N° 401 - Rapport de M. Yves Bur sur la proposition de loi de M. Yves BUR et plusieurs de ses collègues visant à protéger les mineurs contre la diffusion de programmes comprenant des scènes de violence gratuite ou de pornographie (317)




Document
mis en distribution
le 5 décembre 2002

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N° 401

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 novembre 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 317) de M. Yves BUR visant à protéger les mineurs contre la diffusion de programmes comprenant des scènes de violence gratuite ou de pornographie,

PAR M. Yves BUR,

Député.

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Audiovisuel et communication.

INTRODUCTION 5

I.- UNE PROTECTION DES MINEURS INSUFFISAMMENT ASSURÉE 7

A. UNE RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE AMBIGUË 7

B. DES RÉGIMES D'INSPIRATION VOISINE DANS TOUS LES ÉTATS MEMBRES 8

C. UN SYSTÈME FRANÇAIS À PERFECTIONNER 11

1. Les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication 11

2. La diffusion des programmes de catégorie V sur les chaînes françaises 13

3. Des enfants de plus en plus en contact avec des programmes violents ou pornographiques 19

II.- UNE PROPOSITION DE LOI DE RESPONSABILISATION 23

A. LES PROGRAMMES VISÉS 23

B. UN SYSTÈME DE DÉVERROUILLAGE VOLONTAIRE 24

TRAVAUX DE LA COMMISSION 27

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 27

II.- EXAMEN DES ARTICLES 32

Article unique (article 15 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) : Mise en place d'un système de double contrôle d'accès pour les programmes interdits aux mineurs 32

Article additionnel après l'article unique (article 19 du code de l'industrie cinématographique) : Tutelle conjointe du ministre chargé du cinéma et du ministre chargé de la famille sur la commission de classification des films 37

Titre de la proposition de loi 40

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 41

ANNEXE 1: DIRECTIVE « TÉLÉVISION SANS FRONTIÈRES » DU 3 OCTOBRE 1989 MODIFIÉE (article 22) 43

ANNEXE 2 : CONVENTION EUROPÉENNE SUR LA TÉLÉVISION TRANSFRONTIÈRE (article 7) 44

ANNEXE 3 : LOI N° 86-1067 DU 30 SEPTEMBRE 1986 MODIFIÉE, RELATIVE À LA LIBERTÉ DE COMMUNICATION (article 15) 45

ANNEXE 4 : LOI N° 75-1278 DU 30 DÉCEMBRE 1975 PORTANT LOI DE FINANCES POUR 1976 (article 12) 46

INTRODUCTION

L'impact des images sur l'épanouissement des enfants et la construction de leur personnalité ont longtemps été sous-estimés en France. Depuis quelques années cependant, les travaux de pédiatres, de psychiatres et de psychanalystes, qui témoignent de l'impact perturbateur de certains programmes télévisés (mais aussi de jeux vidéos, de films de cinéma, etc.), connaissent un large écho. Nul ne peut aujourd'hui ignorer que la multiplication des programmes télévisés contenant des images violentes ou pornographiques ne saurait rester sans effets néfastes sur les enfants et les adolescents et ce, qu'ils y soient confrontés par hasard ou qu'ils en soient les spectateurs délibérés.

En choisissant de confier en juin dernier à une commission de trente-six personnalités, présidée par la philosophe Blandine Kriegel, le soin de réfléchir à la place de la violence à la télévision et aux moyens d'assurer la protection des plus vulnérables, M. Jean-Jacques Aillagon, a marqué son inquiétude et sa volonté d'agir face à ce phénomène. Les conclusions de cette mission, remises sous forme de rapport au ministre de la culture et de la communication le 14 novembre dernier constituent un outil de référence, d'alerte et de proposition qui ne doit pas demeurer lettre morte.

La télévision n'est bien évidemment pas le seul vecteur de représentation d'une violence exacerbée et gratuite et d'images pornographiques : la vidéo, l'Internet, la presse spécialisée sont autant de débouchés pour ce qui constitue avant tout un marché. L'ampleur du phénomène ne saurait cependant justifier l'inaction : tout doit donc être fait pour tenter de protéger les plus vulnérables et de combattre les effets dévastateurs d'un commerce dont la seule préoccupation est le profit. De plus, la télévision demeure, pour beaucoup de jeunes, le média le plus accessible.

L'objectif de la proposition de loi n° 317, déposée le 24 octobre dernier par le rapporteur, Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Jérôme Rivière et soumise aujourd'hui à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, est clair : il ne s'agit pas d'aseptiser le petit écran en supprimant toute représentation de violence ou d'érotisme mais de renforcer à la fois la vigilance des chaînes, grâce à un surcroît de protection sur les programmes les plus sensibles, et celle des parents qui seront conduits à faire un choix, au cas par cas, pour la réception de ces programmes sur leur téléviseur.

Les mesures de contrôle voire d'interdiction ne prennent en effet de sens « que si les familles sont parallèlement sensibilisées aux enjeux de la socialisation de l'enfant par les médias. Si ces interdits ne sont pas accompagnés par les familles et les éducateurs, ils ne serviront qu'à ajouter des possibilités supplémentaires de transgression »1.

Le dispositif d'accès conditionnel des mineurs aux programmes les plus nuisibles proposé par la proposition de loi a donc vocation à devenir un outil de protection des enfants et des adolescents, un moyen de protéger l'épanouissement de leur personnalité, de préserver leur équilibre affectif et psychologique et de soutenir les adultes dans leur souci de veiller à la qualité des programmes regardés par les plus jeunes.

La proposition de loi soumise aujourd'hui à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales n'est donc pas porteuse d'un jugement moral ou d'une volonté de censure, mais simplement d'un dispositif pragmatique de protection des mineurs et de responsabilisation des éditeurs et distributeurs de services audiovisuels ainsi que des parents.

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I.- UNE PROTECTION DES MINEURS INSUFFISAMMENT ASSURÉE

A. UNE RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE AMBIGUË

Les activités de radiodiffusion télévisuelle sont régies par la directive « Télévision sans frontières » (TSF) du 3 octobre 1989 modifiée le 30 juin 1997. L'article 22 de cette directive (cf. annexe 1) dispose dans son premier paragraphe que les États membres prennent les mesures appropriées pour que les émissions diffusées « ne comportent aucun programme susceptible de nuire gravement à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, notamment (...) des scènes de pornographie ou de violence gratuite ». Cette disposition s'apparente donc à une interdiction.

La directive effectue cependant une distinction entre les programmes « susceptibles de nuire gravement à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs » et les programmes « susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ». Ces derniers, visés par le deuxième paragraphe de l'article, sont en principe également interdits, sauf s'il est assuré que « les mineurs se trouvant dans le champ de diffusion ne sont pas normalement susceptibles d'entendre ou de voir ces émissions ». Plusieurs dispositifs sont évoqués pour faire obstacle à ce visionnage : le choix d'horaires de diffusion adaptés « ou toute mesure technique » (sans plus de précision) et, pour les chaînes diffusées en clair, une signalisation des programmes avant leur diffusion (par « avertissement acoustique » ou par « la présence d'un symbole visuel tout au long de leur durée »).

Toute l'ambiguïté de la directive réside dans le fait que la Commission, tout en édictant un certain nombre de règles apparemment claires, s'est refusée à donner une définition précise des programmes interdits. Comme l'a confirmé Mme Viviane Reding, commissaire européenne chargée des médias, dans un courrier adressé le 15 octobre dernier au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), « l'article 22 constitue une mesure d'harmonisation partielle car la directive ne contient aucune définition de ce qui peut nuire " gravement " ». Les scènes de pornographie et de violence gratuite ne sont ainsi citées par la directive qu'« à titre d'exemple ». L'interdiction, qui semble claire à la lecture du texte de la directive, n'en est donc pas vraiment une !..

Selon Mme Viviane Reding, il incombe aux autorités nationales de définir les critères permettant de déterminer les programmes qui « nuisent gravement » aux mineurs et qui doivent, par conséquent, être interdits. Pour les scènes de sexes ou de violence « en général », les Etats membres peuvent s'en tenir au deuxième paragraphe de l'article, la directive considérant que ces scènes ne nuisent pas gravement, a priori, aux mineurs.

La distinction effectuée par la directive entre les programmes susceptibles de nuire gravement et les programmes simplement susceptibles de nuire aux mineurs permet donc à la Commission de s'accommoder de modalités de transpositions relativement variables selon les Etats membres.

La convention européenne sur la télévision transfrontière, entrée en vigueur le 1er mai 1993, est quant à elle beaucoup plus claire puisqu'elle dispose dans son article 7 que les programmes ne doivent pas contenir de pornographie et mettre en valeur la violence (cf. le texte complet de l'article en annexe).

B. DES RÉGIMES D'INSPIRATION VOISINE DANS TOUS LES ÉTATS MEMBRES

∙ La transposition de l'article 22 de la directive et la protection des mineurs contre la pornographie ou la violence gratuite sont généralement assurées par des systèmes assez proches dans les différents Etats membres. Ces systèmes reposent sur des signaux sonores ou visuels destinés à attirer l'attention des parents. Les règles qu'ils fixent sont modulées en fonction de l'heure de programmation, en établissant parfois une distinction entre les chaînes, selon qu'elles sont ou non cryptées. Ils s'appuient sur les décisions visant à interdire l'accès de certains films aux mineurs de moins de 12,13, 16 ou 18 ans.

Des alertes sonores sont ainsi en vigueur en Belgique, au Danemark, en Finlande, en Irlande, aux Pays-Bas, au Portugal, en Espagne, en Suède et au Royaume-Uni. L'apparition d'icônes sur les écrans de télévision est cependant généralement considérée comme plus efficace pour attirer l'attention sur la nature des programmes diffusés. Cette méthode n'est toutefois pas utilisée au Royaume-Uni et en Irlande et n'est que facultative aux Pays-Bas.

La permissivité est d'autant plus grande que l'heure de programmation est tardive. C'est le cas dans tous les pays, à l'exception du Luxembourg. Les scènes susceptibles de heurter la sensibilité des mineurs sont prohibées de manière générale avant 20 heures (aux Pays-Bas), 20 heures 15 (en Autriche), 21 heures (en Irlande, au Danemark, en Suède, au Royaume-Uni et en Finlande), voire 21 heures 30 (en Grèce) ou 22 heures (au Portugal).

Les chaînes cryptées sont soumises à des règles particulières au Danemark, en Allemagne et au Royaume-Uni. La télévision à péage fait également l'objet de règles distinctes, dans la mesure où son utilisation repose sur un acte volontaire du spectateur. Ainsi, aucune contrainte de programmation ne lui est applicable au Danemark.

Enfin, il existe partout des organismes chargés de fixer les âges en deçà desquels un film doit être interdit aux mineurs. Ces interdictions entraînent généralement des obligations pour les chaînes de télévision.

∙ L'élaboration et l'application de ces mesures sont cependant effectuées de manière diverse.

Ainsi, les réglementations applicables ne sont pas définies de manière uniforme : elles sont généralement adoptées au niveau national (cas de l'Autriche, du Danemark, de la Finlande, des Pays-Bas, de la Suède et de l'Italie), mais peuvent aussi être arrêtées à un niveau décentralisé comme en Espagne, où elles relèvent des communautés régionales (possibilité utilisée par la Catalogne), ou en Belgique, où les communautés linguistiques ont mis en _uvre des systèmes différents : les francophones ont choisi un système d'alerte visuelle, les néerlandophones un système d'alerte sonore, tandis que les germanophones n'ont prévu aucune disposition particulière.

Au Portugal, comme en France, une autorité indépendante débat des règles à respecter avec les radiodiffuseurs lors de l'attribution de leurs licences. L'Alta Autoritad para a Comunicaçao joue ainsi un rôle similaire à celui du CSA.

