N° 1161 - Rapport d'information de M. Hervé Mariton déposé en application de l'article 146 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan sur la politique tarifaire de la SNCF




N° 1161

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 octobre 2008

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

sur la politique tarifaire de la SNCF

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Hervé Mariton,

Député.

INTRODUCTION 7

I.– LE YIELD MANAGEMENT À LA SNCF : UNE CONDITION DE SA POLITIQUE DE VOLUME ET DE RENTABILISATION DE LA GRANDE VITESSE 9

A.– LES DIFFÉRENTS TARIFS NON CONCERNÉS PAR LE YIELD MANAGEMENT 9

1.– Les tarifs sociaux 9

2.– Les tarifs conventionnels 10

3.– Les tarifs TER 10

4.– Les trains grandes lignes classiques 11

B.– LE YIELD MANAGEMENT POUR LES TRAINS À RÉSERVATION OBLIGATOIRE 11

1.– Éléments de base sur le yield management 12

2.– Le yield management à la SNCF 15

C.– LA RENTABILITÉ DU TGV VITALE POUR LA SNCF 19

1.– Le TGV, moteur du développement et pilier de la santé financière de la SNCF 19

2.– La fréquentation accrue par la tarification d’octobre 2007 21

D.– LE YIELD MANAGEMENT N’EST PAS CONTRAIRE AU SERVICE PUBLIC 22

1.– L’avis du conseil d’État 22

3.– La légalité du yield management 29

4.– L’homologation des tarifs issus du yield management par la SNCF 29

II.– UN OUTIL LARGEMENT UTILISÉ ET COMPATIBLE, SOUS CONDITIONS, AVEC L’INTÉRÊT DU CONSOMMATEUR 33

A.– UN OUTIL LARGEMENT RÉPANDU 33

1.– Le yield management dans les transports 33

2.– Le yield management dans les autres secteurs 35

B.–  LE YIELD MANAGEMENT POUSSÉ À L’EXTRÊME 35

1.– Le yield origine-destination dans le transport aérien 35

2.– Le yield management par origine-destination à la SNCF 36

a) Un accès au train en règle générale indépendant du trajet effectué 36

b) Des cas d’espèces en augmentation 37

C.– LA TARIFICATION N’EST PAS À ELLE SEULE UNE STRATÉGIE MARKETING 37

D.–  LA COMPATIBILITÉ DU YIELD MANAGEMENT AVEC L’INTÉRÊT DU CONSOMMATEUR 38

1.– Le yield management au service du consommateur 38

2.– Le yield management au service de l’entreprise 40

3.– Le prix médian, indicateur de juste prix 40

4.– Yield management et délégation de service public 41

III.– LE DROIT DES CONSOMMATEURS DE CONNAÎTRE LES MÉCANISMES ET LES BÉNÉFICIAIRES DU YIELD MANAGEMENT 43

A..– LA VÉRITÉ DES COÛTS DU TRANSPORT FERROVIAIRE SUR CHAQUE BILLET 43

B.– LE TARIF PROPOSÉ DÉCRYPTÉ AVEC LE PRIX MÉDIAN 43

1.– L’autorité de contrôle favorable à une lisibilité accrue 43

2.– L’obligation d’affichage des prix 44

3.– Les avantages et les inconvénients des guides imprimés 45

4.– Les améliorations proposées par la SNCF 45

5.– Pour l’affichage du prix médian 46

C.– LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE 48

D.– LES GAGNANTS ET LES PERDANTS 49

1.– Les hausses moyennes des tarifs sont conformes à la norme autorisée 49

2.– La transparence et la lisibilité des offres de la SNCF pour les « dégourdis » et les « non dégourdis » 52

3.– Le consommateur flexible et capable d’anticipation doit-il être le gagnant principal du yield management ? 53

4.– Le dilemme du remplissage de dernière minute 55

E.– LE RÉGULATEUR FERROVIAIRE ET LES TARIFS DE LA SNCF 56

EXAMEN EN COMMISSION 57

ANNEXE 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 67

ANNEXE 2 : EXTRAITS DU DOCUMENT « LES TARIFS VOYAGEURS DE LA SNCF – JUILLET 2008 – VOLUME 2 – GAMME TARIFAIRE » 69

ANNEXE 3 : LE CONTINGENTEMENT TARIFAIRE À LA SNCF 89

Propositions

n° 1 : Lors de l’achat d’un billet de TGV, le consommateur a communication du prix médian - hors cartes d’abonnement - du trajet considéré pour l’année civile antérieure.

n° 2 : Tout billet de TGV comporte l’indication du montant du péage acquitté par le voyageur, en euros et en pourcentage de son prix total.

n° 3 : Afin de simplifier et d’unifier le yield management, la différenciation période normale – période de pointe ne s’applique pas à la tarification TGV.

n° 4 : Lors de la réservation à un guichet de gare ou d’agence, le consommateur dispose d’un écran reproduisant le contenu de celui du vendeur ou peut consulter l’écran de ce dernier.

n° 5 : La lutte contre la fraude constitue une priorité de la SNCF. L’identité du bénéficiaire du titre de transport est fixe dès la réservation.

n° 6 : La future commission de régulation des activités ferroviaires (CRAF) pourra décider de se saisir de tout sujet relatif à la tarification des transports ferroviaires de voyageurs.

n° 7 : La tutelle de la SNCF publie un arrêté ministériel annuel d’agrément des tarifs TGV organisé autour des prix médians.

INTRODUCTION

Pourquoi, en 2008, un rapport d’information sur la politique tarifaire de la SNCF ?

– Parce que le train est, pour un nombre croissant de Français, la réponse à l’augmentation et à la volatilité du prix du pétrole et des carburants.

Au moment où la demande de transports collectifs et en premier lieu ferroviaires augmente dans des proportions inédites, les Français ont le droit de comprendre les nouveaux tarifs qui leur sont appliqués par la SNCF, établissement public quelquefois critiqué mais toujours reconnu comme l’un des piliers de la cohésion nationale.

– Parce que le report vers le train d’une bonne partie du trafic routier de voyageurs et de marchandises est essentiel pour le développement durable, la lutte contre le changement climatique et la réduction des pollutions de toutes sortes, comme l’a souligné le Grenelle de l’environnement.

Dans ces circonstances, le consommateur a le droit de connaître le coût d’un comportement plus respectueux de l’écologie s’exprimant par un recours accru au transport ferroviaire.

– Parce que, selon les orientations arrêtées par le Président de la République en conclusion du Grenelle de l’environnement, 2 000 km de nouvelles lignes à grande vitesse devront être lancées d’ici à 2020 et que la part du fret ferroviaire dans le transport de marchandises devra progresser de 25 % d’ici à 2012. Malgré l’engagement d’une participation de l’État à leur financement à hauteur de 16 milliards d’euros, la question du financement de cet objectif majeur est posée.

Le consommateur a le droit de connaître dans quelle mesure le prix des billets de train qu’il achète en plus grand nombre, va ou non contribuer à financer l’avenir du transport ferroviaire.

Placée devant une opportunité et des responsabilités historiques, la SNCF a la responsabilité de se développer par ses propres moyens, sans attendre un surcroît d’aides de l’État.

Sa relation de confiance avec les Français passe par une qualité toujours accrue des services qu’elle leur propose. À ce titre, l’excellence technique qui est reconnue à la SNCF ne pourrait survivre à des avaries techniques trop nombreuses.

Mais cette relation de confiance passe aussi par les tarifs de ses services.

Les moyens sont-ils donnés aux Français de comprendre et de tirer parti des offres multiples que la SNCF leur propose ?

Au-delà de leur rôle dans la politique des transports et dans la lutte contre l’effet de serre, les tarifs de la SNCF sont aussi à considérer dans le cadre de la politique de la consommation et des droits des consommateurs.

En tout état de cause, il revient à la SNCF de mieux informer le consommateur sur la composition de ses coûts de production, de lui démontrer plus clairement comment son intérêt et celui de l’entreprise bénéficient de nouvelles approches de tarification, en bref de mettre toutes les cartes sur la table lorsqu’il s’agit pour le consommateur de payer le prix de son billet de train.

I.– LE YIELD MANAGEMENT À LA SNCF : UNE CONDITION DE SA POLITIQUE DE VOLUME ET DE RENTABILISATION DE LA GRANDE VITESSE

La politique tarifaire de la SNCF comporte plusieurs volets.

Certains tarifs lui sont imposés par l’État, comme les tarifs sociaux. D’autres résultent de conventions avec des tiers. Les interrogations actuelles portent sur ceux des tarifs commerciaux qui sont pratiqués sur les trains à réservation obligatoire. Comme pour ses autres tarifs commerciaux, la SNCF en fait agréer la base par l’État.

La stratégie d’optimisation des prix ne déroge pas à la légalité et joue un rôle essentiel, selon la SNCF, dans sa politique de volume et de rentabilisation de la grande vitesse.

A.– LES DIFFÉRENTS TARIFS NON CONCERNÉS PAR LE YIELD MANAGEMENT

1.– Les tarifs sociaux

Les tarifs sociaux sont régis par la loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982, la loi relative à la lutte contre les exclusions du 28 juillet 1998 et la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) du 13 décembre 2000.

Les tarifs sociaux de la SNCF concernent des catégories spécifiques d’usagers et sont mis en œuvre à la demande de l’État qui verse à l’entreprise publique une compensation financière.

Certains tarifs sociaux ont été créés par la loi :

• le tarif Familles nombreuses créé par la loi du 29 octobre 1921 : dans les familles comptant au moins trois enfants de moins de 18 ans, chacun des deux parents et leurs enfants peuvent disposer d’une carte strictement personnelle donnant droit à une réduction allant de 30 % pour les familles de trois enfants à 70 % pour les familles de 6 enfants. Le bénéfice de la réduction a été prolongé sous condition à plusieurs reprises ;

• le tarif réformes pensionnés de guerre (loi du 29 octobre 1921 et loi du 24 décembre 1940 pour l’extension aux Réformés Pensionnés de la Seconde Guerre mondiale) ;

• le permis de visite aux tombes pour les familles de militaires morts pour la France pendant la guerre de 1914-1918 (loi du 29 octobre 1921) ;

• l’abonnement de travail pour les distances domicile travail jusqu’à 75 km (loi du 29 octobre 1921).

Les autres tarifs ont été créés par la voie réglementaire :

• le billet populaire de congés annuels (décision ministérielle du 9 septembre 1936, dans le prolongement de la loi du 20 juin 1936 instituant le droit à un congé payé annuel étendu aux retraités par la loi du 1er août 1950) ;

• le tarif promenade d’enfants (1) (décision ministérielle d’approbation du 29 décembre 1951) ;

• les abonnements d’élèves, étudiants, apprentis (décision ministérielle d’approbation du 29 décembre 1951)

• le tarif pour les handicapés et leurs accompagnateurs (décision du 30 mars 1955).

Ces tarifs sont définis au niveau national et se déclinent au niveau régional. Ils s’appliquent sur l’ensemble du réseau, quel que soit le jour ou l’horaire, sans aucune restriction, à l’exception des abonnements.

Une carte destinée aux familles de moins de trois enfants et aux familles monoparentales, est actuellement à l’étude.

2.– Les tarifs conventionnels

D’autres tarifs résultent de conventions passées avec la SNCF, comme par exemple les tarifs militaires correspondant à une convention passée avec le ministère de la Défense. Des tarifs de cette catégorie peuvent résulter de conventions de même type passées avec des entreprises.

3.– Les tarifs TER

La SNCF établit les tarifs de base du TER par référence à une règle et un barème kilométriques (voir annexe II). Les différentes cartes de réduction s’appliquent à ces tarifs.

En application de la loi n° 2000-1 208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi SRU), et de son décret d’application n° 2001-1 116 du 27 novembre 2001 relatif au transfert de compétences en matière de transports collectifs d’intérêt régional, les régions peuvent décider d’appliquer des dispositions tarifaires spécifiques dans leur ressort territorial, pour la tarification des services régionaux.

Leurs initiatives visent, en complément des tarifs sociaux et commerciaux nationaux par ailleurs applicables au TER, à mieux répondre aux problématiques spécifiques de déplacements régionales et locales et de rendre le TER plus attractif.

En prolongement des tarifs sociaux nationaux « Abonnement de Travail » et « Abonnement Élève Étudiant Apprenti », trois axes sont développés. L’intermodalité correspond au développement de solutions tarifaires combinées octroyant réduction sur le parcours fer en TER et le parcours urbain en Bus, Métro, Tramway pour les abonnés domicile travail et domicile études. Les dispositions nationales sont élargies en termes de territoire, avec la suppression de la limite des 75 km et des accords interrégionaux, et en termes de bénéficiaires (âge, type d’études, type de travail). De nouveaux tarifs sont offerts aux abonnés avec des réductions ou des avantages le week-end ou pendant les vacances scolaires.

La quasi-totalité des conseils régionaux propose des Cartes « TER Loisir » accordant à tous, des réductions les week-ends, jours fériés et/ou vacances scolaires, dans la proportion de 25 % à 50 % de réduction par rapport au plein tarif selon les régions.

Des tarifications sociales visent les demandeurs d’emploi, les titulaires du RMI, dans certains cas les jeunes et permettent de se déplacer soit à prix réduit (de 50 à 90 % de réduction) soit gratuitement pour un nombre limité ou non de trajets.

4.– Les trains grandes lignes classiques

Les trains classiques de la SNCF font l’objet d’une tarification au kilomètre parcouru, assortie de deux types de périodes, bleues ou blanches.

Les périodes sont des créneaux horaires sur les jours de la semaine type ou bien sur des jours particuliers - fériés ou de départs ou retours de vacances. Les périodes bleues - moins chargées - donnent lieu à des réductions de 25 à 50 % pour les titulaires de certaines cartes commerciales (12-25, Enfant+, Escapades, Senior ou Découvertes). Les périodes blanches, chargées ou de pointe, donnent lieu à des réductions inférieures pour ces mêmes cartes.

B.– LE YIELD MANAGEMENT POUR LES TRAINS À RÉSERVATION OBLIGATOIRE

Les trains à réservation obligatoire de la SNCF font l’objet d’une tarification spéciale, fondée sur les techniques du yield management, et mise en place à partir de 1993.

Le yield management concerne ainsi le TGV mais aussi les trains Corail Téoz (2) et Corail Lunéa (3) et les auto-trains. Les contingents correspondant à des tarifs préférentiels proposés sur d’autres trains sont également gérés avec les techniques du yield management.

1.– Éléments de base sur le yield management

L’encadré suivant présente les différentes acceptions de l’expression yield management selon les domaines d’activité ainsi que la définition couramment admise dans le domaine des transports.

LE YIELD MANAGEMENT, UNE EXPRESSION DIFFICILEMENT TRADUISIBLE

• Yield en anglais signifie rendement.

• L’expression yield management, selon le dictionnaire interactif IATE (Interactive Terminology for Europe) de la Commission européenne, recouvre plusieurs acceptions, en fonction du domaine considéré. Yield management signifie ainsi :

o Tarification en temps réel dans le domaine de la politique commerciale

o Gestion des taux dans le domaine du crédit et de la finance

o Optimisation de la recette unitaire dans le domaine des transports

o Système de gestion de la rentabilité dans les domaines de la politique commerciale, des finances et de la vie économique.

Dans le domaine des transports, le yield management au sens strict, correspond aux techniques de gestion permettant de maximiser la recette par voyageur transporté et par kilomètre parcouru (voyageurs-kilomètres).

Dès lors que le yield management a aussi pour objectif l’optimisation du taux de remplissage, certains praticiens et consultants préfèrent parler de Revenue Management(4).

Afin de souligner les implications stratégiques de la gestion de ses prix par une entreprise, d’autres consultants préfèrent parler de stratégie prix, notion englobante qui va au-delà du yield management et même du revenue management. De leur point de vue, la fixation des prix ne peut, en effet, être indépendante des paramètres stratégiques que sont la qualité du produit ou du service, la concurrence, la communication et la politique de distribution (5).

Le présent rapport utilisera dans la suite l’expression de plus en plus connue de yield management dans l’acception extensive d’un ensemble de techniques permettant de maximiser la recette par voyageur-kilomètre tout en optimisant le taux de remplissage.

Les techniques du yield management sont relativement simples dans leur principe mais d’une grande complexité de mise en œuvre. Trouvant leur origine dans le secteur aérien, ces techniques ont été largement diffusées par les grands systèmes informatisés de réservation comme Amadeus ou Sabre.

L’encadré suivant en expose brièvement les principes de base.

LES PRINCIPES DE BASE DU YIELD MANAGEMENT

La règle de base du yield management est que plus tôt la réservation a lieu, moins cher est le tarif consenti, dans la limite des places disponibles.

Le yield management suppose la mise en place d’une segmentation de la clientèle aussi précise que possible. Il s’agit en effet de proposer à chaque catégorie de clients, le prix correspondant à la valeur qu’il attribue au service (« value to customer »). L’objectif est alors de mobiliser la capacité contributive du consommateur, qui est fonction de son revenu et de la valeur qu’il attribue au service proposé.

En particulier, l’objectif sera d’orienter la demande la moins rémunératrice vers les périodes les plus creuses.

