N° 3809 tome IV - Avis de M. Jean-Louis Bernard sur le projet de loi de finances pour 2012 (n°3775)


N° 3809

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 octobre 2011.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2012 (n° 3775)

TOME IV

DÉFENSE

PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

FORCES TERRESTRES

PAR M. Jean-Louis BERNARD,

Député.

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Voir le numéro : 3805 (annexe n° 11)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. —  UNE RÉFORME QUI PREND FORME 7

A. LA POURSUITE DE LA RÉORGANISATION DE L’ARMÉE DE TERRE 7

B. LA MONTÉE EN PUISSANCE DES BASES DE DÉFENSE 8

C LES CONSÉQUENCES DE LA MISE EN PLACE DE CHORUS 10

II. —  LE BUDGET 13

A ÉVOLUTION GÉNÉRALE 13

B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL 14

C. LES CRÉDITS HORS TITRE 2 15

III. —  LES PERSONNELS 17

A. ÉVOLUTION DES EFFECTIFS 17

1. Données générales 17

2. Campagnes de recrutement 18

B. LA QUESTION DU RECRUTEMENT 19

1. Les officiers 19

2. Les sous-officiers 20

3. Les militaires du rang 20

C. LA QUESTION DE LA FIDÉLISATION 21

1. Les officiers 21

2. Les sous-officiers 22

3. Les militaires du rang 22

D. UNE PRISE EN CHARGE EXEMPLAIRE DES BLESSÉS DE L’ARMÉE DE TERRE 26

E. L’IMPACT DE LA RÉFORME DES RETRAITES SUR LE BUDGET DE L’ARMÉE DE TERRE 27

F. LES RÉSERVES 28

IV. —  LES ÉQUIPEMENTS 31

A. DONNÉES GÉNÉRALES 31

1. L’avancée satisfaisante du programme LRU 31

2. Un bilan positif pour les hélicoptères de l’ALAT 31

a) Un appui indispensable en Afghanistan 31

b) Une action déterminante en Libye 32

3. Le programme Scorpion : un projet vital pour l’armée de terre 32

B. LA DISPONIBILITÉ 34

C. LA LUTTE CONTRE LES ENGINS EXPLOSIFS IMPROVISÉS 35

D. LES MUNITIONS 37

1. Données générales 37

2. La montée en puissance progressive du service interarmées des munitions (SIMu) 38

V. — UNE ARMÉE DE TERRE TOUJOURS FORTEMENT SOLLICITÉE 39

A. L’ENGAGEMENT DANS LES OPEX 39

B. LES MISSIONS INTÉRIEURES 41

C. ENTRAÎNEMENT ET EXERCICES 41

1. Activités et entraînement 41

2. Le CENZUB : un exemple de la qualité de la préparation de nos forces 43

a) Le CENZUB, un des grands centres de préparation du CCPF 43

b) Une simulation du combat en zone urbaine au plus près de la réalité 44

c) Un entraînement complet alternant instruction et mise en condition 44

d) CT-ZUB un centre de tir unique au monde 44

3. Les exercices 45

CONCLUSION 47

TRAVAUX DE LA COMMISSION 49

I. —  AUDITION DU GÉNÉRAL BERTRAND RACT-MADOUX, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DE L’ARMÉE DE TERRE 49

II. —  EXAMEN DES CRÉDITS 67

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES ET DES DÉPLACEMENTS 69

I. —  AUDITION 69

II. —  DÉPLACEMENTS 69

INTRODUCTION

L’armée de terre est notre armée la plus sollicitée en opération extérieure et en mission intérieure. Pourtant en 2012 elle passera sous le seuil symbolique des 100 000 militaires et des 10 000 civils. Le rapporteur tient à souligner le fait que la population française n’a jamais été aussi importante et l’armée de terre aussi réduite depuis l’avènement de la République.

En dépit des difficultés qu’impose toute grande restructuration, le rapporteur tient à saluer le professionnalisme de tous les personnels de l’armée de terre, qui chacun à leur niveau, contribuent à faciliter la mise en place de la réforme et à la rendre pleinement efficiente.

Par contre le rapporteur se désole qu’on ne parle pas suffisamment de défense dans notre pays ou que l’on en parle mal. Au cours de ses travaux il a d’ailleurs souhaité se pencher sur la formation initiale et opérationnelle de nos soldats et il peut désormais affirmer que nos troupes reçoivent une formation complète dès leur intégration dans les rangs de l’armée de terre et avant toute projection extérieure.

Le rapporteur tient également à rendre hommage aux soldats tués dont il mesure la force de l’engagement au service de la France. Il souhaite également saluer le dévouement de nos soldats blessés, qu’il a pu rencontrer, et dont on parle trop peu. Ces hommes et ces femmes, qui le plus souvent souhaitent rester dans l’ombre, méritent collectivement une pleine reconnaissance de la Nation. La solidarité nationale doit trouver à s’exprimer à la hauteur de leur engagement au service de la République. L’armée de terre et le service de santé des armées prennent grand soin de nos soldats blessés, il est de notre devoir de parler d’eux et de faire reconnaître leur action.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2011, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 53 réponses étaient parvenues, soit un taux de 98 %.

Les forces terrestres ont conduit en 2011 leur troisième année de transformation dans un contexte d’organisation du soutien considérablement modifié. Cette nouvelle organisation de l’armée de terre traduit l’effort de la transformation initiée en 2009, et répond aux priorités suivantes : rationalisation du commandement, de l’environnement et du soutien général des forces.

Dans ce cadre, l’armée de terre a articulé son organisation selon trois niveaux de responsabilité. Au sommet de cette organisation, le chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT) dispose d’un état-major (EMAT) et de l’inspection de l’armée de Terre (IAT) pour exercer ses responsabilités de conception, de direction et de contrôle.

Les commandants de chaînes fonctionnelles viennent ensuite pour les forces – avec le commandement des forces terrestres –, les ressources humaines – avec la direction des ressources humaines de l’armée de terre –, et la maintenance des matériels terrestres – avec le service de la maintenance industrielle terrestre. Ces différents commandements fonctionnels sont chargés de la mise en œuvre des directives du chef d’état-major dans leurs domaines respectifs d’attribution.

Enfin, en troisième lieu, les formations sont chargées de l’exécution des directives : c’est-à-dire pour l’essentiel, les brigades et régiments dans la chaîne des forces et de la maintenance, et les écoles dans la chaîne des ressources humaines et de la formation.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

La création des bases de défense (BdD) a permis de mutualiser les compétences liées à l’administration et au soutien commun, permettant ainsi une réduction des effectifs du ministère sans dégradation du soutien.

Pour l’armée de terre, cette réforme permet aux chefs de corps de se recentrer sur leur cœur de métier : la préparation opérationnelle, la gestion du personnel et le maintien en condition opérationnelle (MCO) des équipements de combat.

Au niveau du régiment, les modifications de structures induites portent plus particulièrement sur la dissolution des unités d’administration et de soutien (UAS), dont les fonctions d’administration générale et de soutien commun (AGSC) sont reprises et mutualisées au sein des groupements de soutien de base de défense (GSBdD), au fur et à mesure de leur montée en puissance (2009, 2010 puis début 2011).

Par ailleurs, pour assurer la chaîne du soutien par les bases de défense, l’ancien commandement organique territorial de l’armée de terre a connu en 2011 une évolution majeure. En effet les états-majors de régions terre ont été transformés en états-majors de soutien défense (EMSD), relevant directement de l’EMA via le commandement interarmées du soutien (COMIAS).

Les EMSD ont pour mission de coordonner dans leur zone de soutien (ZS) l’organisation interarmées du soutien sous l’autorité fonctionnelle du centre de pilotage et de conduite du soutien (CPCS). Ainsi dans leur zone de responsabilité, les EMSD sont chargés de faciliter l’action des commandants de base de défense.

Le déploiement de la totalité des soixante BdD de plein exercice a été réalisé le 1er janvier 2011 - 51 en métropole, 5 outre-mer et 4 à l’étranger. Elles sont subordonnées à l’EMA, plus précisément au général commandant interarmées du soutien (COMIAS) qui dispose du centre de pilotage et de conduite du soutien (CPCS) pour organiser et diriger la mise en œuvre de l’administration générale et des soutiens communs.

L’armée de terre, comme les autres armées, est donc passée d’un mode de soutien qui lui était directement subordonné à un système plaçant ses organismes en position de bénéficiaire de prestations assurées par les GSBdD et les échelons locaux spécialisés. Ce dispositif est désormais placé sous l’autorité de coordination et d’arbitrage du commandant de la base de défense (COM BdD). Dans le cadre du PLF 2012, les bases de défense sont dotées de 630 millions d’euros (1).

Les premiers résultats de cette nouvelle organisation du soutien de nos armées peuvent désormais être jaugés. En effet les premières années de fonctionnement des BdD expérimentales et pilotes, ainsi que les six premiers mois de la généralisation des BdD, ont permis de mettre en exergue le potentiel dégagé par les BdD.

Il faut d’abord noter que cette mise en place n’a pas été marquée par une rupture dans la chaîne du soutien. En dépit des difficultés transitoires inhérentes à toute réorganisation de grande ampleur, l’efficacité des soutiens a été maintenue, notamment pour les unités en OPEX.

Les gains en terme d’effectifs sont réels. Environ 10 000 suppressions de postes peuvent être attribuées à la mise en place des bases de défense et à la mutualisation au niveau local de l’administration et du soutien. À titre d’exemple, on peut citer la réduction du nombre de magasins de stockage dans les BdD, la dissolution des cercles d’unités — remplacés par un centre unique de gestion — la densification et le regroupement des moyens informatiques et des infrastructures, la mutualisation du soutien à la formation, des moyens de transport et de la gestion des ressources humaines, ainsi que la réorganisation des fonctions financières.

Néanmoins l’essentiel des gains attendus repose sur l’harmonisation et la simplification des processus et des procédures, qui ne seront effectives qu’après déploiement des nouveaux systèmes d’information et après consolidation des BdD. La concentration des marchés et l’harmonisation des besoins exprimés au sein des BdD devraient également conduire à une réduction des dépenses de fonctionnement courant.

Certaines BdD connaissent actuellement quelques difficultés en fin d’année, mais pour le général Bertrand Ract-Madoux, chef d’état-major des armées, c’est là une conséquence inévitable de toute grande restructuration (2). Ce sont là des problèmes d’organisation plutôt que des difficultés financières ; le nouveau système de soutien de nos armées se trouvant encore actuellement dans une période de rodage. Il devrait devenir de plus en plus performant d’année en année.

Le bilan financier des BdD fait actuellement l’objet d’une étude approfondie menée par l’EMA, la direction des affaires financières et la mission pour la coordination de la réforme au sein du groupe de travail ARAMIS.

La mise en place de CHORUS à compter de 2010 a modifié les responsabilités budgétaires comme le montre le schéma ci-après.

Organisation budgétaire du BOP (transition 2010 et cible 2014)

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

Jusqu’à la mi-gestion 2011, l’armée de terre comptait huit unités opérationnelles (UO). Suite à la création des bases de défense et conformément à l’organisation cible, elle en comprend désormais sept (3), auxquelles sont confiés des crédits et des objectifs physiques ; les responsables d’unité opérationnelle (RUO) sont chargés de la performance.

L’UO « État-major de l’armée de Terre » (EMAT), qui sera rebaptisée au 1er janvier 2012 UO « Commandement Ressources centralisées » rassemble les crédits qui ne peuvent être confiés à une autre UO ou que l’EMAT souhaite conserver de manière centralisée.

Les principales évolutions de périmètre budgétaire de l’armée de terre sont liées à la finalisation de la réforme globale du ministère. Elles correspondent au recentrage de l’armée de terre sur son cœur de métier, c’est-à-dire la préparation opérationnelle.

Les réformes engagées continuent donc de se traduire par des modifications de périmètres de responsabilité budgétaire, des transferts entre programmes ou budgets opérationnels de programme (BOP). Ainsi, dans le cadre du PLF 2012, le périmètre budgétaire de l’armée de terre recouvre exclusivement l’action 2 du programme 178 « Préparation des forces terrestres » et la sous-action 93 du programme 146. Après les lois de finances pour 2010 et 2011, le PLF 2012 est marqué par un approfondissement de la distinction entre les dépenses relevant du soutien et celles qui concernent l’activité des forces, réduisant d’autant la surface budgétaire du BOP « Préparation des forces terrestres ».

En 2010, le transfert en gestion des crédits de fonctionnement correspondant à l’intégration d’une vingtaine d’organismes terre au sein des bases de défense a été opéré – 205 millions d’euros concernant les crédits d’AGSC transférés vers les bases de défense. Pour 2011, la principale mesure a consisté à transférer en construction les crédits de fonctionnement AGSC – 4 millions d’euros de transferts – vers l’action 5, sous-action 82 « Soutien des forces par les bases de défense », en consolidation du transfert de 35 millions d’euros effectué en loi de finances initiale (LFI) pour 2009 – correspondants à l’embasement des organismes terre au sein des BdD.

D’autre part, les principales mesures d’organisation adoptées au sein de l’action 5 « Logistique et soutien interarmées » doivent produire leur plein effet en 2012, qui devrait être caractérisée par la finalisation de l’interarmisation des soutiens.

Ainsi, le service interarmées des munitions (SIMu), créé officiellement le 25 mars 2011 dans le but d’harmoniser et d’optimiser les activités liées à l’acquisition, le stockage et la maintenance des munitions, poursuit sa montée en puissance. Vingt dépôts issus des trois armées, dépendant de sept établissements principaux, sont désormais sous le commandement opérationnel de la direction centrale, située à Versailles. Cet ensemble, dont l’activité relève de la sous-action 84, atteindra son mode de fonctionnement optimal en juin 2012.

En outre, le service du commissariat aux armées, né en 2010 de la fusion des commissariats d’armée dans le but d’optimiser la fonction d’administration générale et de soutien commun (AGSC), aura en 2012 son plein champ de compétences. Ses activités relèvent de la sous-action 85.

En 2010 et 2011, l’armée de terre avait déjà transféré des crédits de l’action 2 « Préparation des forces terrestres » à l’action 5 « Logistique et soutien interarmées » à hauteur respectivement de 23 millions d’euros et 214 millions d’euros. En 2012, ce montant s’élèvera à 57,5 millions d’euros, dont 38 millions d’euros concernent l’action 5, sous-action 82, « Soutien des forces par les bases de défense ».

La nomenclature budgétaire, adoptée en 2010 et ajustée à la marge en 2011, semble aujourd’hui adaptée à l’organisation opérationnelle et du soutien.

L’action 2 « Préparation des forces terrestres » a vu sa dotation adaptée afin de répondre au mieux aux évolutions d’organisation, de structures et d’implantations, décidées dans le cadre de la réforme globale du ministère. Le soutien commun est particulièrement concerné par ces évolutions, par une densification des mutualisations et une optimisation des compétences, notamment en interarmées. Les transferts de crédits, notamment vers l’action 5, montrent que la dimension interarmées est bien intégrée dans l’élaboration du budget de l’armée de terre, en particulier pour le soutien.

Le tableau suivant retrace l’évolution des crédits dévolus à l’armée de terre au sein du programme 178.

Évolution des crédits
de l’action 2 « Préparation des forces terrestres »
du programme 178 « Préparation et emploi des forces »

(en millions d’euros courants)

 

AE

LFI 2011

CP

LFI 2011

AE

PLF 2012

CP

PLF 2012

Titre 2 (1)

6 926,52

6 926,52

6 219,76

6 219,76

Titre 3

1 284,92

1 289,16

1 226,73

1 236,63

Titre 5

155,52

155,67

116,42

119,47

Titre 6

5,73

5,73

6,49

6,49

Total

8 372,69

8 377,09

7 569,40

7 582,35

(1) Y compris pensions.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

La dotation du titre 2, y compris pensions, au projet de loi de finances (PLF) présente une diminution significative de 10,40 %, par rapport à la loi de finances initiale de 2011. Cette diminution s’explique notamment par d’importantes mesures d’économies dont :

—  11 millions d’euros au titre des mesures d’ajustement général ;

—  86 millions d’euros d’économies liées aux déflations d’effectifs ;

—  776 millions d’euros d’économies liées aux mesures de transferts d’effectifs.

Les mesures indemnitaires de l’armée de terre s’élèvent en 2011 à 18,73 millions d’euros – contre 31,26 millions d’euros prévus dans la loi de finances initiale pour 2011. L’écart important entre les crédits inscrits au projet de loi de finances et la dépense exécutée en gestion correspond à deux mesures indemnitaires reportées sur le PLF 2012 – la prime de fidélisation des militaires du rang et la prime de qualification « montage » – au titre d’économies de crédits pour 2011.

Les mesures indemnitaires, prévues au titre du PLF pour 2012 s’élèvent à 30,5 millions d’euros. Les principales mesures pour 2012 sont : la première annuité de la transposition de la réforme de la grille indiciaire de la catégorie B aux sous-officiers des armées (3,69 millions d’euros), la revalorisation des primes versées lors d’un réengagement qui s’inscrit dans le cadre d’une politique de fidélisation des jeunes engagés (7,99 millions d’euros). On peut également relever la réforme de l’indemnité de résidence à l’étranger (5, 01 millions d’euros) et la refonte du système indemnitaire des militaires (6, 51 millions d’euros).