En Allemagne, les radiodiffuseurs privés ont confié à un organisme extérieur, le FSF, le soin de déterminer les règles permettant d'évaluer les programmes, tandis que l'audiovisuel relève non pas de la compétence de la Fédération, mais de celle des Länder.

Les règles ainsi édictées s'appliquent selon des schémas différents. Ainsi, le système de reconnaissance visuelle (icônes) concerne soit l'ensemble des radiodiffuseurs (cas du Portugal, de la Finlande et de la Belgique), soit les seuls diffuseurs publics (cas de l'Autriche). Il est aussi parfois laissé à l'appréciation du radiodiffuseur (cas de l'Espagne, des Pays-Bas, et sans doute prochainement de l'Italie et du Luxembourg).

règles de programmation applicables dans les états-membres de l'Union européenne en matière de diffusion télévisée d'émissions pouvant nuire aux mineurs (

Allemagne

- Les émissions pouvant mettre en danger le bien-être physique, psychologique ou émotionnel des enfants et des adolescents ne peuvent être diffusés qu'entre 23 heures et 6 heures.

- Les films interdits aux mineurs de moins de 16 ans ne peuvent être diffusés qu'entre 22 heures et 6 heures.

- Des exceptions à ces règles sont possibles si le diffuseur a pris les moyens nécessaires - tel que le cryptage - de sorte que les mineurs ne puissent avoir accès au programme. Toutefois, ces exceptions doivent recevoir l'aval de l'Autorité de régulation du Land, compétent sur la base d'une proposition de l'Office commun de la protection de la jeunesse et de la programmation.

Autriche

- Avant 20 heures l5, les programmes doivent être destinés à toute la famille.

- Les _uvres cinématographiques interdites aux mineurs de moins de 16 ans doivent être diffusées après 22 heures.

Belgique

- La diffusion avant 22 heures d'_uvres de fiction susceptibles de heurter la sensibilité des mineurs de moins de 12 ans par des scènes répétées ou une atmosphère générale doit être assortie de la diffusion d'une icône pendant toute la durée des programmes - y compris les génériques - sur les chaînes non-cryptées ; cette obligation de diffusion de l'icône est ramenée à une minute sur les chaînes cryptées. Pour les diffusions après 22 heures, l'icône doit être diffusée pendant une minute au début du programme, puis pendant 15 secondes après chaque coupure.

- La diffusion d'_uvres à caractère érotique ou d'une grande violence doit être assortie de la diffusion d'une icône pendant l'intégralité du programme, y compris les génériques, quelle que soit l'heure de diffusion.

Danemark

- Le service public de radiodiffusion et de télévision n'est pas soumis à une règle stricte ; toutefois, il est tacitement reconnu que les émissions pouvant avoir un caractère choquant ne peuvent être diffusées qu'après 21 heures.

- Une disposition réglementaire oblige les diffuseurs à ne programmer les émissions susceptibles de choquer les mineurs qu'après minuit.

- Ces mesures ne s'appliquent pas aux chaînes cryptées.

Espagne

La diffusion d'émissions susceptibles de mettre en danger le bien-être physique, psychologique ou émotionnel des enfants n'est autorisé qu'entre 22 heures et 6 heures et doivent faire l'objet d'un signal visuel ou sonore.

Finlande

La diffusion d'émissions déconseillées aux enfants doit avoir lieu après 21 heures.

Grèce

Les émissions les moins choquantes doivent être diffusées après 21 heures 30 ; les programmes les plus choquants doivent être diffusés après minuit.

Irlande

Les émissions destinées aux adultes doivent être diffusées après 21 heures.

Italie

- Les films classés par les commissions de censure comme interdits aux mineurs de moins de 14 ans ne peuvent être diffusés qu'entre 22 heures 30 et 7 heures. Cette règle s'applique aussi aux publicités pour des messageries destinées aux adultes.

- La loi ne prévoit pas, pour le moment, de dispositif sonore ou de symbole visuel pour signaler les programmes les plus nuisibles.

- Les programmes réellement pornographiques ou d'incitation à la violence ne sont accessibles que sur les chaînes cryptées.

Luxembourg

Absence de règles dans ce domaine.

Pays-Bas

- Les films classés par les commissions de contrôle compétentes comme interdits aux mineurs de moins de 12 ans ne peuvent être diffusés avant 20 heures.

- Les films classés comme interdits aux mineurs de moins de 16 ans ne peuvent pas être diffusés avant 22 heures.

Portugal

La diffusion d'émissions à contenu violent et/ou pouvant choquer, ainsi que des films classés comme interdits aux mineurs de moins de 16 ans n'est possible qu'après 22 heures ; cette diffusion doit être précédée d'un message d'information sur le contenu du programme et assortie de la diffusion d'une icône pendant toute la durée du programme.

Royaume-Uni

- La diffusion de programmes ne convenant pas aux enfants doit avoir lieu entre 21 heures et 5 heures 30 ; les chaînes doivent néanmoins faire preuve de « prudence » dans le choix des programmes jusqu'à 22 heures 30.

- Les films et téléfilms classés par la commission de classification des films comme interdits aux moins de 12 ans ne peuvent être diffusés avant 20 heures.

- Les films classés comme interdits aux moins de 15 ans ne peuvent pas être diffusés avant 21 heures.

- Les films classés comme interdits aux moins de 18 ans ne peuvent pas être diffusés avant 22 heures.

- Les programmes à caractère pornographique ne peuvent contenir de films non classés par la commission de classification des films ou encore classés R18, qui limite la diffusion aux sex shops agréés.

Suède

La diffusion d'émissions déconseillées aux enfants doit avoir lieu après 21 heures.

C. UN SYSTÈME FRANÇAIS À PERFECTIONNER

1. Les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

L'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, dispose en son premier alinéa que : « La communication audiovisuelle est libre ». Il définit ensuite les principes limitant l'exercice de cette liberté, notamment le « respect de la dignité de la personne humaine » et confie au CSA le soin de garantir l'exercice de cette liberté dans les conditions définies par la loi.

L'article 15 de cette même loi définit les missions du CSA en matière de protection des mineurs. Il dispose que « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille à la protection de l'enfance et de l'adolescence et au respect de la dignité de la personne dans les programmes mis à disposition du public par un service de communication audiovisuelle (...)».

Cet article a été a été considérablement renforcé par la loi du 1er août 2000, qui a assuré la transposition de l'article 22 de la directive TSF évoquée ci-dessus. Le législateur a confié au CSA des responsabilités particulières en ce qui concerne les conditions de diffusion des programmes susceptibles de nuire, de façon plus ou moins grave, à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs. Comme la directive, la loi opère donc une distinction - qui reste évidemment subjective - entre les programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement de ces derniers et ceux pouvant leur nuire « gravement ».

Le deuxième alinéa indique les précautions devant être respectées par les services de radiodiffusion et de télévision mettant à la disposition du public des programmes « susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ». Cet alinéa est la retranscription du 2) de l'article 22 de la directive européenne. La rédaction retenue par la directive - et reprise intégralement dans le présent article, qui adjoint systématiquement au mot « épanouissement » les trois adjectifs « physique », « mental » ou « moral » -  permet au CSA d'interpréter de façon relativement large la nature et l'impact des programmes potentiellement dangereux.

Les précautions obligatoirement applicables par les services de communication audiovisuelle - alternatives et éventuellement cumulatives - sont de deux ordres : d'une part, le choix d'une heure tardive de diffusion pendant laquelle les mineurs ne sont « normalement » pas susceptibles de les voir ou de les entendre et, d'autre part, la mise en place de « tout procédé technique approprié » (codage ou cryptage) afin d'empêcher les mineurs d'avoir accès à ces programmes.

Des contraintes supplémentaires s'appliquent aux services de télévision : le troisième alinéa de l'article 15 retranscrit ici le 3) de l'article 22 de la directive. Il concerne les précautions devant être prises par les services de télévision diffusés en clair mettant à la disposition du public des programmes jugés « susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ». Le CSA doit veiller à ce qu'une précaution au moins soit prise à cette occasion, à savoir que ces messages soient précédés d'un avertissement acoustique ou bien qu'ils puissent être identifiés par la présence d'un symbole visuel. Cependant, contrairement à ce qui est prévu par la directive, cette obligation vaut pour l'ensemble des services de télévision.

Enfin, deux interdictions générales de diffusion s'imposent aux chaînes et aux radios de manière absolue et sans aucune possibilité de dérogations.

Le quatrième alinéa de l'article 15 dispose que les programmes susceptibles de nuire gravement à l'épanouissement des mineurs ne sont jamais diffusables. Il est la retranscription du 1) de l'article 22 de la directive. Suivant l'esprit de la directive, cet alinéa pose une interdiction générale qui ne souffre aucune dérogation ni arrangement. L'adverbe « gravement » est donc essentiel. C'est lui qui détermine le caractère absolu de l'interdiction. En effet, on l'a vu, les programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement des mineurs (sous-entendu, pas de façon aussi grave que ces derniers) sont diffusables moyennant des modalités fixées par les deux alinéas précédents.

Cet alinéa ne reprend cependant pas l'intégralité du texte de la directive qui précise que, parmi les programmes nuisant gravement à l'épanouissement des mineurs, figurent « notamment des programmes comprenant des scènes de pornographie ou de violence gratuite ». Lors de l'examen de la loi du 1er août 2000 qui a assuré la transposition de la directive, ce membre de phrase a été considéré comme une illustration, que les Etats membres n'étaient pas tenus de reprendre textuellement. En outre, l'introduction de cette précision aurait pu être interprétée comme traduisant la volonté du législateur de prohiber totalement la diffusion de films pornographiques, alors que cette diffusion est admise en France, comme dans la plupart des autres États membres, dès lors qu'elle a lieu à une heure tardive et sur une chaîne cryptée.

En revanche, telle qu'elle est formulée, l'interdiction totale de diffusion peut s'appliquer aux films pornographiques dans lesquels les acteurs se trouvent placés dans des situations particulièrement choquantes pour les mineurs et qui portent atteinte à la dignité de la personne humaine.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 15 vise à prohiber totalement les programmes contenant des incitations à la haine ou à la violence. Il est très largement inspiré de l'article 22 bis de la directive TSF, qui interdit à tous les services de radiodiffusion comme de télévision de diffuser un programme incitant à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité. Le dispositif français est quant à lui plus complet puisqu'il vise également l'incitation à la violence, pour les même raisons.

En définitive, cette transposition est venue très largement consacrer les actions menées depuis plus de dix ans par le CSA en matière de protection des mineurs.

2. La diffusion des programmes de catégorie V sur les chaînes françaises

Le 5 mai 1989, le CSA a élaboré une directive selon laquelle les chaînes devaient veiller à ne pas diffuser d'émissions pour la jeunesse comportant des scènes de nature à heurter la sensibilité du jeune public. Les chaînes devaient également veiller à programmer aux heures de grande écoute des émissions destinées au public familial. Cette directive demandait en outre aux diffuseurs de ne pas programmer avant 22h30 de films interdits aux moins de 16 ans (les chaînes peuvent toutefois obtenir une dérogation en raison de l'ancienneté de la date du visa d'exploitation), ni des séquences à caractère érotique ou pouvant inciter à la violence.

