N° 2013 - Avis de M. Patrick Ollier sur le projet de loi relatif au Grand Paris (n°1961)




N
° 2013

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 novembre 2009

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE LOI relatif au Grand Paris (n° 1961),

PAR M. Patrick OLLIER,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2008 et 2068.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.— UN AMÉNAGEMENT DE LA RÉGION CAPITALE LENT ET INACHEVÉ 5

A.— UNE ORGANISATION SOUMISE AUX SOUBRESAUTS DE L’HISTOIRE 5

B.— DES EFFORTS RÉCENTS INSUFFISANTS AU REGARD DE LA CONCURRENCE DES GRANDES MÉTROPOLES INTERNATIONALES 7

II.— LE GRAND PARIS : UN PROJET PRÉSIDENTIEL AMBITIEUX À LA MESURE DES DÉFIS À RELEVER 9

A.— UNE PREMIÈRE ÉTAPE POUR RÉTABLIR L’ATTRACTIVITÉ INTERNATIONALE DE LA RÉGION CAPITALE 9

B.— UN PROJET DE LOI PRIVILÉGIANT LA COMMUNICATION DES HOMMES ET DES IDÉES 10

1. L’accent du projet mis sur les transports 11

2. L’aménagement urbain et le développement du Plateau de Saclay 12

EXAMEN EN COMMISSION 15

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 15

II.— EXAMEN DES ARTICLES 29

TITRE IV – DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL ET PROJETS D’AMÉNAGEMENT 29

Article 18 : Conclusion et régime des contrats de développement territorial 29

Article 19 : Dispositions relatives à la mise en œuvre des contrats de développement territorial 32

Après l’article 19 33

TITRE V – DISPOSITIONS RELATIVES AU PROJET DE CRÉATION D’UN PÔLE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE SUR LE PLATEAU DE SACLAY 33

CHAPITRE Ier: DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC DE PARIS - SACLAY 34

Article 20 :Création de l’« établissement public de Paris – Saclay » 34

Article 21 : Missions assignées à l’« établissement public de Paris – Saclay » 36

Article 22 : Modalités de gouvernance de l’« établissement public de Paris – Saclay » 39

Article 23 : Direction générale de l’« établissement public de Paris – Saclay » 43

Article additionnel après l’article 23 / Compétences du président-directeur général de l’établissement public 45

Article 24 : Ressources de l’« établissement public de Paris – Saclay » 45

Article 25 : Périmètre du domaine foncier de l’« établissement public de Paris- Saclay » 46

Article 26 : Dérogation apportée à l’application de la loi relative à la démocratisation du secteur public 47

Article 27 : Précisions relatives aux modalités de fonctionnement de l’« établissement public de Paris – Saclay » 48

CHAPITRE II : DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES RELATIVES À LA MISE EN œUVRE DU PROJET DE PÔLE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE SUR LE PLATEAU DE SACLAY 48

Article 28 (Section III [nouvelle] du code de l’urbanisme) : Instauration d’une zone de protection naturelle, agricole et forestière sur le Plateau de Saclay 48

Article 29 (article 1-5 [nouveau] de l’ordonnance relative à l'organisation des transports de voyageurs en Île-de-France) : Constitution et modalités de fonctionnement du syndicat mixte de transports sur le Plateau de Saclay 51

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 53

Mesdames, Messieurs,

L’Histoire de France montre que la ville de Paris a constamment fait l’objet de toutes les attentions de la part des pouvoirs publics. Longtemps siège de la royauté, en dépit de la fastueuse éclipse versaillaise inaugurée par Louis XIV, puis de la République, centre économique et industriel autant qu’universitaire et artistique, Paris a toujours été choyée et aménagée afin de répondre aux besoins d’un territoire longtemps marqué par le jacobinisme.

Tel n’a pas été le cas en revanche de la proche banlieue et, plus largement, de la région Île-de-France.

Porteur d’une ambition paradoxalement à la fois séculaire et nouvelle, ce projet de loi est indéniablement la première étape d’une série de textes de loi qui, à eux tous, constitueront le projet du « Grand Paris ». Il s’agit, à terme, de donner à la capitale les moyens qui lui permettront d’être au niveau des autres « villes - monde » existantes.

I.— UN AMÉNAGEMENT DE LA RÉGION CAPITALE LENT
ET INACHEVÉ

Les faubourgs de la capitale, nés de la volonté royale qui, après l’épisode de la Fronde, avait souhaité que Paris devienne une ville ouverte et non plus une forteresse entourée de murailles, repliée sur elle-même, ont été aménagés dans le plus grand désordre, qui plus est sur une étendue de plusieurs kilomètres.

« Si l’initiative des pouvoirs publics et celle des propriétaires en tant que futurs habitants se combinent tout au long des siècles pour organiser les extensions et les remodèlements du tissu urbain, les entrepreneurs qui voient là une spéculation rapidement fructueuse se succèdent aussi pour mener des opérations de lotissement fondées sur des concessions de terrains à bâtir obtenues à bon compte » rappelle à juste titre l’historien Jean Favier1. Prenant acte de ce vaste souffle, les petites villes autour de Paris en ont profité pour prendre un essor considérable sous la Restauration et, surtout, sous la Monarchie de Juillet (extension facilitée il est vrai par la construction de nombreuses lignes de chemin de fer à l’image de celle de Sceaux, ouverte en juin 1846 et qui s’étend jusqu’à la ville d’Orsay dès 1854) de telle sorte que plusieurs d’entre elles dépassent rapidement les 30 000 habitants. Cohabitent alors deux ensembles distincts : les faubourgs proprement dits et la banlieue. Si les premiers jouxtent la capitale et forment un tissu urbain discontinu, laissant une assez large place aux espaces agricoles ou naturels, la banlieue constitue en revanche un ensemble solidaire qui, des Trois Glorieuses (juillet 1830) à la fin du XIXème siècle, change doucement de nature, glissant ainsi de la banlieue industrielle à la banlieue résidentielle. En outre, évolution marquante survenue à compter du milieu du Second Empire, Paris incorpora à son périmètre plusieurs faubourgs en totalité (Grenelle, Vaugirard, Charonne, Belleville…) ou seulement partiellement (Gentilly, Neuilly, Saint-Mandé, Vanves). L’accroissement de la surface qui s’en suivit (la seule ville de Paris passant ainsi de 3 438 ha en 1818 à plus de 7 200 ha en 1920) eut également pour effet de gonfler la population des villes alentours et, par voie de conséquence, d’engendrer une forte urbanisation.

L’ensemble ainsi constitué en périphérie de la capitale s’effectue dans une relative anarchie jusqu’à ce que naisse, du moins du point de vue juridique (son existence historique et politique étant attestée depuis Louis XI au moins), la région Île-de-France.

