N° 2712 - Rapport de M. François Rochebloine sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sur l'Office franco-allemand pour la jeunesse (n°2630)




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mis en distribution

le 8 décembre 2005

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N° 2712

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 novembre 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 2630, autorisant l'approbation de l'accord sur l'Office franco-allemand pour la jeunesse,

PAR M. FRANÇOIS ROCHEBLOINE,

Député

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INTRODUCTION 5

I - L'OFFICE FRANCO-ALLEMAND POUR LA JEUNESSE : UN BILAN À     L'OCCASION DE SON QUARANTIÈME ANNIVERSAIRE 7

A - LA MISE EN PLACE DE L'OFAJ : OUTIL PRIVILÉGIÉ DE COOPÉRATION  BILATÉRALE DANS LE DOMAINE DE LA JEUNESSE 7

1) Le Traité de l'Elysée 7

2) L'Office franco-allemand pour la jeunesse et l'accord
du 25 novembre 1983
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B - UN BILAN GLOBALEMENT POSITIF 9

II - LA RÉFORME DE L'OFFICE FRANCO-ALLEMAND POUR LA JEUNESSE : UNE MODERNISATION POUR PLUS D'EFFICACITÉ 11

A - UN RÉÉQUILIBRAGE DES MISSIONS CONFIÉES À L'OFFICE 11

B - LES STRUCTURES INTERNES D'ADMINISTRATION DE L'OFFICE 12

1) Le Conseil d'administration 12

2) La création d'un Conseil d'orientation 13

3) Le Secrétariat général 13

C - LES AUTRES ADAPTATIONS NÉCESSAIRES 13

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

Mesdames, Messieurs,

L'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) a été créé par un accord le 5 juillet 1963 révisé par les accords du 22 juin 1973 et du 25 novembre 1983.

Quarante années plus tard, en 2003, l'Office a fait l'objet d'une double évaluation. Deux missions ont été conduites ; l'une ministérielle et l'autre parlementaire.

Les missions, l'organisation et le mode de travail de l'Office ont été reconsidérés afin de le moderniser et de le rendre plus efficace.

A l'issue de ces évaluations un groupe de travail a remis ses propositions qui s'inspirent globalement des conclusions de la mission d'information parlementaire.

La réforme de l'Office franco-allemand pour la jeunesse a été présentée à l'occasion de la réunion de son Conseil d'administration le 21 octobre 2004 puis lors du Conseil des ministres franco-allemand le 26 octobre 2004. Un accord a été signé à l'issue du Conseil franco-allemand du 26 avril 2005.

Le présent projet de loi vise à autoriser l'approbation de cet accord.

I - L'OFFICE FRANCO-ALLEMAND POUR LA JEUNESSE :
UN BILAN À L'OCCASION DE SON QUARANTIÈME ANNIVERSAIRE

A - La mise en place de l'OFAJ : outil privilégié de coopération bilatérale dans le domaine de la jeunesse

1) Le Traité de l'Elysée

Outre les dispositions relatives à la coopération en matière de défense et de politique étrangère, le traité de l'Elysée sur la coopération franco-allemande signé le 22 janvier 1963 contient de nombreuses dispositions relatives à l'éducation et à la jeunesse.

Les dispositions relatives à l'éducation visent l'enseignement des langues française et allemande, l'adoption de nouvelles équivalences et le développement de la coopération en matière de recherche scientifique.

Les principaux objectifs en ce qui concerne la jeunesse entendent renforcer la coopération entre les jeunes français et allemands et multiplier les échanges collectifs.

Ainsi, le traité annonce la création d'un organisme binational l'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) qui sera mis en place le 5 juillet 1963 par un accord entre le Chancelier Konrad Adenauer et le Président Charles de Gaulle.

L'accord prévoit que l'OFAJ (« l'Office ») a pour objet de :

- « resserrer les liens qui unissent les jeunes des deux pays » ;

- « renforcer leur compréhension mutuelle » ;

- et, à cet effet, « de provoquer d'encourager et le cas échéant de réaliser des rencontres et des échanges de jeunes ».

L'Office est invité à intervenir dans différents domaines : les rencontres et échanges d'écoliers, d'étudiants et de jeunes travailleurs ; les échanges à caractère socioprofessionnel et technologique, les déplacements de groupes, manifestations sportives et de jeunesse, ou encore de colonies, centres et maisons familiales de vacances ; les échanges et stages en vue de la formation de cadres sportifs et de jeunesse, la connaissance réciproque des deux pays par une action d'information, l'organisation de voyages et de séjours d'études, de séminaires, de manifestations artistiques ; le développement des institutions extra-scolaires qui se consacrent à la diffusion de la langue de l'un ou de l'autre pays, des enquêtes et recherches scientifiques dans le domaine de la jeunesse.

