N° 816 - Rapport d'information de M. Gilles Carrez déposé en application de l'article 145 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan sur les premiers éléments disponibles concernant l'exécution du budget en 2007




N° 816

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 avril 2008

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

Sur les premiers éléments disponibles concernant
l’exécution du budget en 2007

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Gilles Carrez,

Rapporteur général,

Député.

——

 

INTRODUCTION 5

I.– UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE CONTENU EN DÉPIT DU RALENTISSEMENT ÉCONOMIQUE 8

A.– UNE RÉDUCTION INÉDITE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT 8

B.– UN MOINDRE SURPLUS DE RECETTES 12

1.– Des plus-values de recettes fiscales en diminution par rapport à 2006 13

2.– Des recettes non fiscales assez sollicitées 19

3.– Une heureuse surprise du côté des prélèvements sur recettes 20

C.– UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE RÉDUIT DE 3,5 MILLIARDS D’EUROS PAR RAPPORT À LA PRÉVISION 21

II.– DE NOUVELLES RÈGLES DE GOUVERNANCE POUR DES FINANCES PUBLIQUES VULNÉRABLES 23

A.– L’ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DU DÉFICIT PUBLIC ET DE LA DETTE 23

B.– POUR UN RENFORCEMENT DES RÈGLES DE GOUVERNANCE DES FINANCES PUBLIQUES 28

1.– Développer une gestion pluriannuelle des finances publiques 29

2.– Assurer la maîtrise des dépenses fiscales 31

a) Un enjeu budgétaire croissant mais toujours mal maîtrisé 31

b) Développer des instruments de pilotage 36

EXAMEN EN COMMISSION 41

INTRODUCTION

Sans attendre le dépôt du projet de loi de règlement du budget de 2007 à la fin du mois de mai prochain, le présent rapport d’information entend tirer les premiers enseignements de l’exécution budgétaire de l’année passée.

En 2007, le déficit budgétaire de l’État a atteint 38,4 milliards d’euros, au lieu de 42 milliards d’euros prévus en loi de finances initiale.

Ce solde a été arrêté le 16 janvier dernier, date de fin de la période complémentaire – désormais limitée à 20 jours par l’article 28 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF) (1). Comme les années précédentes, le Rapporteur général a porté une attention particulière aux opérations réalisées au cours de cette période complémentaire.

OPÉRATIONS DE PÉRIODE COMPLÉMENTAIRE (a)

(en milliards d’euros)

Année

Budget général

Comptes spéciaux

Total

Solde

Dépenses

Recettes

Dépenses

Recettes

Dépenses

Recettes

1990

9,12

1,15

2,74

2,44

11,87

3,59

– 8,28

1991

9,36

1,37

3,67

0,19

13,04

1,56

– 11,48

1992

11,98

0,88

1,35

1,43

13,33

2,31

– 11,02

1993

10,46

1,69

2,41

0,19

12,87

1,88

– 10,99

1994

12,96

0,65

1,37

0,23

14,33

0,87

– 13,45

1995

10,33

3,64

3,25

0,29

13,58

3,93

– 9,65

1996

7,76

1,24

1,69

0,22

9,45

1,46

– 7,99

1997

6,95

0,82

2,36

0,09

9,31

0,91

– 8,40

1998

7,10

– 0,05

4,01

0,10

11,11

0,05

– 11,06

1999

7,77

– 0,17

2,66

5,04

10,43

4,87

– 5,56

2000

7,14

0,03

1,46

0,35

8,59

0,37

– 8,22

2001

3,92

0,71

2,86

5,45

6,77

6,16

– 0,61

2002

3,77

1,36

2,82

5,65

6,59

7,01

+ 0,43

2003

3,22

1,22

1,84

5,41

5,06

6,63

+ 1,57

2004

2,99

2,30

1,92

5,99

4,91

8,29

+ 3,38

2005

3,62

3,37

0,74

6,42

4,36

9,79

+ 5,44

2006 (b)

4,96

– 4,77

1,87

10,85

6,83

6,08

– 0,75

2007

4,30

3,98

1,67

9,49

5,97

13,46

+ 7,49

(a) Les recettes du budget général sont nettes des prélèvements sur recettes.

(b) Hors régularisation comptable des pensions de décembre 2005.

Sources : SROT, Direction générale de la comptabilité publique.

Il en ressort que la période complémentaire 2007 a porté sur des masses particulièrement importantes : 19,4 milliards d’euros au total, au lieu de 10 à 15 milliards d’euros ces dernières années. Le solde des opérations enregistrées pendant cette période est positif (7,5 milliards d’euros) alors qu’il était constamment négatif dans les années 1990, pour des montants dépassant parfois 10 milliards d’euros.

Les dépenses du budget général effectuées durant cette période, qui avaient assez régulièrement décru depuis le milieu des années 1990, demeurent supérieures à 4 milliards d’euros en janvier 2008. Les plus significatives en volume sont : un versement au titre des charges de la dette de l’État de 473,5 millions d’euros ; des subventions de 438 millions d’euros versées au groupe OSEO (du fait d’un encaissement tardif de recettes de fonds de concours provenant de l’Agence de l’innovation industrielle) ; des dépenses d’environ 350 millions d’euros du programme Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables pour financer la « prime de Noël », l’hébergement d’urgence ou l’aide alimentaire d’urgence ; le versement au Crédit foncier de France de primes d’épargne logement à hauteur de 220 millions d’euros, correspondant aux crédits ouverts en collectif budgétaire de fin d’année.

Les dépenses des comptes spéciaux sont principalement marquées par le versement de 753 millions d’euros du compte d’affectation spéciale Participations financières de l’État à l’ERAP, en vue du remboursement d’une dette obligataire de cet établissement arrivant à échéance en 2008.

Du côté des recettes du budget général, trois encaissements réalisés pendant la période complémentaire, portés à la connaissance du Parlement lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative de fin d’année, méritent d’être signalés :

– l’acompte de 918 millions d’euros versé par EDF au titre de ses dividendes 2007 ;

– la soulte de 640 millions d’euros versée par la SNCF en contrepartie de la reprise par l’État, via la Caisse de la dette publique, de la dette ferroviaire du service annexe d’amortissement de la dette (SAAD) (2) ;

– le prélèvement supplémentaire de 400 millions d’euros, par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale, effectué sur la trésorerie du compte de l’État à la COFACE.

Les recettes des comptes spéciaux sont, quant à elles, essentiellement marquées par l’encaissement de 6,7 milliards d’euros par le compte de concours financiers Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics, correspondant au remboursement par l’Union européenne d’avances consenties à l’Agence unique de paiement (AUP) dans le cadre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (3).

Au-delà de ce constat du bon déroulement des opérations réalisées pendant la période complémentaire, l’analyse de l’exécution budgétaire 2007 permet de tirer deux principaux enseignements : d’une part, le déficit budgétaire de l’État a pu être contenu en dépit d’une croissance économique inférieure aux prévisions (1,9 %, au lieu de 2 % à 2,5 %) (4) ; d’autre part, la situation encore préoccupante des comptes publics, dont attestent les résultats communiqués par l’INSEE le 28 mars dernier (5), nécessite d’approfondir les règles de gouvernance de nos finances publiques.

I.– UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE CONTENU EN DÉPIT
DU RALENTISSEMENT ÉCONOMIQUE

A.– UNE RÉDUCTION INÉDITE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT

Deux grands motifs de satisfaction découlent de l’examen de l’exécution des lois de finances pour 2007.

Le premier est le respect de l’enveloppe de dépenses votée par le Parlement : les dépenses nettes du budget général hors fonds de concours ont été inférieures de 50 millions d’euros au plafond fixé en loi de finances initiale.

LE RESPECT DE L’ENVELOPPE DE DÉPENSES VOTÉE PAR LE PARLEMENT

(crédits de paiement, en millions d’euros)

Crédits approuvés par le Parlement (1)

A.- Crédits LFI 266 850

B.- Modifications prises en compte dans le collectif :

– ouvertures – 3 899

– annulations + 3 899

– variation nette  0

C.- Prévisions des lois de finances (A + B)  266 850

Modifications réglementaires des crédits

D.- Fonds de concours (2) + 3 832

E.- Reports depuis 2006 + 3 990

F.- Crédits ouverts (C + D + E)  274 672

Exécution budgétaire

G.- Dépenses nettes totales  270 632

H.- Dépenses nettes hors fonds de concours (G - D) 266 800

(1) Crédits du budget général nets des remboursements et dégrèvements.

(2) Crédits ouverts.

Quoique désormais habituel, un tel résultat est d’autant plus méritoire que le budget 2007 était construit, comme on le verra ci-après, sur une norme d’évolution des dépenses plus ambitieuse que les années précédentes.

Le respect de l’autorisation parlementaire a été permis par une gestion infra-annuelle rigoureuse, caractérisée par :

– l’ « absorption » de 4 milliards d’euros de crédits reportés depuis l’exercice 2006, sans rupture avec la politique de réduction continue des reports mise en œuvre depuis 2002 (6) ;

– un usage raisonnable de la régulation budgétaire, aucun « gel » de crédits supplémentaire par rapport à la réserve de précaution initiale de 5,6 milliards d’euros ne s’étant avéré nécessaire ;

– la couverture systématique des besoins nouveaux par des annulations de crédits d’égal montant, qu’il s’agisse de dépenses financées par décret d’avance ou par la loi de finances rectificative de fin d’année.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS PRIS EN COMPTE DANS L’ÉQUILIBRE DES LOIS DE FINANCES EN 2007

(en millions d’euros)

 

 Crédits
LFI

Décrets d’avance

Loi de finances rectificative

 Montant final des crédits

 

Ouvertures

Annulations

Solde

Ouvertures

Annulations

Solde

Budget général

 

 

 

 

 

 

 

 

Crédits bruts

343 310

1 239

1 239

0

6 491

2 859

+ 3 632

346 942

R&D

76 460

3 831

198

+ 3 633

80 093

Crédits nets

266 850

1 239

1 239

0

2 660

2 661

– 1

266 849

Budgets annexes

1 860

49

+ 49

1 910

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

 

 

 

CAS

53 048

432

– 432

52 616

CCF

96 300

96 300

R&D : remboursements et dégrèvements ; CAS : comptes d’affectation spéciale ; CCF : comptes de concours financiers.

Le second motif de satisfaction est, de façon cette fois inédite, la réduction en volume des dépenses de l’État.

Jusqu’à 2006, en effet, la norme de dépense consistait à stabiliser en volume, c’est-à-dire en euros constants, les dépenses nettes du budget général. Pour la première fois, la loi de finances pour 2007 a été construite sur un objectif plus ambitieux de réduction en volume des dépenses : les crédits ont été alloués en fonction d’un rythme d’évolution inférieur d’un point à l’inflation prévisionnelle (1,8 %).

En exécution, cette norme plus exigeante a été respectée : entre 2006 et 2007, les dépenses nettes du budget général n’ont, à périmètre constant, effectivement augmenté que de 0,8 %. Compte tenu d’une inflation constatée en 2007 (1,5 %) plus limitée qu’attendu, les dépenses ont donc diminué de 0,7 % en volume. Concrètement, cela représente une économie de près de 2 milliards d’euros par rapport à ce qu’aurait autorisé la précédente norme de stabilisation en volume.

UNE RÉDUCTION INÉDITE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT EN EUROS CONSTANTS

(crédits de paiement, en millions d’euros)

Exercice 2006 (budget général)

A.– Dépenses nettes totales  272 887

dont personnel  120 838

dont fonctionnement  37 049

dont investissement  12 706

dont intervention  62 095

dont charges de la dette  38 946

dont pouvoirs publics  872

dont opérations financières  380

B.- Fonds de concours (1)  3 558

C.- Régularisation pensions décembre 2005  3 266

D.- Dépenses nettes hors pensions déc. 2005 (A – B – C) 266 064

Exercice 2007 (budget général)

E.- Dépenses nettes totales  270 632

dont personnel  118 352

dont fonctionnement  33 815

dont investissement  13 021

dont intervention  64 623

dont charges de la dette  39 550

dont pouvoirs publics  921

dont opérations financières  350

F.- Fonds de concours (1)  3 832

G.- Dépenses nettes (E – F)  266 800

Évolution des dépenses

H.- Changements de périmètre 2006/2007 (2)  – 1 475

I.- Progression 2006/2007 (G – D – H)  + 2 211

soit .......... + 0,8 % en valeur

soit (3) – 0,7 % en volume

(1) Crédits ouverts.

(2) Changements de périmètre identifiés dans la charte de budgétisation annexée au PLF 2007
(– 480 millions d’euros), majorés des transferts aux collectivités territoriales effectués par amendement lors de la discussion budgétaire (– 995 millions d’euros).

(3) L’inflation (IPC hors tabac en moyenne annuelle) constatée en 2007 est de 1,5 %, au lieu de 1,8 % prévu en loi de finances initiale.