Circonscription administrative, elle souffre pendant longtemps d’un manque évident d’organisation. Il faut attendre la loi Cornudet du 14 mars 1919 pour que l’on prescrive enfin des « plans communaux d’aménagement, d’embellissement et d’extension » pour toutes les communes du département de la Seine et, ailleurs, pour toute commune dépassant les 10 000 habitants. Faute de moyens financiers et humains, cette loi resta lettre – morte et il fallut attendre la loi du 19 juillet 1924 pour qu’un dispositif contraignant, définissant des orientations similaires, soit enfin mis en place. Le Bureau d’urbanisme du département de la Seine proposa alors d’établir des plans d’aménagement et d’extension pour les communes parisiennes mais le succès fut, là encore, très relatif. Pour autant, loin de se décourager, les pouvoir publics prirent d’autres initiatives visant à remédier, à leur mesure, au manque de rationalisation présidant à l’extension du territoire francilien : on mentionnera à cet effet le Plan Jayot de 19272 (plan visant à structurer le réseau de transports collectifs au regard du nombre croissant d’habitants des banlieues), le Plan Prost (établi par l’architecte Henri Prost dans les années 1930) qui préfigurait notamment le futur réseau d’autoroutes autour de la capitale ainsi que le tracé de la Francilienne, ainsi que le Plan d’aménagement et d’organisation générale de 1958, sans que cela ne conduise pour autant à une véritable rationalisation de ce gigantesque ensemble urbain.

Ce n’est finalement que sous la houlette de Paul Delouvrier (1914-1995), nommé par le général de Gaulle au poste stratégique de Délégué général au district de la région de Paris en août 1961, que la situation va définitivement évoluer. Un décret du 31 décembre 1958 avait déjà confié au Service de l’aménagement de la région parisienne (SARP) l’élaboration d’un document non contraignant, dépourvu de toute force juridique, le Plan d’Aménagement et d’Organisation Générale (PADOG) pour la région parisienne, approuvé par le gouvernement
le 2 août 1960. Cette feuille de route lançait plusieurs initiatives et consistait de fait à effectuer des investissements dans le secteur des transports et à opérer une restructuration de la banlieue proche de la capitale. Chargé de proposer au Gouvernement de l’époque une politique cohérente tant en matière d’aménagement urbain que d’équipements (notamment dans le domaine des transports), Paul Delouvrier, qui devint par la suite le premier préfet de la région Île-de-France, inspira très largement le Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région parisienne (SDAURP), approuvé le 22 juin 1965. Document essentiel, il ne s’agit rien moins que de la véritable base programmatique sur laquelle seront construites les futures villes nouvelles autour de Paris (respectivement Saint-Quentin-en-Yvelines, Cergy-Pontoise, Évry, Marne-la-Vallée et Sénart) et le Réseau express régional (RER)
3. Pourtant, n’ayant été officiellement approuvé qu’en 1976, il ne sera appliqué qu’à compter de cette époque, imposant des investissements extrêmement lourds en pleine période de crise économique.

L’aménagement de la région Île-de-France va connaître une évolution contrastée dans les années 1970, plus particulièrement au cours de l’année 1976, symbolique à bien des égards.

En premier lieu, en effet, c’est le 1er juillet 1976 qu’est officiellement installé le Conseil régional d’Île-de-France : bien que ses compétences ne soient encore que parcellaires et que son fonctionnement soit aléatoire, sa mise en place n’en revêt pas moins une réelle importance quant à la future gouvernance de la région. En second lieu, et de façon assez paradoxale, alors que le Schéma directeur d’aménagement urbain de la région Île-de-France (SDAURIF) élaboré en cette même année 1976 n’a eu qu’un faible impact sur l’organisation urbaine et sur l’équipement général de la région, des efforts considérables sont parallèlement entrepris pour multiplier les espaces verts en réaction aux excès de l’urbanisation survenue au début des années 1970. 1976 a ainsi vu la création de l’Agence des espaces verts qui, des années plus tard, contribuera activement à créer deux parcs naturels régionaux en Île-de-France4, la création d’une trame verte (qui deviendra la « ceinture verte » dans le projet de révision du SDAURP intervenu en 1980) ainsi qu’un effort particulier des communes de banlieues qui, depuis 1976, sont parvenues à créer plus de 6,3 millions d’hectares d’espaces verts, soit le double de leur patrimoine initial5 !

Un pas décisif en matière d’aménagement est ensuite franchi au milieu des années 1990 lorsque l’on crée officiellement le Schéma directeur de la Région Île-de-France (SDRIF) dont l’élaboration et la révision sont directement confiées à la région en vertu de la loi de 1995 sur l’aménagement du territoire6. Document programmatique ambitieux, le SDRIF a pour objectif, aux termes de l’article L. 141-1 du code de l’urbanisme, de maîtriser la croissance urbaine et démographique et l’utilisation de l’espace tout en garantissant le rayonnement international de cette région. Il précise à cet effet les moyens à mettre en œuvre pour corriger les disparités spatiales, sociales et économiques de la région, coordonner l’offre de déplacement et préserver les zones rurales et naturelles afin d’assurer les conditions d’un développement durable de la région. Fort logiquement, son importance n’a cessé de croître compte tenu de la multiplication des déplacements motorisés en Île-de-France qui, de 17,6 millions au milieu des années 1970, ont atteint environ 21,7 millions en 1996, l’essentiel de cette hausse concernant au surplus des déplacements de banlieue à banlieue7.

Pour autant, en dépit des améliorations apportées au fil du temps, l’Île-de-France n’en demeurait pas moins à la traîne des grandes capitales mondiales, notamment au regard des trois autres « ville-monde » que sont New York, Tokyo et Londres. Moindre attractivité économique (Londres et Francfort ayant depuis longtemps supplanté au plan européen la place boursière de Paris), scientifique (là encore, la recherche a davantage trouvé à s’épanouir en Grande-Bretagne ou dans les pays nordiques que sont le Danemark ou la Suède) et universitaire, manque de dynamisme culturel (au profit de villes comme Londres mais aussi Berlin, Amsterdam ou Barcelone), la région capitale apparaissait aux yeux de beaucoup comme une « belle endormie » dont la confiance en soi masquait un inexorable retard de développement dans le cadre d’une mondialisation où naissent chaque jour de nouveaux concurrents. À cet égard, des villes comme Shanghai (ville organisatrice de l’Exposition Universelle de 2010) ou Bombay peuvent, sans aucun doute, prétendre à renforcer leur stature, acquise depuis longtemps par ailleurs, de ville-monde : compte tenu du potentiel de ces mégalopoles qui ne demandent qu’à se développer, il était nécessaire que la France adopte une réaction forte et volontariste. C’est ce qui motiva le projet destiné à mettre en œuvre le « Grand Paris ».

II.— LE GRAND PARIS : UN PROJET PRÉSIDENTIEL AMBITIEUX
À LA MESURE DES DÉFIS À RELEVER

Sur le modèle de l’entité créée en 1965 outre-Manche8, le Président de la République a en effet martelé avec force son souhait de voir la France faire « de sa capitale une ‘‘ville-monde’’ ouverte, dynamique, attractive, créatrice de richesses et d’emplois »9.

