N° 608 - Avis de Mme Michèle Tabarot sur le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (528)



N° 608

(1ère partie)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 février 2003.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 528) pour la confiance dans l'économie numérique,

PAR MME MICHÈLE TABAROT,

Député.

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Voir le numéro :

Assemblée nationale : 612.

Audiovisuel et communication.

INTRODUCTION 5

EXAMEN DES ARTICLES 11

Article premier (art. 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) : Définition de la communication publique en ligne 11

Article additionnel après l'article 1er18

Article 2 (art. 43-4 et 43-7 à 43-14 [nouveaux] de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) : Obligations et responsabilités des prestataires intermédiaires 18

Article 43-7 : Obligation pour les fournisseurs d'accès de proposer des moyens techniques de restriction de l'accès aux services de communication publique en ligne 24

Article 43-8 : Responsabilité civile des hébergeurs 25

Article 43-9 : Responsabilité pénale des hébergeurs 29

Article 43-10 : Exclusion des prestataires techniques de la responsabilité éditoriale au titre de producteurs de services de communication audiovisuelle 30

Article 43-11 : Absence de responsabilité générale des prestataires techniques du fait des contenus stockés ou transmis 31

Article 43-12 : Référé 32

Article 43-13 : Conservation et transmission des données d'identification des auteurs de contenus 34

Article 43-14 : Obligation d'identification des éditeurs de services 36

Article additionnel après l'article 2 38

Article 3 (art. L. 332-1 et L. 335-6 du code la propriété intellectuelle) : Protection de la propriété intellectuelle 38

Article 5 (art. 34-11 [nouveau] du code des postes et télécommunications) : Attribution des noms de domaine 44

Article 7 : Détermination de la loi applicable 53

Article 8 : Clause de sauvegarde 59

Article 13 (art. L. 121-20-4 du code de la consommation) : Formalités requises pour les contrats fournissant une prestation de services d'hébergement, de transport, de restauration et de loisirs conclus par voie électronique 61

Article 14 (art. 1108-1 et 1108-2 et chapitre VII [nouveaux] du code civil) : Régime des actes et contrats souscrits et conservés sous forme électronique 64

Article 1108-1 nouveau du code civil : Validité de l'acte juridique électronique 64

Article 1108-2 nouveau du code civil : Exceptions au principe de validité de l'acte juridique 71

Article 1369-1 nouveau du code civil : Obligations précontractuelles en matière de contrat électronique 73

Article 1369-2 nouveau du code civil : Conclusion du contrat électronique 75

Article 1369-3 nouveau du code civil : Exceptions aux règles de formalisme en matière de contrat électronique 77

Article 15 : Adaptation par ordonnance des formalités requises pour les contrats passés par voie électronique 78

Article 16 (art. L. 134-2 [nouveau] du code de la consommation) : Conservation de la preuve du contrat conclu par voie électronique

Article 24 : Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie

Article 25 (art. 132-76 [nouveau] du code pénal) : Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation d'un moyen de cryptologie pour préparer ou commettre une infraction

Article 26 (art. 11-1 [nouveau] de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 et art. 434-15-2 [nouveau] du code pénal) : Interceptions de sécurité de messages cryptés - sanctions pénales en cas de refus de communiquer leur convention de déchiffrement

Article 27 (titre IV [nouveau] du code de procédure pénale) : Réquisition des moyens de décryptage

Article 30 (art. 56 du code de procédure pénale) : Perquisitions en flagrant délit - Modification des pièces susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation

Articles 31 et 32 (art. 94 et 97 du code de procédure pénale) : Perquisitions dans le cadre d'une instruction - Modification des pièces susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation

Article 33 (art. 323-1 à 323-3 du code pénal) : Aggravation des peines encourues par les auteurs des atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données

Article 34 (art. 323-3-1 [nouveau], 323-4 et 323-7 du code pénal) : Création d'une nouvelle incrimination en matière de droit de l'informatique

AMENDEMENTS ADOPTÉS OU POUR LESQUELS LA COMMISSION A ÉMIS UN AVIS FAVORABLE

AMENDEMENTS POUR LESQUELS LA COMMISSION A ÉMIS UN AVIS DÉFAVORABLE

ANNEXE 1 : Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »)

ANNEXE 2 : Charte de nommage de la zone « .fr » de l'AFNIC (Association française pour le nommage Internet en coopération)

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

MESDAMES, MESSIEURS,

Même si « ce ne sont pas les philosophes avec leurs théories, ni les juristes avec leurs formules, mais les ingénieurs avec leurs inventions qui font le droit et le progrès du droit », comme le soulignait, en 1908, le juriste Albert de Lapradelle, le fait est que l'émergence et l'expansion « fulgurante », pour reprendre les mots de la Ministre de l'Industrie, des nouvelles technologies posent des problèmes juridiques qui ne peuvent plus être laissés sans réponse.

Un projet de loi attendu

Le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique vient combler ces lacunes. Il est d'autant plus attendu après la forte déception née de l'abandon, sous la précédente législature, du projet de loi sur la société de l'information, pourtant déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 14 juin 2001, mais que le précédent gouvernement n'a jamais jugé utile d'inscrire à l'ordre du jour. Hébergeurs, fournisseurs d'accès, éditeurs, consommateurs, commerçants professionnels, etc. : les acteurs du numérique attendent pourtant, aujourd'hui, d'être aussi des « cyber-sujets de droit ».

Sans compter que ce projet de loi vient également combler le retard pris par la France dans la transposition de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique, qui aurait dû être introduite dans notre droit avant le 17 janvier 2002. Ce texte permet par ailleurs à la France d'honorer d'autres engagements communautaires : le projet de loi transpose ainsi l'article 13 de la directive du 12 juillet 2002 sur les données personnelles, qui fait partie d'un ensemble de directives qu'il est convenu d'appeler le « paquet télécoms » et qui devraient faire l'objet d'un projet de loi au cours de la présente année.

Révolution numérique, révolution juridique ?

Il serait néanmoins illusoire de voir dans ce projet de loi « la » loi, définitive et unique, qui règlerait les problèmes, actuels et futurs, posés par l'émergence des nouvelles technologies, voire définirait de nouveaux concepts juridiques, considérés comme la seule réponse à la mesure de cette révolution numérique dont chacun constate les manifestations dans sa vie quotidienne.

Tout d'abord, cette révolution n'a pas fini de produire ses effets, les techniques n'étant d'ailleurs même pas stabilisées, tant s'en faut. La fluidité des supports, l'interaction entre les technologies n'en est qu'à ses débuts. Il faut donc se résoudre à ce que notre droit adopte une approche évolutive, comme l'y invite d'ailleurs la directive sur le commerce électronique.

En outre, prétendre régir dans un texte de loi la « société de l'information » ne conduit qu'à l'inaction : il convient de faire preuve d'une certaine humilité face aux grandes inventions, sous peine d'engager une course contre la montre que, par définition, la loi, dans sa solennité et du fait de la chronologie qui lui est propre, ne pourra remporter. Que n'a-t-on lu, ici et là, dans les années 1990 notamment, sur les bouleversements qu'allaient introduire dans le droit ces technologies ? Autant de professions de foi de ces « gourous de l'internet » déjà obsolètes.

Les mots d'Albert de Lapradelle rappellent fort à propos que la confrontation entre des technologies nouvelles en émergence et un corpus juridique éprouvé, forgé par la sédimentation des textes, n'est pas nouvelle. En France, le débat sur cette question a été tranché de manière convaincante par le rapport établi en 1998 par le Conseil d'État, sur Internet et les réseaux numériques : « contrairement à ce l'on entend parfois, l'ensemble de la législation existante s'applique aux acteurs d'Internet, notamment les règles de protection du consommateur et celles qui garantissent le respect de l'ordre public. Il n'existe pas et il n'est nul besoin d'un droit spécifique de l'Internet et des réseaux : ceux-ci sont des espaces dans lesquels tout type d'activité peut être pratiqué et toutes les règles régissant un domaine particulier (publicité, fiscalité, propriété intellectuelle,...) ont vocation à s'appliquer » (1).

Par conséquent, la révolution numérique n'est pas une révolution juridique. La crainte de voir les cadres traditionnels d'un droit presque inconsciemment conçu pour une société de l'écrit papier, ébranlé par l'avènement d'un espace dématérialisé, se révèle injustifiée. C'est bien davantage à une adaptation pragmatique du droit qu'appellent les nouvelles technologies, sans doute lourde, complexe parfois. Les défis à relever pour adapter nos outils juridiques aux nouvelles technologies de l'information relèvent donc de la technique juridique, et nullement de l'élaboration de nouveaux concepts fondamentaux.

Une approche pragmatique

Tel est le cadre dans lequel s'inscrit le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique aujourd'hui soumis à notre Assemblée, qui constitue le premier texte du plan RESO 2007 présenté par le Premier ministre au mois de novembre 2002 et visant favoriser le développement des technologies de l'information. Comme le souligne l'exposé des motifs, « le présent projet de loi ne tend pas à créer un droit spécifique pour les réseaux et les contenus numériques mais à assurer l'adaptation des règles en vigueur à l'économie numérique ». Ce projet s'inscrit donc avant tout dans une démarche pragmatique, visant à fonder, de manière stable et durable, la confiance de nos concitoyens dans les nouvelles technologies de l'information.

D'où un texte que d'aucuns considéreront peut-être comme un patchwork, mais qui doit surtout être lu comme le support propice à l'épanouissement de l'économie numérique, voire comme une « boîte à outils juridiques » dans laquelle tous les acteurs des services de communication en ligne sont susceptibles de trouver des réponses efficaces et cohérentes aux problèmes qu'ils ont pu rencontrer dans le développement parfois quelque peu anarchique de la société numérique.

Ainsi, les dispositions proposées s'articulent autour de quatre thèmes :

- Le cadre juridique dans lequel s'exerce la liberté de communication via les réseaux numériques (titre Ier).

- Les règles applicables au commerce électronique, et notamment les mécanismes visant à renforcer les mécanismes de protection des consommateurs (titre II).

- La sécurité dans l'économie numérique (titre III).

- Les systèmes satellitaires (titre IV).

Par ailleurs, un dernier titre traite de l'application de la loi dans les collectivités d'outre-mer.

Des dispositions multiples et importantes qui expliquent la saisine pour avis de la commission des lois

La densité et la diversité des mesures proposées, de même que le caractère, par nature, transversal des problèmes posés par l'essor des nouvelles technologies auraient, sans aucun doute, justifié la mise en place d'une commission spéciale. Telle n'a pas été, cependant, la procédure retenue et c'est à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire qu'il revient d'examiner ce projet de loi au fond.

Si le constat qui précède justifie à lui seul la saisine pour avis de la Commission des lois, votre rapporteur souhaiterait néanmoins développer les raisons précises qui sous-tendent cette saisine. Au préalable, il convient de préciser qu'en accord avec la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, un partage entre les deux commissions a été fait, de sorte que chacun des rapporteurs désignés ne traite, dans le rapport établi au nom de sa commission respective, que des articles touchant à la compétence réglementaire de chacune des commissions. Aux termes de cet accord, la Commission des lois se prononcera pour avis exclusivement :

- Dans le titre Ier, sur les articles 1er, 2, 3 et 5 ;

- Dans le titre II, sur les articles 13 à 16 ;

- Dans le titre III, sur les articles 24 à 27 et 30 à 34.

Il a semblé en effet aux deux rapporteurs, en accord avec les présidents de chaque commission, qu'au vu de la complexité du sujet et de la diversité des thèmes abordés, ce partage des tâches ne pourrait que permettre au travail parlementaire de gagner en efficacité et en pertinence, d'autant plus que les délais d'examen de ce texte ont été très resserrés.

Certains des problèmes juridiques posés par les nouvelles technologiques et auxquels ce texte apporte des réponses pragmatiques, équilibrées et efficaces, recouvrent en effet des enjeux non négligeables.

Quatre grandes questions sont traitées dans le titre Ier.

S'agissant tout d'abord de la communication audiovisuelle, compte tenu de l'importance croissante de la communication en ligne, il est nécessaire de définir sans ambiguïté le régime qui lui est applicable. A cette fin, le projet de loi recourt à l'expression « en ligne », qui permet à la loi de respecter un principe de neutralité technologique au regard du support de diffusion et, de ce fait, de ne pas être frappée d'obsolescence à court et moyen terme. Quant à la définition retenue de la communication publique en ligne, elle s'inscrit dans le cadre de la loi du 30 septembre 1986 sur la communication audiovisuelle et est conçue dans notre droit comme un sous-ensemble de la communication audiovisuelle.

Le projet de loi redéfinit par ailleurs les obligations des opérateurs de télécommunications et des prestataires intermédiaires des services de communication publique en ligne, et notamment le dispositif de mise en jeu de la responsabilité civile et pénale des hébergeurs. Notamment, l'article 2 traite de ce thème récurrent, dont l'actualité récente a montré qu'il fallait, en la matière, renoncer aux approches simplistes ou dogmatiques. Votre rapporteur estime que la solution retenue, à savoir l'absence d'obligation générale de surveillance combinée à la mise en jeu limitée de leur responsabilité, est de nature à préserver aussi bien la liberté de communication et les droits attachés à la propriété intellectuelle, que la préservation des intérêts généraux, notamment au regard du respect de la dignité des personnes et de l'ordre et de la sécurité publics.

Dans le domaine de la propriété intellectuelle, c'est d'ailleurs une réelle avancée qui est proposée dans le projet de loi, avec l'extension de la procédure de saisie-contrefaçon aux contenus illicites en ligne.

Enfin, au-delà même de la mise en conformité de notre droit avec les règles communautaires, le texte soumis à l'examen de notre assemblée traite du système d'adressage par noms de domaine de l'internet, actuellement en pleine évolution dans le cadre de l'ICANN (The Internet Corporation for Assigned Names and Numbers).

Le titre II, qui transpose très largement la directive précitée sur le commerce électronique, fixe des conditions juridiques claires qui permettront de réaliser de façon sûre les échanges électroniques dans un cadre transparent. Il s'agit de renforcer la confiance des acteurs et d'assurer les bases d'une croissance économique durable.

Votre commission a fait porter son examen sur la clarification apportée, par l'article 7, aux règles relatives à la loi applicable à l'exercice de l'activité de commerce électronique, tout en posant sans ambiguïté le principe de son libre exercice.

Elle s'est également penchée sur les problèmes complexes introduits dans notre droit civil par l'expansion des nouvelles technologies. Ainsi, les dispositions du code civil relatives aux contrats sont complétées afin que soient prises en compte les spécificités du support électronique. Notamment, une innovation majeure est introduite dans notre droit, en mettant fin à la discrimination qui frappe aujourd'hui l'écrit électronique par rapport à l'écrit papier pour la reconnaissance de la validité des actes juridiques. Ces modifications apportées au code civil dans le domaine contractuel jettent les bases d'« un monde juridique totalement dégagé du papier et tout entier dominé par les communications électroniques, « en temps réel » comme on se plaît à dire aujourd'hui, rythmé par le « double-clics-signature » (2), et constituent à ce titre une évolution majeure.

Le titre III du projet de loi procède enfin à la mise à jour complète de la réglementation touchant la cryptologie, où réside sans doute la clé du développement de l'économie numérique. L'utilisation de moyens de cryptographie efficaces est, en effet, une condition essentielle - voire la condition - à l'instauration d'une véritable confiance du consommateur dans l'outil numérique.

La libéralisation de l'utilisation de la cryptologie a cependant comme corollaire nécessaire la mise en œuvre de véritables moyens de lutte contre l'utilisation à des fins criminelles de cet outil. Sans doute, sur ce point, le projet de loi n'apporte-t-il qu'une réponse limitée. Mais il ouvre un chantier que d'autres projets de loi devraient venir compléter, dans un avenir proche.

Enfin, en matière de lutte contre la cybercriminalité, c'est une procédure pénale plus apte à enrayer le phénomène qui est proposée. Le texte introduit également les mesures nécessaires à la lutte contre les virus.

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Au total, loin de la relation antagonique que beaucoup, dans le mouvement d'enthousiasme suscité par la massification d'une invention dont les effets réels sont encore loin d'avoir été épuisés, entrevoyaient entre les nouvelles technologies et le droit, le projet de loi propose une série d'adaptations ponctuelles qui répondent à des préoccupations concrètes des acteurs, professionnels ou non, du numérique.

Plus encore, le texte proposé à l'examen de notre assemblée fournit une illustration du progrès que représente la diffusion des nouvelles technologies. Notamment, il rappelle que le support numérique peut aussi être un moyen de renforcer le droit, qu'il s'agisse d'utiliser les nouvelles technologies pour lutter contre la grande criminalité, de garantir une meilleure accessibilité au droit ou de simplifier le formalisme juridique.

Votre rapporteur vous propose par conséquent de donner un avis favorable à son adoption, sous réserve de modifications et de précisions ponctuelles visant, notamment, à :

- clarifier les compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel vis-à-vis des services de communication en ligne et à préciser, d'une part, le régime de responsabilité des hébergeurs de sites, d'autre part, le rôle de l'organisme chargé de gérer l'attribution et le retrait des noms de domaine, les conditions de recours contentieux en la matière étant par ailleurs clairement explicitées (titre Ier) ;

- mieux spécifier les conditions d'application du principe de libre exercice de l'activité de commerce électronique, ainsi que les règles de protection du consommateur, et à restreindre le champ des obligations formelles pesant sur les contrats électroniques aux seuls professionnels (titre II) ;

- exclure du bénéfice de l'atténuation de peines les auteurs des infractions les plus graves et, en matière de virus, à restreindre le champ de l'exclusion de la responsabilité pénale au profit des organismes agréés de recherche scientifique et de sécurité des réseaux (titre III).

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Après l'exposé du rapporteur pour avis, M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur pour la commission des Affaires économiques, du territoire et de l'environnement, a rappelé que l'examen du présent projet de loi était contraint, d'une part, par l'obligation de transposer deux directives européennes, la directive du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information et la directive du 12 juillet 2002 sur la protection des données personnelles, et, d'autre part, par la nécessité d'assurer un équilibre entre l'objectif de dynamisation économique du secteur et celui d'encadrement juridique d'Internet.

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La Commission est ensuite passée à l'examen des articles compris dans le champ de la saisine pour avis.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier

(art. 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)

Définition de la communication publique en ligne

Cet article insère dans la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication une définition de la communication publique en ligne, considérée comme un sous-ensemble de la communication audiovisuelle.

· La loi n° 2000-719 du 1er août 2000 portant modification de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée a inséré dans le titre II de cette loi un nouveau chapitre VI relatif aux « services de communication en ligne autres que de correspondance privée ». Malgré un débat important entre les deux assemblées, le législateur a préféré s'en tenir à une définition en creux de ces « services en ligne » et maintenir une certaine ambiguïté quant à leur appartenance à la communication audiovisuelle.

Le rapporteur du texte à l'Assemblée nationale a ainsi précisé que si « il n'y a pas là de divergence fondamentale entre les deux assemblées puisque un service de communication audiovisuelle est, aux termes de l'article 2 de la loi de 1986, un service autre que de correspondance privée [...], les auteurs de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale ont eu la volonté de séparer ″ la communication par réseau ″ de la communication audiovisuelle, en considérant que les services fournis notamment par Internet étaient improprement qualifiés de service de communication audiovisuelle. ». Il a également critiqué la proposition du Sénat de qualifier ces services de « services de communication audiovisuelle fournis sur un réseau électronique », en considérant qu'une définition par le support était source d'équivoque. Au total, il a jugé que « La définition de la ″ communication en réseau ″ reste à trouver dans une future loi qui lui serait spéciale » et que, dans l'attente d'un tel texte, «  Le terme de service en ligne, si vague soit-il, est préférable. » (3)

· L'article premier du présent projet de loi revient sur cette position et consacre l'existence et la spécificité, au sein de la communication audiovisuelle, de la « communication publique en ligne ». Elle se distingue par le fait qu'elle est « transmise sur demande individuelle ».

Arrêter une terminologie et une définition légales pour ce nouveau type de communication n'est pas chose aisée, car celui-ci va à l'encontre de l'organisation actuelle du droit de la communication, comme le soulignait déjà le Conseil d'État dans son rapport « Internet et les réseaux numériques » du 2 juillet 1998 : « Internet s'inscrit avec difficulté dans ce cadre traditionnel qui repose sur la distinction des services et des réseaux et fait largement dépendre le régime des services des supports empruntés. Internet présente en fait la particularité de ne pouvoir être qualifié, au sens strict, ni de réseau ni de service. Si l'on fait parfois appel à la notion de réseau pour qualifier Internet, ce n'est que par référence aux modalités de transport de l'information et non pour désigner un type particulier de support. En pratique les données accessibles via l'Internet transitent par tous types de supports (réseau téléphonique, câble, satellite, etc.) » (4).

L'expression « en ligne », couramment utilisée en France, permet à la loi de respecter un principe de neutralité technologique dans l'approche des différents services et d'éviter une référence au support de diffusion. En pratique, cette terminologie recouvre toutes les communications qui utilisent les réseaux électroniques, c'est à dire l'Internet, mais également les réseaux télématiques, les services de communication sur les téléphones mobiles ou les audiotels.

La terminologie retenue par le droit européen est différente. Ainsi, la directive 2000-31-CE du 8 juin 2000 dite « commerce électronique » transposée par le présent projet de loi, vise, de façon plus générale, les « services de la société de l'information ». De même, les directives du « paquet télécom » adoptées en mars 2002 et qui devraient être prochainement transposées visent de façon cette fois beaucoup plus précise les « communications électroniques ».

Ces appellations n'ont pas été retenues car elles étaient de portée trop large et comprenaient notamment les correspondances privées en ligne. La définition proposée par le présent projet de loi est cependant cohérente avec la définition des services de la société de l'information telle qu'elle existe déjà en droit communautaire (5). Le considérant 17 de la directive « commerce électronique » précitée précise ainsi que « cette définition couvre tout service fourni, normalement contre rémunération, à distance au moyen d'équipement électronique de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage des données, à la demande individuelle d'un destinataire de services ». On retrouve bien la notion de service fourni sur demande individuelle et l'utilisation des réseaux électroniques, caractéristique des services en ligne.

· La définition des services de communication publique en ligne proposée par le présent article est insérée dans la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Le choix a donc été fait de ne pas créer un droit spécifique pour les services en ligne et de les insérer dans la législation existante, sous réserve des modifications ou adaptations nécessaires (comme, par exemple, pour la responsabilité des prestataires techniques). C'est d'ailleurs ce que recommandait le Conseil d'État dans le rapport de 1998 précité, en considérant que : « pour l'essentiel, le cadre juridique des services en ligne existe. Il s'agit de différentes législations sectorielles qui nécessitent quelques adaptations (code de la consommation, code de la propriété intellectuelle, etc.). Au-delà du cadre existant, il apparaît souhaitable de procéder d'une part à la définition des grands principes applicables à toute communication au public et, d'autre part, à la définition d'exigences minimales spécifiques qui s'imposent aux fournisseurs de service en ligne. » (rapport précité, p. 234).

La définition retenue fait de la communication publique en ligne un sous-ensemble de la communication audiovisuelle. Cela signifie qu'elle possède toutes les caractéristiques de la communication audiovisuelle, qui est définie, au deuxième alinéa de l'article 2 de la loi du 30 septembre 1986 comme « toute mise à disposition du public ou de catégories de public, par un procédé de télécommunication, de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée ». Le présent article complète cet article 2 par un nouvel alinéa qui précise que « toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication » constitue une « communication publique en ligne ».

Les similitudes entre la communication audiovisuelle et la communication publique en ligne ont donc été considérées comme prédominantes et justifiant le rattachement de la seconde à la première. En effet, comme la communication audiovisuelle, la communication publique en ligne consiste en :

- la mise à la disposition du public ou de catégories de public,

- par un procédé de télécommunication,

- de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature,

- qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée.

Ce dernier point apparaît comme central dans la décision de rattacher la communication publique en ligne à la communication audiovisuelle. La notion de correspondance privée n'a fait l'objet d'aucune définition législative mais une circulaire du 17 février 1988 a cependant précisé cette notion en disposant que : « La communication audiovisuelle se définit par opposition à la correspondance privée. Il y a correspondance privée lorsque le message est exclusivement destiné à une (ou plusieurs) personnes, physique ou morale, déterminée et individualisée. A l'inverse, il y a communication audiovisuelle lorsque le message est destiné indifféremment au public en général ou à des catégories de public, c'est à dire un ensemble d'individus indifférenciés, sans que son contenu soit fonction de considérations fondées sur la personne » (6).

La distinction essentielle réside donc bien dans la nature même de la communication, qui dans un cas concerne l'ensemble du public, et dans l'autre une ou plusieurs personnes, revêtant ainsi un caractère privé. Il revient à la loi du 30 septembre 1986 d'encadrer l'exercice de la communication au public (communication audiovisuelle et notamment communication en ligne) et au code des postes et télécommunications de garantir la confidentialité des correspondances privées. L'article L. 32-1-II-5° du code des postes et télécommunications rappelle ainsi que l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) et le ministre chargé des télécommunications veillent au respect des dispositions législatives et réglementaires imposées aux fournisseurs de services de télécommunication et notamment du secret des correspondances auquel sont tenus ces opérateurs et les membres de leur personnel.

La communication publique en ligne se signale cependant par une spécificité qui justifie son traitement individualisé au sein de la communication audiovisuelle. En effet, à la différence des services de radio et de télévision, qui relèvent d'une communication du type point/multipoint, la transmission des services de communication publique en ligne est assurée « sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication ». Dans la pratique, cette demande correspond à la connexion à un site Internet, télématique ou à un centre serveur.

Cette distinction se retrouve dans la réglementation communautaire, puisque le considérant 18 de la directive « commerce électronique » précise que : « les services de télévision au sens de la directive 89/552/CEE [directive « télévision sans frontières »] et de radiodiffusion ne sont pas des services de la société de l'information car ils ne sont pas fournis sur demande individuelle. En revanche, les services transmis de point à point, tels que les services de vidéo à la demande ou la fourniture de communications commerciales par courrier électronique constituent des services de la société de l'information. »

Ce rattachement à la communication audiovisuelle pose néanmoins un problème de « frontières » qui n'est pas résolu par le projet de loi.

La notion de communication audiovisuelle tend en effet à mélanger la destination du message (qui vise le public et non des personnes bien individualisées) et le service offert (services audiovisuels de radio ou de télévision). Or, on vient de voir que certains services audiovisuels ne constituent pas des services en ligne et que, au sein des services en ligne, les services audiovisuels ne sont qu'une catégorie, parmi bien d'autres, des services de communication offerts au public. Il y a donc une ambiguïté à faire entrer l'ensemble des services de communication en ligne sous le terme de communication audiovisuelle, ce qu'ont notamment souligné l'ART, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications dans les avis qu'ils ont rendus sur l'avant-projet de loi.

Pour clarifier cette question, le Conseil d'État avait proposé, dans son rapport de 1998, de substituer le concept de « communication au public » à celui de « communication audiovisuelle », afin de bien établir «  l'exact pendant de la notion de correspondance privée qui elle, ne laisse elle rien sous-entendre quant aux modalités de transmission et aux contenus de la communication. » (rapport précité p. 226), puis d'appliquer ensuite aux différents services la réglementation correspondant à leur contenu. Cette solution n'a été retenue par le présent projet de loi qui, en tout état de cause, ne se prononce pas de façon définitive sur la question de la régulation applicable au secteur de la communication publique en ligne. Celle-ci devrait être tranchée lors de la transposition des directives du « paquet télécoms ».

Plusieurs organismes consultés sur l'avant-projet de loi ont également observé que la stricte séparation entre communication au public et correspondance privée induite par le rattachement à la communication audiovisuelle ne permettait pas de recouvrir l'ensemble des services en ligne, qui mélangent souvent ces deux caractéristiques.

En fait, cette distinction fondamentale ne semble pas devoir être remise en cause par l'émergence des services « mixtes », comme par exemple les services de vente à distance. Certes, ceux-ci relèvent à la fois de la communication audiovisuelle (publicité et catalogue en ligne) et de la correspondance privée (prise de commande) mais il est tout à fait possible, dans ce cas, comme le confirme une jurisprudence aujourd'hui établie, de faire une application combinée des deux législations (loi sur la liberté de communication ou autre pour la partie publique et code des postes et télécommunications pour la partie privée).

Ce rattachement au droit de la communication audiovisuelle consacre en tout état de cause le principe de la liberté de la communication publique en ligne. Celle-ci est totale depuis la loi précitée du 1er août 2000 puisque l'article 2 de cette loi a supprimé le 1° de l'article 43 de la loi du 30 septembre 1986, qui soumettait à déclaration préalable les services de communication audiovisuelle autres que les services de radiodiffusion sonore et de télévision, c'est-à-dire les services de communication publique en ligne. Le droit français est ainsi en cohérence avec l'exigence d'absence d'autorisation préalable à la création de tels services, posée par l'article 4 de la directive « commerce électronique ».

L'exercice de cette liberté est néanmoins subordonné aux dispositions du deuxième alinéa de l'article premier de la loi du 30 septembre de 1986, qui définit les conditions d'exercice de la liberté de communication. Il précise que « L'exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d'une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d'autrui, du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion et, d'autre part, par la sauvegarde de l'ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité de développer une industrie nationale de production audiovisuelle. ». Ce rattachement témoigne de ce que, au delà des différences d'utilisation et de contenus, qui justifient des régimes juridiques et des modes de régulation distincts, l'ensemble des services mis à disposition du public doit veiller au respect des mêmes grands principes (pluralisme, protection des mineurs, respect de la dignité de la personne, respect de la vie privée, etc.).

Ce même article premier fait du CSA, autorité indépendante, le garant de l'exercice de cette liberté dans les conditions définies par la loi. Il doit notamment, à ce titre, assurer l'égalité de traitement et veiller à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre les éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle. Sur tous ces sujets, le CSA dispose d'un pouvoir de recommandation aux opérateurs.

Les services de communication publique en ligne étant inclus dans la communication audiovisuelle, ils sont également soumis à ce pouvoir général de régulation du CSA. On peut également considérer, même si la question ne semble pas avoir fait l'objet d'un arbitrage définitif, que les articles 15 et 17 de la loi de 1986 s'appliquent aux services de communication publique en ligne :

- Le premier alinéa de l'article 15 charge le CSA de veiller « à la protection de l'enfance et de l'adolescence et au respect de la dignité de la personne dans les programmes mis à disposition du public par un service de communication audiovisuelle ». Si cet alinéa concerne l'ensemble des services de communication audiovisuelle, on peut néanmoins s'interroger sur la portée que peut avoir la notion de « programmes » pour les services de communication publique en ligne... Les alinéas suivants visant spécifiquement les services de radiodiffusion sonore et de télévision, la question de leur application aux services en ligne ne se pose pas, tout du moins lorsqu'ils ne constituent pas de la radio ou de la télévision !

- L'article 17 dispose que : « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel adresse des recommandations au Gouvernement pour le développement de la concurrence dans les activités de communication audiovisuelle.

« Il est habilité à saisir les autorités administratives ou judiciaires compétentes pour connaître des pratiques restrictives de la concurrence et des concentrations économiques. Ces mêmes autorités peuvent le saisir pour avis. »

Ces compétences du CSA en matière de préservation de la concurrence s'articulent avec les dispositions de l'article 41-4 de cette même loi du 30 septembre 1986, qui organisent sa coopération avec le Conseil de la concurrence. Le paragraphe I. de l'article 2 du présent projet de loi prévoit d'ailleurs l'application de cet article aux services de communication publique en ligne.

Le fait que le projet de loi confie au CSA un pouvoir de régulation du secteur de la communication publique en ligne a été fortement critiqué par certaines autorités consultées (et notamment l'ART et la Commission supérieure du service public des postes et télécommunication) en raison des compétences strictement audiovisuelles de cette autorité.

Le rapporteur pour avis considère quant à lui que l'extension du rôle du CSA en ce qui concerne la régulation des contenus au regard des grands principes d'exercice de la liberté de communication fixés à l'article premier de la loi (dont l'article 15 n'est, d'une certaine façon, que le prolongement) est tout à fait acceptable. Par contre, il s'interroge sur l'opportunité de prévoir son intervention en matière de droit de la concurrence, car les enjeux dans le secteur de la communication en ligne sont objectivement éloignés des questions de pluralisme des courants de pensées et d'opinion sur lesquelles le CSA appuie ses interventions (fort peu nombreuses, au demeurant).

La Commission a examiné un amendement n° 12 de M. Jean Dionis du Séjour retirant la définition de la communication publique en ligne de la loi du 30 septembre 1986 et instituant un Conseil supérieur de la communication publique en ligne, chargé de formuler des recommandations relatives au respect des principes régissant le secteur.

Après avoir précisé qu'il présentait ses amendements à titre personnel, puisqu'ils n'ont pas encore été examinés par la commission des Affaires économiques, M. Jean Dionis du Séjour a souligné que l'insertion de la communication publique en ligne dans le droit de l'audiovisuel était très contestée, tant par le monde de l'entreprise, que par les intermédiaires techniques et les associations de l'Internet. Il a considéré que seules les industries culturelles y étaient favorables, en raison de leur souci de protéger les droits de propriété intellectuelle.

Il a expliqué que son amendement avait pour objet de donner une nouvelle rédaction à cet article afin, tout à la fois, de demeurer fidèle à la directive européenne de juin 2000 sur le commerce électronique - qui ne place pas les services de la société de l'information dans la communication audiovisuelle - et de valoriser les caractéristiques propres de la communication en ligne, comme l'interactivité et l'abondance, qui la distinguent nettement de la communication audiovisuelle classique.

Le rapporteur pour avis s'est opposée à l'amendement en soulignant qu'il bouleversait la logique du projet de loi, lequel confirme le rattachement de la communication publique en ligne à la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, acquis depuis 2000. Il a observé que cet amendement, ainsi que les amendements suivants du rapporteur de la commission des Affaires économiques, revenaient sur l'arbitrage interministériel rendu sur ce texte et sur la volonté, confirmée par l'exposé des motifs du projet, de ne pas créer de droit spécifique pour les services en ligne, comme le préconisait déjà le Conseil d'État en 1998 dans son rapport sur l'Internet et les réseaux numériques.

Le président Pascal Clément s'est interrogé sur l'utilité de créer, comme le prévoit l'amendement, un nouvel organisme exerçant des activités comparables au Conseil supérieur de l'audiovisuel et a observé que, pour transposer une directive, un État membre n'était pas tenu à une fidélité du mot à mot, mais devait en respecter les objectifs, ce qui devrait lui permettre, en l'espèce, de tenir compte des organismes déjà existants.

M. Jean Dionis du Séjour a considéré que le CSA était d'ores et déjà chargé de nombreuses attributions par la loi de 1986 et qu'il n'était pas en mesure d'assurer une activité de régulation à l'égard des millions de sites auxquels donnent accès les réseaux en ligne. Il a rappelé que l'insertion des services de communication publique en ligne dans la loi de 1986 donnerait au CSA un pouvoir de recommandation sur les contenus, ce qui serait inapplicable. Il a donc choisi de proposer la création d'un nouvel organisme qui disposerait de compétences de régulation différentes de celles du CSA, plus proches, par leur nature, des pouvoirs de l'Autorité de régulation des télécommunications (ART). En conclusion, il a jugé que le projet de loi avait été malmené pour faire une place au CSA, et qu'il convenait de revenir sur cette décision.

Le rapporteur pour avis a confirmé son opposition à l'amendement, en observant que la nouvelle structure allait nécessiter de nouveaux moyens qui pourraient tout aussi bien être accordés au CSA. Il a ensuite annoncé qu'il présenterait à l'article 2 un amendement tendant à circonscrire les compétences du CSA au seul respect, par les services de communication en ligne, des principes généraux de la liberté de communication, en supprimant de ce fait les dispositions qui prévoient d'étendre à ce secteur ses compétences spécifiques en matière de concurrence.

La Commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 12 et un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 1er

La Commission a émis un avis défavorable à l'amendement de conséquence (n° 13) de M. Jean Dionis du Séjour.

Article 2

(art. 43-4 et 43-7 à 43-14 [nouveaux] de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication)

Obligations et responsabilités des prestataires intermédiaires

Cet article redéfinit les obligations des prestataires intermédiaires des services de communication publique en ligne et notamment le dispositif de mise en jeu de la responsabilité civile et pénale des hébergeurs. Pour cela, il complète l'article 43-4 et modifie les articles 43-7 à 43-11 de la loi du 30 septembre 1986, tels qu'adoptés dans le cadre de la loi du 1er août 2000 précitée, afin de tirer les conséquences de la sanction du Conseil constitutionnel sur une partie de ces dispositions et d'assurer la transposition des articles 14 et 15 de la directive du 8 juin 2000 précitée « commerce électronique ».

L'examen du texte qui allait devenir la loi du 1er août 2000 a été l'occasion pour les parlementaires de se saisir, pour la première fois et un peu en urgence, de la question de la responsabilité des prestataires techniques à raison des contenus des services de communication en ligne autre que de correspondance privée.

Comme l'a explicité le Conseil d'État dans son rapport de 1998 précité, deux types de services relèvent de l'intermédiation technique :

- le fournisseur d'accès est un prestataire technique qui met son serveur, connecté en permanence aux réseaux électroniques, à la disposition de ses abonnés pour leur permettre de circuler dans le réseau Internet, d'accéder aux sites et d'échanger du courrier électronique,

- les sites sont généralement hébergés sur le serveur informatique d'un prestataire technique appelé fournisseur d'hébergement, qui permet l'accès au site depuis les réseaux ; un hébergeur stocke sur des disques informatiques les données préparées par l'éditeur du site et achemine ces pages vers l'ordinateur de tout utilisateur des réseaux qui en fait la demande par voie électronique.

Pour un certain nombre de juristes, le développement de l'Internet et de la communication en réseau n'aurait pas dû conduire à remettre en cause le principe de non-responsabilité du fait des contenus arrêté depuis de nombreuses années tant pour les opérateurs de télécommunication (auxquels les fournisseurs d'accès peuvent être assimilés), soumis à une obligation de neutralité (7), que pour les centres serveurs télématiques (qui remplissent des fonctions comparables à celles des hébergeurs). Pour ces derniers, la Cour de cassation a notamment affirmé que le responsable d'un centre serveur minitel est un « outil entre les mains du fournisseur de service » et qu'il apparaît impossible « d'envisager que le directeur d'un tel centre - lequel héberge souvent des dizaines de services - assure une responsabilité quelconque quant au contenu des messages. » (8).

Leur responsabilité ne saurait donc être mise en cause dès lors qu'ils s'abstiennent d'intervenir sur les contenus qu'ils stockent ou diffusent et n'ont pas connaissance de leur éventuel caractère illicite.

Le développement exponentiel des services en ligne durant les cinq dernières années et la progression de l'idée que les réseaux sont un espace virtuel et de non-droit, où la délinquance et la criminalité trouvent un espace d'impunité, ont cependant conduit les pouvoirs publics et le juge à revenir sur ce principe d'irresponsabilité pour préciser ses modalités de mise en œuvre dans le monde de l'Internet et son articulation avec le droit commun.

Le rapport du Conseil d'État précité sur Internet et les réseaux électroniques a ainsi considéré qu'il convenait de clarifier la responsabilité des différents acteurs de la communication en réseau, tout en insistant sur la nécessité d'une autorégulation de ces acteurs, rendue inévitable par le fait que l'Internet est un monde sans frontières, dans lequel les réglementations étatiques sont extrêmement difficiles à mettre en œuvre.

En matière de responsabilité civile, il a proposé, pour les fournisseurs d'hébergement, d'« exclure la responsabilité des contenus informatiques qu'ils n'ont pas conçus et qu'ils se limitent à héberger » tout en faisant peser sur eux « un devoir de vigilance sur les contenus qu'il [leur] est proposé de mettre en ligne ». Quant aux fournisseurs d'accès, il conviendrait de limiter, « en cas d'activité exclusivement technique », l'engagement de responsabilité « aux cas de connaissance ou de possibilité de maîtrise de l'information mise en cause » (rapport précité, p. 186).

La démarche en matière pénale est de même inspiration : il s'agirait de limiter la responsabilité éditoriale aux seuls éditeurs de contenus, et « d'appliquer un régime des responsabilité de droit commun pour toutes les autres fonctions exercées sur le réseau, et notamment les fonctions d'intermédiation technique » afin de rendre possible la poursuite des intermédiaires sur le terrain de la complicité (article 121-7 du code pénal) « si [ils] ont agi en connaissance de cause et si [ils] n'ont pas accompli les « diligences normales » pour faire cesser l'infraction » (rapport précité, p. 184 et 185).

Cette clarification des responsabilités devrait s'accompagner d'une meilleure identification des différents acteurs ainsi que d'un renforcement des moyens d'action à la dispositions des autorités de police (comme la fournitures des données de connexion).

De son côté, le juge a progressivement nuancé sa position sur les intermédiaires techniques et construit une définition de leur responsabilité (en particulier pour les fournisseurs d'hébergement) en se fondant sur le droit commun décrit par l'article 1383 du code civil (9). Le fait que les prestataires d'hébergement soient de simples transmetteurs d'informations a donc été remis en cause.

La Cour d'appel de Paris a ainsi condamné, le 10 février 1999, dans l'affaire Estelle Halliday/Valentin Lacambre, l'hébergeur (Altern) d'un site ayant diffusé, sans autorisation, des photos de Mme Estelle Halliday. Elle a donc retenu la responsabilité civile de l'hébergeur à l'égard d'un contenu dont il n'était pas l'auteur, en considérant que, pour s'exonérer de sa responsabilité, l'hébergeur devait veiller à la bonne moralité de ceux qu'il héberge et au respect par ceux-ci des lois, des règlements et des droits des tiers.

L'hébergeur s'est vu, de plus en plus souvent, imposer une « obligation générale de diligence et de prudence ». Il lui appartient, à ce titre, de « prendre les précautions nécessaires pour ne pas léser les droits des tiers » et de mettre en œuvre, à cette fin, des moyens raisonnables d'information (en attirant l'attention des créateurs de sites sur « le nécessaire respect des droits des tiers »), de vigilance (en prenant « les mesures raisonnables qu'un professionnel avisé mettrait en œuvre pour évincer de son serveur les sites dont le caractère illicite est apparent ») et d'action (en procédant, le cas échéant, au retrait des informations en cause ou à la fermeture du site incriminé) (10).

Le comportement de l'intermédiaire technique étant dès lors soumis au crible de l'appréciation du juge, la non-responsabilité des hébergeurs du fait des contenus stockés est devenue largement conditionnelle. Les prestataires techniques ont pu parfois avoir le sentiment de jouer un rôle de victime de substitution, en lieu et place des véritables responsables, à savoir les éditeurs de contenus, le plus souvent protégés par l'anonymat.

· La loi du 1er août 2000

Face à cette incertitude juridique, le législateur a donc décidé d'intervenir, sous la forme d'amendements au projet de loi portant modification de la loi de 1986 relative à la liberté de communication. L'objectif des auteurs des amendements était de clarifier les responsabilités à mettre en œuvre au sein des services de communication en ligne tout en restant dans le droit commun. Cette démarche rejoignait l'orientation majoritairement défendue en France de ne pas construire un droit spécifique pour les services en ligne mais, tout au contraire, de faire en sorte qu'ils s'intègrent de la façon la plus simple possible dans le droit existant.

Après de nombreuses modifications au cours des navettes, le texte définitif adopté le 29 juin 2000 définit, dans un nouveau chapitre VI du titre II de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, un ensemble de dispositions applicables aux « services de communication en ligne autres que de correspondance privée ». Ces dispositions concernent essentiellement les hébergeurs.

L'article 43-8 dispose ainsi que la responsabilité civile ou pénale d'un hébergeur ne peut être engagée que dans deux conditions :

- si, lorsqu'il a été saisi par une autorité judiciaire, il n'a pas agi « promptement pour empêcher l'accès à ce contenu » (deuxième alinéa) ;

- si, lorsqu'il a été saisi par un tiers s'estimant lésé par un contenu hébergé ou estimant que ce contenu est illicite, il n'a pas procédé aux « diligences appropriées » (troisième alinéa).

Un nouvel article 43-9 organise par ailleurs les conditions de conservation et de communication des données de connexion par les fournisseurs d'accès et les hébergeurs, dont les conditions d'application doivent être fixées par décret en Conseil d'État après avis de la CNIL et un article 43-10 organise une obligation d'identification pour les éditeurs de contenus en ligne.

Cette construction juridique, longuement pesée et destinée à clarifier les responsabilités des intermédiaires techniques, va cependant être très largement amputée par une décision du Conseil constitutionnel (11). Celui-ci a en effet déclaré non conforme à la Constitution le troisième alinéa de l'article 43-8 en considérant que les conditions de cette saisine par un tiers n'étaient pas assez précises et que l'article ne déterminait pas de façon suffisamment claire « les caractéristiques du comportement fautif de nature à engager, le cas échéant, la responsabilité des intéressés ».

Après cette censure, le régime de mise en cause de la responsabilité civile ou pénale des hébergeurs s'est donc retrouvé limité à la seule saisine du juge. La loi se contente donc de dire que ces opérateurs doivent déférer aux injonctions de la justice (ce qui est bien le moins !) et ne sont tenus à aucune autre type de vigilance. Un commentateur de cette décision observera à juste titre que « par la grâce du Conseil constitutionnel, ils sont placés au dessus des lois. » (12). Le juge a d'ailleurs interprété les dispositions de la loi du 1er août 2000 comme posant un « principe d'irresponsabilité » des hébergeurs, ce qui a entraîné le rejet d'une action formée contre l'hébergeur d'un site diffusant des messages injurieux et diffamatoires (TGI de Paris, 6 février 2000).

L'adoption définitive de ce texte en juin 2000 a par ailleurs coïncidé avec la publication, le 8 juin 2000, de la directive 2000/31/CE sur le commerce électronique, qui définit notamment les obligations des prestataires intermédiaires des « services de la société de l'information ».

· La directive « commerce électronique »

Ce texte opte clairement pour un principe de responsabilité raisonnée des intermédiaires techniques, relativement proche de la jurisprudence dégagée par le juge français avant l'adoption de la loi du 1er août 2000.

La responsabilité des prestataires est traitée dans la section 4 « responsabilité des intermédiaires ». L'activité d'intermédiaire est caractérisée par le fait que les informations traitées sont fournies, transmises ou stockées par ou à la demande des « destinataires » du service. Ce terme de destinataire, un peu ambigu en langue française, désigne non seulement le « consommateur » de l'information, c'est-à-dire celui qui y a accès, mais également toute personne qui édite cette information, que ce soit à titre professionnel ou personnel. Il s'agit donc des « clients » du prestataire intermédiaire, en amont et en aval de la chaîne d'information.

L'article 15 de la directive vise l'ensemble des prestataires techniques et dispose que ceux-ci ne peuvent se voir imposer une obligation générale de surveillance sur les informations qu'ils stockent ou transmettent, pas plus qu'un devoir général de procéder à une recherche active de faits ou circonstances indiquant des activités illicites. Ce même article permet cependant aux Etats membres de prévoir que les intermédiaires techniques :

- doivent informer les autorités publiques d'activités illicites alléguées qu'exerceraient les « destinataires de leurs services », ou d'informations illicites que ces derniers fourniraient,

- et / ou doivent « communiquer aux autorités compétentes, à leur demande, les informations permettant d'identifier les destinataires de leurs services avec lesquels ils ont conclu un accord d'hébergement ».

La directive distingue trois types d'activités d'intermédiation technique : le simple transport (fourniture d'accès), le « catching » (activité dite « de cache », en français) et l'hébergement. Pour chaque type d'activité, le prestataire doit remplir certaines conditions pour bénéficier de l'exonération de responsabilité prévue (conditions qui varient selon qu'il y a ou non « demande en dommages et intérêts »). S'il ne remplit pas ces conditions, sa responsabilité est appréciée selon la législation nationale.

La loi française, notamment du fait de la décision précitée du Conseil constitutionnel, s'est donc quasiment immédiatement trouvée en contradiction avec le droit communautaire. Le dispositif « survivant » à la censure du Conseil constitutionnel ne répond que de façon très partielle aux exigences de la directive, qui s'engage beaucoup plus avant sur le terrain de la responsabilité des hébergeurs.

· Le présent article revient donc sur les articles 43-7 à 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 tels que prévus par la loi du 1er août 2000 et met en place un régime de responsabilité limitée des intermédiaires techniques, c'est-à-dire une « réponse de raison » fondée sur l'idée que « n'est fautif que celui qui est capable d'intervenir, sait qu'il y a matière à intervenir et ne fait rien » (13).

Le paragraphe I étend la portée des dispositions de l'article 41-4 de la loi du 30 septembre 1986, qui prévoit des modalités spécifiques d'intervention du Conseil de la concurrence et du CSA en matière de pratiques anticoncurrentielles et de concentrations dans le secteur de la communication audiovisuelle, au secteur de la communication publique en ligne.