Le yield management nécessite la mise en place de modèles statistiques informatisés d’une grande complexité, reposant sur des historiques de fréquentations précis et fiables. L’intervention en temps réel de spécialistes expérimentés est indispensable pour décider la fermeture ou l’ouverture de contingents de places correspondant à un tarif donné, les contingents étant souvent désignés sous le nom de « boîtes ».

Le yield management peut rencontrer plusieurs types de difficultés. La lisibilité et la compréhension du système de tarification doivent être suffisantes pour ne pas générer de frustration et d’insatisfaction pour la clientèle.

Par ailleurs, il est impératif d’éviter le phénomène dit de dilution, selon lequel des clients à fort pouvoir d’achat choisissent en nombre de bénéficier des réductions de prix consenties à d’autres catégories de clients.

La mise en place du yield management ne doit pas conduire à un effondrement du prix moyen, compromettant la rentabilité de l’exploitation.

Le système de yield management doit être intégré au modèle d’exploitation, c’est-à-dire au volume et à la qualité de la production ainsi qu’à la communication.

Enfin, dans une situation de concurrence forte, le yield management ne doit pas déclencher de guerre de prix, synonyme de fragilisation de l’entreprise et du secteur tout entier (6).

On voit bien la portée de la limite de validité donnée à la règle « plus tôt = moins cher dans la limite des capacités disponibles ».

Les capacités disponibles totales d’un train complet ou d’un avion sont inévitablement limitées. À chaque catégorie de tarif correspond un contingent de place ou « boîte ».

Les techniciens du yield management indiquent qu’ « on ferme les boîtes » successivement.

Dès lors, les changements de tarifs peuvent intervenir à tout moment, sans que le consommateur potentiel puisse le prévoir.

Inévitablement, la compréhension par le client du tarif pratiqué en est altérée et le champ est ouvert à la manipulation éventuelle des prix au détriment du consommateur et au bénéfice du fournisseur.

La dilution est un phénomène auquel sont particulièrement attentifs les gestionnaires de tarifs. Il s’agit de l’utilisation par un consommateur d’un tarif qui ne correspond pas à son profil.

LA DILUTION

La dilution est le phénomène par lequel des clients utilisent, de leur propre initiative, des tarifs inférieurs à ceux qui correspondent à leur profil.

À titre d’exemple, Air France a mis en place un nouveau tarif spécifique d’accès à la classe Affaires pour sa clientèle non professionnelle intéressée par un accès à sa qualité de service moyennant un surcoût acceptable par rapport à celui de la classe économique. Lors de l’élaboration de cette nouvelle offre, toute la difficulté était de poser des conditions spécifiques, de manière que les professionnels, clients habituels de la classe Affaires, n’accèdent pas, en nombre, à ces tarifs avantageux. Une étude statistique approfondie de la clientèle Affaires traditionnelle a déterminé que les professionnels ne sont que 6 % à rester plus de 7 jours sur place et à effectuer leur réservation 42 jours à l’avance. Ces deux conditions subordonnent donc l’accès au tarif spécifique de la classe Affaires.

La création de ce tarif spécifique a entraîné une dilution de 6 % mais, en revanche, a permis de toucher 85 % de la clientèle Loisirs. Les recettes additionnelles générées par ce tarif représentent plusieurs dizaines de millions d’euros (7).

En tout état de cause, la dilution est un risque auquel les gestionnaires du yield management sont particulièrement attentifs.

2.– Le yield management à la SNCF

La SNCF a mis en place un premier système de maximisation de ses recettes sur les TGV en 1993. Cinq années plus tard, ont été proposés les tarifs Prem’s qui correspondent à son offre la plus compétitive. En octobre 2007, une nouvelle tarification a été mise en place, après trois années d’études. Cette réforme s’est traduite par une augmentation du nombre de paliers. Dans la perspective de l’ouverture à la concurrence sur les lignes internationales, le 1er janvier 2010 (8), une nouvelle tarification est d’ores et déjà à l’étude.

Pour la SNCF, sa politique tarifaire n’a qu’un objectif : la réussite de sa politique de volume. Son parc de 450 rames TGV est dimensionné pour faire face aux besoins de la pointe hebdomadaire (9). La politique tarifaire a pour but numéro un « de permettre de voyager en pointe » et simultanément de renforcer « la motivation des usagers vis-à-vis de l’étalement des horaires (10). »

LA MISE EN PLACE DU YIELD MANAGEMENT À LA SNCF

• Janvier 1993 : Mise en place du logiciel de réservation Socrate sur TGV

• Mars 1993 : Mise en place du yield sur le TGV Nord, le reste du réseau y passe progressivement.

• 1996-1997 : Mise en place de la nouvelle gamme tarifaire (NGT), qui permet à la SNCF de développer une politique de volume via entre autre une politique de yield adaptée.

• Printemps 2003 : Audit interne

• Septembre 2003 : Mise en place du yield sur Corail avec l’arrivée du premier Téoz sur Clermont.

• Fin 2003 :

o Mise en place des d’indicateurs de suivi business (stat tendance)

o Le yield origine-destination qui était déjà en place sur les parcours internationaux est expérimenté pour les origines destinations domestiques

• Automne 2004 : Mise place des premières grosses promotions (ex : Prem’s "prix barré", 15 jours irrésistibles à 15 euros, 1ère promo week end de dernière minute), On découvre le potentiel d’induction Loisir sur certaines relations identifiées comme très pros.

• Novembre 2004 : Mise en place des Prem’s 1ère

• Été 2005 : Généralisation de Prem’s 1ère (plusieurs niveaux de prix)

• 2006 : Passage de 5 à 7 classes de contrôles

• Septembre 2006 : Énorme succès de la promo TGV « billets à 5 euros »

• Service 2007 : Changement de méthodologie dans la gestion des stocks de tarifs commerciaux

• Été 2007 : TGV Est

• Octobre 2007 : Mise en place de la gamme Notes (11)

Les propositions commerciales de la SNCF reposent sur le service attendu par les usagers en termes de prix et de possibilités d’échange ou d’annulation.

Les clients les plus sensibles au niveau des prix, qui sont prêts à anticiper longtemps à l’avance (quatre-vingt-dix jours) leurs réservations se voient proposer les tarifs les moins chers, les tarifs « Prem’s » Dans le cas d’une réservation par Internet, dix jours de réflexion leur sont accordés, après lesquels la réservation tombe si le paiement n’est pas effectué.

La clientèle « Loisir » se répartit entre la clientèle occasionnelle et la clientèle régulière possédant une carte commerciale. Les tarifs qui lui sont proposés dépendent, d’une part, du délai entre la date de réservation et la date de départ, et, d’autre part, du niveau de la demande par rapport à l’offre de train.

LA GAMME LOISIR

Les voyageurs occasionnels peuvent bénéficier d’une gamme Loisir Occasionnel, accessible à tous sans distinction d’âge avec plus de prix réduits :

• cinq niveaux de prix - dont le tarif standard de référence - sont proposés ; une réduction est proposée en fonction de l’anticipation d’achat ; les billets sont échangeables et remboursables jusqu’au départ, sans retenue jusqu’à la veille du départ, avec une retenue de 10 euros en cas d’échange le jour du départ. La retenue sur l’échange et le remboursement répond au besoin de favoriser une pratique plus responsable des clients et de permettre au maximum de clients de voyager ;

• des tarifs Loisirs spécifiques et des tarifs week-end réduits donnent accès à des prix plus attractifs aux clients qui voyagent avec une nuit du samedi au dimanche sur place. Ces prix sont accessibles même en réservant au dernier moment ;

• deux niveaux de prix d’appel Prem’s, non échangeables et non remboursables, récompensent l’anticipation. Cependant, les voyageurs qui n’ont pas pu en bénéficier peuvent avoir accès à un plus grand nombre de tarifs réduits intermédiaires avec les prix Loisirs Occasionnels.

Les porteurs de cartes bénéficient de réductions plus avantageuses que les voyageurs Loisir occasionnel.

Les cartes commerciales s’adressent aux voyageurs fréquents, selon des critères sociodémographiques (12-25 ans, Enfant+, Senior, Escapades). Une réduction minimum à 25 % est garantie dans tous les trains, quel que soit l’horaire.

De nouveaux paliers de réductions allant jusqu’à :

• 40 % pour les Escapades (26-59 ans) ;

• 50 % pour les Seniors et Enfant+ ;

• 60 % pour les 12-25 ans

sont accordés dans la limite des places disponibles à ce tarif.

Les billets achetés avec des cartes commerciales sont échangeables et remboursables jusqu’au moment du départ. En cas d’échange le jour du départ, une retenue de 3 euros est appliquée à cette clientèle (10 euros sans carte).

On notera que sur la période octobre 2007-août 2008, le taux de réduction moyen pour les porteurs de cartes 12-25, Senior, Enfant+ et Escapades s’est élevé à 45 %.

À l’opposé, les clients privilégiant la possibilité d’échanger gratuitement leur billet à tout moment et la qualité des services annexes, se voient proposer un tarif supérieur au plein tarif, les tarifs Pro.

LA GAMME PRO

L’offre Pro, valable pour la seconde classe comme pour la première classe, permet de bénéficier d’un service d’échange et remboursement gratuit jusqu’au départ du train et de services en gare et à bord du train. Cette offre s’adresse aux voyageurs qui recherchent une souplesse maximale ainsi qu’aux porteurs d’abonnement Fréquence ou d’abonnement Forfait.

Une offre « prix-services » spécifique, majorée de 2 à 4 euros, est proposée à la clientèle professionnelle.

L’objectif est de proposer davantage de flexibilité et de confort, notamment en 1ère classe :

• les échanges sont gratuits jusqu’à une heure après le départ ;

• un traitement prioritaire des appels sur la Ligne Directe Pro, des Bornes d’Échanges Minute et des guichets dédiés sont également proposés ;

• des places de parking peuvent être réservées sur Internet ;

• pour les clients de 1ère classe, d’autres services sont proposés :

o le placement prioritaire à bord en espace réservé

o sur certaines destinations professionnelles (Paris-Rennes-Nantes-Bordeaux-Montpellier-Marseille-Lyon-Strasbourg) : accès aux salons Grands Voyageurs, réservation de taxi à bord, service d’accueil à quai et service de restauration à la place aux heures des repas (12).

En outre la SNCF a introduit en janvier 2008 les « Bons Plans du Net » à savoir des billets à tarif réduit pour les trains peu chargés. Cette offre à prix modérés, à partir de 15 euros, inférieurs de 40 à 60 % aux prix de la gamme Loisir, est distribuée en exclusivité par le site Internet www.voyages-sncf.com. Il s’agit d’une offre de déstockage des dernières places invendues sur un train donné à une date précise. Sur les huit premiers mois de l’année 2008, 170 000 clients ont pu en bénéficier.

IdTGV propose également sur 20 destinations, un nombre limité de trains à des horaires décalés, en flanc de pointe, avec des services spécifiques à bord, dans le cadre d’une filiale de la SNCF. Il s’agit de contingents de place à des tarifs avantageux modulés en fonction de l’anticipation. Les réservations s’effectuent exclusivement sur Internet, avec impression du billet par l’utilisateur, pour des prix à partir de 19 euros en aller simple et des variations de tarifs selon la date de réservation et l’affluence du jour considéré. Le prix moyen sur un train idTGV est inférieur de 25 % au prix moyen sur TGV. Avec un taux d’occupation de 85 à 88 %, le revenu par train est identique à celui d’un TGV normal. Le nouveau service iDNIGHT correspondant à des parcours TGV de nuit a été mis en place en avril 2008 sur un nombre restreint de destinations (Paris – Hendaye ou Perpignan ou Marseille).

L’encadré suivant donne des précisions complémentaires sur iDTGV.

iDTGV : NOUVEAU PRODUIT OU NOUVELLE ÈRE DU TGV ?

L’offre tarifaire iDTGV est construite sur une base simple : un même prix d’appel quelle que soit la destination, une expression en euros uniquement et non en taux de réduction et l’absence de conditions d’accès sociodémographiques. Les billets IDTGV sont en particulier non éligibles aux réductions des cartes commerciales SNCF.

Les billets IDTGV sont toujours non remboursables et échangeables sous conditions (uniquement en billets iDTGV et avec paiement d’un frais d’échange de 10 euros). Ce type de prix s’adresse avant tout à une cible 26-59 ans occasionnelle.

En septembre 2008, la desserte iDTGV comprend les offres suivantes :

• deux aller et retour quotidien sur l’axe Paris Marseille

• un aller et retour quotidien sur l’axe Paris Montpellier desservant Nîmes, et Perpignan

• un aller quotidien sur Paris Toulouse desservant Bordeaux

• un aller et retour quotidien sur l’axe Paris-Nice desservant Avignon, Toulon, Saint Raphaël et Cannes

• un aller et retour quotidien entre Paris et la Côte Basque (Hendaye, Saint Jean de Luz, Biarritz et Bayonne) avec desserte de Bordeaux.

• un aller et retour quotidien entre Paris et Mulhouse avec desserte de Strasbourg

• un aller et retour quotidien entre Paris et Lyon (Part Dieu et Perrache)

• un aller et retour quotidien entre Paris et Nantes.

 À compter du 26 septembre, iDTGV a également lancé un second aller-retour Paris Nice, qui circulera dans un premier temps uniquement 3 jours par semaine (vendredi, samedi, dimanche) sur la période octobre-mars, et sera quotidien par la suite.

 Sur les 12 derniers mois, 2,2 millions de trajets iDTGV ont été vendus pour un prix moyen de 43 euros

La clientèle IDTGV comprend essentiellement des voyageurs se déplaçant pour des motifs privés ou loisirs.

Enfin, une nouvelle offre pour la clientèle privée loisir est, expérimentée du 4 juillet au 11 novembre 2008 : les « Prêt à Partir » de TGV. L’objectif est de proposer des prix attractifs (25 ou 45 euros en 2ème classe) les jours de plus forte demande, c’est-à-dire les vendredis et les dimanches en soirée. Ces prix sont proposés sur des TGV pour des créneaux horaires décalés avec une arrivée aux alentours de minuit et sont garantis jusqu’à la dernière place disponible dans le train. Cinq destinations phares ont été proposées dans un premier temps depuis Paris vers Marseille, Montpellier, Lyon, La Rochelle et Bordeaux. Avec la mise en place de trains supplémentaires en 2008, 250 000 places « Prêt à Partir » de TGV seront mises en vente. Si cette expérimentation s’avère concluante, l’offre s’ouvrira en 2009 à quatre nouvelles destinations. À terme, l’objectif est de proposer un million de places sur l’année. Au 15 juillet, 47 000 billets avaient été vendus.

C.– LA RENTABILITÉ DU TGV, VITALE POUR LA SNCF

La SNCF ne saurait être réduite à sa seule activité TGV, qui ne représente qu’un peu plus de la moitié de son activité voyageurs, qui, elle-même, n’a compté que pour moins de 30 % du chiffre d’affaires total du groupe en 2007.

Mais la rentabilité du TGV, la réussite technique unique dans le monde qu’il représente et son succès populaire font de la tarification de ses services un sujet d’une extrême importance pour le public et pour l’entreprise elle-même.

Au reste, le yield management est formellement autorisé par la loi et la réglementation.

Tout au plus, peut-on considérer que toutes les recommandations émises par le conseil d’État en 1993, ne sont pas encore toutes appliquées.

1.– Le TGV, moteur du développement et pilier de la santé financière de la SNCF

L’activité Voyageurs France Europe (VFE) du groupe SNCF a réalisé un chiffre d’affaires de 6,89 milliards d’euros en 2007, à comparer aux 5,9 milliards d’euros de la branche Proximités, aux 7,7 milliards d’euros de la branche Transports et Logistique et aux 4,5 milliards d’euros de la branche Infrastructure et ingénierie

CHIFFRE D’AFFAIRES DU GROUPE SNCF PAR BRANCHE

(en millions d’euros)

 

2006

2007

2008-
1er trimestre

Voyageurs France Europe

6 593

6 891

1 747

Proximités

5 682

5 908

1 555

Transport et Logistique

6 688

7 726

2 048

Infrastructure et ingénierie

4 453

4 532

1 066

Source : SNCF

La contribution de la branche Voyageurs France Europe au résultat opérationnel du groupe SNCF est essentielle puisqu’elle s’est élevée à 891 millions d’euros en 2007, contre 62 millions pour la branche Proximités, les deux autres branches ayant des résultats opérationnels courants négatifs (voir tableau ci-dessous).

RÉSULTATS OPÉRATIONNELS COURANTS
DES QUATRE BRANCHES DU GROUPE SNCF

(en millions d’euros)

 

2006

2007

Voyageurs France Europe

828

891

Proximités

105

62

Infrastructure et Ingénierie

-110

-67

Transport et Logistique

-74

-23

Source : SNCF

Or, en termes de trafic, le TGV a, en 2007, représenté 57,8 % du trafic voyageurs total de la SNCF, exprimé en voyageurs-kilomètres. Le TER vient en deuxième place avec 11,6 % et le Transilien en troisième avec 11,2 % du total.

