N° 1876 tome 3 - Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale , après déclaration d'urgence, pour 2005 (1830)




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N° 1876

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 octobre 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2005 (n° 1830)

TOME III


FAMILLE

PAR Mme Marie-Françoise Clergeau,

Députée.

--

INTRODUCTION 5

I.- LES COMPTES DE LA BRANCHE FAMILLE 9

A. LE CONTEXTE DÉMOGRAPHIQUE ET JURIDIQUE 9

1. Les facteurs démographiques 9

2. L'Impact financier des mesures décidées les années précédentes 9

B. LE DÉFICIT DE LA BRANCHE FAMILLE EN 2004 11

1. Le bilan de la branche famille pour les années 2003 et 2004 11

2. Les prévisions pour 2005 11

3. Des mesures d'économie pénalisant les familles modestes 12

C. L'ÉVOLUTION DES RECETTES 15

1. Les cotisations 15

2. Les impôts et taxes 17

3. Les subventions de l'Etat 17

D. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES 19

1. Une diminution en volume des prestations d'entretien 19

2. Une progression plus faible des prestations d'aide à la garde d'enfants 20

3. Une faible augmentation des aides au logement 20

4. Une progression soutenue des aides aux personnes handicapées 21

II.- LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS 23

A. LES DIFFÉRENTES FACETTES DE LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS 23

1. La pauvreté en termes de revenus 23

2. Une autre approche de la pauvreté : les conditions de vie dégradées 25

3. La pauvreté dans sa dimension culturelle 28

B. QUELQUES PISTES POUR LUTTER PLUS EFFICACEMENT CONTRE LA PAUVRETÉ DES ENFANTS 29

1. Accroître l'aspect redistributif des prestations familiales 29

2. Favoriser un meilleur accès à l'emploi pour les parents 30

3. Garantir un meilleur accès aux droits 31

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION 35

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI RELATIVES À LA FAMILLE 37

TITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES AUX AUTRES POLITIQUES DE SÉCURITÉ SOCIALE 37

Section 2 : Branche famille 37

Article 24 (article L. 531-2 du code de la sécurité sociale) : Majoration de la prime d'adoption 37

Article 25 (article L. 211-10 du code de l'action sociale et des familles) : Réforme du mode de financement de l'Union nationale des associations familiales 37

Article 26 : Prise en charge par la caisse nationale d'allocations familiales des majorations de pension pour enfants 43

Article 27 : Fixation de l'objectif national de dépenses de la branche famille pour 2005 44

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 45

INTRODUCTION

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 pourrait s'intituler « les espérances déçues d'une politique familiale » : aucune mesure phare, aucune annonce porteuse d'une nouvelle ambition pour la politique familiale.

Ce texte n'apporte aucune évolution positive à l'exception du doublement de la prime d'adoption.

Alors que les aides au logement et les prestations familiales jouent un rôle majeur dans la prévention de la pauvreté et de l'exclusion, le gouvernement a choisi de fragiliser les familles modestes et de privilégier les familles aisées en leur octroyant de nouvelles déductions fiscales pour les emplois familiaux.

De plus le gouvernement a profité de la revalorisation des barèmes des aides au logement pour modifier les règles de calcul des plafonds de ressources en supprimant l'abattement représentatif des frais de garde. Ces décrets parus au printemps dans la plus grande discrétion ne sont pas de pures mesures techniques de bonne gestion mais ont pour conséquences de réduire le niveau de prestations de nombreuses familles déjà fragilisées. Où sont donc les véritables priorités de ce gouvernement  qui affiche des objectifs de réduction de la fracture sociale mais qui agit tout différemment ?

Les objectifs ambitieux de la Conférence de la famille de 2002 qui avait pour thème l'autonomie des jeunes semblent être complètement oubliés. La dernière conférence de la famille sur l'adolescence n'a fait que prendre acte du malaise des adolescents et a cherché à médicaliser leurs comportements à risque.

Elle a proposé l'organisation de « maisons de l'adolescence » alors qu'il s'agit, en fait, de rebaptiser une partie des services de pédiatrie dans les dispensaires et les hôpitaux, pour faire la distinction entre les soins aux enfants en bas âge et les soins aux adolescents.

A aucun moment le gouvernement n'a voulu se saisir de la question centrale de la pauvreté croissante des adolescents des milieux défavorisés et de l'inadaptation de la politique familiale actuelle pour aider les familles à financer les études de leurs jeunes adultes.

La situation financière des étudiants ne cesse de se dégrader ; 45,5 % d'entre eux doivent prendre un emploi pendant leurs études, contre 37,2 % il y a cinq ans (dernier rapport de l'Observatoire de la vie étudiante) ; 100 000 étudiants sont en situation de précarité.

Rappelons quelques chiffres clés qui feront mieux comprendre l'urgence de la situation.

Pour vivre indépendamment, un étudiant a besoin d'un minimum de 900 € par mois. S'il vit dans sa famille, il coûte en moyenne 660 € (dont 450 € en provenance de sa famille). Un smicard qui élève deux adolescents est contraint de vivre 24 % en dessous du seuil de pauvreté.

Le soutien aux familles ayant à charge des étudiants a été mis en place en 1945, à une époque où seuls 10 % des jeunes étaient encore étudiants à 20 ans ; aujourd'hui, c'est plus de 65 % des jeunes qui font encore des études à cet âge (80 % des jeunes de 20 ans et encore 60 % des jeunes de 22 ans vivent chez leurs parents).

C'est ainsi que le versement des prestations familiales s'arrête au moment où les jeunes coûtent le plus cher : une famille de trois enfants qui gagne le SMIC perd plus de 400 € par mois entre le vingtième et le vingt et unième anniversaire de leur aîné.

Il est donc urgent de revoir l'ensemble des aides financières destinées aux étudiants.

Le système des bourses (qui repose sur des textes de 1925 !) est aussi désuet qu'inéquitable : 1,3 milliard d'euros lui est consacré avec des critères d'attribution qui ne reflètent en rien le niveau de vie des familles : les « points de charge » qui servent de quotient familial n'ont qu'un lointain rapport avec la réalité.

Les allocations de logement étudiant sont d'un montant de 150 € par mois environ et coûtent 1,5 milliard d'euros par an à l'Etat. Le système mis en place en 1993 a révélé de nombreux effets pervers mais il perdure faute de vouloir s'attaquer au problème. Pour décourager les demandes, on supprime aux parents les prestations familiales dues au titre de l'enfant bénéficiaire de l'allocation logement, ce qui conduit beaucoup de familles à renoncer à demander cette prestation.

Le présent projet de loi prévoit l'instauration d'un examen médical en classe de 5e pris en charge intégralement par l'assurance maladie. L'objectif est louable mais c'est aussi un bel aveu de d'impuissance pour l'Etat, incapable d'organiser un service de médecine scolaire digne de ce nom ! Depuis des années les parents d'élèves réclament davantage de médecins et d'infirmières scolaires dans les établissements et pour toute réponse il nous est proposé un examen médical, qui n'est même pas obligatoire, et qui devrait se dérouler dans les cabinets des praticiens libéraux !

Cette solution a dû être retenue car la pénurie de médecins scolaires rend impossible de pratiquer cet examen dans les locaux scolaires. En effet notre pays ne compte que 2 200, médecins soit un médecin pour 5 660 élèves ! Dans son rapport 2002 la Défenseure des enfants soulignait l'impuissance de la médecine scolaire qui ne peut travailler efficacement avec les autres acteurs du système de soins faute de disposer d'assez d'infirmières.

Il paraît indispensable de revoir le dispositif de cet examen pour prévoir qu'il devienne obligatoire dans les zones d'éducation prioritaire et qu'il se déroule dans les locaux scolaires avec le concours des médecins libéraux.

A quoi servirait cet examen médical qui est banal pour les jeunes des classes moyennes, mais qui peut être une occasion unique pour un adolescent dont la famille répugne à consulter faute de moyens financiers pour assumer les frais médicaux que peut engendrer une consultation.

Des mesures spécifiques auraient dû être annoncées dans la foulée du rapport du Centre d'étude des revenus et des coûts (CERC) qui en 2003 démontrait la gravité de la pauvreté des enfants. Selon les critères de définition de la pauvreté retenus, un à deux millions d'enfants vivraient en dessous du seuil de pauvreté en France, ce risque augmentant pour les adolescents du fait de l'inadaptation de la politique familiale qui est beaucoup plus efficace pour faciliter l'accueil des jeunes enfants que pour compenser le surcoût représenté par les adolescents.

C'est pourquoi ce rapport abordera la question de la pauvreté des enfants car la situation actuelle semble démontrer une détérioration des conditions de vie des familles en situation de précarité. Les derniers chiffres connus sur les bénéficiaires du RMI sont alarmants : 1,19 million de personnes sont allocataires soit une progression de 9,6 % en un an !

Notre politique familiale manque d'imagination pour s'adapter aux conditions de vie actuelles des familles.

La rapporteure demande au gouvernement d'étudier de manière urgente comment renforcer l'aspect redistributif des prestations familiales pour aider prioritairement les familles fragilisées et tenir compte des frais spécifiques liés à la scolarité des étudiants. Il conviendrait par exemple d'évaluer précisément le coût que représenteraient le versement des allocations familiales jusqu'à 22 ans, la majoration de la prime de rentrée scolaire pour les enfants de l'enseignement technique et la majoration du RMI pour les familles ayant des adolescents à charge.

La pauvreté conduit aussi certains parents à se replier sur eux-mêmes et rend très difficile l'exercice de leur autorité parentale. Notre politique familiale devrait œuvrer plus efficacement pour aider les parents à assumer leur rôle éducatif. Seul un accompagnement social global, pratiqué par des professionnels formés à l'approche des publics en situation de précarité, pourra permettre de sortir d'une logique de guichet qui distribue des prestations alors que la pauvreté conduit à une exclusion beaucoup plus globale qui se reproduit d'une génération à l'autre.

Les initiatives lancées par ATD Quart Monde doivent être saluées et devraient inspirer les pouvoirs publics car elles permettent à des familles fragilisées de retrouver leur dignité et de se réapproprier leur propre histoire, au lieu de continuer à être les simples bénéficiaires de politiques sociales souvent peu adaptées pour surmonter les handicaps culturels qui sont autant d'entraves pour sortir durablement de la pauvreté.

