N° 4453 - Rapport d'information de Mme Monique Boulestin déposé par la commission des affaires européennes sur l'Europe de la culture




No 4453

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 mars 2012.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
l’Europe de la culture,

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Monique BOULESTIN,

Députée

——

La Commission des affaires européennes est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Michel Herbillon, Jérôme Lambert, Didier Quentin, Gérard Voisin vice-présidents ; M. Jacques Desallangre, Mme Marietta Karamanli, MM. Francis Vercamer secrétaires ; M. Alfred Almont, Mme Monique Boulestin, MM. Pierre Bourguignon, Yves Bur, Patrice Calméjane, Christophe Caresche, Philippe Cochet, Jean-Yves Cousin, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Michel Diefenbacher, Jean Dionis du Séjour, Marc Dolez, Daniel Fasquelle, Pierre Forgues, Mme Marie-Louise Fort, MM. Jean-Claude Fruteau, Jean Gaubert, Hervé Gaymard, Guy Geoffroy, Mme Annick Girardin, M. Philippe Gosselin, Mmes Anne Grommerch, Pascale Gruny, Elisabeth Guigou, Danièle Hoffman-Rispal, MM. Régis Juanico, Robert Lecou, Michel Lefait, Lionnel Luca, Philippe Armand Martin, Jean-Claude Mignon, Pierre-Alain Muet, Jacques Myard, Michel Piron, Mmes Chantal Robin-Rodrigo, Valérie Rosso-Debord, Odile Saugues, MM. André Schneider, Philippe Tourtelier.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. L’EUROPE DE LA CULTURE : UNE POLITIQUE AMBITIEUSE, PEU VISIBLE AU REGARD DE SES ENJEUX 9

A. UNE COMPÉTENCE D’APPUI DE L’UNION EUROPÉENNE 9

1. Une reconnaissance tardive 9

2. Consolidée et approfondie par le traité de Lisbonne 10

a) La reconnaissance de la culture comme élément constitutif de l’Union européenne 10

b) La possibilité de promouvoir des actions culturelles à la majorité qualifiée 11

c) Le respect de l’ « exception culturelle » dans les accords commerciaux 12

3. « Unis dans la diversité » : le paradoxe de la culture européenne ? 12

B. LA PROMOTION DE L’IDENTITÉ EUROPÉENNE ET DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE : DES ENJEUX ESSENTIELS 13

1. L’identité européenne : une identité à construire par la culture ? 13

2. Une culture ou des cultures ? 14

3. Le « décalogue » : une réponse à la définition d’une Europe de la culture 15

C. UNE LISIBILITÉ DE LA POLITIQUE DE LA CULTURE CONTESTABLE DU FAIT DU NOMBRE D’ACTEURS IMPLIQUÉS 15

1. L’Union européenne et le Conseil de l’Europe : un partage de compétences pas toujours bien identifié 15

2. La définition de la politique culturelle  européenne: une pluralité d’acteurs 19

a) La Commission européenne 19

(1) Les propositions de la Commission 19

(2) La mise en œuvre de la politique culturelle 20

b) Les positions des co-législateurs de l’Union européenne 20

c) La collaboration avec les États membres : la mise en place de la méthode ouverte de coordination (MOC) 21

II. DES RÉALISATIONS CONCRÈTES QUI POURRAIENT ÊTRE DAVANTAGE DÉVELOPPÉES : 23

A. LA MISE EN VALEUR DU PATRIMOINE : UNE POLITIQUE ACTIVE 23

1. Les « Capitales de la culture » 23

2. Le « label du patrimoine européen » 24

3. Numérisation et conservation : un exemple la bibliothèque « Europeana » 26

B. DÉVELOPPER DAVANTAGE L’AIDE À LA CRÉATION ET À L’INNOVATION CULTURELLE 27

1. Promouvoir le « droit de chacun de participer à la vie culturelle» 28

2. Les aides au numérique : une politique d’avenir 28

3. Innovation et création : Europe 2020 28

C. DÉVELOPPER UNE PLUS GRANDE SYNERGIE ENTRE LES ACTEURS 29

1. Mieux identifier les besoins en termes de partenariats culturels 29

2. Un programme-cadre unique, en liaison avec les autres financements d’actions culturelles 29

3. Renforcer les synergies entre les acteurs 30

CONCLUSION 31

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

ANNEXES 35

ANNEXE 1 : « DÉCALOGUE POUR L’EUROPE DE LA CULTURE », DÉCLARATION COMMUNE 37

ANNEXE 2 : TRAITÉS RELEVANT DU DOMAINE DE LA CULTURE 39

ANNEXE 3 : UN EXEMPLE « D’ERASMUS POUR LA CULTURE » 41

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

On peut s’interroger aujourd’hui sur la pertinence d’un rapport sur l’Europe de la culture, au moment où la crise de la dette fait la une des manchettes de nos quotidiens et où la sauvegarde de notre monnaie commune occupe largement les esprits europhiles les plus convaincus. La culture serait-elle le parent pauvre, un bien superflu, voire un luxe, à l’heure où la construction européenne traverse l’une des crises les plus graves de son histoire ?

Ce n’est pas l’opinion de votre rapporteure. La crise actuelle, comme toute crise, est un révélateur. La difficulté à mettre en place des mécanismes de solidarité européenne révèle davantage les failles d’une unité européenne, d’une prise de conscience insuffisante d’une communauté culturelle, socle d’une Europe politique, que l’inverse.

Jean Monnet, père fondateur de notre Europe, ne s’y trompait d’ailleurs pas puisqu’on lui fait dire de manière apocryphe : « si c’était à refaire je commencerais par la culture » ! Et il n’est dès lors pas indifférent de constater que les prémisses d’une politique culturelle européenne sont déjà introduites par le traité de Maastricht, traité fondateur puisqu’il définit une citoyenneté européenne.

Cependant, quel corps donner à cette citoyenneté européenne, en dehors du principe abstrait d’un passeport désincarné ? Ce n’est pas un hasard si George Steiner, en 2005, sous le titre Une certaine idée de l’Europe, publie un hymne d’amour à la culture européenne, ciment de cette identité européenne, qui fait sens mais qu’il est si difficile de définir.

L’Europe, comme il aime à le rappeler, se résume-t-elle aux cafés, aux monuments, aux rues aux noms célèbres, c’est-à-dire à « ce côté sombre, à cette souveraineté du souvenir » qui ferait d’elle « un lieu de mémoire »?

Derrière cette impossible définition, se dessine, en réalité, en creux, celle d’une diversité de cultures, pourtant unies. En effet, le lien qui semble se tisser entre les pays membres réside dans la devise de l’Union, pour le moins paradoxale « unis dans la diversité ».

La reconnaissance d’une Europe culturelle par l’Union européenne a été tardive, en raison même de cette difficulté à définir l’identité culturelle européenne.

Autrement dit, la difficulté des États membres à s’accorder sur une définition univoque d’une culture européenne explique les difficultés de sa mise en œuvre. La politique ambitieuse voulue par les États membres reste donc peu lisible dans ses actions.

La construction d’une identité et d’une citoyenneté européennes demeure encore une perspective qui suppose une adhésion au projet d’une Europe politique, une vision partagée.

Cette construction passe par des actions volontaristes, une politique culturelle commune qui devra devenir plus visible.

A cet égard, le traité de Lisbonne donne une définition de la culture qui reflète bien la recherche d’un consensus entre les États membres sur cette question.

En effet, trois aspects de la culture se trouvent dans ce traité :

– la culture n’est pas un bien comme les autres : à ce titre, les biens culturels, dans ce qu’il est convenu d’appeler « l’exception culturelle » ou la défense de la « diversité culturelle » échappent aux négociations commerciales dans les accords de politique commerciale (article 207 TFUE) ; cette conception se retrouve notamment dans la dérogation à l’interdiction des aides de l’État en ce qui concerne la politique culturelle (article 107 TFUE) ;

– la culture est une valeur partagée par les États, elle repose sur un héritage commun, c’est la dimension patrimoniale de la culture (article 167 TFUE) ;

– la culture est synonyme du respect de la diversité culturelle, en particulier des cultures régionales, des langues minoritaires, en un mot de la diversité linguistique (article 3 TFUE).