2) L'Office franco-allemand pour la jeunesse et l'accord du 25 novembre 1983

Modifié en 1973 puis par un accord du 25 novembre 1983, l'Office est une personne morale qui bénéficie de l'autonomie de gestion et d'administration (article 3, alinéa 1er).

Créé par un traité bilatéral entre les Etats, l'Office est une organisation internationale. A cette fin, les prescriptions figurant aux paragraphes 3, 4, 7, 9 et 31a de la Convention adoptée par l'Assemblée générale le 21 novembre 1947 sur les immunités et privilèges des institutions spécialisées s'appliquent à l'Office tant en France qu'en Allemagne.

Les dispositions de la Convention de 1947 concernent la capacité de contracter, d'acquérir et de disposer des biens immobiliers et mobiliers, la capacité d'ester en justice (paragraphe 3) l'immunité de juridiction (paragraphe 4), le droit de détenir et de transférer librement toutes disponibilités financières (paragraphe 7) l'exonération de tout impôt direct et de tout droit de douane sur les importations et exportations à usage officiel (paragraphe 9), le règlement des différends de droit privé (paragraphe 31a)1.

Le Conseil d'administration, instance de décision, présidé par les ministres français et allemand chargés des questions de jeunesse, est investi des pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de la mission de l'Office. Il arrête le programme des activités de l'Office et donne les directives pour son application. Il prend toutes mesures utiles à son bon fonctionnement, vote le budget et approuve le rapport annuel du Secrétaire général.

Les dispositions relatives au nombre de représentants au Conseil d'administration, les modalités de leur désignation ou encore la fréquence de leur réunion ont fait l'objet d'adaptations qui figurent aujourd'hui dans le projet de loi soumis à l'Assemblée.

Il est en effet apparu que le nombre des membres du Conseil d'administration (trente) était très élevé par rapport à l'effectif total du personnel de l'Office (soixante dix personnes). De surcroît, des risques de conflits d'intérêts se sont révélés dans la composition du Conseil d'administration dans la mesure où les bénéficiaires des subventions participent également à la décision sur l'attribution de celles-ci.

Par ailleurs, les modalités de nomination du Secrétaire général et du Secrétaire général adjoint, effectuées de manière parallèle, ne permettaient pas de garantir la constitution d'un binôme complémentaire. De plus, les fonctions et les compétences du Secrétaire général adjoint sont définies de manière imprécise dans le décret de 1983.

Quant aux personnels de l'Office, leur statut sui generis depuis le 1er janvier 1964, conforme aux règles de l'OCDE, a été peu remis en cause. Dès lors, il est apparu que les agents de l'Office bénéficiaient d'avantages multiples (salaires de départ, règles relatives à l'avancement, aux congés...) faisant obstacle au principe même de la mobilité et au renouvellement des effectifs.

Toutefois, en dépit de sa nécessaire modernisation, l'Office présente un bilan largement positif.

B - Un bilan globalement positif

L'OFAJ est le premier opérateur franco-allemand en matière d'échange de jeunes. S'il touche davantage de jeunes dans l'enseignement secondaire, soit environ 160 000 jeunes par an, 7000 de ses programmes concernent le primaire, le supérieur et les jeunes professionnels, apprentis et demandeurs d'emploi. Des formations pour des enseignants et animateurs de jeunesse sont également organisées.

Au total, depuis 1963, plus de sept millions de jeunes allemands et français ont bénéficié des services et programmes de l'OFAJ.

Le budget de l'OFAJ pour 2005 est de 22,87 millions d'euros.

Chacun des ministères y contribue à parité, ce qui représente 95,5% des recettes de l'Office, soit 10,67 millions d'euros pour le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative et autant pour le ministère fédéral chargé de la jeunesse. Les ministères des Affaires étrangères français et allemand apportent également une dotation de 270 000 euros par an et l'Office mène des actions de coopération avec les pays d'Europe centrale et orientale ainsi qu'avec les Balkans.

En 2003, soit quarante ans après son lancement, l'Office a fait l'objet d'une double évaluation. Les ministres chargés de la jeunesse, d'une part, et les parlementaires d'autre part ont souhaité reconsidérer les missions de l'OFAJ, son organisation et son mode de travail afin de le moderniser et de le rendre plus efficace.

