N° 2862 tome IV - Avis de M. Jean-Louis Bernard sur le projet de loi de finances pour 2011 (n°2824)


N° 2862

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2010.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2011 (n° 2824)

TOME IV

DÉFENSE

PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

FORCES TERRESTRES

PAR M. Jean-Louis BERNARD,

Député.

——

Voir le numéro : 2857 (annexe n° 11)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  LA POURSUITE DE LA RÉFORME 7

A. UNE RÉFORME BIEN ENGAGÉE 7

B. LA MONTÉE EN PUISSANCE DU COMMANDEMENT DES FORCES TERRESTRES 8

C. LA MISE EN œUVRE DE CHORUS 9

II. —  LE BUDGET 11

A. ÉVOLUTION GÉNÉRALE 11

B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL 11

C. LES CRÉDITS HORS TITRE II 12

III. —  LES PERSONNELS 15

A. L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS 15

B. UN ENJEU MAJEUR : LA FIDÉLISATION DES ENGAGÉS. 16

C. UNE PROTECTION ET UNE PRISE EN CHARGE AMÉLIORÉES DES PERSONNELS 18

D. L’ACCOMPAGNEMENT DE LA RÉFORME 19

E. L’IMPACT DE LA RÉFORME DES RETRAITES 19

F. LES RÉSERVES 19

IV. —  LES ÉQUIPEMENTS 23

A. DONNÉES GÉNÉRALES 23

1. Les équipements terrestres 23

2. Les hélicoptères 23

3. Le programme SCORPION 24

B. LA DISPONIBILITÉ 25

1. Données générales 25

a) Les matériels terrestres 25

b) Les matériels aériens 25

2. L’allocation de potentiel 26

C. LA LUTTE CONTRE LES ENGINS EXPLOSIFS IMPROVISÉS 27

D. LES MUNITIONS 29

V. —  UN ENGAGEMENT QUI RESTE SOUTENU 31

A. L’ENGAGEMENT DANS LES OPEX 31

B. LES FORCES FRANÇAISES DU CAP-VERT 33

1. La situation au Sénégal 33

2. La présence des FFCV 34

a) Les forces françaises 34

b) Les exercices 35

3. L’évolution : des FFCV vers les EFS 36

C. LES MISSIONS INTÉRIEURES 37

D. ENTRAÎNEMENT ET EXERCICES 38

1. Activité et entraînement 38

2. Les exercices 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL ELRICK IRASTORZA, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE 41

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 57

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET DES DÉPLACEMENTS 63

I. —  AUDITION 63

II. —  DÉPLACEMENTS 63

INTRODUCTION

En 2011, l’armée de terre poursuivra sa réorganisation tout en continuant à remplir les missions qui lui sont confiées. Les crédits qui lui sont alloués passent pour la première fois sous le seuil symbolique des neuf milliards d’euros.

L’armée de terre est très sollicitée en opérations extérieures et dans les missions intérieures. Le rapporteur tient à rendre hommage aux soldats tués ou blessés en service dont il salue le sens de l’engagement. La protection des militaires est toujours une préoccupation majeure et les efforts d’accompagnement et d’équipement restent soutenus. L’engagement des hélicoptères Tigre en Afghanistan a d’ailleurs été particulièrement apprécié. La fin de l’année 2011 se caractérisera par la mise en service opérationnel et l’engagement sur ce même théâtre des systèmes FELIN et par la livraison tant attendue du premier hélicoptère de manœuvre NH90.

Au cours de ses travaux le rapporteur a pris la mesure de l’évolution des menaces. Les orientations du Livre blanc restent d’actualité mais il estime qu’il pourrait être adapté pour que les objectifs visés et les moyens mis en œuvre restent en adéquation avec le contexte stratégique et sécuritaire. Dans cet esprit, il invite à reprendre la réflexion sur l’avenir des Forces françaises du Cap Vert.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 17 septembre 2010. À cette date, seules 9 réponses étaient parvenues, soit un taux de 20 %.

Au 10 octobre 2010, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, 44 réponses étaient parvenues, soit un taux de 98 %.

L’armée de terre poursuit ses efforts de rationalisation et de réduction des effectifs pour répondre aux objectifs fixés. Elle vise, pour 2014, l’achèvement de sa réorganisation en huit brigades interarmes et trois brigades spécialisées regroupant 80 régiments totalisant 88 000 hommes. Sous la double contrainte de la mise en œuvre du Livre blanc et de la réforme du ministère, l’armée de terre poursuit sa contribution à la mutualisation des fonctions d’environnement et de soutien. À terme, environ 20 000 emplois – 10 500 militaires et 9 500 civils – devraient être transférés vers des structures interarmées.

L’intégration dans les bases de défense se poursuit. Les expérimentations menées ont eu pour principal objectif d’identifier les éventuels dysfonctionnements de mise en œuvre et non d’évaluer l’intérêt du nouveau dispositif. Le rapporteur estime le recul insuffisant pour porter une appréciation mais il conviendra de s’assurer à terme que ce qui a été prévu produit bien ses effets. Selon l’état-major de l’armée de terre (EMAT), les gains en effectifs ne sont pas actuellement au rendez-vous. Pour atteindre l’objectif fixé, les services communs de soutien devront faire un effort en termes de diminution d’effectifs pour que ceux-ci ne soient pas prélevés sur les forces de combat.

À l’aube de 2011 les principaux services de soutien sont interarmées. Les échelons de préfiguration de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT), du service de maintenance industrielle terrestre (SMITer), et du service interarmées des munitions (SIMu) ont bien été créés en 2010. Mais les textes réglementaires de création et d’organisation sont encore en cours de validation. L’état-major de montée en puissance (1) du SIMu s’est installé à Versailles à l’été 2010. Dès la mise en place du service, tous les dépôts des armées relevant de son périmètre passeront sous son commandement. À partir des 20 emprises concernées des trois armées, seront créés sept établissements principaux de munitions, comptant chacun de deux à quatre dépôts. L’ensemble devrait atteindre son mode de fonctionnement optimal en juin 2012. Année de finalisation de la transformation du soutien, 2011 sera marquée par la mise en œuvre de la fonction d’opérateur unique du soutien commun. Il conviendra de veiller à ce que l’interarméisation du soutien ne se traduise pas par un éloignement de la réalité du terrain des personnels chargés de la conception et de l’achat des équipements.

Les régions terre disparaissent au 1er janvier 2011. A l’échelon zone de défense, l’officier général disposera de deux états-majors : un état-major interarmes de zone de défense et un état-major de soutien de défense.

Les compétences du commandement des forces terrestres (CFT) ont été accrues en 2010. Les brigades d’appui spécialisées artillerie, génie et aéromobile ont été dissoutes et leurs compétences transférées au CFT au sein duquel ont été créés un centre de mise en œuvre (CMO) artillerie, un CMO génie et un poste de commandement et de mise en œuvre (PCMO) aéromobile.

Le rapporteur s’est rendu le 15 octobre 2010 au CFT. Créé le 1er juillet 2008, il doit permettre de réduire la structure du commandement, les implantations et les coûts tout en maintenant la cohérence capacitaire des forces terrestres. Il est armé par 750 personnes.

Commandement organique, le CFT assure la préparation, la gestion des capacités opérationnelles et la mise en œuvre de l’engagement des forces terrestres. Ses responsabilités sont élargies par rapport à celles du commandement de la force d’action terrestre, notamment dans le domaine de la logistique. La dimension interarmées de la préparation opérationnelle comme de la logistique est de plus en plus importante.

Le CFT centralise l’ensemble des moyens dédiés à la préparation opérationnelle : camps, munitions, budget. Il adapte constamment cette mission à l’évolution des conditions d’engagement (2). Les responsables de cette mise en condition rappellent la nécessité de disposer des équipements génériques pour conduire l’entraînement.

Le concept d’armée responsable de la logistique en fonction de la nature de la mission est décliné dans un contexte de soutien interarmées. La plus grande difficulté de la logistique réside dans l’éclatement des effectifs résultant de la multiplicité des théâtres et des rotations. Compte tenu de l’éloignement, de la variété des milieux, de la dispersion des forces, de leur imbrication avec celles d’autres pays et avec la population des lieux d’intervention, la force logistique doit se penser comme un corps expéditionnaire à la fois sur mesure et réactif pour le combat aéroterrestre.

Au sein du CFT, l’état-major opérationnel terre agit en coordination permanente avec le CPCO (3) pour préparer et assurer la continuité de l’action des forces terrestres en OPEX et en missions intérieures. Il contribue au travail de planification, conduit la montée en puissance en hommes et en matériels des modules déployés, procède à leur acheminement et assure leur soutien logistique. Il participe à la réflexion sur l’adaptation réactive, au désengagement des forces et à l’exploitation du retour d’expérience.

La mise en œuvre de CHORUS en 2010 modifie les responsabilités budgétaires. Lorsque toutes les bases de défense auront été créées, le BOP « Préparation des forces terrestres » fonctionnera avec sept unités opérationnelles (UO) auxquelles seront confiés des objectifs concrets et des crédits. En phase de transition, on dénombre actuellement huit unités opérationnelles. Le schéma ci-dessous présente l’évolution mise en œuvre dans le cadre de la réforme. L’UO « État-major de l’armée de terre » rassemble les crédits qui ne peuvent être confiés à une autre UO ou que l’EMAT souhaite conserver de manière centralisée.

L’évolution des unités opérationnelles

Source : ministère de la défense et état-major de l’armée de terre.

Les réformes engagées se traduisent par des modifications de périmètres de responsabilité budgétaire, des transferts entre programmes ou budgets opérationnels de programme (BOP). Le regroupement de services au niveau interarmées (service du commissariat des armées, SIMu) et le transfert de l’administration générale et des soutiens communs à des structures interarmées réduit la surface du BOP « Préparation des forces terrestres ». Le budget 2011 est marqué par un important transfert de 214 millions d’euros de ce BOP vers le BOP « Soutien des forces », qui porte les crédits des bases de défense.

Le tableau suivant retrace l’évolution des crédits dévolus à l’armée de terre au sein du programme 178.

Crédits des forces terrestres (programme 178)

(en millions d’euros)

Titre

AE

CP

LFI 2010

PLF 2011

Évolution

LFI 2010

PLF 2011

Évolution

Titre 2

7 290

6 927

- 4,98 %

7 290

6 927

- 4,98 %

Titre 3

1 792

1 286

- 28,24 %

1 485

1 291

- 13,06 %

Titre 5

135

156

+ 15,56 %

148

156

+ 5,41 %

Titre 6

2

6

+ 200,00 %

2

6

+ 200,00 %

Sous-total

9 219

8 374

- 9,17 %

8 925

8 378

- 6,13 %

Source : projet annuel de performances et ministère de la défense.

Les crédits réservés à l’armée de terre au titre du programme 178 baissent de 9,17 % en autorisations d’engagement et de 6,13 % en crédits de paiement. Dans les deux cas le seuil symbolique des 9 milliards d’euros est franchi. La régression est plus marquée qu’en 2010. Outre la poursuite de la diminution des effectifs, la réduction de périmètre est plus conséquente.

Les crédits inscrits au titre 2 pour l’armée de terre s’élèvent à 6 927 millions d’euros, soit une diminution de 4,98 %. Ce nouveau recul résulte de la poursuite des restructurations et de la réduction des effectifs. L’exercice 2010 n’est pas achevé mais il est probable que les crédits qui étaient inscrits au titre 2 seront insuffisants pour prendre en compte la montée en puissance de la présence française au sein de l’OTAN et aux Émirats Arabes Unis.

Les mesures indemnitaires s’élèvent à 31,26 (4) millions d’euros. Ces crédits comprennent 28,6 millions d’euros au titre des mesures inscrites pour 2011 et incluent le financement de mesures catégorielles complémentaires prévues en 2010 mais reportées en 2011 comme l’extension de l’indemnité pour charge militaire et la revalorisation de l’indemnité spéciale des plongeurs d’armes.

Les principales mesures pour 2011 sont : la mise en œuvre de la troisième et dernière tranche de la revalorisation des grilles indiciaires pour les officiers et les sous-officiers (10,48 millions d’euros) et celle d’une prime de fidélisation pour les militaires du rang (9,63 millions d’euros). On peut également relever la revalorisation de l’indemnité de dépiégeage (prime NEDEX, neutralisation, enlèvement, destruction d’engins explosifs) et l’instauration d’une prime de qualification « montagne ».

Hors carburants opérationnels, les crédits de fonctionnement enregistrent une diminution d’environ un tiers et s’établissent à 403 millions d’euros. Cette baisse résulte de mesures d’économie, d’une part, et de transferts, d’autre part. En effet, l’essentiel des crédits de fonctionnement courant est transféré vers la sous-action 82 « Soutien des forces par les bases de défense ». Carburants inclus, les crédits d’activité et de fonctionnement s’élèvent à 463 millions d’euros.

Les crédits de paiement réservés à l’entretien programmé du personnel s’élèvent à 181,2 millions d’euros. Ils enregistrent une hausse de 23 %. Cette progression traduit la volonté de poursuivre la montée en gamme des équipements du combattant nécessaire pour adapter le paquetage de combat aux conditions durcies d’engagement auxquelles sont confrontés les soldats, en particulier en Afghanistan.

Depuis 2010, les crédits consacrés à l’entretien programmé du matériel intègrent ceux destinés au démantèlement. Ils s’élèvent à 545,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 562,8 millions d’euros en crédits de paiement. Le tableau suivant retrace l’évolution de ces crédits depuis 2009.

Évolution des crédits destinés à l’entretien programmé du matériel

(en millions d’euros courants)

Armée de Terre

AE

CP

2009

2010

2011

2009

2010

2011

697,5

841,1

545,3

614,5

552,6

562,8

Source : ministère de la défense.

La diminution des crédits de paiement depuis 2010 conduira l’armée de terre à réduire l’emploi de certains matériels. Pour les matériels aéroterrestres, dont la maintenance relève de la SIMMAD, l’efficacité du maintien en condition opérationnelle (MCO) permet une excellente disponibilité sur les théâtres d’opérations extérieures et une préparation des forces en métropole dans des conditions acceptables.

Les coûts de MCO varient en fonction de l’âge des parcs : ils sont plus élevés en début et en fin de vie des équipements. Les matériels majeurs de l’armée de terre se situent pour l’essentiel dans ces périodes nécessitant des dépenses plus importantes. Les contrats de MCO prévoyant un plan de charge minimal pour l’industriel, il n’y a pas de relation de proportionnalité entre une diminution de volume ou d’utilisation et une réduction des coûts.

Les crédits d’infrastructure sont en chute. Or, des dépenses sont nécessaires pour s’adapter aux restructurations, mettre à niveau les locaux techniques et permettre le déroulement des préparations opérationnelles.

