N° 2419 - Rapport de M. Bruno Bourg-Broc sur le projet de loi , adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Estonie relatif au statut et au fonctionnement des centres culturels (2059)




Document

mis en distribution

le 30 juin 2005

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N° 2419

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juin 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Estonie relatif au statut et au fonctionnement des centres culturels,

PAR M. BRUNO BOURG-BROC

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 226 (2003-2004), 115 et T.A. 48 (2004-2005)

Assemblée nationale : 2059

INTRODUCTION 5

I - DES RELATIONS BILATÉRALES EN VOIE D'INTENSIFICATION 7

II - UN ACCORD S'INSCRIVANT DANS LE CADRE D'UNE RELATION DE COOPÉRATION CULTURELLE FRUCTUEUSE 9

CONCLUSION 11

EXAMEN EN COMMISSION 13

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale est saisie du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Estonie relatif au statut et au fonctionnement des centres culturels (n° 2059). Ce projet de loi a été adopté par le Sénat au cours de la séance publique du 3 février 2005 sur le rapport de M. André Boyer1.

Alors que le caractère privilégié des relations entre la France et ce nouveau pays membre de l'Union européenne de 1,4 million d'habitants a d'ores et déjà été consacré par la signature d'un traité d'entente, d'amitié et de coopération entre les deux Etats le 26 janvier 2003, le présent accord, signé le 14 juillet 2003, vise à faciliter le fonctionnement des centres cultures de chaque pays sur la base de la réciprocité.

Le présent rapport fera état des relations bilatérales entre la France et l'Estonie avant d'analyser le contenu de l'accord relatif aux centres culturels.

I - DES RELATIONS BILATÉRALES EN VOIE D'INTENSIFICATION

La double adhésion de l'Estonie à l'OTAN (2 avril 2004) et à l'Union européenne (1er mai 2004), marque l'aboutissement de la politique extérieure menée par les autorités estoniennes depuis l'indépendance, en 1991. L'Estonie a été invitée à rejoindre l'OTAN au Sommet de Prague et l'Union européenne au Conseil européen de Copenhague en 2002. L'adhésion de l'Estonie à l'Union a été approuvée par référendum à une large majorité (68,8% des voix) le 14 septembre 2003. Sur le plan institutionnel, Tallinn dispose d'un commissaire européen (actuellement en charge de l'administration, de l'audit et de la lutte antifraude), 4 voix au Conseil et 6 députés au Parlement européen (sur 732).

Au plan institutionnel, l'Estonie est une démocratie parlementaire, dans laquelle le Parlement dispose de pouvoirs étendus, y compris celui d'élire le Président. M. Arnold Ruutel a succédé à M. Lennart Meri à cette fonction le 21 septembre 2001. Le gouvernement actuel  (coalition réunissant le parti libéral « la Réforme » et les deux partis de centre gauche « le Centre » et « l'Union du Peuple ») est conduit par M. Andrus Ansip depuis le 29 mars 2005. Les élections municipales doivent avoir lieu à l'automne 2005. Les élections présidentielles et législatives sont quant à elles prévues respectivement en 2006 et 2007.

L'Estonie a réussi son passage d'une économie centralisée à une véritable économie de marché viable et performante (85 % du PIB est réalisé par le secteur privé). Les fondamentaux de l'économie sont solides avec une croissance durable supérieure à 5 % en moyenne entre 1996 et 2003, qui s'est même accélérée en 2004 pour atteindre 6,2 %. Cette stabilité économique repose sur un secteur bancaire solide (détenu à 95 % par des investisseurs étrangers, dont 86 % par les banques suédoises), une monnaie stable, des finances publiques saines et un faible endettement. L'inflation a atteint 3 % en 2004 sous l'effet des hausses de prix résultant de l'adhésion à l'Union européenne et de l'augmentation des carburants. Le taux de chômage est pour sa part passé de 10 % en 2003 à 8,5 % en 2004.

