N° 3806 tome III - Avis de Mme Sophie Delong sur le projet de loi de finances pour 2012 (n°3775)


N° 3806

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2011.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2012

TOME III

CULTURE

PATRIMOINES

Par Mme Sophie DELONG,

Députée.

___

Voir les numéros : 3775, 3805 (annexe n° 9).

INTRODUCTION 5

LE BUDGET DE LA CULTURE EN 2012 : DES EFFORTS CONSOLIDÉS 7

LA RÉFORME DU RÉGIME DES TRAVAUX D’ENTRETIEN ET DE RESTAURATION DES MONUMENTS HISTORIQUES : UN PREMIER BILAN 17

I.- UN SYSTÈME QUI AVAIT ATTEINT SES LIMITES ET QUI A JUSTIFIÉ UNE RÉFORME DE TRÈS GRANDE AMPLEUR 19

A. UN SYSTÈME QUI PRÉSENTAIT DE NOMBREUX INCONVÉNIENTS. 19

1. La maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments classés n’appartenant pas à l’État 19

2. La maîtrise d’œuvre : le monopole des ACMH 20

3. Le cas particulier du Centre des monuments nationaux 20

4. Le cas particulier des monuments affectés au ministère de la culture situés en Île-de-France 21

B. UN CHANGEMENT RADICAL 22

1. La dévolution de la maîtrise d’ouvrage au propriétaire ou à l’affectataire domanial 23

2. L’introduction d’une certaine liberté de choix du maître d’œuvre 23

3. La création de l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture et le renforcement du pilotage des investissements au ministère de la culture 26

4. La mise en œuvre d’un contrôle scientifique et technique assuré par les services de l’État 28

II.- UNE TRANSITION DIFFICILE, UNE VIGILANCE NÉCESSAIRE POUR GARANTIR LE SUCCÈS D’UNE RÉFORME LÉGITIME 31

A. UNE TRANSITION DIFFICILE 31

1. Des retards dans la mise en œuvre de la réforme 31

2. Un défaut de pilotage d’ensemble : le cas du CMN 33

B. LE BILAN DE LA RÉFORME : UNE VIGILANCE NÉCESSAIRE 34

1. La réforme de la maîtrise d’ouvrage 34

a) La nécessité pour les propriétaires de pouvoir compter sur l’expertise de l’État : l’assistance à la maîtrise d’ouvrage et le contrôle scientifique et technique 34

b) Les conséquences de la réforme sur le rythme de consommation des crédits 36

2. La réforme de la maîtrise d’œuvre 37

TRAVAUX DE LA COMMISSION 39

I.- AUDITION DU MINISTRE 39

II.- EXAMEN DES CRÉDITS 39

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 53

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 55

INTRODUCTION

Le présent rapport a pour objet d’examiner, au sein de la mission « culture », le programme 175 « patrimoines », les deux autres programmes de la mission faisant l’objet d’un avis distinct confié à M. Patrick Bloche.

À la suite de la réorganisation des services centraux du ministère de la culture et de la communication, intervenue en janvier 2010 conformément aux orientations établies dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, l’architecture du projet de loi de finances pour 2011 avait connu d’importantes modifications. Cette architecture est désormais stabilisée, ce dont la rapporteure se félicite.

Le projet de budget de la mission « culture » s’élève pour 2012 à 2,601 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,732 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 1,8 %. Compte tenu du contexte budgétaire difficile que nous traversons, il faut saluer l’importance de l’effort consenti en faveur de la culture, effort particulièrement significatif si l’on considère l’ensemble de la législature : toutes missions confondues, le budget du ministère a cru de plus de 20 % depuis 2007, soit 1,23 milliard d’euros.

Ce volontarisme s’incarne tout particulièrement dans le domaine du patrimoine : après les effets néfastes exercés sur ce dernier par des budgets en « dents de scie », dénoncés par notre collègue Christian Kert dans un rapport d’information de 2006 (1), un important effort a été entrepris afin d’éviter l’accumulation de reports de crédits déconnectés de la réalité du terrain, en établissant des autorisations d’engagement à un niveau réaliste, mais aussi en augmentant les crédits de paiement de manière significative.

Ainsi en 2009, dans un discours prononcé à Nîmes lors des vœux au monde de la culture, le Président de la République déclarait-il : « Notre patrimoine ce sont aussi nos monuments, une richesse qui n’est ni suffisamment entretenue ni suffisamment exploitée [...]. Il est venu, le temps d’entretenir notre patrimoine, c’est aussi une affaire d’identité, de sens, de respect de notre culture. » Depuis, ce sont 291 millions d’euros supplémentaires qui ont été consacrés aux monuments historiques.

La rapporteure consacrera la première partie de cet avis à l’évolution des crédits du programme 175, examen qui fait apparaître une légère hausse des crédits de paiement de 0,5 %.

Puis, s’attachant à étudier un secteur de l’action culturelle, elle a porté son choix sur la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques classés.

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre 2011 la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 82,2 % des réponses étaient parvenues à la rapporteure pour avis.

 

LFI 2011

PLF 2012

Variation en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme patrimoines

848,93

868,79

813,94

870,59

- 4,1

+ 0.5

Le programme 175 connaît une hausse de 0,5 % de ses crédits de paiement, après une hausse précédente de 1,5 % inscrite dans la loi de finances initiale pour 2011.

Le programme 175 comporte 9 actions, sachant que les dépenses de personnel sont regroupées avec l’ensemble des dépenses du titre II dévolues au ministère du sein de l’action n° 7 du programme 224.

 

Autorisations d’engagement (AE)

Crédits de paiement (CP)

Numéro et intitulé de l’action
 / sous-action

Titre 2
Dépenses
de personnel

Autres titres

Total

Titre 2
Dépenses
de personnel

Autres titres

Total

 01

Patrimoine monumental

 

345 937 877

345 937 877

 

380 746 467

380 746 467

 02

Architecture

 

26 765 202

26 765 202

 

27 761 202

27 761 202

 03

Patrimoine des musées de France

 

372 733 852

372 733 852

 

382 601 728

382 601 728

 04

Patrimoine archivistique et célébrations nationales

 

37 330 348

37 330 348

 

48 876 661

48 876 661

 07

Patrimoine linguistique

 

2 600 833

2 600 833

 

2 600 833

2 600 833

 08

Acquisition et enrichissement des collections publiques

 

18 506 024

18 506 024

 

18 506 024

18 506 024

 09

Patrimoine archéologique

 

10 067 766

10 067 766

 

9 504 766

9 504 766

 Total

 

813 941 902

813 941 902

 

870 597 681

870 597 681

Source : projet annuel de performance

L’action n° 1, « patrimoine monumental », est dotée de crédits destinés à assurer la conservation et la protection des patrimoines architectural, urbain, technique, scientifique et ethnologique, ainsi qu’au recensement, à l’étude et à la mise en valeur de ces patrimoines auprès du public.

Une importante démarche de modernisation de cette politique a été engagée à la suite du plan national en faveur du patrimoine, adopté par le Gouvernement en septembre 2003. Cette modernisation repose sur la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques, à laquelle la seconde partie du présent rapport sera consacrée.


L’effort en faveur des monuments historiques est consolidé à hauteur de 376 millions d’euros de crédit de paiement, contre 374 millions l’an passé.

Conformément aux recommandations du rapport d’audit de modernisation d’avril 2006 sur La modernisation et la rationalisation de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre sur les monuments historiques, 15 % des crédits en faveur des monuments historiques sont affectés à l’entretien, ce afin de réduire la nécessité d’interventions curatives plus coûteuses.

56 % des 270 millions d’euros consacrés à la restauration seront affectés à des monuments n’appartenant pas à l’État, soit 3 % de plus qu’en 2011. Rappelons que sur les 14 000 monuments classés et les 27 000 monuments inscrits, l’État ne détient que 4 % des édifices protégés, les communes 44 %, notamment les églises construites avant 1905, les propriétaires privés 46 %, les 6 % restants revenant aux autres collectivités publiques. L’objectif n° 3 assigné au programme 175 est d’élargir les sources de financement des patrimoines publics ; il est décliné en deux sous-objectifs, l’un d’entre eux visant à ce qu’un euro investi par l’État se traduise par un engagement des autres partenaires à hauteur de 2 euros.

En dehors des grands projets, 67 % des dépenses correspondent à des crédits déconcentrés. 145,76 millions d’euros de subventions d’investissement permettront de soutenir les collectivités territoriales et les propriétaires privés pour les travaux de restaurations sur les monuments historiques. Le montant de la participation de l’État est généralement compris entre 30 et 50 % du coût de ces travaux lorsqu’il s’agit de monuments classés et entre 15 et 25 % lorsqu’il s’agit de monuments inscrits. Les règles de versement des subventions ont été aménagées dans le cadre de la réforme de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments classés n’appartenant pas à l’État : l’obligation nouvelle pour les collectivités et les propriétaires privés de faire l’avance du coût des travaux aurait en effet pu les mettre en difficulté. Par dérogation à la règle du service fait, des avances peuvent désormais être versées par l’État pour des montants pouvant atteindre jusqu’à 30 % du montant total de la subvention.

Les grands projets à Paris et en région se poursuivent par ailleurs, 33 millions d’euros de crédits de paiement y étant affectés, contre 28 en LFI pour 2011. L’année 2012 sera ainsi marquée par deux grands chantiers : la Maison de l’histoire de France et le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM).

Maison de l’histoire de France

Associant un réseau de neuf musées nationaux (2), cette nouvelle institution a pour mission de créer un outil valorisant la rencontre entre ceux qui produisent l’histoire et le large public.

Une association de préfiguration a été créée en mars 2009. L’État, représenté par les ministères de la culture et de la communication, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de l’éducation nationale et de la défense, l’Institut national du patrimoine, ainsi que la Cité de l’architecture et du patrimoine en sont les membres fondateurs. Des personnalités qualifiées, françaises et étrangères, complètent le conseil d’administration. Cette association, qui ne porte aucun crédit d’investissement, aura une durée de vie limitée, puisqu’elle disparaîtra à la création de l’établissement public le 1er janvier prochain. À la fin de l’année 2011, elle comptera dix personnes, pour un budget de fonctionnement de 1,9 million d’euros. Cette association est en charge du pilotage du projet, sous la tutelle de la direction générale des patrimoines.

Un comité d’orientation scientifique a été installé par le ministre de la culture et de la communication, le 13 janvier dernier. Présidé par Jean-Pierre Rioux, il comprend vingt historiens. Il est en charge de l’élaboration du projet scientifique et culturel du nouvel établissement. Le 16 juin dernier, un avant-projet a été rendu public, remis au ministre de la culture et de la communication et ouvert à une large concertation. Sept rencontres régionales sont ainsi organisées à Paris, Lille, Toulouse, Marseille, Strasbourg, Rennes et Lyon, afin de présenter et débattre de l’avant-projet. Tenant compte de ces consultations, le projet définitif sera remis à la fin de l’année 2012.

Après la remise de l’avant-projet, dans le cadre d’un schéma directeur général du quadrilatère Rohan-Soubise (Archives nationales) à Paris, une équipe d’architectes-programmistes a été missionnée. Elle doit établir une pré-programmation et croiser des hypothèses avec l’équipe d’architectes-programmistes des Archives nationales.

La Maison de l’histoire de France sera créée sous la forme d’un établissement public le 1er janvier prochain. En 2012, l’établissement devrait compter un effectif de vingt personnes, pour un budget de fonctionnement de 5 millions d’euros.

Ce nouvel établissement public s’associera au sein d’un groupement d’intérêt public, avec les neuf musées nationaux précités, afin de développer leur coopération scientifique et lancer des initiatives communes en faveur de la diffusion de la connaissance de l’histoire de France.

Enfin, plusieurs opérations de préfiguration sont d’ores et déjà programmées. Le site internet de la nouvelle institution, premier élément d’une stratégie numérique d’ampleur, a été lancé le 23 septembre et évoluera pour devenir un portail de ressources numériques sur l’histoire de France. Une exposition-événement aura également lieu au Grand Palais au début de l’année prochaine. Elle permettra de faire connaître au grand public une collection méconnue des plans-reliefs, à travers l’exposition de seize plans jamais rendus publics. Une exposition de préfiguration aura lieu au premier semestre 2013 au Grand Palais. Elle permettra de s’interroger sur les traits caractéristiques de notre histoire nationale. Enfin, de nombreux partenariats sont en cours d’élaboration, avec de grandes institutions patrimoniales, le réseau des villes et pays d’art et d’histoire, les collectivités territoriales, les universités et les centres de recherche.

La Maison de l’histoire de France ouvrira ses portes en 2015.

S’agissant de la Maison de l’histoire de France, 15 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont consacrés aux travaux de clos et couvert des établissements qui constituent le réseau du projet. 3,75 millions d’euros de crédits de paiement sont programmés pour la réalisation des études et le lancement des travaux d’implantation du projet au sein du quadrilatère Rohan-Soubise. S’y ajoutent 1,25 million d’euros pour les travaux muséographiques et 5 millions d’euros de dépenses de fonctionnement, inscrits à l’action n° 3 du présent programme. Au total, 10 millions d’euros de crédits de paiement et 30 millions d’euros d’autorisations d’engagement seront consacrés à ce projet en 2012.

Le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM) compte également parmi les grands projets prioritaires du ministère.

Il consiste en la création, à Marseille, d’un véritable musée national de société, à partir du transfert et de la transformation du musée national des arts et traditions populaires, fermé depuis 2005.

Le MUCEM s’étendra sur trois sites :

– sur l’ancien môle portuaire, le bâtiment en construction, réalisé par l’architecte Rudy Ricciotti associé à Roland Carta, sera le cœur du musée et accueillera les espaces d’exposition, des espaces dédiés aux enfants et un auditorium ;

– le Fort Saint-Jean, monument historique dont les origines remontent au XIIe siècle, sera relié au bâtiment du môle par une passerelle et ouvert à la visite après restauration, avec un jardin méditerranéen et une présentation des collections d’arts et traditions populaires du MUCEM ;

– le centre de conservation et de ressources, construit sur le site de la caserne de Muy, dans le quartier de la Belle de Mai et réalisé dans le cadre d’un partenariat public-privé.