L’armée de terre se caractérise par une forte mobilité : sur un effectif d’environ 110 000 militaires, près de 30 000 sont projetés tous les ans dans différentes missions, 30 000 sont concernés par le plan annuel de mutation et le flux de mouvements s’établit à 31 000 personnes (17 000 départs et 14 000 recrutements). Elle comprend une forte proportion de contractuels, 72 % des personnels étant concernés.

Deux objectifs difficilement conciliables sont poursuivis : la réduction des effectifs et l’allongement de la durée des engagements.

Le plafond d’emploi autorisé du BOP 178 pour l’armée de terre est fixé à 123 722 ETPT (5), soit une réduction de 7,7 % par rapport à 2010. La déflation de personnel est de 10 256 ETPT. Les personnels civils enregistrent la plus forte baisse avec 5 642 ETPT en moins, soit une diminution de 27,4 % d’emplois par rapport à 2010. Les militaires perdent 4,1 % d’ETPT, soit 4 614 emplois. Avec 108 829 ETPT, l’effectif des militaires de l’armée de terre passe pour la première fois sous le seuil symbolique des 110 000 hommes. Le tableau suivant retrace l’évolution des effectifs entre 2010 et 2011.

Évolution des effectifs

 

2007

2008

2009

2010*

2011

Militaires

PEA

124 491

121 063

118 477

113 443

108 829

Effectif moyen réalisé

122 061

120 904

117 823

112 913

nc

Effectif au 31 décembre

122 174

119 778

116 721

111 346

nc

Civils

PEA

25 036

24 215

22 923

20 535

14 893

Effectif moyen réalisé

23 894

22 841

21 307

19 047

nc

Effectif au 31 décembre

23 443

22 535

20 920

18 738

nc

Total action 2

PEA

149 527

145 278

141 400

133 978

123 722

Effectif moyen réalisé

145 955

143 746

139 129

131 960

nc

Effectif au 31 décembre

145 617

142 313

137 641

130 084

nc

Données estimées au 30 juin 2010.

nc : non connu.

Source : ministère de la défense.

En 2011, 6 768 ETPT, 1 922 emplois militaires et 4 846 emplois civils, seront transférés de l’action 2 « Préparation des forces terrestres » du programme 178 vers d’autres programmes du ministère de la défense. Huit emplois le seront vers d’autres ministères.

Les transferts les plus significatifs vers des structures interarmées sont (6) :

- 3 986 ETPT vers le service du commissariat des armées ;

- 1 215 ETPT vers la chaîne interarmées des soutiens (essentiellement dans les groupements de soutien des bases de défense) ;

- 927 ETPT vers le service interarmées des munitions ;

- 290 postes vers les centres ministériels de gestion ;

- 134 postes vers l’état-major des armées au titre du retour dans le commandement intégré de l’OTAN.

Lors de ses travaux portant sur le budget 2010 le rapporteur avait soulevé les difficultés rencontrées par l’armée de terre pour recruter des militaires du rang de qualité satisfaisante puis les fidéliser. La situation ne s’est pas améliorée.

Si les besoins sont satisfaits, l’armée de terre estime néanmoins qu’elle est parfois contrainte à garder en son sein du personnel n’ayant pas le profil idéal. Le contexte économique en 2009 et début 2010 a favorisé un sensible accroissement des candidatures au recrutement. Il s’est élevé à 2,03 candidats par poste en 2009 contre 1,8 en 2008. Mais l’embellie est mesurée : les prévisions 2010 retombent à 1,84. L’armée de terre constate toutefois que la qualité tout comme le niveau scolaire sont en hausse.

Depuis 4 ans, les départs au terme d’un contrat ou par décision des engagés sont conséquents. Après une forte augmentation en 2006 (7) (+38 %) et une croissance plus mesurée les années suivantes, ils seraient en hausse de 27 % pour 2010. Cette importante progression tient compte du taux de dénonciation et de résiliation toujours important et des conséquences des restructurations. La motivation des jeunes candidats à l’engagement étant essentiellement économique, il en résulte un nombre important d’abandons au cours des premiers mois de vie militaire. Si la discipline ne gêne pas les jeunes recrues, ces dernières éprouvent de réelles difficultés à vivre en collectivité. La volatilité est d’autant plus importante que l’unité d’emploi est exposée sur le plan opérationnel. L’attrition est particulièrement importante dans les unités de mêlée (8) (infanterie et arme blindée, cavalerie). L’une des raisons réside dans le taux élevé de rotation et la nature des missions de ces unités. Ceux qui sont venus « chercher de l’aventure » ont pu la trouver sur de nombreux théâtres en peu de temps sans avoir à prolonger leur contrat pour multiplier leurs expériences opérationnelles. En dépit de la réduction de son format, l’armée de terre va devoir maintenir un effort de recrutement assez soutenu et composer avec des jeunes plus indécis et moins avertis de la nature de l’engagement militaire.

L’armée de terre est confrontée à un double défi. En premier lieu, celui de conserver ses plus jeunes engagés au-delà du premier contrat. L’objectif d’une durée moyenne de huit ans sous les drapeaux n’est pas atteint. Pour l’heure, seuls 35 % des engagés volontaires de l’armée de terre renouvellent leur engagement au terme du premier contrat alors que la cible visée est un taux de renouvellement du contrat de 40 %. La tendance 2010 n’est pas encourageante, l’armée de terre s’attend à une baisse d’un point. En second lieu, celui d’intéresser une part significative des engagés à servir au-delà de onze ans. Il faut conserver un volume significatif d’engagés expérimentés, chargés de guider et conseiller les plus jeunes. Le parcours professionnel a été modifié en conséquence pour devenir plus attractif. Initiée en 2010, cette démarche devrait produire ses premiers effets à partir de 2011.

L’attrition perturbe la gestion des militaires du rang, en particulier celle de la population servant au-delà de onze ans. Jusqu’en 2008, un nombre suffisant de candidats au renouvellement garantissait la qualité de la population effectuant un parcours long. L’érosion des recrutements initiaux durant la dernière décennie a réduit le vivier des militaires du rang potentiellement candidats au renouvellement de leur contrat au-delà de onze ans de services.

L’armée de terre a pris, en 2010, différentes mesures destinées à favoriser une fidélisation plus forte des jeunes et reconstituer le corps des plus anciens en offrant de meilleures perspectives aux engagés :

– suppression des durées de renouvellement prédéfinies de contrats au-delà de 11 ans ;

– disparition de la commission nationale d’harmonisation et la sélection par les chefs de corps sur des critères plus adaptés à la mission ;

– simplification des parcours de certification professionnelle des niveaux élémentaires et supérieurs ;

– accès facilité aux recrutements sous-officier et officier ; la volonté affirmée du chef d’état-major de l’armée de terre est de monter à 70 % la proportion de sous-officiers issus des militaires du rang (9;

– attention portée à l’orientation des engagés par la mise en place d’un rendez-vous annuel individualisé et concomitant au processus de notation ;

– valorisation financière du renouvellement de contrat au-delà de cinq ans (10.

Dans le même temps, pour mieux fidéliser le personnel recruté par une intégration progressive au sein de l’institution militaire, le chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT) met en place des centres de formation initiale des militaires (CFIM) afin d’optimiser et d’harmoniser la formation initiale des recrues. 10 CFIM sont installés en septembre 2010. Deux nouvelles implantations sont prévues en 2011 : Dieuze et Montlhéry. Il conviendrait de revoir le dimensionnement de celui de Dieuze : un double CFIM devait y être installé ; Or, depuis que cette décision a été prise, un nouveau CFIM a été créé à Bitche. Cette situation invite à reprendre la réflexion sur le volume de celui de Dieuze. Des CFIM occasionnels sont également montés en fonction des besoins.

Récemment introduits dans le cursus de mise en condition avant projection, la préparation au tir de combat et la formation au sauvetage au combat sont considérées comme des évolutions majeures et sont très appréciées des militaires. La première permet d’entraîner le combattant dans les conditions réelles d’engagement. La deuxième a déjà permis de sauver des vies et le haut niveau du soutien santé contribue au moral du combattant.

Depuis 1993 la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (CABAT) intervient auprès des blessés et soutient les familles des soldats tués. En 17 ans, elle a suivi 5 000 blessés. Elle réagit dans l’urgence en complément des moyens institutionnels. Elle a pour mission de repérer et suivre les blessés dans la durée, d’accompagner les familles des tués, de développer une capacité d’aide à la réinsertion, de coordonner l’action du monde associatif et de gérer un site internet dédié aux blessés. Pour ce faire, elle organise l’accueil des familles visitant les blessés à l’hôpital, intervient dans la prise en compte financière du transport, de l’hébergement, de l’alimentation de ces familles, aide dans l’accomplissement des démarches administratives et sollicite financièrement le monde associatif en complément des indemnisations légales.

Pour les officiers, le dispositif d’attribution de pécules a porté ses fruits (226 pécules en 2010). La dotation pour 2011 s’élève à 2,18 millions d’euros. En revanche, les transferts vers la fonction publique restent en deçà des objectifs souhaités. Le rapporteur constate que dans le cadre d’une politique globale de réduction des effectifs dans la fonction publique, ces transferts ne peuvent être que limités.

Pour les sous-officiers, les départs volontaires sont en hausse. Ils restent toutefois insuffisants pour atteindre les objectifs de déflation fixés et doivent être complétés par des départs aidés.

Le rapporteur étudie les crédits dévolus à l’armée de terre alors que le Parlement se prononce sur le projet de loi portant sur les retraites. Comme pour les autres agents, l’ancienneté minimale requise pour prétendre à une pension de retraite est portée de 15 à 17 ans pour les militaires. Toutefois, il leur faudra attendre 19,5 ans d’ancienneté pour prétendre à une pension minimale. Le rapporteur souligne que les militaires constituent le seul corps social dont la durée minimale de service est augmentée de fait de 4,5 ans. Il regrette cette situation inéquitable et considère qu’il s’agit là d’un manque de considération pour une catégorie de citoyens qui contribue particulièrement à la défense et la sécurité de la Nation. Cette distorsion constitue un obstacle de plus à la fidélisation des recrues : l’allongement de la durée minimale de services pour prétendre à une pension diminue d’autant la période qui peut être réservée à une deuxième carrière.

Le nombre d’unités d’intervention de réserve est passé de 98, en 2009, à 57 en 2010. Les unités restantes ont été renforcées par une augmentation du nombre de sections, passant de 2 à 4, au sein de ces unités. Dans le même temps, les unités spécialisées (11) de réserve sont passées de 16 en 2009 à 23 en 2010, sur une cible de 24 en 2015.

La baisse des effectifs en 2009 a été plus importante que prévue. Le non-renouvellement de contrats par les intéressés et la mise en œuvre des premières dissolutions et restructurations de formations de l’armée de terre expliquent ce phénomène (12). Or, à compter de 2009, un ajustement du format de la réserve opérationnelle et de nouveaux objectifs de montée en puissance ont été étudiés pour tenir compte des besoins générés par les nouveaux contrats opérationnels définis par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Pour l’armée de terre, la cible à atteindre à l’horizon 2015 est de 22 000 réservistes.

Le nombre moyen de jours d’activité se stabilise. Les crédits, en hausse de 6 % en 2010, sont reconduits en 2011. L’évolution du nombre de réservistes, de la durée moyenne d’activité et des crédits alloués à la réserve est retracée dans le tableau ci-après.

évolution des effectifs, de la durée d’activité
et des crédits alloués à la réserve

 

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Prévisions 2010

Prévisions 2011

Nombre de réservistes

15 439

16 485

17 002

18 249

18 348

17 225 (13)

nc

nc

Nombre de jours moyens d’activité

18

20

22

25

22

22

22

nc

Budget RCS
(en millions d’euros)

28,13

32,23

37,06

40,94

41,60

41,90

44,00

44,00

Variation
des crédits

 

15,0 %

15,0 %

10,0 %

1,6 %

0,7 %

6,0 %

0 %

Source : ministère de la défense.

Plusieurs centaines de réservistes sont engagés chaque année en opérations extérieures ainsi que pour la sécurité du territoire national (sécurisation des points sensibles, protection des communications, contrôles de l’accès au territoire ou participation à la défense nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC), Vigipirate, lutte contre l’incendie, etc.). Employés en priorité sur le territoire national, la projection en extérieur, en individuel ou en unités constituées est possible, sous réserve d’avoir satisfait aux processus de mise en condition de projection et de validation avant projection. Pour l’armée de terre, en règle générale, chaque réserviste doit, dans toute la mesure du possible, pouvoir être engagé en MISSINT ou en OPEX au moins une fois tous les quatre ou cinq ans. Le tableau ci-dessous dresse le bilan de l’engagement des réservistes en OPEX ou en projections intérieures.

Bilan de l’engagement des réservistes
en OPEX ou missions intérieures

 

2008

2009

Afghanistan

25

19

Bosnie

9

1

Kosovo

96

36

Liban

16

16

RCA

7

7

RCI

76

31

Tchad

27

22

Divers

0

3

Total OPEX

256

135

Cameroun

2

0

Djibouti

4

3

Gabon

8

1

Guadeloupe

1

2

Guyane

20

28

Martinique

4

2

Mayotte

2

2

Nouvelle Calédonie

5

3

Papeete

1

0

Polynésie

8

9

Réunion

6

21

Sénégal

7

3

Total missions de courte durée

68

74

Hors Vigipirate

766

728

Vigipirate

975

927

Missions intérieures

1 741

1 655

Total général

2 065

1 864

Source : ministère de la défense.

Au titre des OPEX, les réservistes sont principalement engagés au Kosovo (36 personnes) et en RCI (31) puis au Tchad (22), en Afghanistan (19) et au Liban (16). Au titre des MCD, les réservistes sont pour la plupart d’entre eux engagés en Guyane et à la Réunion.

L’engagement des réservistes en OPEX est limité par la nécessité, à mission identique, de dispenser une même formation aux personnels d’active et de réserve. Cet impératif sur des théâtres à risques élevés oblige les réservistes à étaler dans le temps une formation spécifique qui peut être longue en elle-même. Cette contrainte se heurte à l’exigence des employeurs civils parfois peu enclins à accepter l’absence de l’un de leurs salariés pendant plusieurs mois. Dans le cas d’une projection en Afghanistan, le cumul de six mois de préparation avant projection puis de 6 mois sur le théâtre représente un effort conséquent.

Lors de son précédent avis, le rapporteur avait présenté le système FELIN. L’évaluation du matériel est particulièrement positive. Les militaires s’en disent satisfaits même si des ajustements techniques doivent encore être réalisés. La qualification du système a été prononcée le 30 avril 2010. La mise en service opérationnel devrait intervenir fin 2011.