Depuis 1996, le conseil a mis en place, en concertation avec les diffuseurs hertziens et les chaînes du câble et du satellite, un dispositif reposant sur une classification des programmes en cinq catégories, chaque catégorie étant assortie d'une signalétique et, pour certaines, de restrictions horaires. La classification est effectuée par les diffuseurs. Le CSA a cependant définit avec eux un certain nombre de critères à prendre en compte :

- le nombre et la nature des scènes violentes ;

- leur gratuité, leur caractère indispensable par rapport au scénario ;

- l'utilisation scénaristique de la violence pour résoudre les conflits ;

- le traitement en images de ces scènes, la mise en scène, le type de plan utilisé, le réalisme de la représentation, le traitement de la bande sonore (génératrice d'angoisse) ;

- l'évocation de thèmes difficiles comme la drogue, le suicide, l'inceste, la violence envers les enfants ;

- la représentation des actes sexuels ;

-  l'image dégradante donnée de la femme ;

- la psychologie des personnages et les repères qu'elle offre à un public d'enfants ou d'adolescents ;

- le caractère du héros, ses mobiles, son caractère éventuellement malsain, son recours à la violence ;

- la présence d'enfants lors de scènes violentes, etc.

L'application de ces critères se fait au cas par cas, et pour les séries, épisode par épisode. Le CSA ne souhaite pas établir une liste exhaustive de ces critères, ni de leurs conséquences en termes de classification. Par contre, il encourage les chaînes à utiliser la signalétique dès qu'elles pressentent qu'un programme risque de heurter la sensibilité des plus jeunes, l'objectif étant avant tout d'informer les parents et non d'aseptiser le petit écran.

Cette signalétique vient d'être revue afin de rendre les pictogrammes plus explicites et les avertissements plus clairs, sans pour autant négliger le confort de visionnage des téléspectateurs. À l'instar de ce qui existe pour les autres médias (films de cinéma, jeux vidéos, livres pour enfants), la nouvelle signalétique jeunesse - à l'antenne depuis le 18 novembre dernier - délivre désormais des recommandations pratiques en termes d'âge.

- Signalétique applicable en l'ensemble des chaînes et des programmes -

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Catégorie I

Tous publics
(pas de signalétique)

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Catégorie II

Déconseillé aux moins de 10 ans

Programmes dont certaines scènes sont susceptibles de heurter les moins de 10 ans.

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Catégorie III

Déconseillé aux moins de 12 ans ou interdit en salle aux moins de 12 ans

Programmes pouvant troubler les moins de 12 ans, notamment lorsque leur scénario recourt de façon répétée et systématique à la violence physique ou psychologique.

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Catégorie IV

Déconseillé aux moins de 16 ans ou interdit en salle aux moins de 16 ans

Programmes à caractère érotique ou de grande violence, susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des moins de 16 ans.

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Catégorie V

Déconseillé aux moins de 18 ans ou interdit en salle aux moins de 18 ans

_uvres cinématographiques interdites aux mineurs de 18 ans et programmes réservés à un public adulte averti et qui, en particulier par leur caractère obscène, sont susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des moins de 18 ans.

Les pictogrammes des catégories III, IV et V doivent être visibles pendant toute la durée du programme. La mention « Déconseillé aux moins de ... » ou, le cas échéant, la mention de l'interdiction aux mineurs décidée par le ministère de la culture et de la communication doit apparaître pendant les bandes-annonces, une minute minimum en début de programme ou pendant la diffusion du générique et une minute après la ou les éventuelles interruptions de programme.

∙ L'ensemble des chaînes hertziennes diffusées en clair (ainsi que les chaînes du câble et du satellite autres que de cinéma) sont soumises aux mêmes règles de programmation, énoncées par le CSA et reprises dans les cahiers des missions et des charges (pour les chaînes publiques) et dans les conventions (pour les chaînes privées). Ces règles sont les suivantes :

Programmes de catégorie II : les horaires de diffusion sont laissés à l'appréciation de la société, étant entendu que cette diffusion ne peut intervenir dans les émissions destinées aux enfants.

Programmes de catégorie III : ils ne doivent pas être diffusés avant 22 heures ; à titre exceptionnel, une diffusion avant 22 heures peut être admise (en pratique quatre au maximum dans l'année), à condition qu'elle soit accompagnée d'une signalétique permanente et qu'elle n'intervienne en aucun cas avant 22 heures les mardi, vendredi, samedi et veille de jours fériés.

Programmes de catégorie IV : réservées à un public averti, ces _uvres sont diffusables seulement après 22 heures 30.

Programmes de catégorie V : ces _uvres font l'objet d'une interdiction totale de diffusion en clair.

En ce qui concerne les bandes-annonces, le pictogramme de la catégorie dans laquelle le programme est classé doit apparaître pendant toute la durée de la bande-annonce. De plus, le CSA demande aux chaînes de ne pas diffuser avant 20 heures 30 de bandes-annonces violentes ni de bandes-annonces de programmes comportant des scènes de nature érotique ou violente qui sont, de ce fait, réservés à un public d'adultes et ne peuvent être diffusés avant 22 heures 30.

Pour Canal + ainsi que pour les chaînes cinéma du câble et du satellite et les services de paiement à la séance, les règles de programmation sont les suivantes :

Programmes de catégorie III : programmation libre, sauf le mercredi (pas avant 20 heures 30) ;

Programmes de catégorie IV : _uvres diffusables à partir de 20 heures 30 ;

Programmes de catégorie V : ces programmes ne peuvent être diffusés qu'entre minuit et cinq heures du matin. Cette obligation figure dans les conventions des neuf chaînes payantes actuellement autorisées à diffuser des films pornographiques (Canal + - dans ses différentes versions -, XXL, Ciné Cinéma Frisson, Cinéstar 1 et 2, Cinétoile, TPS Star, Kiosque et Multivision).

De plus, la diffusion des programmes attentatoires à la dignité de la personne humaine, notamment les programmes consacrés à la représentation de violences et de perversions sexuelles, dégradantes pour la personne humaine ou qui conduisent à l'avilissement de la personne humaine ainsi que des programmes à caractère pornographique mettant en scène des mineurs ainsi que des programmes d'extrême violence ou de violence gratuite est systématiquement interdite. Cette mention figure dans les conventions des chaînes autorisées à diffuser des programmes de catégorie V.

On peut considérer que les programmes ainsi visés correspondent aux « programmes susceptibles de nuire gravement à l'épanouissement des mineurs » interdits par l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986.

Par ailleurs, la signalétique n'exonère pas les chaînes de respecter les dispositions du décret n°90-174 du 23 février 1990 modifié relatives à la classification des _uvres cinématographiques. La Commission de classification, qui relève du ministère de la culture et de la communication et dans laquelle le CSA est représenté, visionne et émet un avis sur tous les films qui sortent en salle et sur leurs bandes-annonces. Au vu de cet avis, le ministre de la culture délivre ensuite le visa qui peut être accompagné d'une interdiction en salle aux mineurs de 12 ans, de 16 ans, voire de 18 ans, ou encore d'un avertissement au public.

Les chaînes doivent informer les téléspectateurs de ces interdictions lors de la diffusion des bandes-annonces et, plus généralement, lors de toute présentation du film à l'antenne, ainsi que, bien sûr, lors de sa diffusion. Elles induisent systématiquement une classification dans la catégorie correspondante (respectivement III, IV, V).

∙ Selon le CSA, les diffusions de films pornographiques s'élèvent actuellement à 934 chaque mois, dont 840 en paiement à la séance. Le tableau présenté à la page suivante détaille le contenu et la durée des autorisations accordées par le CSA.

Le CSA dispose de pouvoirs de sanction administrative pour contraindre les opérateurs à respecter leurs obligations légales et conventionnelles. Les sanctions peuvent porter sur les services (suspension provisoire ou retrait définitif de l'autorisation, diffusion d'un communiqué à l'antenne) ou bien être de nature financière. Les premières sont cependant difficilement applicables car elles sont ressenties par le public comme une privation de service et peuvent être assimilées à la censure. Quant aux secondes, elles ont l'avantage de ne pas gêner les téléspectateurs tout en faisant revenir l'opérateur à la raison.

Le problème est que les articles 42-1 et 48-2 de la loi du 30 septembre 1986, qui définissent les différentes sanctions applicables par le CSA, disposent que des sanctions pécuniaires ne peuvent être prononcées lorsque le manquement constaté par le CSA peut être constitutif d'une infraction pénale. Or, cela est le cas pour la diffusion de programmes comportant des scènes de violence ou de pornographie, sanctionné par l'article 227-24 du code pénal2. Le CSA se trouvent donc aujourd'hui assez largement dépourvu de moyens de sanction.

- Chaînes autorisées par le CSA à diffuser des programmes de catégorie V -
(au 18 novembre 2002)

Chaînes hertziennes cryptées diffusant des programmes de catégorie V

Services

Date de signature

Durée de la convention

Commentaires

Canal+

29.05.2000

5 ans + 5 ans si TNT

3 diffusions en moyenne par mois

Canal Antilles*

5.01.1993

10 ans

Actuellement 3 diffusions mais aucune diffusion à partir du 11.02.03

Canal Guyane*

18.10.1994

10 ans

3 diffusions par mois

Canal Réunion*

6.06.2000

5 ans

3 diffusions par mois

Canal Calédonie

7.06.1994

10 ans

3 diffusions par mois

Canal Polynésie

7.06.1994

10 ans

3 diffusions par mois

I - Total hertzien analogique (hors Dom-Tom) : 3 diffusions mensuelles

* Une déclinaison dénommée "Bleu" reprend sur Canalsatellite, partiellement aux Antilles et intégralement en Guyane et à la Réunion, les programmes de Canal+ Jaune, et propose environ 21 diffusions mensuelles de programmes de catégorie V.

Chaînes cryptées du câble et du satellite diffusant des programmes de catégorie V

Services

Date de signature

Durée de la convention

Commentaires

Absat

XXL

26.03.1996

10 ans

56 diffusions par mois

Canal Satellite

Canal+ Jaune

29.05.2000

5 ans + 5 ans si TNT

9 diffusion

Canal+ Vert

Idem

Idem

2 diffusions

Canal+ Bleu

Idem

Idem

Aucune diffusion

Ciné Cinéma Frisson

Avenant : 09.10.2002

Jusqu'au 28.01.2007

16 diffusions par mois

TPS

Cinéstar 1

26.05.1997 (prorogation jusqu'au 31.12.02)

5 ans

4 diffusions par mois

Cinéstar 2

26.05.1997 (prorogation jusqu'au 31.12.2002)

5 ans

Aucune diffusion

Cinétoile

26.05.1997 (prorogation jusqu'au 31.12.2002)

5 ans

Aucune diffusion

TPS Star

27.09.2001

5 ans

4 diffusions par mois

II - Total numérique hors paiement à la séance : 91 diffusions mensuelles

Paiement à la séance

Kiosque

24.11.2000

5 ans

40 titres par mois, diffusés en moyenne 15 fois sur 3 canaux

Multivision

20.06.2001

Jusqu'au 24.11.05

40 titres par mois, diffusés en moyenne 6 fois sur 9 canaux

III - Total paiement à la séance : 840 diffusions mensuelles

Total général I + II + III = 934 diffusions mensuelles

3. Des enfants de plus en plus en contact avec des programmes violents ou pornographiques

L'impact d'un programme de radio ou de télévision s'apprécie en fonction du public auquel il est destiné et donc du choix de son horaire de diffusion et du cadre de l'émission dans laquelle il est diffusé. Le contexte social est également important, car la violence d'une _uvre est d'autant moins supportable qu'elle risque d'avoir une répercussion sur une actualité brûlante.

Il est naturel que la violence apparaisse dans les émissions d'information, mais la confrontation avec certaines images, seulement précédées d'une annonce sobre du présentateur, peut se révéler extrêmement perturbante pour un jeune téléspectateur qui n'a pas été préparé à recevoir ces images et, la plupart du temps, ne les comprend pas. Par ailleurs, la violence constitue l'un des ressorts de certains genres de programmes (les fictions policières notamment). Cependant, ces représentations de la violence, si elles sont excessives ou trop brutales, peuvent déclencher l'anxiété du jeune public.

