N° 3983 - Proposition de loi de M. Denis Jacquat prescrivant le choix d'un suppléant de sexe opposé pour les députés dans une perspective de rééquilibrage des répartitions homme-femme à l'Assemblée nationale



N° 3983

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 novembre 2011.

PROPOSITION DE LOI

prescrivant le choix d’un suppléant de sexe opposé
pour les députés dans une perspective de rééquilibrage
des répartitions homme-femme à l’Assemblée nationale,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Denis JACQUAT,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dès lors qu’un collectif se voit confier la charge de représenter une communauté, d’agir en son nom et de défendre ses intérêts immédiats et futurs, il semble naturel et justifié d’en établir la composition en cherchant à définir l’ascendance de ses différents membres en fonction du profil de la population que ladite instance entend représenter de manière crédible. Cette logique de représentativité au plus près de la société française répond ainsi à la nécessité de soumettre au débat démocratique l’ensemble des points de vue et des préoccupations de la population française. Les femmes, qui représentent plus de 51 % de la population du pays, ont donc toute légitimité à participer plus amplement à la prise de décision dans les affaires de la collectivité et de la vie publique.

Depuis plus d’un demi-siècle, des efforts considérables ont été faits en ce sens, notamment :

– le 29 avril 1945 où le droit de vote est attribué aux femmes ;

– le 6 juin 2000 et le 30 juillet 2003, où la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, en imposant un mode de scrutin de liste paritaire pour les élections municipales (dans les communes de plus de 3 500 habitants), régionales, sénatoriales et européennes ;

– le 26 février 2008 où la loi sur la parité est renforcée, en imposant à chaque candidat aux élections cantonales de se présenter avec un suppléant de sexe opposé.

Toutes ces contraintes (liste paritaire ou suppléance de sexe opposé) sont donc effectives, dans la mesure où les candidatures « non paritaires » ne sont tout simplement pas enregistrées. Dans le cas des législatives, les contraintes sont en revanche seulement incitatives : les partis politiques ne respectant pas la parité font l’objet de sanctions financières dont ils s’acquittent parfois sans s’en formaliser à l’excès. Afin de favoriser un rééquilibrage des répartitions homme-femme à l’Assemblée Nationale, il est donc utile d’imposer, comme pour les élections cantonales, une contrainte de nature effective. Une telle initiative aura pour effet de conforter la création d’un vivier de femmes prêtes à s’engager dans une vie parlementaire. En effet, alors que les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à accéder aux études supérieures, elles parviennent difficilement à accéder à un mandat de député (malgré l’introduction des scrutins de liste paritaire) : elles ne détiennent en effet que 18,54 % des sièges à l’Assemblée nationale, pourcentage notoirement au-dessous de la moyenne mondiale qui était de 19,1 % à la fin de l’année 2010 (chiffre publié dans la brochure de l’Union interparlementaire). Sur le thème, au sein de l’Union européenne, la France est classée au 18e rang seulement (sur les 27 états membres), la lauréate étant la Suède qui affiche un pourcentage de 46,70 % (chiffres publiés sur le site de l’Assemblée nationale).

Cette proposition de loi qui impose aux candidats aux élections législatives de choisir un remplaçant de sexe opposé, contribue :

– à favoriser la démocratie en imposant une plus juste représentation de la population française à l’Assemblée Nationale ;

– à changer le regard de la société française sur la femme (encore trop souvent victime de discrimination et de violence conjugale) ;

– à donner l’exemple sur la scène internationale et ainsi à œuvrer pour la protection des droits fondamentaux de la femme dans le monde.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 155 du code électoral, après la dernière occurrence du mot : « doit », sont insérés les mots : « être de sexe opposé au candidat titulaire et »

Article 2

La présente loi s’applique dès les élections législatives de 2012.


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