En ce qui concerne les mesures spécifiques à l’accompagnement du personnel en voie de reconversion ou qui quittent l’armée de façon anticipée, le plan d’accompagnement des restructurations (PAR) du PLF 2012 comporte : 46 millions d’euros de pécules d’incitation à une seconde carrière professionnelle ; 1,3 million d’euros d’indemnité de préparation à la reconversion ; 3,9 millions d’euros d’extension du complément forfaitaire de l’indemnité de charge militaire ; et 0,6 million d’euros d’indemnité d’aide à la mobilité du conjoint.

Dans le PLF 2012, les crédits réservés à l’armée de terre au sein du programme 178 (hors titre 2) représentent 19,76 % du programme. Pour comparaison les crédits de l’armée de l’air en représentent 26,37 % et ceux de la Marine nationale 27,18 %.

Les crédits de fonctionnement hors carburants opérationnels passent de 402 millions d’euros à 374 millions d’euros, soit une diminution de 7 %. Cette baisse s’explique essentiellement par des mesures de transferts et par les mesures d’économies sur les dépenses de fonctionnement conformément aux orientations du Gouvernement. Les crédits dédiés aux carburants opérationnels passent eux de 60 millions d’euros à 56 millions d’euros, cette baisse étant due à une réduction du besoin. Carburants inclus, les crédits d’activité et de fonctionnement s’élèvent donc à 430,5 millions d’euros.

Les crédits de paiement réservés à l’entretien programmé du matériel (EPM) augmentent de 3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2011. Cette évolution du besoin de paiement traduit l’effort de l’armée de terre pour consolider sa politique d’emploi et de gestion des parcs, tout en assurant la montée en puissance des matériels de nouvelle génération (VBCI, TIGRE, NH90).

Évolution Des Crédits D’EPM

(en millions d’euros)

 

LFI 2005

LFI 2006

LFI 2007

LFI 2008

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

PLF 2012

Armée de terre

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

662,5

472

672,1

563

516

551

630,1

571,9

683

602

841,1

552,6

545,3

562,8

576,1

580,6

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

Les crédits pour l’entretien programmé des personnels (EPP) connaissent une baisse significative de 24 % par rapport à l’exercice précédent. Cette évolution correspond pour partie au transfert de crédits vers l’action 5, notamment pour le renouvellement d’ameublement, ainsi que pour le renouvellement du matériel de restauration collective. D’autre part, des mesures d’économies affectent le périmètre : elles visent les effets d’habillement commun et certains effets techniques. Il est important de noter que les besoins opérationnels demeurent la priorité : l’effort de montée en gamme des équipements spécifiques du combattant entamé en 2010 est ainsi préservé.

On constate une réduction des effectifs au cours de l’année 2011 à hauteur de 1 339 ETPT. En outre, les mesures de transferts au profit d’autres actions du programme 178 « Préparation et emploi des forces » ainsi que d’autres programmes du ministère de la défense s’élèvent en 2011 à 1 922 ETPT pour l’action 2 du programme 178. En volume, ces transferts concernent principalement le budget opérationnel de programme Soutien.

En ce qui concerne plus spécifiquement chaque catégorie militaire :

—  la population des officiers est à l’équilibre par rapport aux prévisions de gestion, avec un recul de seulement 12 emplois ;

—  pour les sous-officiers, l’effectif moyen réalisé, de l’ordre de 34 ETPT en moins, se situe ainsi en dessous des prévisions ;

—  en revanche la population des militaires du rang présente un excédent par rapport aux prévisions de gestion, avec 106 ETPT supplémentaires ;

—  par contre la situation reste compliquée pour les volontaires, dont les contrats sont de courte durée et qui représentent un vivier de recrutement pour la catégorie des militaires du rang. En 2011 la population des volontaires était déficitaire par rapport aux prévisions, avec 62 ETPT en moins. Le recrutement externe pour cette catégorie demeure à ce jour un objectif difficile à réaliser.

Pour les personnels civils :

—  Le plafond d’emploi autorisé du BOP 178 pour l’armée de terre est fixé à 107 276 ETPT (4), soit une réduction de 13,3 % par rapport à 2011. La déflation de personnel est de 16 502 ETPT par rapport au PMEA (plafond ministériel d’emploi autorisé) 2011.

Les personnels civils enregistrent une baisse de 4 938 ETPT, soit une diminution de 33 % d’emplois par rapport à 2011. Les militaires perdent quant à eux 10,6 % d’ETPT, soit 11 564 emplois. L’effectif des militaires de l’armée de terre passe donc à 97 297 ETPT.

Le diagramme suivant retrace l’évolution des effectifs entre 2007 et 2012.

Évolution des effectifs

* Données au 30 juin 2011.

** Données PMEA 2012 du 29 août 2011.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

En 2012, 13 473 ETPT, 9 080 emplois militaires et 4 393 emplois civils, seront transférés de l’action 2 « Préparation des forces terrestres » du programme 178 vers d’autres programmes du ministère. Quatorze emplois le seront vers d’autres ministères.

Les armées françaises étant devenues professionnelles, les campagnes de recrutement constituent désormais un élément essentiel pour leur assurer une certaine visibilité et pour les rendre in fine attractives aux yeux de l’opinion publique. Les campagnes de communication pour le recrutement concernent toutes les catégories de personnel des armées. Leur budget recouvre deux dimensions :

—  en premier lieu, le marché de création des outils publicitaires (spots TV, affiches, etc.) c’est-à-dire le marché qui lie la direction des ressources humaines de l’armée de terre à l’agence publicitaire titulaire du marché de la campagne de communication de recrutement et de sa déclinaison en outils, sur 3 ans, pour un budget oscillant entre 1,2 et 1,5 million d’euros ;

—  en second lieu, ce budget recouvre les dépenses liées à l’achat d’espaces publicitaires, pour exploiter les outils publicitaires créés afin de diffuser les messages (campagne de publicité télévisée, campagne Internet, affichage, etc.). Sur un an, 7 à 8 millions d’euros ont été consacrés à l’achat de ces espaces ; à titre d’exemple, une campagne de publicité télévisuelle de trois semaines coûte entre 1,2 et 1,3 million d’euros. L’achat d’espaces publicitaires est réalisé tant au niveau national, que régional et local.

La question du recrutement – ainsi que celle de la fidélisation – du personnel militaire est centrale, car l’atteinte des objectifs quantitatifs et qualitatifs engage la capacité de l’armée de terre à tenir son contrat opérationnel comme à fournir, dans la durée, les volumes de militaires et les compétences nécessaires à son fonctionnement. Il est indispensable de garder à l’esprit que l’armée de terre est à présent constituée aux trois-quarts de contractuels.

La situation générale du recrutement des officiers est satisfaisante. Il faut souligner que le recrutement des officiers de carrière se fait à 70 % à partir de la ressource interne.

En ce qui concerne le recrutement externe des officiers, le nombre et la qualité des candidatures (direct toutes catégories, OSC-E (5), OSC-S (6)) se maintiennent à un niveau très satisfaisant ; le taux de sélection se situant entre 1/3 et 1/4 pour les OSC (7), et 1/13 pour les OST (8)-BAC + 5, et enfin 1/10 pour les Saint-Cyriens tous concours confondus.

Les viviers dans lesquels chaque recrutement d’officiers puise sont limités et font l’objet d’une très forte concurrence avec le monde civil.

La principale difficulté réside dans le recrutement des OSC/P (9). L’exigence des tests d’aptitude pour l’aviation légère de l’armée de terre (ALAT), conjuguée à un accroissement des besoins en pilotes et à un nombre insuffisant de candidatures, ne permet pas d’atteindre les objectifs de recrutement. En effet il a manqué dix pilotes sur les vingt nécessaires à la promotion du printemps dernier. Pour s’assurer néanmoins du recrutement de vingt OSC/P en septembre, des mesures ont été prises en sélection initiale : tout d’abord un abaissement du critère de niveau d’anglais, ainsi qu’un abaissement de quelques critères spécifiques à la sélection « pilote ». Il faut noter que dix stagiaires de l’armée de l’Air ont pu bénéficier des procédures de changement d’armée depuis janvier 2011.

Les objectifs de recrutement pour les sous-officiers sont globalement très satisfaisants. La politique de recrutement a considérablement évolué. Ainsi, l’objectif fixé par le chef d’état-major de l’armée de terre de recruter 70 % de sous-officiers ayant pour origine un corps de troupe (semi-direct, rang, légion étrangère) a été atteint en trois ans – contre moins de 50 % en 2009 – grâce à la forte implication du commandement de proximité et à la réponse dynamique des engagés volontaires de l’armée de terre (EVAT). En 2012, sur les 2 200 sous-officiers recrutés, plus de 1 200 proviendront des EVAT.

Le recrutement direct des EVSO (10) a désormais vocation à honorer majoritairement les domaines techniques. Il faut signaler que l’attractivité reste faible dans ces domaines et que l’éventail des choix offerts devient très limité. Il convient aussi de noter des difficultés récurrentes pour le recrutement dans certains domaines de spécialité, tels que les informaticiens, ou les maintenanciers.

En dépit de la réduction de son format, l’armée de terre va devoir maintenir un effort de recrutement assez soutenu pour compenser les départs. La relative stabilité du début de la professionnalisation reposait sur la ressource issue de la conscription. Désormais, l’armée de terre doit composer avec des jeunes plus versatiles et moins conscients de la nature de l’engagement militaire.

Les besoins en recrutement sont en hausse constante depuis 2004, en raison du taux élevé de dénonciation du contrat pendant la période de formation initiale. Dans ce contexte, l’armée de terre met tout en œuvre pour conserver sa ressource, d’autant que les départs subis au terme d’un contrat ou par décision des engagés sont en sensible augmentation depuis quatre ans, soulevant la question de la fidélisation. En 2010, le taux de départs est élevé car il tient compte des conséquences des restructurations et du taux de dénonciation et de résiliation toujours important.

Le contexte économique de 2010 et de 2011, plus favorable en termes d’emploi des jeunes, et l’engagement des troupes françaises sur des théâtres difficiles comme l’Afghanistan ont sans doute induit une baisse du nombre de candidats au recrutement, d’où un taux de sélection en baisse. Malgré cette situation, il est à noter que le besoin en militaires du rang est satisfait et que le niveau de qualité, tout comme le niveau scolaire, sont en hausse.

Les jeunes candidats à l’engagement sont le plus souvent attirés par un emploi non routinier ou soucieux d’acquérir rapidement une autonomie financière. Cette motivation économique a pour résultat un nombre important d’abandons au cours des premiers mois de vie militaire. Cette volatilité est d’autant plus importante si l’unité d’emploi est exposée sur le plan opérationnel. On remarque ainsi que pour les unités de mêlée (infanterie, arme blindée et cavalerie), la durée moyenne de service d’un engagé est passée sous la barre des cinq ans, alors que la stabilité du modèle demande une ancienneté moyenne de huit ans. L’une des raisons de ce phénomène réside dans le taux élevé de rotation et la nature des missions de ces unités. Ceux qui sont venus « chercher de l’aventure » ont pu la trouver sur de nombreux théâtres en peu de temps, sans avoir à prolonger leur contrat pour multiplier leurs expériences opérationnelles.

Pour les années à venir, l’armée de terre sera donc confrontée à un double défi : celui de conserver ses plus jeunes engagés au-delà du premier contrat - pour l’heure, seuls 31 % des militaires du rang renouvellent leur primo contrat de 5 ans - et celui d’intéresser une part significative des engagés à servir au-delà de 11 ans.

La fidélisation est une question centrale pour l’armée de terre qui, en terme de personnels, a des besoins quantitatifs mais également qualitatifs. En effet, elle doit garder ses personnels sur une durée assez longue pour être sûre de compter dans ses rangs des hommes et des femmes ayant une très bonne connaissance du métier militaire, gage d’efficacité en opération et étant en position de transmettre ce savoir être et ce savoir-faire aux plus jeunes recrues.

S’agissant de la fidélisation des jeunes officiers, deux phénomènes sont apparus récemment :

En premier lieu, pour les officiers de carrière, après étude portant sur une période de 15 ans – c’est-à-dire les promotions incorporées de 1995 à 2010 – l’attrition annuelle observée connaît une hausse récente, mais durable, du nombre de ceux qui décident de démissionner avant 15 ans de services. Ce phénomène est suivi avec attention par l’armée de terre et demande à être observé dans la durée afin d’en mesurer les conséquences, notamment sur la constitution des volumes d’officiers supérieurs ;

En second lieu, pour les officiers sous contrat, parmi les départs subis, les non-renouvellements de contrat du fait des intéressés sont en hausse depuis deux ans :

—  le taux des départs, à la suite du non-renouvellement du primo contrat, des OSC/E avant la prise du commandement d’une unité élémentaire a triplé (29 % en 2011 contre 10 % en 2010). Une hausse de 5 % a été enregistrée pour les OSC/S ;

—  le taux des départs, à la suite du non-renouvellement de contrat des « hors primo contrats » – départs volontaires à l’issue du temps de commandement d’une unité élémentaire – des OSC/E est de 23 % contre 12 % en 2010. Les OSC/S enregistrent 17 % de départs subis contre 10 % en 2010.

Le nouveau modèle d’officier repose sur des équilibres profondément modifiés, du fait de la forte diminution des recrutements directs et semi-directs au profit des contractuels et des officiers de recrutement plus tardif. Aussi l’attrition des jeunes officiers de carrière et les départs d’officiers sous contrat « du fait de l’intéressé » retiennent-ils toute l’attention de l’armée de terre.

Les estimations pour l’année 2010 montrent des taux de départs en retrait par rapport à 2009. Cette situation résulte d’une politique d’aide aux départs ciblée et d’une tendance à la stabilisation en fin de première année de restructuration.

Le taux de renouvellement des premiers contrats se situe à hauteur de 84 %. Le renouvellement du premier contrat permet aux sous-officiers de rentrer dans le cursus de formation de seconde partie de carrière – avec le brevet supérieur de technicien de l’armée de terre (BSTAT) à la fin du deuxième contrat – afin d’honorer à terme les postes de responsabilité plus élevée. Une priorité doit donc être accordée pour inciter les sous-officiers à renouveler ce premier contrat.

La mise en place du BSTAT rénové - mieux dimensionné et recentré sur les besoins opérationnels - en 2012 devrait inciter les sous-officiers à renouveler leur premier contrat de façon plus importante. De même, l’effort porté sur le recrutement semi-direct — population plus fidèle que le recrutement direct — devrait se traduire à terme par une amélioration globale du renouvellement du premier contrat.

La fidélisation est une véritable priorité en ce qui les concerne. En effet pour cette catégorie de personnel, l’armée de terre présente deux fragilités :

—  une attrition de la ressource, après recrutement, encore trop importante ;

—  une fidélisation sur le long terme, qui reste une préoccupation majeure.

Le taux de dénonciation continue d’être important au cours de la première année. L’attrition s’élève en effet en moyenne à 28,7 % depuis 2008, la cible de l’armée de terre étant de 15 %. Le rapporteur tient à souligner l’innovation majeure que constitue en ce domaine la généralisation des centres de formation initiale des militaires du rang (CFIM). Bien qu’encore trop récente pour pouvoir en tirer des conclusions durables, cette création semble porter ses fruits. À la suite d’un déplacement au CFIM de Verdun au mois de septembre dernier, le rapporteur a pu observer la pertinence d’un tel système d’instruction coordonné au niveau national : le taux d’attrition s’élève pour le centre à 17 %, ce qui est très encourageant.

Les motifs avancés pour expliquer l’attrition sont notamment l’éloignement familial, l’inaptitude à l’armée, à la vie en collectivité, et la mauvaise perception de l’institution. Il faut de toute façon garder à l’esprit qu’un seuil plancher d’attrition existe en dessous duquel il ne sera pas possible de descendre.

Le taux de renouvellement du primo contrat à 5 ans reste en deçà des attentes de l’armée de terre : il se situe en moyenne à 30,3 % depuis 2008, la cible modèle étant de 40 % hors recrutement interne.

De plus le turn-over des effectifs reste important, l’ancienneté moyenne de service n’est que de 6 ans et 4 mois – la cible de l’armée de terre étant fixée à 8 ans –, avec un fort déséquilibre entre les métiers du « contact » (infanterie, cavalerie, artillerie, génie) qui connaissent une ancienneté moyenne de 5 ans et les métiers du « soutien » qui connaissent pour leur part une ancienneté moyenne de 7 ans et demi.

Si la situation quantitative globale est satisfaisante, elle reste toutefois instable et trop dépendante du recrutement. En outre, l’armée de terre connaît un déficit quantitatif de militaires du rang ayant entre 5 ans et 11 ans de service, préjudiciable dans la mesure où ce sont là les militaires du rang les mieux formés, les mieux entraînés et les plus expérimentés.

