N° 2110 - Proposition de loi de M. Jean-Philippe Maurer créant le délit d'usurpation d'identité indépendamment de toute autre infraction



N° 2110

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 novembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

créant le délit d’usurpation d’identité
indépendamment de toute autre infraction,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-Philippe MAURER,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Actuellement, le code pénal sanctionne, à l’article 434-23, le fait de prendre le nom d’un tiers existant. Cependant, pour être réprimée, l’usurpation d’identité doit avoir été commise dans des circonstances qui ont ou auraient pu déterminer des poursuites pénales contre ce tiers sur le fondement d’autres infractions. Par exemple, un voleur sera poursuivi pour usurpation d’identité si tel a été le cas lors de la commission de vol. En revanche, le simple fait aujourd’hui d’usurper une identité sans commettre une autre infraction pénale n’est pas répréhensible.

Dès lors, le problème suivant se pose : si l’un des éléments constitutifs de l’infraction principale fait défaut, celle-ci n’est pas constituée, et, par ricochet, le délit d’usurpation ne l’est pas non plus.

Pourtant, selon une enquête du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) parue en octobre 2009, l’usurpation d’identité touche chaque année plus de 210 000 Français, un chiffre plus important que les cambriolages à domicile (150 000) ou les vols d’automobile (130 000). Le coût individuel moyen des victimes de ce délit est de 2 229 €, comprenant les détournements d’argent ou d’aides sociales, les démarches judiciaires et administratives, et les frais supplémentaires générés par cette infraction (médecins, frais postaux).

Le coût global des usurpations d’identité en France représente chaque année un montant de 3,874 milliards d’euros : 474 millions d’euros pour les assureurs et les particuliers, 1,4 milliard de préjudice pour l’Unedic, un milliard pour la Caisse nationale d’assurance-maladie et un milliard pour la Caisse d’allocations familiales.

L’usurpation d’identité engendre une perte de ressources importantes pour l’État, et constitue une violation grave à la vie privée. Elle doit être plus génériquement réprimée, et ne plus être considérée comme une infraction annexe. La présente proposition de loi entend ainsi en faire un délit à part entière d’atteinte à la personne humaine.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

I. – Les articles 226-1, 226-2 et 226-3 du code pénal deviennent respectivement les articles 226-2, 226-3 et 226-3-1 du code pénal.

II. – L’article 226-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art 226-1. – Le fait d’utiliser l’identité d’un tiers ou des données qui lui sont personnelles, en vue de troubler la tranquillité de cette personne ou d’autrui, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

« Est puni de la même peine le fait d’utiliser l’identité d’un tiers ou des données qui lui sont personnelles, en vue de porter atteinte à son honneur ou à sa considération. »


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