I.- LES COMPTES DE LA BRANCHE FAMILLE

A. LE CONTEXTE DÉMOGRAPHIQUE ET JURIDIQUE

1. Les facteurs démographiques

Les résultats de la branche famille sont largement dépendants de facteurs démographiques, à savoir le nombre de naissances, l'âge des enfants et la taille des familles. Le nombre des naissances demeure important depuis 2000 et se situe à hauteur de 760 000 en métropole. En 2004 l'hypothèse retenue est celle d'une stabilité des naissances, ce qui signifie que les entrées potentielles d'enfants dans les dispositifs de prestations familiales sont stables mais relativement élevées à législation constante.

Comme en 2003, les sorties en 2004 des dispositifs d'aide à la petite enfance - allocation pour jeune enfant (APJE), allocation parentale d'éducation (APE), aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA), allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) - devraient être nombreuses en raison du nombre élevé de naissances en 2000 et 2001. En revanche le faible dynamisme de la natalité en 1984 et 1985 devrait se traduire par un nombre de sorties des allocations familiales plus faible que par le passé.

La taille des familles allocataires se réduit et la part des familles de plus de cinq enfants a baissé de plus de 30 % par rapport à 1990 alors que celle des familles avec un enfant a progressé de 40 %. La branche famille est aussi confrontée à la très forte augmentation du nombre de familles monoparentales dont le taux de progression est de 22 % entre 1990 et 2000, 13 % des enfants de moins de 15 ans étant élevé dans une famille monoparentale contre 9 % selon les indications du recensement de 1990.

Les dépenses sont aussi conditionnées par les décisions de revalorisation des bases de calcul. La plupart des prestations sont égales à un pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF) qui a été revalorisé de 1,7 % en 2003 et en 2004 alors que le taux était de 2,1 % pour 2002. Seules l'AFEAMA, l'AGED, l'ALF et l'AHH évoluent indépendamment de cette base, les deux premières étant souvent corrélées aux évolutions du SMIC, la troisième dépendant de plusieurs indices dont celui du coût de la construction et la dernière suivant la revalorisation des pensions retraite.

2. L'impact financier des mesures décidées les années précédentes

De nombreuses mesures ont une incidence sur les comptes de la branche famille entre 2001 et 2003.

· Loi de financement pour 2001

- Création de l'allocation de présence parentale (APP) ayant pour objectif d'aider les parents d'un enfant gravement malade, handicapé ou accidenté, et dont l'état de santé nécessite une présence et des soins continus de la part d'un des parents, qui réduit donc son activité professionnelle ;

- Autorisation de cumul de l'allocation parentale d'éducation (APE) avec un revenu d'activité afin d'inciter à des sorties anticipées de la prestation ;

- Réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA) visant à ouvrir aux familles modestes l'accès au mode de garde concerné dans des conditions financières proches de celles existantes dans les crèches.

· Loi de financement pour 2002 

- Réforme du système des compléments d'allocation d'éducation spéciale (AES) afin d'éliminer les disparités locales constatées jusqu'alors ;

- Création du congé de paternité, prestation assimilée à une indemnité journalière maladie mais prise en charge par la CNAF et qui n'est donc pas comptabilisée parmi les prestations légales.

- Loi de financement pour 2003 :

- Création de la mesure dite « grands enfants » ou « allocation forfaitaire » qui figure dans les dispositions de l'article 58.

Cette mesure est destinée à atténuer la perte de revenus que subissent les familles bénéficiaires des allocations familiales lorsque l'aîné atteint son vingtième anniversaire, soit l'âge limite de versement des allocations familiales. En effet, les familles perdent le bénéfice des allocations familiales alors qu'elles continuent très souvent à assumer la charge des enfants, perte d'autant plus lourde que la famille est nombreuse.

La mesure a pour objet de verser un montant d'allocation forfaitaire d'un montant de 70 euros mensuel par enfant aux familles ayant au moins trois enfants à charge et qui perdent le bénéfice des allocations familiales.

· Loi de financement pour 2004 

- Mise en place progressive de la prestation d'accueil du jeune enfant dont le coût est évalué à 140 millions d'euros pour 2004.

· Aides au logement 

Concernant les aides au logement, les mesures ont été nombreuses depuis quatre ans :

- amélioration de la solvabilisation des aides au logement (loi de financement de la sécurité sociale pour  1999 et suivantes) ;

- rapprochement des loyers plafond de l'ALF et de l'APL (loi de financement de la sécurité sociale pour 1999) ;

- passage de 20 à 21 ans de l'âge limite de prise en compte des enfants dans le calcul des aides (loi de financement de la sécurité sociale pour 2000) ;

- mise en place d'un barème unique pour tous les locataires bénéficiaires d'aides au logement (loi de financement de la sécurité sociale de 2001).

B. LE DÉFICIT DE LA BRANCHE FAMILLE EN 2004

1. Le bilan de la branche famille pour les années 2003 et 2004

En 2003, pour la cinquième année consécutive les comptes de la branche famille sont excédentaires mais cet excédent est en forte régression : 426 millions d'euros contre 1 029 millions en 2002. Cette évolution s'explique par une progression des prestations sociales à un rythme légèrement inférieur (2,16 %) à celui des produits issus des cotisations, impôts et produits affectés (2,27 %). De plus la branche a bénéficié d'une augmentation des reprises sur amortissements de 270 millions d'euros par rapport à 2003 en raison du remboursement à la branche famille d'une créance sur le FOREC. La dégradation des résultats est due à la forte progression de la contribution au financement du FSV en application de l'article 59 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

Pour la première fois depuis 1998 la branche famille devrait être en déficit pour 2004, selon les estimations de la commission des comptes de la sécurité sociale. La CNAF serait déficitaire de 183 millions d'euros en raison d'une progression sensible des prestations (+ 3,5 %). L'évolution sera contrastée selon les prestations avec une majoration des dépenses pour les allocations logement et les prestations extra-légales en raison notamment du transfert aux caisses d'allocations familiales des prestations de services des crèches auparavant financées par l'Etat.

Les cotisations du secteur privé devraient croître un peu plus rapidement qu'en 2003 mais les cotisations des travailleurs indépendants et du secteur public devraient en revanche connaître une plus faible progression.

2. Les prévisions pour 2005

La progression des dépenses de prestation devrait se ralentir avec un taux estimé à 2,8 %, ce qui devrait conduire à un retour à l'équilibre ou à un très faible déficit en 2005. Les allocations logement devraient connaître une moindre progression en raison des mesures d'économies mises en œuvre et de l'absence de revalorisation des barèmes au 1er juillet 2004, en revanche le montant des prises en charge des cotisations de retraite pour les parents au foyer devraient augmenter fortement (5,8 %) en raison de deux importantes revalorisations successives du SMIC au 1er juillet 2003 et 2004. Quant aux recettes elles devraient connaître une progression favorable en raison notamment des prévisions de croissance de la masse salariale (+ 4 %).

En 2005 la CNAF devra faire face à une augmentation importante de ses allocataires avec le transfert de gestion des prestations familiales des fonctionnaires de métropole. Au 1er janvier 2005, ce sont 180 000 nouveaux allocataires qui seront gérés par les Caf puis en juillet les allocataires de l'Education nationale seront concernés. Les fonctionnaires continueront à bénéficier de l'action sociale individuelle de leur administration. Pour le moment les conditions financières ne sont pas connues et il est impossible de savoir comment l'Etat assumera la compensation des cotisations « employeurs » d'allocation familiale. La rapporteure s'attachera donc à veiller à ce que ce transfert ne se traduise par une nouvelle dégradation des comptes de la branche en raison d'une non compensation par l'Etat de ces charges.

La commission des comptes estime que la branche famille « qui est structurellement excédentaire devrait retrouver spontanément l'équilibre à moyen terme, lorsque la montée en charge de la PAJE sera achevée ». Même si la situation de la branche famille est beaucoup moins préoccupante que les autres secteurs de la sécurité sociale, il convient de rester vigilant pour éviter que le budget d'action sociale ne fasse les frais de cette détérioration des comptes et que des mesures apparemment techniques ne viennent exclure de nombreuses familles de l'accès aux prestations.

3. Des mesures d'économie pénalisant les familles modestes

· La prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE)

Certaines réformes sont annoncées comme de grands progrès mais se traduisent aussi par certaines restrictions dans l'accès aux prestations. Prenons pour exemple la PAJE qui a durci les conditions pour bénéficier de l'allocation de libre choix d'activité (ex-allocation parentale d'éducation).

Dorénavant, pour avoir droit à la prestation, les mères de trois enfants et plus doivent avoir travaillé deux ans dans les cinq ans qui précèdent chaque naissance alors qu'avant, il suffisait d'avoir travaillé deux ans dans les dix ans qui précédaient la troisième naissance.

Il est encore trop tôt pour disposer d'un bilan de la PAJE mais certains effets d'éviction risquent d'être constatés.

· Les aides au logement

Avec neuf mois de retard, le gouvernement a fait connaître les barèmes des aides personnelles au logement. Prenant argument des « contraintes budgétaires » et de la recherche d'une « meilleure équité », ces nouveaux barèmes se traduiront en fait par un accroissement du taux d'effort des ménages et des familles notamment en raison de la non-prise en compte de l'augmentation réelle des loyers et d'un « forfait charges » inchangé.

De plus, l'augmentation de 15 € à 24 € (+ 60 %) du montant mensuel en deçà duquel les aides ne seront plus versées (soit 288 € par an) va exclure un grand nombre de familles du bénéfice de ces aides(selon la CNAF environ 75 000 familles). Désormais, une famille de deux enfants ayant un salaire net de 1 900 euros par mois ne bénéficiera plus d'aucune aide. Cette disposition serait justifiée par les coûts de gestion générés pour de si petites sommes. Si tel est réellement le cas, pourquoi dès lors ne pas avoir recours à un versement unique annuel ? (décrets n° 2004-463 et n° 2004-464 du 28 mai 2004)

Compte tenu de l'application de nouvelles mesures techniques réduisant notamment les prestations pour les allocataires chômeurs et les retraités ayant élevé trois enfants, le coût de cette revalorisation ne sera pas comme indiqué de 223 millions d'euros mais se limitera à 55 millions d'euros. Force est de constater que ces mesures dites « d'équité » se traduisent toutes par des réductions des prestations, et que ces économies s'inscrivent dans le cadre de la baisse des crédits votés dans la loi de finances 2004, loi qui a également entériné le recul des financements de l'État consacrés à la construction du logement social.