Toutefois, force est de constater le caractère partiellement artificiel du respect de la norme de dépense en 2007 qui, faute de crédits suffisants, a été obtenu au prix d’une reconstitution des créances des organismes de sécurité sociale sur l’État, à hauteur d’environ 1,8 milliard d’euros pour le seul régime général (7). Une telle situation est d’autant plus regrettable que les dettes accumulées par l’État jusqu’à la fin 2006, soit 5,1 milliards d’euros, avaient fait l’objet d’un apurement en octobre dernier.

Ces résultats illustrent la difficulté de la démarche de réduction en volume d’un périmètre de dépenses limité aux crédits nets du budget général. Cette difficulté devrait être croissante dans l’avenir, compte tenu de la forte augmentation tendancielle de la charge de la dette de l’État et des dépenses de pensions (qui, cumulées, progresseront d’environ 4 milliards d’euros chaque année). Sauf à recourir à des expédients critiquables (débudgétisations, sous-budgétisations, mobilisation de ressources extrabudgétaires, etc.), il est donc plus judicieux d’élargir l’assiette de la norme de dépenses et de faire porter les efforts sur l’ensemble des acteurs de la dépense publique.

C’est le choix opéré dans la loi de finances pour 2008 pour la présente législature, dont la stratégie budgétaire consiste à stabiliser en volume une enveloppe de dépenses élargie aux prélèvements sur recettes – au profit de l’Union européenne et des collectivités territoriales – et aux nouvelles affectations de ressources à des opérateurs de l’État (8).

L’exécution budgétaire 2007 montre que le succès de cette maîtrise accrue de la dépense ne pourra être au rendez-vous – a fortiori dans un cadre pluriannnuel (9) – qu’à la condition de progresser davantage dans le bon calibrage des dotations budgétaires initiales.

B.– UN MOINDRE SURPLUS DE RECETTES

Un moindre surplus de recettes

LFI (en millions d’euros)

A.– Recettes fiscales nettes 265 733

Recettes fiscales brutes 342 193

Remboursements et dégrèvements 76 460

B.– Recettes non fiscales 26 956

C.– Prélèvements sur recettes 68 147

D.– Fonds de concours 4 249

E.– Ressources nettes du budget général (A + B – C + D) 228 791

LFR (variation par rapport à la LFI, en milliards d'euros)

A.– Recettes fiscales nettes + 1,45

Dont IS net + 5,21

TVA nette – 2,39

IR – 0,29

TIPP – 0,54

ISF + 0,57

droits de mutation – 0,10

B.– Recettes non fiscales + 0,5

Produit des participations de l’État + 0,74

Produit des jeux + 0,15

C.– Prélèvements sur recettes – 1,98

Collectivités territoriales – 0,12

Union Européenne – 1,86

D.– Fonds de concours 0

E.– Ressources nettes du budget général (A + B – C + D) + 3,92

TOTAL LFR (en millions d’euros) 232 716

Exécution (variation par rapport à la LFR, en milliards d'euros)

A.– Recettes fiscales nettes – 0,47

Dont IS net – 0,28

TVA nette + 0,41

IR – 0,46

droits de mutation + 0,71

B.– Recettes non fiscales + 1,22

Produit des participations de l’État – 0,02

Produit des jeux + 0,16

C.– Prélèvements sur recettes + 0,61

Collectivités territoriales + 0,27

Communauté européenne – 0,34

D.– Fonds de concours – 0,41

E.– Ressources nettes du budget général (A + B – C + D) – 0,27

TOTAL (en millions d’euros) 232 442

Progression des recettes nettes de la LFI à l’exécution
(y compris fonds de concours)
(en millions d’euros)  + 3,65

Progression des recettes nettes de la LFI à l’exécution
(hors fonds de concours)
(en millions d’euros)  + 4,1

soit + 1,8 % en valeur
ou  0,3 % en volume

1.– Des plus-values de recettes fiscales en diminution par rapport à 2006

● L’évolution globale

Le montant total des recettes fiscales nettes en exécution a atteint 266 711 millions d’euros, soit un montant inférieur de 1,18 milliard d’euros au montant atteint en 2006.

Ce montant est proche de celui de 265 733 millions d’euros qui était prévu dans la loi n° 2006–1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 (+ 978 millions d’euros). Pour autant, l’évolution des recettes fiscales au cours de l’exercice 2007 s’est éloignée du chemin initialement tracé en loi de finances initiale. La proximité des chiffres cache deux phénomènes opposés qui se sont compensés.

L'exécution 2007 a bénéficié d'une évolution tendancielle des recettes fiscales plus dynamique qu’anticipée en loi de finances (+ 6,8 milliards d’euros environ).

En revanche, l’impact des mesures nouvelles prises antérieurement à la loi de finances pour 2007 a été sous-évalué. Chiffré à – 6,8 milliards d’euros en loi de finances initiale, il est passé en exécution, d’après les premières estimations, à
– 10,7 milliards d’euros, soit un coût supplémentaire de 3,9 milliards d’euros. Selon les informations communiquées au Rapporteur général, les erreurs de prévision ont plus particulièrement porté sur le chiffrage de la mesure nouvelle « 5ème acompte » d’IS et le crédit d’impôt développement durable.

À ces erreurs de prévision s’est ajouté le coût des mesures nouvelles et des transferts de recettes adoptés après la loi de finances pour 2007 et ayant un impact sur l’exercice 2007. La loi de finances pour 2007 avait prévu environ 4,9 milliards d’euros de mesures nouvelles et transferts de recettes (10), ce chiffre est passé à 7,5 milliards d’euros, soit un coût supplémentaire de 2,6 milliards d’euros.

La loi n° 2007–123 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (dite loi TEPA) a eu un coût limité en 2007, à hauteur d’environ 740 millions d’euros, (124 millions d’euros au titre des droits de succession, 233 millions au titre des droits de donation, 380 millions au titre des transferts complémentaires de recettes effectués au bénéfice de la sécurité sociale dans le cadre de la compensation des exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires prévus par la loi de finances rectificative pour 2007).

La loi n° 2007–290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale a eu un impact très limité en matière de TVA (– 30 millions d’euros).

La loi de finances rectificative pour 2007 a eu un coût d’environ 1 milliard d’euros, hors effet de la compensation de charges liée au TEPA (– 83 millions d’euros de transfert supplémentaire de TIPP aux régions, – 61 millions d’euros de transfert supplémentaire de taxe sur les conventions d’assurance aux départements, - 886 millions d’euros au titre du transfert de la totalité de la taxe sur les salaires et du transfert supplémentaire de droits tabac à la sécurité sociale).

Le tableau ci-après retrace les grandes lignes de l’évolution des recettes fiscales en 2007.

ÉVOLUTION DES RECETTES FISCALES EN 2007

 

Scénario du PLF 2007

Scénario de la LFI 2007

Résultat constaté

Taux de croissance du PIB en volume

2,25 %

2,25 %

1,9 %

Base Recettes fiscales 2006 brutes

Prévues en PLF : 335,0 Md€

Prévues en PLF : 335,0 Md€

Effectivement constatées pour 2006 : 340,1 Md€

Base Recettes fiscales 2006 nettes

prévues en PLF : 262,8 Md€

prévues en PLF : 262,8 Md€

Effectivement constatées pour 2006 : 267,9 Md€

Croissance spontanée des recettes fiscales nettes :

+ 14,6 Md€

+ 14,6 Md€

+ 16,4 Md€

Mesures nouvelles

Mesures de périmètre :
– 2,6 Md€

Mesures de périmètre :
– 3,7 Md€

Mesures de périmètre :
– 5,4 Md€

Mesures nouvelles :
– 7,7 Md€

Mesures nouvelles :
– 8,0 Md€

Mesures nouvelles :
– 12,1 Md€

Solde de croissance des recettes fiscales nettes par rapport à l’exécution 2006

+ 4,2 Md€

+ 3,0 Md€

– 1,2 Md€

Total recettes fiscales nettes 2007

267,2

265,7

266,7

L’élasticité des recettes fiscales s’établirait à 1,4 pour 2007 selon les premières estimations effectuées par direction générale du trésor et de la politique économique.

ÉLASTICITÉ DES RECETTES FISCALES

Année

Élasticité prévue en PLF

Élasticité constatée

Écart

2002

1,0

– 0,1

– 1,1

2003

0,9

0,2

– 0,7

2004

0,7

1,7

+ 1,0

2005

1,5

1,3

– 0,2

2006

1,2

2,0

+ 0,8

2007

1,3

1,4 (11)

+ 0,1

Le coût en exécution des mesures nouvelles (prises avant et après le projet de loi de finances 2007) figure dans le tableau ci-après.

COÛT DES MESURES NOUVELLES EN EXÉCUTION 2007

TOTAL MESURES NOUVELLES

– 12,1

Explication détaillée des 12,1Md€ de mesures nouvelles :

IR

Réforme du barème de l’IR (LFI 2006)

– 4,4

Hausse de la PPE (LFI 2006 et LFI 2007)

– 1,0

Crédit d’impôt développement durable (LFI 2006)

– 0,9

Crédit d’impôt garde d’enfants hors domicile
(LFI 2006)

– 0,5

IS

Aménagement du régime des acomptes d'IS
(LFR 2005, LFR 2006, LFI 2007)

– 2,9

Abaissement du taux réduit sur les plus-values à long terme (LFR 2004)

– 0,9

Crédit impôt recherche (LFI 2006)

– 0,2

Modification du barème, suppression de l’imputation de l’IFA sur l’IS en contrepartie d’une déduction en charges (*) (LFI 2006)

– 0,2

Sociétés d’investissements immobiliers cotées : Exonération d’IS sur les bénéfices et plus-values sous la condition d'en distribuer une fraction (LFI 2003)

– 0,3

Déductibilité de la hausse C3S (LFSS 2006)

0,2

Autres

Suppression de la CRL (LFI 2006)

– 0,7

Allègements des droits de successions (Loi TEPA)

– 0,1

Allègements des droits de donation (Loi TEPA)

– 0,3

ISF (LFI 2005 et LFI 2007)

– 0,1

Bouclier fiscal (LFI 2007)

– 0,2

Autres

0,3

(*) Au 31 janvier 2008, près de 187 millions de restitutions ont été opérés au titre du bouclier fiscal 2007 à 10 250 contribuables.

Source : Direction du budget

Le tableau ci-après fait apparaître pour les principaux impôts les écarts entre les prévisions de la loi de finances pour 2007 et l’exécution.

ÉVOLUTION DES PRINCIPALES RECETTES FISCALES EN 2007

 

Révisé 2006 figurant au PLF 2007 (A)

Exécution 2006 (B)

LFI 2007

Mesures nouvelles décidées après la LFI 2007

Changements de périmètre décidés après la LFI 2007

Écart de prévisions (1)

Dont effet base (B-A)

Exécution 2007

Impôt sur le revenu (yc CRL)

58 180

58 619

57 057

 

 

– 753

439

56 304

Autres impôts
d'État sur rôle

6 080

6 300

6 200

 

 

27

220

6 227

Impôt brut sur les sociétés
(yc CSB et CRL)

54 020 

58 373

55 480

 

 

7 783

4 353

63 263

Impôt net sur les sociétés
(yc CSB et CRL)

44 570 

48 949

46 030

 

 

5 001

4 379

51 031

Autres impôts directs et taxes assimilées

10 013

10 426

10 592

 

– 532

698

413

11 290

TIPP part État

19 300

18 870

18 005

 

– 144

– 573

– 430

17 288

TVA brute

166 100

166 268

174 786

– 30 (2)

 

– 834

168

173 922

TVA nette

127 400

127 090

133 486

– 30

 

– 1 947

– 310

131 509

Enreg, timbre, autres contributions
et taxes ind.

21 263

21 276

20 153

– 357 (3)

– 1 066 (4)

685

13

19 415

Remboursements et dégrèvements
(hors IS et TVA)

– 23 968

– 23 637

– 25 710

 

 

– 767

331

– 26 477

RECETTES FISCALES NETTES

262 838

267 893

265 813

– 387

– 1 742

3 030

5 055

266 711

(1) : + : sous-estimation // - : sur-estimation

(2) : Loi droit opposable au logement

(3) : Loi TEPA

(4) : Y compris 303 millions d’euros de droit de timbre PMU supprimé et basculé en RNF

Source : Direction du budget et DGCP.

Sans entrer dans le détail de l’évolution des recettes fiscales nettes qui sera analysé dans le cadre de l’examen de la loi de règlement, le Rapporteur général tient à retracer ici l’évolution des principaux impôts.

● L’impôt sur le revenu

Les recettes nettes d’impôt sur le revenu (12) d’un montant de 50 033 millions d’euros se sont avérées inférieures de 1,5 milliard d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale (et de 461 millions d’euros par rapport aux prévisions révisées de la loi de finances rectificative pour 2007).