Le MUCEM est un musée national auquel la ville de Marseille, le conseil général et la région apportent leur concours, aux côtés de l’État, en participant au financement de la construction du bâtiment du môle.

Le MUCEM ouvrira ses portes avec plusieurs expositions inaugurales en 2013, dans le cadre de la célébration de Marseille Provence, capitale européenne de la culture. L’aboutissement de ce projet se traduit par l’inscription de 41,3 millions d’euros de crédits de paiement, dont 36,31 millions d’euros au titre de l’action n° 3 et 4,9 millions au titre de l’action n° 1.

Le budget de l’action n° 2, « architecture », augmente de 8,5 % en crédits de paiement. L’objectif reste le soutien et l’accompagnement des collectivités pour un aménagement du territoire de qualité assurant la synthèse de l’architecture, des paysages et du patrimoine.

La loi n° 2010-788, portant engagement national pour l’environnement et dite « Grenelle II », a été publiée en juillet 2010. Elle prévoit le remplacement des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) par des aires de mises en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP). À la suite de la parution du décret d’application prévue pour fin 2011, l’année 2012 marquera le réel point de départ de la mise en œuvre de ce dispositif. Des crédits sont ainsi destinés à aider les collectivités locales à financer les études des nouvelles AVAP d’une part, et d’autre part les travaux engagés par les propriétaires publics ou privés aux abords de monuments historiques, en secteurs sauvegardés, en ZPPAUP ou AVAP.

Les crédits destinés aux études d’AVAP s’élèvent à 2,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 2,25 millions d’euros en crédits de paiement, avec un rythme de 100 aires par an et le souci de procéder à un rééquilibrage géographique au niveau national. Il existe aujourd’hui près de 640 zones de protection ZPPAUP sur l’ensemble du territoire et plus de 600 projets sont à l’étude. L’État finance aux côtés des collectivités locales jusqu’à 50 % du montant des études des AVAP. En outre, 2 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement sont consacrés au financement de révisions des ZPPAUP en AVAP dans le cadre du Grenelle II, ainsi qu’aux études urbaines en faveur de la qualité architecturale (études de diagnostic territorial, études paysagères pour l’implantation et l’intégration d’équipements solaires).

Les moyens destinés à l’Atelier international du Grand Paris sont consolidés à hauteur de 1,5 million d’euros. Depuis le printemps 2011, la ville de Paris, la région Ile-de-France, l’association des maires d’Ile-de-France et le syndicat Paris-Métropole ont rejoint les organes de gouvernance de l’Atelier, groupement d’intérêt public ayant pour mission de favoriser les débats, recherches, initiatives sur les enjeux urbains de ce projet, prolonger et développer les projets rassemblés lors de la consultation internationale de 2008.

Dans le champ muséal (action n° 3), 382 millions d’euros de crédits de paiement, soit 11 de plus qu’en LFI pour 2011, permettront à l’État de respecter les deux priorités qu’il s’est fixées en matière de gestion des collections : amélioration de leur connaissance et de leur condition de conservation. La politique volontariste de diffusion culturelle et de développement d’un égal accès de tous à la culture sera poursuivie.

Les subventions pour charges de service public versées aux opérateurs du ministère s’élèveront à 283 millions d’euros de crédits de paiement. La rapporteure relève en particulier les 92,83 millions d’euros en faveur du Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, qui anime un projet novateur de démocratisation culturelle dans le cadre du projet Centre Pompidou Mobile, dont la première étape vient de débuter à Chaumont (Haute-Marne).

Outre le financement des deux grands projets que sont la Maison de l’histoire de France et le MUCEM, dans des conditions décrites supra, les crédits inscrits à l’action n° 3 permettent la poursuite du plan musées, lancé en 2011, à hauteur de 16,7 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 15,1 millions d’euros de crédits de paiement. Ce plan d’investissement en faveur des musées, nationaux ou territoriaux, en régions, a comme objectif d’assurer un rééquilibrage territorial et de renforcer la conservation et la mise en valeur des collections.

S’agissant de l’action n° 4, « patrimoine archivistique et célébrations nationales », l’année 2012 sera marquée par l’aboutissement du projet de construction du futur centre des archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis. Le budget 2012 prévoit les derniers paiements relatifs au chantier de construction (195 millions d’euros) ainsi qu’à l’équipement, l’exploitation et la maintenance du nouveau centre.

Le projet de Centre national des archives à Pierrefitte-sur-Seine

La décision de l’État de construire un nouveau bâtiment pour les archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine a été prise afin de remédier à la saturation et à l’inadaptation des actuels sites de Paris et de Fontainebleau. Les principaux objectifs de ce projet sont la poursuite de la collecte, la conservation des documents dans des magasins sécurisés aux normes de conservation et l’instauration d’espaces publics de consultation.

La volonté de rendre accessible au plus grand nombre le contenu des archives nationales se manifeste au travers du choix de l’implantation en Seine-Saint-Denis.

La construction du nouvel équipement a été confiée, par la direction des archives de France, à l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC), par convention de mandat. Le suivi du projet est assuré par les archives nationales, service à compétence nationale, au sein desquelles une mission, dédiée au projet Pierrefitte, « impulse et coordonne l’ensemble des chantiers du nouveau site » (art. 2 de l’arrêté d’organisation des archives nationales du 31 décembre 2007).

Les principales caractéristiques du programme de l’équipement culturel sont les suivantes :

– capacité totale de conservation : 320 km linéaire (kml) d’archives, dont 80 kml restent à équiper à l’issue du chantier ;

– capacité des salles de lecture : 310 places ;

– estimation des effectifs de travail : environ 300 agents ;

– surface utile de l’équipement : 62 000 m² (dont 75 % pour la conservation des archives).

Le permis de construire a été délivré en juin 2008 et le marché de travaux a été notifié en mai 2009. La durée des travaux est de 31 mois, pour une livraison du bâtiment au premier semestre 2012. Le coût global du bâtiment est fixé à 194,23 millions d’euros.

Les chantiers scientifiques connexes à la construction du bâtiment sont tout aussi importants que ce dernier. Ils subordonnent son ouverture au public et sont assumés directement par la mission « projet Pierrefitte ». Ils interviennent dans les domaines scientifiques, organisationnels, techniques. Les trois chantiers, pour lesquels des assistances à maîtrise d’ouvrage ont été contractées jusqu’à l’aboutissement du projet en 2013, sont entrés en phase opérationnelle :

– le système d’information archivistique : outil de gestion, outil documentaire et outil de publication, le SIA constitue le socle de toute la politique de modernisation des archives nationales et le préalable indispensable à l’ouverture du bâtiment. Le SIA assure, sur les trois sites des archives nationales, la gestion de la collecte des archives, la gestion des espaces de conservation des archives, et leur communication aux lecteurs sous tous supports. Il gère également la gestion documentaire de ces archives : la production d’instruments de recherche et leur valorisation. En outre, le SIA permettra l’échange d’informations avec les missions des archives de France auprès des ministères. Pour favoriser la communication avec les lecteurs, il sera accessible via un portail internet, comprenant notamment une Salle des inventaires virtuelle (SIV) permettant de diffuser en ligne les instruments de recherche des Archives nationales. Le marché de conception et de déploiement du SIA, d’une durée de 5 ans, a été notifié en décembre 2008. Le marché de fourniture et de maintenance des infrastructures supports du SIA a été notifié en octobre 2010 ;

– la dématérialisation des inventaires (instruments de recherche) : composante du SIA, la salle des inventaires virtuelle (SIV) constituera une innovation technologique importante. Elle va permettre aux lecteurs des archives nationales de consulter à distance les instruments de recherche et de préparer ainsi leur déplacement. La salle des inventaires virtuelle sera alimentée par les instruments de recherche produits sous forme normalisée, dans le cadre du système d’information archivistique, mais aussi grâce au processus de dématérialisation des inventaires. L’enjeu de ce chantier est d’engager les opérations de dématérialisation suffisamment en amont afin qu’un nombre significatif d’instruments de recherche soient en ligne à l’ouverture du site de Pierrefitte-sur-Seine. Plus de 16 000 instruments de recherche (soit près de 70 %) ont été traités depuis le démarrage du chantier en 2008, dans le cadre d’un marché triennal de numérisation et d’encodage des instruments de recherche ;

– le chantier des fonds et du déménagement : ce chantier se décompose en deux grandes phases : la phase préparatoire au déménagement, puis le déménagement lui-même. La phase préparatoire regroupe toutes les opérations préalables au déménagement : récolement, bilan sanitaire et climatique, opérations de traitement (reconditionnement, transfert sur nouveaux supports, numérisation, microfilmage, restauration, désinfection). Depuis le démarrage du chantier, 27,6 kml d’archives ont été reconditionnées. Le déménagement, qui porte sur 214 kml d’archives, durera 18 mois et est conçu avec la volonté d’en limiter l’impact sur la communication des fonds aux chercheurs. Il est lui-même en interconnexion forte avec les chantiers bâtiment et système d’information archivistique. Les opérations préparatoires de code-barrage des documents sont en phase d’achèvement.

En outre, le ministère soutient la construction de centres d’archives en région et plus particulièrement d’archives départementales, qui exercent souvent le rôle de services culturels de proximité. Ces projets se voient consacrer 3 millions d’euros de crédits de paiement.

Les crédits en faveur du patrimoine linguistique (action n° 7) progressent de 1,3 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement et permettent de financer les interventions de la délégation générale à la langue française et aux langues de France en faveur du multilinguisme, de la maîtrise de la langue française, de son enrichissement et de sa diffusion.

Quant à ceux prévus pour les acquisitions patrimoniales (action n° 8), ils sont en hausse de 11,3 % et s’établissent à 18,5 millions d’euros. Les crédits de cette action seront majoritairement consacrés au financement du fonds du patrimoine, à hauteur de 3,30 millions d’euros qui joue un rôle clé dans l’enrichissement des collections publiques françaises en se concentrant sur l’acquisition des trésors nationaux et des œuvres d’intérêt patrimonial majeur.

Dans le secteur de l’archéologie (action n° 9), 5,9 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 5,3 millions d’euros de crédits de paiement seront consacrés à la rénovation ou à la construction des Centres d’études et de conservation (CCE). Ces projets de CCE, répartis en région, sont destinés à créer ou à mettre à niveau des structures de conservation adaptées à la gestion des mobiliers et de la documentation archéologiques, afin qu’ils soient accessibles aux chercheurs. Notons également qu’une réforme de la redevance d’archéologie préventive est en cours et devrait aboutir dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de fin d’année. Elle devrait permettre d’en augmenter le rendement et d’améliorer ainsi la capacité de réalisation de ces opérations, notamment par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), et de réduire les délais d’intervention.

LA RÉFORME DU RÉGIME DES TRAVAUX D’ENTRETIEN ET DE RESTAURATION DES MONUMENTS HISTORIQUES :
UN PREMIER BILAN

Contrairement à une idée généralement admise, tous les monuments historiques n’appartiennent pas à l’État, bien au contraire : sur les 14 000 monuments classés et les 27 000 monuments inscrits, l’État ne détient que 4 % des édifices protégés, les communes 44 %, notamment les églises construites avant 1905, les propriétaires privés 46 %, les 6 % restants revenant aux autres collectivités publiques.

Le caractère d’intérêt public qui s’attache à la conservation de ces monuments justifie que des restrictions soient apportées au droit du propriétaire de disposer de son bien.

Ainsi, jusqu’à une date récente, la maîtrise d’ouvrage des travaux d’entretien et de restauration sur tous les monuments classés échoyait à l’État, même sur les édifices ne lui appartenant pas. Les architectes en chef des monuments historiques (ACMH), recrutés par concours, jouissaient du monopole de la maîtrise d’œuvre de ces travaux.

Ce système, qui essuyait des critiques récurrentes, a connu sa « révolution copernicienne » pour reprendre l’expression employée par M. Philippe Belaval, Directeur général des patrimoines au ministère de la culture, lors de son audition par la rapporteure. Le principe en vertu duquel le propriétaire ou l’affectataire de l’édifice en est le conservateur a été affirmé par l’ordonnance n° 2005-1128 du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés, entrée en vigueur le 1er janvier 2008. Parallèlement, le statut des ACMH a été réformé par le décret n° 2007-1405 du 28 septembre 2007, qui a introduit une marge dans le choix du maître d’œuvre pour les travaux de restauration sur les monuments classés. La loi de finances pour 2007 a consacré la dévolution de la maîtrise d’ouvrage au Centre des monuments nationaux sur les monuments qui lui sont remis en dotation. Enfin, le décret n° 2010-818 du 14 juillet 2010 a créé un nouvel établissement public, l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture, qui est venu se substituer au Service national des travaux, service à compétence nationale chargé de la maîtrise d’ouvrage d’un certain nombre de monuments du ministère de la culture situés en Ile-de-France, et à l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels, maître d’ouvrage des grands travaux de construction, d’aménagement, de réhabilitation de gros entretien ou de réutilisation d’immeubles appartenant à l’État et présentant un intérêt culturel.

La rapporteure a souhaité consacrer quelques développements au premier bilan que l’on peut tirer de cette grande réforme. Le recul manque encore pour en mesurer tous les effets, mais quelques enseignements peuvent d’ores et déjà en être tirés. Elle se félicite à cet égard qu’un observatoire de la réforme ait été constitué par le ministère de la culture, regroupant l’ensemble des parties intéressées, dont les travaux ne manqueront pas d’éclairer utilement l’administration et le législateur.