Du strict point de vue institutionnel, cette volonté s’est immédiatement concrétisée dans la création d’une entité gouvernementale spécifique, le Secrétariat d’État chargé du développement de la région capitale10, placé auprès du Premier ministre. Ayant pour mission d’organiser et de valoriser dans tous ses aspects la région Île-de-France, la tâche confiée à M. Christian Blanc, actuel Secrétaire d’État, s’avère particulièrement décisive compte tenu du poids de celle qui est aujourd’hui la plus grande région urbaine d’Europe (avec Londres), forte de plus de onze millions d’habitants et génératrice de près de 40 % du produit intérieur brut français.

Nouvelle preuve de la globalité du projet ainsi poursuivi, le Président de la République a, dans un discours prononcé au Palais de Chaillot11, souhaité la mise en branle d’un processus d’aménagement qui devrait intervenir sur une durée de dix années au moins. Promettant notamment un investissement record de plus de 35 milliards d’euros en faveur des transports (effort se traduisant notamment par la construction d’un réseau de plus de 130 kilomètres de lignes automatiques reliant les points névralgiques de la région, la volonté de prolonger le RER E à l’ouest de la capitale, de renouveler le matériel, de désengorger la ligne 13 du métro, de favoriser les liaisons de banlieue à banlieue…), le Président de la République a incontestablement manifesté le désir de faire du développement francilien un de ses grands chantiers pour les années à venir. Dans le même temps, dix équipes d’architectes de toutes nationalités (des Français comme Roland Castro, Jean Nouvel, Djamel Klouche, Christian de Portzamparc, Yves Lion mais aussi le hollandais Winy Maas, l’allemand Finn Geipel, l’italien Bernardo Secchi et le Britannique Richard Rogers) ont été conviées à réfléchir à ce que pourrait être le Grand Paris dans le futur et, en conséquence, quels aménagements devaient être envisagés. Nouvelle preuve tangible de l’aspiration poursuivie, le projet retenu par le Président de la République est sans aucun doute le plus ambitieux puisqu’il prévoit une ouverture du Grand Paris sur la mer ! Porté par l’architecte Antoine Grumbach (titulaire du grand prix national d’urbanisme en 1992, connu pour avoir notamment réhabilité le centre ville de Shanghai), ce projet de « Seine Métropole » vise à aménager la vallée de la Seine à l’horizon 2030, de Melun au Havre, afin d’utiliser et mettre en valeur les fondamentaux portuaires, agricoles et industriels existants12.

Le présent projet de loi, présenté en conseil des ministres le 7 octobre 2009, s’inscrit dans ce cadre global et ambitieux en cherchant plus modestement à valoriser les seuls potentiels de Paris et de la région afin d’en faire un pôle économique incontournable, permettant ainsi à la capitale française d’être un moteur de croissance pour l’ensemble du territoire. Si, à terme, on espère que l’aménagement du Grand Paris engendrera plus d’un million d’emplois sur la région parisienne dans un délai de quinze ans et contribuer à accroître le PIB francilien de plus de 1,5 % (soit 5,3 milliards d’euros par an), il convient d’ores et déjà d’insister sur l’effet de levier que cet immense chantier devrait jouer. Certes, le projet est avant tout francilien mais, de même qu’il dépasse largement la seule ville de Paris, de même il a vocation à entraîner avec lui l’activité de la France tout entière et, infrastructures de transports aidant, à dynamiser l’ensemble des régions.

Première étape d’un vaste mouvement législatif, ce projet de loi (qui compte cinq titres, soit 29 articles) comporte deux volets principaux : la communication des personnes (se traduisant par un important dispositif consacré aux transports) et ce que l’on pourrait qualifier, certes de façon quelque peu rapide, la communication des idées en prévoyant la constitution d’un pôle d’excellence sur le Plateau de Saclay.

Les trois premiers titres du projet de loi traitent donc de façon spécifique des transports dans le cadre de l’aménagement du Grand Paris, le réseau envisagé de près de 130 kilomètres de nouvelles lignes de métro devant faire office de véritable « colonne vertébrale du Grand Paris » selon Christian Blanc. Les objectifs poursuivis sont ambitieux : la vitesse de croisière de ce nouveau réseau oscillerait entre 60 et 80 km/h, la capacité maximale visée serait de 40 000 passagers en heure de pointe, le quartier de La Défense serait mis à vingt-cinq minutes de l’aéroport de Roissy, Saclay serait à dix minutes de celui d’Orly…

Après avoir défini l’ambition que pouvait représenter le « Grand Paris » (article 1er), le Titre Ier (« Élaboration et outils de mise en œuvre du réseau de transport public du Grand Paris » soit les articles 2 à 6 du projet de loi) vise spécifiquement le réseau de transport public du Grand Paris. Il est ainsi prévu que le schéma d’ensemble des infrastructures soit dessiné par l’établissement public « Société du Grand Paris » (créé par l’article 7) avant d’être soumis à la consultation (organisée par le préfet de région) tant du public que des collectivités intéressées (région, départements, communes, EPCI…). Le projet d’infrastructure a ensuite vocation à être déclaré d’utilité publique ; dans le même temps, les articles 5 et 6 contiennent certaines dispositions permettant de lutter contre la spéculation foncière qui ne manquera pas de naître compte tenu de la valorisation du territoire consécutive aux projets d’aménagement de la région.

Le Titre II (« Établissement public ‘‘Société du Grand Paris’’ », détaillé aux articles 7 à 11) concerne plus directement la création d’un premier établissement public, celui de la « Société du Grand Paris ». Dirigé par un directoire de trois membres nommés par décret après avis du conseil de surveillance qui le surveille ensuite, il associe représentants de l’État, de la région et des départements d’Île-de-France, afin d’agir en tenant compte des différents points de vue et de favoriser ainsi la concertation et le consensus. De nature industrielle et commerciale mais créé par la loi eu égard à ses compétences spécifiques, cet établissement public se voit assigner comme mission principale la maîtrise d’ouvrage du réseau de transport public du Grand Paris et la conduite d’opérations d’aménagement. Même s’il s’agit d’une tâche qui aurait pu être dévolue au Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF), il serait faux de penser que les deux entités travailleront en parallèle sans jamais se préoccuper des options choisies par l’une ou l’autre. Il suffit notamment de rappeler que les membres du conseil d’administration du STIF (à l’exception de la chambre de commerce et d’industrie de Paris) seront membres du conseil de surveillance de la société du Grand Paris : un droit de regard existera donc et la cohérence des projets sera donc assurée. En outre, ce titre détaille le mode de gouvernance et les principales ressources financières de l’établissement.

Comme l’illustre son intitulé, le Titre III (« Réalisation et gestion du réseau de transport public du Grand Paris », articles 12 à 17) vise notamment à clarifier le partage de compétences entre l’établissement public « Société du Grand Paris » et certaines entités (RATP, RFF et SNCF) lorsqu’il s’agit de réaliser des infrastructures en matière d’équipements ou de transports. Il permet également à l’établissement public de déléguer la maîtrise d’ouvrage ou de conclure des contrats de partenariat dans le cadre des opérations d’aménagement poursuivies.

La Commission des affaires économiques s’est saisie pour avis des
titres IV et V du projet de loi, le premier constituant la mise en
œuvre des trois titres précédents, le second illustrant la deuxième dimension du présent projet de loi. Si les articles seront ultérieurement détaillés dans le présent rapport, il importe néanmoins dès à présent d’en souligner l’importance et les spécificités.