Or, à ce jour, ces trois définitions ne font pas nécessairement consensus au sein des États membres, à l’exception peut-être de la conception patrimoniale.

Comment dès lors bâtir une véritable politique culturelle commune sur un accord a minima ?

Comment dès lors incarner la citoyenneté européenne sur un héritage commun dont seul l’aspect artistique fait consensus ?

Comment dès lors bâtir une politique culturelle ambitieuse si l’on s’accorde uniquement sur le plus petit dénominateur commun ?

Néanmoins, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les réussites enregistrées par la politique culturelle européenne résident essentiellement dans la promotion d’actions symboliques à portée identitaire, qu’il s’agisse des « Journées du patrimoine européen », des « Capitales de la culture », du projet de bibliothèque numérique Europeana, des « Labels du patrimoine européen ».

Ce sont ces actions symboliques qui, couplées au programme Erasmus, – qui n’entre pas stricto sensu dans le programme Culture de l’Union européenne, mais participe de cette construction volontariste d’une citoyenneté européenne incluant une communauté de culture – assurent à la fois la visibilité de la politique culturelle européenne et son succès.

Cependant, le programme 2007-2013 pour la Culture a permis des réussites incontestables, et la Commission européenne a su tirer les enseignements de sa mise en œuvre en recentrant davantage ses actions sur les promotions de la création artistique européenne.

Les critiques que l’on pouvait adresser à la politique culturelle européenne, dispersion des acteurs, saupoudrage des crédits, lourdeur administrative dans la sélection des dossiers, sont donc partiellement levées.

Le programme cadre 2014-2020 propose un recentrage de la politique culturelle sur deux actions d’envergure, à l’exception de l’audiovisuel qui n’entre pas dans le sujet de ce rapport :

– l’aide à la création artistique par l’aide facilitée à la création ;

– le développement des aides numériques qui sont la clé de l’innovation et de la création de demain.

La politique patrimoniale n’en est pas pour autant délaissée, mais elle se combine davantage avec la modernité des projets culturels.

Toutefois, aussi ambitieuse soit-elle, la politique culturelle européenne reste sous-dotée par rapport aux autres politiques européennes. Eu égard aux enjeux de sa mise en œuvre, une augmentation de ses ressources devrait être envisageable comme le propose la Commission européenne dans sa communication en décidant de consacrer 500 millions d’euros à la culture dans les perspectives budgétaires 2014-2020.

Si l’hypothèque de la définition d’une Europe de la culture ou des cultures n’a pas été entièrement levée, la prise en compte d’une nécessité d’une politique culturelle commune, est le premier pas vers la construction que les pères fondateurs appelaient de leurs vœux dans le respect des identités des États membres.

Si l’on considère que la citoyenneté européenne ne supplée pas la citoyenneté nationale, mais s’y rajoute, alors considérons aussi que l’identité européenne ne remplace pas l’identité nationale, mais qu’elle la transcende.

Le présent rapport vise à faire un état des lieux de l’Europe de la culture, tant au regard des enjeux politiques que dans la perspective des négociations budgétaires pour 2014-2020. Nous prenons acte qu’il n’est que la première pierre de l’édifice à construire.

Nous savons, en effet, que des actions prioritaires déjà mises en oeuvre doivent être développées et renforcées.

J’entends rappeler, par là, en premier lieu, la promotion d’une politique patrimoniale d’envergure, le renforcement des aides au numérique, et peut-être la mise en place d’une politique commémorative autour de figures et de personnalités qui incarnent véritablement l’identité européenne afin de donner corps à une véritable politique européenne de la culture.

C’est la voie – humaine, vivante, diverse – indispensable pour contribuer à l’avènement d’une conscience européenne partagée, sans laquelle l’union à laquelle nous aspirons ne saurait trouver son plein épanouissement.

« Sans elle, […] l’Europe resterait inachevée. Car elle parlerait à la raison et non pas au cœur, à l’imagination, au besoin de chaque citoyen d’envisager un avenir dans un sens qui dépasse la nécessité, l’économique. D’où ma profonde conviction, maintes fois exprimée, que dans l’échelle des valeurs, la culture vient devant l’économie. »

José Manuel Barroso, Paris, 3 mai 2005.

I. L’EUROPE DE LA CULTURE : UNE POLITIQUE AMBITIEUSE, PEU VISIBLE AU REGARD DE SES ENJEUX

Reconnue tardivement par le traité de Maastricht, la politique culturelle de l’Union européenne reste peu lisible compte tenu de la multiplicité des acteurs qui l’anime. Ce manque de lisibilité et de visibilité est dommageable eu égard aux enjeux relatifs au projet européen : construire une identité et une citoyenneté européennes qui ne peuvent reposer que sur la prise de conscience d’une communauté culturelle, une identité culturelle commune.

L’Union européenne s’est construite sans la culture. Les politiques culturelles, à l’exception de la défense de « l’exception culturelle » lors des négociations à l’Organisation mondiale du commerce, ne font pas partie des compétences initiales de l’Union européenne.

Les références explicites dans les traités à une Europe de la culture sont donc tardives. Une raison majeure explique cet état de fait : la difficulté à donner une définition de la culture partagée par l’ensemble des États membres, difficulté qui se retrouve dans la défense d’une exception culturelle, c'est-à-dire le refus de faire des biens culturels des marchandises comme les autres.

La référence explicite à une politique culturelle de l’Union européenne, définie comme une compétence d’appui à l’action des États membres, est introduite par le traité de Maastricht instituant l’Union européenne, à l’article 151 TCE(2) qui dispose que « la Communauté contribue à l’épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale, tout en mettant en évidence l’héritage culturel commun ».

Il n’est pas indifférent de noter que c’est le traité de Maastricht qui dessine, le premier, une véritable intégration européenne avec l’introduction d’une citoyenneté européenne.

Dès lors, il paraît difficile de prôner une plus grande intégration européenne sans faire mention du lien qui unit l’ensemble des citoyens européens autour d’une idée et d’un projet commun. Pas d’identité européenne sans culture européenne.

Le traité de Lisbonne consolide et approfondit les différents apports de la construction européenne, qu’il s’agisse des traités d’Amsterdam et de Nice modifiant le traité de Maastricht, et de certaines avancées relatives au traité portant une Constitution pour l’Europe malgré son rejet par référendum.

A ce titre le Préambule du traité sur l’Union européenne fait mention par deux références explicites de la dimension culturelle de l’Union européenne en rappelant les « héritages culturels, religieux et humanistes de l’Europe »(3) et la volonté « d’approfondir la solidarité entre les peuples dans le respect de leur histoire, de leur culture et de leurs traditions. »

L’article 3 du traité sur l’Union européenne énonce dans les objectifs de l’Union européenne que celle-ci « respecte la richesse de sa diversité culturelle et linguistique, et veille à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel européen. »

En accordant une valeur juridique à la Charte des droits fondamentaux, le Traité de Lisbonne donne également une pleine effectivité à son article 22 qui précise : « l’Union respecte la diversité culturelle, religieuse et linguistique. ».

La culture, définie dans sa diversité et sa pluralité, figure donc parmi les fondements de l’Union européenne. Le traité de Lisbonne va plus loin qu’un simple aspect déclaratoire, il offre la possibilité, dans le respect du principe de subsidiarité, de fonder une véritable politique culturelle.

L’article 6 TFUE précise que la culture est au nombre des compétences d’appui de l’Union européenne. Par compétence d’appui, il faut entendre, en respect du principe de subsidiarité, que les politiques culturelles ressortent en premier lieu de la responsabilité des États membres.

L’Union européenne n’intervient donc qu’à titre subsidiaire, elle peut financer des actions, notamment par le biais des fonds structurels, sans pour autant imposer une harmonisation des législations nationales.