I.- UN SYSTÈME QUI AVAIT ATTEINT SES LIMITES ET QUI A JUSTIFIÉ UNE RÉFORME DE TRÈS GRANDE AMPLEUR

Comme le rappellent Jean-Paul Godderidge et Catherine de Salins dans leur rapport au ministre de la culture de juin 2008 sur la maîtrise d’ouvrage des monuments historiques, « l’"ancien régime" de protection des monuments historiques, issu d’une pratique autant que des textes, reposait sur le principe selon lequel l’État, dans le cadre de sa politique nationale de protection du patrimoine, prenait des mesures de protection, inscription ou classement, et ensuite aidait financièrement les propriétaires des monuments ainsi protégés qui lui en faisaient la demande à les conserver et à y réaliser des travaux. Mais cette aide avait pour contrepartie l’imposition de prescriptions par l’État, au premier chef desquelles la prise en main de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments classés ainsi que l’obligation de recourir à un architecte en chef des monuments historiques pour la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration sur ces monuments classés. »

L’entretien des monuments, c’est-à-dire l’ensemble des interventions ponctuelles ne nécessitant pas de toucher aux structures ou aux éléments constitutifs du classement, était de la responsabilité des services départementaux de l’architecture et du patrimoine (SDAP) dirigés par des architectes des bâtiments de France (ABF), maîtres d’œuvre des travaux correspondants. La maîtrise d’ouvrage des opérations de restauration ou de grosse réparation des bâtiments classés relevait des conservateurs régionaux des monuments historiques (CRMH) au sein des directions régionales des affaires culturelles (DRAC).

Un tel régime avait pour avantage d’affirmer clairement la responsabilité de l’État dans la conservation des monuments historiques et avait permis la mise en place au sein des DRAC d’équipes compétentes sur une question complexe tant d’un point de vue administratif que technique.

Mais il avait occasionné un relatif « embouteillage » des dossiers de restauration causé par l’obligation de passer par les services de l’État, des retards dans les travaux souhaités par les propriétaires, et entretenu chez certains propriétaires le sentiment d’être dépossédés de leur bien par l’administration.

En outre, le décalage entre la maîtrise d’ouvrage directe de l’État sur les monuments historiques appartenant aux collectivités territoriales et la décentralisation était devenu criant.

Les architectes en chef des monuments historiques, recrutés par concours, se voyaient attribuer un monopole de compétence sur une zone géographique éventuellement complétée par l’affectation de certains monuments hors de cette zone.

Dans cette zone et à l’égard de ces monuments, chaque architecte en chef des monuments historiques disposait d’un monopole pour assurer la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration sur les immeubles classés pour lesquels soit la maîtrise d’ouvrage était exercée par l’État, soit les propriétaires recevaient une aide de l’État au titre de la protection des monuments historiques.

Leur monopole reposait donc sur la protection du monument et l’aide obtenue de l’État. Seule une décision de l’État modifiant le champ de compétence d’un architecte en chef des monuments historiques pouvait affecter cette situation. Une mésentente entre le propriétaire et son architecte était en revanche sans effet sur la compétence de ce dernier, pouvant conduire à des situations de blocage.

Le Centre des monuments nationaux (CMN) est « l’héritier » de la Caisse des monuments historiques créée en juillet 1914. Jusqu’en 2007, le CMN avait pour mission de présenter au public les monuments nationaux ainsi que leurs collections dont il avait la garde, d’en développer la fréquentation et d’en favoriser la connaissance.

Il s’agissait donc d’une mission de gestion des monuments nationaux, c’est-à-dire des monuments historiques, classés ou inscrits, appartenant à l’État et remis en dotation à l’établissement, ainsi que des monuments historiques, classés ou inscrits, faisant partie du patrimoine propre de l’établissement, soit 95 monuments au total.

La maîtrise d’ouvrage des travaux d’investissement et d’entretien sur ces monuments demeurait assurée par les services de l’État au sein des DRAC et des SDAP et, pour certains monuments franciliens, par un service à compétence nationale spécialisé, le service national des travaux (SNT). Le CMN n’était en charge que des travaux d’aménagement d’espaces d’accueil du public, de comptoirs de vente ou de locaux pour ses agents.

Comme le rappelle le rapport précité « il en résultait une situation complexe, notamment au point de vue décisionnel, certaines opérations, comportant à la fois des travaux de clos et de couvert et des aménagements d’accueil, se trouvant dès lors placées sous un système de double maîtrise d’ouvrage. Les tentatives d’instauration de procédures de concertation entre les services de l’État et du CMN pour améliorer la cohérence des programmations montrèrent très vite leurs limites, les préoccupations premières des deux "parties" n’étant pas nécessairement les mêmes, et les possibilités d’arbitrage demeurant limitées. Cet éclatement de responsabilités était à l’origine d’autres difficultés. Le CMN, responsable de la sécurité, mais incompétent pour la plupart des travaux, se trouvait dépossédé des moyens d’agir pour se conformer aux prescriptions des commissions de sécurité. De même, les choix techniques adoptés par les services de l’État (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre) ne prenaient pas toujours en compte les contraintes ou les souhaits de l’établissement exploitant, notamment en matière d’impact sur les coûts de fonctionnement. Au-delà de ces difficultés concrètes, les positions du CMN et des services de l’État ont souvent été caricaturées comme relevant de deux cultures fondamentalement différentes et parfois opposées : celle des services de l’État étant ressentie par le CMN comme essentiellement voire exclusivement préoccupée par la conservation du monument et sa transmission aux générations futures et celle de l’établissement présentée par les agents de l’État comme s’intéressant principalement aux publics d’aujourd’hui et insuffisamment sensible à l’impératif de conservation. »

La maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments historiques affectés au ministère de la culture, qui n’étaient pas affectés au CMN, relevait en région des services déconcentrés de l’État, SDAP et DRAC.

La situation était particulièrement complexe en Ile-de-France, où intervenaient pas moins de trois opérateurs.

La DRAC, dont les prérogatives avaient progressivement été réduites, intervenait sur les quatre cathédrales que compte la région, sur les sites archéologiques et sur certains monuments nationaux affectés au CMN.

Le Service national des travaux (SNT), service à compétence nationale créé par le décret n° 90-13 du 3 janvier 1990, qui avait dans un premier temps conduit des opérations dans le domaine des grands projets culturels, s’était progressivement recentré sur les travaux de restauration des monuments historiques et sur les travaux de rénovation, de mise en conformité technique et d’aménagement à réaliser sur le patrimoine immobilier du ministère de la culture en Ile-de-France, dont le périmètre avait été stabilisé par arrêté en 2002.

Enfin, intervenait l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturel (EMOC), héritier direct de l’établissement public du Grand Louvre et de la mission interministérielle des grands travaux. Créé en 1998, il avait pour mission d’assurer, à la demande et pour le compte de l’État, tout ou partie des attributions du maître d’ouvrage sur les opérations de construction, d’aménagement, de réhabilitation de gros entretien ou de réutilisation d’immeubles appartenant à l’État et présentant un intérêt culturel. Il pouvait également se voir confier la réalisation d’études préalables à ces opérations pour le compte d’autres maîtres d’ouvrage et assister ces derniers dans la constitution de dossier et la mise en œuvre de procédures spécifiques comme les partenariats publics-privés.

La question du partage des opérations entre le SNT et l’EMOC s’était donc posée dès 1998. C’est en 2002 qu’a eu lieu la répartition des tâches : à l’EMOC, les opérations supérieures à 10 millions d’euros impliquant des constructions neuves (écoles d’architecture, centre national de la danse de Pantin…) ou des restructurations lourdes (immeuble des Bons Enfants du ministère de la culture, Cinémathèque…) ; au SNT, les opérations relevant davantage de la restauration sur des palais nationaux ou des monuments historiques.

Mais la coexistence de l’EMOC et du SNT n’allait pas sans soulever des difficultés : la réalisation concomitante, sur un même bâtiment, de travaux d’aménagement intérieur et de restauration architecturale avait parfois conduit à faire appel à la fois au SNT et à l’EMOC, sans qu’aucune structure ne soit chargée de la coordination de leurs interventions : ce fut ainsi le cas au Palais de Chaillot, lors de l’aménagement de la Cité de l’architecture et du patrimoine, ou sur le quadrilatère Richelieu de la Bibliothèque nationale de France.

Comme le souligne le rapport précité de Jean-Paul Godderidge et Catherine de Salins, cette concurrence, parfois entretenue par le ministère, avait vocation à s’exacerber. Par ailleurs, la réduction des dépenses de l’État a limité la possibilité de lancer de nouveaux grands projets sur les seuls financements publics et les opérateurs se sont trouvés marginalisés par le développement de la maîtrise d’ouvrage au sein de certains grands établissements publics comme le Louvre ou le musée du Quai Branly.

Enfin, la Cour des comptes, dans son rapport public de 2007, L’organisation des grands chantiers culturels : un paysage institutionnel à redessiner, avait pointé une dérive du coût des travaux et des délais de réalisation confiés à l’EMOC. Cette dérive, qui pouvait s’expliquer par la gratuité de ses interventions, laquelle privait l’État d’instrument de sanctions, tenait également à la faiblesse du pilotage du ministère de la culture : depuis 1990, la direction du patrimoine et de l’architecture, à travers sa sous direction des constructions publiques, n’assurait plus le rôle de « vigie » de la conduite opérationnelle des travaux, chaque direction étant devenue directement responsable de ses propres opérations.

L’article L. 621-29-2 du code du patrimoine, issu de l’ordonnance n° 2005-1128 du 8 septembre 2005, affirme désormais les prérogatives du propriétaire pour assurer la maîtrise d’ouvrage des travaux de restauration des monuments historiques.

Cette même ordonnance a également introduit le principe d’une assistance gratuite ou payante pouvant être apportée aux propriétaires par les services de l’État. Comme le soulignaient les auteurs du rapport d’audit d’avril 2006 sur la modernisation et la rationalisation de la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre sur les monuments historiques (3), « en les laissant sans assistance, le risque est double : ils peuvent décider de travaux qui ne sont pas les plus nécessaires, ce qui peut provoquer des difficultés au moment de l’autorisation ou même des dommages au monument, ou décider de s’en remettre exclusivement au maître d’œuvre, ce qui peut entraîner des dépenses excessives ».

L’article L. 621-29-2 permet donc aux services de l’État d’assurer, à titre gratuit, des missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage, lorsque le propriétaire ne dispose pas, du fait de la faiblesse de ses ressources ou de la complexité de l’opération, des moyens d’assurer seul sa mission de maître d’ouvrage. Dans certaines conditions, des prestations d’assistance à maîtrise d’ouvrage peuvent également être assurées à titre payant par les services de l’État. Un dispositif parallèle est prévu par l’article L. 622-27 pour les travaux de restauration des objets et orgues classés.

Toutes les dispositions de l’ordonnance du 8 septembre 2005 sont entrées en vigueur le 1er janvier 2008, mais, dès 2004, des directives avaient été données aux services déconcentrés du ministère de la culture et de la communication pour ne plus assurer la maîtrise d’ouvrage sur de nouvelles opérations de restauration de monuments dont l’État n’était pas propriétaire. Les opérations sous maîtrise d’ouvrage de l’État se sont donc terminées, à quelques exceptions près, à la fin de 2009.

Dans la continuité de l’ordonnance de 2005, le transfert de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments nationaux est intervenu au profit du Centre des monuments nationaux (CMN) à la faveur de l’article 48 de la loi de finances pour 2007 et de la modification de ses statuts par le décret du 6 avril 2007.

La réforme de la maîtrise d’ouvrage a été complétée par l’adoption d’un nouveau statut des ACMH. Le décret n° 2007-1405 du 28 septembre 2007 portant statut des architectes en chef des monuments historiques et adaptation au droit communautaire des règles applicables à la restauration des immeubles classés a apporté deux modifications importantes à ce statut.

Si le plan national pour le patrimoine prévoyait bien une réforme de la maîtrise d’œuvre, celle-ci a été rendue d’autant plus nécessaire que la France a fait l’objet d’une mise en demeure de la Commission européenne en avril 2004, qui dénonçait l’absence d’ouverture du concours des ACMH aux ressortissants communautaires et l’excessive restriction au droit de la concurrence que constituait ce concours pour l’accès à la maîtrise d’œuvre des travaux sur les monuments classés.

La réforme a donc introduit une mise en concurrence entre ACMH et autres architectes ressortissants d’un État membre de l’Union européenne, ainsi qu’avec des architectes français, pour la maîtrise d’œuvre sur les travaux de restauration de monuments n’appartenant pas à l’État. Notons que chaque ACMH continue de se voir affecter, par arrêté, un ou des monuments historiques ou une circonscription territoriale. Il est chargé, dans cette circonscription et pour ces monuments, d’une mission générale de conseil et de surveillance de l’état de l’ensemble des monuments.

Lorsque les monuments appartiennent à l’État, l’ACMH conserve le monopole de la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration, y compris lorsque ces monuments ont été remis en dotation à un établissement public.

En ce qui concerne les monuments appartenant à des propriétaires privés et publics autres que l’État, ceux-ci peuvent donc désormais soit recourir à un ACMH, soit faire appel à un architecte établi dans un État membre de la Communauté européenne et de l’Espace économique européen pourvu que celui-ci puisse justifier d’une qualification et d’une expérience professionnelle équivalentes à celles d’un architecte en chef des monuments historiques, ou bien encore recourir à un architecte français justifiant d’une qualification et d’une expérience en matière de restauration.

Précisons que si les propriétaires décident d’avoir recours à un ACMH, ils ne sont donc plus tenus de recourir à celui qui est territorialement compétent. La maîtrise d’œuvre exercée dans le cadre du libre choix par le propriétaire relève pour l’architecte en chef des monuments historiques de son activité libérale et privée, et non de sa mission de fonctionnaire.

