N° 59 - Avis de M. Jean-Charles Taugourdeau sur le projet de loi , après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (n°4)




N
° 59

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 juillet 2007

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, après déclaration d’urgence, en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (n° 4),

PAR M. JEAN-CHARLES TAUGOURDEAU,

Député.

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Voir les numéros 62, 58 et 61.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

CRÉER UN CHOC DE CROISSANCE PAR UN INVESTISSEMENT D’AMPLEUR DANS L’ÉCONOMIE 6

FAVORISER LE TRAVAIL À TOUS LES TEMPS DE LA VIE. 6

DONNER DES SIGNAUX POSITIFS AUX ENTREPRISES TOUT EN MORALISANT LA VIE ÉCONOMIQUE 8

METTRE FIN À DES PRÉLÈVEMENTS ANTIÉCONOMIQUES. 8

TRAVAUX DE LA COMMISSION 9

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 9

II.— EXAMEN DES ARTICLES 13

Article 1er : Exonération d’impôt sur le revenu et allègements de charges sociales sur les rémunérations des heures supplémentaires 13

Article 2 : Exonération des rémunérations versées aux jeunes au titre d’activités exercées pendant leurs années d’études 20

Article 3 (article 200 quaterdecies [nouveau] du code général des impôts) : Crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunts supportés pour l’acquisition ou la construction de l’habitation principale 25

Article 4 (articles 775 ter, 777, 777 bis, 779, 780, 784, 788, 789 bis, 790 C, articles 790 E, 790 F et 790 G [nouveaux], article 793, article 796-0 bis [nouveau], articles 796, 800, 990 I, 1709, 150-0 A, 150-0 D, 150-0 D bis, 163 bis C, 200 A du code général des impôts ; article L. 136-6 du code de la sécurité sociale) : Allègement des droits de mutation à titre gratuit 28

Article 5 (articles 1er et 1649-0 A du code général des impôts) : Droit à restitution des impositions en fonction du revenu 32

Après l’article 5 34

Article 6 : Réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune au titre des versements effectués à des organismes d’intérêt général ou en vue de souscrire au capital de PME 35

Article 7 (articles L. 225-42-1, L. 225-22-1, L. 225-90-1 et L. 225-79-1 du code de commerce) : Modification du régime des conventions réglementées relatives à certaines rémunérations différées des dirigeants d’entreprises cotées 41

Article additionnel après l’article 7 (articles L. 127-1, L. 127-1-1 et L. 434-2-1) : Simplification des conditions d’adhésion des entreprises de 300 salariés et plus aux groupements d’employeurs 48

Article additionnel après l’article 7 (article 127-10 du code du travail) : Tâches pouvant être confiées au salarié d’un groupement d’employeurs mixte mis à disposition d’une collectivité locale.. 51

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 53

La Commission des affaires économiques a choisi de se saisir pour avis du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, destiné à créer le choc que les électeurs ont exigé à travers leur vote aux élections présidentielle et législatives. Toutes les mesures proposées ont été évoquées pendant les campagnes présidentielle et législatives.

Elles n’ont qu’un objet : permettre l’expression du talent, de l’intelligence, du courage, de l’esprit d’entreprise. Elles visent à augmenter le pouvoir d’achat sans augmenter le coût du travail. Remédier au scandale des travailleurs pauvres, et reconnaître le rôle social et économique des entrepreneurs, c’est revaloriser le travail et revaloriser le travail, c’est relancer la croissance.

Ce choc est un choc fiscal : exonération d’impôts et de charges pour les heures supplémentaires, défiscalisation du revenu des étudiants, exonération de droits de mutation pour 95 % des successions, bouclier fiscal, réductions d’impôt de solidarité sur la fortune, crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt immobilier.

Mais il s’agit aussi, et peut-être avant tout, d’un choc économique, qui engage une révolution des mentalités : pour obtenir le point de croissance qui manque à la France, il faut remettre la valeur travail au cœur de toutes les politiques, lever les tabous et les préjugés qui entravent les entreprises, placer les administrations à leur service.

C’est la raison pour laquelle la commission des affaires économiques a souhaité se saisir de ce projet de loi dans sa totalité - mesures fiscales, mesure de moralisation de la vie économique à travers l’encadrement des « parachutes dorés » à l’exception du revenu de solidarité active, dont la commission des affaires culturelles, familiales et sociales s’est saisie pour avis.

Ce choc économique a bien sûr un coût qui devrait s’élever à 11 milliards d’euros en 2008 mais ce coût, c’est celui de la relance de la machine économique, celui de la levée des blocages qui brident les initiatives et les énergies. Ce n’est pas une dépense mais un investissement.

Ce projet de loi a vocation à enclencher le cercle vertueux que le Président de la République appelait de ses vœux à l’occasion du discours prononcé devant les parlementaires de la majorité le 20 juin 2007. Il est en effet plus que temps « d’enclencher le cercle vertueux de l’optimisme, de la productivité et de la croissance, à la place du cercle vicieux du pessimisme, de la frustration et de la stagnation qui nous tire vers le bas ».

CRÉER UN CHOC DE CROISSANCE PAR UN INVESTISSEMENT D’AMPLEUR DANS L’ÉCONOMIE

Le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, premier projet de loi de cette législature pour l’Assemblée nationale, comporte des mesures fortes qui traduisent un changement profond d’approche de la politique économique et fiscale.

Au-delà des querelles théoriques opposant politique de l’offre et politique de la demande, au-delà des tabous idéologiques, ce qui compte, c’est de mobiliser tous les leviers pour redonner confiance aux entreprises et aux salariés, stimuler la croissance et contribuer à rendre sa place à la valeur qui orientera toutes les politiques de cette législature : le travail.

À cette fin, c’est un investissement d’ampleur qui est consenti à travers ce projet de loi :

Articles

Coût de la mesure
en 2008

(en millions d’euros)

Article 1 (exonération d’impôt et de charges des heures supplémentaires)

3 796

Article 2 (exonération d’impôt du revenu des étudiants)

40

Article 3 (crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunt immobilier)

3 000

Article 4 (exonérations de droits de mutation)

2 200

Article 5 (bouclier fiscal)

600

Article 6 (réductions d’impôt de solidarité sur la fortune)

190

Ce choc économique, psychologique et fiscal poursuit plusieurs objectifs :

Soutenir les plus jeunes (articles 2 et 4)

Les jeunes de moins de 26 ans qui travaillent tout en poursuivant des études seront exonérés d’impôt sur le revenu dans la limite de trois fois le montant du SMIC mensuel.

Pour que chaque génération ne reparte pas de zéro, les dons aux jeunes générations seront favorisés par une franchise d’impôt allant jusqu’à 20 000 euros pour chacun des enfants et petits-enfants.

Travailler plus pour gagner plus (article 1er)

Les heures supplémentaires et complémentaires bénéficieront d’une exonération d’impôt sur le revenu et d’un allègement de charges sociales salariales et patronales.

Cette mesure sera applicable dès le 1er octobre 2007 à l’ensemble des entreprises et des salariés du secteur privé. Elle s’appliquera également, selon des modalités adaptées, au secteur public.

Transmettre les fruits d’une vie de travail (article 4)

Pour que le résultat d’une vie de travail ne disparaisse pas, préempté par l’État, 95 % des successions en ligne directe seront exonérées de droits de mutation. Le conjoint survivant, qu’il soit marié ou lié par un PACS, sera entièrement exonéré.

Ce choc en faveur du travail, des millions de Français l’attendent, car on ne peut espérer bâtir une croissance durable sur la démoralisation des travailleurs et sur la dévalorisation du travail.

Ce choc, ce sont des centaines de milliers d’entreprises qui l’attendent, qui veulent pouvoir répondre aux accélérations de l’activité en libérant des énergies aujourd’hui contenues, en donnant du travail à leurs salariés, et ainsi se développer, innover et créer des emplois durables.

Le rapporteur souhaite apporter une contribution pragmatique à ce mouvement, en favorisant le développement des groupements d’employeurs. Dans le cadre de ces structures, et en fonction de la demande des entreprises, les salariés travaillent, pour des durées variables, au sein des entreprises dites utilisatrices. Lorsque le besoin de l’entreprise est satisfait, le salarié est alors mis à la disposition d’une autre entreprise et bénéficie ainsi d’une stabilité d’emploi. Il s’agit de promouvoir une véritable logique gagnant/gagnant en répondant aux besoins de flexibilité des entreprises, tout en offrant aux salariés une véritable sécurité de l’emploi.

Il propose également la création d’une « carte active » permettant le traitement automatisé des données relatives à la gestion des heures travaillées par le salarié et de sa rémunération, facilitant ainsi la pluriactivité.

Orienter l’épargne vers le financement des PME et les organismes d’intérêt général (article 6)

Afin de favoriser l’essor et le développement des PME, dont on connaît la contribution essentielle à la croissance et à la création d’emplois, les sommes investies dans le capital de ces entreprises pourront être déduites de l’ISF. La même mesure bénéficiera aux organismes d’insertion, aux établissements publics de recherche et d’enseignement et aux fondations d’utilité publique, dont les ressources seront ainsi renforcées. Cet avantage fiscal atteindra 75 % du montant des sommes éligibles, et sera plafonné à 50 000 euros.

Encadrer les « parachutes dorés» (article 7)

Reconnaître le mérite de chacun, c’est aussi subordonner les indemnités de départ des dirigeants aux performances. Les « parachutes dorés » ne seront plus automatiques et feront l’objet d’une plus grande transparence. Surtout, leur versement sera soumis à des conditions de performance examinées au moment du départ du dirigeant. L’encadrement des parachutes dorés devrait permettre de mettre un terme à certaines pratiques scandaleuses qui ont jeté l’opprobre sur les chefs d’entreprise dont la grande majorité sont pourtant irréprochables.

Le rapporteur propose d’aller plus loin dans cette démarche en liant plus étroitement le versement de ces rémunérations aux performances de la société.

Lever des entraves fiscales à l’accession à la propriété (article 3)

Les emprunts déjà souscrits ou à souscrire pour l’acquisition de la résidence principale donneront droit, les cinq premières années, à un crédit d’impôt sur le revenu égal à 20 % des intérêts versés, dans la limite d’un avantage fiscal annuel de 1 500 euros pour un couple. Pour que chacun puisse en bénéficier, ce crédit d’impôt sera remboursé aux ménages non imposables.

Améliorer l’attractivité fiscale de la France (article 5)

Le « bouclier fiscal » sera renforcé par la baisse de 60 % à 50 % de la part des revenus susceptibles d’être prélevés et par la prise en compte de la CSG et de la CRDS, pour contribuer au maintien ou au retour en France des personnes qui peuvent investir dans l’économie productive.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa réunion du 4 juillet 2007, la commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Charles Taugourdeau, le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (n° 4).

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur pour avis.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec a indiqué que le groupe socialiste partageait l’objectif de ce texte de soutenir l’emploi et le travail et de favoriser le pouvoir d’achat mais a regretté que les choix faits par le gouvernement s’en éloignent. Les experts économiques, y compris ceux du Conseil d’analyse économique, organisme rattaché au Premier ministre, ont souligné l’effet incertain sur l’emploi de la détaxation des heures supplémentaires. La mise en place de ce dispositif va conduire à dépenser 6 milliards d’euros en pure aubaine et à créer une énorme niche fiscale, au service d’un système injuste et opaque. La présentation de ce dispositif par la majorité ignore en outre l’application concrète du droit du travail et l’inégalité du rapport entre salarié et employeur. L’offre d’heures supplémentaires n’est pas une offre libre. Le salarié est obligé de l’accepter sous peine de voir remise en cause la pérennité de son statut. De plus, l’augmentation du temps de travail de ceux qui en ont ne donnera pas un emploi à ceux qui n’en ont pas. Le dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires se relève donc inapproprié par rapport à l’objectif affiché de soutien de l’emploi.

Les exonérations fiscales applicables aux revenus des étudiants, qui prolongent celles déjà prévues par la loi de finances pour 2005 pour les emplois d’été, seraient par ailleurs pertinentes si elles étaient limitées aux seules familles disposant de revenus modestes et prenaient la forme d’un crédit d’impôt. Or tel n’est pas le cas, le dispositif bénéficiant aux familles aisées payant l’impôt sur le revenu qui intégreront leurs enfants étudiants dans le foyer fiscal.

Quant à la déduction des intérêts d’emprunt immobilier, elle souligne la volonté du gouvernement de privilégier l’accession à la propriété sans la favoriser pour ceux qui ont le plus besoin d’être aidés. Le prêt à taux zéro est déjà ouvert à des revenus élevés, de l’ordre de 6000 euros par mois. Dès lors, le gouvernement organise une nouvelle niche fiscale, en altérant sa capacité financière à relancer une véritable offre locative, conforme aux besoins des 1 400 000 demandeurs de logement -notamment en terme de proximité avec le lieu de travail- et aux exigences de salubrité. Le coût du « dispositif de Robien », évalué à 400 millions d’euros, cumulé à celui de la déduction des intérêts d’emprunt, estimé à plus de 3,7 milliards d’euros, va compromettre le financement des 120 000 vrais logements sociaux, PLUS et PLAI, dont les Français les plus pauvres ont besoin.