Cet article, dérogatoire au droit commun de la concurrence, met en place un système de saisine obligatoire du Conseil de la concurrence par le ministre chargé de l'économie sur toute concentration ou tout projet de concentration « concernant directement ou non un éditeur ou un distributeur de services de communication audiovisuelle ». Le Conseil de la concurrence doit alors recueillir l'avis du CSA qui dispose d'un mois pour se prononcer. Le Conseil de la concurrence doit également prendre l'avis du CSA sur les pratiques anticoncurrentielles dont il est saisi dans ce secteur. De son côté, le CSA doit saisir le Conseil de la concurrence de tout fait susceptible de constituer une pratique concurrentielle dans le secteur de la communication audiovisuelle.

Le régime spécifique prévu par cet article découle du fait que le CSA est investi, par l'article premier de la loi du 30 septembre 1986, d'une mission spécifique de garantie du pluralisme. Il a donc été considéré que ses avis pouvaient donner au Conseil de la concurrence, qui fonde ses décisions sur des raisonnements principalement juridiques et économiques, un éclairage complémentaire.

L'application de l'article 41-4 aux services de communication publique en ligne doit être explicitement prévue car cet article est placé dans le chapitre III du titre II de la loi du 30 septembre 1986 et concerne donc les seuls « services de communication audiovisuelle soumis à autorisation », ce qui n'est pas le cas, comme on l'a vu, des services de communication publique en ligne. A contrario, l'application des articles 15 et 17, évoquée à l'article premier, n'avait pas à être mentionnée puisque ces articles concernent l'ensemble des services de communication audiovisuelle sans distinction.

Le rapporteur renouvellera ici ses interrogations exprimées à l'article premier en ce qui concerne l'application de l'article 17 aux services de communication publique en ligne. Il ne lui apparaît pas que le Conseil de la concurrence ait besoin de l'éclairage du CSA pour juger des concentrations et des pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la communication publique en ligne, car celui-ci n'est pas soumis aux mêmes contraintes que le secteur audiovisuel classique, notamment en terme de rareté des moyens de diffusion.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis prévoyant que les compétences spécifiques exercées par le CSA en matière de concurrence ne s'appliquaient pas aux services de communication publique en ligne (amendement n° 31).

Le paragraphe II opère une renumérotation des articles du titre II de la loi du 30 septembre 1986 à la suite de la création d'articles supplémentaires par le paragraphe III du présent article ainsi que par l'article 10. L'article 43-11 actuel devient donc l'article 43-15.

Le paragraphe III propose une réécriture du Chapitre VI du titre II de la loi du 30 septembre 1986 relatif aux « services de communication en ligne autres que de correspondance privée » désormais intitulé, par coordination avec l'article premier du projet de loi : « Dispositions relatives aux services de communication publique en ligne ».

La Commission a examiné l'amendement n° 14 de M. Jean Dionis du Séjour proposant une nouvelle rédaction de cet article, qui retire de la loi du 30 septembre 1986 le dispositif organisant la responsabilité des prestataires techniques et en précise les modalités de mise en œuvre. Son auteur a expliqué que le projet de loi organisait l'irresponsabilité des intermédiaires techniques du fait des contenus qu'ils stockent ou diffusent, sous réserve qu'ils n'aient pas connaissance de leur caractère illicite, ce qui revenait à charger ces professionnels - en fait, les hébergeurs - d'apprécier l'illicéité d'un contenu. Il a précisé que son amendement permettait de mieux identifier les contenus manifestement illicites, pour lesquels une obligation spéciale de vigilance était prévue, et dégageait plus clairement, pour le reste, la responsabilité des hébergeurs.

Le rapporteur pour avis s'est opposée à l'amendement, en observant qu'il s'agissait d'une rédaction globale de l'article 2 qui contenait, certes, des modifications intéressantes, mais rompait une nouvelle fois avec la logique du texte, qui était de maintenir ces dispositions dans la loi de 1986 sur la liberté de communication.

La Commission a émis un avis défavorable à cet amendement.

Article 43-7

Obligation pour les fournisseurs d'accès de proposer des moyens techniques
de restriction de l'accès aux services de communication publique en ligne

La rédaction proposée pour cet article ne diffère que sur la forme de l'actuel article 43-7, adopté dans le cadre de la loi du 1er août 2000 et proposant lui-même une réécriture limitée de l'ancien article 43-1 de la loi de 1986. Cet article, introduit par la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, dispose que « toute personne dont l'activité est d'offrir un service de connexion à un ou plusieurs services de communication audiovisuelle mentionnés au 1° de l'article 43 est tenue de proposer à ses clients un moyen technique leur permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner ».

Il s'agit donc de l'obligation faite aux fournisseurs d'accès de proposer à leurs clients des logiciels de filtrage dits parfois de « contrôle parental » permettant une sélection des services accessibles. Ces logiciels fonctionnent par repérage de mots clés.

En proposant dans la loi du 1er août 2000 une nouvelle rédaction de cet article et son déplacement au sein d'un chapitre nouveau, le législateur a souhaité d'une part mieux marquer la spécificité de la « communication en ligne » par rapport au reste de la communication audiovisuelle et d'autre part tirer les conséquences de l'abrogation du régime de déclaration préalable des services télématiques prévue au 1° de l'article 43 évoqué dans le commentaire de l'article premier.

Le présent projet n'opère que des modifications de forme dans la rédaction de l'article 43-7, afin de la mettre en conformité avec la nouvelle terminologie utilisée par le texte. Il supprime également la précision que les personnes visées peuvent être des personnes « physiques ou morales », celle-ci étant inutile.

L'article vise « les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication publique en ligne » : il s'agit des opérateurs de télécommunications couramment appelés « fournisseurs d'accès », dont l'article 4 du présent projet définit les fonctions de façon plus détaillée dans un nouvel article L. 32-3-3 du code des postes et télécommunications.

L'article ne prévoit pas de sanctions spécifiques en cas de non-respect de ces obligations par les fournisseurs d'accès. Selon les informations communiquées au rapporteur, des peines contraventionnelles qui relèvent du pouvoir réglementaire seraient envisagées.

Article 43-8

Responsabilité civile des hébergeurs

Cet article et le suivant modifient l'actuel article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986 afin de transposer l'article 14 de la directive du 8 juin 2000 relative au commerce électronique. Par souci de clarté, la définition des conditions de mise en œuvre des responsabilités civile et pénale a fait l'objet de deux articles distincts.

Il semble utile de souligner dès à présent quelques différences d'ordre général avec la directive :

- La définition des hébergeurs proposée par l'article, dans la ligne de celle retenue par la loi du 1er août 2000, vise « les personnes qui assurent, même à titre gratuit, le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature accessibles par des services de communication publique en ligne ». Ces termes diffèrent de ceux utilisés par la directive « commerce électronique », puisque son article 14, qui définit la responsabilité des hébergeurs, s'applique « à la fourniture d'un service de la société de l'information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service ».

C'est essentiellement sur les termes « direct et permanent » que portent les interrogations. L'ART observe ainsi, dans son avis sur le projet de loi, qu'il n'est pas certain que la définition proposée « puisse couvrir l'ensemble des prestataires techniques qui interviennent dans la fourniture d'un service de communication public en ligne interactif. La responsabilité d'un exploitant de services interactifs qui n'héberge pas lui-même les contenus échangés ou qui stocke des informations fournies par les utilisateurs finals n'apparaît pas évidente » (14).

On peut considérer que le stockage est qualifié de « permanent » par opposition au stockage « automatique, intermédiaire et temporaire » qui caractérise les activités « de cache », définies par l'article 13 de la directive et l'article 4 du projet de loi. Le terme « direct » est plus ambigu et pourrait effectivement laisser penser que seuls sont concernés les opérateurs qui effectuent directement ce stockage et non ceux qui ont recours à un prestataire pour cette fonction. Il semblerait que ce terme signifie en réalité que ces prestataires traitent directement les informations que leur transmettent les éditeurs, sans intervenir sur leur contenu.

La définition des opérateurs visés par l'article ne fait pas d'exclusive : sont concernés tous les intermédiaires dont l'activité consiste à stocker durablement des données (stockage « permanent »), sans intervenir sur leur contenu (stockage « direct »), de façon à les rendre accessibles au public au moyen d'un service de communication publique en ligne (c'est-à-dire, comme cela a été expliqué à l'article premier, les sites Internet mais également télématiques ou d'audiotel). Peu importe qu'il s'agisse d'informations fournies par des éditeurs professionnels de sites, par des utilisateurs de places de marché ou de sites d'enchères en ligne, ou encore par des contributeurs à un forum. L'article n'entre pas dans ce détail des auteurs et des contenus, de même qu'il n'utilise pas, volontairement, le terme « d'hébergeur », aujourd'hui trop caractérisé.

On notera d'ailleurs que le juge ne s'est pas laissé arrêter par cette définition, déjà présente dans la rédaction actuelle de l'article 43-8, et qu'il a par exemple considéré « qu'au titre du service offert, relatif à la mise en place d'un forum permettant aux utilisateurs d'échanger entre eux des messages, (...) la société Finance Net doit être considérée comme assurant sur ce point le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de messages au sens de l'article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 1er août 2000 » (15).

- La rédaction retenue pour les articles 43-8 et 43-9 décrit un système de mise en œuvre de responsabilité limitée, alors que la directive pose plutôt un principe d'irresponsabilité sous conditions. Cette solution a été retenue par fidélité à la philosophie générale du droit français, qui, en application du principe qui veut que tout ce qui n'est pas interdit est permis, tend à définir dans les textes ce qui est interdit et passible de sanction. L'utilisation par la directive d'une double négation (l'hébergeur n'est pas responsable s'il n'a pas connaissance) a donc été remplacé par une rédaction affirmative (l'hébergeur est responsable s'il a connaissance), qui ne modifie en rien la portée et le périmètre d'application du système de responsabilité défini par la directive.

Pour le reste, le dispositif mis en place par l'article est très fidèle à l'article 14 de la directive. La mise en œuvre de la responsabilité civile découle de l'articulation de critères relatifs à la connaissance que l'hébergeur pouvait avoir de la présence de contenus illicites (c'est-à-dire interdits par la loi) parmi ceux qu'il héberge et à l'action qu'il a menée pour fait cesser l'infraction.

La connaissance : deux modalités de prise de connaissance du caractère illicite d'informations ou d'activités diffusées sont prévues :

. soit l'hébergeur a acquis, par lui-même, la connaissance « effective » de ce caractère illicite ;

. soit « des faits et circonstances » ont fait « apparaître » ce caractère illicite.

L'action : dès qu'il a acquis cette connaissance, l'hébergeur doit « agir avec promptitude pour retirer ces données ou rendre l'accès à celles-ci impossible ».

Les termes utilisés, qui reprennent strictement la directive, n'ont pas une portée juridique immédiatement identifiable et appellent des explications.

En ce qui concerne la connaissance, le terme « effectif » doit être compris comme renvoyant à une connaissance des faits avérée et certaine, constatable par ses propres moyens, par opposition à une connaissance supposée, dont le juge fait parfois usage. L'illicéité des contenus en cause doit donc ici être évidente et apparaître comme manifeste même à un non-professionnel du droit. Dans ce premier cas, l'hébergeur n'aura pas eu besoin de « faits ou de circonstances », comme un article de presse ou le courrier d'un tiers s'estimant lésé, pour réaliser le caractère illégal de certaines des informations qu'il stocke.

Cette notion reste néanmoins forcément imprécise : ce sera aux personnes s'estimant lésées par certaines informations ou activités de prouver que l'hébergeur avait « effectivement connaissance » (comme l'écrit la directive) de leur caractère illicite et qu'il n'a pas agi. La jurisprudence permettra donc progressivement de préciser cette notion, en fonction des situations.

En tout état de cause, cette exigence de connaissance effective s'articulera avec le fait que les hébergeurs ne sont pas soumis à une obligation générale de surveillance des contenus qu'ils stockent (cf. article 43-11, ci après). Ils ne sont donc en aucun cas tenus de faire une recherche a priori des contenus illégaux.

Quant à l'action, la notion de « promptitude », peu courante en droit français, pourrait utilement être remplacée par une expression telle que « dans les meilleurs délais », qui signifie également qu'il convient d'agir sans retard mais présente l'avantage d'être déjà utilisée (comme par exemple par l'article 63-4 du code de procédure pénale, relatif à la garde à vue). C'est pourquoi la Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis tendant à remplacer la notion de « promptitude » - avec laquelle doit intervenir un hébergeur - par la nécessité d'agir « dans les meilleurs délais », expression plus connue du droit français (amendement n° 32). En revanche, elle a émis un avis défavorable à l'amendement n° 4 de M. Patrice Martin-Lalande proposant une nouvelle définition de la fonction d'hébergeur.

Les deux actions prescrites sont celles retenues par la directive : soit l'hébergeur rend l'accès aux données impossibles, soit il les retire définitivement de son serveur, cette deuxième mesure ayant un caractère plus définitif que la première. Selon l'avis de l'ART, ces mesures « impliquent une manipulation sur un serveur qui revient à couper ou filtrer la source d'émission des informations et ne présente pas de difficultés majeures ».

Il convient de noter que cet article n'établit pas un droit de coupure sur notification pour toute personne s'estimant lésée par un contenu : la simple dénonciation par un tiers d'une atteinte à ses droits ne suffira pas, dans tous les cas, à faire « apparaître » l'illicéité d'un contenu. Comme l'a souligné M. Eric Caprioli, avocat au barreau de Nice, lors de son audition par le rapporteur, « si l'information litigieuse notifiée au prestataire n'est manifestement pas illicite, le prestataire n'aura pas le devoir d'intervenir et pourra exiger des preuves supplémentaires de la part du plaignant. En revanche, dès le moment où le plaignant parvient à établir l'illicéité « manifeste » de l'information mise en ligne, le prestataire aura l'obligation d'intervenir pour être en droit de bénéficier de l'exonération de responsabilité. ».

A ce propos, il pourrait être opportun - et rassurant pour les opérateurs - de prévoir que les personnes qui auront abusivement qualifié un contenu d'illicite afin d'en obtenir le retrait par un hébergeur pourraient voir engagée leur responsabilité pénale.

La Commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis prévoyant que les personnes qui auraient abusivement qualifié un contenu d'illicite afin d'en obtenir le retrait engageraient leur responsabilité pénale pour entrave à la liberté d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation, que l'article 431-1 du code pénal punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Le rapporteur pour avis a précisé que cette disposition était destinée à rassurer les hébergeurs en les protégeant contre des tentatives de pression ou d'intimidation pour obtenir la coupure d'un contenu. La Commission a adopté cet amendement (amendement n° 33).

La Commission a par contre émis un avis défavorable à l'amendement n° 5 de M. Patrice Martin-Lalande insérant dans le dispositif une procédure de coupure sur notification, précisant les mentions devant, sous peine de nullité, figurer dans cette notification et étendant l'incrimination de dénonciation calomnieuse aux notifications abusives.

L'article, comme la directive, investissent l'hébergeur d'une mission qui n'est pas simple à exercer, en lui demandant d'apprécier, alors qu'il n'est ni un professionnel du droit ni un magistrat, la licéité des contenus qu'il héberge. On peut cependant considérer qu'« Il y a un certain nombre d'informations dont l'illicéité est évidente pour toute personne de bonne foi : des injures raciales, l'apologie de crime contre l'humanité, des photos à caractère pédophile, pour ne prendre que quelques exemple, sont évidemment illicites et un fournisseur d'hébergement devra donc les censurer immédiatement dès qu'il en aura pris connaissance, sans avoir à attendre qu'une décision de justice intervienne. Mais, dans toute autre hypothèse, et notamment dans celles d'atteintes aux droits patrimoniaux ou aux droits de la personnalité des personnes, le fournisseur d'hébergement n'aura pas à s'ériger en juge. » (16)

C'est donc bien souvent au juge qu'il reviendra de statuer sur l'adéquation du comportement de l'hébergeur à la situation et, en dernier lieu, sur le caractère licite ou illicite des données mises en cause.

Auditionnée par la rapporteure, l'Association des fournisseurs d'accès (AFA) a observé qu'une telle disposition ferait courir le risque aux hébergeurs qui couperont des contenus qu'ils considèrent comme illicites d'être poursuivis pour coupure abusive par les auteurs de ces contenus. Il serait effectivement prudent, après l'adoption de la loi, que les hébergeurs se prémunissent, dans leurs contrats de prestataire, contre toute risque de mise en cause de leur responsabilité du fait de l'application du présent article.

Article 43-9

Responsabilité pénale des hébergeurs

L'article affirme en préambule que les hébergeurs ne peuvent voir leur responsabilité pénale engagée que s'ils se sont abstenus d'agir « en connaissance de cause ». L'article 121-3 du code pénal disposant qu'« il n'y a pas de crime ou de délit sans intention de le commettre », une telle mention ne peut se justifier que par la volonté de bien pointer le « comportement fautif », comme le demandait le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée du 27 juillet 2000. En effet, en matière pénale, il ne peut y avoir d'infraction par abstention ou méconnaissance et la responsabilité ne peut être engagée en qualité d'auteur ou de complice que si la personne a sciemment, par aide et assistance, facilité la préparation ou la commission du délit (article 121-7 du code pénal).

L'article reprend la conjugaison des critères de connaissance et d'action utilisée à l'article précédent pour définir les conditions de mise en cause de la responsabilité pénale des hébergeurs.

La connaissance est ici placée sur le terrain de l'évidence puisque l'article vise les informations et les activités dont l'hébergeur ne peut « ignorer le caractère illicite ». Doit-on voir dans cette rédaction un rappel du principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » ? Il serait plus explicite de prévoir que l'hébergeur doit agir lorsqu'il a connaissance de faits « manifestement » illicites, terme qui fait référence à une notion plus usitée en droit français.

L'action : dès lors qu'il a connaissance de l'existence de contenus illicites, l'hébergeur doit agir « avec promptitude » pour en faire cesser la diffusion. Les remarques formulées à l'article précédent sur le terme de « promptitude » valent bien évidemment ici aussi.

Quant à la formulation de son obligation d'action, on peut s'interroger sur le fait que, contrairement à ce que prévoit la directive, les termes utilisés soient différents de ceux retenus pour la responsabilité civile. Que signifie « faire cesser la diffusion » des données suspectes, si ce n'est les retirer du serveur ou bien rendre leur accès impossible ? La formule retenue a néanmoins été jugée plus parlante et plus concrète.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis effectuant une modification de coordination et précisant que la responsabilité pénale des hébergeurs ne serait engagée que lorsqu'ils n'auront pas agi pour faire cesser la diffusion d'un contenu « manifestement » illicite (amendement n° 34).

Article 43-10

Exclusion des prestataires techniques de la responsabilité éditoriale
au titre de producteurs de services de communication audiovisuelle

Cet article est destiné à clarifier le partage des responsabilités au sein des acteurs de la société de l'information et vient confirmer la distinction entre les auteurs de contenus et les simples intermédiaires techniques qui sous-tend les deux articles précédents.

Il convient de rappeler que, quelque soit le mode de communication utilisé, la responsabilité d'un message illicite ou préjudiciable incombe tout naturellement à celui qui est à l'origine de ce message. En matière de délits de presse, la loi du 29 juillet 1881 a défini un système de responsabilité en cascade qui désigne comme auteurs principaux les directeurs de publication ou éditeurs, puis, à défaut, les auteurs, puis, à défaut, les imprimeurs puis, à défaut, les vendeurs, distributeurs et afficheurs. Cette déclinaison de responsables a été transposée au secteur de l'audiovisuel par la loi n° 85-1317 du 13 décembre 1985, dans les articles 93-2 et 93-3 insérés dans la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.

L'article 93-2 dispose que tout service de communication audiovisuelle doit disposer d'un directeur ou d'un co-directeur de la publication. L'article 93-3 précise que ce directeur ou co-directeur de la publication est responsable en premier lieu sur le plan éditorial. A défaut, les poursuites peuvent porter sur l'auteur puis, à défaut, sur le producteur.

Ces articles ont jusqu'à aujourd'hui été considérés, selon une jurisprudence confirmée, comme applicables aux sites télématiques puis à l'ensemble des services de communication en ligne, que l'on pouvait à juste titre assimiler, du fait de leur insertion dans la loi du 30 septembre 1986, à des services de communication audiovisuelle.

Pourtant, la transposition de ce principe de responsabilité éditoriale en cascade aux services en ligne a été fortement contestée, tant il ne correspond pas à la logique et aux pratiques du monde des réseaux. En effet, la détermination de la chaîne des responsabilités impose de dépasser la première apparence selon laquelle le fournisseur (« producteur ») du contenu serait nécessairement l'auteur de la mise en ligne. On a vu précédemment qu'il n'en est rien dans la plupart des cas.

Pour résoudre ce problème, le Conseil d'État a suggéré « de maintenir la responsabilité éditoriale pour ce qui la concerne, c'est-à-dire la fonction d'édition de contenus mais de retenir un régime de responsabilité de droit commun pour toutes les autres fonctions exercées sur le réseau et notamment les fonctions d'intermédiation technique ou d'ensemblier.

« Concrètement, un fournisseur d'accès ne serait donc a priori responsable que de ses propres contenus, édités par lui-même, mais non de ceux-ci auxquels ils donnent accès ou qu'il héberge ; il ne serait ainsi ni le directeur de la publication des pages personnelles de ses abonnés, ni responsable des propos émis dans les forums. » (rapport précité p. 184).

Le présent article s'inscrit dans cette logique puisqu'il dispose que les intermédiaires techniques (tant les fournisseurs d'accès que les hébergeurs) ne peuvent être considérés comme des « producteurs » au sens de l'article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982. Dès lors qu'ils s'abstiennent de toucher aux contenus qu'ils stockent ou éditent (ce qui est leur caractéristique principale), ces intermédiaires ne peuvent donc plus être inclus dans le système de responsabilité éditoriale en cascade qui ne concerne que les auteurs de contenus.

Par contre, il semble logique et nécessaire de faire porter la responsabilité éditoriale prévue par la loi du 29 juillet 1982 sur les auteurs de contenus mis en ligne, ce qui est désormais facilité par l'obligation d'identification qui pèse sur eux, ainsi que par la conservation des données de connexion imposée aux intermédiaires techniques (cf. article 43-13 et 43-14 ci-après).

La Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis, de coordination rédactionnelle (amendement n° 35).

Article 43-11

Absence de responsabilité générale des prestataires techniques
du fait des contenus stockés ou transmis

Cet article transpose quasiment mot à mot dans la loi française le premier paragraphe de l'article 15 de la directive « commerce électronique », qui pose un principe de non responsabilité générale et a priori des intermédiaires techniques (fournisseurs d'accès et hébergeurs) du fait des contenus qu'ils hébergent ou diffusent.

Ceux-ci ne sont donc pas tenus, de façon générale :

- « de surveiller les informations qu'ils stockent ou transmettent » ;

- « de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites ».

La seule différence entre le présent article et la directive concerne ce dernier point : là où directive évoque l'absence d'obligation de rechercher « activement » des faits ou circonstances révélant des activités illicites, le projet de loi se contente du seul mot « rechercher ». On doit se féliciter de cette variante, car la reprise de la notion de recherche « active » aurait pu laisser penser que, a contrario, les intermédiaires techniques n'étaient pas exonérés de tout devoir de recherche... Mais comment caractériser une recherche « inactive » ?

L'article précise que les intermédiaires « ne sont pas soumis à une obligation générale » : ils ne sont donc pas tenus de surveiller a priori les contenus qu'ils stockent ou diffusent, mais rien ne leur interdit de le faire (ce qui, en pratique, est souvent le cas, par le biais, notamment, de sondages). Ce principe général de non-responsabilité s'articulant avec le régime de responsabilité limitée des hébergeurs posé aux articles 43-8 et 43-9, il ne faudrait cependant pas que certains prestataires, soucieux d'éviter le stockage de contenus illicites, soient considérés comme possédant une « connaissance effective » de l'existence de tels contenus dès lors qu'ils procèderaient, de façon nécessairement partielle et aléatoire, à de tels sondages.

La transposition de cet article de la directive marque néanmoins une rupture avec la jurisprudence précédemment évoquée qui mettait à la charge des hébergeurs une triple obligation générale d'information, de vigilance et d'action.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis, de coordination rédactionnelle (amendement n° 36).

Article 43-12

Référé

Cet article transpose le paragraphe 3 des articles 12 (relatif aux fournisseurs d'accès) et 14 (hébergeurs) de la directive qui disposent que le régime de responsabilité limitée mis en place pour ces intermédiaires techniques « n'affecte pas la possibilité, pour une juridiction ou une autorité administrative, conformément aux systèmes juridiques des Etats membres, d'exiger du prestataire qu'il mette un terme à une violation ou qu'il prévienne une violation ». Pour ce qui concerne les hébergeurs, l'article 14 précise de plus que les Etats membres peuvent « instaurer des procédures régissant le retrait de ces informations ou les actions pour en rendre l'accès impossible. ». Il s'agit donc d'une simple possibilité de réglementation complémentaire offerte aux Etats membres.

Le projet de loi reprend cette possibilité à travers le présent article ainsi que, de façon plus spécifique pour ce qui concerne l'atteinte aux droits de la propriété intellectuelle, dans son article 3.

· L'article s'applique tout à la fois aux fournisseurs d'accès et aux fournisseurs d'hébergement. Ces deux types de prestataires peuvent se voir imposer par l'autorité judiciaire, sous forme d'une ordonnance de référé, « toute mesure propre à faire cesser un dommage occasionné  par le contenu d'un service de communication publique en ligne ». Le juge agira donc sur la demande d'une personne s'estimant lésée par un contenu diffusé par un service de communication publique en ligne.

La procédure du référé permet au juge d'ordonner des mesures d'application immédiate à l'issue d'un débat contradictoire (17). Celui-ci est nécessaire puisque les hébergeurs, même s'ils ne sont pas les auteurs des contenus mis en ligne, se voient désormais imposer par la loi une responsabilité - certes limitée mais néanmoins réelle - du fait de ces contenus, dès lors qu'ils sont clairement illicites. Le débat contradictoire peut donc être utile pour éclairer le juge sur la demande du requérant et les mesures déjà engagées par le prestataire.

Cette disposition, de portée générale, s'articule avec celle figurant à l'article 3 qui prévoit que le président du tribunal de grande instance peut, par ordonnance sur requête, prononcer la suspension par tout moyen du contenu d'un service de communication publique en ligne portant atteinte à un droit d'auteur. Cette procédure est tout aussi rapide qu'un référé mais n'est pas rendue de façon contradictoire. Dans le cas prévu à l'article 3, les prestataires techniques ne seront donc pas obligés d'être parties à la procédure.

· A titre d'exemple, l'article précise que le juge peut ordonner des mesures « visant à cesser de stocker ce contenu » (ce qui ne peut concerner qu'un hébergeur) ou « à défaut, à cesser d'en permettre l'accès » (ce qui concerne les deux types d'intermédiaires). L'article indique ainsi clairement que le juge devra donner sa préférence, dans la mesure du possible, aux actions portant sur le stockage.

Cette priorité s'explique par le fait que les mesures de filtrage imposées aux fournisseurs d'accès sont particulièrement difficiles à mettre en œuvre et d'une efficacité toute relative. Dans son avis précité sur le présent projet de loi, l'ART soulignait en effet que, « dans ce cas, le fournisseur d'accès ne peut couper la source d'émission des informations et doit donc contrôler que ses abonnés ne reçoivent pas d'informations en provenance du site hébergeant le contenu en question. Pour cela, un filtrage du trafic à destination ou en provenance de ses abonnés est nécessaire. Dans le cas des services Internet, le fournisseur d'accès doit bloquer les informations, par exemple sur la base de leur adresse IP ou de domaine. Ce filtrage nécessite une adaptation du réseau du fournisseur d'accès et l'utilisation d'équipements spécifiques de traitement du trafic (...). »

« En outre, l'efficacité de telles mesures prescrites à des fournisseurs d'accès doit être examinée. Dans le cas d'Internet, un contenu hébergé sur un site est accessible par l'intermédiaire de tout fournisseur d'accès. Par conséquent, pour rendre inaccessible à tous les internautes français le contenu mis en cause, la prescription du juge devrait s'appliquer à tous les fournisseurs d'accès à l'Internet. Le juge ne pouvant prendre une décision de portée générale, cette condition paraît difficile à remplir. Les fournisseurs d'accès à l'Internet sont nombreux (150 recensés par l'INSEE en 2000) et difficiles à recenser de manière exhaustive puisqu'il s'agit d'une activité libre (article L. 34-2 du code des postes et télécommunications). La décision du juge pourrait donc porter sur certains fournisseurs d'accès, mais son efficacité resterait très relative ».

Plusieurs expertises judiciaires réalisées notamment dans le cadre de procès contre des sites mettant à disposition des messages, des images, des textes et des objets nazis ou faisant l'apologie du nazisme (affaire Yahoo ! Inc, affaire Front14) ont confirmé ces réticences. Il ressort de ces études qu'aucune des technologies disponibles actuellement ne permet d'empêcher efficacement d'accéder aux contenus prohibés. Les moyens de contournements sont nombreux, tant pour le fournisseur de contenu que pour les internautes eux-mêmes.

Il reste que l'action contre des fournisseurs d'accès doit être prévue par la loi, car elle demeure pour un juge la seule possibilité de faire cesser un dommage lorsque l'hébergeur n'est pas installé sur le territoire français. C'est le sens qu'il convient de donner aux mots « à défaut ».

Dans ce cas, la procédure sera considérablement alourdie - tant pour le plaignant que pour le juge - par la nécessité d'exercer une action auprès de chaque fournisseur d'accès opérant en France. Il serait donc tout à fait souhaitable que les fournisseurs d'accès s'accordent sur un principe d'autorégulation visant à mettre en place un système de coupure générale de l'accès à un contenu dommageable, dès lors qu'une décision de justice aura ordonné cette mesure à un de ces opérateurs.

La Commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 6 de M. Patrice Martin-Lalande supprimant le présent article.

La Commission a ensuite adopté, à l'initiative du rapporteur pour avis, un amendement de coordination rédactionnelle (amendement n° 37).

Article 43-13

Conservation et transmission des données d'identification
des auteurs de contenus

Cet article, qui reprend, sous réserve de quelques modifications rédactionnelles et de coordination, le texte de l'article 43-9 de la loi du 30 septembre 1986 adopté dans la loi du 1er août 2000, dispose que les fournisseurs d'accès et les hébergeurs doivent détenir et conserver les données concourant à l'identification des auteurs du contenu ou de l'un des contenus des services dont ils sont prestataires (premier alinéa).

Il s'agit donc pour un hébergeur de pouvoir repérer non seulement les éditeurs de contenu (ce qui devrait être facilité par l'obligation d'indentification que prévoit l'article 43-14) mais également tout utilisateur qui enrichit le contenu d'un site (par exemple dans les forums ou les sites de petites annonces). Lors de l'examen de la loi du 1er août 2000, le Sénat a tenté de préciser la nature de ces dernières données : il s'agissait notamment des données relatives à l'identité des abonnés au service d'accès ou d'hébergement recueillies lors de l'abonnement et des données de connexion qui sont notamment le « login », les heures de début et de fin de connexion, le numéro IP de l'appelant, les sites visités.

Eu égard aux menaces qu'une telle obligation pouvait faire peser sur les libertés individuelles, le choix a finalement été fait de renvoyer la définition de ces données ainsi que de la durée et des modalités de leur conservation à un décret en Conseil d'État pris après avis de la CNIL. Ce choix est conservé par le présent projet de loi (cinquième alinéa de l'article). On observera que ce décret n'a toujours pas été publié, la définition de ces données ainsi que leur articulation avec les dispositions de l'article 29 de la loi sur la sécurité quotidienne, qui appellent également une application par décret, s'étant manifestement révélée problématique.

On peut noter que l'identification des abonnés est une des mesures préconisées par le Conseil d'État pour faciliter l'action de la police et de la justice dans la poursuite des infractions pénales commises à travers Internet : « Chaque fournisseur d'accès devrait être en mesure de fournir l'identité de ses clients, dans le cadre d'une enquête, aux services de police et de justice. Ceci devrait le conduire à demander l'identité de ses clients lors d'une demande d'abonnement, ce que certains pratiquent déjà » (rapport précité, page 188). Cette obligation interdit cependant, du même coup, les pratiques d'abonnement ou d'hébergement gratuit puisque la vérification en ligne de l'identité s'opère par l'intermédiaire des moyens de paiement. La difficulté des abonnements gratuits n'avait d'ailleurs pas échappé au Conseil d'État qui cependant ne proposait pas à ce sujet de solution d'une grande clarté.

Les trois alinéas suivants consistent en la reprise des dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 43-10. Le deuxième alinéa dispose que les intermédiaires techniques doivent fournir aux éditeurs de services de communication publique en ligne les moyens techniques de satisfaire à leur obligation d'identification (prévue à l'article 43-14). Cette disposition, qui laisse les professionnels relativement perplexes (alors même qu'elle est en vigueur depuis août 2000 !) semble signifier que ces prestataires doivent prévoir un formulaire électronique à remplir par tous les éditeurs de contenus avec lesquels ils contractent et faire en sorte que ce formulaire soit ensuite accessible par tous les « consommateurs » ou utilisateurs du site.

Le troisième alinéa dispose que l'autorité judiciaire peut demander aux prestataires intermédiaires de lui communiquer ces données d'identification. Cette disposition est tout à la fois cohérente avec les préconisations du Conseil d'État évoquées ci-dessus et avec les dispositions de l'article 15 de la directive « commerce électronique » qui prévoit, à la fin de son paragraphe 2., que les Etats membres peuvent instaurer, pour les prestataires de services de la société de l'information, l'obligation « de communiquer aux autorités compétentes, à leur demande, les informations permettant d'identifier les destinataires de leurs services avec lesquels ils ont conclu un accord d'hébergement ».

Enfin, le quatrième alinéa prévoit que les articles 226-17, 226-21 et 226-22 du code pénal (qui assurent la protection et la confidentialité des données nominatives faisant l'objet d'un traitement automatisé) sont applicables au traitement de ces données d'identification.

Les obligations posées par l'article ne sont assorties d'aucune sanction pénale. En 2000, le législateur avait finalement renoncé à prévoir des peines spécifiques pour non-conservation des données et non-communication de ces données à l'autorité judiciaire qui en aurait fait la demande.

Article 43-14

Obligation d'identification des éditeurs de services

Cet article reprend, pour partie en les précisant, les dispositions de l'article 43-10 de la loi du 30 septembre 1986, qui impose aux éditeurs de services en ligne de « tenir à la disposition du public » un certain nombre d'éléments permettant de les identifier et, le cas échéant, de les mettre en cause directement.

L'article s'inscrit dans la démarche consistant à responsabiliser les auteurs de contenus et à dégager la responsabilité, très subsidiaire, des prestataires techniques. Il ne concerne que les « éditeurs » de services de communication publique en ligne et non pas, comme l'article 43-13, toute personne contribuant « à la création du contenu ou de l'un des contenus » d'un tel service.

Le texte du présent article continue à distinguer, dans deux paragraphes distincts, deux degrés d'identification :

· Le paragraphe I prévoit l'identification directe des personnes dont l'activité professionnelle est d'éditer un service en ligne.

Lorsqu'il s'agit de personnes physiques, elles doivent rendre publics sur le service leurs nom, prénom et domicile.

Lorsqu'il s'agit d'une personne morale, celle-ci doit tenir à disposition du public sa dénomination ou sa raison sociale ainsi que son siège social et, s'il s'agit d'entreprises assujetties aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de leur inscription, leur capital social, l'adresse de leur siège social (cette dernière disposition constituant un ajout par rapport à l'actuel article 43-10).

Dans les deux hypothèses, est également requis le nom du directeur ou du co-directeur de la publication et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction. Ces notions doivent être définie par référence à celles figurant à l'article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.

Enfin, le dernier alinéa du paragraphe prévoit que les éditeurs doivent également tenir à la disposition du public les coordonnées (dénomination ou raison sociale et adresse) de leur hébergeur.

· Le paragraphe II prévoit une identification indirecte des éditeurs non professionnels. Cette disposition vise donc toutes les personnes qui créent des sites personnels pendant leurs loisirs et, en tout cas, en marge de leur activité professionnelle.

Pour ces personnes, dont il est présumé qu'elles sont nécessairement des personnes physiques, le texte autorise le maintien de l'anonymat, sous réserve qu'elles communiquent, au public, le nom et les coordonnées de l'hébergeur et à l'hébergeur, les éléments d'identification requis des professionnels (nom, prénom et domicile).

Comme le texte adopté en juin 2000, l'article prévoit que ces informations doivent être « tenues à la disposition du public ». Cette formule est reprise des dispositions de l'article 37 de la loi du 30 septembre 1986 qui définit l'obligation d'identification de toute personne morale titulaire d'une autorisation relative à un service de communication audiovisuelle (18). Elle est cependant relativement floue lorsqu'il s'agit de décrire sa réalisation matérielle par un service en ligne. Est-ce que cela signifie que les éléments d'identification doivent apparaître à l'écran ? Qu'un lien hypertexte doit permettre de les afficher ? Ou bien qu'ils sont communicables sur demande ?

Pour clarifier la portée de l'article sur ce point, le rapporteur pour avis proposera d'en modifier légèrement la rédaction afin de prévoir que les informations relatives à l'identification seront « mises » à la disposition du public, ce qui entraînera nécessairement leur accessibilité directe à partir du service en ligne. La Commission a adopté un amendement en ce sens du rapporteur pour avis (amendement n° 38).

Enfin, on notera, comme à l'article précédent, que ces obligations ne sont assorties d'aucune sanction pénale spécifique. Lors de l'examen de la loi du 1er août 2000, M. Patrick Bloche, auteur de l'amendement introduisant ces dispositions à l'Assemblée nationale, avait fait valoir en nouvelle lecture que « sur les questions d'identification, le régime proposé va dans le sens de la responsabilisation et non de sanctions automatiques » (19).

On observera néanmoins que le dirigeant de droit ou de fait d'un service de communication audiovisuelle autorisé qui n'aurait pas respecté ses obligations d'identification est actuellement puni d'une amende de 6 000 euros (article 76 de la loi de 1986 précitée). Par parallélisme, le rapporteur pour avis proposera donc de prévoir une peine d'amende applicable aux personnes physiques et aux personnes morales.

C'est pourquoi la Commission a adopté, à l'initiative du rapporteur pour avis, un amendement prévoyant des peines d'amende spécifiques pour les personnes physiques ou morales qui n'auraient pas respecté les prescriptions en matière de conservation des données de connexion ou l'obligation d'identification prévues par l'article (amendement n° 39) et enfin un amendement de conséquence (amendement n° 40).

Elle a émis un avis favorable à l'article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 2

La Commission a émis un avis défavorable aux amendements nos 15 et 16 de M. Jean Dionis du Séjour, devenus sans objet du fait du rejet de son amendement n° 14.

Article 3

(art. L. 332-1 et L. 335-6 du code la propriété intellectuelle)


Protection de la propriété intellectuelle

L'article 3 fournit une illustration tout à fait probante de la capacité des problématiques posées par les nouvelles technologies à s'insérer dans les cadres juridiques existants, de même qu'il illustre comment la règle de droit se trouve renforcée par le recours à ces nouveaux supports techniques.

Ainsi, dans la ligne de l'article 2, qui, entre autres sujets, traite, en général, des dommages occasionnés par le contenu d'un service de communication en ligne, l'article 3 règle le cas particulier des dommages occasionnés par les atteintes aux droits d'auteur et aux droits voisins.

Afin de donner tous les moyens utiles aux autorités judiciaires d'intervenir, dans les délais les plus rapides, pour faire cesser ce type de dommage, il étend en effet les pouvoirs du président du tribunal de grande instance, statuant par ordonnance sur requête, selon la procédure spécifique de la saisie-contrefaçon prévue par le code de la propriété intellectuelle (I).

Cet article ouvre par ailleurs au tribunal la faculté d'ordonner, en cas de condamnation pour contrefaçon, la publication du jugement sur un service de communication en ligne (II).

· L'application de la procédure de saisie-contrefaçon aux atteintes portées aux droits d'auteur et droits voisins sur les services de communication en ligne (paragraphe I).

Le paragraphe I confirme le caractère « patchwork » du présent projet de loi, en ce qu'il procède, là encore, à un exercice de transposition d'une directive européenne, portant cette fois sur les droits d'auteur et droits voisins.

En effet, aux termes de l'article 8 de la directive sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information du 22 mai 2001 (20) - d'ailleurs évoquée au considérant 50 de la directive du 8 août 2000, alors qu'elle n'est encore qu'une proposition de directive -, « 1. Les États membres prévoient des sanctions et des voies de recours appropriées contre les atteintes aux droits et obligations prévus par la présente directive et prennent toutes les mesures nécessaires pour en garantir l'application. Ces sanctions sont efficaces, proportionnées et dissuasives. 2. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte que les titulaires de droits dont les intérêts sont lésés par une infraction commise sur son territoire puissent intenter une action en dommages-intérêts et/ou demander qu'une ordonnance sur requête soit rendue ainsi que, le cas échéant, demander la saisie du matériel concerné par l'infraction ainsi que des dispositifs, produits ou composants visés à l'article 6, paragraphe 2. 3. Les États membres veillent à ce que les titulaires de droits puissent demander qu'une ordonnance sur requête soit rendue à l'encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à un droit d'auteur ou à un droit voisin. ».

Le texte de la directive est, on le voit, contraignant s'agissant de la procédure et des bénéficiaires de cette mesure de protection. Il laisse en revanche aux États le soin de déterminer les sanctions, définies dans leur forme, mais non dans leur nature.

Patchwork ou non, il faut se féliciter de la transposition de cette directive : les titulaires de droits (auteurs, éditeurs, producteurs, ...) en matière de propriété intellectuelle sont très attachés au renforcement de la lutte contre la contrefaçon sur les supports numériques. Il est vrai que cet environnement se prête particulièrement au risque de contrefaçon : de fait, la copie numérique d'une œuvre est strictement identique à l'original. Comme le Conseil d'État le notait déjà dans son rapport de 1998 (21), trois grandes difficultés rendent malaisée la lutte contre la contrefaçon sur les réseaux numériques :

- le caractère immatériel et généralement fugace des actes de contrefaçon, qui rend difficile leur constatation et donc la preuve devant le juge ;

- la rapidité de diffusion et de dissémination des copies contrefaisantes qui peut créer, en très peu de temps (quelques heures suffisent), un préjudice considérable au titulaire des droits ;

- le caractère international des réseaux numériques, qui fait souvent obstacle, à l'heure actuelle, à l'exécution à l'étranger des jugements rendus en matière de contrefaçon.

Et de recommander alors une coopération internationale accrue, une plus grande responsabilisation des acteurs et... une amélioration des procédures judiciaires. Tel est précisément l'objet du présent article.

La procédure de saisie-contrefaçon

Le texte de la directive laisse aux États membres une marge de manœuvre relativement étroite dans le choix de l'instrument juridique, en l'occurrence l'ordonnance sur requête. Dans ce cadre contraint, pourquoi, parmi les outils juridiques qui s'offraient à lui, le gouvernement a-t-il choisi de recourir au cadre préexistant de la procédure de saisie-contrefaçon ? Y avait-il d'autres solutions dans notre droit pour satisfaire aux obligations de la directive ?

S'interrogeant en 1998 sur les voies d'amélioration des procédures judiciaires, le Conseil d'État s'était penché sur la procédure de saisie-contrefaçon : soulignant qu'elle n'était pas applicable telle quelle, la saisie d'exemplaires contrefaisants supposant un support matériel qui n'existe bien évidemment pas dans le cas de copies illicites circulant sur les réseaux numériques, il recommandait cependant de conférer au président du tribunal de grande instance la possibilité d'ordonner, à titre conservatoire, le retrait d'un contenu présumé contrefaisant et la coupure de l'accès audit contenu à tout fournisseur d'accès ou d'hébergement, en s'inspirant sur ce point des dispositions de l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle.

Le projet de loi suit cette recommandation, sans toutefois créer un article spécial à cette fin dans le code, mais en se contentant de compléter le cadre défini à l'article précité. D'un strict point de vue de technique juridique, ce choix peut paraître étonnant, pour les raisons, évoquées ci-dessus, qu'avait mises en avant le Conseil d'État en 1998. D'aucuns pourraient également arguer de l'existence d'un article spécifique (article L. 332-4), dans le code de la propriété intellectuelle, sur la saisie-contrefaçon de logiciels ou de bases de données pour plaider en faveur d'un article spécifique sur le numérique.

La pertinence technique et juridique du recours au cadre de la saisie-contrefaçon peut sans doute être discutée : en effet, la question n'est pas tant, s'agissant de services de communication en ligne, de saisir que de supprimer le contenu litigieux. Reste que, dans la rédaction choisie, le droit de la propriété intellectuelle appliqué aux services en ligne, tel qu'élaboré dans le cadre communautaire, trouve dans le droit national un cadre procédural préexistant, somme toute efficace. Par ailleurs, s'agissant des logiciels et bases de données, l'article L. 332-4 ne déroge à l'article L. 332-1 que s'agissant de la compétence reconnue aux commissaires de police et aux juges d'instance, et non quant aux pouvoirs accordés au président du tribunal de grande instance. La jurisprudence considère ainsi que ce dernier détient, s'agissant des logiciels, les pouvoirs très étendus que lui confère le texte général de l'article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle.

En conséquence, choisir la procédure décrite à l'article 332-1 du code de la propriété intellectuelle, c'est se donner des moyens rapides et efficaces de lutter contre ce qui représente aujourd'hui un fléau de la communication en ligne. La saisie-contrefaçon est, en effet, une procédure destinée à se procurer la preuve d'agissements argués de contrefaçon (saisie dite descriptive) ou à les suspendre provisoirement en attendant l'instance au fond (saisie dite réelle), en matière de propriété littéraire, artistique, industrielle. Pour comprendre la valeur ajoutée de cette procédure, il suffit de la comparer à l'autre moyen de preuve qui s'offre à l'auteur victime d'une contrefaçon, à savoir le procès-verbal dressé par un officier de police judiciaire dans le cadre d'une enquête de flagrance, d'une enquête préliminaire ou d'une instruction. L'infraction peut alors également être constatée par huissier, voire par les agents assermentés de sociétés de perception ; en ce cas, cependant, le constat n'a pas force probante authentique. Tout au contraire, la procédure de saisie-contrefaçon présente un double avantage : outre sa fonction probatoire, qui présente un intérêt majeur dans l'instance au fond, notamment pour une action en dommages et intérêts, elle est dotée d'une fonction coercitive qui se traduit par la confiscation des objets contrefaisants.

Aux termes de l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle, elle peut être exécutée selon deux modalités :

- selon la procédure simple, le requérant peut, par simple requête au commissaire de police, exiger que ce dernier - à défaut les juges d'instance - aille pratiquer, aux heures ouvrables, une saisie probatoire ou réelle dans tous les lieux où se trouvent des objets contrefaits ;

- selon la procédure lourde, la saisie intervient par voie d'ordonnance sur requête du président du tribunal de grande instance, qu'il s'agisse de retarder ou de suspendre des présentations ou des exécutions publiques en cours ou déjà annoncées (deuxième alinéa), de faire suspendre toute fabrication en cours tendant à la reproduction illicite d'une œuvre (troisième alinéa), de saisir, quels que soient le jour et l'heure, des exemplaires constituant une reproduction illicite de l'œuvre, déjà fabriqués ou en cours de réalisation, des recettes réalisées et des exemplaires illicitement utilisés (quatrième alinéa), ou enfin de saisir les recettes provenant de toute reproduction, représentation ou diffusion, d'une œuvre de l'esprit, en violation des droits de l'auteur (cinquième alinéa).

À l'évidence, seule cette dernière procédure peut s'appliquer dans le domaine de la violation des droits d'auteur sur support électronique, qui ignore la notion d'heure ou de jour ouvrable. Définie à l'article 493 du nouveau code de procédure civile, l'ordonnance sur requête se présente comme « une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ». Aux termes de l'article 495, l'ordonnance « est exécutoire au seul vu de la minute ». Elle se caractérise ainsi par son efficacité, dans la mesure où elle allie un formalisme limité et une effectivité quasi-immédiate. Or, s'agissant d'œuvres en ligne, le facteur temps joue un rôle considérable, le processus de reproduction, diffusion, etc. d'une œuvre de l'esprit sur un service de communication en ligne pouvant techniquement, en un temps très limité, être répété des dizaines, voire des centaines de fois.

Ce souci d'une intervention rapide et efficace explique la nature très large des pouvoirs reconnus dans ce cas de figure au président du tribunal de grande instance : lui est ainsi reconnue la faculté de suspendre par tout moyen le contenu d'un service de communication publique en ligne portant atteinte à l'un des droits de l'auteur, qui inclut notamment la suppression des données stockées ou, à défaut, la coupure de l'accès. Il est par ailleurs précisé que, dans ce cas précis d'application de la procédure de saisie contrefaçon, le délai de mainlevée prévu à l'article L. 332-2 du code de la propriété intellectuelle, fixé à trente jours dans les cas précités, est réduit à quinze jours. Dans un domaine où les éléments techniques confèrent une grande importance au facteur temps, il importe, en cas d'intervention in fine injustifiée du juge, de rétablir au plus vite les droits de l'hébergeur ou du fournisseur d'accès.