Néanmoins, l’article 167 TFUE, qui est l’article pivot de l’action culturelle de l’Union européenne, dispose, dans son paragraphe 2, que l’action de l’Union vise à développer la coopération et à compléter l’action des États membres dans les domaines suivants :

« - l’amélioration de la connaissance et de la diffusion de la culture et de l’histoire des peuples européens,

- la conservation et la sauvegarde du patrimoine culturel d’importance européenne,

- les échanges culturels non commerciaux,

- la création artistique et littéraire, y compris dans le secteur de l’audiovisuel. »

En outre, dans son paragraphe 4, cet article reconnaît l’aspect transversal de la politique culturelle de l’Union puisque « l’Union tient compte des aspects culturels dans son action au titre d’autres dispositions des traités, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité de ses cultures. »

Cette disposition particulière donne un fondement juridique à d’autres politiques de financement que celle contenue spécifiquement dans le programme Culture qui sera analysée dans ce rapport (cf. infra). Si elle contribue à donner une souplesse à l’action de l’Union européenne dans le domaine de la culture, elle a, cependant, pour conséquence, de renforcer le manque de visibilité de sa politique culturelle.

La seule obligation contenue dans les dispositions de l’article 167 TFUE, la consultation obligatoire du Comité des régions, est de s’assurer que la diversité régionale évoquée au paragraphe 1 soit respectée.

Le paragraphe 5 de l’article 167 TFUE précise que la politique culturelle ne ressort plus d’une prise de décision à l’unanimité mais à la majorité qualifiée, condition nécessaire à mise en œuvre d’une politique culturelle européenne d’envergure.

La promotion d’une telle politique bénéficie de la dérogation au principe d’interdiction des aides d’État prévu à l’article 107 TFUE qui est contraire par définition aux dispositions relatives au marché intérieur, en ce qui concerne les « aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans l’union dans une mesure contraire à l’intérêt commun».

Le traité de Lisbonne offre donc les fondements juridiques nécessaires à une politique culturelle ambitieuse, en collaboration avec les États membres.

Par une rédaction complexe, l’article 207 TFUE dispose que le Conseil doit statuer à l’unanimité, contrairement au droit commun qui requiert dans le cadre de la politique commerciale depuis le traité de Lisbonne la majorité qualifiée, si la négociation et la conclusion d’accords « dans le domaine du commerce des services culturels et audiovisuels, […] risquent de porter atteinte à la diversité culturelle et linguistique de l’Union».

Le respect de l’exception culturelle, entendu au sens de diversité culturelle, est donc préservé. Ceci met en évidence l’importance que l’Union européenne accorde aux biens culturels, qui ne peuvent être assimilés à une marchandise comme une autre.

La devise de l’Union européenne, « Unis dans la diversité », qui, suite à l’échec du référendum sur le traité portant Constitution pour l’Union européenne, n’a pas été reprise dans le traité de Lisbonne, met particulièrement bien en exergue le paradoxe inhérent à la promotion d’une culture européenne.

En premier lieu, elle semble davantage se définir en creux, non pas à travers un contenu explicite de ce que serait la culture européenne mais plutôt par ses modalités : respecter la diversité des expressions culturelles héritées du passé au sein de l’Union, qu’il s’agisse d’une diversité linguistique mais également culturelle.

Pour autant, la diversité ne saurait à elle seule résumer l’unité européenne. Quel contenu dès lors apporter à une Europe de la culture, et a fortiori, à une politique culturelle commune si seules les modalités de l’action culturelle sont définies mais pas véritablement son contenu ?

Si le paradoxe de la définition de la culture européenne s’exprime nettement dans la devise européenne un effort de clarification s’avère probablement nécessaire afin de répondre aux enjeux portés par le projet européen : définir une identité et une citoyenneté européennes.

« Si c’était à refaire je commencerais par la culture », cette citation apocryphe de Jean Monnet relève bien les apories relatives à la notion de culture.

Contrairement à la méthode « des solidarités de fait »(4) imposée pour contraindre à la création d’un projet commun que plusieurs siècles d’histoire n’ont pu mener à bien, commencer par la culture reviendrait à mettre en avant l’identité européenne comme une évidence là où la construction historique de l’Union européenne a démontré l’inverse.

Si l’introduction d’une politique culturelle est corrélée à la création d’une citoyenneté européenne par le traité de Maastricht, ni l’identité européenne ni la culture européenne ne sont pour autant clairement définies.

Les débats de la Convention relative à un traité établissant une Constitution pour l’Europe ont mis en évidence les difficultés pour les conventionnels à s’accorder sur l’héritage européen(5), donc sur l’identité du projet européen et de l’Union européenne. Ainsi la réécriture du Préambule ne s’est-elle pas faite sans mal.

Fille des Lumières, porteuse d’un projet universaliste, l’Europe semble avoir du mal à définir ce qui détermine son identité.

Définir une culture européenne revient donc dès lors à promouvoir des valeurs et un contenu qu’il s’agira de défendre au sein des États membres mais également à l’extérieur de l’Union.

Un premier pas résiderait dans la définition d’une politique patrimoniale d’envergure seule à même de définir un espace culturel commun. A ce titre la culture artistique européenne, héritière des courants de pensée de l’Humanisme et des Lumières, semble apte à rassembler, même si l’on peut faire remonter le rayonnement culturel de l’Europe au Moyen Age à travers les rencontres artistiques des constructeurs de cathédrales et les échanges savants de ce temps-là.

La définition d’un espace artistique commun européen n’est en rien une chimère mais une réalité qu’il faut rendre vivante à travers la promotion de l’histoire européenne.

La difficulté à définir une identité européenne autre que patrimoniale réside, à la fois, dans la double conception attachée au terme culture et dans une définition relativement large des actions culturelles au titre de la politique culturelle de l’Union européenne.

Au travers des références faites au terme « culture » dans les différents articles du traité de Lisbonne quatre définitions de la culture peuvent être données :

– la culture n’est pas un bien comme les autres. Ainsi, comme nous l’avons vu, les biens culturels échappent à la règle de la majorité dans le cadre des accords de politique commerciale. Cette conception se retrouve notamment dans la dérogation à l’interdiction des aides d’État en ce qui concerne la politique culturelle ;

– la culture est une valeur partagée par les États, elle repose sur un héritage commun, c’est la dimension patrimoniale de la culture ;

– la culture est synonyme du respect de la diversité culturelle, en particulier des cultures régionales, des langues minoritaires, de la diversité linguistique ;

– la culture est, également, synonyme de création, artistique et audiovisuelle.

Par ailleurs, une lecture de l’article 167 TFUE, fondement juridique à toute action communautaire dans le champ culturel, met en évidence une pluralité de domaines d’action : défense d’une politique patrimoniale à travers la sauvegarde du patrimoine, diffusion de l’histoire culturelle de l’Europe, ou promotion d’actions culturelles en faveur de la création de la culture artistique, aides au secteur audiovisuel.

Cette pluralité de domaines met également en lumière tant les difficultés à donner une définition univoque de la culture que les risques de saupoudrage des actions culturelles.

Conscient de la nécessité de redonner à la politique culturelle une action d’envergure, vingt-deux ministres des affaires culturelles(6), ont, en collaboration avec la Commissaire européenne chargée des questions culturelles(7), Mme Androulla Vassilliou, le 9 février 2012, fait, à Bruxelles, une déclaration commune ayant pour objet de rappeler, entre autres, que « l’Europe de la Culture concourt à l’affirmation de l’identité européenne dans toute sa diversité ».

Sous la forme d’un décalogue(8), cette communication énumère à travers dix commandements, sous forme déclaratoire, les actions à promouvoir pour faire de la culture une politique à part entière de l’Union européenne. Plus qu’un contenu, ce sont des principes qui sont rappelés :

– libre circulation des œuvres ;

– libre accès de tous et de chacun à la culture ;

– liberté de création ;

– préservation des droits d’auteur.