· Mesures d'économie liées à la revalorisation des plafonds de ressources

Dans un souci de meilleure gestion de la branche famille le ministère a publié deux décrets visant à modifier la prise en compte des revenus pour les allocations versées sous conditions de ressources, qui représentent aujourd'hui 60 % des prestations (décrets n° 2004-710 et n° 2004-711 du 15 juillet 2004). C'est ainsi qu'il a été décidé que les frais de garde des enfants ne seront plus déductibles des ressources prises en compte pour bénéficier des prestations familiales. Jusqu'à présent, les familles faisant garder un enfant de moins de 7 ans pouvaient déduire 762 € des revenus qu'elles déclaraient à la CAF. Au 1er juillet 2004, cette déduction disparaît. Cette décision est défavorable pour :

- toutes les familles modestes bénéficiaires de l'allocation logement, soit 500 000 familles. Sur ce total on peut évaluer à 100 000 familles les allocataires directement concernés par ces restrictions. Pour un ménage au SMIC avec deux enfants, le manque à gagner est de 30 € par mois ; avec 2 SMIC il est plus fort encore : 74 € par mois ! Cette mesure devrait générer 40 millions d'euros d'économies.

- 60 000 familles issues des classes moyennes qui étaient aux limites du droit à l'allocation de rentrée scolaire ou à l'allocation pour jeune enfant ; voilà une prime de 257 € par enfant et un revenu de 161 € par mois qui s'envolent !

Dans la même logique les droits des chômeurs ne seront réexaminés que deux mois après leur perte d'emploi.

En cas de chômage, en effet, la CAF recalcule les droits de la famille en pratiquant un abattement de 30 % sur les ressources du chômeur. Ce recalcul s'effectuait à compter du mois qui suivait le licenciement. Désormais, il va falloir attendre deux mois ! Cette mesure devrait économiser environ 20 millions d'euros et concerner 80 000 familles.

Il convient de souligner que la revalorisation des plafonds de ressources est plus faible que l'augmentation des salaires.

Depuis 1995, les plafonds de ressources ne suivent plus l'évolution des salaires. Ils sont strictement indexés sur les prix de sorte que d'année en année, de plus en plus de familles issues des classes moyennes sont privées du droit aux prestations sous conditions de ressources. En neuf ans, les salaires ont progressé de 7 % plus vite que l'inflation ce qui a déjà écarté 40 000 familles du droit aux prestations familiales concernées soit une économie annuelle d'environ 60 millions d'Euros. Par ailleurs, la faible revalorisation de la base mensuelle de calcul (BMAF) ne permet pas aux prestations familiales de gagner « en pouvoir d'achat », la revalorisation annuelle permettant tout juste de limiter les effets de l'inflation.

Evolution indiciaire des prix, du salaire moyen, du SMIC horaire
et de la BMAF

Année

Prix à la consommation hors tabac

SMPT (1) 

Smic brut
moyen (2)

BMAF (3)

1990

100,0

100,0

100,1

100,0

1991

103,2

104,3

104,9

102,9

1992

105,6

108,1

109,0

105,2

1993

107,5

110,6

111,8

108,4

1994

109,0

112,6

114,3

110,5

1995

110,8

115,1

117,8

111,9

1996

112,9

117,6

122,0

112,0

1997

114,1

120,2

125,6

113,6

1998

114,8

122,3

129,3

114,9

1999

115,3

124,3

131,4

115,7

2000

117,2

126,5

134,3

116,3

2001

119,0

129,6

139,2

118,4

2002

121,0

132,8

143,8

120,9

2003

123,4

136,1

149,3

122,9

2004

-

-

157,6

125,0

(1) Salaire moyen annuel brut par tête de l'ensemble des salariés des secteurs marchands non agricoles, croissance moyenne annuelle.

(2) Taux de croissance en euros courants.

(3) Moyenne annuelle ; taux de croissance en euros courants

Sources : INSEE (SMIC et PRIX), DARES (SMPT), CNAF (BMAF)

Ces quelques exemples illustrent la politique contradictoire menée par le gouvernement : d'un côté, le gouvernement fait des effets d'annonce en affichant avec la PAGE 1,2 milliard d'euros de plus en faveur des familles (en réalité 140 millions seulement en 2004) ; d'un autre, il procède à de discrètes et efficaces économies sur leurs prestations.

Ces mesures d'économie contrastent avec certaines mesures clientélistes proposées dans le projet de loi de finances pour 2005 notamment celle visant les emplois familiaux. Le plafond de dépenses ouvrant droit à une réduction d'impôt connaîtra une hausse substantielle de 10 000 à 15 000 euros. Cette mesure devrait concerner moins de 40 000 familles très aisées. A titre d'exemple, cette mesure aura pour effet de rendre non imposable un couple avec deux enfants disposant d'un revenu imposable mensuel de près de 4 600 euros (55 000 euros par an).Cette réforme n'améliora pas réellement l'accueil des jeunes enfants mais est le symbole d'une politique basée sur l'initiative individuelle alors que les modes collectifs de garde sont sacrifiés.

C. L'ÉVOLUTION DES RECETTES

Les comptes de la CNAF retracent les recettes et les dépenses de tous les régimes servant des prestations familiales en métropole et dans les départements d'outre-mer.

Les recettes de la branche famille sont constituées de quatre sources principales : les cotisations dues par les employeurs et assises sur les revenus professionnels, les remboursements d'exonérations de cotisations par l'État correspondant notamment aux mesures liées aux bas salaires et aux dispositifs d'aide à l'emploi, la contribution sociale généralisée et enfin les remboursements par l'État pour l'allocation aux adultes handicapés et l'allocation pour parent isolé. La branche famille perçoit 15 % du total des cotisations des régimes de base.

1. Les cotisations

Les recettes de la branche famille proviennent essentiellement des cotisations (à hauteur de 59 % environ), qui sont dans cette branche entièrement à la charge des employeurs et s'élèvent à 28,5 milliards d'euros pour 2003. Depuis le 1er janvier 1998, les cotisations des employeurs et travailleurs indépendants ont été entièrement déplafonnées.

Les ressources de la CNAF

graphique

Répartition des cotisations par branche tous régimes

(En millions d'euros)

2002

2003

%

2004

%

2005

%

Maladie

63 005

64 780

2,8

66 190

2,2

67 477

1,9

AT-MP

7 252

7 455

2,8

7 588

1,8

7 666

1,0

Famille

27 257

28 026

2,8

28 533

1,8

29 091

2,0

Vieillesse

79 298

81 702

3,0

83 833

2,6

85 680

2,2

Total

176 811

181 963

2,9

186 144

2,3

189 914

2,0

dont régime général

140 290

143 766

2

146 721

2,1

149 437

1,9

Source : direction de la sécurité sociale

Comme pour les autres branches, la progression des cotisations sociales affectées à la branche famille a ralenti en 2003 : +3 % alors que les charges globales augmentent de 4,4 %.

2. Les impôts et taxes

Le montant total de ces recettes s'élève pour 2003 à 9,73 milliards d'euros et devrait s'établir pour 2004 à 9,9 milliards d'euros, les prévisions pour 2005 étant de 10,2 milliards.

Depuis 2001 ce poste ne comprend plus que la seule CSG. En effet l'article 31 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a supprimé le versement à la branche famille du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et les revenus de placement pour l'affecter au financement des retraites. La CNAF ne perçoit donc plus d'impôt ni de taxe affectés.

Impôts et taxes affectés par branche
tous régimes et pour les fonds

(en millions d'euros)

2002

2003

%

2004

%

2005

%

Maladie

48 945

50 891

4,0

53 584

5,3

59 260

10,6

AT-MP

23

20

22

22

Famille

9 483

9 723

2,5

9 947

2,3

10 291

3,5

Vieillesse

3 775

2 941

-22,1

4 029

37,0

3 806

-5,5

Total tous régimes

62 227

63 575

2,2

67 582

6,3

73 379

8,6

dont régime général

49 571

51 015

2,9

52 965

3,8

58 974

11,3

Fonds

26 748

27 286

2,0

12 412

-54,5

11 883

-4,3

Ensemble

88 975

90 861

2,1

79 994

-12,0

85 262

6,6

Source : direction de la sécurité sociale

La ligne Fonds comprend le FOREC (jusqu'en 2003 inclus), le FSV et le FRR.

3. Les subventions de l'Etat

Les subventions de l'Etat correspondent à la prise en charge des prestations servies par la branche famille pour le compte de celui-ci.

Il s'agit de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), du solde des cotisations d'allocations familiales dues par l'Etat et des prestations servies aux fonctionnaires et, depuis 1999, de l'allocation de parent isolé (API). Ces remboursements ne couvrent que le montant des prestations, les coûts de gestion induits par cette activité n'étant pas pris en charge par l'État.

Il faut, par contre, rappeler que la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (ARS) étant désormais entièrement intégrée dans l'allocation de base et financée par la branche famille, elle ne donne plus lieu à transfert.

Remboursement de prestations par l'Etat
à la Caisse nationale d'allocation familiales

(en millions d'euros)

2002

%

2003

%

2004

AAH

4 430

4,6

4 631

4,5

4 851

API

796

5,6

834

4,8

865

TOTAL

5 226

4,9

5 465

4,63

5 716

Source : commission des comptes de la sécurité sociale

La branche famille a versé en 2003 un total de 32,9 milliards de prestations légales, soit une augmentation de 2,1 % par rapport à 2002. Cette progression est nettement inférieure à celle enregistrée en 2002 (+ 3,2 %).

Plusieurs facteurs expliquent ce ralentissement :

- la moindre revalorisation de la base mensuelle (BMAF) au 1er janvier 2003 (+ 1,7 % contre 2,1 % en 2002) ;

- la fin de la montée en charge de la réforme des allocations logement et la non-revalorisation du barème en 2003 (progression des dépenses de 1,2 % contre 6,1 % en 2002) ;

- un tassement de la progression des prestations liées à la petite enfance en raison de la sortie du dispositif des enfants nés en 2000 qui forme une génération nombreuse par rapport à 1999.

En 2004 les dépenses devraient s'élever à 34 milliards en raison de mesures nouvelles générant une dépense supplémentaire de 230 millions d'euros.

L'évolution des dépenses est très contrastée selon les prestations.

D. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES

Masses financières des prestations familiales et évolution

2002

2003

%

2004

%

2005

%

Total des prestations légales

32 237

32 910

2,1

34 069

3,5

35 017

2,8

Prestations d'entretien

17 404

17 677

1,6

16 967

- 4,0

16 498

- 2,8

- Allocations familiales

11 258

11 447

1,7

11 705

2,2

11 705

0,0

- Complément familial

1 555

1 556

0,1

1 570

0,9

1 570

0,0

- Allocation pour jeune enfant

2 823

2 820

- 0,1

1 741

- 38,3

934

- 46,3

- Allocation d'adoption

3

4

21,4

3

- 15,0

2

- 30,0

- Allocation de soutien familial

955

992

3,8

1 033

4,1

1 077

4,2

- Allocation de parent isolé

796

833

4,7

880

5,7

880

0,0

- Allocation de présence parentale

18

29

60,0

34

20,0

34

0,0

Prestations pour la garde des enfants

5 177

5 315

2,7

4 951

- 6,8

3 263

- 34,1

- Allocation parentale d'éducation

2 996

3 034

1,3

2 740

- 9,7

1 677

- 38,8

- Afeama

2 065

2 168

5,0

2 097

- 3,3

1 449

- 28,8

- Aged

116

113

- 1,9

114

0,8

92

- 19,8

Prestations en faveur de l'éducation (ARS)

1 353

1 338

- 1,1

1 346

0,6

1 361

- 19,8

Prestations en faveur du logement (ALF)

3 228

3 267

1,2

3 370

3,2

3 375

1,1

Prestations en faveur des handicapés

4 818

5 045

4,7

5 277

4,6

5 498

0,2

- AAH

4 430

4 577

3,3

4 773

4,3

4 974

4,2

- AES

388-

468

20,8

503

7,6

524

4,1

Paje

-

-

-

1 880

-

4 733

-

- Prime de naissance et allocation de base

-

-

-

1 262

-

2 458

-

- Complément d'aide à la garde

-

-

-

295

-

1 160

-

- Complément d'activité

-

-

-

324

-

1 115

-

Autres prestations

257

267

3,9

278

4,0

289

4,0

Prestations extralégales

2 363

2 449

3,6

2 645

8,0

2 837

7,3

Contribution de la Cnaf au FNH et au Fnal

3 135

3 183

1,5

3 230

1,5

3 225

- 0,2

Source : Direction de la Sécurité sociale (SDEPF/GA).

1. Une diminution en volume des prestations d'entretien

Les allocations familiales, le complément familial, et l'allocation pour jeune enfant diminuent en volume pour des raisons démographiques, car les effectifs des ménages bénéficiaires potentiels ont tendance à se stabiliser voire à se réduire. De plus la diminution tendancielle de la taille des familles vient réduire le montant des prestations versées.

A l'opposé l'allocation de soutien familial et l'allocation de parent isolé conservent une croissance soutenue en raison de l'augmentation du nombre de familles monoparentales et de la conjoncture économique difficile.

2. Une progression plus faible des prestations d'aide à la garde d'enfants

On constate un net ralentissement des dépenses avec une progression des dépenses de 0,1 % contre 2,9 % en 2001, alors que la progression avait été de 5,6 % en 2002 par rapport à 2001.

Cette évolution recouvre des tendances différentes selon les trois prestations.

L'allocation parentale d'éducation n'a progressé que de 1,3 %, le nombre de bénéficiaires restant stable ; l'aide pour l'emploi d'une assistante maternelle a poursuivi une hausse significative de + 5 % ; l'aide à la garde à domicile (AGED) a connu une baisse beaucoup moins forte que les années précédentes.

La rapporteure regrette que la politique menée par le précédent gouvernement en faveur des structures collectives de garde n'ait pas été poursuivie car l'accueil en crèche permet de mieux sociabiliser les enfants de familles en situation de précarité. Il aurait fallu renforcer les initiatives récentes qui prévoyaient de garder des places en crèche pour permettre l'intégration d'enfants handicapés. Le gouvernement actuel a lui choisi de privilégier les modes de garde individuels comme l'illustre l'encouragement aux emplois familiaux par l'augmentation des avantages fiscaux.

3. Une faible augmentation des aides au logement

Plus de la moitié des allocataires perçoivent des aides au logement, ce qui représente 5,6 millions de personnes et avec les ayants droit 12,8 millions de personnes, soit 21 % de la population. Les publics bénéficiaires de ces aides sont assez contrastés. L'APL concerne potentiellement toute personne habitant un logement conventionné. L'ALF est réservée aux familles et concentre des allocataires d'âge intermédiaire. A contrario l'ALS bénéficie plutôt à des allocataires de moins de 25 ans ou âgés.

Le nombre de bénéficiaires est en diminution sensible par rapport à 2002 (- 1,5 %) Cette évolution est liée à un retard constaté dans l'actualisation du barème Les évolutions sont assez contrastées selon le type de prestations : l'APL baisse de 2,6 % (l'APL en accession baissant tout particulièrement), l'ALF est en diminution de 1,7 % tandis que l'ALS est stable.

La stabilité du nombre de bénéficiaires de l'ALS est un indicateur du maintien des problèmes d'insertion notamment chez les jeunes, le nombre d'allocataires de cette prestation ayant tendance à baisser quand la conjoncture économique s'améliore.

4. Une progression soutenue des aides aux personnes handicapées

L'allocation d'éducation spéciale connaît sur les années récentes une évolution plus rapide que les autres prestations de la branche avec une progression de 5 % annuelle en moyenne. Compte tenu de la stabilité des effectifs, il semblerait que cette augmentation soit liée à l'abaissement de l'âge moyen des bénéficiaires qui perçoivent cette allocation de plus en plus jeunes.

Quant à l'allocation adulte handicapé, il convient de souligner un infléchissement de la progression du nombre de bénéficiaires en 2003 avec un taux de 2,2 % contre 2,7 % pour l'année précédente. Cependant cette prestation a été très dynamique depuis vingt ans puisque les bénéficiaires ont augmenté de 28 % depuis 1994, soit une progression annuelle moyenne de 2,7 %.

En réalité les facteurs démographiques ne sont pas déterminants et ils n'expliquent que 0,6 % de l'augmentation des dépenses alors que d'autres facteurs sont beaucoup plus importants :

- une augmentation du taux de prévalence du handicap qui est liée au gain d'espérance de vie des personnes handicapées ;

- une meilleure reconnaissance du handicap par les Cotorep , ces organismes accordant plus facilement le bénéfice du statut de personne handicapée (les accords ont augmenté de 2,9 % en moyenne depuis vingt ans). Ce phénomène est très marquant pour les taux d'incapacité permanente compris entre 50 et 79 % avec des progressions dans les décisions positives de près de 5 % par an sur la même période ;

- les personnes éligibles à cette prestation sont plus nombreuses qu'auparavant compte tenu de la difficulté d'insertion professionnelle des personnes légèrement handicapées qui se retrouvent sans ressources et peuvent donc percevoir l'AAH qui est une allocation différentielle.

Rappelons que cette allocation, classée parmi les minima sociaux, a connu des évolutions contrastées dans les années précédentes avec plusieurs coups de pouce décidés en 1994, 1996 et 1999 ; mais la progression de cette dépense n'a été que de 1,3 % en moyenne annuelle depuis 1994. En revanche la structure des dépenses a beaucoup évolué : la part des allocations servies à taux plein a progressé plus vite (3,5 % en moyenne annuelle) que celles versées à taux réduit.

La rapporteure rappelle l'urgence de revoir le mode d'indexation de cette allocation qui devrait au moins connaître une évolution similaire au SMIC et la nécessité d'augmenter sensiblement son montant car les personnes handicapées supportent des charges spécifiques pour aménager leur environnement et ne reçoivent pour cela aucun dédommagement. De plus, faute de ressources suffisantes, elles ne peuvent accéder aux activités sportives culturelles ce qu accentue les risques d'isolement.

II.- LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS

A. LES DIFFÉRENTES FACETTES DE LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS

Le Conseil européen donnait en 1984 la définition suivante de la pauvreté : « Des personnes vivent dans des situations de pauvreté si leurs revenus et leurs ressources (matérielles, culturelles et sociales) sont à ce point insuffisants qu'elles les empêchent d'avoir des conditions de vie considérées comme acceptables dans le pays membre où ils vivent. »

Cette définition souligne que la pauvreté est un phénomène relatif qui ne peut se réduire à des critères monétaires. Le phénomène d'exclusion qu'engendre la pauvreté est beaucoup plus complexe et doit être analysé dans ses effets dynamiques car s'agissant d'enfants, l'insuffisance de ressources peut les empêcher de connaître à l'âge adulte les conditions de vie acceptables, la précarité de leur enfance générant une nouvelle forme d'exclusion à l'âge adulte notamment à cause d'une formation de mauvaise qualité.

1. La pauvreté en termes de revenus

Les critères de la « pauvreté monétaire » ne sont pas uniformes en Europe. Si l'on retient le seuil de 50 % du revenu médian il y aurait près d'un million d'enfants soit 8 % des enfants qui vivraient en situation de pauvreté, ce chiffre augmentant très fortement si on retient le critère européen de 60 % du revenu médian car la pauvreté toucherait alors près de deux millions de mineurs, soit 16 % de l'ensemble des enfants.

Une autre manière de quantifier la pauvreté des enfants consiste à rappeler que 600 000 enfants sont bénéficiaires, par l'intermédiaire de leur famille, du RMI et que pour l'allocation de parent isolé ce chiffre atteint près de 300 000 mineurs.

Peu d'études ont analysé la persistance de la pauvreté et ses conséquences spécifiques au regard d'une situation transitoire de pauvreté due à un accident ponctuel professionnel ou personnel des parents. Il semble pourtant que la persistance de la pauvreté pour des enfants jeunes est un facteur important d'exclusion sociale. Selon une étude menée en 2002 il semblerait que quatre enfants pauvres sur dix connaissent une situation de pauvreté d'au moins trois ans consécutifs. Cette estimation est corroborée par l'exploitation des fichiers des titulaires du RMI selon laquelle la moitié environ des enfants de famille percevant le RMI était dans cette situation depuis plus de trois ans.

Cette persistance de la pauvreté semble plus importante pour les familles avec enfants que pour les couples sans enfants. On estime en effet que la moitié des ménages qui éprouvent des difficultés de conditions de vie se retrouvent dans la même situation l'année d'après. Concernant le RMI, 30 % des allocataires fin 2001 ne le touchaient plus en 2003 mais il faut garder à l'esprit que les sorties de la précarité peuvent être temporaires puisque la moitié des personnes sortant de la pauvreté une année donnée redeviennent pauvres dans les deux années suivantes.

Il apparaît clairement que ce sont surtout les adolescents qui sont frappés par la pauvreté car le taux de pauvreté augmente avec l'âge, de 5 à 6 % avant quatre ans à plus de 10 % après 13 ans, ce phénomène semblant s'expliquer par de meilleurs transferts sociaux pour la petite enfance que pour l'adolescence.