Ainsi, le Titre IV (articles 18 et 19 : « Développement territorial et projets d’aménagement ») se subdivise en deux parties étroitement imbriquées. L’article 18 vise spécifiquement la possibilité de conclure des contrats de développement territorial afin de mettre en œuvre les objectifs assignés au Grand Paris en vertu du I du présent projet de loi. Ces contrats ont notamment pour objet de désigner le titulaire du droit de préemption à titre principal autour des gares du futur réseau de transports défini dans le cadre du Grand Paris. Innovation d’importance, ces contrats ont notamment vocation à conférer aux communes ou établissements publics territoriaux la maîtrise de formes d’aménagement qui sont classiquement dévolues à l’État. Ce titre définit également un nouveau type de contrat, outil spécifique mis à la disposition des maires, permettant de mettre en œuvre les opérations afférentes à un contrat de développement territorial.

Paradoxalement, le Titre V (articles 20 à 29) peut s’entendre de manière autonome alors qu’il n’est en réalité qu’un élément de l’aménagement plus globalement envisagé du Grand Paris. Il concerne en effet la création d’un pôle scientifique et technologique sur le plateau de Saclay. La volonté de créer un tel pôle vient là encore de la volonté du Président de la République. Celui-ci a, dès le mois de janvier 2008, exprimé le souhait d’« organiser et [de] structurer cette énergie et cette volonté mutuelle d’agir pour fonder un grand projet à la fois (…) scientifique, économique, urbanistique et paysager, sur le plateau de Saclay »13. Il faut dire que l’Île-de-France représente un lieu tout à fait exceptionnel en regroupant sur son territoire plus de 45 % de la recherche française tant publique que privée (correspondant à plus de 78 000 chercheurs et à 42,5 % des dépenses en recherche et développement effectuées sur le territoire national) ainsi qu’un ensemble comprenant notamment dix-sept universités (huit dans Paris intra muros, quatre en petite couronne et cinq en grande couronne)14. Le site de Saclay est emblématique de ce niveau d’équipements puisque, pour ne prendre que deux exemples particulièrement illustratifs, l’Université scientifique d’Orsay est créée en 195815 (quelques années plus tard, une Université non scientifique sera par ailleurs créée à Nanterre) et l’École Polytechnique s’installe en 1976 sur le site de Palaiseau.

Cette volonté de constituer un pôle scientifique et de recherche de dimension internationale a été adoptée avec enthousiasme par l’ensemble des parties prenantes. Ainsi, le Premier ministre a également insisté sur le fait que « la force de la France dépendra essentiellement de son potentiel scientifique et technique [et qu’à cet effet] l’avenir des savoirs scientifiques passe par la solidarité entre formation et recherche, entre université et entreprise, entre vitalité intellectuelle et croissance économique »16. À terme, le campus rassemblerait plus de 100 000 personnes (ingénieurs, étudiants, doctorants, industriels), ce qui permettrait à la France d’affronter efficacement la concurrence internationale. Consciente de ses retards en ce domaine, l’Union européenne n’a d’ailleurs cessé d’encourager les États membres à constituer de vastes ensembles de nature à favoriser les synergies et les contacts entre entités et milieux qui n’ont pas fatalement l’occasion de travailler ensemble. Outre le programme de travail de la Présidence française de l’Union (1er juillet au 31 décembre 2008) qui mentionnait en bonne place sa volonté de faire de l’Europe un modèle de développement social, écologique et économique durable17, le Président de la République a ainsi réaffirmé avec force sa volonté de constituer en France des pôles dont la taille critique serait à même d’en faire des concurrents efficaces au plan mondial, au cours du discours qu’il a prononcé lors des « Assises européennes de l’innovation » qui se sont tenues à la Cité de La Villette, à Paris, le 9 décembre 2008. Dans cette optique, l’article 21 du projet de loi définit les nombreuses missions qui seront dévolues au pôle (innovation, enseignement, recherche…) en insistant sur la mutualisation qui doit exister entre ces différentes activités, les unes n’étant que le prolongement et la transformation des autres. Force est de constater que les premières critiques qui avaient pu naître sur le manque d’ambition du dispositif se sont amenuisées en raison notamment du lien, rappelé par Christian Blanc, existant avec d’autres mécanismes, comme le Plan Campus par exemple, qui ont également vocation à contribuer au développement des activités s’exerçant sur le plateau de Saclay.

Enfin, il convient d’insister, à l’image du projet de l’architecte Antoine Grumbach, sur l’alliance parfaite qui doit exister entre le développement industriel et scientifique du Plateau de Saclay et le respect de l’environnement dans lequel il s’insère. C’est la raison pour laquelle le premier article du Chapitre II du Titre V (l’article 28 du projet de loi) prévoit la sanctuarisation, au cœur de Saclay, dans le périmètre de l’opération d’intérêt national qui y est définie, d’espaces naturels et agricoles, en conformité avec la logique de développement durable qui préside à l’aménagement du plateau. Cette dimension s’avère essentielle puisqu’elle inscrit le projet d’aménagement dans un cadre de développement conforme aux prescriptions décidées lors du protocole de Kyoto. Ainsi, et tel est l’objet des trois premiers titres du projet de loi, il est décidé de mettre en œuvre une infrastructure de transports en tenant compte de l’environnement mais aussi des contraintes et renouveaux urbanistiques, des évolutions de la population francilienne… En un mot, ce projet de loi véhicule une véritable dimension humaniste en veillant à mettre en cohérence un schéma de transport en adéquation avec la carte de l’habitat, des lieux de travail et des lieux de loisirs.

EXAMEN EN COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 4 novembre 2009, la Commission a entendu M. Chrisian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale auprès du Premier ministre puis a procédé, sur le rapport de M. Patrick Ollier, à l’examen pour avis des titres IV et V du projet de loi relatif au Grand Paris (n° 1961).

M. Serge Poignant, président. M. le secrétaire d’État, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous vous accueillons aujourd’hui pour écouter votre présentation du projet de loi relatif au Grand Paris : comme vous le savez, notre commission s’est saisie pour avis des titres IV et V et M. Patrick Ollier, son président, a été nommé rapporteur sur ce texte important. Je précise d’ailleurs que, sitôt votre audition terminée M. le secrétaire d’État, notre commission examinera ce projet de loi et les amendements qui s’y rapportent.

Texte important disais-je car, vous l’avez vous-même souligné au cours d’entretiens dans la presse, il s’agit là en réalité de la première étape d’une ambition beaucoup plus large qui devrait se concrétiser par d’autres textes de lois. En effet, comme l’a souhaité le Président de la République, il convient d’insuffler aujourd’hui une nouvelle dynamique à la « région capitale » afin de faire de Paris, et de son environnement, une place attractive à tous points de vue, capable de rivaliser efficacement avec les autres grandes métropoles à travers le monde. De ce fait, le projet de loi que vous portez aujourd’hui inaugure un vaste mouvement qui, sur le long terme, ne manquera pas de développer la compétitivité de notre pays de façon décisive.

