N° 1000 - Rapport de M. Jérôme Bignon sur la proposition de loi organique , adoptée sans modification par le Sénat, portant réforme de la durée du mandat et de l'élection des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat (936)




Document mis

en distribution

le 4 juillet 2003

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N° 1000

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 juillet 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR :

1. LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT (n° 936), portant réforme de la durée du mandat et de l'âge d'éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat ;

2. LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT (n° 937), portant réforme de l'élection des sénateurs,

PAR M. JÉRÔME BIGNON,

Député.

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Voir les numéros :

Sénat : 312 et 313, 333 et 334 et TA 124 et 125 (2002-2003).

Assemblée nationale : 336 et 337.

Élections et référendums.

INTRODUCTION 5

I. - LE RÉGIME ÉLECTORAL DU SÉNAT DÉTERMINÉ PAR SON RÔLE PARTICULIER DOIT ÊTRE AUJOURD'HUI ADAPTÉ AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ 6

A. UN RÉGIME ÉLECTORAL DOMINÉ PAR LE PRINCIPE DE REPRÉSENTATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 6

1. Un rôle particulier qui justifie un régime électoral spécifique 6

a) La représentation des collectivités territoriales 6

b) Un bicamérisme inégalitaire 8

2. Les caractéristiques actuelles du régime électoral sénatorial 10

a) Un collège électoral composé majoritairement d'élus locaux 10

b) Le département, circonscription traditionnelle de l'élection des sénateurs 12

c) La dualité des modes de scrutin 13

d) Un mandat de neuf ans tempéré par un renouvellement triennal du Sénat 14

e) Un âge d'éligibilité fixé à trente-cinq ans 14

B. LES ADAPTATIONS NÉCESSAIRES AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ 14

1. Une durée de mandat excessive 14

2. Une représentativité perfectible 15

a) Un âge d'éligibilité trop élevé 15

b) L'impérative prise en compte des évolutions démographiques des départements 15

c) Le rééquilibrage nécessaire des modes de scrutin 16

II. - UNE RÉFORME ÉQUILIBRÉE QUI RENFORCE LA LÉGITIMITÉ DE L'INSTITUTION SÉNATORIALE TOUT EN PRÉSERVANT SA SPÉCIFICITÉ 16

A. LA MODERNISATION DE L'INSTITUTION SÉNATORIALE PAR LA RÉDUCTION DE LA DURÉE DU MANDAT SÉNATORIAL À SIX ANS 16

1. Un mandat raccourci de trois ans 16

2. Un renouvellement du Sénat par moitié 16

3. Une mise en œuvre progressive 17

B.  L'AMÉLIORATION DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES SÉNATEURS 18

1. L'abaissement de l'âge d'éligibilité à trente ans 18

2. L'adaptation indispensable de la répartition des sièges aux évolutions démographiques 18

a) L'augmentation des sièges dans les départements 19

b) L'ajustement de la représentation sénatoriale outre-mer 22

3. La définition d'un meilleur équilibre entre le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle 23

a) L'extension du scrutin majoritaire 23

b) L'absence de remise en cause de la progression vers la parité 23

DISCUSSION GÉNÉRALE 26

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE (n° 936) 31

Article 1er(art. L.O. 275 du code électoral) : Réduction de la durée mandat sénatorial à
six ans 31

Article 2 (art. L.O. 276 du code électoral) : Renouvellement du Sénat par moitié et dispositions transitoires 33

Article 3 (art. 1er et 5 de la loi organique n°83-499 du 17 juin 1983) : Renouvellement de sénateurs représentant les Français établis hors de France 37

Après l'article 3 39

Article 4 (art. L.O. 296 du code électoral) : Âge d'éligibilité au Sénat 40

Article 5 (art. L.O. 274 du code électoral) : Nombre de sénateurs élus dans les départements 41

Après l'article 5 48

Article 6 (art. L.O. 438-1, L.O. 438-2 et L.O. 438-3 [nouveaux] du code électoral) : Dispositions organiques relatives aux sénateurs de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna 48

Article 7 : Suppression du siège de sénateur représentant le territoire des Afars et des Issas 50

Article 8 (art. L.O. 334-14-1 [nouveau] du code électoral) : Dispositions organiques relatives à Mayotte 51

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI ORDINAIRE (n° 937) 55

Article 1er(tableau n° 6 annexé au code électoral): Répartition des sénateurs représentant les départements 55

Article 2 (tableau n° 5 annexé au code électoral) : Renouvellement par moitié du Sénat et dispositions transitoires 57

Article 3 (art. L. 440 et L. 442 du code électoral) : Dispositions relatives à l'élection des sénateurs de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna 59

Article 4 (art. 2 de la loi n° 83-390 du 18 mai 1983) : Renouvellement des sénateurs représentant les Français établis hors de France 60

Articles 5 et 6 (art. L. 294 et L. 295 du code électoral) : Champ d'application du mode de scrutin majoritaire à deux tours et de la représentation proportionnelle 61

Article 7 (art. L. 52-3 du code électoral) : Contenu des bulletins de vote 66

Après l'article 7 67

TABLEAU COMPARATIF (proposition de loi organique n° 936) 69

TABLEAU COMPARATIF (proposition de loi n° 937) 77

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION (proposition de loi organique n° 936) 83

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION (proposition de loi n° 937) 85

MESDAMES, MESSIEURS,

Inauguré dans notre pays il y a deux siècles et ancré dans la tradition républicaine depuis 1875, le bicamérisme suscite l'adhésion de nos concitoyens qui, à deux reprises, en 1946 et en 1969, se sont opposés à sa disparition.

Pour autant l'appréciation positive du rôle du Sénat et de la qualité de ses travaux est quelque peu altérée par les critiques récurrentes portées sur le statut électoral des sénateurs. Si ce statut doit conférer à la seconde chambre une certaine particularité, il ne doit pas pour autant rendre ses membres trop étrangers aux aspirations des citoyens.

Soucieux de renforcer sa légitimité tout en conservant ses spécificités, le Sénat a pris lui-même l'initiative d'une réforme d'ensemble de son régime électoral, dont les règles relèvent soit de la loi organique, soit de la loi ordinaire. Le 12 juin dernier, il a ainsi adopté deux propositions de loi complémentaires : la proposition de loi organique n° 936 présentée par MM. Christian Poncelet, Josselin de Rohan et plusieurs de leurs collègues, portant réforme de la durée du mandat et de l'âge d'éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat, et la proposition de loi ordinaire n° 937 des mêmes auteurs portant réforme de l'élection des sénateurs.

Cette réforme s'inscrit dans le prolongement des conclusions du groupe de réflexion sur l'institution sénatoriale mis en place par l'actuel président du Sénat et présidé par M. Daniel Hoeffel. Elle s'articule autour de quatre points principaux :

-  réduire la durée du mandat sénatorial de neuf ans à six ans tout en maintenant le principe d'un renouvellement partiel de la seconde chambre, par moitié, afin de préserver son caractère modérateur ;

-  abaisser l'âge d'éligibilité des sénateurs de trente-cinq à trente ans afin d'ouvrir davantage le Sénat aux jeunes générations ;

-  adapter également la répartition des sièges de sénateurs entre les départements afin de tenir compte des évolutions démographiques intervenues depuis 1975 et augmenter à cette fin les effectifs de la seconde chambre ;

-  rétablir un certain équilibre entre le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle.

Par respect pour l'usage républicain selon lequel les règles relatives à une élection ne doivent pas être modifiées dans l'année précédant sa tenue, il importe que les deux propositions de loi que nous propose le Sénat soient adoptées au cours de cette session extraordinaire.

I. - LE RÉGIME ÉLECTORAL DU SÉNAT DÉTERMINÉ PAR SON RÔLE PARTICULIER DOIT ÊTRE AUJOURD'HUI ADAPTÉ AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ

A. UN RÉGIME ÉLECTORAL DOMINÉ PAR LE PRINCIPE DE REPRÉSENTATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'histoire constitutionnelle française démontre notre attachement à un modèle bicaméral qui permet d'éviter la monopolisation du pouvoir par une seule assemblée. Le régime électoral du Sénat est lié au rôle particulier qui lui est assigné.

1. Un rôle particulier qui justifie un régime électoral spécifique

a) La représentation des collectivités territoriales

-  Un principe ambivalent

Comme l'Assemblée nationale, le Sénat procède du suffrage universel et représente avec elle la souveraineté nationale, une et indivisible. Dans sa décision du 9 avril 1992, relative au traité de Maastricht (1), le Conseil constitutionnel a clairement indiqué qu'en sa qualité d'assemblée parlementaire, le Sénat participait à l'exercice de la souveraineté nationale. Les deux chambres doivent ainsi représenter de manière indivisible la totalité du peuple français.

Mais la Constitution dans son article 24, alinéa 3, confie au Sénat une vocation spécifique de représentation des collectivités territoriales de la République qui doit se concilier avec le principe de représentation du peuple dans son entier :

« Le Sénat est élu au suffrage indirect. Il assure la représentation des collectivités territoriales de la République. Les Français établis hors de France sont représentés au Sénat. »

La portée de ces dispositions fait l'objet d'interprétations divergentes. La désignation de la seconde chambre par des élus locaux est une donnée constante du système institutionnel français depuis 1875. Seul le régime de Vichy a totalement rompu avec ce principe. Pour certains auteurs, si les constituants de 1875, 1946 et 1958 ont choisi de faire élire la seconde chambre par les représentants des assemblées locales, ce choix n'a pas été dicté par la volonté de lui confier une mission particulière de représentation et de protection du pouvoir local face aux tendances liberticides de l'État. Sous la Cinquième République comme sous les deux Républiques précédentes, le recours à la représentation des collectivités territoriales pour asseoir les bases de la seconde assemblée s'expliquerait par la volonté de lui conférer un caractère modéré.

Dans cette optique, défendue notamment par M. François Robbe (2), le principe de représentation des collectivités territoriales inscrit à l'article 24, alinéa 3, de la Constitution doit s'analyser comme une simple modalité technique d'organisation du suffrage indirect et de représentation du peuple. L'enracinement local du Sénat lui permet de mieux assurer son rôle de contrepoids, car la fonction du Sénat dans le système institutionnel mis en place en 1958 est bien d'agir comme un facteur de modération face à la première chambre.

Mais le principe de la représentation des collectivités territoriales peut être analysé différemment. Il conférerait au Sénat une mission particulière de défense du pouvoir local au niveau national, qui, justifiée à l'origine par la nécessité de lutter contre la tendance centralisatrice de la France, trouve un fondement nouveau avec le développement de la décentralisation. Ce « bonus constitutionnel », selon les termes du Président du Sénat, conduit en tout cas les sénateurs à être particulièrement sensibles aux préoccupations des collectivités territoriales, dont les élus constituent son électorat. Cette tendance, sensible dès la Troisième République, s'est particulièrement accentuée sous la Cinquième.

Enfin, certains considèrent qu'à travers le principe de représentation des collectivités territoriales, le Sénat aurait également pour mission de représenter le territoire, et jouerait ainsi un rôle important dans la politique d'aménagement du territoire. Ainsi, le sénateur Gérard Larcher estime que le Sénat a « vocation à représenter la Nation, en assurant l'équité dans la représentation des populations mais aussi l'équilibre dans la représentation des territoires... ». Il ne s'agit pas d'opposer représentation de la population et représentation du territoire. Les territoires n'ont un droit d'expression que parce qu'ils accueillent une population et le Sénat représente avant tout le peuple. Mais il est certain que le principe de représentation des collectivités territoriales joue en faveur des collectivités les moins peuplées et donne plus de poids aux espaces ruraux.

-  les implications du principe de représentation des collectivités territoriales

Les implications du principe de représentation des collectivités territoriales sur le régime électoral du Sénat ont été précisées par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le Sénat ne doit pas assurer la représentation spécifique et égalitaire de toutes les collectivités territoriales en tant que personnes morales à l'instar des secondes chambres des États fédéraux. Une telle représentation serait impossible compte tenu de leur nombre et peu compatible avec le principe constitutionnel d'indivisibilité de la Nation. Le Conseil constitutionnel a précisé dans sa décision du 9 mai 1991 (3) que l'article 24, alinéa 3, de la Constitution impliquait seulement que les différentes collectivités territoriales soient représentées au sein du collège électoral sénatorial et que le cadre de désignation des sénateurs et des électeurs sénatoriaux n'avait pas d'incidence sur la représentation des collectivités territoriales.

Dans sa décision du 6 juillet 2000 sur la loi relative à l'élection des sénateurs (4), le Conseil constitutionnel a apporté d'importantes précisions sur la portée du principe de représentation des collectivités territoriales :

« Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 24 de la Constitution que le Sénat doit, dans la mesure où il assure la représentation des collectivités territoriales de la République, être élu par un corps électoral qui est lui-même l'émanation de ces collectivités ; que, par suite, ce corps électoral doit être essentiellement composé de membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ; que toutes les catégories de collectivités territoriales doivent y être représentées ; qu'en outre, la représentation des communes doit refléter leur diversité ; qu'enfin, pour respecter le principe d'égalité devant le suffrage résultant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et de l'article 3 de la Constitution, la représentation de chaque catégorie de collectivités territoriales et des différents types de communes doit tenir compte de la population qui y réside. »

Dans cette décision, le Conseil a constitutionnalisé en quelque sorte les règles concernant la composition du collège électoral sénatorial existant depuis 1875. Ainsi les membres de la seconde chambre ne peuvent être élus que par un collège composé majoritairement d'élus locaux. Ils pourraient l'être par un collège de grands électeurs ad hoc désignés au suffrage universel direct semblable au collège mis en place par la loi organique du 27 octobre 1946.

En outre, si la population des collectivités territoriales doit être prise en compte dans la composition du collège sénatorial, elle ne doit pas l'être de façon absolue. En particulier, en posant le principe selon lequel la représentation des communes au sein du collège électoral doit refléter leur diversité, le Conseil constitutionnel semble exiger une représentation des petites communes rurales qui rende compte de leur nombre davantage que de leur faible poids dans la population française.

Le Conseil constitutionnel a admis que la représentation de la population par le Sénat soit plus souple que pour l'Assemblée nationale, qui doit être élue sur des bases essentiellement démographiques, selon la formule utilisée dans les décisions des 1er et 2 juillet 1986 et du 18 novembre 1986 (5) à propos du découpage des circonscriptions électorales des députés.

b) Un bicamérisme inégalitaire

Si le régime électoral du Sénat repose sur le principe de représentation des collectivités territoriales, il est également déterminé par sa place dans le bicamérisme inégalitaire instauré par la Constitution.

Le bicamérisme introduit par la Cinquième République est inégalitaire. L'Assemblée nationale bénéficie d'une primauté fondée sur son élection au suffrage universel direct, mais le Sénat participe pleinement à la fonction parlementaire, offrant ainsi la garantie d'un double regard.

Ainsi, la Constitution confère le pouvoir législatif aux deux chambres en leur donnant un droit d'initiative et en établissant que chaque projet ou proposition de loi est examiné successivement par chacune d'elle en vue de l'adoption d'un texte identique. Afin de parvenir à un compromis entre les députés et les sénateurs, un mécanisme de navette parlementaire est prévu et, en cas de désaccord, après deux lectures par chaque assemblée, ou une seule lecture si le Gouvernement a déclaré l'urgence, une commission mixte paritaire peut être réunie. Cependant le Gouvernement peut demander à l'Assemblée nationale de statuer définitivement, en cas de désaccord persistant entre les deux assemblées, sur les dispositions du texte en discussion n'ayant pas fait l'objet d'un vote identique. La primauté de l'Assemblée ne joue cependant pas pour les révisions constitutionnelles et les lois organiques relatives au Sénat, qui doivent être adoptées dans les mêmes termes par les deux assemblées, les autres lois organiques devant, faute d'accord, l'être par l'Assemblée nationale à la majorité absolue de ses membres. En outre, l'Assemblée dispose d'une priorité d'examen pour les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale. Depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, le Sénat, au nom du principe de représentation des collectivités territoriales, bénéficie d'une priorité d'examen pour les projets de loi ayant pour principal objet l'organisation des collectivités territoriales et pour ceux qui sont relatifs aux instances représentatives des Français établis hors de France.

En dépit du dernier mot à l'Assemblée nationale, le Sénat apporte une contribution importante et appréciée au travail législatif. Il participe également à la mission de contrôle de l'activité du Gouvernement pouvant, à l'instar de l'Assemblée nationale, utiliser les procédures de questions orales et écrites et constituer des missions d'information et des commissions d'enquête. Cependant si le Gouvernement a la faculté de demander au Sénat l'approbation d'une déclaration de politique générale, il n'est responsable que devant l'Assemblée nationale. L'existence du Gouvernement est donc conditionnée par l'existence d'une majorité à l'Assemblée nationale qui, en contrepartie, peut être dissoute par le Président de la République.

En revanche, le Sénat peut avoir une majorité politique différente de celle de l'Assemblée nationale sur laquelle s'appuie le Gouvernement sans que le fonctionnement des institutions soit paralysé. Sa majorité ne conditionne ni la composition politique du Gouvernement ni la mise en œuvre de son programme. En conséquence, le régime électoral des sénateurs n'a pas vocation à permettre de dégager une majorité de gouvernement. Le Sénat n'a pas à traduire instantanément les variations de l'opinion. Cela ne veut pas dire qu'il ne doit pas connaître de changements, mais que ceux-ci peuvent être plus progressifs. Son régime électoral doit lui permettre d'apporter un regard différent de celui de l'Assemblée nationale et de jouer un rôle pondérateur par rapport à elle.

2. Les caractéristiques actuelles du régime électoral sénatorial

Hormis le principe du suffrage indirect inscrit dans la Constitution, les règles relatives à l'élection des sénateurs relèvent soit de la loi organique, soit de la loi ordinaire.

Relèvent ainsi de lois organiques « relatives au Sénat », qui ne peuvent être modifiées sans l'accord des deux assemblées :

-  le nombre total de sénateurs et leur élection dans une circonscription constituée par le département (article L.O. 274 du code électoral) ;

-  la durée du mandat (article L.O. 275 du code électoral) ;

-  le renouvellement par tiers du Sénat (article L.O. 276 du code électoral) ;

-  les conditions d'éligibilité et le régime des incompatibilités (articles L.O. 296 et L.O. 297 du code électoral) ;

-  le remplacement des sénateurs (articles L.O. 319 à L.O. 323 du code électoral) ;

-  la date de début et de fin de mandat, la période d'organisation des élections sénatoriales et le contentieux de l'élection des sénateurs (articles L.O. 277, L.O. 278 et L.O. 325 du code électoral).

Les caractéristiques fondamentales du régime électoral du Sénat sont au nombre de cinq.

a) Un collège électoral composé majoritairement d'élus locaux

Le Sénat est élu au suffrage universel indirect par un collège électoral composé majoritairement d'élus locaux et qui se réunit dans le cadre du département. Selon l'article L. 280 du code électoral, les sénateurs des départements sont élus par :

-  les députés élus dans le département ;

-  tous les conseillers généraux du département ;

-  des conseillers régionaux ou conseillers à l'Assemblée de Corse ;

-  des représentants des conseils municipaux (articles L. 283 à L. 293).

La présence des députés dans les collèges électoraux sénatoriaux peut surprendre puisqu'elle ne répond pas à l'obligation constitutionnelle de représentation des collectivités territoriales. Elle s'explique pour des raisons historiques. Les constituants de 1875, et plus tard les auteurs de la loi du 9 décembre 1884, ont cherché à constituer un collège électoral sénatorial composé d'élus du suffrage universel, sans s'imposer la règle de la représentation des collectivités territoriales. Après l'intégration de cette règle dans la Constitution, à partir de 1946, le législateur n'a pas jugé bon de remettre en question cette tradition. Du reste, le poids des députés au sein des collèges électoraux est très faible.

La présence des conseillers régionaux dans le collège électoral des sénateurs remonte à la loi du 10 juillet 1985 instituant des assemblées régionales élues. Le législateur de 1985 a choisi de faire désigner les membres des assemblées régionales dans le cadre des départements, afin qu'ils puissent être directement intégrés dans les collèges sénatoriaux départementaux, sans qu'il soit nécessaire d'organiser l'élection des sénateurs dans le cadre régional. La loi n° 99-36 du 19 janvier 1999 relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux avait prévu l'élection des conseillers régionaux dans le cadre de circonscriptions régionales. Un dispositif complexe était prévu pour affecter les conseillers régionaux dans les collèges départementaux. Il était analogue à celui qui avait été mis en place en 1991 uniquement pour les conseillers de l'Assemblée de Corse.

La loi n° 2000-327 du 11 avril 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux, des représentants au Parlement européen et à l'aide publique aux partis politique, qui organise l'élection régionale dans des circonscriptions régionales et institue des sections départementales au sein des listes régionales, a supprimé le système de répartition des conseillers régionaux entre les collèges départementaux élisant les sénateurs mis en place par la loi du 19 janvier 1999. Désormais, chaque conseiller régional sera électeur dans le collège électoral du département où il a été élu. En revanche, le dispositif reste en vigueur pour les délégués de l'Assemblée de Corse.

Les représentants des conseils municipaux constituent 95 % du collège électoral sénatorial, ce qui s'explique aisément puisque chaque commune, quelle que soit sa dimension, bénéficie d'une représentation propre. La loi constitutionnelle du 24 février 1875 avait attribué à toutes les communes un nombre égal d'un électeur sénatorial. Par la suite, sans remettre en cause la représentation de chaque commune au sein du collège, la loi du 9 décembre 1884, puis la loi organique du 23 septembre 1948 et enfin l'ordonnance du 15 novembre 1958 sont venues atténuer la rigueur de ce système en augmentant le nombre de délégués des communes urbaines pour tenir compte de leur poids démographique.

Les délégués municipaux sont élus parmi les conseillers municipaux et le cas échéant parmi les électeurs inscrits sur la liste électorale de la commune intéressée, ce qui assure un lien avec la commune représentée. Les conseils municipaux élisent aussi des suppléants (à raison de deux quand le nombre de titulaires ne dépasse pas cinq puis augmenté de deux par cinq titulaires ou fraction de cinq).

Aujourd'hui, dans les communes de moins de 9 000 habitants, le nombre de délégués est inférieur à l'effectif des conseils municipaux. Il varie de 1 délégué (communes de moins de 500 habitants) à 15 délégués (communes de 3 500 à moins de 9 000 habitants). Le choix des suppléants s'effectue alors au sein du conseil municipal.

Dans les communes comptant entre 9 000 et moins de 31 000 habitants, tous les conseillers municipaux sont délégués municipaux (de 29 à 39 délégués). Le choix des suppléants est établi parmi les électeurs de la commune, en dehors du conseil municipal et des membres de droit du collège électoral.

Enfin, dans les communes comptant un minimum de 31 000 habitants, tous les membres du conseil municipal sont délégués pour l'élection des sénateurs et des délégués supplémentaires sont élus à raison d'un délégué par tranche entière de 1 000 habitants en sus de 30 000 habitants.