L’écart de prévision, qui provient pour un tiers de moindres émissions et deux tiers d’une augmentation des remboursements, s’explique principalement par une mauvaise anticipation du coût de la PPE et de certains crédits d’impôts. Ainsi, le coût de la PPE a augmenté de 530 millions d’euros entre la prévision de la loi de finances initiale et l’exécution tandis que le coût du crédit d’impôt développement durable s’est accru d’environ 900 millions d’euros.

Le tableau ci-après décompose pour l’année 2007 et les seuls revenus 2006 l’évolution de l’impôt sur le revenu en isolant le coût des réductions et des crédits d’impôts ainsi que de la PPE. Il illustre bien la part croissante prise par ces dépenses fiscales auxquelles il conviendrait d’ajouter les dépenses fiscales intervenant en amont du barème.

ÉVOLUTION DE L’IMPÔT SUR LE REVENU EN 2007

(en millions d’euros)

(À partir des émissions d’impôt sur le revenu)

Montants

Impôt avant réductions d'impôt

56 566

Total des réductions d'impôt

5 248

Impôt après réductions d'impôt

51 318

impôt avant crédits d'impôt *

54 515

Montant des crédits d'impôt hors PPE

4 116

Prime pour l'emploi

4 529

Montant total des crédits d'impôt

8 645

Impôt total dû

45 870

* Y compris impôt à taux proportionnel, acomptes PPE, CRL, taxe sur les agents d'assurance. Ces facteurs ne sont pas pris en compte dans la ligne précédente.

Source : Fichier des déclarations de revenus 2006 taxées jusqu’à la 6ème émission

● L’impôt sur les sociétés

Les recettes nettes d’impôt sur les sociétés ont atteint en exécution un montant très supérieur aux prévisions de la loi de finance initiale, 51 031 millions d’euros, mais conformes aux prévisions de la loi de finances rectificative pour 2007. Les prévisions d’impôt sur les sociétés de la loi de finances pour 2007 ont été finalisées au cours du mois de septembre 2006, en l’absence d’information sur le montant des 4ème et 5ème acomptes versés en décembre 2006. Or, ces acomptes ont été bien meilleurs qu’anticipés. Les données précises de l’exécution 2006 ont pu être intégrées dans les prévisions 2007 associées à la loi de finances rectificative pour 2007. L’écart par rapport à la loi de finances rectificative (- 300 millions d’euros) reste faible au regard du niveau des sommes en jeu et de la grande volatilité qui caractérise les montants versés au titre du 4ème et du 5ème acomptes.

● La TVA

Les recettes nettes de TVA, à 131 509 millions d’euros, sont en retrait sensible par rapport à la prévision associée à la loi de finance initiale (– 2 milliards d’euros), mais en progression par rapport à la prévision associée à la loi de finance rectificative (+ 409 millions d’euros). L’écart par rapport à la prévision initiale s’explique par un taux de croissance en valeur de la consommation des ménages (+ 3,8 %) plus faible que prévu et le nombre élevé de demandes de remboursements de crédits de TVA en début d’année.

● Les recettes de TIPP sont en retrait de 700 millions d’euros par rapport au montant prévu en loi de finances. Cet écart provient pour 100 millions d’un transfert supplémentaire de TIPP aux collectivités territoriales décidé en loi de finances rectificative. Pour le reste, il s’expliquerait par la hausse des prix des produits pétroliers, la douceur de l’hiver et le développement de technologies plus performantes.

RÉPARTITION DE LA TIPP ENTRE BÉNÉFICIAIRES

TIPP

2007

État

17 288

Régions

2 877

Départements RMI

4 821

Total

24 986

Source : Direction du budget

DÉCOMPOSITION DES MISES À LA CONSOMMATION

(en millions d’hectolitres)

 

2004

2005

2006

2007

Super

10,5

4,5

1,03

ns

Sans plomb

143,3

141,8

135,6

130,2

Évolution en %

– 2,73 %

– 1,1 %

– 4,4 %

– 4 %

Gazole

357,9

364,3

370,6

382,9

Évolution en %

+ 2,6 %

+ 1,8 %

+ 1,7 %

+ 3,3 %

Fioul domestique

187,6

186,2

171,9

152,4

 

+ 0,4 %

– 0,75%

– 7,7 %

–11,3 %

Source : Direction du budget

● Les autres recettes fiscales

– Les recettes d’ISF (4 417 millions d’euros) ont augmenté d’environ 571 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale (l’écart à la prévision atteint 14,8 %). Le dynamisme des marchés boursiers durant le dernier trimestre de 2006 (environ 10 % de hausse) conjugué au maintien d’une progression du marché immobilier tout au long de l’année 2006 explique cet écart. Le nombre de redevables pour l’année 2007 s’établirait à 527 866.

– Le montant des droits de successions (7 882 millions d’euros) a progressé d’environ 466 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale. Cet écart s’explique ici encore par le dynamisme des marchés boursiers du dernier trimestre 2006 et du premier semestre 2007 et le maintien des prix immobiliers à un haut niveau.

– Hors effet de la loi TEPA, évalué à une baisse de 240 millions d’euros, le montant des droits de donations (1 087 millions d’euros) est en ligne avec les prévisions de la loi de finances initiale.

2.– Des recettes non fiscales assez sollicitées

La loi de finances initiale pour 2007 a prévu un montant de recettes non fiscales de 26 956 millions d’euros, soit une progression de 2 176 millions d’euros (8,8 %) par rapport au montant de recettes non fiscales obtenu en 2006.

En exécution, le montant des recettes non fiscales a atteint 28 680 millions d’euros, soit 1,7 milliards d’euros de plus que prévu (+ 6,4 %).

ÉVOLUTION DES RECETTES NON FISCALES EN 2007

(en milliers d’euros)

Exécution 2006

PLF 2007

LFR 2007

Exécution 2007

24 779 688

26 956 200

27 455 436

28 679 907

La plus-value d’environ 499 millions d’euros entre la loi de finances initiale et la loi de finances rectificative provient pour l’essentiel de l’acompte de 923 millions d’euros versé par EDF sur le dividende dû au titre de l’exercice 2007. La plus-value de 1 224 millions d’euros réalisée par rapport à la loi de finances rectificative résulte notamment du versement par la SNCF d’une soulte de 640 millions d’euros intervenu en décembre en contrepartie de la reprise par l’État de la dette du SAAD (service annexe d’amortissement de la dette) et de diverses bonnes surprises (notamment une hausse du produit de la cotisation nationale de péréquation de taxe professionnelle (13) pour un montant de 134 millions d’euros, une hausse du produit des autres amendes et condamnations pécuniaires pour 135 millions d’euros, une hausse du produit des jeux exploités par la Française des jeux pour 106 millions d’euros).

3.– Une heureuse surprise du côté des prélèvements sur recettes

Le montant total des prélèvements sur recettes s’est révélé moins élevé que prévu, une plus-value de 1 366 millions d’euros a pu être dégagée grâce à la forte baisse du prélèvement européen.

ÉVOLUTION DES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES EN 2007

(en millions d’euros)

 

LFI 2007

LFR 2007

Exécution 2007

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

– 49 451 400

– 49 368 188

– 49 604 818

Prélèvement sur recettes au profit des communautés européennes

– 18 696 000

– 16 837 700

– 17 176 157

Total

– 68 147 400

– 66 171 643

– 66 780 975 

RÉPARTITION DU PRÉLÈVEMENT EUROPÉEN

(en millions d’euros)

Ressources propres traditionnelles

1 776,50

Ressource TVA

4 440,70

Ressource RNB

10 958,90

Total

17 176,16

C.– UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE RÉDUIT DE 3,5 MILLIARDS D’EUROS PAR RAPPORT À LA PRÉVISION

Un déficit du budget général réduit de 1 milliard d’euros

Le déficit de l’État dans la LFI hors fonds de concours (en millions d'euros)

A.– Solde du budget général – 42 308

Charges nettes 271 099

Ressources nettes 228 791

B.– Soldes des comptes spéciaux (CS) 309

C.– Solde des budgets annexes 3

D.– Solde du budget de l’État (A + B + D) – 41 997

Évolution du déficit de l’État en cours d’année (en millions d'euros)

D.– Plus-values de ressources nettes + 3 649

E.– Évolution des charges nettes – 467

Dont évolution de la norme de dépenses – 50

F.– Évolution du solde du budget général + 3 182

G.- Solde du budget général en exécution (hors FMI et hors produit de cessions de titres) – 38 192

H.– Solde des CS en 2007 (hors FMI et hors produit de cessions de titres) – 212

I.– Solde du budget de l’État en exécution – 38 403

Répartition des marges de manœuvre entre 2006 et 2007
(en milliards d'euros)

– Marges de manœuvre (à périmètre constant)  20,3

surplus spontané de recettes fiscales nettes  16,4

progression spontanée des recettes non fiscales 3

baisse du prélèvement européen 0,5

– Répartition des marges de manœuvre

baisses d’impôts 12,1

dont décidées en LFI et LFR 2,3

progression des charges 5,5

dont charges nettes du budget général (« norme de dépense ») 2,2

dont prélèvements au profit des collectivités territoriales 1,4

dont couverture par l’État de dépenses effectuées par d’autres organismes publics 1,9

allégements de charges sociales 1,7

réduction du déficit du budget général – 1

Comme le montre le tableau ci-dessus, en exécution le déficit du budget général a été réduit d’un milliard d’euros par rapport au déficit prévu en loi de finances initiale. Le déficit du budget de l’État (y compris les comptes spéciaux) atteint 38 403 millions d’euros hors produit de cession de titres EDF (14), soit 3 594 millions de moins que le montant prévu en loi de finance initiale.

Malgré tout, la comparaison avec les résultats de 2006 n’est pas à l’avantage de l’exécution budgétaire de 2007. Force est en effet de constater que :

– le déficit budgétaire a augmenté en 2007 de 2,7 milliards d’euros par rapport à 2006 (15) ;

– l’excédent primaire, qui s’établissait à 2,7 milliards d’euros en 2006, a été ramené à 0,9 milliard d’euros en 2007 (ceci en dépit d’une augmentation de la charge de la dette) (16) ;

– le solde stabilisant la dette de l’État (17) n’a été atteint que d’extrême justesse en 2007, alors qu’il l’avait été plus franchement en 2006 (ainsi que le montre le graphique ci-après).

SOLDE EFFECTIF ET SOLDE STABILISANT LA DETTE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

Ces résultats en demi-teinte invitent manifestement à renforcer nos capacités de pilotage des finances publiques.

II.– DE NOUVELLES RÈGLES DE GOUVERNANCE POUR DES FINANCES PUBLIQUES VULNÉRABLES

A.– L’ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DU DÉFICIT PUBLIC ET DE LA DETTE

La première évaluation des comptes nationaux des administrations publiques pour 2007 réalisée par l’INSEE pour la notification à la Commission européenne des ratios de dette et déficit publics a été publiée le 28 mars 2008. Elle fait ressortir une évolution préoccupante du déficit public et de la dette.

RATIOS DE FINANCES PUBLIQUES

 

Taux en % du PIB

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Déficit public notifié *

1,5

1,5

3,1

4,1

3,6

2,9

2,4

2,7

Dette publique notifiée

57,3

56,9

58,8

62,9

64,9

66,4

63,6

64,2

Recettes publiques

50,2

50,0

49,5

49,2

49,6

50,4

50,3

49,9

Dépenses publiques

51,6

51,6

52,6

53,3

53,2

53,4

52,7

52,6

Prélèvements obligatoires

44,1

43,8

43,1

42,9

43,2

43,6

43,9

43,5

Source : Comptes nationaux base 2000 - Insee, Direction générale de la comptabilité publique (DGCP), Direction générale du Trésor et de la Politique économique (DGTPE), Banque de France.

* Le déficit public notifié se distingue du besoin de financement par la prise en compte des flux d’intérêts liés à des opérations de swaps effectuées par les administrations publiques (0,3 milliard d’euros en 2007).

● En 2007, le déficit public notifié s’élève à 50,3 milliards d’euros, soit 2,7 % du PIB. Le processus de baisse du déficit public amorcé en 2005 est interrompu.

Par rapport à 2006, le déficit public se dégrade de 7,7 milliards d’euros, la progression des dépenses (+4,0 %) étant plus dynamique que celle des recettes publiques (+3,4 %). La part de ces dernières rapportée au PIB diminue de 50,3 % à 49,9 %. Par rapport à la prévision associée au projet de loi de finances pour 2008, le déficit public accuse une augmentation de 5,6 milliards d’euros.

La dégradation du déficit public par rapport à la prévision associée au projet loi de finances pour 2008 est imputable pour 0,2 point de PIB à l’État et pour 0,2 point de PIB aux collectivités territoriales, les administrations de sécurité sociale apportant une contribution positive de 0,1 point de PIB.