Taux de pauvreté avant et après transferts sociaux des ménages
selon la configuration familiale

Avant transfert

Après transfert

Couple avec 1 enfant

5,0

4,6

Couple avec 2 enfants

6,5

5,4

Couple avec 3 enfants

14,7

6,1

Couple avec 4 enfants et plus

44,5

17,5

Familles monoparentales

33,0

15,4

Source : Insee-Dgi, enquêtes Revenus fiscaux 2000, calculs Drees.

Répartition des enfants et des enfants pauvres par type de famille

Enfants de moins de 18 ans

Enfants pauvres
de moins de 18 ans

Familles monoparentales

12 % 

23 % 

dont 1 enfant

4 % 

5 % 

dont 2 enfants et plus

8 % 

18 % 

Couples

1 enfant

16 % 

10 % 

2 enfants

37 % 

24 % 

3 enfants

23 % 

17 % 

4 enfants

12 % 

26 % 

Source : Insee-Dgi, enquêtes Revenus fiscaux 1999 et 2000, calculs CERC.

Il résulte de ce tableau que les enfants élevés dans une famille monoparentale représentent 12 % de la population des enfants de moins de 18 ans, mais que 23 % des enfants pauvres de moins de 18 ans sont élevés dans une famille monoparentale.

2. Une autre approche de la pauvreté : les conditions de vie dégradées

La mesure de la pauvreté en termes de conditions de vie repose sur un repérage d'un certain nombre de manques par rapport à des éléments du bien être matériel standard car largement diffusés dans la population. L'INSEE dans une étude d'avril 2003 a listé 21 objets types et a estimé que les enfants pauvres en conditions de vie pouvaient s élever à 1,4 million, soit 10,5 % de la totalité des enfants. Les scores de privation sont sensiblement plus élevés dans les familles nombreuses et monoparentales.

Distribution du score de privations et score moyen
selon le type de ménage auquel appartiennent les enfants

(en %)

Score

Niveau enfants

Ensemble

Couples
1 ou 2 enfants

Couples
3 enfants et plus

Parents isolés

0

38,4

47,8

32,0

15,8

1

20,6

22,4

19,8

14,7

2

12,5

11,5

13,9

13,1

3

8,1

6,2

9,9

11,3

4

5,4

3,7

6,5

10,2

5

4,3

2,6

5,5

8,7

6 et +

10,5

5,7

12,4

26,1

Ensemble

100,0

100,0

100,0

100,0

Score moyen

1,9

1,3

2,2

3,7

Champ : enfants de moins de 18 ans vivant dans un ménage ordinaire dont la personne de référence n'est pas étudiante.

Source : partie fixe « Santé, logement, endettement des ménages » des Enquêtes permanentes sur les conditions de vie des ménages de mai 1999 à mai 2001, Insee.

La liste des items utilisés pour la construction du score est la suivante :

- Logement :

_ Dispose d'une salle de bain/douche

_ Dispose de toilettes

_ Dispose de l'eau chaude courante

_ Dispose d'un système de chauffage

_ Pas de problème d'humidité

_ Logement non surpeuplé

- Biens durables :

_ Téléviseur couleur

_ Un autre équipement : réfrigérateur congélateur, lave-linge, lave-vaisselle, sèche-linge, four à micro-ondes, magnétoscope, chaîne hi-fi

_ Automobile

- Consommation « Le ménage a les moyens financiers lui permettant, s'il le souhaite, de ... »

_ Maintenir le logement à la bonne température

_ Acheter des vêtements neufs (et non d'occasion)

_ Disposer pour chaque adulte de 2 paires de chaussures

_ Manger de la viande ou équivalent tous les deux jours

_ Recevoir des parents ou amis au moins 1 fois par mois

_ Faire des cadeaux au moins 1 fois par an

Partir en vacances une semaine 1 fois par an

- Situation financière

_ Les revenus couvrent les dépenses

_ Pas de découverts bancaires réguliers

_ Pas de retards fréquents de paiement

_ Les remboursements n'excèdent pas le quart du revenu

_ Le ménage a pu épargner au cours de l'année

Cette étude a cherché à vérifier si la pauvreté monétaire et les conditions de vie se recouvraient et a conclu que parmi les enfants à bas revenus 36 % étaient également pauvres en conditions de vie. Au total le recouvrement entre les deux formes de pauvreté permet de définir un noyau dur de pauvreté de 6 % d'enfants pauvres selon les deux approches.

Le problème de l'accès au logement est un des aspects les plus importants en terme d'insertion sociale et d'image de soi.

Sous l'effet de la hausse des loyers et de la dégradation de l'impact solvabilisateur des aides au logement se loger pèse de plus en plus lourd pour les ménages pauvres, ce qui conduit à une détérioration des conditions de logement. Entre 1998 et 2002 les loyers des ménages pauvres ont augmenté de 80 % alors que les revenus ne progressaient que de 30 %. Le taux d'effort net de 13 à 16 % de 1998 à 2002. Il atteint 26 % dans le parc privé où la hausse des loyers a atteint 100 % sur la même période.

L'impact des aides au logement a tendance à décroître en raison du mode d'indexation de ces prestations. En effet les plafonds de ressources pour être bénéficiaire de ces prestations évoluent comme les prix et non comme le salaire moyen ce qui conduit déjà à réduire les allocataires mais le facteur le plus sélectif est le mode d'indexation du plafond du loyer donnant lieu à prestation, qui est fixé par rapport à l'indice du coût de la construction dont l'évolution est nettement inférieure à celle des loyers. A titre d'exemple en 2002 le plafond de loyer mensuel pour la région parisienne correspondait pour un couple avec deux enfants à 378 euros plus 67 euros de charges forfaitaires, ce qui correspond à un loyer pour un 38 m2 dans la région parisienne mais à un appartement de 24 m2 à Paris !

Conditions de peuplement des ménages

(en  %)

1988

2002

Ménages à bas revenus

Ménages modestes

Autres ménages

Ensemble

Ménages à bas revenus

Ménages modestes

Autres ménages

Ensemble

Sous-peuplement très accentué

11,0

11,7

19,4

17,2

10,7

16,7

27,7

24,1

Sous-peuplement prononcé

16,8

16,6

23,2

21,4

13,5

18,3

24,7

22,4

Sous-peuplement modéré

24,6

28,5

30,1

29,3

23,6

27,2

25,9

25,9

Peuplement normal

27

28,5

20,5

22,6

32,5

26,7

17,7

20,8

Surpeuplement modéré

14,6

10,9

5,8

7,6

14,8

8,8

3,5

5,6

Surpeuplement accentué

6,0

3,8

1,0

1,9

5,0

2,3

0,5

1,2

Ensemble

100,0

100,0

100,0

100,0

100,00

100,00

100,0

100,0

Champ : ménages de deux personnes et plus.

Source : Insee, enquête Logement 1988 et 2002.

Cette érosion des prestations sociales conduit à une pression très forte sur le parc social qui concentre les ménages en forte précarité et qui voit s'accumuler les demandes de logement : selon l'Observatoire national de la pauvreté les demandes avoisineraient 1,1 million.

L'approche de la pauvreté par les conditions de vie pour appréhender les problèmes spécifiques des enfants ne paraît pas très pertinente à l'heure actuelle car les outils statistiques ne sont pas adaptés pour prendre en compte les éléments de l'environnement déterminants pour leur développement harmonieux. Lors de son audition M. Michel Dollé, rapporteur général du Centre d'études des revenus et des coûts (CERC), a souligné que de nouveaux indicateurs devaient être mis au point pour tenir compte des spécificités des enfants. Il conviendrait par exemple d'évaluer la qualité des équipements scolaires et des équipements collectifs de loisirs, éléments beaucoup plus importants pour le devenir des enfants que des éléments du confort de l'habitat.

La rapporteure estime important que la France se dote d'outils statistiques adaptés et parvienne à mieux cerner le phénomène de la pauvreté chez les enfants, ce qui permettrait de se fixer ensuite des objectifs quantitatifs et qualitatifs pour la réduction de la pauvreté des enfants. Elle proposera donc que l'Observatoire national de la pauvreté en concours avec le CERC mette au pont des indicateurs statistiques adaptés et établisse un bilan régulier de l'évolution de la pauvreté des enfants.

3. La pauvreté dans sa dimension culturelle

La dimension culturelle de la pauvreté est la plus difficile à évaluer car elle se laisse mal appréhender par des critères objectifs mais elle se traduit cependant par des phénomènes très concrets comme par exemple l'échec scolaire ou l'illettrisme. Mais cette réalité est bien plus complexe car elle doit prendre en compte la situation ressentie par les populations pauvres, qui se sentent plus ou moins exclues en raison de leurs handicaps culturels. L'association ATD-Quart Monde a depuis longtemps souligné l'importance du facteur culturel dans la reproduction intergénérations de la pauvreté et essayé de permettre aux populations pauvres de se réapproprier leur histoire et les différentes productions culturelles (bibliothèque de rue, ateliers de théâtre amateur...).

Une des premières réalités de la pauvreté est sans conteste l'exclusion scolaire. Si de gros progrès ont été faits avec le prolongement de la scolarité et la scolarisation précoce en maternelle, il n'en demeure pas moins que l'échec scolaire touche encore beaucoup plus les enfants pauvres que les autres, ce qui conduit à une exclusion sociale beaucoup plus sévère que par le passé car l'employabilité d'un jeune sans qualification est beaucoup plus faible qu'autrefois.

Quelques chiffres permettent de mesurer la gravité du phénomène : à 17 ans 4 % environ des jeunes ont arrêté leurs études mais ils sont près de 20 % chez les enfants pauvres contre 1 % parmi les enfants de familles privilégiées.

L'échec scolaire est tout aussi différencié lors de l'entrée en 6: 24 % des enfants sont en retard à l'entrée en collège mais ce taux atteint 45 % pour les enfants pauvres, alors que ce taux n'est que de 9,6 % parmi les enfants dont les parents sont cadres.

Il semble que ce ne soit pas tant le niveau de revenus qui soit déterminant dans la réussite scolaire que le capital scolaire des parents ou à tout le moins leur bonne intégration scolaire même si elle ne s'est pas traduite par un niveau de diplôme élevé : 55 % des élèves dont les parents sont sans diplôme sont en échec scolaire en 3e contre 10 % environ pour les enfants dont au moins un des parents a un diplôme universitaire long, l'influence du bagage scolaire de la mère apparaissant primordial.