Le recours à ce cadre procédural préexistant de la saisie-contrefaçon représente, par conséquent, le moyen juridique le plus simple de régler la question de l'atteinte aux droits d'auteur ou aux droits voisins sur un service en ligne. Remarquons néanmoins qu'au regard de l'efficacité et de la rapidité, le choix d'autres procédures au sein de notre arsenal juridique était possible, ainsi que l'atteste d'ailleurs la lecture combinée de cet article 3 avec les dispositions modifiées par l'article 2, notamment l'article 43-12 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Dans ce cadre général en effet, qui traite des moyens destinés à « faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication publique en ligne », le projet de loi fait le choix de la procédure du référé, l'ordonnance de référé étant, aux termes de l'article 484 du nouveau code de procédure civile, « une décision provisoire rendue à la demande d'une partie, l'autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n'est pas saisi du principal le pouvoir d'ordonner immédiatement les mesures nécessaires. » D'ailleurs, dans son rapport de 1998, le Conseil d'État ne relevait-il pas que « cette procédure de référé [était] jugée relativement satisfaisante par les titulaires de droits » ?

Si la nécessité d'une procédure rapide justifie aussi bien le recours au référé qu'à l'ordonnance sur requête, en matière de contrefaçon, l'obligation d'obtenir un effet de surprise plaide cependant pour cette dernière, car la saisie, comme il est mentionné ci-dessus, apporte un élément probatoire qui serait susceptible de disparaître dans le cadre d'une procédure contradictoire laissant à la personne mise en cause tout loisir de faire disparaître les éléments de preuve.

Les sanctions

Reste qu'au delà de la procédure, la question se pose, comme dans le cadre général de l'article 2, de savoir si le juge doit viser les hébergeurs ou les fournisseurs d'accès. À cet égard, dans l'avis (22) qu'elle a rendu le 3 décembre 2002 sur le projet de loi, l'Autorité de régulation des télécommunications note avec satisfaction que la nouvelle rédaction du projet d'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle - destinée à y ajouter un alinéa 4° qui donne au président du tribunal de grande instance la possibilité d'ordonner la « suspension, par tout moyen, du contenu d'un service de communication en ligne portant atteinte à l'un des droits de l'auteur, y compris en ordonnant de cesser de stocker ce contenu ou, à défaut, de cesser d'en permettre l'accès » - prend en compte les observations formulées par l'Autorité dans son avis n° 01-423 du 2 mai 2001, rendu à propos du projet de loi sur la société de l'information, déposé par le gouvernement précédent, mais jamais inscrit à l'ordre du jour. Elle se réjouit notamment que la rédaction de ce texte privilégie la coupure de l'hébergement, qui constitue une mesure simple et efficace, par rapport à la coupure de l'accès au contenu litigieux qui, en revanche, risque d'être complexe et d'une efficacité relative, dans la mesure où l'éditeur du contenu peut très facilement transférer celui-ci sur un autre site.

Fallait-il aller jusqu'à exclure des moyens offerts au juge la coupure de l'accès, au motif, déjà évoqué précédemment, au sujet de l'article 43-12 de la loi de 1986, que cette option soulève des problèmes techniques difficilement surmontables par les fournisseurs d'accès ? Telle est l'opinion de l'association des fournisseurs d'accès, auditionnée par le rapporteur pour avis. L'examen de la jurisprudence montre que le juge recourt d'ores et déjà volontiers à cette option : ainsi, dans son ordonnance de référé du 17 septembre 2002, le tribunal de grande instance de Lille a ordonné la suspension de l'accès à un site sur le fondement d'une assignation pour contrefaçon.

Dans la logique qu'ils défendent en matière de responsabilité, les fournisseurs d'accès souhaitent, à ce titre, voir le poids de la sanction porter exclusivement sur les hébergeurs de sites, c'est-à-dire les prestataires techniques mentionnés à l'article 43-8 de la loi de 1986, et sa mise en oeuvre technique se limiter à la coupure de l'hébergement. Une telle solution se heurte toutefois à l'objection majeure déjà évoquée précédemment : dès lors que le site en cause est hébergé dans un État étranger, la seule mesure que peut prendre le juge est la coupure de l'accès, aussi peu satisfaisante que soit cette solution.

Les bénéficiaires de la procédure

Aux termes de l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle, seuls sont recevables à agir « l'auteur d'une oeuvre protégée par le livre Ier » du code, ses ayants droit ou ses ayants cause. Les titulaires de droit voisins définis au livre II du code de la propriété intellectuelle sont, par conséquent, exclus du champ des personnes admises à introduire une requête de saisie-contrefaçon. À ce jour, seule l'action pénale leur est ouverte, au contraire des auteurs qui ont accès aux deux procédures, civile et pénale. Cette dernière, définie par l'article L. 335-1 du code de la propriété intellectuelle, s'applique donc indifféremment aux auteurs ou aux titulaires de droits voisins. Selon cette procédure, les officiers de police - seuls compétents - peuvent procéder, dès la constatation de la diffusion illicite de l'oeuvre, à la saisie des phonogrammes et vidéogrammes reproduits illicitement, des exemplaires et objets fabriqués ou importés illicitement et des matériels spécialement installés en vue de tels agissements. Il est à noter qu'aucune saisie recette n'est prévue pour les titulaires des droits voisins.

Lourde, d'une efficacité limitée dans le cadre de contrefaçons classiques, et par conséquent insuffisante à la mise en œuvre d'une véritable protection des droits voisins, la procédure pénale est totalement inadaptée dans le cadre de violations des droits voisins sur des services de communication en ligne. Or, les titulaires de droits voisins que sont, par exemple, les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes et vidéogrammes ou les entreprises de communication audiovisuelle sont particulièrement touchés par le piratage et la contrefaçon en ligne, ainsi que l'a rappelé à votre rapporteur pour avis M. Marc Guez, directeur général de la société civile de production de phonogrammes, qui chiffre la part de la consommation illicite de musique en France à 10 % de la consommation totale.

Conformément à la directive précitée, le troisième alinéa de l'article 3 étend donc aux titulaires de droits voisins le droit de saisine du président du tribunal de grande instance, dans le cadre de la procédure de saisie-contrefaçon définie par l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle. Cette disposition dépasse par conséquent le seul cadre de la contrefaçon sur les services de la communication en ligne, puisque les trois hypothèses définies aux 1°, 2° et 3° de cet article entrent dans le champ de cette extension. Ainsi, c'est l'ensemble de la procédure de saisie-contrefaçon, dans sa forme « lourde » - ordonnance sur requête auprès du président du tribunal de grande instance - qui est désormais accessible aux titulaires de droits voisins, jusqu'alors obligés de se tourner vers le seul juge pénal. Le projet de loi vient ainsi combler une lacune importante de notre droit de la propriété intellectuelle.

En raison de l'apport conséquent de ce paragraphe I aux droits de la propriété intellectuelle, la Commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 7 présenté par M. Patrice Martin-Lalande, tendant à la suppression de ce paragraphe.

· La publication en ligne du jugement de condamnation pour contrefaçon (paragraphe II).

Dans un second paragraphe, l'article 3 autorise le tribunal prononçant une condamnation pour contrefaçon à ordonner, aux frais du condamné, la publication intégrale ou par extrait du jugement sur les services de communication publique en ligne. Sont ici visées les infractions suivantes :

- l'édition d'écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs (art L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle) ;

- l'exportation et l'importation des ouvrages contrefaits (même article) ;

- la reproduction, la représentation ou la diffusion d'une œuvre de l'esprit y compris les logiciels, en violation des droits de l'auteur (art. 335-3 du code de la propriété intellectuelle) ;

- la fixation, la reproduction, la communication ou la mise à disposition du public ou la télédiffusion, l'importation ou l'exportation d'une prestation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme réalisé sans l'autorisation de l'artiste-interprète, du producteur ou de l'entreprise de communication audiovisuelle (art. L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle).

Cette disposition, directement inspirée de la recommandation du Conseil d'État en 1998, rappelle que, certes soumise à un redoutable défi par les nouvelles technologies, la règle de droit peut aussi en faire le vecteur de sa pleine et entière application.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 3 dans la rédaction du projet de loi.

Article 5

(art. 34-11 [nouveau] du code des postes et télécommunications)


Attribution des noms de domaine

Le nom de domaine est la partie de l'adresse Internet comprise entre le préfixe composé des trois lettres www et le suffixe, par exemple « .fr » ou « .com ». Dans le cadre d'un réseau mondial, la fonction du nom de domaine est essentielle puisqu'elle permet d'identifier un site, donc de le reconnaître voire de le faire connaître, ce qui, en matière de communication et de commerce électroniques, est déterminant. Dès lors on comprendra aisément que les règles d'attributions des noms de domaine soulèvent des enjeux considérables et provoquent de nombreux débats.

En effet, le développement d'Internet aidant, les noms de domaines sont rapidement apparus comme étant une ressource rare - car les appellations, comme les mots, ne sont pas en nombre infini - devant être gérée de façon coopérative et internationale. A cet égard, on rappellera que la progression du nombre des domaines enregistrés a été de près de 30 % en 1999 et 2000, leur nombre total atteignant 30,6 millions en juillet 2002 dont 21,2 millions pour le seul « .com » (23).

Or, la règle qui a longtemps prévalu en cette matière a été celle du « premier arrivé, premier servi » qui signifiait que la première personne ayant déposé un nom de domaine était la seule à pouvoir l'exploiter quand bien même ce nom reprenait celui d'une marque célèbre qui avait omis de le réserver. Ces comportements d'occupation indue, voire de « cybersquattage », ont défrayé la chronique, multiplié les contentieux, et conduit à une réforme de la procédure de nommage sur Internet, certes encore inachevée, mais qu'il n'est pas inutile de rappeler.

· L'attribution des noms de domaine génériques : un régime en évolution permanente

Jusqu'en 1998, l'attribution des noms de domaine génériques (les « .com » ou « .net » etc.) relevait de la compétence exclusive du NSI (network solutions inc.), organisme américain, tandis que l'attribution des noms de domaine géographiques (le « .fr » pour la France) était dévolue à des organismes nationaux. Jusqu'à cette date, la règle du « premier arrivé premier servi » régna en maître et conduisit rapidement à un risque majeur d'éclatement des pratiques de nommage qui constituait une sérieuse invite à l'autorégulation.

C'est ainsi que fut créée, en 1998, l'ICANN (Internet corporation for assigned names and numbers) qui est également un organisme de droit américain succédant au NSI dont les modalités d'organisation diffèrent néanmoins de celles de son prédécesseur. En effet, compte tenu de l'internationalisation du recours à Internet, il n'est plus apparu possible, ni même souhaitable, d'accorder à un seul organisme de droit américain le monopole de l'enregistrement et de l'attribution des noms de domaine génériques. C'est pourquoi, l'ICANN a décidé de privatiser cette mission et de l'ouvrir à la concurrence ce qui a entraîné la multiplication des organismes de nommage, qui doivent, en contrepartie, respecter des règles d'enregistrement identiques.

Corrélativement, des mécanismes de règlement des conflits furent mis en place et aboutirent, le 24 octobre 1999, à l'adoption par l'ICANN des principes directeurs régissant le règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (24). Bien que ce rapport n'ait pas pour objet de les décrire de façon approfondie, on observera que ces principes tendent à garantir le respect des droits des tiers, fixent des règles procédurales précises mais laissent au requérant le choix de l'institution de règlement parmi celles qui sont agréées par l'ICANN. En pratique, le principal organisme de règlement des différends est le « centre d'arbitrage et de médiation » de l'OMPI (office mondial de la propriété intellectuelle), qui a d'ailleurs édicté des « règles supplémentaires de l'OMPI pour l'application des principes directeurs régissant le règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine » (25) qui complètent celles édictées par l'ICANN. Cette activité semble en forte croissance puisque, selon les statistiques de l'OMPI, plus de 3 000 plaintes ont été déposées pendant la période allant du début de l'année 2000 à la fin 2001 et que 2 500 décisions ont été rendues, dont 1 800 ordonnant le transfert du nom de domaine.

Ces mécanismes, qui relèvent de l'arbitrage, constituent l'ébauche de la construction d'un ordre juridique numérique supranational destiné à occuper une place croissante dans l'économie générale de ce secteur, mais ils ne sont pas exclusifs de la saisine des tribunaux nationaux, qui demeurent compétents pour trancher les litiges en matière d'attribution des noms de domaine nationaux.

· L'attribution des noms de domaine nationaux : un régime plus encadré mais au fondement juridique incertain

Ainsi que cela a été évoqué précédemment, l'attribution des domaines renvoyant à une zone géographique déterminée relève d'organismes nationaux délégués à cet effet par l'ICANN et qui sont actuellement au nombre de 239. Ainsi, depuis le premier janvier 1998, c'est l'AFNIC (association française pour le nommage Internet en coopération) qui a la charge de l'attribution et de la gestion du « .fr ». Afin d'élaborer des règles acceptées par l'ensemble des utilisateurs du réseau, l'AFNIC est composée de trois collèges regroupant, respectivement, les prestataires techniques (hébergeurs et fournisseurs d'accès), les membres « utilisateurs », qu'il s'agisse de personnes physiques ou morales et les membres « correspondants » au niveau international.

L'ensemble des règles d'attribution des noms de domaine en « .fr » figure dans la « charte de nommage », reproduite en annexe du rapport, et qui, comme l'indique son préambule, « est un document consensuel dont l'objectif est d'assurer une administration harmonieuse des noms de domaine ». Les principes directeurs qui l'organisent sont les suivants :

- Tout nom de domaine doit être justifié. A cet effet, l'enregistrement d'un nom de domaine par l'AFNIC ne sera effectif qu'après la vérification en ligne des droits du requérant, de son identité et de la validité des documents produits.

- Une arborescence par « sous rubriques » est proposée afin d'organiser l'espace de nommage français et d'éviter les difficultés liées à d'éventuelles homonymies. Ainsi, alors que les entreprises sont directement enregistrées sous le « .fr », les associations, à titre d'exemple, le sont sous la forme de « asso.fr », tandis que les avocats ou le gouvernement le sont respectivement sous la forme du « avocat.fr » et du « gouv.fr ».

- Aucune revente de noms de domaine ne peut avoir lieu. En effet, la charte de l'AFNIC prévoit que l'attribution d'un nom de domaine emporte un « droit d'usage » sur celui-ci et non sa propriété, ce qui signifie, en principe, qu'il est incessible. Cette règle a pour objet d'entraver le profit qui peut être retiré de la réservation d'un nom de domaine dans l'espoir de le revendre à une autre entité. Ce faisant, si le risque de cybersquatting semble davantage limité dans l'espace du « .fr », la charte indique néanmoins qu'une société A peut récupérer le nom de domaine de la société B si celle-ci l'abandonne, ce qui est une façon indirecte d'indiquer la manière d'organiser sa cession.

Le tableau suivant, qui n'est pas exhaustif de l'ensemble des rubriques et sous rubriques du « .fr », témoigne de la volonté - suffisamment singulière en la matière pour être relevée - de l'organisme de nommage français d'imposer au demandeur une justification à l'appui de sa demande. Ce contrôle n'a d'ailleurs nullement entravé le développement du « .fr » puisque le nombre des noms de domaine y appartenant est passé de : 54 994 en 1999 à 84 440 en 2000, puis s'est établi à 143 588 en 2001 pour atteindre près de 163 000 aujourd'hui.

Domaines

Demandeur

Justifications

.fr

Société ou personne morale dotée d'un numéro SIREN/SIRET (hors domaines sectoriels, conventions de nommage ou autres zones publiques).

Un extrait de K bis ou un identifiant au répertoire INSEE.

Entité titulaire d'une marque dûment enregistrée.

Certificat définitif INPI, OHMI ou OMPI (sous réserve que la France figure parmi les pays concernés par le dépôt).

Tout organisme non identifié auprès de l'INSEE créé par loi ou décret, ou répertorié en syndicat professionnel.

- Loi, décret ou,

- Copie d'immatriculation délivrée par la mairie ou la préfecture.

.asso.fr

Association

- Copie de la parution au JO ou récépissé de déclaration à la préfecture ou,

- Copie de l'identifiant INSEE.

.nom.fr

.nom.fr

Personne physique résidant en France.

Le nom de domaine en « .nom.fr » ne peut être accordé qu'à une personne majeure et capable.

- Copie certifiée conforme de la carte nationale d'identité, ou du permis de conduire, ou d'une carte de séjour, et

- Un justificatif de domicile de moins de 3 mois (facture EDF-GDF, téléphone).

Personne physique de nationalité française résidant à l'étranger.

Le nom de domaine « .nom.fr » ne peut être accordé qu'à une personne majeure et capable.

- Copie certifiée conforme de la carte nationale d'identité ou du permis de conduire,

- Un justificatif de domicile de moins de 3 mois du pays de résidence.

.prd.fr

Projet de programme de recherche et développement.

Présentation écrite du projet avec la liste des membres.

.presse.fr

Organisme de presse.

Copie du document ISSN de la Bibliothèque Nationale.

.tm.fr

Marque déposée.

- Enregistrement de la marque sur présentation du certificat définitif INPI, OHMI ou OMPI (sous réserve que la France figure parmi les pays concernés par le dépôt) ou

- Publication au BOPI de la demande d'enregistrement et dans les six mois suivant la demande d'enregistrement, la remise du certificat INPI définitif ou du certificat d'identité avec état des inscriptions pour valider définitivement la demande.

.com.fr

Toute personne physique ou morale.

Un justificatif d'identité (sur la base des mêmes documents que pour les enregistrements sous les autres domaines publics).

.gouv.fr

Ministère

- Un identifiant au répertoire INSEE et,

- Validation de la Délégation Interministérielle à la Réforme de l'État (DIRE).

Toutefois, le monopole d'attribution ainsi accordé à l'AFNIC n'est pas sans soulever certaines interrogations. En effet, en vertu de quelle norme juridique, française ou internationale, cette mission est-elle exercée ? La réponse est quelque peu difficile à apporter puisque l'AFNIC est une association régie par la loi de 1901 qui exerce ses compétences dans le cadre d'une « délégation de pouvoirs » émanant d'un organisme de droit privé américain, l'ICANN. Cette incertitude quant au fondement de sa compétence exclusive en matière d'attribution est une source de fragilité pour l'action et l'autorité de l'AFNIC. En effet, ses décisions sont susceptibles de faire grief et peuvent, à ce titre, être contestées devant les tribunaux compétents. Or, des moyens fondés sur l'illégalité du monopole de l'AFNIC ont d'ores et déjà été soulevés devant certaines juridictions.

Il en a été ainsi devant le Conseil de la concurrence, qui a été saisi, au mois de mars 2000, d'une plainte d'une société à laquelle l'AFNIC avait refusé l'enregistrement d'un nom de domaine. La plaignante avait donc attaqué l'organisme de nommage français au motif « qu'il dispose d'un monopole de fait sur la gestion du domaine « .fr » et qu'il s'arrogerait sans base légale le pouvoir discrétionnaire d'interdire l'accès d'un opérateur au marché français de l'Internet ; que le refus d'enregistrer le nom du domaine souhaité par la société X, qui correspond pourtant à une enseigne commerciale ainsi qu'à une marque déposée à l'INPI, constituerait un abus de position dominante au sens de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ».

Si le Conseil a débouté le requérant (cf. décision n° 2000-D-32 du 9 juin 2000), il l'a fait sur le fondement de l'absence de l'existence d'un abus de position dominante, sans évoquer la question du défaut de base légale des décisions prises par l'AFNIC. Or, ce moyen demeure sérieux et rien ne garantit, en l'état actuel du droit, qu'une autre juridiction ne le reçoive pas. Chacun conviendra donc aisément que cette situation n'est pas satisfaisante juridiquement ni propice à l'établissement d'un climat de confiance dans la sécurité des droits sur les réseaux numériques. Une intervention législative était donc nécessaire afin d'établir les fondements juridiques incontestables au bon fonctionnement de l'autorité chargée du nommage de l'espace français : tel est l'objet du présent article.

· Le projet de loi propose de confier au ministre chargé des télécommunications le soin de désigner les organismes d'attribution des noms de domaine en « .fr »

Le présent article insère un article L. 34-11 nouveau au sein du code des postes et télécommunications dont le premier alinéa dispose que le ministre chargé des télécommunications désigne « après consultation publique, les organismes chargés d'attribuer les noms de domaine » correspondant au « territoire national ». Cette rédaction appelle plusieurs remarques :

- Compte tenu de la nature d'Internet, de l'interactivité qu'il permet et de la diversité des intérêts en présence, qu'il s'agisse de ceux des professionnels ou des utilisateurs, l'organisation d'une consultation publique est la bienvenue et témoigne de la volonté du Gouvernement d'adopter une démarche ouverte à la discussion qui permettra au ministre d'être pleinement informé. Certaines autorités administratives ont d'ailleurs, d'ores et déjà, annoncé leur intention d'y participer, à l'instar de l'ART (Autorité de régulation des télécommunications) qui, dans l'avis qu'elle a rendu sur le présent projet de loi, affirme que « compte tenu des missions qui lui sont dévolues par la loi pour le développement des réseaux et des services de télécommunications et plus particulièrement en ce qui concerne l'accès à Internet et la gestion des ressources en numérotation, l'Autorité souhaite activement participer à cette consultation ».

- En prévoyant la désignation par le ministre des organismes chargés d'attribuer les noms de domaine en « .fr », la rédaction du présent article peut susciter quelques incertitudes qu'il convient lever. En effet, il n'est nullement dans l'intention du Gouvernement de remplacer l'AFNIC, dont l'activité donne satisfaction, par plusieurs organismes chargés du nommage. L'usage du pluriel est la conséquence de l'application des principes définis par l'ICANN à l'organisation territoriale de la France, qui possède de nombreux départements et territoires d'outre-mer. En effet, puisque l'attribution des noms de domaine nationaux doit correspondre à des territoires plus ou moins continus, le domaine du « .fr » ne peut s'appliquer aux territoires géographiquement éloignés de la France métropolitaine. Aussi existe-t-il aujourd'hui, à titre d'exemple, des noms de domaine spécifiques à la Martinique (« .mq »), à la Guadeloupe (« .gp ») ou à la Réunion (« .re »). Dès lors, l'application du dispositif proposé à l'outre-mer impose que le ministre des télécommunications y désigne, dans les mêmes formes, des organismes de nommage, ce qui explique l'usage du pluriel.

- La mission effectivement remplie par l'AFNIC aujourd'hui excède de beaucoup la seule « attribution » des noms de domaine. En effet, cet organisme, à la lecture de sa charte, administre les demandes des prestataires techniques qui peuvent, par délégation, enregistrer les demandes d'attribution des noms de domaine et peut également suspendre un nom de domaine dont l'attribution n'aurait pas respecté les dispositions de la charte. De surcroît, l'AFNIC est en relation permanente avec les organismes professionnels étrangers intervenant en cette matière, qu'il s'agisse de l'ICANN ou de l'OMPI. C'est pourquoi il serait davantage conforme à la réalité de l'activité de l'AFNIC d'indiquer, dans cet alinéa, qu'elle attribue et « gère » les noms de domaine à l'instar de la rédaction retenue au troisième alinéa de l'article L. 34-11. A l'initiative de son rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement en ce sens (amendement n° 41).

Les organismes ainsi désignés se voient assignés pour mission d'attribuer les noms de domaine « dans l'intérêt général », et, notamment, selon des règles « non discriminatoires rendues publiques ». Ces principes qui figurent aujourd'hui dans la charte de l'AFNIC, bien que formulés en des termes différents, accèdent ainsi à une valeur législative qui conforte leur autorité et leur opposabilité. En effet, le préambule de charte dispose qu'elle constitue un document « consensuel dont l'objectif est d'assurer une administration harmonieuse des noms de domaine » au « bénéfice de tous ». En outre, lesdits organismes devront adresser au ministre chargé des télécommunications un rapport d'activité annuel.

Fort logiquement, et en contrepartie du pouvoir de désignation qui lui est attribué, le quatrième alinéa de cet article confère au ministre chargé des télécommunications la mission de veiller au respect par ces organismes de leurs obligations. A ce titre, il peut procéder au retrait de la désignation après que l'organisme concerné ait présenté ses observations ce qui garantit le respect du principe du débat contradictoire préalable à une décision susceptible de faire grief. Bien évidemment, et il s'agit là d'un principe général en droit administratif, la décision prise par le ministre des télécommunications peut faire l'objet d'un recours juridictionnel, en l'occurrence, devant les tribunaux administratifs. Toutefois, le texte ne précise pas à quelle juridiction de l'ordre administratif échoit la compétence pour connaître du litige portant sur cet acte ministériel. Or, compte tenu des enjeux que représente la désignation d'un organisme qui possèdera un monopole en matière de nommage en « .fr » sur l'ensemble du territoire métropolitain, il semblerait préférable de prévoir qu'il s'agit du Conseil d'État. Cette solution est d'ailleurs conforme aux dispositions de l'article L. 311-1 du code de justice administrative qui prévoit que le Conseil d'État connaît en premier ressort des affaires si « l'objet du litige ou l'intérêt d'une bonne administration de la justice » l'exigent, ce qui semble être le cas en l'espèce. Suivant la proposition de son rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement en ce sens (amendement n° 43).

Somme toute, si les modalités de désignation des organismes chargés d'attribuer les noms de domaines et certains des principes auxquels ces derniers doivent veiller, sont clarifiés par le présent projet, il demeure que la nature juridique du nom de domaine en lui-même reste à déterminer.

· Le nom de domaine : un objet juridique non-identifié relevant partiellement du droit de la propriété intellectuelle

Quelle est la nature juridique du nom de domaine ? A cette question, il n'est pas de réponse simple ni univoque et les ouvrages savants tentant d'y répondre se multiplient (26). Toutefois, un rapprochement avec la « marque » est tentant puisque celle-ci est définie par l'article L. 711-1 du code de la propriété intellectuelle comme « un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale », sachant que « peuvent constituer un tel signe, les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblage de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres chiffres, sigles ». Par ailleurs, une analogie avec le nom commercial ou l'enseigne est également plaidable puisque celui-ci est, selon la doctrine (27), l'appellation sous laquelle le commerçant exerce le commerce, tandis que celle-là est une dénomination, l'emblème choisi pour individualiser le fonds. Ces séduisants parallèles illustrent clairement que, si le régime juridique du nom de domaine relève à titre principal de celui de la propriété intellectuelle, il ne saurait y être intégralement assimilé. En effet, le droit des marques obéit à un formalisme particulièrement précis qui ne se retrouve pas en matière de nommage. Si une marque peut devenir un nom de domaine à l'issue de la procédure d'attribution et, qu'à l'inverse, un nom de domaine peut devenir une marque grâce à un dépôt officiel, le nom de domaine en lui-même n'est pas une marque.

En cette matière complexe, le projet de loi apporte un certain nombre de précisions, confirmant l'hypothèse du rattachement du nom de domaine au régime de la propriété intellectuelle tout en déterminant les limites de cette assimilation.

En effet, le premier alinéa de l'article L. 34-11 dispose que la mission d'attribution des noms de domaine ne confère pas aux organismes désignés à cette fin des droits de propriété intellectuelle sur ces noms, ce qui confirme, a contrario, que le nom de domaine relève bien de cette branche du droit. Cette disposition de bon sens, conforme à la mission d'intérêt général dévolue à ces organismes, reprend d'ailleurs une stipulation de la charte de l'AFNIC qui indique que le nom est attribué à l'organisme demandeur et non à l'AFNIC ou au fournisseur d'accès qu'elle a habilité à cet effet. Toutefois, bien que le texte soit silencieux sur ce point, on rappellera que, toujours selon la charte, le nom de domaine n'est pas attribué en propriété mais sur le fondement d'un « droit d'usage » reconnu à l'organisme demandeur.

S'agissant de la notion de droit d'usage, elle se réfère à l'une des caractéristiques de la pleine propriété d'un bien au sens du droit civil, puisque que celle-ci emporte le droit exclusif d'en user, jouir et disposer de la manière la plus absolue pourvu « qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par la loi » (article 544 du code civil). Elle se retrouve d'ailleurs au troisième alinéa du présent article, qui attribue à l'État « le droit d'usage de la base des données des noms de domaine » de l'organisme qui viendrait à cesser son activité. Compte tenu du caractère d'intérêt général que représente cette base de données, cette disposition est la bienvenue puisqu'elle garantit la continuité du fonctionnement de ce service public en cas de défaillance de l'organisme chargé d'attribuer les noms de domaine.

Parenté avec la marque, mais sans qu'il y ait pleine propriété : le nom de domaine échappe donc aux catégories habituelles du droit français et la complexité de la définition de sa nature juridique en apparaît plus clairement. Ceci dit, puisque le dispositif du présent article rattache, à juste titre, les noms de domaine au droit de la propriété intellectuelle, il convient de s'assurer du respect de ses dispositions par l'ensemble des acteurs de l'Internet. C'est la raison pour laquelle, le deuxième alinéa de l'article L. 34-11 dispose que l'attribution des noms de domaine est assurée par les organismes désignés selon des règles « qui respectent les droits de la propriété intellectuelle ». Or, cette rédaction soulève un certain nombre de difficultés qu'il convient d'exposer.

En effet, selon le droit en vigueur et notamment les stipulations de la charte de l'AFNIC, les demandes de création de noms de domaine « ne doivent en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers ni à l'ordre public ». Cependant, si l'AFNIC se réserve le droit d'exercer toutes mesures afin de faire cesser l'atteinte aux droits des tiers, elle n'a pas pour vocation de veiller, pour chaque demande, à l'absence de préjudice qu'emporte l'attribution d'un nom de domaine. Là encore la charte est explicite puisque, si elle attribue à l'AFNIC la mission d'assurer le respect de ses stipulations, elle indique, par ailleurs, que sa responsabilité ne saurait être engagée au titre d'un acte d'administration sur un nom de domaine et qu'elle n'est aucunement responsable du contrôle du contenu, de la conformité ou de la légalité des éléments qui lui sont remis ou communiqués. Il ressort clairement de ces développements qu'il appartient au demandeur de vérifier que la dénomination qu'il souhaite obtenir ne porte pas atteinte aux droits des tiers.

Or, la rédaction proposée par le présent article, qui souhaite conserver ce régime d'irresponsabilité de l'organisme de nommage, pourrait aboutir au résultat inverse. En effet, dès lors que l'attribution est assurée par des organismes spécialement désignés à cet effet et qu'elle s'effectue « selon des règles qui respectent les droits de la propriété intellectuelle », il peut en être déduit, fort logiquement, qu'il leur appartient de veiller eux-mêmes au respect de ces règles par les demandeurs. Or, les organismes de nommage ne sont pas en mesure d'assurer une mission de cette nature. En effet, les dispositions du code de la propriété intellectuelle imposent, dans de nombreuses hypothèses, des procédures complexes de recherche d'antériorité dont l'objet est de s'assurer que la demande d'enregistrement, d'une marque à titre d'exemple, ne porte pas atteinte à des droits antérieurs, et notamment, à une marque déjà déposée, à une raison sociale, une enseigne, une appellation d'origine protégée ou aux droits d'auteurs (article L. 711-4 du code de la propriété intellectuelle).

Dès lors, à supposer que la rédaction actuelle soit maintenue, le risque est grand de voir les décisions des organismes de nommage faire l'objet de contestations devant les tribunaux au motif qu'elles méconnaîtraient certains droits de la propriété intellectuelle, ce qui engagerait leur responsabilité civile. C'est pourquoi, il semble préférable d'indiquer que le respect des droits de la propriété intellectuelle et les droits des tiers incombe au demandeur du nom de domaine. A l'initiative de son rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement en ce sens (amendement n° 42).

Enfin, le dernier paragraphe du présent article a pour objet d'appliquer les dispositions de l'article L. 34-11 nouveau aux collectivités d'outre-mer qui ne sont pas soumises au principe d'assimilation. Il en est ainsi de Mayotte, des îles Wallis-et-Futuna, des Terres australes et antarctiques. Par ailleurs, le dernier alinéa précise que les organismes chargés d'attribuer les noms de domaine en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française ne détiennent pas de droits de propriété intellectuelle sur ces noms.

Après avoir émis un avis favorable sur l'amendement n° 17 présenté par M. Jean Dionis du Séjour tendant à s'assurer que la gestion de chaque domaine de premier niveau est attribuée à un organisme unique, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 7

Détermination de la loi applicable

L'article 7, qui transpose plusieurs articles de la directive, traite du problème de la détermination de la loi applicable à l'activité commerciale exercée sur support électronique.

Problème classique du droit international privé, la détermination de la loi applicable aux contrats passés entre deux contractants situés dans deux pays différents n'en est pas moins complexe, puisqu'elle fait intervenir des règles conventionnelles de niveau international, un acquis communautaire particulièrement riche en matière de droit de la consommation et une législation qui, dans le cas de la France se distingue également par son caractère particulièrement étoffé. Envisagée dans le cadre du commerce électronique, la question de la loi applicable en matière de contrats internationaux retrouve une nouvelle actualité : à nouvel outil, nouveaux concepts ? Ou bien est-il possible de se contenter d'une adaptation des cadres juridiques existants à l'activité de prestation de biens et de services définie à l'article précédent ? En un mot, pour reprendre une terminologie classique du droit international privé, la lex mercatoria classique survivra-t-elle ou faut-il définir une lex electronica ?

Force est de constater que, jusqu'à une époque récente, à en croire certains « gourous de l'internet », cet autre monde qu'était l'internet justifiait la mise en place de règles radicalement nouvelles. Aujourd'hui toutefois, ces théories n'ont plus cours : « un contrat reste un contrat quelle que soit la façon dont la liaison s'est opérée entre les deux parties. En fait, les contrats du commerce électronique sont des contrats par correspondance, plus exactement par téléphone » (28). La directive européenne transposée dans le présent article témoigne de ce retour aux concepts fondamentaux du droit des contrats, qu'elle s'efforce de concilier de façon à faire de l'outil juridique un vecteur du développement, et non un frein, du commerce électronique. En l'occurrence, elle s'articule autour de deux principes-phares, illustrés dans chacun des paragraphes du présent article :

- la liberté d'exercice pour le prestataire (I) ;

- l'application de la loi du pays d'établissement du prestataire de biens ou de services (II).

· Le principe de libre exercice du commerce électronique (paragraphe I)

Le paragraphe I de l'article 7 affirme, en son premier alinéa, le principe de libre exercice de l'activité de commerce électronique sur le territoire national pour les prestataires de biens et services établis dans un autre État membre de l'Union. Il transpose l'article 3.2 de la directive, aux termes duquel « les États membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre État membre ». Précisons que, dans la terminologie communautaire, le « domaine coordonné » concerne les exigences prévues par les systèmes juridiques des États membres et applicables aux prestataires des services de la société de l'information ou aux services de la société de l'information. Il s'agit notamment des règles d'accès à l'activité d'un service de communication en ligne (qualification, autorisation, notification) et des exigences portant sur le comportement du prestataire, la qualité ou le contenu du service.

Le principe de libre exercice de l'activité de commerce électronique n'est cependant pas absolu. Le prestataire se doit notamment de satisfaire aux dispositions de la loi française dans six cas limitativement énumérés (1° à 6°) :

- Il s'agit, en premier lieu, « des dispositions relatives au libre établissement et à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté européenne dans le domaine de l'assurance, prévues aux articles L. 361-1 à L. 364-1 du code des assurances ». Cette référence vise les conditions d'exercice des entreprises d'assurance communautaires, régies par deux directives communautaires auxquelles il est fait référence dans l'annexe à l'article 3 (troisième tiret), transposées dans notre droit par la loi n°94-5 du 4 janvier 1994 modifiant le code des assurances (partie législative) en vue notamment de la transposition des directives n° 92-49 et n° 92-96 des 18 juin et 10 novembre 1992. Cette exception se justifie par l'existence d'un dispositif d'agrément préalable à l'exercice de cette activité, soumis par ailleurs à des contrôles spécifiques de la part de la commission de contrôle des assurances.

- Sont visées, en deuxième lieu, les dispositions relatives à la publicité et au démarchage des organismes de placement collectif en valeurs mobilières. En vertu de l'article L. 214-12 du code monétaire et financier, il revient à la Commission des opérations de bourse de définir les règles prévalant en la matière.

- Entrent, en troisième lieu, dans le champ des règles devant être respectées par les prestataires visés dans cet article, l'ensemble des dispositions relatives aux pratiques anticoncurrentielles et à la concentration économique. Définies aux articles L. 420-1 à L. 420-7 pour les premières et L. 430-1 à L. 430-10 du code de commerce pour les secondes, ces dispositions concernent notamment les actions concertées, les ententes, les abus de position dominante, les prix abusivement bas et l'ensemble des règles relatives à la concentration.

- En quatrième lieu, sont également concernées les dispositions relatives à l'interdiction ou à l'autorisation de la publicité sollicitée envoyée par courrier électronique, définies par le présent projet de loi.

- En cinquième lieu, s'imposent à ce prestataire les dispositions du code général des impôts ;

- Il s'agit, en sixième et dernier lieu, des droits protégés par le code de la propriété intellectuelle, exception évoquée à l'annexe de l'article 3 (premier tiret) de la directive.

En complément de cette disposition relative au libre exercice de l'activité de commerce électronique, dont la rédaction, dans la directive, peut paraître étonnante dans la mesure où ce principe fondamental est énoncé dans une phrase négative, l'article 4 de la directive énonce clairement le principe de non-autorisation préalable. Le gouvernement n'a pas jugé utile de transposer cette disposition, en raison du statut constitutionnel du principe de liberté du commerce.

Cette économie législative est sans nul doute louable : toujours est-il cependant, qu'à aucun moment n'est affirmé explicitement le principe de libre exercice de l'activité de commerce électronique pour les prestataires de biens et de services établis en France. Sans doute cela va-t-il de soi, plus encore dans la mesure où cette disposition se déduit logiquement du II, qui, comme il est expliqué ci-dessous, pose en principe l'application de la loi de l'État dans lequel le prestataire est établi, d'où il se déduit que les prestataires établis en France bénéficient, dans cette branche particulière du commerce comme dans l'ensemble de cette activité, du principe constitutionnel.

Reste que l'absence d'une telle mention dans le paragraphe I de l'article 7, qui se lit comme un guide des règles et principes à respecter par le prestataire de services en ligne de nature commerciale - par contraste avec le paragraphe II qui se lit comme une charte de protection à l'intention du consommateur - peut sembler étonnante. Par conséquent, la Commission, sur proposition du rapporteur pour avis, a adopté un amendement explicitant le régime applicable aux prestataires de biens et de services établis et exerçant leur activité sur le territoire national, précisant notamment le champ des activités exclues du principe de libre exercice du commerce électronique, mentionnées, dans la rédaction du projet de loi, à l'article 6 (amendement n° 44). Elle a, de même, sur proposition du rapporteur pour avis, rappelé ces exclusions pour les prestataires établis dans un autre État membre de l'Union européenne (amendement n° 45).

· Le principe d'application de la loi du pays d'établissement du prestataire de biens ou de services et ses tempéraments (paragraphe II)

Le premier alinéa du paragraphe II transpose l'article 3.1 de la directive, ainsi que le quatrième tiret des dérogations à l'article 3 figurant en annexe à celui-ci. Il pose le principe de l'application, au commerce électronique, de la loi du pays d'établissement du prestataire de biens et de services, sous réserve de la commune intention des parties, Il convient de préciser, à ce stade de la réflexion, que les contrats électroniques ne posent pas, en eux-mêmes, de problème de conflit de lois, le commerce électronique n'étant « pas un phénomène international en soi » (29). « Le fait que l'Internet soit un moyen de communication international est, en effet, un élément à lui seul insuffisant pour conférer ce caractère aux contrats conclus par son intermédiaire » (30). Le paragraphe II ne vise par conséquent que les contrats pour lesquels le pays d'établissement du prestataire et celui de destination sont différents : cette remarque va sans doute de soi ; la confusion souvent observée entre le caractère transnational d'Internet et sa nature internationale justifie cependant ce point de méthodologie.

Le principe du pays d'origine permet un contrôle à la source, garantissant de ce fait les conditions les plus favorables du développement du commerce électronique. A contrario en effet, poser le principe du pays de destination ferait peser le risque de voir les prestataires se délocaliser hors de l'Union européenne, dans la mesure où ils devraient respecter à chaque fois la législation du pays du consommateur, soit potentiellement quinze législations différentes. La lisibilité du dispositif adopté profite ainsi non seulement aux citoyens de l'État membre, mais également à l'ensemble des citoyens de la Communauté, objectif clairement affiché dans le considérant 22 de la directive. C'est sans doute dans ce souci que le style adopté dans cet alinéa ressemble davantage à celui du législateur communautaire qu'à celui du législateur national... L'énoncé d'une disposition applicable aux États membres pourrait ainsi laisser penser à une velléité d'application extraterritoriale de la présente loi, alors qu'il ne s'agit, en visant cette règle abstraite, que d'y inclure, par définition, la France, tout en informant le commerçant français du droit applicable.

Cette disposition sur la loi applicable ne vaut pas pour les contrats conclus avec les consommateurs : le paragraphe 3 de l'article 3 de la directive mentionne en effet que cette disposition ne s'applique pas aux domaines visés à l'annexe, dont les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs font partie. La règle du pays d'origine ne s'applique donc pas aux contrats conclus avec les consommateurs : tel est le sens du 1° du paragraphe II de l'article 7. S'agissant de ces contrats, il est ainsi renvoyé au droit commun. Sur ce point, il convient d'observer que les contrats conclus avec un consommateur sont régies de plus en plus largement par des règles de fond issues du droit communautaire dérivé, qui prévoit un socle commun de règles protectrices du consommateur (contrats à distance, clauses abusives, etc.). La convention de Rome du 19 juin 1980 relative à la loi applicable aux obligations contractuelles (31) donne d'ailleurs priorité au droit communautaire dans son article 20.

Reste que, sur les principes de base du droit international privé en matière contractuelle, c'est à cette convention qu'il convient de se référer, comme l'y invite d'ailleurs le considérant 23 de la directive qui précise que « la présente directive n'a pas pour objet d'établir des règles supplémentaires de droit international privé ». Celle-ci consacre le principe fondamental de l'autonomie des volontés. Selon cette « loi d'autonomie », qui vaut d'ailleurs tant en droit international que dans le droit français, les parties sont en principe libres de choisir la loi qui régira leurs relations contractuelles, et ce même si la loi qu'elles désignent n'a aucun lien avec le contrat. À défaut de choix des parties sur la loi applicable à leur contrat, la convention de Rome désigne, en son article 4, la loi « du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits » (premier alinéa). Or, aux termes du deuxième alinéa de ce même article, « le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s'il s'agit d'une société, association ou personne morale, son administration centrale ». Sur ce point, l'article 4 de la convention de Rome du 19 juin 1980 énonce un principe du droit international privé, selon lequel, à défaut de choix des parties, la loi applicable est celle du pays d'établissement du débiteur de la prestation caractéristique, c'est-à-dire celle qui est due moyennant paiement. Il convient de rappeler sur ce point, comme le fait d'ailleurs la directive dans le considérant 57, que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice, l'État membre a toute faculté de prendre des mesures contre un prestataire établi dans un autre État, lorsque le choix du lieu d'établissement est lié à la volonté de se soustraire à la loi de l'État membre vers lequel son activité est principalement ou entièrement tournée.

Le souci de protéger la partie faible du contrat, qui imprègne notre droit, se définit, plus largement, comme l'un des principes fondamentaux du droit international privé. Ainsi, la convention de Rome contient une clause relative au conflit de lois applicables qui protège le consommateur passif. D'après l'article 5.2 de cette convention, la liberté de choix des parties ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle dès lors que l'une des deux conditions suivantes est remplie :

- la conclusion du contrat a été précédée dans le pays du consommateur d'une proposition spécialement faite ou d'une publicité et le consommateur a accompli dans ce pays les actes nécessaires à la conclusion du contrat ;

- le cocontractant du consommateur ou son représentant a reçu la commande dans ce pays.

En renvoyant au droit commun, et donc à cette clause de la convention de Rome, la directive et, a fortiori, le projet de loi, invitent à poser la question des conditions d'application de cette clause au support numérique. Faut-il considérer que le seul fait de rendre un site accessible dans un pays différent de celui d'établissement du prestataire suffit à être assimilé à une sollicitation d'un consommateur étranger ?

Sur cette question, trois thèses sont généralement présentées. Pour certains auteurs, l'accessibilité d'un site est assimilable à la sollicitation préalable prévue par l'article 5 de la convention de Rome ; d'autres font, au contraire, prévaloir le fait que « l'initiative de la connexion revient en tout état de cause au consommateur : s'il décide de contacter un commerçant étranger, c'est qu'il y trouve un intérêt ; il ne mérite par conséquent aucune protection particulière » (32). La voie médiane consisterait à identifier les pays ciblés par le site étranger - langue utilisée, monnaies de paiement proposées, etc. Selon votre rapporteur pour avis, la première interprétation ne saurait être retenue : il semble tout à fait excessif de considérer que la seule accessibilité potentielle d'un site Internet suffit à établir que le consommateur ait été sollicité. Le seul fait de se connecter et d'aller sur un site est constitutif d'une démarche active du consommateur, loin de la passivité évoquée dans la convention de Rome. Il reviendra cependant à la jurisprudence de se prononcer sur l'application de cette disposition de la convention à Internet.

Le législateur se doit néanmoins de pointer cette ambiguïté, dès lors qu'est en cause la protection effective du consommateur français. Or, tel qu'il est rédigé, le 1° du paragraphe II pourrait laisser croire au consommateur français que la question est d'ores et déjà tranchée, dans le sens qui lui est le plus favorable. Aux termes de cet alinéa, le consommateur semble, en effet, devoir bénéficier systématiquement de la clause de protection dès lors qu'il acquiert des biens et des services sur Internet, comme s'il était acquis que l'accessibilité d'un site était assimilée à une sollicitation commerciale préalable. Il est, en conséquence, nécessaire de rappeler l'existence de la condition de sollicitation préalable posée par l'article 5 de la convention de Rome, en faisant mention des engagements internationaux souscrits en la matière par la France, ce qui revient à viser implicitement la convention de Rome. Sans doute le respect, par la France, de ses engagements internationaux va-t-il de soi, mais, dans la mesure où le texte auquel il est implicitement fait référence contient une condition essentielle à la mise en œuvre de la clause protectrice du 1°, il est préférable de rappeler explicitement les obligations internationales de la France. Votre rapporteur pour avis vous propose par conséquent de préciser en ce sens le troisième alinéa (1°) du II, afin qu'en la matière, le consommateur français sache que c'est l'article 5 de la convention de Rome qui s'applique, avec toutes les ambiguïtés qui s'y attachent dès lors qu'il s'applique au commerce en ligne. La Commission a donc adopté, sur proposition du rapporteur pour avis, un amendement visant à faire prévaloir, au paragraphe II, l'application de la convention de Rome du 19 juin 1980 relative aux obligations contractuelles (amendement n° 46).

Deux autres règles impératives s'imposent aux cocontractants, tant en dépit de l'application du principe de la loi nationale que de l'autonomie des parties.

En premier lieu, il est interdit de déroger aux règles de forme impérative prévues par la loi française pour les contrats créant ou transférant des droits sur un bien immobilier situé sur le territoire national.

En second lieu, il ne peut, de même, être dérogé aux règles déterminant la loi applicable aux contrats d'assurance pour les risques situés sur le territoire d'un ou plusieurs États parties à l'accord sur l'Espace économique européen et pour les engagements qui y sont pris, prévues aux articles L. 181-1 à L. 183-2 du code des assurances. Ces derniers traitent des assurances de dommages non obligatoires (articles L. 181-1 à L. 181-4), de dommages obligatoires (article L. 182-1) et des assurances sur la vue et capitalisation (articles L. 183-1 et L. 183-2). Il vise à préciser la loi applicable selon le lieu où le risque est susceptible de s'exercer et selon le lieu de résidence du souscripteur.

Ces exceptions respectent exactement le champ des dérogations mentionnées à l'article 3 de la directive qui, dans son annexe, établit la liste des domaines échappant à la libre circulation des services de la société de l'information.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 8

Clause de sauvegarde

L'article 8 du projet de loi introduit une clause de sauvegarde permettant à l'autorité administrative de déroger au principe de liberté du commerce électronique sur le territoire national, dans un certain nombre de cas, limitativement énumérés :

- maintien de l'ordre et de la sécurité publics ;

- protection des mineurs ;

- protection de la santé publique ;

- préservation des intérêts de la défense nationale ;

- protection des consommateurs et investisseurs en tant que personnes physiques, à l'exception des investisseurs appartenant à un cercle restreint définis à l'article L. 411-2 du code monétaire et financier. Il s'agit en fait de viser ici les investisseurs en tant que catégorie particulière de consommateurs, de produits financiers ou d'instruments de marchés en l'occurrence. D'où l'exclusion des cercles restreints, qui désignent l'entourage des proches - dont le nombre est fixé à cent aux termes du décret n° 98-880 du 1er octobre 1998 - des dirigeants de l'émetteur d'instruments financiers, liés à eux par des relations personnelles, à caractère professionnel ou familial, c'est-à-dire une catégorie d'investisseurs qui, par son statut spécifique, n'a nul besoin de protections légales particulières. Notons qu'il n'est pas fait mention des investisseurs qualifiés évoqués dans ce même article du code monétaire et financier, qui sont par définition des personnes morales.