En 2004, après quatre années de forte croissance, les exportations françaises vers l'Estonie ont connu un infléchissement, s'établissant à 162 millions d'euros, tandis que les importations en provenance de ce pays ont enregistré un bond de 267 millions d'euros (+190 %) résultant de la forte hausse des livraisons d'hydrocarbures (69 %). Les exportations françaises sont ainsi passées sous la barre de 2 % de part de marché, positionnant la France à la 14ème place parmi les fournisseurs de l'Estonie, qui était l'an dernier le 73ème fournisseur de la France.

Les chiffres ne reflètent que partiellement le volume réel des ventes françaises à l'Estonie car de nombreux produits français sont exportés vers l'Estonie via les pays nordiques. Les ventes de l'industrie automobile française demeurent notre premier poste d'exportation, suivi des secteurs de biens d'équipement et des produits des industries agricoles et alimentaires. Les ventes estoniennes vers la France sont constituées d'un petit nombre de produits, essentiellement pétroliers, métalliques et de bois.

II - UN ACCORD S'INSCRIVANT DANS LE CADRE D'UNE RELATION DE COOPÉRATION CULTURELLE FRUCTUEUSE

Depuis 1998, la coopération franco-estonienne se structure surtout autour de l'adhésion de l'Estonie à l'Union européenne. Dans ce cadre, plusieurs jumelages institutionnels ont été noués dans les domaines des marchés publics, du traitement de l'eau, du contrôle financier, des transports ferroviaires... La place du français, qui reste encore modeste dans l'enseignement primaire et secondaire, avec 4 650 élèves apprenant notre langue, se développe avec le soutien des autorités estoniennes.

La coopération culturelle entre les deux pays est importante. Une salle de littérature française a été ouverte à la Bibliothèque Nationale estonienne. Il existe en outre une branche estonienne de l'Alliance Française, ainsi qu'un centre culturel français implanté à Tallinn depuis 1992. Tous les quatre mois, le centre culturel français élabore, en coopération avec ses partenaires estoniens, un programme de manifestations culturelles permettant de présenter différents aspects de la culture française contemporaine : la musique, le cinéma, la danse, etc. Par ailleurs, l'Estonie a ouvert un centre culturel à Paris en 2001.

Dans le cadre des politiques de soutien à la langue française, notre pays soutient les quatre lycées franco-estoniens et a mis en place une coopération étroite avec deux établissements d'enseignement supérieur, l'Université de Tartu qui dispose d'un Centre d'Études Françaises, et l'Université Pédagogique de Tallinn. De plus, le Ministère estonien des Affaires étrangères a mis en place, en coopération avec l'Ambassade de France en Estonie, un vaste programme d'enseignement du français pour ses fonctionnaires, ayant pour but d'assurer des connaissances de base en français à tous les diplomates estoniens.

Depuis trois ans, une centaine d'œuvres d'écrivains et de philosophes français ont été traduites en estonien, comprenant notamment des auteurs tels que Blaise Pascal, Jean-Jacques Rousseau, André Gide, Simone de Beauvoir, Jean Giono, Jean Genet, Gaston Bachelard, Andreï Makine et Marguerite Yourcenar. Grâce à quelques traducteurs estophiles, les lecteurs français peuvent découvrir les œuvres d'un certain nombre d'auteurs estoniens, tels Jaan Kross, Viivi Luik, Heino Kiik, Tõnu Õnnepalu, Jaan Kaplinski, qui ont reçu des prix littéraires prestigieux : en 1989, Le fou du tsar de Jaan Kross a emporté le Prix du meilleur livre étranger et en 2003 le recueil de poésie de Jaan Kaplinski Le désir de la poussière s'est vu attribuer le Prix Max Jacob.

À Tallinn, la semaine du cinéma français, organisée avec le concours de l'Ambassade de France, a permis la projection des œuvres de différents réalisateurs français. Les théâtres estoniens mettent régulièrement en scène des pièces d'auteurs dramatiques français, tels que Molière, Cocteau, Anouilh, ou de langue française comme Beckett.

