avec intérêt l'annonce faite par le rapporteur d'un certain nombre d'amendements.

Toutefois, le point le plus frappant de ce projet est l'absence totale de dispositif de maîtrise des dépenses, fût-elle médicalisée, en dehors du « plan médicament ». La maîtrise comptable des dépenses a plus ou moins été imposée par les circonstances et n'apparaît aujourd'hui plus souhaitable. On ne peut pour autant s'en tenir à la situation existante et prôner la seule maîtrise médicalisée. Si on ne peut qu'approuver l'idée d'un meilleur partenariat avec les professions de santé, on doit observer que la notion de maîtrise ne s'accompagne d'aucune mesure concrète.

Sur ce point, il semble que la démobilisation des acteurs est totale. La maîtrise comptable a certes entraîné des difficultés avec les médecins ; cependant, la focalisation sur la maîtrise des dépenses d'assurance maladie en entraînera également à l'avenir pour les malades. Cette orientation, dangereuse pour le système de santé et les assurés, ne sera pas mieux acceptée que celle à laquelle elle entend se substituer. Il n'existe certes pas de recette toute faite, mais il semble nécessaire de ne pas s'en tenir à cette seule approche.

En ce qui concerne le médicament, les mesures gouvernementales ont été plutôt bien accueillies. Il est vrai que l'idée qui les sous-tendait était des plus simples, à défaut d'être juste. En effet, les auditions animées par le rapporteur ont montré que même les défenseurs des médicaments génériques étaient mécontents du dispositif adopté. Le dépôt de prix est essentiellement un effet d'annonce. Quant aux déremboursement opérés sur la base de la réévaluation du service médical rendu, on ne peut agir uniquement par le biais d'arguments démagogiques. Certains médicaments ne devraient pas être déremboursés.

Le gouvernement a d'ailleurs multiplié les déclarations vidant progressivement ces dispositifs relatifs au médicament d'effets concrets. En tout état de cause, ce qui en subsistera ne contribuera pas à la maîtrise de la dépense de médicaments.

On ne peut qu'être favorable à un système de santé adapté aux besoins des Français et le plus efficace possible. C'est à l'aune de ces deux préoccupations que l'opposition jugera les amendements présentés par le rapporteur.

M. Claude Evin a fait les remarques suivantes :

- La maîtrise des dépenses de santé apparaît absolument nécessaire étant donné que le système repose sur des financements publics et que les éventuelles dérives des dépenses pèsent en dernière analyse sur les usagers eux-mêmes. Or le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 ne comporte aucune mesure efficace en la matière.

- On peut relever que certaines dispositions du projet de loi viennent compléter et prolonger des dispositions votées l'année passée, qui avaient, à l'époque, suscité de vives critiques de la part de l'opposition : l'article 6 relatif à la contribution sur les dépenses de promotion des laboratoires pharmaceutiques ou l'article 7 sur la clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d'affaires des laboratoires pharmaceutiques non conventionnés.

- Il faut se réjouir que le projet de loi prévoit des financements clairs et suffisants s'agissant du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ou de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux. En revanche, certaines dispositions du projet de loi n'apportent en réalité rien de nouveau ; on voit mal, par exemple, quelle valeur ajoutée apporteront la mission d'expertise sur les hôpitaux ou les nouvelles mesures relatives à la tarification des activités médicales qui ont déjà fait l'objet d'un texte de loi en 1999.

- Il faut dénoncer la contradiction qui existe entre, d'une part, le discours consensuel du ministre selon lequel il convient de clarifier les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale et, d'autre part, la démarche consistant à mettre en place une fausse caisse indépendante compétente en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles. On sait que la mise en place officielle de cette nouvelle caisse n'a pas d'autre but que de permettre aux représentants du MEDEF d'intervenir à nouveau sur les questions importantes des taux de cotisations et d'indemnisation des accidents du travail, sans pour autant s'impliquer dans la gestion de la CNAM elle-même.

M. Pascal Terrasse a fait les observations suivantes :

- S'agissant de l'article 34 du projet de loi qui porte sur la fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie révisé pour 2002, on peut déplorer qu'aucune augmentation ne soit prévue pour le secteur médico-social, ce qui ne va pas sans poser de sérieux problèmes aux établissements concernés. Ceux qui accueillent des personnes handicapées ont besoin de davantage de moyens pour mener à bien leurs missions.

- L'article 25 relatif à la prolongation du délai pour la signature des conventions tripartites par les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes reporte la date de signature de ces conventions de 2003 à 2006, ce qui aura des incidences très graves pour les établissements concernés. Reporter cette date à 2004 aurait permis que les 150 millions d'euros devant leur être versés le soient dans des délais raisonnables.

- L'article 26 relatif à la réintégration des médicaments remboursables dans les tarifs de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur suscite d'autres interrogations. Le fait de réintégrer les médicaments remboursables dans les tarifs de ces établissements aura des conséquences néfastes. Il aurait été préférable de maintenir les dispositions antérieures ou de ne prévoir que la réintégration des médicaments les moins coûteux.

- D'une manière générale, la notion de fongibilité des enveloppes est séduisante a priori mais on ne peut que déplorer que cela s'opère si rarement en faveur du secteur médico-social.

Mme Hélène Mignon a fait les remarques suivantes :

- Il serait peu judicieux d'assimiler la notion de responsabilisation du corps médical avec celle des malades eux-mêmes, tant il est vrai que les seconds sont dépendants, de par leur état de santé même, des premiers.

- On peut considérer que la tarification de la visite est susceptible d'évoluer et va beaucoup dépendre des exigences professionnelles et éthiques des médecins, de considérations géographiques et notamment de l'accessibilité des lieux par des moyens de transport public.

- Le déremboursement de certains médicaments ne signifiant pas que ces derniers seront forcément retirés du circuit commercial, il faut s'inquiéter des conséquences néfastes à long terme de l'automédication. Si, dans un premier temps, les dépenses de remboursement peuvent en effet diminuer, on peut craindre à terme un accroissement des dépenses rendues nécessaires par les effets nocifs de la prise de tel ou tel médicament sans suivi médical.

M. Pierre Morange a fait les observations suivantes :

- On doit saluer le caractère sincère de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui permet pour la première fois d'annoncer un ONDAM réaliste. On sait en effet que pour les dernières lois de financement, le montant de l'ONDAM adopté par la représentation nationale pouvait être réévalué quelques semaines seulement après l'adoption de la loi.

- Les dispositions relatives aux bonnes pratiques médicales vont également dans le bon sens, de même que la volonté du gouvernement de promouvoir de manière active les médicaments génériques.

- Les mesures concernant la création de l'Agence nationale de lutte contre le cancer ou la taxation supplémentaire pesant sur le tabac doivent être saluées. Le projet de loi de programmation pluriannuelle en santé publique, qui sera discuté au Parlement lors du premier semestre 2003, devrait permettre d'avancer sur de nombreux dossiers médicaux et sanitaires.

- Les dispositions transférant le financement des interruptions volontaires de grossesse et des centres de soins spécialisés pour les toxicomanes à l'assurance maladie vont dans le sens de la clarification des relations financières entre la sécurité sociale et l'Etat.

M. Jean-Pierre Door a fait les remarques suivantes :

- Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 opère un changement de cap appréciable : la santé est à nouveau confiée aux médecins. D'une manière générale, il serait bon de mettre en place de nouvelles relations de responsabilité entre le médecin et son patient.

- Il faut réfléchir aux moyens d'améliorer et de renforcer à toutes les étapes de sa carrière la formation du médecin. A cet égard, il est dommageable que l'on ait tendance à négliger tant le rôle du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville que celui des unions régionales des médecins libéraux, qui constituent pourtant un excellent outil d'évaluation des pratiques.

- De nouvelles voies devront être explorées en matière de gardes médicales ou de permanence des soins en ville. Des actions fortes devront être menées pour lutter contre la désertification médicale en milieu rural. Il faut, enfin, mettre en place des relations rénovées entre le médecin généraliste et le spécialiste, entre le secteur privé et le public, ce qui est la seule façon d'augmenter l'efficacité globale du système de santé.

Mme Catherine Génisson a souhaité avoir des précisions sur le rôle de la mission d'expertise et d'audit hospitalier créée par le projet.

M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, a apporté les réponses suivantes :

- L'objectif poursuivi par le projet de loi de financement est de s'engager vers une maîtrise médicalisée des dépenses de santé, différente par définition de la maîtrise dite comptable. Différentes dispositions du projet viennent conforter la logique de la maîtrise médicalisée : on peut citer l'article 2 visant à fournir au Parlement une information « médicalisée » sur le contenu de l'ONDAM, l'article 18 définissant les missions du service médical de l'assurance maladie ou l'article 19 mettant en place des procédures applicables aux médecins en cas de pratiques abusives.

- S'agissant du déremboursement de certains médicaments, il faut rappeler que cela ne concerne que les médicaments à service médical rendu nul ou insuffisant. Les médicaments jugés dangereux sont purement et simplement retirés du marché. Quant à ceux qui ne sont efficaces que pour des indications très particulières, le principe de leur remboursement est maintenu, comme l'a confirmé le ministre de la santé lors de son audition par la commission.

M. Jean-Marie Le Guen a alors suggéré l'application d'un taux de remboursement à 0 % pour que ces médicaments puissent néanmoins être pris en charge pour les patients atteints d'affections de longue durée.

M. Jean Bardet, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, après avoir jugé la proposition intéressante, a poursuivi ses réponses :

- La mission d'expertise et d'audit hospitaliers créée par l'article 11 porte sur la gestion des hôpitaux et non pas sur les procédures d'accréditation ; sa création répond à un objectif d'assouplissement.

- L'article 37, qui prévoit le montant du versement de la branche accidents du travail à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, est la conséquence de mesures votées dans les précédentes lois de financement.

- La prolongation du délai pour la signature des conventions tripartites par les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes s'explique par le fait que, sur les 8 000 établissements concernés, seuls 763 ont pour le moment signé une telle convention ; l'allongement du délai de signature jusqu'en 2006 est donc raisonnable. En outre, les établissements ne semblent pas demandeurs.

- Le dispositif, supprimé par l'article 26, qui prévoit l'exclusion des médicaments remboursables des tarifs de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur, a certes été adopté sous la précédente législature, à l'initiative du Sénat, mais, il faut le rappeler, contre la volonté du gouvernement de l'époque. Le jugement porté sur ce dispositif doit donc être relativisé.

- Les responsabilités du corps médical et des malades en matière de maîtrise des dépenses de santé doivent effectivement être équilibrées. Ainsi, si des normes précises ont été prévues pour évaluer la nécessité d'une visite à domicile, celles-ci ne doivent pas constituer un carcan et devront être appliquées avec souplesse et discernement.

- Les difficultés actuellement rencontrées par les gardes et les services d'urgences pour assurer la continuité des soins ont été soulignées à plusieurs reprises. Un amendement proposera donc d'utiliser les crédits non consommés du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (107 millions d'euros) pour réorganiser des services de garde.

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE ET AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL

TITRE 1ER

ORIENTATIONS ET OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE

Article 2

(article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997)

Création d'une annexe sur la médicalisation de l'ONDAM

Cet article vise à donner au Parlement une nouvelle information « médicalisée » sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), pour lui permettre de mieux contrôler l'application des lois de financement et de connaître plus précisément le contenu de l'enveloppe de soins remboursables qu'il vote.

Pour ce faire, il est proposé de compléter la liste des rapports que le gouvernement doit rattacher chaque année à l'annexe b au projet de loi de financement. Ladite annexe b est définie par l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale comme « [devant] rendre compte de la mise en _uvre des dispositions des lois de financement de la sécurité sociale de l'exercice précédent ». L'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a déjà prévu de rattacher à cette annexe b huit rapports supplémentaires :

- le bilan des contrôles médicaux effectués dans le secteur de l'hospitalisation ;

- l'état de la réforme de la Nomenclature générale des actes professionnels ;

- l'exécution budgétaire de la loi de financement ;

- le bilan des expérimentations des « filières et réseaux de soins » ;

- la mise en oeuvre des références médicales opposables ;

- les restructurations hospitalières ;

- le bilan de l'exécution du programme de médicalisation des systèmes d'information ;

- le bilan des contrôles d'attributions des prestations familiales.

Ce neuvième rapport devra analyser l'évolution, au regard des besoins de santé, des soins financés au titre de l'ONDAM. Grâce à des indicateurs chiffrés et concrets, le débat sur l'ONDAM ne se limitera plus à une discussion « budgétaire » sur un taux de croissance permettant d'équilibrer les comptes de l'assurance maladie. Le Parlement pourra mieux apprécier l'utilité « médicale » de l'augmentation des dépenses de santé.

Le gouvernement devra donc compléter par des éléments d'analyse médicalisée la description de l'ONDAM figurant à l'annexe b. Ces éléments pourront être définis dans le cadre des travaux du groupe de travail sur la médicalisation de l'ONDAM créé par M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, au sein de la Commission des comptes de la sécurité sociale qu'il préside. Enfin, à terme, l'utilisation de nouveaux outils comme les comptes par pathologie permettra de disposer d'une information détaillée sur l'ONDAM, non plus seulement par enveloppe en fonction de l'offre de soins (une enveloppe par prescripteur) mais véritablement en fonction de la demande (besoins de santé de la population répartis par catégories diagnostiques).

Sur le plan juridique, il faut toutefois rappeler que, dans sa décision n° 98-404 DC du 18 décembre 1998, le Conseil constitutionnel a resserré sa jurisprudence par rapport à la loi de financement pour 1997 en censurant la disposition de la loi de financement pour 1999 qui prévoyait qu'un rapport sur l'état de la santé bucco-dentaire de la population devait être joint à l'annexe a au projet de loi de financement de la sécurité sociale. En effet, en vertu du premier alinéa de l'article 47-1 de la Constitution : « Le Parlement vote les projets de loi de financement de la sécurité sociale dans les conditions prévues par une loi organique » ; pour le Conseil, il en résulte que « seule la loi organique peut déterminer les rapports qui doivent être annexés aux projets de loi de financement de la sécurité sociale ».

Pour éviter que ce rapport sur la médicalisation de l'ONDAM, auquel le rapporteur est très attaché au fond, soit déclaré contraire à la Constitution au motif qu'il serait adopté au terme d'une procédure irrégulière, il convient de transformer ce rapport, non en une nouvelle annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais en un « simple » rapport du Gouvernement au Parlement, déposé à la même date que les annexes du projet de loi de financement et relatif au contrôle de l'application des lois de financement.

Le caractère assez artificiel du procédé suggère toutefois de modifier assez rapidement la loi organique sur ce point, afin de permettre aux lois de financement, tout comme les lois de finances, de prévoir de nouvelles annexes : cette matière ne doit pas relever de la loi organique. Il s'agira ainsi de faciliter le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

*

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES À L'ASSURANCE MALADIE

Article 10

(articles L. 162-222, L. 162-22-3, L. 162-22-8 du code de la sécurité sociale et L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles)

Mode de calcul de l'objectif quantifié national des cliniques privées

Cet article établit le calcul de l'objectif quantifié national (OQN) des cliniques privées en droits constatés, seul demeuré exprimé en comptabilité d'encaissement. Il permet, par ailleurs, de prendre en compte la reconversion d'établissements de santé privés sous OQN en établissements médico-sociaux.

L'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a procédé à une réforme en profondeur des modes de régulation des cliniques privées, fondée sur la contractualisation et une meilleure prise en compte de l'activité médicale dans la tarification. Ce dispositif avait pour objectif d'accroître le rôle dévolu aux ARH et de renforcer le dialogue avec les professionnels au niveau régional comme au niveau national, tout en préparant un passage à la tarification à la pathologie (selon la terminologie de l'époque).

Cette réforme positive a été suivie d'une évolution qui concerne, cette fois, l'ensemble de la comptabilité de la sécurité sociale : le passage d'une comptabilité de caisse à une comptabilité en droits constatés. Les comptes des régimes de base de la sécurité sociale étaient habituellement présentés en encaissement/décaissement. Depuis l'exercice 1996 pour le régime général et l'exercice 1997 pour les autres régimes de base, les comptes des organismes de sécurité sociale ont été présentés en droits constatés. Au demeurant, les comptes consolidés présentés à la commission des comptes de la sécurité sociale sont demeurés en comptabilité de caisse jusqu'en 2002.

Les vertus de la comptabilité en droits constatées sont connues : elle constitue un dispositif d'information précis, fiable, qui permet à un organisme de connaître avec précision l'état de ses créances et de ses dettes à l'égard d'un tiers. Elle permet encore d'arrêter les comptes plus tôt, en raison de l'absence de période complémentaire dans ce système. Enfin, elle produit un résultat comptable indépendant des évènements pouvant perturber de façon accidentelle le paiement des cotisations ou le versement des prestations.

Il se trouve, qu'à ce jour, l'objectif quantifié national (OQN) des cliniques privées est le seul objectif restant exprimé en encaissement/décaissement.

L'objet du présent article est donc triple :

· établir et suivre l'OQN des cliniques privées dans la nouvelle norme comptable ;

· réduire le nombre des rendez-vous de suivi des dépenses à un seul rendez-vous semestriel ;

· autoriser la fongibilité des enveloppes entre l'OQN et l'enveloppe médico-sociale afin de prendre en compte la reconversion d'établissements de santé privés en établissements médico-sociaux.

· Le I du présent article modifie l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale qui définit l'objectif quantifié national.

Le A de ce I adapte les termes du premier alinéa de cet article à la comptabilité en droits constatés en substituant à l'expression : « le montant annuels des frais d'hospitalisation dans ces établissements pris en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie, dont le contenu est fixé par un décret », l'expression : « le montant annuel des charges afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés dans ces établissements au cours de l'année et supportés par les régimes obligatoires d'assurance maladie ».

Pour mémoire, les établissements visés par cet article, qui sont mentionnés à l'article L. 6114-3 du code de la santé publique, sont les cliniques privées non financées par la dotation globale.

Le B du I du présent article complète le I de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale en précisant que le montant de l'OQN, arrêté par les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale, de l'économie et du budget en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, dans un délai de quinze jours suivant la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale, prend en compte les cliniques privées non financées par la dotation globale dont l'évolution des activités les conduisent à exercer des activités relevant du secteur médico-social. Dans ce cas, ces établissements passent sous le régime de financement prévu à l'article L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles.

Ce dernier financement est celui des prestations des établissements et services sociaux et médico-sociaux publics et privés qui sont à la charge des organismes de sécurité sociale.

Il s'agit d'établissements dont l'activité s'oriente vers des prestations telles les soins de suite ou l'hébergement médicalisé de personnes handicapées.