Il convient de remarquer qu'une telle clause d'ordre public existe d'ores et déjà dans notre droit. Ainsi, en matière d'investissements étrangers en France, domaine régi par un principe de liberté, affirmé à l'article L. 151-1 du code monétaire et financier, l'autorité administrative est habilitée à donner des injonctions à l'investisseur dans l'hypothèse où l'investissement en cause « est de nature à mettre en cause l'ordre public, la santé publique ou la sécurité publique » (article L. 151-3 du code monétaire et financier).

La possibilité pour les États de recourir à une telle clause de sauvegarde est ouverte par la directive elle-même, l'article 8 du projet de loi transposant en effet l'article 3.4 de la directive. Deux conditions sont posées à cette possibilité de déroger aux principes fondamentaux régissant le commerce électronique :

- une condition de fond, touchant à la nature des mesures en cause.

Celles-ci doivent, en premier lieu, être nécessaires à la protection de l'ordre public, de la santé publique, des consommateurs, « y compris des investisseurs » et à la sécurité publique. La directive décline, à titre non exhaustif toutefois, les éléments constitutifs de l'ordre public justifiant une telle restriction au principe, et cite à ce titre « la prévention, les investigations, la détection et les poursuites en matière pénale, notamment la protection des mineurs et la lutte contre l'incitation à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité et contre les atteintes à la dignité de la personne humaine ».

Cette nécessité s'apprécie non seulement au regard de l'atteinte effective à l'un de ces quatre grands domaines, mais également sur le fondement de la seule existence d'un risque « sérieux et grave ». La directive éclaire sur ce point le texte du projet de loi, qui se contente d'une référence à la nécessité, même si le droit administratif français distingue en pratique les deux notions.

En troisième et dernier lieu, les mesures doivent être « proportionnelles » à l'objectif poursuivi, notion transposée par la référence « au cas par cas », qui laisse l'autorité administrative libre d'apprécier en l'espèce le degré de restriction à apporter à la liberté définie à l'article 7. La directive, qui évoque des « mesures qui dérogent », ne précise pas en effet la nature de ces mesures : la restriction apportée, le cas échéant, par l'autorité administrative à l'activité de commerce électronique peut donc être relative ou absolue, c'est-à-dire ressortir de l'interdiction d'exercer pure et simple.

- une condition de forme, relative à la mise ne œuvre effective de la dérogation.

Deux procédures sont prévues par la directive à cette fin.

Selon la procédure de droit commun, l'État membre doit, préalablement à toute mise en œuvre de la clause de sauvegarde, demander à l'État d'établissement du prestataire de prendre des mesures. Si celles-ci sont inexistantes ou insuffisantes, l'État membre doit alors notifier à la Commission et à l'État d'établissement du prestataire son intention de prendre des mesures.

En cas d'urgence cependant - notion qui, n'étant pas définie dans la directive, est appréciée souverainement par les États membres -, une procédure spéciale est prévue, qui permet à l'État subissant le préjudice de notifier en temps réel ou ex post à la Commission, mais quoi qu'il arrive « dans les plus brefs délais », les mesures qu'il aura prises, en indiquant les raisons pour lesquelles il a estimé qu'il y avait urgence. Dans cette hypothèse, et « sans préjudice de la faculté pour l'État membre de prendre d'appliquer les mesures en question », la Commission examine dans les plus brefs délais les mesures adoptées et vérifie leur compatibilité avec le droit communautaire. Si elle estime que tel n'est pas le cas, elle « demande à l'État membre concerné de s'abstenir de prendre les mesures envisagées ou de mettre fin d'urgence aux mesures en question ».

Si la procédure est minutieusement décrite dans sa phase communautaire, votre rapporteur pour avis ne dispose pas à ce jour d'informations sur les conditions dans lesquelles la clause de sauvegarde jouera dans un cadre strictement national : aux termes de l'article 8, un décret en Conseil d'État est prévu à cette fin, qui, en dépit du retard pris dans la transposition de la directive, n'existe pas encore à ce jour. Au vu à la fois des marges de manoeuvre importantes que recèle potentiellement cet article pour l'autorité administrative française, et de la lettre, comme de l'esprit de la directive, il est certain que la clause de sauvegarde devra faire l'objet d'un encadrement réglementaire extrêmement strict, afin que l'exception ne puisse en aucun cas servir à contourner le principe. Dans un passé récent, la Cour de justice de communautés européennes n'a pas hésité à condamner la France sur ce fondement.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 13

(art. L. 121-20-4 du code de la consommation)


Formalités requises pour les contrats fournissant une prestation de services d'hébergement, de transport, de restauration et de loisirs
conclus par voie électronique

L'ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 relative à la vente à distance, qui transposait la directive CE n° 97-7 du 20 mai 1997, a introduit de nombreuses formalités à finalité informative, destinées à assurer au consommateur une protection renforcée dans le cadre de la vente à distance.

Ainsi, aux termes de l'article L. 121-18 du code de la consommation, l'offre de contrat doit, dans ce cas, comporter des informations spécifiques, telles que le nom du vendeur du produit ou du prestataire de service ainsi que ses coordonnées, les frais de livraison, s'ils existent, les modalités de paiement, de livraison ou d'exécution, l'existence d'un droit de rétractation, la durée de la validité de l'offre et du prix de celle-ci et le coût de l'utilisation de la technique de communication à distance, s'il diffère du tarif de base. Il est précisé par ailleurs que ces informations doivent apparaître de manière claire et compréhensible. En outre, le consommateur doit recevoir en temps utile, et au plus tard au moment de la livraison, un certain nombre d'informations, partiellement redondantes avec celles qui sont mentionnées dans l'offre de contrat. Celles-ci sont détaillées à l'article L. 121-19 du code de la consommation.

Cette même ordonnance a exclu certaines catégories de services des dispositions ci-dessus. Notamment, aux termes de l'article L. 121-20-4 (2°) du code de la consommation, il peut être dérogé aux dispositions des articles L. 121-18 et L. 121-19 du même code pour « la prestation de services d'hébergement, de transport, de restauration, de loisirs qui doivent être fournis à une date ou selon une périodicité déterminée ».

Dans la mesure où, d'un point de vue juridique, le commerce électronique n'est qu'une forme particulière du commerce à distance, cette disposition est applicable dès lors que le contrat de prestation portant sur ce type d'activité est souscrit par voie électronique. Or, la direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes a constaté que ce domaine faisait l'objet du nombre le plus important de réclamations de la part des consommateurs. Il est, dès lors, paradoxal, d'exonérer les sites concernés de toute obligation d'information. L'article 13 vise, par conséquent, à rendre applicables les dispositions des articles L. 121-18 et L. 121-19 aux contrats portant sur ce type de prestation, lorsqu'ils sont souscrits sous forme électronique. Le présent projet de loi vient, de la sorte, combler une lacune dans le dispositif de la directive de 1997 précitée, qu'il conviendrait de modifier sur ce point afin que tous les États membres soient soumis au même régime.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article dans la rédaction du projet de loi.

Chapitre III

Les contrats par voie électronique

Le chapitre III du projet de loi, relatif aux contrats souscrits par voie électronique, transpose les articles 9 à 11 de la directive du 8 juin 2000. Ainsi, aux termes de l'article 9.1 de la directive, « Les États membres veillent à ce que leur système juridique rende possible la conclusion des contrats par voie électronique. Les États membres veillent notamment à ce que le régime juridique applicable au processus contractuel ne fasse pas obstacle à l'utilisation des contrats électroniques ni ne conduise à priver d'effet et de validité juridiques de tels contrats pour le motif qu'ils sont passés par voie électronique ».

Cette disposition représente l'une des mesures phares de la directive, dans la mesure où elle vise à faire sauter l'un des principaux verrous au développement du commerce électronique : d'un contexte d'incertitude, voire d'insécurité, le « cyberclient » passe désormais au cadre prévisible et sécurisant qui s'attache à la définition d'un véritable statut juridique du contrat électronique.

N'eût été la réglementation européenne, et dans une perspective strictement nationale, une évolution majeure de notre droit des contrats s'imposait. Jusqu'alors certes, la jurisprudence s'est fort bien satisfaite des outils juridiques existants pour régler les litiges soulevés par l'intrusion du fait électronique dans notre droit. Comme le souligne Jean-Luc Aubert, « La jurisprudence a apporté, dans la mesure de ses moyens, de premiers ajustements » (33). À l'évidence cependant, une telle démarche n'est à la mesure ni du phénomène, ni de ses enjeux. D'une part en effet, « [L]a fonction jurisprudentielle d'adaptation du droit à la vie sociale ne pouvait régler le problème ; en particulier parce que la jurisprudence est lente et ponctuelle, alors que l'évolution de l'électronique de communication a été fulgurant et tend à la généralité ». En devenant un phénomène de masse, le commerce électronique « se civilise » au sens du droit et appelle, dès lors, un encadrement juridique. D'autre part, ce qui se profile, avec le développement du support électronique dans les relations de droit, c'est une remise en cause radicale de la manière dont il faut désormais envisager la mise en œuvre pratique des relations de droit, en bref les formes de celui-ci. « Appuyé sur une civilisation ancestrale de l'écrit, celui qui est porté par le papier, notre formalisme se trouve aujourd'hui en voie d'écartèlement entre le passé et l'avenir » (34).

L'intervention du législateur est donc aujourd'hui une nécessité. Il convient à cet égard de rappeler que ce n'est pas la première fois que le droit civil français se trouve saisi par le fait numérique. Ainsi, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, l'écrit électronique est admis à titre de preuve dans certaines circonstances, la signature électronique bénéficiant par ailleurs d'une présomption de fiabilité dans les conditions définies par l'article 1316-4 du code civil. Restait cependant préciser les conditions de formation du contrat électronique et, surtout, à reconnaître la validité de l'écrit électronique en matière juridique. Comme le souligne Gérard Couturier, la réforme de 2000, « en soi considérable, n'est qu'un premier pas dans la voie qui répandra l'écriture électronique dans la confection des actes juridiques » (35). Ce pas vers un changement d'échelle dans l'utilisation de l'écrit électronique dans notre droit est franchi avec le présent projet de loi, dans les articles 14 à 16 qui composent le chapitre III du projet de loi. Même si, répétons-le, ils ne définissent pas un régime spécial applicable aux contrats électroniques : il faut, là encore, réaffirmer qu'en termes de technique juridique, les nouvelles technologies parviennent sans peine à se glisser dans les cadres existants. La jurisprudence qui s'est développée au cours des années récentes, en l'absence de toute base légale, l'illustre suffisamment.

Dans la reconnaissance de la validité de l'écrit électronique, le projet de loi dépasse même l'objet de la directive européenne, en ne se limitant pas au seul cadre du droit des contrats. Sont en effet visés, aux termes de l'article 1108-1 nouveau du code civil créé par l'article 14, tous les actes juridiques, et non les seuls actes juridiques bilatéraux que sont les contrats. En effet, alors que le contrat est un accord de volontés, l'acte juridique se définit, de manière plus générale, comme étant tout acte accompli volontairement en vue de produire des effets de droit, ce qui inclut notamment les actes unilatéraux, c'est-à-dire par lesquels une personne s'oblige envers une autre sans réciprocité, autrement dit ceux qui sont l'œuvre d'une seule volonté. Précisons qu'au sein des actes juridiques unilatéraux, il convient de distinguer les actes individuels - par exemple, le testament - et les actes collectifs, tels que les délibérations d'une assemblée générale.

L'intitulé du chapitre III est donc inexact, dans la mesure où il fait référence aux seuls contrats. Votre rapporteur pour avis vous propose par conséquent de lui substituer le terme d'« obligations ». Dans un même souci de cohérence avec l'article 14, qui crée un chapitre VII nouveau dans le titre III du livre III du code civil, intitulé « Des contrats sous forme électronique », il serait également préférable d'harmoniser la terminologie en recourant à la seule expression « sous forme électronique », préférable à celle de « par voie électronique » dans la mesure où est également concerné, dans le présent chapitre, l'archivage des actes électroniques, ce qui inclut une dimension statique. Suivant la recommandation du rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement modifiant l'intitulé du chapitre III de façon, d'une part, à viser les obligations, et non les seuls contrats, en cohérence avec les dispositions de l'article 14 qui traitent des actes juridiques dans leur ensemble, et, d'autre part, à harmoniser la rédaction du texte (amendement n° 47).

Article 14

(art. 1108-1 et 1108-2 et chapitre VII [nouveaux] du code civil)


Régime des actes et contrats souscrits et conservés sous forme électronique

Dans un premier paragraphe (premier alinéa), l'article 14 introduit deux articles nouveaux dans le code civil :

- Aux termes de l'article 1108-1 nouveau, l'écrit exigé pour la validité d'un acte juridique peut être établi et conservé sous forme électronique, de même que les mentions manuscrites obligatoires ;

- L'article 1108-2 nouveau énumère trois catégories d'exceptions à ce principe.

Article 1108-1 [nouveau] du code civil

Validité de l'acte juridique électronique

C'est une avancée majeure qui a été réalisée en 2000 avec la reconnaissance de la preuve électronique : la France est le premier pays d'Europe à avoir introduit cette innovation dans son droit. Hors d'Europe, il n'est guère que le Québec pour avoir modifié son droit civil en ce sens : ainsi, le code civil québécois admit, dès 1991, l'écrit électronique au rang des preuves littérales, tout en autorisant sa contestation par tous moyens. Par ailleurs, la loi-type sur le commerce électronique adoptée en 1996 par la Commission des Nations unies pour le droit du commerce international (CNUDCI) reconnaît l'admissibilité et la force probante des « messages de données » ainsi que la validité des contrats passés par ce truchement.

Les dispositions introduites en 2000 dans le droit de la preuve français ont suscité de nombreux commentaires, certains voulant y lire une reconnaissance globale de l'écrit électronique comme valant non seulement ad probationem, c'est-à-dire comme preuve, mais également ad validitatem, c'est-à-dire comme condition de la validité de l'acte. Tel n'était assurément pas l'objectif de la loi du 13 mars 2000, comme l'atteste d'ailleurs l'emplacement des articles introduits par cette réforme dans le code civil, qui complètent les dispositions du chapitre VI du titre III relatif au droit de la preuve. À contrario, en créant deux articles relatifs au contrat électronique,, à la suite de l'article 1108 du code civil qui précise les conditions « essentielles » de validité des contrats, le présent projet de loi met fin à toutes les interrogations qui ont fait florès en la matière depuis 2000. À cet égard, il est heureux qu'un remaniement substantiel ait été apporté au texte par rapport au projet de loi sur la société de l'information. Ce dernier, en effet, créait de nouveaux articles à la fin du chapitre relatif aux contrats, après l'article 1369 du code, sans les rattacher à un cadre existant. Outre le fait que ce choix méthodologique heurtait de front le principe selon lequel il n'existe pas de droit spécifique des contrats électroniques, la lisibilité du présent projet de loi par rapport à la loi du 13 mars 2000 sur la preuve s'en trouvait singulièrement amoindrie.

Sans doute, d'un point de vue strictement formel, n'est-il certainement pas satisfaisant de voir figurer une disposition portant sur les actes juridiques en général dans le titre du code civil relatif aux seuls contrats et obligations conventionnelles. Si la doctrine admet la distinction bipartite opérée par le code civil entre contrats et obligations conventionnelles d'une part, engagements qui se forment sans convention d'autre part, elle observe que « la première catégorie est incomplète : elle devrait comprendre non seulement le contrat, mais l'ensemble des actes juridiques. Le premier n'est en effet qu'une espèce dans un genre, constitué par les seconds » (36). Néanmoins, tout en la jugeant contestable, les auteurs s'accordent sur cette classification qui conduit à inclure le terme générique dans la partie du code consacrée à ce qui n'en est finalement qu'une espèce. Ainsi, il est entendu que « le Code traite, au titre des contrats, non seulement des règles propres à ceux-ci, mais également de règles qui, en réalité, sont communes à toutes les obligations ».

· La reconnaissance de l'écrit sous forme électronique pour la validité d'un acte juridique et d'une mention manuscrite

Au-delà de ces considérations méthodologiques, il convient de saluer l'innovation majeure introduite dans le code civil. Aux termes du premier alinéa de cet article, en effet, les actes juridiques, dès lors que leur validité est subordonnée à l'existence d'un écrit, pourront être établis ou conservés indifféremment sur support papier ou sur support électronique, sans voir leur validité contestée sur ce fondement. De même, les mentions manuscrites obligatoires pourront être établies, sous certaines conditions, par voie électronique.

L'objectif poursuivi ne peut que susciter le plus vif enthousiasme, tant il représente une avancée majeure pour la modernisation de notre droit et la simplification de notre procédure juridique. La révolution numérique dépasse ainsi le champ des loisirs et de la culture, dans lequel elle s'est principalement épanouie jusqu'alors, pour entrer dans celui de la vie quotidienne des sujets de droit que nous sommes. En bref, l'évolution majeure amorcée avec la reconnaissance de l'écrit électronique au titre de preuve est menée à son terme : l'écrit cesse, dans notre droit, d'être systématiquement associé au support papier.

Faut-il aller jusqu'à considérer que le support, électronique ou papier, est désormais neutre au regard de la validité de l'acte ? Poser cette question revient à s'interroger sur le choix rédactionnel fait à l'article 14. Pourquoi, en effet, n'avoir pas repris, en écho, une formulation similaire à celle de l'article 1316-3, s'agissant de la preuve, en rédigeant ainsi l'article 1108-1 : « L'écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier » ? Interrogé sur ce point par votre rapporteur pour avis, le professeur Jacques Huet a estimé que, de fait, l'écrit électronique n'a pas la même valeur que l'écrit papier : il a sa propre valeur, comparable, mais néanmoins différente. Le seul fait, d'ailleurs, que, dans l'article 1108-2 nouveau qui suit, certains actes ne puissent être valablement être établis sur support électronique en témoigne d'ailleurs : adopter des protections particulières pour les actes majeurs de la vie, en en subordonnant la validité à l'existence d'un écrit papier, revient à affirmer implicitement que l'écrit électronique reste sujet à caution dans certaines circonstances, notamment sans doute du fait de son caractère plus manipulable qu'un écrit papier en l'absence de dispositif technique certifiant sa fiabilité totale.

En bref, l'objet du premier alinéa n'est pas de dire, par analogie avec le droit de la preuve, que le support d'un acte juridique écrit est sans incidence sur sa validité, mais de poser le principe selon lequel ce n'est parce qu'il est établi et, le cas échéant, conservé sous forme électronique, que l'acte juridique écrit n'est pas valide et que sa nullité peut être invoquée sur ce fondement. Cette rédaction montre qu'en définitive, l'écrit papier reste le référent de base.

Sans doute l'expression « lorsqu'un écrit est exigé pour la validité d'un acte juridique » pose-t-elle question et conduit à évoquer le débat, qui n'est pas nouveau, sur la notion d'écrit en droit civil. En principe, l'écrit n'est exigé qu'ad probationem, en vertu de la règle du consensualisme, fondamentale dans notre droit des obligations, selon laquelle la volonté des parties suffit à faire naître l'obligation, sans condition formelle particulière.

Force est de reconnaître cependant que ce principe souffre d'exceptions nombreuses, sans qu'il soit pour autant toujours aisé d'en délimiter clairement le contour.

S'agissant des actes pour lesquels c'est la loi elle-même qui exige certaines solennités, dont l'obligation de recourir à la forme écrite, le principe défini par l'article 1108-1 nouveau est parfaitement limpide. Dans ce cas de figure où la solennité requise par la loi conditionne la naissance du droit - l'acte juridique étant, à défaut, atteint d'une nullité absolue - ce nouvel article du code civil vient éclairer l'ensemble des dispositions, multiples, dispersées dans notre droit : il est désormais clair que l'écrit auquel il est fait référence dans tous ces textes ne saurait être interprété comme désignant exclusivement l'écrit papier.

De multiples exemples d'actes pour lesquels la loi requiert explicitement un écrit pourraient être cités.

En matière d'acte juridique unilatéral, l'exemple du testament olographe est, sans doute, le plus frappant : aux termes de l'article 970 du code civil, « Le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n'est assujetti à aucune autre forme ». Cette disposition a suscité une abondante jurisprudence sur le mode et le support de l'écriture : si les supports les plus incongrus - par exemple, le dessus et le côté d'une machine à laver le linge ! (37) - sont admis, le juge a adopté, en revanche, une conception très restrictive du caractère manuscrit de l'écriture, la loi ne spécifiant ni la matière, ni l'instrument avec lesquels les caractères doivent être tracés. Notamment, une jurisprudence constante depuis 1936 considère qu'un document dactylographié ne peut être tenu pour un testament olographe valable, nonobstant la mention manuscrite apposés par le testataire au bas des feuillets numérotés, datés et signés (38).

Il est impossible d'énumérer l'ensemble des contrats dont la loi dispose expressément, à peine de nullité, qu'ils doivent être constatés par écrit. Tel est le cas, par exemple, des actes portant donation entre vifs, dont le code civil (article 931) exige qu'ils soient passés devant notaire et qu'il en reste « minute, sous peine de nullité ». Dans cette hypothèse, l'exigence de l'écrit comme condition de la validité de l'acte découle de l'obligation d'en dresser et d'en conserver une minute. Citons par ailleurs le chèque (loi du 14 juin 1865), les conventions collectives de travail (code du travail, art. L. 132-2), le contrat de construction d'une maison individuelle (code de la construction, art. L. 231-1) ou encore la licence de brevet d'invention (loi n° 68-1 du 2 janvier 1968). Dans tous les cas, il s'agit de protéger la volonté de l'une des parties ou, à tout le moins, de ralentir et alourdir la procédure pour prévenir la précipitation et favoriser la réflexion.

Reste qu'au delà de ces cas clairement identifiés pour lesquels un écrit est exigé comme conditionnant la validité de l'acte, il existe toute une série d'hypothèses plus floues quant au statut de l'écrit. Ainsi, comme le rappelle Gérard Couturier, les sanctions apportées aux règles de forme « donnent lieu depuis longtemps à des multiples discussions où sont en cause la place de la nullité parmi ces sanctions, les conditions dans lesquelles elles sont prononcées et le régime auquel sont soumises les nullités qui sanctionnent les règles de forme » (39). Ainsi, dans bien des cas, même si l'écrit est prévu, il n'est pas toujours aisé de distinguer les cas où l'écrit crée le droit des parties (condition de la validité ou écrit ad solemnitatem) de ceux où il constate ces droits (condition de la preuve ou écrit ad probationem). Comme le souligne très justement Pierre Catala, « entre les formes probatoires et les formes solennelles existe une affinité profonde que traduit le vieil adage Idem est non esse aut non probari » (40).

À l'évidence, il n'existe pas de réponse univoque à la question de savoir dans quelle mesure les exigences de forme passant par des supports spécifiques peuvent être assimilées à un formalisme touchant le contrat lui-même : cela dépend des règles et des contrats en cause. Ainsi, pour prendre l'exemple du contrat de travail, « en dépit d'une erreur répandue, il n'y a pas de règle générale imposant la forme écrite pour la conclusion de ce contrat. C'est au principe du consensualisme que se réfère, au contraire, le premier alinéa de l'article L. 121-1 du Code du travail. Des règles doivent, en revanche, assurer une information complète du salarié sur le contrat qu'il conclut avec l'employeur » (41). De même, le bail d'habitation, régi par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, semble être un exemple d'écrit sous seing privé exigé ad validitatem, l'article 3 de cet texte énonçant que « le contrat de location est établi par écrit ». Toutefois, le fait que la sanction de cette disposition ne soit pas la nullité, rend incertaine la valeur de cette obligation formelle.

Il convient, in fine, de s'en remettre au juge. Généralement, le juge privilégie plutôt l'interprétation des règles de formalisme comme touchant au droit de la preuve. Ceci dit, sur un même type d'acte, la jurisprudence a pu se révéler très évolutive. Tel est le cas, par exemple, s'agissant de la mention manuscrite exigée dans le contrat de cautionnement. Initialement, l'exigence, découlant de l'article 1326 du code civil, était regardée comme une règle de preuve. À partir de 1987, la première chambre civile de la cour de cassation l'a présentée comme une condition de validité (42). Cette jurisprudence a peu duré : depuis 1989, il s'agit à nouveau d'une règle de preuve (43).

· Les conditions de validité de l'acte juridique et de la mention manuscrite sous forme électronique

L'article 1108-1 nouveau précise par ailleurs les conditions de validité de l'acte juridique et de la mention manuscrite électronique. Aux termes mêmes de la directive (considérant 35), l'obligation de reconnaître la validité de l'écrit électronique ne saurait en effet affecter « la possibilité pour les États membres de maintenir ou d'établir pour les contrats des exigences juridiques générales ou spécifiques qui peuvent être satisfaites par des moyens électroniques, notamment des exigences en matière de sécurité des signatures électroniques ».

Dans la mesure où la loi du 13 mars 2000 sur la preuve électronique a d'ores et déjà défini, aux articles 1316-1 à 1316-4 et 1317 du code civil, les conditions dans lesquelles le recours aux technologies électroniques pour l'établissement d'actes juridiques en garantissait la fiabilité le projet de loi se contente d'y faire référence. Que l'on se situe dans le cadre de la preuve ou de la validité, les conditions techniques garantissant le recours au support électronique ne sont, en effet, pas différentes.

Aux termes de l'article 1316-1, la condition posée à la validité de l'écrit électronique est double. D'une part, il est nécessaire « que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane ». D'autre part, il faut « qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ».

Par ailleurs, l'article 1316-4 définit les fonctions de la signature, dans la mesure où il s'agit d'une condition d'existence de l'acte instrumentaire, et admet qu'une signature puisse être effectuée sous forme électronique. Cet article précise notamment que la signature électronique « consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec lequel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve du contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ».

Quant à l'article 1317 du code civil, qui définit l'acte authentique, il précise que cet acte puisse être dressé sur support électronique, s'il est établi et conservé dans des conditions fixées par décret en conseil d'État.

Par conséquent, l'article 1108-1 nouveau invite à se reporter aux deux décrets prévus par les articles 1316-4 et 1317.

Si le premier a été pris le 30 mars 2001 (44), la rédaction du décret établissant les conditions de validité de l'acte authentique électronique est encore en cours, en raison de la complexité qui s'attache à ce sujet.

Le décret du 30 mars 2001 relatif à la signature électronique

Le décret définit les règles présidant à la création de dispositifs sécurisés de signature électronique, c'est-à-dire de dispositifs garantissant que les données de signature :

- ne puissent être établies qu'une fois ;

- restent confidentielles ;

- ne soient pas falsifiables ;

- soient protégées conte l'utilisation par des tiers ;

-  n'entraînent aucune altération du contenu de l'acte à signer.

Des procédures d'évaluation et de certification de la sécurité des dispositifs sont par ailleurs prévues.

De fait, comme le soulignait le rapport sur le projet de loi portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information (45), « s'il est évident que l'acte authentique ne saurait rester en dehors de la révolution numérique, c'est une chose d'affirmer qu'il peut être dématérialisé, c'en est une autre de rendre effective cette affirmation ».C'est d'ailleurs en raison de ces difficultés pratiques qu'à la suite de l'adoption de la loi du 13 mars 2000, un groupe de travail a été mis en place sous l'égide de la direction des affaires civiles et du sceau du ministère de la justice, dont les travaux sont toujours en cours (46). Le défi est effectivement redoutable : « peut-on renoncer à certaines solennités ou les transformer sans altérer l'authenticité et amoindrir la foi de l'acte authentique ? » (47) De fait, « l'article 1317 du Code civil, qui définit l'acte authentique, a résisté à l'électricité, aux transmissions sans fil, au télégraphe, au téléphone, au télex et aux liaisons radio. (...) Voilà pourquoi l'acte authentique est hissé au sommet des actes juridiques par sa forme, sa force, sa pérennité et la sécurité corrélative qu'il apporte aux contractants ». (48) Constat qui revient à poser la question de savoir ce qui est indispensable à l'authenticité...

Le premier problème posé par l'acte authentique électronique tient au caractère indispensable de la présence de l'officier public, posé par l'article 1317 du code civil. De fait, « la présomption très forte de véracité attachée à l'acte authentique est liée à la qualité d'officier public du notaire » (49). Par conséquent, au stade de l'établissement de l'acte authentique, seule l'utilisation du traitement de texte justifie l'appellation d'acte « électronique ». Cependant, si les actionnaires, administrateurs et membres du conseil de surveillance ont, depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, la possibilité de participer et de voter aux assemblées et réunions du conseil par des moyens de télétransmission - ils « sont réputés présents » selon les articles L. 225-37 et L. 225-82 du code de commerce -, pourquoi ne pourrait-il en être de même pour les actes authentiques ? Ainsi, de la même façon que cette faculté est exclue pour les décisions importantes dans le droit de société, elle pourrait, s'agissant des actes authentiques, se limiter aux actes non obligatoires.

Le deuxième problème tient à la signature de l'officier public, dans la mesure où elle participe de l'authenticité de l'acte, contrairement à celle des parties, considérée comme secondaire par la plupart des auteurs. En la matière, les dispositions du décret du 30 mars 2001 évoqué ci-dessus, et notamment l'obligation de certification du prestataire, pourraient sans nul doute trouver à s'appliquer. Au stade actuel de la technique, aucun expert n'est toutefois en mesure de garantir la fiabilité parfaite de quelque technologie que ce soit. Reste que la présence de l'officier public, et la responsabilité qui s'y attache, tempère ce constat.

La troisième difficulté tient à la conservation et à l'archivage de l'acte. D'après les services de la Chancellerie auditionnés par votre rapporteur pour avis, cette difficulté est l'une des plus épineuses à résoudre, faute d'un outil technique susceptible de permettre le respect des dispositions de conservation de l'acte authentique, dont la durée est... illimitée. La création d'un minutier central géré par un organisme public, comme le propose le conseil supérieur du notariat, est l'une des voies les plus sérieusement envisagées, ce qui ne résout pas cependant la question complexe de la restitution de l'acte à long terme.

Enfin, un dernier problème se pose, d'une redoutable complexité également : les notions de « copie » et d'« original » d'un acte authentique électronique sont-elles pertinentes dans un environnement numérique ? Ainsi, s'il s'agit de numériser des données à partir d'un document papier original, les notions de « copies » et d' « original » ne posent pas problème. Mais qu'en sera-t-il, dans le cadre des nouvelles dispositions sur le statut de l'écrit électronique, de données directement créées de façon numérique, dont, par définition, il n'existe pas de document original papier ? Selon le professeur Jacques Huet auditionné par votre rapporteur pour avis, il peut exister un original électronique, notamment dans la mesure où l'horodatage permet sans difficulté de distinguer entre le premier acte constitué et ses clones numériques. Ajoutons, avec maître Eric Caprioli, « qu'à l'avenir, nous serons certainement confrontés à des situations nouvelles qui consisteront à reproduire sur papier des données immatérielles, comportant une signature numérique. Cette copie d'un original numérique ne pourra restituer directement la signature, sauf à la modifier et à y adjoindre le certificat établi par l'autorité de certification » (50). Là encore, l'adaptation des règles existantes en la matière n'est pas des plus aisées.

En définitive, l'article 1108-1 ouvre un chantier immense plus qu'il ne prend acte d'un besoin immédiat et c'est en cela que sa portée est essentielle. Même s'il est difficile aujourd'hui de prendre la mesure du temps nécessaire à cette évolution majeure de notre droit civil, nul doute que cette scène de fiction qu'est encore « la confection simultanée en temps réel de télé-contrats authentiques combinant les vidéo-conférences, les « e-mails » et d'autres technologies véhiculant l'écriture, l'image ou la parole » (51) est appelée à devenir réalité.

Article 1108-2 [nouveau] du code civil

Exceptions au principe de validité de l'acte juridique

L'article 1108-2 nouveau a pour objet de définir les exceptions aux possibilités de dématérialisation des actes juridiques ouvertes à l'article 1108-1 nouveau. Il s'inscrit dans le cadre de la directive, dont le considérant 36 précise que « Les États membres peuvent maintenir des restrictions à l'utilisation de contrats électroniques en ce qui concerne les contrats pour lesquels la loi requiert l'intervention de tribunaux, d'autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique. Cette possibilité couvre également les contrats requérant l'intervention de tribunaux, d'autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique afin de produire des effets à l'égard des tiers, aussi bien que les contrats requérant une certification juridique ou une attestation par un notaire ».

Trois exceptions sont ainsi définies :

- les actes sous seing privé relatif au droit de la famille et des successions (1°) ;

- les actes soumis à autorisation ou homologation de l'autorité judiciaire (2°) ;

- les actes sous seing privé relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s'ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession (3°).

La logique qui sous-tend les exceptions énumérées au 1° et au 3° est celle de la protection des parties : en l'absence de cette garantie que représente la présence du notaire, officier ministériel, il convient de protéger au mieux les droits des personnes, plus encore dans des domaines aussi essentiels que le droit de la famille ou des sûretés, personnelles (cautionnement par exemple) ou réelles, telles que le nantissement. Il serait en effet paradoxal, pour le moins, que cet outil de simplification qu'est le numérique devienne un élément qui vienne affaiblir la partie par nature faible du contrat. C'est d'ailleurs au nom de cette même logique, a contrario, que l'exception en matière d'actes relatifs aux sûretés ne s'étend pas aux professionnels ; elle est d'ailleurs tout à fait cohérente avec la tradition juridique française, qui protège davantage le particulier que le professionnel. Il convient de noter que la France, en limitant la dérogation aux actes sous seing privé en matière de droit de la famille et des successions, n'épuise pas la faculté dérogatoire ouverte par la directive, qui vise l'ensemble des actes en la matière.

À l'évidence, l'exception mentionnée au 2°, relative aux actes soumis à autorisation ou homologation de l'autorité judiciaire, ne s'inscrit pas dans la même logique. Tout au contraire, si l'on considère que l'intervention d'un dépositaire de l'autorité publique - en l'occurrence le juge - est, à l'instar de celle du notaire, une garantie suffisante pour les parties, l'exception apportée au 2° n'a pas lieu d'être. En réalité, cette exception obéit à deux considérations : d'une part, l'élément de solennité introduit par l'intervention du juge est considéré comme incompatible avec la forme électronique ; d'autre part, beaucoup plus pragmatiquement, les juridictions ne sont pas dotées des moyens nécessaires à cette évolution technologique.

Nul doute cependant qu'à l'occasion de la révision quinquennale du dispositif prévue par la directive, qui oblige les États à faire rapport sur ce point, la question du bien-fondé de certaines exceptions sera posée. À cet égard, il faut souhaiter que les justiciables, comme les juridictions, puissent aussi entrer dans la révolution numérique, sinon pour tous les actes devant être homologués par l'autorité judiciaire, du moins pour ceux pour lesquels le support électronique n'est pas incompatible avec cette procédure. Plus largement, cette clause de révision introduite par le législateur européen devra être l'occasion, dans le cadre national, de mesure l'acclimatation du phénomène numérique. La question qu'il conviendra de se poser, qui motive aujourd'hui les exceptions définies par le présent article, est simple : l'écrit électronique est-il de nature à assurer la même protection que l'écrit papier ? Tant qu'il ne sera pas cet « équivalent fonctionnel » auquel se réfère la CNUDCI, autrement dit un support neutre, la pertinence des exceptions demeurera intacte.

Le second paragraphe de l'article 14 (huitième alinéa) crée un chapitre VII nouveau dans le titre III du livre III du code civil, relatif aux contrats et obligations conventionnelles, composé de trois articles :

- l'article 1369-1 nouveau précise les obligations précontractuelles applicables en matière de contrat électronique ;

- l'article 1369-2 définit les modalités de conclusion du contrat électronique ;

- enfin, les exceptions à ces règles sont précisées à l'article 1369-3.

Chapitre VII [nouveau]

Des contrats sous forme électronique

L'introduction, dans notre code civil, d'un chapitre spécifique aux contrats conclus sous forme électronique ne saurait être interprétée comme la mise en place d'un droit des contrats spécifique, dont les règles différeraient en tous points du droit des contrats « traditionnel ». Le seul objet de ce chapitre, au-delà du fait que la France doit se conformer à ses engagements européens, est de préciser les formes propres aux contrats électroniques, aussi bien dans la phase précontractuelle qu'au stade de la conclusion du contrat elle-même.

D'aucuns considéreront que l'introduction, dans le code civil, d'obligations formelles, parfois pointilleuses, dans le domaine contractuel heurte de front le principe fondamental du consensualisme. Ce serait oublier que ce dernier est déjà largement amendé par le législateur national lui-même, comme il a été rappelé précédemment. Au total par conséquent, votre rapporteur pour avis estime, à quelques exceptions près, que le projet de loi trouve un équilibre satisfaisant entre l'obligation de satisfaire aux exigences communautaires et la nécessité de recourir à une rédaction qui s'insère dans le cadre bientôt bicentenaire du code civil.



Article 1369-1 [nouveau] du code civil

Obligations précontractuelles en matière de contrat électronique

L'article 1369-1 nouveau porte sur les obligations contractuelles requises en matière de contrats électroniques, dans la phase préalable à la conclusion du contrat. Aux termes de la directive du 8 juin 2000 (considérant 56), « les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les consommateurs (...) doivent être interprétées comme comprenant les informations sur les éléments essentiels du contenu du contrat, y compris les droits du consommateur, ayant une influence déterminante sur la décision de contracter ».

La logique qui sous-tend cet article est celle de la protection du client. Elle confirme ainsi le constat de nombre d'auteurs sur le droit des contrats : « La forme est devenue l'instrument privilégié de toute protection de la partie faible et, l'impératif de protection ayant été perçu comme primordial, s'en est nécessairement suivi un développement sans précédent du formalisme » (52). Les nouvelles technologies n'échappent pas à cette règle : « renouvelant le paradoxe autrefois souligné par Jacques Flour, l'évolution des techniques se substituant à « la civilisation du papier » ne conduit donc pas à la disparition du formalisme. Bien au contraire, elle permet la création de formes nouvelles, aptes à remplir les mêmes fonctions sans dénaturer la substance de l'acte » (53).

Il s'agit en l'occurrence d'un formalisme informatif, particulièrement répandu en droit de la consommation, ce terme désignant les dispositions imposant que soient données des informations précises au consommateur. C'est, en règle générale, dans la phase précontractuelle que sont définies ces règles à finalité informative : la réglementation s'applique ainsi d'abord à l'offre de contracter.

Le présent article n'échappe pas à cette règle.

· Dans son premier alinéa, il transpose, en quelque sorte, au domaine numérique la formule générale qui prévaut en matière de droit de la consommation, selon laquelle « tout professionnel vendeur de biens ou de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service » (art. L. 111-1 du code de la consommation). Au « mettre en mesure » de cet article fait écho le « transmet les conditions générales et particulières applicables d'une manière qui permette leur conservation et leur reproduction » dans le présent projet.

Dans la mesure où ces règles de formalisme visent, à l'instar de l'ensemble des dispositions légales imposant un certain niveau de formalisme contractuel, à protéger la partie faible, il semble tout à fait paradoxal que l'article 1369-1 nouveau du code civil vise, dans son premier alinéa, l'ensemble des offres de biens et de services, c'est-à-dire y compris celles passées entre particuliers. Dans sa rédaction actuelle, il désigne en effet « quiconque propose, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestations de services ». En outre, inclure les particuliers dans le champ de cet article revient à introduire un niveau élevé de complexité dans la vente entre particuliers, sans que rien ne le justifie. Faut-il enfin rappeler que la directive du 8 juin 2000 ne vise que les professionnels de la société de l'information, comme le rappelle d'ailleurs l'article 6, qui précise sans ambiguïté que sont visées, dans le présent chapitre, les personnes « agissant à titre professionnel » ? Votre rapporteur pour avis vous propose par conséquent de préciser que seules les offres faites à titre professionnel sont ici visées et de limiter par-là même la portée de cette disposition aux relations entre professionnels et clients. Il convient dès lors de supprimer cette mention, devenue inutile, dans le deuxième alinéa de ce même article. Suivant le rapporteur pour avis, la Commission a donc adopté, à l'article 1369-1 nouveau du code civil, l'amendement limitant le champ des dispositions de cet article aux offres faites à titre professionnel (amendement n° 48), avant d'adopter également, au deuxième alinéa de cet article, l'amendement rédactionnel proposé par le rapporteur pour avis (amendement n° 50).

Par ailleurs, l'attachement du ministère de la justice à transposer très précisément le paragraphe 3 de l'article 10 de la directive sur le commerce électronique, qui fait référence aux « clauses contractuelles » et aux « conditions générales », l'a conduit à recourir à l'expression de conditions « générales et particulières », davantage utilisée dans les contrats d'assurance ou de vente de produits destinés à un large public que dans le code civil. Votre rapporteur pour avis propose de lui substituer le terme de « contractuelles », dans la mesure où il remplit tout aussi bien l'objectif visé par la directive. La Commission a donc adopté un amendement en ce sens (amendement n° 49).

Le premier alinéa précise en outre que l'auteur de l'offre est tenu par sa proposition tant qu'elle reste accessible par voie électronique. Comme le souligne maître Eric Caprioli, le rappel de cette disposition selon laquelle l'offre de contracter oblige le professionnel permet d'éviter la circulation sur internet d'offres contractuelles déceptives émanant de professionnels n'ayant, en réalité, aucune intention de donner suite mais cherchant seulement à attirer le chaland.

L'articulation de cette disposition sur le caractère liant de l'offre avec celles prévues dans le droit commun des contrats d'affaires pose question. Qu'en est-il, par exemple, en cas de décès ou d'incapacité de l'auteur de l'offre ? En outre, dans le cadre spécifique du commerce électronique, que se passe-t-il si l'offre continue d'être présentée sur un site différent de celui de l'auteur de l'offre, alors que lui-même l'a retirée ? Pour résoudre cette double difficulté, la Commission a émis un avis favorable à l'amendement n° 18 présenté par M. Jean Dionis du Séjour, tendant à préciser que le caractère liant d'une offre contractuelle ne concerne que les offres accessibles en ligne du fait du professionnel.

Les alinéas suivants, qui transposent presque mot pour mot l'article 10.1 de la directive, détaillent le contenu informatif spécifiquement requis pour la conclusion de contrats électroniques. Les cinq éléments mentionnés visent en effet des dispositions formelles qui n'ont de raison d'être que dans le monde numérique. Ainsi en va-t-il :

- des différentes étapes à suivre pour conclure le contrat par voie électronique (1°) ;

- des moyens techniques permettant à l'utilisateur, avant la conclusion du contrat, d'identifier les erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger (2°) ;

- des langues proposées pour la conclusion du contrat (3°) ;

- le cas échéant, des modalités d'archivage du contrat par l'auteur de l'offre et des conditions d'accès au contrat archivé (4°) ;

- des moyens de consulter par voie électronique les règles professionnelles et commerciales auxquelles l'auteur de l'offre entend, le cas échéant, se soumettre (5°).

Si les dispositions du 1° et du 2° font référence à la nécessaire acclimatation des consommateurs aux technologies numériques, presque même à une véritable « pédagogie numérique » et sont destinées à leur accorder une protection supplémentaire à ce titre, le 3° rappelle le caractère non seulement transnational, mais également international de ces technologies.

Les dispositions du 4° s'écartent quelque peu des dispositions de la directive, qui laisse au professionnel de décider ou non s'il archive le contrat. Outre que cette rédaction eût été incohérente avec celle de l'article 16, qui instaure une obligation d'archivage pour certains contrats, il convenait de ne pas fermer la porte à d'autres hypothèses dans lesquelles le contrat nécessitera un archivage.

Votre rapporteur pour avis s'est longuement interrogé sur le sens des mentions figurant au 5°, notamment sur la nature des « règles professionnelles et commerciales auxquelles l'auteur de l'offre entend, le cas échéant, se soumettre ». Il s'agit en l'occurrence d'une transposition de la référence aux codes de bonne conduite que la directive « encourage ». Un groupe de travail étudie d'ailleurs, au sein du conseil national de la concurrence, les éléments essentiels qui pourraient constituer le socle d'un code de déontologie auquel les professionnels pourraient adhérer selon une démarche volontaire, dans un souci de valorisation de leur site.



Article 1369-2 [nouveau] du code civil


Conclusion du contrat électronique

L'article 1369-2 définit les modalités de conclusion du contrat électronique. Pour reprendre les termes du professeur Jérôme Huet, auditionné par votre rapporteur pour avis, il « officialise, dans une forme acceptable au regard du code civil, le double clic ».

Telle est effectivement, en pratique, la manière par laquelle s'effectuera le consentement au contrat, comme le décrivent les dispositions du premier alinéa. Ainsi, dans les faits :

- le client passe sa commande en cliquant sur les produits choisis ;

- un récapitulatif lui en est présenté, qui lui permet de « vérifier le détail de sa commande et son prix total », et, le cas échéant, « de corriger d'éventuelles erreurs » ;

- il clique à nouveau, pour exprimer son acceptation : le contrat est alors conclu.

L'accusé réception mentionné au deuxième alinéa, que l'auteur de l'offre doit renvoyer sans délai dès réception de la commande, n'a dès lors qu'un rôle purement technique, dépourvu de toute valeur contractuelle.

Il convient de préciser, comme le fait le troisième alinéa, qu'à tous les stades de la procédure décrite, sont considérés comme reçus la commande, la confirmation de l'acceptation de l'offre et l'accusé de réception dès que « les parties auxquelles ils sont adressés peuvent y avoir accès », définition utile dans la mesure où elle conditionne la mise en jeu des délais contractuels de droit commun, notamment des délais de rétractation.

Cet article a fait l'objet d'un travail de réécriture important par rapport à la rédaction initialement envisagée dans le projet de loi sur la société de l'information sous la précédente législature. Une première rédaction avait, en effet, été adoptée, qui pouvait laisser croire à la conclusion du contrat en deux temps. Trois étapes successives étaient prévues : commande par le client, accusé de réception par le professionnel et confirmation par le client de son acceptation des conditions de l'offre. Dans son avis du 3 décembre 2002 sur le projet de loi relatif à l'économie numérique (54), l'autorité de régulation des télécommunications (ART) avait accueilli avec de multiples réserves ce projet d'article, faisant notamment valoir que sa formulation pouvait prêter à confusion. En effet, celle-ci pouvait laisser entendre que la passation du contrat nécessitait trois étapes distinctes et successives. Or, si les deux premières étapes sont prévues par la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique, tel n'était pas le cas de la confirmation de l'acceptation des conditions de l'offre après réception de l'accusé de réception. S'il est certes nécessaire que le client confirme son acceptation des conditions de l'offre, toutefois, cette acceptation ne semble pas devoir forcément constituer une étape distincte intervenant après l'accusé de réception de la commande par le professionnel. Par ailleurs, outre le fait qu'un tel formalisme pouvait compliquer inutilement la passation des commandes par voie électronique, il était inutile, voire contre-productif, au regard de l'objectif de protection des consommateurs qu'il prétendait poursuivre. Une telle disposition les exposait notamment à des pratiques semblables à celles qui existent dans la grande distribution, telle que celle du prix d'appel avec dérive des ventes.

La rédaction actuelle du projet de loi est donc beaucoup plus satisfaisante. Outre qu'elle satisfait aux obligations communautaires, la solution finalement retenue présente un second mérite, qui n'est pas mince, en ce qu'elle s'inscrit dans le cadre du droit des contrats. Le processus initialement envisagé revenait en effet à créer un contrat en deux temps, notion étrangère à toute notre tradition juridique.



Article 1369-3 [nouveau] du code civil


Exceptions aux règles de formalisme en matière de contrat électronique

· L'article 1369-3 nouveau du code civil vise à préciser, dans son premier alinéa, que les dispositions formelles prévues à l'article 1369-2 ne s'appliquent pas aux courriers conclus exclusivement par échange de courriers électroniques.

Aux termes du considérant 18 de la directive, est explicitement exclue du champ des services de communication en ligne « l'utilisation du courrier électronique (...) par des personnes physiques agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de leurs activités commerciales ou professionnelles, y compris leur utilisation pour la conclusion de contrats entre ces personnes ». L'utilisation du courrier électronique dans un cadre commercial ou professionnel est donc, en principe, soumise aux dispositions de la directive en matière contractuelle. Toutefois, l'article 10.4 de la directive tempère ce principe général en ne soumettant les contrats conclus sous cette forme qu'à une partie des formalités très détaillées visées par l'article 10, en l'occurrence celle qui, dans le paragraphe 3, prévoit que « les clauses contractuelles et les conditions générales fournies au destinataire doivent l'être d'une manière qui permette de les conserver et de les archiver », disposition transposée par le troisième alinéa de l'article 1369-2 nouveau. En revanche, dans la rédaction actuelle du texte, les obligations mentionnées aux 1° à 5° de l'article 1369-1 sont applicables dans cette hypothèse.

Dans la mesure où, en raison de l'amendement qui vous a été proposé de limiter le champ de l'article 1369-1 aux offres faites à titre professionnel, il convient, par cohérence, d'exclure lesdites obligations pour les contrats conclus exclusivement par échange de courrier électronique. Par conséquent, la Commission, sur proposition du rapporteur pour avis, a adopté un amendement de cohérence rédactionnelle excluant du champ des obligations formelles énoncées à l'article 1369-1 nouveau du code civil les contrats conclus exclusivement par voie électronique (amendement n° 51).

