N° 2566 - Rapport de M. Bruno Bourg-Broc sur la proposition de résolution de M. Édouard Balladur et plusieurs de ses collègues la mise en oeuvre de l'action-cadre "Mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire" (E 2853) (2338)




Document

mis en distribution

le 13 octobre 2005

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N° 2566

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2005

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (n° 2338) présentée par M. Edouard BALLADUR et plusieurs de ses collègues, sur la mise en œuvre de l'action-cadre : « Mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire » (E 2853),

PAR M. Bruno BOURG-BROC,

Député

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INTRODUCTION 5

I - POUR UNE CODIFICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE 7

A - ÉTAT DES LIEUX DE LA MISE À JOUR ET DE LA SIMPLIFICATION DE L'ACQUIS COMMUNAUTAIRE 7

B - LA NÉCESSITÉ D'UNE CODIFICATION THÉMATIQUE DU DROIT COMMUNAUTAIRE 10

II - CONCILIER RIGUEUR JURIDIQUE ET DIVERSITÉ LINGUISTIQUE 11

A - RELANCER LE PROCESSUS DE CODIFICATION 11

B - RÉSOUDRE LES PROBLÈMES LINGUISTIQUES 12

CONCLUSION 13

AUDITION DE M. MAURICE DRUON, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL HONORAIRE DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE (8 FÉVRIER 2005) 15

EXAMEN EN COMMISSION 23

PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION 25

Mesdames, Messieurs,

La Commission des Affaires étrangères est saisie d'une proposition de résolution relative à la mise à jour et à la simplification de l'acquis communautaire déposée par MM. Édouard Balladur, Pascal Clément, Pierre Lequiller, Hervé de Charette, Roland Blum, Michel Destot, Jacques Godfrain, François Loncle et François Rochebloine (n° 2338).

Cette proposition de résolution a été déposée le 24 mai 2005 à la suite de l'audition par la Commission des Affaires étrangères de M. Maurice Druon, Secrétaire perpétuel honoraire de l'Académie française1, venu présenter à cette occasion le Manifeste qu'il a rédigé en octobre 2004 demandant que la langue française soit la langue de référence pour tous les textes ayant valeur juridique ou normative engageant les membres de l'Union.

La proposition de résolution poursuit un double objectif : promouvoir la mise à jour et la simplification du droit communautaire en mettant en œuvre un ambitieux programme de codification ; régler les problèmes d'interprétation des textes juridiques européens en proposant qu'en cas de difficulté, la version française fasse foi. Pour ce faire, le texte vise la Communication de la Commission au Conseil du 16 juin 2004, intitulée Mise en œuvre de l'action-cadre : « mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire »2. Ce document, qui dresse un bilan d'étape du travail de mise à jour et de simplification opéré par la Commission, a été transmis par le Gouvernement au Parlement en application de l'article 88-4 de la Constitution à la demande de M. le Président de la Commission des Affaires étrangères.

Il importe que cette proposition de résolution entre en vigueur dans les meilleurs délais, car la Grande-Bretagne a fait de la simplification du droit communautaire et de l'amélioration de la réglementation l'une des priorités de sa présidence de l'Union. L'adoption rapide de cette proposition de résolution par l'Assemblée est d'autant plus nécessaire que le prochain Conseil « compétitivité » des 28 et 29 novembre 2005 doit adopter des conclusions en la matière. Il serait donc souhaitable qu'à cette occasion le Gouvernement français tienne compte de la position de l'Assemblée sur ce point et qu'il puisse en faire part aux autres Etats membres.

I - POUR UNE CODIFICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE

A - État des lieux de la mise à jour et de la simplification de l'acquis communautaire

· Une volonté clairement affichée des institutions communautaires

Les institutions européennes se sont depuis longtemps assigné l'objectif de mettre à jour et de simplifier l'ensemble des normes communautaires. Pourtant, force est de constater qu'aujourd'hui les résultats en la matière sont peu probants. Ce manque d'accessibilité et de lisibilité du droit de l'Union contribue à creuser le fossé entre les citoyens et l'Europe en même temps qu'il nuit à la sécurité juridique. La mise en œuvre d'un ambitieux programme de codification à l'échelon communautaire constitue très certainement la réponse la mieux adaptée pour remédier à cette situation : en rassemblant les textes existants d'une manière cohérente, elle permettrait en effet de mettre à jour les dispositions contradictoires ou caduques, ce qui constitue un préalable indispensable à toute refonte totale du droit existant.

Le chantier de la codification des textes communautaires a été lancé de longue date : ainsi le Conseil a-t-il adopté le 26 novembre 1974 une résolution relative à la codification de ses propres actes juridiques, émettant par ailleurs le souhait qu'une codification plus systématique de l'ensemble des textes communautaires soit entreprise. Une telle démarche nécessitait l'accord des autres institutions productrices de normes communautaires, à savoir la Commission et le Parlement. Un tel accord interinstitutionnel est intervenu le 20 décembre 1994 avec l'adoption d'une « méthode de travail accélérée pour la codification officielle des textes législatifs ». Cet accord consacre les principes de codification mis en œuvre en droit français : à savoir une codification à droit constant, débouchant le cas échéant sur l'abrogation des textes caducs ou la modification des textes contradictoires dans le cadre de la procédure législative classique.