S’agissant des véhicules blindés, un troisième régiment (14), le 1er régiment de tirailleurs d’Épinal, est équipé de véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) et formé à cet équipement depuis septembre 2010. La livraison de 100 engins est attendue en 2011. La cible de 630 véhicules, 520 véhicules de combat d’infanterie et 110 véhicules de poste de commandement, devrait être atteinte en 2015. Le marché pour l’acquisition de 129 véhicules haute mobilité a été notifié fin décembre 2009. Le rapporteur constate que le coût total du programme dépasse l’enveloppe financière initialement prévue. Trois versions de ces VHM sont attendues : commandement, rang et logistique. Les premières livraisons interviendront en 2011.

Le programme de lances roquette unitaire (LRU) ne progresse pas de manière satisfaisante. La commande devait intervenir en 2010 mais le contrat de transformation des lanceurs est toujours en cours de négociation avec l’Allemagne et l’industriel. Annoncée pour 2012 la première capacité opérationnelle pourrait n’intervenir qu’en 2014. La mise en service des LRU permettra de disposer d’un moyen d’artillerie indispensable, performant tant en précision qu’en puissance et utilisable de jour comme de nuit. Actuellement un régiment d’artillerie n’a pas de système d’arme. Cette situation ne saurait perdurer et l’armée de terre n’a d’autre choix que de l’équiper ou d’envisager sa dissolution.

Engagés sur le théâtre afghan, les Tigre se révèlent dissuasifs. Capables de survoler la zone de responsabilité française en 20 minutes, ils ont dépassé les 1 000 heures de vol en moins d’un an. Ils interviennent en appui des hélicoptères de manœuvre ou des troupes au sol. Ils constituent une arme très performante capable de traiter des objectifs de jour comme de nuit. En Afghanistan, aucune patrouille ni opération n’est conduite sans s’assurer de la disponibilité des appuis air-sol fournis par des avions ou des hélicoptères. L’emploi des hélicoptères (Tigre ou Gazelle) réduit les risques liés aux engins explosifs improvisés (EEI) ou d’embuscades sur les axes routiers ; en montagne ils permettent de surprendre l’ennemi et facilitent la prise des points hauts.

Les neuf standards de Gazelle existants seront ramenés à deux. Cette mesure permettra de couvrir un spectre de missions étendu tout en limitant la mise en place de ces équipements à la stricte suffisance opérationnelle. Ces hélicoptères, comme les Cougar, subiront une remise aux normes de la circulation aérienne générale.

Symbolique, la livraison du premier NH90 est attendue pour la fin de l’année 2011. Il devrait être opérationnel en 2013. Cet appareil est le premier d’un marché notifié en novembre 2007 et composé d’une tranche ferme de 12 appareils, suivie d’une première tranche conditionnelle de 22 hélicoptères affermie en décembre 2008 puis d’une seconde de 34 unités dont l’affermissement est prévu en 2012.

Le programme SCORPION contribue à la modernisation de l’outil de combat aéroterrestre qui est l’une des priorités définies par le Livre blanc. Il vise à améliorer l’agilité, la survivabilité et la polyvalence des unités de contact. Ces objectifs passent par la modernisation ou le remplacement d’équipements, l’augmentation de la résistance des matériels, le développement de capacités nouvelles (combat en zone urbaine par exemple), la mise en réseau des systèmes d’information et des systèmes de combat afin d’accroître les synergies entre les différentes composantes.

Particulièrement important (15) et complexe, le programme est décliné en étapes. La fin de la première est pour l’instant fixée à 2020. Elle vise à équiper ou transformer 18 des 30 régiments de mêlée avec la livraison de 977 véhicules blindés multirôles (VBMR) (16), 72 engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) et la rénovation de 254 chars Leclerc intégrant le système d’information tactique partagé.

Le ministre de la défense a approuvé le lancement du stade d’élaboration du programme SCORPION le 22 février 2010. Un candidat a été retenu à l’issue d’un appel d’offres pour un marché d’architecture. La notification du marché n’est pas encore intervenue, l’annonce des arbitrages budgétaires du Premier ministre ayant suspendu la procédure. La réalisation du processus se trouve pour l’instant décalée d’une année. Le rapporteur relève que ce programme est un modèle de conduite de projets coordonnés. Si, le cas échéant, la contrainte budgétaire impose que ses ambitions soient revues à la baisse, il ne doit en aucun cas être démantelé sauf à revenir à une juxtaposition de programmes dont la coordination sera compliquée.

La DTO moyenne des matériels terrestres est de 75,4 %. Elle permet de répondre aux besoins des forces terrestres pour la préparation opérationnelle et les projections. La DTO des matériels en OPEX est excellente et atteint 91,4 % pour le premier semestre 2010. Le tableau suivant présente l’évolution de la disponibilité d’équipements lourds ou significatifs.

Disponibilité technique opérationnelle
des principaux équipements terrestres de l’armée de terre

Catégorie

Matériel

2005

2006

2007

2008

2009

2010(1)

Tendance

Blindés lourds

LECLERC

45 %

42 %

37 %

32 %

41 %

51 %

ì

Blindés légers

ERC 90

nc

nc

67 %

57 %

50 %

51 %

ì

VAB

69 %

65 %

69 %

68 %

61 %

59 %

î

VBL/VB2L

nc

nc

70 %

67 %

66 %

66 %

è

(1) Pour 2010, la disponibilité est calculée sur les 19 premières semaines.

Source : ministère de la défense.

La politique d’emploi et de gestion des parcs permet la mise à disposition du bon matériel au bon endroit et au bon moment. L’instauration de seuils planchers de disponibilité en matériels majeurs permet de conduire l’instruction, la préparation opérationnelle et le service courant en garnison.

La disponibilité globale des aéronefs de l’armée de terre est de 57,6 % pour 2009 et de 49,9 % pour le premier semestre 2010. La disponibilité des parcs anciens, en particulier pour les hélicoptères de manœuvre, est insuffisante. Le vieillissement des parcs se traduit par une augmentation du poids de la maintenance préventive et curative. Les coûts financiers augmentent et la charge de travail s’accroît à volume de main-d’œuvre constant. L’arrivée progressive des NH90 en unité à compter de 2013 pour suppléer les hélicoptères Puma est très attendue. La plus grande fiabilité des parcs récents permet généralement une amélioration progressive de leur disponibilité. Le tableau suivant présente l’évolution de la disponibilité des aéronefs.

Disponibilité technique opérationnelle
des hélicoptères de l’armée de terre

Catégorie

Parcs

2008

2009

2010 (1er semestre)

Tendance

Hélicoptères légers

Gazelle

57 %

61 %

63 %

ì

Fennec

71 %

75 %

67 %

è

Hélicoptères NG

Tigre EC 665

47 %

47 %

40 %

ì

Hélicoptères de manœuvre

Cougar

48 %

48 %

49 %

è

Puma

48 %

48 %

49 %

è

EC 725 Caracal

36 %

57 %

61 %

è

Source : ministère de la défense.

La disponibilité des Gazelle se redresse, en particulier celle du standard prioritaire Viviane. Il en est de même pour les Caracal. La baisse enregistrée pour les Fennec résulte de l’indisponibilité de plusieurs machines pour des opérations de mise aux normes de l’aviation civile internationale et des grandes visites.

Pour les Tigre, le taux de disponibilité se situe 5 points en dessous du seuil minimal de 45 % fixé par l’état-major de l’armée de terre. Des difficultés de soutien du parc hétérogène de l’école franco-allemande, des retards dans les livraisons des pièces de rechange et quelques incidents techniques sur les appareils et équipements nécessitant l’immobilisation de la machine expliquent cette situation.

L’allocation d’un potentiel annuel pour les principaux matériels permet de mieux évaluer les besoins de MCO et d’anticiper le vieillissement des parcs. Ces modalités sont en adéquation avec l’évolution des marchés exprimés notamment en termes d’achat de forfaits kilométriques ou d’heures de fonctionnement. En cours de mise en place, les VBCI sont dotés d’un potentiel annuel de 300 heures moteur ou 3 000 kilomètres par engin ; pour les CAESAR, le potentiel annuel par canon est de 2 000 kilomètres et 120 coups.

Après avoir connu quelques difficultés de contractualisation, le soutien des chars Leclerc fait maintenant l’objet d’un marché à tranches et bons de commande dont il conviendra de suivre l’exécution. La première tranche garantit un soutien jusqu’en mars 2013. Sept tranches conditionnelles annuelles ont vocation à fournir sept années de soutien supplémentaire. Ce dispositif vise à assurer la pérennité du soutien du parc sur dix ans à un coût maîtrisé avec des obligations de résultat en termes de disponibilité. Il a déjà permis une amélioration du potentiel par machine avec 78 heures par an et par char, contre 54 en 2008. Pour 2010, les 254 chars Leclerc opérationnels en régiment disposent d’une enveloppe de 20 000 heures de fonctionnement (17). Dans le même temps, le potentiel sera économisé à l’entraînement en recourant, en plus de l’utilisation des simulateurs, à un matériel de substitution moins gourmand en termes de MCO, l’ERC Sagaie, à hauteur de 6 000 heures.

Le potentiel pour les hélicoptères est exprimé en heures de vol par an. En 2010 il est stable pour les Puma, croît légèrement pour les Cougar et plus significativement pour les Tigre. La réduction est forte pour les Gazelle et résulte d’une déflation du parc. Le tableau suivant présente l’évolution du potentiel des aéronefs.

Potentiel annuel des aéronefs

(en heures de vol par an pour tous les aéronefs)

Hélicoptères

2007

2008

2009

2010

GAZELLE

56 880

50 248

53 054

44 872

PUMA

18 132

17 889

18 566

18 564

COUGAR

4 739

4 787

4 200 (1)

4 300

TIGRE

3 400

6 000

4 150

4 200

(1) la diminution du nombre d’heures allouées au Cougar est la conséquence de la baisse du nombre d’appareils (21 en 2008, 18 en 2009).

Source : ministère de la défense.

Pour les hélicoptères de manœuvre, la moyenne d’heures de vol par machine (18) s’est établie pour 2009 à 203 heures pour les Puma, 210 pour les Cougar et 226 pour les Caracal.

Parmi les menaces auxquelles sont confrontés les militaires, les engins explosifs improvisés représentent un risque permanent. 70 % des pertes en Afghanistan sont dues à ces dispositifs. Ce danger est évolutif, l’adversaire s’efforçant de s’adapter aux parades mises en œuvre. Il est aussi multiforme compte tenu de la variété des explosifs, des munitions et des déclencheurs utilisés. La lutte contre les EEI passe par trois vecteurs : tout d’abord, le renseignement, outil de recherche et d’identification des réseaux de poseurs d’engins, de fournisseurs d’explosifs, afin de mieux cibler leur neutralisation ; ensuite, la formation des personnels pour une meilleure compréhension et maîtrise du risque ; enfin, la mise en œuvre de moyens susceptibles d’éviter le déclenchement ou, lorsqu’il a eu lieu, de limiter les dommages. La mise en œuvre du concept d’approche globale donne d’excellents résultats. Les différentes armées en présence coopèrent pour trouver des parades à la menace.

L’armée de terre conduit une opération d’ensemble baptisée « capacité de réaction et d’anticipation pour la lutte contre les engins explosifs improvisés » (CARAPE). Elle vise à interdire la mise en place d’EEI à proximité des emprises des forces ou des zones sous leur responsabilité ainsi que sur les itinéraires qu’elles empruntent ou contrôlent, à rendre inopérantes les attaques adverses, à réduire les dommages, à altérer les capacités de l’adversaire à planifier, conduire et exploiter des attaques. Elle consiste à doter l’armée de terre de plusieurs matériels en deux étapes. La première comprend l’acquisition de véhicules de contre-minage BUFFALO, de détecteurs de mines associés à une déclencheuse SOUVIM (19) et de véhicules fortement protégés d’accompagnement du BUFFALO, les ARAVIS (20).

Dans le même temps, la réduction de l’efficacité des attaques – qu’il s’agisse de rendre les actions ennemies inopérantes ou de limiter les dommages – passe par les systèmes de brouillage et les surprotections des VAB et des VBL. Pour les matériels déployés en Afghanistan, des surprotections balistiques ont été acquises pour les véhicules logistiques projetés. Le VBCI étant pré-équipé pour recevoir des kits de surprotection anti-mines, celles-ci ont été posées sur les blindés envoyés sur ce théâtre. Les VAB ont bénéficié soit d’une valorisation soit d’une surprotection selon leur emploi. Le kit de surprotection pour VAB comprend une structure métallique de protection sous le véhicule, une protection intérieure contre les éclats et une protection latérale. Le kit de surprotection pour VBL comprend des plaques latérales en aluminium mobiles, des protections fixes contre les éclats à l’intérieur et le renforcement de la structure du véhicule pour accepter la masse supplémentaire générée. Cette première étape est achevée. L’effort lors de la seconde étape portera sur la réduction des dommages. Dans le cadre de l’étape 2, on peut relever parmi les équipements acquis en urgence opérationnelle en 2010 l’achat de surprotections pour les VAB et les AMX 10 RC, de brouilleurs, de systèmes de protection électronique des enceintes militaires en opérations.

Aucun blindage ne constitue une protection parfaite contre un EEI important. L’augmentation du blindage ne peut que réduire les dégâts. La détection, la neutralisation ou le déclenchement à distance sont actuellement les meilleures solutions.

Les munitions sont prioritairement employées pour approvisionner les forces engagées en opérations et assurer les alertes. Elles le sont en deuxième lieu pour la préparation opérationnelle. Enfin, elles constituent les stocks d’alerte nécessaires au soutien des contrats opérationnels. Les moyens dont dispose l’armée de terre lui permettent de répondre aux besoins liés aux opérations en cours et à la préparation opérationnelle et d’assurer le soutien des premiers mois d’engagement d’une force de 30 000 hommes sur les 12 mois prévus par les contrats opérationnels. Toutefois, un effort financier conséquent serait nécessaire pour soutenir cet engagement dans la durée.

Les unités disposent globalement des munitions en nombre suffisant pour la préparation opérationnelle. Cependant, des difficultés techniques persistent pour certains calibres : l’approvisionnement en munitions de 5,56 mm pour le FAMAS et en obus de mortier de 81 mm et de 120 mm reste tendu. Le tableau suivant présente l’évolution des dotations inscrites en lois de finances initiales pour les munitions d’instruction.

Évolution des dotations réservées aux munitions d’instruction

(en millions d’euros courants)

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

PLF 2011

AE

92,60

91,95

92,70

62,66

69,38

97,34

88,41

CP

61,40

73,95

69,71

100,50

61,32

86,85

79,90

Source : ministère de la défense.