Le dispositif prévu par le projet de loi en matière de successions et de donations doit lui aussi être confronté à la réalité des transmissions : 80 % des successions en ligne directe sont aujourd’hui exonérées et ce chiffre monte à 90 % quand il s’agit de transmissions au conjoint survivant. Il y a donc un vrai problème d’honnêteté d’affichage de la portée de cette mesure et de ses bénéficiaires, sachant qu’un patrimoine transmis s’élève en moyenne aujourd’hui à 99 000 euros et qu’une succession sur deux est inférieure à 62 000 euros. Il est clair que ce dispositif favorise là encore les patrimoines les plus importants et que l’État se prive d’un instrument de redistribution pourtant utile.

Enfin, le groupe socialiste est favorable à un bouclier mais en matière de logement qui permette de maintenir la solvabilité des familles dans un contexte marqué par la hausse des loyers et des prix de l’immobilier.

Le Président Patrick Ollier a répondu que l’affirmation selon laquelle l’allongement du temps de travail des uns ne créait pas d’emplois pour les autres relevait d’une vision purement malthusienne, qu’il ne partageait pas. La création de richesse induite par la défiscalisation des heures supplémentaires sera à l’origine de nouveaux emplois. Il a également rappelé que la majorité a déjà initié, sous son impulsion, des mesures importantes en faveur de l’accession sociale à la propriété sous la précédente législature et qu’elle est donc une force de progrès.

M. Jean Dionis du Séjour a indiqué que le groupe Nouveau centre partageait les diagnostics mis en avant par le gouvernement. Le triste record détenu par la France en matière de nombre d’heures travaillées, qui la place en queue de peloton des pays industrialisés, constitue l’une des causes de son recul économique. Le Nouveau centre sera néanmoins exigeant en matière de redressement des finances publiques et demandera au gouvernement des précisions sur le coût des différents dispositifs et sur leur financement. Si ce coût est entre 11 et 15 milliards d’euros, il faut le dire et l’assumer. Le Premier ministre a évoqué hier plusieurs pistes pour sa prise en charge : stabilisation du budget en volume, maîtrise des dotations versées aux collectivités locales, réduction des niches fiscales. Peut-être faudrait-il également évaluer les 22 milliards d’euros d’exonérations de charges existantes.

M. Serge Poignant a souligné que l’examen de ce texte reprenait des engagements du Président de la République et que les Français avaient donné mandat à la nouvelle majorité parlementaire pour les mettre en œuvre. Le travail est au cœur de ce texte. Il est difficile de s’opposer à l’exonération fiscale des revenus des étudiants, quand ceux-ci sont obligés de travailler pour poursuivre leurs études. La détaxation des heures supplémentaires a certes un coût pour l’État et les organismes de sécurité sociale mais ce dispositif est au cœur de la politique de la croissance. S’agissant de la déduction des intérêts d’emprunt immobilier, il faut rappeler que la majorité a déjà fait beaucoup pour la construction de logements, y compris sociaux, et doublé le rythme de construction par rapport à la précédente législature, en passant de 40 000 à 80 000 nouveaux logements. Ces efforts déjà engagés seront naturellement poursuivis. Enfin, cette déduction fiscale est justifiée par le fait que la France est l’un des pays où le pourcentage de personnes propriétaires de leur logement est le plus faible. En conséquence, le groupe UMP est favorable à l’adoption de ce projet de loi.

M. Jean-Yves Besselat a jugé que le projet de loi était fondamental pour rétablir la confiance des Français en l’avenir ; ils seront sûrs désormais qu’ils pourront travailler plus et ainsi gagner plus et qu’ils pourront transmettre le patrimoine qu’ils auront acquis au cours d’une vie de travail. À ce sujet, une simulation pourrait-elle être établie pour déterminer quel serait le nombre de successions que l’abattement de 150 000 euros par enfant ne défiscaliserait pas entièrement ? Il convient en effet de prévenir les déceptions à la marge de familles qui pourraient croire que le projet de loi créée une exonération totale. Les Français, comme le disait Georges Pompidou, sont attachés à l’héritage.

Mme Catherine Vautrin a insisté sur le caractère novateur de certaines dispositions du projet de loi pour le financement à la fois de fondations et aussi d’associations et d’entreprises d’insertion qui aujourd’hui trouvent très difficilement des moyens de fonctionner, puisque l’article 6 permet de déduire de l’impôt de solidarité sur la fortune les dons pour ce type d’organisme. Il faut aussi rappeler que le Gouvernement reprend les engagements du gouvernement précédent de construire 120 000 logements sociaux par an.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec a fait remarquer qu’il n’y en avait que 90 000 dont 40 000 financés par le prêt locatif social, qui, à son sens, ne saurait être assimilé à un dispositif en faveur des catégories les plus défavorisées.

En réponse aux intervenants, M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis, a fait les observations suivantes : l’ensemble des études internationales fait apparaître que les pays où la durée individuelle du travail est la plus importante sont aussi les pays où le taux de chômage est le plus bas. La possibilité de répondre à des demandes ponctuelles par des heures supplémentaires est un moyen de développement souple qui permet de créer progressivement une capacité supplémentaire d’offre permanente pour l’entreprise, et donc une source d’emplois permanents en plus. La modulation annuelle des horaires a appauvri les salariés, notamment les salariés saisonniers puisque les heures travaillées en plus ne sont pas payées plus mais sont compensées par des horaires moindres en période creuse. Les salariés, surtout les plus modestes, sont demandeurs d’heures supplémentaires dès lors qu’elles sont payées plus cher.

Les allègements de fiscalité liés à la défiscalisation des revenus des étudiants concernent certes les ménages qui paient l’impôt sur le revenu ; cependant son caractère optionnel permet aussi à ceux qui perçoivent la prime pour l’emploi de la conserver.

Les exonérations nouvelles concernant les successions ne sont pas seulement une question de patrimoine. C’est aussi un moyen de préserver l’outil de travail lors de sa transmission : trop d’entreprises disparaissent lors de cette période.

Enfin, les questions relatives au chiffrage des mesures ne doivent pas occulter le fait qu’il s’agit d’un dispositif d’avenir qui doit trouver, par l’élan qu’il impulse, son propre équilibre. Il faut y voir un investissement, plus qu’un coût.

La commission est ensuite passée à l’examen des articles du projet de loi.

Le Président Patrick Ollier a proposé à la commission de limiter son avis aux articles 1er à 7 qui traitent des questions relatives aux charges pesant sur le travail, à l’accession à la propriété, aux aides fiscales attribuées au jeunes, aux mesures en faveur des PME et de l’attractivité du territoire français et à l’encadrement des « parachutes dorés ».

Il en a été ainsi décidé.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Exonération d’impôt sur le revenu et allègements de charges sociales
sur les rémunérations des heures supplémentaires

Dans une intervention récente (1), le Président de la République a proposé à la majorité présidentielle le choix suivant :

« Politique sociale : le travail.

Politique éducative : le travail.

Politique économique : le travail.

Politique fiscale : le travail.

Politique de concurrence : le travail.

Politique commerciale : le travail.

Politique de l'immigration : le travail ».

L’article 1er du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat propose une des principales traductions concrètes de cette ambition, en rompant avec la logique malthusienne et contraignante des « trente-cinq heures ». Le coût social, économique et moral des deux lois dites Aubry (2) est maintenant établi depuis plusieurs années. L’Assemblée nationale elle-même en avait dressé un bilan inquiétant, dès avril 2004, au terme des travaux de la mission d’information commune sur l’évaluation des conséquences économiques et sociales de la législation sur le temps de travail, présidée par M. Patrick Ollier, et à laquelle le rapporteur pour avis avait participé.

Plusieurs lois ont entre-temps permis de desserrer les contraintes de cette réglementation, aussi bien pour les salariés que pour les entreprises : la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi et la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise.

La réforme proposée aujourd’hui vise à leur donner toute leur portée. Le nombre d’heures supplémentaires effectuées (900 millions par an) reste aujourd’hui relativement faible au regard des possibilités prévues par les plafonds légaux (4 milliards d’heures). En donnant du pouvoir d’achat aux salariés sans augmenter le coût du travail pour les entreprises, le dispositif du présent article devrait permettre de remédier à l’une des faiblesses fondamentales de l’économie française : le nombre d’heures travaillées par actif y est très faible, puisque trois pays seulement au sein de l’OCDE connaissent des durées moyennes annuelles par actif occupé inférieures. Or toutes les comparaisons internationales le montrent : plus ce nombre est important, plus le chômage est faible. La situation de la France ou de l’Allemagne est inverse de celle des États-Unis, du Japon ou du Royaume-Uni. Travailler plus, ce n’est pas seulement gagner plus, c’est aussi pouvoir travailler tous.

L’allègement de charges sociales salariales et patronales et l’exonération d’impôt sur le revenu des heures supplémentaires et complémentaires proposés par le présent article forment un dispositif très large. Tous les salariés et tous les employeurs sont concernés (le dispositif sera adapté par décret à la fonction publique, aux régimes spéciaux, et aux autres salariés non soumis au droit commun de la durée du travail).

L’article 1er propose :

– d’exonérer d’impôt sur le revenu les rémunérations perçues au titre d’heures supplémentaires, d’heures complémentaires ou d’un temps de travail additionnel comparable ;

– d’alléger les cotisations sociales salariales et patronales dues au titre des heures de travail dont les rémunérations seraient exonérées d’impôt sur le revenu, en centrant ce dispositif sur les bas salaires ;

– d’abroger le régime dérogatoire transitoire de majoration salariale des heures supplémentaires applicable aux entreprises comptant vingt salariés ou moins le 31 mars 2005 ;

L’entrée en vigueur du dispositif est prévue le 1er octobre 2007. Le suivi de son application devra faire l’objet d’un rapport du Gouvernement au Parlement en 2009. S’il est urgent de lancer ce choc fiscal, le délai sera court entre la promulgation de la loi et son entrée en vigueur. Aussi faudra-t-il prévoir certaines aides aux PME pour leur permettre de s’adapter à la réforme dans les meilleures conditions.

L’exonération porte sur :

– les salaires versés au titre des heures supplémentaires et des heures assimilées effectuées par les salariés à temps plein soumis au droit commun réglementant la durée du travail ;

– les salaires versés aux salariés à temps partiel au titre des heures complémentaires, dans la limite d’un plafond ;

– les salaires versés par des particuliers employeurs à des salariés au titre des heures supplémentaires (au-delà de 40 heures) ;

– les salaires versés aux assistants maternels au titre des heures supplémentaires et des heures complémentaires (au-delà de 45 heures) ;

– les éléments de rémunération versés aux agents publics au titre des heures supplémentaires ou d’un temps de travail additionnel effectif ;

– les éléments de rémunération versés au titre des heures supplémentaires ou complémentaires de travail aux salariés non soumis au droit commun réglementant la durée du travail.

L’exonération d’impôt sur le revenu s’applique à la rémunération horaire normale de l’heure supplémentaire et à son éventuelle majoration sous réserve d’un plafond conventionnel ou légal.

Elle ne concerne pas la rémunération liée aux heures de repos compensateur, l’indemnité couvrant les droits à repos compensateur des salariés dont le contrat de travail est rompu, ni la monétisation des droits affectés à un compte épargne-temps.

Le champ de l’exonération est défini à partir de la rémunération, non de telle ou telle catégorie d’employeurs. La mesure s’appliquera donc quelle que soit la spécificité de l’employeur.

Afin de garantir une égalité de traitement des salariés indépendamment du mode d’organisation de leur temps de travail, des définitions très variées de l’heure supplémentaire sont prises en compte.

Par exemple, dans le cas d’un accord de modulation, les périodes de décompte pour le calcul des heures supplémentaires seront la durée hebdomadaire fixée par la convention ou l’accord, et la durée annuelle de 1 607 heures ou le plafond inférieur fixé par la convention ou l’accord.

Sont prises en compte de la même manière les spécificités des autres formes d’aménagement de l’organisation du temps de travail, qu’il s’agisse de l’organisation du travail par cycle, de la réduction du temps de travail sur une période de quatre semaines, de la réduction du temps de travail sur l’année ou de l’organisation du temps de travail selon un forfait en heures sur une base annuelle. Le seuil à partir duquel les heures complémentaires ou assimilées varie selon les périodes de décompte du temps de travail.

Les revenus tirés des heures supplémentaires augmenteront le montant du revenu fiscal de référence, pris en compte pour le calcul de certains impôts locaux, l’octroi de certaines prestations ou le niveau de leur tarification.

Ces revenus seront intégrés dans les revenus d’activité professionnelle qui conditionnent le bénéfice de la prime pour l’emploi (PPE). Vers le haut, cette intégration privera certains bénéficiaires de la PPE de cet avantage. Vers le bas, il permettra à l’inverse à d’autres salariés d’y accéder, puisque le revenu d’activité donnant accès à la PPE est encadré par un plafond et un plancher.

En application du code de la sécurité sociale, les réductions de cotisation seront intégralement compensées aux régimes concernés par le budget de l'État pendant toute la durée de leur application.