Les politiques actuelles paraissent peu efficaces pour compenser les handicaps culturels familiaux. Selon de premières estimations la création des ZEP n'a pas eu d'influence déterminante sur le devenir scolaire des enfants défavorisés l'effet positif étant plus marqué en primaire qu'au collège pour disparaître au niveau du bac les lycéens de ZEP qui ont au bout du compte autant de chances d'obtenir leur bac que la moyenne des élèves.

Il serait souhaitable que la France dispose d'outils statistiques permettant d'évaluer le devenir scolaire et social d'un groupe d'enfants dont il serait possible d'étudier l'évolution sur 25 ans. L'INSEE étudie actuellement les conditions pour constituer des cohortes d'enfants pour enrichir le dispositif statistique en disposant d'études longitudinales.

B. QUELQUES PISTES POUR LUTTER PLUS EFFICACEMENT CONTRE LA PAUVRETÉ DES ENFANTS

1. Accroître l'aspect redistributif des prestations familiales

La politique familiale française est restée longtemps marquée par le principe selon lequel tous les enfants devaient être bénéficiaires de prestations familiales, car il s'agissait là du droit de chaque enfant et non d'une mesure de redistribution sociale. Peu à peu les prestations sous conditions de ressources ont vu leur part augmenter mais aucune étude approfondie n'a été menée pour évaluer dans quelle mesure les prestations familiales parviennent à compenser le surcoût représenté par les enfants, cette notion devant être affinée selon l'âge de l'enfant et la composition de la famille.

L'Observatoire national de la pauvreté a ainsi pu chiffrer l'impact de la politique familiale qui reste très généreuse pour l'arrivée du troisième enfant (majoration des allocations familiales, complément familial, régime plus favorable des majorations pour âge, majoration des aides au logement). En revanche rien de tel pour le quatrième et les enfants suivants. L'aide accordée pour le troisième enfant est évaluée à 377 euros par mois alors que le seuil de pauvreté est fixé à 181 euros. Pour un quatrième enfant les prestations supplémentaires s'élèvent à 185 euros, ce qui représente un montant à peine supérieur au seuil de pauvreté pour un enfant. Cette caractéristique des transferts sociaux explique pour partie le ressaut du taux de pauvreté des enfants appartenant à des familles de quatre enfants et plus.

La politique menée en faveur des familles monoparentales semble beaucoup plus efficace surtout pour les familles composées d'un adulte et d'un enfant de moins de trois ans le taux de pauvreté étant alors très bas 7 % alors que ce taux est de 19 % pour les familles monoparentales avec des enfants adolescents.

Ces quelques exemples conduisent à penser qu'il faudrait accentuer le caractère redistributif des prestations familiales soit en augmentant le niveau des prestations soit en fiscalisant ces allocations tout en élargissant le champ de leurs bénéficiaires.

De plus comme cela a été souligné précédemment le taux de pauvreté augmente avec l'âge des enfants. Il serait donc indispensable de d'augmenter les majorations pour âge et de moduler l'allocation de rentrée scolaire selon l'âge de l'enfant et selon le type d'enseignement suivi, l'enseignement technique nécessitant des équipements beaucoup plus coûteux.

Le CERC dans son rapport sur la pauvreté des enfants suggère aussi d'accorder des allocations familiales dès le premier enfant (avec ou sans conditions de ressources) pour faciliter notamment le retour à l'emploi des jeunes mères bénéficiaires de minima sociaux et qui sont faiblement incitées à retravailler surtout si elles doivent gérer un travail en horaire décalé ou un temps partiel subi.

Actuellement le système de transferts liés aux enfants est neutre en termes de redistribution des revenus en raison du poids des prestations sans conditions de ressources et du jeu du quotient familial. La rapporteure juge indispensable que des études soient menées pour réaménager la structure des prestations familiales et analyser les incidences de leur fiscalisation afin que les familles avec enfants ne soient plus pénalisées financièrement en comparaison avec des ménages sans enfants et puissent avoir des solutions pour concilier vie professionnelle et vie privée.

2. Favoriser un meilleur accès à l'emploi pour les parents

La meilleure garantie contre la pauvreté des enfants demeure l'insertion professionnelle durable de leurs parents. De nombreux progrès ont été faits pour inciter les titulaires de minima sociaux à retrouver une activité rémunérée. Des mécanismes ont été mis en place, par exemple, pour lisser les effets de seuils liés à la perte d'avantages sociaux connexes lors de la reprise d'emploi. Plusieurs mécanismes fiscaux sont aussi intervenus : baisse des taux marginaux d'imposition, aménagement de la décote pour limiter le taux marginal d'imposition en entrée de barème. Depuis 2000 la taxe d'habitation est progressive avec le revenu et l'exonération de taxe d'habitation pour les minima sociaux a été prolongée d'une année après la sortie du dispositif.

Sur la longue période on constate un écart croissant entre les bas salaires et les minima sociaux. Depuis 1989 le RMI a progressé de 5 % en euros constants alors que le SMIC a connu une augmentation de 18 %.

Ces mesures ont eu un impact positif mais il a été très limité pour les familles nombreuses et les familles monoparentales. Lors de son audition M. Dollé, rapporteur général du CERC, a souligné la nécessité de mettre en œuvre des mécanismes facilitant la conciliation d'une vie professionnelle et de la vie famille.

Trop de femmes sont exclues du marché de travail car elles ne peuvent trouver de dispositif de garde d'enfants adapté tout particulièrement si elles ont des horaires décalés ou des journées de travail éclatées (cas des femmes chargées du ménage des locaux de travail). Même si l'allocation de parent isolé a permis de sortir de nombreuses familles de la pauvreté elle risque d'être un facteur d'exclusion sociale à terme car rien n'est fait pour accompagner la bénéficiaire à retrouver un emploi à l'issue du versement de cette prestation. Des critiques similaires ont été adressées à l'allocation parentale d'éducation.

Actuellement le coût et la rareté des dispositifs publics de garde de jeunes enfants conduisent les ménages pauvres à recourir au réseau familial ou informel pour la garde de leurs jeunes enfants, la mère renonçant souvent à une activité professionnelle faute de structure de garde. Il convient de citer en exemple le cas des pays scandinaves et du Danemark où les communes ont obligation de proposer un système de garde bien au-delà de trois ans (12 ans au Danemark). C'est ainsi que 65 % des enfants de moins de trois ans au Danemark et 50 % en Suède bénéficient de structures publiques de garde. Ces pays ont aussi mis en place des mécanismes de congés parentaux très généreux.

Le Danemark a également choisi d'accorder des aides financières massives, l'équivalent de nos allocations familiales représentant une aide de 394 euros par trimestre pour un enfant de moins de deux ans et versée dès le premier enfant. Cet ensemble de mesures a permis à ce pays d'avoir un taux d'activité féminin élevé, supérieur de six points à la France.

La Grande-Bretagne a mis en place en 1997 un plan de lutte contre la pauvreté notamment des familles monoparentales pour assurer un suivi de réinsertion à ces jeunes femmes. Les premiers résultats sont très encourageants avec une baisse du taux de pauvreté entre 1997 et 2002 de quatre points du taux de pauvreté et du taux de pauvreté persistante. Ce plan a d'ailleurs donné lieu à un travail très intéressant d'évaluation de ces politiques d'accompagnement social et a permis de définir une batterie d'indicateurs sociaux. Comme le souligne le rapport précité du CERC.

Il conviendrait également de donner une dimension familiale à la prime pour l'emploi, qui est un dispositif intéressant pour aider les travailleurs pauvres ou modestes mais qui n'a pas pris suffisamment en compte le surcoût des enfants alors que cette dimension est beaucoup plus présente pour les ménages imposés par le biais du quotient familial.

3. Garantir un meilleur accès aux droits

De multiples associations chargées de la lutte contre l'exclusion soulignent que l'amélioration des dispositifs sociaux pour les familles en situation de précarité ne suffit pas à faire reculer la pauvreté en raison de la difficulté à faire valoir ses droits.

Lors de son audition, ATD Quart Monde a souligné que les personnes en situation de grande pauvreté répugnaient à s'adresser aux services sociaux car ceux-ci sont perçus plus comme une menace que comme une possibilité de soutien. La principale raison de cette crainte est liée au risque de placement des enfants, les familles craignant que toute démarche ne soit suivie d'un signalement au service de la DDASS qui peut conduire au placement. La pauvreté est ressentie comme une véritable humiliation et avec culpabilité. De plus l'accès aux droits suppose de fournir un certain nombre de renseignements qui sont perçus comme autant d'intrusion dans l'intimité de la famille, les demandeurs devant toujours se justifier comme s'ils étaient en situation d'accusés.

Les principaux organismes sociaux ont pourtant contribué à améliorer la connaissance des aides par les bénéficiaires potentiels. Il faut saluer certaines initiatives qui gagneraient à être généralisées.

La convention d'objectifs et de gestion signée entre la CNAF et l'Etat fait mention de la nécessité de mieux évaluer les allocataires potentiels et les raisons du non-recours aux prestations. Cette priorité affichée a notamment conduit à la création d'un observatoire départemental du non-recours aux services public à Grenoble.

Ce travail d'enquête a permis d'améliorer l'effectivité des droits en s'assurant par exemple que les allocataires répondent bien aux demandes d'actualisation des droits (contrôle annuel du niveau de ressources par exemple) afin de limiter les périodes de suspension des droits. De même les caisses d'allocations familiales procèdent systématiquement à une étude globale de la situation du demandeur lorsqu'il fait une démarche précise de demande de prestations afin d'éviter que l'allocataire ne perçoive pas l'intégralité de ses droits.

La situation la plus délicate est d'aller au-devant des populations les plus marginalisées qui ne sont en contact avec aucune structure. Le relais des associations est alors très précieux pour servir de médiateur et pour permette à ces familles de surmonter leur méfiance vis-à-vis des services sociaux.

Certains organismes de protection sociale ont décidé d'aller au-devant des allocataires potentiels car ils ont constaté que la simple démarche d'aller se renseigner sur ses droits ne va pas de soi. La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Calvados a ainsi créé la cellule de détection et de traitement de l'exclusion sociale (DETRES) dont l'originalité est d'avoir envoyé des professionnels à la rencontre des personnes marginalisés afin de leur permettre un accès aux soins le plus rapide possible, ce contact étant aussi l'occasion de faire le point sur l'ensemble des droits de la personne. La revue « Quart monde », dans un article de mai 2004 sur « une innovation pour garantir l'accès aux soins », qualifie ces professionnels de « mousquetaires de la sécu » qui loin d'être devenus inutiles depuis la création de la couverture maladie universelle (CMU) constatent tous les jours que l'accès aux soins est encore problématique. Depuis dix ans 80 000 personnes ont pu ainsi recouvrer leurs droits et bénéficier de ce guichet unique social avant l'heure !