Pour remédier à ces difficultés, l’armée de terre a pris récemment un ensemble de mesures :

—  elle souhaite assurer un développement des perspectives d’emploi des engagés en terme de durée de contrat avec notamment l’assouplissement des conditions à remplir au renouvellement à 11 ans et la suppression du palier à 22 ans. De plus ont été revues les perspectives d’évolution de carrière via une ouverture des recrutements vers les corps des officiers et des sous-officiers ;

—  elle a procédé à une amélioration de la qualité d’écoute et de suivi des militaires du rang par une orientation annuelle individuelle couplée avec la notation et une simplification des processus de certification professionnelle ;

—  elle a renforcé l’attractivité du renouvellement de contrat au-delà de 5 ans en valorisant financièrement les primes à cette échéance (mesures catégorielles 2011 reportées en 2012) ;

—  elle a mis en œuvre un nouveau parcours professionnel à étapes. Un militaire du rang nouvellement recruté doit servir en premier lieu dans le cœur des métiers du contact et du soutien opérationnel, les fonctions du soutien et de l’AGSC étant désormais réservés à la deuxième partie de carrière ;

—  elle a uniformisé et amélioré l’encadrement pour la formation initiale générale des militaires du rang par la mise en place des centres de formation initiale des militaires du rang (CFIM) qui produisent leurs premiers effets bénéfiques. Néanmoins le rapporteur souhaite que soit suivi le nombre de dénonciations dans la période post-CFIM, c’est-à-dire lors du retour en régiment, où le jeune militaire du rang va recevoir sa formation spécialisée.

Les CFIM

La mise en place des centres de formation initiale des militaires du rang (CFIM) répond à deux objectifs principaux :

—  uniformiser et professionnaliser la formation initiale des militaires du rang. ;

—  contenir l’attrition en dessous du seuil de 15 %.

Les CFIM ont pour mission de mettre en œuvre la formation générale initiale (FGI), qui sera par la suite complétée au sein des régiments par la formation de spécialité initiale (FSI). La FGI est une période clé dans l’apprentissage du métier de soldat. En effet c’est désormais dans les CFIM que les jeunes engagés vont progressivement intégrer la communauté militaire et apprendre le savoir être militaire, recevoir le socle d’aptitudes nécessaires à l’exécution de leurs missions et acquérir les fondamentaux de l’instruction militaire.

Depuis sa création, le dispositif est peu à peu monté en puissance et assure un véritable maillage du territoire : dix CFIM ont été mis en place en 2010 (11), auxquels il faut ajouter le CFIM de Dieuze qui a ouvert le 1er juillet 2011 et celui de Montlhéry qui est opérationnel depuis le 1er octobre dernier.

La réorganisation de la formation initiale des engagés volontaires a généré peu de coûts supplémentaires, si l’on exclut un effort financier conjoncturel, lié à l’adaptation nécessaire des infrastructures et au paiement des indemnités de service en campagne (ISC) pour l’encadrement tournant. La mise en place des CFIM s’est faite à partir des ressources humaines et financières auparavant affectées à la formation initiale dans les régiments. Le budget correspondant a donc été transféré des régiments vers les CFIM. L’uniformisation et la professionnalisation de la formation initiale ont permis de coordonner la pédagogie et les programmes d’instruction dans les différents centres. Désormais chaque nouvelle recrue recevra le même socle de fondamentaux militaires avant de s’en retourner dans son régiment pour y recevoir l’instruction correspondant à la spécialité qu’elle s’est choisie.

Le rapporteur tient à souligner – alors que la première année de fonctionnement des CFIM n’est pas encore achevée – les effets positifs sur le taux d’attrition d’une telle réorganisation de la formation initiale.

En 2011, 588 militaires de l’armée de terre ont été blessés en service dont 292 en Afghanistan et 324 dans les autres opérations extérieures. Au-delà de la prise en charge médicale - assurée par le service de santé des armées - ont été créées dans l’armée de terre des structures spécialisées dans le soutien aux blessés et dans l’accueil des familles.

La cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (CABAT) a été mise en place en 1993 pour accompagner les personnes touchées dans l’accomplissement de leur mission. Depuis sa création, elle a suivi plus de 5 300 blessés. La moyenne est à présent de 750 blessés par an dont 300 qui nécessiteront un accompagnement dans la durée. La CABAT est composée de quatorze personnes, dont une issue de l’action sociale des armées.

Le rapporteur tient à insister sur le sort des blessés de notre armée de terre et veut souligner l’engagement et le dévouement de nos soldats. Il a pu en rencontrer plusieurs à l’occasion d’un déplacement à l’hôpital d’instruction des armées Percy à Clamart, constatant la qualité des soins prodigués et la compétence des équipes du service de santé des armées. Ce qui l’a le plus frappé est la force de l’engagement de ces soldats blessés très souvent jeunes – qui souhaitent ardemment réintégrer leur régiment.

La CABAT joue un rôle d’interface et de « facilitateur » vis-à-vis du blessé et de son entourage. Elle est selon l’expression de l’ancien CEMAT, le général Irastorza, une « tour de contrôle » des blessés de l’armée de terre. Elle prend ainsi en charge le transport, l’accueil, l’accompagnement et l’hébergement des familles. Il est d’ailleurs actuellement question de construire sur l’emprise même de l’hôpital Percy un bâtiment qui serait réservé à l’hébergement des familles, leur permettant ainsi de rester au plus près du blessé, tout au long de sa convalescence. Le projet en est aujourd’hui à ses prémices, mais il faut savoir que les familles de blessés sont d’ores et déjà aidées par la CABAT pour leur logement – qui a notamment lieu dans des hôtels – aux frais de l’armée de terre.

Une fois l’état de santé du blessé stabilisé, l’accompagnement s’inscrit dans la durée jusqu’au retour en activité, comme militaire, personnel civil de la défense ou dans le privé. Les équipes de la CABAT gardent un contact permanent et individualisé avec chaque blessé, l’aide dans toutes ses démarches administratives, soutiennent sa réinsertion, en collaboration interne avec la direction des ressources humaines de l’armée de terre (DRHAT) et avec l’aide de l’Agence de reconversion de la défense (ARD).

La CABAT cherche en priorité à retrouver une place pour ses blessés au sein de l’armée de terre – ce qui est le souhait de la très grande majorité de ceux rencontrés par le rapporteur. Mais cette réinsertion peut également se faire dans la fonction publique au sein du ministère de la défense ou dans toute autre administration, voire dans le secteur civil.

Pour remplir cette mission, la CABAT ne dispose pas de budget propre. Pour l’aider dans sa tâche, elle sollicite le soutien de nombreuses associations dont « Terre Fraternité », association d’entraide de l’armée de terre.

La CABAT assure également le lien avec les régiments, au niveau local. Dès la diffusion de l’information sur le blessé, une cellule de crise (12)renforcée par les moyens du GSBdD est mise en place pour organiser un soutien de proximité. Des officiers d’environnement humain (OEH) ont également été spécialement formés au sein des unités pour soutenir les blessés et les familles de décédés, en liaison avec les assistantes sociales. Le commandant de formation préside ensuite trimestriellement la commission locale de suivi qui regroupe l’ensemble de ces acteurs et à laquelle s’associent les services du GSBdD. Ces commissions sont chargées de suivre dans la durée le blessé, le malade ou la famille du décédé et de rendre compte à la CABAT de leurs conclusions (13).

Le travail de l’armée de terre – et plus particulièrement celui du service de santé des armées et de la CABAT – auprès des blessés est exemplaire. La prise en charge des blessés de l’armée de terre et de leurs familles se doit d’être à la hauteur de l’engagement de nos soldats.

Le rapporteur tient néanmoins à souligner le défaut de communication de l’armée de terre sur ses soldats blessés et la prise en charge qu’elle leur offre via la CABAT – et dont elle n’a pas à rougir. Ces soldats, qui le plus souvent souhaitent individuellement rester discrets, méritent collectivement la reconnaissance de la Nation. Tout en les préservant, l’armée de terre pourrait insister sur le travail du service de santé des armées et le dévouement de la CABAT. Un tel discours paraît indispensable pour faire pleinement reconnaître à l’extérieur l’engagement de nos soldats blessés. Ce travail de communication pourrait également s’avérer extrêmement positif pour le moral de leurs camarades en opération et jouer en faveur du recrutement en donnant une bonne image de notre armée, qui sait effectivement s’occuper des hommes et des femmes qui ont choisi de rejoindre ses rangs.

La réforme des retraites a effectivement un impact sur le budget 2012 de l’armée de terre puisque le BOP terre bénéficie dans le PLF 2012 de mesures spécifiques correspondantes. En effet 2,9 millions d’euros sont prévus, au titre du financement de l’impact de la réforme sur les retraites, afin de compenser l’augmentation mécanique du glissement vieillesse technicité (GVT), ainsi que 1,5 million d’euros au titre de l’indemnité proportionnelle de reconversion.

Cependant il faut relever que le coût réel de la réforme des retraites pour le BOP terre ne pourra pas être analysé avant la fin de la gestion 2012.

La réforme des retraites a également un impact sur les reconversions. Une tendance se dessine en faveur d’un différé des reconversions, ce qui devrait conduire par conséquent à une baisse du volume dans l’immédiat.

En effet, les militaires servant en vertu d’un contrat dont l’échéance était programmée selon des conditions antérieures à la loi de 2010, se sont vu proposer une prorogation de contrat leur permettant de répondre aux nouvelles conditions édictées, en particulier celles relatives à la liquidation d’une pension de retraite militaire, voire à une liquidation avec bénéfice du minimum garanti. Les militaires de carrière ont, quant à eux, majoritairement repoussé la date de leur radiation des cadres jusqu’à la nouvelle limite d’âge statutaire instaurée par la loi.

Ce différé des départs, qui est une conséquence logique de la loi 2010, contrarie la manœuvre de réduction des effectifs conduite par l’armée de terre.

Le tableau ci-après dresse un bilan des engagements à servir dans la réserve (ESR) souscrits pour les années 2005 à 2010 (14) et les perspectives de recrutement pour 2011.

Évolution des effectifs, de la durée d’activité et des crédits alloués a la réserve

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Prévision
2012

Nombre de réservistes

16 485

17 002

18 249

18 348

17 225

16 987

16 300

nc

Nombre moyen de jours d’activité

20

22

25

22

22

24

nc

nc

Budget RCS

(en millions d’euros)

32,23

37,06

40,94

41,6

41,9

44,4

39,4

37,4

Progression

15 %

15 %

10 %

1,6 %

0,7 %

6 %

- 11,26 %

- 5 %

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

La baisse des effectifs entamée en 2009 a perduré en 2010. Cette tendance résulte principalement du non-renouvellement de contrats par les intéressés eux-mêmes décidés fin 2009, mais prenant effet en 2010 et de la poursuite de la mise en œuvre des dissolutions et restructurations de formations de l’armée de terre. Le personnel de réserve est en effet fortement ancré dans sa garnison. Le taux d’attrition de cette ressource est ainsi plus élevé que pour le personnel d’active, dès lors que son unité est dissoute ou transférée dans une autre garnison, éloignée de plusieurs centaines de kilomètres, et qu’aucune autre unité n’existe dans les environs.

Malgré les contraintes budgétaires, dans la réserve avait été observée en 2009 une légère augmentation de la durée moyenne d’activité atteignant alors les 22 jours. L’année 2010 a été marquée par un taux d’activité de 24 jours, renouant ainsi avec les objectifs prescrits, notamment grâce à la mise en place de la nouvelle gouvernance des réserves qui a déconcentré la gestion des crédits de titre 2 réserve, au niveau des têtes de chaîne.

La cible à atteindre à l’horizon 2015 est de 22 000 réservistes sous ESR - 18 400 pour les formations du BOP terre et 3 600 pour les formations hors BOP terre - effectuant un taux d’activité annuel moyen de 25 jours.

Le chef d’état-major de l’armée de terre a fait de la réserve opérationnelle un de ses axes d’effort, prônant plus particulièrement une indispensable optimisation de cette ressource. Cette dernière doit être confirmée et renforcée dans sa dimension de « réserve d’emploi », véritable complément de l’armée d’active. La réserve opérationnelle est destinée à renforcer la capacité opérationnelle de l’armée de terre au moyen de volontaires sous contrat ESR venant du secteur civil ou anciens militaires. Ils sont affectés en tant que réservistes dans toutes les formations d’active, soit en complément individuel, soit en unités constituées au sein d’un régiment d’active.

Les réservistes participent à l’ensemble des activités de l’armée de terre. Chaque année, plusieurs centaines d’entre eux sont engagés en opérations extérieures. De même, plusieurs milliers participent à la sécurité du territoire national (Vigipirate, lutte contre l’incendie, etc.). Néanmoins des facteurs limitent leur participation. Tout d’abord la formation avant projection doit être la même pour la réserve et l’active. En effet les théâtres d’opérations extérieures présentant des risques élevés, cette formation identique est un impératif absolu. Mais cette obligation impose aux réservistes d’étaler dans le temps une formation spécifique qui peut déjà être longue en elle-même – par exemple d’une durée de six mois avant projection en Afghanistan. De plus les employeurs civils peuvent se montrer réfractaires à l’idée de laisser partir un de leurs employés pendant plusieurs mois en opération.

Il faut souligner la mise en place d’un dispositif d’alerte impliquant la réserve opérationnelle de l’armée de terre à compter du 1er juillet 2011. Ce dispositif particulier, appelé « Guépard Réserve », doit permettre d’engager sous 48 heures, à raison d’une unité de marche par brigade, un total de 800 réservistes pour une durée de huit jours.

Lors de son précédent avis, le rapporteur avait fait part de ses inquiétudes concernant le programme de lance roquette unitaire (LRU), les négociations du contrat n’avançant pas de manière satisfaisante. Il se félicite donc des importantes avancées qui ont eu lieu récemment, permettant de finaliser une commande de 13 LRU, qui seront disponibles à l’horizon 2014. La mise en service des LRU permettra de disposer pour nos unités d’une capacité unique de tir à longue portée (70 km) très précis, très rapide et apte par tous temps, constituant ainsi un facteur de supériorité opérationnelle évident.

L’armée de terre engage en permanence, depuis le 30 juillet 2009, trois hélicoptères Tigre sur le théâtre afghan, où ils constituent une arme très performante. Ils sont en effet, dotés d’une forte puissance de feu et embarquent des systèmes de visée de dernière génération leur permettant de traiter des objectifs avec une grande précision, de jour comme de nuit.

Dans le cadre de l’opération PAMIR, ils accomplissent des missions sur l’ensemble du théâtre et principalement dans la zone de responsabilité française, dont ils peuvent atteindre tous les points en moins de 20 minutes. Depuis 2009 ils ont effectué plus de 2 500 heures de vol, et ont tiré près de 1 000 roquettes et 18 000 obus de 30 mm dans des missions d’appui direct des unités terrestres françaises, afghanes ou alliées au contact des insurgés.

Les Tigre appuient les hélicoptères de manœuvre lors des missions de transport tactique ou d’héliportage des groupements tactiques interarmes (GTIA) et effectuent des missions d’appui au profit des troupes au sol. En Afghanistan, aucune patrouille ni opération n’est conduite sans s’assurer de la disponibilité des appuis air-sol fournis par des avions ou des hélicoptères. Les hélicoptères Tigre concourent directement à l’efficacité de la force et permettent d’accroître notablement sa réactivité dans la conduite des opérations en renforçant sa liberté d’action. Leur emploi réduit les risques d’attaques par EEI et d’embuscades liés à l’utilisation des axes routiers. En zone montagneuse, ils permettent de surprendre l’ennemi et facilitent la saisie des points hauts, indispensables à la sûreté des opérations dans les vallées.

Le rapporteur observe que l’intervention de l’ALAT en Libye a constitué un tournant dans l’opération Harmattan. Un groupement aéromobile (GAM) de l’armée de terre a été en effet engagé depuis le 26 mai 2011 en complément de la composante aérienne déployée initialement. Ce déploiement a nécessité la projection de près de 220 militaires de l’armée de terre.

Le rapporteur tient également à souligner l’efficacité du travail réalisé en commun par la marine nationale et l’armée de terre à cette occasion. Cette complémentarité fut exemplaire. Mis sur pied et embarqué sur très court préavis - moins de six jours - sur un bâtiment de projection et de commandement (BPC) de la marine nationale, ce GAM a principalement effectué des missions d’attaque et de neutralisation des forces pro-Kadhafi sur la bande côtière dans les régions de Misratah, Brega et Tripoli.

Jusqu’à dix-huit hélicoptères de l’armée de terre et une structure de commandement embarquée — sur le BPC — ont été engagés. On a ainsi compté deux hélicoptères d’appui-protection Tigre, douze hélicoptères Gazelle armés de missiles antichar HOT, de canons de 20 mm ou de missiles de défense antiaérienne MISTRAL, ainsi que 4 hélicoptères de manœuvre Puma.