Néanmoins, non sans pragmatisme, l’importance de l’aspect économique du secteur est rappelée afin de mieux consolider les budgets européens des programmes Culture et Médias.

La pluralité des actions engagées au titre de la politique culturelle rend sa lisibilité et sa visibilité difficiles, notamment du fait que le nombre d’acteurs impliqués dans sa mise en œuvre croît d’autant.

L’article 167 TFUE fait explicitement référence au Conseil de l’Europe comme partenaire privilégié des politiques culturelles, même si, en tant qu’organisation paneuropéenne, ce ne sont plus 27 mais 47 États membres qui sont dès lors impliqués dans leurs mises en œuvre.

Le Conseil de l’Europe est, tout d’abord, un acteur incontournable pour la promotion d’instruments juridiques visant à protéger le patrimoine et les biens culturels. Ce ne sont pas moins de huit conventions(9), relevant du domaine de la culture qui ont été signées dont sept sont entrées en vigueur. On citera à titre d’exemple la Convention européenne du paysage ayant pour objectif d’offrir un cadre juridique pour protéger la diversité des paysages.

Il est également un partenaire privilégié dans la mise en œuvre de certaines politiques, telle que celle visant à faire connaître les itinéraires et paysages culturels.

Ce programme a été lancé par le Conseil de l’Europe en 1987. La résolution du Comité des ministres du 8 décembre 2010(10) a créé un accord partiel élargi sur les Itinéraires culturels.

L’institut Européen des Itinéraires culturels, qui siège au Luxembourg, a, ainsi, avec le soutien de l’Union européenne, pour mission de mieux valoriser et transmettre « un patrimoine commun de l’Europe », en développant un tourisme culturel.


Les 29 itinéraires culturels (avril 2011)(
11)

Personnages européens
:

1- Saint Martin de Tours, personnage européen, symbole du partage

2- Les voies de Mozart

3- L’itinéraire Schickhardt

4- La route de Don Quichotte

5- Les routes des Phéniciens

6- La Via Carolingia

7- Transromanica – Itinéraires de l’art roman en Europe

8- La Via Regia

Les chemins de pèlerinage
:

9- Les chemins de Saint-Jacques

10- La Via Francigena

11- Les chemins de Saint Michel

12- Les routes de saint Olav

L’influence monastique :

13- Le réseau des sites

14- Route européenne des abbayes cisterciennes

15- Vikings et Normands

16- Sites, routes et monuments

Patrimoine industriel en Europe
:

17- La route du fer dans les Pyrénées

18- La route du fer en Europe centrale

19- Les parcs et jardins, le paysage

20- Les architectures militaires fortifiées en Europe : l’Itinéraire Wenzel et l’Itinéraire Vauban

21- L’héritage Al-Andalus

22- Le chemin de la langue castillane et son expansion en Méditerranée

23- Itinéraires européens du patrimoine

24- Itinéraires européens du Patrimoine des migrations

25- Les routes de l’olivier

26- Iter Vitis – Les chemins de la vigne en Europe

27- Chemins d´art rupestre préhistorique

28- La route européenne des cimetières

29- La route européenne du patrimoine thermal et des villes thermales

Sont actuellement en projets trois nouveaux itinéraires : la culture et le patrimoine des Roms, et dans les pays voisins de l’Union européenne dont le Caucase Sud, l’itinéraire d’Alexandre Dumas ainsi que l’itinéraire du livre.

Les Journées européennes du Patrimoine sont, depuis 1999, organisées conjointement par l’Union européenne et le Conseil de l’Europe. Les 50 pays signataires de la Convention culturelle européenne (Convention du Conseil de l’Europe) y participent. Un thème national, qui diffère selon les pays, et, change tous les ans, fédère, au niveau national, les manifestations patrimoniales dans les États membres. En 2011, la France avait choisi comme thème « Le voyage du patrimoine », l’Espagne « Archéologie et paysage », la Suède, « Espaces verts », l’Allemagne « Romantisme, réalisme et révolution - le XIXe siècle », la Grèce, « Crises : Continuités et discontinuités dans l’histoire », l’Italie, « Italie, trésor d’Europe… »,...

Les journées européennes du patrimoine 2012 : Les patrimoines cachés

La 29e édition des Journées européennes du patrimoine aura lieu les 15 et 16 septembre prochains invite à découvrir les patrimoines cachés.

Ce thème national a pour objectif de montrer un patrimoine rarement accessible, parfois méconnu et souvent insoupçonné : secrets d’histoire, trésors enfouis, coulisses et machinerie, envers du décor.

Les visiteurs seront invités à poser un regard neuf sur :

– le patrimoine enfoui (fouilles archéologiques, bunkers, épaves,…) ;

– le patrimoine souterrain (catacombes, cryptes, caves, grottes, tumuli,…) ;

– le patrimoine en hauteur (cloches, charpentes,…).

Les visiteurs seront également invités à découvrir des lieux habituellement fermés (salles de théâtre, cinémas, coulisses,…), à admirer des objets rarement exposés, déceler grâce aux nouvelles technologies les couches imperceptibles à l’œil nu de certaines œuvres picturales, ainsi qu’à apprécier le travail de tous ceux qui oeuvrent à la conservation et la mise en valeur du patrimoine.

Source : Ministère de la Culture et de la Communication (France).

Si ce partage des compétences n’est pas critiquable en lui-même il peut conduire à une absence de lisibilité des politiques menées et à une identification difficile des acteurs à même de les mener dans la mesure où la ligne de partage n’est pas clairement définie. L’implication du Conseil de l’Europe est davantage historique, puisqu’il a exercé une compétence qui lui avait été dévolue du fait de l’absence d’implication de l’Union européenne dans ce domaine. Aujourd’hui sa légitimité dans le domaine apparaît moins prégnante.

Néanmoins le Conseil de l’Europe n’est pas la seule organisation internationale a avoir une coopération étroite avec l’Union européenne ; l’UNESCO(12) joue également un rôle important, en particulier en ce qui concerne la promotion et le respect de la diversité culturelle.

Le programme « Culture » de l’Union européenne a été défini à travers deux calendriers : l’agenda 2007-2013, et l’agenda 2014-2020, actuellement en cours de négociation, qui cherche à tirer les enseignements de l’agenda 2007-2013 notamment en promouvant un programme-cadre unique.

En outre, eu égard à la politique transversale de l’Union européenne dans ce domaine, de nombreuses activités culturelles peuvent être financées sur des programmes adjacents (Fonds structurels, Programme Jeunesse en action, Medias…). La volonté identifiée de la Commission européenne et du législateur européen de définir un programme-cadre unique n’empêche pas le financement d’autres actions communautaires dans le cadre d’autres programmes.

La Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un agenda européen de la culture à l’ère de la mondialisation(13), prise en 2007, a rappelé les objectifs de la politique culturelle de l’Union européenne : étant « généralement admis que la culture est un élément indispensable pour atteindre les objectifs stratégiques de l’Union européenne en matière de prospérité, de solidarité et de sécurité, et pour garantir une présence plus visible sur la scène internationale ».

L’objectif de cet agenda s’articule autour de trois axes principaux :

– la promotion de la diversité culturelle et du dialogue interculturel ;

– la promotion de la culture en tant que catalyseur de la créativité dans le cadre de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi ;

– la promotion de la culture en tant qu’élément indispensable dans les relations extérieures de l’Union.

Dans sa communication de 2011, la Commission européenne a proposé un nouveau programme : le programme « Europe créative – Un nouveau programme-cadre pour les secteurs de la culture et de la création (2014-2020) ». Il a pour objectif un programme-cadre unique afin de rationaliser les actions notamment du point de vue de la gestion de celles-ci.

Ce programme se composera des trois volets suivants :

– un volet transsectoriel destiné à l’ensemble des secteurs de la culture et de la création ;

– un volet Culture destiné aux secteurs de la culture et de la création ;

– un volet MEDIA destiné au secteur audiovisuel.