En effet, si l'autorisation de financement des établissements de soins relève de l'ARH, l'autorisation des établissements sociaux et médico-sociaux relève du représentant de l'Etat dans la région. Ainsi, dans le cas où l'ARH constate l'évolution d'un établissement de soins vers des activités relevant du secteur médico-social, la décision est soumise au comité régional de l'organisation sanitaire et sociale qui, le cas échéant, annule l'autorisation de financement qui est alors reprise par le représentant de l'Etat dans la région.

Il s'agit donc de la mise en _uvre de la fongibilité entre l'OQN et l'enveloppe médico-sociale, les dépenses ainsi épargnées aux régimes d'assurance maladie étant alors prises en charge par le secteur social et médico-social. Ce tranfert permet la résorption et l'éventuel redéploiement de lits excédentaires financés par l'assurance maladie.

Le C du I du présent article adapte, à l'instar du A, les termes de la dernière phrase du II de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale à la nouvelle norme comptable en substituant à la phrase : « Il tient compte à cet effet notamment de l'évolution constatée des dépenses au titre de l'année antérieure, et des changements de régime juridique et financier de certains établissements. », la phrase : « Il prend en compte à cet effet, notamment l'évolution des charges au titre des soins dispensés l'année précédente, et les changements de régime juridique et financier de certains établissements ».

· Le II du présent article modifie l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale qui crée un accord bipartite.

Le A de ce II remplace les deux premiers alinéas du II de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale.

Il s'agit, dans un souci de simplification, de réduire le nombre des rendez-vous de suivi des dépenses à un unique rendez-vous semestriel.

Pour mémoire, le I de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale pose le principe d'un accord annuel passé entre les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et les représentants des établissements et détermine le champ de cet accord.

La nouvelle rédaction du premier alinéa du II adapte sa rédaction à la terminologie propre à la comptabilité en droits constatés mais, surtout, ramène la constatation de l'évolution des charges entrant dans l'OQN par les partenaires de la convention bipartite à au moins une fois dans l'année, au vu des résultats des quatre premiers mois de l'année. Dans le texte actuel, ce rendez-vous est prévu au moins deux fois dans l'année : une première fois au vu des résultats des quatre premiers mois de l'année et une seconde fois au vu des résultats des huit premiers mois de l'année.

La nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale substitue aux termes : « le montant total des versements afférents aux frais d'hospitalisation définis au I de l'article L. 162-22-2 », les termes : « le montant total des charges mentionnées au I de l'article L. 162-22-2 ».

Cet alinéa prévoit les conditions dans lesquelles la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) communique à l'Etat et aux ARH, pour l'ensemble des régimes obligatoires d'assurance maladie, le montant total des charges afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés dans ces établissements au cours de l'année et supportés par les régimes obligatoires d'assurance maladie.

Les B, C et D du II du présent article, modifient respectivement les troisième et sixième alinéas du II de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale et, pour le C, supprime les 1° et 2°.

Il s'agit d'adapter la rédaction des alinéas concernés au passage à la comptabilité en droits constatés (B et C), le C précisant que les informations sont communiquées à l'ARH par la CNAMTS au plus tard le 31 août pour les quatre premiers mois.

Le C supprime les 1 et 2° qui font référence aux dates actuelles de transmission : le 15 juin au plus tard, pour les quatre premiers mois ; le 15 octobre au plus tard, pour les huit premiers mois.

Le E du II du présent article remplace le III actuel de l'article L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale.

Dans sa rédaction actuelle, ce III renvoie au décret mentionné à l'article L. 162-22-2 qui détermine «  les modalités selon lesquelles, chaque année, sont déterminées les évolutions des tarifs des prestations compatibles avec le respect de cet objectif », cela y compris en cas de défaut de transmission par la CNAVTS des informations relatives au montant total des charges afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés dans ces établissements au cours de l'année et supportés par les régimes obligatoires d'assurance maladie.

En effet, en cas d'absence de conclusion de l'accord avant le 25 février, un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixe au plus tard le 15 mars:

1º L'évolution moyenne nationale et l'évolution moyenne dans chaque région des tarifs des prestations servant de base au calcul de la participation de l'assuré et des montants afférents aux forfaits annuels mentionnés à l'article L. 162-22-8 selon les modalités prévues à l'article L. 162-22-2 ; ces évolutions peuvent être différentes pour certaines activités médicales.

2º Les variations maximale et minimale des taux d'évolution des tarifs des prestations et des montants afférents aux forfaits annuels mentionnés à l'article L. 162-22-8, qui peuvent être alloués aux établissements par les agences régionales de l'hospitalisation selon les modalités définies par l'accord régional mentionné à l'article L. 162-22-4.

3º Les tarifs des prestations d'hospitalisation nouvellement créées dans les conditions prévues au 1º de l'article L. 162-22-1.

4º Le montant total des ressources qui peuvent être allouées au plan national au financement de nouveaux forfaits annuels créés dans les conditions prévues à l'article L. 162-22-8, les critères présidant à la détermination du montant de chacun de ces -forfaits et leur valeur unitaire.

La modification apportée par le E du III du présent article se borne à substituer au terme « dépenses » le terme « charges ».

· Le III du présent article modifie l'article L. 162-22-8 du code de la sécurité sociale en réécrivant son quatrième alinéa.

La modification apportée par le III se borne à substituer au terme « dépenses » le terme « charges ». Il s'agit donc, là encore d'adapter l'article au nouveau mode comptable.

L'article L. 162-228 du code de la sécurité sociale

Cet article, qui résulte de l'article 41-IV de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, crée, par dérogation à l'article L. 162-22-1 qui détermine les prestataires d'hospitalisation, une nouvelle catégorie de financement destinée aux établissements privés ayant reçu une autorisation d'activité de soins, d'accueil et de traitement des urgences.

Ces établissements privés sont les établissements entrant dans le champ de la régulation par objectif quantifié national, c'est-à-dire les établissements de santé à but lucratif ou non ayant conclu un contrat d'objectifs et de moyens avec les ARH.

L'activité d'accueil et de traitement des urgences est une activité soumise à autorisation. En application des schémas régionaux d'organisation sanitaire de deuxième génération, les agences régionales de l'hospitalisation ont commencé, au cours de l'année 2000, à délivrer des autorisations d'activité aux établissements répondant tout à la fois aux besoins mis à jour par les Schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) et aux normes de fonctionnement définies par la réglementation.

Or, les prestations servies par les établissements privés commerciaux dans le cadre de l'activité d'accueil et de traitement des urgences ne peuvent pas donner lieu à facturation en l'absence de tarifs de prestation.

Le premier alinéa de l'article L. 162-22-8 permet donc de mettre en place une rémunération de l'activité d'urgence.

Ce système de rémunération est adapté aux spécificités des urgences. En effet, cette activité est conjoncturelle. Le financement prévu dans cet article combine donc un forfait annuel visant à assurer la couverture des frais fixes inhérents à cette activité et un tarif de prestation au passage.

Le deuxième alinéa indique que ne peuvent bénéficier de ce financement que « les établissements ayant reçu une autorisation d'activité de soins d'accueil et de traitement des urgences, en application des schémas régionaux d'organisation sanitaire ».

Le troisième alinéa de l'article précise que le forfait annuel versé par douzième est pris en charge par l'assurance maladie.

Le quatrième alinéa précise que les sommes versées aux établissements pour le compte des différents régimes sont ensuite réparties « au prorata des dépenses supportées par chacun de ces régimes ».

Cette réforme du financement des cliniques privées a permis d'augmenter l'offre de soins en matière d'urgence dans le secteur privé afin de mieux faire face à l'augmentation toujours plus importante de la fréquentation des unités d'urgences hospitalières.

· Le IV du présent article modifie l'article L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles.

Cet article a trait à la procédure de délivrance de l'autorisation de création, de transformation ou d'extension des établissements et services sociaux et médico-sociaux. L'autorisation est accordée si le projet :

« 1° Est compatible avec les objectifs et répond aux besoins sociaux et médico-sociaux fixés par le schéma d'organisation sociale et médico-sociale dont il relève et, pour les établissements visés au b du 5° du I de l'article L. 312-1, aux besoins et débouchés recensés en matière de formation professionnelle ;

2° Satisfait aux règles d'organisation et de fonctionnement prévues par la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale ou pour son application et prévoit les démarches d'évaluation et les systèmes d'information respectivement prévus aux articles L. 312-8 et L. 312-9 ;

3° Présente un coût de fonctionnement qui n'est pas hors de proportion avec le service rendu ou les coûts des établissements et services fournissant des prestations comparables ;

4° Présente un coût de fonctionnement en année pleine compatible avec le montant des dotations mentionnées, selon le cas, aux articles L. 313-8, L. 314-3 et L. 314-4, au titre de l'exercice correspondant à la date de ladite autorisation. L'autorisation, ou son renouvellement, peuvent être assortis de conditions particulières imposées dans l'intérêt des personnes accueillies.

Lorsque l'autorisation a été refusée en raison de son incompatibilité avec les dispositions de l'un des articles L. 313-8, L. 314-3 et L. 314-4 et lorsque le coût prévisionnel de fonctionnement du projet se révèle, dans un délai de trois ans, en tout ou partie compatible avec le montant des dotations mentionnées audit article, l'autorisation peut être accordée en tout ou partie au cours de ce même délai sans qu'il soit à nouveau procédé aux consultations mentionnées à l'article L. 313-1.

Lorsque les dotations mentionnées aux articles L. 313-8, L 314-3 et L. 314-4 ne permettent pas le financement de tous les projets présentés dans le cadre du premier alinéa de l'article L. 313-2 ou lorsqu'elles n'en permettent qu'une partie, ceux des projets qui, de ce seul fait, n'obtiennent pas l'autorisation font l'objet d'un classement prioritaire dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. »

Cet article est complété par un alinéa prévoyant que le décret mentionné au dernier alinéa de l'article L. 314-3 du code de l'action sociale et des familles prend en compte les évolutions à la suite desquelles des cliniques privées non financées par dotation globale relèvent du secteur social et médico-social (cf. le commentaire du B du présent article).

Les établissements de soins ainsi reconvertis en établissements médico-sociaux relèveront alors de la part de l'ONDAM dévolue au secteur social et médico-social pour les prestations de sécurité sociale qu'ils continuent de délivrer.

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Article 11

(article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 et article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal)

Création d'une mission d'audit et d'expertise hospitalier

Cet article ajoute aux charges du Fonds pour la modernisation des établissements de santé (FMES) le financement d'une mission d'audit et d'expertise hospitaliers chargée d'établir un diagnostic de gestion, au sein d'établissements de soins, et de définir des référentiels de bonne pratique.

Le FMES a été créé par l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, modifié par l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 : il se substituait alors au Fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé (FASMO), lui-même créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

Mis en place pour cinq ans, le FASMO avait pour mission d'aider à la mobilité ou au départ des personnels hospitaliers concernés par une opération de restructuration. Il s'adressait aussi aux salariés de cliniques privées à condition que l'opération implique un établissement public. Cependant, il n'est entré en application que le 1er janvier 1999, les décrets fixant les conditions d'alimentation et de gestion du fonds ainsi que les modalités d'octroi aux personnels hospitaliers statutaires de l'indemnité de départ volontaire étant seulement intervenus le 29 décembre 1998.

Pour sa première année de fonctionnement, en 1999, il a été alimenté par une contribution des régimes d'assurance maladie de 45 millions d'euros. Mais cette dotation n'a pas été consommée en raison des conditions trop restrictives pour bénéficier des crédits. Les conditions relatives à la distance séparant l'hôpital où travaille un agent hospitalier et sa nouvelle affectation ont ainsi interdit à tous les personnels mutés à l'intérieur de l'Ile-de-France de bénéficier d'une aide.

Ce fonds était financé par une contribution de l'assurance maladie répartie entre les différents régimes au prorata de leur part dans la dotation globale hospitalière et dont le montant est déterminé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale.

Du fait de l'absence de projets éligibles en 1998 et 1999, le FASMO a dégagé des résultats excédentaires en 2000, ceux de 2001 étant déficitaires du fait de l'absence de contribution des régimes d'assurance maladie.

Le FMES a été créé en application du protocole d'accord du 14 mars 2000 sur la modernisation du service public hospitalier, conclu entre le gouvernement et les organisations syndicales représentant les personnels de la fonction publique hospitalière.

Ce fonds bénéficie des mêmes sources de financement que son prédécesseur, et sa gestion est également confiée à la Caisse des dépôts et consignations. A sa création le FMES a reçu du FASMO un solde positif de 79,93 M€.

Ses missions sont plus larges que celle du FASMO puisqu'il soutient des opérations d'investissement et de fonctionnement des établissements. En 2001, ses dépenses se sont élevées à 72,3 millions d'euros, il absorbait 8 % des dépenses des fonds médicaux et hospitaliers et coûtait 91,5 millions d'euros à l'assurance maladie. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 l'a doté de 152,2 millions d'euros.

Le I de cet article complète le III de l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 en ajoutant aux missions du FMES le financement d'une mission d'expertise et d'audit hospitalier placé auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Cette mission est chargée de procéder ou de faire procéder à des audits de la gestion et de l'organisation de l'ensemble des activités des établissements de santé et de diffuser auprès de ces établissements les références et recommandations de gestion hospitalière qu'elle élabore à partir des résultats des audits.

D'après l'exposé des motifs, la nécessité s'impose d'élaborer des référentiels de bonne pratique de gestion dans ses différentes composantes : économiques, logistiques et de ressources humaines.

L'institution de cette mission s'intègre dans le plan quinquennal « Hôpital 2007 » qui vise, notamment, à hisser la gestion hospitalière à la hauteur de l'excellence. Dans son discours de présentation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées évoquait un des axes de ce plan qui est la responsabilisation des acteurs par le biais de l'assouplissement de la gestion. Il évoquait ainsi la « culture du résultat et pas seulement des moyens ».

Il est donc possible de considérer qu'un dispositif reposant sur trois piliers est mis en place :

· la démarche conduite par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) qui participe du développement d'une pratique de soins de qualité au plus juste coût a travers, notamment, la production de référentiels de bonne pratique dans ce domaine ;

· l'institution de la mission d'expertise et d'audit qui produit des référentiels de bonne pratique de gestion, élément novateur de la présente loi de financement de la sécurité sociale ;

· la mise en place de la tarification à l'activité qui constitue une incitation à l'efficacité, cela y compris en termes de coûts.

L'exposé des motifs précise qu'il s'agit d'analyser, chaque année, la pratique de certains établissements dans des domaines définis et donne pour exemple les achats inappropriés ou les journées inutiles.

Ces études « sur pièces et sur place » auront, certes, pour objet de définir des actions d'amélioration de gestion au sein des établissements visités, mais encore l'élaboration de référentiels de gestion applicables à l'ensemble des établissements de santé.

· Le II de cet article modifie la fin du dernier alinéa de l'article 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal qui consacre « le droit de toute personne à l'information » en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs.

Il s'agit, par ce complément, de préciser, qu'à l'instar « des actes des assemblées parlementaires, les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 140-9 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés à l'article L. 241-6 du même code, les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République », ne sont pas considérés comme des documents administratifs librement accessibles au public « les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé prévu à l'article L. 6113-6 du code de la santé publique et les rapports d'audit des établissements de santé mentionnés à l'article 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001 ».

Les documents ainsi visés sont les rapports d'accréditation transmis à l'établissement de santé concerné ainsi qu'à l'ARH par l'ANAES et les rapports d'audits créés par le présent article.

D'après les informations fournies au rapporteur par le gouvernement, un rapport annuel de synthèse rendra compte des travaux de la mission d'expertise et d'audit hospitaliers. Dans ces conditions, comme pour l'ANAES, il est en effet préférable de ne pas diffuser de façon inconsidérée des documents susceptibles de citer nommément des établissements de soins.

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Article 12

(article L. 6122-19 du code de la santé publique)

Expérimentation du financement des hôpitaux en fonction de leur l'activité

Cet article institue l'expérimentation d'un mode de tarification unique des établissements de santé publics et privés fondé sur leurs activités. A cette fin, il modifie le premier alinéa de l'article L. 6122-19 du code de la santé publique.

L'unique alinéa du présent article substitue, dans le premier alinéa de l'article L. 6122-19 du code de la santé publique, la référence à l'activité à la référence à la « tarification à la pathologie ».

En visant les articles L. 6113-7 et L. 6113-8 du code de la santé publique et le 7° de l'article L. 166-22-1 du code de la sécurité sociale, la rédaction proposée précise les conditions dans lesquelles de nouveaux modes de financement des établissements de santé publics et privés sont fondés sur leurs activités et établis en fonction des informations qu'il recueillent et transmettent à l'Etat, aux ARH et aux organismes d'assurance maladie.

Aux termes de l'exposé des motifs, il s'agit d'unifier les modes de rémunérations des deux secteurs public et privé en les soumettant à un système commun d'évaluation des coûts de leur activité, l'objectif visé étant, comme l'a indiqué le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, la généralisation de la tarification à l'activité dès l'année 2004.

Le schéma est le suivant :

- Les établissements publics et privés, par le truchement du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), procèdent à l'analyse de leur activité ; ces informations sont transmises aux ARH, à l'Etat et aux organismes d'assurance maladie.

- Les organismes d'assurance maladie, sous contrôle de l'Etat au plan national et des ARH au plan régional, mettent alors au point un système commun d'information.

L'exposé des motifs précise que des établissements seront impliqués dans l'expérimentation sur la base du volontariat. Il s'agit, pour les établissements concernés, « de produire et analyser l'information sur leur activité médicale dans des délais plus courts qu'aujourd'hui » afin de déterminer leurs besoins internes.

Le programme médicalisé des systèmes d'information (PMSI)

Le PMSI consiste en un recueil d'informations administratives (âge, durée de séjour...) et médicales (diagnostics, actes pratiqués...) sur chaque séjour de patient réalisé dans un établissement de santé de court séjour (médecine, chirurgie, obstétrique - MCO).

Ces informations sont codées à partir de deux classifications : l'une pour les diagnostics, l'autre pour les actes pratiqués. Les résumés de sortie anonymisés (RSA) transmis aux ARH sont répartis par un logiciel entre les groupes homogènes de malades (GHM) comportant des caractéristiques économiques (coût, durée de séjour) et médicales (motif médical du séjour, actes pratiqués...) proches.

Grâce à la comptabilité analytique détaillée d'une quarantaine d'établissements, un coût moyen, exprimé en point d'indice synthétique d'activité (ISA), est calculé pour chaque GHM. Pour chaque région et pour chaque établissement, sont ensuite calculés le nombre de point ISA produits (nombre de séjours par GHM multiplié par le nombre de point ISA, budget de court séjour divisé par le nombre de points ISA produits par l'activité de court séjour). La valeur du point ISA est un indicateur global de productivité des établissements de santé.