· Faut-il, de même, préciser, au second alinéa de l'article 1369-3, que les conventions conclues entre professionnels peuvent déroger aux dispositions formelles prévues aux 1° à 5° de l'article 1369-1 (formalités informatives) et de l'article 1369-2 (modalités de formation du contrat) ? Ne vaut-il pas en la matière s'en remettre à la « philosophie » générale qui inspire le projet de loi en matière de contrats électroniques et laisser les professionnels régler dans des conventions-cadres, comme ils le font d'ores et déjà, la manière dont ils entendent régler leurs relations contractuelles ?

Interrogé sur ce point, le gouvernement invoque la nécessité de préciser, conformément aux dispositions de l'article 10.3 de la directive, que les conventions conclus entre professionnels sont soumises aux dispositions du premier alinéa de l'article 1369-1.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 14 ainsi modifié.

Article 15

Adaptation par ordonnance des formalités requises pour
les contrats passés par voie électronique

Aux termes du considérant 34 de la directive du 8 juin 2000, « chaque État membre doit ajuster sa législation qui contient des exigences, notamment de forme, susceptibles de gêner le recours à des contrats par voie électronique. Il convient que l'examen des législations nécessitant cet ajustement se fasse systématiquement et porte sur l'ensemble des étapes et des actes nécessaires au processus contractuel, y compris l'archivage du contrat. Il convient que le résultat de cet ajustement soit de rendre réalisables les contrats conclus par voie électronique ».

À l'évidence, c'est à un toilettage lourd et complexe qu'appelle la législation communautaire, qui requiert un examen systématique de notre arsenal juridique. Au vu de la diversité et de l'ampleur des textes visés, le gouvernement a jugé préférable de s'en remettre à la procédure de l'ordonnance définie par l'article 38 de la Constitution pour satisfaire aux exigences communautaires.

L'article 15 vise, par conséquent, dans un premier alinéa, à autoriser le gouvernement à procéder par ordonnance à l'adaptation des dispositions législatives subordonnant la conclusion, la validité ou les effets de certains contrats à des formalités autres que celles mentionnées à l'article 1108-1 du code civil, en vue de permettre l'accomplissement de celles-ci par voie électronique. Le deuxième alinéa précise que l'ordonnance devra être prise dans l'année suivant la publication de la présente loi, tandis qu'il est prévu, dans un dernier alinéa, qu'un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Interrogée par votre rapporteur pour avis sur les modalités pratiques de mise en œuvre de cette disposition, la Chancellerie a indiqué qu'elle procédait actuellement à un relevé des textes visés par cette disposition, qu'ils traitent de formalités liées au support papier, prévoient des formulaires détachables - ce qui est fréquent notamment en matière de droit de la consommation -, des mentions au verso, ou encore qu'il s'agisse des formalités en matière de notification ou de résiliation, typiquement la lettre recommandée avec accusé de réception.

Pour reprendre l'exemple du bail d'habitation, le congé ne saurait valablement être donné par électronique car l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 exige qu'il soit « notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou signifié par acte d'huissier ». Or, comme le souligne Maître Eric Caprioli, « la nature électronique du support interdit une notification par courrier recommandé. Ce ne sont pas les exigences relatives à l'écrit qui interdisent l'emploi d'un document électronique mais la procédure de transmission des actes qui est organisée afin d'éviter toute contestation sur la formation du contrat et pour s'assurer du consentement éclairé du contractant ».

Lorsque le travail d'identification des textes visés sera achevé, il restera à élaborer une méthode d'adaptation des formalités au support électronique. Deux options se dessinent d'ores et déjà : une approche ponctuelle, qui consisterait à adapter la procédure au cas par cas ou bien une approche par équivalence fonctionnelle, qui reviendrait à élaborer une lise des formalités existantes et à définir pour chacune un équivalent électronique, toute la difficulté tenant, dans ce cas de figure, à définir un équivalent qui satisfasse aux objectifs de la formalité. Sans préjuger du résultat des travaux en cours au ministère de la Justice, il semblerait logique qu'il faille, in fine, combiner ces deux approches, c'est-à-dire définir, autant que possible, des équivalents systématiques, et procéder à des substitutions au cas par cas dès lors que l'approche systématique se révèle inadaptée.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 16

(art. L. 134-2 [nouveau] du code de la consommation)


Conservation de la preuve du contrat conclu par voie électronique

L'article 16 introduit un nouvel article L. 134-2 dans le code de la consommation, qui met à la charge du contractant professionnel l'obligation de conserver l'écrit qui constate le contrat pendant un certain délai, déterminé par décret, et en garantit l'accès à tout moment à son cocontractant si celui-ci en fait la demande, dès lors que le contrat conclu par voie électronique porte sur une somme supérieure ou égale à un certain montant, à fixer par ce même décret.

L'article 16 recouvre des enjeux de première importance. Dans la mesure où il est peu probable que des parties ayant contracté par voie numérique doublent le contrat de documents papiers, la question de la conservation du contrat devient dès lors cruciale. Comme le souligne fort justement Maître Eric Caprioli, non seulement elle intervient, le cas échéant, dans l'administration de la preuve auprès des tribunaux, mais elle est également déterminante dans la production de pièces justificatives aux agents de diverses administrations (douanes, impôts, caisses sociales et de retraite).

Cette disposition pose ainsi la question, toujours complexe, de l'archivage des contrats. Elle rejoint le problème similaire soulevé par l'article 1316-1 du code civil : « Comment conserver des données numériques tenant lieu de documents à valeur juridique, lesquels restent soumis, ne l'oublions pas, à des règles formulées le plus souvent pour l'archivage sur des supports papier ? L'archivage ne correspond-il pas à l'idée de pérennité de l'information avec la possibilité de la restituer intacte ? » (55). Nul besoin d'ajouter que cette question recouvre, qui plus est, une dimension économique importante, la mise en œuvre de modalités de conservation efficaces du contrat requérant l'acquisition de moyens techniques spécialement dédiés (double disque, disque amovible, réseau spécifique, etc.).

Dans cette perspective, la question des montants concernés et des délais envisagés apparaît comme cruciale, ces deux paramètres pouvant, selon la combinaison qui est retenue, déterminer l'importance du matériel technique requis pour le stockage des données.

Concernant le montant, s'agira-t-il du seuil de 800 euros défini par le décret n° 80-533 du 15 juillet 1980 - modifié par le décret n° 2001-476 du 30 mai 2001 portant adaptation de la valeur en euros du montant exprimé en francs - pris pour l'application de l'article 1341 du code civil, selon lequel « il doit être passé acte devant notaires ou signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret » ? Interrogé sur ce point par votre rapporteur pour avis, le gouvernement n'est pas en mesure d'apporter de réponse à ce stade.

La question des délais appelle un préalable méthodologique nécessaire à la compréhension de l'ensemble des données du problème : en effet, « une distinction fondamentale s'impose, qui concerne les délais de conservation obligatoires des documents archivés et les délais de prescriptions relatifs aux droits et obligations y afférant » (56), même s'il est vrai que cette distinction présente un intérêt relatif au vu de l'identité des délais. Sur cette question non plus, votre rapporteur pour avis n'a pas obtenu d'informations précises.

Le gouvernement souhaite en effet se donner le temps de la réflexion sur ces questions et mener une concertation étroite avec tous les acteurs concernés, qui devrait débuter au cours de la présente année, sous l'égide de la mission pour l'économie numérique créée en mars 2001 au sein du ministère de l'économie et des finances. Comme l'a indiqué à votre rapporteur pour avis M. Gilles Brégant, secrétaire général de la mission pour l'économie numérique, le Gouvernement est totalement ouvert aux propositions des utilisateurs et des professionnels des services en ligne et s'est fixé pour objectif de parvenir à un accord qui satisfasse l'ensemble des intérêts en présence.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

N° 608

(2ère partie)

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 février 2003.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 528) pour la confiance dans l'économie numérique,

PAR MME MICHÈLE TABAROT,

Député.

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Voir le numéro :

Assemblée nationale : 612.

Audiovisuel et communication.

INTRODUCTION 5

EXAMEN DES ARTICLES (article premier à article 15)

Article 16 (art. L. 134-2 [nouveau] du code de la consommation) Conservation de la preuve du contrat conclu par voie électronique 7

Article 24 Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie 8

· La création d'une nouvelle catégorie d'agents spécialisés dotés de pouvoirs de police judiciaire 8

· Des investigations placées sous le contrôle de magistrats qui peuvent autoriser la confiscation des matériels de cryptologie 9

Article 25 (art. 132-76 [nouveau] du code pénal) Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation d'un moyen de cryptologie pour préparer ou commettre une infraction 11

Article 26 (art. 11-1 [nouveau] de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 et art. 434-15-2 [nouveau] du code pénal) Interceptions de sécurité de messages cryptés - sanctions pénales en cas de refus de communiquer leur convention de déchiffrement 13

· La possibilité de procéder à des interceptions de sécurité de messages cryptés est prévue 13

· Des sanctions pénales en cas de refus de communiquer aux autorités judiciaires la convention de déchiffrement ayant servi à la préparation ou à la commission d'une infraction sont introduites 14

Section 5 Saisine des moyens de l'État pour la mise au clair de données chiffrées 15

Article 27 (titre IV [nouveau] du code de procédure pénale) Réquisition des moyens de décryptage 15

Chapitre II Lutte contre la cybercriminalité 17

Article 30 (art. 56 du code de procédure pénale) Perquisitions en flagrant délit - Modification des pièces susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation 20

Articles 31 et 32 (art. 94 et 97 du code de procédure pénale) Perquisitions dans le cadre d'une instruction - Modification des pièces susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation 22

Article 33 (art. 323-1 à 323-3 du code pénal) Aggravation des peines encourues par les auteurs des atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données 22

Article 34 (art. 323-3-1 [nouveau], 323-4 et 323-7 du code pénal) Création d'une nouvelle incrimination en matière de droit de l'informatique 23

AMENDEMENTS ADOPTÉS OU POUR LESQUELS LA COMMISSION A ÉMIS UN AVIS FAVORABLE 27

AMENDEMENTS POUR LESQUELS LA COMMISSION A ÉMIS UN AVIS DÉFAVORABLE 33

ANNEXE 1 37

DIRECTIVE 2000/31/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 8 JUIN 2000 RELATIVE À CERTAINS ASPECTS JURIDIQUES DES SERVICES DE LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION, ET NOTAMMENT DU COMMERCE ÉLECTRONIQUE, DANS LE MARCHÉ INTÉRIEUR ("DIRECTIVE SUR LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE") 37

ANNEXE 2 65

CHARTE DE NOMMAGE DE LA ZONE « .FR » DE L'AFNIC (ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LE NOMMAGE INTERNET EN COOPÉRATION) 65

I.  DISPOSITIONS GÉNÉRALES 65

1. Préambule 65

2. Conditions d'accès au « .fr » 66

3. Dispositions pratiques 68

II.  PRINCIPES DIRECTEURS DU NOMMAGE 68

1. Répartition de la zone de nommage 68

2. Organisation générale 69

3. Syntaxe du nommage 70

4. Règles propres aux domaines publics 70

5. Règles propres aux domaines sectoriels 74

6. Règles spécifiques aux conventions de nommage 76

III.  ACTES D'ADMINISTRATION SUR LES NOMS DE DOMAINE 80

1. Création du nom de domaine 80

2. Modifications relatives au nom de domaine ou aux éléments techniques et administratifs 81

3. Transmission du nom de domaine 81

4. Cession d'un nom de domaine 87

5. Changement de prestataire 87

6. Suppression du nom de domaine 88

7. Noms de domaine orphelins 88

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 89

Article 16

(art. L. 134-2 [nouveau] du code de la consommation)


Conservation de la preuve du contrat conclu par voie électronique

L'article 16 introduit un nouvel article L. 134-2 dans le code de la consommation, qui met à la charge du contractant professionnel l'obligation de conserver l'écrit qui constate le contrat pendant un certain délai, déterminé par décret, et en garantit l'accès à tout moment à son cocontractant si celui-ci en fait la demande, dès lors que le contrat conclu par voie électronique porte sur une somme supérieure ou égale à un certain montant, à fixer par ce même décret.

L'article 16 recouvre des enjeux de première importance. Dans la mesure où il est peu probable que des parties ayant contracté par voie numérique doublent le contrat de documents papiers, la question de la conservation du contrat devient dès lors cruciale. Comme le souligne fort justement Maître Eric Caprioli, non seulement elle intervient, le cas échéant, dans l'administration de la preuve auprès des tribunaux, mais elle est également déterminante dans la production de pièces justificatives aux agents de diverses administrations (douanes, impôts, caisses sociales et de retraite).

Cette disposition pose ainsi la question, toujours complexe, de l'archivage des contrats. Elle rejoint le problème similaire soulevé par l'article 1316-1 du code civil : « Comment conserver des données numériques tenant lieu de documents à valeur juridique, lesquels restent soumis, ne l'oublions pas, à des règles formulées le plus souvent pour l'archivage sur des supports papier ? L'archivage ne correspond-il pas à l'idée de pérennité de l'information avec la possibilité de la restituer intacte ? » (57). Nul besoin d'ajouter que cette question recouvre, qui plus est, une dimension économique importante, la mise en œuvre de modalités de conservation efficaces du contrat requérant l'acquisition de moyens techniques spécialement dédiés (double disque, disque amovible, réseau spécifique, etc.).

Dans cette perspective, la question des montants concernés et des délais envisagés apparaît comme cruciale, ces deux paramètres pouvant, selon la combinaison qui est retenue, déterminer l'importance du matériel technique requis pour le stockage des données.

Concernant le montant, s'agira-t-il du seuil de 800 euros défini par le décret n° 80-533 du 15 juillet 1980 - modifié par le décret n° 2001-476 du 30 mai 2001 portant adaptation de la valeur en euros du montant exprimé en francs - pris pour l'application de l'article 1341 du code civil, selon lequel « il doit être passé acte devant notaires ou signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret » ? Interrogé sur ce point par votre rapporteur pour avis, le gouvernement n'est pas en mesure d'apporter de réponse à ce stade.

La question des délais appelle un préalable méthodologique nécessaire à la compréhension de l'ensemble des données du problème : en effet, « une distinction fondamentale s'impose, qui concerne les délais de conservation obligatoires des documents archivés et les délais de prescriptions relatifs aux droits et obligations y afférant » (58), même s'il est vrai que cette distinction présente un intérêt relatif au vu de l'identité des délais. Sur cette question non plus, votre rapporteur pour avis n'a pas obtenu d'informations précises.

Le gouvernement souhaite en effet se donner le temps de la réflexion sur ces questions et mener une concertation étroite avec tous les acteurs concernés, qui devrait débuter au cours de la présente année, sous l'égide de la mission pour l'économie numérique créée en mars 2001 au sein du ministère de l'économie et des finances. Comme l'a indiqué à votre rapporteur pour avis M. Gilles Brégant, secrétaire général de la mission pour l'économie numérique, le Gouvernement est totalement ouvert aux propositions des utilisateurs et des professionnels des services en ligne et s'est fixé pour objectif de parvenir à un accord qui satisfasse l'ensemble des intérêts en présence.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 24

Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie

Parce que la cryptologie est un instrument technologique hautement sophistiqué, il importe que les personnels chargés de veiller au respect de son régime d'emploi, qui est déterminé par le présent projet, soient spécialisés en cette matière. Le présent article a précisément pour objet de prévoir la création d'une telle catégorie d'agents, ainsi que les modalités de leur intervention.

· La création d'une nouvelle catégorie d'agents spécialisés dotés de pouvoirs de police judiciaire

Le premier alinéa de cet article prévoit que les agents compétents pour constater par procès verbal les infractions aux dispositions des articles 18, 19, 22 et 23 du présent projet tendant à la libéralisation de l'usage de la cryptologie, sont « habilités à cet effet par le Premier ministre » et « assermentés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ».

Bien évidemment, cette compétence ne doit pas avoir pour effet d'interdire l'intervention des autres agents investis de pouvoirs de police judiciaire et le début du premier alinéa le précise expressément. En effet, on rappellera que la mission de la police judiciaire de droit commun est de constater les infractions à la loi pénale, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs tant qu'une information n'est pas ouverte (article 14 du code de procédure pénale). Celle-ci peut donc être amenée à conduire des investigations en matière de fraude au régime légal de la cryptologie sans devoir pour autant se dessaisir de l'affaire au profit des agents habilités. De même, il ne saurait être question de priver les agents des douanes des prérogatives qu'ils détiennent en application des dispositions de l'article 64 du code des douanes, qui les autorisent à rechercher et à constater les infractions aux dispositions du code des douanes dont l'application en matière d'importation ou d'exportation illégales de matériel de cryptologie n'est pas à exclure. Là aussi, la rédaction du présent article préserve leurs compétences.

En raison de leur statut d'agents habilités bénéficiant de pouvoirs de police judiciaire, les prérogatives qui leur sont attribuées doivent être strictement déterminées par la loi. Le deuxième alinéa de cet article s'y emploie en précisant qu'ils peuvent accéder « aux locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel en vue de rechercher et de constater les infractions, demander la communication de tous les documents professionnels et en prendre copie, recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications ». En outre, il est indiqué qu'ils ne peuvent accéder à ces locaux que pendant leurs heures d'ouvertures au public et, à défaut, entre 8 heures et 20 heures. On observera qu'à la différence des officiers de police judiciaire de droit commun auxquels est reconnue la possibilité, sous certaines conditions prévues par le code de procédure pénale, de procéder à des visites domiciliaires, les agents habilités au titre du présent article « ne peuvent accéder aux locaux qui servent de domicile » à l'intéressé. Cette restriction n'est pas sans rappeler celle opposable à d'autres agents spécialisés dotés de pouvoirs de police judiciaire, à l'instar des inspecteurs du travail qui, en application des dispositions de l'article L. 611-8 du code du travail, ne peuvent pénétrer dans les locaux qui servent de domicile qu'après en avoir reçu l'autorisation des occupants.

· Des investigations placées sous le contrôle de magistrats qui peuvent autoriser la confiscation des matériels de cryptologie

Le droit commun, en particulier l'article 12 du code de procédure pénale, place la police judiciaire sous la direction du procureur de la République. Le dispositif proposé par le présent article ne retient pas formellement cette solution mais aboutit à un régime juridique qui s'en approche. En effet, le troisième alinéa du présent article dispose que le procureur de la République est « préalablement informé des opérations envisagées en vue de la recherche des infractions » et qu'il peut s'opposer à celles-ci. Dans ces conditions, ce magistrat exerce bien, de fait, la direction des investigations menées par les agents habilités. De surcroît, il est destinataire dans les cinq jours des procès verbaux dressés par les agents dont une copie est d'ailleurs remise à l'intéressé.

A ce contrôle exercé par un magistrat du parquet, s'ajoute l'intervention d'un juge du siège lorsque les agents habilités désirent procéder à la saisie de moyens de cryptologie. Ainsi, le quatrième alinéa du présent article prévoit que les agents habilités peuvent saisir de tels moyens sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du président du tribunal de grande instance ou du juge des libertés et de la détention. A cet égard, il est quelque peu surprenant que des agents dotés de pouvoirs de police judiciaire, placés de fait sous le contrôle du procureur de la République, soient autorisés à s'adresser directement à un magistrat du siège aux fins de saisie de matériel de cryptologie. Il semblerait en effet préférable, notamment en termes d'efficacité de la réponse pénale, de prévoir que la demande de saisie est transmise aux magistrats du siège par l'intermédiaire du procureur de la République qui pourra, compte tenu de ses résultats, décider de mettre en œuvre ou non l'action publique conformément aux dispositions de l'article 31 du code de procédure pénale. A titre d'illustration, on fera observer que la procédure de saisie conservatoire en matière de terrorisme prévue par l'article 706-24-2 du même code est ordonnée par le juge des libertés et de la détention sur requête du procureur de la République.

S'agissant de la demande de saisie, il est prévu qu'elle doit comporter « tous les éléments d'information » de nature à la justifier. Sur le fond, l'intervention de juges du siège, inamovibles ainsi que le prévoit l'article 64 de la Constitution, constitue une garantie essentielle et nécessaire dans le cadre d'une procédure susceptible de conduire à la saisie de biens privés. Il demeure toutefois que l'on peut s'interroger sur l'opportunité d'offrir au procureur de la République, le choix de saisir le président du tribunal de grande instance ou le juge des libertés et de la détention qui a lui-même le rang de président, de premier vice-président ou de vice-président ainsi que le précise l'article 137-1 du code de procédure pénale. En effet, dans un souci de simplification procédurale et afin de prévenir d'inévitables divergences de jurisprudences au sein d'une même juridiction, il semblerait préférable d'unifier dans les mains d'un seul des deux magistrats du siège précités le pouvoir d'autoriser la saisie de moyens de cryptologie.

Après avoir adopté un amendement du rapporteur pour avis, corrigeant une erreur de référence (amendement n° 52), la Commission a adopté un amendement du même auteur prévoyant que la demande de saisie des matériels de cryptologie présentée par les agents spécialisés doit être transmise par l'intermédiaire du procureur de la République au seul président du tribunal de grande instance ou au juge du siège délégué par lui (amendement n° 53).

A supposer que lesdits magistrats du siège autorisent les agents habilités à procéder à la saisie de moyens de cryptologie, cette opération s'effectuera sous leur contrôle et leur autorité ainsi que le précise la dernière phrase du quatrième alinéa du présent article. Comme le prévoit le texte, les matériels saisis feront immédiatement l'objet d'un inventaire qui sera annexé au procès-verbal dressé sur les lieux, les originaux de ces documents étant transmis au juge ayant ordonné la saisie. Enfin, en contrepartie de ce pouvoir, le présent article confère aux magistrats du siège le droit à tout moment, d'office ou sur la demande de l'intéressé, d'ordonner la mainlevée de la saisie.

On observera néanmoins que le dispositif proposé par le présent article n'indique pas ce qu'il advient des pièces saisies. Sont-elles confisquées sans aucune limite de durée, constituent-elles des pièces susceptibles d'être versées au dossier de la procédure si le procureur de la République décide de mettre en œuvre l'action publique ? Cette dernière solution semble préférable et mériterait d'être précisée. A l'initiative de son rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement en ce sens (amendement n° 54).

Puis la Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 25

(art. 132-76 [nouveau] du code pénal)


Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation d'un moyen
de cryptologie pour préparer ou commettre une infraction

La libéralisation de la cryptologie proposée par l'article 18 du présent projet doit, corrélativement, s'accompagner du renforcement des sanctions pénales encourues par les personnes qui l'utiliseront à des fins criminelles. Tel est précisément l'objet du présent article, qui fait de l'usage de la cryptologie une circonstance aggravante lorsque ce procédé «  a été utilisé pour préparer ou commettre un crime ou un délit ou pour en faciliter la préparation ou la commission ». Toutefois, lorsque le législateur est désireux d'aggraver les sanctions pénales à raison du recours à un procédé particulier, deux méthodes s'offrent à lui.

La première, dont la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs, est une bonne illustration, constitue à insérer dans chaque incrimination la référence particulière à l'usage dudit procédé. En l'espèce, la loi du 17 juin 1998 a souhaité entraver le développement du réseau Internet en matière d'exploitation sexuelle en faisant de « l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications » une circonstance aggravante pour un certain nombre de crimes et délits qu'elle a modifiés à cet effet. Il en est ainsi, à titre d'exemple, de la pédo-pornographie (troisième alinéa de l'article 227-23 du code pénal) ou du proxénétisme (10° de l'article 225-7 du même code). Or, cette démarche emporte le risque d'omettre un certain nombre d'incriminations, sachant qu'il en existerait dans notre droit, selon certaines estimations, près de 15 000, dont les auteurs échapperont, de ce fait, au renforcement de la répression souhaité par le législateur, ce qui n'est pas satisfaisant.

C'est pourquoi la méthode suivie par le présent article est différente et tend, à l'inverse, à prévoir une disposition de portée générale aggravant les peines encourues dans tous les cas d'utilisation d'un moyen de cryptologie. A cet effet, le présent article insère dans le code pénal, au sein du titre III, relatif aux peines, du livre premier, regroupant les dispositions générales, un article 132-76 nouveau qui aggrave les sanctions pénales en se référant au quantum de la peine encourue lorsque le crime ou le délit a été commis de façon ordinaire, sans avoir recours à un moyen de cryptologie. Cette méthode est également celle qui a été retenue en matière de terrorisme, comme le montre l'article 421-3 du code pénal.

Ainsi, le 1° de l'article 132-76 dispose que lorsque le crime est puni de trente ans de réclusion criminelle, la peine est portée à la réclusion à perpétuité dans l'hypothèse où un moyen de cryptologie a été utilisé pour sa préparation ou sa commission. Le 2°  procède la même manière et porte la peine à trente ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de vingt ans de réclusion. Le 3° porte la peine d'emprisonnement à vingt ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de quinze ans de réclusion ; le 4° la porte à quinze ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de dix ans d'emprisonnement ; le 5° la porte à dix ans d'emprisonnement lorsque les faits sont passibles de cinq ans d'emprisonnement et le 6° porte à sept ans d'emprisonnement la peine encourue lorsque l'infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement. Enfin, s'agissant des délits punis de trois ans d'emprisonnement au plus, le 7° dispose que le maximum de la peine privative de liberté est porté au double lorsqu'un moyen de cryptologie a été utilisé.

Au-delà de cette légitime aggravation des sanctions pénales, le dispositif proposé introduit néanmoins une rare novation dans notre droit pénal, qu'il convient de relever. En effet, le dernier alinéa de l'article 132-76 nouveau dispose que ces sanctions ne sont pas applicables à « l'auteur ou au complice de l'infraction qui, à la demande des autorités judiciaires, leur a remis la version en clair des messages chiffrés ainsi que les conventions secrètes nécessaires au déchiffrement ».

Ce faisant, il s'agit d'introduire la notion, aujourd'hui étrangère au droit français, de « repenti » qui soulève certaines interrogations. En effet, si l'objectif poursuivi est d'améliorer l'interpellation des auteurs d'une infraction grâce à la protection offerte à l'un d'entre eux désireux de coopérer avec les autorités judiciaires, ce que l'on peut comprendre, la portée générale du dispositif proposé n'emporte pas pleinement l'adhésion de votre rapporteur pour avis. En effet, est-il envisageable, de renoncer à l'aggravation des peines à l'endroit d'un auteur de crime, un terroriste par exemple, ayant recouru à la cryptologie et qui fournirait ensuite les moyens de déchiffrer les messages qu'il a envoyés ? A tout le moins, le champ de l'exception prévue par le dernier alinéa de cet article, devrait, pour les infractions les plus graves, être limité aux seuls complices.

Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur pour avis (amendement n° 55), la Commission a adopté un amendement du même auteur limitant le champ d'application de la procédure d'atténuation des peines en prévoyant d'exclure de son bénéfice les auteurs des infractions punies d'une peine supérieure à quinze ans d'emprisonnement (amendement n° 56). La Commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

Article 26

(art. 11-1 [nouveau] de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991
et art. 434-15-2 [nouveau] du code pénal)


Interceptions de sécurité de messages cryptés - sanctions pénales
en cas de refus de communiquer leur convention de déchiffrement

A la suite des attentats commis le 11 septembre 2001, les investigations menées par les services de police américains et européens ont révélé que les terroristes avaient largement eu recours aux réseaux numériques et à des messages cryptés pour échanger des informations et préparer leurs crimes. C'est pourquoi, nombre de gouvernements ont décidé d'adopter des dispositions spécifiques afin de renforcer l'efficacité de la lutte contre le terrorisme.

S'agissant de la France, des dispositions en ce sens ont été introduites dans la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne mais leur validité est limitée à une durée « allant jusqu'au 31 décembre 2003 », ainsi que le prévoit son article 22. Or, chacun conviendra que la menace terroriste n'a nullement disparue et qu'il n'est pas souhaitable, ni prudent, de se priver d'un certain nombre d'instruments juridiques à partir du 31 décembre prochain.

C'est pourquoi le présent article a pour objet de pérenniser les dispositions introduites par l'article 31 de la loi du 15 novembre 2001 précitée et qui sont relatives aux interceptions de sécurité et aux sanctions pénales encourues par les personnes refusant de remettre aux autorités judiciaires la convention de déchiffrement des messages. A cet effet, le paragraphe I du présent article abroge l'article 31 de la loi du 15 novembre 2001, tandis que ses deux paragraphes suivants reprennent littéralement son dispositif pour l'insérer de façon pérenne dans notre droit positif.

· La possibilité de procéder à des interceptions de sécurité de messages cryptés est prévue

Le paragraphe II du présent article tend à insérer un article 11-1 nouveau dans la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des télécommunications. Son dispositif prévoit que les personnes assurant des prestations de cryptologie sont tenues de remettre aux agents « autorisés dans les conditions prévues à l'article 4 », sur leur demande, les conventions permettant le déchiffrement des données cryptées au moyen des prestations qu'elles ont fournies.

On rappellera que l'article 3 de la loi du 10 juillet 1991 qui détermine les conditions autorisant le recours aux interceptions de sécurité prévoit qu'elles sont autorisées « à titre exceptionnel » et doivent avoir pour objet de « rechercher les renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la prévention du terrorisme, de la criminalité ou de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées ». S'agissant des autorités compétentes pour autoriser ces interceptions, l'article 4 précité prévoit que seul le Premier ministre, ou l'une des deux personnes spécialement déléguées par lui, peuvent ordonner une telle mesure par une « décision écrite et motivée ». Cette autorisation n'est valable que pour une durée maximale de quatre mois, mais est renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée, ainsi que le prévoit l'article 6 de la même loi. Enfin, l'on observera que les renseignements ainsi recueillis ne peuvent servir à d'autres fins que celles énumérées à l'article 3 mais ne font pas obstacle à l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale qui, rappelons-le, oblige toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire d'informer sans délai le procureur de la République des crimes ou délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

La cryptologie étant une discipline hautement complexe, le dispositif proposé par l'article 11-1 nouveau prévoit, fort prudemment, que les agents autorisés peuvent demander aux fournisseurs de prestations de cryptologie de « mettre eux-mêmes en œuvre ces conventions » de déchiffrement, sauf si ceux-ci démontrent qu'ils ne sont pas en mesure de satisfaire à ces réquisitions. Afin de garantir l'efficacité des réquisitions adressées par les agents habilitées, le deuxième alinéa de l'article 11-1 nouveau punit d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait de ne pas y déférer. Pour sa part, le dernier alinéa de cet article renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les procédures suivant lesquelles l'obligation de transmettre les conventions de déchiffrement est mise en œuvre et les conditions de sa prise en charge financière par l'État.

· Des sanctions pénales en cas de refus de communiquer aux autorités judiciaires la convention de déchiffrement ayant servi à la préparation ou à la commission d'une infraction sont introduites

Le paragraphe III du présent article insère au sein de la deuxième section, relative aux entraves à l'exercice de la justice, du chapitre IV du titre III du livre IV du code pénal, un article 434-15-2 nouveau qui punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, pour quiconque ayant connaissance de la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie « susceptible d'avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit », de refuser de la mettre à la disposition des autorités judiciaires, procureur de la République ou juge d'instruction, qui en font la demande. Le second alinéa de cet article aggrave la sanction en la portant à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende si ce refus « aurait permis d'éviter la commission d'un crime ou d'un délit ou d'en limiter les effets ».

Ces dispositions complètent utilement le droit en vigueur qui ne permet pas de sanctionner ce type de comportement. En effet, les différentes dispositions de la deuxième section précitée sanctionnent, notamment, la menace commise envers un magistrat ou un juré (article 234-8 du code pénal), leur tentative de subornation (234-9), le fait, pour quiconque connaissant la preuve de l'innocence d'une personne, de refuser de témoigner (article 234-11), le témoignage mensonger (article 234-13) ou encore la subornation d'un interprète ou d'un expert (articles 434-19 et 434-21) mais non l'usage de la cryptologie qui peut, indéniablement, constituer une entrave à l'exercice de la justice.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Section 5

Saisine des moyens de l'État pour la mise au clair de données chiffrées

Article 27

(titre IV [nouveau] du code de procédure pénale)


Réquisition des moyens de décryptage

A l'instar du précédent, le présent article a pour objet de pérenniser des dispositions de la loi du 15 novembre 2001, et plus précisément celles figurant à l'article 30, relatives à la « mise au clair des données chiffrées nécessaires à la manifestation de la vérité ». A cette fin, le paragraphe I du présent article abroge l'article 30 précité dont les dispositions sont insérées dans le code de procédure pénale par le paragraphe II qui introduit, après l'article 230 dudit code, un titre IV nouveau qui regroupe les articles 230-1 à 230-5 nouveaux.

Sur le fond, l'article 230-1 nouveau prévoit que, lorsqu'il apparaît que des données saisies ou obtenues au cours d'une enquête ou de l'instruction ont fait l'objet d'opérations de transformation empêchant d'y accéder en clair, le procureur de la République ou, le cas échéant, le juge d'instruction peut « désigner toute personne physique ou morale qualifiée, en vue d'effectuer les opérations techniques permettant d'obtenir la version en clair de ces informations ainsi que, dans le cas où un moyen de cryptologie a été utilisé, la convention secrète de déchiffrement, si cela apparaît nécessaire ».

Ces dispositions spécifiques aux messages cryptés s'appliquent sans préjudice de l'application des dispositions de droit commun du code de procédure pénale (articles 60, 77-1 et 156 ), qui confèrent aux officiers de police judiciaire, au procureur de la République ou au juge d'instruction, le droit de recourir à « toutes personnes qualifiées » s'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, ainsi que le rappelle le premier alinéa de l'article 230-1 nouveau.

Toutefois, si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement et que les nécessités de l'enquête ou de l'instruction l'exigent, le procureur de la République, le juge d'instruction mais également la juridiction de jugement saisie de l'affaire peuvent « prescrire le recours aux moyens de l'État soumis au secret de la défense nationale » selon les modalités prévues par les articles 230-2 et 230-3 nouveaux du code de procédure pénale. Il s'agit de permettre, dans les affaires les plus graves et les plus complexes, de renforcer l'efficacité des poursuites et des investigations judiciaires en facilitant l'accès des magistrats à des moyens particulièrement sophistiqués, aujourd'hui réservés aux seules forces en charge de la défense nationale.

A supposer que les magistrats ou les juridictions précités décident de recourir auxdits moyens, il est nécessaire d'en prévoir les modalités pratiques. Tel est précisément l'objet de l'article 230-2 nouveau qui dispose que ce recours doit prendre la forme d'une réquisition écrite « adressée au service national de police judiciaire chargé de la lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information » et accompagnée du support physique contenant les données à mettre au clair. La réquisition doit préciser les délais dans lesquels les opérations de mise au clair doivent être réalisées, sachant que l'autorité judiciaire requérante peut ordonner l'interruption des opérations prescrites.

En l'état actuel de l'organisation administrative des services de la police judiciaire, l'organisme compétent pour traiter de ces réquisitions est l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information (OCLCTIC) créé par le décret n° 2000-405 du 15 mai 2000. Toutefois, on observera que la rédaction proposée par le présent article est formulée en des termes suffisamment neutres pour ne pas désigner uniquement l'OCLCTIC et permettra, en conséquence, à son dispositif de ne pas devenir inapplicable en raison d'une modification ultérieure des structures administratives du ministère de l'intérieur.

Une fois saisi, le service de police judiciaire transmet sans délai la réquisition à un organisme technique soumis au secret de la défense nationale et désigné par décret. En effet, l'OCLCTIC, office central à vocation interministérielle et à compétence nationale a, certes, pour mission de réaliser des enquêtes judiciaires technologiquement complexes et d'assister techniquement d'autres services de police judiciaires, par exemple en matière de pédophilie sur Internet ou de trafic de stupéfiants, mais il n'a pas vocation à mettre en œuvre directement l'ensemble des moyens technologiques nécessaires, qui exigent des compétences extrêmement variées (des ingénieurs et des informaticiens) et des moyens humains considérables.

Toutefois, le dernier alinéa de l'article 230-2 indique que les données protégées au titre du secret de la défense nationale ne peuvent être communiquées que dans les conditions prévues par la loi n° 98-567 du 8 juillet 1998 instituant une Commission consultative du secret défense. On rappellera que cette commission est une autorité administrative indépendante qui a pour objet de donner un avis à la suite de la demande d'une juridiction française tendant à la déclassification et la communication d'informations ayant fait l'objet d'une classification en application des dispositions de l'article 413-9 du code pénal. Ce dernier définit les données présentant un « caractère de secret de la défense nationale » comme les renseignements, procédés, objets, documents, données informatiques ou fichiers « dont la divulgation est de nature à nuire à la défense nationale ou pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale ».

Pour sa part, l'article 230-3 nouveau précise les modalités de transmission des résultats des opérations tendant à la mise au clair des données. Ainsi, dès leur achèvement, ou dès qu'il apparaît que ces opérations sont impossibles, ou à l'expiration du délai prescrit par l'autorité judiciaire, les résultats sont retransmis au service national de la police judiciaire, qui les remet « immédiatement » à l'autorité requérante. Fort logiquement, ces résultats sont accompagnés des indications techniques utiles à leur compréhension, ainsi que d'une attestation visée par le responsable de l'organisme technique « certifiant la sincérité des résultats transmis ». Enfin, le dernier alinéa de cet article dispose que les éléments ainsi obtenus font l'objet d'un procès verbal et sont versés au dossier de la procédure. Cette précision est d'importance puisqu'elle garantit que les éventuels éléments de preuve ainsi obtenus seront accessibles aux parties et pourront, le cas échéant, être contestés selon les voies de recours de droit commun. En revanche, les décisions judiciaires de recourir aux moyens permettant la mise au clair des données ne doivent pas pouvoir faire l'objet de contestations car elles constituent des mesures d'investigations ne revêtant pas le caractère juridictionnel. L'article 230-4 nouveau le prévoit expressément et peut d'ailleurs être rapproché des dispositions du second alinéa de l'article 100 du même code, qui indique que la décision du juge d'instruction de prescrire l'interception des correspondances émises par la voie des télécommunications « n'a pas de caractère juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours ».

Enfin, l'article 230-5 nouveau se borne à préciser que, sans préjudice des obligations découlant du secret de la défense nationale, les agents requis en application des dispositions des articles 230-1 et suivants sont tenus d'apporter leur concours à la justice.

En conclusion, les dispositions du présent article, ainsi que celles figurant à l'article précédent constituent le juste corollaire de la libéralisation du régime de la cryptologie prévue par l'article 18 du présent projet. En effet, si la libéralisation de ces moyens a pour principal objet de sécuriser les échanges d'informations sur les réseaux en garantissant leur confidentialité, ce qui devrait sans conteste améliorer la confiance des acteurs en la matière et contribuer au développement économique de ce secteur, elle ne saurait avoir pour effet d'amoindrir la capacité d'élucidation des services de police judiciaire. En renforçant les moyens technologiques au service de la police et des autorités judiciaires tout en sanctionnant pénalement le refus de mettre à leur disposition les conventions de déchiffrement ayant servi à préparer ou à commettre une infraction, le texte propose un juste équilibre entre ces deux exigences.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Chapitre II

Lutte contre la cybercriminalité

Le développement des technologies de l'information, et tout particulièrement d'Internet, constitue indéniablement un progrès dans le droit reconnu à chacun d'accéder librement aux informations qu'il recherche, mais représente également un facteur considérable de gains de productivité pour les entreprises et de croissance pour l'ensemble de l'économie, qu'il convient d'encourager. Quelques données statistiques illustrent clairement cette dimension. Ainsi, le nombre des foyers possédant un PC est passé de 4,074 millions en 2001 (soit 16,7 % d'entre eux) à près de 5,40 millions au premier trimestre 2002 (soit 22 % des foyers). S'agissant du commerce électronique entre les entreprises et les consommateurs (dit « B to C »), son montant a atteint 2 350 millions d'euros en 2002 contre 685 millions seulement en 2000, soit une progression de 343 % (59).

Les graphiques suivants illustrent clairement l'impact macroéconomique croissant des technologies de l'information et de la communication (TIC). Ainsi, la part de l'investissement en TIC dans l'investissement productif est passée, en France, de 6,8 % en 1980 à 14,4 % en 2000.

PART DE L'INVESTISSEMENT EN TIC DANS L'INVESTISSEMENT PRODUCTIF

En % (calculs sur données en valeur (1))

Types d'investissement en TIC

Années

France

Etats-Unis

Équipements de communication

1980

2,5

5,1

 

1990

3,5

7,0

 

1995

3,9

8,7

 

2000

4,4

8,3

Logiciels

1980

1,3

3,0

 

1990

2,6

8,0

 

1995

3,5

10,1

 

2000

6,1

13,6

Équipements de communication

1980

2,9

7,1

 

1990

3,2

7,5

 

1995

3,5

7,3

 

2000

3,9

8,0

Total TIC

1980

6,8

15,2

 

1990

9,4

22,5

 

1995

10,8

26,1

 

2000

14,4

29,9

(1) Les données en valeur ont plus de sens que les données en volume à cause de l'utilisation d'indices chaînes.

Source : Colecchia-Schreyer (2001), tableau 2, in Le contre-choc de la « nouvelle économie », une étude de cas sur cinq pays de l'OCDE, La revue de l'OFCE, octobre 2002, p. 254.

La conséquence économique de cette part croissante des investissements en TIC se traduit dans l'augmentation de leur contribution annuelle moyenne à la croissance du PIB. En effet, celle-ci s'établissait en France, producteurs et utilisateurs de TIC confondus, à 0,8 point de PIB entre 1996 et 1999, soit 42 % de l'ensemble de la croissance obtenue, contre seulement 0,3 % entre 1990 et 1995, soit 33 % du total de celle-ci (voir le tableau ci-contre)

CONTRIBUTION ANNUELLE MOYENNE À LA CROISSANCE DU PIB

Points de pourcentage

 

Producteurs de TIC

Utilisateurs de TIC

Croissance du PIB

 

1990-1995

1996-1999

1990-1995

1996-1999

1990-1995

1996-1999

Finlande

0,3

1,5

- 0,5

1,0

- 0,5

5,1

France

0,2

0,5

0,1

0,3

0,9

1,9

Pays-Bas

0,1

0,6

0,5

1,3

2,1

3,7

États-Unis

0,4

0,8

0,5

1,9

2,3

4,7

Les contributions sont calculées en pondérant la variation annuelle du PIB en volume de chaque secteur par la part du PIB de ce secteur en (t-1) dans le PIB total.

Le total n'est pas égal à la somme des composantes du fait des arrondis.

Source : Van Ark (2001), in Le contre-choc de la « nouvelle économie », une étude de cas sur cinq pays de l'OCDE, La revue de l'OFCE, octobre 2002, p. 254.

Cependant, comme toute innovation, les technologies de l'information ont également généré de nouveaux types de comportements délictueux dont le développement altère la confiance des acteurs dans la sécurité des réseaux et entrave son expansion. L'ampleur de la « cybercriminalité » semble néanmoins difficile à évaluer puisque les statistiques recensent les infractions selon leur nature et non en fonction des moyens techniques utilisés par leurs auteurs. Dès lors, toutes les estimations de ce phénomène criminel sont nécessairement fondées sur des extrapolations des données existantes ce qui les rend contestables. De surcroît, s'agissant des atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données (STAD), qui sont pourtant des infractions spécifiques, ni les statistiques de la délinquance établies par le ministère de l'intérieur selon la nomenclature de « l'état 4001 », ni celles figurant au sein de l'annuaire statistique de la justice ne les font apparaître distinctement, ce qui est regrettable. Il serait d'ailleurs tentant, vraisemblablement à tort, d'en déduire leur caractère non significatif. En effet, il est probable que les entreprises ou les administrations victimes de ces délits sont réticentes à les déclarer afin de ne pas altérer la confiance des internautes ou de leurs clients dans la sûreté de leur réseau. Cependant, selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, les faits de cybercriminalité seraient passés de moins d'une dizaine en 1988 à près de 2 000 en l'an 2000.

Sur le plan juridique, la cybercriminalité regroupe principalement deux catégories de crimes et délits : ceux de droit commun commis à l'aide ou exclusivement sur les réseaux numériques, et les atteintes spécifiques aux systèmes informatiques ou aux données personnelles. Or, la répression de ces infractions est aujourd'hui imparfaitement assurée par les dispositions en vigueur en raison de l'inadaptation des incriminations aux spécificités des délits numériques. Ainsi, la répression des infractions de droit commun commises à l'aide de, ou exclusivement sur, les réseaux numériques, à l'instar de la diffusion de contenus illicites, relève de l'application de la loi pénale générale, mais très peu d'incriminations ont été adaptées aux spécificités des réseaux numériques, ce qui n'est pas satisfaisant. On mentionnera toutefois, que constitue une circonstance aggravante le fait de commettre le délit de proxénétisme « grâce à l'utilisation, pour la diffusion de message à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications » (60), ce qui désigne, sans ambiguïté, l'hypothèse du recours à Internet (61) mais il s'agit là d'un exemple isolé.

Quant aux infractions spécifiques contre les biens, le nouveau code pénal comporte, au sein du chapitre III du titre II du livre troisième, les articles 321-1 à 323-7 réprimant les atteintes aux systèmes de traitement automatisé des données (STAD), mais ces dispositions, introduites par la loi dite « Godfrain » du 5 janvier 1988, n'ont pas été actualisées pour prendre en considération le développement d'Internet et notamment l'introduction d'un « virus » informatique.

Si le droit pénal semble incomplet, il en est de même des règles du code de procédure pénale En effet, les instruments dont disposent les officiers de police judiciaire dans la recherche des preuves des infractions n'ont pas été conçus au temps de l'univers numérique et dématérialisé, ni même adaptés à celui-ci. Il en est ainsi de la nature des pièces susceptibles d'être saisies dans le cadre des perquisitions. ou des horaires pendant lesquels elles peuvent avoir lieu. Dès lors, si l'on est fondé à plaider en faveur d'un « toilettage formel » de certaines dispositions du code de procédure pénale, d'autres modifications, plus substantielles, doivent être également envisagées afin d'améliorer la réactivité des services en charge des enquêtes.

Le Gouvernement et sa majorité sont déterminés à s'engager dans cette voie. D'ores et déjà, à l'initiative du rapporteur du projet de loi pour la sécurité intérieure (62), l'Assemblée nationale a adopté des dispositions permettant le recours à des perquisitions en ligne ou facilitant la mise à disposition, par la voie numérique, des données nécessaires à l'enquête et qui sont requises par les officiers de police judiciaire auprès des opérateurs de télécommunications. Par ailleurs, le Garde des Sceaux prépare un projet de loi renforçant les instruments juridiques destinés à la lutte contre la criminalité organisée, qui devrait également prendre en considération les spécificités de la cybercriminalité en l'attente de l'introduction dans notre droit interne des obligations qui découlent de la signature par la France de la convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité.

Pour leur part, les articles du présent chapitre du projet de loi constituent l'une des premières étapes de la nécessaire adaptation des règles du droit pénal et de la procédure pénale à la délinquance numérique qui, au-delà de l'actualisation formelle des pièces susceptibles d'être saisies dans le cadre des perquisitions ou de l'exécution d'une commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction (articles 30 à 32), renforcent le quantum des peines encourues en matière d'atteinte aux STAD (article 33) et introduisent une nouvelle incrimination permettant de sanctionner le recours aux « virus informatiques » (article 34).

Article 30

(art. 56 du code de procédure pénale)


Perquisitions en flagrant délit - Modification des pièces
susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation

Introduit par la loi n° 57-1426 du 31 décembre 1957, le premier alinéa de l'article 56 du code de procédure pénale dispose que, si la nature du crime est telle que la preuve en puisse être acquise par la « saisie de papiers, documents ou autres objets » en la possession des personnes qui paraissent avoir participé au crime ou détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés, l'officier de police judiciaire se transporte « sans désemparer » au domicile de ces derniers pour y procéder à une perquisition dont il dresse procès-verbal. Inchangée depuis son introduction dans le code de procédure pénale, cette disposition ne mentionne pas les données informatiques dont l'invention et le développement lui sont postérieurs.

Or, cette situation n'est pas satisfaisante car elle ne correspond pas aux investigations effectivement menées par les services de police judiciaire, qui sont parfois contraints de saisir l'ensemble du support informatique, qui constitue un « objet », alors que seules quelques données précises sont nécessaires à la manifestation de la vérité. C'est pourquoi les deux premiers alinéas du présent article ont pour objet de compléter la liste des pièces susceptibles d'être saisies par les officiers de police judiciaire (OPJ) en insérant la référence, d'une part, aux « données informatiques » en la possession des personnes qui paraissent avoir participé au crime et, d'autre part, aux « informations » relatives aux faits incriminés.

Au-delà de ces adaptations strictement formelles, le présent article a également pour objet d'adapter les modalités de saisie et de conservation desdites données informatiques. En effet, le droit en vigueur est silencieux en matière de reproduction de données informatiques, alors même que l'une de leurs principales caractéristiques est la facilité et la rapidité avec laquelle cette tâche peut être réalisée.