Votre Rapporteur précise que cette évaluation aura permis la création de la première mission parlementaire mixte franco-allemande, laquelle a conclu ses réflexions par onze propositions présentées le 23 juin 2004. A l'issue de ses travaux et partant de ses propositions, un groupe de travail mixte franco-allemand a été mis en place par les ministres chargés de la jeunesse.

Le groupe de travail a formulé des propositions concrètes qui s'inspirent des préconisations parlementaires et un accord a été signé lors du Conseil franco-allemand du 26 avril 2005. Le présent projet de loi vise à autoriser l'approbation de cet accord.

La réforme entend adapter et équilibrer les missions confiées à l'Office, réformer ses structures d'administration et son équipe de direction. Par la suite, l'Office devrait adopter un nouveau statut du personnel et un nouveau règlement financier.

II - LA RÉFORME DE L'OFFICE FRANCO-ALLEMAND POUR LA JEUNESSE : UNE MODERNISATION POUR PLUS D'EFFICACITÉ

Face aux défis du XXIème siècle, la mission parlementaire d'information a conclu que les missions et structures de l'Office n'étaient plus adaptées à l'état des relations franco-allemandes, ni aux conséquences de la globalisation, ni à l'élargissement de l'Union européenne à l'Est.

Parce que la relation franco-allemande peut être un exemple pour l'entente des peuples en Europe et dans le monde, l'Office est appelé à assumer de plus grandes responsabilités.

A - Un rééquilibrage des missions confiées à l'Office

Dans le cadre d'une Europe élargie les missions confiées à l'Office sont clarifiées et rééquilibrées.

Alors que l'article 2 du décret du 23 juillet 1984 mentionnait que l'Office avait pour objet de resserrer les liens qui unissent les jeunes des deux pays, le nouvel accord donne à l'Office la mission d'approfondir les liens qui unissent les enfants, les jeunes, les jeunes adultes et les responsables de jeunesse des deux pays. Favoriser l'apprentissage linguistique tant du Français que de l'Allemand est une composante importante des missions élargies de l'Office.

En effet, la mission parlementaire a présenté des statistiques inquiétantes sur le niveau de l'apprentissage du français et de l'allemand. Par exemple, en France, en 2000, près de 90% des élèves de 6ème étudient l'anglais et moins de 9,4 % ont choisi l'allemand, soit moins d'un élève de 6ème sur 10. En ce qui concerne le choix de la deuxième langue, pour l'ensemble du second degré, plus de 61 % des élèves choisissent l'espagnol et moins de 20 % l'allemand. A titre de comparaison, en 1970, l'espagnol et l'allemand étaient choisis à égalité comme deuxième langue. Ainsi pour l'ensemble du second degré l'anglais est étudié par 5,1 millions d'élèves, devant l'espagnol, 1,8 million, et l'allemand, qui arrive en 3ème position, 1,1 million. La situation de l'apprentissage du français en Allemagne est tout aussi inquiétante.

Or la maîtrise de l'allemand ou du français tend à faciliter l'entrée des jeunes dans la vie professionnelle, les populations frontalières des deux pays étant appelées à travailler ensemble. Il apparaît notamment que chaque année, en France, au moins vingt mille postes vacants ne peuvent être pourvus faute de connaissance de l'allemand.

L'article 2 énumère les actions qui permettent à l'Office d'accomplir ses missions au regard des objectifs de la coopération franco-allemande et, notamment, par la découverte de la culture du partenaire, l'encouragement des apprentissages interculturels, les mesures de qualification professionnelle, les projets communs d'engagement citoyen, ou encore l'incitation des jeunes à apprendre la langue du pays partenaire.

Ce même article affirme que l'Office est « un centre de compétence pour les Gouvernements  des deux pays », un intermédiaire et un conseiller pour les collectivités territoriales et les acteurs de la société civile dans les deux pays.

De manière explicite l'article 3 souligne la personnalité juridique de l'Office en tant qu'organisation internationale et rappelle que les prescriptions 3, 4, 7, 9 et 31 a de la Convention de 1947 s'appliquent à l'Office.

Il est également précisé que l'Office a son siège en Allemagne ou en France, conformément à un échange de notes auquel procèdent les gouvernements. Par ailleurs les structures de l'Office et la méthode de travail du Secrétariat général doivent permettre l'accomplissement équilibré de ses missions dans les deux pays.