L'accord dont l'approbation est soumise à l'autorisation du Parlement s'inscrit donc dans le cadre d'une coopération extrêmement fructueuse. Son contenu est classique : il précise le statut des deux centres, définit leurs missions, les autorise à percevoir certaines recettes, indique le statut du personnel et le régime fiscal et douanier des deux instituts.

Le centre français de Tallinn est qualifié par l'accord de « Centre culturel et de coopération linguistique » et le centre estonien de Paris est dénommé « Institut estonien en France ». Du côté français, le centre est géré par le Ministère des Affaires étrangères et placé sous l'autorité de l'Ambassadeur de France en Estonie. Du côté estonien, l'Institut est géré par une association à but non lucratif, dénommée « Eesti institut » et placé sous la tutelle du Ministère de la culture. Les deux instituts ne font pas partie de la représentation diplomatique de chaque Etat. Ils sont en revanche fondés à intervenir sur l'ensemble du territoire de chaque partie et sont soumis au droit du pays dans lequel ils ont leur siège.

Les missions imparties aux deux institutions sont identiques. Il s'agit à la fois d'organiser des manifestations culturelles (expositions, projections de films, organisations de spectacles...), d'accueillir des conférenciers, des scientifiques ou des artistes, d'entretenir une médiathèque, d'assurer un enseignement linguistique.

Les instituts sont autorisés sur la base de la réciprocité à percevoir des droits d'entrée aux manifestations qu'ils organisent, à vendre des matériels tels que des catalogues ou des supports audiovisuels et à percevoir des droits d'inscription pour les cours de langue qu'ils dispensent. Les deux instituts n'ayant pas d'activité à but lucratif, les recettes perçues doivent avoir un lien direct avec leurs missions.

Le personnel des instituts relève de chacun des Etats partie. L'accord prévoit la possibilité pour la France de confier au personnel diplomatique du service de coopération artistique et culturelle (SCAC) la direction de son centre culturel. Les deux Etats s'engagent à faciliter la délivrance des titres de travail et de séjour des personnels de l'institut ainsi qu'à leurs conjoints et enfants à charge. L'accord prévoit en outre la possibilité pour chaque institut de recruter du personnel soumis au droit local.

Enfin, l'accord définit le régime des exonérations fiscales et douanières applicable aux biens de chaque institut. L'exonération des droits de douane et des taxes à l'importation est ainsi reconnue aux documents vidéo et sonores, ainsi qu'aux appareils d'enregistrement ; aux matériels exposés dans les instituts ou nécessaires aux manifestations qu'ils organisent, les meubles et fournitures de bureau.

CONCLUSION

La politique de coopération culturelle et linguistique est essentielle pour le rayonnement de notre pays et pour l'amélioration de la connaissance mutuelle des peuples. Le présent accord, conclu sur la base de la réciprocité, constitue un outil indispensable au bon fonctionnement du centre culturel français en Estonie. Il a été approuvé par l'Estonie le 14 mars 2005. Il importe donc que la France approuve cet accord dans les meilleurs délais. Pour ces raisons, votre Rapporteur vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 29 juin 2005.

Après l'exposé du Rapporteur, le Président Edouard Balladur a fait observer qu'il serait intéressant que, dans le cadre d'une mission d'information, la Commission examine le fonctionnement des centres culturels français à l'étranger.

M. François Rochebloine a considéré que le principal problème du réseau culturel français était celui du manque de moyens.

M. François Loncle a rappelé que, sous la législature précédente, M. Yves Dauge avait remis au nom de la Commission des Affaires étrangères un rapport d'information sur cette question. Ce rapport a eu un important retentissement. Il serait tout à fait utile de poursuivre ce travail, d'autant qu'un certain nombre des suggestions de ce rapport n'ont pas été suivies d'effet.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 2059).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 2059).

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N° 2419 - Rapport sur le projet de loi, adopté par le sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République d'Estonie relatif au statut et au fonctionnement des centres culturels (Bruno Bourg Broc)

1 Rapport de M. André Boyer, Sénateur, au nom de la Commission des Affaires étrangères et de la défense, n° 115 (2004-2005).


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