RÉPARTITION DU TRAFIC VOYAGEURS DE LA SNCF PAR CATÉGORIE DE LIGNES

(en milliards de voyageurs-kilomètres)

 

2007

TGV (1)

46,52

Dont :

 
 

 

TGV Sud-Est

18,28

   

TGV Atlantique

11,32

   

TGV Nord Europe

1,77

   

TGV Est européen

2,17

   

TGV intersecteurs

8,89

   

Eurostar

2,75

   

Thalys

1,34

Autres grandes lignes (2)

6,57

   

TER (3)

11,62

   

Corail Intercités (4)

4,64

   

Transilien

11,20

   

Total Voyageurs

80,55

   

Source : MEEDDAT

(1) Trains à grande vitesse, y compris TGV affrétés

(2) Trains Grandes lignes autres qu’à grande vitesse

(3) y compris chemins de fer corses

(4) Les trains Corail Intercités correspondent aux liaisons à moyenne distance (200 km environ) proposées par la SNCF sur 24 lignes reliant 272 gares au moyen de 330 trains par jour.

(5) Le trafic Transilien (SNCF en Ile-de-France) est établi sur la base des enquêtes effectuées en 2003 sur l’utilisation de l’ensemble des titres de transport Île-de-France (RATP, Optile et SNCF)

L’activité TGV est donc d’une importance capitale pour la SNCF, car elle génère la plus grande part de son résultat opérationnel courant.

Pour 2008, la SNCF a prévu une croissance de 7,4 % de son trafic, notamment grâce à l’exploitation en année pleine du TGV Est. Le résultat de la branche Voyageurs France Europe devrait augmenter de 5,4 %.

À partir de 2010, par ailleurs, la SNCF va être confrontée à une hausse de 60 millions par an des montants de péages qu’elle acquittera à Réseau ferré de France. Il est en effet impératif que les activités ferroviaires contribuent dans leur ensemble à la couverture de leurs charges d’infrastructures, en prenant davantage en compte qu’à l’heure actuelle la valeur d’usage de celles-ci.

Le tableau suivant présente l’évolution des péages qui seront acquittés par la SNCF pour ses TGV, à réseau constant.

ÉVOLUTION DES PÉAGES ACQUITTÉS PAR LA SNCF
SUR LA PÉRIODE 2008-2013

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Péages TGV acquittés

1 223

1 350

1 438

1 545

1 647

1 742

Source : MEEDDAT

On conçoit donc que la SNCF doive, compte tenu de l’encadrement de la hausse tarifaire moyenne TGV et de l’importance de cette activité, maximiser ses recettes.

L’augmentation du taux de rotation des rames, dont le prix unitaire est actuellement de 30 millions d’euros environ, est un moyen d’augmenter leur productivité. Leur durée moyenne d’utilisation est actuellement de 7,16 heures par jour.

L’objectif est de l’augmenter d’une demi-heure dans les cinq ans et d’une heure dans les dix ans.

2.– La fréquentation accrue par la tarification d’octobre 2007

Le bilan sur six mois fait par la SNCF pour sa nouvelle tarification lancée en octobre 2007 est le suivant :

• Le trafic TGV a augmenté d’un point. La hausse des prix des carburants n’a compté que pour un tiers de la hausse observée.

• Le taux moyen d’occupation du TGV a augmenté de 5 points et s’élève à environ 75 %.

• Le nombre de billets délivrés à tarif réduit a augmenté, au rythme de 1,5 million de tarifs Prem’s supplémentaires par an. L’objectif de 5 millions sur 3 ans est atteignable.

• Le nombre de clients Loisirs occasionnel payant plein tarif a diminué.

• Toutefois, la nouvelle tarification n’a pas permis d’atténuer dans la clientèle l’idée de la cherté des tarifs de pointe.

• Les tarifs Pro sont plus nombreux.

• Les notes de satisfaction données attribuées par la clientèle sont en hausse.

En conséquence, la SNCF dresse un bilan positif de sa nouvelle tarification.

Selon elle, avec un seul prix TGV, le tarif moyen serait de 50 euros. Or il est actuellement de 42 euros. L’impact de cette différence est majeur en terme d’accès aux transports ferroviaires. Selon la SNCF, avec un prix moyen de 50 euros, une part très importante des clients actuels ne voyagerait pas en TGV.

La SNCF indique que le chiffre d’affaires du TGV est réalisé à 60 % par le marché privé loisirs, à 30 % par le marché professionnel et à 10 % par les tarifs sociaux, les tarifs de groupe et les tarifs militaires.

Le TGV a une forte base de clients très sensibles aux prix. En effet, les tarifs destinés aux cibles à forte contrainte budgétaire représentent 45 % du chiffre d’affaires TGV. Il s’agit des tarifs liés aux cartes commerciales, aux tarifs sociaux, aux billets Prem’s et aux Bons Plans du Net

Par ailleurs, la croissance du trafic est tirée par les offres correspondant aux prix les plus bas. En 2007, ces offres sont à l’origine de la moitié de la croissance du trafic TGV par rapport à 2006. 90 % de la hausse du trafic générée par la nouvelle offre de tarifs mise en place en octobre 2007 est précisément due aux bas tarifs et aux promotions.

La SNCF indique que ses tarifs sont 25 % moins élevés que dans les autres pays et que ses taux de remplissage sont meilleurs que ceux observés en Espagne mais aussi en Allemagne. Dans ces deux pays, l’absence d’obligation de réservation empêche la mise en place d’un yield management de qualité, d’où un taux de remplissage moyen de 40 % pour les ICE allemands. En Italie, un rattrapage des prix est intervenu dans les derniers mois.

D.– LE YIELD MANAGEMENT N’EST PAS CONTRAIRE AU SERVICE PUBLIC

1.– L’avis du Conseil d’État

Le ministre de l’Équipement, du logement et des transports avait saisi en 1993 le Conseil d’État, sur la compatibilité de la pluralité des tarifs de base et la modulation temporelle appliqués sur le TGV Nord avec les principes du service public et les dispositions du cahier des charges de la SNCF.

Le texte de cet avis est reproduit ci-après.

Assemblée générale (Section des travaux publics) - n° 353.605 - 24 juin 1993

Texte intégral de l’avis

Le Conseil d’État, saisi par le ministre de l’Équipement, du Logement et des Transports d’une demande d’avis tendant à savoir si la pluralité de tarifs de base et la modulation temporelle de ces tarifs que comporte le nouveau tarif voyageurs de la SNCF applicable au TGV Nord Europe à compter du 23 mai 1993, sont compatibles tant avec les principes du service public qu’avec les dispositions du cahier des charges de la SNCF ;

Vu la loi n° 82-1 153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs modifiée ;

Vu le décret n° 83-817 du 13 septembre 1983 portant approbation du cahier des charges de la SNCF ;

Est d’avis de répondre à la question posée dans le sens des observations suivantes :

I -
Le tarif voyageurs de la SNCF applicable au TGV Nord à compter du 23 mai 1993 comporte, par rapport au tarif voyageurs applicable sur les autres lignes de la SNCF, deux innovations essentielles qui font l’objet de la présente demande d’avis et qui sont les suivantes :

1°) À un tarif de base correspondant à un prix de voyage en seconde classe valable pour l’ensemble des lignes SNCF (part kilométrique et part forfaitaire, modulées en fonction de la distance parcourue), se trouvent substitués une série de tarifs de base établis pour le voyage en seconde classe sur chaque liaison TGV NORD (liaison Paris-Lille ; liaison Paris-Arras ; liaison Paris-Lens, etc...) sans référence à un prix kilométrique constant ;

2°) le tarif de base de chaque liaison du TGV Nord se trouve affecté d’une modulation temporelle : les trains sont répartis en quatre niveaux (N1, N2, N3, N4) en fonction de la fréquentation prévue selon l’heure et le jour de la semaine. Le tarif de base de chaque liaison correspond au prix du voyage en seconde classe sur les trains les moins fréquentés, c’est-à-dire les trains de niveau N1, et ce tarif est réévalué sur les trains de niveau supérieur.

II - La légalité de ces innovations tarifaires doit être appréciée au regard des dispositions générales de la loi susvisée d’orientation des transports intérieurs et du cahier des charges qui définissent les missions de la SNCF, à savoir celles de l’article 18 alinéa 1er de la LOTI et de l’article 1er du cahier des charges. Aux termes de l’article 18, alinéa 1er, de la LOTI, la SNCF, établissement public industriel et commercial, "a pour objet d’exploiter, d’aménager et de développer, selon les principes du service public, le réseau ferré national".

Et selon l’article 1er du cahier des charges de la SNCF :

"La société nationale des chemins de fer français est un élément essentiel du système de transport intérieur français. Ses activités doivent contribuer à la satisfaction des besoins des usagers dans les conditions économiques et sociales les plus avantageuses pour la collectivité, concourir à l’unité et à la solidarité nationales et à la défense du pays. Elle prend à cet effet, en tenant compte des coûts correspondants, toute initiative visant à développer l’usage du rail pour le transport des personnes et des biens.
Elle a pour mission :

§ d’une part, de gérer, d’aménager et de développer le réseau ferré national dans les conditions définies au titre V du présent cahier des charges ;

§ d’autre part d’exploiter les services ferroviaires sur ce réseau, dans les meilleures conditions de sécurité, d’accessibilité, de célérité, de confort et de ponctualité, compte tenu des moyens disponibles.

L’ensemble des services offerts par la S.N.C.F. est mis en œuvre selon les principes du service public, notamment en matière de continuité et de conditions d’accès des usagers"...

Il convient de rappeler, en outre, les dispositions relatives aux tarifs des articles 13, 14 et 17 du cahier des charges de la SNCF.

"La SNCF perçoit un prix en contrepartie des prestations qu’elle fournit.

Elle mène une politique tarifaire visant à développer l’usage du train en participant à la satisfaction du droit au transport, dans des conditions assurant l’équilibre global de son exploitation, compte tenu des participations des collectivités publiques et d’autres bénéficiaires publics ou privés qui, sans être usagers des services, en retirent un avantage direct ou indirect.

Cette politique tarifaire favorise la réalisation des objectifs définis par l’État pour obtenir l’utilisation la meilleure au plan économique et social du système des transports intérieurs français".

Aux termes de l’article 14 :

"Les prix payés par les usagers des services nationaux sont fixés par la SNCF en application :

§ d’un tarif de base correspondant au prix du voyage en seconde classe,

§ et d’un ensemble de tarifs comportant diverses modulations par rapport à l’application du tarif de base et intégrant les tarifs sociaux mis en œuvre par la SNCF à la demande de l’État.

Les prix des prestations complémentaires au service du transport ferroviaire sont établis par la SNCF dans le cadre de la réglementation de droit commun".

En outre, en vertu de l’article 17 du même cahier des charges les tarifs établis par la SNCF sont soumis pour homologation au ministre chargé des Transports et sont portés à la connaissance du public avant leur entrée en vigueur.

III - Il résulte, en premier lieu, des dispositions rappelées ci-dessus de l’article 18, alinéa 1er de la LOTI et de l’article 1er du cahier des charges de la SNCF, dont la validité n’est pas, dans la situation de droit actuelle, mise en cause par le droit communautaire, que l’activité de la SNCF doit s’exercer dans le respect des "principes du service public", au nombre desquels figure le principe d’égalité de traitement des usagers d’un même service public.

1°) S’agissant d’abord de la rupture d’unicité du tarif de base, il apparaît que si les conditions particulières de rapidité et de confort dont bénéficient les usagers des TGV par rapport aux autres usagers de la SNCF peuvent autoriser certaines disparités tarifaires entre les premiers et les seconds, on ne saurait, en revanche, déceler, parmi les usagers du TGV Nord, de différences de situation appréciables susceptibles de justifier l’application de tarifs de base différents d’une liaison à l’autre.

Une telle différence de traitement ne peut, dès lors, selon la jurisprudence, trouver sa justification que dans certaines nécessités d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation du service ferroviaire.

a) Au regard des objectifs qu’elle poursuit, la rupture d’unicité du tarif de base vise à la fois, à partir d’études de marché pratiquées auprès de ses usagers potentiels, à permettre à la SNCF d’améliorer la rentabilité du service en fonction des caractéristiques particulières de la clientèle propre à certaines liaisons et de mieux adapter ses tarifs à la concurrence d’autres modes de transport.

S’agissant d’un établissement public à caractère industriel et commercial tel que la SNCF, le souci d’assurer l’équilibre financier de son exploitation répond à l’obligation qui lui est faite par l’article 13, alinéa 2 de son cahier des charges, et lui permet, en outre, d’améliorer de façon générale les conditions d’exécution du service public dont il a la charge.

De même, la mission de développer l’usage du train assignée à la SNCF par les articles 1er, alinéa 1er et 13, alinéa 2 de son cahier des charges suppose que cet établissement public soit en mesure de faire face, notamment sur le plan tarifaire, à la concurrence d’autres modes de transport.

b) Si les motifs qui inspirent la rupture de l’unicité du tarif de base ne peuvent, ainsi, être contestés dans leur principe, il convient cependant que la mise en œuvre de cette mesure soit assortie de certaines précautions destinées à la fois à limiter sa portée à ce qui est indispensable pour atteindre les objectifs légitimes poursuivis, et à prendre en compte les autres obligations de service public qui s’imposent à la SNCF.

De ce point de vue, il apparaît nécessaire

§ que l’institution de tarifs de base propres à certaines liaisons demeure réservée à celles où il peut être justifié, par des éléments objectifs, que cette mesure est nécessaire pour atteindre les buts rappelés ci-dessus ;

§ qu’afin d’éviter de porter atteinte, sur les liaisons concernées, au principe d’égal accès de tous au service public il soit imposé un écart maximum entre les tarifs de base particuliers et le tarif de base général ;

§ que le maniement des tarifs visant à résister à la concurrence d’autres modes de transport respecte l’obligation de "tenir compte des coûts correspondants" mentionnée par l’article 1er alinéa 1er du cahier des charges et ne dégénère pas en guerre tarifaire susceptible de compromettre l’équilibre global de l’exploitation ;

§ qu’enfin la SNCF attache une attention spéciale, en ce qui concerne les tarifs de base particuliers, à respecter l’obligation d’information du public mise à sa charge par l’article 11 du cahier des charges.


2°) S’agissant ensuite de la modulation temporelle des tarifs de base, il apparaît que cette mesure peut trouver sa justification à la fois dans certaines différences de situation appréciables faites aux usagers et dans des considérations d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation du service public.


À ce second point de vue, il convient de relever que la modulation temporelle des tarifs de base vise un double objectif : par l’augmentation des tarifs appliqués sur les trains les plus fréquentés, elle permet d’écrêter les pointes de trafic et de limiter ainsi les frais d’exploitation ; par la réduction des tarifs appliqués sur les trains les moins fréquentés, elle permet de faciliter l’accès du TGV à des catégories plus larges de la population. On ne peut contester que de tels objectifs répondent à la mission confiée à la SNCF par les articles 1er et 13 de son cahier des charges. Encore est-il nécessaire, pour atteindre ces objectifs d’intérêt général, que la modulation temporelle des tarifs soit mise en
œuvre de telle sorte que le nombre et les horaires des trains aux tarifs les plus bas soient tels que, sur aucune liaison, l’égal accès au service public ne se trouve compromis.


IV -
Il convient de relever, en second lieu, que si la modulation temporelle du tarif de base peut être regardée comme susceptible de se rattacher aux "diverses modulations" mentionnées par les dispositions rappelées ci-dessus du second tiret de l’article 14 du cahier des charges de la SNCF, celles du premier tiret du même article font obligation à cet établissement public d’appliquer à l’ensemble des voyageurs empruntant ses services nationaux un tarif de base unique correspondant au prix du voyage en seconde classe. Il en résulte que les éléments du tarif voyageurs du TGV Nord qui comportent l’application de plusieurs tarifs de base sur cette ligne sont contraires aux dispositions du 1er tiret de l’article 14 du cahier des charges, et exigent une modification desdites dispositions.

V - La nouvelle tarification du TGV Nord appelle, en outre, les remarques suivantes :

1°) Les considérations développées au III ci-dessus mettent en évidence la nécessité de règles d’encadrement précises du nouveau système de tarification. Ces règles contribueront à définir les conditions d’exécution du service public, et devront donc, en application de l’article 24 § 1 de la LOTI, figurer, au moins en ce qui concerne leurs éléments de principe, dans le cahier des charges de la SNCF, leurs modalités variables étant susceptibles d’être renvoyées à des arrêtés ministériels publiés au Journal officiel. Il serait souhaitable qu’une structure de concertation permanente entre la SNCF et ses usagers soit associée à l’élaboration de ces règles d’encadrement et puisse en suivre la mise en application.

2°) Pour assurer une application correcte de l’article 17 du cahier des charges, l’autorité ministérielle chargée d’homologuer les tarifs établis par la SNCF doit être dotée des moyens lui permettant d’apprécier la pertinence des propositions qui lui sont faites, et notamment de vérifier la qualité des études de marché à partir desquelles sont établis les tarifs de base particuliers et leurs modulations temporelles.

3°) Si, après prise en compte des remarques ci-dessus touchant à la légalité du système, il est concevable que pour une période expérimentale d’un an, l’application du nouveau régime tarifaire soit limitée au seul TGV Nord, cette situation ne saurait se perpétuer sans créer une disparité de traitement injustifiée entre les usagers du TGV Nord et ceux d’autres lignes de la SNCF répondant aux mêmes caractéristiques. Il appartient donc à la SNCF de définir rapidement les critères objectifs lui permettant de délimiter, sur des bases incontestables, le champ d’application définitif de son nouveau régime tarifaire.