Pour les cliniques privées, la valeur du point ISA n'est pas calculée à partir du budget (et donc des coûts) des établissements, mais à partir des dépenses remboursées par l'assurance maladie aux établissements : la valeur du point ISA des établissements sous dotation globale et des autres établissements n'est donc pas comparable.

Sources : Cour des comptes

Toujours selon l'exposé des motifs, une mission d'expertise et d'évaluation placé sous la responsabilité du ministre de la santé sera chargée d'accompagner les établissements. Elle remettra au gouvernement un rapport d'étude d'impact sur la tarification à l'activité réalisée à partir de simulations.

Ce rapport complétera utilement les conclusions du rapport d'étape de la mission d'expérimentation sur la tarification à la pathologie évoqué plus haut.

Ainsi, cet article organise le passage de l'expérimentation à la phase de préparation de la mise en _uvre du nouveau système de financement.

Le second alinéa de l'article L. 6122-19 du code de la santé publique qui n'est pas modifié par le présent article, prévoit l'inclusion dans l'ONDAM des dépenses pour les régimes obligatoires de base d'assurance maladie résultant de ces expériences.

Article L. 6113-7 du code de la santé publique

Les établissements de santé, publics ou privés, procèdent à l'analyse de leur activité.

Dans le respect du secret médical et des droits des malades, ils mettent en oeuvre des systèmes d'information qui tiennent compte notamment des pathologies et des modes de prise en charge en vue d'améliorer la connaissance et l'évaluation de l'activité et des coûts et de favoriser l'optimisation de l'offre de soins. Les praticiens exerçant dans les établissements de santé publics et privés transmettent les données médicales nominatives nécessaires à l'analyse de l'activité au médecin responsable de l'information médicale pour l'établissement dans des conditions déterminées par voie réglementaire après consultation du Conseil national de l'ordre des médecins.

Le praticien responsable de l'information médicale est un médecin désigné par le conseil d'administration ou l'organe délibérant de l'établissement, s'il existe, après avis de la commission médicale ou de la conférence médicale. Pour ce qui concerne les établissements publics de santé, les conditions de cette désignation et les modes d'organisation de la fonction d'information médicale sont fixés par décret.

Article L. 6113-8 du code de la santé publique

Les établissements de santé publics et privés transmettent aux agences régionales de l'hospitalisation mentionnées à l'article L. 6115-2, ainsi qu'à l'Etat et aux organismes d'assurance maladie, les informations relatives à leurs moyens de fonctionnement et à leur activité qui sont nécessaires à l'élaboration et à la révision de la carte sanitaire et du schéma d'organisation sanitaire, à la détermination de leurs ressources et à l'évaluation de la qualité des soins.

Les destinataires des informations mentionnées à l'alinéa précédent mettent en oeuvre, sous le contrôle de l'Etat au plan national et des agences au plan régional, un système commun d'informations respectant l'anonymat des patients, ou, à défaut, ne comportant ni leur nom, ni leur prénom, ni leur numéro d'inscription au Répertoire national d'identification des personnes physiques, et dont les conditions d'élaboration et d'accessibilité aux tiers, notamment aux établissements de santé publics et privés, sont définies par voie réglementaire.

Article L. 162-22-1 du code de la sécurité sociale

 Pour les établissements de santé mentionnés à l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique, un décret en Conseil d'Etat, pris après avis des organisations nationales les plus représentatives de ces établissements, détermine :

7º Les modalités de transmission par les établissements à l'Etat, aux agences régionales de l'hospitalisation et aux organismes d'assurance maladie, des informations relatives d'une part aux frais d'hospitalisation, d'autre part aux honoraires des professionnels de santé y exerçant leur activité. Sur la base de ces informations, l'agence régionale de l'hospitalisation procède à un suivi régulier du coût total pour l'assurance maladie de chaque établissement

Article 13

(article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et L. 6161-9 du code de la santé publique)

Fusion du Fonds de modernisation des établissements de santé avec le Fonds de modernisation des cliniques privées

Dans le cadre du plan quinquennal « Hôpital 2007 », le Fonds de modernisation des cliniques privées (FMCP) est absorbé par le Fonds de modernisation des établissements de santé (FMES) afin de concourir à l'investissement dans les domaines de la construction et de la rénovation du patrimoine immobilier hospitalier mais aussi de l'équipement et des systèmes d'information.

Devant la vétusté du patrimoine et des équipements hospitaliers, le gouvernement a décidé, dans le cadre du plan quinquennal « Hôpital 2007 », la mise en _uvre d'une aide à l'investissement de 6 milliards d'euros, une première tranche d'un montant de 300 millions d'euros est inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 par le truchement du présent article.

Les dotation conjuguées des deux fonds s'élèverait à 150 millions d'euros, ajouté aux 300 millions d'euros prévus au titre de l'aide à l'investissement, un montant de 450 millions d'euros serait atteint dès l'année 2003.

Par ailleurs, le ministre a indiqué que, par le biais d'investissements réalisés en partenariat avec le secteur privé, l'investissement total pourrait atteindre 1 milliard d'euros. En effet, il a été annoncé que des modifications législatives interviendraient prochainement afin d'autoriser une personne privée à construire des bâtiments pour le compte de l'hôpital. Ce dispositif connaît un précédent puisque, la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire a fourni un cadre juridique permettant de recourir au secteur privé pour financer la création de nouveaux établissements pénitentiaires.

Le I du présent article prévoit, à compter du 1er janvier 2003, le transfert des obligations et créances du FMCP, créé par l'article 33 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000, au FMES, créé par l'article 40 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Le II de cet article, prévoit que le solde disponible au 31 décembre 2002 du FMCP est versé au FMES. Le montant de ce solde est constaté par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget.

Le FMES a été substitué au Fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé (FASMO) par la loi du 23 décembre 2000 précitée. Ce dernier fonds avait vocation à financer la mobilité et l'adaptation des établissements sous dotation globale concernés par des recompositions. Il était financé par une contribution de l'assurance maladie répartie entre les divers régimes au prorata de leur part dans la dotation globale hospitalière. Le FMES, géré comme le FASMO par la Caisse des dépôts et consignations, est chargée de missions plus élargies puisqu'il doit soutenir des opérations d'investissement et de fonctionnement des établissements. En 2001, les dépenses du FMES ont été de 72,3 millions d'euros.

Le FMCP a été créé pour cinq ans avec pour mission de financer des investissements concourant à l'adéquation de l'offre de soins hospitaliers aux priorités définies par le schéma régional d'organisation sanitaire (SROS). Géré par la caisse des dépôts et consignations, sa dotation, à la charge de l'assurance maladie, a été inscrite en loi de financement de la sécurité sociale, pour respectivement 15,24 millions d'euros en 2000 et 22,87 millions d'euros en 2001. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a porté la dotation pour 2001 à 114,34 M€ et a fixé la dotation 2002 à 91,47 millions d'euros pour tenir compte de l'élargissement des missions du fonds.

Ainsi, le FMES, dans la répartition des dépenses des fonds médicaux et hospitaliers en 2001, représente 8 % et la FMCP, pour la même période, 1 %.

Ce dernier chiffre tempère le procès fait au gouvernement qui « siphonnerait » les fonds dévolus aux cliniques privées au profit des établissements publics.

Le III du présent article abroge le VIII de l'article 33 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000. Ce VIII portait création du FMCP, il est donc logique qu'il disparaisse puisqu'il est absorbé par le FMES.

Le IV du présent article modifie l'article L. 6161-9 du code de la santé publique. Cet article prévoit que les établissements de santé privés à but non lucratif autorisés à assurer l'exécution du service public hospitalier peuvent conclure des concessions avec l'Etat

Le dernier alinéa de cet article prévoit que les concessionnaires ne peuvent recevoir de subventions pour leurs équipements à l'exception des subventions du FMCP.

Logiquement, le IV substitue, dans l'article L. 6161-9 du code de la santé publique, aux mots : « fonds de modernisation des cliniques privées », les mots : « fonds de modernisation des établissements de santé ».

Le V du présent article prévoit que le montant de la participation des régimes obligatoires d'assurance maladie au financement du Fonds pour la modernisation des établissements de santé est fixé pour l'année 2003 à 450 M€.

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Article 14

(article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique)

Extension des missions du Fonds pour l'emploi hospitalier

Cet article étend les missions du Fonds pour l'emploi hospitalier (FEH) au financement de l'étalement, respectivement sur quatre et trois ans, du recrutement de 3 500 emplois de médecins hospitaliers et des 45 000 recrutements au titre de la réduction du temps de travail.

Les modalités de mise en _uvre des 35 heures ont été définies, après négociation avec les organisations syndicales représentatives, par le protocole d'accord du 27 septembre 2001, signé avec quatre organisations syndicales, puis transcrites dans les textes réglementaires par le truchement de l'article 31 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, modifiant l'ordonnance du 26 novembre 1982 relative à la fonction publique hospitalière.

Ce dispositif s'applique aux fonctionnaires stagiaires, titulaires et aux agents contractuels.

Toutefois, la complexité de la mise en _uvre de la RTT dans la fonction publique hospitalière réside dans son calendrier de montée en charge.

En effet, alors que les droits à RTT sont ouverts depuis les 1er janvier 2002 et 2003, les recrutements ont été échelonnés sur trois ans afin de tenir compte des capacités de formation et de financement nécessaires.

Les agents, en 2002, n'ont pu bénéficier de l'intégralité de leurs droits à RTT, les différés ou difficultés de recrutement devant être compensés par le recours au compte épargne-temps et, à un moindre degré, aux heures supplémentaires :

- Un compte épargne-temps a été mis en place, alimenté au choix de l'agent par des jours de congés annuels ou de RTT non pris et des heures supplémentaires non récupérées et non indemnisées. Celui-ci est devenu opérationnel au 1er janvier 2002. Son financement est spécifique et indépendant du financement des 45 000 emplois ; il ne commencera à intervenir qu'en 2003. Les agents épargnant du temps ne pourront l'utiliser qu'à partir de 2004 compte tenu des modalités d'alimentation du compte épargne. Pour ce qui concerne le financement de la montée en charge des comptes épargne-temps, les droits à congé correspondant doivent être financés afin de remplacer les agents lorsqu'ils feront usage de ces droits ou de les leur payer.

- Le contingent d'heures supplémentaires mensuelles est de 20 heures jusqu'à 2004 compris, puis passera à 15 heures en 2005, et à 10 heures en 2006. Les cadres peuvent opter entre le régime du décompte horaire et le décompte en jours, avec 20 jours de RTT. Les personnels de direction bénéficient d'un décompte en jours (204 jours travaillés) et de 20 jours de RTT.

Le gouvernement de l'époque a créé 45 000 emplois spécifiques pour la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière. En 2002, il était prévu de pourvoir 12 300 emplois, soit 27,5 % du total des créations. Plus précisément, les recrutements devaient être pourvus tout au long de l'année et devaient atteindre 40 % des créations d'emplois à la fin de l'année 2002, puis 80 % fin 2003. L'année 2004 devant concerner la réduction du travail de nuit et le solde des emplois soit 9 000.

Pour ce qui concerne les personnels médicaux, un protocole relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des praticiens exerçant en établissements publics de santé a été signé le 22 octobre 2001.

Ce protocole s'applique aux praticiens relevant des statuts des praticiens hospitaliers, praticiens des hôpitaux exerçant à temps partiel, aux assistants des hôpitaux, aux praticiens contractuels et aux praticiens adjoints contractuels.

Afin de compenser la diminution du temps de travail entraîné par la RTT, il a été décidé de créer 35 000 postes de praticiens hospitaliers sur quatre ans, dont une première tranche de 2 000 emplois sur les années 2002/2003 puis une seconde tranche de 1 000 postes sur les années 2004/2005.

En outre, pendant la période de montée en charge des créations de postes et des recrutements destinés à compenser les jours de congés supplémentaires des praticiens au titre de la RTT,.les droits à congé acquis et affectés au compte épargne-temps sont financés comme dans la fonction publique hospitalière.

Afin de pourvoir à l'ensemble des financements ainsi rendus nécessaires, le présent article étend les missions du Fonds pour l'emploi hospitalier, créé par l'article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994, relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique.

Ce fonds prend en charge :

- les deux tiers de l'indemnité exceptionnelle allouée aux agents qui bénéficient des dispositions de l'ordonnance n° 82-298 du 31 mars 1982 ;

- les deux tiers de la différence entre la rémunération versée aux agents autorisés à travailler à temps partiel dans une proportion de 80 % ou 90 % du temps plein et celle qui résulterait d'une réduction proportionnelle de leur traitement indiciaire.

Le fonds peut également prendre en charge le financement d'aides à la mobilité et d'actions de formation.

Les agents mentionnés ci-dessus sont les fonctionnaires régis par la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée et les agents contractuels visés à l'article 10 de ladite loi.

Ce fonds, dont la gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations, est alimenté par une contribution à la charge des établissements énumérés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986. Ces établissements sont les suivants :

- établissements publics de santé et syndicats interhospitaliers ;

- hospices publics ;

- maisons de retraite publiques, à l'exclusion de celles qui sont rattachées au bureau d'aide sociale de Paris ;

- établissements publics ou à caractère public relevant des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance et maisons d'enfants à caractère social ;

- établissements publics ou à caractère public pour mineurs ou adultes handicapés ou inadaptés, à l'exception des établissements nationaux et des établissements d'enseignement ou d'éducation surveillée ;

- centres d'hébergement et de réadaptation sociale, publics ou à caractère public, mentionnés à l'article 185 du code de la famille et de l'aide sociale ;

- centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre.

Cette contribution est assise sur le montant des rémunérations soumises à retenues pour pension. Son taux, qui ne peut excéder 1,8 % est fixé par décret.

Elle est recouvrée dans les mêmes conditions et selon les mêmes règles que les contributions versées par les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

Le présent article complète la loi précitée du 25 juillet 1994 par un III comportant quatre alinéas.

En vertu du premier alinéa, le FEH contribue au financement des droits à congés acquis au titre de la réduction du temps de travail non pris ou portés dans un compte épargne-temps en raison de la réalisation progressive des recrutements.

Il est précisé que ne peuvent être ainsi financés que les droits acquis en 2002, 2003 et 2004 par les médecins, pharmaciens et odontologistes (praticiens concernés par le protocole du 22 octobre 2001) et, en 2002 et 2003, par les agents concernés par le protocole du 27 septembre 2001.

Cette prise en charge ne concerne que les rémunérations prises en compte pour le calcul des ressources allouées par l'assurance maladie à l'établissement employeur des personnes concernées.

En vertu du deuxième alinéa, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale fixe, chaque année, le montant des crédits ouverts à ce titre dans les comptes du fonds.

En vertu du troisième alinéa, les opérations du fonds réalisées pour l'exercice de cette mission font l'objet d'un suivi distinct en comptabilité.

En vertu du quatrième alinéa, cette nouvelle mission du fonds est financée par les régimes obligatoires d'assurance maladie à la hauteur du montant des crédits ouverts chaque année à ce titre par l'arrêté interministériel mentionné au deuxième alinéa du présent article.

D'après l'exposé des motifs, le fonds remboursera les établissements sur une base forfaitaire selon une répartition fixée par les ARH pour les établissements de santé, par le représentant de l'Etat dans le département pour les établissements sociaux et médico-sociaux.

Article 15

(articles L. 162-5-9, L. 162-15-2, L. 162-15-3, L. 162-5-13, L. 162-15, L. 322-5-1, L. 162-12-16, L. 315-3, L. 615-13 du code de la sécurité sociale et article L. 732-5 du code rural)

Suppression du mécanisme dit des « lettres-clefs flottantes »
et des comités médicaux régionaux

Le présent article vise à modifier le code de la sécurité sociale et le code rural afin, d'une part, de supprimer le mécanisme de contrôle des dépenses de soins de ville institué par l'article 24 de la loi de financement de sécurité sociale pour 2000 et dénommé « lettres-clefs flottantes » et, d'autre part, de supprimer les comités médicaux régionaux créés par l'ordonnance n°96-345 de 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins.

1. La suppression du dispositif des lettres-clefs flottantes 

Cette disposition vise à supprimer le c_ur de la maîtrise dite « comptable » des dépenses de soins de ville. Ces dispositifs, introduits dans le code de la sécurité sociale par la loi de financement de sécurité sociale pour 2000, ont ensuite été profondément modifiés par la loi n°2002-322 du 6 mars 2002 portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions libérales de santé et les organismes d'assurance maladie.

Le mécanisme applicable

La loi de financement de sécurité sociale pour 2000 effectuait une délégation aux caisses d'assurance maladie pour la gestion des dépenses d'honoraires des professionnels de santé libéraux et de transport sanitaire.

Pour chacune des professions sous convention, une annexe à la convention fixe un objectif de dépenses remboursables ainsi que des tarifs et honoraires. Cet objectif est fixé, le cas échéant, de manière unilatérale par les caisses. Les caisses d'assurance maladie sont chargées du suivi infra-annuel des dépenses considérées. Si l'évolution des dépenses n'est pas compatible avec l'objectif initial, les caisses et les professionnels ou, en cas de désaccord, les caisses de manière unilatérale, peuvent prendre « des mesures de toute nature » pour rétablir l'équilibre initialement prévu : il peut s'agir de toute action visant à réduire le volume des actes non justifiés au plan médical et des modifications, dans la limite de 20 %, de la cotation des actes inscrits à la nomenclature établie pour les actes pris en charge par l'assurance maladie. En cas de carence ou de mesures insuffisantes, l'Etat peut prendre les mesures nécessaires.

A titre de rappel, les lettres-clefs résultent de l'application des dispositions générales de la nomenclature générale des actes professionnels. Cette nomenclature s'impose aux praticiens lorsqu'ils communiquent aux organismes d'assurance maladie, dans le respect du secret médical, le type et la valeur des actes techniques afin d'en assurer leur remboursement. Tout acte est désigné par une lettre-clé et un coefficient.

Le mécanisme décrit plus haut a été appelé « lettres-clefs flottantes », bien qu'en cas de gonflement imprévu du volume d'actes, aucun ajustement de la lettre-clef automatique, instantané et avec effet rétroactif n'ait été prévu.

La loi du 6 mars 2002, qui a conservé le mécanisme du rapport d'équilibre établi par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et la ou les caisses concernées, a supprimé le dispositif dit des lettres-clefs flottantes, sauf dans le cas où les professions concernées ne sont pas sous convention.

Elle inscrit dans la loi la conclusion d'un accord-cadre interprofessionnel (article L. 162-1-11 nouveau du code de la sécurité sociale). En outre, elle dispose que les conventions conclues entre les professions de santé et les caisses doivent prévoir pour cinq ans :

- les tarifs, fixés dans le cadre d'avenants à chaque convention dont les annexes comportent les changements de nomenclature ;

- les engagements des signataires portant sur « l'évolution de l'activité des professions concernées », qui prennent la forme d'accords de bon usage, de contrats de bonne pratique ou d'autres instruments créés par la négociation conventionnelle. Ces conventions fixent les dispositions applicables en cas de non-respect des engagements.

