N° 1006 - Proposition de résolution de M. Noël Mamère tendant à la création d'une commission d'enquête relative à l'incendie du centre de rétention administrative de Vincennes, au fonctionnement et à la légalité des centres de rétention administrative



Document

mis en distribution

le 7 juillet 2008


N° 1006

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 juin 2008.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête relative à l’incendie du centre de rétention administrative de Vincennes, au fonctionnement et à la légalité des centres de rétention administrative,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR M. Noël MAMÈRE, Mme Martine BILLARD, MM. Yves COCHET et François de RUGY,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le dimanche 22 juin 2008 des évènements très graves se sont déroulés au centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes (Val-de-Marne). Le plus grand centre de rétention de France a été ravagé par les flammes. Le sinistre a eu lieu au lendemain de la mort d’un Tunisien, âgé de 41 ans, qui a succombé à une crise cardiaque dans ce centre (samedi 21 juin en fin d’après-midi). L’homme se trouvant seul au moment du décès. À l’annonce de son décès, les autres retenus ont, selon la préfecture de police, « légitimement souhaité connaître la situation ». C’est le dimanche en milieu d’après-midi qu’un début de révolte a éclaté. La police est intervenue et, très vite, quelques chambres ont pris feu, puis tout le centre. Selon la préfecture de police de Paris, « plusieurs foyers d’incendie volontaire » sont détectés. L’incendie sera signalé aux sapeurs-pompiers de Paris à 15 h 10. Malgré l’intervention rapide des secours, le feu a détruit les deux enceintes de 140 places chacune qui composaient le CRA de Vincennes. L’une était ouverte depuis à peine plus d’un an et l’autre avait été réhabilitée après un premier incendie en janvier 2007. L’établissement, qui hébergeait 249 étrangers en instance de reconduite à la frontière, est hors d’usage. Si la plupart des retenus ont pu être rapidement évacués et réunis au sein du gymnase de l’école de police voisine, dix-huit d’entre eux, intoxiqués par les fumées, ont dû être hospitalisés. Sur les 249 étrangers présents dans le centre, 193 ont été transférés dans la nuit de dimanche à lundi vers d’autres CRA, à Lille (Nord), Nîmes (Gard), Palaiseau (Essonne) et Oissel (Seine-Maritime). Un seul manquait à l’appel lundi matin, ayant vraisemblablement pris la fuite dans la panique. Depuis six mois, ce centre connaît des incidents à répétition. La taille de cet établissement, d’une capacité totale de 280 places, rend la situation ingérable, y compris pour les policiers.

Ces évènements posent le problème de l’existence même de ces centres de rétention. La France compte 25 centres de rétention administrative en métropole, 2 centres en Guyane et à Mayotte, et plus de 100 lieux de rétention (locaux de police, etc.). Les centres comptent 1 700 places. En 2007, 35 000 étrangers ont transité en rétention, dont 242 enfants, selon la Cimade, seule association autorisée à pénétrer dans les Centres. La rétention ne peut dépasser 32 jours. Au bout de 48 heures, si elle n’a pas pris fin, le préfet doit saisir le juge des libertés.

En tout état de cause et en regard des principes du droit européen, il faut faire la lumière sur des évènements qui laissent apparaître une non conformité avec la réglementation et donc une dangerosité potentielle. La représentation nationale est atone devant cette question majeure qui met en question l’image de la France et de l’administration. Par son absence de réaction elle laisse se développer des zones de non droit dans ces centres. Par son silence et son inaction elle cautionne la contestation des autorités légales et les désordres nécessairement induits. Le Parlement doit jouer son rôle et permettre qu’un débat parlementaire se tienne dans des conditions sereines, fondé sur l’enquête concernant ces incidents et, plus généralement, sur le fonctionnement et le rôle de ces centres de rétention.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, d’adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement, est créée une commission d’enquête parlementaire de vingt-cinq membres relative aux évènements intervenus le 22 juin 2008 au centre de rétention administrative de Vincennes.

Elle devra plus généralement évaluer le fonctionnement et les conditions de sécurité dans les centres de rétention administrative. Elle devra notamment évaluer la légalité de ces centres en rapport avec les principes du droit, les directives européennes et les conventions internationales sur le droit des migrants.


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