Le rapporteur regrette que les munitions restent toujours la variable d’ajustement. Il convient de prendre en compte l’arrivée, sur la durée de la LPM 2009-2014, de nouveaux systèmes d’armes nécessitant d’importants investissements dans ce domaine.

Que ce soit dans le cadre d’opérations extérieures ou de missions intérieures l’armée de terre est très sollicitée. Elle conduit aujourd’hui 24 missions hors métropole. Les trois théâtres majeurs sont l’Afghanistan, le Liban et la Guyane.

En 2009, l’armée de terre a engagé 24 151 personnels en opérations extérieures. La contrainte se desserre en 2010 avec 21 214 personnes projetées.

Le premier théâtre d’engagement reste l’Afghanistan. Il concentre environ le tiers des effectifs projetés. Avec un total de 7 380 personnels en 2010 contre 5 911 en 2009, la présence de l’armée de terre est renforcée. Un cinquième des personnels en OPEX est mobilisé au Liban au sein de la FINUL. Enfin, l’Afrique reçoit plus d’un quart des effectifs, ces déploiements se faisant sous mandat national. La fin de l’EUFOR Tchad-RCA et de la MINURCAT contribue significativement à la réduction du nombre de militaires déployés : respectivement 1 456 et 1 072 personnes ont été mobilisées en 2009 pour ces opérations. Le désengagement de RCI économise 900 militaires. Celui du Kosovo se traduit par une diminution d’environ 50 % des personnels déployés sur ce théâtre. Le tableau suivant retrace par mandat les principales opérations et précise les effectifs.

Effectifs de l’armée de terre déployés en OPEX en 2010 (prévisions)

Mandat

Aires géographiques

Opérations

Total

OTAN

Europe

KOSOVO – TRIDENT

2 173

Autres

22

Asie

AFGHANISTAN – PAMIR dont OMLT

7 380

Sous-total OTAN

9 717

National

Afrique

TCHAD – ÉPERVIER

2 100

RCI – LICORNE

2 550

RCA – BOALI

720

MAURITANIE

144

TOGO

2

Antilles

HAÏTI – séisme

236

Sous-total National

5 752

Forces ONU

Afrique

SAHARA OCCIDENTAL – MINURSO

20

RDC – MONUC, MONUSCO

10

RCI – ONUCI

20

TCHAD, RCA – MINURCAT

33

Moyen-Orient

LIBAN – FINUL

4 400

Divers

 

7

Sous-total Forces ONU

4 490

Union Européenne

Afrique

RDC – EUSEC, OUGANDA – EUTM SOMALIA

44

Europe

Divers

13

Antilles

HAÏTI – séisme

110

Sous-total UE

167

Divers

Asie

PAKISTAN, TADJIKISTAN – renforts HERACLES

26

Moyen-Orient

SINAÏ – FMO

6

Sous-total Divers

30

Forces spéciales

 

1 200

Total des effectifs cumulés

21 214

Source : ministère de la défense.

Les surcoûts liés aux OPEX en 2009 sont évalués à 387,5 millions d’euros pour l’armée de terre. Le surcoût en entretien programmé du matériel est estimé à 35,7 millions d’euros. À compter de 2010, le surcoût est calculé par théâtre toutes armées confondues.

Le rapporteur s’est rendu auprès des forces françaises du Cap-Vert (FFCV) les 7 et 8 octobre 2010. Des accords de coopération sont en cours de négociation avec le Sénégal. Jusqu’en décembre 2010, les FFCV rétrocèdent diverses emprises (21)actuellement occupées par les forces. Le 1er août 2011, les FFCV deviendront « éléments français au Sénégal ». La discussion se poursuivra ensuite sur les accords de coopération.

La France et le Sénégal entretiennent des liens historiques forts. La population et les forces sénégalaises semblent opposées au départ des Français. L’émergence d’un sentiment d’abandon, de rancœur a été signalée au rapporteur. Par ailleurs, alors que les liens, le niveau du pays et sa contribution en troupes dans les OPEX le distinguent, le Sénégal ne comprend pas qu’il soit traité de la même manière que les autres pays pour l’attribution de place au forum de l’IHEDN sur le continent africain.

Le Sénégal est le socle d’une équerre de stabilité allant de la Gambie au Togo. Il est touché par deux arcs de crise, le premier côtier et le second étant l’axe sahélo-saharien. Le pays est une démocratie dont les forces armées de sécurité sont loyales. Les confréries jouent un rôle majeur dans sa stabilité.

Il est confronté à de sérieuses difficultés en matière de fourniture d’électricité. Les délestages sont monnaie courante et perturbent lourdement l’économie locale. Seuls les groupes électrogènes permettent à ceux qui en ont les moyens de se prémunir contre ces coupures. Les FFCV disposent de groupes fonctionnant en permanence afin de garantir leur indépendance énergétique.

Le contexte social se dégrade. Le décalage économique se creuse : une classe aisée, peu nombreuse, continue à s’enrichir tandis que le reste de la population s’appauvrit. Les inondations saisonnières dégradent les conditions de vie et les pouvoirs publics sénégalais semblent bien impuissants. L’inexistence des services publics, l’augmentation du prix des denrées de base et les délestages électriques favorisent la contestation. Le climat sécuritaire est bon mais se détériore. Il pourrait d’ailleurs se dégrader rapidement, au rythme de la paupérisation.

Essentiellement terrestre, l’armée sénégalaise comprend 17 000 hommes. Son budget est d’environ 400 millions de dollars. Elle participe régulièrement à des opérations de maintien de la paix où elle déploie ses forces pour des missions de six mois. Lorsqu’elle est employée dans des opérations intérieures en Casamance, ce sont près de la moitié des forces opérationnelles qui sont mobilisées. La marine sénégalaise bénéficiera à la fin de l’année de la rétrocession de l’engin de débarquement d’infanterie et de chars Sabre.

Forte de 1 600 personnels, la zone de responsabilité (22) des FFCV couvre 15 pays et 8 millions de km2. Elles comprennent des éléments des trois armées assurant des missions de présence et de coopération. Le contrat opérationnel actuel leur impose de concourir à la défense du Sénégal, à celle des intérêts français et de conduire des actions de coopération militaire opérationnelle franco-sénégalaises et régionales. L’effort de coopération avec les forces africaines occupe d’ailleurs une bonne place dans les activités des FFCV. Elles forment en outre une force d’intervention susceptible de mener notamment des opérations d’évacuation de ressortissants en cas de crise (23). Elles mènent également diverses actions civilo-militaires. Les forces doivent se préparer à l’engagement opérationnel en cas de crise et se distinguer par l’excellence de leur comportement (24).

Les ressources affectées aujourd’hui sont juste suffisantes pour assurer les missions fixées. Les moyens aéronavals sont essentiels et très employés dans des missions de secours et de sauvetage, de surveillance des grands espaces, de lutte contre les narcotrafics, de surveillance des pêches par exemple. En fonction des événements les moyens peuvent basculer instantanément d’une mission à l’autre. La préservation de la capacité amphibie est essentielle : elle permet de conserver une liberté d’action en cas de blocage du cap.

• Le 23e bataillon d’infanterie de marine

Unité interarmes, le 23e BIMa a une vocation amphibie. Il tient une posture opérationnelle graduée permanente et répond régulièrement à des alertes. Implanté sur le site de Bel Air (25), il est armé par 520 militaires, dont 65 % en mission de courte durée, et 73 civils dont 71 personnels recrutés localement (PRL). Il comprend une compagnie de commandement et de logistique, une compagnie d’infanterie à 4 sections et un escadron blindé. Outre ses propres équipements – 130 véhicules, 10 ERC Sagaie et 8 porte-missile Eryx et Milan – il a la responsabilité des parcs Guépard – 70 véhicules – et Recamp – 110 véhicules.

Son contrat opérationnel lui impose la mise en œuvre d’une section en 24 heures, d’un sous-groupement tactique interarmes en 48 heures, du bataillon en 72 heures et, enfin, du groupement tactique interarmes au complet en 96 heures.

• La base aérienne 160

Implantée sur les emprises de Ouakam et au sud de l’aéroport Léopold Sedar Sanghor, elle est armée par 250 aviateurs (dont 60 en missions de courte durée), un civil français et 100 civils sénégalais. Elle est équipée d’un avion de transport tactique Transall auquel sont attribuées 470 heures de vol et d’un hélicoptère léger Fennec qui bénéficie d’un potentiel de 185 heures de vol.

Base de soutien à vocation interarmées, la base aérienne dispose de capacités d’accueil et de soutien. Elle peut assurer l’hébergement de passage de 300 personnels et dispose de trois mois de stock de carburants (26). Elle est également escale de passage pour les Mirage 2000 ainsi que pour les Belouga à destination du centre spatial guyanais.

Le détachement du service de santé soutient les forces de présence ou projetées, il assure également le soutien sanitaire des familles, des PRL et de leurs familles, du personnel de l’ambassade et des anciens combattants. Le poste de vétérinaire sera supprimé à l’été 2011. Comme il n’y en aura pas non plus à Libreville, les missions relevant de sa compétence comme la sécurité sanitaire de l’alimentation ne seront plus assurées. Le détachement disparaîtra en juillet 2012. Il restera pourtant des forces au Sénégal.

Les FFCV disposent au Sénégal de capacités d’entraînement et d’aguerrissement en zone lagunaire et d’entraînement en région sahélienne. Une zone d’entraînement amphibie est à sa disposition entre le Cap Vert et la Gambie. Les exercices Narval réalisés avec des navires français sont dimensionnés à chaque fois en fonction de l’importance du bâtiment présent.

La présence de nos forces permet de conduire des exercices bilatéraux ou internationaux. En 2009, s’est déroulé l’exercice majeur bilatéral Deggo mettant en œuvre 1 600 militaires, une opération amphibie, un aérolargage et un poser d’assaut. Répondant à un réel besoin de l’armée sénégalaise, ce type d’exercice est particulièrement important.

L’exercice international Emerald Move organisé en novembre 2010 a pour objet la mise à la terre d’un corps expéditionnaire en zone subsaharienne représentant une force équivalente à une demi-brigade. Exercice amphibie européen, il réunira des moyens français, italiens, néerlandais (27) et sénégalais. Les FFCV auront pour mission d’accompagner les forces sénégalaises. Le 23e BIMa et quelques éléments sénégalais intégrés joueront le rôle de plastron.

L’évolution de FFCV vers l’état « d’éléments français au Sénégal » (EFS) se traduira par une forte compression des effectifs. Il reste toutefois des incertitudes sur la définition de la zone de responsabilité, sur les moyens et la répartition des compétences avec les services du ministère des Affaires étrangères ainsi que sur le maintien de la capacité Guépard.

Les missions évolueront. La coopération militaire opérationnelle sera la priorité. Les forces présentes devront également assurer les missions de veille opérationnelle et stratégique, de secours et sauvetage, de sécurité des systèmes d’information et de communication et maintenir les capacités d’escale maritime et aérienne. Le rapporteur a constaté l’importance de Dakar comme site de facilitation de l’action : les FFCV offrent actuellement une plateforme d’accueil multimodale essentielle ; cette capacité devra être préservée.

Sur un effectif d’environ 300 personnels, 200 relèveront du groupe de coopération opérationnelle qui constituera également une capacité minimale d’intervention. Il comprendra une forte composante terrestre ainsi que des commandos de la marine et de l’armée de l’air. L’élément terrestre sera en partie armé par des détachements proterre en mission de courte durée. Cette mesure permettra de faire venir, en fonction des besoins, les spécialistes nécessaires à la formation de l’armée sénégalaise. L’action de coopération appuiera également l’architecture africaine de paix et de sécurité et devra permettre de mettre à niveau les contingents zonaux pour des opérations de maintien de la paix ; la CEDEAO souhaite d’ailleurs se doter d’une brigade de près de 5 000 hommes. La coopération portera sur l’instruction et l’entraînement des forces. Les missions retenues devront répondre à un objectif de pertinence et de stricte suffisance. L’instruction devra être durable en formant des instructeurs au sein des forces africaines. Elle devra aussi être adaptée, notamment aux moyens des bénéficiaires. La réduction du format des forces françaises ne permettra plus le tutorat.

Dakar est un point d’appui indispensable pour l’armée de l’air : l’escale est incontournable pour les avions de transport tactique contraints à effectuer des détours importants pour tenir compte des interdictions de survol de certaines zones. La base aérienne sera dissoute mais l’emprise de Ouakam sera conservée et la présence en zone militaire de l’aéroport sera préservée. Une incertitude pèse toutefois sur l’avenir de l’actuel aéroport de Dakar, la construction d’une autre plateforme à 70 ou 80 kilomètres de la ville étant envisagée. Lorsque les FFCV seront devenues EFS, le Transall sera remplacé par un Casa.

Alors que les effectifs diminueront de 75 %, le patrimoine à entretenir ne diminuera que de 50 %, constituant une charge encore importante pour le service d’infrastructure.

Le volume de personnels recrutés localement est important. La diminution conséquente des effectifs français se traduira par une forte restriction du nombre de PRL. Le départ des militaires français entraînera également le licenciement des personnes embauchées dans divers emplois familiaux. Dans un pays fortement marqué par le chômage, l’impact du départ massif des forces françaises sera conséquent.

Le rapporteur s’interroge sur la pertinence d’un affaiblissement, voire d’un démantèlement, du dispositif actuel et appelle à une actualisation du Livre blanc. Le contexte géostratégique et la menace ont évolué depuis sa publication, des circonstances récentes sont venues le souligner. Cette nouvelle donne sécuritaire et les liens historiques qu’entretiennent la France et le Sénégal invitent à reprendre la réflexion sur le format de la présence française au Sénégal, d’autant que celle-ci doit y maintenir une capacité opérationnelle. Il semble en outre que Dakar soit un meilleur choix que Libreville dont les possibilités portuaires sont moins performantes (28) ; les capacités de soutien aux opérations y seraient certainement moindres. Le rapporteur s’oppose à ce que les futures EFS soient cantonnées à des missions de coopération ou à des actions humanitaires.

L’engagement des armées sur le territoire national en accompagnement ou en complément de forces et moyens civils spécialisés s’accroît. Pour l’armée de terre, certaines missions sont circonstancielles comme la protection de sommets ou l’intervention lors de catastrophes. D’autres sont récurrentes comme la participation à la lutte contre les feux de forêts (contribution au protocole Héphaïstos). Enfin, certaines missions sont permanentes comme la protection du centre spatial guyanais ou la participation au plan Vigipirate.