Les équipages ont effectué près de 900 heures de vol, tiré 400 missiles HOT, 1 200 roquettes et 10 000 obus de 20 et 30 mm. Ces missions ont permis la destruction de plus de 500 objectifs, notamment des véhicules des forces pro-Kadhafi, des bâtiments de commandement, des positions de combat et des radars. Ces actions offensives, menées exclusivement de nuit sous forme de raids dans la profondeur, ont été d’une grande efficacité et d’une grande précision malgré une défense adverse particulièrement agressive. La composante aéromobile s’est avérée être un complément essentiel à l’action aérienne pour le traitement des cibles d’opportunité, et les pertes des forces pro-Kadhafi.

Le programme Scorpion, projet phare de l’armée de terre, est vital pour son avenir. La modernisation de l’outil de combat aéroterrestre est une des priorités avancées dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Il doit assurer cette transformation en améliorant l’agilité, la « survivabilité » et la polyvalence des unités du combat de contact, qui sont le cœur même de l’engagement au sol et des opérations actuelles.

Ces unités de contact sont constituées en GTIA, formés à partir des régiments d’infanterie, de cavalerie, du génie et d’artillerie. Leur capacité opérationnelle est déterminée par leurs moyens principaux de combat (plates-formes armées, équipements individuels et collectifs) et leur aptitude à les combiner, via des systèmes d’information et de combat, afin d’accroître les synergies entre les différentes composantes. Le programme Scorpion vise la transformation cohérente des capacités des GTIA. Le choix de recourir à un programme unique répond à cet impératif de cohérence. Il s’agit en effet de concevoir les GTIA comme des ensembles intégrés, et non plus comme une juxtaposition de moyens.

Cette approche globale doit assurer à terme des gains opérationnels, mais elle doit également être génératrice de gains financiers. Le programme Scorpion s’inscrit dans une démarche de maîtrise de l’empreinte logistique et des coûts associés. Il permet de constituer une « communauté » d’équipements standardisés, générant des gains financiers évidents. Par exemple, pour le choix des plateformes, sera systématiquement appliqué le principe de « juste suffisance » technologique. Elles seront donc acquises en version de base et, en fonction des besoins et des théâtres d’opération, pourront par la suite être équipées de kits additionnels. De plus, la maintenance sera fondée sur des partenariats avec les industriels, qui devront s’engager sur des résultats et partageront la responsabilité de la performance du maintien en condition opérationnel des systèmes.

Le programme Scorpion, qui s’étale sur quinze ans, est articulé en deux étapes successives. La première s’étale de 2010 à 2021, visant un premier niveau de combat coordonné avec le lancement de la modernisation, avec mise en cohérence, des moyens des GTIA. Cette première étape devrait permettre d’atteindre les trois niveaux capacitaires suivants :

—  en 2015, l’homogénéisation des systèmes d’information tactique devrait être atteinte ;

—  en 2018, devrait intervenir le déploiement des VBMR ainsi que la mise en réseau des informations ;

—  à partir de 2021, devraient être livrés l’engin blindé de reconnaissance et de combat (EBRC), successeur de l’AMX10RC, et le Leclerc rénové.

À l’issue de cette première étape, 977 VBMR, 72 EBRC et une partie des 254 Leclerc rénovés pourraient être livrés avec le système d’information tactique partagé.

La deuxième étape du programme Scorpion, qui s’étale de 2015 à 2021, doit fournir à l’ensemble des GTIA des forces terrestres les capacités de préparation et d’engagement au standard Scorpion. Cette étape est actuellement au stade d’initialisation.

À terme, le programme Scorpion devrait permettre à l’armée de terre de bénéficier de 2 326 VBMR ; 254 chars Leclerc rénovés ; et 292 EBRC. Elle devait également disposer d’un système d’information du combat Scorpion (SICS) fédérant les unités de combat.

Le ministre de la défense a approuvé le lancement du stade d’élaboration du programme Scorpion le 22 février 2010. Afin d’assurer la cohérence entre les différentes phases constituantes du programme Scorpion, un marché d’architecture de conception a été notifié le 22 novembre 2010 au groupement Thalès-Nexter-SAGEM. Fin 2010, le passage au stade de la réalisation a été décalé de 2012 à 2013. Ce décalage n’est pas inquiétant à condition qu’il n’augure pas d’une remise en cause ultérieure de l’opération.

Le coût du stade d’élaboration de l’étape 1 est de 70 millions d’euros. Les estimations pour le stade de la réalisation de l’étape 1 sont comprises entre 3,6 millions d’euros et 4,8 millions d’euros. La priorité a été donnée au développement du VBMR livré à compter de 2016 ; les premières livraisons de Leclerc rénovés et d’EBRC sont décalées à 2019.

Le rapporteur tient à souligner que ce programme majeur pour l’armée de terre est un modèle de conduite de projets coordonnés. Si, à l’avenir, la contrainte budgétaire impose que ses ambitions soient revues à la baisse, la réalisation de ce programme pourrait être étalée dans le temps mais en aucun cas il ne saurait être démantelé. Un démantèlement, qui conduirait en fait à un retour à une juxtaposition de programmes, menacerait la cohérence de l’ensemble et pourrait réduire à néant tous les efforts entrepris, rendant ainsi très compliqué la coordination des GTIA.

La baisse de disponibilité technique opérationnelle (DTO) enregistrée entre 2010 et 2011 est notamment liée au soutien des OPEX qui mobilisent les ressources consacrées au maintien en condition opérationnel et aux opérations de rénovation-modernisation, immobilisant ainsi certains matériels terrestres (Leclerc, AMX 10 RCR, VCI et VAB). Cela conduit par conséquent à baisser les prévisions de disponibilité pour 2013.

La disponibilité des hélicoptères de manœuvre connaît aussi une baisse en raison de l’ancienneté du parc Puma et du retard industriel en matière de visites périodiques. Une amélioration est attendue en 2012 grâce à la prolongation des matériels de l’ancienne génération et l’arrivée de ceux de la nouvelle génération.

Depuis 1999, la sollicitation des matériels s’est intensifiée, notamment en opérations extérieures (Kosovo, Côte-d’Ivoire, Liban, Afghanistan, etc.). Cet engagement opérationnel des matériels majeurs se traduit par une consommation élevée de potentiel (kilomètres, heures de fonctionnement ou de vol, nombre de tirs, etc.) afin de remplir les missions dévolues aux forces projetées et une usure – quatre fois plus élevée qu’en métropole – qui induit une hausse significative des interventions techniques correctives sur des parcs anciens soumis à des conditions d’emploi parfois très sévères comme le climat, le relief ou encore des événements d’ordre tactique.

La disponibilité technique opérationnelle des matériels terrestres en OPEX est une priorité. Avec une moyenne de 91,5 % au premier semestre 2011, elle est supérieure au seuil plancher de 90 %, tout comme en 2010, et en dépit d’une nette augmentation du nombre de matériels projetés, notamment blindés ou aéronefs. La priorité accordée aux OPEX induit certaines difficultés en métropole en matière de distribution des rechanges critiques et de mise à disposition des équipes de maintenance pour les activités moins prioritaires.

Face à la forte sollicitation des matériels en opérations extérieures et consciente de la nécessité de faire durer ces équipements jusqu’à l’arrivée de leurs successeurs, l’armée de terre a décidé de procéder à une relève des matériels majeurs. Le rythme est triennal ou quadriennal, ou fonction des impératifs d’entretien préventif correspondant à des visites profondes.

Simultanément, l’émergence des parcs de haute technologie se traduit par un saut générationnel considérable, accompagné par une hausse des coûts d’acquisition mais aussi d’entretien. Par ailleurs, ces nouvelles technologies ont également révélé des problèmes de maîtrise industrielle à l’origine de nombreux défauts de fiabilité. Le recours croissant à des contrats dits innovants, car à obligation de résultats, pour soutenir ces nouveaux équipements se heurte parfois aux difficultés de certains industriels à répondre à l’élargissement des responsabilités contractuelles.

La prolongation de matériels de l’ancienne génération et l’arrivée de ceux de la nouvelle placent l’armée de terre face à la difficulté de devoir assurer, avec une ressource en EPM placée sous forte contrainte budgétaire, le maintien en condition de matériels qui se situe aux deux extrémités du cycle de vie d’un équipement, c’est-à-dire lorsqu’il coûte le plus cher en termes de soutien.

À défaut de l’abondement de son budget EPM, l’armée de terre sera confrontée à des choix drastiques en termes de priorisation des actes techniques et d’attribution des ressources de MCO (maintenanciers, rechanges, outillages, infrastructures, contrats, etc.) entre les divers besoins de maintenance qui se présentent. Elle pourrait perdre sa cohérence, à l’instar de l’armée anglaise, entraînant des conséquences sur son niveau opérationnel, sur sa faculté à remplir la mission et sa capacité à fidéliser ses soldats.

Pour faire face à la menace permanente que représentent les engins explosifs improvisés (EEI), l’armée de terre se dote de plusieurs types de matériels par le biais d’une opération d’ensemble (OE) du nom de CARAPE (capacité de réaction et d’anticipation pour la lutte contre les engins explosifs improvisés). Les EEI représentent un danger évolutif, car les adversaires s’efforcent de s’adapter en permanence aux parades mises en œuvre. C’est également un danger protéiforme compte tenu de la variété des explosifs, des munitions et des déclencheurs utilisés, pouvant aller du plus rudimentaire au plus sophistiqué.

L’opération d’ensemble recouvre plusieurs actions complémentaires :

—  elle vise tout d’abord à interdire la mise en place des EEI à proximité des sites de nos forces ou sous notre responsabilité ;

—  elle vise également à empêcher la mise en place d’EEI sur les itinéraires utilisés ou contrôlés par nos forces ;

—  elle a pour but de rendre inopérantes les attaques adverses ;

—  elle permet de réduire les dommages directs ou indirects de ces attaques ;

—  elle a également pour but d’altérer les capacités de l’adversaire à planifier, conduire et exploiter des attaques.

L’étape 1 CARAPE vise à acquérir des véhicules de contre-minages que sont le Buffalo (15), le SOUVIM (16), et l’ARAVIS (17) et à améliorer quantitativement et qualitativement les capacités des systèmes de brouillage ainsi que la surprotection des VAB et des VBL.

La surprotection balistique des véhicules logistiques et des moyens du génie se fait à l’aide de kits Last Armor. En outre, une partie du parc GBC est équipée de cabines blindées. Enfin, une vingtaine de véhicules de transport de marque SCANIA, commandés en 2009, sont présents sur le théâtre afghan et comprennent une protection renforcée par blindage.

Les VAB déployés en Afghanistan ont bénéficié de surprotections Last Armor. Le kit de surprotection pour VBL comprend des plaques latérales en aluminium mobiles, des protections fixes contre les éclats à l’intérieur et le renforcement de la structure du véhicule pour accepter la masse supplémentaire générée.

Le VBCI est prédisposé à recevoir des kits de surprotection anti-mines. Ils ont été installés sur ceux projetés en Afghanistan. Le rapporteur tient d’ailleurs à souligner qu’un VBCI a subi récemment une attaque EEI sans aucun dommage pour le personnel embarqué. Un blindage adapté des véhicules et le respect des procédures de sécurité, concernant la vitesse de circulation par exemple, permettent de réduire de façon significative les risques pour nos troupes sur le théâtre afghan.

De même les hélicoptères TIGRE déployés sur le théâtre afghan sont dotés de protections balistiques supplémentaires.

Néanmoins le rapporteur tient à insister sur le fait qu’aucun blindage ne saurait protéger face à un EEI de taille très importante - telle qu’une charge de plusieurs dizaines de kilogrammes d’explosifs enfouie sous une route ou de 100 kg ou plus placée dans un véhicule suicide. L’augmentation du blindage ne peut que réduire les dégâts, diminuer la probabilité de décès ou la gravité des blessures. Face à de tels engins, la détection - pour désamorcer ou éviter l’EEI - la neutralisation par brouillage ou le déclenchement à distance sont actuellement les meilleures solutions.

En matière de munitions, la politique de l’armée de terre consiste à constituer un stock objectif calculé en prenant en compte, d’une part, ses besoins pour assurer son contrat opérationnel et, d’autre part, ses besoins pour assurer sa préparation opérationnelle. Les moyens mis à disposition sont prioritairement employés pour approvisionner les forces engagées en opérations et assurer les alertes. Les munitions sont également employées pour assurer la continuité de la préparation opérationnelle. Il faut également noter que les moyens mis à disposition en matière de munitions sont en dernier lieu utilisés pour constituer des stocks d’alerte et d’engagement nécessaires au soutien des contrats opérationnels.

La période couverte par la LPM 2009-2014 se caractérise par l’arrivée de nouveaux systèmes d’armes, au profit desquels l’investissement dans les munitions est important. La majorité des systèmes d’armes actuellement engagés sont d’ancienne génération et « profitent » encore aujourd’hui des stocks issus de la guerre froide. L’entrée en service des matériels de nouvelle génération – notamment les Tigre, les CAESAR, les VBCI – et leur engagement sur les différents théâtres d’opération impliquent la constitution de nouveaux stocks au regard de consommations rapides.

L’augmentation du surcoût des dépenses de munitions en opérations extérieures rend nécessaire la régénération des munitions de type et d’effet similaires à celles consommées au prix actualisé de renouvellement, et non à un prix inventaire dépassé de munitions n’existant plus sur le marché. Ainsi, le niveau des remboursements des surcoûts des années précédentes ne permet pas de renouveler les stocks à hauteur de l’attendu. Ce problème majeur d’appauvrissement est lié au remboursement insuffisant des dépenses de munitions consommées en OPEX. Il doit être corrigé pour que cet effet pervers puisse être lissé dans la durée.

Le tableau suivant établit sur la période 2008-2011 une comparaison entre l’évolution du coût inventaire des consommations de munitions en OPEX et leur coût de recomplètement. Il prend en compte à la fois les augmentations « naturelles » (inflation) pour les munitions qui restent en service, et les prix des nouvelles munitions pour celles qui sont remplacées.

Évolution du coût des consommations de munitions en OPEX

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011 (*)

Coût inventaire

4,74

11,30

14,21

28,06

Coût de recomplètement

8,01

22,44

37,96

89,83

(*) Estimation à partir des consommations du 1er quadrimestre.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

Le soutien pour les munitions des opérations en cours ne rencontre pas de difficultés particulières. Les unités disposent globalement de munitions en nombre suffisant pour s’entraîner. Néanmoins l’augmentation significative du coût des munitions de nouvelle génération conduit l’armée de terre à réduire les consommations à l’entraînement au profit d’un emploi accru de la simulation. Cette dimension est désormais intégrée dans la conception même des nouveaux systèmes d’armes. Le rapporteur appelle à la vigilance sur ce point, la simulation ne pouvant être que transitoire. Elle ne saurait remplacer un véritable entraînement en condition réelle, seul à même de maintenir et d’améliorer le savoir-faire de nos soldats en matière de tir.

Après deux ans de montée en puissance, le Service interarmées des munitions (SIMu) a été officialisé par arrêté le 25 mars 2011. Le SIMu, dans ses relations avec l’armée de terre, s’est inscrit dans la continuité de celles qui existaient auparavant avec le bureau munitions de l’ancienne direction centrale du matériel (DCMAT). Ainsi, le ravitaillement en munitions des forces, tant pour les engagements en cours que pour la préparation opérationnelle, n’a subi aucune rupture. Le soutien de l’opération Harmattan a été à ce titre exemplaire.

De plus, les capacités d’acquisition du SIMu viennent en force d’appoint à la direction générale de l’armement (DGA), pour la passation des marchés.

Le directeur du SIMu prend la responsabilité d’opérateur d’importance vitale (OIV) en lieu et place du chef d’état-major de l’armée de terre à partir des mois d’octobre-novembre 2011 et assumera la responsabilité de la sûreté et de la protection des dépôts de munitions. L’armée de terre continuera à participer à la protection de ses anciens dépôts par la mise à disposition de moyens et de personnes.

L’engagement des forces françaises hors métropole avait mobilisé en 2010 21 214 personnes. Ce nombre devrait atteindre les 18 383 pour l’année 2011.

L’Afghanistan reste le premier théâtre d’engagement avec près 7 500 personnes mobilisées en 2011 contre 7 380 pour l’année 2010. La présence de l’armée de terre se trouve donc renforcée. Néanmoins, dans le droit fil des annonces faites par le Président de la République, cet effectif devrait être progressivement réduit à partir de l’année 2012 pour atteindre 5 700 personnes mobilisées.

La participation de la France au Liban dans le cadre de la FINUL a mobilisé près de 4 200 personnes en 2011.

L’armée de terre est fortement présente sur le continent africain. En 2011, 1 750 personnes ont été déployées dans le cadre de l’opération Licorne en Côte-d’Ivoire. Au Tchad 1 500 personnes ont été mobilisées au sein de l’opération Epervier. Il faut souligner à ce propos que conformément au Livre blanc, les troupes françaises n’ont pas vocation à rester présentes au Tchad dans leur format actuel. À terme, l’évolution du dispositif devrait conduire au maintien d’une activité essentiellement orientée vers des missions de coopération avec les forces tchadiennes. La révision des accords de défense, qui devrait être engagée d’ici la fin de l’année 2011, permettra de définir le format final de la présence militaire française.