Le Gouvernement de M. Lionel Jospin a tenté de modifier ce système. L'article 2 de la loi relative à l'élection de sénateurs avait ainsi prévu de supprimer tout lien entre le nombre des délégués de la commune et l'effectif du conseil municipal, le nombre de délégués étant déterminé en fonction de la population des communes, à raison d'un délégué pour 300 habitants ou une fraction de ce nombre. Mais le Conseil constitutionnel a censuré ces dispositions. Il a considéré que, si le nombre des délégués d'un conseil municipal devait être fonction de la population de la commune et si, dans les communes les plus peuplées, des délégués supplémentaires, choisis en dehors du conseil municipal, pouvaient être élus par lui pour le représenter, c'était à la condition que la participation de ces derniers au collège sénatorial conserve un caractère de correction démographique. Or le système proposé aboutissait à ce que des délégués supplémentaires non titulaires d'un mandat municipal prennent une part substantielle, voire, dans certains départements, majoritaire au sein du collège des électeurs sénatoriaux, allant au-delà d'une simple correction démographique. Le juge constitutionnel a considéré que ce système méconnaissait ainsi l'article 24 de la Constitution, qui implique une représentation diversifiée des communes et un poids prépondérant accordé aux élus locaux.

Jusqu'à la loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 relative à l'élection des sénateurs, les délégués sénatoriaux de communes de moins de 9 000 habitants étaient désignés au scrutin majoritaire à trois tours, les autres étaient élus à la représentation proportionnelle. Aujourd'hui, l'élection des délégués sénatoriaux se fait au scrutin majoritaire à deux tours dans les communes dont la population est inférieure à 3 500 habitants et à la représentation proportionnelle dans les autres.

b) Le département, circonscription traditionnelle de l'élection des sénateurs

Depuis 1875, les sénateurs sont élus dans le cadre du département, à l'exception des sénateurs représentant les Français de l'étranger et les collectivités situées outre-mer qui ne sont pas organisées sous forme départementale. Consacré par la loi constitutionnelle du 24 février 1875, le cadre départemental n'a été remis en cause que de manière marginale sous le régime transitoire de la loi organique du 27 octobre 1946. Il existe un lien historique entre le département et l'institution sénatoriale. La grande loi de 1871 sur l'organisation départementale fut élaborée par la même Assemblée nationale que celle qui rédigea les lois constitutionnelles de 1875 et des analogies peuvent être relevées dans l'organisation des deux institutions. En outre, le département présente trois caractéristiques qui peuvent expliquer qu'il ait été choisi et maintenu comme cadre d'élection : il est traditionnellement l'espace privilégié d'expression du pouvoir des notables, le lieu de rencontre et d'articulation entre le pouvoir central et le pouvoir local et le cadre naturel de la désignation des parlementaires depuis la Révolution.

Depuis 1875, la répartition des sièges entre les départements a pris en compte dans une certaine mesure les données démographiques. L'actuelle répartition des sièges résulte de la loi ordinaire n° 76-645 du 16 juillet 1976, qui s'appuie sur les résultats du recensement de 1975 auxquels il a été appliqué une « clé de répartition » inspirée de la loi n° 48-1971 du 23 septembre 1948. Cette clé consiste à attribuer un siège de sénateur jusqu'à 150 000 habitants puis un siège supplémentaire par tranche de 250 000 habitants ou fraction de ce nombre. Cette répartition est établie sur la base de critères démographiques tout en assurant une représentation minimale des départements les moins peuplés. Chaque département dispose d'au moins un sénateur et un département, dont la population est comprise entre 151 000 habitants et 400 000, de deux.

c) La dualité des modes de scrutin

Le Sénat est la seule assemblée politique française qui soit désignée par deux modes de scrutin différents, le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle. Si ces deux modes de scrutin sont utilisés pour la désignation des conseils municipaux en fonction de leur population (plus ou moins 3 500 habitants), chaque conseil municipal est désigné selon un seul et unique mode de scrutin. La dualité des modes de scrutin est donc bien une spécificité du Sénat, de nature à enrichir sa spécificité.

Tous les membres du Sénat de la Troisième République étaient désignés au scrutin majoritaire. En 1946, le scrutin proportionnel fut introduit pour la première fois pour désigner certains membres de la chambre haute à l'initiative des députés communistes. Toutefois, il était impossible de généraliser ce mode de scrutin puisque 68 départements de la métropole n'avaient qu'un seul conseiller de la République à élire. Ainsi, la loi organique du 27 octobre 1946 instaura la coexistence de la représentation proportionnelle et du scrutin uninominal majoritaire, ce dernier s'appliquant dans les départements métropolitains n'élisant qu'un seul conseiller et dans les territoires d'outre-mer. La cohabitation des deux modes de scrutin n'a pas été remise en cause depuis, mais le dosage entre les deux a varié. Le scrutin majoritaire est demeuré dominant de 1948 à 2001. La loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 a considérablement étendu le champ d'application de la représentation proportionnelle, qui s'applique désormais dans les départements ayant plus de deux sièges à pourvoir, soit pour l'élection de 212 sénateurs dans 50 départements et pour l'élection des douze sénateurs représentant les Français de l'étranger.

La constitutionnalité de la coexistence de deux modes de scrutin pour l'élection d'une même assemblée au regard du principe de l'égalité du suffrage a été débattue. On peut considérer que les départements où les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire et ceux où ils sont élus à la représentation proportionnelle se trouvent objectivement dans des situations différentes liées à leur démographie. En tout état de cause, le Conseil constitutionnel saisi de la loi relative à l'élection des sénateurs n'a pas sanctionné ce mode d'élection différencié des sénateurs dans sa décision du 6 juillet 2000 (6).

d) Un mandat de neuf ans tempéré par un renouvellement triennal du Sénat

Le régime électoral des sénateurs est caractérisé par une durée de mandat plus longue (neuf ans) que celle des députés (cinq ans). La longueur du mandat de sénateur a pour corollaire le principe du renouvellement partiel, par tiers, du Sénat. Ces deux règles ont été instaurées en 1875 comme une arme contre le camp républicain : il fallait, dans l'hypothèse où la Royauté ne pourrait pas être rétablie à la fin de la présidence du Maréchal de Mac Mahon, qu'une institution demeure pour défendre les intérêts de la monarchie et éviter tout basculement brutal du Sénat dans le camp des adversaires. Maintenues par les républicains lors de la réforme de 1884, ces deux règles n'ont été modifiées que de 1946 à 1958, le Conseil de la République étant élu pour six ans et renouvelable par moitié. Associées au principe selon lequel la Haute assemblée ne peut être dissoute, ces règles lui confèrent une continuité dont ne bénéficie pas l'Assemblée nationale et contribuent à sa fonction modératrice.

e) Un âge d'éligibilité fixé à trente-cinq ans

Enfin, l'âge d'éligibilité des sénateurs, fixé à trente-cinq ans, est supérieur à celui des députés, qui est de vingt-trois ans (article L.O. 296 du code électoral). En revanche, le régime des incompatibilités applicable aux sénateurs est le même que celui des députés. Lors de l'élaboration des lois d'avril 2000 relatives au cumul des mandats (7), la question de savoir si le principe de représentation des collectivités territoriales par le Sénat impliquait que les sénateurs obtiennent un traitement plus favorable que celui des députés pour cumuler leur mandat avec des mandats locaux a été débattue. Ni les députés ni les sénateurs n'ont cependant défendu cette idée avancée par certains constitutionnalistes.

B. LES ADAPTATIONS NÉCESSAIRES AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ

Le régime électoral du Sénat en fait une institution stabilisatrice assurant, à côté de l'Assemblée, une représentation différenciée et complémentaire de la Nation. Il doit cependant être adapté sur certains points pour prendre en compte les évolutions sociales et territoriales récentes.

1. Une durée de mandat excessive

La longueur de la durée du mandat sénatorial fait aujourd'hui l'objet de critiques. Nombreux sont ceux qui estiment qu'elle devrait être réduite pour renforcer la légitimité démocratique de l'institution. Il est vrai qu'elle fait figure d'exception au regard de la périodicité des élections démocratiques contemporaines et que son utilité peut être contestée.

Depuis l'introduction du quinquennat pour le président de la République, le mandat sénatorial est aujourd'hui le seul mandat en France dont la durée excède six ans. Sa durée apparaît également singulière en droit comparé. Le mandat sénatorial français est le mandat parlementaire le plus long d'Europe. Parmi les États connaissant le bicamérisme, la moyenne de la durée du mandat des secondes chambres se situe entre quatre et six ans. Seuls les membres des secondes chambres du Maroc et du Libéria ont un mandat de neuf ans.

Une telle durée, justifiée au départ par la nécessité de conférer au Sénat une certaine stabilité et un caractère modérateur, n'est pas pleinement fondée. La stabilité de la seconde chambre est également assurée par l'impossibilité de la dissoudre et le renouvellement par tiers de ses membres, qui l'inscrivent dans la pérennité, puisque le Sénat ne cesse jamais d'être en fonction. Son rôle modérateur est garanti par son mode de scrutin indirect et le profil particulier des élus ainsi choisis. En outre, la durée du mandat sénatorial n'est pas la mieux adaptée au principe de représentation des collectivités territoriales. En effet, la durée des mandats locaux (conseillers municipaux, conseillers généraux, conseillers régionaux et conseillers à l'Assemblée de Corse depuis la loi du 11 avril 2003) est harmonisée à six ans ; il en résulte que certains élus locaux n'ont pas l'occasion, au cours de leur mandat, de voter pour élire les sénateurs qui les représentent.

2. Une représentativité perfectible

a) Un âge d'éligibilité trop élevé

Le mandat de sénateur est le seul mandat auquel on ne puisse accéder qu'à partir de trente-cinq ans. Cet âge d'éligibilité est nettement supérieur à celui exigé pour les mandats locaux, fixé à dix-huit ans, et pour les mandats de député, Président de la République et député européen, fixé à vingt-trois ans. Même si l'âge d'éligibilité des sénateurs ne contribue pas de façon déterminante à élever leur âge moyen, il alimente les critiques à l'égard du Sénat, trop souvent perçu comme une assemblée de retraités. Son abaissement constituerait un signe positif à l'égard des jeunes générations.

b) L'impérative prise en compte des évolutions démographiques des départements

La répartition des sièges de sénateurs entre les départements est aujourd'hui fortement décalée par rapport aux évolutions démographiques intervenues depuis 1975. Les recensements généraux de la population de 1982, 1990 et 1999 n'ont pas été pris en compte par le législateur.

Or, les évolutions démographiques des collectivités territoriales ont été importantes entre 1975 et 1999 : tandis que la population française a augmenté de 12 %, celle de la Seine-et-Marne a crû de 58 % et celle de la Guyane de 182,5  %. À l'inverse, la population de la Creuse a baissé de 15 %.

Aussi, certains départements sont aujourd'hui manifestement « sous-représentés » au Sénat sans justification particulière : alors que chacun des trois sénateurs des Côtes d'Armor représente 180 728 habitants, chacun des trois sénateurs du Haut Rhin en représente 235 665 et chacun des trois sénateurs de l'Hérault en représente 298 475.

Le Conseil constitutionnel a par deux fois invité le législateur à adapter la répartition des sièges de sénateurs entre les départements pour tenir compte des évolutions démographiques : tout d'abord dans sa décision du 6 juillet 2000 relative à la loi reformant le mode de scrutin de l'élection des sénateurs, puis l'année suivante dans une décision Hauchemaille et Marini rendue sur une contestation relative à l'organisation des élections sénatoriales de septembre 2001 (8).

c) Le rééquilibrage nécessaire des modes de scrutin

La loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 relative à l'élection des sénateurs a abaissé le seuil de la représentation proportionnelle qui s'applique désormais dans les départements ayant trois sièges de sénateurs et plus. Ainsi, elle concerne deux tiers des sièges du Sénat. La représentation proportionnelle traduit plus fidèlement que le scrutin majoritaire la densité démographique élevée de certains départements, mais le scrutin majoritaire seul permet une représentation satisfaisante des départements peu peuplés. Il favorise une plus grande proximité entre l'élu et ses électeurs et assure par là l'élection de personnalités ancrées dans le milieu local. Si la pluralité des modes de scrutin sénatoriaux doit être conservée, il apparaît également nécessaire de modifier à nouveau le curseur entre représentation proportionnelle et scrutin majoritaire afin d'étendre l'application de ce dernier.

II. - UNE RÉFORME ÉQUILIBRÉE QUI RENFORCE LA LÉGITIMITÉ DE L'INSTITUTION SÉNATORIALE TOUT EN PRÉSERVANT SA SPÉCIFICITÉ

A. LA MODERNISATION DE L'INSTITUTION SÉNATORIALE PAR LA RÉDUCTION DE LA DURÉE DU MANDAT SÉNATORIAL À SIX ANS

1. Un mandat raccourci de trois ans

La durée actuelle de neuf ans du mandat sénatorial n'est plus justifiée. L'article premier de la proposition de la loi organique propose de l'abaisser à six ans. Elle serait ainsi alignée sur celle des mandats locaux, ce qui paraît naturel puisque le Sénat est élu par un collège comprenant essentiellement des titulaires de tels mandats. En outre, la durée du mandat sénatorial demeurerait supérieure d'un an à celle du mandat de député et de président de la République, ce qui permettrait de maintenir l'équilibre institutionnel actuel.

2. Un renouvellement du Sénat par moitié

Le principe du renouvellement partiel du Sénat, gage de stabilité de l'institution, serait maintenu. Au renouvellement par tiers serait substitué un renouvellement par moitié et l'effectif du Sénat serait réparti en deux séries approximativement égales. Le renouvellement par moitié est plus compatible avec la réduction de la durée du mandat sénatorial à six ans que le renouvellement par tiers (article 2 de la proposition de loi organique). En effet, des renouvellements partiels tous les deux ans risqueraient de troubler le bon fonctionnement du Sénat. Le dispositif proposé s'inspire du précédent du Conseil de la République sous la Quatrième République et de celui retenu actuellement pour les conseils généraux (article L. 192 du code électoral).

3. Une mise en œuvre progressive

L'abaissement de la durée du mandat sénatorial et le renouvellement par moitié du Sénat seront progressivement introduits afin d'éviter la réduction de la durée des mandats en cours. Le renouvellement par moitié ne serait pleinement effectif qu'à compter de 2010, la réduction de la durée du mandat s'appliquerait à l'ensemble des sénateurs à compter de 2013.

Des dispositions transitoires sont prévues (article 2 de la proposition de loi ordinaire).

Dès 2004, une partie des sénateurs de la série C, renouvelable à cette date, seraient élus pour six ans, les autres continuant de l'être pour neuf ans. La série C serait ainsi scindée en deux sections (d'une part les sièges des départements du Bas-Rhin à l'Yonne, à l'exception de la Seine-et-Marne, et d'autre part, les sièges des départements de l'Île-de-France et des Antilles, ainsi que les sièges des sénateurs de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon).

Au cours de la première semaine d'octobre 2003, le Bureau du Sénat serait chargé de désigner par tirage au sort, la section dont la durée de mandat sera ramenée à six ans et celle dont la durée de mandat sera maintenue à neuf ans.

En 2007, la série A serait intégralement renouvelée pour six ans. En 2010, l'ancienne série B et les sénateurs de l'ancienne série C élus pour six ans en 2004 seraient renouvelés pour six ans au sein de la nouvelle série 1. En 2013, l'ancienne série A et les sénateurs de l'ancienne série C élus pour neuf ans en 2004 seraient renouvelés pour six ans au sein d'une nouvelle série 2.

Dispositions transitoires

Année

Première série

Deuxième série

Série B

Moitié C

Moitié C

Série A

2004

Élection (6 ans)

Élection (9 ans)

2005

2006

2007
(municipales)

Élection (6 ans)

2008

2009

2010

Renouvellement total (6 ans)

2011

2012

2013
(municipales)

Renouvellement total (6 ans)

B.  L'AMÉLIORATION DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES SÉNATEURS

1. L'abaissement de l'âge d'éligibilité à trente ans

L'article 4 de la proposition de loi organique prévoit d'abaisser l'âge d'éligibilité des sénateurs de trente-cinq ans à trente ans. Cette mesure élargira l'accès au mandat sénatorial tout en maintenant un écart avec l'âge d'éligibilité des députés, aujourd'hui fixé à vingt-trois ans.

2. L'adaptation indispensable de la répartition des sièges aux évolutions démographiques

Les propositions de loi prévoient d'ajuster la répartition des sièges de sénateurs entre les départements et les collectivités d'outre-mer aux évolutions démographiques intervenues depuis 1976. La solution retenue consiste à appliquer la clé de répartition introduite en 1948, et légèrement modifiée depuis 1966, aux résultats du recensement de 1999, ce qui conduit à augmenter l'effectif des sénateurs. Vingt-cinq sièges seraient créés et un, celui du sénateur représentant le territoire des Afars et des issas, serait supprimé, soit une création nette de vingt-quatre sièges (article 5 de la proposition de loi organique et article premier de la proposition de loi ordinaire).

Certains objecteront que la réforme aurait pu se faire à effectif constant en définissant une nouvelle méthode de répartition des sièges. Le choix retenu n'est cependant guère contestable : le nombre de sénateurs est resté relativement stable depuis le début de la Troisième République et l'augmentation prévue reste modeste. Il convient de souligner que la prise en compte des résultats du recensement général de la population de 1975 avait entraîné la création de 33 nouveaux sièges.

La clé de répartition utilisée favorise la représentation des départements les moins peuplés. Mais le Conseil constitutionnel n'impose pas au nom du principe d'égalité du suffrage une proportionnalité absolue entre la population d'une circonscription et le nombre de sièges qui lui sont attribués et accepte que le législateur tienne compte d'impératifs d'intérêt général. Dans les considérants de la décision du 6 juillet 2000 portant sur la loi relative à l'élection des sénateurs, il a imposé au législateur de modifier la répartition par département des sièges de sénateurs « pour tenir compte des évolutions de la population des collectivités territoriales ». Cette formule laisse à penser que seule l'évolution géographique enregistrée depuis 1976 impose une redistribution des sièges entre les circonscriptions départementales. Le Conseil constitutionnel ne semble pas remettre en cause la méthode utilisée pour procéder à cette répartition.

a) L'augmentation des sièges dans les départements

22 nouveaux sièges seraient créés dans les départements portant leur nombre total de 304 à 326. Cette augmentation entrerait en vigueur progressivement au fur et à mesure du renouvellement de chacune des séries et serait totalement effective en 2010. Ainsi, à titre transitoire, le nombre de sénateurs élus dans les départements serait de 313 en 2004 et 322 en 2007. L'effectif total du Sénat serait ainsi porté à 346 membres, au terme des trois prochains renouvellements partiels, en 2010.

21 départements connaîtraient une augmentation de leur représentation sénatoriale. Un seul département, celui de Seine-et-Marne gagnerait 2 sièges, un siège supplémentaire étant obtenu dans les vingt autres.

Le tableau ci-après fait apparaître la nouvelle répartition des sièges par département qui résulterait des propositions de loi :

nombre et répartition des sénateurs selon les propositions de loi n° 936 et 937

Départements

Nombre de sénateurs

Augmentation
proposée par
rapport au nombre d'actuel

1 siège

Alpes-de-Haute-Provence

1

9 départements
et 9 sièges

Alpes (Hautes)

1

Ariège

1

Belfort (Territoire de)

1

Corse-du-Sud

1

Corse (Hautes)

1

Lozère

1

Wallis-et-Futuna (tom)

1

Saint-Pierre-et-Miquelon (Collec. Terr.)

1

2 sièges

Allier

2

41 départements
et 82 sièges

Ardèche

2

Ardennes

2

Aube

2

Aude

2

Aveyron

2

Cantal

2

Charente

2

Cher

2

Corrèze

2

Creuse

2

Dordogne

2

Gers

2

Indre

2

Jura

2

Landes

2

Loire (Haute)

2

Loir-et-Cher

2

Lot

2

Lot-et-Garonne

2

Marne (Haute)

2

Mayenne

2

Meuse

2

Nièvre

2

Orne

2

Pyrénées (Hautes)

2

Pyrénées-Orientales

2

Saône (Haute)

2

Savoie

2

Sèvres (Deux)

2

Tarn

2

Tarn-et-Garonne

2

Vienne

2

Vienne (Haute)

2

Vosges

2

Yonne

2

Guyane (dom)

2

(+1)

Martinique (dom)

2

(+1)

Polynésie française (Collec d'outre-mer)

2

(+1)

Mayotte (Collec. d'outre-mer)

2

(+1)

Nouvelle-Calédonie (Collec. d'outre-mer)

2

(+1)

3 sièges

Ain

3

(+1)

25 départements
et 75 sièges

Aisne

3

Calvados

3

Charente-Maritime

3

Côte d'Armor

3

Côte d'Or

3

Doubs

3

Drôme

3

(+1)

Eure

3

Eure-et-Loir

3

(+1)

Gard

3

Indre-et-Loire

3

Loiret

3

Manche

3

Marne

3

Morbihan

3

Puy-de-Dôme

3

Pyrénées-Atlantiques

3

Saône-et-Loire

3

Sarthe

3

Savoie (Haute)

3

Somme

3

Vaucluse

3

(+1)

Vendée

3

Guadeloupe (dom)

3

(+1)

4 sièges

Finistère

4

10 départements
et 40 sièges

Hérault

4

(+1)

Ille-et-Vilaine

4

Loire

4

Maine-et-Loire

4

(+1)

Meurthe-et-Moselle

4

Oise

4

(+1)

Rhin (Haut)

4

(+1)

Var

4

(+1)

Réunion (dom)

4

(+1)

5 sièges

Alpes-Maritimes

5

(+1)

8 départements
et 40 sièges

Essonne

5

Garonne (Haute)

5

(+1)

Isère

5

(+1)

Loire-Atlantique

5

Moselle

5

Rhin (Bas)

5

(+1)

Val-d'Oise

5

(+1)

6 sièges

Gironde

6

(+1)

6 départements
et 36 sièges

Seine-et-Marne

6

(+1)

Seine-Maritime

6

Seine-Saint-Denis

6

Val-de-Marne

6

Yvelines

6

(+1)

7
sièges

Hauts-de-Seine

7

3 départements
et 21 sièges

Pas-de-Calais

7

Rhône

7

8
sièges

Bouches-du-Rhône

8

(+1)

1 département
et 8 sièges

11
sièges

Nord

11

1 département
et 11 sièges

12
sièges

Paris

12

24 sièges

Français établis hors de France

12

soit un total de 346 sièges

L'application stricte de la clé démographique de 1948 aurait dû conduire les sénateurs à supprimer quatre sièges : un siège dans le département de la Creuse et trois à Paris. Toutefois, ces derniers n'ont pas souhaité procéder à cette suppression estimant que l'adaptation du nombre de sièges des départements aux évolutions démographiques ne devait intervenir qu'à la hausse. Ils ont ainsi fait valoir que le Parlement avait déjà refusé en 1976 lors de la prise en compte du recensement général de la population de 1975 de retirer un siège à la Creuse et deux à Paris et qu'un « effet cliquet » à la baisse aurait ainsi été instauré.

Ce précédent ne garantit pas pour autant la constitutionnalité du dispositif retenu. En effet, le Conseil constitutionnel n'avait pas été saisi en 1976 de la loi ordinaire fixant la répartition des sièges de sénateurs mais seulement de la loi organique fixant le nouvel effectif du Sénat. Il avait alors pris soin de préciser dans sa décision n° 76-68 DC du 15 juillet 1976 validant la loi organique que « n'étant saisi ni de la répartition des sièges de sénateurs entre les départements, ni des règles selon lesquelles cette répartition est opérée, le Conseil constitutionnel ne peut porter d'appréciation que sur la conformité à la Constitution de la fixation du nombre des sénateurs des départements ».