Le rapporteur (29) s’est rendu début avril dernier, auprès du dispositif Vigipirate à Paris. En région parisienne, le préfet de police fixe la mission ; le gouverneur militaire de Paris en a la responsabilité opérationnelle. Sur le millier d’hommes mobilisés en permanence, environ 600 étaient déployés à cette période en Île-de-France ; cet effectif a été renforcé à Paris, début octobre, d’une soixantaine de militaires. L’activité est soutenue et les soldats sont relevés tous les 15 jours. Chaque groupe effectue deux patrouilles par jour, ce qui représente entre 19 et 20 heures de travail. En 2009, les patrouilles ont procédé à 5 084 interventions ainsi réparties : 1 795 bouclages de périmètres de sécurité, 1 202 actions de neutralisation, enlèvement et destruction d’explosif, 1 112 sécurisations de vols sensibles, 412 assistances à la personne et 563 assistances aux forces de l’ordre.

En cas de crise majeure, les armées sont capables de mettre sur pied une force à dominante terrestre en mesure de participer à la protection du territoire national en renfort du dispositif de sécurité publique et de sécurité civile dans les domaines génériques de la sécurisation et du rétablissement relevant de la sécurité civile. Le coût des opérations de secours restant à la charge des ministères pourvoyeurs de moyens, des crédits sont inscrits à cet effet. Pour 2011, la dotation pour le ministère de la défense (armée de terre), identique à celle de 2010, est de 0,36 million d’euros.

En 2010, l’effort dans la lutte contre l’orpaillage illégal et l’immigration clandestine en Guyane (opérations Harpie) s’est accru. Il est rappelé que la Guyane est le troisième théâtre d’engagement de l’armée de terre après l’Afghanistan et le Liban. Dans le même temps, la succession d’événements climatiques (30) a nécessité un engagement conséquent et sans préavis de moyens militaires.

En régression en 2011 par rapport aux prévisions pour 2010, le nombre de journées de préparation et d’activité opérationnelle (JPAO), 116, s’éloigne de la cible de 150 fixée par la LPM 2009-2014. L’armée de terre disposera des ressources tout juste nécessaires pour conduire ses entraînements. L’organisation d’une préparation opérationnelle différenciée permet de porter l’effort d’entraînement au profit des militaires qui vont être projetés ou qui le sont déjà. Le rapporteur souligne les progrès constants enregistrés pour l’activité en vol des pilotes d’hélicoptères. L’objectif fixé par la LPM est de 180 heures de vol. Compte tenu des contraintes budgétaires et de disponibilité des appareils, celui affiché est de 160 heures de vol. Cette moyenne varie selon les unités, de 150 heures pour les unités de la brigade aéromobile à 200 heures pour le 4e régiment d’hélicoptères des forces spéciales Depuis 2007, l’objectif de 160 heures a toujours été dépassé et a crû d’année en année. En 2010, le niveau d’entraînement des pilotes pourrait atteindre 172 heures de vol. Le niveau de préparation opérationnelle atteint dans ces conditions est jugé juste suffisant pour l’engagement actuel en opérations extérieures et la préparation opérationnelle des équipages devrait être complétée si la France avait à participer à une opération majeure. Le recours à la simulation et l’utilisation d’hélicoptères de préparation opérationnelle permettent de rationaliser les coûts. Des simulateurs de proximité sont progressivement déployés dans les unités. Le tableau ci-après rappelle les objectifs et la cible pour 2011 et les résultats obtenus en 2009 et 2010.

Activité des forces

Année

Nombre de JPAO

Nombre d’heures de vol par pilote

2009

105

170

2010 (1)

120

180

Cible 2011

116

180

Objectifs LPM 2009-2014

150

180

(1) Prévisions actualisées au 30 juin 2010.

Source : ministère de la défense.

En 2009, 72 exercices majeurs ont été réalisés, 31 étant limités aux postes de commandement, les 41 autres incluant la participation de troupes. 59 sont prévus en 2010, dont 42 avec la participation de troupes. Toutefois, le nombre d’exercices au niveau corps de réaction rapide ou état-major de forces est fortement diminué : le premier est projeté en Afghanistan au second semestre 2010, d’une part ; un état-major est dissous tandis que la dissolution d’un autre se prépare, d’autre part. Le tableau ci-dessous récapitule les exercices réalisés en 2009 et prévus en 2010 et 2011 ainsi que leur coût.

Exercices majeurs

 

2009

2010

2011

Prévus

Réalisés

Prévus

Réalisés au 1er semestre

Prévus

Nationaux

40

48

29

18

29

Internationaux

21

24

30

17

12

Total

61

72

59

35

41

Coût (en millions d’euros)

20,10

27,15

nc

nc : non connu.

Source : ministère de la défense.


En 2010, la contribution à deux exercices annuels américains a permis de relancer l’entraînement avec les États-Unis. L’exercice Cold Response, en février 2010 en Norvège, a permis d’entraîner la 27e brigade d’infanterie de montagne dans des conditions climatiques extrêmes. En novembre, l’armée de terre participera à l’exercice amphibie évoqué supra. En décembre, l’exercice annuel franco-allemand Colibri, sous commandement allemand, accueillant des unités espagnoles, néerlandaises et belges, permettra d’entretenir l’interopérabilité des niveaux compagnie, régiment et état-major de brigade en matière d’opérations aéroportées.

En 2011, l’exercice franco-britannique de poste de commandement Flandres 2011 aura pour objet de démontrer l’efficacité opérationnelle de brigades françaises et britanniques sous commandement d’un état-major de division française dans un environnement numérisé (31).

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Elrick Irastorza, chef d’état–major de l’armée de terre, sur le projet de loi de finances pour 2011 (n° 2824), au cours de sa réunion du mercredi 20 octobre 2010.

M. Philippe Vitel, président. Nous recevons le chef d’état-major de l’armée de terre, le général Elrick Irastorza, à qui je souhaite la bienvenue. Je dois excuser le Président Teissier, retenu ce jour dans sa circonscription.

Mon général, vous allez nous préciser l’impact sur l’armée de terre des efforts que doit consentir le ministère de la défense en 2011. Certains programmes doivent être retardés, vous nous les détaillerez ainsi que les conséquences que cela implique pour nos soldats.

M. le général d’armée Elrick Irastorza, chef d’état-major de l’armée de terre. Je vous remercie de m’offrir l’opportunité de vous présenter un point de situation sur l’armée de terre et de vous faire part de mon appréciation sur le projet de loi de finances.

Depuis l’été 2008, l’armée de terre a conduit les deux premières étapes de sa réorganisation tout en assurant simultanément et de manière satisfaisante toutes ses missions opérationnelles.

2010 a été une année difficile marquée par une très forte mobilité interne. Entre les opérations, pourtant en régression de près de 3 000 postes depuis 2008, et les missions de courte durée de renforcement de nos forces de présence et de souveraineté, elle aura projeté 31 000 soldats hors du territoire métropolitain. 33 000 ordres de mutations, dont les deux tiers avec changement de résidence résultent du plan annuel de mutation auquel s’ajoutent sept dissolutions, dix transferts majeurs et la poursuite de la gestion des restructurations déjà initiées. Enfin, l’armée de terre étant composée à 72 % de contractuels pour préserver la jeunesse de ses régiments, nous avons dû accompagner 18 200 départs, dont 15 100 sans bénéfice d’une pension, et procéder, malgré la déflation de près de 3 000 hommes, à 15 000 recrutements, ce qui fait, au total, un chassé-croisé de plus de 33 000 personnes. Au final, plus de 97 000 hommes et femmes auront donc été concernés par un mouvement en 2010. Ce n’est pas sans effet sur la perception de la réforme en cours et la préservation du moral dans une collectivité de 112 000 militaires, 125 000 en comptant le personnel militaire servant hors du BOP. En dépit de sa moindre mobilité, le personnel civil concerné par les restructurations a également été soumis à de fortes contraintes. Trois exemples significatifs de cette surmobilité : l’état-major de la 9e brigade légère blindée de marine a conduit simultanément la préparation de son engagement en Afghanistan et son déménagement de Nantes à Poitiers ; l’école de l’infanterie a repris sans discontinuité ses activités de formation deux mois après avoir déménagé de Montpellier à Draguignan ; enfin, le 16e bataillon de chasseurs a envoyé 632 hommes en OPEX et 392 en mission Vigipirate tout en déménageant d’Allemagne à Bitche.

L’année 2011 sera encore plus difficile. Aux réorganisations structurelles connues, à savoir sept dissolutions et quatre transferts majeurs, viendront s’ajouter la réorganisation fonctionnelle de l’administration générale et des soutiens courants en bases de défense. Or, toucher aux processus bien ancrés dans les mœurs est plus anxiogène que modifier ou déplacer les structures.

Ces deux réformes ont un effet sur les ressources budgétaires du BOP terre inscrites dans le projet de loi de finances pour 2011. Le recul de 6 %, soit 529 millions d’euros, par rapport à 2010 est justifié : la réduction de format de 10 145 postes, un tiers par suppressions de postes et deux tiers par transferts pour l’essentiel à l’organisation interarmées des soutiens, génère une économie de 356 millions d’euros. 204 millions d’euros, soit 37 % des crédits de fonctionnement, sont transférés vers le BOP soutien. Je relève la stabilité des crédits consacrés aux activités, 133 millions d’euros, et souligne que cette année encore, avec 583 millions d’euros, l’essentiel des crédits hors titre 2 seront consacrés à l’entretien programmé des matériels.

J’estime avoir globalement les ressources strictement indispensables à la préparation des opérations et à la conduite de la réforme, mais je reste préoccupé par les contraintes pesant sur le programme 146, équipement des forces, et, comme les années précédentes, par les ressources attendues du programme 212 concernant les infrastructures.

Je vous propose d’évoquer successivement, la préparation opérationnelle, les équipements, les ressources humaines et, enfin, la réorganisation.

L’armée de terre continue de s’approprier avec pragmatisme le principe de préparation opérationnelle différenciée et la nouvelle politique d’emploi et de gestion des parcs d’équipements majeurs qui lui est associée. La mise en condition différenciée avant la projection est plutôt bien acceptée par ceux qui en bénéficient mais un peu moins par les unités qui n’en ont pas encore apprécié l’efficacité et conduisent leurs activités avec des moyens plus chichement comptés.

Une meilleure utilisation des remarquables installations de nos centres de préparation des forces de Champagne et de Provence, accroît indiscutablement l’efficacité opérationnelle de nos unités. D’ailleurs nos soldats reconnaissent bien volontiers que la qualité de leur préparation opérationnelle constitue leur meilleure protection lorsqu’ils sont projetés. Le revers de la médaille est un accroissement de l’absentéisme en garnisons et une augmentation sensible des indemnités afférentes, en particulier celle de services en campagne.

Le niveau de notre engagement opérationnel stricto sensu est retombé à 7 200 hommes, ce qui engendre mécaniquement une diminution du nombre de jours d’activité opérationnelle sur les théâtres et une perte de savoir-faire qui doit être automatiquement compensée par un entraînement plus soutenu et donc par une augmentation des journées de préparation opérationnelle.

À enveloppe constante de 133 millions d’euros, le nombre de jours de préparation et d’activité opérationnelles diminuera légèrement : 116 jours sont prévus en 2011 contre 120 en 2010 ; nous tomberons probablement à 111 jours en 2012 et à 105 en 2013. En revanche, parce qu’il y va de la sécurité des vols, l’objectif de 180 heures de vol par an et par pilote sera maintenu dans l’ALAT, dont 20 de vol sur appareils de substitution et 20 heures par transformation de 60 heures de vols sur simulateurs en heures de vol réel. En cas de contraintes supplémentaires, il n’y aura pas d’autre solution que la réduction du nombre de pilotes.

S’agissant des équipements, nous sommes désormais bien entrés dans ce que j’appelle le 3e cycle de régénération depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Le détail est présenté dans le chapitre 4 du projet de loi de finances. Les commandes et les livraisons devraient être conformes à la programmation à l’exception du véhicule haute mobilité (VHM) ramené de 15 à 10 engins et du lance-roquettes unitaire (LRU).

La démarche consistant à engager sans attendre les équipements neufs (Tigre, VBCI, CAESAR, ARAVIS, PVP par exemple.) sur les théâtres d’opérations sera poursuivie en 2011, avec la projection de missiles Javelin, du véhicule de détection de mines SOUVIM 2, ou encore de FELIN, cette dernière étant envisagée à la fin 2011, une fois terminé l’entraînement d’appropriation du système. Le 1er régiment d’infanterie (RI) vient d’être équipé FELIN. Suivront en 2011, le 13e bataillon de chasseurs alpins, le 16e bataillon de chasseurs, le 92e RI et le 35e RI. Cinq régiments d’infanterie sur vingt seront donc « félinisés » en fin d’année ; parmi eux, deux sont déjà équipés du VBCI, les 35e et 92e RI.

En dépit d’un processus de renouvellement de ses équipements qui mérite d’être souligné pour son impact immédiat sur notre capacité opérationnelle et le moral des soldats, l’armée de terre reste depuis 2005 en deçà de la barre des 20 % des crédits consacrés à ses équipements majeurs. 2007 fut d’ailleurs une année particulièrement difficile. Avec 1 743 millions d’euros accordés en 2011 au titre du programme 146, elle perdra 139 millions d’euros en valeur absolue par rapport à 2010 – ce qui se conçoit dans le contexte actuel – et régressera à 18,2 % de l’enveloppe globale à périmètre équivalent. Cela ne me semble plus tout à fait en phase avec la volonté du Livre blanc de mettre l’accent sur la remise à niveau des moyens terrestres.

Pour ce qui relève des programmes à effets majeurs, j’ai trois préoccupations.

Tout d’abord, avant d’envisager de démembrer le programme Scorpion, il faut se souvenir de sa finalité première : rompre avec les dispendieuses habitudes du passé en recherchant d’emblée un maximum de points communs entre nos équipements neufs ou en cours de rénovation pour en réduire les coûts et faciliter ultérieurement leur soutien. Ce programme fédérateur incrémental devra, sous la contrainte, faire preuve d’une certaine plasticité, mais y renoncer serait, à court terme, une régression conceptuelle et, à long terme, une source de surcoûts.

Ensuite, le premier véhicule blindé multi-rôles, appelé à remplacer nos VAB des années soixante-dix aujourd’hui sursollicités, devra impérativement être livré en 2015 au coût unitaire maximum de un million d’euros pour l’engin de base.

Enfin, décaler au-delà du raisonnable l’entrée en service du LRU privera nos armées de la seule capacité interarmées tactique combinant actuellement précision quasi métrique, portée étendue (70 kilomètres) et employabilité immédiate quelles que soient la météo et l’heure du jour et de la nuit. 252 roquettes ont été commandées en 2009, il reste à réaliser l’adaptation des lanceurs du 1er régiment d’artillerie (RA) à cette nouvelle munition puisqu’ils ne peuvent plus tirer les roquettes à sous-munitions. Il faut se souvenir que c’est parce que je comptais sur cette transformation de l’actuel lance-roquettes multiple que j’ai proposé la réduction de moitié de notre artillerie.