Important, ce texte l’est également du point de vue de son contenu. Outre les trois premiers titres relatifs aux transports autour de Paris, ce projet de loi comporte en effet des dispositions tout à fait spécifiques qui, à n’en pas douter, feront école. Je fais naturellement allusion aux contrats de développement territorial, mécanisme juridique original, dont l’objet vise, à travers la concertation entre l’État et les collectivités territoriales, à aménager un territoire donné. Je veux également parler de laménagement du Plateau de Saclay qui, grâce à la constitution d’un établissement public dédié, devrait ainsi favoriser les synergies en matière de recherche et d’innovation qui, là encore, devraient contribuer à accroître le dynamisme de notre pays.

Avant de vous laisser la parole, M. le secrétaire d’État, je souhaiterais vous poser deux questions :

– tout d’abord, pouvez-vous nous indiquer le calendrier prévisionnel de mise en place de l’établissement visant à aménager le Plateau de Saclay ? Le classement de Shanghai, paru dans la presse il y a deux jours, place l’Université de Paris XI – Orsay au 2ème rang parmi les Universités françaises (soit le 43ème rang mondial). Vous comprendrez aisément que la situation de cette université et de son environnement nous importent au plus haut point ;

– ensuite, M. le secrétaire d’État, pouvez-vous nous éclairer sur la dynamique globale de ce projet de loi ? En effet, certains estiment que nous sommes là sur un texte exclusivement centré sur Paris et son environnement géographique et que, par conséquent, la province serait de ce fait tenue à l’écart. Naturellement, la « région capitale » est au centre du dispositif mais, pour autant, les conséquences ne sont pas celles que certains veulent bien croire en raison de l’effet d’entraînement, de l’effet de levier que ne manquera pas de générer ce texte. Pouvez-vous néanmoins nous éclairer, voire nous rassurer, sur ce point ?

En vous remerciant, je vous laisse la parole M. le secrétaire d’État.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale auprès du Premier ministre. Merci M. le Président. Il y a quelques jours, devant les parlementaires de la commission du développement durable, l’un d’eux a souligné que j’avais beaucoup de chance de défendre un projet aussi exaltant que le Grand Paris. C’est vrai.

Paris, aujourd’hui, est une ville-monde. Selon le classement effectué par l’OCDE, elles sont au nombre de quatre, avec Londres, Tokyo et New York. Si la ville-monde désigne un pôle de croissance et de dynamisme majeur auquel l’histoire et la culture ont donné une vocation de rayonnement bien au-delà des frontières nationales, sa situation demeure néanmoins toujours précaire. Elle peut décrocher ou, au contraire, connaître un nouveau souffle. Shanghai et Bombay sont aujourd’hui incontestablement dans la course des villes-monde émergentes : Paris en fera-t-elle toujours partie demain ?

Nous l’espérons et nous le voulons. C’est pourquoi, il y a un an et demi, en mars 2008, le Président de la République, constatant une trop faible ambition pour le développement de la région capitale décidait de créer un Secrétariat d’État spécifique. Sa mission est inédite : elle est circonscrite et géographique mais aussi prospective et stratégique. Selon la lettre de mission qui m’a été donnée, il s’agit en effet d’établir une stratégie pour « permettre à la France de tenir son rang dans la compétition des territoires, en faisant de sa capitale une “ville-monde” ouverte, dynamique, attractive, créatrice de richesses et d’emplois, et qui constitue pour la nation un atout décisif dans la compétition économique du 21ème siècle ».

S’il s’agit là en effet du double enjeu d’une ville-monde : capitaliser sur tous ses potentiels tout en suscitant de nouveaux, mais aussi vivre en liaison et rayonner avec le territoire national, qui forme avec elle une économie-monde.

Nous avons vécu, pendant plusieurs décennies, avec l’empreinte de Paris et le désert français de Jean-François Gravier. Vous vous souvenez sans doute qu’il reprochait ainsi à Paris et à son agglomération de s’être comportés « non pas comme une métropole vivifiant son arrière-pays, mais comme un groupe “monopoleur” dévorant la substance nationale. » Malgré son ton polémique, ce livre a sans aucun doute permis un rééquilibrage et une affirmation de métropoles régionales. Aujourd’hui, nous n’en sommes plus là. Ces dernières années, la région capitale croît proportionnellement moins vite que les autres villes-monde, à l’exception de Tokyo. Qui peut croire que c’est au profit de la France alors que la perte d’attractivité de la région capitale entraîne un décrochage de sa croissance qui ne profite pas pour autant aux autres régions. Au contraire, elles en souffrent également. Aujourd’hui, l’Île-de-France représente près de 30 % du PIB national et contribue de façon déterminante au financement de l’économie nationale : toute progression de sa croissance provoque mathématiquement une progression de la croissance nationale. Aujourd’hui déjà, son articulation avec les autres métropoles françaises, en particulier grâce au réseau de TGV et au réseau numérique, est décisive pour l’économie de notre pays.

Demain, avec le Grand Paris, nous allons renforcer cette synergie. Les portes du Grand Paris que sont les aéroports internationaux, les gares TGV et le port du Havre, autant de portes du territoire national, sont une source évidente d’attractivité pour tout notre pays.

Le Secrétariat d’État à la Région Capitale a élaboré une méthode pour préparer et mettre en œuvre le plus rapidement possible les dispositifs fondamentaux qui doivent permettre la réalisation, de manière cohérente, des objectifs identifiés. Ainsi, pour la première fois en France, une infrastructure de transport, le métro automatique à grande capacité, sera réalisée de manière cohérente avec le développement économique, l’urbanisme et l’architecture autour des territoires qu’elle relie.

Tel est l’objet précis du projet de loi relatif au Grand Paris qui vous est présenté aujourd’hui. J’entends bien les impatiences, raison de plus pour garder un cap. Après ce premier projet de loi, qui est celui des fondations nécessaires, d’autres viendront certainement pour préciser l’extension du Grand Paris et pour mieux l’articuler encore avec les autres métropoles régionales.

Pour mener à bien ces travaux, nous avons cartographié les potentiels de la région capitale : certains étaient connus, d’autres assez largement ignorés. Aussi surprenant que cela puisse paraître, nos facteurs de dynamisme mondial ne sont pas toujours assez repérés et nous perdons ainsi en efficacité et en attractivité. Nous avons identifié des territoires de compétitivité qui peuvent d’ores et déjà permettre au Grand Paris de s’affirmer nettement dans la compétition mondiale. Nous n’allons pas opérer de greffe au hasard, créer des centres ex nihilo : ils existent. Il faut seulement leur donner des moyens d’être plus dynamiques, plus compétitifs, plus attractifs et lisibles. C’est pourquoi nous avons imaginé comment organiser un « espace propice à la création et à l’innovation », dans lequel un nouveau schéma de transport mette “en cohérence” la carte de l’habitat, des lieux de travail, des lieux de loisir et des transports ».