Le programme Culture 2007-2013 qui remplace le programme Culture 2000 reste un bon exemple d’une politique ambitieuse difficilement lisible pour le citoyen européen mais également pour les acteurs de la politique culturelle.

Au sein de la Commission ce sont deux entités différentes qui sont chargées de la mise en œuvre de la politique culturelle :

– la Direction Générale Education et Culture désigne les Capitales européennes de la Culture, soutient l’attribution de prix pour le Patrimoine culturel, l’architecture, la littérature et la musique ;

– l’Unité Culture de l’Agence exécutive « Education, Audiovisuel et Culture » (EACEA) gère et exécute la plupart des autres activités du Programme Culture 2007-2013 ;

En application du principe de subsidiarité, l’EACEA propose des financements qui sont ensuite directement exécutés par les États membres.

Malgré la volonté de rendre l’action de l’Union européenne dans le domaine de la culture plus lisible, le programme-cadre unique n’a pas pour objet de changer la répartition des compétences entre la Direction générale de la Culture et l’Unité Culture de l’Agence exécutive.

Dans la décision du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 établissant le programme Culture pour la période 2007-2013(14), les axes prioritaires suivants ont été définis :

– promouvoir la mobilité transnationale des acteurs culturels ;

– encourager la circulation transnationale des œuvres et des produits culturels et artistiques ;

– favoriser le dialogue interculturel.

Une enveloppe de 400 millions d’euros a été attribuée pour la période 2007-2013.

Le Conseil de l’Union européenne a défini un plan de travail, lors de ses conclusions adoptées le 18 novembre 2010, pour la période 2011-2014 qui s’organise autour de six priorités : diversité culturelle, dialogue interculturel et culture accessible et inclusive, industries culturelles et créatives, compétence et mobilité, patrimoine culturel, culture dans les relations extérieures, statistiques culturelles.

Ce plan de travail prévoit notamment la mise en place d’un « label du patrimoine européen ».

Le 23 novembre 2011, la Commission européenne a adopté une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne établissant le programme « Europe créative »(15) qui a pour objectif de succéder pour la période 2014-2020 aux programmes de soutien et de coopération que sont Culture, Media et Media Mundus.

Ce programme sera doté d’un financement à hauteur de 1,8 milliard d’euros et se divisera en trois volets, un volet transsectoriel axé sur tous les secteurs de la culture et de la création, un volet culture et un volet média.

Au sein des États membres les compétences culturelles peuvent être dévolues à différents acteurs en fonction du niveau de centralisation des États. Ainsi si en France il est de tradition que l’État soit un acteur de premier plan de la politique culturelle, les régions et les communes, du fait de la compétence générale qui leur est attribuée participent également à la définition et à la mise en œuvre de la politique culturelle.

La méthode ouverte de coordination prônée (MOC) par la Commission européenne vise à adopter des objectifs communs, à contrôler régulièrement les progrès accomplis dans leur réalisation et à échanger les bonnes pratiques et les informations utiles de manière à favoriser l’apprentissage mutuel.

Pluralité des acteurs, pluralité des actions, pluralité des contenus, la politique culturelle européenne est peu lisible pour le citoyen européen, alors qu’il s’agit de construire une identité européenne reconnaissable et identifiable comme telle. A l’ambition des valeurs énoncées dans le Préambule doivent nécessairement répondre des actions d’envergure, même si dans le domaine de la valorisation du patrimoine culturel des avancées réelles sont remarquables.

II. DES RÉALISATIONS CONCRÈTES QUI POURRAIENT ÊTRE DAVANTAGE DÉVELOPPÉES :

La décision du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 établissant le programme Culture (2007-2013) a porté essentiellement sur un volet patrimonial. Volet patrimonial qui coïncide avec la visibilité des actions en matière de politique de la culture et de volonté d’identifier des lieux marquants de l’héritage européen, sorte de « lieux de mémoire »(16) de l’identité européenne.

Différentes initiatives sont à noter, l’initiative des « Capitales de la culture » qui a rencontré un succès grandissant ainsi que celle des « Label du patrimoine européen ».

Initiative intergouvernementale à l’origine, l’opération « Capitale de la culture » devient une véritable initiative communautaire à partir de 1999(17), dont les critères de sélection sont précisés par la décision du Parlement et du Conseil du 24 octobre 2006.

La décision du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 2006(18) a, ainsi, institué une action communautaire en faveur de la manifestation « Capitale européenne de la culture » pour les années 2007 à 2019, en précisant notamment l’ordre d’habilitation à nommer une « Capitale européenne de la culture ». Le programme Culture 2007-2013 prévoit le financement de ce volet de la politique patrimoniale européenne, qui est également repris dans l’agenda pour 2014-2020.

En 2012, les villes de Guimaraes (Portugal) et Maribor (Slovénie) ont été désignées Capitales européennes de la culture. Leur succèderont en 2013 les villes de Marseille et Kosice (Slovaquie).

L’intérêt de cette manifestation pour notre pays est double : la promotion de la diversité européenne à travers les échanges entre artistes, et le soutien financier des manifestations à hauteur de 1,5 million d’euros.

L’intérêt de ce programme, outre l’aspect patrimonial, a pour objet de rendre visibles les actions de l’Union européenne dans le développement d’une culture européenne commune.

Un exemple de Capitale européenne de la culture : Lille 2004

De la cérémonie d’ouverture des manifestations, le 6 décembre 2003, à la cérémonie de clôture des manifestations, le 28 novembre 2004, Lille capitale européenne de la culture aura proposé 2 500 manifestations culturelles : spectacles, expositions, grandes fêtes populaires, métamorphoses urbaines...

Ces 2 500 manifestations se sont déroulées sur un territoire transfrontalier impliquant 193 communes de la région Nord / Pas-de-Calais et de Belgique.

La ville de Lille a connu une augmentation de 30 % de sa fréquentation touristique avec de 9 millions de visiteurs, parmi lesquels de nombreux touristes européens (Allemagne, Grande-Bretagne, Pays-Bas).

Les grandes expositions ont connu des fréquentations records : 301 000 visiteurs pour l’exposition Rubens au Palais des Beaux-arts de Lille, 251 000 visiteurs au Tri Postal de Lille, 214 000 visiteurs pour l’exposition Mexique-Europe au Musée d’Art Moderne de Villeneuve d’Ascq, 128 000 visiteurs pour l’exposition Picasso à la Piscine de Roubaix, 110 000 visiteurs pour l’exposition relative à l’égyptologue Auguste Mariette à Boulogne-sur-Mer, 80 000 visiteurs pour les Beffrois de la culture, 59 000 visiteurs pour les installations de l'Eglise Sainte Marie-Madeleine de Lille, et 28 500 visiteurs pour l’exposition Ousmane Sow à Mons-en-Baroeul.

La célébration de Lille comme capitale de la culture a été l’occasion de développer des programmes d'aménagement urbain et de réhabilitation du patrimoine qui ont permis, des deux côtés de la frontière franco-belge, d'offrir, pour les années futures, de nouveaux équipements culturels : douze maisons Folie, des lieux d'exposition, la réouverture de l'Opéra de Lille ou encore une Halle de glisse dédiée aux nouveaux sports.

L'événement Lille 2004 a donc participé au développement d'un territoire transfrontalier européen.

Source : mairie de Lille.

La décision le Conseil de mettre en place, dans ses conclusions établissant un plan de travail en faveur de la culture pour la période 2011-2014, un « label du patrimoine européen », répond à la priorité d’identifier un patrimoine culturel afin de fonder une identité commune, telle que l’avait défini le Conseil dans ses conclusions en novembre 2008.

La décision, prise selon la procédure de la co-décision, le 16 novembre 2011 par le Conseil et le Parlement européen, d’établir une action de l’Union européenne pour développer le label du patrimoine européen, a abouti, le 1er décembre 2011, à une décision du Conseil sur les modalités pratiques et de procédure en vue de la nomination de quatre membres du jury européen.