L'institution pilote en matière de codification est la Commission, qui a créé au sein de son service juridique un groupe spécifiquement chargé de ce travail. En juin 2002, elle a lancé une initiative pour l'amélioration de la réglementation visant « à mettre en place un corpus de droit communautaire dérivé clair, efficace, actualisé et d'un emploi aisé »3. En février 2003, elle lançait une action de mise à jour et de simplification de l'acquis communautaire, dans le but d'améliorer la législation en vigueur et d'en réduire le volume. Cette initiative a été entérinée par l'accord interinstitutionnel du 23 septembre 2003 entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, intitulé « Mieux légiférer », qui est entré en vigueur en décembre 2003. Cet accord tend à promouvoir la coordination entre les institutions en vue de l'amélioration de la production normative européenne tant sur un plan qualitatif, par le biais d'études d'impact, que sur un plan quantitatif, au moyen de mesures de simplifications et par le développement d'instruments d'autorégulation ou de co-régulation en substitution des normes de droit dérivé traditionnelles.

La simplification et l'amélioration de la législation communautaire répond à un double objectif : d'une part faciliter l'intégration de l'acquis communautaire dans le droit interne des nouveaux pays membres et dans celui des pays candidats ; d'autre part, améliorer l'environnement juridique des acteurs économiques, afin de ne pas peser sur leur compétitivité, conformément aux objectifs énoncés dans la stratégie de Lisbonne.

Pour ces raisons, la simplification et l'amélioration du droit communautaire constituent l'un des chantiers prioritaires des institutions européennes. Le Conseil a ainsi approuvé en novembre 2004 une liste de priorités en matière de simplification reposant sur la suggestion des Etats membres et il a invité la Commission à prendre les mesures appropriées. Celle-ci a en conséquence repris cet objectif dans son programme de travail pour 20054, tandis que le Conseil demeurait saisi de la question dans le cadre de sa formation consacrée à la compétitivité (réunion des 6-7 juin 2005 et des 28-29 novembre 2005).

· De nombreux obstacles demeurent

Si la codification du droit communautaire constitue l'une des priorités retenue par les institutions européennes, elle se heurte toutefois à d'importants obstacles qui limitent la portée du travail d'amélioration et de simplification de l'acquis communautaire entrepris.

L'une des premières difficultés rencontrées est d'ordre pratique et tient au nombre des langues officielles de l'Union, au nombre de 20 depuis le dernier élargissement. Dans sa Communication au Conseil du 16 juin dernier sur la mise en œuvre de l'action-cadre « mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire », la Commission a ainsi indiqué qu'elle avait « rencontré des problèmes imprévus qui échappaient dans une large mesure à son contrôle. En particulier, la traduction de l'acquis communautaire dans les nouvelles langues (qui est effectuée dans les nouveaux Etats membres) n'a pas été achevée pour la date d'adhésion et les textes nécessaires à la codification dans les nouvelles langues ont seulement commencé à être disponibles dans le courant de 2004 ».

La Commission a ainsi été conduite à prononcer un moratoire de neuf mois, d'août 2003 à avril 2004, en matière d'adoption et de publication d'actes codifiés, afin d'éviter que l'Office des publications officielles ne soit surchargé dans la phase précédant l'élargissement de l'Union. La conséquence de ce moratoire est d'avoir créé un véritable goulot d'étranglement en matière de codification puisque « à la suite de l'adhésion, tous ces actes [devraient] en principe être adoptés dans vingt langues. Cela signifie que l'adoption des textes codifiés prêts à être adoptés dans onze langues à la fin du moratoire sera reportée jusqu'à ce que ces textes soient disponibles dans les nouvelles langues officielles et que les travaux de codification d'autres textes devront être étendus aux neuf nouvelles langues ».

Une autre difficulté tient aux différences d'approche des différents Etats membres sur les questions de codification. Ainsi, la Grande Bretagne qui se trouve dans un système juridique dans lequel la jurisprudence occupe une place prépondérante par rapport aux sources écrites du droit (common law), cherche-t-elle à développer un système de co-régulation et d'autorégulation en substituant aux normes communautaires des instruments incitatifs non contraignants (soft law). Une telle approche ne constitue à l'évidence pas une réponse appropriée, puisque la construction communautaire se trouve clairement dans une logique de droit écrit et qu'elle a fondé un ordre juridique spécifique directement intégré dans le système interne des différents Etats membres.

Par ailleurs, de nombreux Etats membres ne disposent pas de véritables codes regroupant par domaine l'ensemble des textes législatifs, réglementaires et la jurisprudence pertinente. Ainsi, les priorités de codification arrêtées par le Conseil en novembre 2004 sur la base des suggestions des Etats membres sont-elles particulièrement édifiantes : soit elles traitent de sujets d'importance, mais se limitent à un seul texte, comme la douzième directive « droit des sociétés » ou la directive relative aux déchets, soit elles portent sur des sujets particulièrement techniques et circonscrits, comme les huiles usagées, les récipients à pression ou les produits phytopharmaceutiques. Dans ces deux cas de figure, la codification opérée constitue un faible progrès en matière de simplification et d'amélioration de la législation.