 

Plusieurs points particulièrement importants résultent de cet avis du Conseil d’État en date du 24 juin 1993.

Le tarif de base sans référence à un prix kilométrique constant et la modulation temporelle en fonction de la fréquentation, c’est-à-dire le yield management pratiqué par la SNCF, ne sont contraires ni aux principes du service public ni au cahier des charges de l’entreprise.

Mais le Conseil d’État pose plusieurs conditions qui s’imposent à la mise en œuvre de cette tarification.

Un écart maximum doit être imposé entre les tarifs de base particuliers et le tarif de base général.

La SNCF fait état d’écarts maximums de 1 à 3 entre ses différents tarifs pour une même prestation. Dans les transports aériens, les écarts peuvent être de 1 à 7, comme par exemple pour Air France. Il n’y a pas de réponse unique à la justification d’un écart de tarif. Seul le Gouvernement pourrait décider l’amplitude maximale souhaitable de cet écart.

Par ailleurs, le maniement des tarifs visant à résister à la concurrence doit respecter l’obligation de tenir compte des coûts correspondants et ne dégénère pas en guerre tarifaire susceptible de compromettre l’équilibre de l’exploitation.

Pour le Conseil d’État, les tarifs doivent tous tenir compte des coûts et ne pas menacer la rentabilité de chaque liaison TGV. Une traduction plus actuelle de cette préconisation pourrait être que la recette totale d’un TGV couvre la totalité de ses coûts. Or aucune liaison ferroviaire n’a jamais été annulée en raison d’un remplissage insuffisant. La notion d’équilibre ou de bénéfice devrait donc s’appliquer à un ensemble de liaisons TGV, voire à l’ensemble des services TGV sur une période donnée.

La SNCF doit attacher une attention spéciale, en ce qui concerne les tarifs de base particuliers, à respecter l’obligation d’information du public imposée par son cahier des charges.

La situation actuelle montre que des progrès restent à faire et s’imposent à la SNCF.

Le Conseil d’État conclut son avis par deux remarques capitales :

• Les règles d’encadrement du nouveau système de tarification devraient figurer au moins en ce qui concerne leurs éléments de principe, dans le cahier des charges de la SNCF, leurs modalités variables étant susceptibles d’être renvoyées à des arrêtés ministériels publiés au Journal officiel.

En tout état de cause, il ne semble pas que des arrêtés ministériels publiés au Journal officiel aient détaillé les modalités de la tarification de la SNCF.

• L’autorité ministérielle chargée d’homologuer les tarifs établis par la SNCF doit être dotée de moyens d’apprécier la pertinence des études de marché sur lesquelles reposent les tarifs de base particuliers.

Il ne semble pas, là non plus que la direction générale des infrastructures de transports et de la mer (DGITM) ait eu la possibilité de se doter de fonctionnaires en nombre suffisant pour réaliser ces contrôles.

L’avis du Conseil d’État a ainsi souligné en 1993 les règles à respecter et les moyens d’y parvenir.

Il n’est pas inutile de citer l’article 44 du cahier des charges de la SNCF qui reprend les principes formulés par cet avis.

CAHIER DES CHARGES DE LA SNCF - PRINCIPES ET CONDITIONS D’EXÉCUTION DU SERVICE PUBLIC FERROVIAIRE

Article 14

(Modifié par le décret n° 94-606 du 21 juillet 1994 annexe)

1. Les prix payés par les usagers des services nationaux sont fixés par la S.N.C.F. en application :

• d’un tarif de base général correspondant au prix du voyage en seconde classe ;

• de tarifs de base particuliers correspondants au prix du voyage en seconde classe, sur certaines relations, institués dans les conditions définies au 2 ci-dessous ;

• et d’un ensemble de tarifs comportant diverses modulations par rapport à l’application des tarifs de base et intégrant les tarifs sociaux mis en œuvre par la S.N.C.F. à la demande de l’État.

2. Un tarif de base particulier peut être institué sur une relation :

a) Lorsque cette relation présente pour les usagers des avantages particuliers de rapidité et de confort ;

b) Ou lorsque cette relation est soumise à une forte concurrence de la part d’un autre mode de transport et que l’institution de ce tarif particulier est susceptible, en développant l’usage du train, d’éviter la dégradation ou de concourir à l’amélioration des comptes de résultat de la S.N.C.F.

Le cas échéant, un tarif de base particulier peut être institué à titre expérimental et pour une durée limitée.

3. Un arrêté conjoint des ministres chargés des transports et de l’économie, pris sur proposition de la S.N.C.F. après consultation de ses usagers, fixe :

• le rapport maximal entre le prix du voyage en seconde classe déterminé selon le tarif de base particulier institué sur une relation et celui calculé selon le tarif de base général ;

• le rapport maximal, pour le voyage en seconde classe, entre le prix le plus élevé, incluant la modulation temporelle, appliqué sur une relation et le prix de base appliqué sur cette même relation ;

• les modalités de répartition dans le temps des trains accessibles au tarif de base, général ou particulier.

4. Les prix des prestations complémentaires au service du transport ferroviaire sont établis par la S.N.C.F. dans le cadre de la réglementation de droit commun.

Le yield management est depuis lors légalisé par la loi de modernisation de l’économie.

3.– La légalité du yield management

Certaines critiques de la politique tarifaire de la SNCF portent sur la compatibilité de la différenciation des tarifs avec les dispositions sur les conditions générales de vente et sur l’interdiction de la vente à perte.

La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie introduit le principe que les conditions générales de vente peuvent être variables selon les produits ou les services.

Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie

Article 92

I.– Les sixième et septième alinéas de l’article L. 441-6 du code de commerce sont ainsi rédigés : « Les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services. »

L’objectif de la loi, en termes de conditions de vente, est clairement centré sur les relations entre l’industrie et la grande distribution.

Toutefois, on sait que le yield management définit des catégories d’utilisateurs et pour la détermination des tarifs, des boîtes correspondant à des niveaux de tarifs, qui sont fermées les unes après les autres.

Bien que la loi de modernisation de l’économie n’ait pas visé explicitement le cas du yield management, on ne peut qu’être frappé par le fait que l’article 92 prend en compte une diversité de situations, dont potentiellement celle du yield management.

Par ailleurs, la question est souvent posée de la compatibilité du yield management avec les dispositions relatives à la vente à perte.

En réalité, la notion de vente à perte est relative à la distribution. La vente à perte correspond en effet à la revente d’un produit en l’état à un prix inférieur à son prix d’achat effectif. Aucune disposition n’interdit à un industriel ou à un prestataire de service de pratiquer un prix ne couvrant pas la totalité de ses coûts fixes et/ou de ses coûts variables.

4.– L’homologation des tarifs issus du yield management par la SNCF

Les tarifs des services de transport ferroviaire de voyageurs sont fixés par la SNCF dans les conditions prévues par son cahier des charges, approuvé par le décret n° 83-817 du 13 septembre 1983.

L’article 14, modifié par décret n° 94-606 du 21 juillet 1994, dispose que les prix payés par les usagers des services nationaux sont fixés par la SNCF en application d’un « tarif de base général » correspondant au prix du voyage en seconde classe, et de « tarifs de base particuliers » applicables sur certaines relations qui présentent des avantages particuliers de rapidité et de confort ou qui sont soumises à une forte concurrence de la part d’autres modes de transport.

Dans ce cadre, un arrêté conjoint des ministres chargé des transports et de l’économie (arrêté du 22 juillet 1994 fixant les modalités d’application de l’article 14), pris sur proposition de la SNCF après consultation des usagers, fixe :

• un rapport maximal de 40% pour le prix du voyage en 2ème classe, entre le « tarif de base particulier » et le « tarif de base général » ;

• un rapport maximal de 50% pour un voyage en 2ème classe et en incluant la modulation temporelle, entre les prix applicables le plus élevé et le moins élevé ;

• un principe d’« accessibilité raisonnable » des voyages au prix de base : « Les trains sont répartis dans le temps de telle sorte que le voyage au prix de base soit raisonnablement accessible. Le nombre des trains pour lesquels le prix du voyage en seconde classe est calculé selon le tarif de base de la relation doit être égal, d’une part, à au moins 40 p. 100 du nombre total des trains, sur une semaine ne comportant pas de jours de pointe exceptionnels, d’autre part, à au moins 10 p. 100 des trains circulant entre le vendredi 12 heures et le samedi 12 heures, et entre le dimanche 12 heures et le lundi 12 heures ».

L’arrêté du 22 juillet 1994 n’a pas été modifié depuis son entrée en vigueur.

Dans la pratique, les prix de la SNCF sont homologués chaque année par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) lors des majorations tarifaires ou lors de toutes évolutions substantielles de la gamme. Les majorations pour TGV se font fin janvier, celles pour Lunéa fin décembre et pour le tarif kilométrique et les abonnements début juillet.

Un dossier complet avec l’ensemble des prix pour 500 relations TGV est transmis à la DGITM, ainsi que l’évolution des barèmes kilométriques pour Corail ainsi que les prix des relations Lunéa.

La DGITM reçoit trois semaines avant la date de majoration une demande officielle d’homologation de la part des directeurs délégués de branche Voyageurs.

La hausse tarifaire moyenne pour le TGV en 2008 est de 1,9 %, selon la proposition faite au ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (MEEDDAT), en charge des transports et acceptée par celui-ci.

Il n’est pas établi que le MEEDDAT dispose du temps et des équipes nécessaires pour se livrer à une étude approfondie de la pertinence et de l’opportunité des tarifs proposés par la SNCF.

Par ailleurs, les tarifs des voyages proposés par iDTGV, filiale de la SNCF, ne sont pas homologués par l’État. On peut se demander comment l’offre commerciale d’iDTGV peut être considérée comme déconnectée de l’offre TGV générale. En tout état de cause, l’alignement de l’une des deux offres sur l’autre pourrait être l’un des risques encourus par la pérennité du double système.

II.– UN OUTIL LARGEMENT UTILISÉ ET COMPATIBLE, SOUS CONDITIONS, AVEC L’INTÉRÊT DU CONSOMMATEUR

Le yield management permet d’optimiser la recette d’une activité où l’offre est par nature rationnée. Il n’est donc pas étonnant qu’il se soit largement diffusé, à partir des activités de transport, vers d’autres secteurs comme l’hôtellerie, les tours opérateurs ou les spectacles.

On constate par ailleurs que ces techniques voient leur domaine d’application s’élargir, en intégrant, dans le domaine des transports, la difficile question des priorités tarifaires, voire des priorités d’accès pour les trajets comportant plusieurs tronçons.

En tout état de cause, le yield management ne saurait à lui seul constituer ni une stratégie prix ni une stratégie marketing. Il s’agit d’un élément important de celle-ci, qui doit toutefois prendre place dans une stratégie globale.

Enfin, il convient de se demander si le yield management mis en place à l’initiative des prestataires de services afin d’optimiser leurs revenus, est compatible ou non avec l’intérêt du consommateur.

A.– UN OUTIL LARGEMENT RÉPANDU

Les principaux autres secteurs où le yield management est utilisé sont le transport aérien, le secteur hôtelier, les tour-opérateurs, le secteur des spectacles et la téléphonie mobile.

Structurellement, ces secteurs diffèrent du transport ferroviaire qui peut, contrairement aux autres, augmenter son offre de capacités en rajoutant une rame à un train déjà programmé.

1.– Le yield management dans les transports

C’est dans le transport aérien que le yield management est né, afin d’optimiser la recette de chaque vol dans un contexte de concurrence avec des compagnies à bas coûts (low cost).

Le transport aérien se caractérise d’abord par des coûts fixes importants, incluant les frais de carburants qui varient peu à la marge, ensuite par des coûts variables très réduits, et, enfin par l’absence de stock, la valeur d’un siège vide étant nulle dès la fermeture des portes de l’avion. L’objectif du yield management est d’optimiser le chiffre d’affaires par rapport aux coûts engagés d’un vol programmé.

La vente du siège passager à un prix même très bas est préférable à la non-vente, dès lors que le prix de vente du billet couvre les coûts variables.

Dans cette situation, une condition doit être respectée, à savoir que le nombre de billets vendus à bas prix ne doit pas être trop important de façon à ne pas diminuer trop fortement le prix moyen du billet. Le taux d’occupation et le prix du billet sont deux leviers majeurs pour y parvenir.

Les écarts de prix entre les tarifs minimums et les tarifs les plus élevés peuvent être considérables. À titre d’exemple, Air France propose trois grandes classes de tarifs sur le vol Paris New York aller et retour. Le tarif le plus bas correspond à une réservation effectuée très à l’avance, pour une durée de séjour minimale sur place et sans possibilité de changement de date. Le tarif intermédiaire, 50 % plus cher, offre une possibilité de changement de date. Le tarif le plus élevé, plus de sept fois supérieur au tarif minimum, correspond à une réservation opérée au dernier moment et à une flexibilité totale concernant la date du vol.

Le yield management s’accompagne dans le transport aérien de la pratique de la surréservation ou suroffre (surbooking), qui permet d’atteindre des taux de remplissage de 100 %. Cette technique est proscrite dans la plupart des autres secteurs, en raison du niveau très élevé d’insatisfaction des usagers qui en seraient victimes, comme exemple dans l’hôtellerie.

Au début de la mise en œuvre du yield management dans le transport aérien, le prix variait relativement peu. Ce sont les compagnies aériennes « low cost » qui, à partir de l’année 2000, ont imposé le modèle d’une forte élasticité du prix de vente.

ÉLÉMENTS SUR LE SYSTÈME DE TARIFICATION DES COMPAGNIES AÉRIENNES
À BAS PRIX « LOW COST »

Le modèle de tarification des compagnies aériennes « low cost » est celui d’une optimisation du taux de remplissage grâce à des prix attractifs d’autant plus bas que la date de réservation est plus éloignée de la date du vol.

Les compagnies à bas prix « low cost » ont pour principe de base de réduire leurs coûts, notamment en optimisant la productivité de leurs équipages et en augmentant le taux d’utilisation de leurs avions.

S’agissant de la tarification, les compagnies « low cost » proposent des prix bas en début d’ouverture des réservations et l’augmentent progressivement au fur et à mesure que la date de départ se rapproche. À une date donnée, ces prix sont uniques.

La demande journalière pour les vols court ou moyen courrier comprend deux pics, l’un le matin vers 7 heures et l’autre vers 19 heures Les compagnies aériennes traditionnelles orientent donc vers les heures creuses la demande la moins rémunératrice et la plus sensible aux prix.

Les compagnies « low cost » ne donnent aucune indication aux clients potentiels sur le moment où les tarifs sont susceptibles d’augmenter. Au cas où le remplissage du vol ne se fait pas comme attendu, des classes de prix plus favorables peuvent même être rouvertes.

2.– Le yield management dans les autres secteurs

L’hôtellerie, pour sa part, utilise des fenêtres de prix correspondant au classement des établissements. La clientèle accepte sans difficulté que la fenêtre de prix d’un établissement trois étoiles diffère de celle d’un deux étoiles. En revanche, les écarts trop importants entre des tarifs d’un même type d’hôtel déroutent la clientèle.

Deux secteurs représentent un cas limite d’application du yield management. Les tours opérateurs qui préachètent des réservations, n’ont pas de coût fixe mais seulement des coûts variables, ce qui ne les empêche pas de faire varier le prix afin d’améliorer le taux d’utilisation de leurs réservations. Dans le cas de la téléphonie mobile, le yield management consiste à interrompre les communications en cas d’encombrement des lignes, selon la nature du forfait des clients concernés.

B.–  LE YIELD MANAGEMENT POUSSÉ À L’EXTRÊME

Dans le domaine des transports, le yield management peut être poussé à l’extrême pour déterminer des règles de priorité pour l’accès à des tronçons de parcours. En tout état de cause, la prise en compte de l’origine et de la destination du voyageur est liée à l’existence de hub.

1.– Le yield origine-destination dans le transport aérien

Les compagnies aériennes intègrent le paramètre origine-destination dans leur yield management. Ceci conduit à de nouvelles règles d’attribution des sièges dès lors que le nombre de sièges disponibles tend vers zéro.

L’exemple de deux passagers en concurrence pour obtenir le dernier siège disponible sur un vol Madrid-Paris est éclairant à cet égard. L’un des deux passagers prolonge son vol vers Bangkok et se voit appliquer une contribution de 4 c€/km sur l’ensemble du trajet Madrid-Bangkok. Le second passager s’arrête à Paris et se voit appliquer une contribution de 25 centimes d’euros par km.

Le yield management classique, qui a pour objectif de maximiser la recette passager-km conduirait à offrir le siège au passager Madrid-Paris. Le yield management intégrant le paramètre origine-destination aboutit à la conclusion inverse.

Un arbitrage est en effet effectué entre les passagers moyen long courrier-court courrier. Le système informatique détermine un niveau de prix minimum (bit price) pour pouvoir accéder au vol Madrid-Paris. Si le prix potentiel du billet est supérieur à ce prix minimum, la réservation est acceptée, sinon elle est refusée.

