N° 672 - Rapport de M. Jacques Godfrain sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance réciproque en matière d'impôts sur le revenu, la fortune, les successions et les donations(16)




Document
mis en distribution
le 19 mars 2003

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N° 672

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 mars 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance réciproque en matière d'impôts sur le revenu, la fortune, les successions et les donations,

PAR M. JACQUES GODFRAIN,

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 285 (1999-2000), 227 et T.A. 84 (2001-2002)

Assemblée nationale : 16

Traités et conventions

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - UNE CONVENTION FISCALE CLASSIQUE ADAPTÉE
     AUX RÉALITÉS DE LA GUINÉE
7

A - LE CONTEXTE DE LA NÉGOCIATION 7

B - UNE CONVENTION CONFORME AU MODÈLE DE L'OCDE
      AVEC QUELQUES AMÉNAGEMENTS
7

1) Une convention conforme à celles signées avec les autres Etats
     de la région
7

2) Des aménagements par rapport à la convention type de l'OCDE 7

a) L'établissement stable 7

b) Les dividendes 8

c) Les retenues à la source 8

d) La redevance 8

e) Les revenus des professions indépendantes 8

C - DES DISPOSITIONS PARTICULIÈRES 8

1) Les dons et legs 9

2) La clause de crédit d'impôt fictif 9

II - UNE SITUATION COMPLEXE 11

A - POLITIQUE INTÉRIEURE DOMINÉE PAR
     LA SUCCESSION DU PRÉSIDENT CONTÉ
11

B - POLITIQUE EXTÉRIEURE MARQUÉE PAR L'INSTABILITÉ DE LA RÉGION 11

III - LA RELANCE DES RELATIONS BILATÉRALES ENTRE
      LA FRANCE ET LA GUINÉE
13

A - AU NIVEAU POLITIQUE 13

B - AU NIVEAU ÉCONOMIQUE ET COMMERCIAL 13

C - LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE 13

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis à votre examen a pour objet l'approbation de la Convention signée le 15 février 1999 entre la France et la Guinée en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance réciproque en matière d'impôt sur le revenu, la fortune, les successions et donations.

Cet instrument classique a été établi à la demande de la Guinée pour stimuler les échanges bilatéraux franco-guinéens. Il n'a pas encore été ratifié par la Guinée.

I - UNE CONVENTION FISCALE CLASSIQUE
ADAPTÉE AUX RÉALITÉS DE LA GUINÉE

A - Le contexte de la négociation

C'est à la demande des autorités guinéennes, qu'une délégation française s'est rendue à Conakry du 2 au 5 mai 1995 pour négocier une convention fiscale tendant à éviter les doubles impositions. Un texte a été paraphé à l'issue des négociations qui se sont déroulées.

Toutefois à l'occasion de la relecture du projet de convention, un certain nombre de corrections techniques et matérielles se sont avérées nécessaires. Le projet de convention a été ainsi à nouveau paraphé par échange de lettres, d'une part, par la Partie française le 15 janvier 1998 à Paris et, d'autre part, le 22 mai 1998 à Conakry par la Partie guinéenne. Lors de la ratification de l'accord par le Sénat le 21 février 2002 une erreur matérielle de référence dans le paragraphe 7 de l'article 25 avait été détectée. Le texte du nouvel article 25 rectifié a été transmis à l'Assemblée nationale après accord des autorités guinéennes.

B - Une convention conforme au modèle de l'OCDE avec quelques aménagements

1) Une convention conforme à celles signées avec les autres Etats de la région

La convention fiscale franco-guinéenne s'inspire très largement du modèle-type de l'OCDE. Un certain nombre de demandes guinéennes ont été acceptées, car elles correspondent à des clauses figurant dans les conventions signées par la France avec d'autres Etats de cette zone géographique notamment le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Sénégal.