Ce schéma s’appuiera sur un réseau de métro automatique de 130 km, circulant à plus de 60 km/h de moyenne sur un réseau interconnecté au réseau existant et qui prend enfin en compte le fait que 70 % des trajets se font aujourd’hui de banlieue à banlieue. Il est prévu que ce métro transporte 3 millions de passagers par jour, soit autant que le réseau actuel du métro et du RER. Nous livrons là une partie décisive pour la compétitivité économique de la Région Capitale, son attractivité mondiale, la valorisation de ses territoires à haut potentiel scientifique et économique, le développement de grands projets urbains et l’amélioration des conditions de vie quotidienne de ses citoyens. Plus ce schéma sera mis en service rapidement, plus il montrera son efficacité concrète. Il permettra de réduire les temps de transport quotidien et leur inconfort ; il rendra l’accès aux grands aéroports et aux gares TGV plus aisé aux entreprises et aux citoyens ; il sera une source accrue d’attractivité internationale en permettant aux visiteurs étrangers un accès plus immédiat aux centres névralgiques économiques, financiers, scientifiques, mais aussi touristiques de la Région Capitale.

Grâce à la création d’un premier établissement public spécifique, dit « Société du Grand Paris », le projet de loi que je vous présente permet une réalisation très rapide de ce réseau stratégique. Pour une plus grande efficacité, les dispositions prévues mettent en place une procédure adaptée, garantissant la pleine participation du public à son élaboration. La « Société du Grand Paris », chargée de la réalisation du réseau de métro automatique, sera directement responsable de l’élaboration du dossier soumis à la consultation du public : mieux impliquée dans le processus, elle permettra que les délais de la procédure préalable soient raccourcis, sans que soit pour autant altérée la qualité du débat soumis aux millions de citoyens concernés par le Grand Paris. La « Société du Grand Paris », dont le conseil de surveillance associera l’État, la Région, les départements d’Île-de-France ainsi que la Ville de Paris, pourra aussi participer à l’aménagement des territoires autour des gares.

Après consultation du public sur le tracé définitif de ce nouveau réseau de transport et sur l’implantation envisagée des gares et après l’adoption par décret du Conseil d’État, le texte de loi permet la signature de contrats de développement territorial autour des gares qui pourront être signés entre l’État et les communes ou établissements publics de coopération intercommunale. Les collectivités terriroriales continueront ainsi d’être les premiers acteurs de leur développement. Ces contrats, pleinement partenariaux, donneront le cadre et les outils de l’élaboration d’une stratégie de développement économique et urbain dans les périmètres définis entre l’État et les communes.

À l’heure où l’innovation est un facteur essentiel de la croissance, un autre aspect important du projet de loi est le territoire de Saclay, dont la concentration d’excellence internationale, unique en France, est incontestablement une chance pour notre pays. Vous le savez, la recherche et l’innovation tirent bénéfice des liens de proximité géographique entre leurs principaux acteurs. Mais Saclay, ceci a été mis en exergue à Grenoble, sera un pôle-charnière entre la région capitale, le pays et le monde : parfaitement relié par le nouveau schéma de transport au centre de Paris, aux gares et aux aéroports internationaux d’Île-de-France, il sera également en synergie avec les pôles de Province. Dans le domaine des nanotechnologies, Saclay fonctionnera ainsi de manière renforcée avec les autres centres du réseau « Nano Innov’ » que sont Toulouse et Grenoble ; le futur regroupement des sites franciliens d’« AgroParisTech » sera un moteur mondialement visible en réseau avec les pôles régionaux existants. En informatique, on peut signaler l’INRIA (Institut National de Recherche en Informatique et Automatique) collabore déjà avec Grenoble et Rennes.

Saclay doit être, grâce aux conditions de vie et de travail que nous offrirons aux étudiants, aux chercheurs, aux entrepreneurs et aux créateurs de start-up, certes une vitrine mondiale attractive mais avant tout un lieu de recherche, d’expériences, d’innovation et d’échanges de tout premier ordre. Pour piloter cette grande opération, le projet de loi du Grand Paris propose de créer là aussi un établissement public de type nouveau, scientifique et technologique, doté de compétences en matière de valorisation et de développement économique. Il associera dans une gouvernance originale et spécifique l’État, les collectivités territoriales, la communauté scientifique et les acteurs économiques.

Ce projet de loi relatif au Grand Paris est un acte de fondations. Elles sont nécessaires si nous voulons, de manière méthodique, bâtir ce Grand Paris et cette grande ambition « d’une stratégie d’aménagement et de développement des territoires à l’échelle nationale ». Permettez-moi de retenir les enseignements de notre grand historien Fernand Braudel, pour qui les transports et l’innovation furent de tous temps les clés du succès des villes-monde et des économies-monde. Ce sera celui du Grand Paris, nous le croyons et, avec lui, celles d’un réel élan pour tout le pays.

M. Serge Poignant, président. Merci monsieur le secrétaire d’État. Vous avez la parole monsieur le rapporteur pour avis.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Tout d’abord je constate qu’il s’agit d’un texte qui constitue la première étape d’une grande ambition au service de la région capitale et du développement du territoire national. Le projet de loi devrait ainsi donner les moyens à cette dernière de rivaliser efficacement avec les autres capitales, qu’elles soient européennes ou internationales.

De quelle situation partons-nous ? D’une manière générale, on peut considérer que la capitale est en déclin. Le nombre d’étudiants étrangers accueillis en France, majoritairement à Paris et dans sa proche banlieue, est légèrement supérieur à 266 440 ce qui nous place très loin derrière les États-Unis (plus de 660 000 étudiants), la Grande-Bretagne ou même l’Australie. Dans le domaine si crucial de la recherche, la place de la France et, là encore, principalement de la « région capitale », est également en déclin. Certes, l’Île-de-France accueille sur son sol plus de 45 % de la recherche française tant publique que privée, correspondant à plus de 78 000 chercheurs et à 42,5 % des dépenses en recherche et développement effectuées sur le territoire national. Il n’en demeure pas moins que cette tendance est à la baisse depuis plusieurs années ! Ces deux premiers constats nécessitaient une réponse à la hauteur de nos ambitions. Si des mesures ont été prises au cours des dernières années pour accroître le dynamisme de la France (je pense notamment à la « Loi relative aux libertés et responsabilités des Universités » d’août 2007 dont on commence à percevoir aujourd’hui les premiers effets), il manquait toujours une initiative de grande ampleur.

C’est ce qui a conduit le Président de la République à décider d’aménager, sur la durée et dans toutes ses dimensions, la région capitale afin de lui redonner toute sa place au plan international. Cette ambition présidentielle s’est tout d’abord traduite par la nomination d’un secrétaire d’État spécialement en charge de cette responsabilité : je rappellerai en outre les discours que le Président de la République a prononcés en l’honneur du professeur Albert Fert en janvier 2008 et son intervention plus récente à la Cité de l’architecture et du patrimoine, au Palais de Chaillot, en avril 2009, qui ont constitué autant d’actes de foi dans l’avenir de la capitale, difficilement traduisible en un texte législatif.