En l'absence de convention, ou en l'absence d'accords de bon usage ou de contrats de bonne pratique, un arrêté interministériel peut fixer les tarifs et les engagements d'activité. C'est uniquement en l'absence de convention que la loi du 6 mars 2002 confie aux caisses des compétences élargies. L'article L. 165-15-2 du code de la sécurité sociale dispose que les caisses fixent l'objectif des dépenses de la profession, les tarifs des honoraires, et, le cas échéant, les mesures de toute nature propres à garantir le respect de l'objectif fixé, notamment les actions visant à réduire le volume des actes non justifiés et les modifications, dans la limite de 20 %, de la cotation des actes inscrits à la nomenclature. En outre, conformément à l'article L. 165-15-3 du code de la sécurité sociale, les caisses assurent le suivi des dépenses au moins deux fois dans l'année et, en cas de carence des caisses ou lorsque les mesures décidées n'ont pas d'effet, un arrêté interministériel fixe les tarifs et mesures mentionnées plus haut.

La suppression du dispositif s'accompagne de la définition d'un nouveau mode de détermination des tarifs

En cas d'absence de convention nationale, le I du présent article propose de revenir au système de fixation des tarifs et honoraires dans le cadre du règlement conventionnel minimal (RCM) : il s'agit d'un arrêté interministériel pris après l'avis du conseil d'administration de la CNAMTS et des organisations syndicales représentatives. Il est donc proposé de retourner à l'état du droit antérieur à l'adoption de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

A cette fin, le I modifie l'article L. 162-5-9 du code de la sécurité sociale issu de l'ordonnance n°96-345 du 24 avril 1996, modifié par l'article 24 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 et par la loi n° 2002-322 du 6 mars 2002, article relatif au règlement conventionnel minimal (RCM).

Le paragraphe A du I précise que la consultation de la CNAMTS précède l'application du règlement conventionnel minimal aux professions de santé (après consultation de l'instance ordinale correspondante).

Le paragraphe B du I complète le IV de l'article L.° 162-5-9 du code de la sécurité sociale afin de préciser que le règlement conventionnel minimal fixe les tarifs des honoraires, les rémunérations et les frais accessoires dus par les assurés sociaux aux professionnels.

Le II du présent article supprime la sous-section 2 de la section 3-1 du chapitre II du livre Ier du code de la sécurité sociale, en abrogeant les articles L. 162-15-2 et L. 162-15-3, articles issus de la loi de la loi de financement de sécurité sociale pour 2000 et modifiés par la loi du 6 mars 2002.

L'article L. 162-15-2 prescrit aux caisses d'assurance maladie, en l'absence de convention, de fixer les tarifs et l'évolution des dépenses, et de prendre « les mesures de toute nature propres à garantir le respect de l'objectif fixé » (dont la modification des lettres-clefs). L'article L. 162-15-3 concerne la procédure des rapports d'équilibre établis par les caisses et transmis au Parlement et aux ministres compétents.

Le III, le IV et le V du présent article sont des dispositions de cohérence visant à actualiser des références du code de la sécurité sociale.

2. La suppression des comités médicaux régionaux (CMR)

Les VI et VII du présent article suppriment les comités médicaux régionaux institués par l'article 19 de l'ordonnance n°63-345 de 1996 et dont le régime a été précisé par le décret n° 96-786 du 10 septembre 1996 relatif au contrôle médical. Le VI vise à supprimer les dispositions relatives au CMR dans le code de la sécurité sociale, le VII dans le code rural.

Ces comités médicaux régionaux sont des instances paritaires composées de représentants de médecins libéraux (généralistes et spécialistes) et du service médical de l'assurance maladie. Elles sont présidées par le médecin inspecteur régional, qui dispose d'une voix prépondérante.

Ces organes devaient servir d'instances pré-contentieuses en permettant aux caisses de contester le non-respect de l'obligation de signalement de l'indication pour laquelle sont prescrits certains médicaments ainsi que le volume des prescriptions suivantes :

- ordonnance « bizone » (modèle spécifique d'ordonnance qui contient une première partie réservée aux soins en rapport avec l'affection de longue durée et une seconde partie destinée aux affections dites intercurrentes ; le problème vient que le médecin ignore la nature de l'affection) ;

- transports sanitaires ;

- et, enfin, les indemnités journalières.

Les CMR émettent un avis en proposant une sanction et les caisses appliquent la sanction. Compte tenu de l'état des relations entre les caisses et les syndicats de médecins, le système, qui supposait une bonne coopération des deux acteurs principaux, n'a jamais bien fonctionné. Il convient donc de le supprimer.

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Article 16

(article L. 228-1 du code de la sécurité sociale)

Missions du conseil de surveillance de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés

Cet article vise à élargir les missions du conseil de surveillance de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), afin qu'il « veille à la cohérence » des conventions passées entre la CNAMTS et les professionnels de santé avec l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

1. Le conseil de surveillance de la CNAMTS dans la législation applicable

L'article 18-I de l'ordonnance n° 96-344 du 24 avril 1996 relative à l'organisation de la sécurité sociale, devenu l'article L. 228-1 du code de la sécurité sociale, a créé un conseil de surveillance de la CNAMTS, chargé d'examiner les conditions de mise en _uvre des conventions d'objectifs et de gestion, sous la forme d'un avis transmis au Parlement.

Le conseil est composé de 34 membres (dont six parlementaires, des représentants de collectivités locales et des représentants des professions de santé, des établissements de santé et des personnels des établissements de santé). Le président du conseil de surveillance est un membre du Parlement désigné d'un commun accord par les deux Assemblées.

2. Une nouvelle mission dont les contours sont encore indéterminés

Dispositif proposé

Le présent article conduit à attribuer au conseil de surveillance une nouvelle mission relative au respect de la nécessaire cohérence des conventions passées entre les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé avec l'ONDAM.

A cette fin, il ajoute une phrase au quatrième alinéa de l'article L. 228-1 du code de la sécurité sociale disposant que le conseil « veille à la cohérence » des conventions conclues entre la CNAMTS et les professions de santé avec l'ONDAM.

Il s'agit notamment des conventions mentionnées à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale (médecins), à l'article L. 162-9 (chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux), article L. 162-12-2 (infirmiers), L. 162-12-9 (masseurs-kinésithérapeutes), L. 162-14 (laboratoires d'analyses) et L. 162-16-1 (pharmaciens titulaires d'officine).

Le dispositif, dans sa rédaction actuelle, paraît d'une portée normative réduite. En effet, il ne précise pas de quelle manière le conseil est censé « veiller à la cohérence » des conventions avec l'ONDAM : s'agit-il d'une consultation ? d'un avis ? d'une sorte de droit de veto ?

Avantages escomptés

Cet article est à mettre en perspective avec les dispositions de l'article 15 du présent projet, qui procèdent à l'abrogation des articles du code de la sécurité sociale relatifs à la maîtrise comptable, notamment de l'article L. 162-15-3, qui prévoit que le rapport d'équilibre établi par la CNAMTS et les autres caisses concernées et transmis au Parlement et aux ministres compétents « comporte des éléments permettant d'apprécier la compatibilité des annexes ou des mesures déterminées par les caisses nationales avec l'objectif de dépenses déléguées ».

Ce rapport d'équilibre étant supprimé, le présent article permet de préserver cet objectif d'information du Parlement quant au contenu des conventions et leur compatibilité avec l'ONDAM.

En outre, le conseil aura l'opportunité d'assurer le lien nécessaire entre le Parlement, les gestionnaires et les professions de santé.

Modalités d'application

L'exposé des motifs indique que les modalités d'application de l'article feront l'objet d'une concertation entre le président du conseil de surveillance et le président du conseil d'administration de la CNAMTS.

En effet, conformément à l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, les projets de texte réglementaire ou législatif entrant dans le champ de compétence de la CNAMTS doivent donner lieu à la saisine de son conseil d'administration.

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Article 17

(article L. 162-16 du code de la sécurité sociale)

Spécialités délivrées sur la présentation d'une prescription rédigée

en dénomination commune internationale

Le présent article propose de modifier les dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux conditions du remboursement d'une spécialité délivrée par un pharmacien d'officine sur la présentation d'une prescription rédigée en dénomination commune internationale. Au vu d'une prescription en dénomination commune internationale, le pharmacien doit délivrer une spécialité conforme à la prescription, mais dont l'écart de prix avec la spécialité moins chère conditionne le remboursement. Le présent article vise à étendre la comparaison des prix à des spécialités ne figurant pas dans un groupe générique.

Cet article est le premier d'une série de dispositions relatives à la politique « structurelle » du médicament (c'est-à-dire en excluant les mesures relatives aux taxes et à la fixation du « taux K » figurant dans le titre II), qui ont été réparties en trois « groupes » dans le présent projet : les articles 17, 20-21 et 26-27.

S'agissant de la promotion de la prescription en dénomination commune, le présent article complète le dispositif créé par la loi de financement de sécurité sociale pour 2002.

1. Définitions

Le médicament générique

Aux termes du 5°) de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, la « spécialité générique d'une spécialité de référence » est une substance « qui a la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence2 avec la spécialité de référence est démontrée par des études de biodisponibilité appropriées ». Il s'agit de copies de molécules tombées dans le domaine public.

Le groupe générique

Un groupe générique est constitué de deux ou trois médicaments de référence et des médicaments génériques associés. Chaque médicament du groupe a le même principe actif, le même dosage et la même forme pharmaceutique. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) tient le répertoire public des groupes génériques, qui paraît au Journal officiel. Si le prix du générique est nettement inférieur au princeps (son fabricant n'ayant pas à assurer les coûts de recherche et de développement), il comporte la même molécule et a les mêmes effets.

La prescription en dénomination commune internationale (DCI)

L'organisation mondiale de la santé (OMS) établit pour chaque substance active une dénomination simple appartenant au domaine public, généralement différente du nom chimique. Chaque DCI doit comporter un « segment - clé » commun au groupe pharmacologique auquel la substance se rattache. La Pharmacopée française comporte 6 500 noms de marque pour 1 700 substances actives.

La politique de promotion de la prescription en dénomination commune internationale a deux aspects. Elle assure le respect des impératifs de santé publique et de protection des patients grâce à une harmonisation internationale. En outre, elle permet au pharmacien de délivrer des médicaments conformes à la prescription mais moins chers que les médicaments princeps.

2. Le dispositif mis en place par l'article 19 de la loi de financement de sécurité sociale pour 2002 visait à promouvoir la prescription en dénomination commune en précisant les conditions de remboursement des spécialités délivrées

L'article 19 modifiait d'abord l'article L. 5125-23 du code de la santé publique afin d'autoriser le pharmacien à délivrer un médicament sur la présentation d'une prescription libellée en DCI.

Lorsque la prescription libellée en dénomination commune peut être respectée par la délivrance d'une spécialité figurant dans un groupe générique, le pharmacien délivre une spécialité appartenant à ce groupe, en respectant les dispositions de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale relatives au remboursement.

L'article 19 de la loi de financement de sécurité sociale pour 2002 modifiait le code de la sécurité sociale afin de préciser les conditions de remboursement. Lorsque le pharmacien d'officine délivre une spécialité sur la présentation d'une prescription libellée en dénomination commune, l'écart de prix entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère du même groupe générique ne peut être supérieur à un montant déterminé par la convention prévue à l'article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale ou, à défaut, par un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et du budget.

Cette disposition vise à obliger le pharmacien à délivrer les produits les moins coûteux ; elle est comparable à celle en vigueur pour le droit de substitution.

3. Le dispositif proposé modifie les conditions de remboursement en étendant les possibilités de comparaison de prix entre spécialités

La rédaction actuelle est restrictive

La rédaction du code de la sécurité sociale adoptée par le législateur en 2001 restreint la comparaison du prix de la spécialité délivrée au prix des médicaments figurant dans un groupe générique.

La rédaction avait fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale (deuxième séance du jeudi 25 octobre 2001) : un amendement d'origine parlementaire visait à restreindre le champ de la DCI aux seuls médicaments inscrits dans un groupe générique. L'amendement avait été repoussé à l'Assemblée nationale en première lecture. Le Sénat adopta un amendement à l'objet identique « afin de respecter le principe de précaution et de favoriser le caractère opérationnel du répertoire des génériques de l'agence [du médicament] » (selon les propos de M. Alain Vasselle, rapporteur). La rédaction resta ensuite inchangée.

Or, des molécules peuvent être prescrites en dénomination commune, mais sans que les médicaments correspondants aient été inscrits au répertoire administratif des génériques. Pourtant, des formes très peu chères de ces molécules existent.

C'est par exemple le cas de l'aspirine et du paracétamol. Selon les données fournies par l'étude MEDICAM de la CNAMTS (qui concerne 70 % de l'ensemble des remboursements de médicaments tous régimes), le paracétamol est en 2001 le quatrième des quinze premiers principes actifs remboursés, ce qui correspond à un montant de remboursement de près de 180 millions d'euros, pour environ 124 000 unités prescrites. Le dossier remis par le gouvernement à l'occasion de la présentation du projet évalue l'économie potentielle liée à l'adoption du présent article « à plusieurs dizaines de millions d'euros ».

Le dispositif proposé

Le dispositif proposé consiste à adopter une rédaction plus générale de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale. A cette fin, l'article dispose que le pharmacien, sur la présentation d'une prescription en DCI, délivre une spécialité dont l'écart entre son prix et la spécialité la moins chère conforme à la prescription, qu'elle soit inscrite au répertoire des groupes génériques ou non, ne peut être supérieur à un montant déterminé de manière conventionnelle ou par un arrêté ministériel.

Cette disposition conduira les pharmaciens à délivrer des formules peu chères de médicaments très courants et prescrits en DCI, jusqu'à présent exclues du dispositif.

Le décret d'application de l'article 19 de la loi de financement de sécurité sociale pour 2002 ayant été enfin promulgué, cette disposition est une mesure de cohérence qui complétera le dispositif législatif, réglementaire et conventionnel nécessaire à la promotion de la prescription en dénomination commune.

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Article 18

(articles L. 183-1, L. 315-1, L. 315-1-1 nouveau, L. 615-13 du code de la sécurité sociale
et article L. 732-5 du code rural)

Dénomination et missions du service médical de l'assurance maladie

Cet article vise à réformer le service du contrôle médical de l'assurance maladie, en modifiant sa dénomination et ses missions.

1. Le contrôle médical dans sa forme actuelle

Le contrôle médical est visé par les articles L. 315-1 à L. 315-3 du code de la sécurité sociale, articles issus de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins.

Organisé et dirigé par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), le service médical est constitué en un service national unique, indépendant des caisses régionales et primaires. Le service médical comporte trois niveaux d'intervention : un échelon national (ENSM), 17 échelons régionaux (ERSM) et 133 échelons locaux (ELSM). L'ENSM participe, notamment, à la refonte des nomenclatures, aux négociations des conventions médicales, aux études destinées à modifier la législation. Des représentants du service du contrôle médical font également partie des comités médicaux régionaux supprimés par l'article 15 du présent projet.

Le médecin conseil national apporte un conseil médical au directeur de la CNAMTS et au conseil d'administration. Il dirige l'ENSM et anime le réseau des échelons régionaux et locaux. Il est assisté de praticiens conseils chargés de mission.

Depuis quelques années, le service du contrôle médical se transforme de plus en plus en instance de conseil, de pédagogie et d'expertise plutôt que de sanction, évolution que vient conforter le présent article.

2. Changement de dénomination

Le I, II et III du présent article visent à modifier la dénomination du service concerné, en supprimant le mot « contrôle ».

Le I tend à transformer dans tout le code de la sécurité sociale l'expression « service du contrôle médical » en « service médical de l'assurance maladie ».

Le II procède à la modification correspondante en ce qui concerne l'échelon régional, en modifiant la rédaction de l'article L. 183-1 du code de la sécurité sociale relatif aux unions régionales de caisses d'assurance maladie.

Le III remplace l'intitulé du chapitre V du titre Ier du livre troisième du même code « Contrôle médical » par « Bon usage des prestations et relations avec les professionnels de santé ».

3. Les missions du service médical

Le IV vise à modifier l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale qui fixe les missions du service médical. Conformément à la rédaction actuelle, le service médical a quatre fonctions : expertise médicale (visée au I de l'article L. 315-1), analyse de l'activité et conseil aux établissements de santé et aux professionnels (visés au III et au IV) et enfin contrôle (II de l'article L. 315-1).

L'expertise médicale est renforcée

La rédaction actuelle dispose que « le contrôle médical porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité ».

La rédaction proposée précise que la mission du service médical de l'assurance maladie est d'« examiner » les éléments mentionnés ci-dessus, en y ajoutant une mission d'analyse de l'activité des prestataires de soins, dès lors que cette analyse poursuit deux buts : « promouvoir les bonnes pratiques » et « lutter contre les prescriptions abusives ».

A titre de rappel, l'article L. 315-3 du code de la sécurité sociale précise que le service du contrôle médical peut saisir les comités médicaux régionaux. Le VII de l'article 15 du présent projet propose de supprimer cet article L. 315-3.

De nouvelles missions sont introduites

Le V prévoit d'ajouter à la suite de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale un article L. 315-1-1 nouveau, qui confie au service médical trois nouvelles missions.

Il s'agit d'abord de confier au service la réalisation d'actions de bon usage des soins auprès des assurés sociaux et des professionnels de santé (en coopération avec les unions régionales de médecins libéraux s'agissant des médecins). Cette action menée en direction des assurés sociaux s'inscrit dans la perspective de l'article 26 de la loi n° 99-1140 de financement de sécurité sociale pour 2000, qui permettait au service du contrôle médical de donner des recommandations à l'assuré. Les actions de bon usage de soins doivent viser la promotion des avis et recommandations scientifiques émis par les instances compétentes, notamment de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES).

Le service participera en outre aux actions menées par les organismes d'assurance maladie afin de porter à la connaissance des professionnels de santé l'évolution de la législation et de la réglementation de la sécurité sociale.

Enfin, le service mettra à disposition des professionnels concernés les documents « de toute nature » leur permettant d'analyser leur activité individuelle et d'améliorer leur exercice. A titre de rappel, les caisses transmettent déjà aux praticiens un relevé individuel d'activité et de prescription (RIAP) tous les trimestres. Il comptabilise l'ensemble des éléments figurant sur les feuilles de soins ayant donné lieu à remboursement par les caisses des différents régimes d'assurance maladie pendant la période étudiée.

L'application des dispositions de l'article L. 315-1-1 fera l'objet d'un décret. Conformément au premier alinéa de l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, le conseil d'administration de la CNAMTS sera saisi pour avis de ce décret.