Enfin, jusqu’à entrée en vigueur de la réforme le propriétaire d’un édifice classé pouvait bénéficier d’une maîtrise d’œuvre gratuite de l’État pour les travaux de réparation ordinaire à engager sur son immeuble. Cette maîtrise d’œuvre était assurée par l’ABF. Depuis ce recours est strictement encadré. Sur demande du propriétaire ou de l’affectataire domanial et sur décision du préfet de région, l’ABF peut toutefois assurer la maîtrise d’œuvre de ces travaux sous réserve que soit établie, soit la situation de péril pour les monuments ou de danger imminent pour les personnes, soit la carence de l’offre privée ou publique. Cette carence ne peut être établie, pour les personnes soumises au code des marchés publics, qu’après mise en œuvre des procédures de publicité et de concurrence prévues par ces textes et selon les modalités qu’ils prévoient.

Suivant le même principe, le recours à l’architecte en chef des monuments historiques territorialement compétent peut être sollicité pour assurer la maîtrise d’œuvre des travaux sur les monuments historiques classés n’appartenant pas à l’État, lorsqu’aucun maître d’œuvre n’a pu être retenu par le maître d’ouvrage. La situation de carence de l’offre doit être établie suivant les mêmes modalités.

Dans les faits, ces dispositions sont essentiellement destinées à assurer une maîtrise d’œuvre pour des opérations qui, par la faiblesse de leur montant, n’ont pas permis d’attirer des prestataires privés.

La maîtrise d’œuvre des monuments historiques classés après la réforme :

 

Réparation

Restauration

État propriétaire

– ABF ;

– pour les immeubles remis en dotation aux établissements publics, possibilité de confier la maîtrise d’ouvrage à l’architecte urbaniste (spécialité patrimoine)

– monuments affectés à d’autres ministères que le ministère de la culture, possibilité de confier la maîtrise d’ouvrage à l’architecte fonctionnaire titulaire du diplôme de spécialisation et d’approfondissement en architecture mention « architecture et patrimoine ».

– ACMH territorialement compétent.

Autres propriétaires

– Architecte titulaire du diplôme de spécialisation et d’approfondissement en architecture mention « architecture et patrimoine » ;

– Possibilité de demander au préfet d’autoriser l’ABF à exercer la maîtrise d’ouvrage en cas de carence de l’offre.

– ACMH, indépendamment de sa circonscription, ou architecte établi dans un État membre de la Communauté européenne et de l’Espace économique européen justifiant d’une qualification et d’une expérience professionnelle équivalentes, ou architecte français justifiant d’une qualification et d’une expérience en matière de restauration ;

– En cas de carence, possibilité de recourir à l’ACMH territorialement, compétent.

Le Conseil de modernisation des politiques publiques du 11 juin 2008 a décidé le rapprochement du SNT et de l’EMOC.

La voie d’une modification du décret statutaire de l’EMOC a été retenue pour la mise en œuvre de la fusion. Elle porte, pour l’essentiel, sur la dénomination de l’établissement, ses missions, le cadre juridique dans lequel celles-ci sont exercées et sa gouvernance. L’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) a ainsi été créé par le décret n° 2010-818 du 14 juillet 2010.

La mise en place effective de l’OPPIC est intervenue dès la publication du décret : son premier conseil d’administration s’est réuni le 21 juillet 2010, soit le lendemain de celle-ci, pour arrêter le budget et approuver le dispositif contractuel par lequel le ministère a délégué à l’OPPIC la maîtrise d’ouvrage des opérations antérieurement gérées par le SNT.

Son décret statutaire dispose qu’il a pour mission, pour le compte de l’État ou des établissements publics nationaux :

« 1° De réaliser toute étude et analyse préalable relatives :

a) Aux investissements immobiliers du ministère chargé de la culture ou des établissements publics placés sous sa tutelle ;

b) À l’entretien et à la mise en valeur du patrimoine immobilier mis à disposition de ce ministère ou de ces établissements publics, qu’il appartienne à l’État ou que l’État détienne sur lui un droit réel ;

2° D’assurer la réalisation d’opérations de construction, de restauration, de réhabilitation, d’aménagement ou de maintenance de ces immeubles ;

3° De mener à bien toute mission d’assistance et de conseil dans le domaine de la gestion et de la mise en valeur de ces immeubles ;

4° De participer à l’organisation de cérémonies nationales et au transfert au Panthéon de cendres illustres ;

5° À titre accessoire, d’accomplir pour d’autres ministères ou pour les établissements publics placés sous leur tutelle les missions prévues aux 1°, 2° et 3°. »

Le décret dispose également que l’OPPIC peut, « à titre accessoire et onéreux, […] accomplir les missions mentionnées aux 1°, 2° et 3° du I pour le compte des collectivités territoriales, de leurs établissements publics ou d’autres personnes publiques ». Lors de son audition, le président de l’OPPIC, M. Christophe Vallet, a indiqué que l’OPPIC ne faisait pas usage de cette faculté, ne souhaitant pas s’engager dans une concurrence avec les opérateurs privés.

Le plafond d’emploi de l’OPPIC a été fixé, pour 2010, à 114 équivalents temps plein (ETP), à comparer à la somme des 76 emplois ouverts à l’EMOC et des 46 ouverts au SNT, soit 122 ETP.

La plupart des agents du SNT n’ont pas souhaité rejoindre l’OPPIC et entre l’annonce de la fusion et la création du nouvel établissement, l’État s’est efforcé de gérer au mieux l’évolution de la carrière de ces agents publics. Un suivi individuel a été mis en œuvre qui a permis de trouver des solutions conformes aux vœux des agents dans les trois quarts des cas.

Dans le même temps, l’organisation du ministère de la culture a été modifiée afin de renforcer le pilotage des opérations d’investissement.

Un comité des investissements a été créé auprès du secrétariat général du ministère, sans que les éléments transmis à la rapporteure par ce dernier permettent toutefois de décrire ses compétences et son fonctionnement. Un département de la maîtrise d’ouvrage, de la sécurité et de la sûreté a également été créé au sein de la direction générale des patrimoines : il intervient à la demande des services maîtres d’ouvrage tant en administration centrale qu’en administration déconcentrée sur toute question touchant à la sécurité, à la sûreté, au développement durable ou à l’accessibilité des handicapés.

Il peut être également sollicité par le directeur général des patrimoines, en matière de méthodologie de projet ou de démarche qualitative, ainsi que sur tous les projets architecturaux conduits ou accompagnés par la direction générale des patrimoines.

Actuellement, compte tenu des moyens humains et des compétences techniques dont il dispose, le département est prioritairement orienté sur la prévention et le conseil en matière de sécurité et de sûreté, et sur les questions de sensibilisation et de formation à l’accessibilité handicapés.

Par ailleurs, en liaison avec le secrétariat général du ministère de la culture et de la communication, il prépare au titre de la direction générale des patrimoines, les réunions de la Commission ministérielle des projets immobiliers (CMPI).

Créée pour améliorer le pilotage de la politique immobilière du ministère, la CMPI a pour objectif d’apporter au ministre et à son cabinet une analyse régulière et actualisée des grandes opérations immobilières d’un montant supérieur à 20 millions d’euros afin, notamment, d’éclairer les arbitrages qui doivent être rendus lors des étapes de validation de ces projets par le ministre et de prévenir tout risque pouvant toucher une opération en cours de conception ou de réalisation.

Ainsi, la CMPI est systématiquement consultée avant la validation des programmes architecturaux et techniques des opérations, au moment de la désignation de leurs maîtres d’œuvre et en phase de conception des études d’avant-projets préalables au dépôt des dossiers de permis de construire.

Organe collégial consultatif, elle permet également au ministère de disposer d’une instance habilitée à définir une doctrine cohérente et une pratique harmonisée en matière d’exercice de la maîtrise d’ouvrage, à l’intention des différents maîtres d’ouvrage du ministère.

Présidée par le secrétaire général du ministère, elle comprend des membres de l’administration centrale représentant les différentes directions générales, le haut fonctionnaire au développement durable ainsi qu’un représentant de la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques.

En 2010, cette instance s’est réunie à quatre reprises pour examiner un certain nombre de grands projets tels que la rénovation du musée Picasso, la création du MUCEM à Marseille et du centre de recherche, de restauration et de conservation des patrimoines de Cergy-Pontoise, l’aménagement de la médiathèque de l’architecture et du patrimoine à Charenton-le-Pont, ou encore celui du centre des archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine.

La dévolution de la maîtrise d’ouvrage aux propriétaires privés d’édifices classés d’une part, et l’aménagement d’une liberté de choix du maître d’œuvre, d’autre part, appelaient une évolution du rôle de l’État qui, de prescripteur, devait concentrer son intervention sur le contrôle des travaux. Ce changement d’orientation s’est traduit par le renforcement de sa compétence de contrôle scientifique et technique (CST), facilitée par la fusion, au niveau déconcentré, entre les SDAP et les DRAC.

Le contrôle scientifique et technique est une mission régalienne, qui a toujours incombé à l’État et qui n’est donc pas nouvelle. Elle est assurée à titre gratuit et son bénéfice est ouvert à tout propriétaire.

Or, comme le rappelait le rapport précité de Daniel Godderidge et Catherine de Salins, « l’exercice par l’État de sa mission de conseil auprès des propriétaires de monuments historiques pour les aider tout au long de la réalisation d’une opération de travaux dans le cadre du contrôle scientifique et technique nécessite de multiples compétences - architecturales, historiques, scientifiques, économiques, techniques, etc. - impliquant de nombreux intervenants. Or ces compétences sont aujourd’hui dispersées. Certaines existent dans les DRAC : compétences documentaires dans les centres d’information et de documentation (CID), compétences archéologiques dans les services régionaux de l’archéologie (SRA), compétences techniques, économiques et juridiques dans les conservations régionales des monuments historiques (CRMH), compétences scientifiques dans les domaines de l’architecture, de l’histoire de l’art, des objets et des décors chez les conservateurs du patrimoine. Elles sont également largement présentes dans les SDAP : compétences économiques et techniques chez les ingénieurs et les techniciens des services culturels en poste dans ces services, mais aussi compétence architecturale et de maîtrise d’œuvre chez les Architectes des bâtiments de France, qui nous semble être essentielle : un monument historique est en effet une œuvre architecturale, avant d’être un objet scientifique ou artistique, et l’architecte, par sa formation et par sa pratique professionnelle, possède à la fois les capacités d’analyse et de synthèse des différentes données d’une opération de travaux qui sont nécessaires à la mise au point du programme des travaux, et au suivi de leur réalisation en phase d’études et de travaux. »

L’intégration des SDAP dans les DRAC constituait donc, selon les termes de ce rapport, « un enjeu stratégique » du point de vue de la mise en œuvre du contrôle scientifique et technique des travaux sur le patrimoine monumental. Elle est désormais effective, depuis la parution du décret n° 2010-633 du 8 juin 2010, les SDAP devenant des unités territoriales des DRAC.

L’article R. 621-18 du code du patrimoine dispose que le contrôle scientifique et technique assuré par les services de l’État chargés des monuments historiques poursuit deux objectifs : d’une part vérifier périodiquement l’état des monuments historiques et les conditions de leur conservation de façon que leur pérennité soit assurée, d’autre part vérifier et garantir que les interventions prévues sont compatibles avec le statut de monument historique reconnu à ces immeubles, qu’ils soient inscrits ou classés.

La réforme du CST a permis d’accompagner la réforme de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments historiques classés. Comme l’a indiqué l’association Demeure Historique lors de son audition, elle construit un cadre relationnel nouveau, entre le propriétaire du monument et l’État.

Elle introduit ainsi une série de garanties tant pour le propriétaire que pour l’État : l’article R. 621-21 du code précité dispose notamment que « lorsque le propriétaire […] fait part au préfet de région de son intention de réaliser un projet de travaux sur un immeuble classé, le préfet de région met à sa disposition l’état des connaissances dont il dispose sur l’immeuble en cause et lui indique les contraintes réglementaires, architecturales et techniques que le projet devra respecter. Le préfet de région lui précise, en fonction de la nature, de l’importance et de la complexité des travaux envisagés, les études scientifiques et techniques qui devront être réalisées préalablement à la détermination du programme d’opération. Le préfet de région lui indique également les compétences et expériences que devront présenter les architectes candidats à la maîtrise d’œuvre de ces travaux […] ».

En outre, la réforme instaure auprès des propriétaires un « guichet de proximité » avec les Services territoriaux de l’architecture et du patrimoine placés sous l’autorité des DRAC. Comme l’indique M. Pierre Cazenave, conservateur régional des monuments historiques à la DRAC de Poitou Charente, dans une note adressée à la rapporteure, « les ABF ont souvent, de par leur mission de terrain, une connaissance de proximité des maîtres d'ouvrage. Ils assurent par ailleurs la tenue du fichier sanitaire des monuments historiques de leur département d’affectation. La réforme consolide cette position de proximité en plaçant les dépôts de toutes les demandes d’autorisation à leur niveau. Ils réalisent une pré-instruction des dossiers, puis les transmettent au niveau régional qui dispose des moyens d’expertise nécessaires à l’élaboration de la proposition d’autorisation présentée aux préfets de régions. »

Enfin, le rapprochement des SDAP et des DRAC a permis de renforcer la cohérence de l’organisation administrative des services déconcentrés du ministère de la culture : comme le notait au cours de son audition M. Jean-Paul Ollivier, directeur régional des affaires culturelles de Champagne-Ardenne, la plupart des DRAC ont mis en place des réunions périodiques, qui dans sa région prennent la forme de conférences régionales du patrimoine regroupant les ABF, les techniciens de la CRMH, les services documentaires, dans le but d’organiser l’échange d’informations et d’établir une doctrine en matière d’études préalables ou d’autorisations de travaux.

Dans son principe et comme l’a indiqué lors de son audition M. Jean-Paul Godderidge, la réforme du contrôle scientifique et technique fait l’objet d’une appréciation unanimement positive de la part de l’ensemble des parties prenantes.