C'est pourquoi, le 3° du présent article substitue au cinquième alinéa de l'article 56 précité trois nouveaux alinéas qui permettent aux OPJ de placer sous main de justice une copie des données informatiques dont la saisie est nécessaire à la manifestation de la vérité. Toutefois, afin de garantir l'authenticité et la non-altération des données copiées par rapport aux originales, le dispositif proposé prévoit que cette opération ne peut être réalisée « qu'en présence des personnes qui assistent à la perquisition ». En conséquence, dans l'hypothèse où ces dernières seraient absentes, seul le support physique contenant les données pourrait être saisi et placé sous scellé comme le prévoit le droit en vigueur.

A supposer que les données saisies soient copiées, il ne saurait pour autant être question de les laisser à la disposition des auteurs de l'infraction. En effet, il n'est pas concevable que les détenteurs d'images pornographiques de mineurs numérisées, qui entrent dans le champ des sanctions prévues par l'article 227-23 du code pénal, soient laissés en possession de celles-ci une fois la copie réalisée par les OPJ. C'est pourquoi, le deuxième alinéa du 3° du présent article prévoit que, sur instruction du procureur de la République, il peut être procédé à l'effacement définitif des données sur le support physique qui n'a pas été placé sous main de justice et dont la « détention ou l'usage est illégal ou dangereux pour la sécurité des personnes et des biens ».

Enfin, le dernier alinéa du présent article, reprend pour l'essentiel les dispositions de l'actuel cinquième alinéa de l'article 56 du code de procédure pénale qui prévoit que, avec l'accord du procureur de la République, l'officier de police judicaire ne maintient que la saisie des objets, documents et « données informatiques » utiles à la manifestation de la vérité. Il convient de préciser que les modifications ainsi introduites en matière de perquisition dans le cadre des enquêtes de flagrance s'appliqueront également à celles menées au cours d'une enquête préliminaire en application des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale. En effet, le dernier alinéa de cet article renvoie, s'agissant des « formes » de la perquisition et donc des pièces susceptibles d'être saisies, à celles figurant à l'article 56 du code de procédure pénale, précisément modifié par le présent article du projet.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Articles 31 et 32

(art. 94 et 97 du code de procédure pénale)


Perquisitions dans le cadre d'une instruction - Modification des pièces
susceptibles d'être saisies et des modalités de leur conservation

Par coordination avec les modifications apportées par le précédent article à l'article 56 du code de procédure pénale, l'article 31 du projet a pour seul objet de prévoir expressément la possibilité de saisie de « données informatiques » dans le cadre des perquisitions ordonnées par le juge d'instruction en application des dispositions de l'article 94 du code de procédure pénale.

Pour sa part, l'article 32 du présent projet modifie l'article 97 du même code, dont le premier alinéa prévoit que le juge d'instruction, ou l'officier de police judiciaire qu'il a commis à cet effet, peuvent rechercher et prendre connaissance des « documents » nécessaire à l'instruction. De même, le deuxième alinéa de cet article dispose que « tous les objets et documents » placés sous main de justice sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés. Enfin, le cinquième alinéa du même article prévoit que, si les nécessités de l'instruction ne s'y opposent pas, « copie ou photocopie des documents » placés sous main de justice peuvent être délivrés à leurs frais aux intéressés qui en font la demande. Là encore, afin de prendre en considération les conséquences du développement de l'informatique, il est proposé de compléter la liste des documents et objets susceptibles d'être saisis ou reproduits par la référence aux « données informatiques ».

Par ailleurs et à l'instar des modifications proposées par l'article 30 du projet de loi, le 5°  de l'article 32 autorise la réalisation d'une copie des données informatiques saisies, qui doit également être réalisée « en présence des personnes qui assistent à la perquisition ». Par coordination, le juge d'instruction ayant fait procéder à la copie de données informatiques peut ordonner leur effacement du support initial qui n'a pas été placé sous main de justice lorsque leur détention ou usage est « illégal ou dangereux pour la sécurité des personnes et des biens ».

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de ces articles sans modification.

Article 33

(art. 323-1 à 323-3 du code pénal)


Aggravation des peines encourues par les auteurs des atteintes
aux systèmes de traitement automatisé de données

Introduits par la loi du 5 janvier 1988, dite loi « Godfrain », les articles 323-1 à 323-7 du code pénal répriment les atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données (STAD). Ainsi, le premier alinéa de l'article 323-1 punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait d'accéder ou de se maintenir frauduleusement dans tout ou partie d'un STAD sachant que, lorsqu'il en est résulté la suppression ou la modification de données qui y sont contenues ou l'altération de son fonctionnement, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende par les dispositions du deuxième alinéa du même article. En outre, le fait d'entraver ou de fausser le fonctionnement d'un STAD est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende, comme le prévoit l'article 323-2. Enfin, l'article 323-3 sanctionne d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait d'introduire frauduleusement des données dans un STAD ou de supprimer ou de modifier frauduleusement les données qu'il contient.

Bien que novatrices lors de leur introduction dans notre code pénal, ces dispositions n'ont pas été modifiées depuis et le quantum des peines encourues ne semble manifestement plus en rapport avec les dommages subis par les victimes des infractions précédemment décrites. En effet, selon certaines études (63) menées sur la base d'un échantillon de 3 286 entreprises américaines et européennes, les pertes moyennes engendrées par l'effacement de données ou l'attaque du réseau depuis l'extérieur seraient, respectivement, de l'ordre de 24 625 euros et de 54 380 euros. Ces montants particulièrement élevés démontrent la nocivité économique des atteintes aux STAD et incitent le législateur à renforcer les sanctions encourues par les auteurs de ces infractions.

Tel est précisément l'objet du présent article, qui aggrave l'ensemble des peines encourues par les auteurs des infractions précitées. Ainsi, il est proposé que les peines prévues par l'article 323-1 du code pénal soient désormais de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende et soient portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsqu'il en est résulté la suppression, la modification de données ou l'altération du fonctionnement du STAD. S'agissant des peines encourues par les auteurs des délits prévus à l'article 323-2, le paragraphe II du présent article les porte à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. Enfin, les auteurs d'un délit sanctionné par les dispositions de l'article 323-3 seront désormais passibles d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

La Commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article sans modification.

Article 34

(art. 323-3-1 [nouveau], 323-4 et 323-7 du code pénal)


Création d'une nouvelle incrimination en matière de droit de l'informatique

Ils ont souvent des noms suggestifs comme « Tchernobyl », voire aguicheurs tels que « I love you » ou « Melissa », pour ne citer que les plus connus, mais leurs conséquences sont ravageuses pour les systèmes informatiques qui en sont les victimes. Les virus informatiques sont, en effet, l'un des avatars les plus néfastes du développement des réseaux numériques. Selon une étude menée sur un vaste échantillon d'entreprises américaines et européennes (64), l'introduction d'un virus dans le système informatique entraîne une perte moyenne de plus de 26 000 euros pour les sociétés qui en sont victimes.

Or, face au développement de ces pratiques hostiles, le droit pénal français n'apporte pas de réponse pleinement satisfaisante. En effet, l'article 323-1 du code pénal réprime l'accès frauduleux dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données (STAD), alors même que, dans bien des cas, les virus y sont introduits d'une façon régulière, par l'intermédiaire des messageries personnelles des salariés par exemple. De même, l'article 323-3 qui sanctionne le fait d'introduire frauduleusement des données dans un STAD, ne permet pas de réprimer l'introduction non frauduleuse de telles données par un virus. Pour sa part, l'article 323-2 du même code punit le fait d'entraver ou de fausser le fonctionnement d'un STAD. Or, cette incrimination sanctionne davantage les conséquences de l'introduction d'un virus dans un STAD que le fait de détenir ou de concevoir un tel programme informatique, ce qui peut sembler paradoxal, voire insuffisant en termes d'efficacité de la réponse pénale.

C'est pourquoi, le présent article tend à insérer un article 323-3-1 nouveau du code pénal, qui a pour objet de réprimer le fait de « détenir, d'offrir, de céder ou de mettre à disposition un instrument, un programme informatique ou toute donnée conçus ou spécialement adaptés » pour commettre les infractions prévues par les articles 323-1 à 323-3. Les peines encourues par les détenteurs ou les fabricants de virus informatiques sont celles prévues par l'infraction commise à l'aide de leur programme. Si l'on prend en considération l'aggravation des peines proposée à l'article précédent du projet de loi, les détenteurs, vendeurs ou pourvoyeurs de programmes informatiques ayant permis la commission des infractions prévues à l'article 323-1 seront désormais passibles d'une peine de trois ans d'emprisonnement de 45 000 euros d'amende, tandis que les auteurs des délits prévus aux articles 323-2 et 323-3 encourront cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

On observera que cette nouvelle incrimination n'est pas sans rappeler celle prévue par les dispositions de l'article L. 163-4-1 du code monétaire et financier (65) qui punit de sept ans d'emprisonnement et de 750 000 € d'amende le fait « de fabriquer, de détenir, de céder, d'offrir ou de mettre à disposition des équipements, instruments, programmes informatiques ou toutes données conçus ou spécialement adaptés » pour commettre les délits de contrefaçon ou de falsification de cartes de paiement. Cette incrimination tend, notamment, à réprimer le recours à des logiciels de fabrication de faux numéros de cartes de paiement ou de piratage de ceux-ci à l'occasion d'une transaction sur Internet, qui sont ensuite exploités frauduleusement ou mis à la disposition du public sur des sites spécialisés dits de « carding ».

Pour autant, le dispositif du second alinéa de l'article 323-3-1 nouveau du code pénal comporte une différence substantielle par rapport à celui prévu à l'article L. 163-4-1 du code monétaire et financier. En effet, il prévoit que les sanctions pénales ne sont pas applicables lorsque la détention, l'offre, la cession et la mise à disposition sont « justifiés par les besoins de la recherche scientifique et technique ou de la protection et de la sécurité des réseaux de communication électronique et des systèmes d'information ». Cette exclusion du champ d'application de la sanction pénale a pour premier objet de permettre aux laboratoires scientifiques en informatique, y compris ceux qui travaillent en matière militaire, de poursuivre leurs nécessaires travaux en ce domaine. Elle se justifie également au regard des pratiques des sociétés chargées de concevoir des programmes informatiques de veille, de sécurisation ou de défense des systèmes informatiques et qui ont besoin de concevoir des virus afin de tester la fiabilité de leur propre programme anti-virus.

Toutefois, sur le plan juridique, cette exclusion du champ de la responsabilité pénale soulève certaines interrogations. En effet, il est quelque peu curieux de prévoir une irresponsabilité pénale absolue pour des organismes ou des personnes physiques qui ont détenu ou conçu des programmes « spécialement adaptés » pour commettre une infraction. Au regard du principe constitutionnel de la légalité et de la nécessité des peines, une dérogation aussi générale semble d'ailleurs contestable. C'est pourquoi, il semblerait préférable de prévoir que ces organismes ne sont pas responsables lorsqu'ils détiennent ou conçoivent des programmes spécialement adaptés pour commettre « les faits » prévus aux articles précités du code pénal et non les « infractions » réprimées par ces mêmes articles. Cette distinction peut d'ailleurs se justifier sur le fondement du principe général de droit pénal figurant à l'article 121-3 du code pénal selon lequel « il n'est point de crime ou de délit sans l'intention de le commettre » puisque, tant les laboratoires de recherche que les sociétés chargées de la veille ou de la sécurisation des systèmes informatiques sont, a priori, exempts de toute intention de commettre un crime ou un délit à l'aide de leurs outils informatiques.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis juge le champ de l'exclusion de la responsabilité pénale proposée excessivement large. En effet, les notions de « besoins de la recherche scientifique et technique » ou de « protection et de la sécurité des réseaux de communication » sont particulièrement imprécises, susceptibles de recouvrir des organismes irréprochables et d'autres qui le seraient moins, certains pouvant être tentés de développer des virus informatiques en excipant de leur mission de sécurisation des réseaux. C'est pourquoi, afin de renforcer les garanties juridiques quant au bon usage des virus informatiques, il serait préférable de prévoir que les organismes, publics et privés, qui sont habilités à mettre en œuvre de tels programmes informatiques procèdent préalablement à une déclaration auprès des services du Premier ministre. Suivant son rapporteur pour avis, la Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis en ce sens (amendement n° 57).

Enfin, le dernier alinéa du présent article a pour objet, par coordination avec l'introduction de ce nouveau délit, d'insérer dans les articles 323-4 et 323-7, respectivement relatifs à la commission des infractions au STAD en groupement ou à l'aide d'une entente et à la répression de la tentative de commettre ces délits, la référence à l'article 323-3-1.

La Commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption de cet article ainsi modifié.

AMENDEMENTS ADOPTÉS OU POUR LESQUELS
LA COMMISSION A ÉMIS UN AVIS FAVORABLE

Article 2

Amendement n° 31 de la Commission :

Rédiger ainsi le I de cet article :

« I. -  L'article 17 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux services visés au chapitre VI du titre II. »

(art. 43-8 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendements nos 32 et 33 de la Commission :

·  A la fin de cet article, substituer aux mots : « avec promptitude », les mots : « dans les meilleurs délais ».

·  Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« Le fait, par quiconque, de caractériser de façon abusive une apparence d'illicéité aux fins d'obtenir le retrait de données ou d'en rendre l'accès impossible est constitutif d'une entrave à la liberté d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation au sens du premier alinéa de l'article 431-1 du code pénal. »

(art. 43-9 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 34 de la Commission :

Après les mots : « n'ont pas agi », rédiger ainsi la fin de cet article : « dans les meilleurs délais pour faire cesser la diffusion d'une information ou d'une activité manifestement illicite. »

(art. 43-10 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 35 de la Commission :

Au début de cet article, substituer aux mots : « prestataires techniques mentionnés », les mots : « personnes mentionnées ».

(art. 43-11 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 36 de la Commission :

Au début de cet article, substituer aux mots : « prestataires techniques mentionnés », les mots : « personnes mentionnées ».

(art. 43-12 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 37 de la Commission :

Dans cet article, substituer aux mots : « tout prestataire technique mentionné », les mots : « toute personne mentionnée ».

(art. 43-14 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 38 de la Commission :

Dans le premier alinéa du I de cet article, substituer aux mots : « tiennent à la disposition », les mots : « mettent à disposition ».

Amendements nos 39 et 40 de la Commission :

·  Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Après l'article 79-6 de la même loi, sont insérés deux articles 79-7 et 79-8 ainsi rédigés :

« Art. 79-7. -  Est puni de 3 750 euros d'amende le fait, pour une personne physique ou le dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale exerçant l'une des activités définies aux articles 43-7 et 43-8, de ne pas avoir conservé les éléments d'information visés à l'article 43-13 ou de ne pas déférer à la demande d'une autorité judiciaire d'avoir communication desdits éléments.

« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de ces infractions dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal. Elles encourent une peine d'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal. »

« Art. 79-8. -   Est puni de 3 750 euros d'amende toute personne physique ou tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale exerçant l'activité définie à l'article 43-14 qui n'aurait pas respecté les prescriptions de ce même article.

« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de cette infraction dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal. Elles encourent une peine d'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal. »

·  Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« V. -  Dans le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 26 de la loi n° 1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, la référence : "43-16" est substituée à la référence "43-11".

« Il est procédé à la même substitution dans le premier alinéa de l'article 33-1, dans le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 44, dans l'article 44-1 et dans le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 53 de la même loi. »

Article 5
(art. L. 34-11 de code des postes et télécommunications)

Amendements nos 41, 42 et 43 et de la Commission :

·  Dans la première phrase du premier alinéa du I de cet article, après les mots : « d'attribuer », insérer les mots : « et de gérer ».

·  Après les mots : « rendues publiques et qui », rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa du I de cet article :

« veillent au respect, par le demandeur, des droits de la propriété intellectuelle. »

·  I. -  Avant la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du I de cet article, insérer la phrase suivante : « La décision du ministre chargé des télécommunications tendant à la désignation, ou au retrait de la désignation, d'un organisme peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'État. »

II. -  En conséquence, rédiger ainsi la dernière phrase du même alinéa : « Chaque organisme adresse au ministre chargé des télécommunications un rapport d'activité annuel. »

Amendement n° 17présenté par M. Jean Dionis du Séjour :

Avant le dernier alinéa du I de cet article, insérer l'alinéa suivant :

« L'attribution et la gestion des adresses rattachées à chaque domaine de premier niveau sont centralisées par un organisme unique ».

Après l'article 5

Amendements nos 11, 9, 10 et 8présentés par M. Patrice Martin-Lalande :

·  Insérer l'article suivant :

« I. -  A la fin du quatrième alinéa (3°) de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, les mots : ", si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale", sont supprimés.

« II. -  Après le premier alinéa de l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, sont insérés deux alinéa ainsi rédigés :

« Lorsque le manquement est constitutif d'une infraction pénale, le montant de la section pécuniaire ne peut excéder celui prévu pour l'amende pénale.

« Lorsque le Conseil supérieur de l'audiovisuel a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s'impute sur l'amende qu'il prononce. »

·  Insérer l'article suivant :

« L'article 42-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifié :

« I. -  Dans la première phrase, les mots : "titulaires d'autorisation pour l'exploitation d'un service de communication audiovisuelle" sont remplacés par les mots : "éditeurs de services de radiodiffusion sonore ou de télévision".

« II. -  Après la première phrase sont insérées deux phrases ainsi rédigées : "Le Conseil supérieur de l'audiovisuel demande à l'intéressé de lui présenter ses observations dans un délai de deux jours francs à compter de la réception de cette demande. La décision est ensuite prononcée sans que soit mise en œuvre la procédure prévue à l'article 42-7."

« III. -  La dernière phrase est complétée par les mots : "dans les conditions fixées à l'article 42-2."

·  Insérer l'article suivant :

« A la fin de l'article 48-2 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, les mots : "et à la condition que le manquement ne soit pas constitutif d'une infraction pénale" sont supprimés. »

·  Insérer la division et l'intitulé suivants :

« Chapitre III
« Régulation de la communication ».

Article 7

Amendements nos 44, 45 et 46 de la Commission :

·  Avant le I de cet article, insérer le paragraphe suivant :

« I A. -  L'activité définie à l'article 6, lorsqu'elle est assurée par des personnes établies en France, s'exerce librement sur le territoire national dans le respect des lois et règlements en vigueur.

« Sont exclus des dispositions de l'alinéa précédent :

« 1° Les jeux d'argent, y compris sous forme de paris et de loteries, légalement autorisés ;

« 2° Les activités de représentation et d'assistance en justice ;

« 3° Les activités des notaires exercées pour l'application des dispositions de l'article 1er de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat. »

·  Dans le premier alinéa du I de cet article, après les mots : « sur le territoire national », insérer les mots : « à l'exclusion des activités visées aux 1° à 3° du paragraphe précédent et ».

·  Compléter la première phrase du 1° du II de cet article par les mots : « , conformément aux engagements internationaux souscrits par la France ».

Avant l'article 14

Amendement n° 47 de la Commission :

Rédiger ainsi l'intitulé du chapitre III :

« Les obligations souscrites sous forme électronique ».

Article 14
(art. 1369-1 du code civil)

Amendements nos 48 et 49 de la Commission :

·  Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après les mots : « Quiconque propose », insérer les mots : « à titre professionnel ».

·  Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, substituer aux mots : « générales et particulières », le mot : « contractuelles ».

Amendement n18 présenté par M. Jean Dionis du Séjour:

Compléter la dernière phrase du premier alinéa de cet article par les mots : « de son fait ».

Amendement no 50 de la Commission :

Rédiger ainsi le deuxième alinéa de cet article :

« L'offre énonce en outre : ».

(art. 1369-3 du code civil)

Amendement n° 51 de la Commission :

·  Rédiger ainsi le début du premier alinéa de cet article :

« Il est fait exception aux obligations visées aux 1° à 5° de l'article 1369-1 et aux deux premiers alinéas ... (le reste sans changement) ».

Article 24

Amendements nos 52, 53 et 54 de la Commission :

·  A la fin du premier alinéa de cet article, substituer aux mots : « , 22 et 23 », les mots : « et 22 ».

·  I. -  Après les mots : « du président du tribunal de grande instance », rédiger ainsi la fin de la première phrase du quatrième alinéa de cet article : « ou d'un magistrat du siège délégué par lui, préalablement saisi par le procureur de la République. ».

II. -  En conséquence, dans l'avant-dernier alinéa de cet article, substituer aux mots : « le juge des libertés et de la détention », les mots : « ou le magistrat du siège délégué par lui ».

·  Compléter le cinquième alinéa de cet article par la phrase suivante : « Ils sont versés au dossier de la procédure. »

Article 25
(art. 132-76 du code pénal)

Amendements nos 55 et 56 de la Commission :

·  Dans le premier alinéa de cet article, substituer aux mots : « relative à la communication électronique », les mots : « pour la confiance dans l'économie numérique ».

·  Dans le dernier alinéa de cet article, substituer aux mots : « à l'auteur ou au complice de l'infraction qui, », les mots : « au complice d'une infraction punie de plus de quinze ans d'emprisonnement ou à l'auteur ou au complice d'une infraction punie d'une peine inférieure ou égale à quinze ans d'emprisonnement qui, ».

Article 34
(art. 323-3-1 du code pénal)

Amendement no 57 de la Commission :

I. -  Dans le premier alinéa de cet article, substituer aux mots : « une ou plusieurs des infractions prévues », les mots : « les faits prévus ».

II. -  En conséquence :

1° Dans le dernier alinéa de cet article, après les mots : « mise à disposition », insérer les mots : « de l'instrument, du programme informatique, ou de toute donnée, » ;

2° Compléter le dernier alinéa de cet article par les mots : « et lorsqu'elles sont mises en œuvre par des organismes publics ou privés ayant procédé à une déclaration préalable auprès du Premier ministre selon les modalités prévues par les dispositions du III de l'article 18 de la loi n°     du          pour la confiance dans l'économie numérique. »

AMENDEMENTS POUR LESQUELS LA COMMISSION
A ÉMIS UN AVIS DÉFAVORABLE

Article premier

Amendement n° 12 présenté par M. Jean Dionis du Séjour :

Rédiger ainsi cet article :

« On entend par communication publique en ligne toute transmission, sur demande individuelle, de données numériques n'ayant pas un caractère de correspondance privée, qui s'appuie sur un procédé de télécommunication permettant un échange réciproque d'information entre l'émetteur et le récepteur.

« On entend par courrier électronique, tout message de correspondance privée, sous forme de texte, de voix, de son ou d'image, envoyé par un réseau public de communication, stocké sur un serveur du réseau ou dans l'équipement terminal du destinataire, jusqu'à ce que ce dernier le récupère.

« La communication publique en ligne est libre.

« L'exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d'une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la protection de l'enfance et de l'adolescence, de la liberté et de la propriété d'autrui, du caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion et, d'autre part, par la sauvegarde de l'ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication.

« Il est institué un Conseil supérieur de la communication publique en ligne.

« Un décret prévoit sa composition, son mode de fonctionnement, ainsi que les conditions dans lesquelles il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de communication publique en ligne des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française. »

Après l'article premier

Amendement n° 13 présenté par M. Jean Dionis du Séjour :

Insérer l'article suivant :

« Le chapitre VI du titre II de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est abrogé. »

Article 2

Amendement n° 14 présenté par M. Jean Dionis du Séjour :

Rédiger ainsi cet article :

« I. -  Les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication publique en ligne sont tenues d'informer leurs abonnés de l'existence de moyens techniques permettant de restreindre l'accès à certains services ou de les sélectionner et de leur proposer au moins un de ces moyens.

« II. -  Les prestataires techniques mentionnés aux paragraphes III et IV ne sont pas soumis à une obligation générale de surveiller les informations qu'ils transmettent ou stockent, ni à une obligation générale de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites.

« Toutefois, les prestataires techniques mentionnés au paragraphe III mettent en œuvre les moyens conformes à l'état de l'art pour prévenir la diffusion de données constitutives des infractions visées aux cinquième et huitième alinéas de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et à l'article 227-23 du code pénal.

« III. -  Les personnes qui assurent, même à titre gratuit, le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature accessibles par des services de communication publique en ligne, ne peuvent voir leur responsabilité civile engagée du fait de la diffusion de ces informations ou activités que si, dès le moment où elles ont eu la connaissance effective de leur caractère manifestement illicite, ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère manifestement illicite, elles n'ont pas agi avec promptitude pour retirer ces données ou rendre l'accès à celles-ci impossible.

« IV. -  Les personnes désignées au paragraphe II ne peuvent voir leur responsabilité pénale engagée que si, en connaissance de cause, elles n'ont pas agi avec promptitude pour faire cesser la diffusion d'une information ou d'une activité dont elles ne pouvaient ignorer le caractère manifestement illicite.

« V. -  La personne physique ou morale qui a caractérisé une apparence d'illicéité aux fins d'obtenir le retrait de données ou de rendre leur accès impossible engage sa responsabilité pénale au titre de l'article 431-1 du code pénal, et sa responsabilité civile envers la personne dont les données ont été retirées ou rendues inaccessibles.

« VI. -  L'autorité judiciaire peut prescrire sur requête, à tout prestataire technique mentionné aux paragraphes III et IV, toutes mesures propres à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication publique en ligne, telles que celles visant à cesser de stocker ce contenu ou, à défaut, à cesser d'en permettre l'accès. »

(art. 43-8 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendements nos 4 et 5 présentés par M. Patrice Martin-Lalande :

·  Rédiger ainsi le début de cet article :

« Les personnes qui fournissent, même à titre gratuit, un service à la société de l'information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service, pour mise à disposition du public de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature accessibles par des services de communication publique en ligne, ne peuvent voir leur responsabilité civile engagée... (le reste sans changement) »

·  Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« II. -  Une procédure de notification à laquelle pourront, d'une part, les personnes physiques ou morales ayant un intérêt à agir et s'étant identifiées ou, d'autre part, le parquet, est instaurée.

« Cette notification comprend, sous peine de nullité :

« - L'identification de l'auteur de la notification

« - La description des faits litigieux

« - L'emplacement exact du contenu litigieux

« - Les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré comprenant la mention dispositions légales et des justifications de fait

« - La copie du courrier électronique envoyé simultanément à l'auteur/éditeur du contenu objet du différend, pour l'informer de la notification ou la justification de ce que l'auteur n'a pu être contacté.

« L'incrimination pénale de dénonciation calomnieuse prévue à l'article 226-10 du code pénal s'étend à la notification abusive. »

(art. 43-12 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986)

Amendement n° 6 présenté par M. Patrice Martin-Lalande :

Supprimer cet article.

Après l'article 2

Amendements nos 15 et 16 présentés par M. Jean Dionis du Séjour :

·  Insérer l'article suivant :

« Les personnes mentionnées aux paragraphes III et IV de l'article 2 de la présente loi sont tenues de détenir et de conserver les données de nature à permettre l'identification de quiconque a contribué à la création du contenu ou de l'un des contenus des services dont elles sont prestataires.

« Elles sont également tenues de fournir aux personnes qui éditent un service de communication publique en ligne des moyens techniques permettant à celles-ci de satisfaire aux conditions d'identification prévues à l'article 2 ter.

« L'autorité judiciaire peut requérir communication auprès des prestataires mentionnés aux paragraphes III et IV de l'article 2 des données mentionnées au premier alinéa.

« Les dispositions des articles 226-17, 226-21 et 226-22 du code pénal sont applicables au traitement de ces données.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, définit les données mentionnées au premier alinéa et détermine la durée et les modalités de leur conservation. »

·  Insérer l'article suivant :

« I. -  Les personnes dont l'activité est d'éditer un service de communication publique en ligne tiennent à la disposition du public :

« a) S'il s'agit de personnes physiques, leurs nom, prénom, domicile et numéro de téléphone ;

« b) S'il s'agit de personnes morales, leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social, leur numéro de téléphone et, s'il s'agit d'entreprises assujetties aux formalités d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de leur inscription, leur capital social, l'adresse de leur siège social ;

« c) Le nom du directeur ou du codirecteur de la publication et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction au sens de l'article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ;

« d) Le nom, la dénomination ou la raison sociale, l'adresse et le numéro de téléphone du prestataire mentionné au paragraphe III de l'article 2.

« II. -  Les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication publique en ligne peuvent ne tenir à la disposition du public, pour préserver leur anonymat, que le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse du prestataire mentionné au paragraphe III de l'article 2, sous réserve de lui avoir communiqué les éléments d'identification personnelle prévus au I. »

Article 3

Amendement n° 7 présenté par M. Patrice Martin-Lalande :

Supprimer le I de cet article.

ANNEXE 1

DIRECTIVE 2000/31/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 8 JUIN 2000 RELATIVE À CERTAINS ASPECTS JURIDIQUES DES SERVICES DE LA SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION, ET NOTAMMENT DU COMMERCE ÉLECTRONIQUE, DANS LE MARCHÉ INTÉRIEUR ("DIRECTIVE SUR LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE")

LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 47, paragraphe 2, son article 55 et son article 95,

vu la proposition de la Commission (66),

vu l'avis du Comité économique et social (67), statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 du traité (68), considérant ce qui suit :

(1) L'Union européenne vise à établir des liens toujours plus étroits entre les États et les peuples européens et à assurer le progrès économique et social.

Conformément à l'article 14, paragraphe 2, du traité, le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises et des services ainsi que la liberté d'établissement sont assurées. Le développement des services de la société de l'information dans l'espace sans frontières intérieures est un moyen essentiel pour éliminer les barrières qui divisent les peuples européens.

(2) Le développement du commerce électronique dans la société de l'information offre des opportunités importantes pour l'emploi dans la Communauté, en particulier dans les petites et moyennes entreprises. Il facilitera la croissance économique des entreprises européennes ainsi que leurs investissements dans l'innovation et il peut également renforcer la compétitivité des entreprises européennes, pour autant que tout le monde puisse accéder à l'Internet.

(3) Le droit communautaire et les caractéristiques de l'ordre juridique communautaire constituent un atout essentiel pour que les citoyens et les opérateurs européens puissent bénéficier pleinement, sans considération de frontières, des possibilités offertes par le commerce électronique. La présente directive a ainsi pour objet d'assurer un niveau élevé d'intégration juridique communautaire afin d'établir un réel espace sans frontières intérieures pour les services de la société de l'information.

(4) Il est important de veiller à ce que le commerce électronique puisse bénéficier dans sa globalité du marché intérieur et donc que, au même titre que pour la directive 89/552/CEE du Conseil du 3 octobre 1989 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle (69), un niveau élevé d'intégration communautaire soit obtenu.

(5) Le développement des services de la société de l'information dans la Communauté est limité par un certain nombre d'obstacles juridiques au bon fonctionnement du marché intérieur qui sont de nature à rendre moins attrayant l'exercice de la liberté d'établissement et de la libre prestation des services. Ces obstacles résident dans la divergence des législations ainsi que dans l'insécurité juridique des régimes nationaux applicables à ces services. En l'absence d'une coordination et d'un ajustement des législations dans les domaines concernés, des obstacles peuvent être justifiés au regard de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes. Une insécurité juridique existe sur l'étendue du contrôle que les États membres peuvent opérer sur les services provenant d'un autre État membre.

(6) Il convient, au regard des objectifs communautaires, des articles 43 et 49 du traité et du droit communautaire dérivé, de supprimer ces obstacles par une coordination de certaines législations nationales et par une clarification au niveau communautaire de certains concepts juridiques, dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché intérieur. La présente directive, en ne traitant que certaines questions spécifiques qui soulèvent des problèmes pour le marché intérieur, est pleinement cohérente avec la nécessité de respecter le principe de subsidiarité tel qu'énoncé à l'article 5 du traité.

(7) Pour garantir la sécurité juridique et la confiance du consommateur, il y a lieu que la présente directive établisse un cadre général clair pour couvrir certains aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur.

(8) L'objectif de la présente directive est de créer un cadre juridique pour assurer la libre circulation des services de la société de l'information entre les États membres et non d'harmoniser le domaine du droit pénal en tant que tel.

(9) Dans bien des cas, la libre circulation des services de la société de l'information peut refléter spécifiquement, dans la législation communautaire, un principe plus général, à savoir la liberté d'expression, consacrée par l'article 10, paragraphe 1, de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui a été ratifiée par tous les États membres. Pour cette raison, les directives couvrant la fourniture de services de la société de l'information doivent assurer que cette activité peut être exercée librement en vertu de l'article précité, sous réserve uniquement des restrictions prévues au paragraphe 2 du même article et à l'article 46, paragraphe 1, du traité. La présente directive n'entend pas porter atteinte aux règles et principes fondamentaux nationaux en matière de liberté d'expression.

(10) Conformément au principe de proportionnalité, les mesures prévues par la présente directive se limitent strictement au minimum requis pour atteindre l'objectif du bon fonctionnement du marché intérieur. Là où il est nécessaire d'intervenir au niveau communautaire, et afin de garantir un espace qui soit réellement sans frontières intérieures pour le commerce électronique, la directive doit assurer un haut niveau de protection des objectifs d'intérêt général, en particulier la protection des mineurs, de la dignité humaine, du consommateur et de la santé publique. Conformément à l'article 152 du traité, la protection de la santé publique est une composante essentielle des autres politiques de la Communauté.

(11) La présente directive est sans préjudice du niveau de protection existant notamment en matière de protection de la santé publique et des intérêts des consommateurs, établi par les instruments communautaires. Entre autres, la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (70) et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance (71) constituent un élément fondamental pour la protection des consommateurs en matière contractuelle. Ces directives sont également applicables, dans leur intégralité, aux services de la société de l'information. Ce même acquis communautaire, qui est pleinement applicable aux services de la société de l'information, englobe aussi notamment la directive 84/450/CEE du Conseil du 10 septembre 1984 relative à la publicité trompeuse et comparative (72), la directive 87/102/CEE du Conseil du 22 décembre 1986 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (73), la directive 93/22/CEE du Conseil du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement dans le domaine des valeurs mobilières (74), la directive 90/314/CEE du Conseil du 13 juin 1990 concernant les voyages, vacances et circuits à forfait (75), la directive 98/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 relative à la protection des consommateurs en matière d'indication des prix des produits offerts aux consommateurs (76), la directive 92/59/CEE du Conseil du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits (77), la directive 94/47/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 1994 concernant la protection des acquéreurs pour certains aspects des contrats portant sur l'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers (78), la directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs (79), la directive 85/374/CEE du Conseil du 25 juillet 1985 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux (80), la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 1999 relative à certains aspects de la vente et aux garanties des biens de consommation (81), la future directive du Parlement européen et du Conseil concernant la vente à distance de services financiers aux consommateurs et la directive 92/28/CEE du Conseil du 31 mars 1992 concernant la publicité faite à l'égard des médicaments (82). La présente directive doit être sans préjudice de la directive 98/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 1998 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité et de parrainage en faveur des produits du tabac (83) adoptée dans le cadre du marché intérieur ou des directives relatives à la protection de la santé publique. La présente directive complète les exigences d'information établies par les directives précitées et en particulier la directive 97/7/CE.

(12) Il est nécessaire d'exclure du champ d'application de la présente directive certaines activités compte tenu du fait que la libre prestation des services dans ces domaines ne peut être, à ce stade, garantie au regard du traité ou du droit communautaire dérivé existant. Cette exclusion doit être sans préjudice des éventuels instruments qui pourraient s'avérer nécessaires pour le bon fonctionnement du marché intérieur. La fiscalité, notamment la taxe sur la valeur ajoutée frappant un grand nombre des services visés par la présente directive, doit être exclue du champ d'application de la présente directive.

(13) La présente directive n'a pas pour but d'établir des règles en matière d'obligations fiscales ni ne préjuge de l'élaboration d'instruments communautaires relatifs aux aspects fiscaux du commerce électronique.

(14) La protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel est uniquement régie par la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (84) et par la directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications (85), qui sont pleinement applicables aux services de la société de l'information. Ces directives établissent d'ores et déjà un cadre juridique communautaire dans le domaine des données à caractère personnel et, par conséquent, il n'est pas nécessaire de traiter cette question dans la présente directive afin d'assurer le bon fonctionnement du marché intérieur, et notamment la libre circulation des données à caractère personnel entre les États membres. La mise en oeuvre et l'application de la présente directive devraient être conformes aux principes relatifs à la protection des données à caractère personnel, notamment pour ce qui est des communications commerciales non sollicitées et de la responsabilité des intermédiaires. La présente directive ne peut pas empêcher l'utilisation anonyme de réseaux ouverts tels qu'Internet.

(15) Le secret des communications est garanti par l'article 5 de la directive 97/66/CE. Conformément à cette directive, les États membres doivent interdire tout type d'interception illicite ou la surveillance de telles communications par d'autres que les expéditeurs et les récepteurs, sauf lorsque ces activités sont légalement autorisées.

(16) L'exclusion des activités de jeux d'argent du champ d'application de la présente directive couvre uniquement les jeux de hasard, les loteries et les transactions portant sur des paris, qui supposent des enjeux en valeur monétaire. Elle ne couvre pas les concours ou jeux promotionnels qui ont pour but d'encourager la vente de biens ou de services et pour lesquels les paiements, s'ils ont lieu, ne servent qu'à acquérir les biens ou les services en promotion.

(17) La définition des services de la société de l'information existe déjà en droit communautaire. Elle figure dans la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information (86) et dans la directive 98/84/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 1998 concernant la protection juridique des services à accès conditionnel et des services d'accès conditionnel (87). Cette définition couvre tout service fourni, normalement contre rémunération, à distance au moyen d'équipement électronique de traitement (y compris la compression numérique) et de stockage des données, à la demande individuelle d'un destinataire de services. Les services visés dans la liste indicative figurant à l'annexe V de la directive 98/34/CE qui ne comportent pas de traitement et de stockage des données ne sont pas couverts par la présente définition.

(18) Les services de la société de l'information englobent un large éventail d'activités économiques qui ont lieu en ligne. Ces activités peuvent consister, en particulier, à vendre des biens en ligne. Les activités telles que la livraison de biens en tant que telle ou la fourniture de services hors ligne ne sont pas couvertes. Les services de la société de l'information ne se limitent pas exclusivement aux services donnant lieu à la conclusion de contrats en ligne, mais, dans la mesure où ils représentent une activité économique, ils s'étendent à des services qui ne sont pas rémunérés par ceux qui les reçoivent, tels que les services qui fournissent des informations en ligne ou des communications commerciales, ou ceux qui fournissent des outils permettant la recherche, l'accès et la récupération des données. Les services de la société de l'information comportent également des services qui consistent à transmettre des informations par le biais d'un réseau de communication, à fournir un accès à un réseau de communication ou à héberger des informations fournies par un destinataire de services. Les services de télévision au sens de la directive 89/552/CEE et de radiodiffusion ne sont pas des services de la société de l'information car ils ne sont pas fournis sur demande individuelle. En revanche, les services transmis de point à point, tels que les services de vidéo à la demande ou la fourniture de communications commerciales par courrier électronique constituent des services de la société de l'information. L'utilisation du courrier électronique ou d'autres moyens de communication individuels équivalents par des personnes physiques agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de leurs activités commerciales ou professionnelles, y compris leur utilisation pour la conclusion de contrats entre ces personnes, n'est pas un service de la société de l'information. La relation contractuelle entre un employé et son employeur n'est pas un service de la société de l'information. Les activités qui, par leur nature, ne peuvent pas être réalisées à distance ou par voie électronique, telles que le contrôle légal des comptes d'une société ou la consultation médicale requérant un examen physique du patient, ne sont pas des services de la société de l'information.

(19) Le lieu d'établissement d'un prestataire devrait être déterminé conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, selon laquelle le concept d'établissement implique l'exercice effectif d'une activité économique au moyen d'une installation stable et pour une durée indéterminée. Cette exigence est également remplie lorsqu'une société est constituée pour une période donnée. Le lieu d'établissement d'une société fournissant des services par le biais d'un site Internet n'est pas le lieu où se situe l'installation technologique servant de support au site ni le lieu où son site est accessible, mais le lieu où elle exerce son activité économique. Dans le cas où un prestataire a plusieurs lieux d'établissement, il est important de déterminer de quel lieu d'établissement le service concerné est presté. Dans les cas où il est difficile de déterminer, entre plusieurs lieux d'établissement, celui à partir duquel un service donné est fourni, le lieu d'établissement est celui dans lequel le prestataire a le centre de ses activités pour ce service spécifique.

(20) La définition du "destinataire d'un service" couvre tous les types d'utilisation des services de la société de l'information, tant par les personnes qui fournissent l'information sur les réseaux ouverts tels que l'Internet que par celles qui recherchent des informations sur l'Internet pour des raisons privées ou professionnelles.

(21) La portée du domaine coordonné est sans préjudice d'une future harmonisation communautaire concernant les services de la société de l'information et de futures législations adoptées au niveau national conformément au droit communautaire. Le domaine coordonné ne couvre que les exigences relatives aux activités en ligne, telles que l'information en ligne, la publicité en ligne, les achats en ligne, la conclusion de contrats en ligne et ne concerne pas les exigences juridiques des États membres relatives aux biens telles que les normes en matière de sécurité, les obligations en matière d'étiquetage ou la responsabilité du fait des produits, ni les exigences des États membres relatives à la livraison ou au transport de biens, y compris la distribution de médicaments. Le domaine coordonné ne couvre pas l'exercice du droit de préemption par les pouvoirs publics concernant certains biens tels que les oeuvres d'art.

(22) Le contrôle des services de la société de l'information doit se faire à la source de l'activité pour assurer une protection efficace des objectifs d'intérêt général. Pour cela, il est nécessaire de garantir que l'autorité compétente assure cette protection non seulement pour les citoyens de son propre pays, mais aussi pour l'ensemble des citoyens de la Communauté. Pour améliorer la confiance mutuelle entre les États membres, il est indispensable de préciser clairement cette responsabilité de l'État membre d'origine des services. En outre, afin d'assurer efficacement la libre prestation des services et une sécurité juridique pour les prestataires et leurs destinataires, ces services de la société de l'information doivent être soumis en principe au régime juridique de l'État membre dans lequel le prestataire est établi.

(23) La présente directive n'a pas pour objet d'établir des règles supplémentaires de droit international privé relatives aux conflits de loi ni de traiter de la compétence des tribunaux. Les dispositions du droit applicable désigné par les règles du droit international privé ne doivent pas restreindre la libre prestation des services de la société de l'information telle que prévue par la présente directive.

(24) Dans le cadre de la présente directive et nonobstant le principe du contrôle à la source de services de la société de l'information, il apparaît légitime, dans les conditions prévues par la présente directive, que les États membres prennent des mesures tendant à limiter la libre circulation des services de la société de l'information.

(25) Les juridictions nationales, y compris les juridictions civiles, statuant sur les différends de droit privé peuvent déroger à la libre prestation des services de la société de l'information, conformément aux conditions définies dans la présente directive.

(26) Les États membres peuvent, conformément aux conditions définies dans la présente directive, appliquer leurs règles nationales de droit pénal et de procédure pénale pour engager toutes les mesures d'enquêtes et autres nécessaires pour détecter et poursuivre les infractions en matière pénale, sans qu'il soit besoin de notifier ces mesures à la Commission.

(27) La présente directive, en liaison avec la future directive du Parlement européen et du Conseil concernant la vente à distance de services financiers aux consommateurs, contribue à la création d'un cadre juridique pour la prestation en ligne de services financiers. La présente directive ne préjuge pas de futures initiatives dans le domaine des services financiers, notamment en ce qui concerne l'harmonisation des règles de conduite dans ce domaine. La possibilité pour les États membres, établie par la présente directive, de restreindre, dans certaines circonstances, la libre prestation des services de la société de l'information aux fins de protection des consommateurs couvre également les mesures dans le domaine des services financiers, notamment des mesures visant à protéger les investisseurs.

(28) L'obligation faite aux États membres de ne pas soumettre l'accès à l'activité d'un prestataire de services de la société de l'information à une autorisation préalable ne concerne pas les services postaux couverts par la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service (88), consistant dans la remise physique d'un message imprimé par courrier électronique et n'affecte pas les régimes d'accréditation volontaire, notamment pour les prestataires de services de signature électronique et de certification.

(29) Les communications commerciales sont essentielles pour le financement des services de la société de l'information et le développement d'une large variété de nouveaux services gratuits. Dans l'intérêt de la protection des consommateurs et de la loyauté des transactions, les communications commerciales, y compris les rabais, les offres, concours et jeux promotionnels, doivent respecter un certain nombre d'obligations relatives à la transparence. Ces obligations sont sans préjudice de la directive 97/7/CE. La présente directive ne doit pas affecter les directives existantes concernant les communications commerciales, en particulier la directive 98/43/CE.

(30) L'envoi par courrier électronique de communications commerciales non sollicitées peut être inopportun pour les consommateurs et pour les fournisseurs de services de la société de l'information et susceptible de perturber le bon fonctionnement des réseaux interactifs. La question du consentement du destinataire pour certaines formes de communication commerciale non sollicitée n'est pas traitée dans la présente directive, mais a déjà été traitée, en particulier, dans la directive 97/7/CE et dans la directive 97/66/CE. Dans les États membres qui autorisent l'envoi par courrier électronique de communications commerciales non sollicitées, la mise en place de dispositifs de filtrage approprié par les entreprises doit être encouragée et facilitée. Il faut en outre, en toute hypothèse, que les communications commerciales non sollicitées soient clairement identifiables en tant que telles afin d'améliorer la transparence et de faciliter le fonctionnement de tels dispositifs mis en place par les entreprises. L'envoi par courrier électronique de communications commerciales non sollicitées ne saurait entraîner de frais supplémentaires pour le destinataire.

(31) Les États membres qui autorisent l'envoi par courrier électronique, par des prestataires établis sur leur territoire, de communications commerciales non sollicitées sans le consentement préalable du destinataire, doivent veiller à ce que les prestataires consultent régulièrement les registres "opt-out" où les personnes physiques qui ne souhaitent pas recevoir ce type de communications commerciales peuvent s'inscrire, et respectent le souhait de ces personnes.

(32) Pour supprimer les entraves au développement des services transfrontaliers dans la Communauté que les membres des professions réglementées pourraient proposer sur l'Internet, il est nécessaire que le respect des règles professionnelles prévues pour protéger notamment le consommateur ou la santé publique soit garanti au niveau communautaire. Les codes de conduite au niveau communautaire constituent le meilleur instrument pour déterminer les règles déontologiques applicables à la communication commerciale. Il convient d'encourager leur élaboration ou, le cas échéant, leur adaptation, sans préjudice de l'autonomie des organismes et des associations professionnels.

(33) La présente directive complète le droit communautaire et le droit national relatif aux professions réglementées en maintenant un ensemble cohérent de règles applicables dans ce domaine.

(34) Chaque État membre doit ajuster sa législation qui contient des exigences, notamment de forme, susceptibles de gêner le recours à des contrats par voie électronique. Il convient que l'examen des législations nécessitant cet ajustement se fasse systématiquement et porte sur l'ensemble des étapes et des actes nécessaires au processus contractuel, y compris l'archivage du contrat. Il convient que le résultat de cet ajustement soit de rendre réalisables les contrats conclus par voie électronique. L'effet juridique des signatures électroniques fait l'objet de la directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques (89), l'accusé de réception par un prestataire peut être constitué par la fourniture en ligne d'un service payé.

(35) La présente directive n'affecte pas la possibilité pour les États membres de maintenir ou d'établir pour les contrats des exigences juridiques générales ou spécifiques qui peuvent être satisfaites par des moyens électroniques, notamment des exigences en matière de sécurité des signatures électroniques.

(36) Les États membres peuvent maintenir des restrictions à l'utilisation de contrats électroniques en ce qui concerne les contrats pour lesquels la loi requiert l'intervention de tribunaux, d'autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique. Cette possibilité couvre également les contrats requérant l'intervention de tribunaux, d'autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique afin de produire des effets à l'égard des tiers, aussi bien que les contrats requérant une certification juridique ou une attestation par un notaire.

(37) L'obligation faite aux États membres d'éliminer les obstacles à l'utilisation des contrats électroniques ne concerne que les obstacles résultant d'exigences juridiques et non pas les obstacles d'ordre pratique résultant d'une impossibilité d'utiliser les moyens électroniques dans certains cas.

(38) L'obligation faite aux États membres d'éliminer les obstacles à l'utilisation des contrats électroniques est mise en oeuvre dans le respect des exigences juridiques pour les contrats, consacrées par le droit communautaire.

(39) Les exceptions aux dispositions relatives aux contrats passés exclusivement au moyen du courrier électronique ou au moyen de communications individuelles équivalentes prévues dans la présente directive, en ce qui concerne les informations à fournir et la passation d'une commande, ne sauraient avoir comme conséquence de permettre le contournement de ces dispositions par les prestataires de services de la société de l'information.