Il est vrai que la jurisprudence du Conseil constitutionnel admet que le principe d'égalité, dont celui d'égalité du suffrage, ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, à condition que la différence de traitement soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. En l'espèce, ces conditions ne semblent pas remplies.

La Creuse, avec 124 470 habitants et 2 sénateurs, bénéficierait d'un sénateur de plus que des départements plus peuplés : l'Ariège avec 137 205 habitants, le territoire de Belfort avec 137 408 habitants, les Alpes-de-Haute-Provence avec 139 561 habitants et la Haute-Corse avec 141 603 habitants. Elle aurait en conséquence le nombre d'habitants par sénateur le plus faible de métropole (62 235).

Paris, avec 2 125 246 habitants et 12 sénateurs au lieu de 9, aurait un sénateur de plus que le Nord pourtant plus peuplé (2 555 020 habitants). Son nombre d'habitants par sénateur (177 104) est proche du niveau observé dans les départements peuplés de 350 000 à 710 000 habitants, alors que les départements comptant plus de 1,5 million d'habitants comptent tous un sénateur pour au moins 225 000 habitants.

C'est la raison pour laquelle la commission des Lois a souhaité procéder à la suppression d'un siège dans la Creuse et de trois à Paris, ce qui portera le nombre de sièges par département à 322 et l'effectif total du Sénat à 342.

b) L'ajustement de la représentation sénatoriale outre-mer

La représentation sénatoriale des collectivités d'outre-mer est restée inchangée depuis 1946, malgré la croissance démographique de ces collectivités. Il convenait donc d'appliquer la clé démographique de 1948 aux résultats du recensement de 1999 dans ces territoires. Cela conduit à créer un nouveau siège de sénateur en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française ainsi qu'à Mayotte (articles 6 et 8 de la proposition de loi organique). La création de ces sièges supplémentaires prendrait effet au prochain renouvellement des séries auxquelles ces collectivités sont rattachées. Par ailleurs, le siège de sénateur de l'ancien territoire des Afars et des Issas, inoccupé depuis 1980, serait supprimé (article 7 de la proposition de loi organique).

Il convient de souligner que la proposition de loi organique prévoit la codification des dispositions organiques relatives aux élections sénatoriales dans les collectivités d'outre-mer. Seules les dispositions législatives de nature ordinaire ont pu être intégrées dans le code électoral par les ordonnances du 20 août 1998 et du 19 avril 2000. L'état du droit en vigueur dans les collectivités d'outre-mer sera ainsi rendu plus cohérent et plus accessible.

3. La définition d'un meilleur équilibre entre le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle

a) L'extension du scrutin majoritaire

Les articles 5 et 6 de la proposition de loi portant réforme de l'élection des sénateurs proposent de revenir à un meilleur équilibre entre les modes de scrutin applicables, en relevant le seuil d'application du scrutin majoritaire. Il serait désormais applicable dans les départements ayant jusqu'à trois sièges de sénateurs contre deux actuellement. En tenant compte de la création de nouveaux sièges de sénateurs, la réforme proposée ne conduit pas à réduire considérablement le champ d'application du scrutin proportionnel, mais à rééquilibrer les deux modes de scrutin.

Depuis la loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000, la représentation proportionnelle s'applique dans cinquante départements pour l'élection de 212 sénateurs et pour l'élection des 12 sénateurs représentant les Français de l'étranger, soit 70 % des sénateurs. Si l'effectif du Sénat était porté à 346 membres conformément à la proposition de loi organique et à seuil inchangé, elle concernerait 245 sénateurs, soit 74 % d'entre eux. En abaissant son seuil d'application, elle concernerait 180 sénateurs soit 52 % d'entre eux. En tenant compte des propositions de notre commission de supprimer quatre sièges dans les départements, elle s'appliquerait à 177 sénateurs.

Ce nouvel équilibre entre les deux modes de scrutin tend à maximiser leurs effets positifs respectifs et à permettre au Sénat de mieux assurer son rôle de représentant des collectivités territoriales. Ainsi, le scrutin majoritaire et la représentation proportionnelle pourront respectivement assurer une représentation satisfaisante des territoires les moins peuplés et de ceux à forte densité de population. Les règles électorales retenues permettraient la sauvegarde d'une certaine égalité entre les collectivités territoriales, au bénéfice des plus fragiles d'entre elles.

b) L'absence de remise en cause de la progression vers la parité

Certains ont pu mettre en doute la constitutionnalité du relèvement du seuil d'application du scrutin majoritaire en estimant qu'il réduirait le champ d'application de la parité et méconnaîtrait ainsi le cinquième alinéa de l'article 3 de la Constitution introduit par la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999 et selon lequel : « La loi favorise l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives ». En effet, l'obligation de parité ne s'applique que dans les départements où l'élection a lieu à la représentation proportionnelle, les listes devant respecter une alternance stricte des candidats de chaque sexe depuis la loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives.

Le Sénat demeure peu féminisé. Il compte aujourd'hui trente-six femmes, soit 11,2 % de son effectif. Sur ces trente-six femmes, vingt-deux ont été élues ou réélues en septembre 2001, lors de la première application de la loi du 6 juin 2000. Le recul du champ d'application de la représentation proportionnelle peut légitimement susciter une certaine inquiétude du point de vue de l'exigence constitutionnelle.

Toutefois, comme le souligne Mme Gisèle Gauthier, rapporteur de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat (9), une aggravation de la situation existante n'est pas à craindre et la parité pourrait encore progresser. En effet, il convient de garder à l'esprit deux éléments importants. Tout d'abord, le mode de scrutin en vigueur n'a été utilisé qu'une fois, en 2001, sur la série B. Les séries C et A, ont été respectivement renouvelées en 1995 et en 1998, lorsque la représentation proportionnelle ne s'appliquait qu'à partir de cinq sièges par département et sans obligation de parité sur les listes. En outre, l'accroissement envisagé de l'effectif des sénateurs profite essentiellement aux départements relevant de la représentation proportionnelle. Cela permet à Mme Gisèle Gauthier de conclure : « Il apparaît que les effets potentiellement négatifs, au regard de la parité, de la nouvelle ligne de partage entre les modes de scrutin, devraient se trouver en partie compensés par l'accroissement de l'effectif du Sénat. »

L'inconstitutionnalité du relèvement du seuil d'application n'apparaît pas fermement établie au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Selon une jurisprudence traditionnelle et de portée générale, celui-ci considère qu'il est loisible au législateur de modifier des textes ou de les abroger en leur substituant de nouvelles dispositions à condition que ce pouvoir n'aboutisse pas à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. Le relèvement du seuil d'application des règles de la proportionnelle ne saurait priver de garanties légales l'objectif constitutionnel de « parité ». Celui-ci continuera en effet à être garanti par l'existence de la règle de l'alternance dans les départements comptant quatre sénateurs et plus.

Dans sa décision du 3 avril 2003 (10) sur la loi relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques, le juge constitutionnel a eu pour la première fois à statuer sur la constitutionnalité de dispositions électorales au regard de l'objectif de parité. Il a jugé que le nouveau mode de scrutin européen prévu par le législateur n'avait ni pour objet, ni pour effet de réduire la proportion de femmes élues en France au Parlement européen, en soulignant que la règle de l'alternance avait été consacrée. Cette jurisprudence accréditerait l'idée que, lorsque le législateur a fixé des garanties pour assurer le respect d'une exigence de caractère constitutionnel, il ne peut, par la suite, les supprimer ou les modifier qu'à la condition de les remplacer par des garanties d'une efficacité équivalente. Même si ces garanties ne sont pas prévues dans les textes proposés, plusieurs observations peuvent être formulées.

La situation n'est pas comparable à celle de la réforme du mode de scrutin européen, puisqu'il ne s'agissait pas alors de substituer un scrutin à un autre, mais de conserver la représentation proportionnelle en redéfinissant les contours de la circonscription dans laquelle elle allait s'appliquer. La règle de l'alternance pouvait alors être aisément conservée.

En outre, le Conseil constitutionnel accepte qu'il soit dérogé au principe d'égalité du suffrage au nom d'un motif d'intérêt général ou d'une exigence constitutionnelle. En l'occurrence, le relèvement du seuil d'application du scrutin proportionnel est justifié par la volonté de définir un meilleur équilibre entre deux modes de scrutin afin de permettre une meilleure représentation des collectivités territoriales par le Sénat.

Enfin, il convient de souligner que le juge constitutionnel, en matière électorale, s'est toujours refusé à devenir un juge de l'opportunité des dispositions retenues par le législateur, estimant à juste titre que la Constitution ne lui conférait pas un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement et qu'il ne lui revenait donc pas de rechercher si l'objectif que s'était assigné le législateur aurait pu être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues ne semblaient pas manifestement inappropriées à l'objectif poursuivi.

*

* *

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente de la délégation aux droits des femmes, après avoir remercié le président Pascal Clément d'avoir saisi la délégation, a expliqué que celle-ci exprimait des réserves sur la conformité des propositions de lois sénatoriales à l'objectif constitutionnel de la parité énoncé à l'article 3 de la Constitution. Elle a rappelé que cet article, issu de la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999, dispose que la loi favorise l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives et que, sur ce fondement, ont été adoptées des lois qui ont fait progresser la parité. Regrettant que la portée de ces réformes soit restée modeste lors des élections législatives, elle a relevé que des avancées significatives avaient été obtenues lors des élections municipales et sénatoriales de 2001 et que la réforme avait contribué à abaisser la moyenne d'âge du Sénat. Elle a expliqué qu'à rebours, le rétablissement du scrutin majoritaire, au détriment du scrutin proportionnel, dans les départements élisant trois sénateurs, aurait des effets défavorables sur la parité, s'appuyant sur la comparaison entre le résultat du renouvellement partiel du Sénat de septembre 2001, lors duquel 20 % des élus, soit 15 sénateurs sur 75, étaient des femmes, alors que, en 1998 par exemple, une seule femme avait été élue sur les 78 sénateurs élus dans les 26 départements élisant trois sénateurs. Elle a donc fait observer que la délégation aux droits des femmes, à l'instar du ministre délégué aux libertés locales, s'interrogeait sur la compatibilité de la proposition de loi avec l'article 3 de la Constitution, ajoutant qu'elle souhaitait que, sur le fondement du rôle qui leur était dévolu au titre de l'article 4 de la Constitution, les partis politiques veillent à mettre activement en œuvre l'objectif de la parité.

M. Bernard Roman, s'exprimant au nom du groupe socialiste, s'est tout d'abord élevé contre l'idée communément admise, selon laquelle l'Assemblée nationale devrait s'abstenir de se prononcer sur les modifications du mode d'élection du Sénat. Il a estimé au contraire que les députés avaient le devoir d'intervenir lorsque était en cause l'équilibre général des institutions, comme l'a fait la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale.

Il a exprimé que, si la réforme était proposée par des sénateurs et non par le Gouvernement, c'était parce que la forteresse du palais du Luxembourg était assiégée, à la fois par une décision du Conseil constitutionnel, par l'opinion publique, par une partie de la majorité ainsi que la quasi-totalité de l'opposition et que, dès lors, ses occupants avaient entrepris de combler de l'intérieur les fissures qui affaiblissent une institution qu'il a qualifiée de « temple du conservatisme ». Il a insisté sur le fait que les avancées contenues dans ces propositions de loi ne sauraient en masquer les aspects inacceptables. Au nombre des avancées, il a cité, en premier lieu, la réduction de la durée du mandat des sénateurs à six ans, chiffre déjà élevé au regard des règles prévalant à l'étranger, mais plus conforme aux évolutions institutionnelles françaises. Il a évoqué, en deuxième lieu, l'abaissement relatif de l'âge minimal requis pour devenir sénateur, tout en regrettant qu'il ne soit pas aligné sur celui exigé pour être candidat à la présidence de la République, à savoir 23 ans, avant de mentionner, en troisième lieu, le renouvellement du Sénat par moitié, lui préférant toutefois un renouvellement global qui interviendrait à la suite des élections municipales, 95 % des délégués au collège électoral sénatorial étant constitué d'élus municipaux.

S'agissant des aspects qu'il a jugés inacceptables de la réforme proposée, il a tout d'abord cité l'accroissement du nombre de sénateurs, en rappelant que les travaux préparatoires de la Constitution de la Ve République mettaient l'accent sur le respect d'un rapport de forces entre députés et sénateurs, lequel doit notamment se traduire par une proportion de deux tiers/un tiers au sein du Congrès, déplorant que cet équilibre soit remis en cause. Il a jugé que cette atteinte à la règle intéressait, plus que l'Assemblée nationale, l'ensemble des institutions et qu'était posé en l'occurrence un vrai problème de légitimité. Il a donc suggéré une répartition différente du nombre de sièges de sénateurs, à effectif constant, qui satisferait néanmoins l'objectif de respect des évolutions démographiques.

Il a ensuite fait valoir que la proposition de réforme du mode d'élection des sénateurs était tout aussi inacceptable, se félicitant à cet égard des travaux de la délégation aux droits des femmes. Il a estimé qu'en modifiant la Constitution pour y inscrire l'objectif de la parité, le législateur avait entendu, par un geste solennel, affirmer clairement un nouveau principe constitutionnel et qu'il était, de ce fait, inacceptable de soutenir une réforme qui le bafouait. Il a rappelé, en écho aux propos de la présidente de la délégation aux droits des femmes, que les élections sénatoriales partielles de 2001 avaient représenté une avancée sans précédent au regard de la parité et que le juge constitutionnel ne saurait accepter une loi méconnaissant un principe inscrit dans la Constitution avec l'accord de toutes les sensibilités politiques. Il a donc proposé, au nom du groupe socialiste, soit d'en rester au système actuel, soit d'étendre encore le champ d'application du scrutin proportionnel.

Il a enfin dénoncé l'absence de réforme du corps électoral sénatorial, alors même que, dans sa décision du 6 juillet 2000, le Conseil constitutionnel avait affirmé que la représentation de chaque catégorie de collectivités territoriales devait tenir compte de la population qui y résidait afin de respecter le principe d'égalité devant le suffrage. Il s'est donc étonné qu'aucune réforme de la désignation des délégués municipaux au collège électoral sénatorial ne soit proposée, alors que certains sénateurs représentent 70 000 habitants, tandis que d'autres en représentent 300 000. Rappelant que le Conseil constitutionnel s'était opposé à la fixation d'un seuil d'un délégué pour 300 habitants, il a proposé de prévoir un seuil à 400 ou à 500 habitants.

Il a souhaité que l'Assemblée nationale saisisse l'occasion qui lui était offerte de rééquilibrer le fonctionnement des institutions, estimant qu'il s'agissait d'un devoir dépassant les clivages politiques, à l'heure où le point d'équilibre entre les deux chambres se déplace dangereusement au profit du Sénat, comme en témoigne, par exemple, la priorité d'examen que la Constitution lui a récemment attribuée pour les textes relatifs à l'organisation des collectivités territoriales.

Le président Pascal Clément, tout en saluant la pertinence de l'argument tenant à l'équilibre du rapport entre les deux chambres au sein du Congrès, a néanmoins fait observer que le nombre de députés avait été accru en 1985 et que, malgré l'augmentation du nombre de sénateurs prévue par la proposition de loi organique, ce rapport demeurait plus favorable à l'Assemblée nationale que celui qui préexistait à la réforme de 1985 ; il a ainsi observé que les sénateurs représentaient 40 % du Congrès en 1985 contre 37 % après l'adoption de la réforme proposée.

Mme Valérie Pecresse a souligné que, même si l'on ne pouvait considérer un mode de scrutin comme défavorisant, par lui-même, l'élection des femmes dans les assemblées politiques, la réforme du mode d'élection des sénateurs soulevait néanmoins une difficulté au regard de l'article 3 de la Constitution. Après avoir mis en relief les éléments de fait dont le Conseil constitutionnel pourrait tenir compte, elle a jugé que la réduction de la place du scrutin proportionnel allait objectivement à l'encontre d'un accès plus égalitaire des femmes et des hommes aux fonctions électives. Elle s'est demandée si un système de sanctions financières ne pourrait être prévu pour favoriser les candidatures féminines dans les départements dont les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire.

M. René Dosière a regretté que les propositions de loi soumises au vote de l'Assemblée nationale n'engagent pas une véritable réforme de l'institution sénatoriale, considérant qu'elles visaient davantage à restaurer son image qu'à résoudre des problèmes de fond. Il a estimé que la réduction de la durée du mandat sénatorial de 9 à 6 ans était un progrès ; en revanche, il a jugé insuffisant l'abaissement à 30 ans de l'âge d'éligibilité des sénateurs, observant d'ailleurs que ceux-ci étaient désignés par des élus locaux eux-mêmes éligibles dès l'âge de 18 ans. En réponse au rapporteur, il a admis que l'âge moyen des sénateurs n'était pas aussi élevé qu'on pourrait le penser, mais a considéré qu'il ne s'agissait pas du seul critère à prendre en compte pour apprécier la représentativité d'une institution : évoquant la répartition des élus par tranche d'âge, il a relevé qu'un sénateur sur quatre avait aujourd'hui plus de 70 ans, ce qui n'est le cas que d'un député sur vingt-cinq. Il a jugé, par ailleurs, que deux aspects de la réforme proposée étaient inadmissibles. Il a cité, en premier lieu, l'augmentation du nombre de sièges, qui n'est rendue nécessaire par aucune obligation constitutionnelle, puisque, si le Conseil constitutionnel a demandé que les évolutions démographiques soient prises en compte pour la répartition des sièges entre les départements, il n'avait pas pour autant préconisé la création de sièges supplémentaires, cette solution étant par ailleurs coûteuse pour les finances publiques. Il a contesté, en second lieu, la baisse du nombre de sénateurs élus au scrutin proportionnel, qui constitue une régression au regard de l'exigence constitutionnelle d'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives. Il a précisé que, malgré la hausse du nombre de sièges de sénateurs, 180 d'entre eux seulement seraient élus demain selon ce mode de scrutin, contre 224 si la loi n'était pas modifiée.

M. Jean-Jack Queyranne a considéré que la diminution de la durée du mandat sénatorial mettait fin à un archaïsme, mais que la réforme laissait de côté des questions importantes et constituait, par certains aspects, une régression. Il a rappelé qu'une augmentation du nombre de sièges avait été proposée sous la précédente législature pour tenir compte des évolutions démographiques et que le Sénat s'y était fermement opposé, alors que cette augmentation était plus modeste que celle qui est prévue aujourd'hui. Il a également cité le rapport du groupe de réflexion sur l'institution sénatoriale du 2 juillet 2002 qui n'envisageait pas une augmentation du nombre de sièges au-delà de quelques unités. Il a donc jugé que la position actuelle du Sénat était contradictoire au regard de ses positions antérieures. S'agissant du mode de scrutin, il a rappelé que le nombre de sénatrices était passé de 5 à 22 lors du dernier renouvellement grâce à la proportionnelle, seules 2 femmes ayant été élues au scrutin majoritaire sur les 28 sièges à pourvoir, et en a déduit que la réforme proposée était contraire à l'article 3 de la Constitution. Il a rappelé que le groupe de réflexion avait également souhaité une meilleure prise en compte du fait urbain dans la composition du collège électoral du Sénat, ce qui aurait dû conduire à accroître le nombre de délégués des conseils municipaux des villes. Il a considéré que l'absence de dispositions de cette nature ne pourrait que perpétuer le déséquilibre qui affecte la représentativité du Sénat et donc sa légitimité.

M. Guy Geoffroy s'est élevé contre le discours qui consiste à rendre indissociable le combat en faveur de la parité de celui qui est mené pour l'instauration de la représentation à la proportionnelle. Refusant un tel amalgame, il a jugé que le scrutin à la proportionnelle présentait de nombreux défauts, notamment lorsqu'il était appliqué dans des petites circonscriptions où le nombre de sièges à pourvoir est inférieur à quatre. Plaidant en conséquence pour un système qui serait susceptible de préserver la parité tout en conservant la personnalisation indispensable de l'élection dans les petites circonscriptions, il s'est déclaré favorable à l'instauration d'un scrutin de liste majoritaire.

Mme Brigitte Barèges a jugé indispensable de préserver les acquis de la parité, compte tenu du progrès que représente pour la vie politique l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électifs. Elle s'est donc demandée s'il ne conviendrait pas, soit de conserver le dispositif existant en maintenant inchangé le seuil d'application de la représentation proportionnelle, soit d'adopter un dispositif s'inspirant des suggestions de M. Guy Geoffroy.

Sur ce point, le président Pascal Clément a suggéré qu'une réflexion soit menée sur la possibilité d'instaurer un scrutin de liste obligatoire dans les circonscriptions élisant moins de quatre sénateurs. À l'inverse de la proposition faite par M. Geoffroy, il a jugé souhaitable que le système conserve une certaine souplesse en autorisant le panachage, faculté dont M. Bernard Roman a considéré qu'elle risquait de jouer au détriment de la parité.

M. Jean-Jack Queyranne a observé que la proposition suggérée par M. Guy Geoffroy aurait des conséquences particulièrement contraignantes dans les départements élisant deux ou trois sénateurs puisqu'elle y rendrait obligatoire l'élection d'une ou deux femmes.

M. René Dosière a indiqué que, s'agissant du scrutin municipal, la parité n'était exigée que par groupe de six candidats de la même liste, à la différence du scrutin prévu pour les élections régionales, qui impose le respect de l'alternance entre les hommes et les femmes et ce, tant au premier qu'au second tour. Il a considéré que l'application au scrutin sénatorial de dispositifs tendant à garantir le respect de la parité en cas de fusion de listes ne soulevait pas de difficulté majeure et souhaité, en conséquence, que l'Assemblée nationale élabore des dispositions en ce sens.

M. Christian Decocq a émis le souhait que l'Assemblée nationale parvienne à un équilibre satisfaisant entre le nécessaire renforcement de la présence des femmes au Sénat et la prise en compte de situations politiques locales anciennes et légitimes qu'une application excessive de la parité pourrait perturber tout en suscitant l'incompréhension des électeurs concernés.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

-  La réforme proposée étant largement positive, il conviendrait, si l'on veut qu'elle aboutisse, de ne pas se livrer à une surenchère. Le principe d'efficacité et de réalité doit guider le dépôt des amendements sur ces textes.

-  Dans sa décision du 6 juillet 2000 sur la loi relative à l'élection des sénateurs, le Conseil constitutionnel a validé le régime de désignation des délégués municipaux. Il a en effet considéré que, si le nombre des délégués d'un conseil municipal devait être fonction de la population de la commune et si, dans les communes les plus peuplées, des délégués supplémentaires, choisis en dehors du conseil municipal, pouvaient être élus par lui pour le représenter, c'était à la condition que la participation de ces derniers au collège sénatorial reste minoritaire par rapport aux élus locaux et conserve un caractère de correction démographique. Il a censuré les dispositions tendant à ce que des délégués supplémentaires non titulaires d'un mandat municipal prennent une part substantielle au sein du collège des électeurs sénatoriaux et a considéré que l'article 24 de la Constitution impliquait une représentation diversifiée des communes et un poids prépondérant des élus locaux.