Des dispositions de coordination sont prévues

Le VI concerne l'article L. 615-13 du code de la sécurité sociale rendant applicables au régime d'assurance maladie des travailleurs non salariés les dispositions relatives aux missions du service médical, en tirant les conséquences de la création de l'article L. 315-1-1.

Le VII réalise une opération similaire s'agissant de l'article L. 732-5 du code rural relatif au régime d'assurance maladie des personnes non salariées des professions agricoles.

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Article 19

(article L. 162-5 du code de la sécurité sociale)

Mesures et procédures applicables aux médecins en cas de pratiques abusives

Cet article modifie l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale afin d'étendre le champ d'application de la convention nationale régissant les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins libéraux à la détermination des « mesures et procédures » applicables aux médecins ayant des pratiques abusives. Les autres professions de santé ne sont pas concernées par le présent article.

Cet article doit être mis en perspective avec l'abrogation des articles relatifs à la maîtrise comptable des dépenses de soins de ville et avec la suppression des comités médicaux régionaux proposée par l'article 15 du présent projet. S'il est nécessaire de mettre fin à des mécanismes ni compris ni acceptés par les professionnels, et donc inapplicables, il est également indispensable de doter le système de moyens de régulation.

Il faut éviter que des contentieux relatifs aux pratiques abusives des médecins ressortissent systématiquement à la compétence des instances ordinales.

Ce serait d'abord disproportionné en raison du risque d'un grave préjudice causé à des praticiens ; cette solution serait également inefficace, compte tenu de la longueur et la complexité des procédures.

L'article L. 162-5, introduit par l'article 24 de l'ordonnance n°96-345 du 24 avril 1996, fixe le régime juridique des conventions nationales conclues entre les organismes d'assurance maladie et les médecins. Le présent article vise à ajouter aux quatorze paragraphes définissant le contenu potentiel de ces conventions un paragraphe nouveau relatif aux pratiques abusives des médecins et aux mesures et procédures correspondantes.

Quels sont les comportements visés ? L'article évoque les « pratiques abusives » contraires « aux objectifs de bonnes pratiques et aux bons usages de soins ».

Selon les informations fournies au rapporteur par le ministère, les termes « bonnes pratiques » et « bons usages des soins », qui sont des références à deux outils conventionnels mis en place par l'article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale n° 99-1140 du 29 décembre 1999 n'excluent pas que les partenaires conventionnels puissent étendre la définition des « pratiques abusives » à des comportements qui ne sont visés par ces accords de bon usage et contrats de bonne pratique. La rédaction proposée est en outre assez large et vise non pas explicitement les dispositifs conventionnels mais les « objectifs » de ces bonnes pratiques et du bon usage des soins.

Les accords de bon usage des soins (dits acBUS) sont visés à l'article L. 162-12-17 du code de la sécurité sociale. Ils sont conclus à l'échelon national par les signataires de la convention nationale et à l'échelon régional par les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM). Ces accords prévoient « des objectifs médicalisés d'évolution des pratiques ainsi que des actions permettant de les atteindre ». Ils peuvent fixer des objectifs quantifiés d'évolution de certaines dépenses, permettant aux médecins conventionnés de récupérer sous certaines conditions une partie des dépenses évitées. Les accords nationaux et régionaux sont approuvés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Le régime des contrats de bonne pratique (article L. 162-12-18 du code de la sécurité sociale) est fixé par les conventions nationales. Il s'agit de contrats individuels conclus entre les organismes d'assurance maladie et les professionnels conventionnés. L'adhésion ouvre droit, en contrepartie du respect des engagements de ce contrat, à un complément forfaitaire de rémunération ou à la majoration de la participation prévue aux articles L. 162-5-11, L. 645-2 et L. 722-4 du code de la sécurité sociale. Le contrat comporte nécessairement des engagements relatifs à l'évaluation de la pratique du professionnel (références opposables et recommandations de bonne pratique), aux modalités de suivi avec le service du contrôle médical et, s'agissant d'un professionnel habilité à prescrire, des pratiques de prescription (en particulier à la prescription en dénomination commune ou à la prescription de médicaments génériques). Le contrat peut en outre comporter d'autres engagements, portant notamment sur le niveau de l'activité du professionnel, sa participation aux programmes d'information destinés aux assurés et mis en place par les caisses d'assurance maladie. Les conventions prévoient les conditions dans lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie peut, lorsque les engagements ne sont pas tenus, mettre fin à l'adhésion du professionnel, après que celui-ci a été en mesure de présenter ses observations.

La détermination des sanctions doit ressortir à la négociation conventionnelle. Le présent article invite les organismes d'assurance maladie et les organisations représentatives de médecins libéraux à s'asseoir autour d'une même table afin de mettre en place ces outils et de les intégrer à la convention nationale.

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Article 20

(article L. 162-17-8 nouveau du code de la sécurité sociale)

Inscription accélérée sur la liste des médicaments remboursables

Cet article vise à créer un article L. 162-17-8 dans le code de la sécurité sociale afin de mettre en place une procédure accélérée d'inscription sur la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux.

Il s'agit de la procédure dite de « dépôt de prix » visant à assurer une place privilégiée à l'innovation et à garantir un accès plus rapide aux produits innovants aux patients dans le cadre de la médecine de ville.

1. Les mécanismes en vigueur mettent les médicaments innovants à la disposition des patients en ville après un délai trop long

La délivrance par l'AFSSAPS d'autorisations temporaires d'utilisation (ATU) permet une mise à disposition rapide des médicaments les plus innovants aux patients hospitalisés, sans le passage devant la commission de la transparence et le comité économique des produits de santé.

En revanche, la procédure actuelle pour le médicament en secteur ambulatoire est caractérisée par la longueur des délais : selon les données fournies par le gouvernement, il s'écoule en moyenne 237 jours (dont uniquement 70 jours d'examen par la commission de la transparence) entre le début de l'examen par la commission de la transparence et la publication au Journal officiel de l'arrêté signé.

Lorsqu'une entreprise exploitant un médicament souhaite qu'une spécialité soit remboursable, elle dépose une demande à l'AFSSAPS. Celle-ci décide, conformément aux dispositions du code de la santé publique, d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). Ensuite, si l'entreprise souhaite que son médicament soit remboursé par l'assurance maladie, elle dépose un dossier à la commission de la transparence. Cette commission donne un avis aux ministres compétents sur le service médical rendu (SMR) par ce médicament et sur son intérêt par rapport à la thérapeutique déjà sur le marché (amélioration du service médical rendu dite ASMR). La commission propose aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, un avis favorable ou non sur :

- l'inscription sur la liste des spécialités agréées pour les collectivités publiques dans le cadre d'un médicament devant être commercialisé à l'hôpital ;

- l'inscription sur la liste des spécialités remboursables aux assurés sociaux avec un taux de remboursement de 35 %, 65 % ou 100 % pour un médicament commercialisé en officine.

L'avis de la commission de la transparence est transmis au comité économique des produits de santé (selon les données fournies par le gouvernement, cette seule transmission durerait 29 jours). Conformément à l'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale, le prix de vente au grand public du médicament mentionné dans la liste L. 162-17 est fixé par convention entre le laboratoire et le comité économique des produits de santé.

2. Le dispositif proposé pose le principe d'une accélération de la procédure

Réduction du délai de mise à disposition du médicament aux patients de ville

La procédure proposée vise à permettre à l'entreprise de demander à bénéficier d'une procédure accélérée d'inscription sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, sans passer par la procédure de fixation du prix via une convention avec le comité économique des produits de santé. Le délai de mise à disposition d'un médicament aux patients de ville pourrait ainsi être réduit de moitié.

La procédure concernera deux sortes de médicaments. Il s'agit des médicaments dont le service médical rendu présente un intérêt particulier pour la santé publique ; ce service médical rendu est apprécié par la commission de la transparence en application du code de la sécurité sociale.

Il s'agit également de médicaments dont le caractère « innovant » présente un intérêt particulier pour la santé publique. Or, la notion de caractère innovant n'a pas de base juridique dans le code de la sécurité sociale ou le code de la santé publique. Dès lors, la question des conditions de l'appréciation de ce caractère innovant se pose : qui apprécie ? selon quels critères ?

Renvoi de l'encadrement du dispositif à des dispositions de nature réglementaire

Le dispositif évoque les « engagements que doit prendre l'entreprise », qui seront fixés par décret. Il ne s'agit pas d'un système de liberté de prix où la rapidité d'inscription sur la liste n'aurait aucune contrepartie. A titre d'exemple, cette contrepartie pourrait prendre la forme d'une remise.

L'exposé des motifs apporte les précisions suivantes :

- une possibilité d'opposition de la part des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale serait aménagée ;

- l'entreprise fixerait un prix provisoire dans un délai de six semaines après l'avis de la commission de la transparence ;

- la fixation du prix par l'entreprise présente un caractère provisoire et elle précède le résultat de la négociation conventionnelle portant sur le prix.

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Article 21

(articles L. 162-17-4 et L. 162-17-9 nouveau du code de la sécurité sociale)

Pénalités financières applicables aux entreprises exploitant des médicaments

Cet article vise à modifier les dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux sanctions applicables aux entreprises dont les médicaments ont fait l'objet d'une interdiction de publicité (I) et aux entreprises n'ayant pas fourni toutes les informations relatives aux médicaments pour lesquelles elles ont demandé leur remboursement par l'assurance maladie (II).

1. La nature des pénalités en cas d'interdiction de publicité : de la baisse de prix à une pénalité financière plafonnée

Conformément à l'article L. 5122-9 du code de la santé publique, l'AFSSAPS prononce une mesure d'interdiction de publicité pour un médicament en cas de méconnaissance des dispositions réglementant la publicité des médicaments.

La rédaction actuelle des huitième et neuvième alinéas de l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale assortit cette sanction de la possibilité (il ne s'agit pas d'une obligation) pour le comité économique des produits de santé de demander à l'entreprise concernée, dans le délai d'un mois après la publication de l'interdiction, soit la modification du prix des médicaments frappés par l'interdiction, soit le versement d'une remise sur le chiffre d'affaires du médicament. Le montant de ces remises n'est pas précisé par la loi. Si l'avenant correspondant n'a pas été signé, le comité peut résilier la convention ; un arrêté interministériel, après avis du comité économique des produits de santé, fixe alors les prix du médicament.

Une des recommandations du rapport 2001 de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de financement de la sécurité sociale était de renforcer les sanctions en cas d'infraction au régime juridique de la publicité relative aux médicaments. Or, cette procédure est complexe et longue. Elle est de plus source d'insécurité juridique. Le rapport du comité économique des produits de santé sur l'année 2001 indique que le comité n'a demandé en 2001 aucune baisse comme suite d'une demande de publicité.

Le rapport évoque un arrêt rendu par le Conseil d'Etat saisi d'un recours contre un arrêté de baisse consécutif à une interdiction de publicité. Selon l'interprétation donnée par le rapport du comité économique des produits de santé, le Conseil d'Etat a précisé que de telles baisses de prix devaient « en outre être justifiées sur le fondement des critères de droit commun posées par le code de la sécurité sociale pour la fixation ou la modification des prix. Il en résulte en particulier que le risque pour la santé publique lié au mésusage entraîné par une publicité interdite ne peut justifier une baisse de prix, sauf à démontrer qu'en outre, cette publicité a causé ou a pu causer un dommage économique mesurable à l'assurance maladie obligatoire ». Dans les cas examinés par le Comité en 2001, il lui a été impossible d'établir ce constat dans les délais très brefs dont il disposait.

Le dispositif proposé vise à substituer à cette procédure de baisse des prix le prononcé d'une pénalité financière par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale après l'avis du comité économique des produits de santé. La pénalité est plafonnée à 10 % du chiffre d'affaires relatif aux spécialités concernées (il ne s'agit pas du chiffre d'affaires total visé au II du présent article).

Son montant est fixé en fonction de la gravité de l'infraction et de l'évolution des ventes de la spécialité concernée.

La pénalité est recouvrée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son montant est réparti entre les régimes d'assurance maladie qui financent le régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés suivant des clés de répartition identiques à celles gouvernant la répartition de la contribution à la charge des établissements de vente en gros de spécialités pharmaceutiques et des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques, contribution visée à l'article L. 138-1 du code de la sécurité sociale.

2. Le régime des sanctions applicables aux laboratoires pharmaceutiques en cas de défaut de transmission d'informations relatives à un médicament n'est pas assez incitatif

L'entreprise souhaitant que son médicament titulaire d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) fasse l'objet d'un remboursement par les régimes d'assurance maladie, dépose un dossier auprès de la commission de la transparence. Au vu des informations fournies, la commission donne un avis aux ministres compétents sur le service médical rendu et l'amélioration du service médical rendu, ceux-ci arrêtant la décision de l'inscription sur la liste des médicaments remboursables.

Le II du présent article vise à sanctionner les entreprises n'ayant pas transmis à la commission de la transparence des informations qu'elle détenait et qui étaient susceptibles de modifier son avis. Le dispositif proposé vise toutes les informations, c'est-à-dire celles détenues par l'entreprise avant et après l'inscription sur la liste des spécialités remboursables.

Une charge supplémentaire pèse sur l'entreprise, qui doit « signaler la portée » de ces informations, ce qui pourrait être interprété, sous certaines conditions, comme une obligation de ne pas se limiter à une simple transmission sans commentaires. L'entreprise devrait, dans ce cas, expliquer la signification des informations et leurs éventuelles conséquences.

La sanction est une pénalité financière, prononcée par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale après l'avis du comité économique des produits de santé et après que l'entreprise a pu présenter ses observations. Le montant de la taxe est plafonné à 5 % du chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France (au titre du dernier exercice clos). La pénalité, recouvrée par l'ACOSS, abonde les ressources des régimes d'assurance maladie. Un décret en Conseil d'Etat règlera les modalités d'application du présent article.

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Article 22

(articles L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles, L. 3411-2 et L. 3311-2 du code de la santé publique et L. 174-9-1 du code de la sécurité sociale)

Transfert à l'assurance maladie du financement des dépenses des centres spécialisés dans la prise en charge des toxicomanes

Cet article a pour objet de transférer de l'Etat à l'assurance maladie le financement des dépenses médico-sociales des centres spécialisés dans la prise en charge des toxicomanes.

1. Le secteur de la prise en charge de l'alcoolisme et de la toxicomanie a déjà donné lieu, par étapes successives, à une prise en charge croissante par l'assurance maladie au lieu et à la place de l'Etat.

Cela a d'abord été le cas pour les centres de cure ambulatoires en alcoologie (CCAA). Le transfert du financement des dépenses médico-sociales de ces centres a été opéré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, étant entendu que à l'exception de ces dépenses, celles d'organisation, de coordination, de prévention et de traitement de l'alcoolisme en général restent à la charge de l'Etat.

Un deuxième transfert du même ordre a été effectué par l'article 88 de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale3. Celui-ci a, en effet, transféré de l'Etat à l'assurance maladie, les dépenses de fonctionnement des appartements de coordination thérapeutiques (ACT) après que l'impulsion de l'Etat ait permis, dans un premier temps, l'implantation de ces structures.

Les appartements de coordination thérapeutique ont vocation à accueillir des personnes atteintes par le VIH ou par d'autres pathologies graves et se trouvant en situation de précarité, afin de leur assurer une prise en charge globale médicale, sociale et médico-sociale. Ces appartements peuvent être constitués en sections des centres de soins spécialisés aux toxicomanes.

2. Les structures de lutte contre l'alcoolisme ou la toxicomanie s'inscrivent dans un cadre institutionnel nouveau, depuis la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, que le présent article doit prendre en compte.

En effet, au 9 ° de l'article L 312-1 du code de l'action sociale et des familles, figure désormais une nouvelle catégorie d'établissements sociaux et médico-sociaux : les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA). Fondés sur l'idée d'une approche transversale en matière de lutte contre les addictions, quelle que soit la substance psychoactive, ils regroupent les activités des anciens CCAA, qui étaient depuis 1998 dans le périmètre du médico-social, et des anciens CSST qui ont acquis ce statut par la loi précitée du 2 janvier 2002.

Ce cadre institutionnel nouveau oblige à certaines modifications de coordination qui sont opérées par le présent article du projet de loi.

3. Le dispositif de l'article 22 du projet de loi poursuit donc les transferts déjà engagés vers l'assurance maladie en y ajoutant les dépenses des centres spécialisés dans la prise en charge des toxicomanes.

· Le I complète l'article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles relatif aux règles de financement des établissements médico-sociaux afin de prévoir que l'ensemble des activités médico-sociales des CSAPA sont pris en charge par l'assurance maladie.

Il s'agit bien d'un transfert des dépenses des anciens CSST puisque toutes les missions de ces centres sont visées : l'assurance maladie financera les activités de prévention de l'alcoolisme (soins ambulatoires et actions d'accompagnement social et de réinsertion) des CSAPA, ce qui était déjà le cas depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 au travers des CCAA, ainsi que, désormais, les activités de prise en charge sanitaire des toxicomanes.

Le transfert de l'Etat vers l'assurance maladie n'exclut pas la poursuite des financements des collectivités locales, ou de nouvelles participations de leur part, selon des dispositions similaires à celles adoptées lors du transfert du financement des ACT.

Il préserve ensuite la règle de gratuité et d'anonymat qui présidaient au fonctionnement des CSST et dont le principe est posé à l'article L. 3414-1 du code de la santé publique.

Le montant total des sommes ainsi transférées est évalué à 107,5 millions d'euros.

·   Le II tire les conséquences du transfert opéré par le paragraphe précédent dans l'article L. 3411-2 relatif aux autorités en charge de la lutte contre la toxicomanie.

Il en résulte que, comme pour la lutte contre l'alcoolisme, l'Etat reste le financeur de principe des dépenses de prévention de la toxicomanie et de la prise en charge des soins y afférents, à l'exception des dépenses médico-sociales des CSAPA.

·   Le III est un paragraphe de coordination rendu nécessaire par la création des CSAPA par la loi du 2 janvier 2002 précitée.

· Le IV prévoit que le financement de ces centres sera effectué au moyen d'une dotation globale de fonctionnement. Sa répartition entre les différents régimes d'assurance maladie s'effectuera selon les règles de droit commun.

· Le V ouvre un délai d'un an aux centres qui avaient passé une convention avec l'Etat pour leur financement pour solliciter l'autorisation désormais requise pour leur fonctionnement en raison de leur statut d'institution médico-sociale.

· Le VI met en place un dispositif transitoire permettant le financement des centres de soins aux toxicomanes en 2003. Pour éviter toute rupture, le financement sera effectué par acomptes mensuels dans l'attente de la fixation de la dotation globale de fonctionnement pour 2003, le passage d'un financement à l'autre s'effectuant à la date de promulgation de la présente loi.