Au Kosovo, la présence des forces françaises se réduit progressivement. 2 173 personnes étaient mobilisées en 2010 dans le cadre de l’opération Trident contre 850 personnes en 2011. Les prévisions pour l’année 2012 pourraient faire baisser ce nombre à environ 100 personnes.

Le tableau suivant retrace par mandats les principales opérations et précise les effectifs déployés en 2011.

Effectifs Armée De Terre

 

Aires

Opérations

Prévisions des effectifs mobilisés
en 2011

Moyenne des effectifs présents sur le théâtre
au 1er semestre 2011

Prévisions des effectifs mobilisés
en 2012

OTAN

EUROPE

KOSOVO — TRIDENT

850

417

100

BOSNIE — NATO HQ SARAJEVO

0

0

0

ITALIE — JFC NAPLES

0

0

0

PAYS-BAS — JFC BRUNSSUM

6

3

6

RMF OTAN BRUXELLES (à/c 2010)

4

2

4

BELGIQUE — SHAPE

18

9

18

ASIE

AFGHANISTAN — PAMIR

7 250

3 098

5 400

AFGHANISTAN — EPIDOTE (à/c 2010)

250

105

300

Sous-total OTAN

8 378

3 634

5 828

Union Européenne

AFRIQUE

EUSEC — RDC

25

10

25

OUGANDA — EUTM SOMALIA
(à/c 2010)

12

5

12

 

RMF UE BRUXELLES (à/c 2010)

4

3

4

EUFOR FLORENCE (à/c 2010)

11

3

5

EUFOR LIBYE (à/c 2011)

8

0

0

KOSOVO EULEX (à/c 2010)

2

2

2

ANTILLES

HAITI SÉISME 2010 (à/c 2010)

0

0

0

Sous-total Union européenne

62

23

48

Coalition

ASIE

PAKISTAN — TADJIKISTAN — RENFORTSHERACLES

20

10

20

MOYEN-ORIENT

FMO — SINAI

3

2

3

Sous-total Coalition

23

12

23

National

AFRIQUE

TCHAD — EPERVIER

1 500

551

1 500

RCI — LICORNE

1 750

757

500

RCA — BOALI

700

218

500

MAURITANIE — DAMO (à/c 2010)

120

30

120

Renfort Ambassade TOGO (à/c 2010)

0

0

0

ANTILLES

HAITI SEISME 2010 (à/c 2010)

0

0

0

MÉDITERANNÉE

HARMATTAN (début mai 2011)

400

199

0

Sous-total National

4 470

1 755

2 620

Forces ONU

AFRIQUE

SAHARA OCCIDENTAL — MINURSO

20

10

20

RDC — MONUC — MONUSCO

10

5

10

RCI — ONUCI

14

7

14

LIBERIA — MINUL

2

1

2

TCHAD — RCA — MINURCAT (fin en mars 2010)

0

0

0

MOYEN-ORIENT

PROCHE ORIENT — ONUST

2

1

2

LIBAN — FINUL

4 200

1 233

1 400

ANTILLES

HAITI — MINUSTAH

2

1

2

AMÉRIQUE

NEW-YORK — DOMP

0

0

0

Sous-total Forces ONU

4 250

1 258

1 450

Forces spéciales

1 200

341

1 200

TOTAL FORCE (EFFECTIF CUMULÉ)

17 183

6 682

9 969

TOTAL GÉNÉRAL (EFFECTIF CUMULÉ)

18 383

7 023

11 169

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

     

Les surcoûts liés au OPEX en 2011, toutes armées confondues, sont évalués à 877,7 millions d’euros en excluant de ce calcul les surcoûts engendrés par l’opération Harmattan. Ces derniers sont évalués entre 300 et 350 millions d’euros au 1er octobre 2011.

Chaque année, les armées agissent sur le territoire national en soutien, en accompagnement ou en complément des forces et moyens civils spécialisés.

Les opérations intérieures peuvent être permanentes, ce qui est notamment le cas de la protection du centre spatial de Kourou et du plan Vigipirate. Elles peuvent aussi être récurrentes comme la lutte contre les feux de forêts avec l’opération Héphaïstos durant la période estivale. Enfin elles peuvent être circonstancielles. Elles sont alors très diverses, consistant par exemple à assurer la protection des sommets internationaux ou à gérer les conséquences de catastrophes naturelles, sanitaires, voire technologiques.

En cas de crise majeure, les armées, possédant une forte résilience et des capacités de déploiement rapide, sont en mesure de mettre sur pied une force à dominante terrestre pouvant participer à la protection du territoire national en renfort du dispositif de sécurité publique et de sécurité civile.

Il est à noter que depuis 2010, les armées ont accentué leurs efforts dans la lutte contre l’orpaillage illégal et l’immigration clandestine en Guyane dans le cadre de l’opération Harpie.

En régression en 2012 par rapport à 2011, le nombre de journées de préparation et d’activité opérationnelle (JPAO), devrait s’élever à 111 jours. Pour l’armée de terre, l’objectif LPM est de 150 JPAO.

La mise en condition opérationnelle (MCP), c’est-à-dire la préparation avant projection est maintenue à son niveau actuel afin de garantir au personnel engagé en opération une préparation adéquate. Simultanément, le contenu des JPO (préparation opérationnelle) hors MCP sera adapté aux possibilités budgétaires – avec par exemple des exercices poste de commandement sans troupe ou encore des entraînements en garnison sans matériels majeurs. Néanmoins cette situation de fait conduit à une disparité entre les unités en préparation de projection et les autres, entre les moyens mis à disposition dans les centres de préparation et les garnisons. Cet écart poussé à l’extrême pourrait faire penser à une « armée à deux vitesses », ce qui serait à coup sûr très dommageable pour l’image de l’armée de terre et pour le moral de nos troupes.

L’objectif pour la préparation opérationnelle des pilotes d’hélicoptère de l’ALAT s’élève à 180 heures de vol par pilote et par an. Les économies budgétaires conduisent à accroître les vols sur matériels de substitution, ainsi qu’à recourir davantage à la simulation. Malgré les efforts mis en œuvre, les disparités de niveau d’entraînement perdurent entre pilotes. Pour 2011, l’effort moyen est fixé à 172 heures de vol par pilote, réparties de la façon suivante :

—  pilotes sur hélicoptères légers ou de manœuvre : 160 heures de vol ;

—  pilotes sur hélicoptères Tigre : 140 heures de vol ;

—  pilotes du 4e RHFS : 200 heures de vol ;

Il convient d’y ajouter 8 heures d’entraînement par équivalence.

Pour mémoire, les heures de vol moyennes réalisées les années précédentes ont été de 168 heures de vol par pilote en 2008, 170 heures de vol en 2009 et 177,4 heures de vol en 2010.

Pour atteindre l’objectif de 180 heures de vol, l’armée de terre poursuit depuis 2010 une politique visant à compléter les vols sur appareils d’armes par des vols effectués sur hélicoptères de substitution et sur simulateurs qui, selon le type et le perfectionnement technologique, sont comptabilisables comme heures d’entraînement par équivalence, après affectation d’un coefficient (18). Cette démarche permet de limiter le nombre d’heures réelles consacrées à l’entraînement et, par conséquent, d’en maîtriser les coûts.

Le tableau ci-après rappelle les objectifs pour 2012 et les résultats obtenus en 2009, 2010 et 2011.

Activité des forces

Année

Nombre de JPAO

Nombre d’heures de vol
par pilote

2009

105

170

2010

119

177

2011*

116

180

Cible 2012

111

180

Objectifs LPM 2009-2014

150

180

* Prévisions actualisées au 30 juin 2011.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

Le rapporteur a pu se rendre sur le site du Centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) de Sissone et tient à en souligner l’excellence. Ce centre unique au monde de préparation aux combats en zone urbaine, ainsi qu’au tir en zone urbaine depuis peu, nous est envié par un grand nombre de nos partenaires, qui commencent d’ailleurs à venir s’y entraîner.

Le CENZUB fait partie intégrante du pôle Champagne, qui constitue un des deux grands pôles d’entraînement de l’armée de terre, avec le pôle Provence – au sein duquel se trouve notamment le camp de Canjuers où se préparent nos soldats avant projection en Afghanistan. Ces deux pôles se trouvent sous l’autorité du Commandement des centres de préparation des forces (CCPF). Créé le 1er juillet 1997, le CCPF a conduit au regroupement des centres d’entraînement dédiés à la préparation opérationnelle, permettant de rationaliser et d’optimiser l’entraînement de nos troupes en assurant une meilleure cohérence de l’entraînement et en permettant aux unités de se consacrer à la préparation opérationnelle dans les meilleures conditions possibles, dans des créneaux planifiés, préservés de toute autre contrainte.

Le CENZUB, comme les autres centres du CCPF, offre des entraînements clé en main. Les centres du CCPF permettent aux forces venues s’y entraîner de bénéficier de grands espaces de manœuvres pour les exercices, d’une concentration de moyens optimisés et d’un environnement interarmes et interarmées, dont elles ne disposent pas dans leurs garnisons.

Le CENZUB monte peu à peu en puissance depuis son ouverture en 2005. Le très novateur centre de tir en zone urbaine devrait ouvrir très prochainement et atteindre son instrumentation complète en 2017. Bien qu’extrêmement sollicité par les unités de l’armée de terre, le CENZUB pour pleinement être rentabilisé doit s’ouvrir plus encore sur l’extérieur, en accueillant notamment des unités de gendarmerie par exemple, ainsi qu’un nombre plus important de régiments étrangers. Ces unités extérieures à l’armée de terre, pour pouvoir profiter des installations et du savoir-faire des équipes pédagogiques du CENZUB, doivent s’acquitter d’un forfait journalier.

Le CENZUB se base sur un recours à la simulation qui permet d’offrir un entraînement complet le plus réaliste possible. Il s’étend sur 60 km2 et se compose notamment d’une véritable ville reconstituée, comprenant des axes de circulation, des habitations, un hôpital, un lieu de culte. Au cours de l’entraînement, les soldats se retrouvent dans une situation de combat face à une force adverse, qui peut simuler tout à la fois une force ennemie conventionnelle, une milice, un commando, ou une foule hostile.

Ce centre d’entraînement est un pôle d’expertise pour les espaces confinés et habités, qui sont des zones de combat difficile, d’où la très grande nécessité de s’y préparer. En effet le milieu urbain se caractérise par une superposition de réseaux, des zones alternativement claires et obscures, la présence d’une population civile, et une distance d’engagement qui peut aller de 5 à 100 mètres. Il faut souligner que la possibilité d’être confronté à des distances d’engagement très courte implique un emploi spécifique des armes.

Les missions du CENZUB sont les suivantes : il doit entraîner tous les types d’unité, il doit assurer la mise en condition avant projection et l’engagement au contact des foules. Il doit également instruire et entraîner au tir en zone urbaine. Enfin il doit participer aux études doctrinales et aux expérimentations des nouveaux systèmes d’armes (système FELIN notamment et nouveaux matériels Scorpion à partir de l’année prochaine).

Il faut noter que le centre est également très apprécié des industriels qui y trouvent un lieu pour les expérimentations de leur matériel.

L’entraînement dure deux semaines, la première étant consacrée à l’instruction, la suivante à l’exercice en lui-même qui dure 72 heures, ce qui constitue une moyenne des combats en zone urbaine. Un bilan est fait tous les soirs et à l’issue du séjour un bilan global est réalisé pour permettre à l’unité d’en retirer tous les enseignements utiles.

Le CENZUB dispose depuis peu d’un site novateur, le centre de tir en zone urbaine (CT-ZUB), qui offre une nouvelle approche du tir. Il a pu sortir de terre grâce au dernier plan de relance et permet à l’armée de terre de disposer d’un outil de pointe en matière d’entraînement au tir. Il doit ouvrir à la fin de l’année 2011 et devrait tourner à plein régime à partir de 2013. Cette montée en puissance sera progressive afin d’assurer une sécurité maximale aux troupes venues s’entraîner. Cet outil innovant a en effet besoin d’une période de rodage, pour que les formateurs et les soldats s’approprient peu à peu ce nouvel outil, et ce afin d’éviter les accidents – il existe notamment des risques de ricochets de balles.

Le CT-ZUB permet de reconstituer les conditions du tir en zone urbaine, qui se caractérisent notamment par la courte distance d’engagement et la superposition des réseaux. Un système de simulation très sophistiqué permettra de faire bouger les cibles au sein du centre de tir. Elles pourront par exemple adapter leur allure en fonction des tirs et des zones qu’elles traversent. Pour pousser plus loin encore le souci de réalisme, un système de sonorisation permet de reconstituer tous les bruits caractéristiques d’une zone de conflit urbaine. Cette immersion dans ce contexte très particulier constitue un saut technologique non négligeable. En effet nos soldats pourront désormais s’entraîner au tir dans des conditions de réalisme inégalées jusqu’à présent, ce qui leur permettra de développer des réflexes et d’être préparés au mieux pour affronter des conflits en zones habitées ou confinées.

Durant l’année 2011 a eu lieu l’activité « FLANDRES 2011 », exercice franco-britannique de postes de commandement. Il avait vocation à faire le point sur l’interopérabilité entre deux brigades, l’une française et l’autre britannique, sous commandement d’un état-major de division, français en l’occurrence.

Durant l’année 2012, les principaux exercices suivants sont prévus :

—  « GULF » avec les Émirats arabes unis au printemps ;

—  « IRON TRIANGLE » à l’automne avec les Britanniques, deuxième marche vers le CJEF (19) après celle de « FLANDRES 2011 » ;

— « BOLD ALLIGATOR » début 2012 avec l’USMC (20).

Le tableau ci-après récapitule les exercices réalisés depuis 2009 et prévus en 2012, ainsi que leur coût.

Principaux exercices pour 2009, 2010, 2011 et 2012

EXERCICES MAJEURS

2009

2010

2011

2012

Prévus

Réalisés

Prévus

Réalisés

Prévus

Réalisés
au
1er semestre

Prévus

au

1er juillet

CFT (1)

Nationaux

1

0

0

0

0

0

0

Multinationaux

1

2

0

0

0

0

0

CRR (2)

Nationaux

1

3

0

1

2

3

0

Multinationaux

3

2

2

3

3

2

6

EMF (3)

Nationaux

6

12

7

7

4

4

3

Multinationaux

5

5

1

1

3

3

1

B.I.A. (4)

Nationaux

21

19

11

8

14

8

6

Multinationaux

7

8

20

15

4

3

9

B.A.S. (5)

Nationaux

11

14

11

14

9

6

6

Multinationaux

5

7

7

5

2

2

0

TOTAL

Nationaux

40

48

29

30

29

21

15

Multinationaux

21

24

30

24

12

10

16

           

COÛTS GE (en millions d’euros) (6)

16,8

21,7

25,2

 

COÛTS IE (en millions d’euros) (7)

 

89,0

96,8

 

Les coûts sont ceux de l’ensemble des activités d’entraînement des forces terrestres : il s’agit des crédits consommés pour 2009 et 2010, ainsi que des ressources allouées en enveloppe initiale pour 2011.

(1) CFT : Commandement des forces terrestres, a intégré le CFLT (commandement de la force logistique terrestre) en 2008. Les exercices décrits au niveau du CFT, ne le sont que temporairement, dans l’attente de la désignation de l’état-major pilote.

(2) CRR : Corps de réaction rapide (France+UE).

(3) EMF : État-major de Force. À l’été 2011, un EMF dissout sur les trois existants.

(4) BIA : Brigades Interarmes. Huit BIA en métropole + la brigade franco-allemande.

(5) BAS : Brigades d’appui spécialisées. Depuis l’été 2010, les BAS se composent de la brigade logistique (BL), la brigade de transmissions et d’appui au commandement (BTAC), la brigade des forces spéciales terre (BFST), et la brigade de renseignement (BRENS). Sont également assimilés comme BAS, les centres de mise en œuvre des divisions emploi et aéro du CFT, héritiers des brigades artillerie, génie et aéromobile dissoutes.

(6) GE : Grands exercices.

(7) IE : Instruction entraînement.

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

CONCLUSION

Le budget 2012 devrait permettre à l’armée de terre de disposer des ressources strictement nécessaires. En effet les crédits qui lui sont réservés, au titre du programme 178, sont en baisse par rapport à 2011, et s’élèvent à présent à 7,6 milliards d’euros. Il faut également noter que pour la première fois en 2012, l’armée de terre passera sous le seuil symbolique des 100 000 militaires, avec 97 297 soldats.

La taille et les moyens de l’armée de terre ne cessent de se réduire année après année. Pourtant, en sens inverse, la population française augmente et les risques auxquels notre pays doit faire face se multiplient sur l’ensemble du globe.

Le rapporteur tient à insister sur le fait que l’armée de terre ne saurait voir ses moyens et effectifs baisser plus encore dans les années à venir. Une telle situation pourrait in fine se révéler dangereuse pour notre sécurité nationale, en empêchant l’armée de terre de remplir correctement et pleinement les missions que la nation lui assigne.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Bertrand Ract-Madoux, chef d’état-major de l’armée de terre, sur le projet de loi de finances pour 2012 (n° 3775), au cours de sa réunion du mercredi 19 octobre 2011.