(40) Les divergences existantes et émergentes entre les législations et les jurisprudences des États membres dans le domaine de la responsabilité des prestataires de services agissant en qualité d'intermédiaires empêchent le bon fonctionnement du marché intérieur, en particulier en gênant le développement des services transfrontaliers et en produisant des distorsions de concurrence. Les prestataires des services ont, dans certains cas, le devoir d'agir pour éviter les activités illégales ou pour y mettre fin. La présente directive doit constituer la base adéquate pour l'élaboration de mécanismes rapides et fiables permettant de retirer les informations illicites et de rendre l'accès à celles-ci impossible. Il conviendrait que de tels mécanismes soient élaborés sur la base d'accords volontaires négociés entre toutes les parties concernées et qu'ils soient encouragés par les États membres. Il est dans l'intérêt de toutes les parties qui participent à la fourniture de services de la société de l'information d'adopter et d'appliquer de tels mécanismes. Les dispositions de la présente directive sur la responsabilité ne doivent pas faire obstacle au développement et à la mise en oeuvre effective, par les différentes parties concernées, de systèmes techniques de protection et d'identification ainsi que d'instruments techniques de surveillance rendus possibles par les techniques numériques, dans le respect des limites établies par les directives 95/46/CE et 97/66/CE.

(41) La présente directive instaure un équilibre entre les différents intérêts en jeu et établit des principes qui peuvent servir de base aux normes et aux accords adoptés par les entreprises.

(42) Les dérogations en matière de responsabilité prévues par la présente directive ne couvrent que les cas où l'activité du prestataire de services dans le cadre de la société de l'information est limitée au processus technique d'exploitation et de fourniture d'un accès à un réseau de communication sur lequel les informations fournies par des tiers sont transmises ou stockées temporairement, dans le seul but d'améliorer l'efficacité de la transmission. Cette activité revêt un caractère purement technique, automatique et passif, qui implique que le prestataire de services de la société de l'information n'a pas la connaissance ni le contrôle des informations transmises ou stockées.

(43) Un prestataire de services peut bénéficier de dérogations pour le "simple transport" et pour la forme de stockage dite "caching" lorsqu'il n'est impliqué en aucune manière dans l'information transmise. Cela suppose, entre autres, qu'il ne modifie pas l'information qu'il transmet. Cette exigence ne couvre pas les manipulations à caractère technique qui ont lieu au cours de la transmission, car ces dernières n'altèrent pas l'intégrité de l'information contenue dans la transmission.

(44) Un prestataire de services qui collabore délibérément avec l'un des destinataires de son service afin de se livrer à des activités illégales va au-delà des activités de "simple transport" ou de "caching" et, dès lors, il ne peut pas bénéficier des dérogations en matière de responsabilité prévues pour ce type d'activité.

(45) Les limitations de responsabilité des prestataires de services intermédiaires prévues dans la présente directive sont sans préjudice de la possibilité d'actions en cessation de différents types. Ces actions en cessation peuvent notamment revêtir la forme de décisions de tribunaux ou d'autorités administratives exigeant qu'il soit mis un terme à toute violation ou que l'on prévienne toute violation, y compris en retirant les informations illicites ou en rendant l'accès à ces dernières impossible.

(46) Afin de bénéficier d'une limitation de responsabilité, le prestataire d'un service de la société de l'information consistant dans le stockage d'informations doit, dès qu'il prend effectivement connaissance ou conscience du caractère illicite des activités, agir promptement pour retirer les informations concernées ou rendre l'accès à celles-ci impossible. Il y a lieu de procéder à leur retrait ou de rendre leur accès impossible dans le respect du principe de la liberté d'expression et des procédures établies à cet effet au niveau national. La présente directive n'affecte pas la possibilité qu'ont les États membres de définir des exigences spécifiques auxquelles il doit être satisfait promptement avant de retirer des informations ou d'en rendre l'accès impossible.

(47) L'interdiction pour les États membres d'imposer aux prestataires de services une obligation de surveillance ne vaut que pour les obligations à caractère général. Elle ne concerne pas les obligations de surveillance applicables à un cas spécifique et, notamment, elle ne fait pas obstacle aux décisions des autorités nationales prises conformément à la législation nationale.

(48) La présente directive n'affecte en rien la possibilité qu'ont les États membres d'exiger des prestataires de services qui stockent des informations fournies par des destinataires de leurs services qu'ils agissent avec les précautions que l'on peut raisonnablement attendre d'eux et qui sont définies dans la législation nationale, et ce afin de détecter et d'empêcher certains types d'activités illicites.

(49) Les États membres et la Commission doivent encourager l'élaboration de codes de conduite. Cela ne porte pas atteinte au caractère volontaire de ces codes et à la possibilité, pour les parties intéressées, de décider librement si elles adhèrent ou non à ces codes.

(50) Il est important que la proposition de directive sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information et la présente directive entrent en vigueur au même moment afin d'établir un cadre réglementaire clair en ce qui concerne la responsabilité des intermédiaires en cas de violation du droit d'auteur et des droits voisins au niveau communautaire.

(51) Il doit incomber à chaque État membre, le cas échéant, de modifier toute législation susceptible de gêner l'utilisation des mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges par les voies électroniques. Le résultat de cette modification doit être de rendre réellement et effectivement possible, en droit et dans la pratique, le fonctionnement de tels mécanismes, y compris dans des situations transfrontalières.

(52) L'exercice effectif des libertés du marché intérieur nécessite de garantir aux victimes un accès efficace aux règlements des litiges. Les dommages qui peuvent se produire dans le cadre des services de la société de l'information se caractérisent à la fois par leur rapidité et leur étendue géographique. En raison de cette spécificité et de la nécessité de veiller à ce que les autorités nationales ne mettent pas en cause la confiance qu'elles doivent s'accorder mutuellement, la présente directive invite les États membres à faire en sorte que les recours juridictionnels appropriés soient disponibles. Les États membres doivent évaluer la nécessité de fournir un accès aux procédures juridictionnelles par les moyens électroniques appropriés.

(53) La directive 98/27/CE, applicable aux services de la société de l'information, prévoit un mécanisme relatif aux actions en cessation visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. Ce mécanisme contribuera à la libre circulation des services de la société de l'information en assurant un niveau élevé de protection des consommateurs.

(54) Les sanctions prévues dans le cadre de la présente directive sont sans préjudice de toute autre sanction ou voie de droit prévue par le droit national. Les États membres ne sont pas tenus de prévoir des sanctions pénales pour la violation des dispositions nationales adoptées en application de la présente directive.

(55) La présente directive ne porte pas atteinte au droit applicable aux obligations contractuelles relatives aux contrats conclus par les consommateurs. En conséquence, la présente directive ne saurait avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui procurent les règles impératives relatives aux obligations contractuelles prévues par le droit de l'État membre dans lequel il a sa résidence habituelle.

(56) En ce qui concerne la dérogation prévue par la présente directive pour les obligations contractuelles dans les contrats conclus par les consommateurs, celles-ci doivent être interprétées comme comprenant les informations sur les éléments essentiels du contenu du contrat, y compris les droits du consommateur, ayant une influence déterminante sur la décision de contracter.

(57) Conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice, un État membre conserve le droit de prendre des mesures à l'encontre d'un prestataire établi dans un autre État membre, mais dont l'activité est entièrement ou principalement tournée vers le territoire du premier État membre, lorsque le choix de cet établissement a été fait en vue de se soustraire aux règles qui seraient applicables à ce prestataire s'il s'était établi sur le territoire du premier État membre.

(58) La présente directive ne doit pas s'appliquer aux services fournis par des prestataires établis dans un pays tiers. Compte tenu de la dimension mondiale du service électronique, il convient toutefois d'assurer la cohérence des règles communautaires avec les règles internationales. La présente directive est sans préjudice des résultats des discussions en cours sur les aspects juridiques dans les organisations internationales (entre autres, OMC, OCDE, Cnudci).

(59) En dépit de la nature planétaire des communications électroniques, la coordination au niveau de l'Union européenne des mesures réglementaires nationales est nécessaire afin d'éviter la fragmentation du marché intérieur et d'établir un cadre réglementaire européen approprié. Cette coordination doit également contribuer à l'établissement d'une position de négociation commune et forte dans les enceintes internationales.

(60) Pour permettre un développement sans entrave du commerce électronique, le cadre juridique doit être clair et simple, prévisible et cohérent avec les règles applicables au niveau international, de sorte qu'il ne porte pas atteinte à la compétitivité de l'industrie européenne et qu'il ne fasse pas obstacle à l'innovation dans ce secteur.

(61) Si le marché doit réellement fonctionner par des moyens électroniques dans un contexte mondialisé, l'Union européenne et les grands ensembles non européens ont besoin de se concerter pour rendre leurs législations et leurs procédures compatibles.

(62) La coopération avec les pays tiers doit être renforcée dans le domaine du commerce électronique, notamment avec les pays candidats, les pays en développement et les autres partenaires commerciaux de l'Union européenne.

(63) L'adoption de la présente directive ne saurait empêcher les États membres de prendre en compte les différentes implications sociales, sociétales et culturelles inhérentes à l'avènement de la société de l'information. En particulier, elle ne devrait pas porter atteinte aux mesures destinées à atteindre des objectifs sociaux, culturels et démocratiques que les États membres pourraient adopter, conformément au droit communautaire, en tenant compte de leur diversité linguistique, des spécificités nationales et régionales ainsi que de leurs patrimoines culturels, et à assurer et à maintenir l'accès du public à un éventail le plus large possible de services de la société de l'information. Le développement de la société de l'information doit assurer, en tout état de cause, l'accès des citoyens de la Communauté au patrimoine culturel européen fourni dans un environnement numérique.

(64) La communication électronique constitue pour les États membres un excellent moyen de fournir un service public dans les domaines culturel, éducatif et linguistique.

(65) Le Conseil, dans sa résolution du 19 janvier 1999 sur la dimension consumériste de la société de l'information (90), a souligné que la protection des consommateurs méritait une attention particulière dans le cadre de celle-ci. La Commission étudiera la mesure dans laquelle les règles de protection des consommateurs existantes fournissent une protection insuffisante au regard de la société de l'information et identifiera, le cas échéant, les lacunes de cette législation et les aspects pour lesquels des mesures additionnelles pourraient s'avérer nécessaires. En cas de besoin, la Commission devrait faire des propositions spécifiques additionnelles visant à combler les lacunes qu'elle aurait ainsi identifiées,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE :

CHAPITRE Ier

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier
Objectif et champ d'application

1. La présente directive a pour objectif de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en assurant la libre circulation des services de la société de l'information entre les États membres.

2. La présente directive rapproche, dans la mesure nécessaire à la réalisation de l'objectif visé au paragraphe 1, certaines dispositions nationales applicables aux services de la société de l'information et qui concernent le marché intérieur, l'établissement des prestataires, les communications commerciales, les contrats par voie électronique, la responsabilité des intermédiaires, les codes de conduite, le règlement extrajudiciaire des litiges, les recours juridictionnels et la coopération entre États membres.

3. La présente directive complète le droit communautaire applicable aux services de la société de l'information sans préjudice du niveau de protection, notamment en matière de santé publique et des intérêts des consommateurs, établi par les instruments communautaires et la législation nationale les mettant en oeuvre dans la mesure où cela ne restreint pas la libre prestation de services de la société de l'information.

4. La présente directive n'établit pas de règles additionnelles de droit international privé et ne traite pas de la compétence des juridictions.

5. La présente directive n'est pas applicable:

a) au domaine de la fiscalité;

b) aux questions relatives aux services de la société de l'information couvertes par les directives 95/46/CE et 97/66/CE;

c) aux questions relatives aux accords ou pratiques régis par le droit sur les ententes;

d) aux activités suivantes des services de la société de l'information:

- les activités de notaire ou les professions équivalentes, dans la mesure où elles comportent une participation directe et spécifique à l'exercice de l'autorité publique,

- la représentation d'un client et la défense de ses intérêts devant les tribunaux,

- les activités de jeux d'argent impliquant des mises ayant une valeur monétaire dans des jeux de hasard, y compris les loteries et les transactions portant sur des paris.

6. La présente directive ne porte pas atteinte aux mesures prises au niveau communautaire ou au niveau national, dans le respect du droit communautaire, pour promouvoir la diversité culturelle et linguistique et assurer la défense du pluralisme.

Article 2
Définitions

Aux fins de la présente directive, on entend par:

a) "services de la société de l'information": les services au sens de l'article 1er, paragraphe 2, de la directive 98/34/CE, telle que modifiée par la directive 98/48/CE;

b) "prestataire": toute personne physique ou morale qui fournit un service de la société de l'information;

c) "prestataire établi": prestataire qui exerce d'une manière effective une activité économique au moyen d'une installation stable pour une durée indéterminée. La présence et l'utilisation des moyens techniques et des technologies requis pour fournir le service ne constituent pas en tant que telles un établissement du prestataire;

d) "destinataire du service": toute personne physique ou morale qui, à des fins professionnelles ou non, utilise un service de la société de l'information, notamment pour rechercher une information ou la rendre accessible;

e) "consommateur": toute personne physique agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale;

f) "communication commerciale": toute forme de communication destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou l'image d'une entreprise, d'une organisation ou d'une personne ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale ou exerçant une profession réglementée. Ne constituent pas en tant que telles des communications commerciales:

- les informations permettant l'accès direct à l'activité de l'entreprise, de l'organisation ou de la personne, notamment un nom de domaine ou une adresse de courrier électronique,

- les communications relatives aux biens, aux services ou à l'image de l'entreprise, de l'organisation ou de la personne élaborées d'une manière indépendante, en particulier lorsqu'elles sont fournies sans contrepartie financière;

g) "profession réglementée": toute profession au sens, soit de l'article 1er, point d), de la directive 89/49/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionne des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans (91), soit au sens de l'article 1er, point f), de la directive 92/51/CEE du Conseil du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE (92) ;

h) "domaine coordonné": les exigences prévues par les systèmes juridiques des États membres et applicables aux prestataires des services de la société de l'information ou aux services de la société de l'information, qu'elles revêtent un caractère général ou qu'elles aient été spécifiquement conçues pour eux.

i) Le domaine coordonné a trait à des exigences que le prestataire doit satisfaire et qui concernent:

- l'accès à l'activité d'un service de la société de l'information, telles que les exigences en matière de qualification, d'autorisation ou de notification,

- l'exercice de l'activité d'un service de la société de l'information, telles que les exigences portant sur le comportement du prestataire, la qualité ou le contenu du service, y compris en matière de publicité et de contrat, ou sur la responsabilité du prestataire.

ii) Le domaine coordonnée ne couvre pas les exigences telles que:

- les exigences applicables aux biens en tant que tels,

- les exigences applicables à la livraison de biens,

- les exigences applicables aux services qui ne sont pas fournis par voie électronique.

Article 3
Marché intérieur

1. Chaque État membre veille à ce que les services de la société de l'information fournis par un prestataire établi sur son territoire respectent les dispositions nationales applicables dans cet État membre relevant du domaine coordonné.

2. Les État membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l'information en provenance d'un autre État membre.

3. Les paragraphes 1 et 2 ne sont pas applicables aux domaines visés à l'annexe.

4. Les États membres peuvent prendre, à l'égard d'un service donné de la société de l'information, des mesures qui dérogent au paragraphe 2 si les conditions suivantes sont remplies:

a) les mesures doivent être:

i) nécessaires pour une des raisons suivantes:

- l'ordre public, en particulier la prévention, les investigations, la détection et les poursuites en matière pénale, notamment la protection des mineurs et la lutte contre l'incitation à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité et contre les atteintes à la dignité de la personne humaine,

- la protection de la santé publique,

- la sécurité publique, y compris la protection de la sécurité et de la défense nationales,

- la protection des consommateurs, y compris des investisseurs;

ii) prises à l'encontre d'un service de la société de l'information qui porte atteinte aux objectifs visés au point i) ou qui constitue un risque sérieux et grave d'atteinte à ces objectifs;

iii) proportionnelles à ces objectifs;

b) l'État membre a préalablement et sans préjudice de la procédure judiciaire, y compris la procédure préliminaire et les actes accomplis dans le cadre d'une enquête pénale:

- demandé à l'État membre visé au paragraphe 1 de prendre des mesures et ce dernier n'en a pas pris ou elles n'ont pas été suffisantes,

- notifié à la Commission et à l'État membre visé au paragraphe 1 son intention de prendre de telles mesures.

5. Les États membres peuvent, en cas d'urgence, déroger aux conditions prévues au paragraphe 4, point b). Dans ce cas, les mesures sont notifiées dans les plus brefs délais à la Commission et à l'État membre visé au paragraphe 1, en indiquant les raisons pour lesquelles l'État membre estime qu'il y a urgence.

6. Sans préjudice de la faculté pour l'État membre de prendre et d'appliquer les mesures en question, la Commission doit examiner dans les plus brefs délais la compatibilité des mesures notifiées avec le droit communautaire; lorsqu'elle parvient à la conclusion que la mesure est incompatible avec le droit communautaire, la Commission demande à l'État membre concerné de s'abstenir de prendre les mesures envisagées ou de mettre fin d'urgence aux mesures en question.

CHAPITRE II

PRINCIPES

Section 1: Exigences en matière d'établissement et d'information

Article 4
Principe de non-autorisation préalable

1. Les États membres veillent à ce que l'accès à l'activité d'un prestataire de services de la société de l'information et l'exercice de celle-ci ne puissent pas être soumis à un régime d'autorisation préalable ou à toute autre exigence ayant un effet équivalent.

2. Le paragraphe 1 est sans préjudice des régimes d'autorisation qui ne visent pas spécifiquement et exclusivement les services de la société de l'information ou qui sont couverts par la directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services des télécommunications (93).

Article 5
Informations générales à fournir

1. Outre les autres exigences en matière d'information prévues par le droit communautaire, les États membres veillent à ce que le prestataire rende possible un accès facile, direct et permanent, pour les destinataires du service et pour les autorités compétentes, au moins aux informations suivantes:

a) le nom du prestataire de services;

b) l'adresse géographique à laquelle le prestataire de services est établi;

c) les coordonnées du prestataire, y compris son adresse de courrier électronique, permettant d'entrer en contact rapidement et de communiquer directement et efficacement avec lui;

d) dans le cas où le prestataire est inscrit dans un registre de commerce ou dans un autre registre public similaire, le registre de commerce dans lequel il est inscrit et son numéro d'immatriculation, ou des moyens équivalents d'identification figurant dans ce registre;

e) dans le cas où l'activité est soumise à un régime d'autorisation, les coordonnées de l'autorité de surveillance compétente;

f) en ce qui concerne les professions réglementées:

- tout ordre professionnel ou organisme similaire auprès duquel le prestataire est inscrit,

- le titre professionnel et l'État membre dans lequel il a été octroyé,

- une référence aux règles professionnelles applicables dans l'État membre d'établissement et aux moyens d'y avoir accès;

g) dans le cas où le prestataire exerce une activité soumise à la TVA, le numéro d'identification visé à l'article 22, paragraphe 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (94).

2. Outre les autres exigences en matière d'information prévues par le droit communautaire, les États membres veillent au moins à ce que, lorsque les services de la société de l'information mentionnent des prix, ces derniers soient indiqués de manière claire et non ambiguë et précisent notamment si les taxes et les frais de livraison sont inclus.

Section 2: Communications commerciales

Article 6
Informations à fournir

Outre les autres exigences en matière d'information prévues par le droit communautaire, les États membres veillent à ce que les communications commerciales qui font partie d'un service de la société de l'information ou qui constituent un tel service répondent au moins aux conditions suivantes:

a) la communication commerciale doit être clairement identifiable comme telle;

b) la personne physique ou morale pour le compte de laquelle la communication commerciale est faite doit être clairement identifiable;

c) lorsqu'elles sont autorisées dans l'État membre où le prestataire est établi, les offres promotionnelles, telles que les rabais, les primes et les cadeaux, doivent être clairement identifiables comme telles et les conditions pour en bénéficier doivent être aisément accessibles et présentées de manière précise et non équivoque;

d) lorsqu'ils sont autorisés dans l'État membre où le prestataire est établi, les concours ou jeux promotionnels doivent être clairement identifiables comme tels et leurs conditions de participation doivent être aisément accessibles et présentées de manière précise et non équivoque.

Article 7
Communications commerciales non sollicitées

1. Outre les autres exigences prévues par le droit communautaire, les États membres qui autorisent les communications commerciales non sollicitées par courrier électronique veillent à ce que ces communications commerciales effectuées par un prestataire établi sur leur territoire puissent être identifiées de manière claire et non équivoque dès leur réception par le destinataire.

2. Sans préjudice de la directive 97/7/CE et de la directive 97/66/CE, les États membres prennent des mesures visant à garantir que les prestataires qui envoient par courrier électronique des communications commerciales non sollicitées consultent régulièrement les registres "opt-out" dans lesquels les personnes physiques qui ne souhaitent pas recevoir ce type de communications peuvent s'inscrire, et respectent le souhait de ces dernières.

Article 8
Professions réglementées

1. Les États membres veillent à ce que l'utilisation de communications commerciales qui font partie d'un service de la société de l'information fourni par un membre d'une profession réglementée, ou qui constituent un tel service, soit autorisée sous réserve du respect des règles professionnelles visant, notamment, l'indépendance, la dignité et l'honneur de la profession ainsi que le secret professionnel et la loyauté envers les clients et les autres membres de la profession.

2. Sans préjudice de l'autonomie des organismes et associations professionnels, les États membres et la Commission encouragent les associations et les organismes professionnels à élaborer des codes de conduite au niveau communautaire pour préciser les informations qui peuvent être données à des fins de communications commerciales dans le respect des règles visées au paragraphe 1.

3. Lors de l'élaboration de propositions relatives à des initiatives communautaires qui peuvent s'avérer nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur au regard des informations visées au paragraphe 2, la Commission tient dûment compte des codes de conduite applicables au niveau communautaire et agit en étroite coopération avec les associations et organismes professionnels concernés.

4. La présente directive s'applique en sus des directives communautaires régissant l'accès aux activités des professions réglementées et l'exercice de celles-ci.

Section 3: Contrats par voie électronique

Article 9
Traitement des contrats

1. Les États membres veillent à ce que leur système juridique rende possible la conclusion des contrats par voie électronique. Les États membres veillent notamment à ce que le régime juridique applicable au processus contractuel ne fasse pas obstacle à l'utilisation des contrats électroniques ni ne conduise à priver d'effet et de validité juridiques de tels contrats pour le motif qu'ils sont passés par voie électronique.

2. Les États membres peuvent prévoir que le paragraphe 1 ne s'appliquent pas à tous les contrats ou à certains d'entre eux qui relèvent des catégories suivantes:

a) les contrats qui créent ou transfèrent des droits sur des biens immobiliers, à l'exception des droits de location;

b) les contrats pour lesquels la loi requiert l'intervention des tribunaux, des autorités publiques ou de professions exerçant une autorité publique;

c) les contrats de sûretés et garanties fournis par des personnes agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de leur activité professionnelle ou commerciale;

d) les contrats relevant du droit de la famille ou du droit des successions.

3. Les États membres indiquent à la Commission les catégories visées au paragraphe 2 auxquelles ils n'appliquent pas le paragraphe 1. Ils soumettent tous les cinq ans à la Commission un rapport sur l'application du paragraphe 2 en expliquant les raisons pour lesquelles ils estiment nécessaire de maintenir les catégories visées au paragraphe 2, point b), auxquelles ils n'appliquent pas le paragraphe 1.

Article 10
Informations à fournir

1. Outre les autres exigences en matière d'information prévues par le droit communautaire, les États membres veillent à ce que, sauf si les parties qui ne sont pas des consommateurs en ont convenu autrement, le prestataire de services fournisse au moins les informations mentionnées ci-après, formulées de manière claire, compréhensible et non équivoque et avant que le destinataire du service ne passe sa commande:

a) les différentes étapes techniques à suivre pour conclure le contrat;

b) si le contrat une fois conclu est archivé ou non par le prestataire de services et s'il est accessible ou non;

c) les moyens techniques pour identifier et corriger des erreurs commises dans la saisie des données avant que la commande ne soit passée;

d) les langues proposées pour la conclusion du contrat.

2. Les États membres veillent à ce que, sauf si les parties qui ne sont pas des consommateurs en ont convenu autrement, le prestataire indique les éventuels codes de conduite pertinents auxquels il est soumis ainsi que les informations sur la façon dont ces codes peuvent être consultés par voie électronique.

3. Les clauses contractuelles et les conditions générales fournies au destinataire doivent l'être d'une manière qui lui permette de les conserver et de les reproduire.

4. Les paragraphes 1 et 2 ne sont pas applicables à des contrats conclus exclusivement par le biais d'un échange de courriers électroniques ou par des communications individuelles équivalentes.

Article 11
Passation d'une commande

1. Les États membres veillent, sauf si les parties qui ne sont pas des consommateurs en ont convenu autrement, à ce que, dans les cas où un destinataire du service passe sa commande par des moyens technologiques, les principes suivants s'appliquent:

- le prestataire doit accuser réception de la commande du destinataire sans délai injustifié et par voie électronique,

- la commande et l'accusé de réception sont considérés comme étant reçus lorsque les parties auxquelles il sont adressés peuvent y avoir accès.

2. Les États membres veillent, sauf si les parties qui ne sont pas des consommateurs en ont convenu autrement, à ce que le prestataire mette à la disposition du destinataire du service des moyens techniques appropriés, efficaces et accessibles lui permettant d'identifier les erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger, et ce avant la passation de la commande.

3. Le paragraphe 1, premier tiret, et le paragraphe 2 ne sont pas applicables à des contrats conclus exclusivement au moyen d'un échange de courriers électroniques ou au moyen de communications individuelles équivalentes.

Section 4: Responsabilité des prestataires intermédiaires

Article 12
Simple transport ("Mere conduit")

1. Les États membres veillent à ce que, en cas de fourniture d'un service de la société de l'information consistant à transmettre, sur un réseau de communication, des informations fournies par le destinataire du service ou à fournir un accès au réseau de communication, le prestataire de services ne soit pas responsable des informations transmises, à condition que le prestataire:

a) ne soit pas à l'origine de la transmission;

b) ne sélectionne pas le destinataire de la transmission

et

c) ne sélectionne et ne modifie pas les informations faisant l'objet de la transmission.

2. Les activités de transmission et de fourniture d'accès visées au paragraphe 1 englobent le stockage automatique, intermédiaire et transitoire des informations transmises, pour autant que ce stockage serve exclusivement à l'exécution de la transmission sur le réseau de communication et que sa durée n'excède pas le temps raisonnablement nécessaire à la transmission.

3. Le présent article n'affecte pas la possibilité, pour une juridiction ou une autorité administrative, conformément aux systèmes juridiques des États membres, d'exiger du prestataire qu'il mette un terme à une violation ou qu'il prévienne une violation.

Article 13
Forme de stockage dite "caching"

1. Les États membre veillent à ce que, en cas de fourniture d'un service de la société de l'information consistant à transmettre, sur un réseau de communication, des informations fournies par un destinataire du service, le prestataire ne soit pas responsable au titre du stockage automatique, intermédiaire et temporaire de cette information fait dans le seul but de rendre plus efficace la transmission ultérieure de l'information à la demande d'autres destinataires du service, à condition que:

a) le prestataire ne modifie pas l'information;

b) le prestataire se conforme aux conditions d'accès à l'information;

c) le prestataire se conforme aux règles concernant la mise à jour de l'information, indiquées d'une manière largement reconnue et utilisées par les entreprises;

d) le prestataire n'entrave pas l'utilisation licite de la technologie, largement reconnue et utilisée par l'industrie, dans le but d'obtenir des données sur l'utilisation de l'information

et

e) le prestataire agisse promptement pour retirer l'information qu'il a stockée ou pour en rendre l'accès impossible dès qu'il a effectivement connaissance du fait que l'information à l'origine de la transmission a été retirée du réseau ou du fait que l'accès à l'information a été rendu impossible, ou du fait qu'un tribunal ou une autorité administrative a ordonné de retirer l'information ou d'en rendre l'accès impossible.

2. Le présent article n'affecte pas la possibilité, pour une juridiction ou une autorité administrative, conformément aux systèmes juridiques des États membres, d'exiger du prestataire qu'il mette fin à une violation ou qu'il prévienne une violation.

Article 14
Hébergement

1. Les États membres veillent à ce que, en cas de fourniture d'un service de la société de l'information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service, le prestataire ne soit pas responsable des informations stockées à la demande d'un destinataire du service à condition que:

a) le prestataire n'ait pas effectivement connaissance de l'activité ou de l'information illicites et, en ce qui concerne une demande en dommages et intérêts, n'ait pas connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l'activité ou l'information illicite est apparente

ou

b) le prestataire, dès le moment où il a de telles connaissances, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre l'accès à celles-ci impossible.

2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas lorsque le destinataire du service agit sous l'autorité ou le contrôle du prestataire.

3. Le présent article n'affecte pas la possibilité, pour une juridiction ou une autorité administrative, conformément aux systèmes juridiques des États membres, d'exiger du prestataire qu'il mette un terme à une violation ou qu'il prévienne une violation et n'affecte pas non plus la possibilité, pour les États membres, d'instaurer des procédures régissant le retrait de ces informations ou les actions pour en rendre l'accès impossible.

Article 15
Absence d'obligation générale en matière de surveillance

1. Les États membres ne doivent pas imposer aux prestataires, pour la fourniture des services visée aux articles 12, 13 et 14, une obligation générale de surveiller les informations qu'ils transmettent ou stockent, ou une obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites.

2. Les États membres peuvent instaurer, pour les prestataires de services de la société de l'information, l'obligation d'informer promptement les autorités publiques compétentes d'activités illicites alléguées qu'exerceraient les destinataires de leurs services ou d'informations illicites alléguées que ces derniers fourniraient ou de communiquer aux autorités compétentes, à leur demande, les informations permettant d'identifier les destinataires de leurs services avec lesquels ils ont conclu un accord d'hébergement.

CHAPITRE III
MISE EN
ŒUVRE

Article 16
Codes de conduite

1. Les États membres et la Commission encouragent:

a) l'élaboration, par les associations ou organisations d'entreprises, professionnelles ou de consommateurs, de codes de conduite au niveau communautaire, destinés à contribuer à la bonne application des articles 5 à 15;

b) la transmission volontaire à la Commission des projets de codes de conduite au niveau national ou communautaire;

c) l'accessibilité par voie électronique des codes de conduite dans les langues communautaires;

d) la communication aux États membres et à la Commission, par les associations ou organisations d'entreprises, professionnelles ou de consommateurs, de leurs évaluations de l'application de leurs codes de conduite et de leur impact sur les pratiques, les us ou les coutumes relatifs au commerce électronique;

e) l'établissement de codes de conduite pour ce qui a trait à la protection des mineurs et de la dignité humaine.

2. Les États membres et la Commission encouragent les associations ou les organisations représentant les consommateurs à participer à l'élaboration et à l'application des codes de conduite ayant des incidences sur leurs intérêts et élaborés en conformité avec le paragraphe 1, point a). Le cas échéant, les associations représentant les personnes souffrant d'un handicap visuel et, de manière générale, les personnes handicapées devraient être consultées afin de tenir compte de leurs besoins spécifiques.

Article 17
Règlement extrajudiciaire des litiges

1. Les États membres veillent à ce que, en cas de désaccord entre un prestataire de services de la société de l'information et le destinataire du service, leur législation ne fasse pas obstacle à l'utilisation des mécanismes de règlement extrajudiciaire pour le règlement des différends, disponibles dans le droit national, y compris par des moyens électroniques appropriés.

2. Les États membres encouragent les organes de règlement extrajudiciaire, notamment en ce qui concerne les litiges en matière de consommation, à fonctionner de manière à assurer les garanties procédurales appropriées pour les parties concernées.

3. Les États membres encouragent les organes de règlement extrajudiciaire des litiges à communiquer à la Commission les décisions importantes qu'ils prennent en matière de services de la société de l'information ainsi que toute autre information sur les pratiques, les us ou les coutumes relatifs au commerce électronique.

Article 18
Recours juridictionnels

1. Les États membres veillent à ce que les recours juridictionnels disponibles dans le droit national portant sur les activités des services de la société de l'information permettent l'adoption rapide de mesures, y compris par voie de référé, visant à mettre un terme à toute violation alléguée et à prévenir toute nouvelle atteinte aux intérêts concernés.

2. L'annexe de la directive 98/27/CE est complétée par le texte suivant:

"11. Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (`directive sur le commerce électronique') (JO L 178 du 17.7.2000, p. 1)."

Article 19
Coopération

1. Les États membres disposent de moyens suffisants de contrôle et d'investigation nécessaires à la mise en oeuvre efficace de la présente directive et veillent à ce que les prestataires leur fournissent les informations requises.

2. Les États membres coopèrent avec les autres États membres; à cette fin, ils désignent un ou plusieurs points de contact, dont ils communiquent les coordonnées aux autres États membres et à la Commission.

3. Les États membres fournissent dans les plus brefs délais et conformément au droit national l'assistance et les informations demandées par les autres États membres ou par la Commission, y compris par les voies électroniques appropriées.

4. Les États membres établissent des points de contact accessibles au moins par voie électronique auxquels les destinataires de services et les prestataires de services peuvent s'adresser pour:

a) obtenir des informations générales sur leurs droits et obligations en matière contractuelle ainsi que sur les procédures de réclamation et de recours disponibles en cas de différends, y compris sur les aspects pratiques liés à l'utilisation de ces procédures;

b) obtenir les coordonnées des autorités, associations ou organisations auprès desquelles ils peuvent obtenir d'autres informations ou une assistance pratique.

5. Les États membres encouragent la communication à la Commission des décisions administratives et judiciaires importantes prises sur leur territoire s'agissant des litiges relatifs aux services de la société de l'information ainsi que des pratiques, des us ou des coutumes relatifs au commerce électronique. La Commission communique ces décisions aux autres États membres.

Article 20
Sanctions

Les États membres déterminent le régime des sanctions applicable aux violations des dispositions nationales adoptées en application de la présente directive et prennent toutes mesures nécessaires pour assurer leur mise en oeuvre. Les sanctions ainsi prévues doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

CHAPITRE IV
DISPOSITIONS FINALES

Article 21
Réexamen

1. Avant le 17 juillet 2003 et ensuite tous les deux ans, la Commission présente au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social un rapport relatif à l'application de la présente directive accompagné, le cas échéant, de propositions visant à l'adapter à l'évolution juridique, technique et économique dans le domaine des services de la société de l'information, notamment en ce qui concerne la prévention de la criminalité, la protection des mineurs, la protection des consommateurs et le bon fonctionnement du marché intérieur.

2. Ce rapport, en examinant la nécessité d'adapter la présente directive, analyse en particulier la nécessité de présenter des propositions relatives à la responsabilité des fournisseurs de liens d'hypertexte et de services de moteur de recherche, les procédures de notification et de retrait (notice and take down) et l'imputation de la responsabilité après le retrait du contenu. Le rapport analyse également la nécessité de prévoir des conditions supplémentaires pour l'exemption de responsabilité, prévue aux articles 12 et 13, compte tenu de l'évolution des techniques, et la possibilité d'appliquer les principes du marché intérieur à l'envoi par courrier électronique de communications commerciales non sollicitées.

Article 22
Transposition

1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive avant le 17 janvier 2002. Ils en informent immédiatement la Commission.

2. Lorsque les États membres adoptent les dispositions visées au paragraphe 1, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

Article 23
Entrée en vigueur

La présente directive entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Article 24
Destinataires

Les États membres sont destinataires de la présente directive.

ANNEXE

DÉROGATIONS À L'ARTICLE 3

Comme prévu à l'article 3, paragraphe 3, les paragraphes 1 et 2 de l'article 3 ne s'appliquent pas dans les cas suivants:

- le droit d'auteur, les droits voisins, les droits visés par la directive 87/54/CEE (95) et par la directive 96/9/CE (96) ainsi que les droits de propriété industrielle,

- l'émission de monnaie électronique par des institutions pour lesquelles les États membres ont appliqué une des dérogations prévues à l'article 8, paragraphe 1, de la directive 2000/46/CE (97),

- l'article 44, paragraphe 2, de la directive 85/611/CEE (98),

- l'article 30 et le titre IV de la directive 92/49/CEE (99), le titre IV de la directive 92/96/CEE (100), les articles 7 et 8 de la directive 88/357/CEE (101)et l'article 4 de la directive 90/619/CEE (102),

- la liberté des parties de choisir le droit applicable à leur contrat,

- les obligations contractuelles concernant les contrats conclus par les consommateurs,

- la validité formelle des contrats créant ou transférant des droits sur des biens immobiliers, lorsque ces contrats sont soumis à des exigences formelles impératives selon le droit de l'État membre dans lequel le bien immobilier est situé,

- l'autorisation des communications commerciales non sollicitées par courrier électronique.

ANNEXE 2

CHARTE DE NOMMAGE DE LA ZONE « .FR » DE L'AFNIC
(ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LE NOMMAGE INTERNET EN COOPÉRATION)

1. La charte de l'Association française pour le nommage Internet en Coopération (AFNIC), ci-après dénommée « charte de nommage » est un document consensuel dont l'objectif est d'assurer une administration harmonieuse des noms de domaine de la zone de nommage en « .fr », au bénéfice de tous.

2. La charte de nommage est établie conformément aux décisions prises par les organes compétents de l'AFNIC en collaboration avec les « comités de concertation » qui composent l'association.

3. La charte de nommage est donc un document évolutif, fruit de la réflexion, des travaux et des accords de ses membres et des partenaires de l'AFNIC.

4. Au sein de la charte de nommage les termes ci-dessous auront les définitions suivantes :

· « AFNIC » : association française pour le nommage Internet en Coopération, association régie par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 16 août 1901 chargée par délégation d'administrer la zone de nommage Internet en « .fr ». Les statuts et la mission de l'AFNIC sont accessibles sur le site de l'AFNIC.

· « charte de nommage » : la charte est composée du présent document et du guide des procédures. Elle est complétée par un ensemble de documents et d'informations accessibles en ligne sur le site Web de l'AFNIC ou directement auprès de l'AFNIC sur simple demande.

· « prestataire Internet » : prestataire technique ayant conclu une convention d'adhésion avec l'AFNIC, en charge de traiter les demandes de ses clients (les organismes demandeurs) quant à l'administration des noms de domaine. Liste des prestataires conventionnés.

· « organisme demandeur » : toute personne physique ou morale qui demande, par l'intermédiaire d'un prestataire Internet membre de l'AFNIC, un acte d'administration sur un nom de domaine.

· « acte d'administration » : tout acte à caractère administratif ou technique relatif à un nom de domaine sur la base des demandes et documentations adressées par les prestataires Internet. Notamment, et sans que cette liste ne soit limitative, création, modification, transmission, changement de prestataire, suppression... d'un nom de domaine.

· « guide des procédures » : document qui détaille l'ensemble des éléments d'ordre technique relatif à la mise en oeuvre d'actes d'administration sur un nom de domaine.

· « nom de domaine orphelin » : nom de domaine qui n'est plus géré par un prestataire internet, soit que celui-ci ait dénoncé sa convention d'adhésion avec l'AFNIC, soit qu'il ait cessé son activité relative à la gestion de nom de domaine.

5. La version de la charte de nommage opposable est celle disponible sur le site de l'AFNIC au jour de la réception par cette dernière d'une demande d'acte d'administration adressée par un prestataire Internet. Sauf exception, l'application des nouvelles règles n'est pas rétroactive.

6. La charte de nommage est limitée aux seuls noms de domaine de la zone de nommage en « .fr ».

7. L'attribution d'un nom de domaine au sein de la zone de nommage en « .fr » est possible pour tout organisme demandeur officiellement déclaré en France et pour les personnes physiques résidant en France ou de nationalité française dans le respect des dispositions de la présente charte.

8. Le nom de domaine attribué confère un droit d'usage à l'organisme demandeur et non au prestataire Internet.

9. Le prestataire Internet est l'interface entre l'AFNIC et l'organisme demandeur.

10. Les relations techniques établies entre l'AFNIC et le prestataire Internet dans le cadre d'un acte d'administration sur des noms de domaine sont organisées conformément à la charte de nommage et mis en œuvre en application du guide des procédures disponible sur le site de l'AFNIC.

11. Pour tout type d'acte d'administration, l'organisme demandeur est tenu de s'adresser à un prestataire Internet.

12. Le prestataire Internet a notamment pour tâche de :

· Recueillir toutes les pièces justificatives et informations relatives à une demande d'acte d'administration ;

· S'assurer de la validité des pièces justificatives et informations ;

· Suivre les prescriptions du guide des procédures ;

· Le prestataire Internet est tout particulièrement tenu d'informer les organismes demandeurs qui sont ses clients de toute modification et/ou évolution le concernant (évolution ou cessation d'activité, procédure collective...) qui pourrait avoir un impact quant à la bonne gestion du nom de domaine.

13. L'organisme demandeur doit :

· Prendre connaissance et accepter les termes de la présente charte ;

· Vérifier que sa demande, et particulièrement le choix du terme ou des termes qu'il entend utiliser pour l'attribution d'un nom de domaine :

o Est licite au regard du droit et notamment des règles d'ordre public,

o Ne porte pas atteinte aux droits de tiers notamment aux droits d'auteur, aux droits des marques et aux droits de la personne... sans que cette liste soit limitative,

o Est conforme aux dispositions de la présente charte ;

· Fournir à son prestataire Internet les pièces justificatives qui lui seront demandées en application de la présente charte de nommage ;

· Vérifier l'exactitude des informations qu'il communique à son prestataire Internet et s'engager à les actualiser si nécessaire.

14. L'organisme demandeur est seul responsable des documents, informations et demandes qu'il adresse au prestataire Internet. Le prestataire Internet est responsable de la bonne transmission des documents qu'il adresse à l'AFNIC et/ou des saisies informatiques qu'il opère dans le cadre d'un acte d'administration relatif à un nom de domaine. L'organisme demandeur devra s'adresser à son prestataire Internet pour toute question ou réclamation relative à sa demande.

15. La base de données relative aux noms de domaines administrée par l'AFNIC a fait l'objet d'une déclaration auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

16. L'organisme demandeur, dûment identifié, pourra avoir accès aux données personnelles le concernant et aura un droit de rectification sur l'ensemble de ces éléments en application de la loi « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978.

17. En aucun cas l'AFNIC n'est responsable du contrôle du contenu, de la conformité ou de la légalité des éléments qui lui sont remis ou communiqués dans la mesure où ces éléments ou informations sont enregistrés ou établis par des organismes tiers (greffe du tribunal de commerce, INPI, préfecture...).

18. L'AFNIC n'effectue aucune recherche d'antériorité quant aux noms de domaine mais reste gardienne de la bonne application de la charte de nommage. En ce sens elle suspendra tout acte d'administration d'un nom de domaine dès lors que les documents et/ou informations qui lui auront été adressés ne seront pas conformes aux dispositions de la charte de nommage sans que cela constitue pour l'AFNIC une obligation de résultat.

19. L'AFNIC se réserve également le droit de suspendre un nom de domaine pendant un délai d'un mois et de procéder à sa suppression faute de régularisation dans le délai imparti et /ou toute demande d'acte d'administration dans tous les cas où les dispositions de la charte de nommage ne seraient pas respectées ou seraient détournées sans que ceci ne constitue une quelconque obligation à la charge de l'AFNIC.

20. Le droit d'usage d'un nom de domaine est conditionné par le paiement d'une redevance annuelle de maintenance.

21. Pendant toute la durée d'exploitation d'un nom de domaine, cette redevance de maintenance est due par le dernier prestataire Internet en charge dudit nom de domaine, un an après le dernier acte d'administration payant.

22. Les actes d'administration définis aux présentes (partie III) donnent lieu à une facturation due par le prestataire l'ayant demandé.

23. La charte de nommage peut être consultée à tout moment sur le site de l'AFNIC.

24. La charte de nommage est aussi disponible dans le format suivant : Adobe PDF.

25. Pour obtenir la liste des derniers noms de domaine enregistrés, l'organisme demandeur ou le prestataire Internet peut consulter le site de l'AFNIC.

26. Pour toute autre demande il convient de s'adresser aux organismes d'attribution compétents dont la liste est accessible sur le site de l'AFNIC.

1. La zone de nommage « .fr » est décomposée selon les catégories suivantes :

Le « domaine public »

Cette catégorie de noms de domaine est directement organisée et administrée par l'AFNIC.

Elle comporte les extensions suivantes : « .fr », « .asso.fr », « .com.fr », « .nom.fr », « .prd.fr », « .presse.fr » et « .tm.fr ».

Cette catégorie est réglementée conformément aux termes de la présente charte.

Le « domaine sectoriel »

Cette catégorie de noms de domaine permet d'identifier une branche d'activité ou un secteur professionnel et de le structurer de manière homogène.

Elle correspond à des secteurs d'activité réglementés par une autorité en particulier (exemple : ordre, conseil supérieur...).

Cette catégorie de noms de domaine est organisée à la demande de l'autorité compétente qui établit un règlement de nommage pour le secteur qui la concerne et qu'elle soumet pour accord à l'AFNIC.

Une fois le règlement de nommage validé, les noms de domaine correspondants sont administrés par l'AFNIC dans le respect de la présente charte de nommage et du règlement de nommage en cause.

L'AFNIC en accord avec les autorités compétentes des secteurs d'activités réglementés examinera, à l'occasion de chaque demande, l'opportunité de créer un ou plusieurs domaines sectoriels.

Les « conventions de nommage »

Cette catégorie de noms de domaine correspond à des noms de domaine enregistrés sous un format commun pour des entités d'un même secteur d'activité non réglementé.

Elle est organisée et administrée par l'AFNIC dans les conditions détaillées au sein de la présente charte.

Les conventions de nommage sont mises en oeuvre par l'AFNIC en tant que de besoin.

2. Attention : Toutes ces catégories sont susceptibles d'évolution et/ou de compléments.

3. Tout acte d'administration relatif à un nom de domaine repose sur la remise de documents et/ou de justificatifs et/ou d'informations tels que précisés au sein de la présente charte de nommage, sous réserve des spécificités réglementaires régionales ou locales.

4. Tant que le nom de domaine est exploité, l'organisme demandeur qui bénéficie d'un droit d'usage doit pouvoir justifier du respect des dispositions de la présente charte de nommage. Dans l'hypothèse où, à l'occasion d'une demande d'acte d'administration, l'AFNIC devait constater qu'un des noms de domaine de l'organisme demandeur n'était plus justifié, aucune suite ne sera donnée à sa nouvelle demande tant que le sort du nom de domaine non justifié ne sera pas traité (remise des justifications ou suppression).

5. Un certain nombre de termes ne sont pas attribuables à titre de nom de domaine même si la demande répond parfaitement aux critères cités ci-dessus. Cela comprend les termes fondamentaux interdits :

· Liés à l'ordre public ou aux bonnes mœurs,

· Liés au fonctionnement de l'Internet,

· Les noms des organisations internationales et des pays signataires de la convention d'union de Paris.

6. Il en est de même pour le terme France, les noms des collectivités territoriales françaises qui leurs sont réservés, les noms des professions et titres réglementés (singulier et pluriel) sauf exception prévue dans la présente charte.

7. Compte tenu des évolutions, tout nom de domaine composé d'un terme « fondamental interdit » peut subir, un droit de préemption ou de reprise par l'AFNIC, sans dédommagement, assorti d'un délai suffisant pour assurer la migration.

8. L'application des règles relatives aux domaines sectoriels prime sur les règles propres à la catégorie du domaine public.

9. Sont autorisés :

· les lettres de l'alphabet de « A » à « Z » (minuscule ou majuscule indifféremment), les chiffres de « 0 » à « 9 » et le symbole « - » (tiret) à l'exclusion de tout autre symbole ;

· Les noms de domaine d'une longueur maximum de 255 caractères (63 caractères entre chaque « . » ou « label »);

· Les noms de domaine composés :

o directement sous la racine « .fr » d'au moins 3 lettres (« aaa.fr ») ou d'un chiffre et d'une lettre (« z2.fr »),

o sous les autres domaines publics : d'au moins deux caractères « aa.tm.fr » / « m2.asso.fr »).

· le « . » (point) comme séparateur de sous-domaine dans les catégories de domaines sectoriels et de conventions de nommage.

10. Sont interdits :

· Les noms de domaine constitués uniquement de chiffres ;

· Les noms de domaine débutant ou se terminant par le caractère « - » (tiret) ;

· Les caractères accentués.

A noter, seule la lettre sera retenue dans le cas de lettre associée à des caractères accentués (ex : ñ, ë seront enregistrés respectivement n, et e).

Pour l'ensemble des noms de domaine publics, le document justificatif n'est pas demandé à l'appui de l'acte d'administration à l'exception :

· des demandes sous « .fr » émanant d'organismes non identifiés auprès de l'INSEE,

· des demandes émanant d'organismes créés par loi ou décret,

· des demandes émanant d'organismes répertoriés en syndicat professionnel,

· des demandes émanant d'organismes désirant un enregistrement sous « .prd.fr ».

· L'AFNIC se réserve, en tant que de besoin, de demander communication des justificatifs dans les cas suivants :

· contrôle ponctuel réalisé à sa discrétion pour le bon suivi de la charte de nommage,

· impossibilité temporaire ou définitive d'accès aux bases de données permettant de vérifier les justifications,

· incohérence dans les informations recueillies par l'AFNIC auprès des dites bases de données.

Pour tous les contrôles réalisés après la création d'un nom de domaine, le prestataire est tenu de communiquer les documents justificatifs dans un délai maximum de 72 heures ; à défaut, le nom de domaine est suspendu pendant un délai d'un mois puis supprimé faute de régularisation dans le délai imparti.