– La réduction de cotisations salariales

Elle doit être d’un montant proportionnel à la rémunération perçue au titre des heures supplémentaires exonérées d’impôt sur le revenu.

Sont concernées les cotisations de sécurité sociale (maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse de base), mais pas la CSG et la CRDS, ni les cotisations de retraite complémentaire et d’assurance chômage. De ce fait, la mesure ne réduit aucunement les droits à pension des salariés.

Le taux de réduction annoncé par le Gouvernement, soit 21,46 % de la rémunération, correspond au poids de l’ensemble des cotisations et contributions sociales dues par un salarié rémunéré à un niveau inférieur au plafond de la sécurité sociale (soit 2 682 euros mensuels).

La réduction aura ainsi l’effet d’une exonération totale de charges sociales salariales sur les rémunérations des heures supplémentaires et complémentaires. Ce mécanisme permet des facilités de gestion puisqu’il ne nécessite pas la compensation des régimes de retraite complémentaires et de l’Assedic.

– La déduction forfaitaire des cotisations patronales de sécurité sociale

Elle est prévue pour chaque heure supplémentaire exonérée d’impôt sur le revenu effectuée par un salarié éligible à la « réduction Fillon » (réduction générale de cotisations patronales de sécurité sociale pour les bas salaires).

Cette déduction est donc destinée à pousser les employeurs à augmenter le pouvoir d’achat de leurs salariés les plus vulnérables. D’une part, la référence à la « réduction Fillon » limite le champ de la déduction forfaitaire aux bas salaires. D’autre part, les heures complémentaires n’ouvrent pas droit à cette déduction, afin de favoriser le développement du travail à temps plein.

D’après les annonces du Gouvernement, le montant de la déduction, qui sera fixé par décret, devrait être de 1,50 euro par heure dans les entreprises de vingt salariés ou moins, et de 0,50 euro par heure dans celles de plus de vingt salariés. Il sera déduit des sommes devant être versées aux Urssaf ou aux caisses de mutualité sociale agricole.

Dans les entreprises de 20 salariés ou moins, une telle déduction permettrait de compenser partiellement la hausse du coût du travail résultant de l’augmentation de 15 points de la majoration salariale des heures supplémentaires du fait de la disparition anticipée du régime dérogatoire. Elle annulerait l’effet de l’augmentation de la majoration à un niveau de rémunération horaire égal à 1,27 SMIC, entraînerait une baisse du coût du travail pour des rémunérations horaires inférieures et une hausse de ce coût pour des rémunérations supérieures. Le Gouvernement devra veiller, en déterminant par décret le montant de la déduction forfaitaire, à éviter de tels effets de seuil, susceptibles de constituer des trappes à bas salaires.

Cette déduction peut être cumulée avec les autres dispositifs d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale (ZFU, SRR par exemple) dans certaines limites.

– Le changement des règles de calcul de la « réduction Fillon »

Décroissante en fonction de la rémunération horaire du salarié, cette réduction est maximale lorsque le salarié est rémunéré au smic horaire et s’annule pour une rémunération horaire égale à 1,6 smic.

Afin que l’augmentation de la rémunération horaire moyenne des salariés, du fait des mesures proposées par le présent article, ne diminue pas la réduction de cotisation patronale, le projet prévoit de neutraliser la majoration salariale des heures supplémentaires en les affectant d’un coefficient pour le calcul de la « réduction Fillon ».

Pour préserver le ciblage de cette dernière mesure sur les bas salaires, le taux de majoration salariale est plafonné.

Enfin, la « réduction Fillon » peut être cumulée avec la nouvelle déduction de charges sociales patronales.

La loi du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise limite à 10 % le taux de majoration légal de la rémunération due au titre des quatre premières heures supplémentaires (au-delà de 36 heures hebdomadaires) pour les entreprises comprenant au plus vingt salariés au 31 mars 2005.

Ces dispositions sont applicables dans l'attente d’une convention ou d’un accord collectif et, en tout état de cause, jusqu’au 31 décembre 2008 au plus tard. Leur abrogation prendrait effet lors de la publication de la loi.

(en millions d’euros)

Intitulé de la mesure

2007

2008

En régime de croisière

Exonération en matière d'impôt sur le revenu des heures supplémentaires, des heures complémentaires et des IHTS
Création de l'article 81 quater du CGI

-

- 400

- 1 500

Cotisations salariales : augmentation de la majoration dans les entreprises de moins de 20 salariés (effet d'assiette).

40

110

150

Cotisations salariales : réduction proportionnelle à la rémunération des heures supplémentaires, complémentaires et des forfaits jours (compensation par l'État)
Créations de l'article L. 241-17 du code de la sécurité sociale

- 790

- 2 390

- 3 180

Cotisations patronales : réduction forfaitaire d'1,50 € pour les 20 salariés et moins et de 0,50 € pour les plus de 20 salariés sur les heures supplémentaires et les forfaits jours (compensation par l'État)

Créations de l'article L. 241-18 du code de la sécurité sociale

- 240

- 710

- 950

Cotisations patronales : augmentation de la majoration dans les entreprises de moins de 20 salariés (effet d'assiette+ diminution du taux d'allègement moyen).

125

375

500

Cotisations patronales : Neutralisation de la majoration des heures supplémentaires dans l'allégement Fillon (compensation par l'État)

- 250

- 750

- 1 000

 

- 1 115

- 3 765

- 4 880

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Emploi.

L’estimation de ce coût, qui représente en fait un véritable investissement public pour la croissance et l’emploi, est faite sur un nombre d’heures supplémentaires constant, et sans tenir compte des contreparties positives du dispositif pour les finances publiques.

Afin de prévenir les abus dans l’optimisation des modes de rémunération au regard des exonérations et allègements proposés, l’article 1er compte plusieurs mesures pour éviter que des rémunérations existantes (ex : prime aux résultats) soient transformées en heures supplémentaires ou que des accords entre employeurs et salariés ne fixent des durées de travail artificiellement faibles pour gonfler le nombre d’heures supplémentaires. Les rémunérations perçues au titre des heures complémentaires dont la régularité aurait dû aboutir à un relèvement de l’horaire contractuel de travail sont exclues du bénéfice des mesures proposées.

Le ministre de l’Economie, des finances et de l’industrie a indiqué qu’un salarié percevant 1 500 euros brut par mois et effectuant quatre heures supplémentaires par semaine gagnera 2 500 euros sur l’année.

*

Soulignant que les nouvelles dispositions en matière d’heures supplémentaires imposeront une adaptation des progiciels destinés à la gestion de la paie et que ces évolutions entraîneront des frais supplémentaires pour les PME, le rapporteur pour avis a présenté un amendement tendant à ce que les coûts d’adaptation des logiciels liés à la mise en conformité avec la nouvelle législation puissent faire l’objet d’un amortissement exceptionnel, comparable à celui prévu à l’article 236 du code général des impôts pour l’acquisition de logiciels.

M. François Brottes a observé qu’il s’agissait d’un cadeau supplémentaire offert aux entreprises.

La commission a adopté cet amendement.

Le rapporteur pour avis a présenté un amendement tendant à rendre possible une majoration de la déduction forfaitaire de charges sociales patronales proposée par l’article 1er pour les entreprises dont l’effectif était inférieur ou égal à vingt salariés le 31 mars 2005 mais dont l’effectif a, depuis, dépassé ce seuil.

En effet, en l’état actuel du projet de loi, elles subiraient le relèvement de la majoration salariale des heures supplémentaires sans bénéficier de la majoration de la déduction forfaitaire de charges sociales : le régime dérogatoire de majoration salariale des heures supplémentaires (majoration de 10 % des quatre premières heures supplémentaires) prévue par la loi du 31 mars 2005 et abrogé par le présent article s’applique aux entreprises qui comprenaient vingt salariés ou moins le 31 mars 2005, tandis que la majoration de la déduction forfaitaire de charges sociales patronales proposée par le projet de loi concerne les entreprises de vingt salariés ou moins pour l’année concernée.

Après que M. François Brottes s’est interrogé sur sa recevabilité financière au regard de l’article 40 de la Constitution, la commission a adopté cet amendement.

La commission a examiné un amendement proposé par Mme Annick Girardin, tendant à prévoir l’application, dès leur publication, à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon des décrets relatifs aux réductions de cotisations salariales et patronales sur les heures supplémentaires. Les délais de transposition pour l’archipel de ce type de disposition sont autrement toujours très longs.

Le rapporteur pour avis a donné un avis défavorable, les dispositions proposées lui paraissant d’ordre réglementaire mais s’est engagé à attirer l’attention de la ministre en séance publique sur cette question.

Le président Patrick Ollier a déclaré qu’il serait attentif à ce que la commission n’adopte pas de dispositions réglementaires, ce qui est manifestement le cas en l’espèce.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article premier ainsi modifié.

Article 2

Exonération des rémunérations versées aux jeunes au titre d’activités exercées pendant leurs années d’études

Les rémunérations perçues par les jeunes âgés de 21 ans au plus dans le cadre d’emplois exercés pendant leurs congés scolaires ou universitaires sont exonérées d’impôt sur le revenu (IR) depuis l’imposition des revenus de l’année 2005, dans la limite annuelle de deux fois le montant mensuel du salaire minimum de croissance (smic), conformément, au 36° de l’article 81 du code général des impôts, issu de l’article 89 de la loi de finances pour 2005 (n° 2004-1484 du 30 décembre 2004).

Cette mesure profite actuellement à 450 000 bénéficiaires pour un coût évalué dans les derniers documents budgétaires à 30 millions d’euros, en 2006 comme en 2007. D’après les dernières estimations du ministère des finances, ce coût serait en réalité de l’ordre de 10 millions d’euros. Sur cette base, le coût de la mesure proposée par le présent article serait de l’ordre de 40 millions d’euros, ce qui porterait la dépense fiscale totale à 50 millions.

L’article 2 du présent projet de loi propose trois évolutions visant à élargir le dispositif actuel. Il s’agit :

– du relèvement de la limite d’âge conditionnant le bénéfice de l’exonération de 21 à 25 ans ;

– de la prise en compte des salaires perçus au titre d’activités exercées au cours de l’année scolaire ou universitaire et non plus seulement au cours des congés ;

– du relèvement du plafond de rémunérations pris en compte de deux fois le montant mensuel du smic à trois fois celui-ci.

Les bénéficiaires sont les jeunes ayant de la qualité de collégien, lycéen, élève ou étudiant.

Les apprentis exercent leur activité dans le cadre d’un contrat de travail et sont soumis à la législation de droit commun relative aux congés payés. Ils ne peuvent donc prétendre à l’exonération d’impôt sur le revenu des emplois de vacances, mais bénéficient d’un régime fiscal favorable à raison des rémunérations perçues ès qualités. Conformément à l’article 81 bis du code général des impôts, leurs salaires sont exonérés de l'impôt sur le revenu dans la limite du montant annuel du salaire minimum de croissance. Le présent projet de loi ne modifie pas ces dispositions.

Quant aux stagiaires, l’exonération des revenus des « jobs d’été » est cumulable avec celle des indemnités perçues par les étudiants effectuant des stages obligatoires de moins de trois mois faisant partie intégrante du programme d’études.

La limite d’âge s’apprécie au 1er janvier de l’année d’imposition. L’exonération s’applique donc y compris au titre de l’imposition des revenus de l’année au cours de laquelle les intéressés atteignent l’âge de 22 ans. Le projet de loi propose de relever de quatre ans cette limite d’âge.

Il est particulièrement délicat d’estimer le nombre de bénéficiaires supplémentaires de la mesure, le chiffrage du dispositif nécessitant de procéder à des extrapolations à partir des données déclaratives.

ÂGE ET ACTIVITÉS RÉMUNÉRÉES RÉGULIÈRES*

700.Âge et activités rémunérées régulières**Activités exercées au moins 6 mois par an et au moins à mi-temps pendant l'année universitaire.

Source : OVE, Enquête 2003 (3).

Le dispositif actuel ne concerne que les « jobs d’été ». Ainsi, dans le cas d’un jeune travaillant pendant les congés scolaires ou universitaires mais aussi le reste de l’année, notamment le week-end, seules ses rémunérations perçues au titre de l’activité exercée pendant ses congés peuvent être exonérées d’impôt sur le revenu.

L’extension de l’exonération à l’ensemble de ces rémunérations apportera une simplification bienvenue à des modes de calcul compliqués et permettra une exonération uniforme du revenu de ces activités, quel que soit le moment de leur exercice.

D’après l’enquête 2003 de l’Observatoire de la vie étudiante, 63,1 % des étudiants exercent une activité rémunérée pendant les vacances d’été, dont 30,4 % pendant cette seule période, et 36,9 % pendant l’été et l’année universitaire.

FRÉQUENCE DES ACTIVITÉS RÉMUNÉRÉES EXERCÉES
PENDANT L'ANNÉE UNIVERSITAIRE

690.Fréquence des activités rémunérées exercées pendant l'année universitaire

Source : OVE, Enquête 2003.

Lorsqu’un jeune achève ses études, il bénéficie de l’exonération d’impôt sur le revenu issu des rémunérations perçues au titre de l’activité exercée pendant les congés de l’année de l’achèvement de ses études et dont il aurait bénéficié s’il les avait poursuivies, sauf si ce travail marque le début d’une véritable activité professionnelle.