ÉVOLUTION DU DÉFICIT PUBLIC

(en milliards d’euros)

Déficit public
au sens de Maastricht (*)
(provisoire au 28 mars 2008)

Réalisation

Prévision associée au PLF 2008

Administrations centrales

– 41,5

– 37,21

dont : État

– 38,9

– 35,35

Organismes divers d'administration centrale

– 2,6

– 1,86

Administrations locales

– 7,2

– 3,72

Administrations de sécurité sociale

– 1,6

– 3,72

Total administrations publiques

– 50,3

– 44,65

En % du PIB

 

 

Administrations centrales

– 2,2

– 2

Administrations locales

– 0,4

– 0,2

Administrations de sécurité sociale

– 0,1

– 0,2

Total administrations publiques

– 2,7

– 2,4

Source : Comptes nationaux – Base 2000, Insee et PLF 2008

S’agissant de la dégradation du déficit de l’État, quelques précisions s’imposent. Le solde d’exécution budgétaire n’est inférieur que de 100 millions d’euros environ au solde qui figurait dans les prévisions révisées associées au projet de loi de finances pour 2008 et qui fondait une prévision de déficit public pour l’État de 1,9 point de PIB. Mais entre les prévisions révisées associées au projet de loi de finances pour 2008 et l’exécution, il s’est produit une baisse de recettes fiscales qui a été compensée par des recettes non fiscales. Or certaines de ces recettes, comme la soulte SNCF, n’ont pas été prises en compte par l’INSEE, pour le calcul du déficit public en comptabilité maastrichtienne. Par ailleurs, le Gouvernement n’a pas correctement anticipé les retraitements comptables qui seraient effectués par l’INSEE (18). Cela explique que le déficit public de l’État se soit dégradé tandis que le déficit d’exécution budgétaire soit resté stable.

La dégradation de la situation financière des collectivités territoriales après la stabilisation observée en 2006 résulte notamment d’une forte hausse de la masse des rémunérations versées et de l’investissement.

Le montant des dépenses et recettes des collectivités territoriales en 2007 en comptabilité nationale n’a pas encore été rendu public par l’INSEE. À partir des premières données provisoires en comptabilité publique publiées par la Direction générale de la comptabilité publique en novembre 2007, une estimation de l’évolution des dépenses des collectivités territoriales pour l’année 2007 peut être établie.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

(en milliards d’euros)

Dépenses des collectivités territoriales

2005

2006

Évolution 2006/2005 en %

2007

Évolution 2007/2006 en %

À champ courant

185,2

196,3

+ 6

209,8

+ 6,9

À champ constant
(– montant du droit à compensation)

184,6

194,85

+ 5,5

206,1

+ 5,8

Source : Direction du budget

L’argument selon lequel la forte augmentation des dépenses serait imputable à l’augmentation des transferts de compétence n’est guère recevable. Le tableau ci-dessus fait apparaître une forte augmentation de la dépense (+ 5,8 %) pour 2007 à champ constant. Cette évolution montre les limites de l’application de la règle d’or qui interdit aux collectivités territoriales de financer par l’emprunt les dépenses inscrites en section de financement. Cette règle ne suffit pas à garantir l’équilibre général des finances locales.

L’amélioration des comptes sociaux s’explique entièrement par la croissance des excédents dégagés par l’assurance chômage. Le déficit du régime général de sécurité sociale a atteint 9,4 milliards d’euros au lieu des 11,7 milliards d’euros prévus, grâce à des rentrées de CSG et de cotisations supérieures à la prévision et à la bonne tenue de la dépense. Le Rapporteur général tient ici à souligner les effets bénéfiques des mesures prises par le comité d’alerte et l’utilité de ce comité.

DU SOLDE D’EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES
AU BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

2005

2006

2007

Solde d’exécution des lois de finances

– 43,5

– 39,0

– 34,7 *

Corrections droits constatés

– 1,5

– 1,7

– 2,6

Opérations budgétaires traitées en

opérations financières

– 6,6

– 8,4

– 6,0

Opérations non budgétaires ayant un

impact sur le besoin de financement

– 0,6

– 1,0

4,3

Autres

– 0,1

– 0,1

– 0,1

Besoin de financement de l’État

– 52,2

– 47,4

– 39,2

* Y compris recettes de privatisation EDF

Source : Insee, DGCP, DGTPE.

En 2007, le solde d’exécution des lois de finances s’établit à 
– 34,7 milliards d’euros en intégrant les recettes de privatisation d’EDF alors que le besoin de financement de l’État est de  39,2 milliards d’euros et le déficit public notifié de 38,9 milliards d’euros. Le passage du solde d’exécution des lois de finances au déficit de l’État au sens de la comptabilité nationale s’obtient par l’intermédiaire de plusieurs corrections : en ramenant à l’exercice concerné l’enregistrement de certaines dépenses et recettes du budget général (comptabilité en droits constatés), en retraitant des opérations budgétaires en opérations financières ou de patrimoine, en intégrant des opérations non budgétaires, principalement des remises de dettes aux États étrangers.

En 2007, la correction liée à la comptabilité en droits constatés atteint – 2,6 milliards d’euros (dont - 1,6 milliard d’euros au titre des transferts aux organismes de sécurité et – 500 millions d’euros au titre des recettes de TVA).

La correction liée au traitement d’opérations budgétaires en opérations financières se porte à 
– 6 milliards d’euros (dont – 4,5 milliards d’euros de retraitement des opérations du compte des participations financières de l’État, - 1,3 milliard d’euros de moins sur le prélèvement de 2,9 milliards opéré par l’État sur la COFACE, – 600 millions d’euros au titre de la soulte SNCF, – 900 millions de dividende exceptionnel versé par Autoroutes de France, - 200 millions d’euros sur le prélèvement opéré par l’État sur les fonds d’épargne, – 190 millions d’euros de recettes au titre du « culot d’émission » de billets de 500 francs Pascal, + 1,9 milliard au titre de la nouvelle comptabilisation des dépenses militaires).

Les corrections liées à l’intégration dans le calcul du besoin de financement d’opérations non budgétaires s’élèvent à + 4,3 milliards d’euros (dont + 5,1 au titre de l’abandon de la créance détenue par l’ACOSS sur l’État en échange d’un abandon de créance de la caisse de la dette publique sur l’ACOSS, - 650 millions au titre des abandons de créance au profit de l’UNEDIC et – 200 millions au titre des remises de dettes en faveur d’États étrangers).

● L’évolution de la dette publique reste par ailleurs préoccupante.

S’agissant de la dette de l’État, qui représente 77 % de l’ensemble de la dette publique, l’augmentation de l’encours enregistrée en 2007 a retrouvé un niveau comparable aux années 2004 et 2005 (voir le graphique ci-après). Le recul enregistré en 2006 résultait en effet, pour l’essentiel, de facteurs exceptionnels : un niveau particulièrement élevé de recettes tirées des cessions d’actifs (dont 16 milliards d’euros affectés au désendettement) et l’abaissement de 25 milliards d’euros du compte courant du Trésor à la Banque de France en fin d’année.

DÉFICIT DE L’ÉTAT ET CROISSANCE DE SA DETTE

N.B. : Déficit de l’État notifié à la Commission européenne (besoin de financement minoré des excédents de swaps).

Source : INSEE, Comptes nationaux.

Quant à la dette de l’ensemble des administrations publiques, elle a atteint 64,2 % du PIB à la fin 2007, après 63,6 % à la fin 2006. Cette augmentation, certes moindre que celles connues entre 2002 à 2005, contraste avec les prévisions associées au projet de loi de finances pour 2008, qui tablaient sur une stabilisation du taux d’endettement (19).

ÉVOLUTION DE LA DETTE PUBLIQUE DEPUIS 2000

Source : INSEE, Comptes nationaux.

Cette stabilisation ne s’est néanmoins pas révélée possible, pour deux raisons principales :

– à 2,7 % du PIB, le déficit public stabilisant la dette n’a pas été tout à fait atteint en 2007 (effet « déficit ») ;

– les produits de cessions d’actifs affectés au désendettement ont été limités à 3,5 milliards d’euros en 2007 et n’ont pas suffi à contrebalancer les acquisitions d’actifs financiers par les administrations publiques, qui ne viennent pas en déduction de la dette au sens du traité de Maastricht (effet « flux de créances »). À titre d’exemple, la dette des administrations de sécurité sociale a progressé davantage (+ 7 milliards d’euros) que leur besoin de financement (réduit à 1,6 milliard d’euros (20)), car certains organismes non endettés, tels que les régimes complémentaires d’assurance vieillesse, ont dégagé des excédents en 2007.

B.– POUR UN RENFORCEMENT DES RÈGLES DE GOUVERNANCE DES FINANCES PUBLIQUES

Au cours de la précédente législature, la majorité s’est dotée de solides outils de pilotage de nos finances publiques : une norme d’évolution des dépenses de l’État déconnectée du cycle économique ; une règle d’affectation des surplus de recettes fiscales à la réduction du déficit ; un comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie, créé par la loi du 13 août 2004 ; une approche des dépenses sociales selon une démarche par objectifs et résultats par la LOLFSS (21) ; la promotion d’une vision globale des comptes publics, matérialisée par la création du Conseil d’orientation des finances publiques et de la Conférence nationale des finances publiques.

Depuis 2007, la stratégie budgétaire de l’actuelle législature peut s’appuyer sur de nouveaux acquis : un élargissement de la norme de dépense (22) ; un contrat de stabilité indexant sur la seule inflation les dotations de l’État aux collectivités territoriales ; la clarification des relations financières entre l’État et la sécurité sociale (23) ; un objectif de non remplacement d’un agent public partant à la retraite sur deux ; le lancement d’une révision générale des politiques publiques (RGPP) et d’une révision générale des prélèvements obligatoires (RGPO).

Pour autant, compte tenu de la situation encore difficile des comptes publics, mais aussi de l’ambition de nos objectifs d’ici à 2012, le Rapporteur général estime aujourd’hui indispensable de renforcer nos outils de pilotage des finances publiques.

1.– Développer une gestion pluriannuelle des finances publiques

En ce sens, le Rapporteur général se félicite du lancement en 2008 de la gestion pluriannuelle des finances publiques.

Celle-ci devrait revêtir deux dimensions :

– une programmation pluriannuelle de l’ensemble des finances publiques, destinée à tracer et à « sécuriser » le chemin du retour vers l’équilibre des comptes publics d’ici la fin de la législature. Elle gagnerait à prendre la forme d’une véritable loi de programmation, votée par le Parlement avant l’examen du projet de loi de finances pour 2009 ;

– une programmation triennale des dépenses du budget de l’État pour la période 2009-2011, officialisée par une circulaire du Premier ministre du 11 février dernier.

Pour s’en tenir, dans le cadre du présent rapport, au seul cas de l’État, il y a tout lieu de se réjouir de la plus grande visibilité qu’offrira, au Parlement comme aux gestionnaires publics, cette nouvelle procédure pluriannuelle.

Celle-ci consiste à programmer des plafonds de dépenses par mission et des plafonds d’effectifs par ministère pour les trois prochaines années (2009-2011). Concrètement, dans les prochaines semaines se tiendront des conférences de budgétisation pluriannuelle entre le ministère du Budget et les autres ministères, lesquelles aboutiront à la détermination de plafonds triennaux – qui seront portés à la connaissance du Parlement lors du prochain débat d’orientation budgétaire.

Cette nouvelle procédure s’effectuant à droit constant, les plafonds ne pourront, juridiquement, être qu’indicatifs : le Parlement demeurera naturellement libre de modifier, dans le respect de l’article 47 de la LOLF, les crédits des missions et des programmes soumis à son approbation dans les différents projets de loi de finances. Toutefois, d’un point de vue interne au Gouvernement, les plafonds triennaux retenus seront « regardés comme impératifs » selon les termes de la circulaire précitée du Premier ministre (24).

Comme le Rapporteur général l’a déjà souligné (25), le succès de la pluriannualité budgétaire est très directement dépendant de la fiabilité des projections prévisionnelles de dépenses et, partant, de la qualité de la budgétisation initiale : couverture des dépenses obligatoires ou inéluctables, des restes à payer, des priorités gouvernementales etc.

De surcroît, pour que la pluriannualité budgétaire constitue, non seulement une source de plus grande responsabilisation des ministères et des gestionnaires, mais aussi un outil au service de l’assainissement des finances publiques, il conviendra d’établir une articulation forte avec la procédure de RGPP. Les plafonds triennaux devront donc intégrer aussi finement que possible les conséquences budgétaires, en crédits et en effectifs, des réformes structurelles qui résulteront de la RGPP, qu’il s’agisse des éventuels surcoûts en début de période ou – surtout – des économies attendues sur les trois années à venir.

Pour autant, au-delà de cette maîtrise accrue des dépenses budgétaires, le rétablissement de nos comptes publics ne pourra se passer d’une gestion raisonnée des recettes de l’État.