Enfin, une dernière difficulté provient des conflits de pouvoir entre les institutions communautaires. En effet, le Conseil et le Parlement sont réticents à confier à la Commission la mise en œuvre d'une codification de grande ampleur dans la mesure où celle-ci pourrait aboutir à une certaine dépossession de leur pouvoir normatif. La Commission disposant du monopole de l'initiative législative, elle est par ailleurs seule fondée à engager un processus de codification à droit non constant. Celui-ci ne peut toutefois pas aboutir sans l'accord du Conseil et, pour les matières relevant de la co-décision, du Parlement européen. Le partage du pouvoir normatif entre les trois institutions communautaires rend donc l'exercice particulièrement malaisé, ce qui explique, que, malgré les différents accords interinstitutionnels intervenus, la codification des textes communautaires demeure aujourd'hui embryonnaire.

B - La nécessité d'une codification thématique du droit communautaire

Afin que chacun des Etats membres prenne mieux en compte l'acquis communautaire, il est indispensable d'en améliorer l'accessibilité et la lisibilité. Il convient donc de procéder à une codification par grand domaine et non pas dans des matières techniques de portée limitée. Le découpage thématique retenu doit être suffisamment cohérent pour permettre de refondre de manière substantielle les normes en vigueur, exercice impossible si l'on s'en tient aux suggestions de codification effectuées à ce jour par les Etats membres et qui sont énumérées dans le programme de travail de la Commission pour 20055.

Par ailleurs, les codes doivent regrouper l'ensemble des normes existantes, ainsi que la jurisprudence importante. Cela implique que la Cour de Justice des Communautés européennes soit également associée à l'exercice.

La rédaction de codes thématiques exhaustifs aurait un double avantage. D'une part, elle permettrait d'opérer une véritable simplification et une réelle amélioration du droit existant. D'autre part, elle faciliterait le respect du principe de primauté du droit communautaire, tout en respectant le principe de subsidiarité. Dès lors que les institutions publiques des Etats membres, mais aussi les acteurs économiques et les citoyens, peuvent facilement prendre connaissance du droit en vigueur à l'échelon communautaire, ils peuvent ainsi agir et prendre des décisions dans un environnement caractérisé par une plus grande sécurité juridique.

La codification à l'échelle communautaire apparaît dans ce contexte comme une démarche plus appropriée, que le développement d'instruments non contraignants (soft law), qui risquent de se surajouter à l'ensemble des normes juridiques existantes sans permettre pour autant d'améliorer la qualité du droit en vigueur, ni de réduire la quantité des textes.

La codification par grands thèmes apparaît donc comme la démarche la plus adaptée pour concilier la mise en œuvre de l'acquis communautaire avec la nécessité de simplifier la législation dans le cadre de secteurs cohérents. Reste à concilier ce processus avec le principe de diversité linguistique qui confère aux vingt langues de l'Union européenne le statut de langue officielle.

II - CONCILIER RIGUEUR JURIDIQUE ET DIVERSITÉ LINGUISTIQUE

A - Relancer le processus de codification

Pour sortir de la paralysie actuelle, il serait souhaitable que les Etats membres soient en mesure de faire des propositions de codification par grands domaines, comme, par exemple, la citoyenneté européenne, le droit de la concurrence, la protection des consommateurs, l'environnement, la santé, le droit de l'audiovisuel... Le Conseil pourrait sur cette base confier aux services de la Commission le soin de rassembler l'ensemble des textes correspondants à droit constant, en recensant les dispositions contradictoires ou caduques. Il conviendrait également d'associer la Cour de Justice des Communautés européennes à cet exercice, afin que celle-ci puisse recenser les décisions qui, de son point de vue, présentent un intérêt pour interpréter le sens d'une disposition normative en vigueur.

Une fois cette codification à droit constant opérée, deux cas de figure seraient envisageables. Soit il n'est pas nécessaire d'abroger ou de modifier les dispositions en vigueur, auquel cas le code se substituerait à ces dernières. Soit, il apparaît que la codification a mis à jour l'existence de dispositions contradictoires ou caduques, auquel cas la Commission devrait proposer au Conseil et au Parlement une refonte des textes en vigueur. S'ensuivrait une procédure législative classique associant la Commission, le Conseil et le Parlement et aboutissant à la publication de codes se substituant au stock de normes existantes.

Une telle démarche apparaît hautement souhaitable et il est tout à fait regrettable qu'elle n'ait pu être entreprise avant l'élargissement du 1er mai 2004. Il est en effet anormal que les nouveaux Etats membres aient dû appliquer l'acquis communautaire en l'intégrant dans leur propre législation, alors même que la plupart d'entre eux ne disposaient pas des textes correspondants dans leur propre langue. Le fait que les contraintes de traduction de l'acquis communautaire aient provoqué une suspension du programme de simplification et de mise à jour du droit existant souligne, s'il en était besoin, les lourdeurs qu'entraîne l'existence de vingt langues officielles au sein de l'Union européenne. Il est donc nécessaire de trouver une solution à ce problème, afin de relancer avec vigueur l'œuvre de codification du droit communautaire.