-  S'agissant de la création de nouveaux sièges de sénateurs, la réforme proposée, en intégrant la suppression de quatre sièges, est identique à celle que le Gouvernement de M. Lionel Jospin avait soumise au Parlement en 2000.

-  Il n'est pas facile d'imposer la parité dans le cadre du scrutin majoritaire : soit les listes sont bloquées et on aboutit à un scrutin de liste majoritaire, soit on continue d'autoriser le panachage et l'obligation de parité perd de son poids. Dans un souci d'efficacité et d'intelligibilité de la loi, mieux vaut ne pas changer les règles applicables à la présentation des candidats dans le cadre du scrutin majoritaire.

*

* *

Après avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. Jean-Marc Ayrault sur les deux propositions de loi, la Commission a examiné les articles de celles-ci.

EXAMEN DES ARTICLES
DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE (N° 936)

Article 1er

(art. L.O. 275 du code électoral)


Réduction de la durée mandat sénatorial à six ans

Cet article donne une nouvelle rédaction à l'article L.O. 275 du code électoral, afin d'abaisser la durée du mandat sénatorial de neuf à six ans.

Rappelons qu'en vertu de l'article 25 de la Constitution, la durée des pouvoirs de chacune des assemblées relève de la loi organique. S'agissant du Sénat, elle figure dans une loi organique relative au Sénat dont l'adoption nécessite son accord.

1. Une durée qui trouve son origine sous la Troisième République

La longueur du mandat de sénateurs a pour corollaire le principe du renouvellement partiel du Sénat. L'article L.O. 276 du code électoral prévoit ainsi que la seconde chambre se renouvelle par tiers, son effectif étant divisé en trois séries A, B et C d'importance relativement égale.

Comme le souligne M. François Robbe (11), l'origine du mandat de neuf ans et du renouvellement par tiers est à rechercher dans les travaux préparatoires des lois constitutionnelles de 1875, et en particulier dans le premier rapport rédigé en 1874 par Antonin Lefèbre Pontalis, au nom de la Commission des trente (12). Les monarchistes, qui pensaient que les sénateurs élus en 1875 seraient les meilleurs défenseurs des intérêts conservateurs, souhaitaient en conséquence que leur mandat se prolonge le plus longtemps possible. Dans l'hypothèse où la royauté ne pourrait être restaurée avant la fin de la présidence du Maréchal de Mac Mahon, il convenait qu'une institution demeure pour défendre les intérêts du trône. Ainsi la durée du mandat des sénateurs fut fixée à neuf ans. En outre, pour éviter que le Sénat ne bascule brutalement dans le camp des républicains, il fut décidé qu'il serait renouvelé par tiers.

La longueur du mandat sénatorial et le principe du renouvellement partiel ne furent pas remis en cause par les républicains en 1884 et, jusqu'en 1940, les membres de la seconde assemblée furent élus pour un mandat de neuf ans, renouvelable par tiers tous les trois ans. La loi organique du 23 septembre 1948, relative à l'élection des conseillers de la République, réduisit la durée des mandats desdits conseillers à six ans et adopta le principe d'un renouvellement par moitié.

En 1958, la question de la durée du mandat des sénateurs fut peu évoquée au cours des travaux préparatoires de la Constitution. Dès l'origine, il fut décidé que cette question serait réglée par une loi organique. Michel Debré, qui dans un premier temps avait part de sa préférence pour un mandat de neuf ans renouvelable par tiers, opta ensuite pour une durée de six ans avec un renouvellement par moitié. M. François Luchaire fit observer qu'un mandat de neuf ans donnerait plus d'autorité aux membres de la seconde chambre appelés à jouer un rôle plus important que les conseillers de la République. Les articles 2 et 3 de l'ordonnance organique du 15 novembre 1958 renouèrent ainsi avec le mandat de neuf ans et le renouvellement par tiers.

Ces deux règles, au même titre que le principe de la représentation des collectivités territoriales, contribuent à la spécificité de la seconde chambre et lui permettent de cultiver une manière différente d'appréhender les problèmes, propre à sa fonction d'assemblée modératrice.

La durée du mandat sénatorial favorise l'indépendance des sénateurs par rapport aux mouvements de l'opinion publique et des partis politiques. Le cadre temporel des sénateurs est partiellement déconnecté de celui du Gouvernement et des députés, dont l'action s'inscrit dans la même échéance quinquennale. En outre, du fait du renouvellement par tiers, les élections sénatoriales, bien qu'elles puissent parfois avoir valeur de test, ne sanctionnent pas la réussite ou l'échec d'une politique. Les sénateurs peuvent ainsi bénéficier de davantage de recul que les députés dans leurs travaux. Grâce à la durée du mandat et au renouvellement partiel, le Sénat est marqué par une continuité que l'on ne retrouve pas à l'Assemblée nationale. Celle-ci est renforcée par le principe de la représentation des collectivités territoriales qui favorise la constitution d'une assemblée enracinée, liée à des réseaux locaux de solidarités et d'influences qui favorisent la réélection des sénateurs sortants.

2. Une réduction justifiée

Toutefois, l'actuelle durée du mandat sénatorial est excessive. Le « novennat » apparaît de plus en plus anachronique au regard de la périodicité des élections démocratiques contemporaines. La durée du mandat des sénateurs français fait figure d'exception au regard de celle des membres des secondes chambres des pays étrangers, qui varie entre quatre et six ans. Seuls les membres des secondes chambres du Liberia et du Maroc ont une durée de mandat similaire.

Comme on l'a souligné précédemment, la durée du mandat des sénateurs a été fixée sous la Troisième République de façon à être plus longue que celle du Président de la République. En 1958, cette durée a été reprise pour construire un équilibre avec le mandat de député, de cinq ans, et celui du président de la République, de sept ans. L'instauration du quinquennat pour le mandat présidentiel a modifié cet état des choses. La durée du mandat sénatorial n'est plus justifiée au nom de l'équilibre institutionnel.

En outre, il importe de réduire le décalage entre la durée du mandat sénatorial et celle des mandats locaux fixée à six ans. En effet, le décalage actuel ne permet pas à certains élus locaux de participer à la désignation des sénateurs. Au cours d'un mandat, un tiers des conseillers municipaux n'est pas appelé à participer aux élections sénatoriales. À titre d'exemple, les membres des conseils municipaux élus en 1995 dans les communes des départements de la série B n'ont jamais participé à la désignation des sénateurs.

La réduction du mandat sénatorial à six ans apparaît particulièrement opportune. Associée au maintien du principe d'un renouvellement partiel du Sénat, elle ne remettrait pas en cause les avantages liés au novennat tout en favorisant une meilleure représentation des collectivités territoriales. En outre, elle fait l'objet d'un consensus, les parlementaires de tout bord y étant favorables.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 2

(art. L.O. 276 du code électoral)


Renouvellement du Sénat par moitié et dispositions transitoires

Cet article donne une nouvelle rédaction à l'article L.O 276 du code électoral pour fixer le principe du renouvellement du Sénat par moitié, en deux séries, 1 et 2, d'importance approximativement égale (paragraphe I). Cette réforme sera effective à compter de 2010 (paragraphe III). Entre temps, des dispositions transitoires sont prévues pour réduire de manière progressive la durée du mandat sénatorial et instaurer le renouvellement par moitié du Sénat (paragraphe II).

1) La substitution d'un renouvellement par moitié au renouvellement par tiers

Comme on l'a souligné précédemment, le principe du renouvellement partiel du Sénat appartient à la tradition parlementaire française depuis 1875 et n'a jamais été remis en cause. Il est indirectement consacré par l'article 32 de la Constitution relatif à l'élection des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Le principe du renouvellement partiel contribue à construire la spécificité du Sénat. Son effet de « lissage politique » est source de stabilité de l'institution sénatoriale.

L'article L.O. 276 du code électoral prévoit un renouvellement par tiers du Sénat, dont l'effectif est réparti en trois séries A, B, C d'importance approximativement égale, suivant le tableau n° 5 annexé au code électoral.

La série A compte aujourd'hui 102 sièges : 96 sièges de sénateurs élus dans les départements, 1 siège pour la Polynésie française, 1 siège pour Wallis-et-Futuna et 4 sièges de sénateurs représentant les Français établis hors de France.

La série B compte 103 sièges : 97 sièges de sénateurs élus dans les départements, 1 siège pour la Nouvelle-Calédonie, 4 sièges de sénateurs représentant les Français établis hors de France, le siège inoccupé de l'ancien territoire des Afars et des Issas.

La série C compte 117 sièges : 111 sièges de sénateurs élus dans les départements, 1 siège pour Mayotte et 1 siège de Saint-Pierre-et-Miquelon et 4 sièges de sénateurs représentant les Français établis hors de France.

RÉPARTITION ACTUELLE DES SIÈGES PAR SÉRIE

Série A

Série B

Série C

Représentation des départements (1)

Ain à Indre

95

Indre-et-Loire à Pyrénées-Orientales

94

Bas-Rhin à Yonne

62

Guyane

1

Réunion

3

Essonne à Yvelines

45

__

__

Guadeloupe, Martinique

4

96

97

111

Représentation des collectivités d'outre-mer et des Français établis hors de France (2)

Polynésie française

1

Nouvelle-Calédonie

1

Mayotte

1

Îles Wallis et Futuna

1

Territoire des Afars et Issas

1

Saint-Pierre-et-Miquelon

1

Français établis hors de France

4

Français établis hors de France

4

Français établis hors de France

4

102

103

117

(1) Le tableau n° 5 a été modifié par l'article 2 de la loi n° 66-504 du 12 juillet 1966, l'article unique de la loi n° 76-644 du 16 juillet 1976, l'article 1er de la loi n° 76-1219 du 28 décembre 1976 et l'article 10 de la loi n° 86-958 du 13 août 1986.

(2) Les dispositifs figurant dans ce tableau résultent du tableau n° 2 fixant la répartition des sièges des sénateurs entre les séries annexé à l'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l'ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l'élection des sénateurs, des articles 3 et 4 de la loi n° 61-818 du 29 juillet 1961, de l'article 4 de la loi n° 76-1219 du 28 décembre 1976, de l'article 2 de la loi n° 83-390 du 18 mai 1983 et de l'article L. 334-3 du code électoral, introduit par l'article 9 de la loi n° 86-958 du 13 août 1986.

Parallèlement à l'abaissement de la durée du mandat sénatorial à six ans prévu à l'article premier de la proposition de loi organique, trois formes de renouvellement du Sénat étaient envisageables : le renouvellement intégral, le maintien du renouvellement par tiers ou le renouvellement par moitié. Le dispositif retenu, à savoir le renouvellement par moitié tous les trois ans, semble être le plus adéquat.

2. Les dispositions transitoires

Le renouvellement par moitié du Sénat ne sera complètement effectif qu'à partir de 2010. L'abaissement de la durée du mandat sénatorial à six ans, amorcée dès 2004, deviendrait une réalité pour l'ensemble des sénateurs en 2013. La réforme ne provoquerait aucune réduction de la durée des mandats en cours. Le paragraphe II de cet article prévoit des dispositions provisoires pour assurer une transition en douceur

a) Le fractionnement de la série C

Le paragraphe II du présent article prévoit qu'en 2004, une partie des sénateurs de l'actuelle série C, renouvelable à cette date, serait élue pour neuf ans, l'autre l'étant implicitement pour six.

À cette fin, la série C serait scindée en deux sections : la première comprendrait les sièges des départements de la série C, du Bas-Rhin à l'Yonne, à l'exception de la Seine-et-Marne ; la seconde, les sièges des départements de l'Ile-de-France et des Antilles ainsi que de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Selon la réforme envisagée, la série C devrait gagner dix sièges en 2004 (un siège supplémentaire pour le Bas-Rhin, le Haut-Rhin, le Var et le Vaucluse dans la première section ; un siège supplémentaire pour la Guadeloupe, le Val d'Oise, les Yvelines et Mayotte, ainsi que deux sièges supplémentaires pour la Seine-et-Marne, dans la deuxième section). Elle serait donc composée de 127 sièges.

123 sièges seraient à répartir avant le renouvellement partiel de 2004, les quatre sièges des sénateurs représentant les Français établis hors de France faisant l'objet d'un tirage au sort spécifique ultérieur à ce renouvellement (voir commentaire de l'article 3).

La section Bas-Rhin à Yonne serait ainsi composée de 62 sièges et la section Ile-de-France, Antilles, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon comprendrait 61 sièges.

Durant la première semaine d'octobre 2003, le Bureau du Sénat, en séance publique, serait chargé de tirer au sort la section de la série C dont la durée du mandat sera maintenue à neuf ans.

La procédure du tirage au sort et l'intervention du Bureau (13) permettront d'éviter tout arbitraire. Il faut souligner que la procédure de tirage au sort est régulièrement utilisée dans l'activité du Sénat et prévue dans son règlement, par exemple pour le choix des scrutateurs appelés à dépouiller le scrutin lors de l'élection du président du Sénat, du vote pour des nominations personnelles... Le Bureau du Sénat a déjà dans le passé effectué des tirages au sort de manière exceptionnelle. Il avait ainsi déterminé par cette procédure la date de renouvellement des séries A, B, C lors de la séance publique du 9 juin 1959.

Enfin, il convient de relever que le maintien, à titre transitoire, d'une durée de neuf ans pour une partie des sénateurs de la série C en 2004 est conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui accepte des différences de traitement entre élus placés dans une même situation à condition qu'elles soient limitées dans le temps et justifiées par des considérations d'intérêt général en rapport avec l'objet de la loi concernée.

b) La période transitoire et la composition des futures séries 1 et 2

L'organisation de la période transitoire et la composition des futures séries 1 et 2 est déterminée par la lecture combinée du présent article et de l'article 2 de la proposition de loi portant réforme de l'élection des sénateurs.

En 2004, une section des sénateurs de la série C serait élue pour six ans et l'autre pour neuf. En 2007, la série A serait intégralement renouvelée pour six ans. En 2010, l'ancienne série B et les sénateurs de l'ancienne série C élus pour six ans au renouvellement partiel de 2004, seraient renouvelés au sein de la nouvelle série 1 pour six ans. En 2013, l'ancienne série A et les sénateurs de l'ancienne série C élus pour neuf ans en 2004, seraient renouvelés au sein de la nouvelle série 2 pour six ans.

Les deux séries 1 et 2 (prenant en compte six sénateurs représentant des Français établis hors de France) en vigueur à compter de 2010 seraient d'importance approximativement égale.

Selon les résultats du tirage au sort, deux hypothèses sont envisageables. Dans l'hypothèse où la série 1 est composée de la section de la série B comprenant les sièges des sénateurs de l'Ile-de-France et des Antilles ainsi que de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, elle comptera 170 sièges, tandis que la série 2, composée de l'ancienne série A et des sièges des sénateurs de la deuxième section de la série C allant du Bas-Rhin à l'Yonne, à l'exception de la Seine-et-Marne, aura 176 sièges. Dans l'autre hypothèse, la série 1 comptera 171 sièges et la série 2, 175 sièges.

Après avoir rejeté un amendement de M. Bernard Roman prévoyant le renouvellement intégral du Sénat, la Commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 3

(art. 1er et 5 de la loi organique n°83-499 du 17 juin 1983)


Renouvellement de sénateurs représentant les Français
établis hors de France

Cet article modifie la loi organique 83-499 du 17 juin 1983 relative à la représentation au Sénat des Français établis hors de France pour prendre en compte l'abaissement du mandat sénatorial à six ans, à partir de 2004, et l'instauration d'un renouvellement par moitié du Sénat tous les trois ans.

1. La représentation des Français de l'étranger

L'idée d'instituer une représentation spécifique des Français de l'étranger dans la seconde chambre est apparue lors de l'élaboration de la Constitution de la Quatrième République. Les membres des communautés françaises établies en terre étrangère avaient en effet joué parfois un rôle capital dans la libération de la France, qui justifiait une reconnaissance. Les membres de la première Assemblée nationale Constituante élue en octobre 1945 ont tenté d'organiser la représentation des Français établis hors de France au sein de la chambre unique qu'ils entendaient mettre en place, mais ils se sont heurtés à la difficulté pratique d'organiser des élections de députés au suffrage universel direct en terre étrangère. Après le rejet du projet élaboré par la première Assemblée nationale Constituante, il fut possible d'envisager de faire siéger les représentants des Français expatriés au sein de la seconde chambre, élue au suffrage universel indirect.

En application de l'article 6 de la Constitution du 27 octobre 1946, une loi organique datée du même jour, relative à la composition et à l'élection du Conseil de la République, a prévu que cinq conseillers seraient élus par la première chambre pour y représenter les citoyens français résidant à l'étranger. Ces dispositions furent modifiées en 1948 et en 1955 pour prévoir la présentation des candidats par les instances représentatives des Français de l'étranger.

En 1958, sur l'insistance de M. François Luchaire, le principe de la représentation spécifique des Français de l'étranger au sein de la seconde chambre fut introduit dans l'article 24 de la Constitution de la Cinquième République. De 1958 à 1983, le mode de désignation des sénateurs représentant les Français de l'étranger fut proche de celui en vigueur sous la Quatrième République (14). Ils étaient désignés sur présentation du Conseil supérieur des Français de l'étranger (csfe) (15). Le choix des candidats était opéré par les membres élus des deux sections de ce Conseil : la section Afrique d'une part, et la section Amérique, Europe, Levant, Asie, Océanie, d'autre part. Trois sièges étaient attribués à chaque section. Une fois le choix opéré par les sections, le Conseil supérieur, réuni en Assemblée plénière, intervenait pour ratifier ces candidatures. Le choix des candidats était ensuite soumis au Sénat. Dans l'hypothèse où aucune contestation n'était formulée dans un délai d'une heure, les candidats étaient proclamés élus. En revanche, si un groupe composé d'au moins trente sénateurs exprimait son désaccord, le Sénat procédait à l'élection de chaque candidat au scrutin secret et à la majorité simple. Si l'un des candidats n'obtenait pas la majorité des suffrages, l'intégralité de la procédure devait être reprise.

Le mode de désignation des sénateurs représentant les Français de l'étranger était peu satisfaisant. Les lois de mai-juin 1983 ont conservé le principe de leur sélection par le CSFE tout en l'améliorant grandement. La loi du 7 juin 1982 a tout d'abord modifié la composition du Conseil supérieur. Sur 183 membres, le Conseil comprend désormais 150 membres élus au suffrage universel direct, des personnalités qualifiées désignées par le ministère des affaires étrangères, renouvelables par moitié tous les trois ans et les sénateurs représentant les Français de l'étranger. La loi du 18 mai 1983 a organisé l'élection des sénateurs représentant les Français de l'étranger au suffrage universel indirect par le CSFE. Seuls les membres élus de cet organe participent à cette élection et jouent ainsi un rôle similaire à celui des membres des collèges sénatoriaux réunis dans les départements de métropole et les collectivités d'outre-mer. Matériellement, les opérations se déroulent de la façon suivante : le collège électoral se réunit le jour du scrutin au ministère des affaires étrangères, le bureau de vote étant présidé par un conseiller à la cour d'appel de Paris, et l'élection se déroule au scrutin proportionnel selon la règle de la plus forte moyenne.

D'une façon générale, les règles concernant l'élection des sénateurs représentant les Français de l'étranger ont été calquées le plus possible sur celles relatives à la désignation des sénateurs représentant les collectivités territoriales. La loi organique du 17 juin 1983, tout en portant à douze le nombre de sénateurs pour les Français expatriés, leur a étendu les inéligibilités et incompatibilités applicables aux sénateurs territoriaux.

En outre, à l'image des sénateurs représentant les collectivités territoriales, les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont renouvelés par tiers tous les trois ans, quatre d'entre eux étant affectés à chacune des trois séries A,B,C fixées par le tableau n° 5 annexé au code électoral. Les lois de 1983 ont supprimé la distinction entre les sénateurs suivant qu'ils étaient censés représenter les Français de telle ou telle partie du monde. Les dispositions des lois de 1983 ont reçu leur première application en 1986.

2. Les modifications proposées

Le premier paragraphe du présent article tend à compléter l'article premier de la loi organique du 17 juin 1983 pour prévoir la répartition des sénateurs représentant les Français établis hors de France entre les deux nouvelles séries 1 et 2, par groupes de 6 sénateurs. En conséquence, le deuxième paragraphe abroge l'article 5 de la loi organique du 17 juin 1983, qui pose le principe de l'élection de quatre sénateurs des Français établis hors de France à chaque renouvellement partiel. Il est précisé dans le cinquième paragraphe que ces dispositions entreront en vigueur à compter de 2010 comme pour l'ensemble des sénateurs.

Le troisième paragraphe du présent article organise pour sa part la période transitoire. La durée du mandat de deux des quatre sénateurs représentant les Français résidant à l'étranger qui doivent être élus en 2004 sera fixée à neuf ans, leur désignation étant faite par tirage au sort par le Bureau du Sénat dans le mois suivant leur élection. En 2010, les sièges des deux sénateurs élus en 2004 pour six ans seront renouvelés au sein de la nouvelle série 1 et les sièges des deux autres seront soumis à renouvellement en 2013 au sein de la nouvelle série 2.

Le dispositif retenu évite une diminution, même transitoire, de la représentation des Français établis hors de France au Sénat et prend en compte les spécificités de leur élection.

La Commission a rejeté deux amendements de M. Bernard Roman, le premier prévoyant que les sénateurs représentants les Français établis hors de France sont tous élus en même temps et reprenant ainsi le principe du renouvellement intégral pour cette seule catégorie, le second par coordination avec le précédent, prévoyant à titre transitoire que la durée du mandat des sénateurs représentants les Français établis hors de France éligibles en 2007 est fixée à trois ans.

Elle a ensuite a adopté l'article 3 sans modification.

Après l'article 3

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière tendant à prévoir l'élection des sénateurs représentant les Français de l'étranger par un collège composé des membres élus du Conseil supérieur des Français à l'étranger et de délégués supplémentaires élus par les membres élus du Conseil afin d'accroître la représentativité des sénateurs représentant les Français à l'étranger.

Article 4

(art. L.O. 296 du code électoral)


Âge d'éligibilité au Sénat

Cet article modifie le premier alinéa de l'article L.O. 296 du code électoral pour abaisser l'âge d'éligibilité des candidats aux élections sénatoriales de trente-cinq à trente ans.

En vertu de l'article 25 de la Constitution, le régime des inéligibilités et des incompatibilités des parlementaires français relèvent de la loi organique. Pour définir les conditions d'éligibilité applicables aux candidats aux élections sénatoriales, l'article L.O. 296 du code électoral renvoie aux règles applicables pour les candidats aux élections législatives, sauf pour l'âge d'éligibilité qu'il fixe à trente-cinq ans.

