N° 1300 - Proposition de résolution de M. Jean-Jacques Candelier sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs (refonte), E3904



Document
mis en distribution

le 10 décembre 2008


N° 1300

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 décembre 2008.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d’entreprises de dimension communautaire en vue d’informer et de consulter les travailleurs (refonte),

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Jean-Jacques CANDELIER,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d’entreprises de dimension communautaire en vue d’informer et de consulter les travailleurs (COM [2008] 419 final/n° E 3904) constitue la refonte de la législation européenne relative à la consultation des salariés sur les choix des entreprises au plan européen.

Cette proposition de directive a fait l’objet d’un accord des partenaires sociaux européens et constitue, à n’en pas douter, le socle d’un futur accord entre États membres au sein du Conseil comme entre le Conseil et le Parlement européen.

Il faut savoir que cette refonte était justifiée par des problèmes juridiques de tous ordres, mais également par de graves lacunes concernant la mise en place des comités d’entreprise européens (CEE). En effet, quatorze ans après l’adoption de la directive 94/45/CE, seulement 820 CEE sont en activité, ce qui représente 36 % des entreprises entrant dans le champ d’application de la législation actuelle.

Seulement quinze millions de travailleurs sont ainsi représentés en vue d’être informés et consultés au niveau transnational sur les grands choix de gestion des entreprises, alors que beaucoup plus sont concernés.

La refonte des règles qui instituent la consultation était donc urgente et nécessaire, d’autant que les procédures d’information et de consultation des travailleurs prévues au niveau des États membres ne sont souvent plus adaptées à la structure transnationale de l’entité qui prend les décisions.

Toujours est-il que la démarche d’actualisation de la législation doit également prendre en compte, selon nous, l’augmentation du nombre et de la violence des restructurations de portée transnationale ainsi que l’aggravation de pratiques destructrices pour l’emploi telles que les délocalisations, les fusions-acquisitions, les cessions ou les fermetures de sites de production.

Dans la crise d’un capitalisme mondialisé complètement dérégulé, il est particulièrement urgent de réfléchir à des dispositifs pour contrer efficacement ces pratiques, qui sont bien souvent motivées par l’augmentation, ou du moins par le maintien, de l’unique rémunération des propriétaires du capital.

Par ailleurs, il faut également considérer que, dans 75 % des cas, les restructurations ne donnent actuellement lieu à strictement aucune information ni consultation des salariés concernés au plan européen, ce qui est parfaitement scandaleux.

Il s’avère que le problème central est que, dans tous les cas de figure, le rôle des CEE se limite malheureusement à l’information sur des décisions structurantes sur lesquelles les représentants des travailleurs n’ont aucune prise. C’est donc la nature même de la consultation qui empêche de relier les décisions économiques des directions d’entreprise aux légitimes attentes sociales.

C’est pourquoi, il vous est proposé de bien vouloir adopter la proposition de résolution suivante :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d’entreprises de dimension communautaire en vue d’informer et de consulter les travailleurs (refonte) (COM [2008] 419 final/n° E 3904),

Se félicite qu’une démarche de révision, de clarification et d’adaptation de ce volet du droit du travail européen, et notamment de la direction 84/45/CE, soit entreprise ;

Regrette que la proposition de directive de refonte cantonne les CEE dans un rôle « d’accompagnement et d’anticipation du changement » qui affecte les entreprises, alors que ce « changement » constitue dans bien des cas une véritable mutilation de l’appareil productif, à travers les délocalisations, les fusions-acquisitions, les cessions ou les fermetures de sites ;

Considère que les pratiques citées n’ont rien d’inéluctable ;

Se prononce en conséquence pour un changement de la nature de la consultation promue au plan européen, afin de rendre effective la prise en compte des avis émis sur les choix stratégiques ;

Désire, suite aux contentieux engendrés par la fusion Gaz de France-Suez, que les compétences des CEE soient clairement étendues aux choix affectant la structure juridique des entreprises de taille communautaire, et notamment les cessions, fusions et acquisitions ;

Affirme que le moment, la forme et le contenu de l’information sont déterminants pour permettre aux représentants des travailleurs d’examiner en profondeur les répercussions d’une mesure proposée et que, dans ce cadre, il devrait appartenir au management de fournir toutes les informations utiles, par écrit, en temps utile et dans toutes les langues pertinentes, sous peine de sanctions dissuasives ;

Estime nécessaire que les États membres garantissent l’existence de règles adéquates en vue de l’annulation des décisions arrêtées au mépris du processus d’information et du résultat de la consultation ;

Suggère que la directive réexaminée affirme sans ambiguïté le droit, pour les représentants des travailleurs, de se réunir avec les représentants des travailleurs locaux et de disposer des ressources nécessaires à cette fin ;

Se déclare favorable au droit des membres des CEE de tenir des réunions préparatoires et de suivi ainsi qu’à celui de se rendre sur les sites des sociétés ;

Verrait positivement, vu l’action à l’échelle européenne de certaines entreprises comptant moins de mille salariés et vu le mouvement de division des entités productives et d’externalisation, l’abaissement du seuil de création des CEE à 500 travailleurs, avec au moins 100 travailleurs dans deux États membres différents ;

Juge incompréhensible et discriminatoire le maintien de la possibilité de dispositions particulières pour les entreprises du secteur dit « idéologique », c’est-à-dire, par exemple, des médias, ainsi que pour le personnel navigant de la marine marchande.


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