La perception de la violence, variable chez chacun, selon son histoire et sa culture, dépend également du contexte dans lequel la personne y est confrontée : en groupe ou en famille, on peut échanger ses impressions, demander des explications, évacuer le stress ressenti par le dialogue. Seul devant la télévision, un enfant est passif et livré à lui-même : la violence imposée par l'écran ne connaît aucun filtrage ou décodage.

Confronté à des représentations de violence, d'atteinte à l'intégrité physique ou à la dignité des personnes, l'enfant réagit par des sentiments de crainte, d'anxiété et d'angoisse qui peuvent entraîner insomnies et cauchemars. A plus long terme, une exposition fréquente va le conduire à élaborer des stratégies de défense telles que la désensibilisation à la violence, l'agressivité personnelle, voire l'agressivité de groupe, des comportements d'imitation. L'impact des programmes violents agit aussi sur la représentation que l'enfant se fait du monde : il peut entraîner une surévaluation de la violence dans la réalité, une vision manichéenne du monde, une appréhension négative de l'avenir, une tolérance plus grande à l'égard de comportements agressifs et sexistes, des sentiments exagéré d'insécurité.

Cela est particulièrement vrai pour les programmes qui mettent en scène des enfants. L'enfant téléspectateur s'identifie aux héros des dessins animés, des séries ou des émissions dont les enfants sont les acteurs principaux, et les violences qui sont infligées à ces personnages le font particulièrement souffrir. Ainsi, lorsque sont diffusées dans le cadre d'émissions jeunesse des _uvres qui se réfèrent à des valeurs culturelles totalement différentes de celles de la société dans laquelle il vit, on peut s'interroger sur les risques d'incompréhension ou de perturbation que ces programmes peuvent entraîner sur les plus jeunes. C'est le reproche majeur que l'on peut adresser à la diffusion, dans le cadre d'émissions jeunesse et sans avertissement particulier, de certains dessins animés d'origine asiatique qui exaltent le combat et la compétition, et présentent des relations hommes/femmes particulièrement violentes ou perverses, très éloignées des valeurs transmises dans les sociétés européennes.

De même, lorsqu'est évoquée la transgression d'interdits sociaux, tels le viol ou l'inceste, il convient de prendre en compte tout à la fois la nécessaire information du jeune public, qui peut être victime d'abus sexuels, et la protection de ses repères et de ses moyens d'orientation psychologiques élémentaires. Une mise en présence trop répétitive avec de tels programmes peut entraîner une levée totale de certains interdits sociaux et entraîner, chez des jeunes particulièrement fragiles ou impressionnables, des passages à l'acte. Il est ainsi arrivé que des jeunes fassent une tentative de suicide en imitant une scène vue à la télévision. Il s'agit cependant là de cas extrêmes qui ne sauraient être généralisés et dont la responsabilité ne peut être imputée aux seuls médias. De tels passages à l'acte ne dépendent pas que des images reçues : ils se produisent lorsque les enfants n'ont pas la possibilité ou la capacité psychologique de traiter ces images et les reçoivent comme un véritable miroir de la réalité.

La violence présente dans une _uvre de fiction n'est pas toujours angoissante pour le jeune public. Elle peut tout d'abord avoir un effet cathartique et permettre aux enfants de se débarrasser de leur propre violence par le vecteur symbolique du petit écran. La peur, ritualisée, est alors bien circonscrite au domaine de la fiction : cela renvoie au mode de fonctionnement des contes « qui font peur ». La violence est également dédramatisée lorsque des personnages « positifs » sont dotés d'une puissance telle que l'issue des combats ne peut tourner qu'à leur avantage. Cependant, lorsque ces « supers héros » recourent systématiquement à la violence pour résoudre les conflits, on peut redouter l'effet de banalisation de son usage.

Pour les membres de la mission « Kriegel » sur la violence à la télévision, la pornographie constitue un cas particulier de la violence. La confrontation à des images pornographiques - c'est-à-dire, selon le rapport Kriegel, « la présentation d'actes sexuels répétés, destinés à produire un effet d'excitation » - entraîne également chez les mineurs un certains nombre de dommages et de troubles psychologiques et comportementaux.

Chez les plus jeunes, la confrontation, le plus souvent par hasard, avec des images pornographiques provoque des sentiments de honte et de culpabilité qui entraînent le plus souvent le silence, mais aussi, par défense, des comportements pervers de reproduction. Chez les adolescents qui ont encore une représentation largement imaginaire et fantasmatique de la relation sexuelle, les images pornographiques fixent une image fausse et déformée de la réalité, des attentes et des comportements. En focalisant sur les actes et les « performances », elles offrent une vision mécanique des relations sexuelles, totalement détachée de la relation amoureuse, où la violence et les comportements de soumission sont le plus souvent de règle.

Selon un sondage commandé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'institut Médiamétrie, 11 % des enfants de quatre à douze ans des foyers abonnés à Canal + ont été en contact, au moins une minute, avec un film pornographique et 6 % d'entre eux en ont vu au moins vingt minutes. Le CSA estime donc que 470 000 mineurs de moins de douze ans ont déjà vu des images pornographiques sur Canal +. La chaîne considère pour sa part que seulement 0,01 % des enfants d'abonnés a en moyenne vu, pendant au moins dix minutes, un film pornographique sur son écran.

∙ Outre la réglementation des horaires de diffusion mise en place par le CSA, plusieurs dispositifs de protection permettent actuellement aux parents qui le désirent de bloquer les programmes de catégorie V, même s'ils sont obligés, pour cela, de bloquer l'accès aux autres programmes d'autres catégories.

Le premier niveau de protection est très simple : puisque seules des chaînes cryptées diffusent des films à caractère d'extrême violence ou pornographique, il suffit de retirer la carte ou la clé du décodeur pour rendre celui-ci inutilisable.

Un second niveau, disponible sur toute les offres numériques, est celui du code ou verrouillage parental, qui correspond à un code supplémentaire, formé par le biais de la télécommande, et qui permet de supprimer l'accès à certaines chaînes.

Pour ce qui concerne le paiement à la séance, il faut, sur TPS, entrer un code supplémentaire et, sur Canalsatellite, insérer une carte bancaire dans le décodeur, ce qui ajoute encore un nouveau code. Enfin, pour une chaîne comme XXL, il faut acquitter un abonnement supplémentaire.

Seul Canal + propose en plus, pour ses diffusions en numérique, la possibilité d'installer un verrouillage volontaire pour les programmes de catégorie V, après configuration du décodeur. Cette fonctionnalité est mise en place par la diffusion d'un logiciel en continu pendant ces programmes. Les décodeurs de la nouvelle génération permettront une sélection encore plus fine des programmes accessibles, en fonction des différents niveaux de la signalétique (interdiction aux moins de 16 ans, 12 ans ou 10 ans).

Ces systèmes sont cependant mal adaptés au blocage des programmes de catégorie V. Tout d'abord, le blocage de ces programmes n'est pas mis en place par défaut mais doit venir d'une initiative de l'utilisateur principal. De plus, le code est toujours déterminé par l'utilisateur, même pour le double contrôle d'accès de Canal + numérique : il n'y a donc aucune garantie de sa confidentialité par rapport aux mineurs, ni même de son existence. De plus, dans la quasi-totalité des cas, le blocage s'effectue uniquement par chaîne, et non par programme, ce qui pose problème dès lors qu'une chaîne diffuse un contenu hétérogène : la chaîne peut alors rester « non bloquée » soit pour simplifier son accès régulier, soit parce que l'utilisateur principal ne sait pas que des programmes de catégorie V sont diffusés sur cette chaîne, soit parce qu'il ne sait pas mettre en oeuvre la limitation d'accès.

Il semblait donc urgent, notamment dans la perspective de la mise en place de la télévision numérique de terre et donc de l'accès de l'ensemble du public à une offre audiovisuelle numérique élargie, de passer d'un système de verrouillage volontaire à une logique de verrouillage volontaire de l'accès aux programmes de catégorie V afin d'assurer une protection efficace des mineurs.

C'est ce que propose la proposition de loi n° 317 déposée le 24 octobre dernier par le rapporteur, Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Jérôme Rivière.

II.- UNE PROPOSITION DE LOI DE RESPONSABILISATION

Il est proposé d'insérer un alinéa supplémentaire dans l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986, relatif aux compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel en matière de protection des mineurs, afin de préciser les responsabilités de l'organe de régulation envers les programmes comprenant des scènes de violence gratuite ou de pornographie. La diffusion de tels programmes est en principe interdite, sauf s'ils sont rendus inaccessibles aux mineurs.

A. LES PROGRAMMES VISÉS

∙ La proposition de loi soumet la diffusion de « programmes comprenant des scènes de violence gratuite ou de pornographie » à l'application de dispositifs techniques appropriés destinés à s'assurer que ces images ne pourront être vues par des mineurs.

Les termes utilisés, « violence gratuite », et « pornographie », sont ceux de la directive TSF, mais celle-ci n'en donne aucune définition. De même il n'existe pas, dans la réglementation française, de définition du degré de violence d'un film justifiant son interdiction aux moins de dix-huit ans par la commission de classification des films et son inscription sur la liste des films « pornographique ou d'incitation à la violence » prévue à l'article 12 de la loi n° 75-1278 du 30 décembre 19753.

La violence gratuite visée par la proposition de loi peut être considérée comme une violence qui se manifeste pour elle-même, sans contexte, « injustifiée » voire injustifiable puisque non insérée dans un récit. Le rapport Kriegel évoque à son sujet une violence qui sort du jeu pulsionnel pour affirmer une jouissance perverse à faire souffrir l'autre.

De même, il n'existe pas de définition législative ou réglementaire de la pornographie. Par contre, comme le rappelle le rapport du Collectif inter-associatif enfance-médias (CIEM)4, cette définition existe dans la jurisprudence de la Cour de cassation depuis les années soixante-dix ainsi que dans celle de la Commission de classification, même si elle ne l'a jamais formalisée par écrit. Entrent dans la définition de la pornographie la représentation explicite et non-simulée des rapports sexuels, l'objectif d'excitation sexuelle du téléspectateur et l'absence de dimension artistique, ce qui rejoint la définition proposée par le rapport Kriegel, évoquée précédemment.

En insérant un alinéa additionnel dans l'article 15 de la loi de 1986, entre le troisième alinéa, qui vise les programmes de télévision nuisibles aux mineurs (qui correspondent aux catégories III et IV de la signalétique du CSA) et le quatrième alinéa, qui vise les programmes qui nuisent gravement aux mineurs et doivent, à ce titre, être totalement interdits, le texte qualifie un cas particulier parmi les programmes susceptibles de nuire aux mineurs, situé à la frontière des deux catégories actuellement définies par la loi.

Pour ces programmes, - qui correspondent en fait aux programmes de catégorie V de la signalétique - les précautions préconisées par l'article 15 (horaires de diffusion adaptés, avertissement au public et signalétique durant la diffusion) sont, comme on l'a vu, insuffisantes.

Le fait que la proposition de loi se réfère à la « violence gratuite » pose cependant un problème car le terme est ambigu et pourrait laisser penser qu'il existe une violence « payante ». De plus, comme cela a été précisé précédemment, les programmes de « violence gratuite », comme ceux de « violence extrême », sont déjà strictement interdits par le CSA, qui a fait figurer cette disposition dans les conventions des chaînes autorisées à programmer des programmes de catégorie V.

Le choix d'un autre terme serait donc préférable. Le rapporteur proposera en conséquence un amendement tendant à recentrer le dispositif de la proposition de loi sur les programmes de « violence excessive ». Ceux-ci constitueront un degré de nuisance supplémentaire par rapport aux images de « grande violence » qui relèvent des programmes de catégorie IV selon la signalétique du CSA, et ne peuvent, à ce titre, être diffusés avant 22 h 30.