Dans le cas évoqué plus haut, le siège est attribué au passager prolongeant son vol vers Bangkok car sa contribution totale est supérieure à celle du passager s’arrêtant à Paris.

Selon plusieurs experts consultés par votre Rapporteur, la SNCF, sauf instruction contraire des pouvoirs publics, sera dans l’obligation d’intégrer la dimension origine-destination dans son yield management, dès lors que la concurrence sera totale sur le marché français du transport ferroviaire.

2.– Le yield management par origine-destination à la SNCF

Le yield management origine-destination n’est appliqué, pour le moment, qu’à la marge à la SNCF.

Mais il pourrait se généraliser, ce qui ne serait pas sans causer des difficultés.

a) Un accès au train en règle générale indépendant du trajet effectué

Le contingentement d’un TGV se fait au tronçon, portion du parcours du TGV (13). Le contingentement est guidé par des marchés dominants.

Avec un contingentement donné sur un tronçon d’un TGV, la disponibilité est la même pour toutes les possibilités de trajets des TGV qui empruntent ce tronçon, sans priorité de l’une par rapport aux autres.

Ainsi pour un TGV Paris-Le Mans-Rennes-Brest avec un quota de cent places en tarifs commerciaux contingentés, la disponibilité en tarifs commerciaux est de cent quelle que soit l’origine-destination du client, c’est-à-dire que son trajet soit long comme Paris-Rennes ou Paris-Brest, ou court comme Le Mans-Rennes. Le principe de base « premier arrivé, premier servi » s’applique. En conséquence, si cent clients effectuant un parcours Rennes-Brest anticipent davantage et achètent la totalité des cent tarifs commerciaux, les clients effectuant le parcours Paris-Brest n’auront plus de disponibilités en tarifs commerciaux. En revanche il en restera encore cent sur Paris-Rennes.

Pour les dessertes ne passant pas par Paris, le contingentement est souvent effectué sur le tronçon le plus chargé.

En règle générale ce sont les marchés au départ ou à l’arrivée de Paris qui dimensionnent l’offre en tarifs réduits.

b) Des cas d’espèces en augmentation

Pour la SNCF, des mesures de différentiation de traitement des différentes destinations peuvent être nécessaires pour atteindre l’optimum de remplissage.

L’objectif est alors de préserver certains marchés secondaires, mais néanmoins importants, ou, à l’inverse, de préserver le marché principal à longue distance,

C’est notamment le cas lorsque des montées en charge rapide se produisent sur des courtes distances, au détriment des ventes sur des trajets longs.

Des différenciations tarifaires sont alors mises en place pour maximiser le remplissage des TGV.

Après expérimentation, le yield management origine-destination concerne quelques TGV sur chacune des grandes zones Sud-Est, Atlantique, Est, Suisse-Alpes et Nord-Europe.

En tout état cause, la préférence potentielle donnée aux voyageurs accomplissant le trajet le plus long n’est pas sans poser de problème. Le yield management par origine-destination pourrait conduire à accorder un tarif plus avantageux, rapporté au kilomètre parcouru, au voyageur sur Paris-Brest par rapport à un autre voyageant de Paris à Rennes seulement.

Une autre possibilité serait de facturer sur des bases différentes des portions de ligne sur lesquelles le trafic est plus ou moins dense.

Le yield management origine-destination se développe inéluctablement lorsque la concurrence existe sur un trajet ou sur une portion de trajet, entre modes de transport, comme c’est le cas actuellement.

Ce sera également le cas lorsqu’il existera une concurrence entre compagnies ferroviaires pour le trafic voyageurs.

C.– LA TARIFICATION N’EST PAS À ELLE SEULE UNE STRATÉGIE MARKETING

Les objectifs stratégiques d’une entreprise sont la croissance de son chiffre d’affaires, l’augmentation de ses parts de marché et l’amélioration de sa rentabilité.

La croissance des ventes, grâce à une meilleure adéquation des produits aux besoins des marchés et grâce à l’innovation, constitue le premier levier d’action pour augmenter le chiffre d’affaires. La maîtrise voire la baisse des coûts permet d’augmenter les marges et la rentabilité.

Quant au prix, son impact est majeur sur les trois objectifs. Son rôle prend, depuis quelques années, une importance stratégique nouvelle, dans la mesure où les réductions de coûts et l’innovation en matière de produit sont à la fois plus difficiles à mettre en œuvre et plus longues à produire leurs effets.

Pour le consommateur ou l’usager, le prix est le sacrifice économique à consentir pour disposer du produit ou du service.

On admet communément qu’une baisse du prix génère une augmentation des ventes et éventuellement des parts de marché. En réalité, dans une situation de concurrence, une baisse de prix d’un producteur peut entraîner, de la part de ses concurrents, une guerre des prix dont l’issue est incertaine.

L’augmentation des prix de certains produits ou de services peut se traduire, dans certains cas, par une augmentation du chiffre d’affaires et simultanément des parts de marché.

En tout état de cause, le prix d’un bien doit être mis en balance avec sa valeur pour le consommateur. La détermination de la valeur pour le consommateur est centrale dans toute stratégie d’action sur les prix.

Si l’action sur les prix s’impose aujourd’hui aux entreprises comme un nouvel outil déterminant de leur stratégie, elle est toutefois inséparable d’une approche globale qui comporte nécessairement plusieurs dimensions(14).

Le prix est en effet la résultante de la valeur perçue par le consommateur, de la concurrence sur le marché, de la communication vers les consommateurs et de la politique de distribution.

Toute action sur le prix ne peut donc être isolée mais au contraire être précédée ou accompagnée par un ensemble de dispositions visant à adapter en conséquence le marketing mix.

D.– LA COMPATIBILITÉ DU YIELD MANAGEMENT AVEC L’INTÉRÊT DU CONSOMMATEUR

Si le yield management s’impose dans un nombre croissant de secteurs, la question doit toutefois être posée de son intérêt pour les consommateurs considérés dans leur ensemble et pour les différentes catégories de consommateur.

1.– Le yield management au service du consommateur

Selon la thèse du yield management au service du consommateur, le modèle de tarification variable de la SNCF ne saurait être condamné en tant que tel. La variabilité des prix, dimension essentielle du yield management, n’est pas, en effet, par essence, contraire aux intérêts du consommateur et au service public, bien au contraire.

Le graphique suivant illustre le fait qu’avec un seul prix de vente pour un bien donné, le nombre de consommateurs satisfaits est, selon la courbe de demande, inférieur au nombre total de bénéficiaires qui pourraient l’être avec une gamme de prix.

Ainsi, le yield management révèle les préférences des consommateurs, et leur fait acquitter un prix en rapport avec la valeur qu’ils attribuent au service proposé.

Enfin, il est possible d’affirmer que, d’une certaine manière, les consommateurs prêts à acquitter un prix supérieur permettent l’accès au service considéré des consommateurs limités dans leur capacité d’achat.

C’est pourquoi le recours de la SNCF au yield management ne doit pas être critiqué en tant que tel.

Au reste, les consommateurs aujourd’hui ont tellement bien intégré la nécessité d’une optimisation des capacités que les enquêtes d’opinion mettent en évidence leur perplexité voire leurs soupçons face à une tarification à prix unique.

Toute la question est que, dans leur esprit, un équilibre devrait exister entre les surprix en période de pointe et les réductions de prix en période creuse.

En tout état de cause, une transparence réelle sur les tarifs pratiqués est indispensable aux consommateurs, de manière qu’ils puissent adapter leurs décisions au contexte, en toute connaissance de cause.

2.– Le yield management au service de l’entreprise

Que l’entreprise bénéficie du yield management découle de sa mise en œuvre spontanée par celles-ci.

Pour l’entreprise implantée sur un marché où l’offre est par nature limitée, la situation créée par un prix unique n’est pas optimale, le chiffre d’affaires étant inférieur à ce qu’il pourrait être avec des prix différenciés.

Par référence au graphique précédent, le prix unique P1 d’une prestation comme un service de transport permet de satisfaire un nombre Q1 de consommateurs, d’où un chiffre d’affaires P1 x Q1 (partie hachurée). Pour autant, il existe un certain nombre de consommateurs qui sont prêts à payer davantage pour accéder au service. De même, en proposant un prix inférieur, il est possible de satisfaire un nombre accru de consommateurs, d’où des ventes supplémentaires. Le chiffre d’affaires total théorique est alors la somme de l’aire hachurée et des aires en pointillé.

Ainsi le yield management permet incontestablement d’augmenter le chiffre d’affaires. Pour qu’il soit réellement bénéficiaire pour l’entreprise, l’évolution du prix moyen doit être soigneusement contrôlée, de manière à couvrir les coûts complets.

3.– Le prix médian, indicateur de juste prix

Pour évaluer les conséquences du yield management sur le bénéfice consommateur, il est nécessaire de différencier le cas du secteur privé et celui de la délégation de service public.

Une entreprise privée pratiquant le yield management utilise, par principe, cet outil de gestion pour maximiser son profit.

Dans la pratique, lorsque la pression de la demande est forte, c’est-à-dire en période de pointe pour les transports, le yield management a pour conséquence l’augmentation du prix.

Au contraire, en période creuse, le yield management a pour conséquence la baisse du prix.

La fixation de ses tarifs en heure de pointe ou en heure creuse permet à une entreprise privée d’arbitrer entre les objectifs à court et à long terme de renforcement de ses parts de marché ou d’augmentation de sa rentabilité.

Pour une entreprise publique délivrant un service public, différentes questions se posent :

• Pour quelles raisons une entreprise publique ne pourrait-elle pas maximiser ses recettes de manière à faire financer ses activités par ses clients plutôt que par le contribuable ?

• Faut-il une stricte compensation entre la hausse et la baisse du prix et, le cas échéant, sur quelle base ? Les données statistiques actuellement rassemblées par la SNCF sont-elles suffisantes pour parvenir à un tel résultat ?

• L’augmentation du prix d’un service public aux heures de pointe devrait-elle être encadrée, dans la mesure où le besoin de transport est le plus souvent inélastique car lié à des besoins d’ordre professionnel ?

• La baisse du prix en période creuse devrait-elle être encadrée en prenant en compte le type d’usage ?

Le prix moyen et le prix médian constituent alors pour le consommateur des références utiles à sa prise de décision.

4.– Yield management et délégation de service public

La desserte de la Corse par Air France montre a contrario l’intérêt du yield management pour la rationalisation des transports.

Air France est obligé, pour le moment, de mettre en place des moyens surdimensionnés, dans la mesure où aucune gestion de la demande par les tarifs n’est autorisée. Ceci n’empêche pas la clientèle d’être insatisfaite en raison de la saturation de nombreux vols et la compagnie de ne pas pouvoir optimiser l’utilisation de sa flotte.

Pour Air France, il serait possible et utile de mieux répartir la clientèle par des aménagements de tarifs sur les différents créneaux horaires. Les obligations de service public pourraient, de fait, inclure pour chaque vol des quotas de place par catégorie de tarifs.

Cet exemple illustre le fait, désormais admis, que le yield management, en permettant de mieux répartir la demande et de limiter les coûts de la pointe, peut être mis au service de la bonne exécution d’un service public.

III.– LE DROIT DES CONSOMMATEURS DE CONNAÎTRE LES MÉCANISMES ET LES BÉNÉFICIAIRES DU YIELD MANAGEMENT

A..– LA VÉRITÉ DES COÛTS DU TRANSPORT FERROVIAIRE SUR CHAQUE BILLET

La prestation de transport ferroviaire se compose du recours au réseau et de l’utilisation du service de transport proprement dit. L’introduction de la concurrence dans ce secteur implique que le consommateur prenne conscience que les deux services doivent être rémunérés de manière à assurer leur pérennité et donc leur renouvellement.

Le prix acquitté par le consommateur doit donc faire apparaître les deux composantes : péages pour le réseau et rémunération du transporteur.

Votre Rapporteur a traité cette question lors de son rapport d’information consacré aux péages ferroviaires (15).

La proposition n° 2 de ce rapport a été énoncée de la manière suivante

Pour améliorer l’information des consommateurs, les billets de TGV devraient mentionner le prix du péage correspondant au trajet effectué.

Cette proposition doit être mise en application d’urgence par la SNCF. Il devra évidemment en être de même pour les nouveaux opérateurs, après l’ouverture à la concurrence.

B.– LE TARIF PROPOSÉ DÉCRYPTÉ AVEC LE PRIX MÉDIAN

Le système de tarification mis en œuvre par Air Inter comprenait quatre gammes de tarifs par destination. Sa lisibilité était bonne mais ce système est dépassé en efficacité par le yield management moderne, qui peut faire varier les tarifs siège par siège et vol par vol.

La modernisation de la tarification est indispensable. Mais elle doit s’accompagner d’efforts importants pour améliorer encore la compréhension du public des nouvelles règles de formation des prix.

1.– L’autorité de contrôle favorable à une lisibilité accrue

Les tarifs de la SNCF ne sont homologués par l’État que pour partie seulement. Font l’objet d’une homologation, le tarif de base kilométrique des trains Corail, ainsi que le tarif de base du TGV au guichet pour les heures creuses et les heures de pointe (16).

L’État n’a pas communication du prix moyen ni du prix médian des tarifs de la SNCF sur les TGV. S’agissant des TER, l’État s’en remet à la concurrence pour en réguler les tarifs.

En tout état de cause, l’administration estime aujourd’hui nécessaire qu’au minimum, le client ait à sa disposition, afin de pouvoir arbitrer, la palette des tarifs en fonction du jour où il veut voyager.

2.– L’obligation d’affichage des prix

L’obligation d’affichage des prix est générale en France pour les produits et les services. La mise en place d’un système de yield management ne saurait atténuer ou faire disparaître cette obligation.

L’OBLIGATION D’AFFICHAGE DES PRIX SELON L’ARRÊTÉ DU 3 DÉCEMBRE 1987 RELATIF À L’INFORMATION DU CONSOMMATEUR SUR LES PRIX

Article 4 : le prix de tout produit destiné à la vente au détail et exposé à la vue du public, de quelque façon que ce soit, notamment en vitrine, en étalage ou à l’intérieur du lieu de vente, doit faire l’objet d’un marquage par écriteau ou d’un étiquetage.

Article 13 : le prix de toute prestation de services doit faire l’objet d’un affichage dans les lieux où la prestation est proposée au public.

L’affichage consiste en l’indication sur un document unique de la liste des prestations de services offertes et du prix de chacune d’elles. Ce document, exposé à la vue du public, doit être parfaitement lisible de l’endroit où la clientèle est habituellement reçue.

En outre, le prix de tout ou partie des prestations proposées au public doit faire l’objet d’un affichage lisible de l’extérieur, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

Article 1 : Toute information sur les prix de produits ou de services doit faire apparaître, quel que soit le support utilisé, la somme totale toutes taxes comprises qui devra être effectivement payée par le consommateur, exprimée en euros.

Article 15 : Des modalités d’information sur les prix, particulières à certains produits ou service, peuvent être prévues par arrêté ministériel.

Il résulte notamment de l’arrêté du 3 décembre 1987 que, dans le cas des services, les prestations offertes et le prix de chacune d’elles doivent figurer sur un document unique.

Ces dispositions ne semblent pas respectées, ni pour la documentation classique sur support papier, ni pour le système de réservation par Internet.

3.– Les avantages et les inconvénients des guides imprimés

La publication des tarifs dans des documents imprimés a pour inconvénient de limiter la réactivité des prix aux évolutions de la demande. Cet inconvénient est amoindri mais n’est pas supprimé par la mise en place de fourchettes de prix.

La SNCF a remplacé les guides voyageurs, dont les prix de revient étaient élevés, par des fiches horaires, dont l’inconvénient majeur est qu’elles ne comprennent plus les tarifs. Par ailleurs, la SNCF admet que l’information sur les règles du jeu relatives aux prix Prem’s, au tarif Loisir réduit et au tarif Loisir standard ainsi qu’aux cartes commerciales, n’est pas suffisante.

De nouveaux guides doivent donc être publiés en octobre 2008 pour les services de décembre 2008. Ils comporteront les nouveaux tarifs.

LISIBILITÉ DES TARIFS ET SOUPLESSE DE GESTION

Air France publie les différentes classes de réservation, et ses tarifs sont publics.

Toutefois, si l’influence sur le tarif des deux paramètres essentiels, le délai de réservation (APEX Advanced Purchase Excursion) et la durée du séjour sur place, était précédemment publique, il n’en est plus de même pour le délai de réservation.

Le système APEX affichait à l’avance les dates limites générant des réductions. Le nouveau système dit « Delay out » entraîne des fermetures de classes de réservation qui ne sont pas prédéterminées et qui sont décidées par le programme de yield management.

4.– Les améliorations proposées par la SNCF

Pour améliorer la transparence de ses tarifs, la SNCF propose de communiquer, sur ses futurs guides imprimés, des fourchettes de prix, tant pour la 2nde classe que pour la 1ère classe. Grâce à ces fourchettes de prix, le consommateur pourrait situer le tarif qu’on lui propose lors de l’achat de son billet.

Le tableau suivant donne un exemple de ce que pourraient être les propositions de la SNCF.

