N° 3895 - Proposition de loi de M. Jean-Claude Bouchet relative à l'extension du droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural



N° 3895

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2011.

PROPOSITION DE LOI

relative à l'extension du droit de préemption des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Claude BOUCHET, Yves ALBARELLO, Émile BLESSIG, Valérie BOYER, Philippe COCHET, Gilles D’ETTORE, Jean-Pierre DECOOL, Bernard DEPIERRE, Yves FROMION, Michel GRALL, Louis GUÉDON, Gérard HAMEL, Dominique LE MÈNER, Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Philippe MAURER, Christian MÉNARD, Gérard MENUEL, Étienne MOURRUT, Josette PONS, Jacques REMILLER, Jean ROATTA, Fernand SIRÉ, Yves VANDEWALLE, Bernard REYNÈS et Philippe VITEL,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La plupart des cessions de biens immobiliers à vocation et utilisation agricole et des biens mobiliers qui leur sont attachés sont assujetties au droit de regard des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural. Celles-ci ont en effet pour mission de faciliter l’accès des terres aux agriculteurs, d’accompagner le monde agricole et les collectivités dans leur politique de développement, de préserver les terres agricoles et de protéger l’environnement (préservation des espaces naturels, de la ressource en eau et des paysages ; restructuration forestière, mise en place de trames vertes, etc.).

Si ces missions sont assurées en cas de cession, il n’en est pas de même en cas d’aliénation gratuite de biens immobiliers à utilisation agricole et des biens mobiliers qui leur sont attachés.

Parfois, en dehors du contexte familial, ces donations masquent en réalité des transactions en faveur de personnes qui visent des changements de destination de terres agricoles : habitat précaire, dépôts de matériaux, de voitures,...

Ces changements de destination posent plusieurs problèmes :

– N’étant pas notifiées, elles échappent à la connaissance publique (collectivités, communes, Safer) ;

– Elles provoquent un mitage susceptible d’amplifier les détournements d’usage ;

– Elles portent atteinte au foncier agricole et à la qualité des paysages ;

– Elles se situent parfois sur des terrains figurant dans des plans de prévention des risques ;

– Elles posent des problèmes d’insalubrité publique car ces terres ne sont pas destinées à de l’habitation et ne bénéficient pas des connections aux réseaux publics (d’eau et assainissement).

Bien entendu cette atteinte au droit de l’urbanisme est susceptible d’être sanctionnée. Lorsque ces cessions sont révélées par le changement d’occupation, les procédures visant à faire respecter le règlement de l’urbanisme sont complexes, longues, coûteuses, et souvent infructueuses… Aussi une des solutions consisterait à prévenir ce type de dérive a priori plutôt que d’avoir à intervenir a posteriori. Cette modification permettrait aux communes, informées par la SAFER, de mettre en œuvre les moyens nécessaires, notamment par l’exercice du droit de préemption de la SAFER.

Afin d’anticiper de telles pratiques et par conséquent de les éviter, et afin que de telles situations ne perdurent, il vous est proposé aujourd’hui de palier un vide juridique en proposant d’étendre le droit de préemption des SAFER aux cas d’aliénation gratuite, ce qui aurait pour conséquence de permettre à la SAFER d’exercer de plein droit la procédure de préemption et de permettre aux élus de contrer efficacement ces changements de destination illicites.

Tel est, Mesdames et Messieurs, l'objet de la présente proposition de loi qu'il vous est demandé d'adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les dispositions figurant dans les trois premiers alinéas du présent article sont applicables si l'aliénation à titre gratuit de biens immobiliers à utilisation agricole et des biens mobiliers qui leur sont attachés, de terrains à vocation agricole, de bâtiments d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole ou de bâtiments d'exploitation ayant conservé leur utilisation agricole ne profitent pas aux parents ou alliés jusqu’au quatrième degré inclus, ou à des cohéritiers ou à leur conjoint survivant ainsi que les aliénations à titre gratuit entre indivisaires en application des articles 815-14, 815-15 et 883 du code civil.

« Dans les communes et parties de communes de montagne telles que définies par les articles 3 et 4 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, ce droit de préemption peut également être exercé en cas d'aliénation à titre gratuit, si la distribution et le partage des biens du disposant ne profitent aux parents ou alliés jusqu’au quatrième degré inclus, ou à des cohéritiers ou à leur conjoint survivant ainsi que les aliénations à titre gratuit entre indivisaires en application des articles 815-14, 815-15 et 883 du code civil. »

Article 2

Les charges pour les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural résultant de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à la taxe visée à l’article 150 V K du code général des impôts.


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