N° 3720 - Proposition de résolution de M. Jean Grenet tendant à la création d'une commission d'enquête relative aux maltraitances à l'égard des personnes âgées en maisons de retraite



N° 3720

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 septembre 2011.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête
relative aux maltraitances à l’égard des personnes âgées
en maisons de retraite,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean GRENET,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

I. La politique de lutte contre les maltraitances envers les personnes âgées en maisons de retraite.

À côté de celle des enfants, la maltraitance des personnes âgées (parfois fragilisées par une maladie neurodégénérative) apparaît de plus en plus fréquente. Cette maltraitance peut être d’ordre physique, psychologique ou financier. L’attention du public a été attirée sur ce sujet notamment à la suite de la fermeture à Bayonne, en 2009, d’une maison de retraite qui avait été le cadre de prétendues maltraitances. Il semble que le risque de dérives soit plus particulièrement aigu dans les maisons de retraite non médicalisées, en raison de l’absence de personnel médical. Ce risque paraît également accru lorsque l’encadrement est insuffisant, ce qui est souvent le cas dans les petites structures. Les évolutions démographiques pourraient d’ailleurs entraîner une accentuation de ce phénomène dans les prochaines années.

Plusieurs textes et circulaires sont intervenus ces dernières années pour lutter contre ces maltraitances :

Le ministère chargé des affaires sociales a défini en mars 2007 un plan de développement de la bientraitance et de renforcement de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées. Une instruction ministérielle n° DGAS/2A/2007/112 du 22 mars 2007 relative au développement de la bientraitance et au renforcement de la lutte contre la maltraitance a abouti à la mise en place d’un numéro d’appel national unique, le « 3977 », qui offre une écoute du lundi au vendredi de 9 heures à 19 heures et qui transmet les signalements à des centres d’écoute départementaux. Par ailleurs, un comité national de vigilance et de lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des adultes handicapés a été créé par un décret n° 2007-330 du 13 mars 2007 (codifié aux articles D. 116-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles).

Une loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 a réformé la protection juridique des majeurs dans le sens d’un plus grand respect des droits de la personne protégée, et notamment de la préservation de son autonomie et de sa participation aux décisions qui la concernent, tant pour la gestion de ses biens que pour les soins qui lui sont nécessaires ou encore son lieu de vie.

Une circulaire du 15 octobre 2008 (circulaire DGAS n° 2A/2008/316 relative au renforcement des missions d’inspection et de contrôle au titre de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées) a prévu la mise en place dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) d’une démarche d’auto-évaluation des pratiques de bientraitance.

À l’échelon local, l’article 118 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, a précisé que les agences régionales de santé devaient contribuer, avec les services compétents de l’État et les collectivités territoriales concernées, à la lutte contre la maltraitance et au développement de la bientraitance dans les établissements et services de santé et médico-sociaux.

Par la suite, une circulaire du 23 juillet 2010 a défini un certain nombre d’orientations prioritaires en matière de prévention et de lutte contre la maltraitance (circulaire DGCS/2A/2010/254 relative au renforcement de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées et au développement de la bientraitance dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux relevant de la compétence de l’agence régionale de santé).

En l’état actuel du droit, des dispositions en matière de contrôle et d’inspection des établissements sociaux et médico-sociaux (et notamment de ceux accueillant des personnes âgées) figurent aux articles L. 313-13 et suivants et L. 331-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles ainsi qu’à l’article L. 1435-7 du code de la santé publique. L’article L. 312-8 du code de l’action sociale et des familles contient quant à lui des dispositions en matière d’évaluation de l’activité et des prestations de ces établissements.

Sur le fond, la politique nationale mise en œuvre en matière de maltraitance à l’égard des personnes âgées ou handicapées est aujourd’hui organisée autour de quatre axes principaux :

– le signalement et le traitement des situations de maltraitance ;

– le contrôle et l’accompagnement des établissements et services sociaux et médico-sociaux ;

– l’amélioration de la connaissance de la maltraitance en institution et du suivi des signalements par le renseignement des systèmes d’information « prisme » et « plaintes » ;

– la mise en œuvre d’une politique de développement de la bientraitance dans le secteur social et médico-social.

Ces orientations se concrétisent sous la forme de programmes, de dispositifs et de procédures dont l’animation et le suivi relèvent pour le secteur médico-social de la compétence des agences régionales de santé.

Il convient de relever que la politique de lutte contre les maltraitances vient de faire l’objet d’une évaluation d’ensemble, notamment financière.

En effet, un rapport sur la maltraitance financière à l’égard des personnes âgées a été remis le 3 février 2011 au Médiateur de la République (1). Il fait suite à une mission menée de septembre 2010 à janvier 2011, ayant donné lieu à l’audition de 60 personnes et à la consultation écrite d’environ 120 organisations (administrations, associations, syndicats) ou personnalités (magistrats, avocats, médecins, notaires, mandataires judiciaires, professeurs d’universités ou encore gendarmes).

Ce rapport dresse un constat des pratiques observées, met en lumière des carences juridiques et émet des préconisations d’amélioration. L’un des principaux constats du rapport est que la maltraitance financière à l’encontre des personnes âgées hébergées en établissements n’est que le prolongement de pratiques intrafamiliales abusives ayant débuté au domicile. Pour répondre à ce problème, la mission invite en particulier à formaliser un devoir d’alerte des banques et des assurances. Elle propose aussi la réalisation systématique d’un inventaire contradictoire des biens de la personne âgée lors de son entrée en institution, et l’actualisation régulière de cet inventaire.

La mission invite enfin à mieux mesurer la vulnérabilité. Celle-ci devrait selon elle être constatée indépendamment de toute limite d’âge. La mission préconise donc la mise en place d’un audit préventif qui serait déclenché à l’occasion d’une rupture dans la vie (perte du conjoint ou chute grave, par exemple). Cet audit aurait une dimension à la fois personnelle (besoins médicaux, ménagers ou d’aide sociale), familiale (examen des relais possibles dans l’entourage familial, amical, social) et patrimoniale (finances, logement, assurances, mandat de protection future).

II. Proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative aux maltraitances à l’égard des personnes âgées en maisons de retraite.

S’il était jugé nécessaire d’approfondir la question de la maltraitance, la création d’une commission d’enquête pourrait être envisagée dès lors qu’elle n’empiéterait pas sur les procédures judiciaires en cours. Le dispositif pourrait alors être le suivant :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête parlementaire de trente membres relative aux maltraitances à l’égard des personnes âgées hébergées en maisons de retraite.

1 () Rapport de la mission sur la maltraitance financière à l’égard des personnes âgées dans les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, de Mme Véronique Desjardins et de Messieurs Alain Koskas et Jean-Pierre Médioni, remis à M. Jean-Pierre Delevoye, Médiateur de la République, le 3 février 2011. Consultable à l’adresse internet suivante : http://www.mediateur-republique.fr/fr-citoyen-05-350.


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