II.- UNE TRANSITION DIFFICILE, UNE VIGILANCE NÉCESSAIRE POUR GARANTIR LE SUCCÈS D’UNE RÉFORME LÉGITIME

Nul ne conteste désormais le bien fondé de la réforme d’un système qui présentait de nombreuses limites. Il est délicat d’en tirer un bilan définitif compte tenu du fait qu’elle est extrêmement récente. La rapporteure s’y essaie toutefois, en soulignant qu’il est impératif de laisser la réforme prospérer, non seulement afin d’en appréhender pleinement les conséquences, mais aussi parce qu’elle a occasionné de grands bouleversements que les propriétaires et l’administration doivent pouvoir s’approprier dans la sérénité.

Le transfert de la maîtrise d’ouvrage aux propriétaires privés, annoncé dès 2003, anticipé dans les DRAC dès 2004, celles-ci cessant de lancer de nouveaux chantiers en maîtrise d’ouvrage directe, a été décidé par l’ordonnance du 8 septembre 2005, pour finalement entrer en vigueur en janvier 2008.

Les conditions étaient donc réunies pour que les mesures d’accompagnement soient prises suffisamment en amont. Or de nombreux retards ont été pris dans l’édiction de ces mesures

Ce n’est qu’en juin 2009 qu’ont été pris les décrets précisant les conditions d’intervention de l’assistance à maîtrise d’ouvrage, la mise en œuvre du contrôle scientifique et technique ou le statut des ACMH.

Le vade-mecum de la maîtrise d’ouvrage, dont le rapport Bady précité faisait une condition subordonnant l’entrée en vigueur de la réforme, n’est toujours pas publié, même si la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques a consacré un numéro spécial de sa revue Médiation en juin 2010 à la maîtrise d’ouvrage publique et aux opérations de travaux sur les monuments historiques, et que les DRAC s’efforcent de rédiger des guides à l’attention des propriétaires. Le calendrier de publication du vade-mecum va toutefois permettre d’intégrer la modification des dispositions législatives relatives aux espaces protégés, ce qui devrait permettre de fournir aux propriétaires une information plus complète.

Ce n’est que récemment que l’État a modifié les règles de versement de ses subventions, afin d’augmenter le montant des avances susceptibles d’être versées au maître d’ouvrage (4). En effet, la dévolution de la maîtrise d’ouvrage au propriétaire aurait pu mettre les propriétaires en difficulté d’un point de vue financier, puisque ces derniers doivent désormais faire l’avance du coût des travaux, les subventions n’étant versées que sur service fait.

De plus, le plan national pour le patrimoine avait prévu une augmentation de 50 % du nombre des ACMH, afin de rendre effective la liberté de choix du maître d’œuvre consentie au propriétaire de monuments classés : la réforme, conformément aux recommandations établies dans le cadre de ce plan, prévoit en effet de déroger au monopole de l’ACMH territorialement compétent sur la maîtrise d’ouvrage des travaux de restauration sur les monuments classés pour les propriétaires autres que l’État, et la possibilité de choisir un autre ACMH. Or à ce jour, on ne compte que 47 ACMH alors que les effectifs atteignaient une soixantaine en 2003. Il est vrai que le plan n’avait pas anticipé l’ouverture à la concurrence des architectes ressortissants d’un État membre de la Communauté européenne ainsi qu’à celle des architectes du patrimoine au sens large.

Comme le note le rapport de Daniel Godderidge et Catherine de Salins précité, « cette situation transitoire a conduit dans certaines régions, lorsque les propriétaires ont souhaité malgré tout aller de l’avant, à mesurer concrètement les difficultés que soulèvent le nouveau régime et si des solutions ont été trouvées localement, avec ou sans l’aide des services de l’État, c’est au prix de sérieuses prises de risque juridique. »

C’est également avec retard que le décret de création de l’OPPIC a finalement été pris en juillet 2010, quand il était attendu pour le mois de janvier. Le décalage avec l’annonce de la réforme, intervenue en 2008, a exercé un effet démobilisateur, notamment sur les agents du SNT, dont les effectifs se sont rapidement « dégarnis », dans des conditions ne permettant plus d’assurer les missions qui lui étaient confiées, la consommation des crédits qui lui étaient alloués et partant le paiement des entreprises.

C’est le 22 juillet 2010 qu’une première convention annuelle de programmation a été conclue entre le ministère de la culture et l’OPPIC, afin que celui-ci reprenne les opérations lancées par le SNT et non encore achevées, ainsi que certaines opérations nouvelles.

La mise en place rapide des crédits de paiement destinés aux opérations « héritées » du SNT a permis une reprise des paiements à partir du mois d’août, le nouvel établissement rattrapant les retards accumulés par le SNT au cours du premier semestre.

L’envoi à l’OPPIC des autorisations d’engagement pour l’engagement de nouvelles opérations a par ailleurs été retardé par l’impossibilité technique de transférer des AE déjà affectées ou engagées par le SNT. Il a fallu mobiliser temporairement des AE nouvelles pour permettre l’envoi à l’OPPIC des crédits de paiement nécessaires au paiement des opérations en cours. La disponibilité de ces AE nouvelles n’a été retrouvée qu’en fin d’exercice, par l’inscription en loi de finances rectificatives d’un volant d’AE « techniques » rouvrant sur le budget du ministère de la culture les AE déjà engagées par le SNT pour les opérations en cours reprises par l’OPPIC.

Le transfert de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments nationaux est intervenu au profit du Centre des monuments nationaux (CMN) à la faveur de l’article 48 de la loi de finances pour 2007 et de la modification de ses statuts par le décret du 6 avril 2007. Mais cette réforme n’a pas été anticipée, puisque la direction de la maîtrise d’ouvrage n’a pu être créée qu’en juin 2009 et ses effectifs complétés qu’à la fin de l’année 2010. La transition vers l’exercice de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments nationaux par le CMN, et non plus par les DRAC et le SNT, a également été compliquée par le « téléscopage » de cette réforme avec celle du SNT et de l’EMOC, annoncée en 2008.

L’impossibilité pour le CMN d’exercer la compétence de maîtrise d’ouvrage transférée en 2007, faute d’équipes, a donné lieu à un système particulièrement complexe permettant d’assurer la poursuite des travaux nécessaires : la subvention annuelle versée par l’État au CMN a dû être reversée par ce dernier, pour l’essentiel sous forme de fonds de concours, en fonction des programmations de travaux. Des conventions de mandat ont été passées entre le CMN et l’État afin de permettre aux DRAC et au SNT de mettre en œuvre les nouvelles opérations sur les monuments nationaux. Le processus s’est renouvelé en 2009. La complexité du système a considérablement compliqué la consommation des crédits, ce qui explique d’ailleurs la constitution à partir de 2007 de l’important fonds de roulement du CMN, lequel va d’ailleurs permettre notamment les travaux de restauration extrêmement lourds du Panthéon.

La situation a de surcroît été compliquée par la décision de confier au CMN, en sus de la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments nationaux qui lui étaient remis en dotation, la maîtrise d’ouvrage sur d’autres monuments du ministère de la culture. L’incertitude sur les moyens matériels du CMN et sa capacité à assumer sa nouvelle mission s’est donc doublée d’une incertitude sue le périmètre de ses interventions. Cette incertitude a été finalement levée en 2008, le ministère de la culture assumant de nouveau la maîtrise d’ouvrage sur ses propres monuments.

Enfin, la mise en œuvre de la réforme du CMN a été perturbée par l’annonce en 2008 de la fusion entre le SNT et l’EMOC. Comme nous l’avons vu supra, le SNT a souffert d’une relative « hémorragie » de ses effectifs, de sorte que la structure n’était plus en mesure de transférer les marchés en cours d’exécution ; des ordres de service ont été adressés aux entreprises pour arrêter les chantiers en cours. Trois chantiers ont été bloqués et huit marchés d’étude et de diagnostic ont été résiliés.

À la fin de l’année 2009, 43 agents avaient rejoint la direction de la maîtrise d’ouvrage créée en juin. Les postes restant vacants par rapport à l’effectif « cible » de 58 ETP ont fait l’objet d’une publication dans le Moniteur des travaux publics et du bâtiment, en février 2010, ouverts désormais à l’ensemble des candidats intéressés et non plus seulement aux seuls fonctionnaires du ministère de la culture. Douze postes essentiellement techniques ont été pourvus au long de l’année 2010.

Avec trois postes vacants au 1er janvier 2011, la direction de la maîtrise d’ouvrage est finalement opérationnelle.

Le succès de la réforme repose notamment sur deux piliers essentiels : le contrôle scientifique et technique et l’assistance à maîtrise d’ouvrage.

 L’assistance à maîtrise d’ouvrage

En application de l’article L. 621-29-2 du code du patrimoine, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 8 septembre 2005, les services de l’État peuvent apporter à titre gratuit une assistance à la maîtrise d’ouvrage (AMO) aux propriétaires de monuments historiques et des affectataires domaniaux de monuments. Les propriétaires ne satisfaisant pas aux critères d’une assistance gratuite peuvent solliciter une assistance payante, sous réserve qu’ils établissent la carence de l’offre privée ou publique. Compte tenu de la complexité pour les propriétaires à assumer la maîtrise d’ouvrage, la mise en place d’une assistance à la maîtrise d’ouvrage par les services de l’État permet d’officialiser et d’encadrer l’aide technique et administrative que les services des DRAC apportent pour la réalisation de travaux sur les monuments n’appartenant pas à l’État.

Notons tout d’abord que l’assistance payante n’a jamais été mise en œuvre. Le propriétaire doit en effet avoir établi la carence de l’offre privée, il aura donc fait préalablement appel à la concurrence pour présenter la preuve de cet appel et de son caractère infructueux. Or non seulement cette offre privée n’a pas émergé, mais les DRAC sont dans l’incapacité de proposer une offre alternative.

En effet, s’il est économiquement viable pour un bureau d’étude de proposer une mission d’assistance pour une opération d’envergure, en revanche il ne sera pas en capacité d’assurer ce service pour des opérations dont les montants seront limités à quelques dizaines voire centaines de milliers d’euros, dans la mesure où leur conduite administrative nécessitera la mise en œuvre de moyens équivalents à ceux d’une grosse opération. D’après la note remise à la rapporteure par M. Pierre Cazenave, conservateur régional des monuments historiques à la DRAC de Poitou-Charentes, dans cette région « le montant moyen annuel d’une opération de restauration, si l’on met de côté les grosses restructurations, ne dépasse pas 150 000 euros Si l’on applique un barème de rémunération pour l’assistance à maîtrise d’ouvrage de 3,5 % (taux moyen que l’on peut connaître pour ce type de mission), le montant d’honoraire brut attendu pour ce type de mission sera de 5 250 euros. »

L’offre existante reste donc cantonnée aux grosses opérations, contrairement à ce qui avait été envisagé lors de la mise en œuvre de la réforme. Or, les services de l’État ne disposent plus des moyens humains leur permettant de répondre à la carence de l’assistance privée par une assistance payante de l’État.

S’agissant de l’assistance à maîtrise d’ouvrage gratuite, elle doit en principe être formalisée par une convention d’assistance à maîtrise d’ouvrage, mais ce n’est pas encore systématique. Certains propriétaires sont en effet très demandeurs d’informations et de conseils mais encore réticents au conventionnement. La mise en place de conventions est surtout une lourde charge de travail supplémentaire pour des services qui doivent déjà assurer leur nouvelle mission de contrôle scientifique et technique, et qui sont soumis à la règle de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Ainsi, 55 conventions d’AMO ont été conclues sur l’ensemble du territoire dont 46 ayant pour motif l’insuffisance des ressources du demandeur alors que seulement 9 ont été demandées en raison d’une trop grande complexité de l’opération. Ces conventions sont le plus souvent conclues avec des collectivités et très rarement avec des propriétaires privés.

 L’assistance à maîtrise d’ouvrage informelle : le CST

Dans les faits l’assistance gratuite de l’État n’est donc engagée que dans des situations d’extrême complexité associée à une vraie carence de l’offre privée. Les services de l’État sont très vigilants quant à la stricte observation de cette règle du fait d’une certaine tension sur les effectifs.

L’assistance à maîtrise d’ouvrage intervient en réalité de manière informelle à travers le contrôle scientifique et technique, en particulier dans sa phase « amont », au stade des études documentaires et techniques préparatoires ou lorsque les DRAC, lorsqu’il s’agit d’un édifice classé, indiquent au maître d’ouvrage les compétences requises pour le choix de la maîtrise d’œuvre. Comme l’a en effet indiqué M. Jean-Paul Godderidge lors de son audition, contrôler quelqu’un équivaut à lui dire comment mieux faire : le CST est donc une assistance à maîtrise d’ouvrage qui ne dit pas son nom.

 La nécessité de ne pas fragiliser les DRAC

L’ensemble des personnes auditionnées par la rapporteure ont souligné l’importance que revêt l’effectivité de ce contrôle scientifique et technique, tant pour guider les propriétaires dans l’exercice de leurs nouvelles prérogatives que pour s’assurer que, dans le cadre de la réforme concomitante de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre, l’intégrité de notre patrimoine protégé est garantie. Les DRAC conservent une compétence, liée à l’exercice de la maîtrise d’ouvrage sur les monuments classés de l’État certes peu nombreux, mais importants et prestigieux comme les cathédrales et les sites archéologiques, qui leur confère une légitimité irremplaçable pour garantir au plus près du terrain l’effectivité de la politique patrimoniale de l’État.

Or, l’ensemble des personnes auditionnées ont également fait valoir qu’il est non seulement impératif de ne pas procéder à de nouvelles réductions d’effectifs dans les DRAC, mais qu’il serait sans doute nécessaire de détendre la contrainte qui pèse sur elles, en particulier dans le domaine des corps techniques, ingénieurs des services culturels et du patrimoine et technicien des services culturels et des bâtiments de France. M. Jean-Paul Godderidge a ainsi souligné qu’aucun concours d’ingénieur n’a été organisé depuis trois ans.