PROJET D’INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES SUR LA TARIFICATION TGV

(en euros)

 

2nde classe

1ère classe

 

Prix minimum

Prix maximum

Prix minimum

Prix maximum

 

Prem’s

Non échangeable Non remboursable

Loisir

Échangeable

Remboursable

Loisir en Période normale

Échangeable Remboursable

Loisir en période de pointe

Échangeable Remboursable

Prem’s

Non échangeable Non remboursable

Loisir

Échangeable

Remboursable

Loisir

Échangeable

Remboursable

Paris – Agen

22

49

75

87,70

40

64

113,30

Paris – Aix en Provence TGV

22

51

78,20

95,70

40

66

133,30

Paris – Aix les Bains le Revard

22

43

66,20

84,60

40

58

111,70

Source : SNCF

La communication de fourchettes de prix telles que proposées par la SNCF ne semble répondre que de manière imparfaite aux besoins d’information du consommateur.

D’abord, la multiplicité des informations fournies en complique la lecture.

Ensuite, les informations données sur les tarifs Prem’s sont d’une faible utilité dans la mesure où la consultation du tableau ne renseigne pas sur l’importance relative de cette offre sur le marché. Il en est de même pour les autres informations relatives aux tarifs Loisir pour lesquelles ne figurent pas la pondération des différentes offres Loisir et leur part dans les offres totales.

5.– Pour l’affichage du prix médian

En réalité, pour évaluer l’intérêt de l’offre qui lui est faite, le consommateur a besoin d’une seule information : le prix médian hors cartes d’abonnement des billets émis pour le trajet considéré pendant l’année antérieure.

Le prix médian est le prix qui sépare la population de consommateurs en deux parties égales.

Pourquoi afficher le prix médian plutôt que le prix moyen ?

Le prix moyen tout marché est un indicateur synthétique qui tient compte de la pondération des différents tarifs dans l’offre globale. Il intègre la part des différents tarifs et des effectifs qui en ont bénéficié.

Le niveau du prix moyen dépend de la politique commerciale de l’entreprise qui est de sa responsabilité.

On trouvera à titre indicatif au tableau suivant les prix moyens pour différentes liaisons TGV.

PRIX MOYENS SUR DIFFÉRENTS TRAJETS

(en euros)

Trajet

Prix moyen tout marché

Panier moyen 2nde Loisir Fréquent

Panier moyen 2nde Loisir Occasionnel

Paris Est – Reims

17,62

15,93

24,49

Paris Est – Strasbourg

47,19

37,50

48,56

Nancy Ville – Paris Est

36,30

28,60

38,29

Metz Ville – Paris Est

34,91

28,62

38,71

       

Lille Flandres – Paris Nord

29,30

23,80

34,99

Lille Europe – Paris Nord

28,51

25,72

37,04

       

Paris Montparnasse 1 et 2 – Rennes

38, 93

30,84

43,88

Le Mans – Paris Montparnasse 1 et 2

21,55

21,74

32,96

Nantes – Paris Montparnasse 1 et 2

42,72

32,21

45,29

       

Paris Montparnasse 1 et 2 – Saint Pierre des Corps

24,01

24,84

35,58

Angers St Laud – Paris Montparnasse 1 et 2

35

28,40

40,95

Bordeaux St Jean – Paris Montparnasse 1 et 2

44,20

39,61

50,35

       

Dijon Ville – Gare de Lyon

31,33

25,84

36,16

Lyon Part Dieu – Paris Gare de Lyon

50,98

37,77

53,02

Lyon Perrache – Paris Gare de Lyon

49,16

38,07

51,26

Grenoble – Paris Gare de Lyon

53,61

41,81

53,04

Avignon TGV – Paris Gare de Lyon

59,04

50,31

59,51

Aix en Provence TGV – Paris Gare de Lyon

61,02

50

59,92

Marseille St Charles – Paris Gare de Lyon

55,58

48,73

58,59

Montpellier – Paris Gare de Lyon

54,29

47,79

57,77

Le prix médian est, au contraire, une donnée spécifique au consommateur, qui le renvoie à sa propre capacité d’initiative. Se situe-t-il dans les 50 % de la population de consommateurs qui paient le plus ou dans les 50 % de la population qui paient le moins ?

C’est pourquoi au moment de prendre sa décision d’achat, le consommateur doit disposer de cette information.

L’affichage du prix médian de l’année antérieure présente en outre l’avantage de permettre de suivre son évolution dans le temps.

Dans la mesure où le prix médian est connu, il semble inutile de pérenniser la distinction entre période normale et période de pointe. En tout état de cause, pour le yield management, cette information présente une importance secondaire par rapport à l’antériorité de la demande et aux contingents affectés aux différents tarifs. Pour le consommateur, seul compte, au moment du choix, le prix proposé par rapport au prix médian.

Enfin, le prix médian devrait s’afficher sur l’écran de l’internaute ainsi que sur celui du guichetier, mais aussi sur un écran répéteur de celui du guichetier installé face au client après le renouvellement des installations de réservation en gare ou en agence.

C.– LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

La lutte contre la fraude fait partie intégrante d’une gestion commerciale moderne et performante.

La fraude est estimée à 11 % du chiffre d’affaires de la SNCF en Île-de-France.

Pour l’ensemble de ses prestations voyageurs, la SNCF estime la fraude à 0,2 % du chiffre d’affaires de la branche Voyages France Europe, soit près de 14 millions d’euros par an.

Si la fraude génère donc une perte de chiffre d’affaires non négligeable, elle entraîne aussi une grande insatisfaction de la clientèle en raison des désordres, de l’insécurité et des frustrations qu’elle occasionne.

À titre de comparaison, Air France juge le contrôle de la recette comme essentiel pour la rentabilité. L’encadré suivant décrit brièvement les dispositions prises par Air France, qui évoquent certains des problèmes rencontrés par la SNCF.

LE CONTRÔLE DE LA RECETTE PAR AIR FRANCE

Pour Air France, le yield management a trois composantes essentielles (17).

La tarification, qui prend appui sur une segmentation fine de la clientèle en fonction de ses besoins et de son comportement d’achat, permet de maximiser la recette par passager-kilomètre. Les deux critères fondamentaux pour la clientèle sont le délai et la flexibilité de la date de réservation.

La gestion des vols a pour objectif de maximiser le taux de remplissage. La gestion des classes de tarifs est dynamique dans la mesure où la fermeture de classes s’effectue en fonction des réservations enregistrées. En période de pointe, les classes relatives aux tarifs les plus bas ont des effectifs réduits et sont fermées rapidement. En dépit de l’utilisation croissante des heures creuses pour acheminer les passagers vers le hub de Roissy, Air France s’efforce de ne pas pénaliser par des tarifs rédhibitoires les passagers choisissant ces périodes.

Le contrôle de la recette est essentiel pour la rentabilité.

Les réservations non fiables sont systématiquement annulées. Des programmes informatiques annulent les réservations des agences qui ne se sont pas traduites par l’émission des billets avant la date limite ou qui consistent en une réservation opérée dans une classe différente de celle de l’achat du billet.

Il en est de même pour les réservations multiples faites par une même personne sous plusieurs numéros.

Des redressements sont systématiquement effectués pour les billets dits « cross border » pour un parcours en plusieurs segments qui ne sont utilisés que sur une fraction du parcours total.

De même, les réservations sur période creuse que les clients tentent de transformer le jour même en trajet en heure de pointe sont interdites. Enfin, la compagnie s’efforce, malgré les difficultés, de lutter contre les fraudes sur les tarifs typologiques (senior en particulier), correspondant, par exemple, à des billets seniors achetés par des passagers d’un âge inférieur à l’âge limite.

En tout état de cause, il semble indispensable que la SNCF renforce ses dispositifs de lutte contre la fraude.

On peut par ailleurs se demander si l’existence d’un site Internet intitulé « Troc des Prem’s » ne traduit pas une faille du dispositif de réservation, en encourageant les réservations multiples et en privant la SNCF des recettes supplémentaires que pourrait générer l’application des tarifs standards.

La SNCF indique que le Troc de Prem’s ne concerne qu’un nombre limité de billets et qu’il n’existe pour le moment aucun moyen juridique de mettre fin à ce service d’échange, dans la mesure où ceux-ci sont gratuits et où les billets ne sont pas nominatifs tant qu’ils ne sont pas imprimés.

En réalité, on peut se demander s’il ne conviendrait pas que l’ensemble du processus de vente, incluant la réservation, l’émission du billet et le contrôle, soit nominatif. Si la mise en place du billet électronique va dans ce sens, la généralisation du caractère nominatif des billets s’impose, dans l’intervalle, pour tous les types de billets.

D.– LES GAGNANTS ET LES PERDANTS

Quel type de consommateur profite le plus du nouveau système de gestion tarifaire de la SNCF basé sur le yield management ?

Cette question est fondamentale, compte tenu de la mission de service public de la SNCF. Elle l’est également au regard de l’objectif de la SNCF pour les TGV, à savoir « réussir une politique de volume rentable avec un parc dimensionné pour la pointe, en proposant une grande vitesse populaire ».

Trois aspects doivent être examinés à cet égard : d’abord, les hausses moyennes intervenues sur un ensemble de trajets représentatifs, ensuite la capacité des consommateurs à comprendre les offres de la SNCF, et, enfin, les catégories de consommateurs qui sont le mieux à même, par leurs modes de vie et leurs besoins de transport de tirer parti de celles-ci. On examine également la question épineuse des soldes de dernière minute.

1.– Les hausses moyennes des tarifs sont conformes à la norme autorisée

Comme on l’a vu précédemment, la hausse tarifaire moyenne est autorisée chaque année par les pouvoirs publics, sur proposition de la SNCF.

Dans quelle mesure le yield management est-il compatible avec le respect de cette norme d’augmentation moyenne limitée ?

Les tarifs moyens pratiqués et observés respectent-ils l’augmentation maximale autorisée ?

Cette question est fréquemment soulevée par certaines associations de consommateurs qui présentent des cas de hausses supérieures à la norme autorisée.

Le tableau suivant, établi à la demande de votre Rapporteur spécial, présente les hausses moyennes intervenues sur différents trajets, observés entre le 16 janvier 2007 et le 29 janvier 2008.

ÉVOLUTION OBSERVÉE DES TARIFS MOYENS PRATIQUÉS POUR LE TGV EN 2007

 

Prix Loisir Standard au 16/01/07

Prix Loisir Standard 29/01/2008

Croissance
(en %)

Trajet

TN 2PN

TN 2PP

TN 1ère

2PN

2PP

1ère

2PN

2PP

1ère

Paris Gare de Lyon –

Lyon Part Dieu

59,9

78,1

106,7

61

79,5

108,9

1,8

1,8

2,1

Paris Gare de Lyon – Marseille Saint Charles

76,8

94

130,6

78,2

95,7

133,3

1,8

1,8

2,1

Paris Montparnasse 1 et 2 – Bordeaux Saint Jean

65,1

76,7

100,7

66,2

78,1

102,8

1,7

1,8

2,1

Paris Gare de Lyon - Montpellier

75,8

92,8

129,9

77,1

94,5

132,5

1,7

1,8

2

Paris Montparnasse 1 et 2 - Nantes

54

68,9

98,5

54,9

70,2

100,5

1,7

1,9

2

Paris Montparnasse 1 et 2 - Rennes

51,3

64,8

91,8

52,2

66

93,7

1,8

1,9

2,1

Paris Gare de Lyon –

Aix en Provence TGV

76,8

94

130,6

78,2

95,7

133,3

1,8

1,8

2,1

Paris Gare de Lyon –

Avignon TGV

76,8

94

130,6

78,2

95,7

133,3

1,8

1,8

2,1

Paris Gare de Lyon – Grenoble

69,9

86,8

115,1

71,1

88,4

117,5

1,7

1,8

2,1

Paris Nord – Lille Flandres

37

51,3

66,5

37,6

52,2

67,8

1,6

1,8

2

Paris Gare de Lyon –

Lyon Perrache

59,9

78,1

106,7

61

79,5

108,9

1,8

1,8

2,1

Paris Gare de Lyon – Dijon Ville

41,2

51,7

71,4

41,9

52,6

72,8

1,7

1,7

2

Paris Montparnasse 1 et 2 – Angers St Laud

45,3

58,5

84

46,1

59,6

85,7

1,8

1,9

2

Paris Montparnasse 1 et 2 –

St Pierre des Corps

38,4

51,5

71,4

39,1

52,4

72,8

1,8

1,7

2

Paris Montparnasse 1 et 2 –

Le Mans

34

48

65,4

34,6

48,9

66,7

1,8

1,9

2

Paris Nord – Lille Europe

37

51,3

66,5

37,6

52,2

67,8

1,6

1,8

2

Paris Est - Strasbourg

 

 

 

63,7

79,8

113,2

 

 

 

Paris Est – Nancy Ville

 

 

 

50,5

62,7

89,9

 

 

 

Paris Est – Metz Ville

 

 

 

50,5

62,7

89,9

 

 

 

Paris Est - Reims

 

 

 

28,3

36,4

49,5

 

 

 

Source : SNCF

Les variations sont calculées pour les tarifs Loisir standard, à la fois pour la première classe et pour la seconde classe en période normale (PN) ou en période de pointe (PP).

Le tableau ci-dessus montre que, sur les trajets étudiés, les hausses sont inférieures à 2 % pour les tarifs moyens de seconde, que ce soit en période normale ou en période de pointe.

Les hausses intervenues pour les tarifs de première classe sont de 2 % ou de 2,1 %.

L’utilisation du yield management en 2007 ne s’est donc pas traduite par des hausses indues des tarifs moyens.

2.– La transparence et la lisibilité des offres de la SNCF pour les « dégourdis » et les « non dégourdis »

Les critiques adressées à la SNCF dans le domaine de la lisibilité des tarifs visent la pléthore des offres et de renseignements divers conjuguée à l’absence de réponse à des questions simples permettant au consommateur de faire des choix en toute connaissance de cause.

Il est incontestable qu’au premier niveau de la compréhension des offres de la SNCF, il existe un partage en deux catégories, celle des utilisateurs confirmés d’Internet que l’on pourrait appeler les « dégourdis » au sens informatique du terme et les autres, les « non dégourdis » qui n’ont pas d’accès au site de réservation de la SNCF ou bien qui n’ont ni la capacité ni le goût d’en découvrir les subtilités.

Une autre catégorisation pourrait distinguer les plus flexibles et les moins flexibles.

Les « dégourdis », en explorant les sites Internet de la SNCF fréquemment et en profondeur, sont à même de débusquer les incohérences du système, les offres intéressantes et celles qui le sont moins.

Même si la SNCF certifie que les informations communiquées à la clientèle sont les mêmes quel que soit le canal utilisé – documentation papier, guichets ou sites web – , il est clair que l’internaute chevronné dispose d’une accessibilité incomparable à l’information et se trouve être le mieux à même de saisir les offres intéressantes.

À cet égard, le foisonnement des offres pour les TGV est tel qu’on pourrait le considérer comme une série de tests en vraie grandeur des réactions du marché.

Pour répondre à ce type d’objections, la SNCF a mis à l’étude une simplification de son système d’offre.

On trouvera ci-après la copie d’un schéma de travail relatif à une simplification de l’offre qui laisse l’observateur quelque peu perplexe.

Il semble indispensable qu’à l’avenir, des progrès soient faits dans la lisibilité du système de tarification, ceci incluant le cas échéant des changements terminologie et l’utilisation de dichotomies claires comme la distinction Professionnel-Personnel qui figure d’ailleurs sur les écrans du site Internet de réservation.

3.– Le consommateur flexible et capable d’anticipation doit-il être le gagnant principal du yield management ?

Le yield management, comme on l’a vu précédemment, n’est pas par principe défavorable au consommateur. Il permet de mettre en place des prix bas en heures creuses et d’augmenter les taux de remplissage, donc la rentabilité du service.

À l’autre extrémité des tarifs, en évaluant avec précision les capacités contributives des usagers, le yield management diminue les effets d’aubaine dont pourraient bénéficier des passagers à fort pouvoir d’achat et accroît ainsi la rentabilité des services proposés aux heures de pointe.

On pourrait donc dire, d’une certaine manière, que les consommateurs flexibles et les consommateurs haut de gamme subventionnent les autres.

Qu’en est-il exactement ?

Deux tableaux fournis par la SNCF fournissent un éclairage partiel mais pas inintéressant de cette question.

Le premier tableau résume différentes informations communiquées à votre Rapporteur spécial sur les nombres de billets et les prix moyens acquittés par les différentes catégories de voyageurs.

PRIX MOYENS ACQUITTÉS PAR CATÉGORIES DE CONSOMMATEURS

Tarif

Conditions

Nombre de billets vendus entre le 07/10/07 et le 31/08/08

Taux de réduction moyen

Panier moyen

Pro fréquent

Client titulaire d’un abonnement pro (fréquent ou forfait)

9 millions

 

48,50

Pro occasionnel

Client acquittant le tarif TGV pro

8 millions

 

Loisir fréquent

Carte commerciale : 12-25 (1,5 million de porteurs), Senior (1 million de porteurs), Enfant+ et Escapades (environ 0,5 million de porteurs ensemble)

19 millions

45 %

 

Loisir réduit

 

10 millions

28 %

43,60

Loisir standard

 

8 millions

 

Prem’s

     

37,20

Bons plans du Net

 

500 000

   

Ensemble

     

43,30

Source : SNCF

D’après ces chiffres malheureusement incomplets, la hiérarchie des tarifs affichés se reflète dans les tarifs acquittés. Le prix moyen correspondant aux tarifs Pro s’élève à 48,50 euros, celui des Prem’s à 37,20 euros pour un prix moyen de 43,30 euros.