En particulier, afin d’éviter que la programmation des dépenses budgétaires n’entraîne une « fuite » massive vers la dépense fiscale, il paraît indispensable de compléter la pluriannualité de la gestion des crédits par la définition d’une trajectoire pluriannuelle de recettes.

Celle-ci pourrait être déduite de l’hypothèse de croissance retenue dans la programmation des finances publiques et des choix éventuels du Gouvernement en matière d’évolution des prélèvements obligatoires, ce qui rend nécessaire une articulation avec la procédure de RGPO. Pour que cette trajectoire de recettes soit respectée, il conviendrait de fixer ex ante des règles de comportement sur la gestion des éventuels surplus non anticipés de recettes et sur le traitement des mesures nouvelles relatives aux ressources fiscales : aménagement des barèmes, allégements d’impôts, affectations de taxes etc. Les différentes réflexions en cours pour encadrer l’évolution des dépenses fiscales devront également être mises à profit.

2.– Assurer la maîtrise des dépenses fiscales

Les dépenses fiscales ont été officiellement introduites dans les travaux budgétaires en France en application de l’article 32 de la loi de finances pour 1980 qui a prévu que leur évolution serait retracée dans le fascicule « Evaluation des voies et moyens » annexé au projet de loi de finances. Elles sont présentées dans un tome II de ce fascicule et y sont définies comme : « Les dispositions législatives ou réglementaires dont la mise en œuvre entraîne pour l’État une perte de recettes et donc, pour les contribuables, un allègement de leur charge fiscale par rapport à ce qui serait résulté de l’application de la norme, c’est-à-dire des principes généraux du droit français. »

a) Un enjeu budgétaire croissant mais toujours mal maîtrisé

En 2003, le Conseil des impôts (26)a consacré un rapport à la fiscalité dérogatoire (27) dans lequel il dressait un constat sévère, jugeant que les dépenses fiscales étaient mal maîtrisées et d’une efficacité incertaine. Le constat demeure d’actualité.

Les dépenses fiscales sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus coûteuses. A périmètre courant, le nombre des dépenses fiscales s’est accru de 317 en 1981 à 486 en 2008 (soit + 53% en 27 ans). Le chiffrage à périmètre constant présenterait une progression encore plus significative. Le graphique ci-dessous retrace cette évolution.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE DÉPENSES FISCALES DEPUIS 1981

Le coût des dépenses fiscales est de plus en plus lourd pour les finances publiques. Le coût total des 486 dépenses fiscales recensées dans le tome II du fascicule « Évaluation des voies et moyens » pour 2008 (qui ne prend pas en compte les mesures proposées dans le cadre du projet de loi de finances lui-même) est estimé à 73 milliards d’euros, soit une progression de + 16 % par rapport à 2001. Les dépenses fiscales connaissent désormais une croissance plus forte que celle des crédits budgétaires : du projet de loi de finances pour 2007 au projet de loi de finances pour 2008, leur montant a progressé de + 7,1 % contre + 1,6 % pour les crédits budgétaires ; la hausse des dépenses fiscales atteint environ 5 milliards d’euros, soit presque la marge de manœuvre autorisée par le zéro volume sur la norme de dépense budgétaire élargie (5,5 milliards d’euros).

L’emballement du nombre et du coût des dépenses fiscales a été concomitant avec l’instauration de la norme de dépenses budgétaires et il est permis de penser que les dépenses fiscales constituent le point de fuite de la norme de dépenses budgétaires. Entre 2001 et 2005, la hausse des dépenses fiscales a repris et elle s’est accentuée depuis 2006. Un nombre important de mesures nouvelles ont pris la forme de dépenses fiscales tandis que certaines dépenses budgétaires ont été transformées en dépenses fiscales, à l’instar du prêt à taux zéro dans la loi de finances initiale pour 2005. Quelques 180 dépenses fiscales parmi les 486 figurant dans le tome II du fascicule « Évaluation des voies et moyens » du projet de loi de finances pour 2008 ont été créées depuis 2001, pour un coût total de presque 17 milliards d’euros.

Le tableau ci-après retrace l’évolution sur trois ans des dix premières dépenses fiscales qui représentent 40 % du coût total des dépenses fiscales.

LES 10 PREMIÈRES DÉPENSES FISCALES

(en millions d’euros)

Impôt

Mesure

2006

2007

2008

Mission

TVA

Taux de 5,5 % pour les travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien portant sur des logements achevés depuis plus de deux ans

4 700

5 050

5 400

Ville et logement

IR

Prime pour l’emploi en faveur des contribuables modestes déclarant des revenus d’activité

3 240

4 230

4 230

Travail et emploi

IS

Taxation au taux réduit des plus-values à long terme provenant de cession de titres de participation et de certaines parts de fonds communs de placement à risque et de sociétés de capital-risque, ainsi que, sous certaines conditions, de leurs distributions, et des produits de concession de brevets

2 600

3 200

4 000

Développement et régulation économiques

IR

Exonération ou imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie

3 600

2 800

3 200

Engagements financiers de l’État

IR

Abattement de 10 % sur les montants des pensions (y compris les pensions alimentaires) et des retraites

2 350

2 330

2 550

Solidarité, insertion et égalité des chances

IR

Crédit d’impôt pour dépenses d’équipements de l’habitation principale en faveur des économies d’énergie et du développement durable

990

1 900

2 400

Écologie, développement et aménagement durables

IR

Abattement de 50 % puis de 40 % à compter des revenus 2006 sur certains revenus distribués de sociétés françaises ou étrangères

2 470

1 690

1 790

Développement et régulation économiques

TVA

Taux de 5,5 % pour la fourniture de logements dans les hôtels

1 650

1 700

1 750

Développement et régulation économiques

IR

Exonération des prestations familiales, de l’allocation aux adultes handicapés ou des pensions d’orphelin, de l’aide à la famille pour l’emploi d’une assistante maternelle agréée, de l’allocation de garde d’enfant à domicile, et de la prestation d’accueil du jeune enfant

1 600

1 600

1 700

Travail et emploi

Droits d’enregistrement

Exonération en faveur de certains contrats d’assurance maladie complémentaire

1 600

1 700

1 700

Solidarité, insertion et égalité des chances

 

TOTAL

24 800

26 200

28 720

 

– Les dépenses fiscales demeurent mal maîtrisées. Le chiffrage des dépenses fiscales a progressé depuis 2001, mais sa qualité demeure insuffisante. 20 % des dépenses fiscales recensées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008 demeure non chiffrées et la fiabilité du chiffrage s’avère de faible niveau : très bonne pour 14 % des dépenses chiffrées, bonne pour 31 % et un simple ordre de grandeur pour 55 %.

CHIFFRAGE DES DÉPENSES FISCALES

L’évaluation des dépenses fiscales n’est pas assez poussée. L’entrée en vigueur de la LOLF ouvre une voie de progrès : en plus de l’annexe générale relative aux dépenses fiscales présentée dans une perspective de prévisions de recettes, elle a prévu la présentation, dans chacun des projets annuels de performances (PAP), d’une évaluation des dépenses fiscales rattachées au programme concerné, qui permet une comparaison avec les dépenses budgétaires et s’inscrit dans une perspective d’évaluation des politiques publiques. Depuis 2006, les PAP présentent ainsi une évaluation des dépenses fiscales. La qualité de cette évaluation est très largement perfectible. Le Gouvernement s’est engagé à faire des efforts. Ainsi, bien que la LOLF n’impose pas que des indicateurs de performance soient assignés aux dépenses fiscales, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2007, douze dépenses fiscales se sont vues attribuer des objectifs et des indicateurs de performance.

En outre, si la LOLF ne fait pas mention d’une évaluation des dépenses fiscales dans les rapports annuels de performance (RAP) produits ex post en loi de règlement, le Gouvernement a décidé de procéder à cette évaluation. Selon la circulaire ministérielle du 30 janvier 2008 relative à la préparation du projet de loi de règlement et des RAP pour l’exécution 2007, trois améliorations devraient être apportées : un classement des dépenses fiscale par objectif, la totalisation de la dépense fiscale par programme, l’inclusion des dépenses fiscales sur impôt locaux (28). À titre expérimental, une présentation particulière sera réalisée pour 13 dépenses fiscales à forts enjeux. La circulaire du 10 avril 2008 relative à la préparation du budget pluriannuel 2009-2011 et aux conférences de budgétisation prévoit que l’évaluation particulière réservée aux dépenses fiscales à fort enjeux sera étendu pour les PAP 2009 à deux nouvelles dépenses.

Encore mal évaluées, les dépenses fiscales ne font pas l’objet d’un examen suffisamment attentif lors de la préparation du projet de loi de finances. Si depuis 2007, elles sont censées être évoquées en conférence de budgétisation, elles ne font pas l’objet de la même attention que les dépenses budgétaires soumises à plafond. Là encore un progrès s’annonce : la circulaire du 10 avril 2008 prévoit que les conférences de budgétisation des onze missions bénéficiant d’un total de dépenses fiscales supérieur à un milliard d’euros comporteront une partie spécifique d’examen des dépenses fiscales (29).

b) Développer des instruments de pilotage

La mise en œuvre d’une nouvelle gouvernance des dépenses fiscales est indispensable. Lors de sa réunion du 12 décembre 2007, le Conseil de la modernisation des politiques publiques a annoncé à cet effet une série de mesures. Le Rapporteur général souhaite qu’elles soient complétées par l’institution d’une véritable norme de dépense fiscale.

● Renforcer la connaissance des dépenses fiscales pour mieux cerner l’enjeu budgétaire

Pour soumettre les dépenses fiscales à une discipline et un pilotage renforcés, il est indispensable au préalable d’améliorer la connaissance des dépenses fiscales.

– Clarifier la définition des dépenses fiscales.

La notion de dépense fiscale renvoie à la définition d’une norme fiscale bien difficile à déterminer et présente de ce fait nécessairement un caractère quelque peu arbitraire. C’est à la direction de la législation fiscale (DLF), chargée chaque année de l’élaboration du tome II du fascicule « Evaluation des voies et moyens », qu’il revient de déterminer si une mesure entre ou non dans la définition de la dépense fiscale. La DLF utilise deux critères : le caractère plus ou moins ancien de la mesure et son caractère plus ou moins général. Partir du principe qu’une mesure parce qu’elle ancienne appartient à la norme singularise la France et ne répond à aucun argument convaincant. De plus, en pratique, la DLF fait prévaloir le critère de généralité sur celui de l’ancienneté et s’abstient d’exclure de la liste des dépenses fiscales les mesures assez anciennes dès lors qu’elles sont ciblées. Il paraît souhaitable d’abolir le critère d’ancienneté. En outre, il conviendrait d’établir des distinctions au sein des dépenses fiscales, en fonction de leurs objectifs (30).

– Renforcer la transparence du recensement.

Le recensement des dépenses fiscales opéré par l’administration fiscale détermine l’information du Parlement et doit être plus transparent.

Plusieurs améliorations pourraient être apportées au tome II du fascicule « Évaluation des voies et moyens » et ce dès l'exercice 2009 : une explication des variation de périmètre des dépenses fiscales répertoriées, l’indication de la forme que revêtent les dépenses fiscales dans le budget (moindre recette ou remboursement), l’inclusion d’une annexe méthodologique présentant les méthodes de calcul utilisées, notamment en matière de reconstitution de base taxable, la présentation des dépenses fiscales dont le projet de loi de finances propose la création et la totalisation de la somme des dépenses fiscales.

– Améliorer le chiffrage et l’évaluation des dépenses fiscales

Il est nécessaire de progresser dans l’exhaustivité du chiffrage des dépenses fiscales et d’améliorer sa qualité. En outre, un éclairage approfondi doit être apporté sur les principaux écarts qui apparaissent entre la prévision et l’exécution.

L’évaluation des dépenses fiscales doit devenir plus systématique. Il faut d’abord généraliser l’utilisation d’indicateurs de performance. Il est également nécessaire de renforcer les exigences d’évaluation ex ante en subordonnant la création de toute nouvelle dépense fiscale à la réalisation d’une étude d’impact. Dans cette optique, il serait utile de définir une grille d'analyse commune à tous les ministères qui permettrait de structurer le dialogue entre le ministère qui souhaite la création de la dépense et l'administration financière et obligerait le ministère dépensier à justifier qu’une intervention financière est nécessaire, qu’elle doit prendre la forme dépense fiscale plutôt que d’une dépense budgétaire.

● Durcir les conditions de création et de pérennisation des dépenses fiscales

Il paraît indispensable de durcir les conditions de création des dépenses fiscales et de faire en sorte que le choix de recourir à ce type de dépense réponde à la rationalité économique davantage qu’à une solution de facilité. Plusieurs mesures sont envisageables.

– Limiter la durée de vie des dépenses fiscales

Une fois créées les dépenses fiscales restent en vigueur même lorsqu’elles ont pu perdre leur utilité. Les dépenses fiscales, au moins pour celles qui se rattachent à un programme budgétaire (31), ne doivent être autorisées que pour une durée limitée, au maximum trois ans, cadre temporel de la programmation budgétaire. Leur reconduction devra nécessiter une nouvelle intervention du législateur. Cette limitation temporelle créera une incitation à l’évaluation et permettra de favoriser la disparition discrète de dépenses fiscales inefficientes.