La présente résolution invite donc les pouvoirs publics français à peser au sein des institutions européennes pour faire de la codification thématique du droit communautaire l'instrument privilégié de sa simplification et de sa mise à jour.

B - Résoudre les problèmes linguistiques

L'existence de vingt langues de travail au sein de l'Union européenne ne saurait en aucun cas être remise en cause, car elle est la marque de l'attachement de l'Union au principe de la diversité culturelle et de l'égale dignité des Etats membres. Elle soulève toutefois de nombreuses difficultés, notamment en termes de traduction des normes communautaires.

Aussi, la présente résolution, s'inspirant du Manifeste rédigé par M. Maurice Druon et qui a été signé par douze personnalités européennes éminentes, propose-t-elle, outre la relance du processus de codification, de régler le problème des divergences d'interprétation des textes communautaires liées à des problèmes linguistiques en prévoyant que la version en français fasse foi.

Langue d'un pays de droit écrit, à la différence de l'anglais, langue de la common law, le français dispose d'un vocabulaire juridique tout à fait précis et dénué d'ambiguïté. La langue française est d'ailleurs la langue de délibération de la Cour de Justice des Communautés européennes. Notre pays dispose en outre d'une expérience ancienne en matière de rédaction de codes juridiques.

Tout en respectant le principe du pluralisme linguistique - il ne s'agit pas de faire du français la langue juridique de référence de l'Union -, il serait souhaitable que la langue française fasse foi à titre subsidiaire, c'est-à-dire en cas de conflit lié à une difficulté d'interprétation d'une disposition normative. Ce risque n'est pas négligeable et s'est accru depuis le dernier élargissement à dix nouveaux Etats membres, puisque le nombre de combinaisons linguistiques est passé de 110 à 420.

Cette démarche vise donc à concilier le principe de la diversité linguistique existant dans l'Union avec celui du maintien d'une indispensable rigueur juridique.

CONCLUSION

Déposée avant le référendum sur le traité établissant une Constitution pour l'Europe du 29 mai dernier, la proposition de résolution soumise à l'Assemblée nationale conserve aujourd'hui tout son intérêt. Dans l'attente d'un nouveau traité, il est en effet prioritaire de rendre le droit de l'Union plus accessible et plus lisible. A ce titre, la codification apparaît comme un moyen utile d'y parvenir et elle doit permettre de mener à bien une œuvre de simplification et d'amélioration d'un droit perçu à juste titre comme technique et obscur. Parallèlement, il est nécessaire de sortir des difficultés liées aux contraintes de traductions des textes officiels dans les vingt langues de l'Union et il est souhaitable qu'à cette fin le français fasse foi en cas de divergence d'interprétation liée à des problèmes linguistiques.

AUDITION DE M. MAURICE DRUON, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL HONORAIRE DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE, SUR L'EMPLOI DE LA LANGUE FRANÇAISE DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES (8 FÉVRIER 2005)

Le Président Edouard Balladur a remercié M. Maurice Druon, Secrétaire perpétuel honoraire de l'Académie française, d'avoir accepté de venir devant la Commission des Affaires étrangères et il a salué son action en faveur du rayonnement de la langue française.

M. Maurice Druon, Secrétaire perpétuel honoraire de l'Académie française, après avoir rappelé qu'il avait été membre de la Commission des Affaires étrangères et qu'il se réjouissait d'avoir l'occasion d'y revenir, a déclaré qu'il souhaitait donner écho à l'avertissement lancé en 1971 par le Président Georges Pompidou s'adressant depuis l'ambassade de France à Bruxelles à nos compatriotes résidant en Belgique : « Si nous autres Français reculons sur notre langue, alors nous serons emportés purement et simplement. Le rôle de la langue n'est pas un simple moyen d'expression. C'est un moyen de pensée, un moyen d'influence intellectuelle, et c'est à travers notre langue que nous existons dans le monde, autrement que comme un pays parmi les autres. »

Après la capacité stratégique, qui donne crédibilité à sa politique étrangère, l'importance d'un pays se mesure à la diffusion de sa culture, et donc de sa langue, qui en est l'élément fondamental. Une politique de la langue doit donc être une priorité nationale pour tous les gouvernements et un souci premier pour tous les citoyens.

S'il ne faut pas céder à la nostalgie de l'époque où l'Europe était le continent le plus puissant du monde où le français était la langue communément employée par les élites, force est de constater que les reculs du français ne sont pas uniquement dus à la force des choses, mais que nous y avons souvent mis la main : nous sommes passés dans une civilisation technique, où la communication orale l'emporte sur la communication écrite ; les médias audiovisuels diffusent à longueur de temps fautes grossières et vulgarités ; la publicité a multiplié les inventions perverses, les sciences dites humaines un jargon incompréhensible ; l'enseignement est confronté à une tragique baisse de son niveau. Naguère encore, on apprenait à parler comme on doit écrire ; aujourd'hui on apprend à écrire comme on ne doit pas parler.