Si la réforme a garanti, on l’a vu, à travers la mise en œuvre du contrôle scientifique et technique de l’État, un suivi en amont des maîtres d'ouvrage occasionnels et, au travers de l’assistance gratuite, la garantie d’un appui technique pour les opérations les plus sensibles, la majorité des opérations sont engagées par des maîtres dont les capacités d’administration sont très faibles.

Or, il leur appartient de réunir les financements de leur opération, de sélectionner une équipe de maîtrise d’œuvre, de conduire des appels d’offres, de choisir des variantes de travaux, de vérifier et d’acquitter des factures, de demander le versement des subventions, etc.

La complexité de cette conduite d’opération pour le maître d’ouvrage occasionne des difficultés de prévisions de consommation des crédits de paiement, tant pour l’État que pour les partenaires du financement croisé que sont les régions et les départements.

Une autre difficulté pouvant être identifiée concerne la disparition du facteur de « lissage budgétaire » qu’induisait le portage financier par l’État quand il exerçait la maîtrise d’ouvrage antérieurement à la réforme de 2005. L’État était à l’origine de l’engagement de l’opération, en assurait le préfinancement et organisait la réunion des financements croisés.

Désormais, la réunion des financements croisés, dont le montant peut représenter 80 % du coût d’une opération, repose sur le seul propriétaire et commande le démarrage de l’opération. Tout retard pris dans l’engagement d’un partenaire a de ce fait un impact. Il suffit dans la plupart des cas à décaler d’une saison (5) une opération de travaux.

La mesure des effets de la réforme sur le rythme de consommation des crédits devra au demeurant être corrigée des conséquences de la mise en œuvre très difficile du logiciel CHORUS, application informatique partagée par tous les acteurs financiers des services centraux et déconcentrés de l’État et destinée à gérer la dépense, les recettes non fiscales et la comptabilité.

Là encore, la réforme est récente et on ne saurait dresser de bilan trop définitif de ses effets.

L’attention de la rapporteure a tout d’abord été attirée par l’association Patrimoine Environnement sur les conséquences de l’obligation nouvelle pour les propriétaires autres que l’État, notamment les petites communes, de recourir à la maîtrise d’œuvre pour les opérations de réparation sur les immeubles classés dont elles sont propriétaires. Auparavant, l’ABF assumait cette mission gratuitement, et son intervention est désormais exceptionnelle, sur autorisation du préfet. Il conviendra de voir dans quelle mesure les préfets de région auront su se montrer souples dans l’octroi de ces autorisations, afin notamment d’atténuer pour ces petites communes l’impact budgétaire du double transfert de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre.

Par ailleurs, hormis les monuments classés de l’État, pour lesquels les ACMH interviennent en tant que fonctionnaires sur le fondement de leur affectation territoriale, la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration est désormais mise en concurrence entre ACMH et ouverte aux architectes du patrimoine, c’est-à-dire titulaire d’un diplôme de spécialisation et d’approfondissement en architecture et pouvant justifier de 10 ans d’expérience de maîtrise d’œuvre sur des monuments présentant un intérêt patrimonial ou une complexité équivalente à celle d’un monument historique.

Les effets de cette mise en concurrence ne pourront jouer pleinement que dans quelques années puisqu’un régime transitoire a été mis en œuvre afin d’autoriser les ACMH à réaliser la maîtrise d’œuvre des travaux pour lesquels ils ont effectué les études préalables moins de trois ans avant la publication du décret de 2009 : cette mesure avait pour objet d’éviter que les propriétaires ne supportent un surcoût lié à la reprise d’études par un autre architecte.

En tout état de cause, compte tenu de la nature du parc d’édifices dont l’État est le propriétaire, et dont les ACMH ont à assurer les travaux de restauration, ceux-ci disposent de références et d’un savoir faire d’un niveau indéniablement supérieur. Mais comme l’indique la note remise à la rapporteure par M. Pierre Cazenave, conservateur régional des monuments historiques, « la différence de positionnement de l’offre des ACMH et des "architectes du patrimoine" (pour employer un vocable générique), devrait à terme se réduire, lorsqu’il s’agira d’effectuer des travaux de restauration classique ». L’objectif de la réforme ne semble pas dès lors hors de portée.

L’ouverture à la concurrence de la maîtrise d’ouvrage sur les monuments classés appartenant à des propriétaires privés désormais maîtres d’ouvrage, devant faire l’avance des frais et donc sensibles au facteur prix, parallèlement au maintien du monopole des ACMH sur le patrimoine classé de l’État, devra par ailleurs conduire à une certaine vigilance sur la qualité des prestations offertes aux propriétaires privés et sur le prix facturé à l’État et ses établissements publics.

Enfin, comme le soulignait le rapport de Daniel Godderidge et Catherine de Salins, « on ne dira jamais assez combien la bonne réalisation d’une opération sur un monument historique repose sur la qualification des entreprises et de leurs personnels ». Il importe que l’ouverture à la concurrence de la maîtrise d’œuvre et la légitime préoccupation pour le prix des travaux manifestée par les propriétaires maîtres d’ouvrage ne conduise pas à retenir des entreprises ne présentant pas les qualifications requises. La rapporteure ne peut que soutenir les travaux que consacrera l’observatoire de la réforme, mis en place par le ministère de la culture, à la définition d’une certification des entreprises de monuments historiques.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DU MINISTRE

La Commission procède, le 27 octobre 2011, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, sur les crédits pour 2012 de la mission « Culture » (6).

II.- EXAMEN DES CRÉDITS

La Commission examine, au cours de sa séance du mercredi 2 novembre 2011, pour avis, les crédits pour 2012 de la mission « Culture » sur le rapport de Mme Sophie Delong (Patrimoines) et de M. Patrick Bloche (Création ; Transmission des savoirs et démocratisation de la culture).

Mme Sophie Delong, rapporteure pour avis des crédits du programme « Patrimoines ». J’ai choisi de consacrer mon avis au premier bilan que l’on peut tirer de la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques.

Contrairement à une idée reçue, l’État n’est propriétaire que d’un faible nombre de monuments historiques. Sur les 14 000 monuments classés et les 27 000 monuments inscrits, il ne détient que 4 % des édifices protégés, les communes 44 %, notamment les églises construites avant 1905, les propriétaires privés 46 %, les 6 % restants revenant aux autres collectivités publiques.

Jusqu’en 2005, le régime des travaux sur les monuments historiques n’appartenant pas à l’État était le suivant : la maîtrise d’ouvrage n’était pas assurée par les propriétaires, mais par l’État, via les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), tandis que la maîtrise d’œuvre était sous monopole des Architectes en chef des monuments historiques, les ACMH.

Pour les monuments appartenant à l’État, les ACMH disposaient du même monopole pour la maîtrise d’œuvre. La maîtrise d’ouvrage en région était assurée par les DRAC, en Ile-de-France soit par le Service national des travaux (SNT), pour les travaux de restauration, soit par l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC) pour les grands projets culturels. Enfin, lorsque les monuments étaient remis en dotation au Centre des monuments nationaux (CMN), la maîtrise d’ouvrage était assurée par les DRAC, ou, en Ile-de-France, par le SNT.

Ce système présentait de nombreux inconvénients : les propriétaires autres que l’État avaient l’impression d’être dépossédés de leur bien ; au demeurant, s’agissant des collectivités, il paraissait curieux de maintenir la compétence des DRAC sur la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments appartenant à ces collectivités, alors même que le mouvement de décentralisation s’approfondissait. La maîtrise d’ouvrage en Ile-de-France souffrait d’une extrême complexité, le SNT et l’EMOC ayant des domaines de compétence se recouvrant pour partie. Sur un même chantier, ils ont pu intervenir dans le même temps et en parallèle, sans aucune instance de coordination, comme au palais de Chaillot. Pour le CMN, il devenait incohérent de demander à l’établissement d’assurer la présentation des monuments au public sans lui donner la compétence de la maîtrise d’ouvrage sur les travaux de restauration, puisqu’il pouvait prévoir un programme d’activités alors que dans le même temps les DRAC prévoyaient un programme de travaux qui venait télescoper ce projet.

Du côté de la maîtrise d’œuvre, le monopole des ACMH a été contesté par les autorités européennes.

Une réforme de très grande ampleur a donc été mise en œuvre à partir de 2005 et est entrée en vigueur en 2008.

Première modification d’ampleur : les propriétaires autres que l’État assurent seuls la maîtrise d’ouvrage des travaux sur leurs monuments. Pour les travaux d’entretien, ils peuvent avoir recours, pour la maîtrise d’œuvre, à un « architecte du patrimoine », c’est-à-dire un architecte qui, sans être ACMH, a des qualifications spécifiques dans le domaine du patrimoine. Pour la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration, plus lourds, ils peuvent avoir recours à un ACMH ou à un architecte français ou européen présentant des qualifications équivalentes et une expérience suffisante.

Deuxième modification : le CMN devient maître d’ouvrage pour les travaux sur les monuments qui lui sont remis en dotation. Comme pour les autres monuments appartenant à l’État, les ACMH conservent leur monopole sur la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration.

Troisième modification : le SNT et l’EMOC fusionnent au sein d’un nouvel établissement public, l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC). Il est chargé, pour le compte de l’État ou de ses établissements publics, de missions de maîtrise d’ouvrage, mais aussi d’un rôle de conseil, d’assistance et de conduite d’études préalables dans le domaine immobilier.

Quatrième modification : le rôle des DRAC a été repensé. Jusqu’à la réforme, elles avaient un rôle de surveillance des monuments et un rôle de prescripteur des travaux. Désormais, elles continuent à assurer la maîtrise d’ouvrage sur les monuments historiques appartenant à l’État, notamment les cathédrales. Mais pour ce qui concerne les monuments n’appartenant pas à l’État, elles ont désormais une nouvelle mission : le contrôle scientifique et technique. Elles doivent accompagner les propriétaires autres que l’État, leur prodiguer des conseils, et s’assurer que les travaux se déroulent dans des conditions satisfaisantes.

Quel bilan peut-on tirer de cette réforme, que j’ai présentée à grands traits et sur laquelle vous pourrez trouver plus d’éléments dans mon rapport ?

Tout d’abord, la transition a été difficile : le CMN s’est vu transférer la maîtrise d’ouvrage à la fin de 2007. Or il n’avait pas, à cette époque, de département de maîtrise d’ouvrage. L’impossibilité, dans un premier temps, de recourir à des emplois « hors titre 2 », c’est-à-dire de recruter en dehors du seul vivier constitué par les fonctionnaires du ministère de la culture, a ralenti les choses. La direction est opérationnelle depuis le début de cette année, et les choses sont rentrées dans l’ordre.

Dans le même temps, la réforme du SNT et de l’EMOC a été annoncée, ce qui a démobilisé les fonctionnaires du SNT : ce service s’est alors vidé de sa substance, de sorte que le passage de relais n’a pas pu se faire avec le CMN et avec l’OPPIC. Là encore, les choses sont rentrées dans l’ordre.

Enfin, de nombreux textes réglementaires qui devaient permettre la mise en œuvre de la réforme n’ont été pris qu’en 2009. Il en va notamment ainsi du décret sur l’assistance à maîtrise d’ouvrage. Il s’agit en effet d’une compétence pointue et technique, qui requiert une certaine expérience. Pour les petits chantiers, il n’existe pas d’offre privée d’assistance à maîtrise d’ouvrage. Il était donc important que les DRAC puissent accompagner les propriétaires autres que l’État, notamment les petites communes, dans l’exercice de leurs prérogatives.

Après ces quelques mots sur la manière dont s’est déroulée la transition d’un régime à l’autre, quelques remarques sur le nouveau système. Il est trop tôt pour tirer un bilan définitif, surtout après une réforme d’aussi grande ampleur. Le fait que le ministère de la culture ait mis en place un observatoire de la réforme est de mon point de vue une excellente chose. Il conviendra d’être attentif sur plusieurs points.

D’abord, il faudra que les maîtres d’ouvrage privés ne fassent pas primer leur légitime préoccupation pour le coût des travaux sur la qualité de ceux-ci. De la même façon, il faudra veiller à ce que les entreprises spécialisées dans les monuments historiques ne soient pas pénalisées, pour des raisons de coût, au profit des entreprises générales. L’observatoire mis en place par le ministère doit travailler sur la possibilité de mettre en œuvre une certification des entreprises de monuments historiques, c’est une piste intéressante. En outre, il ne faudrait pas que l’ouverture à la concurrence de la maîtrise d’œuvre entraîne un moins-disant sur les prix pour les propriétaires privés, et un rattrapage dans le secteur encore sous monopole, c’est-à-dire pour les travaux de restauration sur les monuments appartenant à l’État. Enfin, il faut absolument que les DRAC aient les moyens d’exercer le contrôle scientifique et technique pour garantir la protection des monuments et l’accompagnement des propriétaires.

Pour conclure, sans revenir sur les aspects budgétaires de ce rapport, que j’ai développés en commission élargie jeudi dernier, je vous demanderai de donner un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Patrimoines ».

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis sur les crédits des programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». En ce qui concerne l’examen des crédits que je rapporte, vous ne serez pas étonnés de l’avis défavorable que j’émets à la suite des considérations que j’ai développées lors de la commission élargie de la semaine dernière.

J’ai consacré la partie thématique de mon avis à un sujet qui était déjà d’actualité l’an passé et qui l’est plus encore cette année, c’est-à-dire le financement du cinéma et de l’audiovisuel par le Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC.

