N° 3899 - Proposition de loi de Mme Marie-George Buffet visant à adapter les règles de prescription aux spécificités des agressions sexuelles



N° 3899

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à adapter les règles de prescription
aux spécificités des agressions sexuelles,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Marie-George BUFFET,

députée.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Actuellement, un juge peut reconnaître une agression sexuelle et, dans le même temps, classer l’affaire sans suite. Ce déni de justice, dont sont victimes de nombreuses femmes, résulte de l’inadaptation des règles de prescription aux caractéristiques spécifiques des agressions sexuelles. Il est urgent de les modifier.

À ses articles 7 à 9, le code de procédure pénal prévoit que les crimes sont en principe prescrits au bout de 10 années à compter du moment où les faits ont été commis, ce délai étant de 3 ans pour les délits et d’un an pour les contraventions. Ces articles prévoient aussi, toutefois, des régimes renforcés pour certains délits lorsque la personne est mineure ou vulnérable.

Pour les mineurs, le délai est ainsi porté à 10 ans pour les agressions sexuelles, et même à vingt ans lorsqu’elles sont commises avec une particulière violence. De même, le délai court à compter de leur majorité et non à compter du moment où les faits ont été commis. Pour les personnes vulnérables, le délai n’est pas allongé, mais il court à compter du moment où elles prennent conscience de ce qui leur est arrivé.

Les agressions sexuelles mentionnées à l’article L. 222-27 du code pénal sont des délits, à la différence des viols qui sont punis de réclusion criminelle aux termes de l’article L. 222-23 du même code. Aussi, les agressions sexuelles, sauf pour les mineurs, sont prescrites au bout de 3 ans. Cette différence de régime peut être interrogée en raison de la proximité de nature de l’ensemble des agressions sexuelles. L’existence d’un régime renforcé pour les mineurs le prouve.

De même, la proximité de nature des viols et des autres agressions sexuelles se traduit dans les faits par des cheminements psychologiques proches. Dans une société marquée par la domination masculine, où les violences de genre sont banalisées, de nombreuses femmes ne prennent conscience du caractère anormal des faits qu’elles ont subi que tardivement. S’ajoute à cela un évident traumatisme.

Aussi, les personnes victimes d’agressions sexuelles devraient pouvoir bénéficier d’un délai de prescription allongé à 10 ans, comme pour les viols. Les personnes victimes d’agressions sexuelles ont besoin de plus de temps pour se décider à agir en justice : il faut le leur donner. Tel est le sens de la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article 7, après le mot : « et », sont insérés les mots : « pour les faits mentionnés aux articles L. 222-27 et suivants du code pénal, ».

2° Au premier alinéa de l’article 8, après le mot : « délit, », sont insérés les mots : « sauf pour les faits mentionnés aux articles L. 222-27 et suivants du code pénal, ».


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