L'âge d'éligibilité varie selon les élections, comme le rappelle le tableau ci-dessous :

ÂGE D'ÉLIGIBILITÉ AUX ÉLECTIONS POLITIQUES FRANÇAISES

Mandats électifs

Âge

· Conseiller municipal (art. L. 228 du code électoral)

· Conseiller général (art. L. 194 du code électoral)

· Conseiller régional (art. L. 339 du code électoral)

· Conseiller à l'Assemblée de Corse (art. L. 367 du code électoral)


Dix-huit ans

· Député (art. L.O. 127 du code électoral)

· Président de la République (art. 3-II de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel)

· Député européen (art. 5 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen)

Vingt-trois ans

· Sénateur (art. L.O. 296 du code électoral actuel)

Trente-cinq ans

La fixation d'un âge d'éligibilité plus élevé pour les sénateurs s'inspire du souci de conférer à la seconde chambre un caractère modérateur. Sous la Troisième République, l'âge d'éligibilité était d'ailleurs fixé à quarante ans.

Le seuil d'éligibilité des sénateurs fait l'objet de critiques récurrentes. Il contribue à alimenter l'idée selon laquelle le Sénat serait une assemblée de « vieux » peu en phase avec les aspirations de la société.

Ces critiques méritent certainement d'être relativisées. En effet, la différence entre l'âge moyen des sénateurs et des députés - 61 ans contre 54 ans et huit mois - ne s'explique pas par la différence d'âge d'éligibilité. En effet l'Assemblée nationale ne compte aucun député dont l'âge est compris entre 23 et 30 ans et seulement six députés dont l'âge se situe entre 30 et 35 ans. Ce sont les modalités des élections sénatoriales qui favorisent les candidats âgés, qui ont une plus longue expérience des affaires locales.

En tout état de cause, sans céder à un « jeunisme » de mauvais aloi, on peut dire que l'abaissement de l'âge d'éligibilité pour les élections sénatoriales se justifie. Conformément aux recommandations du groupe de réflexion sur l'institution sénatoriale, le fixer à trente ans permet de maintenir une différence de principe avec l'Assemblée nationale.

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Bernard Roman tendant à abaisser à vingt-trois ans l'âge d'éligibilité des sénateurs, son auteur ayant rappelé que l'âge d'éligibilité à la présidence de la République était également de 23 ans. Le Président Pascal Clément a indiqué qu'il était défavorable à cet amendement compte tenu de la mission constitutionnelle assignée au Sénat consistant à assurer la représentation des collectivités locales, ce qui requiert, à tout le moins, que les candidats possèdent un minimum d'expérience de la vie politique locale. En dépit de l'intervention de M. René Dosière, qui s'est interrogé sur le point de savoir en quoi l'exercice du mandat de sénateur exigeait davantage d'expérience que celui de député, la Commission a rejeté cet amendement.

Puis la Commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5

(art. L.O. 274 du code électoral)


Nombre de sénateurs élus dans les départements

Le premier paragraphe de cet article donne une nouvelle rédaction à l'article L.O. 274 du code électoral pour porter le nombre de sénateurs élus dans les départements de 304 à 326. Son deuxième paragraphe prévoit que l'augmentation du nombre de sénateurs entrera en vigueur au fur et à mesure des renouvellements partiels de l'assemblée : en 2004, le nombre de sénateurs sera de 313, puis de 322 en 2007.

Sur les 322 sièges que compte aujourd'hui le Sénat, 304 sont pourvus dans le cadre des départements, 12 assurent la représentation des Français de l'étranger, 5 celles des collectivités d'outre-mer et un du territoire des Afars et des Issas.

La fixation du nombre de membres de chacune des deux assemblées relève de la loi organique tandis que la répartition des sièges entre les circonscriptions est fixée par la loi ordinaire. Ainsi, si le nombre de sièges de sénateurs des départements est fixé à l'article L.O 274 du code électoral, la répartition de ces sièges figure dans un tableau n° 6 annexé au code électoral. Tandis que cet article augmente globalement le nombre de sièges des départements, l'article 2 de la proposition de loi ordinaire portant réforme de l'élection des sénateurs indique quelle sera leur répartition.

1. L'évolution du nombre de sièges de sénateurs par départements

Les constituants de 1875 n'ont pas choisi d'attribuer le même nombre de sénateurs à chaque département sur le modèle d'une seconde chambre fédérale. Pour autant, ils n'ont pas établi une proportionnalité stricte entre le nombre de sénateurs et la population de chaque département. Le nombre de sénateurs variait de 1 à 5, les départements ruraux étant largement surreprésentés. La réforme de 1884 a permis par la suite de corriger un peu cette inégalité. Au fur et à mesure de la disparition des sénateurs inamovibles, leurs sièges furent redistribués dans les départements les plus peuplés.

Après le régime transitoire de 1946, la loi organique du 23 septembre 1948 s'efforça d'accroître la représentation des départements le plus peuplés ; ceux-ci gagnèrent des sièges, tandis que les départements peu ou moyennement peuplés, comme l'Allier, le Jura ou la Lozère, en perdirent. La loi de 1948 innova en posant pour la première fois une « clé démographique » pour la répartition de sièges. Son article 5 disposait ainsi : « il est attribué à chaque département un siège de conseiller jusqu'à 154 000 habitants et, ensuite, un siège par 250 000 habitants ou fraction de 250 000 habitants. » En dépit des adaptations effectuées, la loi de 1948 a maintenu le principe de la surreprésentation des départements les moins peuplés.

Il semble que les rédacteurs de l'ordonnance du 15 novembre 1958 relative à l'élection ses sénateurs se soient fondés sur la clé de 1948 pour déterminer le nombre de sièges de chaque département. Cependant, la clé de répartition ne fut pas mentionnée dans le texte de l'ordonnance. En 1966, la répartition des sièges entre les départements fit l'objet d'une modification ponctuelle en raison de la réorganisation administrative de la région parisienne. Le chiffre de 150 000 habitants, et non de 154 000, combiné avec celui de 250 000 habitants, fut alors retenu pour répartir les nouveaux sièges.

Les sièges de sénateurs on fait l'objet d'une redistribution globale à la suite de l'adoption des lois du 16 juillet 1976. La clef de répartition de 1966 fut conservée : la seconde chambre qui, en première lecture, avait adopté une clé de répartition avec 154 000 habitants, qui conduisait à trop diminuer la représentation de la Creuse et de Paris, se conforma finalement à la position de l'Assemblée nationale en s'alignant sur le chiffre de 150 000 habitants. En outre, il est intéressant de noter que la commission des lois du Sénat avait prévu un dispositif permettant d'actualiser de façon permanente sa composition. Elle proposa d'introduire dans la loi électorale la clé de répartition des sièges entre les départements et de confier au Gouvernement le soin d'actualiser le nombre de sièges par département en appliquant cette base de calcul aux résultats de chaque recensement. Mais l'Assemblée nationale se montra hostile à cette proposition. Le législateur de 1976 a donc corrigé les dérapages résultant de l'évolution démographique intervenue depuis le début de la Cinquième République en conservant les clés de 1948 telles que légèrement modifiées en 1966, qui favorise les départements peu peuplés.

2. La nécessité d'une réforme

Depuis 1976, le législateur n'a pas tenu compte des évolutions démographiques constatées lors des recensements généraux de la population effectués en 1982, 1990 et 1999. Lorsque l'on confronte la répartition des sièges aux résultats du recensement de 1999, il apparaît clairement que la surreprésentation des départements ruraux s'est accrue dans les années soixante-dix. Dans 7 départements (la Creuse, l'Ariège, le territoire de Belfort, la Lozère, le Cantal, le Gers, le Lot, la Meuse et la Haute Marne) le nombre d'habitants par sénateur est inférieur de plus de 50 % à la moyenne nationale, qui est d'environ d'un sénateur pour 197 981 habitants. À l'opposé dans trois départements (le Var, l'Hérault, la Seine et Marne), le nombre d'habitants par sénateur dépasse la moyenne nationale de plus de 50 %. Dans quarante-sept départements, le nombre d'habitants par sénateur est supérieur ou inférieur à 20 % de la moyenne nationale. Le tableau ci-après fournit une illustration de ces déformations de représentation.

DÉFORMATION DE LA REPRÉSENTATION DES DÉPARTEMENTS AU SÉNAT

Classement du département le moins bien représenté au département le mieux représenté

Département

Population en 1999

Nombre actuel de sénateurs

Nombre d'habitants
pour un sénateur
Moyenne nationale :
197 981

Taux de sous- ou de surreprésentation (en %)

Var

898 400

3

299 467

- 51,26

Hérault

896 400

3

298 800

- 50,92

Seine-et-Marne

1 193 800

4

298 450

- 50,75

Val-d'Oise

1 105 400

4

276 350

- 39,58

Isère

1 094 000

4

273 500

- 38,14

Yvelines

1 354 300

5

270 860

- 36,81

Bouches-du-Rhône

1 835 700

7

262 243

- 32,46

Haute-Garonne

1 046 300

4

261 575

- 32,12

Ain

515 300

2

257 650

- 30,14

Gironde

1 287 300

5

257 460

- 30,04

Bas-Rhin

1 026 100

4

256 525

- 29,57

Oise

766 400

3

255 467

- 29,04

Alpes-Maritimes

1 011 300

4

252 825

- 27,70

Vaucluse

499 700

2

249 850

- 26,20

Maine-et-Loire

732 900

3

244 300

- 23,40

Haut-Rhin

708 000

3

236 000

- 19,20

Réunion

706 300

3

235 433

- 18,92

Nord

2 555 000

11

232 273

- 17,32

Seine-Saint-Denis

1 382 900

6

230 483

- 16,42

Loire-Atlantique

1 134 300

5

226 860

- 14,59

Essonne

1 134 200

5

226 840

- 14,58

Rhône

1 578 900

7

225 557

- 13,93

Drôme

437 800

2

218 900

- 10,57

Ille-et-Vilaine

867 500

4

216 875

- 9,54

Calvados

648 400

3

216 133

- 9,17

Morbihan

643 900

3

214 633

- 8,41

Finistère

852 400

4

213 100

- 7,64

Guadeloupe

422 500

2

211 250

- 6,70

Haute-Savoie

631 700

3

210 567

- 6,36

Gard

623 100

3

207 700

- 4,91

Seine-Maritime

1 239 100

6

206 517

- 4,31

Loiret

618 100

3

206 033

- 4,07

Pas-de-Calais

1 441 600

7

205 943

- 4,02

Moselle

1 023 400

5

204 680

- 3,38

Val de Marne

1 227 300

6

204 550

- 3,32

Hauts-de-Seine

1 428 900

7

204 129

- 3,11

Eure-et-Loir

407 700

2

203 850

- 2,96

Puy-de-Dôme

604 300

3

201 433

- 1,74

Pyrénées-Atlantiques

600 000

3

200 000

- 1,02

Vienne

399 000

2

199 500

- 0,77

Pyrénées-Orientales

392 800

2

196 400

0,80

Dordogne

388 300

2

194 150

1,94

Martinique

381 400

2

190 700

3,68

Vosges

381 000

2

190 500

3,78

Marne

565 200

3

188 400

4,84

Savoie

373 300

2

186 650

5,72

Charente-Maritime

557 000

3

185 667

6,22

Somme

555 600

3

185 200

6,46

Indre-et-Loire

554 000

3

184 667

6,73

Loire

728 500

4

182 125

8,01

Saône-et-Loire

544 900

3

181 633

8,26

Côtes-d'Armor

542 400

3

180 800

8,68

Eure

541 100

3

180 367

8,90

Vendée

539 700

3

179 900

9,13

Aisne

535 800

3

178 600

9,79

Meurthe-et-Moselle

713 800

4

178 450

9,87

Paris

2 125 200

12

177 100

10,55

Haute-Vienne

353 900

2

176 950

10,62

Sarthe

529 900

3

176 633

10,78

Allier

344 700

2

172 350

12,95

Deux-Sèvres

344 400

2

172 200

13,02

Tarn

343 400

2

171 700

13,27

Charente

339 600

2

169 800

14,23

Côte-d'Or

506 800

3

168 933

14,67

Yonne

333 200

2

166 600

15,85

Doubs

499 100

3

166 367

15,97

Landes

327 300

2

163 650

17,34

Manche

481 500

3

160 500

18,93

Loir-et-Cher

315 000

2

157 500

20,45

Cher

314 400

2

157 200

20,60

Guyane

157 200

1

157 200

20,60

Aude

309 800

2

154 900

21,76

Lot-et-Garonne

305 400

2

152 700

22,87

Orne

292 300

2

146 150

26,18

Aube

292 100

2

146 050

26,23

Ardennes

290 100

2

145 050

26,74

Ardèche

286 000

2

143 000

27,77

Mayenne

285 300

2

142 650

27,95

Haute-Corse

141 600

1

141 600

28,48

Alpes-de-Hte-Provence

139 600

1

139 600

29,49

Territoire de Belfort

137 400

1

137 400

30,60

Ariège

137 200

1

137 200

30,70

Aveyron

263 800

2

131 900

33,38

Jura

250 900

2

125 450

36,64

Hautes-Alpes

121 400

1

121 400

38,68

Corse du Sud

118 600

1

118 600

40,10

Corrèze

232 600

2

116 300

41,26

Indre

231 100

2

115 550

41,64

Haute-Saône

229 700

2

114 850

41,99

Nièvre

225 200

2

112 600

43,13

Hautes-Pyrénées

222 400

2

111 200

43,83

Haute-Loire

209 100

2

104 550

47,19

Tarn-et-Garonne

206 000

2

103 000

47,97

Haute-Marne

194 900

2

97 450

50,78

Meuse

192 200

2

96 100

51,46

Gers

172 300

2

86 150

56,49

Lot

160 200

2

80 100

59,54

Cantal

150 800

2

75 400

61,92

Lozère

73 500

1

73 500

62,88

Creuse

124 500

2

62 250

68,56

Le Gouvernement de M. Lionel Jospin a présenté au Sénat, en février 1999, deux projets de loi (organique et ordinaire) tendant à modifier la répartition des sièges de sénateurs entre les départements. Il s'agissait d'appliquer la clé de répartition utilisée depuis 1948 aux résultats du dernier recensement de la population des départements mais également des territoires d'outre-mer. Le Sénat les examina le 16 mars 2000, au lendemain de l'adoption en seconde lecture du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. Il les rejeta en adoptant une question préalable présentée par le rapporteur de la commission des lois, M. Paul Girod, au motif que la réforme proposée conduisait à augmenter le nombre de sièges de sénateurs. Le rapporteur de la commission des lois rappela ainsi en séance que : « La qualité du travail et l'autorité d'une assemblée ne se mesurent pas au nombre de ses membres » et qu'il n'était pas nécessaire d' « augmenter indéfiniment, sous le nez de nos concitoyens qui jugent déjà la classe politique pléthorique, le nombre des sénateurs » (16). Les esprits n'étaient pas encore mûrs.

L'inconstitutionnalité de l'actuelle répartition des sièges de sénateurs entre les départements ne fait plus aujourd'hui aucun doute. Dans sa décision du 6 juillet 2000 relative à la loi reformant le mode de scrutin de l'élection des sénateurs, le Conseil constitutionnel souligne que « les dispositions combinées de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution imposent au législateur de modifier la répartition par département des sièges de sénateurs pour tenir compte des évolutions de la population des collectivités territoriales dont le Sénat assure la représentation » (17). L'année suivante, dans une décision Hauchemaille et Marini, rendue sur une contestation relative à l'organisation des élections sénatoriales de septembre 2001 (18), le Conseil a de nouveau invité le législateur à modifier l'actuelle répartition des sièges entre les départements :

« Considérant qu'il incombait au législateur, en application des dispositions combinées de l'article 6 de la déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution, de modifier la répartition par département des sièges de sénateurs figurant au tableau n° 6 annexé à la partie législative du code électoral, afin de tenir compte des évolutions de la population et des collectivités territoriales dont le Sénat assure la représentation ; que, si le législateur n'a pas procédé à cette modification, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, se prononçant, comme en l'espèce, en application de l'article 59 (c'est-à-dire comme juge électoral de l'élection sénatoriale) et non de l'article 61 de la Constitution, d'apprécier la constitutionnalité des dispositions législatives contenues dans le tableau susmentionné. »

Le juge constitutionnel n'impose pas la recherche d'une proportionnalité absolue entre la population des départements et le nombre de sièges de sénateurs. D'ailleurs, pour les élections sénatoriales, le principe d'égalité de représentation ne saurait s'appliquer de manière aussi rigoureuse que dans le cadre des élections régionales. La rigidité de la circonscription départementale joint à l'effectif assez faible de la seconde chambre limite la marge de manœuvre du législateur. Le juge constitutionnel ne semble pas défavorable à une nouvelle répartition des sièges sur la base de la clé introduite en 1948 et modifiée en 1966, qui conduit par son mécanisme même, à une importante surreprésentation des départements ruraux. La formule utilisée dans sa décision du 6 juillet 2000 semble indiquer que seule l'évolution démographique enregistrée depuis 1976 impose une redistribution des sièges entre les circonscriptions départementales.

3) Les dispositions proposées

La prise en compte de l'évolution démographique des départements pouvait s'effectuer soit à effectif constant, soit en augmentant l'effectif du Sénat. Les sénateurs ont opté pour la seconde solution. Ils ont souhaité appliquer la clé démographique introduite en 1948 et légèrement modifiée en 1966 aux résultats du dernier recensement. Cette méthode aboutit à la création de 25 sièges. Compte tenu de l'augmentation du nombre de sièges des départements et des collectivités d'outre-mer et de la suppression du siège de sénateur représentant le territoire des Afars et des Issas, l'effectif total du Sénat serait porté à 346.

Le nombre de sénateurs, qui était de 300 en 1875, est passé de 309 en 1958 à 322 aujourd'hui, dont 321 sièges effectivement pourvus. Sur la même période, le nombre de députés est passé de 579 en 1958 à 577. Mais cette évolution n'a pas été linéaire puisque notre assemblée comptait 482 sièges en 1962, puis 487 à partir de 1966, 490 à partir de 1972, 491 à partir de 1975 et enfin 577 en 1985. De fait, le différentiel de sièges entre l'Assemblée et le Sénat s'est considérablement accru avec la réforme de 1985. L'augmentation prévue ne modifierait pas fondamentalement le rapport de forces entre les deux assemblées.

L'application de la clé démographique de 1948 aux résultats du recensement de la population de 1999 devrait entraîner la suppression de quatre sièges: un dans la Creuse et trois à Paris. Toutefois, les sénateurs n'ont pas procédé à cette suppression. On peut dès lors s'interroger sur la constitutionnalité du dispositif retenu par le Sénat, car il aboutit à une forte surreprésentation de la Creuse et de Paris. La première, avec 124 470 habitants et 2 sénateurs, bénéficie d'un sénateur de plus que des départements plus peuplés (l'Ariège avec 137 205 habitants, le territoire de Belfort avec 137 408 habitants, les Alpes-de-Haute-Provence avec 139 561 habitants et la Haute-Corse avec 141 603 habitants). Elle a en conséquence le nombre d'habitants par sénateur le plus faible de métropole (62 235). Avec 2 125 246 habitants et 12 sénateurs au lieu de 9, Paris a un sénateur de plus que le Nord, pourtant plus peuplé (2 555 020).

Les auteurs de la proposition de loi font valoir que l'application stricte de la clé démographique utilisée en 1948 aurait dû conduire le Parlement lors de la réforme de 1976 à supprimer trois sièges : un dans la Creuse et deux à Paris. Les lois de 1976 auraient ainsi consacré l'existence d'un cliquet s'opposant à la diminution du nombre de sénateurs et que le Conseil constitutionnel aurait validée. Toutefois, il convient de souligner que le Conseil n'avait pas été saisi en 1976 de la loi ordinaire fixant la répartition des sièges de sénateurs, mais seulement de la loi organique fixant le nouvel effectif du Sénat. Il avait alors pris soin de préciser dans sa décision n° 76-68 DC du 15 juillet 1976 que « n'étant saisi ni de la répartition des sièges de sénateurs entre les départements, ni des règles selon lesquelles cette répartition est opérée, le Conseil constitutionnel ne peut porter d'appréciation que sur la conformité à la Constitution de la fixation du nombre des sénateurs des départements ».

La Commission a rejeté un amendement de M. Bernard Roman, maintenant à 304 le nombre de sénateurs des départements et prévoyant une nouvelle répartition des sièges entre les départements, sur la base d'un quotient de population fixé par la loi et actualisé à l'issue de chaque recensement. Elle a en revanche adopté un amendement du rapporteur fixant le nombre de sièges dans les départements à 322, afin de supprimer un siège de sénateur dans la Creuse et trois à Paris et éviter tout risque d'inconstitutionnalité. Puis elle a adopté l'article 5 ainsi modifié.

Après l'article 5

La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière supprimant les députés du collège électoral sénatorial, le rapporteur ayant précisé que la présence des députés dans le collège électoral sénatorial datait de 1875 et qu'ils ne représentaient que 0,40% de ce collège, tout en soulignant que l'amendement portait sur une disposition ordinaire, l'article L.280 du code électoral, et non organique.

Article 6

(art. L.O. 438-1, L.O. 438-2 et L.O. 438-3 [nouveaux] du code électoral)


Dispositions organiques relatives aux sénateurs de Nouvelle-Calédonie,
de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna

Cet article a un double objet. Il insère dans le code électoral les dispositions de nature organique applicables à l'élection des sénateurs dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, tout en augmentant le nombre de sièges de sénateurs de ces collectivités.

1. Le droit applicable

Tout en restant une collectivité territoriale de la République, la Nouvelle-Calédonie s'est affranchie de son appartenance à la catégorie des territoires d'outre-mer (TOM) à la suite de l'accord de Nouméa de mai 1998. Elle est désormais régie par les dispositions spécifiques du titre XIII de la Constitution, introduit par la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998. La catégorie des TOM, qui regroupait la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et les terres australes et antarctiques françaises (TAAF), a récemment été supprimée par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003. Désormais, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna appartiennent à la catégorie des collectivités d'outre-mer, caractérisées par un statut particulier défini par loi organique et par un régime total ou partiel de spécialité législative.

Depuis l'ordonnance du 4 février 1959, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française ainsi que Wallis-et-Futuna disposent chacune d'un siège de sénateur. Les règles relatives à la désignation des sénateurs dans les territoires d'outre-mer prévues par le titre premier de l'ordonnance de 1959 étaient devenues obsolètes, leur organisation administrative ayant évolué. L'ordonnance n° 98-730 du 20 août 1998 a procédé à leur actualisation. Lors de l'adoption de la loi ordinaire relative à la Nouvelle-Calédonie en mars 1999, le Parlement a implicitement ratifié les dispositions de l'ordonnance de 1998, tout en leur apportant quelques modifications rédactionnelles pour tenir compte de l'évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie.

L'ordonnance n° 200-350 du 19 avril 2000 portant actualisation et adaptation du droit électoral applicable à l'outre-mer a introduit dans le code électoral un livre V sur les dispositions applicables à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis-et-Futuna. Son titre VII regroupe les dispositions relatives à l'élection des sénateurs, à l'exception de celles qui ont un caractère organique qui figurent dans la loi organique n° 85-689 du 10 juillet 1985 relative à l'élection des députés et des sénateurs dans les TOM et en Nouvelle-Calédonie.

Le sénateur de la Nouvelle-Calédonie est renouvelé en même temps que les sénateurs de la série B, tandis que le renouvellement des sénateurs de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna a lieu à la même date que celui des sénateurs de la série A.

Les dispositions ordinaires applicables à l'élection des sénateurs en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna sont, à quelques exceptions près, celles qui sont en vigueur pour les sénateurs élus dans les départements.