M. le président Guy Teissier. Nous recevons en ce début de matinée le chef d’état-major de l’armée de terre, le général Bertrand Ract-Madoux.

Mon général, c’est la première fois que nous vous accueillons et je vous souhaite la bienvenue au nom de tous les membres de la commission.

Permettez-moi de retracer brièvement les étapes de votre carrière.

Après l’école spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan, vous avez été commandant du 1er régiment de spahis à Valence puis commandant du bataillon d’infanterie n° 2 de l’IFOR, à Sarajevo.

Chef du bureau « recrutement » au commandement militaire d’Ile-de-France, vous rejoignez ensuite le bureau « études et stratégie militaire » de l’état-major des armées.

Vous avez été commandant de la 2e brigade blindée à Orléans avant de devenir commandant tactique des forces françaises dans le cadre de l’opération Licorne, en Côte-d’Ivoire.

De 2007 à 2011, vous êtes directeur de cabinet du directeur général de la sécurité extérieure (DGSE).

Et vous êtes depuis le 1er septembre dernier chef d’état-major de l’armée de terre.

Vous allez aujourd’hui nous présenter les crédits qui seront dévolus l’année prochaine à l’armée de terre.

Je souhaiterais que cette audition soit aussi l’occasion d’un bilan général sur la situation des OPEX du point de vue de l’armée de terre, qui est bien évidemment celle qui est la plus concernée en ce domaine. Nous tenons d’ailleurs à saluer le travail et le dévouement de nos soldats sur tous les théâtres d’opération, notamment en Afghanistan mais également en Libye, où l’armée de terre s’est illustrée grâce à l’intervention déterminante de l’ALAT.

M. le général Bertrand Ract-Madoux, chef d’état-major de l’armée de terre. Je vous remercie de m’offrir cette opportunité de pouvoir vous faire un point de situation sur l’armée de terre et partager mon appréciation sur le projet de loi de finances 2012.

Je rappellerai tout d’abord que 2011 aura été une année particulièrement dense. Au fort engagement opérationnel qui se traduira en fin d’année, en plus des effectifs engagés sur le territoire national, par la projection outre-mer de 36 000 hommes soit plus d’un tiers des effectifs de l’armée de terre, s’est ajoutée la création des bases de défense qui ont profondément bouleversé les habitudes de travail et souvent perturbé le fonctionnement courant des unités. Malgré ces difficultés dont certaines tendent aujourd’hui à s’aplanir, et la poursuite des restructurations, l’armée de terre a su remplir avec efficacité toutes les missions opérationnelles qui lui ont été assignées, sur le territoire national comme en opérations extérieures.

Pour l’armée de terre, 2012 devrait comporter deux orientations principales. Sur le plan organique, elle se présente comme la dernière étape importante de la transformation avec un effort en matière de réorganisation du soutien. Sur le plan opérationnel, elle pourrait être une année de transition caractérisée par le désengagement progressif de certains théâtres d’opérations.

Ces évolutions programmées auront un impact sur les ressources budgétaires, tous titres confondus, du budget opérationnel de programme de l’armée de terre (BOP terre), inscrites au PLF 2012, globalement en retrait de 789 millions d’euros par rapport à 2011 soit une réduction de 9 % justifiée principalement par des évolutions de périmètre. En effet on constate une baisse de 707 millions d’euros pour le titre 2 suite à une réduction de format de 16 193 postes, 20 % par suppressions de postes et 80 % par transferts. Transferts qui sont essentiellement effectués au bénéfice de l’organisation interarmées des soutiens. Par ailleurs 61 millions d’euros correspondent à des mesures de transfert, hors titre 2, vers d’autres BOP ou programmes au sein de la mission défense, traduisant ainsi le recentrage du BOP terre sur son cœur de métier.

Sur le périmètre du BOP terre, je souligne cependant la relative stabilité des crédits consacrés aux activités – aux alentours de 128 millions d’euros – et j’observe que, cette année encore, avec 608 millions d’euros, l’essentiel des crédits hors titre 2 sera consacré à l’entretien programmé des matériels, matériels dont les coûts de maintien en condition opérationnelle (MCO) sont, comme vous le savez, en augmentation régulière.

J’estime pourtant que les ressources strictement indispensables à la préparation des opérations et à la conduite de la réforme ont aujourd’hui atteint un niveau plancher qui peut menacer à court terme la préparation opérationnelle de nos forces. De même, malgré les efforts notables de cette législature pour préserver les budgets de défense, et bien que tout à fait conscient de la situation économique de notre pays, je reste préoccupé par les contraintes pesant sur le programme 146 portant sur l’équipement des forces et, comme les années précédentes, par les ressources attendues du programme 212 pour les infrastructures.

Je vous propose d’illustrer ce propos en abordant successivement, la préparation opérationnelle, les équipements, les ressources humaines, et enfin l’infrastructure.

Les opérations conduites cette année ont montré toute la pertinence de la préparation opérationnelle menée par l’armée de terre, notamment le principe de préparation opérationnelle différenciée instaurée par mon prédécesseur.

Étroitement lié à la politique d’emploi et de gestion des parcs (PEGP) des équipements majeurs qui lui est associée, ce principe de réalité a permis à l’armée de terre de préparer ses unités dans les meilleures conditions possibles pour les engagements planifiés, notamment les plus durs comme l’Afghanistan. Cette préparation s’est faite en s’appuyant sur les installations de ses centres de préparation des forces, qui sont tout à fait remarquables, tels que le CENTAC, le CENZUB, et les installations de Canjuers.

Parallèlement, l’armée de terre a révisé, début 2011, son cycle de préparation opérationnelle pour permettre une meilleure respiration personnelle et professionnelle essentielle pour certains domaines de spécialités sur-sollicités par les opérations en cours. Nous sommes donc passés à un fonctionnement à cinq temps répartis sur 24 mois. Ce nouveau cycle permet aujourd’hui d’accompagner les unités dont l’engagement est programmé, tout en laissant une part à l’engagement d’urgence et à la préparation des engagements futurs.

L’armée de terre a participé cette année à huit opérations dont trois majeures en Afghanistan, en République de Côte-d’Ivoire et en Libye. Sur ces trois théâtres, l’efficacité opérationnelle de nos unités a été reconnue, notamment par nos alliés. Nos hommes se sont acquittés de leur mission à la satisfaction générale. Ils ont fait preuve de courage et d’efficacité dans des conditions parfois très délicates. Ainsi, les pertes qui ont affecté notre contingent en Afghanistan cet été ne doivent pas masquer l’atteinte de nos objectifs tactiques qui ont permis l’implantation durable des forces de sécurité afghanes dans notre zone et le transfert progressif de responsabilité.

Ces engagements ont été l’occasion pour l’aviation légère de l’armée de terre de s’affirmer en tant qu’outil majeur du combat de contact, et j’insiste sur ce terme de contact qui exprime toute sa spécificité. L’arrivée de nouvelles machines telles que le Tigre, le Caracal et bientôt le NH90, ainsi que leur déploiement en opérations ont permis de faire entrer l’ALAT dans cette nouvelle dimension.

En Afghanistan, son action courageuse, en appui des troupes au sol est une réalité quotidienne et un réel soulagement pour les soldats au contact. Son emploi en Côte-d’Ivoire a également été capital. Enfin, dans l’ombre médiatique de l’aviation, elle a joué, en Libye, avec pour une part des hélicoptères de plus de 35 ans, un rôle tout aussi déterminant, contribuant, en toute discrétion, à plus de 40 % des dommages infligés à l’ennemi, soit près de 600 objectifs détruits au cours de près de quarante raids nocturnes à partir de la mer.

Au-delà de l’efficacité opérationnelle de cette composante de l’armée de terre, il est important de souligner l’efficience de ce moyen de combat dont les effets sur le terrain, à coût limité, sont remarquables et font l’admiration de nos alliés.

Je voudrais également faire un bref aparté sur l’engagement en Côte-d’Ivoire pour souligner combien cette opération illustre parfaitement la réussite de la professionnalisation et confirme l’homogénéité des régiments de l’armée de terre 15 ans après le début de ce processus. Les combats dans Abidjan qui ont permis la résolution d’une longue crise ont, de fait, été conduits par des unités issues de régiments professionnalisés depuis 1996. La même observation vaut pour l’Afghanistan.

En termes d’effectifs, avec actuellement 6 700 soldats en OPEX et 3 500 en mission de courte durée, l’armée de terre est capable d’honorer ses contrats opérationnels, sans difficulté ni impact sur son fonctionnement et, comme elle a pu le faire pour Harmattan, de répondre aux sollicitations nouvelles d’urgence. Les volumes projetés seront amenés à se réduire en 2012, notamment en Afghanistan. Le chef d’état-major des armées vous a d’ailleurs présenté les premières lignes de notre désengagement.

Cette diminution des volumes projetés outre-mer a deux conséquences qu’il me semble important de porter à votre attention.

La première est que l’allègement des opérations engendre mécaniquement une diminution du nombre de jours d’activité opérationnelle (JAO) sur les théâtres et une certaine perte de savoir-faire. Celle-ci devra être de facto compensée par un entraînement plus soutenu et donc par une augmentation des journées de préparation opérationnelles (JPO) conduites en métropole notamment.

Or, je constate que le budget 2012, à enveloppe globalement constante – autour de 128 millions d’euros – traduit parallèlement une diminution du nombre de jours de préparation et d’activités opérationnelles avec 111 jours en 2012 contre 120 jours en 2010, 116 jours en 2011, et nous craignons d’atteindre les 105 jours en 2013.

L’armée de terre s’éloigne ainsi de la cible des 120 JPAO qui est le niveau adéquat pour la préparation opérationnelle et qui faisait, jusqu’à présent, consensus.

En revanche, parce qu’il y va de la sécurité des vols, l’objectif de 180 heures de vol par an et par pilote sera maintenu dans l’ALAT, dont 20 heures de vol sur appareils de substitution et 20 heures par transformation de 60 heures de vols sur simulateurs en heures de vol réel. En cas de contraintes supplémentaires, il n’y aurait pas d’autre solution que la réduction du nombre de pilotes.

La deuxième conséquence concerne la PEGP qui, je le rappelle, répond comme la mise en condition opérationnelle différenciée, à un principe de réalité. Celle-ci devrait achever sa montée en puissance à l’été 2012 et fonctionner de manière nominale d’ici un à deux ans lorsque la mise en rotation des différents parcs sera rendue possible par un nombre suffisant de véhicules en parc de gestion. Autrement dit si nous procédons au rapatriement de matériel depuis les théâtres d’opération, ce matériel devra dans un premier temps être remis en état et ne sera donc pas instantanément disponible pour permettre l’instruction et l’entraînement de nos forces.

Cette question de l’entraînement est pour moi un sujet particulièrement préoccupant car elle a un impact direct sur l’intérêt, l’attractivité même du métier et partant de là, sur la fidélisation. J’y serai particulièrement vigilant et j’ai déjà demandé à l’état-major d’anticiper ce phénomène de retour en garnison qui semble très vraisemblable pour une partie des unités.

Pour le territoire national, il convient de rappeler que l’armée de terre représente quotidiennement avec 900 hommes, 90 % des effectifs de la mission Vigipirate mais qu’elle participe, aussi, à différentes missions dont l’opération Harpie en Guyane visant à lutter contre l’orpaillage illégal ou encore à l’opération « fourrage » qui l’a vue transporter, cet été, plus de 6 500 tonnes de fourrage. De même, elle entretient un régime d’alerte de ses unités qui doit lui permettre de répondre aux exigences du contrat de 10 000 hommes fixé par le Livre blanc en renfort du dispositif de sécurité publique et de sécurité civile. Mais il faut être clair : ce contrat n’aurait, à l’échelle de notre pays qu’un impact limité en cas de catastrophe majeure : l’armée de terre mettrait alors en œuvre tous ses moyens, hommes et matériels dont l’efficacité serait proportionnelle au volume engagé.

Elle peut également compter sur sa composante réserve. L’armée de terre a ainsi décidé depuis le 1er juillet de cette année de mettre en place un régime d’alerte qui doit lui permettre d’engager sous 48 heures, à raison d’une unité de marche par brigade, un total de 800 réservistes pour une durée de huit jours. C’est ce que nous appelons le « Guépard Réserve ». Effort qui peut apparaître modeste mais qui, au regard de la complexité du problème, constitue d’ores et déjà un résultat très satisfaisant.

J’aborde maintenant la question des équipements. Comme l’a souligné devant vous le chef d’état-major des armées il y a quelques jours, l’exécution de la loi de programmation militaire (LPM) est globalement conforme. Entrée dans le 3e cycle de régénération de ses équipements depuis la Seconde guerre mondiale, l’armée de terre poursuit à un bon rythme le renouvellement de l’équipement de ses forces, avec les livraisons de systèmes d’armes FELIN, 9 régiments équipés en fin d’année sur 20, les livraisons de VBCI, 5 régiments équipés sur 8, l’arrivée des PVP et des TIGRE, ainsi que le début des livraisons des NH90 – le premier appareil devant arriver pour le mois de décembre – et quatre autres devant suivre en 2012. La démarche consistant à engager sans attendre les équipements neufs sur les théâtres d’opérations s’est poursuivie en 2011, avec la projection sur les théâtres de missiles JAVELIN – complément du MILAN en attendant le MMP – du véhicule de détection de mines SOUVIM 2, ou encore du FELIN qui sera projeté avec le 1er régiment d’infanterie en décembre prochain. Cette démarche donne aujourd’hui pleinement satisfaction.

Pour les appuis, si j’exprime ma satisfaction de voir enfin commandés 13 lanceurs de roquettes unitaires (LRU), je note néanmoins que le respect du cadencement initial aurait permis, d’une part, de projeter ce système dès 2012 en Afghanistan et, d’autre part, de disposer pour nos unités d’une capacité unique de tir à longue portée (70 km) très précis, très rapide et apte par tous temps. Il s’agit là d’un facteur de supériorité opérationnelle évident.

Je relève qu’en dépit de ce processus de renouvellement qui mérite d’être souligné pour son impact immédiat sur notre capacité opérationnelle et le moral de nos soldats, l’armée de terre est toujours restée en deçà de la barre des 20 % des crédits consacrés à ses équipements majeurs sur la période 2005-2012. Je regrette comme l’avait fait mon prédécesseur, que l’armée de terre n’ait finalement pas pu bénéficier de « l’accent à porter sur la remise à niveau des moyens terrestres » prévu par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. La loi de programmation militaire en cours, sensée porter l’effort pour les forces terrestres, n’aura finalement fait qu’initier la modernisation de l’outil de combat aéroterrestre, sa portée initiale étant atténuée année après année par une version annuelle du référentiel (VAR). Dans le domaine de la recherche et du développement, je constate par ailleurs que le tissu industriel lié à la plupart des programmes de l’armée de terre comprend de nombreuses PME et TPE. Or, en raison de leur taille, celles-ci éprouvent malheureusement des difficultés à obtenir des crédits de recherche et développement pour des programmes, ce qui les affecte directement.

C’est pourquoi, il est important de souligner que l’effort devra être impérativement poursuivi lors de la prochaine LPM, en cohérence avec la cible capacitaire de l’armée de terre à l’horizon 2025-2030. D’autant que la contractualisation de nombreux matériels prévus en LPM 2013-2018 doit intervenir dès maintenant.

En effet, si nos livraisons sont satisfaisantes, nos prises de commandes de programmes majeurs sont faibles depuis 2010 et le resteront en 2012, à l’exception notable de la commande prévue de trente-quatre NH90 et du lancement de la réalisation du missile moyenne portée. La poursuite du rééquipement de l’armée de terre devra reprendre en 2013 avec le lancement de la réalisation du programme Scorpion qui permettra le renouvellement des blindés de la classe 20 tonnes, matériels constamment sollicités depuis 1991 en opérations extérieures et dont le remplacement est très attendu dans nos forces. Ainsi les VAB seront remplacés par les VBMR, les AMX 10RC et les ERC 90 Sagaie par l’EBRC.

Je voudrais m’attarder quelque peu sur ce programme Scorpion pour insister sur les notions de cohérence - cohérence capacitaire et cohérence d’ensemble - qui en sont l’essence même. Le programme est en effet marqué par le souci de rationalisation. Il vise ainsi à moderniser, dans le respect du principe de « juste suffisance » technologique, l’ensemble des systèmes d’armes et des outils de préparation opérationnelle nécessaires à un chef sur le terrain.

Outre les gains opérationnels significatifs attendus, notamment par l’interopérabilité des différents systèmes d’armes, il s’appuie d’emblée sur une mise en commun des équipements neufs à venir et de ceux qui seront rénovés et intègre une démarche de maîtrise de l’empreinte logistique et des coûts associés. Il est, en cela, réellement novateur et particulièrement efficient.