En 2010, les 116 opérations d’adaptation réactive lancées depuis la fin de l’année 2007 ont continué à produire les améliorations attendues dans les domaines de la protection, de la puissance de feu, de l’observation de jour et de nuit, des télécommunications, des drones et de l’équipement individuel de nos combattants. Elles seront poursuivies à hauteur de 100 millions d’euros en 2011.

Avant d’aborder la maintenance, j’aimerais vous rappeler le volume de nos parcs actuellement déployés en opérations : 1 800 véhicules sont projetés dont plus de 1 000 blindés parmi lesquels 600 VAB et 24 VBCI. Il convient d’y rajouter les équipements en transit et ceux immobilisés pour cause de rénovation chez les industriels. Cela représente les équipements de 11 régiments sur les 86 que nous comptons encore. Il s’ensuit inévitablement un fort sentiment de sous-équipement en métropole mais surtout une accélération de l’usure des parcs.

La maintenance fonctionne désormais conformément à ce qui a été planifié, tant en termes d’organisation avec la création de la SIMMT, du SMITer, la poursuite du regroupement géographique des unités de maintenance, qu’en volumes et en choix des matériels à soutenir. Compte tenu de la priorité accordée en pièces détachées et d’un rythme de travail sans interruption, la disponibilité technique sur les théâtres est supérieure à 91 % pour le matériel terrestre et 79 % pour les hélicoptères. Le prix à payer est une disponibilité tout juste suffisante en métropole pour conduire un entraînement compatible avec nos contrats opérationnels.

Trois leviers me permettent de préserver autant que faire se peut les équipements : la mise en œuvre de la politique d’emploi et de gestion dynamique des parcs. Ensuite, la mise sous potentiel de la quasi-totalité des véhicules blindés – dont bien sûr le LECLERC dont le soutien en service postproduction est désormais contractualisé – le soin enfin apporté à l’emploi opérationnel des équipements au prix d’une formation plus exigeante.

L’armée de terre s’efforce de préserver ses équipements d’accompagnement et de cohérence, en y consacrant 245 millions d’euros. Avec une enveloppe de 181 millions d’euros, elle continue à porter une attention soutenue à l’entretien programmé du personnel. Les actions entreprises depuis cinq ans, notamment dans le domaine de l’équipement individuel, ont produit les effets attendus sur notre capacité opérationnelle, la protection et le moral de nos soldats. Cet effort ne doit pas se relâcher.

J’en viens à la manœuvre des ressources humaines. En 2011, l’armée de terre passera sous le seuil des 110 000 militaires et 15 000 civils. Cela correspond à une réduction de format de 10 145 postes, 4 560 militaires et 5 585 civils, répartis entre 3 369 suppressions sèches au titre de la déflation – dont 2 700 militaires – et 6 776 transferts hors du BOP Terre.

En baisse de 364 millions d’euros pensions comprises, la masse salariale, qui passe sous la barre des 7 milliards d’euros, permettra de financer les effectifs et les mesures prévues d’amélioration de la condition du personnel, ces dernières bénéficiant d’une dotation de 35 millions d’euros.

Ma première préoccupation est de stabiliser le renouvellement de la ressource humaine que j’estime trop rapide. Il nous épuise en termes de recrutement puis de formation et surtout assèche nos viviers traditionnels. En 2010, nous aurons procédé à 16 300 recrutements externes : 437 officiers, 1 250 sous-officiers et 14 650 militaires du rang dont 1 500 pour, entre autres, la BSPP et les unités de la protection civile. C’est beaucoup trop. Il est nécessaire de maîtriser au plus vite l’attrition initiale qui atteint 25 à 30 % au lieu des 15 % escomptés et d’améliorer le taux de renouvellement du premier contrat, actuellement à 30 % au lieu des 40 % attendus.

Pour cela j’ai pris un certain nombre de décisions. Tout d’abord, rendre de la perspective professionnelle à nos EVAT en passant d’une gestion collective normée à une gestion individuelle au mérite. En second lieu, créer des centres de formation initiale militaire garants de l’orthodoxie de l’instruction et de l’éducation dispensées à nos jeunes soldats par des cadres mieux sélectionnés et mieux formés. Puis, partant du constat que nous avons de très bons soldats, recruter parmi nos EVAT l’essentiel de nos sous-officiers et limiter le recrutement direct à nos seuls besoins complémentaires, l’objectif étant de parvenir au recrutement de 70 % de nos sous-officiers parmi les militaires du rang au lieu de 50 % aujourd’hui. L’armée de terre doit demeurer l’escalier social qu’elle a toujours été avec 70 % de ses sous-officiers issus du rang et 70 % de ses officiers de carrière du corps des officiers des armes issus du recrutement interne, 20 % provenant des officiers contractuels et 50 % des sous-officiers. Enfin, rénover le brevet de technicien supérieur de nos sous-officiers en valorisant mieux encore les acquis de l’expérience. En fin d’année les premiers effets se font sentir et nous avons pu réduire nos recrutements externes.

Ma seconde préoccupation résulte de la difficulté de concilier la déflation du personnel de carrière (80 % des officiers et 50 % des sous-officiers) avec le rallongement progressif des limites d’âges de deux ans. Ce problème restera gérable pour les sous-officiers compte tenu d’un sous-effectif structurel dans les grades terminaux, mais il sera d’une extrême complexité pour les officiers. Sans mesures d’accompagnement dignes de ce nom, il sera difficile de maintenir une pyramide fonctionnelle et la motivation.

Est-ce une conséquence de ces évolutions, je relève que nous assistons depuis 2007 à une accélération des départs précoces de nos jeunes officiers de recrutement direct. Si le recrutement d’officiers contractuels permet de pallier quantitativement ce déficit, cette tendance risque de compromettre la satisfaction des besoins en commandants d’unités élémentaires et l’armement des postes de responsabilité et de haut niveau par des officiers supérieurs. Il me semble indispensable de conserver un recrutement direct substantiel et surtout un niveau de sélectivité suffisamment important en cours de carrière si l’on veut éviter la constitution, à moindre effort individuel compte tenu de l’érosion naturelle, d’un grand corps prédestiné.

L’allongement des limites d’âge de deux années prévu par la réforme des retraites est plutôt bien accepté, y compris le report à 17 ans de la retraite à jouissance immédiate. En revanche le report de la retraite à minimum garanti à 19 ans et demi – soit un décalage de quatre ans et demi – est plutôt perçu comme une injustice et un manque de considération par les 800 militaires du rang qui pouvaient y prétendre chaque année après avoir bien servi pendant désormais 17 ans.

Enfin, en 2011, l’armée de terre poursuivra la montée en puissance de ses unités de réserve. Avec un budget de 44 millions d’euros en 2010, elle a été en mesure de proposer à ses 17 500 réservistes 25 jours d’activité en moyenne. Depuis le début de l’année, 262 d’entre eux ont participé à une mission hors métropole et 1 225 ont été engagés dans le cadre de Vigipirate.

Je terminerai par les restructurations. Globalement acceptée, cette indispensable réforme reste particulièrement anxiogène, non seulement parce qu’elle affecte très directement la vie quotidienne de notre personnel mais aussi parce qu’elle va éloigner des régiments – c’est-à-dire du cœur de l’armée de terre – ceux qui, civils et militaires, en assuraient l’administration générale et les soutiens communs au plus près depuis plus d’un siècle. Elle aura toutefois le mérite de séparer très clairement ce qui relève très directement de l’opérationnel de ce qui l’est moins, même s’il faut préserver une relative porosité entre les deux.

Les besoins en infrastructures de l’armée de terre, validés par l’état-major des armées, sont évalués dans le programme 212 pour 2011 à 575 millions d’euros, soit 260 millions d’euros au titre des réorganisations et 315 millions d’euros pour l’investissement classique et la maintenance spécialisée. Il convient d’y ajouter 48 millions d’euros qui proviendront du BOP 0178 0011 pour la maintenance élémentaire. Si ces niveaux de programmation paraissent acceptables puisqu’ils dépassent les niveaux de ressources habituellement consentis à l’armée de terre, ils intègrent en réalité pour moitié les coûts liés à la transformation. Par ailleurs l’expérience des années 2009 et 2010 montre qu’à peine 50 % des crédits dédiés aux opérations hors restructurations sont effectivement engagés. Si cette situation devait perdurer en 2011, cela signifiera qu’en 3 ans l’armée de terre aura perdu l’équivalent d’une année d’investissement hors restructurations avec toutes les conséquences à en attendre sur l’état général de notre infrastructure, la vie courante et la préparation opérationnelle.

En 2011, l’armée de terre continuera de s’acquitter de toutes ses missions, y compris sur le territoire national en complément des autres services de l’État en charge de la sécurité des Français, tout en poursuivant une réorganisation structurelle et fonctionnelle d’une exceptionnelle ampleur.

2012 constituera, dans l’immédiat, la dernière année de restructurations lourdes et de transferts mais la réorganisation n’en sera pas terminée pour autant. Je relève par exemple que la création des bases de défense ne devrait rapporter que de l’ordre de 2 800 postes sur le BOP Terre - dont 1 110 à réaliser en 2011 et 1 200 en 2012 sur les effectifs transférés au COMIAS – ce qui ne représentera que 12 % des 24 450 postes qu’il lui faut rendre. Il est donc absolument nécessaire que les gains en effectifs attendus sur l’administration et les soutiens au sens large soient suivis précisément et effectivement réalisés, sinon le bouleversement de notre administration n’aura servi à rien et comme il faudra bien payer la déflation, par tranche de 800 c’est inévitablement un régiment de plus qu’il faudra supprimer. Il ne faudrait pas que dans quelques années l’on se dise devant de trop maigres résultats : « Et dire qu’on a fait tout ça rien que pour ça ! ».

La seule finalité d’une armée, faut-il le rappeler, c’est l’engagement opérationnel, comme le prouvent chaque jour nos soldats avec courage et générosité. Vous me permettrez de terminer par eux en ayant une pensée particulière pour nos vingt camarades, trois officiers, neuf sous-officiers et huit militaires du rang, qui sont allés au bout de leur engagement depuis le début de l’année. Parmi eux, des fantassins, des cavaliers, des maintenanciers, des sapeurs, des artilleurs, des logisticiens et des infirmiers, comme tout dernièrement l’infirmier de classe supérieure Miloche, mortellement blessé au combat, décédé pendant son évacuation après s’être soucié jusqu’au bout de l’état de son auxiliaire sanitaire lui-même très gravement touché.

Tous nous rappellent que lorsqu’on a choisi ce métier on ne choisit plus ses missions, sinon il faut avoir l’honnêteté de faire un autre métier.

Nous nous efforçons de porter aux familles de nos tués, à nos blessés et à leurs familles autant d’attention que possible. Cet été, j’ai doublé les effectifs de la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre, la CABAT, en charge de l’assistance immédiate aux familles éprouvées et du suivi dans la durée. En complément de la solidarité institutionnelle dont vous connaissez l’importance, je bénéficie du soutien moral et financier de l’association « Terre Fraternité » créée en 2005 par un de mes prédécesseurs, le général Thorette. Elle tire l’essentiel de ses ressources de la solidarité et d’initiatives internes.

M. Philippe Vitel, président. En tant que député du Var, je voudrais, mon général, remercier l’armée de terre pour son action immédiate et prolongée pendant les inondations cataclysmiques qui ont fait plus de 25 morts l’été dernier.

M. Jean-Louis Bernard. J’aimerais tout d’abord connaître le coût, pour l’armée de terre et pour les soldats, du recul de la jouissance du minimum garanti dans le cadre de la réforme des retraites.

Je souhaiterais également connaître le nombre de blessés de l’armée de terre depuis cinq ou dix ans car leur nombre est, contrairement aux morts, relativement ignoré du grand public. Je voudrais aussi que vous nous précisiez les moyens mis en œuvre pour les prendre en charge sur place, afin de répondre un peu aux critiques acerbes de la Cour des comptes à l’égard du service de santé des armées, celle-ci ayant peut-être négligé le caractère essentiel des soins prodigués aux blessés sur les lieux mêmes où ils sont atteints.

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Le coût pour l’armée de terre d’un minimum garanti accordé à 17 années de service au lieu des 19 ans et demi envisagés est de 1,9 million d’euros par an. Pour ceux qui touchent leur pension, cela représente une somme de 58 euros par mois en moyenne. Ce sont nos militaires du rang qui ne sont pas passés sous-officiers mais ont continué à bien servir dans des spécialités indispensables qui vont être les plus impactés.

Concernant nos blessés, je voudrais mettre en perspective les chiffres : chaque année, l’armée de terre perd sur les routes l’équivalent d’une section d’infanterie – soit une quarantaine d’hommes – et ce sont deux compagnies qui y sont blessées. Nous avons eu 13 tués et 82 blessés graves en Afghanistan cette année. Toutes causes confondues, nous arrivons annuellement à un total de plus de 400 blessés, que ce soit en opérations ou sur le territoire national. Nous aurons probablement une centaine de blessés en Afghanistan cette année.

Sur le service de santé, nous avons fait le choix du soutien de l’avant : nos médecins et nos infirmiers sont en première ligne avec nos soldats. Comme en témoigne le nombre des tués et des blessés ces dernières années en Afghanistan – je pense au médecin capitaine Sicard gravement blessé par un EEI et aux infirmiers Toinette, Penon et Miloche morts au combat –, le service de santé des armées paie un lourd tribut.

M. Philippe Vitel, président. Je voudrais, mon général, vous interroger sur le système FELIN. Le contrat a été signé par la DGA le 1er mars 2004 et concernait 31 445 équipements dont 22 500 pour l’infanterie. Pouvez-nous faire le point sur les 22 500 commandes en cours, les livraisons – 3 107 – effectuées en 2010, celles à venir – 4 036 – en 2011 et les unités livrées en priorité ? J’aimerais également savoir si la version 2 du FELIN est toujours d’actualité. L’arme blindée, le génie, la cavalerie seront-ils dotés ?

Grâce au plan de relance, nous devions arriver au chiffre de 500 roquettes LRU mais nous n’en serions aujourd’hui qu’à la moitié : avez-vous un calendrier des livraisons ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Le FELIN est un système modulable conçu pour la protection, la communication mais aussi l’agression. L’infanterie recevra des systèmes complets, à l’inverse des blindés, du génie ou de l’artillerie qui seront partiellement équipés de systèmes moins complets. La cible est de 22 500 systèmes. Quatre régiments d’infanterie seront livrés chaque année à partir de 2011, ce qui représente une livraison annuelle de 4 000 systèmes.

C’est un programme qui a connu des difficultés pendant sa phase de validation et a subi quelques ajustements. C’est aujourd’hui un excellent système qu’il reste à s’approprier. Il sera probablement appelé à évoluer dans les années qui viennent pour tenir compte des évolutions technologiques.