2) Des aménagements par rapport à la convention type de l'OCDE

Ils concernent la durée requise pour la stabilité d'un établissement, les dividendes, les intérêts, les redevances et les revenus des professions indépendantes.

a) L'établissement stable

L'établissement stable est le concept qui permet de répartir l'imposition des bénéfices des entreprises d'un Etat contractant qui exercent une activité dans l'autre Etat contractant. L'établissement n'est imposable dans l'autre Etat que si son activité y est exercée par l'intermédiaire d'un établissement stable et uniquement à raison des bénéfices dégagés par celui-ci. Pour la convention de l'OCDE l'implantation d'un établissement stable doit excéder 12 mois. Aux termes de l'article 5 paragraphe 3 de la convention, les bénéfices imputables à un chantier de construction, d'installation ou de montage seront imposables dans l'Etat où le chantier est situé si la durée de ce dernier dépasse 6 mois.

b) Les dividendes

L'article 10 de la convention prévoit un taux de retenue à la source unique de 15% pour les dividendes quelle que soit la qualité du bénéficiaire effectif. Le modèle de l'OCDE prévoit de ramener ce taux à 5% lorsque le bénéficiaire effectif des dividendes est une société de capitaux qui détient au moins 25% du capital de la société qui paie les dividendes.

c) Les retenues à la source

Comme dans le modèle de l'OCDE, le taux de la retenue à la source applicable aux intérêts est fixé à 10% par l'article 11. Toutefois, la France a obtenu que soient exonérés de retenue à la source : les intérêts versés ou payés à l'un des deux Etats, à l'une de leurs collectivités locales ou personnes morales de droit public, les intérêts payés au titre de créances ou prêts garantis, assurés ou aidés par l'un des deux Etats ou par une personne agissant pour le compte de ces derniers. Cette clause couvre notamment les prêts garantis par la COFACE.

d) La redevance

La convention permet à l'Etat de la source de prélever une retenue à la source sur les redevances dans la limite de 10% ce qui n'est pas prévu par le modèle de l'OCDE.

e) Les revenus des professions indépendantes

Les règles d'imposition des revenus de professions indépendantes sont conformes au modèle de l'OCDE. Quant ils sont perçus par un résident les revenus concernés ne sont imposables qu'en Guinée, à moins que leur bénéficiaire ne dispose d'une base fixe en France.

En revanche, les revenus tirés de l'exercice par un résident de France d'une profession libérale en Guinée peuvent donner lieu au prélèvement d'une retenue à la source limitée à 10 % de leur montant brut, même en l'absence de base fixe dans cet Etat contrairement au modèle de l'OCDE (article 12).

C - Des dispositions particulières

Ces dispositions sont semblables à celles figurant dans les conventions récemment renégociées avec le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Sénégal.

1) Les dons et legs

L'Etat contractant, ses collectivités locales, leurs établissements publics ou les établissements d'utilité publique et organismes à but non lucratif créés ou organisés dans cet Etat, bénéficieront dans l'autre Etat des exonérations en matière de donations et de successions conférées par la législation fiscale de cet autre Etat.

Des dispositions identiques ou similaires figurent dans des conventions renégociées récemment avec des Etats de cette zone géographique.

2) Clause de crédit d'impôt fictif

A la demande de la Guinée, la France a accepté l'introduction dans la convention d'une clause de crédit d'impôt fictif ou forfaitaire pour les intérêts et dividendes de source guinéenne limitée à une durée de dix ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la convention. Ce dispositif figure dans des conventions ou avenants récemment conclus avec des Etats d'un niveau de développement similaire à celui de la Guinée.

II - UNE SITUATION COMPLEXE

Ancienne colonie française, la Guinée a accédé à l'indépendance le 2 octobre 1958. Elle est située à la jonction d'une série de pays francophones : Sénégal, Mali, Côte d'Ivoire, anglophones : Liberia, Sierra Léone, et lusophone : Guinée Bissao. Elle présente le paradoxe d'être riche en ressources naturelles, deux tiers des réserves mondiales de bauxite et probablement des réserves de pétrole, fort potentiel en matière hydraulique et agricole, tout en faisant partie des pays les moins avancés avec un PIB par habitant de 510 Euros.

A - Politique intérieure dominée par la succession du Président Conté

La maladie du Président Conté, au pouvoir depuis 1984, ouvre une période d'incertitude et conduit les différents acteurs politiques à se positionner en vue d'une éventuelle succession. Des élections présidentielles sont normalement prévues en décembre 2003.