Le projet de loi prévoit de relever à trois smic le plafond actuellement fixé à deux smic, soit, compte tenu de la hausse du smic au 1er juillet 2007, de 2510 euros au titre des revenus de 2006 à 3840 euros au titre des revenus de 2007. La mesure devrait en effet être applicable à compter de l’imposition des revenus de 2007.

Comme le précise l’instruction fiscale 5F-13-06 du 19 mai 2006, l’exonération s’applique uniquement en matière d’impôt sur le revenu, et pas aux taxes et participations assises sur les salaires.

Comme dans le dispositif actuel, cette exonération s’appliquera au jeune imposable en son nom propre ou au foyer fiscal de ses parents. Dans ce dernier cas, elle continuera d’être cumulable avec la réduction d’impôt sur le revenu au titre des dépenses de scolarité des enfants à charge.

Rappelons qu’une personne constituant un foyer fiscal autonome bénéficie déjà d’une exonération d’impôt sur le revenu dans la limite de douze smic mensuels. La mesure proposée ne vise qu’à mettre en place un encouragement à la poursuite d’études en aidant les jeunes à les financer.

De 532 euros annuels en moyenne en 2003, la rémunération des activités exercées pendant l’année universitaire varie fortement selon le type d’activité.

RÉMUNÉRATION DES ACTIVITÉS
EXERCÉES PENDANT L'ANNÉE UNIVERSITAIRE

730.Rémunération des activités exercées pendant l'année universitaire

Source : OVE, Enquête 2003.

L’importance des revenus d’activité pour les étudiants varie aussi fortement selon l’origine géographique et sociale et selon le type d’études.

C'est en région parisienne, et plus particulièrement à Paris (50 %) et dans la petite couronne (51,9 %), que la part des revenus d'activité est la plus importante dans les ressources déclarées par les étudiants. Cette part est la plus faible (27,7 %) dans les villes de moins de 100 000 habitants.

Les emplois en concurrence avec les études (activités exercées au moins six mois par an et au moins à mi-temps pendant l'année universitaire, à l'exception de celles qui sont intégrées aux études et des jobs chez les particuliers (baby-sitting, cours particuliers) concernent 28,8 % des étudiants actifs. Ces emplois sont exercés de façon plus fréquente par les étudiants issus des classes populaires : 31,8 % des enfants d'ouvriers contre 26,2 % des enfants de cadres, chefs d'entreprise et professions intellectuelles supérieures.

Les étudiants en langues, lettres et sciences humaines exercent beaucoup plus fréquemment que les autres de tels emplois : 45,2 % des étudiants actifs en sciences humaines contre 14,4 % des étudiants en sciences et technologie. En STS et IUT, rares sont les étudiants actifs à exercer régulièrement un emploi entrant en concurrence avec leurs études : respectivement 12,1 % et 17,2 %. Enfin, en classe préparatoire aux grandes écoles l'exercice d'activités de ce type est très exceptionnel (3,4 %).

Le dispositif proposé par l’article 2 du projet de loi est optionnel : son automaticité aurait privé certains bénéficiaires de leurs droits à la prime pour l’emploi, calculés sur les seuls revenus imposés. Les jeunes, que le projet vise à aider à financer leurs études et à acquérir une expérience professionnelle, pourront donc bénéficier de la plus intéressante pour eux des deux mesures.

Le rapporteur propose à la commission de donner un avis favorable à l’adoption, sans modification, de l’article 2.

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption, sans modification, de cet article.

Article 3

(article 200 quaterdecies [nouveau] du code général des impôts)

Crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunts supportés pour l’acquisition ou la construction de l’habitation principale

Cet article prévoit l’instauration, pour les contribuables domiciliés en France, d’un crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts des prêts contractés en vue d’acquérir leur résidence principale. L’objectif est de favoriser l’accession à la propriété. En effet, dans ce domaine, la France accuse un retard important puisqu’il n’y a dans notre pays que 57 % de propriétaires, ce qui est relativement faible par rapport aux pays de l’OCDE : ils sont 82 % en Espagne, 70 % au Royaume Uni, 70 % aux États-Unis, et 68 % en Italie.

Cette mesure, qui correspond à un engagement fort du Président de la République, est fondée sur l’idée de ne pas faire payer au contribuable d’impôt sur les intérêts qu’il verse à l’établissement de crédit lui ayant accordé un prêt immobilier.

Constituant à la fois une mesure d’accroissement du pouvoir d’achat et une aide à l’accession, elle ne remet nullement en cause l’existence des autres instruments de développement de l’accession à la propriété, au premier rang desquels figurent le prêt à taux zéro, le prêt social de location-accession et le portage foncier.

Le crédit d’impôt mis en place à l’article 3 vise l’acquisition ou la construction de la résidence principale des contribuables fiscalement domiciliés en France.

Le logement peut être acquis directement ou par l’intermédiaire d’une société non soumise à l’impôt sur les sociétés – ce qui exclut donc les sociétés civiles immobilières (SCI).

Le logement doit satisfaire aux normes minimales de surface et d’habitabilité en vigueur pour le prêt à taux zéro (9 m²).

Selon les informations fournies au rapporteur par le Gouvernement, le crédit d’impôt concernera également les emprunts contractés en vue d’une acquisition-amélioration, mais pas les emprunts contractés en vue de la seule réalisation de travaux.

Le crédit d’impôt s’élève à 20 % du montant des intérêts d’emprunt et concerne les intérêts payés au titre des cinq premières annuités de remboursement des prêts.

Selon les informations fournies à votre rapporteur par le Gouvernement, le choix d’un taux de 20 % pour le crédit d’impôt est fondé sur le constat que le taux marginal d’imposition correspondant à l’impôt acquitté par les contribuables sur leurs intérêts d’emprunt est de 17 %. La limitation de la mesure aux cinq premières annuités d’emprunt repose sur le constat qu’au cours des cinq premières années, les ménages remboursent 40 % de leurs intérêts.

Le montant des intérêts ouvrant droit au crédit d’impôt ne peut excéder, chaque année, 3 750 euros (7 500 euros pour un couple, avec une majoration de 500 euros par personne à charge). Les frais d’emprunt et les cotisations d’assurances contractés en vue de garantir le remboursement des prêts ne sont pas pris en compte dans le calcul de l’impôt.

Selon les informations fournies au rapporteur par le Gouvernement, la formule d’un crédit d’impôt a été retenue car elle seule permet de toucher tous les ménages, y compris ceux qui ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu (soit un foyer fiscal sur deux). C’est la raison pour laquelle le projet de loi précise que si le crédit d’impôt excède l’impôt dû, l’excédent est restitué.

Si la mesure a été ouverte à l’ensemble des emprunteurs, et non aux seuls primo-accédants, c’est afin de favoriser les parcours résidentiels, en particulier pour les familles qui s’agrandissent.

Le Gouvernement estime que la mesure ne devrait pas avoir d’effet sur les prix de l’immobilier, car on n’est plus dans la phase haussière du cycle qu’a connue le marché dans les années récentes (début des années 2000).

1. EXEMPLE D’UN CÉLIBATAIRE QUI SOUSCRIT, LE 1ER OCTOBRE 2007, UN EMPRUNT DE 100 000 € SUR 15 ANS À UN TAUX DE 4 %.

 

Période du 01/01/2007 au
31/12/2007

Année 2008

Année 2009

Année 2010

Année 2011

Période du 01/01/2012 au
30/08/2012

Montant des intérêts d’emprunt

996

3 860

3 656

3 444

3 221

2 265

Montant retenu (plafond) de 3 750 € pour un célibataire

996

3 750

3 656

3 444

3 221

2 265

Montant du crédit d’impôt obtenu

199

750

731

689

644

453

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Emploi

La mesure permettrait à ce célibataire de réaliser, sur cinq ans, un gain de 3 466 euros, soit une réduction de plus de 10 % du coût total de son crédit, qui s’élèvera, hors assurance, à 33 000 euros.

2. EXEMPLE D’UN COUPLE AVEC DEUX ENFANTS QUI SOUSCRIVENT, LE 1ER SEPTEMBRE 2007, UN EMPRUNT DE 200 000 € SUR 20 ANS À UN TAUX DE 4 %

 

Période du 01/01/2007 au
31/12/2007

Année 2008

Année 2009

Année 2010

Année 2011

Période du 01/01/2012 au
30/08/2012

Montant des intérêts d’emprunt

2 656

7 789

7 514

7 228

6 930

4 448

Montant retenu (plafond) de 8 500 € pour un couple avec deux enfants

2 656

7 789

7 514

7 228

6 930

4 448

Montant du crédit d’impôt obtenu

531

1 558

1 503

1 446

1 386

890

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Emploi

La mesure permettrait à cette famille de réaliser, sur cinq ans, un gain de 7 314 euros, soit une réduction de plus de 8 % du coût total de son crédit, qui s’élèvera, hors assurance, à environ 90 000 euros.

Selon les informations fournies au rapporteur par le Gouvernement, la mesure devrait constituer une dépense fiscale de 3,7 milliards d’euros par an en régime de croisière (3 milliards d’euros en 2008 et en 2009).

Le rapporteur propose à la commission de donner un avis favorable à l’adoption, sans modification, de l’article 3.

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption, sans modification, de cet article.

Article 4

(articles 775 ter, 777, 777 bis, 779, 780, 784, 788, 789 bis, 790 C, articles 790 E, 790 F et 790 G [nouveaux], article 793, article 796-0 bis [nouveau], articles 796, 800, 990 I, 1709, 150-0 A, 150-0 D, 150-0 D bis, 163 bis C, 200 A du code général des impôts ; article L. 136-6 du code de la sécurité sociale)

Allègement des droits de mutation à titre gratuit

Cet article a pour objet de supprimer les droits de succession entre conjoints ou personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS), de relever les abattements personnels applicables aux droits de mutation à titre gratuit, d’exonérer d’imposition les donations de sommes d’argent à hauteur de 20 000 euros par donataire, et de supprimer l’exonération de droits de mutation applicable aux plus-values d’acquisition de stock-options en cas de donation.

Cette réforme a pour objectif :

– de réhabiliter le travail en permettant que le fruit d’une vie de travail puisse être transmis en franchise d’impôt ;

– d’éviter la superposition des impositions aux différents stades de la détention de patrimoine ;

– de mettre sur un pied d’égalité les conjoints et les partenaires liés par un PACS,

– et de soutenir la consommation des ménages.

Le calcul des DMTG s’effectue en 3 étapes :

1° On applique tout d’abord des abattements :

– des abattements personnels sur la part de chaque héritier (en fonction du lien de parenté ; ex. : 76 000 euros pour le conjoint ; 57 000 euros si la personne est liée au défunt par un PACS ; …) ;

– un abattement global pour les successions en ligne directe (enfants, ascendants) ou entre époux, de 50 000 euros.

2° On applique ensuite un tarif pouvant aller de 5 à 60 % selon la tranche de revenu et le lien de parenté.

3° Enfin, il est également possible d’appliquer une réduction sur le montant à payer.

Les abattements, tarifs et réductions applicables diffèrent selon qu’il s’agit de droits de succession ou de droits de donation.

La principale réforme des droits de mutation à titre gratuit a eu lieu en loi de finances pour 2005 :

– les abattements applicables en faveur des ascendants, des enfants et des personnes handicapées ont été portés de 46 à 50 000 euros ;

– l’abattement applicable entre frères et sœurs ayant partagé le même domicile a été porté de 15 à 57 000 euros ;

– un abattement global de 50 000 euros (soit pour les enfants ou ascendants et le conjoint, soit pour le conjoint seul) a été créé.

L’article 4 prévoit :

a. tant en ce qui concerne l’abattement …

L’abattement pour donation est porté à 76 000 euros (au lieu de 57 000 euros dans le droit en vigueur) pour les personnes liées par un PACS - cet abattement étant déjà applicable aux couples mariés.

b. … que le tarif applicable

L’article 4 propose d’appliquer le même tarif pour les donations entre époux et entre partenaires liés par un PACS.

L’abattement personnel applicable pour les donations et successions sur la part des ascendants et des enfants vivants ou représentés de 50 000 euros est porté à 150 000 euros ; en contrepartie, l’abattement global successoral est supprimé.

L’abattement en faveur des transmissions entre frères et sœurs est porté de 5 000 à 15 000 euros.

Les successions recueillies par les neveux et nièces bénéficieraient d’un abattement de 5 000 euros, comme c’est le cas pour les donations.

Le projet de loi prévoit une exonération de droits de mutation applicable aux dons en numéraire entre vifs, dans la limite de 20 000 euros, au profit d’un enfant, d’un petit-enfant, ou à défaut, d’un neveu ou d’une nièce.

Cette mesure sera cumulable avec les abattements existants mais suppose :

– que le donateur soit âgé de moins de 65 ans au jour de la transmission ;

– que le bénéficiaire du don soit âgé de 18 ans révolus au jour de la transmission.

Cette mesure ne pourra être utilisée qu’une seule fois par donateur pour un même donataire.