En Nouvelle-Calédonie, le collège électoral sénatorial est composé des députés, des membres des assemblées de province et des délégués des conseils municipaux ou de leurs suppléants (article L. 441-I du code électoral). Les membres du congrès du territoire ne siègent pas en tant que tels dans le collège sénatorial. Le collège électoral en Polynésie regroupe les députés, les membres de l'assemblée de Polynésie et les délégués des conseils municipaux (article L. 441-II du code électoral) tandis qu'à Wallis-et-Futuna, seuls le député élu dans le territoire et les membres de l'assemblée territoriale composent le collège électoral, l'institution communale n'existant pas.

2. Les modifications proposées

-  Le premier paragraphe du présent article insère trois nouveaux articles : L.O. 438-1, L.O. 438-2 et L.O. 438-3, dans le titre VII du livre V du code électoral.

L'article L.O. 438-1 prévoit l'élection de deux sénateurs en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française et d'un sénateur à Wallis-et-Futuna. La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie gagneront ainsi un siège. Cette augmentation de leur représentation sénatoriale est particulièrement justifiée. En effet, celle-ci n'a pas changé depuis 1946. Elle est inadaptée à la densité démographique de ces collectivités, respectivement peuplées de 196 836 habitants et 219 521 habitants. Il s'agit en conséquence d'appliquer la clé de répartition de 1948 aux résultats du recensement général de la population de 1999.

L'article L.O. 438-2 rend les dispositions organiques du livre II du code électoral explicitement applicables à l'élection des sénateurs des collectivités concernées, afin de permettre la mise en œuvre des dispositions organiques instaurant l'abaissement de la durée du mandat sénatorial à six ans et le renouvellement du Sénat par moitié. Seul l'article L.O. 274 du code électoral, qui fixe le nombre de sénateurs élus dans les départements, serait logiquement exclu. En outre, les titres et appellations spécifiques des personnels et des institutions des collectivités concernées seraient substitués à ceux qui sont en vigueur dans les dispositions générales du livre II pour l'élection des sénateurs des départements.

L'article L.O. 438-3 prévoit qu'un décret pris après avis conforme du Conseil d'État devrait déterminer les fonctions exercées en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, qui seront assimilées à celles énumérées aux articles L.O. 131 et L.O. 133 du code électoral relatifs aux conditions d'éligibilité et aux inéligibilités des parlementaires. Il reprend ainsi les dispositions de l'article 2-1 de la loi organique du 10 juillet 1985. Les dispositions de l'article L.O. 131 du code électoral indiquent que les inspecteurs généraux de l'administration en mission extraordinaire et les préfets ne peuvent être élus dans toute la circonscription comprise dans le ressort de laquelle ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de trois ans. Elles réduisent ces délais à un an pour les sous-préfets et les secrétaires généraux de préfecture. Les dispositions de l'article L.O. 133 du code électoral posent le principe de l'inéligibilité de certains hauts fonctionnaires dans la circonscription dans le ressort de laquelle ils exercent ou ont exercé depuis moins de six mois.

-  Le deuxième paragraphe de cet article abroge les dispositions devenues sans objet qui ont été codifiées.

-  Le troisième paragraphe prévoit que les dispositions précédentes prendraient effet pour la Polynésie française (série A) et la Nouvelle-Calédonie (série B) à compter du prochain renouvellement de la série à laquelle chacune de ces collectivités appartient (paragraphe III), soit 2007 et 2010.

Conformément à l'objectif constitutionnel d'intelligibilité de la loi, les dispositions en vigueur relatives à l'élection des sénateurs en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna seraient rassemblées, ordonnées et clarifiées par cette codification, mettant fin à une dispersion des textes préjudiciable à la sécurité juridique.

La Commission a adopté l'article 6 sans modification.

Article 7

Suppression du siège de sénateur
représentant le territoire des Afars et des Issas

Cet article prévoit la suppression du siège du sénateur représentant l'ancien territoire des Afars et des Issas, devenu indépendant en 1977 sous le nom de la République de Djibouti.

Le territoire des Afars et des Issas a connu une longue histoire commune avec la France. Dans les années 1840-1860, la mer Rouge devenant une voie d'eau d'importance mondiale, la France jugea nécessaire de posséder une base de ravitaillement pour sa marine, entre Suez et Saigon. Elle décida ainsi de créer un établissement français sur la rive sud-ouest de la mer Rouge, en passant des traités d'amitié avec les chefs locaux à partir de 1862.

Par un traité du 4 mars 1862, les chefs de la région d'Obock cédèrent en toute propriété à la France, moyennant une forte redevance, le mouillage d'Obock et les territoires s'étendant du Ras-Doumeira au Ras-Ali. Le 14 décembre 1884, le sultan du Gobaad donnait à la France le golfe de Tadjoura. Le 26 mars 1885, les chefs de la région de Djibouti signaient également un traité où ils reconnaissaient le protectorat de la France. L'ensemble de ces territoires prit la dénomination de « Côte française des Somalis et dépendances », dont Djibouti devint la capitale.

En 1946, la Côte française des Somalis devint un territoire d'outre-mer doté d'une assemblée élue et représenté en métropole par un député, un conseiller de la République (ensuite nommé sénateur) et un conseiller de l'Union française. La loi-cadre de 1956 institua en outre un conseil de gouvernement chargé, sous la présidence du gouverneur, de la gestion des affaires locales.

Lors du référendum du 28 septembre 1958, la Côte française des Somalis confirma son appartenance à la République française et son attachement au statut de TOM, en approuvant largement la Constitution de la Cinquième République (75 % de oui). Cependant, parallèlement au processus de décolonisation engagé par la France dans l'ensemble du continent africain, des mouvements indépendantistes virent le jour et leur action s'intensifia progressivement jusqu'au référendum organisé le 19 mars 1967. Cette consultation aboutit à changer les structures de la Côte française des Somalis, qui devint alors le territoire français des Afars et des Issas, sans remettre en cause son appartenance à l'ensemble français.

En 1975, le mouvement favorable à l'indépendance s'amplifia. La totalité des partis politiques militant officiellement pour l'accession à la souveraineté nationale, le Gouvernement français admit « la vocation de Djibouti à devenir un État ».

Le 8 mai 1977, à une écrasante majorité, la population opta pour l'indépendance, qui fut proclamée moins de deux mois plus tard, le 27 juin 1977. Le territoire français des Afars et des Issas devenait la République de Djibouti et n'avait plus de raison d'être représenté au Sénat français. Son siège est inoccupé depuis 1980. Seule une loi organique pouvait le supprimer.

La Commission a adopté l'article 7 sans modification.

Article 8

(art. L.O. 334-14-1 [nouveau] du code électoral)


Dispositions organiques relatives à Mayotte

Cet article double le nombre de sénateurs représentant Mayotte tout en insérant dans le code électoral les dispositions organiques applicables aux élections sénatoriales dans ce territoire.

Mayotte est la seule île de l'archipel des Comores à avoir choisi de demeurer française en 1974. Le 11 avril 1976, sa population refusa massivement le statut de territoire d'outre-mer, 80 % des Mahorais souhaitant voir leur île érigée en département d'outre-mer. La loi n°76-1212 du 24 décembre 1976 mit en place un régime temporaire, érigeant Mayotte en collectivité sui generis sur le fondement de l'article 72 de la Constitution. Son organisation administrative s'inspirait de celle des départements avant la loi du 2 mars 1982, le préfet étant l'exécutif du conseil général de la collectivité, et elle avait conservé le principe de spécialité législative caractéristique des territoires d'outre-mer.

La loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 a conféré à Mayotte un nouveau statut particulier en l'érigeant en « collectivité départementale de la République ». Elle a mis en place une dynamique institutionnelle destinée à assimiler progressivement son organisation à celle des départements métropolitains et introduit le principe de l'identité législative dans plusieurs domaines importants.

La loi constitutionnelle du 23 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République a rattaché Mayotte à la nouvelle catégorie des collectivités d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution et caractérisées par un statut particulier de nature organique et la soumission partielle ou totale au principe de la spécialité législative.

Depuis 1976, Mayotte dispose d'un siège de sénateur. La loi organique n° 76-1217 du 28 décembre 1976 relative à l'élection du sénateur de Mayotte, qui ne comprend plus qu'un article 3, prévoit l'élection d'un sénateur dans les conditions fixées par les dispositions du livre II du code électoral.

Le livre troisième du code électoral consacré aux dispositions particulières applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte prévoit l'application des dispositions législatives ordinaires du livre II du code électoral relatif à l'élection des sénateurs des départements, à l'exclusion de l'article L. 280 qui détermine la composition des collèges sénatoriaux des départements. Pour Mayotte, qui à l'instar de Saint-Pierre-et-Miquelon, ne connaît pas l'institution régionale, l'article L. 334-16 du code électoral prévoit que le collège électoral est composé du député, des conseillers généraux et des délégués des conseils municipaux. L'article L. 334-15-1 prévoit en outre la substitution des dispositions du code des communes applicable localement à celles du code général des collectivités territoriales pour la désignation des délégués des conseils municipaux des communes issues de fusions ou dont la fonction est exercée par délégation spéciale.

L'application des dispositions organiques du livre II et le principe même de la représentation de Mayotte au Sénat ne sont pas clairement mentionnés dans le chapitre V du titre II du livre troisième du code électoral, pourtant consacré au sénateur de Mayotte.

Dans un souci de codification et de simplification de la législation existante, le premier paragraphe du présent article propose d'insérer un article L.O. 334-14-1 dans le code électoral qui prévoit l'application des dispositions organiques du livre II du code électoral à la représentation sénatoriale de Mayotte. Il donnerait en outre deux sièges de sénateurs à Mayotte pour tenir compte de l'application de la clé de répartition démographique retenue aux résultats du recensement général de 1999. En effet, Mayotte compte 160 265 habitants à l'heure actuelle.

En conséquence, le deuxième paragraphe de cet article abroge la loi organique n° 76-1217 du 28 décembre 1976 relative à l'élection du sénateur de Mayotte.

Le troisième paragraphe prévoit que ces dispositions entreraient en vigueur à compter du prochain renouvellement de la série à laquelle appartient Mayotte (série C), soit en 2004.

La Commission a adopté l'article 8 sans modification.

La Commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi organique ainsi modifiée.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter la proposition de loi organique portant réforme de la durée du mandat et de l'âge d'éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat (n° 936) modifiée par l'amendement figurant au tableau comparatif placé à la fin du rapport.

EXAMEN DES ARTICLES
DE LA PROPOSITION DE LOI ORDINAIRE (N° 937)

Article 1er

(tableau n° 6 annexé au code électoral)


Répartition des sénateurs représentant les départements

Si le nombre total de sièges de sénateurs élus dans les départements est fixé par la loi organique, leur répartition dans chaque département dépend de la loi ordinaire. Selon l'article L. 279 du code électoral, les sièges de sénateurs représentant les départements sont répartis conformément au tableau n° 6 annexé au code électoral.

Parallèlement à l'article 5 de la proposition de loi organique portant réforme de la durée du mandat et de l'âge d'éligibilité des sénateurs ainsi que de la composition du Sénat, qui porte le nombre de sénateurs représentant les départements de 304 à 326, cet article modifie le tableau n° 6 pour fixer une nouvelle répartition des sièges entre les départements. La répartition choisie pérennise l'application de la clé démographique de répartition utilisée depuis 1948 et légèrement modifiée à partir de 1966, qui attribue à chaque département un siège de sénateur jusqu'à 150 000 habitants, puis un sénateur supplémentaire par tranche ou fraction de tranche de 250 000 habitants. Elle se borne à l'appliquer aux résultats du dernier recensement de 1999. La dernière actualisation du tableau annexé remonte à 1975.

Sans remettre en cause la clé de répartition retenue depuis 1948, le Conseil constitutionnel a, par deux fois, indiqué que la répartition des sièges de sénateurs devait tenir compte des évolutions démographiques : tout d'abord dans sa décision du 6 juillet 2000 (19) relative à la loi reformant le mode de scrutin de l'élection des sénateurs, puis l'année suivante dans une décision Hauchemaille et Marini rendue sur une contestation relative à l'organisation des élections sénatoriales de septembre 2001.

Un département (Seine-et-Marne) gagnerait 2 sièges, tandis que vingt départements obtiendraient 1 siège supplémentaire. Un département passerait de 1 à 2 sièges (Guyane), cinq départements auraient 3 sièges contre 2 à l'heure actuelle (Ain, Drôme, Eure-et-Loir, Vaucluse, Guadeloupe), six départements passeraient de 3 à 4 sièges (Hérault, Maine-et-Loire, Oise, Haut-Rhin, Var, Réunion), cinq départements de 4 à 5 sièges (Alpes-Maritimes, Haute-Garonne, Isère, Bas-Rhin, Val d'Oise). La Seine-et-Marne passerait de 4 à 6 sièges, tandis que deux départements passeraient de 5 à 6 sièges (Gironde, Yvelines) et un département passerait de 7 à 8 sénateurs (Bouches-du-Rhône).

Les tableaux ci-après récapitulent les modifications introduites dans la proportion de sièges par département et la répartition des sièges supplémentaires de sénateurs.

PROPORTION DE SIÈGES PAR DÉPARTEMENTS

Droit en vigueur

Proposition de loi organique n°936 et proposition de loi n° 937

Nombre de

départements

Nombre de sièges

Nombre de

départements

Nombre de sièges

8

1

7

1

42

2

38

2

26

3

25

3

10

4

10

4

5

5

8

5

3

6

6

6

4

7

3

7

-

8

1

8

1

11

1

11

1

12

1

12

100

304

100

326

RÉPARTITION DES SIÈGES SUPPLÉMENTAIRES DE SÉNATEURS

Départements

Nombre
actuel de sénateurs

Proposition de loi

Départements

Nombre
actuel de sénateurs

Proposition de loi

Ain

2

3

Rhin (Bas-)

4

5

Alpes-Maritimes

4

5

Rhin (Haut-)

3

4

Bouches-du-Rhône

7

8

Seine-et-Marne

4

6

Drôme

2

3

Var

3

4

Eure-et-Loir

2

3

Vaucluse

2

3

Garonne (Haute)

4

5

Guadeloupe

2

3

Gironde

5

6

Guyane

1

2

Hérault

3

4

Réunion

3

4

Isère

4

5

Val d'Oise

4

5

Maine-et-Loire

3

4

Yvelines

5

6

Oise

3

4

La constitutionnalité du dispositif proposé est contestable. Les sénateurs ont choisi de ne tenir compte des évolutions démographiques qu'à la hausse. Ils ont refusé de supprimer un siège dans la Creuse et trois à Paris. La Creuse, avec 124 470 habitants et 2 sénateurs, bénéficie d'un sénateur de plus que des départements plus peuplés (l'Ariège avec 137 205 habitants, le territoire de Belfort avec 137 408 habitants, les Alpes-de-Haute-Provence avec 139 561 habitants et la Haute-Corse avec 141 603 habitants). Elle a en conséquence le nombre d'habitants par sénateur le plus faible de métropole (62 235). Avec 2 125 246 habitants et 12 sénateurs au lieu de 9, Paris a un sénateur de plus que le Nord, pourtant plus peuplé (2 555 020). Les sénateurs font valoir que déjà en 1976 le Parlement aurait refusé de supprimer trois sièges : un dans la Creuse et deux à Paris. Les lois de 1976 auraient ainsi consacré l'existence d'un cliquet s'opposant à la diminution du nombre de sénateurs et que le Conseil constitutionnel aurait validée. Toutefois, le Conseil n'avait pas été saisi en 1976 de la loi ordinaire fixant la répartition des sièges de sénateurs, mais seulement de la loi organique fixant le nouvel effectif du Sénat. Il avait pris soin de préciser, dans sa décision n° 76-68 DC du 15 juillet 1976, que « n'étant saisi ni de la répartition des sièges de sénateurs entre les départements, ni des règles selon lesquelles cette répartition est opérée, le Conseil constitutionnel ne peut porter d'appréciation que sur la conformité à la Constitution de la fixation du nombre des sénateurs des départements ».

En conséquence après avoir rejeté un amendement de suppression présenté par M. Bernard Roman, justifié par la volonté de son auteur d'opérer une nouvelle répartition des sièges entre les départements sans augmenter le nombre de sénateurs sur la base d'un quotient de population fixé par la loi, la Commission a adopté trois amendements du rapporteur, par coordination avec la modification du nombre de sénateurs adoptée dans le cadre de la loi organique : le premier supprimant un siège de sénateur dans le département de la Creuse (amendement n° 1), le second supprimant trois sièges dans le département de Paris (amendement n° 2) et le dernier fixant à 322, au lieu de 326, le nombre total de sénateurs dans les départements (amendement n° 3)

Puis la Commission a adopté l'article premier ainsi modifié.

Article 2

(tableau n° 5 annexé au code électoral)


Renouvellement par moitié du Sénat et dispositions transitoires

L'article L.O. 276 du code électoral pose le principe selon lequel le Sénat est renouvelable par tiers et qu'à cet effet les sénateurs sont réparties en trois séries A, B et C d'importance approximativement égale suivant le tableau n° 5 annexé au code électoral. La définition de la composition des séries et donc le tableau n° 5 relèvent de la loi ordinaire.

L'instauration du renouvellement par moitié du Sénat à compter de 2010, prévue par l'article 2 de la proposition de loi organique, conduit à répartir désormais les sénateurs en deux séries.

Cet article définit la composition des séries 1 et 2, qui seront instaurées à compter de 2010, et modifie à titre transitoire le tableau n° 5 annexé au code électoral pour tenir compte de l'augmentation progressive du nombre de sénateurs jusqu'à cette date.

1. La composition des futures séries 1 et 2

-  Le premier paragraphe de cet article définit la méthode de composition des futures séries 1 et 2 :

La série 1 sera composée des sièges de sénateurs de l'ancienne série B et d'une partie des sièges de l'ancienne série C, dont la durée du mandat sera fixée à six ans pour le renouvellement partiel de 2004.

La série 2 sera composée des sièges de l'ancienne série A et de l'autre partie des sièges de l'ancienne série C, dont la durée du mandat sera fixée à neuf ans pour le renouvellement partiel de 2004.

L'article 2 de la proposition de loi organique a prévu que le Bureau du Sénat procéderait en octobre 2003 au tirage au sort des deux sections de la série C dont les membres seront respectivement élus pour neuf ans et pour six ans. En conséquence, la composition des séries 1 et 2 ne pourra être établie précisément qu'à compter de cette date et le tableau n° 5 actuel ne peut, pour le moment, être modifié.

-  Le second paragraphe du présent article prévoit en conséquence qu'une loi votée avant le renouvellement partiel de 2004 actualisera le tableau n° 5.

2. Les dispositions transitoires

Le renouvellement par tiers du Sénat et le découpage en trois séries figurant dans le tableau n° 5 demeureront valables jusqu'au renouvellement partiel de 2010. Toutefois, ce tableau comporte les effectifs de chaque série et ne reflétera donc pas l'augmentation progressive du nombre de sénateurs entre 2004 et 2010.

22 sièges supplémentaires dans les départements ainsi qu'1 siège supplémentaire pour Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française devraient être créés au fur et à mesure du renouvellement des séries : le nombre de sénateurs passerait de 117 à 127 pour la série C en 2004, de 102 à 112 pour la série A en 2007 et de 103 à 108 pour la série B, alors intégrée à la série 1 en 2010.

Le quatrième paragraphe du présent article propose de supprimer les effectifs inscrits dans le tableau n° 5. En effet, l'augmentation progressive du nombre de sénateurs étant prise en compte par le tableau n° 6 annexé à l'article L. 279 du code électoral et fixant le nombre de sénateurs représentant les départements (voir article premier) et par divers articles du code électoral ou des lois spécifiques, la mention des effectifs des séries dans le tableau n° 5 n'est pas nécessaire.

L'augmentation du nombre de sénateurs et la modification de la répartition des sièges pourront ainsi être effectuées sans difficulté jusqu'en 2010, la loi prévue au deuxième paragraphe de cet article fixant dès lors la composition des séries 1 et 2.

Le tableau n° 5 modifié par le présent article ne contiendrait plus en outre le siège de l'ancien territoire des Afars et des Issas, que la proposition de loi organique supprime dans son article 7.

Enfin, la mention de la Nouvelle-Calédonie et des collectivités d'outre-mer serait substituée à celle de territoires d'outre-mer pour prendre acte de la suppression de ces derniers par la révision constitutionnelle du 28 mars dernier.

La Commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 3

(art. L. 440 et L. 442 du code électoral)


Dispositions relatives à l'élection des sénateurs de Nouvelle-Calédonie,
de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna

Cet article tend à abroger l'article L. 440 du code électoral et à modifier l'article L. 442 du même code, afin de prendre en compte l'augmentation du nombre de sénateurs en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française et le renouvellement du Sénat par moitié à compter de 2010.

1. Le droit existant

La Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna sont respectivement représentées par un sénateur. Le renouvellement du sénateur de la Nouvelle-Calédonie a lieu à la même date que celui des sénateurs de la série B (prochain renouvellement en 2010), tandis que celui des sénateurs de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna a lieu à la même date que celui des sénateurs de la série A (prochain renouvellement en 2007).

Les sénateurs sont toutefois élus par un collège électoral spécifique composé des députés et des membres des assemblées délibérantes de ces collectivités et des dispositions particulières sont prévues dans le code électoral. Lorsqu'un membre de ces assemblées est également député, un remplaçant est désigné par le président de l'assemblée concernée. En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, le choix par les conseils municipaux de leurs délégués ne peut porter ni sur un député, ni sur un membre d'une assemblée délibérante locale.

Par ailleurs, si le vote des membres des collèges électoraux est obligatoire pour l'élection des sénateurs de ces collectivités, comme pour l'élection des sénateurs des départements, les distances entre les lieux d'habitation et les bureaux de vote ainsi que les difficultés de déplacement de nombreux électeurs sont prises en compte par l'autorisation du vote par procuration : les électeurs peuvent, sur leur demande et à titre exceptionnel, voter par procuration. Il ne peut être établi plus de deux procurations au nom d'un même mandataire.

2. Les dispositions prévues

Le premier paragraphe de cet article abroge l'article L. 440 du code électoral, qui fixe aujourd'hui la répartition des sièges de sénateurs en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna.

En effet, l'article L.O. 438-1 nouveau qui serait inséré par l'article 6 de la proposition de loi organique dans le code électoral fixerait désormais le nombre des sièges de sénateurs dans chacune des collectivités précitées : deux sénateurs en Nouvelle-Calédonie, deux sénateurs en Polynésie française et un sénateur à Wallis-et-Futuna.

Par ailleurs, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna sont rattachées à la série A, renouvelable en 2007. Elles seraient comme celle-ci par la suite intégrées à la nouvelle série 2 à compter de 2010. Les sièges des sénateurs de Nouvelle-Calédonie seraient, quant à eux, intégrés à la nouvelle série 1 avec ceux de la série B à la même date.

Ainsi le deuxième paragraphe de cet article modifierait l'article L. 442 du code électoral pour tenir compte de l'augmentation du nombre de sénateurs et de la composition des futures séries 1 et 2.

