N° 2793 - Proposition de loi de M. Philippe Vitel tendant à autoriser la publicité des établissements de santé pratiquant la chirurgie esthétique



N° 2793

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 septembre 2010.

PROPOSITION DE LOI

tendant à autoriser la publicité des établissements de santé pratiquant la chirurgie esthétique,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Philippe VITEL, Thierry MARIANI, Yanick PATERNOTTE, Josette PONS, Francis SAINT-LÉGER, Didier QUENTIN, Louis GUÉDON, Michel TERROT, Patrice DEBRAY, Françoise de SALVADOR, Dino CINIERI, Chantal BOURRAGUÉ, Dominique TIAN, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Jean-Pierre DECOOL, François GROSDIDIER, Jean-Luc REITZER, Frédéric REISS, François CALVET, Philippe BRIAND, Claude GOASGUEN, Jean-Pierre DOOR, Maryse JOISSAINS-MASINI, Jean-Claude BOUCHET, Françoise HOSTALIER, Lionnel LUCA, Alain MARC, Éric RAOULT et Valérie BOYER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France possède l’une des meilleures chirurgies esthétiques au monde. Il s’agit là d’un atout déterminant dans la compétition internationale que connait ce secteur mais aussi de la demande croissante de nos concitoyens pour ce type d’intervention. La qualité des établissements français résulte pour l’essentiel d’un encadrement sanitaire et réglementaire des plus rigoureux.

Paradoxalement, bien que strictement encadrés, les établissements de chirurgie esthétique français sont pourtant interdits de recourir à la publicité (article L. 6322-1, 4e alinéa, du code de la santé publique). Cette interdiction englobe la communication sur des données objectives, voire publiques (coût détaillé d’une opération, diplômes et ancienneté des praticiens, conditions techniques de fonctionnement des établissements, etc).

L’interdiction actuelle est préjudiciable à l’intérêt de nos concitoyens. En effet, ceux-ci sont privés d’une information objective sur les possibilités qui leur sont offertes de mettre fin à une disgrâce, souvent source d’un profond mal-être. De plus, étant privés d’une nécessaire information, ils recourent plus facilement à des prestations étrangères, parfois mensongères, sans garanties sanitaires ou légales.

Or, la Directive 2006/123 CE du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur, implique, en son article 24, la suppression de « toutes les interdictions totales visant les communications commerciales des professions réglementées ». Les États membres doivent seulement veiller à ce que les publicités ainsi autorisées « respectent les règles professionnelles, conformes au droit communautaire, qui visent notamment l’indépendance, la dignité et l’intégrité » des professions, en fonction de leur spécificité, précisant que « les règles professionnelles en matière de communications commerciales doivent être non discriminatoires, justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnées ». Si les « services de soins de santé, qu’ils soient ou non assurés dans le cadre d’établissements de soins » ont été exclus du champ d’application automatique de cet article 24, l’exclusion laisse cependant aux États membres le choix d’autoriser ou non la publicité concernée.

À cela s’ajoute une culture généralisée du droit à l’information des consommateurs de services dans l’Union Européenne, consacrée en droit communautaire, par l’article 153 du Traité de Rome qui dispose qu’afin « de promouvoir les intérêts des consommateurs et de leur assurer un niveau élevé de protection, la Communauté contribue à la protection de la santé, (…) ainsi qu’à la promotion de leur droit à l’information » et, en droit interne français, par les dispositions des articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation.

Enfin, cette interdiction de recourir à la publicité est frappée d’obsolescence technique, puisque les établissements étrangers peuvent quant à eux recourir à la publicité sur le territoire national du seul fait d’internet. L’exemple le plus frappant est l’accroissement des propositions disponibles en ligne de « séjours touristiques » de chirurgie esthétique dont l’effet est d’accroitre la délocalisation des actes, mais pas le rapatriement des risques.

C’est pourquoi il est temps de faire évoluer notre législation afin d’offrir à nos concitoyens une information la plus objective et complète possible. Il s’agit d’introduire de la rationalité et de la transparence dans le cadre d’une démarche toujours très personnelle.

Je vous propose donc dans ce texte d’autoriser l’information sur quelque support que ce soit par des établissements de santé pratiquant des activités de chirurgie esthétique en France. Ces établissements, « acteurs économiques agissant sur un marché pertinent », seront ainsi en libre concurrence, ce qui permettra d’améliorer la diffusion des informations relatives à la qualité des prestations proposées par la France, et d’éviter la délocalisation croissante des actes à l’étranger.

De plus, cette publicité est destinée à participer au changement de comportement de la population et à permettre de la mettre en garde vis à vis des actes et des propositions financièrement alléchantes à l’étranger.

Le dispositif qui vous est proposé est simple, puisqu’il se compose de deux articles.

L’article 1erautorise désormais la mise à disposition du public d’informations sur quelque support que ce soit qu’il encadre néanmoins strictement. Le tout est assorti d’un régime de sanction.

La nouvelle réglementation revient à mettre à la disposition du public des informations déjà connues de l’administration, notamment du fait de l’instruction des demandes d’autorisation et d’accréditation, ou connues des seuls patients au moment de leur consultation (prix d’une opération, formation des praticiens, nature des équipements).

La rédaction proposée tient compte de l’état de l’art juridique puisqu’elle fait référence à des notions de droit déjà en vigueur pour d’autres services telles que la « nécessaire information » ou bien la « mise en œuvre avec dignité et délicatesse ».

L’article 2 tire les conséquences de la nouvelle autorisation de publicité ainsi créée en supprimant la sanction constituée préalablement d’un retrait d’autorisation pour les établissements de chirurgie esthétique recourant à la publicité.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après l’article L. 6322-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6322-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 6322-4. – La publicité des établissements de santé autorisés à pratiquer la chirurgie esthétique ainsi qu’il est prévu à l’article L. 6322-1, est permise, sur quelque support que ce soit, dans la mesure où elle procure au public une nécessaire information. Cette information doit être véridique, respectueuse du secret professionnel et mise en œuvre avec dignité et délicatesse.

« Quelle que soit la forme de publicité utilisée, toutes mentions excessivement laudatives sont prohibées.

« Est puni d’une amende de 30 000 € le fait de pratiquer une publicité en violation des critères de qualité ci-dessus. »

Article 2

En conséquence, le quatrième alinéa de l’article L. 6322-1 du code de la santé publique est supprimé.


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