∙ Les dispositions proposées concernent tous les services audiovisuels, qu'il s'agissent de services de radiodiffusion sonore ou de télévision. En pratique cependant, ce sont les services de télévision cryptés qui seront principalement concernés car, d'une part, les services de télévision accessibles en clair ne sont pas autorisés à diffuser des programmes de catégorie V et, pour la radio, les possibilités de diffuser des programmes comportant des scènes de violence gratuite ou de pornographie sont relativement limitées.

B. UN SYSTÈME DE DÉVERROUILLAGE VOLONTAIRE

∙ L'objectif de la proposition de loi est de faire en sorte - « par tous les procédés techniques combinés appropriés » - que les programmes visés ne seront pas normalement susceptibles d'être vus ou entendus par des mineurs.

Ils s'agit donc de mettre en place un système dit de « déverrouillage volontaire » de l'accès aux programmes de catégorie V : ceux-ci devront systématiquement parvenir cryptés aux abonnés et leur diffusion en clair nécessitera un acte volontaire d'un adulte (en pratique, la composition d'un code spécifique). La logique du système actuel de protection s'en trouvera donc renversée : au lieu de composer un code pour empêcher l'accès à certains programmes, les parents devront choisir d'en autoriser la réception, la chaîne ayant d'office brouillé leur diffusion.

Le terme de « double cryptage », souvent utilisé au sujet de ces dispositifs n'est donc pas réellement approprié. Il s'agit en fait de mettre en place un double système de contrôle d'accès, le premier associé à un cryptage des services diffusés afin d'empêcher les utilisateurs non-détenteurs des droits suffisants de pouvoir accéder au contenu et le second visant à empêcher les mineurs d'accéder à certains programmes. Le second contrôle d'accès doit être déverrouillé par l'utilisateur principal du récepteur (une personne majeure donc), avec le concours d'informations communiquées par les éditeurs sur les niveaux de protection, alors que le premier contrôle d'accès est directement géré par le diffuseur.

Le schéma ci-dessous résume le dispositif applicable aux chaînes numériques :

graphique
graphique

Pour ce qui concerne les chaînes cryptées diffusées en analogique, c'est-à-dire Canal +, le dispositif de double système de contrôle d'accès devra tenir compte des contraintes techniques spécifiques à ce mode de diffusion et aux décodeurs utilisés, mis en place au début des années quatre-vingt dix. Son installation n'est cependant pas impossible.

Auditionné par le rapporteur, le vice-président « technologie » du groupe Canal + a proposé de créer une offre commerciale « adulte » dédiée aux programmes de catégorie V, en plus de l'offre de base fournie à tout abonné à Canal +. Cette option pourrait être activée ou désactivée dans la carte qui sert de « clé » au décodeur, à tout moment, par appel sur un serveur vocal interactif spécifique qui déclanchera l'envoi, par la trame vidéo, des droits correspondants. Le numéro d'abonné servira de code parental. Ainsi, tout abonné ayant une « clé » ne possédant que l'option Canal + de base (hors option adulte- programmes de catégorie V), aura accès à tous les programmes sauf les programmes de catégorie V (écran noir). Tout abonné ayant activé l'option adulte aura la possibilité de voir l'ensemble des programmes.

Ce dispositif sera expliqué dans le magazine des abonnés ainsi que dans les documents accompagnant tout nouvel abonnement. L'information sera donnée aux parents de manière à ce qu'ils sachent quels outils sont mis en _uvre pour protéger la visualisation de ces programmes.

La mise en place de ces systèmes de double contrôle d'accès ne remet bien évidemment pas en cause tous les dispositifs d'information, d'alerte et d'encadrement de la diffusion des programmes actuellement en vigueur. Les programmes de catégorie V continueront donc à faire l'objet d'un contrôle strict par le CSA et notamment ne pourront pas être diffusés en clair et avant minuit.

∙ Pour être réellement performant et répondre aux objectifs de contrôle évoqués plus haut, le dispositif mis en place sur la base de la présente proposition de loi devra répondre à un certain nombre de contraintes. Trois éléments semblent indispensables pour que ce système soit réellement efficace :

- il doit être opérationnel non seulement sur les décodeurs « propriétaires » vendus ou loués par les distributeurs (Canal + pour l'analogique, opérateurs de bouquets satellitaires ou câblo-opérateurs pour le numérique) mais également sur les décodeurs « libres », directement achetés dans le commerce, dont il existe une centaine de modèles (uniquement pour le numérique) ;

- il ne doit pas pouvoir être rendu inactif par une re-programmation du décodeur (système « indébrayable ») ;

- il doit garantir que le code d'accès soit en possession d'un adulte, ce qui exclut, d'une part, les dispositifs où le code d'accès par défaut est le 0000, d'autre part, ceux où le code d'accès est créé lors du premier contact du foyer avec un programme pornographique ou de violence gratuite, sans garantie quant à l'âge de la personne présente à ce moment-là devant le téléviseur. A cet égard, l'envoi d'un code spécifique à l'abonné par voie postale, comme cela se pratique pour les codes de carte bancaire, semble être la mesure la plus sûre. Pour Canal + analogique, l'utilisation du numéro d'abonné lors de la formulation d'une demande de décodage des programmes de catégorie V dédié jouera ce rôle. Ce numéro ne figure pas sur le décodeur.

Pour satisfaire au mieux à ces nécessités, le rapporteur sera amené à présenter une modification du dispositif initial de la proposition de loi qui, par une rédaction trop générale, ne permet pas d'assurer une protection totalement satisfaisante.

*

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission a examiné, sur le rapport de M. Yves Bur, la présente proposition de loi au cours de sa séance du 27 novembre 2002.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Pierre-Christophe Baguet a souligné qu'il est urgent de légiférer. La loi du 1er août 2000, qui a réformé la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication a en effet échoué dans la prise en compte de l'évolution rapide de la télévision. Certes, il n'est pas souhaitable que le Parlement intervienne de façon ponctuelle, au gré des circonstances. Mais le CSA doit être désormais doté de moyens d'action nouveaux pour réagir efficacement face aux dérives de la programmation. Il faut rappeler que, pour les chaînes de télévision, la durée d'une autorisation est de dix ans : sur une telle période, des évolutions importantes peuvent intervenir et nécessiter une intervention de l'instance de régulation. Ainsi, la « télé-réalité », présente sur de nombreuses chaînes, n'existe que depuis trois ans. Par ailleurs, le développement de la télévision numérique de terre va probablement entraîner une multiplication de l'offre de programmes nuisibles aux mineurs : il faut que le CSA puisse réagir face à tout cela.

Il est par ailleurs regrettable que la loi du 1er août 2000 n'ai pas permis une plus grande association des téléspectateurs à la politique de régulation, par exemple par une représentation des associations familiales au sein des conseils d'administration des chaînes.

En tout état de cause, il convient de soutenir la volonté de renforcement des pouvoirs du CSA mise en avant par la proposition de loi.

Mme Muriel Marland-Militello s'est opposée au principe de la représentation des organisations familiales dans les conseils d'administration des chaînes. Il faut éviter de donner le sentiment d'un retour à un quelconque « ordre moral », porteur d'une mauvaise image de la droite.

Si l'ensemble de la proposition de loi doit être soutenu, une expression figurant dans le second paragraphe de l'article unique posent cependant question : quel est l'intention des auteurs de la proposition en prévoyant un dispositif pour que les mineurs ne soient pas « normalement susceptibles » de voir ou d'entendre des programmes de violence gratuite ou de pornographie ? Ne serait-il pas plus approprié de dire simplement « susceptibles de voir ou d'entendre » ?

M. Christian Kert a souligné l'aspect sensible du sujet puisqu'il concerne la protection de l'enfance et de la jeunesse. Cependant, une telle proposition de loi ne devrait pas exister, car la loi n'a pas à s'occuper de la programmation des chaînes de télévision. L'action du Parlement se justifie donc essentiellement aujourd'hui par la nécessité de donner un coup d'arrêt à certaines dérives et surtout d'assurer au CSA les moyens de lutter efficacement contre ces écarts. Dans ces conditions, il est impérieux de s'en tenir au champ strictement délimité par la proposition de loi et d'éviter d'ouvrir la boite de Pandore en s'appuyant, par exemple, sur les dispositions de la directive Télévision sans frontières.

Mme Henriette Martinez a salué l'examen d'un texte qui a pour mérite d'ouvrir un débat dont l'objet central doit demeurer la protection de l'enfant. Les questions soulevées par la proposition de loi relèvent d'enjeux culturels, familiaux et sociaux. Il faut, sur ces sujets, résister à la tentation de l'interdiction pure et simple, qui ne pourrait que donner une image désastreuse des travaux du Parlement et chercher tout à la fois, comme le fait la proposition de loi, à protéger l'enfance et à responsabiliser les adultes et les familles.

On entend parler depuis quelque temps de « maltraitance audiovisuelle » : sans contester la réalité du phénomène, il convient néanmoins de rappeler que les enfants sont aujourd'hui victimes de maltraitances encore bien plus nuisibles, qui appellent également une intervention rapide du législateur.

M. Gaëtan Gorce a déploré, au vu de l'importance du sujet abordé, qu'une large réflexion n'ait pas précédé le dépôt de la proposition de loi. L'adoption, dans une relative précipitation, d'une mesure unique n'est en rien à la hauteur des enjeux, même si on ne saurait être en principe opposé au dispositif proposé.

M. René Couanau a fait part de sa frustration de voir traiter en l'espace d'une réunion de commission un sujet qui nécessite une réflexion approfondie. Cependant, l'urgence de la situation réclame que l'alarme soit déclenchée, même si, pour ce faire, on utilise la séance mensuelle réservée par priorité à un ordre du jour fixé par l'Assemblée nationale, ce qui veut dire un texte court examiné rapidement.

Il a ensuite reconnu avoir été réticent devant l'initiative de M. Yves Bur, ses interrogations portant notamment sur la notion de « violence gratuite » et, à l'instar de Mme Muriel Marland-Militello, sur l'expression : « normalement susceptible ». Cependant, l'attitude mesurée du rapporteur ainsi que les amendements qu'il propose sont de nature à apaiser ces inquiétudes.

M. Maxime Gremetz a exprimé sa perplexité par rapport à cette proposition de loi qui traite d'un problème sérieux ne datant pas d'aujourd'hui. Un véritable débat national doit être engagé, sans positions figées, afin de protéger les enfants sans remettre en cause la liberté ni restaurer la censure.

Cette question n'est pas politique mais sociétale et dépasse très largement le problème de la télévision. Comment, par exemple, maîtriser l'Internet ? On manque d'éléments pour se prononcer en l'état. Ainsi le rapport de Mme Blandine Kriegel vient juste d'être remis au ministre de la culture.

Il y a bien une prise de conscience sur ces questions qui méritent une réflexion collective, sans a priori partisan, mais faut-il vraiment légiférer dans ces conditions ?

M. Didier Mathus a souligné la complexité du sujet. Il est difficile de définir la violence et il n'existe aucune étude européenne de l'impact de cette violence sur les jeunes. Par ailleurs, l'accès à la violence et à la pornographie est marginal par le canal télévisuel compte tenu de l'importance du marché de la vidéo et d'internet. Il y a également une réalité économique du secteur qui exerce des pressions fortes : le chiffre d'affaires des films pornographiques à Los Angeles est ainsi supérieur à celui du reste de l'industrie cinématographique.

La violence et la pornographie à la télévision sont plus pernicieuses, et dans un certain sens plus grave, lorsqu'elles s'invitent sur les plateaux de télévision plutôt que dans des films dont l'accès est réservé aux abonnés volontaires à des services cryptés. La proposition de loi aborde donc de manière déformée un problème réel et selon le seul prisme politique de la majorité actuelle qui mène une offensive de retour à l'ordre moral.