L'anglais est devenu langue dominante dans les domaines scientifiques, techniques, financiers, commerciaux et il est choisi par la plupart des étudiants dans le monde en raison de la puissance économique des Etats-Unis. Mais que l'anglo-américain tende à devenir la langue unique relève de notre faiblesse et de celle des pays latins. Langue unique veut dire culture uniforme, c'est-à-dire mort de la culture par extinction des échanges. Est-il admissible que des congrès scientifiques où l'usage du français est exclu se tiennent en France, qu'un manuel d'économie à l'usage de l'université soit publié en France entièrement en anglais, que les conseils d'administration de certaines grandes sociétés françaises se tiennent dans cette langue, que des contrats conclus entre des entreprises françaises le soient en anglais, ou que dans les entreprises de loisirs le vocabulaire anglais soit employé à tort et à travers car considéré comme plus vendeur. C'est une illusion de croire qu'en adoptant la langue du plus riche, on se hisse à sa hauteur : on ne fait que se mettre à sa remorque.

L'utilisation du français est également en baisse dans les grandes institutions internationales où, pourtant, il est langue officielle et de travail. Il est de fait qu'à l'ONU, les projets de rapport sont quasiment tous rédigés en anglais. A l'Organisation mondiale du commerce, 89 % des documents originaux sont en anglais, contre 6,5 % en espagnol et 4,5 % seulement en français. Au début de l'Europe des Six, le français était la langue utilisée par tous les partenaires et le Ministre allemand von Brentano avait préconisé qu'il fût reconnu langue de la communauté. Au fil des ans, le français n'a cessé de régresser de manière accélérée, il y a sept ans encore 45 % des documents de la Commission européenne étaient initialement rédigés en anglais contre 40 % en français. En 2003, on est passé à 59 % pour l'anglais contre 28 % pour le français.

Faut-il s'en étonner quand de nombreux agents français, par vanité, complaisance ou faux réalisme, privilégient l'anglais dans leurs discours et leurs écrits officiels ? Est-il concevable de recevoir une invitation de Sciences Po écrite en anglais pour un colloque international qui se tient rue Saint Guillaume sous les auspices du Ministère des Affaires étrangères. De quel étrange masochisme sommes-nous saisis ? La langue d'un peuple, c'est son âme : avons-nous perdu tout honneur de nous-mêmes et toute dignité ?

En 1994, une circulaire du Premier ministre relative à l'emploi de la langue française par les agents publics dans les relations internationales disposait qu'aucune considération d'utilité, de commodité ou de coût ne saurait empêcher ou restreindre l'usage de la langue française. Les agents des services extérieurs de l'Etat devaient employer le français dans les négociations et refuser de siéger dans les réunions pour lesquelles les documents préparatoires n'avaient pas été traduits en français. Ces saines obligations ont malheureusement été oubliées par les gouvernements suivants.

S'il est un domaine pour lequel il ne faut pas reculer d'un pouce, c'est celui du droit. Il se créé actuellement un droit européen qui tend à se surimposer aux droits nationaux. Dans l'élaboration de ce droit nouveau, il y a une compétition entre le droit de tradition romano-germanique, fondé sur le droit écrit, et le droit de tradition anglo-américaine, dit de common law qui est coutumier et empirique. Comme l'a dit le Président Abdou Diouf : « la langue véhicule le droit et le droit véhicule la langue. La structure de la langue qui traduit celle de la pensée influence la conception même du droit. » Loin d'être en position de faiblesse, le droit latin dont la langue française est le premier véhicule se trouve plutôt en position de force. Outre les pays où il est par tradition fortement ancré, notre droit est choisi par de vastes nations qui ont à créer ou modifier leurs normes juridiques, parce qu'elles l'estiment plus clair et plus sûr. Nous serions donc gravement coupables si nous laissions notre droit et notre langue battre en retraite dans les institutions du grand ensemble européen où se détermine notre avenir.

Pour ces raisons, M. Maurice Druon a déclaré qu'il avait pris l'initiative de lancer en octobre dernier avec l'appui d'une douzaine de personnalités européennes parmi les plus éminentes, un manifeste demandant au Conseil européen de convenir que « pour tous les textes ayant valeur juridique ou normative engageant les membres de l'Union, la rédaction déposée en français soit celle qui fait référence. ». Il s'agirait, autrement dit, de faire du français la langue juridique de l'Europe.

Les rédacteurs du Traité constitutionnel européen ont mis de côté de manière trop prudente le problème de la langue de l'Union sans doute parce qu'il leur a paru insurmontable. Il est compréhensible que chaque Etat membre veuille que sa langue soit tenue pour langue officielle au nom de sa dignité nationale et de la diversité culturelle. Après le récent élargissement de l'Union, le nombre de langues officielles s'élève à vingt-et-une et devrait atteindre vingt-cinq ou plus compte tenu des élargissements futurs. L'Espagne a pour sa part demandé que les langues de quatre de ses provinces soient reconnues pour officielles. Dans ce contexte, les problèmes de traduction et de compréhension mutuelle risquent de devenir aussi coûteux qu'insurmontables. Il faudra donc, alors que le coût d'interprétation dans les institutions européennes atteindra cette année un milliard d'euros, limiter en usage sinon en droit, le nombre de langues de travail de l'Union.