– Créer une norme d’évolution spécifique pour les dépenses fiscales

Les dépenses fiscales servent en partie à contourner la rigueur de la norme de dépense. Ce constat conduit naturellement à proposer de les y soumettre. L’inclusion des dépenses fiscales dans la norme de dépense existante est une solution a priori séduisante. Elle garantirait une totale fongibilité entre dépenses directes et dépenses fiscales, rendrait théoriquement possible les arbitrages entre les deux types de dépenses et permettrait de responsabiliser davantage les ministères.

Mais la mauvaise qualité du chiffrage des dépenses fiscales et le caractère non limitatif de ces dépenses – la dépense fiscale est accordée à guichet ouvert et il n’est pas possible de la geler en cours d’année par simple décret  – s’opposent à ce qu’elles soient intégrées dans la norme de dépenses budgétaire (même en limitant l’exercice aux seules mesures nouvelles). Une inclusion des dépenses fiscales dans la norme existante affaiblirait en pratique la force contraignante de cette dernière. Une illustration de cette difficulté peut être donnée à l’aune de l’exercice 2007 : en exécution le coût de 16 dépenses fiscales s’est avéré supérieur d’au moins 50 millions d’euros aux estimations initiales et le montant cumulé des écarts entre prévision et exécution pour toutes les dépenses fiscales a atteint presque 4 milliards d’euros !

La prudence recommande donc, dans un premier temps, de concevoir une norme de dépense ad hoc applicable aux seules dépenses fiscales. L'exercice demeure délicat compte tenu des caractéristiques des dépenses fiscales. Un effort de réflexion doit être entrepris s’agissant du champ de cette norme, de la détermination de son taux d’évolution et des possibilités de sanctionner ses éventuels dépassements.

Si la simplicité plaide pour limiter la norme aux créations et extensions résultant d'actes normatifs nouveaux, il parait souhaitable au Rapporteur général de prendre en compte le stock de dépenses fiscales. Il s'agit non seulement de discipliner les projets de dépenses nouvelles mais également de tenir compte du dérapage budgétaire des dépenses fiscales existantes. Le Canada a mis en place une norme de dépense fiscale entre 1980 et 1994, en la limitant aux nouvelles dépenses créées chaque année, mais l’expérience n’a pas été probante.

Il conviendra d’intégrer l’évolution de la norme de dépenses fiscales dans la programmation pluriannuelle. Un plafond sur trois ans et des plafonds annuels devront être définis. La fixation du taux de progression de la norme doit être réaliste mais aucun argument convaincant ne s’oppose à l’alignement, à terme, de la norme ad hoc sur le « zéro volume ».

La création d’une norme de dépenses fiscales ne doit pas uniquement servir à renforcer l’information du Parlement. Le Rapporteur général souhaite qu’un dépassement en exécution de la norme de dépenses fiscales prévue dans la loi de finances initiale puisse être sanctionné, en intégrant le montant du dépassement dans la norme prévue pour l’année suivante.

Dans cette optique, le Rapporteur général propose de :

– faire figurer dans le fascicule « Évaluation des voies et moyens » une présentation de l’exécution des dépenses fiscales du dernier exercice clos et de l’exercice en cours, mettant en évidence les éventuelles dérives constatées ;

– présenter, dans l’exposé des motifs de l’article 1er de la loi de finances initiale (autorisation de percevoir les impôts), un objectif de dépenses fiscales (ODF) pour l’année ;

– inscrire dans les dispositions fiscales de la loi de finances initiale les mesures d’ajustement destinées à corriger les écarts entre l’objectif de dépenses fiscales et les dépenses constatées.

À terme, une fois la définition et le suivi de la dépense fiscale mieux établis, il sera sans doute nécessaire de modifier la LOLF pour permettre au Parlement de voter chaque année l’objectif de dépense fiscale.

– Réserver la création des dépenses fiscales aux lois de finances

Afin de faciliter le respect de la norme de dépense fiscale, il serait souhaitable de réserver la création des dépenses fiscales à la loi de finance en modifiant la Constitution.

Une solution moins radicale consiste à conditionner le maintien en vigueur des dépenses fiscales instaurées en loi ordinaires à leur ratification dans la plus prochaine loi de finances (32). Cette règle permettrait aux lois sectorielles de garder une cohérence d’ensemble.

Le Conseil de modernisation des politiques publiques de décembre 2007 a annoncé qu’il reviendrait au prochain conseil d’orientation des finances publiques de travailler sur les modalités de mise en oeuvre des mesures qu’il a proposées pour assurer le pilotage des dépenses publiques.

Le Rapporteur général souhaite que le Conseil d’orientation des finances publiques se réunisse le plus rapidement possible.

Décisions prises par le Conseil de la modernisation des politiques publiques
en matière de pilotage des finances publiques du mercredi 12 décembre 2007

● Orientations de la politique publique :

Le Gouvernement a défini une politique claire en matière de prélèvements obligatoires :

– dès 2007, un allégement de la fiscalité pesant sur les revenus du travail, avec notamment les mesures prises dans le cadre de la loi sur le travail, l’emploi et le pouvoir d’achat (pas d’impôt sur le revenu et allégements de charges sur les heures supplémentaires) et le bouclier fiscal ;

– une revue générale des prélèvements obligatoires, en cours, qui vise à simplifier notre système d’imposition et à réduire les prélèvements obligatoires sur dix ans.

Au-delà, il faut également assurer une discipline collective plus grande pour limiter les dépenses fiscales aux dispositions réellement nécessaires et pour lesquelles le recours à un dispositif fiscal, plutôt qu’à une dépense budgétaire, a fait la preuve de sa plus grande efficacité.

● Définir des règles d’adoption plus strictes pour les dépenses fiscales :

Afin de contribuer à la baisse de nos taux d’imposition et de réduire le « mitage » actuel des recettes, il convient d’améliorer les règles de gouvernance des dépenses fiscales et des mesures de même nature en matière de finances sociales.

Toute création de dépense fiscale nouvelle sera subordonnée à la réalisation d’une étude d’impact préalable et comportant une comparaison des outils fiscaux et budgétaires. Par principe, les dépenses fiscales nouvelles seront limitées dans le temps et leur renouvellement conditionné à la réalisation d’une étude d’impact. Enfin, l’évolution de la liste des dépenses fiscales sera exposée chaque année dans une annexe au PLF qui présentera les règles conduisant à faire le partage entre dépenses fiscales et dispositions constitutives de la norme fiscale.

Des règles comparables relatives à la limitation dans le temps, à l’obligation d’étude d’impact initiale et d’examen périodique de l’efficacité socio-économique s’appliqueront aux mesures d’exonérations de cotisations sociales et aux dispositifs affectant l’assiette des cotisations et contributions de sécurité sociale.

Par ailleurs, toutes les dispositions fiscales, y compris celles qui sont actuellement présentées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, seront incluses au projet de loi de finances, afin d’assurer une meilleure cohérence et une plus grande lisibilité des évolutions fiscales de l’année.

Enfin, il serait souhaitable qu’un plafond de dépenses fiscales soit mis en place, afin que la création de nouvelles dépenses fiscales ne constitue pas un moyen de contourner la norme de dépenses qui s’applique au budget de l’État.

● Calendrier de mise en œuvre

Le Conseil de modernisation des politiques publiques demande au prochain conseil d’orientation des finances publiques de travailler sur les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions, ce qui permettra une concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, et en particulier le Parlement.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans sa séance du 16 avril 2008, la Commission a procédé, sur le rapport de M. Gilles Carrez, Rapporteur général, à l’examen du rapport d’information sur les premiers résultats de l’exécution budgétaire pour 2007.

Le Rapporteur général a jugé indispensable de faire un point, dès à présent, sans attendre la loi de règlement et le débat d’orientation budgétaire, sur la situation des finances publiques. Celles-ci sont en effet en « convalescence ». Si le déficit budgétaire de l’État pour 2007 est bel et bien inférieur aux prévisions de la loi de finances initiale, ce constat masque des phénomènes inquiétants qui militent pour un approfondissement des règles de gouvernance de nos finances publiques. L’ordre du jour de l’Assemblée nationale au cours des prochains mois devrait permettre d’y remédier, puisque le prochain débat d’orientation budgétaire posera les premiers jalons de la programmation pluriannuelle des dépenses, et qu’une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques devrait être débattue avant l’examen du prochain budget.

Le Rapporteur général a souhaité attirer l’attention de la Commission sur le mécanisme récurrent de révision des prévisions de croissance. Il a rappelé qu’en juin 2007 le Gouvernement a réajusté de 0,5 point le taux de croissance pour 2005. Cette pratique conduit à relativiser les débats sur la croissance et pose la question de l’élasticité des recettes fiscales par rapport à la croissance. En effet, si la théorie économique nous enseigne de retenir une élasticité unitaire sur longue période, les derniers exercices attestent d’une élasticité supérieure.

S’agissant de l’exécution des dépenses, l’enveloppe votée par le Parlement a été respectée, une économie de l’ordre de 50 millions d’euros ayant même été réalisée. Cette exécution a été rendue possible par une gestion infra-annuelle rigoureuse. Premièrement, les reports de crédits de 2006 vers 2007 ont été limités. Deuxièmement, la bonne tenue des recettes fiscales n’a pas nécessité d’annulations « sèches » de crédits, la réserve de 5,4 milliards d'euros ayant permis de redéployer des crédits vers de nouvelles dépenses, le reste ayant été « rendu » aux gestionnaires. Ce résultat est d’autant plus méritoire que la norme de dépenses appliquée à 2007 était sensiblement plus stricte qu’auparavant, suivant l’objectif ambitieux d’une réduction des dépenses de 1 % en volume. Le respect de cet objectif a dégagé une économie de près de 2 milliards d'euros par rapport à la règle de stabilisation en volume.

Ce constat doit cependant être relativisé. Le respect de la norme de dépenses a été assombri par la reconstitution d’une dette de 1,8 milliard d'euros à l’égard des organismes de sécurité sociale. Or, le calcul du déficit de l’État s’effectue selon les règles de la comptabilité budgétaire, sans tenir compte de la dette à l’égard de la sécurité sociale. En revanche, celle-ci figure dans les comptes des organismes sociaux, établis en comptabilité de droit constaté. Cette différence de traitement devrait inciter à éviter de sous doter les transferts de l’État à destination de la sécurité sociale, tels que les compensations d’exonérations de charges sur les contrats aidés ou encore des prestations comme l’allocation de parent isolé ou l’allocation pour adulte handicapé. Ainsi, l’exécution du budget 2007 montre les limites d’une norme de dépenses plus stricte que l’inflation. Il est indéniablement préférable de prévoir une norme « zéro volume » appliquée à un périmètre élargi. C’est précisément le choix fait par la loi de finances pour 2008, qui a étendu la norme « zéro volume » aux prélèvements sur les recettes de l’État et aux nouvelles affectations de ressources à ses opérateurs.

Les recettes fiscales nettes ont été supérieures d’un milliard d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale. Cependant, ce chiffre doit être rapporté aux 10 milliards d'euros d’excédents constatés en 2006. Le montant total des recettes fiscales nettes est très proche en exécution de celui qui était prévu dans la loi de finances initiale, cette adéquation masquant des évolutions contraires qui se sont compensées entre elles. D’une part, l’évolution tendancielle spontanée des recettes fiscales a été plus dynamique que celle prévue par la loi de finances, pour environ 6,8 milliards d'euros. D’autre part, certaines dépenses fiscales décidées antérieurement ont été sous-évaluées en loi de finances pour 2007, occasionnant un décalage de près de 3,9 milliards d'euros, dû en particulier au dérapage du crédit d’impôt développement durable. En outre, ces sous-évaluations se sont conjuguées aux coûts des mesures nouvelles et nouveaux transferts adoptés en cours d’exercice, qui ont grevé l’exécution de 2,6 milliards d'euros.

Le Rapporteur général a souhaité attirer l’attention de la Commission sur deux facteurs de moindre dynamisme des recettes fiscales en 2007. Premièrement, les recettes nettes d’impôt sur le revenu sont inférieures de 1,5 milliard d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale. Cette situation inédite est due en partie à la sous-évaluation de l’impact de la baisse du chômage sur le coût de la prime pour l’emploi. En effet, celle-ci a représenté 4,2 milliards d'euros en 2007, dont environ 500 millions d'euros à destination de nouveaux bénéficiaires. Deuxièmement, la hausse du coût du crédit d’impôt développement durable par rapport à la prévision de la loi de finances initiale s’élève à 900 millions d'euros en 2007. Son coût total est ainsi passé de 900 millions d'euros en 2006, à 1,8 milliard d'euros en 2007. Il est estimé à 2,4 milliards d'euros pour 2008. Cette croissance a conduit le Gouvernement à restreindre par voie réglementaire, en novembre 2007, le champ des dépenses éligibles à ce crédit d’impôt.