S'agissant plus précisément du dispositif proposé par le rapporteur, deux questions peuvent se poser : comment apprécier la violence « excessive », retenue comme critère par un de ses amendements, et comment mettre en place techniquement un double cryptage pour les chaînes analogiques ?

Mme Christine Boutin a rappelé que le sujet avait déjà été étudié par un groupe de travail mis en place par la précédente ministre chargée de la famille, Mme Ségolène Royal, et par le CSA, alertés sur l'urgence de traiter, après un débat approfondi, ce sujet important.

Les problèmes abordés ne sont pas simples ; il ne s'agit pas d'ordre moral mais de protection de l'enfance, objectif qui nécessite la mise en _uvre du principe général de précaution. Il serait toutefois opportun que le gouvernement engage, au-delà de l'examen de cette proposition de loi, un débat d'ensemble sur l'audiovisuel.

M. Dominique Richard s'est félicité que l'examen de cette proposition de loi, sans régler l'intégralité des problèmes, permette d'ouvrir le débat et d'engager une démarche forte sur un sujet sensible. On peut cependant se demander si la responsabilisation des parents aura des effets dans les familles déjà défaillantes. Par ailleurs, on manque d'une définition de la violence. Le rapporteur propose de viser la violence « excessive », mais cela semble, a contrario, justifier une violence légitime. Le rapport Kriegel propose une définition plus philosophique que juridique et on voit donc bien l'extrême difficulté rencontrée pour fixer un seuil d'interdiction.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les éléments d'information suivants :

- La proposition de loi répond à une démarche non partisane, Mme Ségolène Royal s'étant elle-même saisie du sujet lorsqu'elle était ministre, et a par ailleurs incontestablement une portée réduite par rapport à l'ampleur des problèmes posés.

- Conformément aux conclusions du rapport Kriegel, il s'agit de faire confiance aux parents en les responsabilisant et en respectant leur liberté.

- Il est hors de question de remettre en cause l'ensemble du dispositif législatif sur l'audiovisuel datant de 1986, qui repose sur le principe constitutionnel de liberté de la communication audiovisuelle, dont l'exercice est régulé par le CSA.

- Il y a aujourd'hui une situation d'urgence à laquelle il s'agit de répondre en donnant au CSA un outil de régulation supplémentaire. La proposition de loi n'a pas d'autre vocation.

- L'examen de la proposition de loi dans le cadre de l'ordre du jour réservé aux groupes parlementaires ne permettait pas d'évoquer tous les problèmes en raison du temps limité et a justifié l'absence d'auditions publiques par la commission, comme c'est la règle en la matière. Cela n'empêche pas que, sur le sujet des enfants et des médias, l'Assemblée nationale ouvre d'autres espaces de débat.

- Pour caractériser la notion de violence, il est difficile de faire une graduation, mais on peut se référer à la signalétique déjà existante que le ministre de la culture entend renforcer par la mise en place d'une commission d'évaluation. Entre les programmes de « grande violence », qui correspondent à la catégorie IV et ne sont donc diffusés qu'après 22 heures 30, et la violence « gratuite », qui est d'ores et déjà strictement interdite, on peut définir la violence « excessive » comme celle justifiant l'interdiction des programmes aux moins de dix-huit ans. On peut par ailleurs considérer que la pornographie est une violence faite aux femmes.

- La pornographie à la télévision est un fait que l'on peut regretter, mais un fait bien réel, avec près de mille diffusions par mois sur des chaînes cryptées entre minuit et cinq heures du matin. Même si ces chaînes sont uniquement accessibles sur abonnement, une fois le programme enclenché, les enfants peuvent y avoir accès, même par mégarde, alors que la vision de tels programmes ne devrait relever que d'un acte volontaire de la part d'adultes.

- Il n'y aura pas d'exception pour Canal + analogique. Cette chaîne propose déjà le double cryptage depuis le 18 novembre pour ses canaux numériques et elle s'est engagée à mettre en place un dispositif de protection des enfants pour la diffusion analogique qui satisfait aux critères définis par l'amendement qui sera discuté tout à l'heure. Certes, une solution consistant à mettre en place une deuxième clef dans les décodeurs pour accéder aux programmes de catégorie V serait préférable, mais elle semble techniquement difficilement réalisable aujourd'hui. En tout état de cause, cette proposition de loi permet de « mettre la pression » sur les chaînes pour les pousser à innover techniquement et donne des pouvoirs de négociation plus importants au CSA.

M. Didier Mathus a demandé que les interventions sur ce texte ne déforment pas la réalité. Aujourd'hui, tous les films à caractère pornographique sont accessibles uniquement sur abonnement, formule toujours optionnelle, sauf en ce qui concerne Canal +. L'abonnement implique une démarche volontaire des parents. Il existe un problème général de violence, dont la question des films pornographiques ne constitue qu'un élément parmi d'autres.

Mme Françoise de Panafieu a observé que les membres de la commission agissent dans l'urgence, alors même que le problème exige que chacun garde la raison. Les propositions faites en matière de double cryptage, d'horaires obligatoires de diffusion et de renforcement des pouvoirs du CSA sont bonnes. Il serait cependant opportun que l'année prochaine soit l'occasion, pour les parlementaires, d'entendre les membres des différents organes compétents en la matière. Cela pose le problème plus général de la place des parlementaires dans les débats impliquant le ministère de la culture : ils doivent être plus impliqués dans le travail de fond qui s'engage.

M. René Couanau a demandé au rapporteur s'il connaissait l'avis du président du CSA sur l'utilité de la proposition de loi.

M. Maxime Gremetz a relevé une contradiction dans le débat : d'une part, la proposition de loi en appelle à l'esprit de responsabilité et d'autre part, on souhaite utiliser des dispositifs techniques à l'efficacité aléatoire vue la difficulté rencontrée pour définir le degré de violence visé. On peut donc se demander quelle sera l'utilité de la proposition de loi. En tous les cas, discuter d'un tel sujet dans l'urgence n'est pas une solution, compte tenu de la longueur du délai qui avait été donné à Mme Blandine Kriegel pour rédiger son rapport sur la question.

Le président Jean-Michel Dubernard a souhaité savoir comment le Parlement pourrait être associé aux travaux du CSA et du ministère de la culture sur ces questions, sans que ses membres passent nécessairement pour des censeurs.

Le rapporteur a indiqué que lors de sa rencontre avec le président du CSA, celui-ci lui avait confirmé l'utilité d'une telle proposition de loi. S'il était favorable il y a quelques mois à une interdiction totale, il estime désormais que la technique du double cryptage, si elle est fiable, constitue un outil de régulation fort. Le président du CSA a, par ailleurs, annoncé qu'il allait faire tester tous les systèmes de verrouillage par un comité d'experts.

Le président du CSA a également annoncé la création d'une commission d'évaluation de la violence dans les programmes, comme le recommande le rapport Kriegel. Aucune disposition législative n'est nécessaire pour cela. Par contre, il serait souhaitable que les parlementaires y soient associés, d'une façon ou d'une autre.

Quant à la réforme de la commission de classification demandée par le rapport Kriegel, une meilleure prise en compte de la protection des mineurs pourrait sûrement être assurée par l'adoption d'une procédure de vote à la majorité simple, mais cette question outrepasse le champ de la proposition de loi et c'est au ministre de la culture de décider s'il entend ou non donner une suite à cette proposition.

Compte tenu des péripéties de l'examen de la loi du 1er août 2000 modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est indispensable d'être prudent dans l'organisation d'un débat sur le sujet qui nous préoccupe aujourd'hui. Cependant, il faut agir rapidement, et la proposition de loi vise simplement à élaborer un nouvel outil qui sera mis à la disposition du CSA. En outre, si les amendements préparés par M. Patrice Martin-Lalande sont adoptés en séance publique, le CSA sera en mesure de sanctionner pécuniairement les diffuseurs sans attendre le résultat d'éventuelles poursuites judiciaires.

M. Maxime Gremetz a indiqué qu'il ne participerait pas à l'examen des articles, la discussion se justifiant uniquement si la proposition de loi s'inscrit dans un ensemble plus large.

*

La commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article unique

(article 15 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) :

Mise en place d'un système de double contrôle d'accès pour les programmes interdits aux mineurs

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à interdire la diffusion de programmes contenant des scènes de pornographie et de violence gratuite.

Mme Christine Boutin, après avoir rappelé qu'elle travaille depuis de nombreuses années sur le sujet de la violence à la télévision et qu'elle a notamment rédigé un rapport sur ce thème en 1994, a indiqué qu'elle avait rencontré Mme Blandine Kriegel, M. Jean-Jacques Aillagon et M. Dominique Baudis. Les amendements déposés sur la proposition de loi résultent de tout ce travail.

Le premier amendement reprend le dispositif d'une proposition de loi cosignée par plus de cent parlementaires, déposée en juillet dernier à la demande du président du CSA. Il retranscrit à la virgule près le texte de la directive européenne « Télévision sans frontières ». On peut reprocher au texte de la directive de viser la violence car le terme est ambigu et l'assortir d'un curseur, pour déterminer ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas, est extrêmement difficile. Cependant, afin de ne pas être accusée de censure dans un sens ou dans un autre, les termes de la directive ont été conservés. Certes, la commissaire européenne a récemment écrit au président du CSA pour lui dire que la directive avait été correctement transposée en droit français et que l'interdiction des programmes comprenant des images de violence gratuite ou de pornographie n'était pas une obligation pour les Etats membres. Après analyse juridique, cette interprétation a posteriori est apparue comme suffisamment ambiguë pour que le texte de la proposition de loi soit maintenu. Cela semble la meilleure façon de donner au CSA les moyens de mener à bien sa mission de régulation.

A la suite du rapport de Mme Blandine Kriegel, le ministre de la culture - dont la position sur le sujet a d'ailleurs évolué vers une plus grande fermeté depuis la publication de ce rapport - a proposé la mise en place d'une commission d'évaluation des programmes. Mais on sait très bien que les commissions pléthoriques, où le jeu antagoniste des représentants d'intérêts différents empêche souvent les parlementaires de faire entendre leur voix, ne sont ni très efficaces, ni très responsables. Le CSA existe. C'est un organe juridique indépendant, qui doit endosser la responsabilité des interprétations à donner aux notions de violence et de pornographie et c'est une personne morale contre laquelle on peut se retourner.

Le rapporteur a rappelé aux commissaires la nécessité d'inscrire le texte de la proposition de loi dans le prolongement et dans l'esprit des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Cette loi a posé pour principe la liberté de la communication audiovisuelle et a confié au CSA le soin de réguler le secteur. Il n'appartient pas au législateur d'intervenir directement dans le champ de l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle, dont la régulation doit demeurer de la compétence exclusive du CSA. L'amendement proposé par Mme Christine Boutin va à l'encontre de cet objectif, puisqu'il conduit à interdire purement et simplement la diffusion des programmes contenant des scènes de pornographie ou de violence gratuite.

Après avoir émis un avis défavorable quant à l'adoption de cet amendement, le rapporteur a indiqué que les rapports du Collectif inter-associatif enfance-médias (CIEM) et de Mme Blandine Kriegel n'ont pas proposé l'interdiction de tels programmes. La directive européenne est certes ambiguë sur ce point mais il semble qu'elle laisse le soin aux Etats de définir eux-mêmes les programmes susceptibles de nuire gravement aux mineurs et qui doivent, à ce titre, être interdits.