Par ailleurs, il est indispensable pour l'homogénéité du droit européen, l'application des accords et le règlement des litiges, que l'Union se choisisse une langue de référence. Or, la langue française, comme jadis le latin, est la mieux désignée pour jouer ce rôle. Grâce à son vocabulaire, sa grammaire et sa syntaxe, elle est la plus apte aux définitions générales et aux notions abstraites et offre le plus de garanties de clarté et de précision en réduisant au minimum les risques de divergences d'interprétation. L'anglais a ses mérites en ayant des brièvetés qui ne sont pas dans la nature du français, mais il prête facilement à l'ambiguïté. La résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies enjoignant à Israël, après la guerre des six jours, le retrait des Territoires occupés dans le récent conflit ne permettait pas dans sa version anglaise de savoir si elle visait tout ou partie de ces territoires (« from territories »).

Les mots du droit doivent être irréfutables et c'est à cela que la langue française excelle. Elle est la mieux à même d'assurer la sécurité juridique de l'Europe et la Cour de justice de Luxembourg l'atteste puisqu'elle délibère et rend ses arrêts en français. Ce solide précédent doit permettre de persuader nos partenaires de l'intérêt du français comme langue de référence en droit européen.

M. Maurice Druon a espéré que cette cause bénéficierait de l'appui des parlementaires et souhaité que ceux-ci partagent sa conviction que la langue française n'a pas fini de rendre des services à l'humanité.

Le Président Edouard Balladur a remarqué que, actuellement, trois langues de travail, le français, l'anglais, l'allemand étaient utilisées dans les institutions communautaires et qu'elles constituaient de fait les langues de référence. La proposition défendue par le manifeste vise à ce que le français fasse foi en cas de difficulté d'interprétation avec les autres langues officielles. Comment les responsables français et européens ont-ils réagi à cette proposition ? Comment faire en sorte qu'elle soit examinée ?

M. Maurice Druon, Secrétaire perpétuel honoraire de l'Académie française, a indiqué que sa proposition avait recueilli un nombre très important de témoignages d'intérêt et de soutien. Le Président de la République, le Garde des Sceaux, les Ministres de l'Education nationale, des Affaires étrangères, de l'Economie, de la Culture, des Affaires européennes, de la Coopération et de la francophonie, se sont déclarés favorables à la proposition. Le Vice Président du Conseil d'Etat, le Premier Président de la Cour des Comptes et celui de la Cour de Cassation ont également exprimé leur appui.

Le manifeste a été officiellement envoyé aux députés européens membres du groupe interparlementaire sur la Francophonie. Une douzaine d'entre eux s'est déclarée favorable à la proposition. Grâce à l'action de M. Jean-Paul Garraud, 150 députés du groupe UMP ainsi que 50 sénateurs ont signé le manifeste. Il est important que des membres de tous les groupes le signent car la défense de la francophonie n'est pas un sujet de lutte partisane mais relève d'un véritable intérêt de civilisation.

Les professions judiciaires ont suggéré la réunion d'un congrès mondial des pays de tradition de droit écrit. Le manifeste est aussi soutenu par onze associations universitaires ou juridiques polonaises.

Pour mener une action de cette ampleur, il est nécessaire de bénéficier du soutien d'une structure administrative ou privée. Malgré les nombreux encouragements officiels, aucune proposition concrète n'a encore été formulée dans ce domaine. Les parlementaires pourraient contribuer à soutenir cette action à travers les groupes d'amitié qui notamment lient la France à chacun des autres pays membres de l'Union européenne.

Le Président Edouard Balladur a observé que l'usage du français comme langue de création du droit communautaire suppose que cette langue soit utilisée par toutes les institutions qui contribuent à la création de ce droit, le Conseil européen, le Conseil des Ministres, le Parlement européen, la Commission et la Cour de justice des communautés européennes. Cette dernière délibère d'ores et déjà exclusivement en français. Pour arriver à ce résultat, il faudrait qu'une initiative en ce sens soit prise dans chacune de ces institutions. Il peut sembler maladroit que des Français soient à l'origine de cette proposition mais on ne peut guère compter sur d'autres relais. Ainsi on ne saurait attendre le soutien des Britanniques.

M. Maurice Druon s'est inquiété de la pression qui s'exerçait à la Cour de justice des communautés européennes en faveur de l'anglais. Les Britanniques reconnaissent volontiers que la langue française est plus précise que l'anglais mais ils ne soutiendront probablement pas l'idée d'accorder à notre langue une place privilégiée.

M. François Rochebloine a souhaité que la défense de la francophonie soit une priorité nationale soutenue par tous les gouvernements. Il a évoqué deux exemples qui l'ont choqué : M. Jean-Claude Trichet s'est exprimé en anglais à Strasbourg devant le Conseil de l'Europe et le français a été très peu utilisé aux Jeux olympiques d'Athènes, en infraction avec les dispositions de la Charte olympique, mais sans que cela suscite de réactions du gouvernement français, qui était soucieux de ne pas nuire à la candidature de Paris. L'Assemblée nationale ne pourrait-elle pas voter une résolution qui soutiendrait la proposition de M. Maurice Druon ?