Pour leur part, les recettes non fiscales ont été davantage sollicitées en 2007. Mais l’INSEE a requalifié certaines recettes en opérations patrimoniales, pour le calcul du déficit public au sens du traité de Maastricht. C’est le cas de la soulte versée par le service annexe d’amortissement de la dette ferroviaire (SAAD) en contrepartie de la reprise par l’État de la dette de la SNCF, pour un montant de 640 millions d'euros. C’est également le cas des recettes émanant de la Coface, inscrites en loi de finances initiale pour 2,5 milliards d'euros, puis en loi de finances rectificative pour 2,9 milliards d'euros. L’INSEE a considéré que l’État ne peut s’octroyer une recette supérieure au résultat d’exploitation de la Coface, et décidé de requalifier la fraction de la recette dépassant ce résultat courant, soit 1,3 milliard d'euros. L’ensemble des requalifications opérées par l’INSEE représente environ 0,2 point de PIB. Ainsi, le déficit de l’ensemble des administrations publiques est passé en exécution de 2,4 % à 2,7 % du PIB, cette dégradation se décomposant de la manière suivante : – 0,2 pour l’État, – 0,2 pour les administrations publiques locales, et + 0,1 pour les organismes de sécurité sociale.

Le déficit budgétaire est inférieur aux prévisions de 3,5 milliards d'euros, mais en augmentation toutefois de 2,7 milliards d'euros par rapport à l’exécution 2006. L’excédent primaire est passé de 2,7 milliards d'euros en 2006 à 0,9 milliard d'euros en 2007, et le solde stabilisant la dette de l’État n’a été atteint en 2007 que d’extrême justesse. Au total, la dette publique est passée de 63,6 % du PIB à la fin 2006 et 64,2 % du PIB à la fin 2007.

Le Rapporteur général a ensuite insisté sur la nécessité d’avancer des propositions afin d’améliorer la gouvernance des finances publiques, en particulier en ce qui concerne les dépenses fiscales. En effet, celles-ci ont progressé, de la loi de finances pour 2007 à la loi de finances pour 2008, de 7,1 %, contre 1,6 % pour la norme de dépense élargie. Il importe donc de renforcer la connaissance des dépenses fiscales pour mieux cerner l’enjeu budgétaire. Cela implique de clarifier la définition des dépenses fiscales, de renforcer la transparence de leur recensement, d’en améliorer le chiffrage et l’évaluation.

De plus, il faut durcir les conditions de création et de pérennisation des dépenses fiscales, par exemple en limitant leur durée de vie. L’intégration des dépenses fiscales dans la norme de dépense actuelle risque de la fragiliser. Il faut donc créer une norme spécifique d’évolution intégrée dans la programmation pluriannuelle, en instituant un objectif de dépense fiscale (ODF) qui pourrait figurer dans l’exposé des motifs de l’article premier de chaque loi de finances initiale. Le dépassement en exécution de l’ODF devra être sanctionné par des mesures d’ajustement inscrites dans une prochaine loi de finances.

L’idéal serait de réserver la création des dépenses fiscales aux lois de finances. Mais une telle limitation poserait des problèmes constitutionnels, en restreignant le droit d’amendement des parlementaires. Une autre solution consiste à faire ratifier par les lois de finances les dépenses fiscales créées par la loi ordinaire, sur le modèle de la proposition de loi organique adoptée par le Sénat qui impose la ratification des exonérations de cotisations sociales en loi de financement de la sécurité sociale.

En tout état de cause, la réflexion autour du pilotage des dépenses fiscales est d’autant plus urgente qu’on voit se multiplier, ces dernières semaines, les initiatives de tel ou tel ministre qui espère échapper à la norme de dépense par le biais de nouvelles dépenses fiscales.

Le Rapporteur général a donné des premières indications sur l’exécution du budget 2008, en précisant que les mises en réserve s’élèvent à 7,2 milliards d’euros et les reports depuis 2007 à 3,8 milliards d’euros. Le déficit public attendu a été révisé à 2,5 % du PIB. A l’heure actuelle, le rythme des dépenses et des recettes ne connaît pas d’évolution sensible par rapport à celle constatée l’année dernière à la même époque.

Le Président Didier Migaud s’est interrogé sur la destination des 5,7 milliards d’euros de crédits mis en réserve en 2007.

Le Rapporteur général a précisé que, sur les 5,7 milliards d’euros mis en réserve, 4 milliards d’euros ont été « dégelés » et 1,7 milliard d’euros ont été redéployés. Il n’y a donc quasiment pas eu d’annulations « sèches » en 2007. En ce qui concerne 2008, le ministre des comptes publics a indiqué que, sur les 7,2 milliards d’euros mis en réserve, le montant des annulations dépendra des aléas de l’exécution, le solde ayant vocation à être redéployé.

En réponse à M. Henri Emmanuelli, le Président Didier Migaud a précisé que les 5 milliards d’euros d’économies annoncés par le ministre des comptes publics ne prendront effet qu’à moyen terme, et doivent être distinguées des mesures de régulation décidées pour 2008.

M. Jérôme Cahuzac a estimé que la situation de nos finances publiques est bien plus difficile que ne le pense le Rapporteur général. Entre l’alourdissement du déficit et la dérive de la dette publique, il faut parler d’une aggravation plus que d’une convalescence. En outre, cette aggravation est intervenue alors même que les prévisions de croissance pour 2007 ont été quasiment respectées. Qu’en sera-t-il en 2008, alors que plus personne ne croit réalisable l’objectif de croissance de 2 % retenu par le Gouvernement ? On s’oriente donc vers une annulation sèche de la moitié des crédits mis en réserve, ce qui serait inédit dans l’histoire récente de nos finances publiques. Il est urgent de clarifier les relations entre l’État et la sécurité sociale. Le déficit du régime général s’aggravant, quelle décision va être prise ? Transférer cette dette à la CADES et, par conséquent, augmenter la CRDS ? La transférer à l’État, et augmenter d’autant la dette de celui-ci ? Cette situation montre que l’action de M. Xavier Bertrand, qui promettait l’équilibre en 2007 lorsqu’il était secrétaire d’État à l’assurance maladie, n’a pas été très efficace.

Après avoir salué l’intérêt du Rapporteur général pour la prime pour l’emploi, M. Jérôme Cahuzac a souhaité savoir si le Gouvernement envisage de corriger la dérive du crédit d’impôt en faveur du développement durable. Par ailleurs, la révision constitutionnelle en cours peut-elle être l’occasion de mettre en œuvre certaines des pistes évoquées par le Rapporteur général s’agissant du pilotage des dépenses fiscales ? Enfin, que penser des nouvelles niches fiscales qui se profilent dans le domaine de la culture et de l’outre-mer ?

M. Jérôme Chartier a salué le travail conduit par le Gouvernement pour maîtriser les dépenses budgétaires dans un contexte particulièrement difficile et dont la dégradation au second semestre de l’année 2007 ne pouvait pas être prévue. Même en respectant la norme « zéro volume » pour les dépenses, l’objectif de rétablissement des finances à l’horizon 2012 – qui implique une réduction, d’ici là, de la dette publique au rythme d’environ un point de PIB par an – ne pourra pas être atteint sans croissance des recettes, ce qui nécessite, outre la croissance de l’activité qui ne se décrète pas, une maîtrise des dépenses. Comme l’amélioration de l’efficacité de la dépense publique, cette maîtrise des dépenses nécessiterait un certain consensus politique. Tous les exemples étrangers dans lesquels un rétablissement rapide des finances publiques a été obtenu l’attestent. Les rapporteurs spéciaux ont un rôle important à jouer mais leurs recommandations ne sont pas suffisamment suivies. Dans le prolongement de la réflexion demandée au Premier président de la Cour des comptes par le Président de la République, la création d’un système inspiré du National Audit Office britannique et permettant d’associer parlementaires de la majorité et de l’opposition et magistrats de la Cour de la Compte pourrait être étudiée. Les mesures d’économie décidées par cet organisme pourraient être, de droit, intégrées dans la plus prochaine loi de finances. Par ailleurs, il est du devoir de la Commission des finances de lutter contre le recours à la dépense fiscale pour contourner la norme de dépense budgétaire et, plus généralement, de veiller à préserver les recettes. Il convient de réfléchir à la forme que pourrait prendre un engagement très ferme de la Commission sur ce point.

Rappelant que la mission d’information de la Commission sur les niches fiscales achève actuellement ses travaux, le Président Didier Migaud a espéré qu’elle parviendra à des propositions recueillant un large consensus. Il a, par ailleurs, souhaité que le Rapporteur général éclaire la Commission sur les précisions récemment apportées par voie réglementaire au champ du crédit d’impôt en faveur du développement durable.

En réponse aux différents intervenants, le Rapporteur général a apporté les précisions suivantes :

– une dégradation est effectivement constatée entre l’exécution du budget pour 2007 et l’exécution du budget pour 2006. En revanche, il importe de souligner que, comme pour tous les exercices précédents depuis 2004, l’exécution met en évidence la sincérité des prévisions initiales, exception faite des crédits destinés aux organismes sociaux. Si les lois de finances initiales ont prévu des déficits dont on peut regretter le niveau élevé, le solde a toujours été amélioré en exécution, ce qui démontre que les recettes n’ont jamais été surévaluées ;

– s’agissant de l’exercice 2008, le Président de la République a clairement annoncé, lors de la campagne ayant conduit à son élection, sa volonté de faire, cette année, une pause dans la réduction du déficit en relançant l’activité. Les mesures de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat mettent en œuvre cet objectif de relance, en particulier à travers la détaxation des heures supplémentaires. Compte tenu de la conjoncture, il s’agit d’une mesure venant à point nommé et permettant, en revalorisant opportunément le travail, de distribuer immédiatement du pouvoir d’achat pour alimenter la consommation. Le coût de la prime pour l’emploi est passé d’environ 2 milliards d’euros en 2002 à plus de 4,2 milliards d’euros. Cette progression s’est faite sous l’impulsion de l’actuelle majorité qui a eu le mérite de développer, sans esprit partisan et dans un large consensus, ce dispositif créé par un gouvernement socialiste. Elle permet de soutenir la consommation selon des modalités complémentaires à celles de la détaxation des heures supplémentaires. Il convient de prendre en compte le rôle de ces deux dispositifs dans la réflexion sur le revenu de solidarité active ;

– le volume des crédits mis en réserve atteste, lui aussi, du sérieux de la prévision budgétaire pour 2008. Une réserve de précaution destinée à financer les inévitables redéploiements liés aux évolutions de l’exécution est évidemment toujours nécessaire. L’annulation nette de crédits s’inscrit dans une logique différente : elle ne sera nécessaire que si les recettes sont inférieures aux prévisions ou si certaines dépenses « dérapent ». Il a déjà été procédé de manière très importante à de telles annulations, par exemple lors de l’exécution de 2003, au cours de laquelle environ 6,6 milliards d’euros de crédits ont été annulés. À l’heure actuelle, rien ne permet de dire que les prévisions s’avéreront erronées et les derniers exercices attestent que les dénonciations rituelles d’une surévaluation des recettes se sont systématiquement révélées infondées.

Le Rapporteur général a également insisté sur la nécessaire maîtrise de la dépense publique, qui consiste à « dépenser mieux », pour reprendre les termes du groupe de travail dirigé en 1999 par MM. Laurent Fabius et Didier Migaud en préparation de la LOLF. En la matière, les outils ne manquent pas, qu’il s’agisse des expériences étrangères de revues de programmes, des audits de modernisation effectués sous la législature précédente et, tout récemment, des propositions du Conseil de modernisation des politiques publiques dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP). Beaucoup des réformes proposées à l’issue de ces travaux ne demandent d’ailleurs plus qu’une chose : que le politique, et tout spécialement le Parlement, s’en saisisse. Par exemple, est-il justifié qu’après les deux grands mouvements de décentralisation de 1982 et 2004, l’État n’ait pas davantage réduit son réseau de services déconcentrés aux plans régional et départemental ? Autre exemple, qui concerne la politique familiale : est-il encore légitime de maintenir le système, créé en 1945, de la demi-part supplémentaire bénéficiant aux personnes vivant seules dont les enfants ne sont plus à leur charge ?