M. Gaëtan Gorce a déclaré que la question de la restriction de la diffusion des programmes pornographiques et violents est extrêmement délicate dans la mesure où elle conduit à remettre en cause la liberté des adultes. De ce fait, l'élément central de la discussion doit rester la protection de l'enfance. Or, cette problématique dépasse largement le strict cadre de la diffusion des programmes pornographiques visé par la proposition de loi. Se pose en effet le problème plus général de la violence à la télévision, aussi bien dans les _uvres de fiction que dans les programmes d'information. La définition d'une charte de bonne conduite, approuvée par l'ensemble des acteurs du secteur audiovisuel, s'avérerait sans doute une méthode plus efficace et pérenne pour endiguer le développement de la violence, sous toutes ses formes, à la télévision.

M. Emmanuel Hamelin a indiqué que la frontière entre la censure et la responsabilisation constitue une ligne de partage floue. Il convient cependant de mener une politique de responsabilisation, à plusieurs niveaux : responsabilisation des parents ; responsabilisation des chaînes de télévision (à cet égard, la simple annonce de la discussion de la proposition de loi a conduit Canal + analogique à proposer la mise en place d'un double cryptage pour la diffusion des programmes à caractère pornographiques) ; responsabilisation du CSA. On retrouve cette dernière préoccupation dans les amendements de M. Patrice Martin-Lalande qui seront examinés en séance publique et qui visent à renforcer les pouvoirs de sanction de l'autorité administrative.

Le président Jean-Michel Dubernard a demandé à M. Patrice Martin-Lalande de préciser la nature de ses amendements.

M. Patrice Martin-Lalande a indiqué que le CSA ne dispose pas, aujourd'hui, de moyens suffisants pour exercer correctement sa mission de contrôle. En effet, en l'état actuel de la législation, des sanctions financières ne peuvent être décidées par le conseil si les manquements qu'ils visent peuvent faire l'objet de sanctions pénales. Or, celles-ci ne peuvent être prises qu'au terme d'un processus judiciaire assez long. Il faut donc permettre au CSA de prononcer rapidement des sanctions pécuniaires dès qu'une infraction à la législation est constatée, quitte à ce que, si la procédure pénale aboutit, leur montant soit déduit de l'amende prononcée par le juge. Il convient également de corriger la procédure de sanction simplifiée qui consiste, pour une chaîne sur laquelle une infraction a été constatée, à diffuser un communiqué. Cette disposition, initialement prévue dans la loi de 1986, avait été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle avait un caractère automatique et portait en cela atteinte aux droits de la défense. Il convient donc de la rétablir, sans pour autant la rendre automatique.

Mme Christine Boutin a ensuite souhaité apporter deux précisions. D'une part, l'amendement a uniquement pour but de permettre au CSA d'exercer l'ensemble de ses prérogatives. D'autre part, la technique du double cryptage n'est possible que pour les chaînes de télévision diffusée par voie numérique, qui touchent un nombre réduit de personnes.

Par ailleurs, l'interdiction n'est pas la censure. La vitesse est limitée sur les routes, pour autant personne ne considère que cette réglementation constitue une censure. Il ne faut pas avoir peur des mots. Sur ce point, la position du ministre de la culture et de la communication est claire et honnête. Le but de cet amendement n'est pas d'interdire la création d'_uvres pornographiques. L'art peut être dans la pornographie. La production création d'_uvres pornographiques. L'art peut être dans la pornographie. La production artistique de la pornographie, s'il y en a, pourra toujours exister. En la matière, il faut se garder de tout amalgame.

M. René Couanau a déclaré que le débat est vicié par une ambiguïté fondamentale qui consiste à envisager en même temps pornographie et violence. Sur ce point, la législation française établie pourtant une limite bien tracée. La définition de la pornographie existe, elle est admise par tous. Ce qui pose problème, c'est la définition de la violence.

Le rapporteur a indiqué qu'il convenait de clarifier le débat. Aucune chaîne française n'est aujourd'hui autorisée à diffuser, en clair, des programmes à caractère pornographique. Mme Christine Boutin présente son amendement comme un moyen de régulation. Il vise, en réalité, à interdire, purement et simplement, la diffusion télévisée de programmes pornographiques.

M. Didier Mathus a déclaré être frappé de voir une partie de la majorité vouloir interdire ce qui n'existe pas. Hormis Canal +, et dans des conditions d'encadrement strict, aucune chaîne de télévision française diffusée par voie analogique n'est autorisée à diffuser de programme à caractère pornographique. Le rapport Kriegel démontre la même ignorance de la législation puisqu'il préconise d'interdire la diffusion des programmes pornographiques entre 6 heures et 22 heures, disposition déjà prévue par la loi. En réalité, le CSA détient l'ensemble des pouvoirs de régulation et il convient de mettre l'autorité administrative devant ses responsabilités.

M. Pierre-Christophe Baguet a indiqué que la confusion du débat vient du fait que certains commissaires confondent érotisme et pornographie. La pornographie se distingue de l'érotisme en ce qu'elle filme la pénétration. De tels programmes ne sont jamais diffusés en clair. Par ailleurs, ce qui distingue l'interdiction de la régulation est que cette dernière privilégie une démarche pédagogique. En cela elle constitue une approche meilleure car ses effets sont plus durables. Il faut mettre les familles devant leurs responsabilités tout en préservant le distinguo entre les chaînes spécialisées et les chaînes généralistes.

Le rapporteur a, une nouvelle fois, rappelé l'interdiction actuelle pour les chaînes diffusées en clair de programmer des programmes de catégorie V, réservés à un public adulte averti et cantonnés à une diffusion entre minuit et cinq heures sur les chaînes cryptées. L'amendement présenté tendant à une interdiction pure et simple, il ne peut dont être retenu.

Mme Christine Boutin a contesté cette interprétation et proposé une rectification limitant la portée de son amendement aux seuls programmes contenant des scènes pornographiques.

La commission a rejeté l'amendement de Mme Christine Boutin ainsi rectifié.

La commission a examiné un amendement présenté par Mme Christine Boutin visant à ce que les programmes de télévision qui contiennent des images pornographiques ou violentes soient cryptés dans leur intégralité.

Après que le rapporteur a indiqué que la décision de classification s'applique au film dans son intégralité et que la notion de « programme », dans la loi de 1986, vise un élément de grille identifié (film, téléfilm, émission de plateau, bande-annonce), la commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement présenté par le rapporteur visant à substituer la notion de « violence excessive » à celle de « violence gratuite ».

Le rapporteur a expliqué que l'amendement met en conformité le texte de la proposition de loi avec les conditions actuelles de présence de la violence dans les programmes de télévision.

Les programmes de « violence gratuite », tout comme les programmes de « violence extrême », sont en effet déjà strictement interdits de diffusion. Cette interdiction figure dans les conventions des chaînes autorisées à diffuser des programmes de catégorie V.

L'amendement propose donc de recentrer le dispositif de la proposition de loi sur les programmes de « violence excessive ». Ceux-ci constitueront un degré de nuisance supplémentaire par rapport aux images de « grande violence » qui relèvent des programmes de catégorie IV selon la signalétique du CSA, et ne peuvent, à ce titre, être diffusés avant 22 heures 30.

Soulignant l'impossibilité de quantifier la violence, M. René Couanau a indiqué que l'appréhension de la violence par le public relève de la sensibilité de chacun et que c'est l'impact de ces images qu'il convient de prendre en compte. Pas plus que le mot « gratuite », le mot « excessive » n'est satisfaisant.

Après que le rapporteur a rappelé que l'appréhension de la violence est par nature subjective et qu'il convient de faire confiance au CSA ainsi qu'à la commission de classification pour en réglementer la diffusion, la commission a rejeté cet amendement.

Le rapporteur a alors signalé que le texte conserverait donc la référence à la violence gratuite, ce qui est incohérent vue l'interdiction dont elle fait l'objet.

Puis la commission a examiné un amendement présenté par le rapporteur, visant à préciser la portée du dispositif de la proposition de loi afin de s'assurer que les programmes de télévision comportant des scènes de violence gratuite ou de pornographie ne puissent être vus ou entendus par des mineurs.

Mme Christine Boutin s'est déclarée favorable à cet amendement tout en relativisant l'efficacité du dispositif proposé en raison de la compétence du jeune public en matière de NTIC et de maniement des appareils électroniques.

La commission a adopté l'amendement.

La commission a ensuite rejeté un amendement présenté par Mme Christine Boutin visant à rendre explicite la volonté du souscripteur à un abonnement télévisuel de recevoir des films pornographiques non cryptés, le rapporteur ayant donné un avis défavorable en soulignant que ce point relève du pouvoir de régulation du CSA.

La commission a examiné un amendement présenté par M. Dominique Richard visant à suspendre la diffusion de programmes violents ou pornographiques jusqu'à la mise en place d'une nouvelle commission de classification des films, l'actuelle commission faisant preuve de trop de laxisme.

Après que le rapporteur a rappelé que la réforme de la commission de classification suggérée par le rapport de Mme Blandine Kriegel nécessite une négociation interministérielle et dépasse le champ de la proposition de loi, la commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement présenté par M. Dominique Richard visant à interdire la commercialisation de chaînes diffusant des programmes à caractère violent ou pornographique au sein d'abonnements groupés.

Le rapporteur a émis un avis défavorable à l'encontre de cet amendement en rappelant le principe de la liberté de communication ainsi que la compétence du CSA pour en assurer la régulation.

M. Didier Mathus a indiqué que seules les déclinaisons numériques de Canal + sont concernées par cet amendement.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement présenté par M. Dominique Richard visant à donner compétence exclusive au CSA pour imposer, en toute indépendance, les procédés de cryptage en liaison avec les progrès technologiques.

Après que le rapporteur a rappelé la mise en place prochaine d'un comité d'experts en matière de cryptage au sein même du CSA, que la loi de 1986 définit déjà comme une autorité administrative indépendante, M. Dominique Richard a retiré son amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Dominique Richard visant à interdire la diffusion de bandes-annonces représentant des images violentes ou pornographiques ou de titres pornographiques aux heures protégées.

Le rapporteur a rappelé que ces bandes-annonces constituent un programme comme les autres et se voient appliquer les règles de diffusion prévues par le CSA. L'amendement est donc inutile. On peut par ailleurs s'interroger sur la notion de « titre pornographique ».

M. René Couanau a observé que les génériques de certains programmes ou les plages séparant les programmes sont fréquemment l'occasion de diffuser les images les plus « attractives » de programmes à caractère violent.

M. Emmanuel Hamelin s'est déclaré favorable à l'amendement, en relevant que la diffusion d'un extrait hors de son contexte revêt une signification particulière. Ces bandes-annonces concernent certes des films programmés à des heures tardives mais sont quant à elles diffusées à des heures de grande écoute. Par ailleurs, la commission de classification n'est compétente que sur les films alors qu'une réflexion s'impose également sur la classification des émissions de société, des téléfilms, des publicités et des bandes-annonces.

Le rapporteur a confirmé son avis défavorable en précisant que les programmes de catégorie V, réservés aux adultes, ne peuvent donner lieu à aucune publicité en dehors de la plage horaire minuit / 5 heures du matin ; quant aux programmes de catégorie IV, interdits aux moins de 16 ans, ils ne peuvent donner lieu à publicité avant 20 heures 30. En outre, il y a eu une réelle amélioration de la signalétique. L'amendement pose la question plus générale de la liberté de production et d'information : il faut être prudent en la matière et laisser au CSA la possibilité de moduler son action auprès des diffuseurs.

La commission a adopté l'amendement.

M. Dominique Richard a retiré un amendement visant à interdire la diffusion de programmes à caractère violent ou pornographique entre 6 heures 30 et 23 heures.

La commission a adopté l'article unique ainsi modifié.

Article additionnel après l'article unique

(article 19 du code de l'industrie cinématographique)

Tutelle conjointe du ministre chargé du cinéma et du ministre chargé de
la famille sur la commission de classification des films

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin tendant à augmenter la durée de diffusion du message d'avertissement au cours du programme.

