N° 3684 - Proposition de loi de Mme Anny Poursinoff autorisant l'expérimentation des maisons de naissance



N° 3684

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2011.

PROPOSITION DE LOI

autorisant l’expérimentation des maisons de naissance,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Madame et Messieurs

Anny POURSINOFF, Yves COCHET,
Noël MAMÈRE et François de RUGY,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les maisons de naissance proposent un accompagnement différent de celui traditionnellement proposé dans les hôpitaux lors du suivi d’une grossesse et de l’accouchement. Elles constituent une réponse à de nombreuses femmes enceintes, à leur famille, aux sages-femmes, maïeuticiens et aux médecins qui souhaitent une autre approche, plus douce, plus personnalisée, pour les grossesses et leurs suivis.

Mises en œuvre au Canada notamment, ces structures d’accueil, de suivi et d’accouchement sont destinées aux femmes enceintes dont la grossesse est considérée médicalement sans risque. Elles permettent de les accueillir dans un contexte moins médicalisé que celui proposé par les structures hospitalières.

La « surmédicalisation » des grossesses ne peut en effet constituer une réponse globale et systématique aux besoins des femmes qui doivent avoir le choix du mode d’accouchement leur convenant le mieux, y compris à domicile. La liberté de choix, lorsqu’elle est médicalement envisageable, doit être respectée.

À cet égard, il est important de noter que les meilleures garanties de sécurité sont liées au suivi tout-au-long de la grossesse, un suivi idéalement effectué par les mêmes interlocuteurs de santé. Dans ce cadre, les maisons de naissance peuvent apporter une réponse satisfaisante par la démarche spécifique qu’elles proposent : un accompagnement global à la naissance, comportant une médicalisation mesurée de la grossesse et de l’accouchement.

Toutefois, la liberté de choix quant au lieu d’accouchement doit s’accompagner des meilleures garanties de sécurité pour les parturientes et leurs enfants. Toute création de maison de naissance doit donc être encadrée.

Elles doivent certes offrir un accueil moins médicalisé aux femmes et à leurs familles, tout en étant en liaison avec le plateau technique d’une maternité afin d’assurer les meilleures conditions de sécurité. Aussi, elles peuvent se situer dans l’enceinte d’une maternité hospitalière ou à proximité, dès lors que le transfert des femmes peut se faire dans des délais compatibles avec l’urgence. En outre, elles doivent s’inscrire dans un réseau de santé impliquant parturientes, sages-femmes, médecine de ville, l’ensemble des acteurs de santé hospitaliers, syndicats et associations.

Par ailleurs, la mise en œuvre de ces structures, fortement demandée par les associations d’usagères et de sages-femmes, ne peut en aucun cas apparaître comme une éventuelle justification des fermetures des maternités de proximité. Il s’agit de structures complémentaires et non concurrentes.

Compte tenu de ces éléments, la création de maisons de naissance pourrait permettre de répondre à des besoins et des choix d’accouchement qui ne trouvent pas de solution satisfaisante dans l’organisation actuelle.

Lors des débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2011, les parlementaires des deux chambres ont adopté le principe de l’expérimentation de ces maisons de naissance.

Cependant le Conseil constitutionnel a invalidé l’article qui l’instaurait, car cette expérimentation n’avait « pas d’effet ou un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ».

Cette proposition de loi vise donc à rendre effective cette expérimentation, attendue par les associations et les sages-femmes depuis son inscription au plan périnatalité 2005-2007.

Elle prévoit une modification du code de la santé publique afin de pouvoir autoriser l’expérimentation des maisons de naissance dont les modalités exactes pourront être définies par décret en Conseil d’État.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, d’adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Pendant une période de deux ans, le gouvernement peut engager l’expérimentation de nouveaux modes de prise en charge de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés, au sein de structures dénommées: « maisons de naissance », où des sages-femmes réalisent l’accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3 du code de la santé publique.

Article 2

Ces expérimentations ont une durée maximale de cinq ans. Elles sont réalisées en conformité avec un cahier des charges adopté par la Haute Autorité de Santé. À cet effet, il est dérogé aux articles L. 1434-2, L. 1434-7 et L. 6122-1 du code de la santé publique.

Article 3

Par dérogation à l’article L. 162-22-13 du même code, les dépenses nécessaires au fonctionnement des maisons de naissance peuvent être prises en charge en tout ou partie par la dotation annuelle prévue à l’article L. 162-22-14 du même code.

Article 4

La maison de naissance doit être située à proximité d’une structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle doit obligatoirement passer une convention qui s’inscrit dans un réseau de santé impliquant sages-femmes, médecine de ville, l’ensemble des acteurs de santé hospitaliers, syndicats et associations.

Article 5

Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, après avis conforme de la Haute Autorité de Santé, la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental en fonction notamment de l’intérêt et de la qualité du projet pour l’expérimentation et de son intégration dans l’offre de soins régionale en obstétrique. La suspension de fonctionnement d’une maison de naissance inscrite sur la liste peut être prononcée par le directeur général de l’agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévues par l’article L. 6122-13 du code de santé publique. Le retrait d’inscription à la liste est prononcé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu’il n’a pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension.

Article 6

Un premier bilan est établi un an après le début de l’expérimentation.

Article 7

Les conditions de l’expérimentation, les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels, les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance ainsi que les modalités d’évaluation de l’expérimentation à son terme sont fixées par décret en Conseil d’État.


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