ATD Quart Monde estime indispensable de promouvoir des formations spécifiques pour les travailleurs sociaux afin de les sensibiliser aux barrières culturelles et psychologiques de l'accès aux droits. Comment comprendre le comportement irrationnel de certaines familles qui ne répondent pas à la caisse d'allocations familiales au risque de voir leurs allocations suspendues par crainte d'une intrusion dans leur précarité ? Sans un travail préalable sur la perception des services sociaux par ces familles, toute tentative de communication « administrative » risque d'être un échec faute d'avoir été précédée par un effort pour se mettre à la place de celui qui est en situation de précarité.

ATD Quart Monde organise déjà ce type de formations qui se déroulent en présence de familles très pauvres afin que les professionnels puissent vraiment appréhender les préoccupations de ces populations. Les témoignages recueillis à cette occasion montrent que la pauvreté n'est pas perçue comme un problème monétaire mais bien plus comme un phénomène d'exclusion sociale avec le sentiment de ne compter pour rien aux yeux de la société. Une de ces personnes constatait « la misère c'est quand tu ne sais plus comment fonctionne le monde, un peu comme si tu étais hors du monde ».

C'est pourquoi ATD Quart Monde estime indispensable de revoir l'organisation des services sociaux pour promouvoir des actions d'accompagnement social dont le but est de faciliter aux familles la réussite de leur projet familial. Souvent la pauvreté conduit à ne plus faire de projets, à vivre au jour le jour. Une personne en grande précarité s'exprimait ainsi « la pauvreté c'est d'avoir les mêmes rêves que tout le monde pour l'avenir mais aucun moyen de les réaliser sur terre ». Il paraît donc indispensable d'aider ces personnes à se réapproprier leur avenir et de les aider à pouvoir vivre en famille sans subir des placements successifs qui font voler en éclat l'histoire familiale. Cet accompagnement serait aussi beaucoup plus économe des deniers publics car le placement des enfants coûte très cher sans garantir un épanouissement des enfants qui souffrent de l'éclatement de leur famille. Les services sociaux sont aujourd'hui incapables d'assurer cet accompagnement qui demande un personnel formé important. La rapporteure souhaite que soient rapidement lancées des expériences pilote pour analyser comment des associations peuvent aider les services sociaux à mettre en œuvre ce soutien aux familles en difficulté.

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION

La commission a examiné le rapport de Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille, au cours de sa séance du mardi 19 octobre 2004.

Un débat a suivi l'exposé de la rapporteure.

M. Jean-Luc Préel a rappelé que le financement de la majoration de pension de retraite en fonction du nombre d'enfants par un transfert de la branche famille vers le Fonds de solidarité vieillesse constitue un véritable « hold-up » dénoncé à plusieurs reprises. Les fonds de la branche famille doivent être consacrés à la politique familiale.

M. Jean-Marie Le Guen a fait observer que, concernant la politique familiale, le discours du gouvernement est connu : ce qui ne se fait pas dans la loi de financement de la sécurité sociale, pour les familles en situation de précarité, se fait dans la loi de finances, à travers des mesures en faveur des familles aisées. Il s'agit là d'éléments très démonstratifs quant à la réorientation en cours des mécanismes de transferts sociaux.

M. René Couanau a relevé, quant à la branche famille, qu'il convient d'éviter de caricaturer l'action menée par le gouvernement qui ne peut se résumer à des mesures défavorables pour les familles alors que des pans entiers de cette politique n'ont pas été évoqués comme par exemple les mesures fiscales très importantes pour compenser les surcoûts liés à l'éducation des enfants.

En réponse aux intervenants, Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille, a considéré qu'on peut dire sans caricaturer que face aux familles qui ont vu leurs prestations réduites ou supprimées sans aucune forme de compensation fiscale, le gouvernement multiplie les avantages fiscaux et les aides au profit des familles aisées. Ainsi 40 000 familles ont été privées de l'allocation de parent isolé (API) à la suite d'une erreur technique, sans oublier les restrictions pour de nombreuses familles qui figurent dans d'autres budgets, tel que celui de la jeunesse et des sports.

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI
RELATIVES À LA FAMILLE

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES AUX AUTRES POLITIQUES
DE SÉCURITÉ SOCIALE

Section 2

Branche famille

Article 24

(article L. 531-2 du code de la sécurité sociale)


Majoration de la prime d'adoption

L'article 24 modifie l'article L. 531-2 du code de la sécurité sociale afin de majorer la prime versée à l'occasion de l'adoption d'un enfant.

Cette prime est l'une des composantes de la prestation d'accueil du jeune enfant, prestation versée sous conditions de ressources et attribuée au plus tard au deuxième mois après l'arrivée de l'enfant dans sa famille d'adoption.

Le gouvernement souhaite doubler le montant de la prime d'adoption qui passera de 812,37 à 1624,75 euros, pour mieux prendre en compte les contraintes spécifiques de cette démarche. En effet, sur les 5000 enfants adoptés en 2003, 70 % l'ont été à l'étranger ce qui représente des frais très lourds en termes de déplacement, d'assistance juridique et de paiement de frais d'entretien de l'enfant à l'institution chargée de son assistance durant le déroulement de la procédure d'adoption.

Article 25

(article L. 211-10 du code de l'action sociale et des familles)


Réforme du mode de financement
de l'Union nationale des associations familiales

Cet article a pour objet de réformer l'Union nationale des associations familiales (UNAF) qui a été créée par l'ordonnance du 3 mars 1945.

· Les missions de l'UNAF

L'UNAF est une institution nationale chargée de promouvoir, défendre et représenter les intérêts de toutes les familles vivant sur le territoire français, quelles que soient leurs croyances ou leur appartenance politique.

Union et non fédération d'associations, elle permet aux familles de s'exprimer, dans toute leur diversité, pour une politique familiale globale, innovante et forte.

Elle anime le réseau des 22 unions régionales des associations familiales (URAF) et des 100 unions départementales des associations familiales (UDAF), et les appuie dans leurs missions institutionnelles et de services aux familles.

L'UNAF est une association loi 1901, reconnue d'utilité publique, réunissant exclusivement des personnes morales. Ses adhérents sont de deux types.

Sont membres actifs :

- Les 100 unions départementales des associations familiales (UDAF). Porteuses des voix des familles adhérentes aux associations familiales de leur département, elles sont membres votants de l'assemblée générale. Elles élisent 22 des 40 membres du conseil d'administration.

- 8 mouvements familiaux nationaux « généralistes » et 20 mouvements « à recrutement spécifique » (agissant sur des domaines particuliers de la politique familiale : éducation, formation, action sociale, familles monoparentales....). Ces 28 mouvements sont membres de l'assemblée générale, mais ne votent pas. Ils désignent 18 des 40 membres du conseil d'administration.

Sont membres associés :

- 38 groupements nationaux à but familial agréés par l'UNAF. Ils ne sont pas considérés par la loi comme associations familiales au sens propre du terme, mais leur action sur le terrain est jugée conforme aux intérêts des familles. Ils sont à ce titre membres de l'assemblée générale de l'UNAF, et sont consultés dans le cadre de ses travaux.

L'UNAF est née de la volonté d'organiser le dialogue entre les familles représentées par leurs associations et les pouvoirs publics.

Les premières associations familiales sont nées en France à la fin du XIXe siècle. Elles avaient alors surtout pour but d'organiser l'entraide entre les familles. Progressivement, elles ont étendu leur vocation à la défense des intérêts des familles à tous les niveaux.

De leur côté, les pouvoirs publics ont voulu, dès le début du XXe siècle, reconnaître aux familles une place spécifique dans les institutions de la République.

En 1945, face aux défis de la reconstruction, le gouvernement s'est trouvé confronté à l'urgence d'élaborer une politique familiale volontariste et ambitieuse.

Pour définir cette politique et la mener à bien, il a souhaité s'appuyer, aux plans local et national, sur l'ensemble des familles françaises. Décision a été prise de créer une institution qui les représente toutes et dans toute leur diversité.

Le 3 mars 1945, une ordonnance institue l'UNAF et les UDAF. Une loi renforcera ses missions en 1975, en améliorant la représentation des mouvements familiaux nationaux.

Depuis, l'UNAF, les URAF et les UDAF sont les partenaires institutionnels des pouvoirs publics dans tous les domaines de la politique familiale. L'UNAF a tout d'abord une fonction de représentation des intérêts des familles. Elle dispose pour ce faire d'un réseau de 23 000 bénévoles qui siègent dans de multiples organismes traitant de la politique familiale (par exemple au conseil d'administration des caisses d'allocations familiales. L'UNAF a aussi un rôle de formateur pour professionnaliser les services offerts aux familles.

En effet les UDAF sont aujourd'hui des partenaires clés des services publics et se voient confier, ou développent, un nombre croissant de services directs aux familles tels que :

- les tutelles des majeurs protégés ;

- les tutelles aux prestations sociales ;

- le conseil en économie familiale (surendettement,...) ;

- la médiation familiale ;

- l'accompagnement du RMI ;

- la formation des illettrés ;

- l'aide aux familles immigrées.

Ces services emploient 6000 personnes dans les UDAF.

L'UNAF a aussi un rôle dans la défense des intérêts des familles et se porte fréquemment partie civile.

Lorsqu'un procès met en jeu les intérêts de l'ensemble des familles, l'UNAF et les UDAF peuvent se porter partie civile dans des domaines tels que la discrimination, l'exclusion, la maltraitance, la sécurité, le non-respect des droits des usagers, l'UNAF et les UDAF ont déjà pris part à de nombreuses affaires judiciaires.

L'UNAF, en tant qu'organisation officielle de consommateurs, est particulièrement attentive aux affaires mettant en jeu le droit de la consommation.

Cette organisation est aussi un laboratoire d'idées pour envisager de nouveaux aspects de la politique familiale. Elle a par exemple créé des observatoires de la famille pour mieux connaître localement les préoccupations des familles et elle est à l'origine des initiatives pour le soutien à la parentalité.

· L'organisation financière

Les actions institutionnelles de défense, promotion et représentation des intérêts des familles assurées par l'UNAF et les UDAF sont financées par un fonds spécial.

Institué par la loi du 24 mai 1951, ce fonds est doté de 0,1% du montant des allocations familiales versées annuellement par la CNAF. Le montant de cette subvention - appelée « fonds spécial » - s'est élevé à 23,3 millions d'euros en 2003 (contre 24,8 millions en 2002).