L’objectif du « label du patrimoine européen » n’est pas de concurrencer d’autres actions patrimoniales, tels que les Itinéraires culturels du Conseil de l’Europe ou le Prix du Patrimoine culturel de l’Union européenne. Ce dernier, défini d’après le concours Europa Nostra, a été attribué à la Villa Empain le 30 septembre 2011 (Bruxelles), qui a été désignée comme l’un des exemples plus aboutis du style Art Déco en Europe.

Le « label du patrimoine européen » n’a ni une vocation esthétique ni une vocation de conservation patrimoniale, mais celle de la construction d’une identité culturelle européenne. A ce titre, il répond davantage à la volonté de désigner des « lieux de la mémoire » européenne auxquels pourraient s’identifier les citoyens européens. Il s’agit donc de distinguer des sites marquants de l’identité européenne.

Ce projet, à l’origine, était une initiative intergouvernementale, lancée, en 2006, par la France, la Hongrie et l’Espagne. En 2011, 68 sites avaient reçu le label du patrimoine européen. La « communautarisation » de ce projet met bien en évidence l’importance que l’Union européenne accorde à des initiatives susceptibles de créer une identité culturelle commune.

En France, ont obtenu le « label du patrimoine européen », la maison de Robert Schuman à Scy-Chazelles, lieu symbolique de la construction européenne, la Cour d’honneur du Palais des Papes, en Avignon, synonyme du rayonnement artistique européen au XVIe siècle, l’abbaye de Cluny, symbole du rayonnement culturel et intellectuel au Moyen Age.

Quelques sites ayant obtenu le label du patrimoine européen dans sa version intergouvernementale

Chypre : les fortifications de Nicosie, site de Kourion, Circuit de six églises avec fresques byzantines et post-byzantines (Région de Troodos),

Espagne : archives de la Couronne d’Aragon, Monastère royal de Yuste, Cap Finistère, Résidence des étudiants de Madrid,

Grèce : l’Acropole, le palais de Knossos, le site archéologique de Poliochne, le site byzantin de Monemvasia,

Hongrie : le Palais Esterhazy de Fertod,

Italie : la place du Capitole à Rome, la maison natale d’Alcide de Gasperi à Pieve Tesino, maisons natales de Puccini, Rossini et Verdi,

Pologne : les chantiers de Gdansk, la colline de Lech, la cathédrale Saint Wenceslas et Stanislas sur la colline de Wawel à Cracovie, la ville de Lublin,….

Source : ministère de la culture et de la communication (France)

Désormais, un jury européen composé de treize experts indépendants se prononcera sur l’attribution de ce label.

Projet initié en 2008, la bibliothèque numérique Europeana a pour vocation première de sauvegarder le patrimoine européen et de le rendre accessible grâce à la numérisation des œuvres. Succès incontestable avec la mise en ligne de plus de 19 millions d’œuvres numérisées, Europeana montre également la capacité des institutions culturelles à collaborer efficacement pour la réussite d’un projet, à l’origine, non dénué d’embûches.

Le succès d’Europeana en tant que plateforme numérique offrant un accès aux œuvres patrimoniales européennes ne doit pas cacher la difficulté à trouver un moyen de financement pérenne pour assurer la viabilité de ce modèle de bibliothèque patrimoniale numérique.

Les conclusions du Conseil du 10 mai 2012 sur Europeana, prochaines étapes(19) invite la Commission à proposer un calendrier allant dans ce sens.

Le financement d’Europeana s’est fait en marge du programme Culture. Dans les perspectives 2014-2020, sa mise en œuvre se fera dans le cadre de la stratégie numérique pour l’Europe.

Le rapport de MM. Hervé Gaymard et Michel Lefait sur la numérisation de l’écrit établi pour le compte de notre commission (no 4450, 6 mars 2012) fait un point d’ensemble sur la bibliothèque Europeana.

Europeana : une initiative patrimoniale d’envergure réussie

Europeana est un site portail permettant de diriger les internautes vers les sites des organismes possédant les documents demandés.

Ce n’est pas une bibliothèque numérique car elle ne stocke pas les fichiers des œuvres auxquelles elle donne accès. Elle permet la recherche à partir d’un ensemble de ressources sur les serveurs de ses partenaires.

Europeana est gérée par une fondation de droit néerlandais (EDL European digital library) domiciliée à la Bibliothèque royale des Pays-Bas, présidée depuis la fin de l’année dernière par M. Bruno Racine, Président de la Bibliothèque nationale de France.

Elle est l’organe directeur d’Europeana. Elle assure la promotion de la collaboration entre les institutions culturelles mettant leurs collections à la disposition d’Europeana et fournit le cadre juridique nécessaire à sa gouvernance.

Europeana contient actuellement environ 19 millions d’objets : dont 64 % de photographies, cartes, tableaux, pièces de musées et autres images numérisées. Les textes, dont plus de 1,2 million de livres complets pouvant être consultés en ligne et/ou téléchargés, s’élèvent à 34 %. Les contenus vidéo et audio représentent environ 2 % des collections.

Les principaux pays contributeurs, au nombre de six, sont l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, la Suède et les Pays-Bas qui fournissent plus d'un million d’objets chacun, l’Allemagne et la France étant largement les deux contributeurs les plus importants.

L’essentiel de ce matériel accessible se compose d’éléments qui ne sont plus protégés par un droit d’auteur.

Pour l’avenir, la Commission a fourni un objectif indicatif de 30 millions d’objets en 2015 pour Europeana, comprenant, notamment, « tous les chefs-d’œuvre européens qui ne sont plus protégés par des droits d’auteur et tout le matériel numérisé grâce à des fonds publics ».

L’objectif de 30 millions d’objets numérisés en 2015 apparaît assez ambitieux compte tenu des coûts et de la situation économique et financière de la plupart des pays d’Europe.

Le rapport du Comité des Sages sur lequel est basé cette recommandation de la Commission, a évalué le coût de la numérisation de l’ensemble des collections des musées, archives et bibliothèques d’Europe à environ 100 milliards d’euros.

Ce chiffre inclut l’ensemble des matériels suivants : 77 millions de livres, 24 millions d’heures de programmes audiovisuels, 358 millions de photographies, 75,43 millions d’œuvres d’art et 10,45 milliards de pages d’archives.

Le programme 2014-2020 tire les enseignements de la mise en oeuvre des actions culturelles initiées par l’agenda 2007-2013. En accord avec la stratégie Europe 2020 qui succède à celle de Lisbonne, le programme 2014-2020, outre la refonte des programmes culture et média dans un programme - cadre unique, recentre son action sur l’aide à la création et au développement du numérique comme éléments de développement d’une culture commune.

Si l’on excepte l’aide dévolue au secteur cinématographique et audiovisuel, ce sont 500 millions d’euros qui seront consacrés à la culture. L’accent est clairement mis par la Commission sur l’importance de la culture dans un contexte de crise par la proposition d’accroître l’enveloppe budgétaire de 25 %, avec la proposition d’allouer 100 millions d’euros supplémentaires spécifiquement au programme destiné à la culture.

A ce titre, il importe de demeurer vigilant, dans un contexte de discipline budgétaire forte, lors des négociations du budget à venir avec les États membres, de manière à ce que ce secteur ne supporte pas des restrictions budgétaires substantielles.

La culture, eu égard aux enjeux qui la sous-tendent, dans un contexte de crise, n’est en rien un luxe superflu, elle est à l’inverse un bien nécessaire, facteur de cohésion sociale autour d’une identité et d’une citoyenneté européennes encore en construction.

Le nouvel agenda fait une priorité de l’accessibilité au financement des actions culturelles par les acteurs culturels, en particulier les PME impliquées dans les secteurs culturels et créatifs. L’analyse du programme antérieur avait mis en évidence la difficulté pour ces acteurs d’accéder à des financements européens.