Que contient ce texte ? Deux axes principaux qui correspondent chacun à des problématiques spécifiques. Le premier sujet concerne celui des transports. Depuis le milieu des années 1970, les déplacements motorisés se sont multipliés en Île-de-France, passant de 17,6 millions chaque année à près de 22 millions aujourd’hui, ce qui est considérable. Si l’on tient également compte de l’accroissement de la population francilienne, il est évident que le maillage des transports n’a pas suivi le fil du temps. Il y avait manifestement une initiative à prendre, c’est chose faite et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Pour s’en tenir à l’essentiel, le dispositif permet ainsi à l’État de conclure avec des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale des contrats de développement territorial afin de mettre en œuvre les objectifs assignés au « Grand Paris ». Traduisant ainsi un véritable partenariat entre l’État et les collectivités territoriales, un co-pilotage en matière d’aménagement, chaque contrat porte donc sur le développement d’un territoire donné constitué par un ensemble de communes qui ne peut être que d’un seul tenant et doit par ailleurs exclure toute enclave ; il précise à cet effet les objectifs poursuivis en matière de développement économique, d’aménagement urbain, de logement et de déplacements.

Il manque peut-être une dimension plus globale qui intéresse l’ensemble du projet, et qui pourrait trouver sa traduction dans l’élaboration de directives locales d’aménagement, sur le modèle des directives territoriales créées en 1994, associant les élus locaux et les différents acteurs de manière à initier un processus de contractualisation que l’établissement public serait ensuite chargé de mettre en œuvre.

Sur la question des transports, il conviendra de clarifier le financement du projet afin que, sans opposer l’avenir au présent, la réalisation future ne nuise pas à l’entretien et à la modernisation des réseaux existants. Il y a des progrès urgents à accomplir dès aujourd’hui en la matière : les Franciliens l’attendent.

Le second axe de ce projet de loi concerne plus précisément l’innovation en prévoyant l’aménagement du Plateau de Saclay au travers de la constitution d’un établissement public spécifique, l’« Établissement public de Paris – Saclay ». On le sait, ce plateau constitue aujourd’hui un potentiel unique en France, tout à fait exceptionnel, en rassemblant sur son territoire de nombreux établissements d’enseignement supérieur (l’École Polytechnique, HEC, Supélec, Digiteo qui est le premier parc de recherche en STIC d’Île-de-France, une partie l’Université de Paris XI – Orsay…) mais aussi des entreprises parmi les plus innovantes, qu’il s’agisse de laboratoires d’essai de Renault, des entreprises Thalès, Air Liquide ou de start-up. Vous avez donc choisi, M. le secrétaire d’État, de créer une structure idoine afin de fédérer les différentes énergies présentes ou à venir, ce qui devrait incontestablement permettre de faire de la « région capitale » un moteur de l’innovation et de la recherche en France et, même, au plan mondial. Si les modalités de gouvernance peuvent sans aucun doute être améliorées, le principe en lui-même nous convient parfaitement. Il faudra naturellement veiller à ce que cette nouvelle personne publique ne soit pas une administration de plus mais soit au contraire une source effective d’impulsions et d’entraînement.

Je terminerai par la question des espaces : vous avez prévu de sanctuariser un espace de zones agricoles, naturelles et forestières. Si le principe est excellent, il y a toutefois un vrai débat sur ce sujet avec les élus locaux, qui concerne son étendue. Le débat doit se poursuivre dans un esprit de partenariat même si je ne suis pas persuadé que tout doive être fixé par la loi.

Un groupe de travail de la commission des affaires économiques réfléchit depuis longtemps sur la maîtrise du foncier agricole de façon à empêcher la déprise des zones agricoles dans les zones périurbaines en vue de préparer la future loi de modernisation agricole. La réflexion que nous avons collectivement engagée doit se poursuivre et tenir compte de ces différents éléments.

La majorité ne peut qu’être satisfaite par ce projet de loi même si, comme je l’ai déjà dit, le dispositif peut être amélioré en plusieurs points. Je déposerai d’ailleurs plusieurs amendements à cet égard. La commission des affaires économiques prendra toute sa part aux débats, en attendant le passage du texte devant la commission du développement durable puis en séance publique. Ce texte est un beau pari sur l’avenir : il nous appartient de l’accompagner pleinement.

M. Serge Poignant, président. Merci monsieur le rapporteur pour avis.

Je donne la parole à M. Jean-Yves Le Bouillonnec au nom du groupe S.R.C.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Merci, monsieur le président. Nous sommes également attachés à participer activement à l’élaboration de ce texte, au point que certains d’entre nous ferons, le temps de ce texte, des infidélités à la commission des affaires économiques au profit de celle du développement durable. Nous déposerons d’ailleurs tous nos amendements devant la commission du développement durable.

Un certain nombre de points méritent d’être abordés monsieur le ministre. Nous sommes nombreux à chercher à mieux prendre en compte les enjeux de l’Île-de-France, à répondre aux traumatismes vécus par les territoires qui la composent et à œuvrer ensemble sur ces questions pour leur donner leur pleine vocation mondiale. Je suis de ceux qui revendiquent pleinement leur appartenance au territoire d’Île-de-France. Quant à la nécessité du retour de l’État dans ces territoires, vous nous retrouverez également M. le ministre. Nous sommes d’accord sur l’ensemble de ces points.

Le problème, en l’occurrence, c’est la méthode. Je regrette d’ailleurs que le texte soit intitulé « projet de loi relatif au Grand Paris ». Ce titre est inexact car vous n’abordez, comme l’a justement rappelé le président Ollier, que les questions relatives au transport et non celles concernant par exemple le logement, la dynamique économique, le cadre de vie, en un mot tout ce qui fait la chair de notre travail d’élu dans ces territoires. Que n’avez-vous appelé votre texte « projet de loi créant un grand réseau de transports en Île-de-France » ? Si vous faisiez cela, vous rendriez service à tout le monde.

Ensuite, certes, vous faites revenir l’État mais vous créez une situation d’exception. Si vous souhaitez un retour de l’État efficace et accepté par tous, vous ne pouvez le faire revenir au détriment de la décentralisation.

Ainsi, vous donnez à la « Société du Grand Paris » des compétences exorbitantes du droit commun au détriment des collectivités territoriales : cela ne paraît pas plus acceptable en Île-de-France qu’ailleurs. Si la « Société du Grand Paris » agit au service de l’État et qu’elle ne permet pas, dans le même temps, aux élus de s’exprimer, cela aura de graves conséquences.

Sur le fond, vous devrez répondre à la question de la compatibilité de votre projet avec le schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF), qui est l’instrumentum dans lequel toutes les collectivités se sont inscrites.

Enfin, aucun État n’a échappé au contentieux de l’urbanisme : nous n’y échapperons pas non plus. Le débat public est un moyen d’atténuer les risques que vous encourrez dans la mise en œuvre de votre politique, un moyen d’échapper aux contestations et de rassurer. Je prends l’exemple de Cachan : si l’Institut Gustave Roussy (IGR), dont je suis un ardent défenseur, accueille une station rocade, la moitié de ma commune sera affectée par la procédure. Concernant l’école normale supérieure, le premier ministre a décidé du transfert de l’ENS sur le plateau de Saclay sans concertation avec le maire de Cachan, laissant ainsi un bâtiment situé actuellement au cœur de la ville ; vous ne trouverez pas un habitant de Cachan en désaccord avec ce que je dis.