Le troisième paragraphe de cet article prévoit que l'entrée en vigueur des dispositions abrogeant l'article L. 440 du code électoral et modifiant l'article L. 442 du même code pour prendre en compte la création d'un deuxième siège de sénateur pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française serait fixée à la date du prochain renouvellement de la série à laquelle la Nouvelle-Calédonie (soit 2010) et la Polynésie française (soit 2007) appartiennent. Les dispositions relatives à la mention des séries 1 et 2 dans l'article L. 442 du code électoral entreraient en vigueur à compter du renouvellement partiel de 2010.

La Commission a adopté l'article 3 sans modification.

Article 4

(art. 2 de la loi n° 83-390 du 18 mai 1983)


Renouvellement des sénateurs représentant les Français
établis hors de France

Cet article tend à modifier l'article 2 de la loi n° 83 390 du 18 mai 1983 relative à l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France afin d'y inscrire le principe du renouvellement du Sénat par moitié.

L'article 2 indique que, dans chacune des colonnes du tableau n° 2 fixant la répartition des sièges de sénateurs entre les séries et annexé à l'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l'ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l'élection des sénateurs, qui est aujourd'hui intégré dans le tableau n° 5 annexé au code électoral, le nombre de sièges de sénateurs représentant les Français établis hors de France est égal au tiers du chiffre fixé dans l'article premier de la loi organique relative à la représentation au Sénat des Français établis hors de France, soit quatre.

Par une mesure de coordination, cet article tire les conséquences de l'article 3 de la proposition de loi organique, qui tend à instaurer le mandat de six ans et le renouvellement par moitié des sénateurs représentant les Français établis hors de France. Il inscrit ainsi le principe du renouvellement par moitié dans l'article 2 de la loi du 18 mai 1983, à compter de 2010.

La Commission a adopté l'article 4 sans modification.

Articles 5 et 6

(art. L. 294 et L. 295 du code électoral)


Champ d'application du mode de scrutin majoritaire à deux tours
et de la représentation proportionnelle

L'article 5 de la présente proposition donne une nouvelle rédaction à l'article L. 294 du code électoral afin de prévoir l'application du scrutin majoritaire à deux tours dans les départements où sont élus trois sénateurs ou moins. Corrélativement, l'article 6 modifie le premier alinéa de l'article L. 295 du code électoral pour rendre le scrutin proportionnel applicable dans les départements ayant quatre sièges de sénateurs ou plus. Les règles propres à ces deux modes de scrutin demeureraient inchangées. Il s'agit de corriger le déséquilibre introduit par la loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 qui a introduit massivement la représentation proportionnelle

1. L'état du droit : une représentation proportionnelle prédominante

La dualité des modes de scrutin

Le Sénat est la seule assemblée politique française qui soit désignée sur la base de deux modes de scrutin différents. Tous les membres du Sénat de la Troisième République étaient désignés au scrutin majoritaire. Ce n'est qu'à partir de 1946 que le scrutin proportionnel fut introduit pour la première fois pour désigner certains membres de la chambre haute ; les députés communistes et des socialistes réussirent à imposer pour le Conseil de la République un mode de recrutement essentiellement fondé sur la règle de la proportionnalité. 68 départements de la métropole ne devant élire qu'un seul conseiller de la République, il était impossible de généraliser le scrutin proportionnel. La loi organique du 27 octobre 1946 instaura donc la coexistence de la représentation proportionnelle et du scrutin uninominal majoritaire, ce dernier s'appliquant dans les départements métropolitains n'élisant qu'un seul conseiller et dans les territoires d'outre-mer.

La loi organique du 23 septembre 1948 confirma la coexistence des deux modes de scrutin, en élargissant toutefois le champ d'application du scrutin majoritaire à tous les départements élisant moins de quatre conseillers. La représentation proportionnelle ne s'appliquait plus que dans onze départements soit un total de soixante-douze sièges. Elle ne jouait plus qu'un rôle marginal, d'autant que l'utilisation de la règle de la plus forte moyenne pour la répartition des restes conduisait à favoriser les partis les mieux implantés.

Les auteurs de l'ordonnance du 15 novembre 1958 relative à l'élection des sénateurs ont repris les dispositions de la loi organique de 1948 tout en accentuant encore le caractère majoritaire du système, puisque le scrutin majoritaire s'appliquait dans tous les départements élisant moins de cinq sénateurs. Le scrutin majoritaire est demeuré dominant dans le mode de désignation des sénateurs jusqu'à la loi du 10 juillet 2000. Avant cette réforme, il s'appliquait dans 85 départements concentrant 67,76 % de la population française et concernait 206 sièges de sénateurs.

Dès 1989, le sénateur socialiste Guy Allouche et plusieurs de ses collègues ont présenté une proposition de loi tendant notamment à faire élire les sénateurs à la proportionnelle dans tous les départements comptant trois sièges ou plus. L'idée fut reprise en 1991 dans un projet de loi relatif à l'élection des sénateurs présenté par le Gouvernement de Mme Edith Cresson, qui fut rejeté par le Sénat le 19 décembre 1991, puis par le projet de loi relatif à l'élection des sénateurs présenté en 1999 par le Gouvernement de M. Lionel Jospin, adopté malgré l'opposition du Sénat.

L'extension du champ d'application du scrutin proportionnel

Ainsi la loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 a considérablement élargi le champ d'application du scrutin proportionnel. Le scrutin majoritaire à deux tours n'est plus en vigueur que dans les départements métropolitains et d'outre-mer, ainsi que dans les autres collectivités d'outre-mer auxquels sont attribués un ou deux sièges de sénateurs, la représentation proportionnelle étant applicable dans les départements auxquels sont attribués trois sièges de sénateurs ou plus. Si avant la loi du 10 juillet 2000, 110 sièges sur 321 (34,3 %) étaient attribués à la représentation proportionnelle, 224 (69,9 %) doivent l'être selon le droit actuellement en vigueur, représentant environ 77 % de la population.

Les règles propres à chaque mode de scrutin

Dans le cadre du scrutin majoritaire à deux tours, et comme c'est le cas pour les autres scrutins de ce type, le candidat arrivé en tête doit obtenir la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits pour être élu au premier tour. Au second tour, la majorité relative suffit et, en cas d'égalité de suffrages, le plus âgé est élu (article L. 294). Le scrutin majoritaire aux élections sénatoriales est soit uninominal soit plurinominal, lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir dans le département. Les candidats peuvent se présenter soit isolément, soit sur une liste (article R. 150 du code électoral). Ces listes peuvent être complètes et ne sont pas bloquées : l'électeur peut rayer des noms ou en ajouter et panacher entre plusieurs listes. À l'issue du scrutin, le décompte des voix ne se fait pas par liste, mais par nom.

La représentation proportionnelle est effectuée suivant la règle de la plus forte moyenne sans possibilité de panachage ni de vote préférentiel. Depuis la loi du 6 juin 2000, l'article L. 300 du code électoral prévoit que sur chacune des listes, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un, chaque liste étant composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. En outre, les listes doivent comporter deux noms de plus qu'il y a de sièges pourvoir afin d'anticiper d'éventuelles vacances en cours de mandat.

2. La réforme proposée : le rééquilibrage entre les deux modes de scrutin

Maximiser les effets positifs de chaque mode de scrutin

En proposant d'étendre le champ d'application du scrutin majoritaire dans les départements disposant de trois sièges ou moins, le projet de loi ne revient pas sur la situation qui prévalait avant la loi du 10 juillet 2000, mais propose une solution équilibrée. En prenant en compte l'augmentation du nombre de sièges, 180 sénateurs, soit 52 % d'entre eux, seront élus au scrutin proportionnel. Cette proportion aurait été de 74 % (245 sur 346) à seuil inchangé. Elle est actuellement de 70 % (224 sur 321).

Comme le soulignait M. Paul Girod, le choix du mode de scrutin ne peut être dissocié de la fonction de l'assemblée qu'il s'agit d'élire, et doit donc s'apprécier pour le Sénat au regard du principe de représentation des collectivités territoriales, qui, dans l'esprit des constituants de 1958, devait assurer la promotion de notables locaux à qui l'expérience procure sagesse et pragmatisme. Or comme le rappelait le sénateur Girod, le scrutin majoritaire confère aux élections sénatoriales une dimension personnelle, propice au recrutement d'élus sur la base de leur enracinement local et non seulement sur des critères principalement idéologiques. Il « facilite l'émergence de notables qui (...) sont ancrés dans le tissu social et donnent au Sénat une légitimité différente de celle de l'Assemblée nationale, plus politisée et plus sensible aux modes par nature éphémères (20) ».

Dans un discours prononcé au cours de l'élaboration de la loi organique du 27 octobre 1946, M. Paul Ramadier développait le même argument en soulignant que, dans les circonscriptions dans lesquelles les conseillers de la République seraient élus au scrutin majoritaire, un « facteur fortement personnel » entrerait en jeu et « les conseillers de la République devraient être des hommes avertis des choses de la vie de leur pays, habitués, par la gestion des charges municipales et départementales, à peser les avantages et les inconvénients des solutions administratives (21) ».

Le scrutin majoritaire favorise l'enracinement local des sénateurs et leur indépendance relative vis-à-vis des formations politiques, d'autant plus que ceux-ci peuvent se présenter soit isolément soit sur une liste qui n'est pas bloquée. Le Sénat y gagne sans aucun doute en autonomie et en indépendance.

Bien entendu le scrutin majoritaire présente un certain nombre d'inconvénients qui justifient qu'il soit combiné avec la représentation proportionnelle, en respectant un certain équilibre.

Le scrutin majoritaire accentue les effets de la surreprésentation des collectivités rurales et amplifie ainsi les effets déformants liés à la composition du collège électoral. Dans une étude sur la représentativité de la seconde chambre, M. Jean Grangé mettait en évidence en 1990, lorsque le scrutin majoritaire s'appliquait dans les départements élisant moins de cinq sénateurs, que ce dernier « qui a pour effet d'amplifier le courant dominant et de réduire la représentation des minorités, renforce donc la majorité dans les départements les moins peuplés, les moins urbanisés et industrialisés (22)».

La représentation proportionnelle favorise la représentation des différentes formations politiques. Elle est particulièrement justifiée dans les départements à forte population urbaine dans lesquels le tissu social est plus hétérogène. En outre, la dimension personnelle du lien entre les électeurs et les candidats est moins prononcée dans ces départements.

Le système proposé permet une meilleure représentation des départements les moins peuplés, avec une représentation équitable des minorités dans les départements les plus peuplés. Il permettra au Sénat de disposer à nouveau d'une représentativité démographique et d'une représentativité territoriale satisfaisantes.

Sans remettre en cause la progression de la parité

En remontant de 3 à 4 le seuil à compter duquel s'appliquera le scrutin proportionnel, la présente proposition de loi réduit le champ d'application de la parité, l'obligation d'alternance des candidats de chaque sexe sur les listes n'étant prévue que pour ce mode de scrutin. L'obligation de l'alternance stricte des candidats de chaque sexe sur les listes, lors du renouvellement de la série B en 2001, a eu un effet réel mais limité : 22 femmes ont été élues, soit 21,6 % des 102 élus ou réélus (contre 6,9 % auparavant). Toutefois, comme le rappelle l'Observatoire de la parité dans son rapport de 2003 au Premier ministre, la multiplication du nombre de listes lors de ces élections a limité l'impact des contraintes de la législation.

La question peut alors se poser de savoir si le recul du champ d'application de la représentation proportionnelle pour les élections sénatoriales est conforme au quatrième alinéa de l'article 3 de la Constitution introduit par la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999 selon lequel « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ».

La jurisprudence du Conseil constitutionnel laisse penser que le choix retenu ne viole pas les dispositions de la Constitution.

Selon une jurisprudence désormais bien établie en matière de droits et libertés, il est loisible au législateur de modifier des textes ou de les abroger en leur substituant de nouvelles dispositions, à condition que l'exercice de ce pouvoir n'aboutisse pas à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. En l'espèce, le relèvement du seuil d'application des règles de la proportionnelle ne saurait priver de garanties légales l'objectif constitutionnel de « parité ». Celui-ci continuera en effet à être garanti par l'existence de la règle de l'alternance dans les départements comptant quatre sénateurs et plus. Comme le souligne le rapport de Mme Gisèle Gauthier au nom de la Délégation du droit des femmes du Sénat, la loi du 10 juillet 2000 n'a été appliquée que pour une seule série et : « les effets potentiellement négatifs, au regard de la parité, de la nouvelle ligne de partage entre les modes de scrutin, devraient se trouver en partie compensés par l'accroissement de l'effectif du Sénat. (...) La perspective d'un net progrès quant à la mixité de la Haute Assemblée paraît donc préservée ».

Le Conseil n'a eu qu'une occasion de se prononcer directement sur la question de la parité, à propos de la loi relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques. Dans sa décision du 3 avril 2003 (23), il a jugé que le nouveau mode de scrutin européen était conforme au cinquième alinéa de l'article 3 de la Constitution, puisque les dispositions critiquées n'avaient ni pour objet ni, par elles-mêmes, pour effet de réduire la proportion de femmes élues en France au Parlement européen et que le législateur avait maintenu la règle de l'alternance entre candidats féminins et masculins sur les listes de candidats, qui prévalait sous l'empire des dispositions précédentes. Certains auteurs ont estimé que cette décision impliquait que, lorsque le législateur a fixé des garanties pour assurer le respect d'une exigence de caractère constitutionnel, il ne peut, par la suite, les supprimer ou les modifier qu'à la condition de les remplacer par des garanties d'une efficacité équivalente.

En l'espèce, le relèvement du seuil d'application de la représentation proportionnelle n'a pas pour objet de réduire les possibilités d'accès égal aux mandats et la progression vers la parité n'est pas compromise grâce à l'augmentation prévue du nombre de sièges, qui, en faisant passer plusieurs départements à quatre sénateurs, rend applicable le scrutin proportionnel et favorise donc la parité.

L'institution de règles favorisant l'égal accès des femmes et des hommes au mandat de sénateur dans les départements comptant au plus trois sénateurs n'est pas aussi facile que dans le cadre de la représentation proportionnelle. Les mesures envisageables ne peuvent pas avoir le même effet contraignant du fait de la nature même de ce mode de scrutin.

La situation n'est pas comparable à celle de la réforme du mode de scrutin européen, puisqu'il ne s'agissait pas alors de substituer un scrutin à un autre mais de conserver la représentation proportionnelle en redéfinissant les contours de la circonscription dans laquelle elle allait s'appliquer. La règle de l'alternance pouvait donc être aisément conservée.

En outre, le Conseil constitutionnel accepte qu'il soit dérogé au principe d'égalité du suffrage pour un motif d'intérêt général ou une exigence constitutionnelle. En l'occurrence, le relèvement du seuil d'application du scrutin proportionnel est justifié par la volonté de définir un meilleur équilibre entre deux modes de scrutin, afin de permettre une meilleure représentation des collectivités territoriales par le Sénat.

Enfin, il convient de souligner que le juge constitutionnel, en matière électorale, s'est toujours refusé à devenir un juge de l'opportunité des dispositions retenues par le législateur, estimant à juste titre que la Constitution ne lui conférait pas un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement et qu'il ne lui revenait donc pas de rechercher si l'objectif que s'était assigné le législateur aurait pu être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues ne semblaient manifestement pas inappropriées à l'objectif poursuivi.

La Commission a rejeté deux amendements de M. Bernard Roman de suppression de ces articles ainsi que deux amendements du même auteur tendant à réserver l'application du scrutin majoritaire aux départements où est élu un seul sénateur et à appliquer en conséquence le scrutin proportionnel dans les départements élisant deux sénateurs et plus. Puis elle a adopté l'article 5 sans modification.

Article 7

(art. L. 52-3 du code électoral)


Contenu des bulletins de vote

Introduit à l'initiative de M. Philippe Darniche avec l'avis favorable du Gouvernement, cet article complète l'article L. 52-3 du code électoral relatif aux bulletins de vote, afin de permettre aux candidats aux élections à la représentation proportionnelle de faire figurer sur leur liste la dénomination de leur parti politique ou le nom de leur représentant. La portée de cet article dépasse le cadre des élections sénatoriales puisque les dispositions de l'article L. 52-3 du code électoral s'appliquent à l'ensemble des élections.

L'article L. 52-3 se borne à préciser que les candidats peuvent faire imprimer un emblème sur leurs bulletins de vote. Pour chaque élection, les règles relatives à la présentation des bulletins de vote figurent dans la partie réglementaire du code électoral.

Pour certaines élections au scrutin majoritaire, le code électoral précise que les bulletins de vote ne peuvent pas comporter d'autres noms propres que celui des candidats (article R. 111 pour les élections cantonales et R. 105 pour les élections législatives). Pour les élections sénatoriales, ne sont pas considérés comme valables les bulletins comportant plus de noms que de sièges à pourvoir lorsque la disposition des noms ne permet pas de déterminer l'ordre de préférence qu'a voulu leur donner l'électeur. En revanche, lorsque la disposition des noms permet de déterminer cet ordre de préférence, le bulletin est valable mais les noms en excédent ne sont pas pris en compte.

Pour les élections municipales et régionales au scrutin proportionnel, les listes présentées dans chacune des circonscriptions ont la possibilité de prendre une dénomination, que ce soit le nom d'un parti ou groupement et/ou celui de son représentant, selon une jurisprudence constante du juge électoral. Dans un arrêt du 12 mai 1993, le Conseil d'État a ainsi admis, s'agissant des élections régionales, que figure sur les bulletins de vote le nom de personnes n'étant pas candidates : « la circonstance que les bulletins de la liste intitulée "Génération écologie - Les écologistes avec Brice Lalonde" aient comporté le nom de ce dernier, dont il apparaissait clairement qu'il n'était pas candidat, n'est pas de nature à entacher la régularité des opérations électorales contestées ». Il ne fait guère de doute que cette jurisprudence aurait été transposable aux élections sénatoriales.

En ajoutant trois alinéas à l'article L. 52-3 du code électoral, cet article entend clarifier les règles applicables. Pour les élections au scrutin majoritaire, les bulletins ne pourront comporter aucun nom propre autre que celui du ou des candidats. En revanche, pour les élections au scrutin de liste, les listes présentées dans chacune des circonscriptions départementales ou régionales, en fonction des élections pourront prendre une même dénomination afin d'être identifiées au niveau national. Cette même dénomination pourra être le nom d'un groupement ou parti politique ou, le cas échéant, celui de son représentant, même s'il n'est pas lui-même candidat.

La Commission a adopté l'article 7 sans modification.

Après l'article 7

La Commission a rejeté deux amendements de M. Bernard Roman fixant le nombre de délégués des conseils municipaux en fonction de la population de la commune, avec respectivement un délégué pour 400 habitants et un délégué pour 500 habitants.

La Commission a adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter la proposition de loi portant réforme de l'élection des sénateurs (n° 937) modifiée par les amendements figurant au tableau comparatif placé à la fin du rapport.

TABLEAU COMPARATIF
(Proposition de loi organique n° 936)

___

Texte de référence

___

Texte adopté par le Sénat

en première lecture

___

Propositions de la Commission

___

Code électoral

Article 1er

L'article L.O. 275 du code électoral est ainsi rédigé :

Article 1er

(Sans modification).

Art. L.O. 275. -  Les sénateurs sont élus pour neuf ans.

« Art. L.O. 275. -  Les sénateurs sont élus pour six ans. »

Article 2

I. -  L'article L.O. 276 du code électoral est ainsi rédigé :

Article 2

(Sans modification).

Art. L.O. 276. -  Le Sénat est renouvelable par tiers. À cet effet, les sénateurs sont répartis en trois séries A, B et C, d'importance approximativement égale, suivant le tableau nº 5 annexé au présent code.

« Art. L.O. 276. -  Le Sénat est renouvelable par moitié. À cet effet, les sénateurs sont répartis en deux séries 1 et 2, d'importance approximativement égale, suivant le tableau n° 5 annexé au présent code. »

Tableau n° 5

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation des départements

Ain
à Indre

95

Indre-et-Loire à
Pyrénées-Orientales

94

Bas-Rhin à Yonne

62

Guyane

1

Réunion

3

Essonne à Yvelines

45

Guadeloupe Martinique.

4

96

97

111

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation des collectivités d'outre-mer
et des Français établis hors de France

Polynésie
française

1

Nouvelle-Calédonie

1

Mayotte

1

Îles
Wallis-et-Futuna

1

Territoire des Afars et des Issas

1

Saint-Pierre-et-Miquelon

1

Français
établis hors de France

4

Français
établis hors de France

4

Français établis hors de France

4

102

103

117

II. -  À titre transitoire, les sénateurs de la série C rattachés par tirage au sort à la série 2 sont élus pour neuf ans en 2004.

À cet effet, les sièges de la série C seront répartis en deux sections, l'une comportant les sièges des départements du Bas-Rhin à l'Yonne, à l'exception de la Seine-et-Marne, et l'autre, ceux des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de l'Île-de-France ainsi que les sièges des sénateurs de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

III. -  Les dispositions du I entreront en vigueur à compter du renouvellement partiel de 2010.

Loi organique n° 83-499
du 17 juin 1983 relative à
la représentation au Sénat
des Français établis hors de France

Art. 1er. -  Les Français établis hors de France sont représentés au Sénat par douze sénateurs.



Article 3

I. -  L'article 1er de la loi organique n° 83-499 du 17 juin 1983 relative à la représentation au Sénat des Français établis hors de France est complété par un alinéa ainsi rédigé :



Article 3

(Sans modification).

« A chaque renouvellement partiel du Sénat, sont élus six sénateurs représentant les Français établis hors de France. »

Art. 5. -  L'application de l'article 1er de la présente loi organique sera échelonnée sur les trois prochains renouvellements partiels du Sénat. A chacun de ces renouvellements seront élus quatre sénateurs représentant les Français établis hors de France.

II. -  L'article 5 de cette même loi organique est abrogé.

IV. -  Les dispositions du I et du II entreront en vigueur à compter du renouvellement partiel de 2010.

Code électoral

Article 4

Le premier alinéa de l'article L.O. 296 du code électoral est ainsi rédigé :

Article 4

(Sans modification).

Art. L.O. 296. -  Nul ne peut être élu au Sénat s'il n'est âgé de trente-cinq ans révolus.

« Nul ne peut être élu au Sénat s'il n'est âgé de trente ans révolus. »

Les autres conditions d'éligibilité et les inéligibilités sont les mêmes que pour l'élection à l'Assemblée nationale.

Toutefois, pour l'application de l'alinéa précédent, n'est pas réputée faire acte de candidature contre un sénateur devenu membre du gouvernement la personne qui a été appelée à le remplacer dans les conditions prévues à l'article L. O. 319 lorsqu'elle se présente sur la même liste que lui.

Article 5

I. -  L'article L.O. 274 du code électoral est ainsi rédigé :

Article 5

I. -  (Alinéa sans modification).

Art. L.O. 274. -  Le nombre de sénateurs élus dans les départements est de 304.

« Art. L.O. 274. -  Le nombre des sénateurs élus dans les départements est de 326. »

« Art. L.O. 274. -  

... de 322. »

II. -  À titre transitoire, le nombre des sénateurs élus dans les départements sera de 313 en 2004, de 322 en 2007.

II. -  

... de 310 en 2004, de 318 en 2007.