En outre, des priorités de nature sociale sont également prises en compte, notamment l’accès et la participation à la culture de groupes défavorisés. La culture comme facteur d’intégration sociale est, dès lors, largement soulignée.

L’accent est également mis sur les aides au numérique, même si la politique de numérisation massive et de conservation ne ressort pas du programme Culture mais de celui de la stratégie numérique pour l’Europe.

L’objectif est d’utiliser le numérique comme un facteur d’innovation et de création dans la perspective d’Europe 2020.

Cette stratégie s’inscrit dans le sens des objectifs Europe 2020 qui vise à développer l’innovation et la création sources de croissance. Le secteur de la culture et de la création représentait en 2008 4,5 % du PIB européen et 3,8 % de la main d’œuvre.

Le secteur de la création culturelle est donc un secteur économiquement porteur. Les nouvelles technologies de l’information participent tant à la diffusion des œuvres qu’à de nouveaux modes de création qu’il est donc nécessaire d’encourager.

Si la politique de la culture européenne est une politique ambitieuse, non exempte de succès, la multiplicité des acteurs comme des sources de financement pose un problème en termes de lisibilité.

L’un des objectifs spécifiques est de développer la capacité des secteurs de la culture et de la création européens à opérer au niveau transnational, en particulier en renforçant les relations et les réseaux établis entre les opérateurs.

Les analyses d’impact relatives au programme Culture ont mis en évidence que la diversité culturelle et linguistique en Europe conduisait à une fragmentation du marché qui limite actuellement la circulation des oeuvres et des artistes.

L’agenda 2014-2020 entend remédier à ces dysfonctionnements notamment en facilitant l’accès aux programmes financés par les sources communautaires. La mise en place d’un guichet commun, intitulé « Europe créative », la réduction des formalités administratives, et, en particulier, la possibilité accrue de remplir des formulaires électroniques, visent à une plus grande efficacité et cohérence du programme communautaire. Les subventions de fonctionnement seront également remplacées par des subventions de projets plus faciles à appréhender pour les candidats bénéficiaires.

Renforcer la capacité financière des secteurs de la culture et de la création est l’un des axes majeurs du nouvel agenda. Pour autant, celui-ci n’entend pas se substituer aux autres modes de financement.

Si la politique culturelle au niveau de l’Union européenne est difficilement lisible pour le citoyen du fait de sa transversalité, ce serait une gageure de croire que l’ensemble des actions pourrait être regroupé au sein d’un seul programme.

Le programme Erasmus est un bon exemple de cette politique transversale. Il dépend autant de la politique culturelle que de la politique éducative. A cet égard, il a inspiré des actions spécifiquement culturelles, puisque le budget 2012 prévoit un projet pilote intitulé « mobilité des artistes »(21).

Le programme Erasmus

Le programme Erasmus n’appartient pas stricto sensu à la politique européenne de la culture. Son financement est assuré par la ligne budgétaire Education.

Il s’agit d’un programme qui encourage, dans le cadre des études supérieures, la mobilité des étudiants et des enseignants dans des universités européennes.

Lancé en 1987, l’acronyme anglais Erasmus (European Region Action Scheme for the Mobility of University Students), forgé sur le nom de l’humaniste européen Erasme, signifie Système Européen d’Action Régionale pour la Mobilité des Etudiants.

La grande majorité des universités européennes prennent part au programme Erasmus et plus de 2,2 millions d'étudiants y ont participé depuis son lancement en 1987, ainsi que 250 000 professeurs et autres membres du personnel de l'enseignement supérieur depuis 1997 (ce type d'échanges a été davantage développé en 2007).

Son budget annuel dépasse les 450 millions d'euros. Il bénéficie de la participation de 4 000 établissements d'enseignement supérieur dans 33 pays. Une extension du programme Erasmus appelée Erasmus mundus, ouverte à tous les pays du monde, a été mise en œuvre à partir de la rentrée universitaire 2004-2005.

Source : Commission européenne.

Une plus grande visibilité et lisibilité de la politique culturelle européenne passera dès lors par une meilleure diffusion de celle-ci : identification d’actions symboliques et aide à la création culturelle. Le rayonnement culturel de l’Europe est le premier moyen d’identifier une culture européenne vivante.

Le nouveau programme pour 2014-2020 n’a pas pour objectif de se substituer aux modes de financements spécifiques des fonds structurels davantage axés sur la préservation du patrimoine et du développement touristique, mais de créer des synergies avec ces instruments dont l’efficacité a été prouvée.

En outre, le caractère transnational de l’intervention de l’Union européenne aura pour effet de renforcer les synergies entre les acteurs culturels, tout en induisant des économies d’échelle.

CONCLUSION

La politique culturelle de l’Union européenne est une réalité, les perspectives financières pour 2014-2020 le confirment. Son manque de lisibilité pour le citoyen européen devrait être en partie corrigé par le nouveau programme, même si sa dimension transversale demeure.

L’aspect patrimonial de cette politique devrait, néanmoins, être renforcé, puisque c’est celui qui pour le moment donne le plus de corps à une identité et une citoyenneté européennes. A cet égard votre rapporteure propose de développer des actions symboliques dont une politique commémorative autour de figures qui incarnent le « génie »(22) européen. La célébration du centenaire de la naissance ou de la mort d’un artiste tels que Wolfgang Amadeus Mozart, Victor Hugo, ou Miguel de Cervantès, pourrait être le moyen de réunir une mémoire européenne autour de ces personnalités incarnant un patrimoine commun, sans que la diversité culturelle qui caractérise l’identité européenne soit mise à mal.

Au-delà de cet état des lieux de la politique culturelle européenne, votre rapporteur prend date pour un approfondissement des thèmes abordés dans ce rapport, eu égard à l’importance de la définition d’une culture commune, pour une identité et une citoyenneté communes.

A ce titre, à ce stade, elle formule quelques propositions :

1) au niveau national :

– rendre plus lisible aux yeux du citoyen européen les actions culturelles financées par l’Union européenne ;

– soutenir, lors des négociations à venir de l’agenda 2014-2020 au Conseil des ministres, la proposition de la Commission d’une enveloppe budgétaire en hausse pour le secteur de la Culture.

2) au niveau communautaire :

– encourager une politique patrimoniale d’envergure ;

– faire de l’aide au numérique le pivot de la création artistique ;

– construire une politique mémorielle autour de figures incontournables.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 6 mars 2012, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

M. Yves Bur. La France est peut-être plus sensible au thème de la culture européenne que d’autres États membres qui n’ont pas de ministère de la culture et n’ont pas de culture officielle. La question est de savoir s’il faut une culture officielle européenne avec un ministère en charge de cette mission ou s’il faut encourager des initiatives qui concourent à cette identité culturelle européenne.

Il y a aussi l’aspect numérique à ne pas négliger car les échanges des réseaux culturels passent de plus en plus par ce vecteur.

Mme Monique Boulestin, rapporteure. On peut également citer le cinéma et aussi bien d’autres actions culturelles. Si un pays est suffisamment novateur, il peut en entraîner d’autres et la France pourrait jouer ce rôle.

Le Président Pierre Lequiller. C’est un sujet majeur mais encore balbutiant. J’ai à l’esprit la phrase de Monnet qu’il n’a sans doute pas prononcée, mais il est vrai qu’il aurait sans doute fallu commencer à faire l'Europe par la culture.

Il y a une atmosphère culturelle spécifique et commune en Europe, même si les langues sont différentes, qui n’existe pas dans l’ensemble du monde et tient peut-être à sa particularité d’avoir vécu une histoire entre guerres et réconciliations.

L’Europe ne peut pas avoir un ministère de la culture mais elle peut fournir le support à une action en faveur de l'Europe de la culture.

Puis la Commission a autorisé la publication du rapport d’information.

ANNEXES

ANNEXE 1 :
« DÉCALOGUE POUR L’EUROPE DE LA CULTURE »,
DÉCLARATION COMMUNE

L’Europe de la culture

À l’occasion de son déplacement à Bruxelles le 9 février 2012 à la Commission européenne, Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication rend public le « Décalogue pour l’Europe de la Culture », déclaration commune approuvée par la commissaire européenne à la Culture et 22 ministres de l’Union européenne.