Dans le droit en vigueur, les plus-values d’acquisition réalisées quatre ans après l’attribution de stock-options sont imposées, au titre de l’impôt sur le revenu, à 30 % sur la fraction des titres inférieure à 152 500 euros, et à à 40 % au-delà de ce montant. Un taux de 11 % correspondant aux prélèvements sociaux s’ajoute dans chacun des deux cas. En deçà de ce délai de quatre ans, les plus-values d’acquisition sont imposées aux taux applicables aux traitements et salaires, majorés des prélèvements.

Cependant, les plus-values d’acquisition sont exonérées en cas de donation. Le projet de loi supprime cette exonération.

L’ensemble des dispositions de l’article 4 entre en vigueur à compter de la publication de la loi, sauf les dispositions relatives aux stock-options. Pour celles-ci, le projet de loi prévoit une entrée en vigueur pour les options attribuées à compter du 20 juin 2007, soit la date d’adoption du projet de loi en Conseil des ministres. En d’autres termes, les plans de stock-options actuellement en cours et attribués avant le 20 juin 2007 ne sont pas visés.

Étant donné la période d’indisponibilité de quatre ans applicable aux stock-options, la mesure n’entrera véritablement en vigueur qu’en 2011.

Actuellement, 70 % des Français sont exonérés de droits de succession. Le projet de loi porte ce taux à 95 %. Le coût de la réforme est estimé par le Gouvernement à 1,7 milliard d’euros pour les successions et 500 millions d’euros pour les donations, par an.

LIQUIDATION DES DROITS DE SUCCESSION

 

Conjoint survivant

Enfant 1

Enfant 2

 

Situation actuelle

Situation
nouvelle

Situation actuelle

Situation nouvelle

Situation actuelle

Situation nouvelle

Base d’impositions

100 000 €

100 000€

150 000 €

150 000 €

150 000 €

150 000 €

Abattement personnel

76 000 €

 

50 000 €

150 000 €

50 000 €

150 000 €

Abattement global de 50 000€ (1)

12 500 €

 

18 750 €

 

18 750 €

 

Part taxable

11 500 €

0

81 250 €

0

81 250 €

0

Droits dus

770 €

0

14 550 €

0

14 550 €

0

(1) Cet abattement s’applique sur l’actif de succession reçu par les enfants et le conjoint survivant. Il est réparti entre les cohéritiers au prorata de leurs droits successoraux.

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Emploi

LIQUIDATION DES DROITS DE SUCCESSION

 

Conjoint survivant

Enfant 1

Enfant 2

 

Situation actuelle

Situation
nouvelle

Situation actuelle

Situation nouvelle

Situation actuelle

Situation nouvelle

Base d’impositions

300 000 €

300 000€

225 000 €

225 000 €

2250 000 €

225 000 €

Abattement personnel

76 000 €

 

50 000 €

150 000 €

50 000 €

150 000 €

Abattement global de 50 000€ (1)

20 000 €

 

15 000 €

 

15 000€

 

Part taxable

204 000 €

0

81 250 €

75 000 €

160 000€

75 000 €

Droits dus

38 170 €

0

30 300 €

13 300 €

30 300 €

13 300 €

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Emploi

Le rapporteur propose à la commission de donner un avis favorable à l’adoption, sans modification, de l’article 4.

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption, sans modification, de cet article.

Article 5

(articles 1er et 1649-0 A du code général des impôts)

Droit à restitution des impositions en fonction du revenu

Cet article a pour objet de ramener de 60 % à 50 % le seuil du « bouclier fiscal » mis en place par la loi de finances pour 2006, et d’intégrer à la liste des impôts pris en compte dans ce bouclier la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

L’article 5 poursuit un triple objectif :

– permettre à chacun de se constituer un patrimoine par le revenu de son travail ;

– que nul ne puisse se voir prélever plus de la moitié de ce qu’il gagne ;

– accroître l’attractivité fiscale de la France en redonnant confiance aux investisseurs et en favorisant leur retour en France.

L’article 74 de la loi de finances initiale pour 2006 prévoit que les impôts directs payés par le contribuable ne peuvent être supérieurs à 60 % de ses revenus à compter du 1er janvier 2006.

Les impôts directs à prendre en compte sont :

– l’impôt sur le revenu (IR),

– l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF),

ainsi que, lorsqu’elles sont afférentes à l’habitation principale :

– la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB),

– la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB),

– et la taxe d’habitation (TH).

La LFI 2006 instaure un droit à restitution sur demande du contribuable lorsque le total des impositions payées une même année excède 60 % des revenus de l’année précédente.

L’article 5 du projet de loi renforce le bouclier fiscal sur deux aspects :

– il ramène de 60 à 50 % des revenus le montant maximal des impositions directes dues par chaque contribuable ;

– il inclut les impositions acquittées par le contribuable au titre des prélèvements sociaux (CSG, CRDS) dans la liste de celles qui sont soumises au plafonnement des impositions en fonction du revenu.

En cumulant les deux dispositifs, il s’agit donc d’une baisse de l’ordre de 18 % du seuil maximal d’imposition, se décomposant comme suit :

– 10 % au titre de la baisse du seuil ;

– 8 % au titre de l’inclusion de la CSG (7,5 %) et de la CRDS (0,5 %).

La mesure devrait constituer une dépense fiscale de l’ordre de 600 millions d’euros par an en régime de croisière.

Le rapporteur propose à la commission de donner un avis favorable à l’adoption, sans modification, de l’article 5.

*

La commission a donné un avis favorable à l’adoption, sans modification, de cet article.

Après l’article 5

La commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis, visant à créer une carte « Active » destinée à simplifier la gestion par l’employeur des heures travaillées par le salarié.

Le rapporteur pour avis a indiqué que ce dispositif poursuivait trois objectifs :

– mettre fin aux contraintes de gestion pesant sur les employeurs. La gestion des heures travaillées pèse lourd dans le budget des employeurs. Elle suppose en effet l’embauche de personnes spécialisées dans la gestion des rémunérations, l’édition des bulletins de paie ou les opérations de virement sur le compte des salariés. De telles contraintes favorisent le travail illégal qui, outre son moindre coût, permet de faire l’économie des contraintes administratives pesant sur la gestion des entreprises.

Afin de simplifier la gestion des heures travaillées, tant pour les employeurs que pour les salariés, l’amendement prévoit donc la mise en place d’une carte « Active », qui fonctionnerait comme une carte Vitale ou une carte bancaire, soit sur un mode électronique et informatisé.

– redéfinir la notion de « travail » fondée sur le nombre d’heures travaillées productrices de richesse. Cette carte à puce permettrait de gérer toutes les transactions concernant les heures travaillées par un salarié, et donc de créer des milliers d’heures, non travaillées ou non déclarées à ce jour. Elle permettrait aussi de faire une distinction plus nette entre heures travaillées productrices de richesse, heures travaillées consommatrices de richesse et heures assistées.

Elle participerait ainsi de la redéfinition de la notion de « travail » qui serait envisagé du point de vue du nombre d’heures travaillées. La carte favoriserait en effet l’embauche de demandeurs d’emploi, même pour un très petit nombre d’heures de travail (une heure ou deux, par exemple).

– fonder cette simplification administrative sur la gestion informatisée des données. La carte « Active » fonctionnera de façon simple : tout employeur potentiel possédera un lecteur de cartes. Grâce à sa carte nominative et personnelle, chaque salarié pourra pointer avant de travailler, puis une fois le travail fini. Ce pointage constituera une forme de déclaration d’embauche automatisée. La mise en œuvre du dispositif se fera par étapes : on peut ainsi envisager que la carte ne soit attribuée dans un premier temps qu’aux seuls demandeurs d’emploi et ne soit valable que dans les très petites entreprises. S’il s’avère efficace, le dispositif pourra être étendu dans un second temps à l’ensemble des demandeurs d’emploi, puis à l’ensemble des salariés en contrat autre qu’à durée indéterminée. Ce système de traitement informatisé des heures travaillées stimulera l’embauche avec d’autant plus d’efficacité qu’il sera complété par un dispositif de perte dégressive des aides aux chômeurs.

M. Jean-Paul Charié a exprimé ses réserves sur l’introduction dans ce projet de loi et à l’occasion d’un amendement d’un nouveau système de carte informatisée, bien que celui-ci puisse être utile en vue de la simplification de la vie des très petites entreprises. Il est prématuré d’introduire une telle contrainte par voie législative au cours de l’examen de ce projet de loi, sans une étude préalable.

Le président Patrick Ollier a indiqué que l’amendement n’était pas recevable au titre de l’article 40 de la Constitution et qu’il nécessitait un travail plus approfondi de la commission.

M. François Brottes a estimé que la rédaction de cet amendement posait un problème de fond, au-delà du seul problème financier. En effet, le dispositif vise les demandeurs d’emploi alors que cette carte ne sera finalement utilisée que par les personnes qui occupent un emploi dans les entreprises de moins de cinq salariés et ne sont plus de ce fait demandeurs d’emploi. De plus, elle assimile de fait l’ANPE à une agence d’intérim. En conséquence, le groupe socialiste s’opposera à l’adoption d’un tel amendement.

M. Jean-Louis Gagnaire a souligné le caractère particulièrement choquant de l’exposé des motifs de cet amendement, qui justifiait le recours au travail illégal par les contraintes de gestion des heures travaillées pesant sur les entreprises. En outre, il ne faut pas oublier que les très petites entreprises ont de grandes difficultés à avoir accès aux technologies de l’information et de la communication.

L’amendement a été retiré par le rapporteur pour avis.

Article 6

Réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune au titre des versements effectués à des organismes d’intérêt général ou en vue de souscrire au capital de PME

Le présent article a pour objet de permettre aux redevables à l’impôt de solidarité sur la fortune de réduire le montant de l’impôt dû à hauteur de 75 % des versements effectués à des organismes d’intérêt général ou en vue de souscrire au capital de PME. En d’autres termes, il s’agit d’offrir aux redevables le choix de s’acquitter de leur impôt ou de l’investir dans les PME ou les organismes en question.

Le rapporteur souhaite en particulier souligner la nécessité d’orienter l’épargne des contribuables les plus fortunés vers le financement des PME.

En effet, selon le rapport du Conseil d’analyse économique de 2006, Une stratégie PME pour la France, notre pays souffre d’un triple mal : insuffisance d’emplois, insuffisances d’exportations et insuffisance de recherche- développement.

Les auteurs du rapport, Jean-Paul Betbèze et Christian Saint-Etienne, attribuent cette insuffisance à un manque d’entreprises de taille moyenne, comptant de 50 à 500 salariés, dont il découle un nombre insuffisant de mini-groupes français ayant de 500 à 3 000 salariés. Or c’est dans ce potentiel de PME que se trouvent des gisements d’emplois et de croissance importants.

Parmi les freins au développement de ces PME, on compte les difficultés de financement. On estime qu’en France, sur les 16 000 PME à la recherche d’un financement en capital-développement en 2005, seulement 500 sont parvenues à le trouver. Sans faire de procès au système bancaire français, il faut bien admettre que celui-ci sait mal répondre aux entrepreneurs les plus aventureux et aux entreprises les plus risquées.

L’État a cherché à remédier à ces difficultés de financement, notamment en utilisant l’outil fiscal.

On peut ainsi citer le dispositif dit « Madelin », créé par la loi nº 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, et prolongé par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l’initiative économique jusqu’au 31 décembre 2006, qui prévoit une réduction d'impôts sur le revenu égale à 25 % des sommes investies dans les PME, dans la limite de 20 000 euros pour un célibataire et de 40 000 euros pour un couple.

Reconduit pour cinq ans, jusqu’au 31 décembre 2010, par la loi de finances pour 2007, le dispositif est ouvert aux investissements intermédiés (les clubs ou réseaux de « Business Angels »), sauf lorsqu’il s’agit de gestionnaires de patrimoine immobilier ou mobilier. Les « Business Angels » (ou « investisseurs providentiels ») sont des personnes physiques qui investissent leur propre argent dans des entreprises à fort potentiel et qui mettent à disposition de ces entreprises leurs compétences, leur expérience, leur réseau relationnel et une partie de leur temps.

Il convient aujourd’hui d’aller plus loin.

On peut en particulier regretter qu’aucune disposition du code général des impôts ne prévoit d’utiliser l’impôt de solidarité sur la fortune comme instrument fiscal visant à orienter l’épargne de contribuables fortunés vers des buts d’intérêt général.

Il existe bien des dispositifs d’exonération, mais ils ne visent que des stocks existants, déjà investis : œuvre d’arts, biens professionnels, parts de sociétés…

S’agissant plus précisément du financement des PME, divers dispositifs ont été aménagés, afin de ne pas pénaliser la détention de titres pour les contribuables qui ne peuvent prétendre à l’exonération d’ISF au titre des biens professionnels.

Exonération à hauteur de 75 % des parts et actions détenues dans les sociétés faisant l’objet d’un engagement collectif de conservation (article 855 I bis du code général des impôts) :

Introduit dans le code général des impôts par la loi du 1er août 2003 pour l’initiative économique, modifié par la loi de finances pour 2006, ce dispositif permet d’exonérer d’ISF, à concurrence des trois quarts de leur valeur, les parts ou actions de sociétés faisant l’objet d’un engagement collectif de conservation d’une durée minimale de six ans.