M. Pierre-Christophe Baguet a souligné que l'amendement est d'autant plus utile qu'il est possible de déroger quatre fois par an à l'interdiction de diffuser en « prime time » des films interdits au moins de 12 ans.

Le rapporteur a convenu de l'insuffisance de la signalétique antérieure, mais celle mise en _uvre à présent, qui prévoit notamment la présence à l'écran, durant tout le programme, d'un pictogramme indiquant l'âge en dessous duquel le programme est déconseillé, est suffisamment explicite. Il convient de ne pas infantiliser les téléspectateurs.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin confiant au seul CSA la compétence pour déterminer la fiabilité des systèmes de cryptage et en accorder l'utilisation.

Mme Christine Boutin a observé que personne ne sait aujourd'hui quelle est l'efficacité du système de cryptage et que le CSA a d'ailleurs lancé une étude sur cette question.

Le rapporteur a rappelé qu'un amendement ayant le même objet a déjà été rejeté par la commission.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à mettre en place une signalétique commune à l'ensemble des chaînes.

Le rapporteur ayant précisé que tel est le cas avec la mise en place des nouveaux pictogrammes, Mme Christine Boutin a retiré l'amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à interdire la création d'une chaîne de télévision dans le but de diffuser des films pornographiques.

Mme Christine Boutin a souligné que la diffusion de la pornographie apparaît comme un simple prétexte pour gagner de l'argent. La protection de l'enfance et de l'adolescence ne doit pas être supplantée par la recherche du profit.

M. Dominique Tian a observé que la diffusion de films pornographiques par des chaînes spécialisées plutôt que par des chaînes généralistes peut avoir effet d'accroître la protection de la jeunesse.

M. Didier Mathus a relevé que la création de telles chaînes relève assurément d'une logique de profit. Cependant, d'autres activités, animées par le même esprit de lucre et source de préjudice pour la jeunesse, ne sont pas pour autant interdites.

Le rapporteur a rappelé son attachement au principe selon lequel la communication audiovisuelle est libre ainsi qu'à la compétence du CSA pour en assurer la régulation. Encore une fois, ce n'est pas à la loi de limiter l'exercice de cette liberté. Par contre, il est clair que la mise en place du double cryptage n'est en aucun cas une invitation à la multiplication des chaînes « adultes » et ne doit pas être l'occasion pour l'ensemble des chaînes de se lancer dans la diffusion de programmes pornographiques.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à interdire la création d'une émission de télévision dans le but de diffuser des films pornographiques.

Après que le rapporteur a donné un avis défavorable, pour les mêmes raisons que sur l'amendement précédent, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné en discussion commune deux amendements similaires de Mmes Henriette Martinez et Christine Boutin visant à mettre en place une tutelle conjointe du ministre de la culture et de celui chargé de la famille sur la commission de classification de films afin d'améliorer la protection des enfants et des adolescents.

Le rapporteur a estimé que la classification n'a pas été assez stricte jusqu'à présent. Le rapport Kriegel propose différentes évolutions pour la commission de classification, comme l'instauration du vote à la majorité simple qui permettrait sûrement de renforcer le niveau des exigences. Mais ce rapport ne propose pas de remettre en cause le fait que la commission soit uniquement rattachée au ministre de la culture. Celui-ci s'est d'ailleurs déclaré défavorable à la co-tutelle avec le ministre de la famille et préconise plutôt un renforcement de l'évaluation du contenu des programmes. Ce débat dépasse assurément le cadre de la présente proposition de loi, qui fournira cependant à ceux qui le souhaitent une occasion utile de l'évoquer. Il n'est donc pas souhaitable d'adopter cet amendement.

Mme Christine Boutin a souligné le paradoxe qu'il y a à s'abriter fréquemment derrière la responsabilité des parents pour refuser de légiférer et le refus opposé à cet amendement qui, en prévoyant l'intervention du ministre de la famille dans la classification des films, renforce la prise en compte de leurs préoccupations.

La commission a adopté l'amendement de Mme Henriette Martinez, celui de Mme Christine Boutin devenant de ce fait sans objet.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à soumettre les programmes de toutes les chaînes de télévision diffusant en France et dans les DOM-TOM, y compris celles dont les statuts relèvent d'un traité international, au contrôle du CSA.

Mme Christine Boutin a évoqué le cas d'ARTE qui ne fait aujourd'hui l'objet d'aucun contrôle de la part du CSA et n'applique donc pas la signalétique définie par lui.

M. Didier Mathus a rappelé que cette absence de compétence du CSA concerne également l'ensemble des chaînes émettant à partir d'un territoire étranger. L'amendement, outre qu'il serait inapplicable, aboutirait à étendre le contrôle du CSA à d'autres chaînes que celle visée, par exemple à La Chaîne Parlementaire.

Le rapporteur a reconnu l'existence d'un problème pour ARTE, tout en relevant que la législation allemande est au moins aussi stricte que la législation française en matière de protection des mineurs contre la diffusion de programmes pornographiques ou violents, même s'il existe des difficultés liées à la différence entre les plages horaires utilisées dans les deux pays. L'amendement pose un réel problème quant à la hiérarchie des normes et est sans aucun doute inconstitutionnel. Il semble préférable de s'en remettre à une démarche plus pragmatique et officieuse de la part du CSA auprès des dirigeants d'ARTE.

A l'issue du débat, Mme Christine Boutin a retiré l'amendement.

Titre de la proposition de loi

La commission a rejeté un amendement du rapporteur substituant dans le titre les mots : « violence excessive » aux mots : « violence gratuite », devenu sans objet, compte tenu de ses votes précédents.

La commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi rédigée.

En conséquence, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l'Assemblée nationale d'adopter la proposition de loi dans le texte ci-après.

*

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE LOI VISANT À PROTÉGER LES MINEURS CONTRE LA DIFFUSION DE PROGRAMMES COMPRENANT DES SCÈNES DE VIOLENCE GRATUITE
OU DE PORNOGRAPHIE

Article 1er

Après le troisième alinéa de l'article 15 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Il veille par ailleurs à ce que des programmes comprenant des scènes de violence gratuite ou de pornographie ne soient pas mis à la disposition du public par un service de radiodiffusion sonore ou de télévision, sauf lorsque seules des personnes majeures sont en mesure de les voir ou de les entendre. Il s'assure pour cela que ces programmes ne sont diffusés que sur des services accessibles sur abonnement et après mise en _uvre, par les éditeurs et distributeurs concernés, d'un dispositif, opérationnel sur l'ensemble des terminaux permettant d'accéder au service, subordonnant systématiquement l'accès à chacun de ces programmes à la composition d'un code personnel.

« Les bandes-annonces représentant des images violentes ou pornographiques, ou titres pornographiques, sont prohibées pendant les heures protégées. »

Article 2

I. - Dans l'article 19 du code de l'industrie cinématographique, après les mots : « chargé du cinéma », sont inséré les mots : « et le ministre chargé de la famille ».

II. - En conséquence, dans l'article 19 du même code, après le mot : « délivrés », il est inséré le mot : « conjointement ».

ANNEXE 1

DIRECTIVE « TÉLÉVISION SANS FRONTIÈRES » DU 3 OCTOBRE 1989 MODIFIÉE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle (89/552/CEE)

CHAPITRE V

Protection des mineurs et ordre public

Article 22

1. Les États membres prennent les mesures appropriées pour que les émissions des organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence ne comportent aucun programme susceptible de nuire gravement à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, notamment des programmes comprenant des scènes de pornographie ou de violence gratuite.

2. Les mesures visées au paragraphe 1 s'étendent également aux autres programmes qui sont susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs, sauf s'il est assuré, par le choix de l'heure de l'émission ou par toute mesure technique, que les mineurs se trouvant dans le champ de diffusion ne sont normalement pas susceptibles de voir ou d'entendre ces émissions.

3. En outre, lorsque de tels programmes sont diffusés en clair, les États membres veillent à ce qu'ils soient précédés d'un avertissement acoustique ou à ce qu'ils soient identifiés par la présence d'un symbole visuel tout au long de leur durée.

ANNEXE 2

CONVENTION EUROPÉENNE SUR LA TÉLÉVISION TRANSFRONTIÈRE

(ouverte à Strasbourg le 5 mai 1989, signée par la France le 12 février 1991,
ratifiée le 21 octobre 1994, entrée en vigueur le 1er mai 1993)

Article 7 - Responsabilités du radiodiffuseur

1. Tous les éléments des services de programmes, par leur présentation et leur contenu, doivent respecter la dignité de la personne humaine et les droits fondamentaux d'autrui.

En particulier, ils ne doivent pas :

a) être contraires aux bonnes moeurs et notamment contenir de pornographie ;

b) mettre en valeur la violence ni être susceptibles d'inciter à la haine raciale.

2. Les éléments des services de programmes qui sont susceptibles de porter préjudice à l'épanouissement physique, psychique et moral des enfants ou des adolescents ne doivent pas être transmis lorsque ces derniers sont susceptibles, en raison de l'horaire de transmission et de réception, de les regarder.

ANNEXE 3

LOI N° 86-1067 DU 30 SEPTEMBRE 1986 MODIFIÉE
relative à la liberté de communication

Article 15

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille à la protection de l'enfance et de l'adolescence et au respect de la dignité de la personne dans les programmes mis à disposition du public par un service de communication audiovisuelle.

Il veille à ce que des programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ne soient pas mis à disposition du public par un service de radiodiffusion sonore et de télévision, sauf lorsqu'il est assuré, par le choix de l'heure de diffusion ou par tout procédé technique approprié, que des mineurs ne sont normalement pas susceptibles de les voir ou de les entendre.

Lorsque des programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs sont mis à disposition du public par des services de télévision, le conseil veille à ce qu'ils soient précédés d'un avertissement au public et qu'ils soient identifiés par la présence d'un symbole visuel tout au long de leur durée.

Il veille en outre à ce qu'aucun programme susceptible de nuire gravement à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ne soit mis à disposition du public par les services de radiodiffusion sonore et de télévision.

Il veille enfin à ce que les programmes des services de radiodiffusion sonore et de télévision ne contiennent aucune incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de race, de sexe, de moeurs, de religion ou de nationalité.

ANNEXE 4

LOI N° 75-1278 DU 30 DÉCEMBRE 1975
portant loi de finances pour 1976

Article 12

« La taxe additionnelle au prix des places perçues postérieurement au 1er janvier 1976 à l'occasion de la projection de films pornographiques ou d'incitation à la violence cesse d'être prise en compte pour le calcul des subventions de forme automatique allouées, au titre du soutien financier de l'industrie cinématographique, aux films et aux salles.

.../...

« La liste des films auxquels s'appliquent les dispositions du présent article est établie par le ministre charge du cinéma après avis de la commission de contrôle des films cinématographiques ; le ministre charge du cinéma communique chaque année au rapporteur spécial du budget de la culture des commissions des finances des deux assemblées et aux rapporteurs pour avis des commissions des affaires culturelles des deux assemblées, avant le dépôt du projet de loi de finances, la liste de films exclus du soutien automatique et sélectif et celle des films admis à ce bénéfice. »

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N° 0401 - Rapport sur la proposition de loi visant à protéger les mineurs contre la diffusion de programmes comprenant des scènes de violence ou de pornographie (M. Yves BUR)

1 In « L'environnement médiatique des jeunes de zéro à dix-huit ans : que transmettons-nous à nos enfants ? », Rapport du Collectif Interassociatif Enfance Médias (CIEM) au ministre délégué à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées, mai 2002 (p. 72)

( Source : service des affaires européennes de l'Assemblée nationale

2 Article 227-24 du code pénal : « Le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d'un tel message, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur.

« Lorsque les infractions prévues au présent article sont soumises par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »

3 Cf. texte en annexe

4 Rapport du précité, p. 41


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