Décalogue pour l’Europe de la Culture

1. L’Europe de la Culture incarne les valeurs de la démocratie dans l’ensemble des nations de l’Union européenne.

2. L’Europe de la Culture concourt à l’affirmation de l’identité européenne dans toute sa diversité et pour l’épanouissement des arts et des langues qui en font la richesse.

3. L’Europe de la Culture assure l’absolue liberté de la création à travers toutes ses composantes et ses manifestations.

4. L’Europe de la Culture promeut l’accès de tous et de chacun sans distinction de sexe, d’âge, d’origine, de santé ou de condition sociale, aux œuvres de l’esprit, aux expressions de l’art, à l’héritage du patrimoine matériel et immatériel.

5. L’Europe de la Culture préserve le droit légitime des créateurs et des auteurs à une juste rétribution et le garantit par toutes mesures appropriées contre les menaces de piratage, contrefaçon, vol et utilisation abusive auxquels ils pourraient être exposés.

6. L’Europe de la Culture favorise la circulation et l’exposition des œuvres, tant à l’intérieur de l’Union européenne qu’au-delà de ses frontières et elle veille au respect juridique et financier de l’action des divers acteurs Culturels qui l’organisent et la valorisent.

7. L’Europe de la Culture établit les bonnes règles de gouvernance de l’économie du marché de l’art et des industries Culturelles dans un esprit de complète transparence. Elle participe à l’élaboration des innovations intéressant les pouvoirs publics et les initiatives privées pour garantir leur développement harmonieux à l’abri de tout monopole commercial.

8. L’Europe de la Culture relève les défis technologiques, financiers et juridiques, induits par la révolution numérique pour le rassemblement et la transmission des œuvres comme pour l’épanouissement de nouvelles formes d’expression artistique.

9. L’Europe de la Culture appelle au renforcement des programmes scolaires, des pédagogies et des médiations pour l’éducation artistique et la formation des créateurs.

10. L’Europe de la Culture en soulignant que la création, l’art et la beauté constituent un investissement d’avenir fondamental, à la fois créateur de mieux-être intime et collectif comme d’emplois économiques, engage l’Union européenne à consolider les budgets des programmes Culture et médias pour répondre aux besoins et aux espérances des Européens.

 

La commissaire européenne et 22 ministres de l’Union européenne soutiennent cette initiative « Décalogue pour l’Europe de la Culture » et cosignent ce texte :

– Mme Androulla Vassilliou, commissaire européenne pour la Culture, les Médias, l’Éducation, la Jeunesse et le Sport

– M. Bernd Neumann, ministre fédéral de la Culture et des Médias d’Allemagne

– Mme Claudia Schmied, ministre fédéral de l’Éducation, des Arts et de la Culture d’Autriche

– Mme Fadila Laan, ministre de la Culture, de l’Audiovisuel, de la Santé et de l’Égalité des chances de la communauté française de Belgique

– M. Vezhdi Rashidov, ministre de la Culture de Bulgarie

– M. Georges Demosthenous, ministre de l’Éducation et de la Culture de Chypre

– M. Jose Maria Lassalle Ruiz, secrétaire d’État à la Culture d’Espagne

– M. Rain Lang, ministre de la Culture d’Estonie

– M. Paavo Arhinmäki, ministre de la Culture et des Sports de Finlande

– M. Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication de la France

– M. Pavlos Yeroulanos, ministre de la Culture et du Tourisme de Grèce

– M. Geza Szöcs, ministre de la Culture de Hongrie

– M. Jimmy Deenihan, ministre des Arts et du Patrimoine d’Irlande

– M. Lorenzo Ornaghi, ministre des Activités et du Patrimoine culturel d’Italie

– Mme Zaneta Jaunzeme-Grende, ministre de la Culture de Lettonie

– M. Arunas Gelunas, ministre de la Culture de Lituanie

– Mme Octavie Modert, ministre de la Culture du Luxembourg

– M. Mario De Marco, secrétaire d’État pour la Culture, le Tourisme et l’Environnement de Malte

– M. Francisco José Viegas, secrétaire d’État pour la Culture du Portugal

– Mme Alena Hanakova, ministre de la Culture de la République tchèque

– M. Hunor Kelemen, ministre de la Culture et du Patrimoine national de Roumanie

– Mme Judith Wilcox (baroness), secrétaire d’État au ministère des Entreprises, de l’Innovation et des Compétences du Royaume-Uni

– M. Bogdan Zeks, ministre de la Culture de Slovénie

Paris, le 8 février 2012

ANNEXE 2 :
TRAITÉS RELEVANT DU DOMAINE DE LA
Culture

N° 

Titre 

Ouverture du traité 

Entrée en vigueur 

E.

N.

U.

018

Convention culturelle européenne  

19/12/1954

05/05/1955

X

 

 

066

Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique  

06/05/1969

20/11/1970

X

X

 

119

Convention européenne sur les infractions visant des biens culturels  

23/06/1985

 

X

X

 

121

Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe  

03/10/1985

01/12/1987

X

X

X

143

Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique (révisée)  

16/01/1992

25/05/1995

X

X

X

147

Convention européenne sur la coproduction cinématographique  

02/10/1992

01/04/1994

X

 

X

199

Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société  

27/10/2005

01/06/2011

X

X

X

176

Convention européenne du paysage  

20/10/2000

01/03/2004

X

 

 

Notes :
Conventions et Accords ouverts aux États membres du Conseil de l'Europe et, le cas échéant :
E.: aux États européens non membres
N.: aux États non européens non membres
U.: à l'Union européenne.
Voir les clauses finales de chaque traité.

Source : Bureau des Traités sur http://conventions.coe.int

ANNEXE 3 :
UN EXEMPLE « D’ERASMUS POUR LA CULTURE »

Chapitre 1504 – Développer la Coopération culturelle et audiovisuelle en Europe

Données chiffrées



Source : Budget de l’Union européenne adopté pour 2012.

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 () D’après la nouvelle numérotation issue du traité d’Amsterdam.

3 () Rédaction issue du traité de Lisbonne.

4 () Selon le terme employé par Robert Schuman dans sa déclaration du 9 mai 1950.

5 () Un consensus a finalement été trouvé. Le considérant 2 du Préambule du TUE rappelle un héritage pluraliste « culturel, religieux et humaniste ».

6 () N’ont pas signé la déclaration commune le Danemark, les Pays-Bas, la Pologne, la Suède, la Slovaquie

7 () Mme Androulla Vassilliou, Commissaire en charge de la Culture, est également commissaire en charge du Multilinguisme, de l’Education, de la Jeunesse et du Sport.

8 () Voir annexe 1.

9 () Voir annexe 2.

10 () CM/RES (2010) 53

11 () Le Conseil de l’Europe, une organisation au service des droits de l’homme, Xavier Pinon. LGDJ, 2011, pp. 185-186.

12 () Le Règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le programme « Europe créative » rappelle que la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles fait partie de l’acquis communautaire.

13 () SEC(2007) 570.

14 () Décision n°1855 /2006/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006.

15 () SEC (2011)1399 final et SEC (2011) 1400 final

16 () « Lieux de mémoire » : expression utilisée par l’historien Pierre Nora pour l’ouvrage éponyme dont il a assuré la direction. En trois volumes, La République, la Nation, les France, cet ouvrage essaie de reconstituer le patrimoine mémoriel et symbolique de la France.

17 () Décision 1419/1999/CE.

18 () Décision 1622/2006/CE.

19 () 2010/C 137/07.

20 () Selon la Recommandation 1990(2012) du Conseil de l’Europe.

21 () Voir annexe no 3.

22 () Génie est pris ici au sens étymologique, c'est-à-dire qui se réfère à la naissance, l’origine de l’idée européenne.