Les crédits du plan de relance ont été essentiellement consacrés à l’ARAVIS et à la densification des commandes du VBCI. Pour ce qui concerne les roquettes LRU, 250 ont effectivement été commandées en 2009 et nous attendons la poursuite des opérations.

M. Yves Vandewalle. Je voulais dire, mon général, mon admiration pour nos soldats qui mènent des opérations dans un contexte de restructurations et de contrainte budgétaire aussi difficile. Nos moyens sont-ils encore en adéquation avec nos missions ? N’y a-t-il pas une sollicitation excessive de nos personnels ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Nous partageons avec le Royaume-Uni la volonté de préserver les conditions de vie de nos soldats. Mon homologue britannique a pour coutume de dire que lorsque nous recrutons des soldats, nous recrutons aussi des familles. Il faut savoir qu’un départ de six mois en Afghanistan est précédé d’une préparation, de six mois également, au cours de laquelle le militaire doit être très disponible. Nous avons des régiments, notamment dans l’infanterie, qui sont effectivement très sollicités ; certains sont déjà allés deux fois en Afghanistan et vont y retourner une troisième fois. Lorsqu’ils reviennent de ce théâtre, nos jeunes soldats ont le sentiment d’avoir vécu une expérience très riche et très dense mais n’ont pas forcément envie d’y repartir tout de suite. Mais dans le même temps, l’infanterie ne connaît pas de difficultés de recrutement puisqu’on compte 8 candidats pour un poste. Il n’y a donc pas d’effet répulsif de l’engagement opérationnel et il importe de maintenir cette sélectivité.

M. Damien Meslot. Vous nous avez fait part de votre inquiétude concernant le déploiement des roquettes LRU. Nous parlons maintenant de 2014. N’y a-t-il pas un risque de voir ce déploiement abandonné ? N’y a-t-il pas, en conséquence, un risque que des régiments disparaissent, notamment le 1er RA ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Il y avait 1 700 canons déployés par l’armée française à Verdun ; l’artillerie n’en possède aujourd’hui plus que 128 qui doivent être complétés par les LRU pour couvrir la zone d’engagement et fournir à nos unités les appuis nécessaires dans un espace relativement vaste. Notre capacité opérationnelle dépend donc du déploiement futur des LRU dont les performances ont déjà été évoquées. Nous avons toujours des LRM, mais il est vrai que le 1er RA est un régiment d’artillerie qui n’a plus d’artillerie puisqu’il ne peut plus tirer les roquettes à sous-munitions (protocole d’Oslo). Il dispose certes de batteries de radars Cobra, de systèmes de détection d’artillerie et de mortiers de 120, mais il va naturellement connaître une baisse capacitaire pendant les deux prochaines années. À terme, la question de son maintien se posera, surtout si la livraison tarde trop ou ne se fait pas.

M. Jean-Jacques Candelier. J’aimerais, mon général, que vous nous fassiez un point rapide sur quelques sujets.

Où en est la mise en place des bases de défense ? Quelles mesures de reconversion ont été programmées pour les villes qui perdent leur garnison ?

Par ailleurs, vous avez dit tout à l’heure que les effectifs de l’armée de terre seraient en dessous de 110 000 soldats en 2010 : où en serons-nous en 2014 ?

Enfin, il y a eu 50 tués en Afghanistan depuis le début de notre engagement en 2001. Comment évolue aujourd’hui la situation ? Gagne-t-on du terrain ? Où en est l’armée afghane ?

M. Alain Marty. J’aimerais revenir sur la livraison des systèmes FELIN : pouvez-nous nous indiquer si leur usage va entraîner des changements sur le plan tactique pour l’infanterie ? J’aimerais également que vous nous dressiez un premier bilan de la mise en œuvre des bases de défense car vous avez fait état de vos inquiétudes sur le sujet.

M. le général d’armée Elrick Irastorza. La réforme des bases de défense est nécessaire et comprise, mais il faudra la mener à son terme avec une volonté de chaque instant. Si la réorganisation se limite à un jeu de taquin pour faire comme avant, elle n’a pas de sens. La restructuration doit certes être conduite de manière sécurisée mais il faut réduire sensiblement les effectifs ; or, pour l’instant, cette réduction demeure légère.

Nous respectons le calendrier prévu : la carte des bases de défense ayant été arrêtée avant l’été, nous avons entamé le travail d’organisation et nous donnerons cet automne les orientations permettant aux directeurs des ressources humaines de conduire la première année de la réorganisation. Je ne suis pas inquiet sur la façon dont le processus s’engage, mais sur la façon dont il pourrait s’enliser.

FELIN est un programme important qui intègre de nombreux éléments qui, sans lui, seraient plus lourds. Il devrait accroître l’efficacité de notre infanterie, au même titre que le VBCI : notamment en accroissant sensiblement la portée et la précision des armes, de jour et de nuit.

S’agissant des effectifs, je note que le Royaume-Uni a retenu une cible de 94 000 hommes : elle correspond à la nôtre pour l’armée de terre au terme du processus de réorganisation.

Je rappelle que la conduite des opérations en Afghanistan relève du chef d’état-major des armées. Il y a un décalage entre la perception des médias et celle de nos soldats de retour d’opérations car ceux-ci constatent des améliorations. Nous appliquons le principe selon lequel nous ne faisons pas un pas sans appui – le Tigre constitue à cet égard un apport précieux –, ni sans l’armée afghane, qui doit émerger. Nous avons regroupé sur la même zone nos bataillons et nos unités de mentorat.

M. Bernard Cazeneuve. Je constate que malgré une surdéflation des effectifs en début de période, la masse salariale reste stable, alors qu’avait été prévue une économie de quatre milliards d’euros. Cela pose un problème d’équilibre global de la réforme du ministère. Confirmez-vous cette situation ? Qu’en est-il pour l’armée de terre ?

Par ailleurs, il semblerait qu’on rencontre des difficultés à faire fonctionner les bases de défense en raison de problèmes liés aux systèmes informatiques, et que, de ce fait, celles-ci coûtent plus cher qu’elles ne rapportent.

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Toute restructuration n’entraîne pas immédiatement les effets escomptés. Il est vrai que les systèmes informatiques engendrent des surcoûts et le passage à un nouveau dispositif crée d’inévitables difficultés mais il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions sur le coût global.

La masse salariale, par l’effet de transferts et de réductions des effectifs, a diminué pour l’armée de terre. Cette réduction est d’environ 33 millions d’euros par tranche de 1 000 effectifs. Ainsi, en 2009, la masse salariale a été réduite de 72 millions et, en 2010, de 144 millions, soit 216 millions pour ces deux années. Cela dit, nous avons des problèmes de sous-dotations de la masse salariale et d’évolution du glissement vieillesse technicité (GVT), positif ou négatif selon les approches. Je ne peux en revanche vous donner le bilan sur la masse salariale pour l’ensemble de la défense.

M. Philippe Folliot. Je souscris à vos propos sur l’engagement de nos hommes sur le terrain et à l’hommage qui leur a été rendu.

S’agissant de l’aéromobilité et de nos capacités de projection, vous avez rappelé que la meilleure assurance pour nos soldats était la qualité de leur préparation et que le nombre de journées à cet effet passera de 120 jours en 2009 à 105 en 2011. On sait que pour la préparation de nos unités parachutistes, la disponibilité des aéronefs est aléatoire. Lors de son audition, le général Paloméros nous a rappelé qu’avait été constituée une cellule commune entre l’armée de terre et l’armée de l’air pour l’utilisation de ces moyens. Cette coordination des forces vous paraît-elle satisfaisante ? Comment jugez-vous nos capacités d’entraînement ? Une opération comme celle conduite par le 8e RPIMa au Kosovo en 2004 est-elle possible aujourd’hui ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. La préparation de nos unités aéroportées est importante mais, pour les régiments de la brigade parachutiste, l’entraînement à la 3e dimension reste complémentaire, l’essentiel étant qu’ils fassent leur métier de fantassin ou d’artilleur. Cela dit, elle a toujours été tendue et nous nous sommes toujours efforcés avec l’armée de l’air de parvenir au niveau de préparation requis ; nous y arrivons encore aujourd’hui, au prix de quelques acrobaties. L’acquisition des CASA constitue une aide précieuse et je pense que nous serions en mesure, en concentrant nos moyens, de mener aujourd’hui une opération telle que celle de Kolwezi.

M. Jean-Claude Viollet. Je regrette que la question des ressources humaines et de la réforme des retraites n’ait pas pu être débattue dans notre commission.

La réorganisation de la défense va toucher à la structure des effectifs, notamment pour les officiers. Or, il faudra valoriser les ressources humaines, sachant que le pyramidage des corps est en équilibre fragile. Cette question touche aussi la reconversion et la réserve opérationnelle. On ne dispose pas d’étude d’impact en la matière : est-il possible d’en réaliser une ?

S’agissant de l’aspect financier, on sera confronté à une augmentation du poste RCS (rémunérations et charges sociales), mais, comme on est censé le réduire, on peut craindre que le problème de structure ne devienne un problème de volume.

Vous avez rappelé l’effet structurant de SCORPION et le fait que si nous ne le mettions pas en œuvre, nous aurions des surcoûts. Or, le projet est gelé ; d’ailleurs, n’est-il pas mort ? Pourra-t-on le reprendre ensuite à l’horizon indiqué ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Pour SCORPION, je reste confiant. Le projet est bien conçu. J’espère que nous conserverons la démarche générale : il faut que le marché d’architecture aille à son terme et que le programme soit initié. Sinon, c’est un retour à des programmes conduits en ordre dispersé, ce qu’on risque de nous reprocher dans dix ou quinze ans.

S’agissant des conséquences de la réforme pour les ressources humaines, l’évaluation est compliquée car nous devons tenir compte de logiques de flux. Nous faisons des simulations en supposant que les personnes vont au bout de leur carrière, tout en appliquant des taux d’érosion empiriques. Mais ces taux dépendent de facteurs que nous ne maîtrisons pas, comme l’évolution du marché de l’emploi et les capacités de nos personnels à s’y reconvertir. Il faudra accompagner les évolutions par des mesures d’incitation au départ qui ne pourront être que financières ou symboliques. Ainsi, par exemple, quelques colonels ont accepté de partir plus tôt sous réserve d’être nommés généraux en deuxième section : cela a permis de gagner deux ans. Toutes les possibilités pour alléger le sommet de la pyramide sont utilisées. Pour les officiers généraux, les perspectives « sommitales » se réduisent : ainsi, en 2011, nous allons diminuer les effectifs de quatre postes comme prévu, mais le rallongement prévisible de quatre mois des limites de service me conduira à conserver onze officiers généraux qui devaient partir, avec les conséquences à en attendre sur l’avancement.

Mme Françoise Hostalier. Je voudrais tout d’abord vous remercier pour votre langage direct et franc sur les bases de défenses. Pour la préparation de nos forces avant la projection à l’extérieur, j’ai eu l’occasion de passer une journée entière à Canjuers et j’ai été ravie de l’accueil qui m’a été réservé ainsi que de ce que j’y ai vu. Je rentre d’Afghanistan où j’ai rencontré quelques-uns de nos militaires et je peux confirmer que le moral est bon. Je pense, comme vous, qu’il existe un décalage entre la réalité et la perception que nous en avons à travers les médias et certains commentaires. Je peux également vous assurer que les VBCI sont appréciés même s’ils sont encore peu nombreux. Certains matériels restent néanmoins en attente, notamment les munitions.

Afin de rentabiliser nos sites de préparation et d’impliquer nos militaires dans les futures coalitions quand ils seront en opération extérieure, est-il envisagé des mutualisations et l’ouverture de nos sites de préparations à d’autres alliés comme les Britanniques ou les Allemands ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Nos alliés sont confrontés aux mêmes problèmes que nous : les Britanniques comme les Allemands ont des capacités d’entraînement importantes et ils ne seraient pas opposés à ce que l’on puisse les rentabiliser. Nous avons, néanmoins, des échanges avec des unités étrangères qui s’entraînent déjà que ce soit dans le Larzac ou à Canjuers.

Nous avons fait un effort, comme vous l’avez souligné, sur Canjuers qui va certainement devenir l’un des centres d’entraînement les plus importants d’Europe. C’est la raison pour laquelle nous avons transféré à proximité l’école d’infanterie de Montpellier. Nous avons également là, les chars Leclerc, les VBCI, le centre de perception, les simulateurs, l’artillerie, le centre d’instruction de missiles de l’armée de terre et les hélicoptères du Cannet des Maures à seulement dix minutes de vol. Il est également prévu d’y déplacer le centre d’instruction et d’entraînement au tir situé au Larzac tout en conservant cet espace d’entraînement.

M. Bernard Deflesselles. Mon général, dans vos propos liminaires transparaissait une inquiétude assez forte sur vos moyens au regard des missions qui vous sont confiées. Sur les 27 pays de l’Union européenne, deux font un effort conséquent : le Royaume-Uni et la France, à hauteur de 1,7 % à 1,9 % du PIB. On évoque d’ailleurs l’émergence d’un axe franco-britannique. Quelles en seraient les conséquences à l’avenir pour notre armée de terre en terme de mission, de mutualisation, de ressources et de calendrier ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Comme vous le savez, il y aura dans quelques jours des réunions au sommet et je laisse donc aux autorités concernées le soin d’annoncer certaines mesures. Avec les Britanniques, nous avons déjà travaillé sur l’interopérabilité de nos systèmes. À titre d’exemple, nous avons un exercice majeur prévu en 2011, l’exercice Flandres, avec une division dans laquelle une brigade française et une brigade britannique travailleront ensemble pour faire fonctionner leurs systèmes d’information.

Nous sommes également très proches d’eux sur les théâtres d’opérations, nos modes de fonctionnement sont proches. La coopération procède souvent de la mise en commun des savoirs faire et les choses avancent plutôt bien dans ce domaine.

M. Christophe Guilloteau. Le CAESAR est–il utilisé au combat en Afghanistan ?

Vous avez évoqué les véhicules blindés ARAVIS. Pourriez-vous nous dire où en sont les achats ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Nous sommes à mi-parcours pour le CAESAR. La première livraison est terminée ; sur une cible de 77, il nous en reste quatre à recevoir en 2011 et nous devrions percevoir une deuxième tranche après 2015. Déployé en Afghanistan, il tire avec une précision remarquable. Il est souvent utilisé en binôme avec le système de drone tactique intérimaire (SDTI) qui permet de régler un tir à partir du moment où un drone se trouve au dessus. Nous comptons le déployer également au Liban en remplacement du canon 155 AUF1.