M. François Loncle a déploré que le représentant permanent de la France auprès des Nations unies tienne le plus souvent ses conférences de presse en anglais et il s'est étonné qu'un Premier ministre français évoque la « positive attitude ». Dans un premier temps, il a estimé que l'Assemblée nationale pourrait exprimer son soutien au manifeste et les députés pourraient agir au Conseil de l'Europe et auprès de leurs collègues du Parlement européen. Dans un deuxième temps, l'appui de parlementaires d'autres pays pourra être recherché.

M. André Schneider a fait part de la réticence de la plupart des personnes à s'exprimer dans une autre langue que la leur, notamment à cause d'une connaissance imparfaite des langues étrangères. Ainsi, à l'occasion d'une rencontre franco-allemande de professeurs de français et d'allemand, ceux-ci ont commencé par s'entretenir en anglais alors que chacun connaissait la langue de l'autre. Le recul de l'influence du français est sensible non seulement en Europe mais aussi dans les pays francophones d'Afrique, comme le Cameroun ; cela constitue un échec culturel mais aussi économique et politique.

Après avoir souligné la pertinence de la proposition de M. Maurice Druon, qui vise non la défense mais la promotion du français en Europe, M. Michel Herbillon a estimé que c'était effectivement au sein de l'Union européenne que se jouait l'avenir de la langue française. Le recul de notre langue a commencé en 1995 lorsque l'Autriche, la Finlande et la Suède sont devenues membres de l'Union. Depuis cette date, le nombre de documents de la Commission ou du Conseil rédigés en français a diminué de moitié. Il est temps de réagir à cette évolution, alors que le récent élargissement risque d'affaiblir encore la place du français.

En 1958, a été proclamée l'égalité des langues de tous les Etats membres mais ce principe a été progressivement oublié, comme l'a montré le rapport d'information de la Délégation pour l'Union européenne intitulé Pour une Europe en V.O., travail dont M. Michel Herbillon a rappelé qu'il en avait été le rapporteur. De graves anomalies sont constatées mais elles ne suscitent aucune réaction. Par exemple, de nombreuses annonces de recrutement sont rédigées uniquement en anglais et le site internet de la Banque centrale européenne n'est disponible que dans cette langue. La proposition de M. Maurice Druon est très ambitieuse mais risque de se heurter à l'opposition de certaines institutions. Deux mesures pratiques pourraient être prises. La première pourrait consister à imposer l'apprentissage d'une deuxième langue vivante à l'école, alors qu'elle n'est actuellement obligatoire que dans sept Etats membres. L'exemple espagnol montre que l'introduction d'une deuxième langue vivante profite essentiellement au français : depuis que cette disposition est en vigueur en Espagne, le nombre d'élèves apprenant le français a quintuplé. Une autre initiative pourrait viser à créer un centre de formation au français pour les fonctionnaires communautaires, lequel pourrait être installé à Strasbourg.

Le Président Edouard Balladur a proposé à la Commission de rédiger une proposition de résolution qui serait présentée à M. Maurice Druon avant d'être soumise aux Présidents des groupes de l'Assemblée nationale et aux Présidents des groupes d'amitié entre la France et les pays de l'Union européenne. La Commission pourrait aussi demander au Gouvernement quelles initiatives il a l'intention de prendre pour soutenir la proposition de M. Maurice Druon.

M. François Loncle et M. François Rochebloine ayant approuvé cette idée, M. Maurice Druon les a vivement remerciés.

La défense de l'utilisation de la langue française dans les instances internationales est une lutte de tous les instants. Ainsi, après que le Pape se fut exprimé en anglais aux Nations unies, l'Académie française lui a remis la médaille d'or de la langue française afin de lui rappeler qu'il aurait dû utiliser le français, langue diplomatique du Vatican, ce qu'il a volontiers reconnu.

La plus grande vigilance est nécessaire pour que soit accordé au français la place qui est la sienne dans la Charte olympique. Celle-ci précise que lorsque la version française et la version anglaise d'un document sont source d'une interprétation divergente, c'est la version française qui fait référence. Il y a là un précédent très important que l'on pourra utilement faire valoir.

L'usage de l'anglais dans les conférences de presse de l'Ambassadeur de France auprès des Nations unies s'explique par les difficultés de compréhension de la langue française de la plupart des journalistes présents à New York. Il ne faut pas pour autant renoncer à utiliser le français car les journalistes feront l'effort de comprendre si les informations sont importantes. Il n'y a pas de raison que la circulaire de 1994, prise par M. Edouard Balladur, ne s'applique pas dans ce type de situation.

M. Maurice Druon a souligné les difficultés psychologiques auxquelles se heurte l'utilisation d'une langue étrangère. Alors que 60 % des élèves britanniques apprennent le français, rares sont ceux qui osent le parler. Il a considéré qu'il serait vain de vouloir se battre sur tous les fronts. Ainsi, lutter pour la place du français dans les organisations internationales économiques semble voué à l'échec alors que la position du français peut être plus efficacement défendue dans le domaine du droit. Il est donc préférable de se consacrer à la réalisation de cet objectif. Les deux propositions formulées par M. Michel Herbillon sont excellentes et mériteraient d'être promues.