B - Les structures internes d'administration de l'Office

Tant les moyens d'action que les structures internes de l'Office sont simplifiés.

1) Le Conseil d'administration

Le Conseil d'administration est une instance de décision plus resserrée. Avant la réforme le Conseil d'administration était composé de quinze membres français et de quinze membres allemands. Dans chaque pays, six de ces membres étaient choisis ès qualités dans les administrations publiques, les neuf autres parmi des personnalités qualifiées, des représentants des collectivités territoriales, des dirigeants d'organisations de jeunesse et d'autres secteurs concernés par les activités de l'Office.

Le nouvel accord prévoit un Conseil d'administration resserré composé de quatorze membres au total. En plus des deux ministres chargés de la jeunesse, les douze autres membres sont désignés à parité par chaque gouvernement. Six représentants viennent des administrations publiques (ministères de la jeunesse, des Affaires étrangères et du budget) et les six autres sont des personnalités qualifiées : deux représentants des collectivités territoriales, deux représentants du Bundestag et de l'Assemblée nationale, deux jeunes entre dix-huit et vingt sept ans.

La durée de leurs fonctions est de trois ans et le Conseil d'administration a vocation à se réunir une fois par an, au lieu de deux fois comme le prévoyait l'ancien accord.

Investi des pouvoirs nécessaires à l'accomplissement des missions de l'Office, il définit les actions prioritaires de ce dernier, adopte les programmes et le budget, assure la bonne gestion des crédits et approuve les comptes et le rapport du Secrétaire général.

Le Conseil d'administration a pour fonction de définir les orientations stratégiques de la politique de l'Office. A ses côtés, un Conseil d'orientation permettra d'assurer la représentation des partenaires de l'OFAJ.

2) La création d'un Conseil d'orientation

Ce Conseil d'orientation, voulu tant par la mission parlementaire que par le groupe de travail gouvernemental, est une instance de concertation composée de 24 membres, ouverte à la société civile comme aux secteurs de l'éducation et de l'université, la culture ou encore l'économie.

Le Conseil d'orientation a vocation à siéger une fois par an et ses membres ont un mandat qui court pendant trois années.

Le Conseil d'orientation élabore des avis et recommandations concernant les orientations, les objectifs, les mesures et les programmes de l'Office qui sont transmis ensuite au Conseil d'administration. Il joue un rôle d'évaluation des projets de l'Office.

3) Le Secrétariat général

Les règles relatives au Secrétariat général sont clarifiées. Sont nommés désormais, par accord des deux gouvernements, deux secrétaires généraux, l'un de nationalité française l'autre de nationalité allemande, qui signent un contrat de travail pour un mandat de six ans. Ils représentent et gèrent l'Office de manière conjointe en toutes circonstances.

C - Les autres adaptations nécessaires

Des mesures de gestion interne complèteront la réforme. Les règles relatives au personnel de l'OFAJ seront précisées. Les deux gouvernements doivent définir un statut du personnel, qui favorise la mobilité et les échanges des personnels de l'Office avec les administrations nationales. Les agents seront recrutés par contrat à durée déterminée.

Par ailleurs, un chapitre nouveau (V) sur le contrôle et l'évaluation précise que des commissaires aux comptes de chaque nationalité seront désignés par les gouvernements afin de contrôler conjointement l'utilisation des crédits de l'Office.

CONCLUSION

L'importance des relations franco-allemandes et le bilan très largement positif du rôle joué par l'OFAJ depuis sa création ne peuvent que conduire à soutenir la réforme présentée aujourd'hui.

Par l'approbation que notre Assemblée donnera à l'accord modernisant l'Office franco-allemand pour la jeunesse, la France permettra l'approfondissement des liens entre les jeunes français et allemands, le soutien à l'apprentissage du français et de l'allemand, en outre, elle réaffirmera la particularité de ses liens avec le peuple allemand et l'amitié qu'elle porte à son partenaire européen.

C'est pourquoi votre Rapporteur ne peut qu'appuyer vivement l'approbation de ce projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 29 novembre 2005.

Après l'exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (n° 2630).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 2630).

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N° 2712 - Rapport au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi n° 2630, autorisant l'approbation de l'accord sur l'Office franco-allemand pour la jeunesse (M. François Rochebloine)

1 La Convention de 1947 a été publiée en France par le décret du 10 octobre 2001 et en Allemagne le 10 août 1980.


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