Nous avons acheté une quinzaine d’ARAVIS grâce au plan de relance. Dix de ces engins sont actuellement en cours de déploiement en Afghanistan. Il s’agit de véhicules surprotégés qui permettront à nos détachements d’ouvertures de pistes du génie de travailler en sûreté. Il y aura donc un train d’équipement entre l’ARAVIS, le système d’ouverture d’itinéraires minés SOUVIM et le BUFFALO, ce qui permettra à nos sapeurs de mener une action toute aussi efficace mais mieux protégée contre les engins explosifs improvisés. Tous ces engins ont été confiés au 13e régiment de génie de Valdahon.

M. Patrice Calméjane. Ma question porte sur le financement des dépenses liées aux pompiers de Paris qui, comme à Marseille, sont des militaires. Il s’agit de près de 7 500 hommes, pour un budget d’environ 350 millions d’euros, financé par les collectivités locales. Outre les fausses alertes, certains organismes, dont l’activité est marchande, bénéficient de missions particulières des pompiers de Paris sans pour autant contribuer à leur financement qu’il s’agisse de rémunérations ou de renouvellement des équipements : je pense par exemple aux bateaux-mouches ou à la Tour Eiffel. Cette situation est d’autant plus regrettable que les pompiers de Paris sont particulièrement sollicités, l’Île de France ne disposant que de 114 pompiers pour 1 000 habitants, contre une moyenne de 382 pour 1 000 en province, volontaires compris, il est vrai.

Ne pensez-vous pas qu’envisager la mise à contribution de ces organismes pourrait aller dans le bon sens ?

M. le général d’armée Elrick Irastorza. L’armée de terre n’est concernée par cette question que dans la mesure où elle fournit quelques officiers à ce corps et, surtout, en assure le recrutement. Mais notre rôle s’arrête là. Je ne suis donc pas compétent pour prendre position sur ces questions d’emploi ou de financement.

M. Philippe Vitel, président. Je pose cette question en mon nom et au nom du président Teissier. Pourriez-vous évoquer le processus de réorganisation des centres d’aguerrissement en montagne après la fermeture des bases de Briançon et de Barcelonnette, au profit d’une concentration sur Modane ? On évoque un coût de mise aux normes de 500 000 euros.

M. le général d’armée Elrick Irastorza. Ce sujet m’est bien connu, puisque j’ai créé il y a 20 ans le centre d’aguerrissement en montagne, avec à l’époque une prise en compte des impératifs d’aménagement du territoire. Aujourd’hui les centres de Briançon et Barcelonnette ne sont plus nécessaires. Canjuers correspond suffisamment aux conditions rencontrées en Afghanistan. Les terrains de manœuvre ne sont en outre pas supprimés et rien ne nous interdit d’organiser des manœuvres en terrain libre. À Modane, une capacité résiduelle est conservée pour faire face, le cas échéant, à un besoin de formation adapté avant un engagement plus exigeant dans un milieu montagneux.

Pour l’heure, les capacités du bataillon de chasseurs alpins suffisent. Quant au coût d’aménagement de Modane, il n’est pas particulièrement élevé, nous vous en communiquerons le détail.

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de la Mission « Défense » : « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) » pour 2011, au cours de sa réunion du mercredi 27 octobre 2010.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Patrick Beaudouin. Lors de l’examen de la loi de programmation militaire, nous avions adopté un amendement préservant les petits programmes de cohérence opérationnelle. Cette disposition a-t-elle été respectée, notamment pour les éléments de protection individuelle ?

M. Yves Fromion. Il semble que le programme SCORPION soit menacé alors même que c’est la première fois que l’armée de terre nous présente un programme de cohérence globale, montrant sa volonté de rationaliser et d’améliorer la conduite des opérations d’armement. Le risque est-il réel ? Quelles seraient les conséquences d’une annulation ?

Par ailleurs, on pourrait avoir le sentiment que l’armée de terre est plus mise à contribution que les autres armées dans le cadre de la réforme. Savez-vous si les économies que la restructuration de ses structures dégage conduisent effectivement à améliorer ses équipements ou est-ce que ces gains bénéficient à l’ensemble du ministère ?

M. Alain Marty. Disposez-vous d’éléments au sujet de la création récente des centres de formation initiale pour les engagés volontaires ? Quels sont la qualité et le coût de cette formation initiale ?

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis. En 2009, j’avais attiré l’attention de la commission sur les conséquences d’une réduction des crédits des petits programmes de cohérence opérationnelle ; je n’ai pas ces inquiétudes pour 2011. Le chef d’état-major de l’armée de terre a d’ailleurs bien souligné que nos soldats ne font rien sans protection, notamment en opérations extérieures et plus particulièrement en Afghanistan. Auparavant, les militaires m’alertaient souvent sur la mauvaise qualité de leur équipement individuel. Ils n’hésitaient d’ailleurs pas à acheter sur leurs fonds propres des chaussures, des treillis ou d’autres équipements. Nous avons fait des efforts très conséquents en la matière : nos soldats ont désormais des tenues adaptées et de bonne qualité. Les défauts du système FELIN, apparus au cours des tests extrêmes qui lui ont été imposés par l’armée de terre, ont été corrigés et le système a été certifié.

Le programme SCORPION est une opération de longue haleine devant faire cohabiter plusieurs équipements complexes et très différents. Nous ne sommes qu’au début de la première phase et il est encore temps de renoncer, ce qui, de mon point de vue, serait une erreur, sans que cela ne pose trop de problème. En revanche, une fois que nous serons engagés, il nous faudra aller au terme du programme : un renoncement en cours de route serait destructeur pour tous les matériels terrestres. À ce stade je ne suis pas inquiet mais nous devons néanmoins rester vigilants.

En matière de formation, tous les soldats déployés en opération bénéficient durant les six mois qui précèdent leur projection d’un entraînement opérationnel de très haut niveau. Cette formation comprend un volant individuel, destiné à apprécier les qualités, y compris psychologiques, de chaque militaire, et un volant collectif, visant à renforcer la cohésion et la cohérence du groupe. Cette exigence de formation est d’ailleurs un frein à la projection des réservistes car il leur est difficile de se libérer sur une période aussi longue.

Pour la formation initiale, il me semble prématuré de dresser un bilan des centres de formation initiale militaire (CFIM) car ils viennent tout juste d’être créés. En revanche, ce sera très vraisemblablement un thème du prochain avis budgétaire.

M. Jacques Lamblin. Vous vous êtes ému du faible taux de renouvellement des contrats des engagés volontaires qui n’atteint que 35 % alors que l’objectif est fixé à 40 %. Localement, je constate que l’armée de terre a de plus en plus de mal à recruter pour un premier contrat et ne peut donc faire qu’une sélection réduite des candidats. N’est-ce pas une des explications du taux d’attrition constaté lors du renouvellement de contrat ?

M. Jean-Claude Beaulieu. Sans anticiper sur les débats qui suivront la présentation de l’avis de M. Philippe Nauche, je souhaiterais savoir si les militaires du service de santé des armées déployés dans les forces, que notre collègue a rencontré lors de ses déplacements, ont réagi au récent rapport de la Cour des comptes.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis. Mon avis budgétaire revient assez longuement sur l’évolution de l’engagement des volontaires. J’ai le sentiment que nous nivelons de plus en plus par le bas faute d’un nombre suffisant de candidats, l’armée de terre n’ayant actuellement que 1,84 candidat par poste. Il faut sans doute améliorer la condition de nos militaires du rang. Les armées font cependant tout pour fidéliser ces jeunes, mais il ne faut pas oublier qu’à leur âge, on peut être facilement attiré par d’autres carrières. J’ajoute que le contexte économique compte également pour beaucoup.

En visite à Dakar, j’ai tenu à rassurer les membres du service de santé des armées qui s’inquiétaient des conclusions du rapport de la Cour des comptes. Je veux ici saluer ces personnels qui font chaque jour la preuve de leur engagement et de leurs compétences. Il ne faudrait pas oublier qu’une partie importante du rapport de la Cour est très élogieuse, soulignant les qualités du SSA. Je rappelle enfin que deux infirmiers sont morts au combat, montrant bien qu’ils sont autant des militaires que des soignants.

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Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission de la défense a donné un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) ».

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La commission est ensuite passée à l’examen des amendements.

Elle a d’abord été saisie de l’amendement II-DF 1 de MM. Guy Teissier et Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Il s’agit de modifier les autorisations d’engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) pour mettre un terme définitif à la différence de traitement entre les sapeurs-pompiers professionnels civils et les marins-pompiers de Marseille. En effet, ces derniers ne bénéficient pas des dispositions de la loi du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale qui intègre l’indemnité de feu dans le calcul des pensions des sapeurs pompiers civils.

M. François Cornut-Gentille. Je suis favorable à cet amendement, mais il me semble que nous avons déjà abordé cette question l’année dernière.

M. Philippe Vitel. Cet amendement avait effectivement été adopté l’année dernière par l’Assemblée nationale et le Sénat, mais ce changement ne s’est pas traduit dans les textes réglementaires.

M. Yves Fromion. Je ne conteste pas l’intérêt de cette proposition mais il me semble qu’il serait également utile de comparer le statut des marins-pompiers de Marseille avec celui des sapeurs-pompiers de Paris.

M. Philippe Vitel. Ce n’est pas l’objet de cet amendement, mais la question devra bien évidemment être étudiée.

M. Jean-Pierre Soisson. Si je comprends bien, notre vote de l’année dernière n’a abouti à rien. Tout cela donne l’impression que nous nous exprimons dans le vide.

La commission a adopté l’amendement n°II-DF1.

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La commission a ensuite examiné l’amendement II-DF 2 de MM. François Cornut-Gentille et Jean-Claude Viollet.

M. François Cornut-Gentille. Jean-Claude Viollet et moi considérons que la France est parvenue à un seuil critique dans le domaine du transport tactique et des ravitailleurs. Cela pose le problème de l’étiolement des compétences de l’armée de l’air et menace la crédibilité de notre dissuasion.

Cet amendement propose donc d’acquérir en leasing une première capacité d’avions mutlirôles (MRT) de type A 330. Notre objectif est de pousser le Gouvernement à faire un choix pour engager le renouvellement de notre flotte de ravitailleurs.

Nous proposons de financer cette mesure en mobilisant 20 millions d’euros sur les crédits du programme 178 « Préparation et emploi des forces » qui est doté de près de 22 milliards d’euros de crédits de paiement.

Je précise que le recours à ces appareils permettra de réaliser des économies de MCO, puisque celui des premiers MRT s’élèvera à 5 000 euros par heure de vol, alors que le coût du seul MCO des C-135 atteint actuellement plus de 13 000 euros.

M. Yves Vandewalle. Je soutiens ce projet mais m’interroge simplement sur sa compatibilité avec les décisions de mutualisation des moyens qui pourraient être prises avec les Britanniques.

M. François Cornut-Gentille. Les deux projets ne s’opposent pas. Si la coopération franco-britannique permettrait d’affréter des heures de vol complémentaires, les données dont nous disposons indiquent que cette option devrait être très coûteuse.

La commission a adopté l’amendement II-DF 2.

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Puis la commission a examiné l’amendement II-DF 3 de M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. La rénovation des Mirage 2000D devait leur permettre d’intégrer une capacité de renseignement image mais également de renseignement électronique que possèdent aujourd’hui les Mirage F1CR avec leur pod ASTAC. Ces appareils leur permettent à la fois d’identifier les dispositifs de l’adversaire et de programmer nos systèmes de contre-mesure électronique.

La procédure de retrait accéléré du Mirage F1CR qui doit s’achever en 2014 et le report de la rénovation du Mirage 2000D renvoyée à l’après 2013 risquent de nous faire perdre, pendant cinq ans au moins, cette capacité indispensable pour entrer en premier sur un théâtre. C’est également une capacité indispensable au travail de la direction du renseignement militaire qui doit alimenter en continu ses bases de données.

Cet amendement vise donc à engager une rénovation a minima pour éviter toute rupture capacitaire, en laissant au ministère de la défense le temps de réfléchir plus largement à l’avenir de cette flotte. Une somme de 10 millions d’euros devrait suffire à intégrer les pod de renseignement électronique ASTAC sur l’ensemble des avions.

La commission a adopté l’amendement II-DF 3.

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M. Jean-Jacques Candelier. L’examen de ce budget donne le sentiment de naviguer à vue. Je déplore qu’il sacrifie l’homme au profit de l’équipement. L’arme nucléaire occupe une bonne place et coûte entre 10 et 11 millions d’euros par jour. Je m’interroge aussi sur l’utilité de la défense anti-missiles balistiques. L’intégration au commandement militaire de l’OTAN me semble une mauvaise décision. Enfin, nous nous enlisons en Afghanistan. Pour toutes ces raisons je voterai contre ce projet de budget.

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La commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Défense » ainsi modifiés.

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ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
ET DES DÉPLACEMENTS

État-major de l’armée de terre.

§ M. le général Elrick Irastorza, chef d’état-major de l’armée de terre.

– Déplacement auprès des forces françaises du Cap-Vert, les 7 et 8 octobre 2010.

§ M. Nicolas Normand, ambassadeur de France au Sénégal ;

§ M. le général Olivier Paulus, commandant les forces françaises du Cap-Vert ;

§ M. le médecin chef des services Jean-Claude Renard, directeur de la direction interarmées du service de santé à Dakar ;

§ M. le colonel Patrick Bengler, attaché de défense et chef de la mission de coopération de sécurité et de défense ;

§ M. le capitaine de vaisseau Henri Fouques Duparc, commandant le transport de chalands de débarquement (TCD) Siroco ;

§ M. le colonel Jean-Jacques Mora, commandant la base aérienne 160 ;

§ M. le colonel Jean-Pierre Fagué, chef de corps du 23e bataillon d’infanterie de marine ;

§ M. l’ingénieur en chef de 1re classe Jean Iribarne, directeur de la direction d’infrastructure de la défense de Dakar ;

§ M. le lieutenant-colonel Laurent Cluzel, chef de la division opérations de l’état-major interarmées ;

§ M. le lieutenant-colonel Jean-Louis Rosiers, commandant le poste de la protection et de la sécurité de la défense de Dakar ;

§ Les personnels des Forces françaises du Cap-Vert ;

§ L’équipage du TCD Siroco.

– Visite du commandement des forces terrestres, le 15 octobre 2010.

§ M. le général Hervé Charpentier, commandant des forces terrestres ;

§ M. le général Marc Foucaud, adjoint chargé de la préparation opérationnelle ;

§ M. le général Jean-Philippe Houdinet, adjoint chargé du soutien ;

§ M. le général Arnaud Sainte-Claire Deville, chef d’état-major ;

§ M. le colonel Jean-François Martini, chef du centre opérationnel de l’état-major opérationnel terre ;

§ Le personnel du CFT.

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