N° 2258 - Proposition de loi de M. Jean-Paul Garraud visant à renforcer la procédure de lutte contre les mariages simulés



N° 2258

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 janvier 2010.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la procédure de lutte contre les mariages simulés,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Paul GARRAUD, Patrick BALKANY, Brigitte BARÈGES, Marc BERNIER, Véronique BESSE, Gabriel BIANCHERI, Roland BLUM, Claude BODIN, Jean-Claude BOUCHET, Loïc BOUVARD, Valérie BOYER, Françoise BRANGET, Dominique CAILLAUD, Patrice CALMÉJANE, Bernard CARAYON, Joëlle CECCALDI-RAYNAUD, Jean-Louis CHRIST, Jean-Pierre DECOOL, Nicolas DHUICQ, Jacques DOMERGUE, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Daniel FASQUELLE, Jean-Michel FERRAND, Marc FRANCINA, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Franck GILARD, Gérard HAMEL, Michel HERBILLON, Patrick LABAUNE, Marc LE FUR, Michel LEZEAU, Lionnel LUCA, Richard MALLIÉ, Jean-Claude MATHIS, Christian MÉNARD, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Jean-Marie MORISSET, Alain MOYNE-BRESSAND, Yanick PATERNOTTE, Christian PATRIA, Nicolas PERRUCHOT, Josette PONS, Éric RAOULT, Francis SAINT-LÉGER, Bruno SANDRAS, Jean-Pierre SCHOSTECK, Michel SORDI, Dominique SOUCHET, Daniel SPAGNOU, Alain SUGUENOT, Dominique TIAN, Christian VANNESTE et Michel ZUMKELLER,

députés.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

M. Gérard César, sénateur de la Gironde, a déposé sur le bureau du Sénat une proposition de loi analogue, cosignée en l’état par plus de 90 de ses collègues.

Le principe de la liberté du mariage, « composante de la liberté individuelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 », interdit de subordonner la célébration du mariage à la régularité du séjour d’un futur conjoint étranger sur le territoire français.

Cependant, le respect de ce principe ne fait pas obstacle à ce que soient prises des mesures de prévention ou de lutte contre les mariages contractés à des fins étrangères aux droits et obligations énoncés aux articles 212 et suivant du code civil.

Ainsi, la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité a renforcé la procédure d’alerte visant à prévenir la conclusion de ces unions.

En introduisant l’obligation pour les officiers de l’état civil de s’entretenir avec les futurs époux avant la publication des bans, la loi précitée fait des officiers de l’état civil les acteurs principaux sur lesquels repose le dispositif préventif de lutte contre les mariages simulés.

Dès lors qu’au vu des pièces du dossier et de l’audition prévue par l’article 63 du code civil, l’officier de l’état civil dispose d’indices sérieux laissant présumer un défaut d’intention matrimoniale des futurs conjoints, il a la faculté de saisir le procureur de la République sur le fondement de l’article 175-2 du code civil.

Le parquet a alors la possibilité d’ordonner à l’officier de l’état civil de surseoir à la cérémonie du mariage dans l’attente des investigations complémentaires ordonnées, ou de s’opposer à la célébration du mariage.

En revanche, l’officier de l’état civil n’a ni le pouvoir, ni le droit de s’opposer à la célébration d’un mariage suspecté de fictivité si le ministère public saisi n’a pris aucune décision de sursis ou d’opposition. Il est dans l’obligation de célébrer le mariage, à l’échéance des délais de sursis ou d’opposition déterminés à l’article 175-2 du code civil, son refus étant constitutif d’une voie de fait.

Or l’officier de l’état civil demeure parfois convaincu, en dépit de la décision favorable du procureur de la République, que des indices sérieux laissent présumer que le mariage est simulé.

La proposition de loi qui vous est proposée vise, d’une part, à ce que la motivation de la décision du procureur de la République de laisser procéder au mariage réponde sur chacun des éléments portés à son attention.

Elle vise, d’autre part, à ce que l’officier de l’état civil, considérant que des indices sérieux laissent présumer qu’il y a simulation, et malgré l’autorisation du procureur de la République, puisse saisir le procureur général afin qu’il se prononce sur la validité du mariage.

Une fois saisi, le procureur général peut laisser procéder au mariage, faire opposition à celui-ci ou surseoir à sa célébration pour faire procéder à une enquête. Dans les quinze jours de sa saisine ou à l’issue des investigations, il fait connaître sa décision motivée de laisser procéder au mariage ou d’y faire opposition à l’officier de l’état civil, aux intéressés et au procureur de la République.

Sans remettre en cause le principe de la liberté du mariage, il est nécessaire d’intensifier le contrôle sur la réalité de l’intention matrimoniale lorsque l’un des futurs conjoints est en situation irrégulière en ouvrant une possibilité de saisine du procureur général près la Cour d’appel, supérieur hiérarchique des Procureurs des Tribunaux de Grande Instance de son ressort.

Tel est donc l’objet de la présente proposition de loi que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L’article 175-2 du code civil est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« La motivation de la décision, adressée à l’officier de l’état civil, de laisser procéder au mariage doit apporter à ce dernier une réponse sur chacun des éléments portés à l’attention du procureur de la République.

« Dans les quarante-huit heures à compter de la décision du procureur de la République de laisser procéder au mariage, l’officier de l’état civil peut saisir le procureur général.

« Le procureur général peut décider de surseoir à la célébration, dans les conditions prévues aux troisième et cinquième alinéas, pour faire procéder à une enquête.

« Dans les quinze jours de sa saisine ou à l’expiration du délai de sursis, le procureur général est tenu soit de laisser procéder au mariage, soit d’y faire opposition. Il fait connaître sa décision motivée à l’officier de l’état civil, aux intéressés et au procureur de la République.


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