11. Les éléments justificatifs nécessaires à la réalisation d'un acte d'administration pour un nom de domaine relevant d'une extension du domaine public de la zone de nommage « .fr » sont décrits ci-après :

Domaines

Demandeur

Justifications

.fr

Société ou personne morale dotée d'un numéro SIREN / SIRET (hors domaines sectoriels, conventions de nommage ou autres zones publiques).

- un extrait de K Bis pour les sociétés et commerçants ou,

- un identifiant au répertoire INSEE pour les autres professions.

Entité titulaire d'une marque dûment enregistrée.

- certificat définitif INPI, OHMI ou OMPI (sous réserve que la France figure parmi les pays concernés par le dépôt).

Tout organisme non identifié auprès de l'INSEE, créé par loi ou décret, ou répertorié en syndicat professionnel.

- loi, décret ou,

- copie d'immatriculation délivrée par la mairie ou la préfecture.

Association immatriculée auprès de l'INSEE

- copie de l'identifiant au répertoire INSEE.

.asso.fr

Association

- copie de la parution au JO ou récépissé de déclaration à la Préfecture ou,

- copie de l'identifiant au répertoire INSEE.

.nom.fr

.nom.fr

Personne physique résidant en France

Le nom de domaine en « .nom.fr » ne peut être accordé qu'à une personne majeure et capable.

- copie certifiée conforme de la carte nationale d'identité, ou du permis de conduire, ou d'une carte de séjour, et,

- un justificatif de domicile de moins de 3 mois (facture EDF-GDF, téléphone).

Personne physique de nationalité française résidant à l'étranger

Le nom de domaine en « .nom.fr » ne peut être accordé qu'à une personne majeure et capable.

- copie certifiée conforme de la carte nationale d'identité ou du permis de conduire,

- justificatif de domicile de moins de 3 mois du pays de résidence.

.prd.fr

Projet ou programme de recherche et développement

- présentation écrite du projet avec la liste des membres.

.presse.fr

Organisme de presse

- copie du document ISSN de la Bibliothèque nationale.

.tm.fr

Marque déposée

- enregistrement de la marque sur présentation du certificat définitif INPI, OHMI ou OMPI (sous réserve que la France figure parmi les pays concernés par le dépôt) ou,

- copie de la demande d'enregistrement ou de la parution au BOPI et dans les six mois suivant la demande d'enregistrement, la remise du certificat INPI définitif ou du certificat d'identité avec état des inscriptions pour valider définitivement la demande.

.com.fr

Toute personne physique ou morale

- justificatif d'identité (sur la base des mêmes documents que pour les enregistrements sous les autres domaines publics).

12. Les règles suivantes régissent les conditions d'attribution des noms de domaine dans toute la zone de nommage « .fr » à l'exception de l'extension « .com.fr ».

13. Les abréviations, raccourcis ou autres adaptations de termes peuvent être envisagés de même que l'ajout d'un terme (tel que conseil, agence, société, groupe, entreprise, ...) de langue française exclusivement de nature à qualifier l'activité de l'organisme demandeur, son nom de domaine ou pallier une homonymie. Ces adaptations ne sont possibles que si elles sont justifiées au regard des documents fournis en application de la présente charte.

14. L'organisme demandeur peut obtenir l'attribution d'un nombre illimité de noms de domaine dès lors qu'ils soient justifiés au regard de la charte.

15. Pour ce qui concerne la justification par extrait K Bis ou identifiant INSEE, l'organisme demandeur choisit le ou les termes parmi les catégories suivantes : dénomination sociale, sigle, enseigne, nom commercial. Il en est de même pour les justificatifs relatifs aux autres extensions du domaine public.

16. Dans le cas où le nom de domaine figurant sur l'identifiant INSEE ou sur le K Bis serait composé de plusieurs termes, l'organisme demandeur peut choisir un seul de ces termes à l'exclusion des termes non attribuables et des termes non discriminants (ex.: article, préposition,...).

17. Une société dont la dénomination sociale est identique au nom d'une commune française peut être enregistrée directement sous « .fr » sur présentation du K Bis et du dépôt de marque antérieur à 1985.

18. Pour les noms de domaines en « .fr » créés sur la base d'un certificat définitif validé par l'INPI, il est précisé que le nom de domaine devra respecter précisément le terme tel qu'il figure sur le certificat, dans le respect des règles de syntaxe qui figurent au sein de la charte.

Attention, le certificat définitif d'enregistrement de la marque n'est délivré que dans un délai de 6 mois après la demande d'enregistrement selon les procédures INPI.

19. En cas d'homonymie, les autres marques identiques ne pourront être enregistrées que sous l'extension « .tm.fr ». Il ne sera pas possible d'ajouter un élément distinctif à ces marques de nature à obtenir une création en « .fr ».

20. Pour les noms de domaine en « .fr » créés pour les associations sur la base d'un identifiant INSEE, il est précisé que le nom de domaine doit respecter exactement les termes tels qu'ils figurent dans l'une des rubriques de l'identifiant (à savoir les nom, enseigne et sigle complets et exacts).

21. Le nom de domaine attribué engage la responsabilité de l'organisme demandeur qui ne doit enregistrer comme sous-domaine que des entités appartenant à son organisme. (À titre d'exemple l'enregistrement de « societeB.societeA.fr » est fortement déconseillé).

22. Il est par ailleurs recommandé de regrouper les entités régionales, filiales, divers services ..., d'un même organisme dans la hiérarchie de cet organisme (exemple : « branche.societe.fr », « filiale.groupe.fr »).

Spécificité de l'extension « .com.fr »

23. L'enregistrement n'est autorisé que si le terme n'est pas déjà enregistré à l'identique dans l'une des extensions du domaine public.

24. L'enregistrement sous l'extension « .com.fr » n'empêche pas un organisme demandeur d'enregistrer postérieurement le même terme dans une des autres extensions du domaine public.

Spécificité de l'extension « .nom.fr »

25. Le nom de domaine d'une personne physique obéit à la syntaxe suivante : « patronyme.nom.fr », et/ou « patronyme-champlibre.nom.fr ».

26. Le patronyme s'entend du nom de famille ou du nom de jeune fille ou du pseudonyme tel qu'il figure sur le document d'identité fourni.

27. Toute personne procédant à un enregistrement sous l'extension « .nom.fr » peut à tout moment demander à bénéficier de l'option dite « liste rouge ».

28. Lorsque l'option "liste rouge" est activée, aucune information d'ordre privé (nom, adresse, téléphone, télécopie et le cas échéant courrier électronique) n'est accessible en consultation sur la base publique Whois. Seules figurent sur cette base des informations d'ordre technique, notamment : contact technique, coordonnées du prestataire Internet et serveurs DNS.

Spécificité de l'extension « asso.fr »

29. Le nom de domaine des associations obéit par principe à l'enregistrement sous l'extension « .asso.fr ».

30. Les associations peuvent demander la création du nom de domaine correspondant au sigle sous réserve qu'il soit l'acronyme exact de leurs dénominations.

31. Les associations peuvent également demander la création du nom de domaine sur la base de leur enseigne sous réserve qu'elle figure sur les documents justificatifs.

32. Cependant, les associations qui disposent d'une identification INSEE peuvent si elles le désirent bénéficier d'un enregistrement sous l'extension « .fr ». Cette demande n'est pas exclusive d'un enregistrement sous l'extension « .asso.fr ». Les associations devront obligatoirement présenter une copie de l'identifiant au répertoire INSEE correspondant.

33. Les modalités propres à chaque domaine sectoriel sont définies dans le règlement de nommage correspondant, accessible auprès de chacune des autorités compétentes dont la liste est disponible ci-dessous (la liste des contacts figurant dans la charte n'a pas été reproduite).

Domaines
sectoriels

Demandeur

Justifications et avis

.aeroport.fr

Aéroport

- un identifiant au répertoire INSEE
- l'avis de l'
UCCEGA.

.assedic.fr

Assedic

- un identifiant au répertoire INSEE
- la validation de l'
UNEDIC.

.avocat.fr

*La zone « .avocat.fr »
remplace
définitivement « .barreau.fr »

Avocat

- un extrait Kbis
ou
- un identifiant au répertoire
INSEE.

.avoues.fr

Avoués

- un extrait K Bis ou l'identifiant au répertoire INSEE
- l'avis de la Chambre nationale des avoués.

.cci.fr

Chambre de
commerce et de l'industrie.
Ce domaine est sous l'autorité de
l'Association des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI).


- un identifiant au répertoire
INSEE,
- l'avis de l'
ACFCI.

.chambagri.fr

Chambre
d'agriculture

-un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE,
- l'avis de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.

.chirurgiens-dentistes.fr*

* remplace
définitivement « ch-dentiste.fr »

Chirurgien-
dentiste

- l'attestation d'inscription au tableau de l'ordre délivrée par l'ordre départemental concerné
ou
- la photocopie recto-verso de la carte professionnelle.

.experts-comptables.fr

Expert
comptable

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE,
- l'avis du Conseil supérieur de l'ordre des experts comptables.

.geometre-expert.fr

Géomètre
expert

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE, et,
- la carte professionnelle et,
- l'avis de l'Ordre des géomètres Experts.

.gouv.fr

Ministère

- un identifiant au répertoire INSEE et,
- la validation de la Délégation interministérielle à la réforme de l'État (
DIRE).

.greta.fr

Groupement d'établissement de l'éducation nationale

- un identifiant au répertoire INSEE.

.huissier-justice.fr

Huissier
de justice

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE, et,
- l'avis de la Chambre nationale des huissiers de justice.

.medecin.fr

Médecin

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE
- la validation de l'Ordre national des médecins.

.notaires.fr

Notaire

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE
- la validation du Conseil supérieur du notariat.

.pharmacien.fr

Pharmacien

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE, et,
- l'avis du Conseil national de l'ordre des pharmaciens.

.port.fr

Port

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE, et,
- avis de l'Union des ports autonomes et des chambres de commerce et d'industrie maritimes (
UPACCIM).

.veterinaire.fr

Vétérinaire

- un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE
- l'avis de l'Ordre national des vétérinaires.

34. Les conventions de nommage n'ont plus de caractère obligatoire, mais leur application relève de la seule responsabilité des autorités administratives en charge du secteur, et ceci sans contrôle de l'AFNIC.

Académies : format d'enregistrement : ac-nom.fr (« nom » étant l'Académie) Ex. : ac-lyon.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni. (Les lycées et collèges sont enregistrés comme sous-domaines des académies correspondantes, mais les établissements privés non pris en charge par une académie sont enregistrés directement sous .fr).

Ambassades : format d'enregistrement : amb-nom.fr (« nom » étant une ville ou un pays). Ex. : amb-wash.fr (Ambassade de France à Washington). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni ou, à défaut, une lettre à en-tête de l'ambassade signée par l'ambassadeur.

Assistance publique : format d'enregistrement : ap-nom.fr (« nom » est une ville). Ex. : ap-hop-paris.fr (hôpitaux de la Ville de Paris). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Bibliothèques municipales : format d'enregistrement : bm-nom.fr (« nom » est un nom de ville). Ex. : bm-lyon.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Bovin de croissance : convention de nommage mise en place par la Fédération bovins croissance. Format d'enregistrement : departement-bovins-croissance.fr (département est le nom du département). Ex. : creuse-bovins-croissance.fr (syndicat de la creuse pour les bovins de croissance). Un identifiant au répertoire INSEE ou autre justificatif doit être fourni.

Caisses d'allocations familiales : domaine sous l'autorité de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF). Enregistrement sous caf.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Caisses régionales d'assurance maladie des artisans et commerçants : domaine sous l'autorité de la caisse nationale d'assurance maladies des professions indépendantes. Format d'enregistrement : canam.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Caisses d'épargne : domaine sous l'autorité du centre national des caisses d'épargne (CENCEP). Enregistrement sous caisse-epargne.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Centres d'économie rurale : format d'enregistrement : cerxx.asso.fr et /ou cerxx.fr (« xx » : est le n° du département). Un identifiant au répertoire INSEE, un récépissé de déclaration à la préfecture ou une copie de la parution au JO doit être fourni(e).

Centres hospitaliers : format d'enregistrement : chu-xx.fr ou chru-xx.fr ou ch-xx.fr ou hopital-xx.fr (« xx » est de la ville d'implantation ou le nom de l'hôpital). Ex. : chu-rouen.fr (centre hospitalier universitaire de Rouen). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Centres régionaux de la propriété forestière : domaine sous l'autorité du centre régional de la propriété forestière d'Alsace Lorraine. Enregistrement sous le domaine crpf.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Chambres des métiers : format d'enregistrement : cm-nom.fr et/ou cm-numérodedépartement.fr (« nom » est une ville, d'un département ou d'une région). Ex. : cm-annecy.fr (Chambre des métiers de Haute Savoie). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Comités départementaux du tourisme : format d'enregistrement : cdt-nom.fr et/ou cdt-tourisme-nom.fr (« nom » est un département). Ex. : cdt-vaucluse.fr (comité départemental du tourisme du Vaucluse). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Comités régionaux du tourisme : format d'enregistrement : crt-nom.fr (« nom » est un nom de région). Ex. : crt-aquitaine.fr (comité régional du tourisme d'Aquitaine). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Communautés d'agglomérations (nouvelle appellation des districts) : format d'enregistrement : agglo-nom.fr (« nom » est la communauté d'agglomérations). Ex. : agglo-montbeliard.fr (communauté d'agglomérations du pays de Montbeliard). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Communautés de communes : format d'enregistrement : cc-nom.fr (« nom » officiellement déclaré). Ex. : cc-confolentais.fr (communauté de communes du Confolentais). Un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment : convention de nommage mise en place par la confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment. Format d'enregistrement : 3 noms de domaine dont l'un doit être capeb-xx.fr (xx correspond au nom du département ou de la région). En cas d'existence de plusieurs entités dans un même département, xx est le nom de la ville d'implantation de la structure et non le numéro du département. Les autres noms de domaine doivent conserver la racine capeb. Ex. : capeb-ain.fr / capeb01.fr (Confédération de l'Ain). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Conseils généraux : format d'enregistrement : cgxx.fr et/ou cg-xx.fr et /ou xx.fr (xx est le numéro ou le nom du département). Ex. : cg23.fr /creuse.fr/cg-creuse.fr (Conseil Général de la Creuse). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni. Attention « numerodedepartement.fr » n'est pas enregistrable.

Conseils régionaux : format d'enregistrement :crxx.fr et/ou cr-xx.fr et /ou xx.fr (xx est le « nom » de la région). Ex. : cr-aquitaine.fr, aquitaine.fr, craquitaine.fr (Conseil régional d'Aquitaine). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Consulats : format d'enregistrement : consulfrance-nomdelaville.fr ( pour les consulats français à l'étranger) et consulnomdupays-nomdelaville.fr (pour les consulats étrangers en France). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni ou à défaut, une lettre à en-tête du consulat signée par le consul.

Contrôle laitier : convention de nommage mise en place par la fédération de Contrôle Laitier. Format d'enregistrement : departement-controle-laitier.fr (« departement » est le nom du département). Ex. : calvados-controle-laitier.fr (Syndicat d'Élevage du contrôle laitier du Calvados). Un identifiant au répertoire INSEE ou autre justificatif doit être fourni.

Crédit agricole : convention de nommage mise en place par la Caisse nationale du crédit agricole. 3 noms de domaine ; format d'enregistrement des agences et des filiales du Crédit Agricole : ca-nom.fr, + 2 autres domaines selon justificatif (« nom » est celui de l'agence). Ex. : ca-alsace.fr. Un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Districts (ancienne appellation des communautés d'agglomérations) : format d'enregistrement : district-xxx.fr (« xxx » est le nom du district ou à défaut le nom de la ville d'implantation). Ex. : district-parthenay.fr ou district-vernon.fr Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Ecoles d'agriculture : enregistrement des lycées publics en sous domaines de : educagri.fr Ex. : esa-angers.educagri.fr Les demandes sont à déposer directement auprès du responsable administratif du domaine educagri.fr.

Ecoles régionales des beaux-arts : format d'enregistrement : erba-nom.fr : erba-nom.fr (« nom » est une ville). Ex. : erba-rennes.fr (écoles régionales des Beaux-Arts de Rennes). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer : domaine sous l'autorité de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer. Enregistrement sous fnclcc.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles : convention de nommage mise en place par la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles. Format d'enregistrement : fdseaXX.fr (xx est le numéro de département). Ex. : fdsea51.fr (fédération départementale de la Marne).

Fédération départementale et régionale du bâtiment, unions et syndicats nationaux : convention de nommage mise en place par la Fédération française du Bâtiment. Format d'enregistrement : ffbatiment-XX.fr (xx est le numéro de département), ffbatiment-nomreg.fr (nomreg est le nom de la région en lettres ou abrégé), ffbatiment-nomunion.fr (nomunion est le nom ou sigle de l'union ou du syndicat).

Groupama et Crama : format d'enregistrement : groupama-nom.fr (« nom » est une entité en toutes lettres, sigle ou abrégé). Ex. : groupama-ca.fr ou groupama-centre-atlantique.fr pour le Groupama Centre Atlantique ; groupama-normandie.fr pour la crama de Normandie. Un extrait K Bis ou un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Instituts universitaires de formation des maîtres : domaine sous l'autorité de l'Institut universitaire des maîtres de Paris. Enregistrement sous iufm.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Instituts Universitaires de Technologie : format d'enregistrement : iut-nom.fr (« nom » est une ville). Ex. : iut-lannion.fr - Il est recommandé d'inclure un IUT dans la hiérarchie de l'université dont il dépend. Ex. : iut.univ-aix.fr plutôt qu'iut-aix.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Mairies et villes : format d'enregistrement : mairie-xx.fr et/ou ville-xx.fr et/ou xx.fr (« xx » est le nom d'une ville). Ex. : mairie-metz.fr, ville-metz.fr, metz.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni. Attention : - pour les communes homonymes, le numéro de département sera systématiquement ajouté.

- l'ajout du numéro de département à tout ou partie du nom de la commune est possible sur demande à condition qu'il n'existe pas de communes homonymes dans le même département ;

- une entreprise détentrice d'un dépôt de marque antérieur à 1985, peut obtenir le nom de domaine correspondant au nom d'une ville. Ex : evian.fr pour la société Evian.

Offices de tourisme : format d'enregistrement : ot-nom.fr (« nom » est une ville). Ex. : ot-avignon.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Offices de tourisme étrangers : format d'enregistrement : nom-tourisme.fr (nom du pays en français). Ex. : italie-tourisme.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Technopoles : format d'enregistrement : tech-nom.fr (« nom » est une ville). Ex. : tech-quimper.fr. Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

Unions des associations des familles : domaine sous l'autorité de la fédération des unions des associations des familles. Enregistrement sous : unaf.fr. Contacter le responsable administratif de la zone concernée.

Universités : format d'enregistrement : univ-nom.fr ou u-nom.fr (« nom » est le nom d'université, souvent lié à une ville). Ex. : univ-rennes1.fr (université de Rennes1), u-grenoble3.fr (université de Grenoble3). Un identifiant au répertoire INSEE doit être fourni.

1. La phase de création du nom de domaine, c'est-à-dire la phase qui vise à permettre l'enregistrement et l'attribution d'un nom de domaine, est réalisée pour le compte de l'organisme demandeur auprès de l'AFNIC par l'intermédiaire du prestataire Internet qu'il aura choisi parmi la liste des prestataires Internet disponible sur le site de l'AFNIC.

2. Toute demande de création de nom de domaine est réalisée selon la règle du « premier arrivé, premier servi », dans le strict respect de la présente Charte de nommage.

3. Les demandes de création de noms de domaine ne doivent en aucun cas porter atteinte aux droits des tiers ni à l'ordre public.

4. A ce titre, l'AFNIC se réserve le droit d'exercer toutes mesures afin de faire cesser l'atteinte aux droits des tiers et la possibilité d'engager toutes procédures adaptées, à l'encontre de tout contrevenant, sans que cela constitue pour elle une obligation quelconque.

5. Dans le cas où le nom de domaine serait créé sur la base de pièces justificatives provisoires, (K Bis provisoire ou en cours de modification...), et à défaut pour l'AFNIC de pouvoir vérifier sur les bases de données l'existence de la justification définitive dans les délais impartis, l'AFNIC procède à la suspension du nom de domaine.

6. Le nom de domaine reste enregistré au nom de l'organisme demandeur dans les bases de données mais ne peut plus être utilisé pour accéder aux services correspondants (Site web, courrier électronique...). Le nom de domaine est suspendu pour une période maximum d'un mois.

7. Il appartient à l'organisme demandeur de régulariser la situation en fournissant à l'AFNIC via son prestataire Internet les justifications. Pendant cette période l'AFNIC fait ses meilleurs efforts pour procéder à la remise en service du nom de domaine dans les 72 heures ouvrées à compter de la réception des justificatifs définitifs.

8. Faute de régularisation dans les délais impartis, le nom de domaine est supprimé sans préavis ni indemnité. Une fois le nom de domaine supprimé celui-ci peut être ré-attribué à un tiers qui en ferait la demande dans le respect des termes de la présente Charte.

9. Dans le cas où le nom de domaine créé sur la base d'une demande d'enregistrement de marque sous l'extension « .tm.fr » n'aboutit à aucune parution au BOPI dans les délais prévus par les procédures de l'INPI, l'AFNIC procède à la suppression du nom de domaine.

10. Pour la bonne gestion de la zone de nommage, l'AFNIC s'interdit de donner suite à toute démarche préalable à une demande de création de nom de domaine. Elle s'interdit ainsi de donner suite à des demandes de préenregistrement ou de réservation de noms de domaine. Une procédure de préenregistrement est toutefois possible auprès d'organismes habilités à cet effet et dont la liste est accessible ici, dans les conditions qui y sont précisées.

2. Modifications relatives au nom de domaine ou aux éléments techniques et administratifs

11. L'organisme demandeur peut, via son prestataire, solliciter la modification du nom de domaine créé pour tenir compte d'une modification intervenue dans le ou les éléments de justification (modification de la raison sociale, de la dénomination commerciale, de l'enseigne, changement du nom de l'association, modification d'une marque...).

12. La demande de modification ne peut être prise en compte par l'AFNIC qu'à la condition que l'organisme demandeur fournisse les éléments de justification correspondants.

13. La modification d'un nom de domaine s'accompagne, au choix de l'organisme demandeur, d'une période initiale de 1 (un) ou 2 (deux) mois dite « période de migration » au cours de laquelle le nom de domaine initial et le nouveau nom de domaine coexistent.

14. L'organisme demandeur peut solliciter un délai supplémentaire qui ne saurait excéder 1 (un) an à compter de la demande de modification adressée par le prestataire Internet à l'AFNIC et sous réserve de fournir les éléments de justification correspondants. Le délai supplémentaire accordé par l'AFNIC varie en fonction de l'ancienneté du nom de domaine initialement enregistré.

15. L'organisme demandeur peut, via son prestataire Internet, demander des modifications d'éléments administratifs le concernant (Changement du contact technique ou administratif, changement d'adresse).

16. Dans le cadre d'une « transformation de société » c'est-à-dire du changement de forme juridique d'une société au cours de son existence (à titre d'exemple, lorsqu'une société à responsabilité limitée change de forme sociale pour devenir une société anonyme), l'organisme demandeur est tenu de communiquer à l'AFNIC, via son prestataire Internet les éléments justificatifs faisant état de cette transformation.

17. La « transmission » du nom de domaine peut intervenir dans les cas détaillés ci-après.

18. Pour des raisons administratives et techniques, la transmission du nom de domaine dans les cas susvisés impose une procédure de suppression/re-création du nom de domaine en cause. La procédure de suppression/re-création du nom de domaine est réalisée le même jour. La procédure de transmission est destinée à éviter qu'une fois supprimé le nom de domaine puisse être re-attribué à un tiers non autorisé.

19. Comme tout acte d'administration, la demande de transmission d'un nom de domaine est adressée par un prestataire Internet pour le compte de l'organisme demandeur.

20. L'organisme demandeur bénéficiaire de la transmission doit satisfaire aux exigences de la Charte notamment pour ce qui concerne la fourniture des pièces justificatives.

21. La transmission de nom de domaine ne saurait avoir des effets contraires à la charte de nommage.

22. Le prestataire Internet est tenu d'intervenir dans le strict respect du guide des procédures.

23. Dans tous les cas, l'AFNIC se réserve la faculté de demander tout justificatif complémentaire à ceux d'ores et déjà identifiés au sein de la présente Charte de nommage pour procéder à toute vérification nécessaire.

3.1. Fusion

24. Le terme de « fusion » s'entend de l'opération décrite aux articles L. 236-1 et L. 236-3 du Code de commerce, par laquelle deux sociétés au moins se réunissent pour n'en former qu'une seule. Cette opération peut résulter de la transmission du patrimoine d'une ou plusieurs sociétés soit à une société existante, soit à une société nouvelle qu'elles constituent.

25. Lorsqu'une demande de transmission de nom de domaine est effectuée suite à une opération de fusion, l'organe dirigeant de la société nouvellement créée ou de la société absorbante, doit joindre à sa demande, pour chacune des sociétés concernées :

· Une copie de l'extrait K Bis des sociétés concernées faisant état de la fusion ;

· Une copie certifiée conforme des publications effectuées dans le ou les journaux d'annonces légales ;

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.2. Scission

26. Le terme « scission » s'entend de l'opération décrite aux articles L 236-1 et L 236-3 du Code de commerce, par laquelle une société (la société « scindée ») transmet son patrimoine à deux ou plusieurs sociétés existantes ou nouvelles.

27. Lorsqu'une demande de transmission de nom de domaine est effectuée suite à une opération de scission, l'organe dirigeant de la société bénéficiaire de celle-ci, doit joindre à sa demande :

· Une copie de l'extrait K Bis des sociétés concernées faisant état de la scission ;

· Une copie certifiée conforme des publications effectuées dans le ou les journaux d'annonces légales ;

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.3. Apport partiel d'actif

28. Le terme « apport partiel d'actif » s'entend de l'opération décrite à l'article L 236-22 du code de commerce par laquelle une société fait l'apport à une autre société (existante ou nouvelle) d'une partie de ses éléments d'actif et reçoit, en échange, des parts ou actions émises par la société bénéficiaire des apports à la condition expresse que l'apport partiel d'actifs en cause ait pour objet les éléments actifs et passifs d'une branche complète d'activité.

29. Lorsqu'une demande de transmission de nom de domaine est effectuée suite à un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions, l'organe dirigeant de la société bénéficiaire doit joindre à sa demande une attestation du commissaire aux comptes si elle en a un, ou le cas échéant, d'un expert comptable certifiant que :

· Le traité d'apport partiel d'actif mentionne l'option pour le régime des scissions ;

· Le nom de domaine de la société apporteuse a effectivement été compris dans cet apport.

30. L'organisme demandeur doit également joindre à sa demande :

· Une copie du K Bis des sociétés concernées faisant état de l'apport partiel d'actif ;

· Une copie certifiée conforme des publications effectuées dans le ou les journaux d'annonces légales ;

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.4. Cession de fonds de commerce

31. La cession de fonds de commerce s'entend des articles L 141-1 et suivants du Code de commerce. Cette cession, qui peut être totale ou partielle, peut intégrer un ou plusieurs noms de domaine.

32. Dans l'hypothèse où la cession totale ou partielle d'un fonds de commerce porte, entre autres éléments sur un ou plusieurs noms de domaine, l'AFNIC procède à la transmission du nom de domaine au bénéfice du cessionnaire à la condition de recevoir de sa part :

· La copie certifiée conforme du contrat de cession de fonds de commerce portant justificatif de l'enregistrement du centre des impôts faisant mention exacte du ou des noms de domaines en cause,

· La copie de la publication au journal d'annonces légales et de l'avis au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales,

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.5. Apports en société

33. Sont ici visés les apports en société portant sur un ou plusieurs noms de domaine tels que visés par les articles 1832 et 1843-1 du code civil et des articles appropriés du Code de commerce.

34. Dans l'hypothèse d'un apport en société portant sur un ou plusieurs noms de domaine, l'AFNIC procède à la transmission du nom de domaine à la société bénéficiaire de cet apport à la condition de recevoir de sa part :

· Pour le cas où l'apport a lieu au moment de la constitution de la société : statut de la société constituée justifiant des apport et le cas échéant rapport du commissaire aux apports ;

· Pour le cas où l'apport a lieu en cours d'existence de la société : procès verbal de l'assemblée générale extraordinaire de la société bénéficiaire de l'apport et le cas échéant rapport du commissaire aux apports.

3.6. Dissolution amiable

35. La dissolution amiable s'entend de la volonté commune de mettre un terme à l'existence d'une société induisant le transfert au bénéfice d'une des parties, d'un ou de plusieurs noms de domaine.

36. Dans l'hypothèse d'une dissolution amiable portant sur un ou plusieurs noms de domaine, l'AFNIC procède à la transmission du nom de domaine à la société bénéficiaire du transfert à la condition de recevoir de sa part :

· Le procès verbal de l'assemblée générale extraordinaire décidant de la liquidation ;

· Le rapport du liquidateur portant transfert du ou des noms domaine, s'il existe un.

3.7. Relations entre société mère et filiale

37. Le terme « société mère » s'entend d'une société possédant plus de la moitié du capital d'une autre société ; celui de « filiale » s'entend d'une société dont plus de la moitié du capital est possédée par une autre société conformément à l'article L 233-1 du Code de commerce.

38. Lorsqu'une demande de transmission de nom de domaine est effectuée dans le cadre des relations entre une société mère et sa filiale, l'organe dirigeant de la société mère ou de la filiale doit joindre à sa demande :

· Tout document justifiant cette transmission,

· Une attestation du commissaire aux comptes ou, le cas échéant, l'attestation d'un expert comptable certifiant l'existence d'un lien entre « société mère » - « société filiale »,

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.8. Cession de marque

39. En cas de cession d'une marque régulièrement déposée, le nom de domaine est supprimé sauf demande expresse du cédant et du concessionnaire visant à bénéficier d'une procédure de transmission.

40. Dans cette hypothèse, il revient à la partie la plus diligente de communiquer à l'AFNIC via son prestataire Internet :

· L'État des inscriptions au Registre national des marques mentionnant la cession de la marque ;

· La lettre d'acceptation selon le modèle type de l'AFNIC accessible ici signée par l'organisme demandeur initial confirmant son acceptation ou tout autre document attestant de l'acceptation de l'ancien organisme demandeur (ex : PV) sous réserve de la transmission et la réalisation de toutes les démarches préalables à l'égard des tiers (notamment à l'égard du prestataire Internet d'origine).

3.9. Procédures collectives

41. Dans l'hypothèse ou l'organisme demandeur serait affecté d'une procédure collective, l'AFNIC procède à la transmission du nom de domaine telle qu'ordonnée par les autorités judiciaires compétentes.

3.10. Décisions judiciaires

42. L'AFNIC procèdera à tout acte d'administration ordonné par une décision judiciaire, dans les termes de ladite décision, et ce dans les conditions suivantes :

· lorsque l'ensemble des parties à l'instance convient d'exécuter la décision de justice et en informe l'AFNIC par lettre recommandée avec avis de réception, ou

· après signification à l'AFNIC par huissier de justice, par la partie la plus diligente, d'une décision de justice bénéficiant de l'exécution provisoire de plein droit en application de l'article 514 du nouveau Code de procédure civile et justification de la notification à partie de cette décision, ou

· après signification à l'AFNIC par huissier de justice, par la partie la plus diligente, d'une décision de justice assortie de l'exécution provisoire au sens de l'article 515 du nouveau Code de procédure civile et justification de la notification à partie de cette décision et sur présentation de la justification de l'éventuelle constitution de garantie ordonnée par le Juge en application de l'article 517 du nouveau Code de procédure civile, ou

· après signification à l'AFNIC par huissier de justice, par la partie la plus diligente, d'une décision de justice investie de la force de la chose jugée au sens de l'article 500 du nouveau Code de procédure civile dont il sera justifié. Cette justification pourra par exemple être constituée, selon les cas, soit par la communication d'un certificat de non-recours, soit par la communication de l'arrêt d'appel.

43. Dans l'hypothèse où une décision de justice serait réformée, l'AFNIC procèdera dans les mêmes conditions à la mise en œuvre des nouveaux actes administratifs ordonnés.

44. L'AFNIC ne pourra donner suite à des demandes qui ne respecteraient pas ces conditions et ne saurait être tenue, par exemple, par l'envoi de lettre ou d'assignation.

45. Les actes d'administration pris par l'AFNIC en application d'une décision de justice ne sauraient engager l'AFNIC pour quelque motif que ce soit, l'organisme demandeur garantissant l'AFNIC contre tout recours.

46. L'organisme demandeur doit, dans un délai maximum d'un mois, fournir à l'AFNIC par l'intermédiaire du prestataire Internet, les justificatifs exigés par la Charte de nommage. A défaut, l'usage du nom de domaine par l'organisme demandeur peut être suspendu jusqu'à régularisation. Si la régularisation n'intervient pas au maximum dans un délai de 6 mois passé la date de suspension du nom de domaine, celui-ci retombe dans le domaine public. Dans l'hypothèse où une personne condamnée à transférer un nom de domaine souhaite réaliser ce transfert en urgence, et sans attendre que le bénéficiaire puisse remettre à l'AFNIC via son prestataire sa demande de création (notamment dans le cadre d'une obligation conditionnée par une astreinte), l'AFNIC procède à un blocage du nom de domaine c'est à dire que le nom de domaine ne peut plus subir de modification. Il appartient à l'organisme demandeur bénéficiaire de la décision de fournir à l'AFNIC, dans le délai sus-visé de régulariser son dossier faute de quoi le nom de domaine retombe dans le domaine public passé un délai de 6 mois.

47. Les frais techniques et administratifs liés à la transmission incombent à l'organisme demandeur, à charge pour lui, en tant que de besoin, d'en obtenir le remboursement par l'une ou l'autre des parties à l'instance.

48. L'exploitation d'un nom de domaine de la zone « .fr » repose sur un droit d'usage. En conséquence, la cession d'un nom de domaine sous quelque forme que ce soit, à titre gratuit ou onéreux, n'est pas opposable à l'AFNIC.

49. En conséquence, toute opération de suppression/re-création d'un nom de domaine, est réalisée aux risques et périls des organismes demandeurs. Il est rappelé, en effet, que dès lors qu'un nom de domaine est supprimé celui-ci retombe dans le domaine public et peut donc à tout moment être ré-attribué à n'importe quel autre organisme demandeur justifiant du respect de la présente Charte de nommage.

50. L'organisme demandeur peut, sous réserve des accords conclus avec son prestataire Internet, demander un changement de prestataire qui consiste en un transfert technique du nom de domaine d'un prestataire Internet vers un autre prestataire Internet.

51. Pour ce faire, il appartient :

· A l'organisme demandeur de prendre toutes mesures à l'égard de ses prestataires Internet pour qu'ils procèdent au changement de prestataires ;

· Aux prestataires Internet intéressés par le changement de prestataire de procéder au mieux des intérêts de l'organisme demandeur.

52. Le prestataire bénéficiant du changement de prestataire doit veiller à ce que cette modification d'ordre technique n'affecte en rien la titularité administrative du nom de domaine.

53. La procédure et les délais relatifs au changement de prestataire sont détaillés dans l'annexe « Guide des procédures ».

54. A tout moment, l'organisme demandeur, par l'intermédiaire du prestataire Internet peut demander la suppression du nom de domaine. Cette demande est irréversible et ne nécessite aucun justificatif.

55. Dans l'intérêt des organismes demandeurs et afin d'éviter tout dysfonctionnement et tout litige, la demande de suppression d'un nom de domaine par un tiers, n'est pas acceptée. En revanche dans le cas où le nom de domaine aurait déjà fait l'objet d'une transmission, le nouveau titulaire peut demander la suppression de ce nom de domaine.

56. Tout nom de domaine supprimé peut être recréé au bénéfice d'un organisme demandeur dans respect de la présente Charte.

57. En cas de cessation d'activité du prestataire Internet pour quelque cause que ce soit (procédure collective, arrêt de l'activité, résiliation de la convention d'adhésion...), il appartient à ce dernier d'aviser ses clients de la nécessité de faire appel à un nouveau prestataire pour la gestion de leur nom de domaine.

58. A défaut pour le prestataire de s'être exécuté, l'AFNIC adresse directement aux organismes demandeurs un courrier RAR pour les informer qu'ils doivent choisir un nouveau prestataire dans un délai maximum d'un mois (103) à compter de la réception de ladite lettre.

59. A défaut de changement de prestataire dans le délai imparti, l'AFNIC procède à la suppression du nom de domaine orphelin correspondant qui peut alors être réattribué à un nouvel Organisme demandeur.

60. Il appartient en tout état de cause aux prestataires Internet de gérer les risques liés aux noms de domaine orphelins.

61. Les prestataires Internet s'engagent à communiquer à l'AFNIC tout changement de coordonnées des organismes demandeurs.

62. En application de cet article, les organismes demandeurs sont invités à vérifier que l'AFNIC dispose en permanence d'informations exactes permettant de les contacter directement.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

- Mme Aline PEYRONNET, sous-directrice à la sous-direction C, en charge de la protection du consommateur à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ministère de l'Économie et des finances, accompagnée de M. Jean-Luc Daniel, administrateur civil.

- Mme Catherine CHAMBON, commissaire principale, directeur de l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), ministère de l'Intérieur.

- Mmes Nadine BELLUROT et Catherine CHADELAT, conseillers techniques au cabinet de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la Justice, accompagnées de Mme Isabelle VENDRYES et de M. Gilles SORBA, des services de la Chancellerie.

- M. Jean-Christophe LETOQUIN, délégué permanent de l'Association des fournisseurs d'accès (AFA), accompagné de Mmes Véronique Etienne-Martin, conseiller auprès de la direction général de Microsoft France, et Sandrine Molgatini, chargée des relations extérieures de Worldcom, de MM. Stéphane Marcovitch, responsable juridique des portails de Wanadoo et Olivier de Bailleux, directeur délégué aux affaires extérieures de Noos, membres de l'AFA.

- M. Éric CAPRIOLI, avocat au barreau de Nice.

- M. Marc GUEZ, directeur général de la société civile des producteurs de phonogrammes, accompagné de M. Philippe JOGUET, consultant.

- M. Gilles BRÉGANT, secrétaire général de la mission pour l'économie numérique et M. Didier ÉTIENNE, chargé de mission sur les questions commerciales électroniques, ministère de l'Économie et des finances.

- M. Jérôme HUET, professeur de droit, directeur du centre d'études juridiques et économiques du multimédia, université de Paris II.

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N°608 - Rapport de Mme Michèle Tabarot sur le projet de loi pour la confiance en l'économie numérique

1 () Internet et les réseaux numériques, Rapport public du Conseil d'État, La documentation française, 1998. C'est le Conseil d'État qui souligne.

2 () Jean-Luc Aubert, « Le formalisme », Répertoire du notariat Defrénois, n° 15-16, 15-30 août 2000.

3 () Rapport n° 2238 (onzième législature) du 8 mars 2000, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales par M. Didier Mathus.

4 () Internet et les réseaux numériques, Conseil d'État, section du rapport et des études, rapport adopté le 2 juillet 1998 (p. 219).

5 () Cf. article premier, paragraphe 2 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 modifiée prévoyant une procédure d'information dans les domaines des normes et réglementations techniques.

6 () Circulaire des ministres de la culture et de la communication, de la justice et de l'industrie, prise en application de l'article 43 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication, concernant la régime applicable à certains services de communication audiovisuelle, JO du 9 mars 1988.

7 () L'article L. 32-1, II du code des postes et télécommunications dispose que « Le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent, dans le cadre de leurs attributions respectives, (...) 5° Au respect par les opérateurs de télécommunications du secret des correspondances et du principe de neutralité au regard du contenu des messages transmis ».

8 () Cass. crim. 15 novembre 1990.

9 () Art. 1383 du code civil : « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

10 () Affaire Lacoste/Multimania, Esterel et Cybermedia, TGI de Nanterre, 8 décembre 1999.

11 () Décision n°2000-433 DC du 27 juillet 2000.

12 () Droit de l'informatique et des réseaux 2002, Tome 1, Éditions Lamy, p. 1591.

13 () Olivier Iteanu, « La responsabilité des intermédiaires techniques, l'histoire mouvementée d'une réforme inutile ? », Cahiers Lamy, droit de l'informatique et des réseaux, n° 130, novembre 2000.

14 () Avis n° 02-1090 du 3 décembre 2002.

15 () TGI de Paris, Affaire Finance net - Boursorama, ordonnance de référé du 18 février 2002.

16 () Gérard Hass et Olivier de Tissot, « L'activité des fournisseurs d'hébergement à l'épreuve du droit des tiers », in Communication - Commerce électronique, juillet-août 2000, Editions du Juris-Classeur.

17 () L'article 484 du code de procédure civile dispose que : « L'ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d'une partie, l'autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n'est pas saisi du principal le pouvoir d'ordonner immédiatement les mesures nécessaires ».

18 () Art. 37 : « Toute personne morale titulaire d'une autorisation relative à un service de communication audiovisuelle tient en permanence à la disposition du public :

2° Sa dénomination ou sa raison sociale, son siège social, le nom de son représentant légal et de ses trois principaux associés ;

3° Le nom du directeur de la publication et celui du responsable de la rédaction ;

4° La liste des publications éditées par la personne morale et la liste des autres services de communication audiovisuelle qu'elle assure. »

19 () Rapport n° 2471 (onzième législature) du13 juin 2000, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales par M. Didier Mathus.

20 () Directive 2001/29/CE, dont le délai de transposition a expiré en décembre 2002.

21 () Internet et les réseaux numériques, rapport du Conseil d'État, La documentation française, 1998.

22 () Avis n° 02-1090.

23 () Source : www.journaldunet.com

24 () Ces règles sont consultables sur le site de l'ICANN : www.icann.org

25 () Ces règles figurent sur le site de l'OMPI : www.ompi.org

26 () Pour une vision complète de l'état de la réflexion et du droit actuels, voir Lamy du droit de l'informatique et des réseaux, édition 2002, pages 1353 à 1381.

27 () Cf. J. Mestre, Droit commercial, LGDJ, 1999, n° 553.

28 () Pierre Mayer, « Actualité du contrat international », Petites affiches, 5 mai 2000, n° 90.

29 () Pierre Mayer, « Actualité du contrat international », Petites affiches, 5 mai 2000.

30 () Isabelle Paulik, « La loi applicable aux contrats internationaux du commerce électronique », JCP, Cahiers du droit de l'entreprise, n° 4, année 2002.

31 () Adoptée par les États membres de la Communauté économique européenne, cette convention vise à l'instauration de règles communes de désignation de la loi applicable aux obligations contractuelles.

32 () Isabelle Paulik, ibid.

33 () Jean-Luc Aubert, « Le Formalisme », Répertoire du notariat Defrénois, n° 15-16, 15-30 août 2000.

34 () Ibid.

35 () Gérard Couturier, « Les finalités et les sanctions du formalisme », Répertoire du notariat Defrénois, n° 15-16, 15-30 août 2000.

36 () Jacques Flour, Jean-Luc Aubert, Éric Savane, Les Obligations, tome I, Armand Colin, 2000.

37 () Nancy, 26 juin 1986.

38 () C. cass., Civ., 18 mai 1936.

39 () Gérard Couturier, « Les finalités et les sanctions du formalisme », Répertoire du notariat Defrénois, n° 15-16, 15-30 août 2000.

40 () Pierre Catala, « Le formalisme et les nouvelles technologies »,Répertoire du notariat Defrénois, op. cit.

41 () Gérard Couturier, ibid.

42 () 1re chambre civ., 30 juin 1987.

43 () 1re chambre civ., 15 novembre 1989.

44 () Décret n° 2001-272 du 30 mars 2001.

45 () Rapport AN n° 2197 établi par M. Christian Paul, rapporteur au nom de la commission des lois, 23 février 2000.

46 () Sur ce sujet, on pourra se reporter très utilement à la chronique de Marlène Trezeguet sur la journée de réflexion sur les actes authentiques électroniques, vendredi 21 juin 2002, disponible sur le site http://www.cejem.com/article.php3? id_article=104.

47 () Pierre Catala, op.cit.

48 () Ibid.

49 () Ibid.

50 () Eric Caprioli, « Variations sur le thème du droit de l'archivage dans le commerce électronique », Petites affiches, 18-19 août 1999, n° 164.

51 () Pierre Catala, art. cit.

52 () Xavier Lagarde, « Observations critiques sur la renaissance du formalisme », JCP éd. G 1999, I, 170, n° 2.

53 () Gérard Couturier, art. cit.

54 () Avis n° 02-1090.

55 () Eric Caprioli, « Variations sur le thème du droit de l'archivage dans le commerce électronique », Petites affiches, 18-19 août 1999, n° 164.

56 () Eric Caprioli, « Variations sur le thème du droit de l'archivage dans le commerce électronique », Petites affiches, 18-19 août 1999, n° 164.

57 () Eric Caprioli, « Variations sur le thème du droit de l'archivage dans le commerce électronique », Petites affiches, 18-19 août 1999, n° 164.

58 () Eric Caprioli, « Variations sur le thème du droit de l'archivage dans le commerce électronique », Petites affiches, 18-19 août 1999, n° 164.

59 () Source : www.journaldunet.com

60 () Cf. 9° de l'article 225-7 du code pénal introduit par la loi n° 98-468 du 17 juin 1998.

61 () De même, l'article 227-23 du code pénal, qui punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation à caractère pornographique d'un mineur, porte les peines à 5 ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende lorsqu'un réseau de télécommunications a été utilisé pour la diffusion de ces images à destination d'un public non déterminé.

62 () Cf. rapport n° 508, du 26 décembre 2002.

63 () Source : OMNI Consulting Group cité par le journal du net, www.journaldunet.com

64 () Source : OMNI Consulting Group, cité par le journal électronique : www.journaldunet.com

65 () Cette disposition a été introduite par la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne.

66 () JO C 30 du 5.2.1999, p. 4.

67 () JO C 169 du 16.6.1999, p. 36.

68 () Avis du Parlement européen du 6 mai 1999 (JO C 279 du 1.10.1999, p. 389), position commune du Conseil du 28 février 2000 (JO C 128 du 8.5.2000, p. 32) et décision du Parlement européen du 4 mai 2000 (non encore parue au Journal officiel).

69 () JO L 298 du 17.10.1989, p. 23. Directive modifiée par la directive 97/36/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 202 du 30.7.1997, p. 60).

70 () JO L 95 du 21.4.1993, p. 29.

71 () JO L 144 du 4.6.1997, p. 19.

72 () JO L 250 du 19.9.1984, p. 17. Directive modifiée par la directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 290 du 23.10.1997, p. 18).

73 () JO L 42 du 12.2.1987, p. 48. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 101 du 1.4.1998, p. 17).

74 () JO L 141 du 11.6.1993, p. 27. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 97/9/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 84 du 26.3.1997, p. 22).

75 () JO L 158 du 23.6.1990, p. 59.

76 () JO L 80 du 18.3.1998, p. 27.

77 () JO L 228 du 11.8.1992, p. 24.

78 () JO L 280 du 29.10.1994, p. 83.

79 () JO L 166 du 11.6.1998, p. 51. Directive modifiée par la directive 1999/44/CE (JO L 171 du 7.7.1999, p. 12).

80 () JO L 210 du 7.8.1985, p. 29. Directive modifiée par la directive 1999/34/CE (JO L 141 du 4.6.1999, p. 20).

81 () JO L 171 du 7.7.1999, p. 12.

82 () JO L 113 du 30.4.1992, p. 13.

83 () JO L 213 du 30.7.1998, p. 9.

84 () JO L 281 du 28.11.1995, p. 31.

85 () JO L 24 du 30.1.1998, p. 1.

86 () JO L 204 du 21.7.1998, p. 37. Directive modifiée par la directive 98/48/CE (JO L 217 du 5.8.1998, p. 18).

87 () JO L 320 du 28.11.1998, p. 54.

88 () JO L 15 du 21.1.1998, p. 14.

89 () JO L 13 du 19.1.2000, p. 12.

90 () JO C 23 du 28.1.1999, p. 1.

91 () JO L 19 du 24.1.1989, p. 16.

92 () JO L 209 du 24.7.1992, p. 25. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 97/38/CE (JO L 184 du 12.7.1997, p. 31).

93 () JO L 117 du 7.5.1997, p. 15.

94 () JO L 145 du 13.6.1977, p. 1. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 1999/85/CE (JO L 277 du 28.10.1999, p. 34).

95 () JO L 24 du 27.1.1987, p. 36.

96 () JO L 77 du 27.3.1996, p. 20.

97 () Non encore parue au Journal officiel.

98 () JO L 375 du 31.12.1985, p. 3. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 95/26/CE (JO L 168 du 18.7.1995, p. 7).

99 () JO L 228 du 11.8.1992, p. 1. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 95/26/CE.

100 () JO L 360 du 9.12.1992, p. 1. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 95/26/CE.

101 () JO L 172 du 4.7.1988, p. 1. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 92/49/CEE.

102 () JO L 330 du 29.11.1990, p. 50. Directive modifiée en dernier lieu par la directive 92/96/CEE.

103 () La remise ou non de la lettre d'engagement est fonction de l'option retenue par le prestataire dans le cadre de la convention signée avec l'AFNIC.


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