Dans l’immédiat, pour s’adapter au plus vite aux nouvelles menaces sur les théâtres d’opérations, les 116 opérations d’adaptation réactive lancées depuis 2008 pour un montant total de l’ordre de 330 millions d’euros continuent à produire les améliorations attendues dans les domaines de la protection, de la puissance de feu, de la lutte contre les engins explosifs improvisés (EEI), de l’observation de jour et de nuit, des télécommunications, des drones et de l’équipement individuel de nos combattants. Cet effort très important conduit à partir de 2008, a atteint ses objectifs en 2011 et, sauf surprise majeure sur un théâtre, devrait en conséquence s’atténuer fortement à présent et être remplacé par la logique exposée précédemment de renouvellement des plateformes principales et des véhicules dans le cadre du programme Scorpion.

Concernant la disponibilité technique opérationnelle de nos matériels, j’aimerais vous rappeler que le volume de nos parcs actuellement déployés en opérations reste important avec plus de 1 800 véhicules dont plus de 1 000 blindés. À ceux-ci s’ajoutent les équipements en transit et ceux en rénovation chez les industriels. Avec l’équivalent des équipements de deux de nos huit brigades interarmes en opérations, on observe un fort sous équipement en métropole mais également une accélération de l’usure des parcs.

Enfin, l’armée de terre s’efforcera de préserver la part du budget consacrée aux équipements d’accompagnement et de cohérence, à hauteur de 215 millions d’euros, et continuera de porter une attention soutenue à l’entretien programmé du personnel pour 137 millions d’euros. Les actions entreprises depuis cinq ans notamment dans le domaine de l’équipement individuel ont produit les effets attendus sur notre capacité opérationnelle, la protection et le moral de nos soldats. Cet effort ne devra pas se relâcher.

Les munitions connaissent aussi un coût de recomplètement croissant du fait de la mise en service d’une nouvelle génération. Le phénomène est actuellement accentué par une consommation élevée en OPEX. L’armée de terre pourrait ainsi rencontrer des difficultés pour constituer et renouveler ses stocks de rechanges et de munitions, notamment en cas de besoin urgent.

J’en viens à la manœuvre des ressources humaines. En 2012, avec un format en organisation de 105 795 postes, l’armée de terre passera sous le seuil symbolique des 100 000 militaires et des 10 000 civils. Je note que la population française n’a jamais été aussi importante et l’armée de terre aussi réduite depuis l’avènement de la République. Cela correspond à une réduction de format de 16 193 postes entre 2011 et 2012, répartis de la façon suivante : 11 399 militaires et 4 794 civils qui quittent l’armée de terre. 13 473 postes sont ainsi transférés hors du BOP terre et 2 720 postes se voient supprimés au titre de la déflation, dont 2 319 militaires.

En baisse de 707 millions d’euros pensions comprises, la masse salariale du BOP terre atteindra 6,2 milliards d’euros en 2012. En raison, notamment, de la réforme des retraites et de la crainte du chômage, facteurs qui ont engendré de moindres départs, le schéma d’emploi semble difficilement tenable en l’état. Seules des mesures d’accompagnement au départ pourraient soulager cette masse salariale très contrainte en permettant le départ du personnel le plus ancien.

Dans ce contexte, la première de mes préoccupations demeure la stabilisation du turn-over de notre ressource humaine qui est encore trop fort tant en termes de recrutement que de formation.

En 2011, nous aurons ainsi procédé à 13 250 recrutements externes, 431 officiers, 734 sous-officiers et 12 085 militaires du rang dont 1 000 pour, entre autres, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et les unités de la protection civile. C’est encore trop élevé, notamment pour la population des militaires du rang.

Néanmoins, 2011 a vu poindre les premiers progrès en matière de fidélisation. L’effet retraite, en retardant les départs, a sans doute joué un rôle notable. Les mesures prises au cours de l’année 2010-2011 commencent également à porter leurs fruits.

Ainsi la montée en puissance des 12 Centres de Formation initiale militaire (CFIM) créés depuis l’été 2010 a permis d’obtenir des résultats encourageants dans le domaine de l’attrition, tout en garantissant l’orthodoxie de l’instruction et de l’éducation dispensées à nos jeunes soldats par des cadres mieux sélectionnés et mieux formés. Le taux d’attrition pendant les quatre premiers mois d’incorporation est descendu à un niveau situé entre 6 % et 14 % suivant les centres, ce qui est très positif. Il reste à confirmer lors des mois suivants en régiment.

De même, le taux de renouvellement du premier contrat progresse mais reste encore un peu en dessous des objectifs. En effet nous nous situons à présent à 36 %, la cible étant de l’ordre de 40 %.

Je compte donc m’inscrire dans la continuité de mon prédécesseur et rendre de la perspective professionnelle à nos engagés volontaires de l’armée de terre (EVAT) en valorisant leurs parcours professionnels, veiller à ce que l’armée de terre demeure l’escalier social qu’elle a toujours été avec 70 % des recrutements de ses sous-officiers réalisés parmi les militaires du rang dès 2012 - contre 50 % en 2009 - et 70 % des recrutements de ses officiers de carrière du corps des officiers des armes réalisés à partir de la ressource interne. Nous voulons limiter le recrutement direct à nos seuls besoins complémentaires. Enfin nous souhaitons poursuivre la mise en œuvre du brevet de technicien supérieur rénové qui donne une part plus importante aux acquis de l’expérience.

Ma seconde préoccupation dans le domaine des ressources humaines découle de la difficulté qu’il y a à concilier la déflation du personnel de carrière - qui représente 80 % des officiers et 50 % des sous-officiers - avec le recul des limites d’âge de deux ans. Sous réserve de ne pas accroître l’effort de déflation, ce problème restera gérable pour les sous-officiers mais il sera d’une extrême complexité pour les officiers supérieurs. Sans mesure d’accompagnement au départ digne de ce nom, il sera difficile de maintenir une pyramide fonctionnelle jeune, adaptée aux engagements les plus durs, ainsi que la motivation de cette population.

Enfin, en 2012, l’armée de terre remettra à plat le fonctionnement de ses réserves qui ne me donne pas aujourd’hui pleinement satisfaction. Expression visible du lien armées-Nation, ces dernières méritent une attention particulière et leur budget ne peut plus servir, en gestion, de variable d’ajustement. Il en va de leur fidélité et de l’attractivité de cette capacité. En 2011, avec un budget de 41 millions d’euros et des à-coups préjudiciables à un fonctionnement harmonieux, l’armée de terre a néanmoins été en mesure de proposer à ses 17 864 réservistes, 24 jours d’activité en moyenne. De plus, depuis le début de l’année, 306 d’entre eux ont participé à une mission hors métropole et 1 731 ont été engagés au sein de la mission Vigipirate.

Je voudrais terminer en abordant la question de l’infrastructure. Dans ce domaine, l’armée de terre aura bénéficié en 2011 d’un niveau de ressources de 452 millions d’euros pour réaliser d’une part, les opérations conduites au titre de la réorganisation et d’autre part, celles correspondant à l’investissement « classique », c’est-à-dire l’infrastructure destinée à la préparation opérationnelle des forces et aux conditions de vie et de travail du personnel, notamment pour les militaires du rang. Si ces niveaux de programmation paraissent acceptables puisqu’ils dépassent les niveaux de ressources habituellement consentis à l’armée de terre, ils intègrent en réalité pour moitié des coûts liés aux restructurations. Par ailleurs, comme en 2010 où seulement 75 % de nos crédits dédiés aux opérations « hors restructuration » ont été engagés, il est à craindre qu’il en soit de même en 2011, le taux d’engagement de ces opérations s’élevant fin septembre à 55 %.

Pour 2012, les prévisions de l’armée de terre, validées par l’EMA, sont évaluées à 350 millions d’euros, dont 91 millions d’euros au titre de la réorganisation. En dépit d’une priorisation des besoins, les ressources accordées à l’armée de terre en 2012 ne permettront pas de rattraper les retards accumulés sur la période 2009-2011. Ils se traduisent mécaniquement par un report des opérations destinées au plan d’hébergement VIVIEN, à la préparation opérationnelle des forces et au maintien en condition de l’infrastructure, avec des conséquences à craindre sur l’entraînement, les conditions de vie et de travail ainsi que sur le moral du personnel.

En 2011, l’armée de terre a continué de s’acquitter de toutes ses missions opérationnelles, notamment sur le territoire national et poursuivi une réorganisation structurelle et fonctionnelle d’une ampleur exceptionnelle. Je rappelle que les bases de défense (BdD) impactent en tout premier lieu le principe multiséculaire du régiment, qui était l’assise même de notre armée de terre. Cette fin d’année s’achève dans des conditions parfois difficiles en raison des difficultés inhérentes à la montée en puissance des bases de défense mais également de leurs budgets de fonctionnement taillés au plus juste. Cette situation a des conséquences sur la vie courante des régiments. Mais ceci relève plutôt d’un problème de jeunesse de cette nouvelle organisation que de financement.

2012 constituera, dans l’immédiat, la dernière année de restructurations et de transferts majeurs mais la réorganisation n’en sera pas terminée pour autant. Alors que l’armée de terre aura achevé ses restructurations, il lui restera encore à réorganiser 5 566 postes sur la période 2013-2015. Cette cible sera particulièrement douloureuse voire difficile à atteindre. Enfin, la réorganisation sera achevée lorsque la déflation des postes transférés hors du BOP terre aura été réalisée.

Dans l’environnement actuel, résilience et surprise stratégique restent au cœur des préoccupations de la défense. Pour que les capacités d’une armée de terre aux effectifs resserrés par la réforme puissent couvrir tous les scénarios prévus, en faisant preuve de réactivité et de modularité, il apparaît plus que jamais essentiel, que les savoir-faire de combat soient entretenus au moyen d’une préparation opérationnelle exigeante et polyvalente, à la hauteur des matériels de dernière génération aujourd’hui en service et des ambitions de notre pays. Or, l’inquiétude de ne pouvoir maintenir le niveau seuil de préparation opérationnelle de l’armée de terre est réelle.

Je vous remercie du soutien que vous nous apportez.

M. le président Guy Teissier. J’aurai pour ma part une question très courte : vous avez souligné dans votre intervention qu’à l’heure actuelle, 9 régiments sur 20 étaient équipés du système FELIN. Je ne reviens pas sur le débat qui s’est tenu ici sur sa qualité ou son caractère prioritaire : il est aujourd’hui clos, mais je souhaiterais savoir quel est le retour d’expérience fait sur cet équipement.

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Nous n’avons pas encore d’expérience opérationnelle, puisque la première unité équipée part en opération à la fin de cette année. Mais c’est un programme désormais bien connu, et dont la valeur opérationnelle est évidente en termes de protection et d’efficacité de communication et donc de coordination. Désormais les manœuvres se font dans un silence quasi-complet, car tout se transmet par vibration, ce qui assure une discrétion particulièrement appréciable dans les manœuvres en zones habitées par exemple. Le programme permet aussi une précision de tir exceptionnelle, en particulier de nuit : un tireur moyen atteint sa cible à 90 %. Des efforts d’ergonomie ont été engagés, même si la difficulté de la masse de l’équipement demeure. Mais un programme de musculation adéquat a été conçu pour pallier ce problème.

M. Jean-Louis Bernard. Vous avez mentionné le rôle de l’ALAT en Libye qui a été quelque peu occulté. Ma première question portera donc sur la complémentarité avec l’armée de l’air, les cibles qui vous ont été assignées, votre taux de réussite ou d’échec, et enfin les enseignements qu’il convient de tirer de cette opération. Ma seconde question concerne le LRU, dont les délais de livraison me font m’interroger sur l’activité du 1er régiment d’artillerie de Belfort dans l’attente de l’arrivée de ce système d’arme.

Mme Françoise Hostalier. Je voudrais tout d’abord vous remercier pour votre présentation claire et franche, mais néanmoins un peu inquiétante. J’espère qu’il y aura une unanimité sur tous les rangs de l’Assemblée pour soutenir votre budget. Vous avez attiré notre attention sur un risque de déséquilibre dans le maintien de la capacité de nos forces : un tiers des effectifs, 36 000 hommes, participeront à une mission hors de métropole, ce qui veut dire que certains régiments risquent d’avoir l’impression d’être laissés pour compte, notamment pour les entraînements et le maintien en condition opérationnel. Je voudrais d’ailleurs plus particulièrement vous interroger sur les équipages des chars Leclerc.

M. le général Bertrand Ract-Madoux. L’armée de terre est volontairement restée discrète sur l’action des hélicoptères pendant que se déroulait l’opération Harmattan : il n’est en effet pas d’usage de dévoiler les modes d’action utilisés alors même que l’opération est en cours. Aujourd’hui il est possible de faire une première analyse. La complémentarité entres les différentes armées a été parfaitement adaptée à la situation : lorsque l’arme aérienne a atteint l’ensemble des cibles atteignables, l’adversaire se dispersant, la décision d’employer les hélicoptères de l’armée de terre a été prise. Je salue le courage et l’efficacité des équipages, qui nuit après nuit, ont décollé du BPC et accompli leurs missions.

Au cours d’une quarantaine de raids, représentant 4 000 heures de vol, près de 600 cibles ont été détruites, soit près de 45 % de toutes celles détruites par les moyens français.

Je tiens à vous signaler que l’armée de terre devrait être remboursée à hauteur de dix-huit millions d’euros, soit 5 % du surcoût de l’opération, ce qui donne un bon ratio par rapport aux cibles détruites.

Je voudrais néanmoins insister sur la parfaite complémentarité avec l’armée de l’air et l’aéronavale. Nos hélicoptères agissent près du sol, en coordination avec les troupes au sol. Leur engagement a exactement correspondu avec la reprise des mouvements des forces terrestres du CNT, qui étaient jusque-là bloquées par les blindés et les moyens d’artillerie de l’adversaire, et donc dans l’incapacité de progresser.

Je tiens tout d’abord à vous rassurer sur le LRU. S’agissant du 1er régiment d’artillerie, il est équipé de mortiers de 120 mm, un très bel outil que l’on nous envie et que l’on nous achète. Le 1er RA est donc très sollicité en OPEX et en mission de courte durée. Ce régiment recevra les munitions du LRU courant 2013, son premier lanceur fin 2013, et le premier module opérationnel de quatre lanceurs en 2014. Mais il s’entraîne d’ores et déjà avec les lances roquettes multiples (LRM) et les munitions d’exercice.

Mon but n’était pas de vous inquiéter, je voulais simplement vous signifier que depuis des années, le budget de l’armée de terre est fortement contraint. Plus l’on resserre l’armée de terre sur son cœur de métier, plus les efforts qui lui seront demandés – en effectifs et en budget – toucheront directement la préparation opérationnelle. Je nuancerai toutefois mon propos en rappelant que nous sommes passés d’une logique d’armées juxtaposées à une logique de partenariat interarmées ; ce qui facilite les choses.

Quant aux régiments qui donneraient l’impression d’être oubliés, en particulier ceux équipés du char Leclerc, je dois vous dire que parmi les trois régiments que j’ai d’ores et déjà visités, l’un (le 501e RCC) était un régiment de chars Leclerc. J’y ai croisé des équipages extrêmement motivés, notamment parce que la maîtrise de l’entretien programmé des chars est désormais assurée, et aussi parce qu’ils sont sollicités par des projections avec matériels de substitution. Je peux aussi ici citer le 12e régiment de cuirassiers d’Olivet, qui a joué un rôle majeur dans la résolution de la crise ivoirienne. Je serai néanmoins particulièrement vigilant pour m’assurer que toutes les composantes de l’armée de terre soient également sollicitées en opération.

M. Yves Fromion. Le ministre de la défense a pris l’engagement de faire réaliser sur l’emprise de l’hôpital Percy un immeuble destiné à permettre à la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (CABAT) d’accueillir les familles des très grands blessés. Où en est-on ?

M. Bernard Cazeneuve. Vous avez évoqué la création des bases de défense et les difficultés d’organisation qu’elles impliquent pour l’armée de terre. Quel est le niveau d’économies engendrées ? Disposez-vous d’un document de comptabilité analytique ?

M. le général Bertrand Ract-Madoux. C’est pour moi une grande fierté de voir les efforts que fait notre pays au profit des blessés et des familles de soldats tués en opération. La mobilisation a pris de l’ampleur au fil des années, elle est véritablement admirable. Je l’ai constaté quelques jours à peine après ma prise de fonctions lorsque j’ai accueilli douze blessés rapatriés dans le cadre de l’opération Morphée.

Les familles sont soutenues et accueillies, et la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (CABAT) fait un travail remarquable. Le projet est lancé, mais d’ores et déjà les familles sont logées en région parisienne aux frais des armées. Beaucoup de blessés, une fois soignés, retournent dans leur unité, dans leur régiment. Ceux qui conservent des séquelles sont alors employés dans d’autres fonctions.

Il faut rappeler que la mise en place des bases de défense date du début de cette année. Un tel changement majeur ne peut pas aller sans difficultés d’organisation ici ou là. Le chiffrage des économies ne peut être instantané, et ce d’autant plus que les restructurations se traduisent généralement par des dépenses initiales d’ajustement. La fin de l’année est un peu difficile dans certains régiments, les chefs de base ayant pu prendre des mesures contraignantes pour être certains de tenir leur budget. Un gain de 3 200 postes est attendu pour l’armée de terre sur la période 2012-2015. Ce gain résulte de suppressions de postes lors de la création des bases de défense et de postes qui seront supprimés parmi les15 200 postes terre transférés à l’organisation interarmées du soutien.

