N° 3075 - Proposition de résolution de M. Noël Mamère tendant à la création d'une commission d'enquête relative au fonctionnement de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé



N° 3075

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 décembre 2010.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

visant à la création d’une commission d’enquête relative
au fonctionnement de
l’Agence française de sécurité sanitaire
des
produits de santé (AFSSAPS),

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Madame et Messieurs

M. Noël MAMÈRE, Anny POURSINOFF, Yves COCHET
et François de RUGY,

député-e-s.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) est au cœur de plusieurs scandales :

– celui du « Mediator » qui a été prescrit à cinq millions de patients et a déjà fait de 1500 à 2000 morts selon les experts ;

– celui des prothèses mammaires PIP (Poly implant prothèse) qui touche 30 000 victimes en France et de nombreuses autres victimes dans le monde puisque que la société PIP exportait 90 % de sa production.

Un livre d’enquête vient de révéler l’existence d’une autre bombe à retardement : celle des produits injectables de comblement des rides pas plus contrôlés qu’un sparadrap.

Le système français de santé publique est globalement touché par ces scandales à répétition. Des millions de Français sont légitimement inquiets, soit parce qu’ils sont touchés directement par les conséquences médicales, soit parce que leurs proches et leurs familles subissent les conséquences de cette dérive provenant d’un organisme sous tutelle de l’État.

La Caisse nationale d’assurance maladie, dont l’équilibre est déjà menacé, risque d’en faire les frais. L’image de la France dans le monde est gravement compromise. Il est nécessaire de faire toute la lumière sur cette affaire.

Ces trois cas illustrent en effet les graves dysfonctionnements de l’AFSSAPS dont les exigences en matière de sécurité sanitaire sont très loin de celles de la Federal Drug Administration américaine (FDA). L’AFSSAPS fait figure de lanterne rouge des pays développés.

Ces affaires et notamment celle qui concerne le Mediator mettent en cause toute la chaîne sanitaire, du fabricant jusqu’aux autorités publiques de contrôle et de sécurité. Voilà, en effet, un médicament fabriqué par Servier, deuxième laboratoire pharmaceutique français, et commercialisé depuis 1976. En France, il a été prescrit (et remboursé par la Sécurité sociale) à près de 3 millions de personnes, jusqu’à son retrait du marché, en novembre 2009. À cette date, plus de 300 000 patients étaient encore traités au Mediator.

Les alertes n’ont pourtant pas manqué. Dès 1997, les États-Unis interdisent les médicaments de la famille des fenfluramines, à laquelle est rattaché le Mediator. Dès 1999, un premier cas de maladie cardiaque grave chez un patient prenant du Mediator est signalé à Marseille. En 2003, un cas similaire en Espagne, et une première étude sur les dangers du Mediator conduisent Servier à ne pas demander le renouvellement de l’autorisation de commercialisation. Il est donc retiré du marché.

En dépit de ces signaux inquiétants, l’AFSSAPS a attendu le dernier moment. Elle reprend aujourd’hui pour sa défense les arguments du laboratoire Servier.

Aujourd’hui, l’AFSSAPS vit essentiellement des taxes et redevances versées par l’industrie pharmaceutique à laquelle elle délivre notamment les autorisations de mise sur le marché des produits de santé. Il est urgent de sortir l’AFSSAPS et ses experts des conflits d’intérêts qui engendrent de nombreux dysfonctionnements.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, d’adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement, est créée une commission d’enquête de trente membres relative au fonctionnement de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Elle devra notamment faire le point sur :

– les dysfonctionnements de l’Agence ;

– les contradictions entre les différents niveaux d’expertise ;

– le contrôle exercé par l’État sur l’Agence ;

– le financement de l’Agence ;

– les rapports exacts qu’entretiennent l’industrie pharmaceutique et cette Agence.


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