De nombreux collègues investis sur ce sujet seront d’accord avec moi pour affirmer qu’il s’agit d’un modèle unique à préserver. Il s’agit également d’un système vertueux puisque le budget de l’État n’est pas mis à contribution. Ce n’est pas le contribuable qui est sollicité, mais le spectateur, par exemple à travers la taxe spéciale additionnelle, dite TSA, assise sur les entrées en salles de cinéma.

Le financement du cinéma et de l’audiovisuel repose sur deux piliers : le fonds de soutien du CNC et les obligations de diffusion et de production des chaînes de télévision. Il fonctionne sur le fondement d’un principe : le financement de la création par la diffusion. Je me suis intéressé au premier pilier, c’est-à-dire le fonds de soutien du CNC, qui a permis le développement d’un écosystème unique au monde et qui a su évoluer avec le temps.

Le compte de soutien est financé par la TSA, la taxe « vidéo », dont le produit a connu une évolution dynamique grâce, notamment, à la réforme de la chronologie des médias en 2009, et la taxe sur les services de télévision, dite TST.

Ce fonds se décline en soutiens automatiques, soit 60 % du total, et en soutiens sélectifs, soit 40 % de ce fonds. Je souhaite attirer votre attention sur les soutiens automatiques, improprement qualifiés de « rente » par la Mission d’évaluation et de contrôle de notre Assemblée dans son rapport sur le financement des politiques culturelles par des ressources affectées. Il s’agit en réalité d’un soutien redistributif et mutualiste dont la mise en cause pourrait entraîner l’explosion de notre modèle.

Les objectifs assignés au fonds de soutien sont atteints, puisque notre cinéma national a été préservé quand tant d’autres cinémas nationaux ont périclité, et nous bénéficions également d’une production audiovisuelle dynamique. La fréquentation en salles de films d’initiative française représente 36,8 % du total des entrées en 2009, contre 49,7 % pour le cinéma américain. Nous disposons d’un maillage dense de salles de cinéma sur notre territoire, et nous contribuons à la production de films étrangers grâce au Fonds Sud. Quant à l’audiovisuel, nous avons assisté à l’explosion du nombre d’heures produites, du fait notamment du développement de la télévision numérique terrestre. On constate toutefois une crise de la fiction française sur laquelle je reviendrai.

En outre, l’augmentation des recettes du CNC au cours des années récentes a coïncidé avec l’apparition de nouveaux besoins. Cette augmentation des recettes s’explique par la progression dynamique de la TSA et de la taxe vidéo, mais surtout par l’augmentation conséquente du rendement de la TST. Cette dernière hausse tient à l’attitude des opérateurs que nous avions voulu mettre à contribution par la réforme votée à l’unanimité en 2007 : l’assiette de la TST étant à l’origine identique à celle de la TVA à taux réduit, le fait que ces opérateurs aient cherché à accroître cette dernière a eu mécaniquement un effet sur le rendement de la TST.

Ces ressources supplémentaires ont permis de financer le Plan numérique, c’est-à-dire à la fois le financement de la numérisation d’œuvres appartenant à notre patrimoine cinématographique, mais aussi de la numérisation des petites salles de cinéma, dans le cadre de la loi de septembre 2010 sur l’équipement numérique des salles, votée à l’unanimité, et dont notre collègue Michel Herbillon avait été le rapporteur. La numérisation des œuvres intervient en complément des financements octroyés dans le cadre du Grand emprunt.

Ce système vertueux se trouve fragilisé au moment même où il devrait être conforté. Je rappellerai brièvement qu’à la suite de la réforme de la TST en 2001, certains opérateurs, comme Free, pour ne pas le nommer, ont développé des stratégies d’optimisation fiscale destinées à réduire le montant de leur contribution. J’ajoute que le rapporteur général du budget du Sénat d’alors, M. Philippe Marini, avait en outre envisagé d’opérer sur les ressources du CNC un prélèvement de 130 millions d’euros, somme qui avait pu être ramenée à 20 millions d’euros.

Dans le cadre de l’examen de la première partie de la présente loi de finances, le Gouvernement a fait adopter deux amendements : l’amendement n° 432 réforme l’assiette et le barème de la TST, afin de mettre fin aux comportements d’optimisation fiscale que j’ai décrits. Cet amendement fait l’objet d’un consensus. En revanche, l’amendement n° 431 rectifié opère un plafonnement taxe par taxe des ressources affectées au CNC, de sorte que le total de ces recettes ne pourrait excéder 700 millions d’euros, le surplus devant être reversé au budget général.

Cet amendement a suscité l’émotion légitime de tous les professionnels réunis à Dijon dans le cadre des Rencontres cinématographiques, émotion telle qu’ils ont même été reçus par le Président de la République, au moment même où la zone euro traversait une nouvelle crise. Le Président de la République n’aurait pas été informé de cette démarche du ministère du budget et l’examen du projet de loi de finances au Sénat devrait être l’occasion de corriger cette initiative malheureuse.

Il convient de souligner que l’amendement n° 431 aurait pour effet de mettre en cause les soutiens automatiques versés par le CNC, alors même que ces derniers sont la condition de l’acceptabilité du système pour les grands opérateurs qui en bénéficient et acceptent dans le même temps de financer des films d’auteurs, des films indépendants, des premiers ou deuxièmes films : en 2010, nous avons compté 77 premiers films et 33 deuxièmes films, ce qui est un résultat très positif.

J’ajoute que le plafonnement des ressources du CNC intervient alors même que de nombreux transferts de charges opérés depuis le budget du ministère de la culture pèsent sur le budget du Centre, qu’il s’agisse du financement de l’École nationale supérieure de l’image et du son, la « Fémis », du financement de la Cinémathèque ou de la prise en charge des aides auparavant financées par des crédits déconcentrés par l’État aux DRAC, notamment en faveur du patrimoine cinématographique en régions. Ces transferts de charges représentent 51 millions d’euros.

Par ailleurs, la mission confiée notamment à notre collègue Franck Riester sur La création musicale et la diversité à l’ère numérique propose de faire financer un Centre national de la musique par un prélèvement de 95 millions d’euros sur le budget du CNC. J’estime qu’il n’est pas bon de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Enfin, le reversement au budget de l’État d’un éventuel surplus des recettes du Centre au-delà d’un plafond de 700 millions d’euros me parait présenter un risque important au regard du droit communautaire. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a en effet évalué le rendement de la TST à 300 millions d’euros, au lieu des 229 millions inscrits dans le projet de loi de finances à la suite de l’adoption de l’amendement n° 431 du Gouvernement. Ce surplus représenterait plus de 20 % du rendement évalué par le Gouvernement.

Or, les aides au cinéma et à l’audiovisuel bénéficient d’un régime dérogatoire au droit commun communautaire interdisant les aides d’État, dans la mesure où elles participent d’une politique de promotion de la culture. Un prélèvement sur des fonds dont la mobilisation est censée répondre à un objectif culturel risque de fragiliser notre système, d’autant que le régime dérogatoire aménagé en faveur du cinéma et de l’audiovisuel va être réformé, et que la Commission européenne a lancé une consultation dans cette perspective. La TST pourrait donc être fragilisée dans les mêmes conditions que la taxe « télécom », qui devrait être abolie à la fin de l’année, et qui avait été mise en place pour compenser la suppression de la publicité sur France Télévisions.

Cette fragilisation intervient dans un contexte de fortes mutations et au moment où notre système, qui a fait la preuve de son efficacité depuis 65 ans, doit faire face à de nouveaux défis : j’évoquerai le dynamisme du « Web COSIP », le nécessaire renouveau de la fiction française, qui doit reposer sur un renouveau de l’écriture mais aussi l’affectation de crédits supplémentaires pour le financement des pilotes de série, afin d’éviter des échecs d’audience, l’intérêt croissant des chaînes de la TNT pour les programmes dits « de stock », précisément ceux qui peuvent prétendre au soutien du CNC, ou le renforcement du soutien à l’export pour les films français.

J’ajoute qu’on peut se demander si à l’avenir la production audiovisuelle pourra continuer à bénéficier du soutien des chaînes, à travers leurs obligations réglementaires : au moment où vont être lancées six nouvelles chaînes gratuites sur la TNT, où se développent les sites de partage de vidéos en ligne, les opérateurs « over the top » comme Google ou Apple, les services délinéarisés, la concurrence est de plus en plus vive. Faute d’audience et de ressources publicitaires, les chaînes pourraient se retrouver en difficulté pour honorer ces obligations, qui constituent le second pilier du financement du cinéma et de l’audiovisuel, aux côtés du fonds de soutien du CNC.

C’est pourquoi ce fonds de soutien doit être renforcé, quitte à ce qu’ait lieu une évolution progressive des obligations de chaînes vers des obligations de groupe ou que les grilles de diffusion du cinéma à la télévision puissent être modifiées.

En conclusion, nous disposons d’un système vertueux que le monde nous envie, il convient de le protéger même si nos finances publiques traversent une situation difficile.

Mme Marie-Hélène Amiable. Je souhaiterais revenir sur la déclaration effectuée le 13 octobre dernier par le Président de la République soulignant que le budget de la culture ne serait pas sacrifié en France et que la culture était une réponse à la crise. Je démontrerai que la présentation du budget de la culture est flatteuse alors qu’il ne connaît pas d’augmentation. Ce week-end, des rumeurs ont circulé indiquant que le plan d’austérité bis et la nécessité d’économiser 6 à 8 milliards d’euros toucheraient les crédits de la mission « Culture ». Par ailleurs, 4 milliards d’euros devraient être prélevés sur les collectivités territoriales alors même qu’elles jouent un rôle culturel de premier plan.

Cette actualité appelle plusieurs commentaires ; l’engagement du Président de la République pourra-t-il être maintenu ? Les députés du groupe GDR dénoncent depuis deux semaines le caractère fallacieux du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ne sommes-nous pas en train d’examiner des crédits qui seront amputés dans quelques jours ?

Si les crédits de paiement sont en légère augmentation, les autorisations d’engagement sont elles en baisse de 4,3 % par rapport à 2011, hors inflation. Les crédits de la mission passent de 2,9 milliards d’euros en 2008 à 2,6 milliards d’euros en 2012.

Les crédits relatifs à l’action Patrimoine monumental diminuent de 8 %.

L’action Patrimoine des musées de France connaît une baisse de 5 % et reste soumise à la révision générale des politiques publiques. Ce malaise s’est traduit notamment par la grève du personnel du musée d’Orsay, lors de sa réouverture.

L’action Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant diminue quant à elle de 2,5 %.

Le Président de la République a annoncé la création du Centre national de la musique sans préciser son financement, alors même que les centres nationaux de création musicale observent une baisse de 770 000 euros de leurs crédits et que les orchestres permanents connaissent une diminution de leurs crédits de 833 000 euros.

Je suis inquiète de l’absence d’un système de protection mutualiste et pérenne pour les professionnels du spectacle vivant et de l’audiovisuel. La liberté d’expression des intermittents doit être préservée.

Les indicateurs traduisent une diminution de la diffusion des arts plastiques.

Enfin, la transmission des savoirs baisse de 5,6 % et la part des crédits culturels affectée aux territoires prioritaires par rapport aux élèves scolarisés diminue fortement. Depuis 2007, c’est une baisse de 40 % qui affecte l’accès à la culture.

Je suis également inquiète par le projet de plafonner les taxes affectées au Centre national du cinéma, alors que ce système profondément original permet de protéger de petits et moyens exploitants de salles de cinéma confrontés aux investissements liés à la numérisation ou à l’accessibilité.

C’est pourquoi, le groupe GDR ne votera pas les crédits de la mission « Culture ».

M. Michel Herbillon. Je tiens à saluer le choix du Gouvernement qui a pris l’initiative de sanctuariser le budget de la culture en maintenant ses crédits, preuve de l’importance donnée à la politique culturelle.

Je souhaiterais souligner que le bilan culturel depuis cinq années est important. En premier lieu, l’offre patrimoniale a été développée, avec notamment la mise en œuvre de grands projets structurants comme le Centre national des archives à Pierrefitte sur Seine, la Maison de l’histoire de France et le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille. Je n’oublie pas la dimension culturelle qui est présente dans le projet du Grand Paris. Les moyens affectés aux monuments historiques bénéficieront de 376 millions d’euros.

En deuxième lieu, les moyens consacrés à la création augmenteront de 6 % en 2012 avec notamment la création de la Philharmonie de Paris qui permettra à la capitale d’avoir une salle de répétition digne de ce nom et le site de création contemporaine du Palais de Tokyo. Un des fils rouges de cette mission est la volonté de protéger et de défendre les artistes et de soutenir et de promouvoir la création.

En troisième lieu, le spectacle vivant augmente de 7 %, ce qui permettra de mettre en œuvre le plan d’action vis-à-vis des artistes et de soutenir à la fois les emplois et les structures.

Enfin, je mettrai en exergue la démocratisation culturelle, au cœur des priorités du Gouvernement. Un des premiers accès à la culture passe par le cinéma, c’est pourquoi le Gouvernement est attaché au modèle unique du Centre national du cinéma qui a permis de sauvegarder une création nationale alors que d’autres pays comme l’Italie n’ont pu le faire. Il ne doit pas être fragilisé.

Je citerai plusieurs exemples de cette politique de démocratisation : le Plan musées en régions, la gratuité des musées nationaux pour le jeune public, le soutien à l’opération Centre Pompidou mobile, le projet Demos ou la relance des conventions culturelles.

En conclusion, le groupe UMP adoptera les crédits de la mission « Culture ».

M. Éric Berdoati. Je souhaiterais une réflexion de la question de la gratuité, liée à la démocratisation culturelle. Moi-même dans ma commune, j’ai cédé à la tentation et ai instauré la gratuité pour la médiathèque et le musée. Néanmoins, comment faire prendre conscience de la valeur d’un bien lorsque celui-ci est gratuit, au moins en apparence ? Il est difficile de conjuguer gratuité et valeur des biens que l’on est amené à entretenir ou à apprécier.

