N° 3697 - Proposition de loi de Mme Marie-George Buffet visant à rendre inéligibles les personnes détentrices de mandats électifs condamnées de manière définitive pour viol, agression sexuelle ou harcèlement sexuel



N° 3697

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre inéligibles les personnes détentrices de mandats électifs condamnées de manière définitive pour viol, agression sexuelle ou harcèlement sexuel,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Marie-George BUFFET, Marie-Hélène AMIABLE, Martine BILLARD, François ASENSI, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jean-Jacques CANDELIER, André CHASSAIGNE, Jacques DESALLANGRE, Marc DOLEZ, Jacqueline FRAYSSE, André GERIN, Pierre GOSNAT, Jean-Paul LECOQ, Roland MUZEAU, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER et Michel VAXÈS,

député-e-s.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Être élu au suffrage universel pour représenter ses concitoyens et ses concitoyennes dans la gestion de la vie publique impose un devoir d’exemplarité. À aucun moment, un élu-e de la Nation ne doit pouvoir user de sa fonction pour obtenir des faveurs de quelque nature que ce soit de la part d’une autre personne pour satisfaire ses intérêts personnels.

Des dispositions légales existent d'ores et déjà pour s’assurer que l’argent public n’est pas détourné. Des dispositions légales existent aussi pour s’assurer qu’un candidat à une élection n’a pas utilisé son mandat d’élu-e pour assurer sa réélection ou qu'il n'a pas bénéficié d'un soutien financier ou autre qui viendrait rompre l'égalité républicaine avec les autres candidats. Dans certains cas, la personne élue est rendue inéligible et son élection est annulée. Elle est déchue de son mandat.

Il n’existe pas de disposition pour sanctionner les élu-e-s qui ont abusé de leur position pour violer, agresser sexuellement ou harceler sexuellement une autre personne.

Alors que, dans le droit du travail, la nature particulière du lien entre l’employeur et ses subordonnés a justifié l'adoption de mesures spécifiques, qui mériteraient certes d'être renforcées, rien n’existe quant à l’autorité dont dispose un élu-e vis-à-vis des personnes qu’il ou elle est amenée à côtoyer. Un tel élu-e est responsable devant la justice dans les conditions de droit commun, alors que son statut lui garantit une relative immunité. Intimidée, la victime peut être tentée de garder le silence et de ne pas déposer plainte.

Un élu-e de la Nation, parce qu’il se trouve du fait de la détention de son mandat dans une situation particulière, doit se voir appliquer des mesures à la hauteur de l’autorité dont il dispose et du devoir d’exemplarité qui lui incombe. Une personne définitivement condamnée pour viol, agression sexuelle, ou pour harcèlement sexuel ne doit pas pouvoir être maintenue dans l’exercice de son mandat ni pouvoir se présenter à l’élection suivante.

Tel est le sens de l'article 1 de cette proposition de loi. Afin d'en renforcer la portée, son article 2 redéfinit au plan pénal la notion de harcèlement sexuel et en aggrave la sanction.

Le principe clair selon lequel un élu-e auteur d'un viol, d'une agression sexuelle ou de harcèlement sexuel est automatiquement déchu de son mandat doit s'imposer comme un principe fondamental de notre République. Cela est indispensable pour contribuer à l'évolution des mentalités et enfin briser la loi du silence.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. Après l’article L. 45-1 du code électoral, est inséré un article L. 45-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 45-2. – Ne peuvent pas faire acte de candidature pendant une durée de cinq ans suivant la date de sa décision, les personnes définitivement condamnées par le juge pour les faits mentionnés aux articles 222-22 à 222-31 et 222-33 du code pénal.

« Les personnes mentionnées à l’alinéa précédent sont déclarées démissionnaires de l’ensemble des mandats électoraux qu'elles détiennent à compter du jour de leur jugement. »

II. Après l’article 222-48-1 du code pénal, est inséré un article 222-48-2 ainsi rédigé :

« Art. 222-48-2. – Les personnes définitivement condamnées pour les faits mentionnées aux articles 222-22 à 222-31 et 222-33 sont également condamnées à l’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 132-26, du droit d’éligibilité mentionné au 2° de ce dernier.

« Les personnes mentionnées à l’alinéa précédent qui détiennent un mandat ou plusieurs mandats sont déclarées démissionnaires de celui-ci ou de ceux-ci à compter du jour de leur jugement. »

Article 2

L’article 222-33 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 222-33. – Tout agissement à connotation sexuelle subi par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant constitue un agissement de harcèlement sexuel.

« Tout agissement de harcèlement sexuel est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. »


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