M. Alain Marty. Je suis maire de la ville de Sarrebourg, ville où se trouve le premier régiment d’infanterie, qui vient de recevoir le système FELIN. J’ai constaté que les militaires étaient fiers de disposer de ce nouvel équipement.

Le transfert à l’armée nationale afghane (ANA) de certains secteurs où les Français sont actuellement implantés ne sera-t-il pas limité par le manque de moyens, notamment aériens, de l’armée nationale afghane ? Comment va-t-on soutenir cette armée ?

M. Damien Meslot. Vous nous avez fait part de vos inquiétudes sur la réduction du format des armées. Or, certaines informations nous sont parvenues, selon lesquelles la France souffrirait de ruptures capacitaires. Par ailleurs, des commandants de régiments m’ont fait part des difficultés dues aux rythmes élevés imposés par les déploiements en opération.

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Le premier régiment d’infanterie de Sarrebourg est un très beau régiment, et j’ai vu comme vous qu’ils étaient fiers de disposer d’équipements FELIN. Je suis très confiant quant à la réussite de leur mission en Afghanistan. Tous sont néanmoins conscients s’agissant de la capacité de FELIN, qu’ils doivent pouvoir s’affranchir de la technique si elle devenait une gêne dans les opérations ; l’équipement FELIN peut en effet tout à fait fonctionner en mode dégradé.

Je tiens à souligner que les effectifs de l’armée nationale afghane ont fortement augmenté. Dans le secteur français, ils sont passés de 500 hommes à 3 000 en trois ans. Il est donc normal que la responsabilité des opérations lui soit transférée dans certaines zones. C’est dans les domaines de l’appui et de l’aide au renseignement que la France maintiendra le plus longtemps son aide.

Sur la question du format de l’armée de terre, je prends mes responsabilités alors qu’est mise en œuvre une réforme qui – m’a-t-on dit – a recueilli un consensus. Ce qui m’inquiète, c’est une éventuelle remise en cause de ce consensus et du modèle d’armée associé.

Concernant le rythme d’activités et d’engagement, il est de fait que certaines unités étaient sous-employées et d’autres sur-employées. La mise en place du rythme à cinq temps par le général Irastorza, en lieu et place du rythme à quatre temps, a déjà permis d’améliorer la situation.

M. Christophe Guilloteau. 75 soldats français ont été tués en Afghanistan et le président de la République a annoncé le retrait des troupes françaises. Le premier départ de troupes, qui concerne 200 légionnaires, a eu lieu aujourd’hui. Les départs devraient concerner à nouveau 200 personnels d’ici décembre. On devrait en compter 600 en 2012. Connaissez-vous aujourd’hui les régiments concernés ? Et est-ce que tout le matériel reviendra avec nos soldats ?

M. Philippe Folliot. Je souhaite insister sur la problématique spécifique des parachutistes et sur les risques de ruptures capacitaires, liés notamment aux lenteurs qui affectent le programme A400M. Ne craignez-vous pas une perte de savoir-faire, notamment en terme de largage en haute altitude ?

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Le retrait d’Afghanistan qui a eu lieu aujourd’hui touche la compagnie de réaction rapide, issue du 2e régiment étranger de parachutistes de Calvi. 200 autres militaires quitteront l’Afghanistan à la fin 2011. Pour les retraits programmés en 2012, le centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) attend de connaître avec certitude l’évolution de la situation sur le terrain avant d’arrêter son choix.

Je tiens à souligner que je suis très fier du travail des parachutistes. Il y a des retards pour le Transall, le C130 et l’A400M, mais heureusement nous avons pu avoir recours au Casa. Il se peut qu’un jour, nous soyons amenés à spécialiser davantage un certain noyau de la brigade parachutiste pour faire un effort en terme de technicité.

M. Jacques Lamblin. Vous avez évoqué un plancher atteint pour les effectifs, le niveau d’activité ou encore le fonctionnement : vous n’avez pas parlé des transmissions. Qu’en est-il ?

M. Nicolas Dhuicq. Certains militaires de l’armée de terre participent au plan Vigipirate mais ces hommes ne se sont pas engagés pour faire le travail des gendarmes ou des policiers. Quel est l’impact sur le moral des troupes de leur participation ?

Par ailleurs, avez-vous développé une réflexion sur l’emploi de l’arme blindée cavalerie dans les futurs conflits en zone urbaine, qui pourraient potentiellement avoir lieu sur le territoire national ?

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Pour l’armée de terre, la conduite des opérations se fait systématiquement dans un cadre interarmes même si de ce point de vue, la situation en Afghanistan est moins représentative. En zone urbaine, les blindés apportent une réelle plus-value. Ils y sont, par ailleurs, moins vulnérables aux frappes aériennes comme on a pu le constater en Libye dernièrement mais également au Kosovo. Ils disposent d’une vraie capacité de résilience. Quand on examine la manière par laquelle de grandes capitales ont été conquises par le passé, on constate que ce sont des groupements mêlant infanterie et blindés qui les ont libérées. D’ailleurs au centre d’instruction en zone urbaine (CENZUB), nous nous entraînons dans cet esprit interarmes.

Rassurez-vous, je ne pense pas que nous ayons à faire usage des blindés sur le territoire national dans un proche ou moyen terme, où nous effectuons bien volontiers des missions de sécurité et des missions de soutien aux services dédiés, notamment lorsqu’ils sont dépassés par l’ampleur d’un événement.

Les capacités des transmissions ont été récemment très sollicitées et nous avons connu de fortes tensions en termes d’emplois. Les besoins en moyens de transmissions de l’armée de terre sont couverts par l’opération du SI terre qui consiste à continuer la numérisation de l’armée de Terre, en attendant les nouveaux systèmes prévus dans le cadre des programmes Scorpion ou SIA. Tous les matériels de cette opération transitoire seront livrés en 2011 et 2016.

L’arme des transmissions a été touchée comme le reste de l’armée de terre par les restructurations. Une grande partie de ses compétences et de ses missions dans le domaine des « transmissions d’infrastructure » a été transférée à la DIRISI (c’est notamment le cas du centre de télécommunication et informatique de Nancy). En ce qui concerne les transmissions tactiques, la brigade de transmissions et d’appui au commandement (BTAC) a été restructurée en cinq régiments dont le 53e  RT.

Mme Patricia Adam. Quels étaient les crédits de paiements prévus pour l’armée de terre par la LPM pour les années 2009 à 2014 et combien ont été effectivement consommés ?

M. Pierre Forgues. Vous nous avez dit tout à l’heure, mon général, que plus les soldats français allaient rentrer d’Afghanistan, plus vous allez devoir consacrer de temps à la préparation opérationnelle. J’avoue ne pas bien comprendre, d’autant plus que vous avez expliqué que ces soldats suivaient des cycles de préparation importants avant de partir en mission.

M. le général Bertrand Ract-Madoux. On dit généralement que les soldats en opération sont surentraînés mais pas assez instruits. C’est précisément ce décalage que nous nous efforçons de combler à leur retour.

Il s’agira d’un effort important dans le cas du retour d’Afghanistan. Or comme les crédits qui y sont dédiés n’augmentent pas, nous allons devoir nous organiser. J’ai évoqué tout à l’heure l’école d’état-major de Compiègne : tous les ans, nous sommes obligés de supprimer des jours de stage pour raisons budgétaires.

M. Daniel Boisserie. Les mois qui viennent vont être l’occasion pour les politiques de débattre de l’avenir de notre défense. Afin de nous éclairer un peu, pourriez-vous nous dire quelle serait l’ampleur de l’effort budgétaire à faire pour avoir une défense à un niveau optimal ? Quelle serait la bonne répartition entre les différentes armées et, à l’intérieur de celles-ci, entre les différents équipements ?

Mme Michèle Alliot-Marie. J’aimerais que vous évoquiez les écoles de formation et les services de reclassement chargés de trouver des débouchés à nos militaires : est-ce que les offres faites par les entreprises augmentent ? Par ailleurs, existe-t-il auprès de vous une organisation particulière chargée du contact avec elles ?

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Le Livre blanc a souligné la nécessité d’effectuer un effort particulier en direction des forces terrestres. Force est de constater que, quatre ans après, cet effort a été lissé. L’équipement de l’armée de terre ne représente que 20 % de l’effort total des armées, alors qu’elle représente 50 % des effectifs et 80 % du personnel déployé en opérations extérieures. Si cette tendance se confirme, cela pourrait signifier que la France renonce à une partie de son ambition pour l’armée de terre. Il faut donc que son budget conserve la place qui lui revient raisonnablement.

D’importants choix devront être faits en 2012-2013 pour les équipements. Nos blindés de 20 tonnes, qui sont utilisés quotidiennement en opérations, devront par exemple être remplacés.

On constate avec la programmation budgétaire triennale (PBT) une encoche de 3,6 milliards d’euros de crédits budgétaires sur la mission défense compensée en partie par le décalage et la réévaluation des recettes exceptionnelles à hauteur de 2,3 milliards d’euros : il faudrait donc rattraper ce retard pour revenir sur la trajectoire au-delà de 2013 !

Pour répondre à Mme Alliot-Marie, je dirais que nous avons le souci constant d’accompagner nos camarades qui rejoignent le monde civil. Le processus de reconversion est aujourd’hui largement interarmées – et m’échappe donc un peu – et je crois que nous faisons le maximum. Nous travaillons au quotidien pour que ceux qui rejoignent le monde civil le fassent dans les meilleures conditions.

Le niveau de recrutement dans les écoles de formation initiale n’a cessé d’augmenter. Vers 30-35 ans, nos officiers reçoivent une formation complémentaire, indispensable pour qu’ils acquièrent les compétences nécessaires à l’exercice de responsabilités en état-major national, mais aussi international – nous avons actuellement 250 officiers à l’OTAN. À l’école de formation de Fontenay-le-Comte, les effectifs formés restent cependant limités.

M. Jean-Pierre Soisson. À combien s’élèvent-ils ?

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Sans doute de l’ordre de 200-300 par an, ce qui ne permet naturellement pas de répondre aux 16 000 départs annuels.

Je voudrais ajouter que l’image de l’armée de terre auprès de la population s’est considérablement améliorée depuis la fin de la conscription et qu’elle est désormais équivalente à celle de la marine et de l’armée de l’air.

M. le président Guy Teissier. J’observe que les efforts faits pour la reconversion sont indispensables. Il faut préserver ce savoir-faire, ce « savoir-être » de nos soldats et je crois que les entreprises leur font plutôt bon accueil. L’armée de terre a, je pense, un peu de retard par rapport à la marine dans ses relations avec le monde de l’entreprise.

M. le général Bertrand Ract-Madoux. Je répondrai juste que la marine a un réseau d’entreprises que nous lui envions et qu’elle dispose d’effectifs plus réduits et plus qualifiés. Je pense que, dans ce domaine, l’interarmisation va vraiment dans le bon sens.

La commission de la défense nationale et des forces armées examine pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de la Mission « Défense » : « Préparation et emploi des forces : forces terrestres » pour 2012, au cours de sa réunion du mercredi 26 octobre 2011.

Un débat suit l’exposé du rapporteur.

M. Philippe Vitel. Est-ce que la livraison des équipements FELIN est terminée ? Avons-nous un retour d’expérience de leur emploi sur les théâtres de crise ? Le problème de leur poids est-il réglé ?

M. Jean-Louis Bernard. Il faut effectivement corréler les exigences de sécurité de nos soldats avec celles de leur mobilité. Il est vrai que ces équipements sont un peu lourds et j’espère que des progrès vont être faits pour les alléger dans les années à venir.

Les systèmes FELIN ont été testés dans les conditions climatiques les plus extrêmes et leurs performances jugées satisfaisantes – ils ont obtenu leur certification en mars 2010. La première unité équipée part en opération en Afghanistan à la fin de l’année.

Je tiens à préciser que les équipements sont livrés en kit et peuvent donc être utilisés partiellement, en mode dégradé. Ensuite, nos soldats sont naturellement soumis à un important travail physique de musculation avant de les porter.

M. Damien Meslot. J’aimerais connaître le taux de féminisation dans l’armée de terre et son évolution récente. Pouvez-vous aussi nous communiquer les chiffres sur les militaires en fin de contrat ?

M. Jean-Louis Bernard. La féminisation est croissante dans l’armée de terre, même si nous sommes loin de la parité. Je ne peux vous communiquer de chiffre sur la situation des militaires en fin de contrat pour l’instant, mais c’est une population très suivie lorsqu’elle quitte l’armée.

M. Philippe Folliot. La baisse des effectifs dans l’armée de terre devait toucher principalement les fonctions du soutien. Sur le terrain, qu’en est-il réellement ?

M. Jean-Louis Bernard. Ce sont effectivement les métiers du soutien, qui du fait de la réforme, contribuent de façon très importante à la réduction des effectifs. Les dépenses de personnel de l’armée de terre vont d’ailleurs connaître une baisse significative de l’ordre de 10,4 % en 2012. Cette diminution s’explique notamment par d’importants transferts d’effectifs dans le cadre de la réforme de la chaîne du soutien.

M. Christian Ménard. Quel est le coût d’un équipement FELIN ?

M. Jean-Louis Bernard. 25 000 euros, soit un peu plus qu’une voiture moyenne. Mais il ne faut pas perdre de vue qu’il y a derrière tous ces matériels des entreprises, des PME, des sous-traitants. Ce budget est essentiel pour notre économie nationale, notamment en termes d’emplois.

M. Jacques Lamblin. Je voudrais revenir sur la question de la reconnaissance que nous devons aux blessés. Au fil des opérations, – et cela est regrettable – l’hommage à leur endroit s’est fait de plus en plus discret. Il y a également un aspect matériel, avec le montant des indemnités qui leur sont versées. Il y a enfin la question de leur reconversion et des emplois réservés.

M. Jean-Louis Bernard. Je suis toujours frappé par la disproportion qui est faite entre le traitement médiatique de nos morts en Afghanistan et celui de nos blessés. La visite que j’ai effectuée à l’hôpital d’instruction des armées Percy a été très émouvante. J’y ai rencontré des blessés légers, qui se réintégreront rapidement, mais aussi des blessés beaucoup plus lourds, notamment un jeune soldat devenu quadriplégique.

La CABAT apporte un soutien exemplaire à nos soldats. Elle travaille notamment à la construction, sur le site de Percy, d’une maison dédiée à l’accueil des familles. Actuellement elle prend en charge leur hébergement dans des chambres d’hôtel, aux frais de l’armée de terre. Le personnel sur place est de grande qualité. Enfin, je trouve tout à fait louable que la plupart des soldats blessés ne pensent qu’à réintégrer leur régiment – je pense notamment à cet artificier que j’ai rencontré, qui souhaite maintenant former des plus jeunes.

M. le président Guy Teissier. Nos soldats méritent en effet notre profond respect et notre considération. La construction d’une maison dédiée aux familles est très importante, leur soutien étant essentiel au moral de nos blessés. Par ailleurs, je pense que notre armée s’honore à conserver ses blessés dans ses régiments.

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* *

Conformément aux conclusions du rapporteur, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Préparation et emploi des forces : forces terrestres ».

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
ET DES DÉPLACEMENTS

État-major de l’armée de terre.

§ M. le général Bertrand Ract-Madoux, chef d’état-major de l’armée de terre.

Société Thales.

§ Mme Pascale Sourisse, président-directeur général de Thales Communications & Security – Senior vice-président, systèmes C4I de défense et sécurité de Thales ;

§ M. le général Jean-Marie Faugère, conseiller défense ;

§ Mme Isabelle Caputo, directeur des relations parlementaires et politiques.

– Visite du centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) à Sissonne, le 13 septembre 2011.

§ M. le général Claude Mathey, commandant du CCPF ;

§ M. le colonel Hubert Legrand, chef de corps ;

§ Le personnel du CENZUB.

– Visite de la base de défense (BdD) de Verdun, du centre de formation initiale des militaires du rang (CFIM) de Verdun et du 1er régiment de chasseurs de Verdun, le 22 septembre 2011.

§ M. le général Francisco Soriano, commandant de la 7e Brigade blindée ;

§ M. le lieutenant-colonel Éric Fallon, responsable du GSBdD de Verdun ;

§ M. le lieutenant-colonel Olivier Cense, commandant en second du 1er RCh de Verdun

§ Les personnels de la Base de Défense de Verdun, du CFIM de Verdun et du 1er RCh de Verdun.

– Visite de l’hôpital militaire Percy à Clamart et rencontre avec des blessés de l’armée de terre, le 19 octobre 2011.

- M. le médecin général inspecteur Christian Plotton, médecin-chef de l’hôpital d’instruction des armées Percy ;

- M. le capitaine Philippe Lalloz de la cellule d’aide aux blessés de l’armée de terre (CABAT) ;

- Le personnel et les blessés de l’hôpital d’instruction des armées Percy.

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