On remarquera par ailleurs que les trois millions de titulaires d’une carte commerciale représentent l’essentiel du trafic, avec 19 millions de billets vendus entre le 7 octobre 2007 et le 31 août 2008, pour un taux de réduction moyen de 45 %.

Le tableau suivant met par ailleurs en évidence l’augmentation du nombre de voyages après la mise en place en octobre 2007 du nouveau système de yield management intitulé NOTES.

COMPARAISONS DES TRAFICS TGV PAR CATÉGORIES DE VOYAGEURS

(en nombre de voyages)

Tarif

Nombre de voyages

octobre 2006-août 2007

Nombre de voyages

octobre 2007-août 2008

Évolution du trafic
(en %)

TGV Pro

6 986 700

7 248 400

3,7 

Gamme LOISIR hors Prem’s

18 864 500

19 004 000

0,7 

Prem’s

3 190 200

3 797 500

19

Carte 12-25

8 684 400

9 719 100

11,9 

Carte SENIOR

4 198 200

4 347 200

3,5 

Carte ENFANT+

2 536 900

2 758 800

8,7 

Carte ESCAPADES

1 141 500

1 285 600

12,6 

Famille Nombreuse

2 137 300

2 167 700

1,4 

Source : SNCF

On constate que la progression la plus forte du nombre de voyages correspond aux Prem’s avec 19 % sur la période octobre 2007 – août 2008 par rapport à la période octobre 2006 – août 2007.

En revanche, les volumes de voyages et la progression enregistrée sont faibles pour les cartes Famille Nombreuse, Senior et Loisir hors Prem’s.

Ces chiffres semblent en conséquence montrer que les catégories correspondantes ne sont pas correctement informées et mobilisées par la SNCF, voire que cette clientèle ne constitue pas une cible prioritaire pour la SNCF.

Le consommateur flexible et virtuose sur Internet est-il le seul à même de rentabiliser les services TGV ?

À cette question, si la SNCF semble avoir répondu, la tutelle ne semble pas l’avoir fait.

4.– Le dilemme du remplissage de dernière minute

Les ventes de places à petits prix quelques jours avant le départ sont une source d’insatisfaction notoire des usagers ayant effectué des réservations antérieurement à des prix plus élevés. Ce cas se produit notamment lorsqu’une rame est doublée.

Les promotions de dernière minute sont fréquentes dans certains secteurs, comme pour les tours opérateurs. Dès lors que la probabilité de rencontre et de discussion entre les clients sur les tarifs acquittés est forte, l’expérience montre que les promotions de dernière minute présentent un fort inconvénient potentiel en terme de satisfaction de la masse de la clientèle et d’image de l’entreprise.

Selon la SNCF, le phénomène de réouverture des classes de contrôles n’a que peu augmenté en terme de fréquence. Ces réouvertures concernent un nombre de places limitées.

Cependant, le plus grand éventail de prix, en particulier pour les cartes, a rendu ce phénomène plus visible

La SNCF envisage pour l’avenir de se donner pour règle de ne rouvrir des contingents à bas prix que 60 jours avant le départ et non pas 30 jours avant celui-ci.

On peut se demander si cette disposition suffit et si la gamme d’offres ne doit pas être davantage modifiée.

E.– LE RÉGULATEUR FERROVIAIRE ET LES TARIFS DE LA SNCF

Une autorité de régulation ferroviaire est sur le point d’être créée en France, après le dépôt au Sénat du projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés, et portant diverses dispositions relatives aux transports, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence des services de transport ferroviaire prévue par l’Union européenne (18).

Les dispositions proposées par le projet de loi pourraient être complétées sur plusieurs points de manière à améliorer la transparence sur les tarifs ferroviaires, en amplifiant le rôle de la future commission de régulation des activités ferroviaires (CRAF).

Dans le domaine des tarifs, le projet de loi prévoit que la commission pourrait émettre un avis sur les tarifs des services de transport de voyageurs réalisés à titre exclusif par une entreprise ferroviaire à la demande de l’autorité administrative compétente. Il serait utile pour la transparence de l’information de lui donner au contraire un pouvoir d’autosaisine sur ces sujets.

Au reste, la commission pourrait également se voir confier un rôle de médiation dans les conflits entre associations de consommateur et transporteurs ferroviaires.

Il est prévu, pour le moment, que les ressources de la commission soient d’origine budgétaire, selon le modèle de la commission de régulation de l’Énergie (CRE), de l’autorité de régulation des Communications électroniques et des postes (ARCEP) ou du conseil de la Concurrence.

On peut se demander s’il ne serait pas préférable, compte tenu de son rôle accru en faveur de la transparence et de la résolution des conflits entre consommateurs et transporteurs ferroviaires que son financement soit assuré par une contribution minime sur les billets de train.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 15 octobre 2008 à 9 heures, votre commission des Finances a examiné le rapport d’information de votre Rapporteur sur la politique tarifaire de la SNCF.

M. Alain Rodet, président d’âge. Nous allons examiner le rapport d’information sur la politique tarifaire de la SNCF présenté par M. Hervé Mariton et sous-titré : « le consommateur a le droit de comprendre ». Un quotidien économique de ce matin fait déjà largement écho aux conclusions de ce rapport. Nous avons donc l’eau à la bouche !

Votre Rapporteur. Quand j’ai pris en charge en 2002 l’établissement du rapport spécial sur les transports terrestres, j’ai rencontré le président de la SNCF de l’époque qui s’était dit prêt à tout me dire… sauf ce qui concernait le secret médical et les pratiques commerciales de son établissement. Je m’étais permis de lui répondre que, si je respectais le secret médical, je n’avais pas compris en revanche que les pratiques commerciales étaient exclues du champ d’investigation du rapporteur spécial.

Après la réunion d’une mission d’évaluation et de contrôle sur le financement du système ferroviaire et mon rapport d’information présenté à la commission, avant l’été, sur les péages ferroviaires et les rapports de la SNCF avec Réseau ferré de France, je me suis attelé à la question de la politique tarifaire. Elle est très présente dans le débat public, notamment depuis la présentation par la SNCF, en mai 2007, de sa politique de contingentement tarifaire intitulée NOTES, dont vous trouverez quelques éléments en annexe au rapport.

Le sujet est important compte tenu de la part du trafic voyageur, en particulier TGV, dans le résultat de la SNCF. Il a des conséquences pour toutes les autres questions, notamment l’évolution du fret. Et son importance ne fera que s’accroître avec l’ouverture à la concurrence.

La dispersion tarifaire observable à la SNCF aujourd’hui est de 1 à 3 sur les mêmes places physiques d’une même rame et de 1 à 5 sur les mêmes places physiques de deux rames accolées si l’on rapproche le concept d’iDTGV du TGV. Notons que, dans les transports aériens, les écarts peuvent être de 1 à 7.

Les associations de consommateurs ont soulevé les questions suivantes. À l’occasion du changement de politique tarifaire, accentué en 2007 par le programme NOTES, y a-t-il eu des hausses masquées ? La réponse est non. Il n’y a pas d’abus. Le consommateur peut-il s’y retrouver ? La réponse est également non. Le système tarifaire actuel est confus et fait coexister des logiques incompatibles. Il y a d’abord le yield lui-même – « plus j’achète tôt et moins je paie cher » – atténué par un effet soldes en fin de course – « plus j’achète tôt, moins je paie cher, sauf si j’achète très tard » – qui sont des aménagements que l’on trouve dans d’autres métiers. Il y a aussi une approche transverse : le calendrier historique que nous avons connu dans notre jeunesse, à savoir les périodes « bleu », « blanc », ou « rouge » réduites aujourd’hui au « bleu » et au « blanc », ou, s’agissant des TGV, aux périodes normales et aux périodes de pointe.

Consciente de la complexité du système et des questions qu’il suscite, la SNCF a prévu la publication pour cet hiver d’un document écrit de communication auprès de ses clients sur ses tarifs, ce qu’elle n’avait pas fait depuis plusieurs années. Mais ce document présente des tableaux si complexes qu’ils me paraissent illisibles, parce qu’ils font référence, sur tout un ensemble de destinations, aux tarifs Prem’s, aux tarifs Loisirs et aux tarifs Pro sur les périodes de pointe et sur les périodes normales. La pondération des différentes offres n’est pas indiquée, de sorte que le client ne peut pas savoir quelle est leur part dans les offres totales.

Le yield est un outil répandu. Il est apparu d’abord dans le transport aérien et s’est étendu ensuite, des activités de transport aux secteurs de l’hôtellerie, du voyage et du spectacle. Un opérateur doit jouir d’une grande liberté tarifaire ; mais il faut veiller à ce que le consommateur puisse comprendre. Ces questions relèvent donc du droit de la consommation.

Mais elles touchent également à la politique des transports et aux relations entre l’État et la SNCF, celle-ci étant une entreprise de service public qui doit répondre, de par les textes, à un certain nombre de conditions d’encadrement de sa politique tarifaire. Force est de constater que la tutelle est aujourd’hui incapable d’assurer cet encadrement. Elle le reconnaît d’ailleurs. Un ancien directeur des transports terrestres que j’ai entendu s’est déclaré heureux que nous menions ce travail parce que lui-même n’avait jamais pu obtenir de réponses à ces questions. Le ministère chargé des Transports a depuis longtemps capitulé, n’appliquant qu’une politique d’homologation de tarifs assez théorique, lointaine et marginale : il se battra, par exemple, pour savoir si, dans la distinction des périodes « bleu » et « blanc » restantes, le week-end démarre à quatorze heures ou à quinze heures. Ces questions, sans être marginales, sont périphériques par rapport à la problématique du yield.

Un avis du Conseil d’État de 1993, qui figure dans le rapport, fixe un certain nombre de repères éclairants. Ils sont probablement surnuméraires et certains ont sans doute vieilli mais ils existent et montrent, comme je l’indiquais, que la tutelle est mal assurée.

La logique du yield, qui est d’optimiser le résultat d’une activité, de « tirer de chaque consommateur le maximum de capacité contributive », pour reprendre les termes d’une note de la SNCF, peut être rendue compatible avec la qualité de service public de cet établissement, car elle permet de faire bénéficier des consommateurs plus flexibles d’un accès particulièrement abordable au train. La SNCF doit à la fois avoir une grande souplesse de pratique commerciale, pour mettre en œuvre ce yield qui doit pouvoir évoluer de manière très rapide et quasiment constante, et répondre aux quelques éléments de référence propres à l’entreprise. Même si elle n’était pas une entreprise de service public, d’ailleurs, elle aurait une responsabilité d’information vis-à-vis du consommateur.

D’où l’idée majeure du rapport : il n’y a lieu d’encadrer qu’une seule chose, le prix de référence. Pour le définir, je propose de prendre le prix médian hors cartes d’abonnements, c’est-à-dire le prix qui sépare la population des consommateurs en deux parties égales : la moitié qui paie plus cher et la moitié qui paie moins cher. Les voyageurs seront ainsi en mesure d’apprécier le prix qui leur est proposé et la SNCF sera amenée à justifier ce prix en raison des services différents qu’il comporte. Elle explique, en effet, la complexité de ses tarifs par le fait qu’elle offre des services variés allant de l’accueil dans un salon à la possibilité d’annulation et de remboursement. Il faut qu’elle puisse le justifier au titre d’une référence. La définition d’un prix de référence lui permettra aussi de justifier différemment sa politique de cartes, le client ne sachant pas actuellement sur quel chiffre est appliqué le pourcentage de sa réduction.

Six autres propositions sont formulées en tête du rapport.

La proposition suivante se situe dans la ligne du rapport du printemps dernier sur les péages ferroviaires. Je propose que tout billet de TGV comporte l’indication du montant du péage acquitté par le voyageur, en euros et en pourcentage de son prix total. Je sais que le péage n’est pas payé par le voyageur, mais, comme il est proportionnel aux sillons utilisés, une proratisation peut être faite.

Troisièmement, la différenciation entre heures normales et heures de pointe ne s’appliquerait plus à la tarification TGV.

Quatrièmement, le client qui prend ses billets au guichet, et qui est souvent moins « dégourdi » – au sens informatique du terme – que celui qui achète sur Internet, disposerait d’un partage d’écran avec l’employé de la SNCF.

Cinquièmement, les billets seraient nominatifs pour lutter contre la fraude, y compris celle sur l’usage de tel ou tel billet. La SNCF est assez pudique sur ce point alors que le transport aérien y met l’accent dans toutes ses politiques de yield management et de nuancement tarifaire. Des marges importantes sont à retirer pour l’entreprise, et peuvent aussi profiter aux consommateurs.

Sixièmement, je propose que la future commission de régulation des activités ferroviaires, la CRAF – qui sera créée par un projet de loi adopté en Conseil des ministres, mais qui n’a pas encore été examiné par le Parlement – puisse bénéficier d’une capacité d’autosaisine, ce que ne prévoit pas actuellement le texte.

Enfin, la tutelle de la SNCF se recentrerait sur l’agrément des prix médians.

De nombreuses auditions ont permis d’entendre des personnalités très diverses et de réunir des informations inédites. À la liste des intervenants annexée au rapport (membres du Conseil général de l’environnement et du développement durable – l’ex-Conseil général des Ponts et Chaussées –, ministère de l’Écologie...) il faut ajouter le ministère chargé de la Consommation puisque j’ai entendu le directeur de cabinet de M. Luc Chatel, qui est assez sensible à notre approche. Nous avons également entendu des responsables de la SNCF, d’Air France et d’Accor, des membres du cabinet de revenue management Simon-Kucher, des universitaires, des associations de consommateurs : la Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie – CLCV – et la Fédération nationale des associations d’usagers des transports – FNAUT.

La SNCF a été plutôt coopérante et très diserte sur la description physique du sujet, moins sur les données économiques et de clientèle, même si la consultation s’est passée dans de bonnes conditions : je n’ai pas réussi à avoir une bonne compréhension des catégories qui étaient gagnantes ou perdantes dans la mise en place du système.

La SNCF a indiqué clairement qu’elle entendait faire ses propres propositions à la fin du mois d’octobre, en concertation avec le secrétaire d’État chargé de la Consommation. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons entendu le directeur de cabinet de M. Luc Chatel. C’est un élément d’éclairage utile sur des phénomènes qui ne peuvent que s’amplifier. Comme je l’ai rappelé, les écarts de prix sont de 1 à 7 dans les transports aériens alors qu’ils sont aujourd’hui de 1 à 3 pour une rame TGV. L’ouverture des lignes ferroviaires internationales en 2010 va relancer la question. De plus le yield origine-destination, important dans le transport aérien, n’est que marginal dans le ferroviaire ; mais il peut ne plus l’être demain, en particulier s’il y a concurrence sur des trajets faisant l’objet de cabotage sur les liaisons internationales. Comment comparera-t-on un Paris-Nice et un Paris-Valence ? On peut se trouver dans des situations quasi absurdes où, le Paris-Nice étant concurrencé par l’aérien, une politique d’optimisation de la SNCF conduirait à le vendre moins cher qu’un Paris-Valence. Il coûtera peut-être moins cher demain de voyager plus loin !

La SNCF ne veut pas aller jusque-là. Elle affirme ne faire du yield origine-destination que de manière marginale. Mais elle est parfaitement consciente de l’intérêt qu’il présente pour elle. En tout cas, le débat ne peut que prendre de la force. C’est pourquoi il me paraît utile de fixer quelques références.

Le régulateur que nous allons installer, à savoir la commission de régulation des activités ferroviaires, fixera sa jurisprudence, y compris sur les questions de régulation tarifaire. Mais, avant qu’elle le fasse, il n’est pas inutile que quelques principes d’action publique soient proposés par le législateur et énoncés par l’exécutif afin d’éclairer le débat.

M. Jean-Pierre Gorges. Je suis un peu surpris par ce rapport car je considère que la politique tarifaire de la SNCF est de bonne pratique pour lutter contre ses concurrents privés. D’ailleurs elle lui a permis d’améliorer son résultat.

Votre Rapporteur. Je ne critique pas le yield !

M. Jean-Pierre Gorges. Je sais que la régulation est à la mode. Chaque incident donne envie de faire une loi. Mais ici nous avons la démonstration que le marché est capable de réguler les prix. Cela ne me choque pas qu’un Paris-Nice soit plus cher qu’un Paris-Valence. Personnellement, j’utilise beaucoup les possibilités offertes par le yield. Pendant des années, je réservais très à l’avance mes voyages. Aujourd’hui, j’ai compris que l’important était de le faire au bon moment et je trouve toujours un bon plan. Je paie moins cher un vol Paris-Athènes, que je prends régulièrement, qu’un vol Paris-Nice. J’aimerais que ce soit également possible à la SNCF.

À trop critiquer la politique tarifaire de celle-ci, je crains que l’usager ne comprenne plus rien. Si la SNCF parvient à ajouter aux avantages du service public les techniques destinées à améliorer la gestion du secteur privé, elle va être meilleure que tout le monde.