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Article 23

(article L. 132-1 du code de la sécurité sociale)

Transfert à l'assurance maladie du financement des dépenses
d'interruption volontaire de grossesse

Cet article a pour objet de transférer de l'Etat à l'assurance maladie la prise en charge des frais de soins et d'hospitalisation afférents aux interruptions volontaires de grossesse (IVG).

La loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de la grossesse avait distingué pour la prise en charge, les interruptions de grossesse effectuées pour des motifs thérapeutiques, remboursées par l'assurance maladie, des autres interruptions volontaires de grossesse qui n'étaient pas remboursées et pouvaient seulement être prises en charge au titre de l'aide médicale pour les intéressées rencontrant des difficultés financières.

La loi n° 82-1172 du 31 décembre 1982 relative à la couverture des frais afférents à l'interruption volontaire de grossesse non thérapeutique et aux modalités de financement cette mesure, a mis fin à ce régime en permettant le remboursement par la sécurité sociale de toutes les interruptions de grossesse (art. L. 321-1 du code de la sécurité sociale). Toutefois, dans cette étape supplémentaire vers la reconnaissance d'un libre choix en matière d'avortement, il avait été jugé préférable, dans le souci de montrer qu'il ne s'agissait pas d'un acte médical ordinaire, de faire assumer la dépense correspondante par l'État.

Ce souci s'exprime de façon théorique, puisque la mécanique de ce remboursement, effectué a posteriori sur des crédits budgétaires au régime d'assurance maladie maternité, reste étranger à la femme qui recourt à une IVG. Pour des nécessités de clarification des relations entre l'État et l'assurance maladie, le moment semble venu de mettre fin à cette particularité.

Il en résultera pour l'assurance maladie une charge supplémentaire de 24,7 millions d'euros (montant de la dotation budgétaire qui avait été prévue pour 2002 et 2003).

Pour réaliser ce transfert, l'article opère deux modifications à l'article L. 132-1 du code de la sécurité sociale :

- Le II de l'article supprime le 1er alinéa de l'article L. 132-1 qui pose le principe du remboursement par l'État à l'assurance maladie des frais afférents à une IVG. Il subsiste donc seulement au 4 ° de l'article L. 321-1 le principe du remboursement par l'assurance maladie.

- Le I et le III opèrent le même transfert de financement pour le mécanisme applicable aux mineures non émancipées dépourvues d'autorisation parentale, mis en place par la loi n °2001-588 du 4 juillet 2001.

L'article L. 2212-7 du code de la santé publique, dans la rédaction issue de la loi précitée, a posé les conditions dans lesquelles une mineure non émancipée pouvait recourir à une IVG même en l'absence d'accord de ces parents, si elle désire garder le secret ou faute d'avoir pu recueillir cette autorisation. Cet article n'est pas modifié, mais à la prise en charge intégrale par l'État des frais liés à l'intervention prévue par le deuxième alinéa de l'article L. 132-1 est substituée la prise en charge intégrale par l'assurance maladie.

Les mineures relèvent en principe de la couverture sociale de leurs parents. Si la mineure a informé l'un de ceux-ci du recours à une IVG et qu'il a donné son consentement, le régime d'assurance maladie des parents prend en charge les frais relatifs à l'IVG. Aux mineures désirant garder le secret ou pour celles pour lesquelles aucun consentement parental n'a été donné, aucun paiement n'est demandé : ni pour les consultations préalables, les examens complémentaires, la consultation préanesthésique, les frais de soins - que ce soit les analyses de laboratoire ou les frais d'intervention elle-même ou l'anesthésie - ni pour les frais d'hospitalisation.

Le principe d'une prise en charge intégrale des frais est donc maintenu.

Le médecin doit ensuite se faire rembourser selon des modalités prévues par le dernier alinéa de l'article L. 132-1 qui dispose que les conditions leur permettant de réserver l'anonymat des mineures sont fixées par décret. Cette disposition est également maintenue.

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Article 24

(article L. 6312-5 du code de la santé publique et
articles L. 161-34 et L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale)

Financement du forfait de garde pour les
entreprises de transports sanitaires

Cet article permet aux entreprises de transports sanitaires (ambulanciers) d'être rémunérées par un forfait pour les gardes qu'elles doivent effectuées au titre de la continuité et de la permanence des soins.

Le problème du financement des gardes des ambulanciers s'est trouvé grandement accru par la mise en _uvre des trente-cinq heures, qui ont augmenté le coût des astreintes à payer comme temps de travail effectif. Les entreprises de transports sanitaires n'étant pas en mesure d'assumer seules la charge financière de ces astreintes, une expérimentation de financement de ces gardes par l'assurance maladie, dans le cadre du Fonds d'amélioration de la qualité des soins de ville, a été menée dans huit départements en 2002 ; elle s'est révélée satisfaisante, justifiant sa généralisation à l'ensemble du secteur du transport sanitaire.

Le I de cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les conditions dans lesquelles le préfet, qui est l'autorité autorisant l'exercice de la profession de transport sanitaire, organise un tour de garde pour le transport sanitaire dans son département. Le préfet est tenu de consulter préalablement le comité départemental de l'aide médicale urgente et des transports sanitaires, lequel veille notamment à la qualité de la distribution de l'aide médicale urgente et à son ajustement aux besoins de la population. Il s'agit d'une simple consolidation de la situation existante puisque le préfet est déjà légalement habilité à instituer un tour de garde des entreprises privées de transports sanitaires agréées, en délimitant notamment des secteurs de tour de garde à l'intérieur du département.

Le II renvoie à la convention nationale conclue entre les organisations syndicales représentatives des entreprises de transports sanitaires et l'assurance maladie le soin de déterminer les conditions de rémunération des gardes ainsi effectuées. Le tour de garde constitue une obligation de service public qui peut être forfaitairement rémunérée, indépendamment des actes effectués directement pour un patient. Le montant du forfait sera librement négocié entre les partenaires conventionnels.

Enfin, le III est une disposition annexe qui permet aux entreprises de transports sanitaires, comme le peuvent déjà les autres professions de santé, de transmettre par voie électronique les feuilles de soins, dans le cadre du dispositif Sésam-Vitale. Il s'agit d'une mesure favorable aux assurés, car elle accélèrera les délais de remboursement des frais de transports sanitaires. Elle devrait également entraîner des économies de gestion pour les caisses d'assurance maladie.

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Article 25

(article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles et article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001)

Prolongation du délai pour la signature des conventions tripartites par les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes

Cet article reporte du 31 décembre 2003 au 31 décembre 2006 la date limite pour la signature des conventions pluriannuelles tripartites entre les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD), les départements et l'Etat, signature qui conditionne le droit pour ces établissements d'accueillir ces personnes. Dans le cadre de ces conventions, les EHPAD sont tenus de respecter un cahier des charges où sont énumérées un certain nombre de recommandations de bonnes pratiques et qui les invite à s'engager dans une « démarche qualité » vis-à-vis des personnes âgées dépendantes.

La loi du 24 janvier 1997 instaurant la prestation spécifique dépendance (PSD) a posé le principe d'une réforme de la tarification des EHPAD qui, pour continuer à héberger des personnes âgées dépendantes, devaient signer avant le 31 décembre 1998, une convention pluriannuelle tripartite avec le président du conseil général le représentant de l'Etat dans le département. Cette date limite a été repoussée par l'article 139 de la loi n° 98-567 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions : celui-ci prévoyait que les conventions devaient être conclues au plus tard deux ans après la date de publication des décrets de réforme de la tarification.

Ces décrets ont été publiés le 27 avril 1999. La date limite devait donc être fixée au 27 avril 2001. Mais l'article 52 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a reporté cette date au 31 décembre 2003 tout en prévoyant un plan pluriannuel de financement de la réforme de la tarification, permettant d'augmenter la prise en charge par l'assurance maladie au titre de l'enveloppe médico-sociale de l'ONDAM dans le cadre des conventions. L'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) a mis en place parallèlement un mécanisme de financement provisoire pour les EHPAD n'ayant pas signé de convention, afin de leur permettre de continuer de fonctionner, tout en les incitant financièrement à signer des conventions car les montants alloués dans ce cadre sont moins importants que ceux alloués aux établissements signataires.

Or la date limite approche, à la fin de cette année, alors que seules 950 conventions tripartites ont été signées au 31 août 2002, sur les 8 000 attendues. Non seulement les services de l'Etat ont quelques difficultés pour négocier toutes les conventions, mais les établissements eux-mêmes n'ont pas été en mesure de s'engager activement dans le processus. Ils ont en effet eu à faire face à la fois à la mise en _uvre de la réforme de la tarification, à l'application des trente-cinq heures et à la montée en charge rapide de l'APA.

Le principe de réalité impose de reporter cette date, non d'une seule année, mais de trois, afin de garantir la qualité des conventions signées. La médicalisation des EHPAD doit se réaliser dans les meilleurs conditions de qualité pour les personnes hébergées, ce que ne permet pas un rythme de signature supérieur à 2 000 conventions par an.

C'est pourquoi le I de cet article repousse de trois ans la date de signature obligatoire des conventions et, par coordination, le II prolonge d'autant la durée d'application du mécanisme provisoire de financement.

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Article 26

(article L. 314-8 du code de l'action sociale et des familles)

Réintégration des médicaments remboursables dans les tarifs de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur

Cet article revient à supprimer l'article 96 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui a sorti les médicaments remboursables du forfait de soins des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées et ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur. Il consiste donc à réintégrer ces médicaments et autres dispositifs médicaux dans les tarifs des établissements et à ne plus les faire prendre en charge directement par l'assurance maladie.

Cet article 96 résulte de l'adoption par le Sénat, le 6 février 2002, de deux amendements identiques de MM. Dominique Leclerc et Serge Franchis. Il s'agissait d'éviter de pénaliser les personnes âgées en établissement par rapport aux personnes âgées à domicile, dont l'ensemble des soins sont pris en charge par l'assurance maladie alors que la logique de régulation budgétaire appliquée aux établissements risquait de limiter la prise en charge des soins.

Ces amendements permettaient également de ne pas remettre en cause la possibilité pour les personnes âgées hébergées en établissement de s'approvisionner directement auprès des pharmacies rurales, afin de ne pas pénaliser financièrement ces officines jouant un rôle essentiel en matière d'aménagement du territoire.

Le gouvernement propose de revenir sur cette disposition qu'il estime inopportune. En effet, non seulement elle remet en cause la politique de coordination des soins que peuvent et doivent mener les établissements, mais aussi elle introduit une inégalité entre les personnes âgées hébergées en établissement, selon qu'un établissement dispose d'une pharmacie intérieure - auquel cas le forfait de soins s'applique de toute façon - ou pas.

Cette suppression s'inscrit dans le cadre de la politique du médicament du gouvernement, consistant à rationaliser la distribution des spécialités pharmaceutiques remboursables. Les établissements peuvent, grâce au médecin coordonnateur, effectuer une coordination des soins, qui doit permettre d'éviter les prescriptions parfois inutiles.

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Article 27

(articles L. 162-17-6 nouveau et L. 162-16 du code de la sécurité sociale)

Tarif forfaitaire de remboursement pour les médicaments

S'agissant des conditions du remboursement des dépenses de médicament par les régimes d'assurance maladie, cet article propose de modifier le code de la sécurité sociale pour créer un remboursement sur la base d'un tarif forfaitaire.

Le marché du médicament est administré : le médicament fait l'objet d'une décision de remboursement, assortie de la fixation du taux de remboursement ; son prix est ensuite fixé par convention. Le présent article propose de fixer, sous certaines conditions, un tarif unique de remboursement, quel que soit le prix du médicament délivré conforme à la prescription.

Cet article, qui est un élément central de la politique du gouvernement en matière de médicament, repose en partie sur la responsabilisation des assurés. La politique de développement de la délivrance de médicaments génériques a d'abord impliqué le pharmacien puis, plus récemment, le prescripteur : ayant débuté avec l'attribution d'un droit de substitution aux pharmaciens, elle s'est poursuivie par la réglementation de la prescription en dénomination commune, qui a l'avantage de laisser au médecin sa liberté de prescripteur.

Le dispositif proposé par le présent article franchit un nouveau pas en faisant appel à la responsabilisation des assurés sociaux.

1. Le remboursement sur la base d'un tarif de responsabilité

Le dispositif proposé

Le I du présent article propose de modifier l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale, qui fixe les conditions des dépenses de remboursement de médicaments par l'assurance maladie.

Dans la rédaction projetée, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, après avis du comité économique des produits de santé (organisme public placé auprès des ministres, notamment chargé de négocier le prix des médicaments avec les laboratoires), ont la faculté d'arrêter un tarif forfaitaire de responsabilité sur la base duquel est calculé le remboursement des frais exposés par les assurés.

Ce tarif concerne soit les médicaments inscrits dans un groupe générique, soit les médicaments appartenant à un groupe d'équivalence (concept créé par le II du présent article).

Comme l'indique la rédaction (« peut »), il s'agit d'une faculté : les ministres se réservent la possibilité de choisir les médicaments concernés, dès lors qu'ils répondent aux conditions posées. Celles-ci, dans l'état actuel du texte, se résument à l'inscription dans un groupe générique ou d'équivalence.

Selon les informations fournies au rapporteur, il semblerait que cette faculté serait particulièrement appliquée lorsque les médicaments sont inscrits dans un groupe où le médicament princeps est très prescrit, lorsque l'écart de prix entre le médicament princeps et les versions génériques est particulièrement élevé, et lorsque le droit de substitution n'est pas suffisamment exercé par le pharmacien.

Lorsque le forfait est appliqué, si le patient souhaite qu'on lui délivre un médicament dont le prix est supérieur au tarif forfaitaire, il lui revient de prendre en charge la différence de prix.

Le succès de la mesure repose en partie sur l'information conjointe et détaillée des trois acteurs concernés : le prescripteur, le pharmacien et le patient.

S'agissant de l'attitude prévisible des organismes d'assurance complémentaire santé, il est intéressant de noter que la Mutualité française a décidé, en comité exécutif, d'engager ses groupements adhérents à ne pas prendre en charge les dépassements du forfait de remboursement pour les médicaments appartenant à un groupe générique (communiqué de presse du 11 octobre 2002).

Les avantages escomptés

Le but de cette disposition est de permettre de baisser - ou d'enrayer la hausse - de certaines dépenses de remboursement de médicaments prises en charge par les régimes d'assurance maladie grâce au développement accru de la consommation de médicaments génériques ou grâce à la diminution du prix des médicaments induite par la mise en place du forfait.

Selon les données fournies au rapporteur, si dans chaque groupe générique, le prix des princeps était aligné sur le générique le moins cher (il s'agit donc d'une évaluation a maxima), les dépenses annuelles de remboursement, sur la base des chiffres du marché actuel, seraient réduites d'environ 500 millions d'euros.

Ce dispositif est appliqué en Allemagne depuis 1989 sous le nom de Festbetrag. Il a accompagné l'essor de la consommation de médicaments génériques.

Un point qui reste à clarifier a un impact sur le montant des économies espérées : le mode de calcul du forfait. S'agira-t-il du médicament générique ou du médicament inscrit dans le même groupe d'équivalence dont le prix est le moins cher ? Ou de la moyenne des prix des génériques ? de la moyenne pondéré par les volumes de ventes ? d'une autre formule ?

Dans tous les cas, une observation fine du secteur et une mise à jour des prix des forfaits est indispensable afin d'éviter les stratégies de contournement.

Les mesures d'accompagnement

L'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale plafonne le montant mensuel des remises, ristournes et avantages consentis par les fournisseurs de médicaments aux officines. Ce taux est égal à 2,5 % du prix du médicament et à 10,74 % du prix fabricant hors taxe pour les médicaments génériques. Ce plafond différencié, issu de l'article 29 de la loi de financement de sécurité sociale pour 1999, vise à promouvoir la délivrance de médicaments génériques en pharmacies d'officine. Le troisième alinéa du I du présent article précise que lorsque le tarif forfaitaire s'applique aux médicaments inscrits dans un groupe générique, ce plafond est fixé à 2,5 % du prix des médicaments. Il s'agit d'une mesure qui vise à réduire un avantage relatif pour les médicaments génériques dès que le mécanisme du tarif de responsabilité, qui leur est particulièrement favorable, s'applique.

Le I précise en outre que le mécanisme visé par le deuxième alinéa de l'article L. 162-16 (dans sa rédaction actuelle) ne s'applique pas aux médicaments remboursés sur une base forfaitaire. Il s'agit de neutraliser les dispositions qui, s'agissant de la délivrance par le pharmacien d'une spécialité sur la base d'une prescription en dénomination commune, réglementent l'écart de prix entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère du même groupe générique (dispositif appelé « arrêté corridor »). Lorsque le mécanisme du forfait s'applique, cette procédure n'a plus lieu d'être applicable, le médicament étant remboursé sur la base du tarif de responsabilité.

2. La création des « groupes d'équivalence »

Le II vise à insérer dans le code de la sécurité sociale un article L. 162-17-6 nouveau. L'article détermine les conditions de la composition des groupes d'équivalence. Ces groupes sont constitués de médicaments remplissant les conditions suivantes :

- ils sont inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale qui vise les médicaments et spécialités remboursables ;

- ils appartiennent à une « même classe pharmacologique », notion utilisée en pharmacologie mais qui ne correspond pas à un concept juridique défini.

- ils ont la même visée thérapeutique, notion au demeurant imprécise ;

- ils rendent un service médical rendu (SMR) de même niveau, service apprécié par la commission de la transparence.

Les groupes d'équivalence sont arrêtés par les ministres de la santé et de la sécurité sociale après l'avis de la commission de la transparence.

La création ex nihilo d'une nouvelle catégorie juridique peut comporter, lorsque certaines conditions relatives à la sélection des groupes ne sont pas remplies, des risques importants pour la santé des assurés. En effet, elle pourrait conduire à ce que deux médicaments soient rendus substituables, alors même que les spécialités concernées pourraient produire des effets thérapeutiques et surtout des effets secondaires différents sur des patients différents.

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Article 28

(article 4 de la loi n°88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale)

Fin du mécanisme de cessation anticipée d'activité

Cet article vise à modifier l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 afin de mettre progressivement fin au dispositif de cessation anticipée d'activité, dit « MICA », destiné aux médecins libéraux conventionnés.

1. Ce mécanisme favorable aux médecins libéraux souhaitant cesser leur activité doit être adapté aux évolutions démographiques actuelles

Descriptif du mécanisme

L'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 a créé une allocation de remplacement de revenus en faveur des médecins libéraux conventionnés choisissant de cesser leur activité avant l'âge de 65 ans. L'objectif de cette « préretraite pour médecins » était de réduire l'offre de soins ambulatoires et de contribuer à maîtriser les dépenses d'assurance maladie. Cette allocation est financée par des cotisations des praticiens conventionnés et par les caisses d'assurance maladie. Elle est gérée par la caisse autonome de retraite des médecins français (CARMF).