(amendement n° 1)

Livre V. -  Dispositions applicables à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie Française et aux îles Wallis-et- Futuna

Titre VII. -  Conditions d'application

Article 6

I. -  Au titre VII du livre V du code électoral, avant l'article L. 439, sont insérés trois articles L.O. 438-1, L.O. 438-2 et L.O. 438-3 ainsi rédigés :

« Art. L.O. 438-1. -  Deux sénateurs sont élus en Nouvelle-Calédonie.

Article 6

(Sans modification).

« Deux sénateurs sont élus en Polynésie française.

« Un sénateur est élu dans les îles Wallis-et-Futuna. »

Livre II. -   Élection des sénateurs des départements

Art. L.O. 274. -  Cf. supra art. 6 du texte adopté par le Sénat.

« Art. L.O. 438-2. -  Les dispositions organiques du livre II, à l'exception de l'article L.O. 274, sont applicables à l'élection des sénateurs en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna sous réserve des dispositions suivantes :

« 1) Pour la Nouvelle-Calédonie, il y a lieu de lire :

« a) « Nouvelle-Calédonie » au lieu de : « département » ;

« b)« haut-commissaire de la République » et « services du haut-commissaire de la République » au lieu de : « préfecture » ;

« c) « commissaire délégué de la République » au lieu de : « sous-préfet ».

« 2) Pour la Polynésie française, il y a lieu de lire :

« a) « Polynésie française» au lieu de : « département » ;

« b) « haut-commissaire de la République » et « services du haut-commissaire de la République » au lieu de : « préfet » et « préfecture » ;

« c)  « chef de subdivision administrative » au lieu de : « sous-préfet ».

« 3) Pour les îles Wallis-et-Futuna, il y a lieu de lire :

« a) «Wallis-et-Futuna » au lieu de : « département » ;

« b) « administrateur supérieur » et « services de l'administrateur supérieur » au lieu de : « préfet » et « préfecture » ;

« c) « chef de circonscription territoriale » au lieu de : « sous-préfet ».

Art. L.O. 131. - Les inspecteurs généraux de l'administration en mission extraordinaire et les préfets ne peuvent être élus dans toute circonscription comprise dans le ressort dans lequel ils exercent ou dans lequel ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de trois ans.

Les sous-préfets et secrétaires généraux de préfecture sont inéligibles dans toutes les circonscriptions du département dans lesquelles ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins d'un an.

« Art. L.O. 438-3. - Pour l'application des articles L.O. 131 et L.O. 133, un décret pris après avis conforme du Conseil d'État déterminera celles des fonctions exercées en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna qui sont assimilées, quelle que soit la collectivité dont elles relèvent, aux fonctions énumérées auxdits articles.

Art. L.O. 133. - Ne peuvent être élus dans toute circonscription comprise dans le ressort dans lequel ils exercent ou dans lequel ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois :

1º Les inspecteurs généraux de l'économie nationale, les ingénieurs généraux des ponts et chaussées, les ingénieurs généraux des eaux et des forêts, du génie rural, et de l'agriculture, les contrôleurs généraux des services vétérinaires, chargés de circonscription ;

2º Les magistrats des cours d'appel ;

3º Les membres des tribunaux administratifs ;

4º Les magistrats des tribunaux ;

5º Les officiers des armées de terre, de mer et de l'air exerçant un commandement territorial ;

6º les recteurs et inspecteurs d'académie ;

7º Les inspecteurs régionaux et départementaux de la jeunesse et des sports, les inspecteurs de l'enseignement primaire, les inspecteurs de l'enseignement technique ;

8º Les trésoriers-payeurs généraux, les receveurs particuliers des finances ;

9º Les directeurs des impôts, les directeurs des douanes et les directeurs des enquêtes économiques ;

10° Les ingénieurs en chef, ingénieurs en chef adjoints et ingénieurs des ponts et chaussées ;

11º Les ingénieurs en chef, ingénieurs principaux et ingénieurs des eaux et forêts, chargés de circonscription; les ingénieurs en chef et ingénieurs des services agricoles chargés des fonctions de directeur des services agricoles ou d'inspecteur de la protection des végétaux; les ingénieurs en chef et ingénieurs du génie rural; les vétérinaires inspecteurs en chef, vétérinaires inspecteurs principaux et vétérinaires inspecteurs chargés des fonctions de directeur des services vétérinaires; les inspecteurs des lois sociales en agriculture ;

12º Les directeurs régionaux de la sécurité sociale, les inspecteurs divisionnaires du travail, les directeurs départementaux et inspecteurs du travail et de la main-d'œuvre ;

13º Les directeurs des organismes régionaux et locaux de sécurité sociale relevant du contrôle de la Cour des comptes et les directeurs des caisses régionales de crédit agricole ;

14º Les directeurs départementaux de l'action sanitaire et sociale ;

15º Les directeurs interdépartementaux des anciens combattants; les secrétaires généraux des offices départementaux des combattants ;

16º Les directeurs départementaux de la construction et de l'urbanisme ;

17º Les directeurs régionaux et départementaux des postes et télécommunications ;

18º Les chefs de division de préfecture, les inspecteurs départementaux des services d'incendie ;

19º Les directeurs départementaux de la police et commissaires de police.

Loi organique n° 85-689 du 10 juillet 1985 relative à l'élection des députés et des sénateurs dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie

Art. 6. -  Le nombre de sénateurs élus dans les territoires d'outre-mer est de trois.

II. -  Les articles 6 et 7 de la loi organique n° 85-689 du 10 juillet 1985 relative à l'élection des députés et des sénateurs dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie sont abrogés.

Un sénateur est élu en Nouvelle-Calédonie.

Art. 7. -  Les dispositions organiques du livre II du code électoral et les articles 2-1, 3 et 3-1 de la présente loi sont applicables à l'élection des sénateurs dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.

III. -  Les dispositions du I et du II prennent effet pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française à compter du prochain renouvellement de la série à laquelle elles appartiennent.

Article 7

Le siège du sénateur représentant l'ancien territoire des Afars et des Issas est supprimé.

Article 7

(Sans modification).

Code électoral

Livre III. - Dispositions particulières à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et à la collectivité territoriale de Mayotte

Article 8

I. -  Dans le chapitre V du titre II du livre III du code électoral, avant l'article L. 334-15, il est inséré un article L.O. 334-14-1 ainsi rédigé :

Article 8

(Sans modification).

« Art. L.O. 334-14-1. -  Deux sénateurs sont élus à Mayotte.

«  Les dispositions organiques du livre II du présent code sont applicables à l'élection des sénateurs de Mayotte. »

II. -  La loi organique n° 76-1217 du 28 décembre 1976 relative à l'élection du sénateur de Mayotte est abrogée.

III. -  Les dispositions des I et II prennent effet à compter du prochain renouvellement de la série à laquelle Mayotte appartient.

TABLEAU COMPARATIF
(Proposition de loi n° 937)

___

Texte de référence

___

Texte adopté par le Sénat
en première lecture

___

Propositions de la Commission

___

Code électoral

Tableau n° 6

Article 1er

Le tableau n° 6 annexé au code électoral et fixant le nombre de sénateurs représentant les départements est ainsi modifié :

Article 1er

(Alinéa sans modification).

Départements

Nombre de sénateurs

Ain

2

Alpes-Maritimes

4

Bouches-du-Rhône

7

Drôme

2

Eure-et-Loir

2

Garonne (Haute-)

4

Gironde

5

Hérault

3

Isère

4

Maine-et-Loire

3

Oise

3

Rhin (Bas-)

4

Rhin (Haut-)

3

Seine-et-Marne

4

Var

3

Vaucluse

2

Guadeloupe

2

Guyane

1

Réunion

3

Val-d'Oise

4

Yvelines

5

Départements

Nombre de sénateurs

Ain

3

Alpes-Maritimes

5

Bouches-du-Rhône

8

Drôme

3

Eure-et-Loir

3

Garonne (Haute-)

5

Gironde

6

Hérault

4

Isère

5

Maine-et-Loire

4

Oise

4

Rhin (Bas-)

5

Rhin (Haut-)

4

Seine-et-Marne

6

Var

4

Vaucluse

3

Guadeloupe

3

Guyane

2

Réunion

4

Val-d'Oise

5

Yvelines

6

Total

326

Départements

Nombre de sénateurs

Ain

(Sans modification).

Alpes-Maritimes

(Sans modification).

Bouches-du-Rhône

(Sans modification).

Creuse

1

Drôme

(Sans modification).

Eure-et-Loir

(Sans modification).

Garonne (Haute-)

(Sans modification).

Gironde

(Sans modification).

Hérault

(Sans modification).

Isère

(Sans modification).

Maine-et-Loire

(Sans modification).

Oise

(Sans modification).

Rhin (Bas-)

(Sans modification).

Rhin (Haut-)

(Sans modification).

Seine-et-Marne

(Sans modification).

Var

(Sans modification).

Vaucluse

(Sans modification).

Guadeloupe

(Sans modification).

Guyane

(Sans modification).

Réunion

(Sans modification).

Paris

9

Val-d'Oise

(Sans modification).

Yvelines

(Sans modification).

Total

322

(amendements nos 1, 2 et 3)

Article 2

I. -  La série 1 est composée des sièges de l'ancienne série B et des sièges des sénateurs de l'ancienne série C dont la durée du mandat a été fixée pour le renouvellement partiel de 2004 à six ans.

Article 2

La série 2 est composée des sièges de l'ancienne série A et des sièges des sénateurs de l'ancienne série C dont la durée du mandat a été fixée pour le renouvellement partiel de 2004 à neuf ans.

Tableau n° 5. -  Cf. infra

II. -  Une loi votée avant le renouvellement partiel de 2004 mettra à jour le tableau n° 5 annexé au code électoral à la suite du découpage des séries 1 et 2 par tirage au sort.

III. -  Les dispositions du I entreront en vigueur à compter du renouvellement partiel de 2010.

Tableau n° 5

IV. -  A titre transitoire, le tableau n° 5 annexé au code électoral et fixant la répartition des sièges de sénateurs entre les séries est ainsi modifié :

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation des départements

Ain à Indre

95

Indre-et-Loire à
Pyrénées-Orientales

94

Bas-Rhin à Yonne

62

Guyane

1

Réunion

3

Essonne à Yvelines

45

Guadeloupe, Martinique.

4

96

97

111

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation des collectivités d'outre-mer, et des Français établis hors de France

Polynésie
française

1

Nouvelle-Calédonie

1

Mayotte

1

Iles
Wallis-et-Futuna

1

Territoire des Affars et des Issas

1

Saint-Pierre-et-Miquelon

1

Français
établis hors de France

4

Français
établis hors de France

4

Français établis hors de France

4

102

103

117

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation des départements

Ain à Indre

Indre-et-Loire à
Pyrénées-Orientales

Bas-Rhin à Yonne

Essonne à Yvelines

Guyane

Réunion

Guadeloupe, Martinique.

SERIE A

SERIE B

SERIE C

Représentation de la Nouvelle-Calédonie, des collectivités d'outre-mer, et des Français établis hors de France

Polynésie
française

Nouvelle-Calédonie

Mayotte

Iles
Wallis-et-Futuna

Saint-Pierre-et-Miquelon

Français
établis hors de France

Français
établis hors de France

Français établis hors de France

Art. L. 440. -   La répartition des sièges de sénateurs s'effectue comme suit :

- Nouvelle-Calédonie : 1 ;

- Polynésie française : 1 ;

- Iles Wallis-et-Futuna : 1.

Article 3

I. -  L'article L. 440 du code électoral est abrogé.

Article 3

Art. L. 442. -   Le renouvellement du sénateur de la Polynésie française et du sénateur des îles Wallis-et-Futuna a lieu à la même date que celui des sénateurs de la série A prévue à l'article L.O. 276 ; le renouvellement du sénateur de la Nouvelle-Calédonie a lieu à la même date que celui des sénateurs de la série B prévue au même article.

II. -  L'article L. 442 du même code est ainsi modifié :

1° Les mots : « du sénateur de la Polynésie française » et « du sénateur de la Nouvelle-Calédonie » sont remplacés respectivement par les mots : « des sénateurs de la Polynésie française » et « des sénateurs de la Nouvelle-Calédonie » ;

2° Les mots : « série A » et « série B » sont remplacés respectivement par les mots : « série 2 » et « série 1 ».

III. -  Les dispositions du I et du 1° du II prennent effet à compter du prochain renouvellement de la série à laquelle la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française appartiennent.

Les dispositions du 2° du II prennent effet à compter du renouvellement partiel de 2010.

Loi n° 83-390 du 18 mai 1983 relative à l'élections des sénateurs représentant les Français établis hors de France

Art. 2. -  Dans chacune des colonnes du tableau n° 2 fixant la répartition des sièges de sénateur entre les séries et annexé à l'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l'ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l'élection des sénateurs, le nombre des sièges de sénateur représentant les Français établis hors de France est égal au tiers du chiffre fixé dans l'article 1er de la loi organique relative à la représentation au Sénat des Français établis hors de France.

Article 4

A compter du renouvellement de 2010, à l'article 2 de la loi n° 83-390 du 18 mai 1983 relative à l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France, les mots : « au tiers » sont remplacés par les mots : « à la moitié ».

Article 4



Code électoral

Art. L. 294. -  Dans les départements qui ont droit à deux sièges de sénateurs ou moins, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours.

Nul n'est élu sénateur au premier tour du scrutin s'il n'a réuni  :

Article 5

Le premier alinéa de l'article L. 294 du code électoral est ainsi rédigé :

« Dans les départements où sont élus trois sénateurs ou moins, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. »

Article 5

1º La majorité absolue des suffrages exprimés ;

2º Un nombre de voix égal au quart des électeurs inscrits.

Au second tour de scrutin, la majorité relative suffit. En cas d'égalité des suffrages, le plus âgé des candidats est élu.

Art. L. 295. -  Dans les départements qui ont droit à trois sièges de sénateurs ou plus, l'élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel.

Article 6

Le premier alinéa de l'article L. 295 du code électoral est ainsi rédigé :

« Dans les départements où sont élus quatre sénateurs ou plus, l'élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. »

Article 6

Sur chaque liste, les sièges sont attribués aux candidats d'après l'ordre de présentation.

Art. L. 52-3. -  Chaque candidat ou liste de candidats peut faire imprimer un emblème sur ses bulletins de vote.

Article 7 (nouveau)

L'article L. 52-3 du code électoral est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

Article 7

« Le libellé et, le cas échéant, la dimension des caractères des bulletins doivent être conformes aux prescriptions légales ou réglementaires édictées pour chaque catégorie d'élection :

« - pour les élections au scrutin majoritaire, les bulletins de vote ne peuvent comporter aucun nom propre autre que celui du ou des candidats ;

« - pour les élections au scrutin de liste, les listes présentées dans chacune des circonscriptions départementales ou régionales peuvent prendre une même dénomination afin d'être identifiées au niveau national. Il peut s'agir du nom d'un groupement ou parti politique et, le cas échéant, de celui de son représentant. »

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
(Proposition de loi organique n° 936)

Article 2

Amendement présenté par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

Rédiger ainsi cet article :

« L'article L.O. 276 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L.O. 276. -  Le Sénat se renouvelle intégralement. »

Article 3

Amendements présentés par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

·  Rédiger ainsi le dernier alinéa du I de cet article :

« Les douze sénateurs de la circonscription des Français établis hors de France sont élus en même temps et sont rattachés à la série 1 (ancienne série B). »

·  Rédiger ainsi le III de cet article :

« III. -  À titre transitoire, la durée du mandat des sénateurs représentant les Français établis hors de France éligibles en 2007 est fixée à trois ans. La durée du mandat des sénateurs éligibles en 2004 est de six ans. »

Après l'article 3

Amendement présenté par M. René Dosière :

Insérer l'article suivant :

« L'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959 complétant l'ordonnance n° 58-1098 du 15 novembre 1958 relative à l'élection des sénateurs est ainsi modifiée :

« I. -  L'article 13 est ainsi rédigé :

« Art. 13. -  Les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont élus par un collège de délégués formés des membres élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger et de délégués supplémentaires élus dans les conditions prévues à l'article suivant. Le nombre de délégués membres de ce collège est fixé à un délégué pour 3 000 électeurs inscrits sur la liste visée à l'article 2 de la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 relative au Conseil supérieur des Français de l'étranger, ou une fraction de ce nombre.

« II. -  Il est inséré, après l'article 13, un article 13-1 ainsi rédigé :

« Art. 13-1. -  Les délégués supplémentaires pour l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France sont élus par un collège formé des membres élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger.

« Leur élection ainsi que celle de leurs suppléants se déroulent sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir.

« Chaque membre élu du Conseil supérieur des Français de l'étranger peut présenter une liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants.

« L'ordre des suppléants résulte de leur rang de présentation. En cas de refus ou d'empêchement d'un délégué, le suppléant de la même liste venant immédiatement après le dernier délégué est appelé à le remplacer.

« Un membre élu du Conseil supérieur des Français de l'étranger empêché d'assister à la séance au cours de laquelle sont élus les délégués et les suppléants peut donner à un autre membre de son choix pouvoir écrit de voter en son nom. Un même membre ne peut être porteur que d'un seul pouvoir qui est toujours révocable.

« III. -  L'article 21 est ainsi rédigé :

« Art. 21. -  Les délégués pour l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France votent dans les locaux des ambassades et consulats ouverts à cet effet. »

Article 4

Amendement présenté par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

Dans le dernier alinéa de cet article, substituer aux mots : « trente ans », les mots : « vingt-trois ans ».

Article 5

Amendement présenté par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

Rédiger ainsi cet article :

« L'article L.O. 274 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L.O. 274. -  Le nombre de sénateurs élus dans les départements est de 304.

« La répartition est effectuée entre les départements sur la base d'un quotient de population fixé par la loi. Ce quotient est actualisé à l'issue de chaque recensement dans le but de maintenir constant l'effectif du Sénat. »

Après l'article 5

Amendement présenté par M. René Dosière :

Insérer l'article suivant :

« Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 280 du code électoral est supprimé. »

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
(Proposition de loi n° 937)

Article premier

Amendement présenté par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

Supprimer cet article.

Article 5

Amendements présentés par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

·  Supprimer cet article.

·  Rédiger ainsi cet article :

« Le premier alinéa de l'article L. 294 du code électoral est ainsi rédigé :

« Dans les départements où est élu un sénateur, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. »

Article 6

Amendements présentés par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

·  Supprimer cet article.

·  Rédiger ainsi cet article :

« Le premier alinéa de l'article L. 295 du code électoral est ainsi rédigé :

« Dans les départements où sont élus deux sénateurs ou plus, l'élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. »

Après l'article 7

Amendements présentés par M. Bernard Roman et les commissaires membres du groupe socialiste :

·  Insérer l'article suivant :

« L'article L. 284 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 284. -  Les conseils municipaux désignent un nombre de délégués déterminé en fonction de la population des communes, à raison d'un délégué pour 400 000 habitants ou une fraction de ce nombre. Le Conseil de Paris élit un nombre de délégués égal à dix fois son effectif.

« Lorsque le nombre de délégués est inférieur ou égal à l'effectif du conseil municipal, les délégués sont élus au sein de ce conseil.

« Lorsque le nombre de délégués est supérieur à l'effectif du conseil municipal, les membres de ce conseil sont délégués de droit, les autres délégués étant élus dans les conditions fixées à l'article L. 289. »

·  Insérer l'article suivant :

« L'article L. 284 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 284. -  Les conseils municipaux désignent un nombre de délégués déterminé en fonction de la population des communes, à raison d'un délégué pour 500 habitants ou une fraction de ce nombre. Le Conseil de Paris élit un nombre de délégués égal à dix fois son effectif.

« Lorsque le nombre de délégués est inférieur ou égal à l'effectif du conseil municipal, les délégués sont élus au sein de ce conseil.

« Lorsque le nombre de délégués est supérieur à l'effectif du conseil municipal, les membres de ce conseil sont délégués de droit, les autres délégués étant élus dans les conditions fixées à l'article L. 289. »

 

N° 1000 - Rapport sur les propositions de loi portant réforme de l'élection des Sénateurs (M. Jérôme Bignon)

1 () Décision n° 92-308 DC - Traité sur l'Union européenne.

2 () M. François Robbe, La représentation des collectivités territoriales par le Sénat, Étude sur l'article 24 alinéa 3 de la Constitution française du 4 octobre 1958, LGDJ, mars 2001.

3 () Décision n° 91-290 DC du 9 mai 1991 - Loi portant statut de la collectivité territoriale de Corse.

4 () Décision n° 2000-431 DC du 6 juillet 2000 - Loi relative à l'élection des sénateurs.

5 () Décision n° 86-208 DC des 1er et 2 juillet 1986 - Loi relative à l'élection des députés ; Décision n° 86-218 DC du 18 novembre 1986 - Loi relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés.

6 () Décision n° 2000-431 DC - Loi relative à l'élection des sénateurs.

7 () Loi organique n° 2000-594 du 5 avril 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux et loi n° 200-595 du 5 avril 2000 relative à la limitation du cumul de mandats électoraux et des fonctions électives.

8 () Décision n° 2000-43 DC du 6 juillet 2000 - Loi relative à l'élection des sénateurs et décision du 20 septembre 2001.

9 () Rapport n° 324 : La réforme de l'élection des sénateurs, 2002-2003.

10 () Décision n° 2003-468 DC - Loi relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques.

11 () La représentation des collectivités territoriales par le Sénat, Étude sur l'article 24 alinéa 3 de la Constitution française, LGDJ, mars 2001.

12 () JO, 25 décembre 1875, page 8585.

13 () Aux termes de l'article 2 du Règlement du Sénat, le Bureau « a tous pouvoirs pour présider aux délibérations du Sénat et pour organiser et diriger tous ses services dans les conditions déterminées par le présent règlement ».

14 () Devant le Comité consultatif Constitutionnel, M. Degoutte fit part de son désir que les sénateurs représentant les Français de l'étranger soient élus au suffrage universel direct, mais le commissaire du Gouvernement Raymond Janot fit observer que le fait d'organiser des élections sur un territoire étranger pouvait se concevoir à condition de réciprocité. Le Gouvernement ne souhaitait pas, a priori, accepter la tenue d'élections étrangères sur son territoire.

15 () Instance consultative créée en 1948, le Conseil supérieur des Français de l'étranger était, avant 1983, composé de trois types de membres :

- les membres de droit : les présidents des principales associations de Français de l'étranger, les six sénateurs représentant les Français hors de France, les anciens sénateurs des Français de l'étranger, sous certaines conditions ;

- les membres nommés par le ministre des relations extérieures en raison de leur compétence ;

- les membres élus par les associations des Français de l'étranger.

16 () J.O., débats Sénat, séance du 16 mars 2000, page 1416.

17 () Décision DC n° 2000-431 du 6 juillet 2000.

18 () Décision du 20 septembre 2001.

19 () Décision n° 2000-431 DC - Loi relative à l'élection des sénateurs.

20 () Rapport n° 427.

21 () JO, AN, débats, 1re séance du 27 septembre 1946, p. 4157.

22 () M. Jean Grangé, Les déformations de la représentation des collectivités territoriales et de la population au Sénat.

23 () Décision n° 2003-468 DC.


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