Les sociétés concernées sont celles exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ; l'exonération s'applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement de conservation.

Cette exonération est subordonnée au respect de deux conditions : l’engagement collectif doit porter sur 20% au moins des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par les sociétés cotées, et 34% au moins des parts ou actions des sociétés non cotées. En outre, l’un des signataires de l’engagement doit exercer dans la société une fonction de direction.

Ce dispositif a pour objet de permettre aux associés ne remplissant pas les conditions pour bénéficier de l’exonération au titre des biens professionnels (absence de fonctions dirigeantes, participation inférieure à 25 %) d’être exonérés à hauteur de 75 % de leurs droits sociaux, afin de favoriser notamment la stabilité du capital des entreprises à actionnariat familial. En effet, compte tenu notamment du taux marginal supérieur d’imposition de 1,8 %, ces associés sont conduits soit à exiger un taux de rémunération du capital supérieur à 1,8 % et le versement de dividendes compromettant l’autofinancement des sociétés, soit à vendre leurs parts, déstabilisant le capital des sociétés et aggravant les risques de délocalisations.

Exonération des titres reçus en contrepartie de la souscription en numéraire ou en nature au capital d’une PME (article 885 I ter)

Introduit par la loi sur l’initiative économique, ce dispositif permet une exonération totale d’ISF des titres reçus en contrepartie de la souscription au capital des PME.

La notion de souscription vise non seulement les apports effectués lors de la constitution de la société, mais aussi à l’occasion d’une augmentation de capital, les souscriptions pouvant revêtir la forme d’apports en numéraires ou en nature, à condition que ces derniers soient nécessaires à l’exercice de l’activité de la société. Sont exclus les apports en actifs immobiliers et les valeurs mobilières.

Les apports doivent être effectués au profit de PME exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale à l’exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier ou immobilier.

Exonération des titres détenus par les salariés, les dirigeants en activité, ou ceux d’entre eux ayant cessé leurs fonctions pour prendre leur retraite (article 885 I quater du code général des impôts)

Depuis la loi de finances pour 2006, les parts ou actions de sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale,sont exonérées à hauteur de 75 % de leur valeur, lorsque leur propriétaire exerce son activité principale dans cette société comme salarié ou mandataire social, ou lorsqu’il y exerce son activité principale lorsque la société est une société de personnes soumise à l’impôt sur le revenu, sous réserve de leur conservation pendant au moins six ans.

Sont également visés par cette disposition les redevables ayant cessé leurs fonctions ou activités pour faire valoir leur droit à la retraite, à condition de détenir ces titres depuis au moins trois ans.

Il s’agit d’une part d’encourager la détention d’actions par les salariés de l’entreprise, d’autre part de reconnaître l’engagement des dirigeants dans leur entreprise en leur permettant de réduire le montant de leur ISF, même s’ils ne sont pas partie à un pacte d’entreprise, qui peut être complexe à mettre en œuvre, et qui ne bénéficient pas du régime d’exonération au titre des biens professionnels ; il s’agit enfin de régler le problème des anciens salariés ou dirigeants partant à la retraite, qui conservent leurs titres mais ne bénéficient plus d’aucun abattement ou exonération. Le régime des biens professionnels ne prévoit en effet d’exonération que pour les propriétaires de parts ou d’actions exerçant des fonctions de direction au sein de l’entreprise. Le départ à la retraite peut donc comporter un coût fiscal très important pour ceux qui souhaitent pérenniser leur participation dans l’entreprise, compromettant ainsi la transmission dans de bonnes conditions des entreprises, enjeu pourtant essentiel pour une population de dirigeants vieillissante.

En pratique, ils se sont révélés trop spécifiques et insuffisamment incitatifs pour permettre de mobiliser les capitaux nécessaires au développement des PME ; il s’agit en effet d’abattements sur l’assiette de l’ISF, qui neutralisent partiellement les effets négatifs de cette imposition sans pour autant constituer une incitation à investir.

L’article 6 du projet de loi traduit donc la volonté de drainer des financements nouveaux vers les entreprises qui en ont le plus besoin, les non cotées, au moment où elles en ont le plus besoin, lors de leur création ou à l’occasion d’une augmentation de capital.

Le I de cet article complète l’article 885 I ter du code général des impôts, afin d’étendre le champ de l’exonération prévue aux titres reçus par le redevable en contrepartie d’une souscription au capital d’une société ayant pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant des activités industrielles, commerciales, artisanales, agricoles ou libérales.

Il s’agit d’une disposition de coordination avec le dispositif existant en matière d’exonération des titres de sociétés faisant l’objet d’un engagement de conservation, et dont le champ couvre les titres détenus dans des sociétés dites « interposées ».

Dans ce cas, le pourcentage de 75 % sera appliqué à la valeur des titres détenus par le redevable dans la société interposée dans la limite de ce que représentent, dans l’actif de cette société « holding », les titres reçus en contrepartie de sa prise de participation dans les PME éligibles.

Le II de cet article institue un avantage fiscal permettant aux redevables de l’ISF de se libérer de leur impôt en souscrivant directement ou indirectement, à travers une société « interposée », au capital de PME quelle que soit leur forme juridique.

Les souscriptions peuvent être effectuées en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l’exercice de l’activité, à l’exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières.

La société bénéficiaire doit pouvoir prétendre à la qualification de PME au sens de l’annexe I du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission européenne, c’est-à-dire employer moins de 250 personnes, produire un chiffre d’affaire annuel n’excédant pas 50 millions d’euros, ou présenter un bilan n’excédant pas 43 millions d’euros, et respecter le critère de l’indépendance, c’est-à-dire que son capital ou ses droits de vote ne soient pas détenus à plus de 25 % par une entreprise ou plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition de la PME.

Elle doit exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ; les sociétés exerçant conjointement une de ces activités et une activité civile sont donc écartées du dispositif.

Sont également exclues du dispositif les sociétés exerçant des activités de gestion de patrimoine mobilier ou immobilier, et notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, ainsi que celles exerçant des activités de gestion ou de location d’immeubles.

Le siège de direction effective de la société devra se trouver dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un État partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale.

Enfin, seules les sociétés non cotées seront concernées par ce dispositif, ce afin de drainer l’épargne des contribuables assujettis à l’ISF vers les entreprises dont l’accès à des financements est le plus problématique.

Les souscriptions au capital de sociétés dont l’objet exclusif est de détenir des participations dans des sociétés répondant aux critères énoncés ci-dessus seront également éligibles au dispositif.

En tout état de cause, le bénéfice de l’avantage fiscal sera subordonné à la conservation par le redevable des titres reçus en contrepartie de sa souscription pendant une durée de cinq ans.

Ces conditions réunies, le redevable pourra déduire du montant de l’ISF dû 75 % des versements effectués aux PME éligibles, dans la limite d’un montant de 50 000 euros. La fraction du versement ouvrant droit à l’avantage fiscal ne pourra donner lieu à un autre avantage fiscal au titre d’un autre impôt, notamment au titre du dispositif « Madelin » précité.

Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect de la règle de minimis sur la notification des aides d’État, c’est-à-dire aux aides qui par leur faible montant échappent à la réglementation européenne.

Le III de cet article décrit un dispositif identique s’agissant des dons en numéraires, à l’exclusion des dons en nature, effectués au profit :

– des établissements publics de recherche et des établissements publics d’enseignement supérieur ;

– des fondations reconnues d’utilité publique ;

– des entreprises d’insertion (entreprises de biens et de services conventionnées par l’État, employant des personnes sans emploi et rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières et exonérées de charges) et des entreprises de travail temporaire d’insertion (entreprises de travail temporaire dont l’objet exclusif consiste à faciliter l’insertion professionnelle de ces personnes) ;

– des associations intermédiaires conventionnées par l’État, qui ont pour objet d’embaucher des personnes sans emploi et rencontrant des difficultés sociales ou professionnelles particulières, afin de faciliter leur insertion en les mettant à disposition, à titre onéreux, de personnes physiques ou morales.

Le redevable pourra imputer sur l’ISF dû, dans la limite de 50 000 euros, 75 % du montant des dons effectués au profit de ces organismes.

Les deux dispositifs, souscriptions au capital de PME d’une part, dons aux organismes d’intérêt général d’autre part, seront cumulables, mais le plafond de 50 000 euros sera appliqué globalement.

Le coût global de cette mesure est estimé à 170 millions d’euros pour 2008 et à 410 millions d’euros pour 2009. Ces coûts nets se décomposent de la façon suivante :

– la réduction d'ISF pour les investissements dans le capital de PME (création de l'article 885-0 V bis du CGI) représenterait un coût de 190 millions d’euros pour 2008 et de 380 millions d’euros à compter de 2009 ;

– la réduction d'ISF au titre des dons consentis à des fondations reconnues d'utilité publique, des établissements publics de recherche, des établissements publics d'enseignement supérieur et des organismes d'insertion par l'activité économique atteindrait un coût de 110 millions d’euros pour 2008 et de 160 millions d’euros à compter de 2009 ;

– la création de la réduction d'ISF entraînerait une diminution du montant global de la réduction d'impôt sur le revenu au titre des dons prévue à l'article 200 du code général des impôts d’environ de 100 millions d’euros à compter de 2008 ;

– l’exclusion de la fraction du versement ayant donné lieu à la réduction d'ISF prévue à l'article 885-0 V bis des versements pris en compte au titre de la réduction prévue à l’article 199 terdecies-0 A du CGI se traduirait par un gain de 30 millions d’euros à compter de 2008.

Le rapporteur propose à la commission de donner un avis favorable à l’adoption, sans modification, de l’article 6.

*

M. Jean-Yves Besselat a réitéré sa demande de simulation des conséquences du passage à 150 000 euros par enfant de la part successorale transmissible sans droit de succession.

Le rapporteur pour avis a répondu que cette mesure ferait passer le pourcentage des successions exonérées de 70 % à 95 % et cité un exemple.

Le président Patrick Ollier a ensuite proposé que le rapporteur interroge le ministre en séance publique sur le nombre de successions qui resteraient imposables et les conditions dans lesquelles elles le resteraient.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption, sans modification, de cet article.

Article 7

(Articles L. 225-42-1, L. 225-22-1, L. 225-90-1 et L. 225-79-1 du code de commerce)

Modification du régime des conventions réglementées relatives à certaines rémunérations différées des dirigeants d’entreprises cotées.

Le présent article constitue un élément essentiel du présent projet en ce qu’il entend mettre fin à certaines aberrations constatées en matière de rémunérations différées des dirigeants d’entreprises, plus communément appelées «golden parachutes » ou « parachutes dorés »

L’appellation « parachutes dorés » recouvre en fait une réalité multiple.

Il peut s’agir, d’une part, de stock-options. Il peut s’agir également de conventions indemnitaires diverses : convention de rachat d’actions par l’entreprise appartenant au président-directeur général révoqué ; convention de versement d’une pension retraite complémentaire ; convention d’indemnités pour services exceptionnels ; convention de paiement d’indemnités pour rupture du contrat de travail (4). En outre, peuvent s’ajouter aux indemnités conventionnelles prévues lors de l’élection du président-directeur général, de la nomination du directeur général ou des directeurs généraux délégués, des accords transactionnels indemnitaires conclus peu de temps avant la révocation.

Ces parachutes dorés se sont d’abord développés aux États-Unis dans les années 1980, avant d’arriver en France où ils ont répondu à la volonté des dirigeants de s’assurer une certaine sécurité en cas d’éviction, faute pour eux de pouvoir bénéficier du régime protecteur du droit du travail et des indemnités de licenciement. Ils se sont également développés sous l’effet des offres publiques d’achat dont les marchés français ont particulièrement fait l’objet au cours des années 1990. Il s’agissait ainsi d’une arme au service des entreprises à l’origine de l’OPA visant à « séduire » les dirigeants d’une société cible et à les inviter à faciliter le rachat de la société en contrepartie de conditions de départ privilégiées.

Au cours des dernières années, la pratique des parachutes dorés a suscité un très grand émoi du fait des montants en jeu, mais aussi du sentiment que ces rémunérations étaient totalement déconnectées de la performance des dirigeants et des résultats de l’entreprise.

Comme le rappelle fort justement une note récente de l’Institut Montaigne (5), il convient en la matière de faire la part des choses.

« Considérer globalement les dirigeants d’entreprise comme extrêmement bien rémunérés serait une grave erreur » ; la France compte trois millions d’entreprises, et autant de patrons, qui gagnent en moyenne 50 000 euros par an, bien loin des montants des « parachutes » qui ont retenu l’attention. Au sein des entreprises du SBF 250 (les 250 plus grandes sociétés cotées de la place parisienne), la rémunération moyenne est d’environ 700 000 euros. Les parachutes dorés dont les montants s’élèvent à plusieurs millions d’euros concernent en réalité une petite minorité de dirigeants d’entreprises, généralement des entreprises exerçant leurs activités au niveau mondial.