L'article 5 de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins a rendu plus favorables les conditions ouvrant droit à l'allocation : abaissement de l'âge d'accès, relèvement important du montant du plafond de l'allocation de remplacement pour les adhérents et assouplissement des conditions de cumul.

L'article 24 de la loi n° 98-1194 de financement de la sécurité sociale pour 1999 proroge le dispositif jusqu'au 31 décembre 2004, mais à des conditions moins attractives. Le mécanisme ouvre à la négociation conventionnelle la possibilité de fixer certaines modalités du dispositif, notamment la modulation de ses conditions d'attribution en fonction de la situation de la démographie médicale appréciée régionalement. Le montant du plafond annuel de l'allocation a été réduit par le décret du 24 juillet 2000.

La nouvelle problématique de la démographie médicale française conduit à revoir l'opportunité d'un tel dispositif

La situation de la démographie des médecins devient progressivement très différente de celle qui avait motivé la création du dispositif en 1996. Cette démographie constitue une des préoccupations prioritaires des gouvernements successifs. Le nombre des médecins, qui a connu un sommet, devrait commencer à baisser.

De nombreux rapports ont déjà attiré l'attention sur les évolutions en cours et pointé la réduction prévisible des effectifs des professionnels de santé, réduction qui se profile déjà à l'horizon de 2005 pour les médecins spécialistes. Un rapport de la Direction générale de la santé de 2001 recommandait d'agir rapidement en la matière. Dans ces conditions, maintenir un dispositif d'incitation à la cessation d'activité serait non seulement coûteux mais incohérent avec la politique du gouvernement, qui a récemment décidé d'augmenter le numerus clausus (+ 8,5 % en 2003).

La suppression du MICA doit être mis en parallèle avec les dispositions de l'article 30 du présent projet, qui incite les médecins et les infirmières en retraite à la reprise d'une activité à temps partiel : il s'agit de lutter contre une baisse trop brutale du nombre de médecins.

Le rapport 1999 de la Cour des comptes sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale soulignait les inconvénients de la procédure : « Devenu plus coûteux, le régime a connu des difficultés. Son bilan tant numérique que financier s'avère au total médiocre ». Pour atteindre l'effectif jugé optimal, le mécanisme aurait dû attirer cinq fois plus de bénéficiaires. L'aide étant indifférenciée, alors que la densité d'implantation des médecins varie fortement, des départs se sont produits dans des zones où ils n'étaient pas souhaitables.

Le MICA a bénéficié à environ 9 000 médecins en 14 ans, dont 264 en 2001 (775 en 2000 et 868 en 1999).

2. Le dispositif proposé ferme le système tout en préservant les droits des médecins ayant déjà opté pour ce mécanisme

Le I modifie la date avant laquelle les médecins doivent cesser définitivement toute activité médicale non salariée, l'avançant du 31 décembre 2004 au 1er avril 2003. A partir de cette date, aucune nouvelle entrée ne pourra plus intervenir. Les médecins qui perçoivent actuellement l'allocation la percevront jusqu'à leur retraite.

Le II abroge le cinquième alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, qui concerne les possibilités de modulation de l'allocation en fonction de critères géographique ou professionnels, possibilité qui n'avait été guère utilisée.

Le III complète le II de l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, paragraphe relatif au financement de l'allocation. Il précise que le solde annuel des cotisations encaissées et des prestations versées est affecté au financement des prestations complémentaires de vieillesse servies aux médecins ayant exercé en libéral.

Le IV supprime le III de l'article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988, qui dispose que les modalités d'application de l'article sont fixées par la voie conventionnelle, ou à défaut, par décret. La rédaction proposée vise à fixer par décret le montant de l'allocation, le montant de la cotisation ainsi que sa répartition et les cas d'exonérations.

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Article 29

(articles L. 161-22 et L. 643-2 du code de la sécurité sociale)

Incitation à la poursuite et à la reprise d'activité
pour les médecins et les infirmières

Le présent article vise à inciter les médecins et les infirmières à poursuivre ou à reprendre leur activité.

En raison des évolutions démographiques prévisibles, particulièrement dans les zones à faible densité, il est indispensable d'utiliser tous les mécanismes possibles autorisant les médecins et les infirmiers à la retraite, quel que soit leur statut antérieur, libéral ou salarié, à être encore professionnellement actifs.

1. Le cas des médecins et des infirmiers employés par des établissements de santé

Comme le confirme une récente réponse ministérielle à une question écrite de M. Henri Nayrou, député, (n °56617, publiée le 15 janvier 2001, réponse du 23 avril 2001), « un principe général de la sécurité sociale proscrit qu'un salarié retraité puisse reprendre une activité auprès de l'employeur qui l'a placé en retraite, sauf à être employé par une structure intermédiaire ». Cette condition rend l'emploi d'un médecin ou d'une infirmière ayant liquidé ses droits à la retraite particulièrement onéreux pour l'établissement de santé, puisqu'il doit passer par une structure intermédiaire.

Le I de l'article propose donc de modifier l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale, qui concerne les ressortissants au régime général ou à un régime spécial. L'article L. 161-22, après avoir précisé que le service d'une pension de vieillesse « est subordonné à la rupture définitive de tout lien professionnel avec l'employeur ou, pour les assurés exerçant une activité non salariée, à la cessation définitive de cette activité », dresse une liste de dérogations à ce principe.

Le présent article propose une dérogation supplémentaire : les « activités correspondants à des vacations accomplies dans des établissements de santé par des médecins ou infirmiers en retraite ». Un décret fixera les conditions d'application. L'article vise les activités exercées par des personnels médicaux ou infirmiers qui présentent les deux caractéristiques suivantes :  il s'agit de vacations (activités exercées à temps partiel) et ces vacations doivent avoir lieu dans des établissements de santé (il ne s'agit pas d'activités exercées à titre libéral).

Le I permettra donc à des infirmiers ou médecins d'effectuer des vacations dans l'établissement de santé où ils étaient auparavant actifs, tout en cumulant ces revenus avec la perception d'une pension de vieillesse.

2. Le cas des médecins et infirmiers exerçant à titre libéral

Le II du présent article concerne les professionnels exerçant en libéral. Il vise à modifier le dernier alinéa de l'article L. 643-2 du code de la sécurité sociale relatif à l'ouverture des droits et à la liquidation des allocations de vieillesse des professions libérales. La rédaction actuelle du dernier alinéa dispose que des décrets peuvent subordonner l'attribution de l'allocation à la cessation de l'activité pour des activités professionnelles déterminées et sur la demande des organisations professionnelles. Le présent article propose de réglementer le cumul des revenus tirés de l'activité libérale et ceux correspondants à l'allocation de vieillesse.

Le premier alinéa pose une condition générale de cessation de l'activité libérale pour l'attribution de l'allocation de vieillesse.

Le deuxième alinéa propose que des décrets pris après avis de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales fixent les conditions dans lesquelles le cumul de l'allocation avec les revenus tirés de l'activité libérale est autorisé. Cette mesure est encadrée de la manière suivante :

- il s'agit d'activités professionnelles déterminées ;

- le décret est pris « pour des raisons d'intérêt général » ;

- le cumul n'est autorisé que dans la limite d'un plafond, dont le franchissement entraîne une réduction à due concurrence de l'allocation de vieillesse ;

- enfin, l'activité libérale doit présenter un caractère accessoire à partir de la date à laquelle l'allocation de vieillesse est liquidée.

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Article 30

Dotation de financement de
l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux

Cet article fixe à 70 millions d'euros le montant de la dotation de financement affectée en 2002 et en 2003 à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

Cet office a été créé par l'article 98 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui a instauré un nouveau droit à indemnisation des accidents médicaux non fautifs. En effet, les accidents médicaux sans faute (« aléas thérapeutiques ») peuvent être indemnisés au titre de la solidarité nationale dès lors qu'ils ont entraîné des dommages d'une certaine gravité, appréciée compte tenu notamment des conséquences sur la vie privée et professionnelle et du taux d'incapacité.

Des commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux ont été créées afin de statuer, en formation de règlement amiable, sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages résultant d'accidents médicaux graves, ainsi que sur l'existence d'une faute ou d'un aléa. Si la commission régionale estime qu'il s'agit d'un aléa thérapeutique, l'ONIAM doit faire une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis par la victime. Après acceptation de l'offre, l'office verse à la victime ou à ses ayants droit les indemnités correspondantes, lesquelles peuvent prendre la forme d'une rente.

Les ressources de l'ONIAM étant constituées par une dotation globale de financement, versée par les régimes d'assurance maladie dans les mêmes conditions que la dotation hospitalière, il revient à la loi de financement de la sécurité sociale de fixer chaque année le montant de cette dotation.

Pour 2002, par anticipation sur le vote de la loi du 4 mars 2002, la loi de financement de la sécurité sociale n'avait provisionné que 40 millions d'euros pour l'ONIAM. La dotation de financement est portée à 70 millions d'euros. Le montant de cette dotation est reconduit à l'identique pour l'année 2003. Ces sommes figurent dans les objectifs de dépenses de la branche maladie fixés par les articles 36 et 46 du présent projet de loi, mais elles ne sont pas intégrées dans le calcul de l'ONDAM.

Il serait cependant souhaitable que le Parlement puisse disposer, au moment où il doit voter cette dotation de financement, d'un rapport retraçant l'activité de l'office et formulant toutes observations relatives à son fonctionnement.

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Article 31

(article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999)

Missions et dotation de financement du
Fonds d'aide à la qualité des soins de ville

Cet article élargit les missions du Fonds d'aide à la qualité des soins de ville et détermine son mode de financement pour l'année 2003.

Ce fonds a été créé au 1er janvier 1999 par l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, afin d'apporter un soutien financier aux mutations de l'exercice de la médecine ambulatoire d'ici 2007, date à laquelle ce fonds doit cesser d'exister. Pour cela, il distribue des aides destinées à l'amélioration de la qualité et de la coordination des soins de ville ; ces aides sont attribuées à des professionnels de santé, médecins et auxiliaires médicaux, individuellement ou collectivement, et aux centres de santé. Ces aides peuvent également soutenir le développement de nouveaux modes d'exercice et de réseaux de soins.

L'article 39 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a élargi les missions du fonds au financement des aides aux professionnels de santé, autres que des médecins, en vue de faciliter leur installation dans des zones rurales ou urbaines où est constaté un déficit en matière d'offre de soins. Le rapporteur regrette cependant que les textes réglementaires d'application de cette disposition n'aient pas encore été pris.

Le I de cet article propose une nouvelle extension des missions du fonds. Il devrait également à l'avenir pouvoir participer au financement des actions d'évaluation des pratiques professionnelles des médecins libéraux organisées par les unions régionales des médecins exerçant à titre libéral (URML). Cette mission supplémentaire s'inscrit dans le cadre du développement de l'évaluation du système de santé que souhaite promouvoir le gouvernement. Il s'agit d'inciter les médecins eux-mêmes à promouvoir une « démarche qualité », au bénéfice des patients, qui s'inscrit dans le cadre de la maîtrise médicalisée.

Les ressources du fonds étant constituées par une contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie, il incombe à la loi de financement de la sécurité sociale de fixer chaque année ce montant. Pour l'année 2003, le II propose de fixer ce montant à 20 millions d'euros, contre 76,23 millions d'euros en 2002. Cette somme figure dans l'objectif de dépenses de la branche maladie déterminé par l'article 33 du présent projet de loi, mais elle n'est pas intégrée dans le calcul de l'ONDAM. Elle sera répartie entre les différents régimes concernés selon les mêmes règles que pour la répartition entre ces régimes de la prise en charge des cotisations sociales des médecins et auxiliaires médicaux conventionnés. Cette répartition devra donc faire l'objet d'un arrêté interministériel.

Par ailleurs, la loi de financement doit également déterminer le montant maximal des dépenses autorisées du fonds pour l'année à venir car les crédits non consommés au titre d'une année restent acquis au fonds et peuvent donc être reportés sur les exercices suivants. En raison de l'existence de réserves importantes, il y a donc une différence significative entre les dépenses susceptibles d'être engagées au titre d'une année et les moyens financiers nouveaux attribués au fonds pour cette année.

Pour 2003, il est proposé que le fonds puisse dépenser 106 millions d'euros, soit autant qu'en 2002. Le rapporteur n'est cependant pas en mesure de rendre compte de l'utilisation des crédits du fonds en 2002, car le gouvernement n'a pas répondu à la question qu'il avait posée à ce sujet en application de l'article L. 111-8 du code de la sécurité sociale. Il se pose en effet un problème d'utilisation effective de ce fonds car, en 2001, pour 107 millions d'euros de dépenses autorisées, seuls 31 millions d'euros ont été engagés.

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Article 32

Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2003

En application du 4° du I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe à 123,5 milliards d'euros l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale pour 2003.

L'ONDAM, dont la définition est conventionnelle, correspond à l'ensemble des dépenses de soins liées aux risques maladie, maternité et accidents du travail, ainsi qu'aux prestations en espèces de la branche maladie et aux dépenses liées à l'incapacité temporaire pour la branche accidents du travail. Il est obtenu à partir des objectifs de dépenses des branche maladie et accidents du travail fixés respectivement par les articles 33 et 39 du présent projet de loi de financement, en en déduisant les frais de gestion administrative, les frais financiers, les dépenses d'action sanitaire et sociale et celles retracées dans les fonds de prévention des régimes obligatoires de base, ainsi que les transferts internes entre celles-ci. En sont également soustraites les rentes d'accidents du travail et les indemnités journalières de maternité.

L'ONDAM ne revêt pas par lui-même un caractère impératif, mais les décisions qui succèdent à son adoption fixent des financements limitatifs ou comportent des mécanismes de régulation a posteriori. Il convient toutefois de rappeler que l'ONDAM ne constitue pas un plafond de dépenses pour les assurés, dont les droits à remboursement restent ouverts et dont les prestations seront servies sans restriction quantitative.

L'ONDAM pour 2003 augmente de 5,3 % à champ constant par rapport à l'ONDAM révisé pour 2002, fixé par l'article 34 du présent projet. Le rebasage de l'ONDAM consiste à calculer son taux de croissance par rapport à cet ONDAM révisé, qui est une prévision d'exécution pour 2002 établie par la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre dernier, et non par rapport au montant de l'objectif initial voté pour 2002.

Ce taux affiché de croissance de l'ONDAM à champ constant intègre 580 millions d'euros de dépenses transférées sur l'ONDAM à partir de 2003, au titre du financement :

- des crédits de remplacement des personnels hospitaliers, que l'Etat ne s'était engagé à prendre en charge sur son budget, dans le cadre des protocoles hospitaliers des 13 et 14 mars 2000, que pendant trois ans ;

- des centres de soins spécialisés aux toxicomanes, que l'article 22 du présent projet transfère du budget de l'Etat à l'assurance maladie ;

- de 180 millions d'euros de mesures salariales pour les cliniques privées, en raison de la fusion du Fonds pour la modernisation des cliniques privées dans le Fonds pour la modernisation des établissements de santé réalisée par l'article 13 du présent projet.

Le taux réel de croissance de l'ONDAM en 2003 est donc de 5,8 %. Par ailleurs, il s'agit d'un objectif net, car en sont retranchés, tant en 2002 qu'en 2003, 300 millions d'euros au titre des remises conventionnelles et de la clause de sauvegarde, versés par l'industrie pharmaceutiques en raison de la trop forte progression de son chiffre d'affaires par rapport à l'enveloppe médicaments de l'ONDAM.

L'ONDAM voté par le Parlement est décomposé librement par le gouvernement, dans les quinze jours suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, en quatre enveloppes de dépenses, correspondant chacune à une catégorie de producteurs de soins. M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, devrait annoncer à l'Assemblée nationale, lors de l'examen en séance publique du présent projet, la répartition de l'ONDAM pour 2003 entre les soins de ville, les hôpitaux publics, les cliniques privées et les établissements médico-sociaux.

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Article 33

Fixation de l'objectif de dépenses de la branche maladie pour 2003

En application du 3° du I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe à 136,31 milliards d'euros en 2003 l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale comptant plus de 20 000 cotisants, actifs ou retraités titulaires de droits propres. Il ne s'agit pas d'une autorisation de dépenser au sens budgétaire du terme - la notion de crédits évaluatifs peut au mieux rendre compte de prestations qui doivent de toute façon être versées en application de la loi et en contrepartie, même indirecte, de cotisations - mais d'une estimation chiffrée qui permet d'informer le Parlement et de piloter le système de santé.

Les dépenses retracées par le présent article comprennent les prestations sociales légales et extra-légales obligatoires, les prestations de services sociaux visant à abaisser le coût d'accès au système de soins, les frais de gestion administrative des régimes, les transferts entre régimes et les frais financiers. Au sein de la branche maladie sont intégrées les dépenses maternité, invalidité et assurance décès. Les dépenses liées au service d'une pension d'invalidité ne sont retracées dans cet agrégat que lorsque les intéressés ont moins de soixante ans, alors que certains régimes spéciaux d'assurance maladie peuvent servir de telles pensions au-delà de cet âge, jusqu'au décès des intéressés, auquel cas les dépenses correspondantes figurent dans l'agrégat de la branche vieillesse.

Par rapport aux comptes élaborés par la Commission des comptes de la sécurité sociale, les chiffres de cet article excluent les dépenses des régimes de moins de 20 000 cotisants. En revanche, les dépenses effectuées dans les départements d'outre-mer (DOM) y sont intégrées. Dans le cadre de la comptabilité en droits constatés, les transferts internes sont retranchés des dépenses de la branche qui les verse.

Si l'on compare les objectifs de dépenses par rapport aux prévisions d'exécution de l'année en cours, la croissance globale des dépenses (+ 5,5 %) marque une augmentation relativement forte, en raison principalement du taux de progression de l'ONDAM dont les dépenses sont incluses pour l'essentiel dans l'objectif de dépenses de la branche maladie. Cette croissance est supérieure à la croissance prévisionnelle du PIB, estimée à 3,9 % en valeur par le gouvernement pour la préparation du projet de loi de finances et du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L'impact des mesures nouvelles du présent projet sur l'agrégat de dépenses de la branche maladie pour 2003, après opérations de consolidation, est rappelé dans le tableau suivant.

Impact du PLFSS pour 2003 sur l'agrégat de dépenses de la branche maladie

(en millions d'euros)

Régime général

Autres régimes de base

Total des

dépenses

Dotation Fonds pour la modernisation des établissements de santé

(art. 13 plfss)

387

63

450

Dotation Office accidents médicaux

(art. 30 plfss)

70

0

70

Dotation Fonds qualité soins de ville

(art. 31 plfss)

17

3

20

Total

474

66

540

Le tableau ci-après présente, à partir de l'annexe c du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, une répartition plus détaillée des différentes catégories de dépenses pour l'ensemble des régimes de base de plus de 20 000 cotisants.