Les conditions dans lesquelles se sont déroulées les élections législatives du 30 juin 2002 ont été peu satisfaisantes, suscitant la réaction de l'Union européenne. Mise à part l'Union pour le Progrès et le Renouveau, les principaux partis d'opposition ont boycotté le scrutin, la participation réelle est restée très faible et la nouvelle assemblée paraît peu représentative.

B - Politique extérieure marquée par l'instabilité de la région

La Guinée entretient toujours des relations tendues avec le Libéria voisin qui sont compliquées par l'afflux de milliers de réfugiés libériens sur le territoire guinéen. Pour contribuer au retour de la paix au Libéria et appuyer le processus de Rabat visant à la réconciliation entre les trois membres de l'Union du fleuve Mano : Guinée, Sierra Léone, Libéria, un Groupe de contact, dont la France est partie prenante, a été créé le 17 septembre 2002 dans le cadre des Nations unies. Une nouvelle réunion de ce Groupe a eu lieu le 19 décembre 2002 au Sénégal. La crise en Côte d'Ivoire et ses répercussions possibles en terme de déplacement de populations et en terme économique ajoute à l'instabilité.

Actuellement membre non-permanent du Conseil de sécurité qu'elle préside en mars 2003, la Guinée est un partenaire privilégié dans le cadre des discussions sur l'Irak. Soumise aux pressions américaines, elle n'a pas encore émis de position définitive sur ce dossier mais a néanmoins adhéré à la position sur l'Irak définie par l'Union africaine confirmée lors du récent Sommet Afrique-France.

III - LA RELANCE DES RELATIONS BILATÉRALES ENTRE
LA FRANCE ET LA GUINÉE

A - Au niveau politique

Les relations récentes entre la France et la Guinée se sont déroulées sans heurt et méritent d'être plus intenses. Cependant, plusieurs éléments semblent faciliter à l'heure actuelle une intensification du dialogue entre la France et la Guinée, notamment les discussions autour de l'Irak.

Le Ministre des Affaires Etrangères guinéen, François Fall, a été reçu par le Président de la République le 26 février 2003 ainsi que par Dominique de Villepin qui s'est rendu en Guinée le 11 mars. Outre la question irakienne, la relance de la coopération bilatérale a été évoquée.

B - Au niveau économique et commercial

La France reste le premier bailleur de fonds bilatéral de la Guinée et ses domaines d'intervention sont allés en s'élargissant. En matière de coopération civile, l'effort du Ministère des Affaires étrangères s'élève à 7 800 000 euros en 2002, celui de l'AFD à 13 000 000 d'euros en 2001. En matière de coopération militaire, l'enveloppe est de 1 400 000 euros en 2002. Ceci devrait s'accompagner d'une relance de plusieurs programmes de coopération.

La France est le premier fournisseur de la Guinée avec 23,1 % du marché. Les exportations françaises sont constituées pour 35 % de biens d'équipement liés aux grands projets d'infrastructure et 21 % de produits agricoles.

La position française en Guinée est loin d'être définitivement acquise face à la concurrence américaine et asiatique.

C - La communauté française

La communauté française en Guinée compte environ 2 600 personnes. Ce chiffre place notre pays au premier rang des Etats non-africains, avant le Liban (3 000), les Etats-Unis (600) et la Russie (500). Il s'agit d'une population plutôt jeune, active, employée principalement dans le secteur tertiaire et dans les 70 entreprises françaises implantées en Guinée. La majeure partie des Français réside dans la capitale, où sont regroupés les sièges des grandes sociétés françaises.

CONCLUSION

La Convention fiscale franco-guinéenne vise à contribuer à la relance des relations économiques et commerciales avec un pays francophone situé dans une zone actuellement instable. Elle vise à encourager les échanges et à favoriser les investissements français en Guinée.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 5 mars 2003.

Après l'exposé du Rapporteur et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 16).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la Convention figure en annexe au projet de loi (n° 16).

N° 0672 - Rapport sur le projet de loi relatif à la convention avec la Guinée en matière fiscale (Sénat, 1ère lecture)(M. Jacques Godfrain)


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