Au surplus, les dirigeants des entreprises du CAC 40 perçoivent des rémunérations qui se situent dans la norme internationale. Ainsi, comme le rappelle l’Institut Montaigne, « la rémunération moyenne d’un patron présidant aux destinées d’une des cinq cents premières entreprises américaines est d’environ 15 millions de dollars, soit 11 millions d’euros. Ce montant est de plus de deux fois et demie supérieur à la moyenne des patrons du CAC 40 ».

Pour autant, on ne peut se satisfaire d’une situation dans laquelle des dirigeants reçoivent des parachutes dorés alors même qu’ils laissent la société qu’ils ont dirigée dans une situation fragilisée, à plus forte raison compte tenu des montants en jeu, ces cas fussent-ils marginaux. Ils contribuent à jeter l’opprobre sur la totalité des entreprises quand la plupart d’entre elles pratiquent une politique de rémunération acceptable et responsable.

Dès lors, quelle forme peut prendre l’intervention de l’État ?

La fixation d’un plafond global revêtirait un caractère arbitraire qui méconnaîtrait le fait qu’une rémunération forte est légitime dans le contexte de bons résultats de l’entreprise et inacceptable dans un contexte de difficultés.

C’est pourquoi le présent article se propose de corréler le montant de ces rémunérations différées aux performances du bénéficiaire, de renforcer la publicité donnée à ces rémunérations ainsi que l’information des actionnaires.

La transparence des rémunérations des dirigeants d’entreprises a d’ores et déjà été considérablement renforcée au cours des dernières années, en particulier grâce à la loi du 26 juillet 2005 de confiance et de modernisation de l’économie, qui soumet les rémunérations différées au régime des conventions réglementées.

En vertu des articles L. 225-38 à L. 225-42 du code de commerce, le régime des conventions réglementées concerne « toute convention intervenant directement ou par personne interposée entre la société et son directeur général, l'un de ses directeurs généraux délégués, l'un de ses administrateurs, l'un de ses actionnaires disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % ou, s'il s'agit d'une société actionnaire, la société la contrôlant (...) ».

Ces conventions sont soumises à l'autorisation préalable du conseil d'administration, sans que l'intéressé puisse prendre part au vote. Le président avise les commissaires aux comptes de toutes les conventions autorisées. Ceux-ci présentent un rapport spécial à l'assemblée générale sur ces conventions. Le président soumet les conventions autorisées à l'approbation de l'assemblée générale, qui statue, par ailleurs, sur le rapport des commissaires aux comptes.

Un régime similaire est prévu dans les sociétés à directoire et conseil de surveillance (articles L. 225-86 à L. 225-90 du code de commerce).

Le présent article crée un régime de « super convention réglementée », présentant des exigences de transparence et de publicité renforcées pour les rémunérations différées dans les sociétés cotées et dispose que ces rémunérations différées seront interdites sauf à être subordonnées au respect de conditions de performance du bénéficiaire, qui seront fixées a priori dans la convention réglementée.

On entend par rémunération différée l’ensemble des éléments de rémunération, indemnités et avantages dus ou susceptibles d’être dus à raison de la cessation ou du changement de fonctions, ou postérieurement à celles-ci, à deux exceptions près.

Sont en effet exclues du dispositif les indemnités éventuellement accordées en contrepartie d’une clause de non-concurrence, car celles-ci ne sont par nature pas liées à la performance du bénéficiaire, mais destinées à compenser un manque à gagner futur pour le dirigeant ; sont également exclus les régimes de retraite à prestations définies visés par l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, qui, selon les explications fournies par le ministère de l’économie, des finances et de l’emploi, « ne peuvent constituer des avantages individuels et dont la constitution de droit à prestations est conditionnée à l’achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l’entreprise ».

Aucun versement ne pourra intervenir sans que le conseil d’administration ou de surveillance ne constate le respect des conditions prévues.

Le présent article renforce également la publicité donnée à ces rémunérations et l’information des actionnaires.

En effet tant l’autorisation par le conseil d’administration de la signature de la convention comportant ces engagements, que la décision par laquelle celui-ci autorise le versement des rémunérations en question seront rendues publiques, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.

En outre, l’information des actionnaires sera garantie par l’obligation de présenter, à l’occasion de la soumission à l’assemblée générale de la convention de rémunération différée en application de l’article L. 225-42-1, une résolution spécifique pour chaque bénéficiaire. L’approbation de l’assemblée générale sera en outre requise à chaque renouvellement de mandat du bénéficiaire.

Tout versement effectué en méconnaissance de ces dispositions sera frappé d’une nullité de plein droit.

Enfin, les conventions en cours devront être mises en conformité avec les présentes dispositions dans un délai de dix-huit mois après la publication de la loi. À défaut, elles pourront être annulées si elles se sont avérées dommageables à la société. Dans les conditions de droit commun, la nullité pourra être couverte par un vote de l’assemblée générale intervenant sur rapport spécial des commissaires aux comptes, rapport qui devra exposer les raisons pour lesquelles la ou les conventions en cours n’ont pas été mises en conformité avec les dispositions du présent article.

Le rapporteur propose d’apporter deux modifications au présent article.

Tout d’abord, il convient de noter qu’à ce jour, les « parachutes dorés » peuvent être négociés par les dirigeants dès le début de leur mandat, mais aussi à l’occasion de la cessation de leurs fonctions.

Or la rédaction actuelle de l’article 7 pourrait laisser au conseil d’administration ou de surveillance et à l’assemblée générale toute latitude pour conclure une convention de rémunération différée en prévision du départ d’un dirigeant et très peu de temps avant, convention fixant alors des critères de performance sur la pertinence desquels on ne pourrait être qu’extrêmement dubitatif.

Au surplus, quelle valeur conférer au constat de la réalisation de ces objectifs par le conseil d’administration, si celui-ci intervient juste après leur définition dans la convention ?

Le rapporteur propose donc un amendement ayant pour objet de préciser que les conventions de rémunération différée sont conclues lors de la nomination ou de l’élection des mandataires sociaux, de manière à ce que les critères de performance visés ici soient fixés ex ante, permettant de bénéficier d’un recul suffisant, au moment où se pose la question du versement des indemnités concernées, pour apprécier si ces objectifs ont été satisfaits ou non.

En outre, la rédaction actuelle de l’article 7 subordonne l’existence et le versement de rémunérations différées à des critères de performance du bénéficiaire.

Or il paraît tout à fait incongru de faire abstraction de toute donnée relative à la bonne santé de l’entreprise dès lorsqu’il s’agit d’apprécier le rôle d’un dirigeant.

On ne saurait priver du bénéfice d’une rémunération différée un dirigeant qui s’est acquitté de sa tâche ; mais on ne saurait la lui verser si ses efforts ne se sont pas traduits sur les résultats de l’entreprise.

Le rapporteur propose donc de préciser que les critères de performance auxquels sont subordonnés les rémunérations, indemnités et avantages différés que cet article se propose d’encadrer, concernent non seulement les critères de performance du bénéficiaire, mais aussi ceux de la société.

Ainsi le versement de ces rémunérations sera-t-il lié non seulement à une obligation de moyens, mais aussi, en partie, à une obligation de résultat.

*

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis précisant que les conventions de rémunération différées sont conclues lors de la nomination ou de l’élection des mandataires sociaux.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis, a expliqué que cet amendement visait à ce que les critères de performance soient déterminés au départ et non à la fin du mandat des dirigeants d’entreprise.

M. François Brottes a demandé quelles étaient les sanctions prévues en cas de non-respect de la loi.

Le rapporteur pour avis a répondu que la sanction du non-respect de cette disposition législative était la nullité des conventions.

La commission a adopté cet amendement.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis prévoyant que les critères de performance auxquels sont subordonnés les rémunérations, indemnités et avantages, sont les critères de performance du bénéficiaire mais aussi ceux de la société.

Mme Monique Iborra a demandé si ces critères incluaient la création d’emplois.

Le rapporteur pour avis a répondu que ce serait le conseil d’administration qui les définirait.

Le Président Patrick Ollier a souligné que le projet de loi renforçait le pouvoir de décision de l’assemblée générale qui validerait les choix du conseil d’administration. Définir des critères dans la loi serait contraire à la liberté des entreprises. En revanche, la loi impose de nouvelles modalités de décision, qui permettront d’éviter l’attribution de parachutes dorés à des dirigeants responsables des mauvais résultats de l’entreprise et des suppressions d’emploi qui s’en suivent.

Mme Monique Iborra a estimé que cela restait insuffisant pour lutter réellement contre le chômage et la précarité.

Le Président Patrick Ollier a répondu que l’objectif à atteindre pour une entreprise n’était pas forcément la création d’emplois et que tout dépendait de la conjoncture et du secteur. En effet, dans un marché qui n’est pas en expansion, l’objectif prioritaire pouvait être la préservation des parts de marché et le maintien des emplois existants.

M. Jean-Louis Léonard a souligné que la prédétermination des critères de performance en début de mandat n’était pas toujours simple et qu’il existait des cas de force majeure. Il n’est pas légitime d’imputer à un dirigeant les mauvais résultats de son entreprise si le marché s’effondre. Par ailleurs, il est prévu de soumettre au conseil d’administration, au conseil de surveillance et à une assemblée générale les clauses et le constat de leur réalisation. Une saisine extérieure pourrait néanmoins le cas échéant être légitime dans certaines entreprises, afin d’associer les salariés fortement impliqués dans la vie de leur entreprise à cette appréciation autrement que par leurs représentants au sein du conseil d’administration.

Le rapporteur pour avis a répondu que le conseil d’administration était souverain pour évaluer les performances des dirigeants.

M. Jean-Louis Léonard a estimé que donner un simple mandat au conseil d’administration était tout à fait insuffisant. Le conseil d’administration, qui est juge et partie, n’est pas crédible. En outre, la composition d’un conseil d’administration peut avoir changé entre le début et la fin du mandat d’un dirigeant. C’est l’actionnariat qui doit décider. Il est à craindre que cet article donne lieu à du contentieux.

Le rapporteur pour avis a précisé qu’en vertu du projet de loi, le bénéficiaire potentiel de la convention sur laquelle se prononçait le conseil d’administration ne prenait pas part au vote.

Le Président Patrick Ollier a rappelé que c’est l’assemblée générale qui serait amenée à valider les propositions faites par le conseil d’administration. L’assemblée générale se prononcera sur la convention et cette dernière fera l’objet d’une résolution spécifique qui ne sera donc pas noyée parmi d’autres points figurant à l’ordre du jour.

M. Jean Dionis du Séjour a souligné que le progrès du texte consistait à donner plus de pouvoir de décision au conseil d’administration, avec un risque de connivence, et à mieux informer l’assemblée générale. En revanche, l’évaluation du respect des performances risque d’être conflictuelle et le projet de loi gagnerait à être simplifié sur ce point.

M. Jean-Paul Charié a indiqué que la majorité présidentielle voulait mettre fin aux dérives permettant le départ de dirigeants d’entreprises mal gérées avec des parachutes dorés. Cependant dans un contexte économique international, la portée effective de ce message serait affaiblie si le projet de loi donnait lieu à une réglementation excessive et à une ingérence dans les décisions des actionnaires des entreprises.

Le rapporteur pour avis a indiqué que les amendements qu’il proposait visaient à renforcer la moralisation de cette pratique, notamment en fixant des critères de performance dès le début du mandat du dirigeant, le conseil d’administration étant souverain pour apprécier si ceux-ci ont été atteints en fin de mandat ou de fonction par le dirigeant. Il reste qu’on peut avoir travaillé beaucoup, sans que cela n’ait permis de faire progresser l’entreprise ; mais dans ce cas, ce travail n’a servi à rien. Sans qu’il soit question de se substituer dans la loi aux actionnaires ou aux conseils d’administration, il est donc légitime de prévoir que ces critères se réfèrent aussi aux performances de l’entreprise.

La commission a adopté cet amendement, le groupe socialiste, radical et citoyen et le groupe de la Gauche démocrate et républicaine s’abstenant.

La commission a ensuite adopté deux amendements de conséquence puis a donné un avis favorable à l’adoption de cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 7

(articles L. 127-1, L. 127-1-1 et L. 434-2-1)

Simplification des conditions d’adhésion des entreprises de 300 salariés et plus aux groupements d’employeurs

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis portant article additionnel.

Le rapporteur pour avis a rappelé que, créés en 1985, les groupements d’employeurs ont pour objet principal de permettre aux entreprises qui en sont membres de recourir à des salariés mis à leur disposition par le groupement dans le cadre d’opérations à but non lucratif.

Cet outil à destination des entreprises, le plus souvent de nature associative, repose sur une conception du travail radicalement différente du modèle traditionnel.

Le groupement d’employeurs embauche des salariés qui sont ensuite mis à la disposition des entreprises membres. Les salariés sont titulaires d’un contrat de travail écrit, lequel a vocation à être à durée indéterminée. En fonction de la demande des entreprises, les salariés travaillent, pour des durées variables, au sein des entreprises dites utilisatrices. Lorsque le besoin de l’entreprise est satisfait, le salarié est alors mis à la disposition d’une autre entreprise et bénéficie ainsi d’une stabilité d’emploi

L’adéquation de cette formule à l’évolution économique et sociale du pays a notamment été soulignée par le Conseil économique et social, qui, dans son avis de novembre 2002, a répondu positivement à la question : Les groupements d’employeurs, un outil pour la croissance et l’emploi ?