M. Maurice Druon a remercié les députés présents de l'unanimité de leurs réactions en faveur de la promotion de la langue française et de la proposition formulée dans son manifeste.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné la présente proposition de résolution au cours de sa réunion du mardi 11 octobre 2005.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Hervé de Charette s'est demandé si la codification du droit communautaire n'avait pas pour résultat de retirer du traité constitutionnel européen la troisième partie, qui est composée pour l'essentiel de textes en vigueur.

M. François Loncle a demandé au Président de la Commission s'il avait fait part de cette proposition de résolution au Gouvernement et si celui-ci entendait y donner suite.

Le Président Edouard Balladur a indiqué que la Ministre déléguée aux Affaires européennes, qui a été informée de cette initiative, devait être entendue par la Commission le mardi 18 octobre 2005 et qu'il conviendrait à cette occasion de l'interroger pour connaître la position du Gouvernement sur cette proposition de résolution.

La Commission est ensuite passée à l'examen de l'article unique de la proposition de résolution.

Elle a adopté un amendement du rapporteur marquant l'attachement de l'Assemblée nationale au caractère écrit et contraignant des normes juridiques.

Elle a adopté un amendement du rapporteur se référant au programme de simplification et d'amélioration du droit communautaire mis en œuvre par l'Union et soulignant l'intérêt de ce programme pour les citoyens, les institutions publiques et les acteurs économiques.

Elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

Elle a ensuite été saisie d'un amendement du rapporteur supprimant la référence au traité établissant une Constitution pour l'Europe. M. Hervé de Charette a estimé qu'il n'était pas nécessaire de supprimer la référence à ce texte, puisque celui-ci existait toujours juridiquement. M. François Loncle a suggéré d'assortir la référence au traité constitutionnel d'un conditionnel. M. Jean-Jacques Guillet a considéré que le maintien de cette référence dans la proposition de résolution en altèrerait la portée. Le Président Edouard Balladur a estimé que l'on pourrait considérer comme surprenant le fait de se référer au traité constitutionnel, alors même qu'il a été rejeté par référendum et qu'il ne peut entrer en vigueur. La Commission a adopté cet amendement.

La Commission a adopté l'article unique de la proposition de résolution ainsi modifié.

*

* *

En conséquence, la Commission demande à l'Assemblée nationale d'adopter la proposition de résolution dont le texte suit.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION
SUR LA MISE EN œUVRE DE L'ACTION-CADRE :
« METTRE À JOUR ET SIMPLIFIER L'ACQUIS COMMUNAUTAIRE »

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la communication de la Commission au Conseil : « mise en œuvre de l'action-cadre : mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire » [COM (2004) 432 du 16 juin 2004, E 2853],

Vu le programme de travail de la Commission pour 2005 [COM (2005) 15 final du 26 janvier 2005, E 2822],

1. Considérant que le droit constitue l'un des instruments privilégiés de la construction européenne ;

2. Considérant que le droit de l'Union européenne est intégré au système juridique des États membres et qu'il peut être invoqué par leurs ressortissants ;

3. Souscrivant à l'objectif de simplification du droit de l'Union tout en déclarant son attachement au caractère écrit et contraignant des normes juridiques ;

4. Affirmant sa volonté de simplifier et d'améliorer les règles de droit, afin de les rendre accessibles et intelligibles aux citoyens, de faciliter leur application par les institutions publiques et par les acteurs économiques ;

5. Estimant que la codification de l'ensemble des textes juridiques de l'Union par matière est le meilleur moyen de parvenir à cet objectif ;

6. Souhaitant que soient éliminés les risques de contradiction entre les textes, ainsi que les risques de divergences d'interprétation compte tenu de l'existence de vingt langues officielles dans l'Union ;

7. Demande que l'Union européenne procède à une codification par matière de l'ensemble des textes communautaires, complétés d'extraits de la jurisprudence de la Cour de Justice des communautés européennes ;

8. Propose qu'en cas de divergence d'interprétation liée à des problèmes linguistiques, la version en français, langue de délibération de la Cour de Justice des communautés européennes, fasse foi.

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N° 2566 - Rapport de M. Bruno Bourg-Broc fait au nom de la commission des affaires étrangères sur la proposition de résolution (N° 2338) présentée par M. Edouard Balladur et plusieurs de ses collègues, sur la mise en œuvre de l'action-cadre : « Mettre à jour et simplifier l'acquis communautaire » (E 2853).

1 Réunion de la Commission des Affaires étrangères du mardi 8 février à 16h30 (cf. compte rendu en annexe)

2 COM (2004) 432 du 16 juin 2004, E 2853

3 COM (2004) 432 final du 16 juin 2004, p. 2.

4 COM (2004) 432 du 16 juin 2004, E 2853

5 Les priorités de codification proposées par les Etats membres sont les suivantes : produits phytopharmaceutiques, comptes annuels, douzième directive « droit des sociétés », huiles usagées, directive relative aux déchets, déchets dangereux, incinération des déchets, étiquetage des denrées alimentaires, règles internationales et règles de l'UE en matière de véhicules à moteur, produits de construction, dispositifs médicaux, récipients à pression, sécurité et santé des travailleurs, statistiques structurelles sur les entreprises.


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