L'UNAF garde 30 % pour son propre fonctionnement et reverse une partie de cette dotation aux mouvements nationaux agréés en qualité de membres actifs. 66,15 % du fond spécial sont affectés aux unions départementales d'associations familiales qui elles-mêmes reversent une partie de cette somme aux associations adhérentes. Le solde est affecté aux unions régionales d'associations familiales (soit environ 3,85 %)

Dotations accordées sur les crédits de l'UNAF

Mouvements familiaux à but général

Associations familiales protestantes

29 071 €

Confédération syndicale des familles

113 818 €

Confédération nationale des associations familiales catholiques

166 079 €

Familles rurales

259 521 €

Familles de France

195 398 €

Conseil national des associations familiales laïques

80 456 €

Union des familles laïques

45 640 €

Mouvements familiaux spécialisés

UN maisons familiales rurales d'orientation et d'orientation

44 424 €

AF personnel de la Banque de France

1 526 €

Famille du cheminot

91 676 €

FN AF maritimes

1 471 €

Aide à domicile en milieu rural

58 847 €

UNA parents d'enfants inadaptés (UNAPEI)

53 162 €

UN parents d'enfants déficients auditifs

14 912 €

UN parents d'enfants déficients visuels

489 €

ANA parents d'aveugles ou gravement déficients visuels

8 073 €

Enfance et familles d'adoption

45 482 €

UN AFAM (malades mentaux)

41 638 €

UN Médaille de la famille française

18 305 €

FN jumeaux et plus

33 415 €

UNAFALT (lutte toxicomanie)

1 437 €

Association des paralysés de France

46 759 €

FA veuves civiles chefs de famille (FAVEC)

52 164 €

A entraite veuves et orphelins de guerre

9 261 €

Fédération syndicale familles monoparentales

4 457 €

Aide à la formation

Confédération syndicale des familles

30 500 €

Confédération nationale des associations familiales catholiques

40 164 €

Familles rurales

29 147 €

Familles de France

29 147 €

Conseil national des associations familiales laïques

19 000 €

Union des familles laïques

7 247 €

UN maisons familiales rurales d'orientation et d'orientation

10 968 €

Aide à domicile en milieu rural

15 416 €

UNA parents d'enfants inadaptés (UNAPEI)

1 806 €

ANA parents d'aveugles ou grav. défic. visuels

2 043 €

Enfance et familles d'adoption

6 718 €

Association des paralysés de France

3 116 €

FA veuves civiles chefs de famille (FAVEC)

9 840 €

Fed syndicale familles monoparentales

7 576 €

UN AFAM (malades mentaux)

13 882 €

Famille du cheminot

1 800 €

Ce mode de financement comportait des inconvénients car il ne procurait pas de ressources stables à l'UNAF qui était tributaire du volume des prestations légales, ce qui a conduit notamment à l a fin des années 1980 à un tassement sensible de ses ressources. De plus de fréquentes polémiques sont apparues pour déterminer la base de calcul du prélèvement car certaines majorations de prestations, comme celles de l'allocation de rentrée scolaire étaient considérées comme exclues de l'assiette par la CNAF.

La Cour des comptes a aussi fait valoir un certain manque de transparence dans l'utilisation des comptes.

A l'occasion du contrôle des comptes de l'UNAF pour les exercices 1997 à 2002, la Cour des Comptes a formulé plusieurs interrogations critiques sur la représentativité de certaines composantes du mouvement familial et sur les critères d'agrément actuellement utilisés par les mouvements en place pour refuser de nouveaux membres, enfin sur la fiabilité des contrôles administratifs, budgétaires et comptables dans l'utilisation des fonds

La Cour n'a pu se permettre ces critiques sévères qu'en raison des modalités spécifiques du financement de l'UNAF : prélèvement sur les allocations familiales croissant automatiquement avec les progrès financiers de la politique familiale, absence de convention précisant les objectifs, faiblesse voir inexistence des contrôles tant internes qu'externes.

C'est pourquoi la réforme présentée par cet article crée un fonds spécial alimenté par un prorata du montant des prestations familiales versées par la CNAF et la Caisse centrale de mutualité agricole. Ce fonds comprendra deux enveloppes. La première, représentant 80 % du total, servira à financer les missions traditionnelles de l'UNAF et elle évoluera comme l'inflation. La deuxième enveloppe, qui est la véritable innovation de la réforme, permettra de financer des actions nouvelles liées à la politique familiale et fera l'objet d'une convention entre l'UNAF et le ministère de la famille. Son indexation sera plus dynamique, car basée sur l'évolution des prestations légales. Pour éviter tout conflit le texte liste les prestations comprises dans l'assiette de calcul du prélèvement au bénéfice de l'UNAF. Un mécanisme de lissage a été prévu en cas de création ou de suppression de prestations pour réduire les variations du financement de l'UNAF d'une année sur l'autre.

Pour répondre aux critiques exprimées sur une répartition injuste du financement entre les associations qui n'auraient pas pris en compte le nombre réel d'adhérents, le texte prévoit que les modalités de répartition des fonds sont fixées par voie réglementaire.

Pour 2005 le fonds est fixé à 24,31 millions d'euros avec une part de 19,44 millions pour la première enveloppe et de 4,8 millions pour la seconde.

Article 26

Prise en charge par la caisse nationale d'allocations familiales des majorations de pension pour enfants

Cet article reconduit le transfert du financement des majorations de pension pour enfants du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) vers la CNAF, qui avait été entamé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Le Fonds de solidarité vieillesse, institué par la loi n° 93-936 du 22  juillet 1993, prend en charge le financement des avantages de vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale (minimum vieillesse et cotisations au titre des périodes validées gratuitement correspondant au service national ou à des périodes de chômage).

Ce fonds prend également en charge les sommes correspondant au service par les régimes d'assurance vieillesse (régime général, régimes alignés et régime des exploitants agricoles) des majorations de pension pour conjoint à charge et des majorations de pension accordées en fonction du nombre d'enfants à charge.

Fonds de solidarité vieillesse (1re section)

(en millions d'euros)

Prise en charge de prestation par le FSV

2001

2002

2003

2004

Minimum vieillesse

2 497

2 485

2 513

2 569

Majorations de pension

Pour enfants

Pour conjoint à charge

2 995

78,6

3 118

77,1

3 239

74,5

3 283

73,4

Les majorations pour enfants, accordées dès 1945 au titre de la politique familiale, ont pour effet d'augmenter la pension de tout assuré d'un dixième de son montant si celui-ci a eu ou a élevé au moins trois enfants, pendant au moins neuf ans, avant leur seizième anniversaire.

Il s'agit d'un avantage familial différé, explicitement institué en direction des familles nombreuses, qui vise à compenser, au moment de la retraite, les charges de familles et leurs conséquences en termes de pension, compte tenu du taux d'inactivité des mères de famille ayant trois enfants ou plus. Cela a d'ailleurs été confirmé par deux fois par le Conseil constitutionnel. Son financement relève donc logiquement de la branche famille de la sécurité sociale. De la même façon, les cotisations de l'assurance vieillesse des parents aux foyers (AVTS) sont à la charge de cette branche.

En 2001, le transfert du financement de ces majorations de pension avait été programmé selon un calendrier qui devait aboutir à un transfert total en 2007 : 15 % en 2001, 30 % en 2002, 45 % en 2003, 60 % en 2004, 75 % en 2005, 90 % en 2006 et 100 % en 2007 mais cet échéancier ne sera pas respecté.

En 2001, 15 % des dépenses totales au titre des majorations ont été prises en charge par la CNAF, soit un montant de 457 millions d'euros ; en 2002, le transfert total qui a été décidé était de 915 millions d'euros.

La loi de financement pour 2003 a accéléré le calendrier initial en fixant à 60 % la fraction prise en charge pour 2003 (au lieu de 45 %). En 2003, la branche famille a donc assuré à ce titre un financement supplémentaire de 536 millions d'euros, soit un transfert total vers la branche famille de 1,9 milliard d'euros. Pour 2004, le chiffre de 1,9 milliard d'euros était également prévu.

Le projet de loi de financement pour 2005 ne met pas en œuvre le taux initialement prévu de 75 % mais maintient celui de 2004, soit 60 %, ce dont s'est félicitée Madame Nicole Prud'homme, présidente de la CNAF, lors de son audition par la rapporteure.

Article 27

Fixation de l'objectif national de dépenses de la branche famille pour 2005

En application du 3° du I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet article fixe le montant des dépenses de la branche famille pour 2005 à 46,2 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale comptant plus de 20 000 cotisants, actifs ou retraités titulaires de droits propres.

Les dépenses de la branche famille sont pour l'essentiel celles de la CNAF, qui retrace déjà dans ses comptes l'ensemble des prestations légales servies par les différents organismes. Les prestations extra-légales versées par les autres régimes ainsi que leurs dépenses de fonctionnement sont également retracées. Seules les sommes versées par certains régimes spéciaux qui ont un caractère de complément de salaire ne sont pas intégrées dans l'agrégat de dépenses.

L'objectif de dépenses est fixé en fonction des montants prévisionnels des dépenses de la branche compte tenu des évolutions prévisibles du nombre des allocataires des prestations familiales, des objectifs des caisses en matière d'action sociale, ainsi que du taux retenu pour la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF).

Ce taux est de 1,5 % pour 2005. En application de l'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale, il est fixé en fonction de l'inflation prévisible pour 2004, compte tenu d'un correctif intégrant un éventuel décalage entre les prévisions de l'année précédente et l'inflation effectivement constatée .

L'objectif intègre également les mesures nouvelles pour 2005 prévues par le présent projet de loi.

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

_ Syndicat national unitaire des instituteurs professeurs des écoles et PEGC (SNUIPP) - M. Gilles Moindrot, co-secrétaire général et porte-parole

_ Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) - M. Michel Dollé, rapporteur général

_ Syndicat national professionnel des assistantes et assistants maternels (SNPAAM) - Mme Monique Dufourny, secrétaire générale

_ Union nationale des associations familiales (UNAF) - M. François Fondard, secrétaire général, et M. Laurent Clevenot, secrétaire général-adjoint

_ ATD Quart Monde - Mme Yvette Boissarie, déléguée nationale-adjointe, et Mme Janine Béchet, chargée de la mission

_ Fédération des familles monoparentales - Mme Patricia Augustin, secrétaire confédérale chargée de la famille

_ Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) - Mme Nicole Prud'homme, présidente, et M. Philippe Georges, directeur

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N° 1876 - Tome 3 - Rapport sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 : Famille (Mme Marie-Françoise Clergeau)


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