Régimes de base de plus de 20 000 cotisants

dépenses de la branche maladie

(en millions d'euros)

CHARGES

2002

2003

Variation

Prestations légales

Prestations extra-légales

Autres prestations

Dotations nettes aux provisions

Pertes sur créances irrécouvrables

Transferts entre organismes de sécurité sociale

Charges techniques

Charges financières

Charges de gestion courante

119 942

400

718

140

24

825

570

369

6 246

126 485

415

751

140

24

822

917

426

6 329

5,46 %

3,75 %

4,6 %

0 %

0 %

- 0,36 %

60,88 %

15,45 %

1,38 %

TOTAL DES CHARGES

129 236

136 309

5,47 %

Article 34

Fixation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie révisé pour 2002

En application du 4° du I et du II de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe à titre rectificatif l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale à 116,7 milliards d'euros pour 2002. Cela correspond à un dépassement de 3,91 milliards d'euros par rapport à la loi de financement de la sécurité sociale initiale pour 2002.

Cet article permet de faire apparaître les évolutions constatées depuis le vote de la dernière loi de financement en matière de dépenses d'assurance maladie. De plus, il permet au Parlement de valider les mesures nouvelles intervenues en cours d'année, sans que le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative n'ait encore pu les prendre en compte.

Le tableau ci-dessous compare les chiffres votés en loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, tels qu'issus de la décomposition de l'ONDAM décidée par le précédent gouvernement, et les montants révisés dont l'adoption est indirectement proposée par le présent article.

ONDAM en 2002
(en milliards d'euros et taux de croissance en %)

LFSS 2002

PLFSS 2003

Soins de ville

51,68

(3,0 %)

54,68
(8,3 %)

Hôpitaux publics

43,17

(4,8 %)

43,87
(5,7 %)

Cliniques privées

7

(3,5 %)

7,02
(5,9 %)

Médico-social

8,29

(4,5 %)

8,29
(8,8 %)

Français à l'étranger

0,15

0,21

DOM

2,47

2,64

Marge résiduelle

0,03

0

ONDAM total

112,79
(3,9 %)

116,7
(7,2 %)

Les principaux écarts entre les prévisions votées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 et les prévisions soumises aujourd'hui au vote du Parlement sont les suivants :

· Enveloppe soins de ville : + 3 milliards d'euros

La progression de la consommation de soins ambulatoires demeure soutenue en 2002. Son effet sur la croissance des dépenses est renforcé par les nombreuses mesures nouvelles de revalorisations tarifaires pour les professionnels de santé intervenues depuis le vote de la loi de financement initiale :

- accord du 24 janvier 2002 avec les médecins généralistes (C à 18,5 €) : 220 millions d'euros ;

- accord du 5 juin 2002 avec les médecins généralistes (C à 20 € et V médicalement justifié à 30 €) : 190 millions d'euros ;

- accord avec les infirmières : 140 millions d'euros ;

- accord avec les masseurs kinésithérapeutes : 50 millions d'euros.

Les économies qui devraient logiquement résulter de ces accords (notamment sur le poste médicaments avec la prescription accrue de génériques et avec une croissance plus limitée des volumes en raison de la revalorisation des actes unitaires) ne sont pas encore observables.

· Enveloppe hôpitaux publics : + 700 millions d'euros

Le dépassement est dû, pour 300 millions d'euros à l'augmentation de la dotation globale hospitalière en juillet dernier compte tenu des difficultés de fonctionnement des établissements, et pour 400 millions d'euros à la mise en place du compte épargne-temps au titre de l'application des trente-cinq heures dans les hôpitaux.

· Enveloppe cliniques privées : + 20 millions d'euros

La croissance des volumes et la mise en _uvre de l'accord de revalorisation tarifaire induisent une progression toujours soutenue des dépenses de + 5,9 %.

· Enveloppe médico-sociale : pas de dépassement

La croissance soutenue des dépenses dans le secteur du handicap est compensée par lenteur de la montée en charge de la réforme de la tarification des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui induit une sous-consommation des crédits octroyés d'au moins 150 millions d'euros. Cette sous-consommation est causée par le peu de signatures de conventions tripartites, justifiant le report de la date limite de signature proposé par l'article 25 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

*

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES AUX AUTRES BRANCHES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Section 1

Branche accidents du travail et maladies professionnelles

Article 35

(article 43 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002)

Dotation de financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante

Cet article fixe à 180 millions d'euros en 2002 et 190 millions d'euros en 2003 le montant de la dotation de financement affectée au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA).

Ce fonds a été créé par l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, afin d'assurer aux personnes ayant été exposé à l'amiante et à leurs ayants droit la réparation intégrale des préjudices qu'ils ont subis. Pour cela, l'indemnisation par le fonds se substitue, pour les préjudices liés à l'amiante, à l'indemnisation de droit commun qui peut être alloué à la victime par une juridiction (tribunal des affaires sanitaires et sociales ou commissions d'indemnisation des victimes d'infractions).

Le conseil d'administration du fonds, nommé en avril 2002, a approuvé une convention de gestion provisoire avec le Fonds de garantie des victimes d'accidents de la circulation et de chasse (FGA), chargé de la gestion technique des demandes d'indemnisation. Il se consacre principalement à l'élaboration du barème d'indemnisation et a adopté, en juin 2002, un barème de provisions qui a permis de verser les premières provisions en juillet dernier.

Les ressources du FIVA étant constituées par une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général, il incombe à la loi de financement de la sécurité sociale de fixer chaque année ce montant. Cette somme figure dans les objectifs de dépenses de la branche accidents du travail fixés par les articles 39 et 46 du présent projet de loi, mais elle n'est pas intégrée dans le calcul de l'ONDAM.

Il est proposé de porter la dotation de la branche accidents du travail de 76,22 millions d'euros à 180 millions d'euros au titre de l'année 2002 et, pour 2003, de la fixer à 190 millions d'euros. Ces dotations de financement, additionnées au report de l'exercice 2001 qui n'a pas encore pu être consommé (438 millions d'euros), permettraient au fonds de satisfaire entre 10 000 et 20 000 demandes d'indemnisation.

Le fonds doit également recevoir une subvention du budget de l'Etat, qui a été de 38,11 millions d'euros en 2002 et sera de 40 millions d'euros pour 2003.

*

Article 36

(article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002)

Dotation de financement du Fonds de cessation anticipée d'activité
des travailleurs de l'amiante

Cet article fixe à 300 millions d'euros en 2002 et 450 millions d'euros en 2003 le montant de la dotation de financement affectée au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA).

Ce fonds a été créé par l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 pour financer une allocation de cessation anticipée d'activité versée aux salariés ou anciens salariés âgés de plus de cinquante ans qui ont cessé toute activité professionnelle et sont :

- soit victimes d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante, y compris les plaques pleurales depuis un arrêté ministériel du 3 décembre 2001 ;

- soit travailleurs dans un des 419 établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage figurant sur une liste établie par arrêté ministériel ;

- soit travailleurs dans un des 821 établissements de la construction et de la réparation navales figurant sur une liste établie par arrêté ministériel ;

- soit ouvriers dockers professionnels et personnels de manutention portuaire ayant travaillés dans l'un des 9 ports inscrits sur une liste établie par arrêté ministériel compte tenu de l'importance du trafic d'amiante.

Les ressources du FCAATA étant constituées par une contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général, il incombe à la loi de financement de la sécurité sociale de fixer chaque année ce montant. Cette somme figure dans les objectifs de dépenses de la branche accidents du travail fixés par les articles 39 et 46 du présent projet de loi, mais elle n'est pas intégrée dans le calcul de l'ONDAM.

Il est proposé de porter la dotation de la branche accidents du travail de 200 millions d'euros à 300 millions d'euros au titre de l'année 2002 et, pour 2003, de la fixer à 450 millions d'euros. L'augmentation des dotations de financement est justifiée par la poursuite de la montée en charge du dispositif, ainsi que le résume le tableau ci-dessous :

Nombre cumulé d'allocataires

Fin décembre 2000

Fin décembre 2001

Fin juin 2002

Entrés

3 894

9 697

13 519

Sortis

109

545

842

Présents

3 785

9 152

12 677

Le fonds reçoit également directement une fraction du droit de consommation sur les tabacs, fixée à 0,35 % à partir de 2003, qui doit lui rapporter 34 millions d'euros à ce titre.

*

Article 37

Montant du versement de la branche accidents du travail à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles

Cet article fixe à 330 millions d'euros en 2003 le montant du versement de la branche accidents du travail à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

L'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a institué un versement forfaitaire annuel de la branche accidents du travail au profit de la branche maladie du régime général, dans le but de compenser les dépenses supportées par cette dernière au titre des affections non prises en charge en application de la législation sur les maladies professionnelles. Ce versement a été étendu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 à la compensation des sous-déclarations des accidents du travail.

Ce phénomène de sous-déclaration peut s'expliquer par la méconnaissance de l'origine professionnelle des maladies par le corps médical ou par les victimes elles-mêmes, les pressions des employeurs pour ne pas déclarer d'accidents du travail, la mauvaise imputation des dépenses hospitalières lors de la prise en charge des victimes par les établissements de santé.

Tous les trois ans, une commission (actuellement présidée par Mme Marianne Levy Rosenwald, conseiller-maître à la Cour des comptes) doit évaluer le phénomène des sous-déclarations des accidents du travail et des maladies professionnelles, afin de donner une base de calcul pour la détermination du montant du versement dû à ce titre. Après avoir été fixé à 299,62 millions d'euros en 2002, il doit être égal à 330 millions d'euros en 2003, conformément aux conclusions du dernier rapport de la commission qui date de septembre 2002.

*

Article 38

(articles L. 221-4, L. 221-5, L. 227-1, L. 227-2, L. 227-3, L. 228-1 et L. 231-5-1 du code de la sécurité sociale)

Autonomisation de la gestion de la branche accidents du travail

Cet article autonomise le mode de fonctionnement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général, d'une part en la dotant d'une convention d'objectifs et de gestion et d'un conseil de surveillance et, d'autre part, en prévoyant la nomination directe des administrateurs de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Il s'agit d'une nouvelle étape, très importante, d'individualisation de la branche accidents du travail. La loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale a créé cette nouvelle branche, autonome par rapport à la branche maladie mais toujours gérée par la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM). Elle a confié la définition des mesures à mettre en _uvre dans le cadre de cette branche à une commission des accidents du travail et des maladies professionnelles composée paritairement de représentants des assurés sociaux et des employeurs, choisis par les membres du conseil d'administration de la CNAM en leur sein ou au sein des comités techniques nationaux et régionaux des accidents du travail.

Afin de donner plus d'autonomie à cette branche, il est proposé par le II de cet article de faire désigner les membres de la commission des accidents du travail directement par les organisations syndicales et patronales représentatives, sans que cette désignation ait un lien quelconque avec le conseil d'administration de la CNAM. Cela devrait notamment permettre au MEDEF, qui a quitté ledit conseil d'administration en septembre 2001 et donc par voie de conséquence la commission des accidents du travail, de réintégrer cette commission sans siéger de nouveau à la CNAM.

Le nombre de membres de la commission des accidents du travail n'est pas modifié : cinq représentants pour les salariés, cinq représentants pour les employeurs. Il s'agit donc toujours de la seule branche du régime général strictement paritaire, car les conseils d'administration des autres caisses comprennent des personnalités qualifiées.

Deux dispositions de coordination sont prévues pour mettre en application ce nouveau mode de désignation. Le I aligne les modalités de désignation et d'exercice du mandat des membres de la commission des accidents du travail sur celles applicables à la CNAM (conditions d'éligibilité, régime d'incompatibilités, durée du mandat, limite d'âge, élection du président et des vice-présidents de la commission, autorisations d'absence pour exercice du mandat, remboursement des frais de déplacement, absence de rémunération) : ces règles figurent aux articles L. 231-1 à L. 231-13 du code de la sécurité sociale et sont communes à toutes les caisses du régime général. Le III renvoie à un décret la définition des modalités d'application de ce nouveau mode de désignation.

Les IV et V dotent la branche accidents du travail d'une convention d'objectifs et de gestion (COG). En effet, lors de la création de cet instrument de contractualisation entre l'Etat et la sécurité sociale par l'ordonnance n° 96-344 du 24 avril 1996 portant mesures relatives à l'organisation de la sécurité sociale, la création d'une telle convention pour la branche avait été expressément exclue, afin de préserver son autonomie. Il s'agit pourtant d'un outil utile de programmation des moyens et de contrôle du respect d'objectifs pour la branche, notamment en matière de prévention. C'est pourquoi cette création est aujourd'hui proposée, notamment à la suite d'une recommandation en ce sens de la Cour des comptes dans son rapport public particulier sur la gestion du risque accidents du travail et maladies professionnelles de février 2002 et après avis favorable de l'actuelle commission des accidents du travail.

Ces conventions, conclues pour une durée minimale de trois ans, permettent de cadrer l'action des caisses dans le respect des lois de financement de la sécurité sociale. Elles comportent des engagements réciproques de l'Etat et de la caisse, notamment en termes de service rendu aux usagers, avec des procédures d'évaluation des résultats obtenus, des objectifs pluriannuels de gestion et la définition des moyens de fonctionnement des organismes. Elles seront signées par le président de la commission des accidents du travail et par le directeur de la CNAM, car cette caisse demeure gestionnaire de la branche en termes de moyens et de structures.

La mise en place de COG permettra d'optimiser la gestion de la branche accidents du travail : engagements en termes de délais pour les victimes, amélioration de la connaissance du risque par un suivi statistique plus homogène, pluriannualisation des moyens financiers pour le fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, simplification des procédures de tarification.

La création de conventions d'objectifs et de gestion pour la branche accidents du travail nécessite deux mesures de coordination législatives. D'abord, ces conventions, comme les autres COG, sont déclinées au niveau des organismes locaux gestionnaires du risque (les caisses régionales d'assurance maladie en ce qui concerne le risque professionnel) au moyen de contrats pluriannuels de gestion. Le VI prévoit que ces contrats seront signés par le président de la commission des accidents du travail et par le directeur de la CNAM.

Enfin, le VII prévoit la création d'un conseil de surveillance spécifique pour la branche accidents du travail. Les conseils de surveillance auprès des caisses nationales de sécurité sociale, créés par l'ordonnance précitée et composés notamment de parlementaires, ont pour mission d'examiner les conditions de mise en _uvre des COG et remettent à cet effet un avis annuel au Parlement. Il y aura donc deux conseils de surveillance auprès de la CNAM, l'un pour la branche maladie, l'autre pour la branche accidents du travail. Le président de la commission des accidents du travail pourra assister aux séances du conseil de surveillance avec voix délibérative.

*

Article 39

Fixation de l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail pour 2003

En application du 3° du I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe à 9,4 milliards d'euros en 2003 l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale comptant plus de 20 000 cotisants, actifs ou retraités titulaires de droits propres. Il ne s'agit pas d'une autorisation de dépenser au sens budgétaire du terme - la notion de crédits évaluatifs peut au mieux rendre compte de prestations qui doivent de toute façon être versées en application de la loi et en contrepartie, même indirecte, de cotisations - mais d'une estimation chiffrée qui permet d'informer le Parlement et de piloter le système de santé.

Les dépenses retracées par le présent article comprennent les prestations sociales légales et extra-légales obligatoires, les prestations de services sociaux visant à abaisser le coût d'accès au système de soins, les frais de gestion administrative des régimes, les transferts entre régimes et les frais financiers. Au sein de la branche accidents du travail sont intégrées les dépenses de la branche correspondante du régime général, des fonds d'assurance existants dans d'autres régimes (mines, salariés et exploitants agricoles,...) et les dépenses effectuées directement par les régimes d'employeurs (notamment la fonction publique) en contrepartie de cotisations fictives. Les dépenses des fonds de financement liés à l'amiante ne figurent pas dans cet agrégat mais ces fonds sont financés par des versements intégrés dans celui-ci.

Par rapport aux comptes élaborés par la Commission des comptes de la sécurité sociale, les chiffres de cet article excluent les dépenses des régimes de moins de 20 000 cotisants. En revanche, les dépenses effectuées dans les départements d'outre-mer (DOM) y sont intégrées. Dans le cadre de la comptabilité en droits constatés, les transferts internes sont retranchés des dépenses de la branche qui les verse.

Si l'on compare les objectifs de dépenses par rapport aux prévisions d'exécution de l'année en cours, la croissance globale des dépenses (+ 4,2 %) marque une augmentation modérée, légèrement supérieure à la croissance prévisionnelle du PIB, estimée à 3,9  en valeur par le gouvernement pour la préparation du projet de loi de finances et du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L'impact des mesures nouvelles du présent projet sur l'agrégat de dépenses de la branche accidents du travail pour 2003, après opérations de consolidation, est rappelé dans le tableau suivant.

Impact du PLFSS pour 2003
sur l'agrégat de dépenses de la branche accidents du travail

(en millions d'euros)

Régime général

Autres régimes de base

Total des

dépenses

Dotation Fonds indemnisation amiante

(art. 35 plfss)

190

0

190

Dotation Fonds préretraites amiante

(art. 36 plfss)

450

0

450

Total

640

0

640

Le tableau ci-après présente, à partir de l'annexe c du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, une répartition plus détaillée des différentes catégories de dépenses pour l'ensemble des régimes de base de plus de 20 000 cotisants.

Régimes de base de plus de 20 000 cotisants

Dépenses de la branche accidents du travail

(en millions d'euros)

CHARGES

2002

2003

Variation

Prestations légales

Prestations extra-légales

Autres prestations

Dotations nettes aux provisions

Pertes sur créances irrecouvrables

Transferts entre organismes de sécurité sociale

Charges techniques

Charges financières

Charges de gestion courante

7 516

4

143

14

8

25

564

0

747

7 765

4

146

18

8

26

721

0

717

3,31 %

0 %

2,1 %

28,57 %

0 %

4 %

27,84 %

0 %

- 4,02 %

TOTAL DES CHARGES

9 021

9 405

4,26 %

_________

N° 0330  - Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 : assurance maladie et accidents du travail (M. Jean Bardet)

1 Tarification à la pathologie : enjeux et perspectives de l'expérimentation en France, in actes du colloque tenu à Paris les 7 et 8 juin 2001, organisé par la DREES.

2 La biodisponibilité est la vitesse et l'intensité de l'absorption dans l'organisme du principe actif. La bioéquivalence est l'absence de différence significative de biodisponibilité : deux médicaments bioéquivalents ont la même équivalence thérapeutique.

3 Cet article reprenait une disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 annulée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle n'avait pas sa place en loi de financement, ce transfert n'ayant pas un impact suffisant sur les dépenses des régimes.


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