Je suis moi aussi attaché au Centre national du cinéma. Le cinéma est la première entrée dans le monde culturel et la qualité et la capacité de production du cinéma français doit être préservée.

Je reviens sur le rapport de notre rapporteure Sophie Delong relatif au patrimoine. Au-delà des acronymes difficiles à déchiffrer et de la complexité de l’ensemble du dispositif, une question, à mon sens, a été occultée : quelle stratégie faudrait-il mettre en place pour le patrimoine ? La réforme du Centre des monuments nationaux montre bien ce qu’il en est. Quatre années ont été nécessaires pour mener à bien cette réforme, qui aurait pu être plus efficace et moins coûteuse.

Mme Pascale Crozon. Je souhaiterais revenir sur la remarque de M. Éric Berdoati relative à la gratuité. L’accès à la culture n’est pas évident. Dans ma circonscription, à Villeurbannais, le Théâtre national populaire n’est pas forcément accessible à notre population. Il serait utile de mener une étude globale sur le sujet.

Les effectifs au sein du ministère continuent de décroître, 110 postes devraient être supprimés, le seront-ils au ministère ou au sein des directions régionales ?

M. Christian Kert. Je souhaiterais insister sur les succès remportés par la Réunion des musées nationaux lors de concours européens, signe de notre savoir faire.

Ma question concerne la situation économique des entreprises spécialisées dans les monuments historiques. Des inquiétudes avaient pu s’exprimer à ce sujet ; Madame la rapporteure, avez-vous rencontré leurs représentants et quelles sont les perspectives qui se dégagent ?

Mme Pascale Crozon. J’ai omis de préciser que le groupe SRC votera contre le budget de la mission « Culture ».

Mme Sophie Delong, rapporteure pour avis. Je vous remercie de vos multiples questions. À Madame Amiable, plus que des éléments chiffrés du budget et des baisses dans tel ou tel secteur, aux bases toujours contestables, je voudrais souligner qu’il me semble important d’aborder les questions concrètes et les réalisations. Cette mandature a vu de grandes évolutions pour la culture, en particulier dans le domaine de l’accès de tous à la culture. Cette question a fait l’objet de débats depuis longtemps, mais nous en avons maintenant des exemples concrets. Comme le rappelait Michel Herbillon, le Centre Pompidou mobile, concept extrêmement novateur et que j’ai la chance d’accueillir à Chaumons, est une réussite dont témoigne, dès les premières semaines, l’affluence de visiteurs, scolaires ou non. La démocratisation prend ici tout son sens. Elle est une réalité.

J’aborderai à cette occasion la question de la gratuité : le Centre Pompidou mobile a une structure qui rappelle un chapiteau de cirque itinérant et abrite des œuvres majeures, en nombre réduit, quatorze, ce qui évite la lassitude d’un public pas nécessairement familier de l’art contemporain. C’est un projet vraiment innovant, pour un coût raisonnable, et qui après Chaumons se rendra dans plusieurs villes de France. Le bouillonnement culturel est là. Et il conviendrait, si l’on voulait aborder la question des chiffres du budget, de prendre en compte non seulement les crédits votés, mais également les crédits consommés. Or, depuis quelques années, le réalisme et la lucidité permettent que soient effectivement consommés les crédits annoncés.

Je remercie Michel Herbillon d’avoir, à bien des égards, apporté les réponses que j’aurais faites. On peut, en effet, se féliciter de l’accès égal de tous à la culture qui est aujourd’hui possible dans les faits et non plus seulement dans les mots.

La gratuité de l’accès à la culture n’est pas notre sujet mais une extrême souplesse est ici nécessaire, comme l’ont montré de nombreux rapports. En effet, les particularités locales sont à prendre en compte, elles sont souvent déterminantes pour élaborer une politique dans ce domaine, pour l’évaluer ou la réorienter à la lumière des résultats obtenus.

En ce qui concerne la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques, notre système était effectivement extrêmement complexe. Il est à l’image de certaines de nos institutions, où s’empilent les structures. Dans le cas présent, on peut citer l’exemple du SNT et de l’ÉMOC, fusionnés après plusieurs années alors qu’il eût été tellement plus simple et efficace d’y penser dès l’origine. Le coût en a été élevé, en particulier pour les personnels du SNT ; le délai entre l’annonce de la restructuration des services et sa mise en œuvre a entraîné le développement d’un stress au travail que l’on imagine. Ce sont les conséquences lourdes de cette absence d’anticipation, autre que verbale, et de décisions concrètes. Il reste à souhaiter que des leçons en seront tirées.

Monsieur Christian Kert, je m’associe à vos compliments sur la réussite de la Réunion des musées nationaux. Par ailleurs, je voudrais saluer l’action du CMN : le transfert au Centre de la maîtrise d’ouvrage des travaux des restauration permet maintenant une action cohérente et les responsabilités identifiées. S’agissant des entreprises de restauration des monuments historiques, sujet qui vous est familier puisque vous êtes l’auteur d’un rapport sur la conservation et l’entretien du patrimoine monumental, elles ne nous ont pas fait part d’inquiétudes sur leur volume du travail mais se sont félicitées de l’ouverture à la concurrence qui les rend moins dépendantes d’un seul maître d’œuvre. Elles s’inquiètent en revanche de la d’un risque de fragilisation de leur savoir-faire, avant tout artisanal, si les marchés devaient être emportés par les grandes entreprises générales dont elles ne seraient que sous-traitantes, avec les difficultés que comporte une telle situation. La possibilité de mettre en œuvre une certification de ces entreprises est explorée par l’observatoire de la réforme, mise en place par le ministère de la culture. Cette certification doit permettre de valoriser les savoir-faire des entreprises de restauration, d’éviter qu’ils ne se perdent et que la qualité des travaux ne s’en ressente.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Un certain nombre de sujets ont été évoqués et notamment la « démocratisation culturelle ». Cette forme de slogan est un peu usée par nos discours officiels, surtout quand les enquêtes récurrentes du ministère de la culture et de la communication dans ce domaine indiquent que les pratiques culturelles des Français n’ont pas été bouleversées durant les dernières décennies.

Effectivement, on n’ouvrira pas ce matin le débat sur la gratuité, même si des expériences peuvent être pertinentes et intéressantes, notamment en ce qui concerne les musées comme, par exemple, de donner un accès gratuit pour les expositions permanentes et payant pour les expositions temporaires. Les augmentations de fréquentation sont de bons indices en la matière. Mon opinion est que ce ne sont pas des dispositifs financiers incitatifs qui sont les plus efficaces. Dans ce domaine l’éducation artistique est la priorité. Si, dès le plus jeune âge, on ne donne pas envie à nos jeunes concitoyens de fréquenter un musée, une salle de spectacle ou d’aller au concert alors, adulte, l’envie n’en viendra pas spontanément. Dans l’apprentissage de chacune ou de chacun, le fait d’avoir accès à l’œuvre d’art très tôt est déterminant. Trop de nos concitoyens considèrent encore qu’une pièce de théâtre, un concert ou un spectacle chorégraphique ne leur sont pas destinés. Par ailleurs, les lieux conventionnés ou labellisés sont en relation contractuelle avec la puissance publique, que ce soit l’État ou les collectivités territoriales, ces dernières, rappelons-le, contribuant pour 70 % au financement public de la culture. Il serait sans doute nécessaire de revisiter les termes du contrat, en fixant des missions de service public plus clairement affirmées et, peut-être, en demandant davantage d’efforts tant en matière de programmation que de recherche ou de conquête de nouveaux publics.

Le malheureux ministère de la culture et de la communication a été victime de deux phases de la Révision générale des politiques publiques, les RGPP 1 puis RGPP 2, et a, de ce fait, été amené à transférer un certain nombre de ses missions et donc à les débudgétiser, puisqu’elles sont prises en charge par d’autres structures. Je l’ai évoqué pour le CNC qui finance aujourd’hui les crédits déconcentrés des DRAC dans le domaine du cinéma, mais aussi ce qu’on appelle communément la Fémis ainsi que la cinémathèque française. Sous ces coups de butoir renouvelés, le ministère perd de nouveau cette année 110 équivalents temps plein (ETP). Mais je ne suis pas en mesure de vous donner les programmes ou actions concernés, ni de vous préciser si la perte affecte davantage l’administration centrale ou les DRAC. Le « bleu » budgétaire, malgré la LOLF, n’en donnant aucune indication, l’opacité est complète. Les effectifs du ministère de la culture en 2012 seront de 11 014 ETP, les suppressions représenteront donc 1 %, ce qui n’est pas secondaire.

S’agissant du CNC, j’ai déjà longuement développé mon rapport pour avis. Je voudrais cependant une nouvelle fois vous alerter sur les risques que comporte l’amendement de plafonnement de chaque taxe affectée au Centre, qui risque de remettre en cause le soutien automatique et donc de faire exploser un système qui n’aura plus ce caractère redistributif grâce auquel les grands opérateurs financent les premiers films et les films d’auteurs.

Mais nous sommes aussi, en quelque sorte, dans l’œil du cyclone, le cyclone étant la Commission européenne, puisque la France doit, avant la fin de l’année, notifier son système d’aides d’État au cinéma. Notre cadre dérogatoire n’est justifié que par ses objectifs culturels et je crains que la Commission européenne ne voie d’un mauvais œil le fait que des opérateurs des télécommunications, des fournisseurs d’accès à internet soient taxés par l’intermédiaire de la TST, mais que 70 millions d’euros en provenant soient reversés directement au budget de l’État. Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, notre débat portait sur 229 millions d’euros de rendement de la TST, or l’ARCEP l’évalue à 300 millions d’euros. Le surplus est de 70 millions, supérieur donc aux 20 % de la somme initialement prévue au-delà desquels le contrôle de la Commission devient sévère.

Nous risquons de fragiliser ce système vertueux qui ne met jamais à contribution le budget de l’État. Le financement du cinéma et de la production audiovisuelle en France est, je le rappelle unique au monde. Il nous a permis de maintenir un cinéma national et une production audiovisuelle dynamiques, payés par le spectateur. Que des taxes affectées puissent être ainsi reversées au budget de l’État est non seulement illogique, mais surtout dangereux.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous en arrivons à l’examen des deux amendements dont la Commission est saisie.

Après l’article 48

La Commission est saisie de l’amendement n° 1 AC.

M. Michel Herbillon. Cet amendement a pour objet d’adapter le dispositif de crédit d’impôt en faveur des tournages en France de films à production internationale. La réalité des conditions de production de ces films montre en effet que le délai de douze mois suivant la date des derniers travaux qui ont été réalisés en France, tel que prévu par la législation en vigueur pour l’obtention de l’agrément fiscal, est trop court. En fait les films produits, notamment au plan international, ont souvent des temps de réalisation et de montage beaucoup plus important et qui dépassent cette échéance des douze mois. C’est pourquoi je propose que le délai d’agrément définitif pour le bénéfice du crédit d’impôt soit porté de douze à vingt-quatre mois. C’est très important pour conforter l’attractivité de la France et de son dispositif en matière de localisation des tournages.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le crédit d’impôt en faveur des tournages en France de films à production internationale. Nous aurions pu également prendre en compte d’autres demandes : que le plafond du crédit d’impôt pour les productions nationales soit situé au même niveau que celui qui existe pour les productions internationales notamment, ou que soit entreprise une réforme des dépenses éligibles à ce crédit d’impôt national. Mais nous sommes là dans le domaine sensible des « niches fiscales » au moment où il nous est demandé de réduire le déficit public. Cependant, l’amendement de notre collègue Herbillon est technique, et porter la durée de douze à vingt-quatre mois permet en effet de prendre en compte le temps long des productions internationales. J’y suis donc favorable.

L’amendement n° 1 AC est adopté à l’unanimité.

La Commission examine ensuite l’amendement n° 2 AC.

M. Michel Herbillon. L’amendement n° 2 AC est également technique. Il s’agit de rectifier une erreur intervenue lors de la codification dans le code du cinéma et de l’image animée de dispositions qui étaient contenues antérieurement dans le code général des impôts et relatives à la taxe sur les entrées de cinéma. En effet, conformément au droit constant, la taxe sur les entrées de cinéma ne saurait entrer dans la base d’imposition des taxes sur le chiffre d’affaires autres que la TVA auxquelles sont soumis les exploitants de cinémas.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Cet amendement rappelle, s’il en était besoin, l’étanchéité du financement du cinéma et de l’audiovisuel par rapport au budget de l’État. Corriger cette erreur est effectivement nécessaire, j’émets donc un avis favorable.

L’amendement n° 2 AC est adopté à l’unanimité.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous allons passer au vote sur les crédits de la mission « Culture », Mme Sophie Delong émettant un avis favorable et M. Patrick Bloche un avis défavorable à leur adoption.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2012 de la mission « Culture ».

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° 1 AC présenté par M. Michel Herbillon

Ø Groupement français des entreprises de restauration de monuments historiques (GMH) – M. Jacques Wermuth, président

Ø Ministère de la culture et de la communication – M. Philippe Bélaval, directeur général des patrimoines, et Mme Isabelle Maréchal, chef du service du patrimoine

Ø La demeure historique – M. Jean de Lambertye, président, M. Claude Aguttes, délégué régional Paris, et Mme Alexandra Proust, juriste

Ø Patrimoine environnement – M. Kléber Rossillon, président

Ø M. Jean-Paul Godderidge

Ø Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Champagne-Ardennes – M. Jean-Paul Ollivier, directeur régionale des affaires culturelles

Ø M. Christophe Vallet, opérateur du patrimoine

Ø Centre des monuments nationaux (CMN) – Mme Isabelle Lemesle, présidente, Mme Sophie Duhamel, directrice des relations extérieures et de la communication, M. Jean-Christophe Simon, directeur de la maîtrise d’ouvrage, M. Raphaël Collard, chef du département budgétaire et financier, et Mme Patricia Ferré, chef du département des relations avec les élus

© Assemblée nationale