« Une solution originale relativement peu utilisée

La formule des groupements d’employeurs, issue d’expérimentations conduites dans l’agriculture, apparaît comme un outil novateur de la politique publique de l’emploi. Force est néanmoins de constater son caractère relativement méconnu, ainsi qu’en atteste la faiblesse du nombre total d’entreprises concernées et de salariés couverts, oscillant entre 15 et 20 000 sans que l’on dispose à ce jour de données chiffrées plus précises. Examinée sur longue période, cette formule, qui s’est plus particulièrement développée dans l’agriculture, ne s’est pas déployée, comme elle aurait pu le faire, dans d’autres domaines professionnels.

Une réponse pragmatique à certains des besoins des entreprises

Les groupements d’employeurs visent, dans un contexte de mutations économiques et d’adaptation permanente des structures productives aux contraintes des marchés, à apporter une réponse pragmatique aux besoins qu’expriment certaines entreprises, s’agissant notamment de la variation de la charge de travail, des questions d’organisation du travail ou de compétences spécialisées nécessaires au développement de l’activité productive. Cette forme de gestion permet d’adapter la demande de main-d’œuvre aux besoins précis de l’entreprise. Le système s’avère dans ses principes et ses règles particulièrement adapté au tissu des très petites entreprises, pour lesquelles la création d’emplois à temps plein ne représente pas, dans certains domaines d’activité, la solution la plus appropriée. Au-delà, la mise en commun et l’externalisation de certaines fonctions de gestion des ressources humaines et de gestion de la paye semblent constituer pour les petites structures adhérentes un facteur favorisant le développement des entreprises et l’emploi des salariés (…)

Un objectif de stabilisation d’emplois salariés et de suivi des parcours professionnels

Les groupements d’employeurs constituent, par ailleurs, l’une des réponses possibles, dans des territoires déterminés, à l’aspiration des salariés à une plus grande stabilité et sécurité d’emploi. Les emplois pourvus par le biais de groupements correspondent en effet à la reconstitution de « fragments d’emploi» le plus souvent marqués par la précarité ou l’instabilité de leur régime juridique antérieur. Pour les salariés, le fait d’être titulaire d’un contrat de travail au sein d’un groupement d’employeurs permet de bénéficier d'une stabilité supérieure, rendue possible par la dimension collective du groupement. Par ailleurs, l’exécution du contrat de travail au sein de deux ou trois entreprises peut être de nature à enrichir les compétences du salarié par la diversité des expériences et des tâches accomplies. Au surplus, les efforts déployés en matière de gestion et de suivi collectif et personnalisé des salariés employés par ces structures, constituent l’un de ses atouts majeurs (…)

L’une des réponses économiques et sociales de proximité

L’apport de la formule en tant que réponse de proximité, au niveau des bassins d’emplois et dans des zones géographiques déterminées, est par ailleurs souvent pertinent. Les groupements existants offrent en effet aux salariés qu’ils emploient une alternative à une mobilité géographique imposée par la désertification des zones rurales. Le dispositif apparaît dès lors comme un instrument potentiel de dynamisation des zones d’activité et d’emploi, vitalisant le partenariat entre les entreprises, les pouvoirs publics, les collectivités territoriales, les organisations syndicales et professionnelles. »

Extrait du rapport de M. Jean-Marcel Bichat, Les groupements d’employeurs, un outil pour la croissance et l’emploi, novembre 2002.

Afin de favoriser le développement des groupements d’employeurs, le législateur a progressivement permis à des entreprises aux effectifs de plus en plus importants de pouvoir adhérer à ces structures. De 10 salariés en 1985, le plafond d’effectif a été fixé à 100 en 1987 puis à 300 par la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993. Depuis l’entrée en vigueur de l’article 27 de la loi nº 2000-37 du 19 janvier 2000, amendé par l’article 58 de la loi nº 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, toute entreprise, quels que soient ses effectifs, peut adhérer à un groupement d’employeurs. Il existe néanmoins encore une réserve : l'adhésion à un groupement d'employeurs des entreprises et organismes occupant plus de trois cents salariés est subordonnée à la conclusion, dans l'entreprise ou l'organisme concerné, d'un accord collectif ou d'un accord d'établissement définissant les garanties accordées aux salariés du groupement.

Cette exigence constitue un obstacle à l’adhésion des entreprises dont la masse critique permettrait de jouer un effet de levier sur le développement des groupements, et constitue également un obstacle à l’adhésion d’établissements locaux de grands groupes nationaux dans des groupements qui pourraient irriguer tout un bassin d’emplois.

À l’évidence, cette réforme ne doit pas être perçue comme une atténuation de la place des institutions représentatives du personnel des entreprises adhérentes.

Aussi, le rapporteur propose de supprimer, pour les entreprises de 300 salariés et plus, l’obligation prévue à l’article L. 127-1-1 du code du travail de conclure un accord d’entreprise ou d’établissement préalablement à l’adhésion au groupement d’employeur.

Il propose également d’obliger ces entreprises à informer les institutions représentatives du personnel de la constitution et de la nature du groupement d’entreprise, dans des conditions identiques à celles actuellement applicables aux entreprises de moins de 300 salariés en vertu de l’article L. 127-1 du code précité.

Enfin, les obligations prévues à l’article L. 432-4-1 du code du travail seront modifiées afin d’obliger l’employeur à tenir le comité d’entreprise informé du nombre de salariés mis à disposition par le groupement, ainsi que les motifs l’ayant conduit à recourir à ces personnels.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec a rappelé que le Premier ministre avait convié les représentants des salariés et des employeurs à ouvrir des négociations sociales et qu’il fallait donc laisser le champ entier à ces négociations. L’adoption de cet amendement porte atteinte au processus de constitution des accords d’entreprise.

Le rapporteur pour avis a expliqué qu’avec la disparition du statut de groupement local d’employeurs, l’adhésion d’un établissement du groupe Accor, par exemple, à un groupement d’employeur devait être précédée aujourd’hui de la conclusion d’un accord au niveau national mais s’est déclaré prêt à retirer l’amendement qui ne vise en aucun cas à contourner les partenaires sociaux mais à sécuriser la situation de certains salariés.

M. Jean-Paul Charié a souligné l’intérêt de permettre aux établissements locaux situés dans un bassin d’emploi d’adhérer facilement à un groupement d’employeurs, quand bien même ils constituent des unités de travail dépendant d’entités de plus de trois cent salariés. Il est souhaitable que les grandes entreprises puissent via leurs filiales contribuer au développement des groupements d’employeurs et favoriser ainsi l’emploi sous contrat à durée indéterminée. L’amendement du rapporteur ne vise ni plus ni moins qu’à remettre en vigueur une facilité anciennement permise par la loi et abrogée à tort.

M. Christian Jacob a souligné la nécessité de maintenir cet amendement, ne serait-ce que pour avoir un débat en séance avec le gouvernement.

M. François Brottes a rappelé l’engagement du Président de la République de ne pas légiférer dans le domaine social sans dialogue préalable avec partenaires sociaux. L’opposition exprimée par les membres du groupe socialiste, radical et citoyen à l’adoption de cet amendement ne porte pas sur l’objectif poursuivi, tout à fait légitime, mais bien sur la méthode.

Le Président Patrick Ollier a indiqué que l’objectif de cet amendement allait dans le sens du progrès social.

La commission a adopté cet amendement.

Article additionnel après l’article 7

(article 127-10 du code du travail)

Tâches pouvant être confiées au salarié d’un groupement d’employeurs mixte mis à disposition d’une collectivité locale.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis portant article additionnel.

Le rapporteur pour avis a rappelé que l’article 58 de la loi de développement des territoires ruraux a créé un dispositif spécifique aux groupements d'employeurs associant des collectivités territoriales et des adhérents de droit privé aux articles L. 127-10 et suivants du code du travail.

Introduit par deux amendements conjoints du gouvernement et de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, ce dispositif mettait fin à une anomalie consistant pour les collectivités territoriales à ne pas pouvoir participer aux groupements d'employeurs dans les zones rurales, là où elles ont précisément besoin d'employer ponctuellement des personnes pour le déneigement, le débroussaillage ou, l'été, le nettoyage etc..

L'article L. 127-10 précité dispose que dans le but de favoriser le développement de l'emploi sur un territoire, des personnes physiques ou morales de droit privé peuvent créer, avec des collectivités territoriales et leurs établissements publics, des groupements d'employeurs constitués sous la forme d'associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ou, dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, d'associations régies par le code civil local ou de coopératives artisanales.

Le texte ajoute que les collectivités territoriales et leurs établissements publics ne peuvent constituer plus de la moitié des membres des groupements.

L’article L. 127-11 précise que les tâches confiées aux salariés du groupement mis à disposition d'une collectivité territoriale s'exercent exclusivement dans le cadre d'un service public industriel et commercial. Grâce à un amendement du rapporteur à la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006, ces tâches ont été étendues à celles s’exerçant dans le cadre d’un service public environnemental ou de l’entretien des espaces verts ou des espaces publics.

Le rapporteur propose d’élargir l’énumération des tâches qui peuvent être confiées aux salariés mis à disposition d’un groupement en visant les activités s’exerçant dans le cadre d’un service public culturel ou touristique, afin de permettre aux petites communes de faire vivre leur territoire en organisant par exemple des manifestations culturelles pour lesquelles elles reçoivent l’assistance ponctuelle d’un salarié du groupement.

Les collectivités, notamment rurales, participeraient ainsi pleinement à la déprécarisation des salariés saisonniers en animant et développant leur territoire.

La commission a adopté cet amendement.

Au terme de l’examen des articles 1er à 7, M. François Brottes a exprimé l’opposition des membres du groupe socialiste, radical et citoyen aux dispositions prévues par ce projet de loi, qui ne contribueraient qu’à aggraver les injustices, à occasionner un « enrichissement sans cause » des quelques bénéficiaires des exonérations fiscales et à donner l’illusion que les salariés pourront gagner plus en travaillant plus par le biais de l’allègement des charges sociale et fiscale sur les heures supplémentaires. Le projet de loi risque de conforter le fait du prince, en permettant aux entreprises de choisir leurs pauvres et leurs artistes par le biais des fondations. Enfin, en modifiant les critères de l’accession sociale à la propriété, le projet de loi consacre l’exclusion du droit au logement des plus démunis, et notamment du logement social qui constitue le grand absent de ce projet de loi.

La commission a émis un avis favorable à l’adoption des articles 1er à 7 du projet de loi ainsi modifiés et complétés.

En conséquence et sous réserve des amendements qu’elle propose, la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire demande à l’Assemblée nationale d’adopter les articles 1er à 7 du projet de loi n° 4.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article premier

Amendements présentés par M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire :

•  I.- Après l’alinéa 26 de cet article, insérer l’alinéa suivant :

« III bis. – Dans le premier alinéa du II de l’article 236 du code général des impôts, après les mots : « Lorsqu’une entreprise acquiert », sont insérés les mots : « ou met à jour ». »

II.– La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence aux régimes concernés par la création d’une taxe additionnelle à la taxe mentionnée à l’article 991 du code général des impôts.

•  I.– Après l’alinéa 51 de cet article, insérer l’alinéa suivant :

« VII bis.– Le décret mentionné au I de l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale peut prévoir une majoration, jusqu’au 31 décembre 2008, du montant de la déduction forfaitaire qu’il fixe pour les entreprises de plus de vingt salariés auxquelles est applicable le régime dérogatoire prévu au II de l’article 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005.»

II.– La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence aux régimes concernés par la création d’une taxe additionnelle à la taxe mentionnée à l'article 991 du code général des impôts.

Article 7

Amendements présentés par M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire :

•  Avant l’alinéa 1 de cet article, insérer les deux alinéas suivants :

« I A.- L’article L. 225-42-1 du code de commerce est ainsi modifié :

« Après les mots : « postérieurement à celles-ci, », sont insérés les mots : « le sont lors de l’élection ou de la nomination de ceux-ci et ». »

•  Compléter l’alinéa 2 de cet article par les mots : « et de la société. »

•  Après l’alinéa 7 de cet article, insérer les deux alinéas suivants :

« II bis.- L’article L. 225-90-1 du même code est ainsi modifié :

« Après les mots : « postérieurement à celles-ci,  », sont insérés les mots : « le sont lors de l’élection ou de la nomination de ceux-ci et ». »

•  Compléter l’alinéa 9 de cet article par les mots : « et de la société. »

Article additionnel après l’article 7

Amendements présentés par M. Jean-Charles Taugourdeau :

•  I.- Le cinquième alinéa de l’article L. 127-1 du code du travail est supprimé et l’article L. 127-1-1 du même code est abrogé.

II.- Dans la première phrase du premier alinéa de l’article L. 432-4-1 du code du travail, après les mots : « travail temporaire, », sont insérés les mots : « le nombre de salariés mis à disposition par un groupement d’employeurs, ainsi que ».

III.- Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 432-4-1 du code du travail, le mot : « cinq » est substitué au mot : « quatre ».

•  Dans la première phrase de l’article L. 127-11 du code du travail, après le mot : « environnemental », sont insérés les mots : « , culturel, touristique ».

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