En 2010, tous les réseaux ferroviaires seront ouverts à la concurrence. S’il y a des opérateurs à deux vitesses, la régulation s’appliquant aux uns et pas aux autres, cela va encore compliquer les choses, alors que la SNCF a enfin réduit son déficit et qu’elle obtient des résultats.

M. Alain Rodet, président. Ne sous-estimez pas le rôle de la partition entre RFF et la SNCF dans ces résultats.

M. Pascal Terrasse. En effet, si l’opérateur SNCF dispose de comptes consolidés satisfaisants depuis deux ans, c’est d’abord en raison de la partition opérée entre l’infrastructure et la gestion courante. Si on réintégrait le coût de RFF dans les comptes consolidés de la SNCF, la situation serait très différente.

Les grandes associations de consommateurs nous alertent depuis plusieurs années sur la multiplication des tarifications chez tous les grands opérateurs de services. La semaine dernière une enquête sur la téléphonie mobile a dénombré entre 53 et 56 forfaits différents. C’est un véritable maquis où plus personne ne se retrouve. La SNCF suit de plus en plus la même logique, en proposant des tarifications différentes suivant les horaires, les jours, les périodes, les familles. Il importe, aujourd’hui avec cet opérateur, demain avec d’autres, de faire en sorte que l’information soit la plus transparente possible.

Ma deuxième remarque concerne l’ouverture des réseaux ferroviaires à la concurrence, notamment de la SNCF, aujourd’hui entreprise nationale et, demain, peut-être, des concessions de transport régionaux, au travers des délégations de service public. Je ne pense pas que des opérateurs internationaux soient tentés de venir sur le marché du TGV ou des grandes lignes. Mais les réseaux locaux, notamment TER, pourraient être soumis à la concurrence d’autres sociétés. Il importe de vérifier la manière dont la tarification sera établie. On considère généralement que plus il y a de concurrence et plus les prix baissent. Ce n’est pas toujours vrai. Il faudrait que les prix soient relativement encadrés. Après la privatisation des sociétés autoroutières, bien qu’il y ait eu un cahier des charges puis une maîtrise des coûts, on a vu comment les choses ont finalement évolué.

Mon troisième point porte sur les tarifs sociaux. Je suis surpris que l’on demande à la SNCF de participer sur ses propres fonds à des dispositifs à caractère social. On ne peut pas l’inciter à être plus compétitive et, en même temps, lui mettre un boulet au pied en la chargeant, en fait, de pallier le désengagement de l’État. La même remarque vaut pour La Poste, vis-à-vis de laquelle il faut arrêter d’être schizophrène. J’ai été surpris de l’annonce faite, il y a quelques semaines, par le Président de la République et la secrétaire d’État à la famille, qui parlaient de rétablir les tarifs sociaux pour les familles et les personnes âgées.

Enfin la carte vermeille m’étonnera toujours. Si elle se justifiait quand les retraités disposaient de retraites très faibles, je ne suis pas certain qu’aujourd’hui un jeune de moins de vingt-cinq ans, qui a un petit salaire, dispose d’avantages aussi importants.

M. Alain Rodet, président. Si j’ai bien compris vos conclusions, M. le rapporteur spécial, il y a quand même une petite chèvre blanche attachée à son piquet : c’est le « non dégourdi » qui a entre vingt-six et cinquante-neuf ans. Comme on dit chez moi dans le Limousin, il est « bourru » !

Votre Rapporteur. Il en existe !

M. Alain Rodet, président. Certes ! Votre rapport, au demeurant excellent, s’appuie essentiellement sur le produit vedette qui est le TGV. Vous évoquez peu le Corail Téoz qui est un désastre. Quatre ans après sa mise en service, les voitures sont dégoûtantes. Leur aménagement a été complètement raté. Elles ont été surélevées, si bien qu’on a mal au cœur. Le directeur de cabinet du Président de la République, le préfet Frémont, qui prend le même Téoz que moi, est du même avis : c’est une honte pour la SNCF. Or on ne peut bâtir une politique commerciale qu’à partir d’un produit sain. Il faut que vous ajoutiez un codicille sur cette prestation.

Par ailleurs, éclairez-moi sur l’iDTGV. Vous citez, parmi les offres de cette desserte, « un aller quotidien sur Paris-Toulouse desservant Bordeaux ». Mais un tel trajet doit durer dix heures, alors que depuis Blagnac, il y a quarante-cinq vols par jour pour Paris à des tarifs extrêmement compétitifs !

Enfin, concernant les TER, il faut mettre les choses en perspective. Quand ils rallieront une gare TGV, ils seront toujours pleins mais, quand ils rallieront des gares mal desservies, ils ne seront fréquentés qu’aux heures des scolaires le matin ou des ouvriers – s’il en reste car notre appareil productif secondaire est en train de s’évader ailleurs.

Votre Rapporteur. Monsieur Gorges, je pense qu’au fond, nous sommes d’accord puisque j’indique clairement dans le rapport qu’il n’y a pas d’abus. À la question posée par les consommateurs de savoir si, du fait du changement de la politique tarifaire avec NOTES, c’est-à-dire de l’aggravation du yield, il y a des hausses cachées et un abus à l’égard du consommateur, je réponds clairement non. Il est important pour le consommateur de savoir que la représentation nationale s’est penchée sur la question et est arrivée à cette conclusion.

Dans le rapport, j’indique également que je partage totalement l’approche de la SNCF. Le yield est une politique commerciale intelligente qui permet d’optimiser la recette. Je ne trouve pas anormal que la SNCF l’applique sur les services en question, d’autant que ce sont les seuls sur lesquels elle peut le faire compte tenu des charges qu’elle a par ailleurs.

Mais plus la politique tarifaire de la SNCF est libre – et je conçois qu’elle puisse être très libre – plus il est important d’avoir un point de référence. Je suggère que le système de régulation qui existe aujourd’hui en théorie, et qui est d’ailleurs assez lourd, se concentre sur un seul élément qui permette à tous les clients, aux « dégourdis » comme aux autres, de comparer le prix du billet à un prix de référence. C’est d’ailleurs une exigence à étendre à beaucoup d’autres secteurs de services car ils n’ont pas, aujourd’hui, de réels affichages des prix, ce qui est pourtant important dans la relation entre l’offre et la demande.

Quant à la création d’une commission de régulation des activités ferroviaires, le texte est en route. Il a d’ailleurs une vision trop restrictive de ce que le cabotage peut vouloir dire en termes de concurrence ferroviaire. Mais dès lors qu’il est prévu que l’autorité examine les questions de tarifs, il me paraît utile qu’elle puisse s’autosaisir, et important que la doctrine qui va émerger ne soit pas son seul enfant. La commission des finances a consacré de nombreuses réunions à la question des autorités indépendantes, en particulier à la commission de régulation de l’énergie – CRE. À l’évidence, il existe plusieurs écoles parmi nous. Je fais partie de ceux qui ont assez confiance dans les autorités indépendantes. Néanmoins il serait bon que nous puissions énoncer quelques principes d’action publique avant que la CRAF ne se forge sa doctrine toute seule.

Je ne conteste pas du tout que la SNCF doive avoir une grande liberté en matière de stratégie tarifaire. Celle-ci a donné de bons résultats sur le plan commercial comme sur celui de l’accessibilité et du développement du trafic. Elle a tout de même un prix pour le consommateur. Certaines catégories de voyageurs n’ont absolument pas « pris le train », si j’ose dire, de la diversification des tarifs contrairement à d’autres, même si, comme je l’ai dit, je n’ai pas réussi à savoir clairement qui sont les gagnants et les perdants du nouveau système.

Oui, Monsieur Terrasse, on répond, en effet, aux remarques des associations de consommateurs. Vous avez évoqué la téléphonie mobile. Bien que ce ne soit pas l’objet de mon étude, j’ai tout de même – voulant savoir comme s’appliquait le yield dans d’autres activités que la SNCF, – posé des questions à l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP – mais je n’ai pas eu de réponse. Sur le haut débit, par exemple, j’ai cru comprendre qu’il y avait des abonnés dont le débit est réduit quand ils prennent des abonnements particuliers. Cela est-il explicite ?

Concernant les TER, la concurrence justifie tout de même qu’on arrive à comprendre un peu ce qui est vendu. Il faut que le consommateur ne soit pas trop désarmé en face du producteur de services et il sera mieux armé s’il est en mesure de comparer les prix.

Comme il est indiqué dans le rapport, plusieurs responsables de la SNCF ont évoqué l’introduction d’une politique de nuancement tarifaire sur les TER ; elle existe déjà un peu. Le patron des TER à la SNCF a dans l’idée d’encourager les personnes âgées à prendre le TER à neuf heures plutôt qu’à huit heures par des éléments tarifaires intelligents évitant de surinvestir. Cela n’a rien de choquant, monsieur Gorges, pour autant que ce soit clair. Mon souci, c’est la clarté.

Quant à la carte vermeille, vous êtes trop jeune, Monsieur Terrasse, pour vous être rendu compte qu’elle n’existait plus en tant que telle. Elle ne figure plus dans la catégorie des tarifs sociaux, dont vous trouverez une description précise dans le rapport. Les personnes âgées peuvent acheter, si elles le désirent, une carte Senior, qui est une carte commerciale et non un tarif social.

Téoz, Monsieur le président, est dans un environnement de yield management comme Lunéa mais j’ai bien entendu vos observations.

La SNCF proclame qu’iDTGV est un produit totalement différent du TGV, non seulement par le contenu du service – les ambiances – mais aussi par les conditions de réservation. C’est la liberté de la SNCF. En même temps, il importe de comprendre les prix pratiqués entre une même origine et une même destination, les deux produits n’étant pas à ce point différents pour le consommateur.

Il ne s’agit pas de contraindre la politique commerciale de la SNCF qui donne des résultats plutôt positifs mais d’aider le consommateur à s’y retrouver. Je n’ai pas inventé le fait qu’il ait du mal à comprendre, qu’il soit un « dégourdi » qui, parfois théorise à l’excès sa stratégie ou un « non dégourdi » qui ne sait pas profiter des offres sur Internet.

M. Jean-Pierre Gorges. Je ne suis pas d’accord pour demander à la SNCF d’afficher un prix de référence. Pour un service public, celui-ci ne peut être que le prix de revient, qui est un équilibre d’exploitation lié au nombre d’usagers, lequel nombre est fonction de la politique commerciale, de sorte qu’on tourne en rond. Cela n’est possible que pour les services de transport de bus où tout le monde paie le ticket au même prix. Quand on veut optimiser l’outil, on ne peut calculer le prix de revient qu’à la fin de l’exploitation. Il est dès lors mathématiquement impossible de fixer à l’avance un prix de référence. On risque de donner une fausse information qui altérerait les comparaisons. De plus, les gens verraient dans ces comparaisons des majorations ou des minorations de tarif et cela n’aurait pas un très bon effet.

Deuxièmement, je mets en garde, comme M. Terrasse, contre les produits que j’appellerais d’opportunité, comme la carte vermeille. Aujourd’hui, les revenus sont plus forts chez les retraités que chez ceux qui travaillent. Un yield bien fait prend en compte le fait que les personnes âgées ont du temps et les incite à voyager pendant les périodes creuses, c’est-à-dire aux moments où l’on veut remplir les trains. Récemment, je me suis fait critiquer parce que, dans le service de transport de ma commune, j’ai accordé la gratuité aux moins de dix-huit ans et supprimé cet avantage aux personnes âgées. Le fait d’être en dehors des systèmes leur permet de bénéficier d’un certain nombre d’avantages.

Votre Rapporteur. Je ne m’étends pas sur votre second point car il est clair que la disponibilité des personnes est importante dans la mise en œuvre du yield.

Concernant le premier point, j’accorde que la définition précise du prix de référence n’est pas un exercice simple. Mais, dans ma vision des choses, celui-ci n’est pas le prix de revient : c’est le prix médian, constaté sur une période de temps – à déterminer – pour un trajet donné. Dès lors qu’on est dans un système où le prix peut être changé à tout moment et sans délai de prévention comme à la SNCF, la seule manière pour que les voyageurs soient informés, c’est l’historique, lequel ne doit pas être trop rigide ni s’étaler sur des périodes trop longues.

M. Alain Rodet, président. Dans votre rapport, vous avez retracé l’historique de la mise en place du yield management à la SNCF qui a commencé avec le fameux logiciel Socrate, dont les problèmes de démarrage avaient fait dire à notre regretté collègue Michel Crépeau que Socrate avait bu la ciguë…

Nous vous remercions, monsieur le Rapporteur. La Commission est-elle favorable à la publication du rapport ?

Le principe de la publication du rapport d’information sur la politique tarifaire de la SNCF, mis aux voix, est approuvé à l’unanimité par la Commission.

ANNEXE 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Conseil général de l’Environnement et du développement durable

• M. Claude GRESSIER, Président de la section Économie, Transports du conseil général de l’Environnement et du développement durable

• M. Claude LIEBERMANN, Ingénieur général des Ponts et Chaussées

Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire

• M. Daniel BURSAUX, Directeur général des infrastructures, des transports et de la mer

Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi

• M. Marc MORTUREUX, Directeur de cabinet du Secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation auprès de la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, Porte-parole du Gouvernement

SNCF

• M. Guillaume PÉPY, Président

• M. Stéphane VOLANT, Secrétaire général

• M. Mireille FAUGERE, Directeur Voyages France Europe (VFE)

• Mme Sylvie LATOUR, Direction VFE

• M. Olivier SANZ, Directeur de l’unité Yield Management

• Mme Anne BARLET, Secrétariat général, Affaires publiques

ACCOR

• Mme Christine POULETTY, Directrice de la Direction de la stratégie et des systèmes de distribution

• M. Pierrick LE MASNE, Directeur de la stratégie et du « Revenue Development »

Air France

• M. Bruno MATHEU, Directeur général adjoint

Simon-Kucher & Partners, Paris

• M. Kai BANDILLA, Managing Partner

• M. Damien ROBERT, Director

Université d’Angers

• M. Alain CAPIEZ, Professeur à l’Université d’Angers et à l’ESSCA

Confédération de la Consommation, du Logement et du Cadre de Vie (CLCV)

• M. Thierry SANIEZ, Secrétaire général,

• M. Édouard PETITJEAN, Chargé d’études économiques

Fédération nationale des associations des usagers des transports (FNAUT)

• M. Jean LENOIR, Vice Président

ANNEXE 2 : EXTRAITS DU DOCUMENT « LES TARIFS VOYAGEURS DE LA SNCF – JUILLET 2008 – VOLUME 2 – GAMME TARIFAIRE »

ANNEXE 3 : LE CONTINGENTEMENT TARIFAIRE À LA SNCF

1 () Le groupe doit au minimum être constitué de 10 personnes voyageant ensemble en 1ère ou 2ème classe, composé d'enfants ou jeunes gens de moins de 15 ans, effectuant, aux frais de municipalités ou d'œuvres philanthropiques, un voyage aller retour, accompagné d'un accompagnateur au maximum pour 10 enfants ou fraction de 10.

2 () Corail Téoz désigne les rames Corail réaménagées et modernisées, mises en service progressivement sur les grandes lignes voyageurs du réseau intérieur français, hors TGV, sur lesquelles des services nouveaux sont proposés.

3 () En service sur les grandes lignes pour les trajets de nuit, les trains Corail Lunéa offrent un service supérieur aux trains de nuit classiques, notamment avec un personnel de bord et des services plus nombreux.

4 () Bruno Matheu, Air France, audition du 17 juillet 2008.

5 () Kai Bandilla et Damien Robert, Simon-Kucher & Partners, audition du 10 septembre 2008.

6 () Alain Capiez, Université d’Angers, audition du 10 septembre 2008.

7 () M. Bruno Matheu, Directeur général délégué, Air France, audition du 17 juillet 2008.

8 () Le cabotage ne sera autorisé que s’il n’est pas effectué à titre principal.

9 () Aucun transporteur ne peut dimensionner son parc pour l’extrême pointe.

10 () Mireille Faugère, Directrice VFE, SNCF, audition du 2 juillet 2008.

11 () Voir en annexe 3, un document sur la gamme Notes.

12 () Certains services de l’offre Pro ne paraissent pas avoir une valeur déterminante, en particulier la restauration à la place. Il paraît en tout état de cause plus difficile au ferroviaire qu’à l’aérien d’offrir des services spécifiques aux voyageurs d’affaires.

13 () Ainsi le parcours TGV Paris Brest avec arrêts intermédiaires au Mans et Rennes est constitué de 3 tronçons, Paris Le Mans, Le Mans Rennes et Rennes Brest.

14 () La stratégie prix, Herman Simon, Florent Jacquet, Franck Brault, Dunod, Paris, 2005.

15 () Péages ferroviaires : pour la vérité des coûts, rapport d’information de M. Hervé Mariton, au nom de la commission des finances, Assemblée nationale, n° 875, mai 2008.

16 () M. Daniel Bursaux, Directeur général des infrastructures et des services de transports, MEEDDAT, audition du 10 septembre 2008.

17 () Bruno Matheu, Air France, audition du 17 juillet 2008.

18 () Directive européenne 91/440/CEE modifiée du Conseil relative au développement de chemins de fer et directive 2001/14/CE modifiée du Parlement européen et du Conseil concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et sa tarification.


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