Pour autant, la maîtrise des dépenses doit aussi s’accompagner d’une « protection » des recettes publiques. Il convient donc d’être raisonnable dans la politique d’allègement des prélèvements obligatoires. Ainsi, la suppression de l’imposition forfaitaire annuelle (IFA), qui coûterait 1,6 milliard d’euros à l’État, doit encore faire l’objet d’une réflexion d’ici au projet de loi de finances pour 2009. De même, les dépenses fiscales doivent être mieux encadrées : dès 2009, l’État pourrait, en instituant un objectif de dépense fiscale, se fixer une prévision d’évolution globale de ces dépenses, afin de permettre un contrôle de leur éventuelle « dérive » en exécution, qui justifierait des mesures d’ajustement dans une prochaine loi de finances. Plus généralement, il s’agit d’aller jusqu’au bout de la logique de « coûts complets » de la LOLF en responsabilisant davantage les responsables de programme et, dans une perspective pluriannuelle, les responsables de mission – c’est-à-dire les ministres.

Le Président Didier Migaud a ajouté que, dès lors que beaucoup de dépenses fiscales ont des objectifs d’incitation, certaines sont appelées à disparaître une fois qu’elles ont épuisé leurs effets. Mais sans doute le Parlement doit-il prendre toute sa part pour les « aider à mourir ».

M. Jean-François Lamour a indiqué qu’il est souvent politiquement délicat de supprimer des avantages fiscaux. C’est pourquoi une plus grande implication des rapporteurs spéciaux, dont le rôle ne doit pas se limiter à l’examen des crédits, semble indispensable.

M. Yves Censi a souligné que certaines dépenses fiscales peuvent se livrer une concurrence entre elles et qu’il faut donc, à une vision sectorielle, préférer une cohérence d’ensemble.

S’agissant des dépenses fiscales, M. Michel Bouvard a estimé qu’il faut revenir à l’esprit de la LOLF consistant à évaluer le coût total des politiques publiques et non pas seulement leur coût en crédits budgétaires. Les dépenses fiscales sont rattachées aux programmes. Il faut donc regarder, dans le cadre de l’examen de ces programmes, si elles apportent une valeur ajoutée par rapport aux dépenses budgétaires et, dans la négative, procéder à un « recalibrage ».

Rappelant que les modifications apportées l’été dernier à la maquette budgétaire ont été décidées très rapidement compte tenu des circonstances politiques, M. Michel Bouvard a fait part de son souhait que les futures modifications se fassent en collaboration avec le Parlement, afin de préserver le droit d’amendement des parlementaires et d’éviter la constitution de programmes trop importants, notamment pour la mission Défense. Il existe une vraie difficulté avec les missions interministérielles. Ces missions devraient être transitoires et les périmètres ministériels devraient à terme rejoindre celui de ces missions. Le pilotage d’une politique publique impose en effet qu’en seul ministre en ait la charge. Il faudra que le Gouvernement travaille sur cette question.

M. Alain Cacheux a indiqué que, pour procéder à des toilettages de dépenses fiscales, il faudrait pouvoir disposer d’éléments d’évaluation sur leur efficacité.

Le Président Didier Migaud a souligné qu’un travail important d’évaluation des dépenses fiscales doit être fait à l’occasion de l’examen des rapports annuels de performances.

Le Rapporteur général a ajouté que la question de la dette de la sécurité sociale est essentielle. Le déficit du régime général de sécurité sociale a été réduit en exécution 2007 par rapport à la prévision, s’établissant à 9,4 milliards d’euros au lieu des 11,7 milliards d’euros prévus, notamment grâce au dispositif dit « du Comité d’alerte ». La dette issue de ce déficit ne peut pas être logée au sein de la CADES car, en vertu de la LOLFSS, cela obligerait à prévoir des transferts de recettes supplémentaires. Elle oblige donc la Caisse des dépôts et consignations à faire des avances de trésorerie à l’ACOSS. Cette avance se monte aujourd’hui à 35 milliards d’euros, ce qui pose un vrai problème.

M. Michel Bouvard a précisé les conditions de gestion de la dette de l’ACOSS par la Caisse des dépôts et consignations. Fin 2007, la CDC a signalé aux pouvoirs publics que cette gestion devient problématique puisqu’elle oblige la Caisse à trouver des ressources extérieures trop coûteuses. La CDC ne sait pas gérer la dette de l’ACOSS au-delà d’un seuil de 36 milliards d’euros. En outre, le plafond des avances de trésorerie à l’ACOSS, fixé en loi de financement de la sécurité sociale, est presque atteint alors que l’on n’est qu’en début d’année.

Le Président Didier Migaud s’est déclaré soucieux de l’avenir du Fonds de réserve des retraites, et a proposé d’organiser une audition sur ce thème.

M. Michel Bouvard a rappelé que ce fonds n’est plus abondé par des recettes exceptionnelles de privatisation. Il importe aujourd’hui de déterminer quel sera son avenir et quand ses moyens seront engagés. Cette information est essentielle puisqu’elle détermine les types de placements que le fonds doit opérer. Pour l’instant, le fonds a privilégié des placements en actions dans la mesure où il n’est pas soumis à une contrainte de rentabilité immédiate.

Le Rapporteur général a estimé souhaitable que se dégage un consensus au sein de la Commission, et plus généralement au sein du Parlement, sur le rôle du Fonds de réserve des retraites.

La Commission a autorisé, en application de l’article 145 du Règlement, la publication du rapport d’information.

1 () Le solde budgétaire a été rendu public par le ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique publique le 22 janvier et présenté à la Commission des finances le 29 janvier (voir le compte-rendu n° 48). Depuis, plusieurs retraitements comptables sont intervenus, à l’impact négligeable sur le déficit (minoré d’environ un million d’euros). Le présent rapport est établi à partir des données fournies par la Direction générale de la comptabilité publique (DGCP), arrêtées au 7 mars 2008.

2 () Article 82 de la loi de finances rectificative pour 2007 (n° 2007-1824 du 25 décembre 2007).

3 () L’AUP a succédé à l’Agence centrale des organismes d’intervention dans le secteur agricole (ACOFA) depuis le 31 décembre 2006.

4 () Ce chiffre pourra encore être révisé. On rappellera que le taux de croissance en volume pour 2005 estimé à 1,2 % au début de l’année 2006 a été révisé ensuite à la hausse à 1,7 %.

5 () Premiers résultats des comptes nationaux des administrations publiques pour 2007.

6 () Les crédits du budget général reportés de l’exercice 2007 vers l’exercice 2008 représentent 3,8 milliards d’euros.

7 () Cette dette de l’État concernerait des compensations d’exonérations ciblées de cotisations sociales pour 1,5 milliard d’euros et des remboursements de prestations servies par les organismes sociaux pour 300 millions d’euros. Il convient cependant de rappeler que, s’agissant d’obligations entre administrations publiques, ces phénomènes sont neutres sur le déficit public au sens du traité de Maastricht.

8 () Voir le Rapport général sur le projet de loi de finances pour 2008, n° 276, Tome 1, octobre 2007, p. 20-31.

9 () Voir infra, II, B.

10 () Est compris dans le chiffrage des transferts de recettes, à hauteur de 300 millions d’euros, le coût d’une mesure de pur périmètre prévue par l’article 139 de la loi de finances rectificative pour 2006 consistant en la création d’un prélèvement unique sur le produit brut des paris du PMU. Ce prélèvement unique a notamment remplacé le droit de timbre prévu à l’article 919 du code général des impôts, qui constituait une recette fiscale. Il est comptabilisé en recette non fiscale.

11 () Estimation DGTPE

12 () Après déduction des remboursements et dégrèvements d’impôt sur le revenu et de PPE.

13 () Cette cotisation est due par les redevables de la taxe professionnelle pour leurs établissements situés dans des communes où le taux global de la taxe professionnelle est inférieur au taux global moyen constaté au plan national l’année précédente. Elle est assise sur les bases nettes imposables à la taxe professionnelle de ces établissements. Son taux est d’autant plus élevé que le taux global de taxe professionnelle de la commune est faible.

14 () 45 millions d’actions EDF ont été cédées pour un montant d’environ 3,7 milliards d’euros. Cette somme doit permettre le lancement du plan d’investissement pour la modernisation des universités.

15 () Hors mesure de régularisation des pensions de décembre 2005 en 2006 et hors produit des cessions de titres EDF en 2007.

16 () La charge nette de la dette de l’État après swaps a atteint 38,4 milliard d’euros en 2006 et 39,3 milliards d’euros en 2007.

17 () Le solde stabilisant, qui représente le niveau du déficit budgétaire permettant de stabiliser le poids de la dette dans le PIB, est égal au produit du taux d’endettement de l’État et du taux de croissance de l’économie. La stabilité du taux d’endettement est réalisée dès lors que le numérateur – la dette – croît au même rythme que le dénominateur – le PIB. En pratique, toutefois, l’évolution de la dette résulte non seulement du déficit, mais aussi des acquisitions et cessions d’actifs.

18 () En application de l’article 50 de la LOLF, le rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances « explicite le passage, pour l’année considérée et celle qui précède, du solde budgétaire à la capacité ou au besoin de financement de l’État tel qu’il est mesuré pour permettre la vérification du respect des engagements européens de la France (..) ». Dans le rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2008, le Gouvernement estimait que pour 2007 le déficit au sens de la comptabilité nationale serait inférieur de 3,4 milliards d’euros à la prévision révisée du solde budgétaire. À titre d’exemple, le retraitement du prélèvement sur la COFACE n’avait pas été anticipé.

19 () À l’époque (automne 2007), le ratio d’endettement à la fin 2006 était arrêté à 64,2 %. En mars 2008, il a été revu à la baisse par l’INSEE, à 63,6 %, du fait d’une révision à la hausse du PIB 2006.

20 () Sous l’effet, notamment, des bons résultats de l’assurance chômage : l’Unédic a dégagé un excédent de 3,5 milliards d’euros en 2007.

21 () Loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

22 () Voir supra, I, A.

23 () Remboursement des dettes antérieures à 2007 à l’égard du régime général ; meilleure budgétisation des crédits destinés à des prestations sociales ; abondement du « panier de recettes » compensant les allégements de charges sur les bas salaires ; compensation intégrale des exonérations sociales sur les heures supplémentaires créées par la loi TEPA du 21 août 2007.

24 () Au bout de deux ans, une révision des plafonds par mission sera cependant possible, afin d’ajuster, dans le respect du plafond global des dépenses du budget général, la troisième et dernière année de la programmation. Concrètement : en 2008 seront définis les plafonds 2009-2011, qui seront ensuite déclinés par la loi de finances pour 2009 au niveau des programmes ; en 2009, la loi de finances déclinera par programmes les plafonds 2010 ; en 2010 seront définis les plafonds 2011-2013 (le cas échéant, avec un ajustement, par rapport à la programmation 2009-2011, de l’annuité 2011), puis les plafonds 2011 seront déclinés par programmes en loi de finances ; en 2011, les plafonds 2012 seront déclinés par programmes en loi de finances ; en 2012 seront définis les plafonds 2013-2015, etc.

25 () Voir supra, I, A.

26 () Devenu depuis les Conseil des prélèvements obligatoires.

27 () Conseil des impôts, XXIème rapport au Président de la République, septembre 2003,  « La fiscalité dérogatoire – Pour un réexamen des dépenses fiscales ».

28 () Les dépenses fiscales sur impôts locaux sont recensées dans le fascicule « Evaluation des voies et moyens » depuis 2007.

29 () Les onze missions bénéficiant d’un total de dépenses fiscales supérieur à 1 milliard d’euros : 1) solidarité, insertion et égalité des chances, 2) développement et régulation économiques, 3) ville et logement,
4) travail et emploi, 5) engagements financiers de l'État, 6) agriculture, pêche, forêt et affaires rurales,
7) écologie, développement et aménagement durables, 8) Outre-mer, 9) recherche et enseignement supérieur, 10) santé, 11) sport, jeunesse et vie associative.

30 () Le Conseil des impôts a proposé de distinguer au sein des dépenses fiscales recensées et évaluées les mesures relevant « des modalités de calcul de l’impôt », ne visant qu’un objectif fiscal (prise en compte la capacité contributive, évitement des doubles impositions, simplification du recouvrement) des mesures spécifiques liées à un objectif de politique publique non exclusivement fiscal, qualifiées de dépenses fiscales au sens strict. Outre cette distinction, un critère de classement opérationnel pourrait consister à faire la part entre mesures incitatives, visant à influer sur les comportements (comme par exemple le crédit d'impôt en faveur des économies d'énergie), et mesures redistributives, destinées à accroître l'équité verticale ou horizontale (comme par exemple l’exonération des prestations familiales) ou encore à aider des catégories de contribuables sans influer sur leurs comportements (comme par exemple le remboursement de TIPP de certains véhicules routiers).

31 () Comme le soulignait le Conseil des impôts, les allégements structurels considérés comme des dépenses fiscales, notamment quand ils sont institués à des fins de simplification, pourraient ne pas être concernés par cette règle.

32 () Dans cet esprit, le Sénat a adopté le 22 janvier dernier la proposition de loi organique présentée par le sénateur Jean Vasselle tendant à prévoir l'approbation par les lois de financement de la sécurité sociale des mesures de réduction et d'exonération de cotisations et de contributions de sécurité sociale adoptées en cours d’exercice.


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