Nous avons besoin que la loi serve aussi la vérité des intentions et qu’elle lève les suspicions.

M. Michel Piron. Sur ce sujet majeur, monsieur le ministre, je ferai trois séries de remarques.

Si le sujet Grand Paris est inépuisable, c’est qu’il représente un enjeu fondamental d’aménagement du territoire. Premièrement, le projet du Grand Paris a une dimension nationale et internationale. Je suis d’ailleurs partagé sur l’emploi de la notion de « ville-monde » ; derrière ce concept, il y a un choix à faire entre des modèles urbains « monopolaires » comme « multipolaires », et la prospérité n’est pas plus d’un côté que de l’autre. Vous avez cité Jean-François Gravier et son livre Paris et le désert français : cela soulève le problème du rapport entre la province et la région capitale, entre Paris et les autres villes, qu’elles aient ou non le statut de métropole ; la question multipolarité-monopolarité mérite d’être développée. En somme la question qui se pose est la suivante : quels doivent être les rapports entre Paris, le monde et l’ensemble de l’hexagone ?

Deuxième point que je souhaite aborder, la dimension locale : c’est un problème très spécifique. Paris présente des caractéristiques de concentration qu’on ne trouve nulle part ailleurs à un tel degré sur l’hexagone – même si l’on peut citer certaines métropoles comme Lyon, Marseille, Toulouse, Lille, et quelques autres – et qui font sa spécificité. La question qui se pose concerne le périmètre du Grand Paris. Quel doit être le rapport entre le centre et la périphérie ? Cette question est fondamentale car elle détermine largement la question des transports. Or, au moment même où l’on s’interroge avec le Grenelle 2 sur la ville de demain, la question subsidiaire qui se pose est : quelle ville ? La question de l’urbanisme « multifactoriel » croît en importance depuis plusieurs années (qui intègre habitat, activités, services marchands ou non marchands, déplacements intermédiaires). Dans ce cadre, comment aborder le problème des gares : on peut les concevoir comme de simples maillons d’un réseau ou comme des centres-villes.

Troisièmement, nous savons que si Paris est dans l’état dans lequel elle se trouve actuellement, cette situation est en grande partie due à des problèmes de gouvernance. L’Île-de-France est, non sans raison car ses communes y sont de grande taille, la région la plus faiblement intercommunalisée de France : de ce point de vue, le retour de l’État se justifie pleinement. S’il y a des arbitrages à rendre, je crois qu’ils exigeront des lois assez spécifiques, à l’instar de la loi PLM qui prévoyait déjà des dispositifs spécifiques.

Enfin, je finirai en soulignant que je n’ai pas compris si, dans votre projet, vous avez choisi entre un et plusieurs centres, par rapport à la périphérie. Votre travail me renvoie à la grande méditation de Pascal sur l’infini : le centre est partout si la circonférence n’est nulle part. Alors M. le ministre, permettez-moi de penser que votre titre et votre activité ne seront pas de trop pour répondre à ces questions.

M. Pierre Gosnat. Une première remarque : l’intérêt porté au développement de la région capitale n’est pas entièrement logique historiquement. Je me souviens d’une réunion du CIAT à Nantes dans les années 1980 qui avait pour but d’étudier un rééquilibrage entre une capitale trop favorisée et la province. C’est d’ailleurs à cette époque, je crois, que l’ENA a été transférée à Strasbourg. Aujourd’hui, la logique inverse semble adoptée.

Ma deuxième remarque concerne la notion de « ville monde » : au-delà de l’ambiguïté relevée par M. Piron, il faut être prudent, car les crises financières et économiques ont eu, sur la plupart de ces grandes métropoles, des conséquences catastrophiques.

Concernant le projet de loi lui-même, je suis extrêmement préoccupé par le terme de « Grand Paris », ambiguïté qui se retrouve sur le territoire dont on parle. Le socle du projet est la réalisation d’un réseau qui relie neuf pôles stratégiques, ce réseau étant réalisé par la Société du Grand Paris, établissement industriel et commercial.

Même modulée depuis le mois d’août, cette solution est fort éloignée du SDRIF, qui a d’ailleurs fait l’objet d’une large concertation avec les villes, contrairement au « SDORIF » des années 1990. Elle est au surplus contradictoire avec les propositions des équipes d’architectes auxquelles le Président de la République avait demandé de faire des propositions – Jean Nouvel vous a d’ailleurs, M. le ministre, interpellé sur ce point – ainsi qu’avec les travaux menés dans le cadre de la commission Carrez, à laquelle j’ai participé. Tout cela me conduit à m’interroger sur la coordination et la collaboration qui existent dans le cadre de votre projet.

Concernant le terme de « Grand Paris », il m’apparaît comme un retour à la fonction étatique de la capitale, niant l’évolution des rapports entre Paris et la métropole : or, c’est précisément ce que nous ne voulons pas retrouver ! La réforme programmée des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle vont d’ailleurs, également dans ce sens et je pense qu’un même esprit les anime.

Quant au projet lui-même, nous étions en droit d’attendre une réduction des inégalités sociales et territoriales, notamment dans le cadre du logement. Ensuite, vous avez fait le choix des transports en commun entre Paris et la banlieue. Les élus communistes ont été les premiers à défendre cette idée, notamment avec le tramway de Bobigny-Saint Denis. Mais vous vous limitez à un réseau reliant des « clusters » : vous revenez ainsi à une conception tournée vers les « pôles d’excellence » qui a pollué la politique d’aménagement du territoire depuis trop longtemps en étant génératrice de déserts et de déséquilibres territoriaux.

Je terminerai en vous posant une série de questions. Quel sera le rôle de la commission nationale du débat public ? Les dispositions du projet s’imposeront-elles aux documents de planification urbaine des collectivités ? La « Société du Grand Paris » pourra-t-elle reprendre à son compte les actifs des OPA présidés par l’État ?

Enfin, je ne peux que dénoncer en bloc la gouvernance de la « Société du Grand Paris » et vous inviter à prévoir la présence majoritaire d’élus dans chacune de ses instances. En conclusion, nous exigeons que le service public soit le moteur principal de développement de « Paris-Île-de-France ».

M. François Pupponi. Comme cela a été dit, il faut effectivement s’occuper de la région parisienne, notamment pour améliorer la desserte et le fonctionnement des transports en Île-de-France. Certaines zones subissent une relégation extrême.

Notre désaccord porte sur la méthode. J’accueillerai volontiers les membres de la Commission à Sarcelles pour leur permettre de constater, cinquante-cinq ans après, les résultats d’une grande intervention de l’État. À l’époque, les hauts fonctionnaires, à la demande des autorités politiques, ont pris des décisions dramatiques dont nous payons aujourd’hui les conséquences.

La décentralisation devait rendre leurs prérogatives aux élus. Or, trois ans après la dernière réforme, l’État reprend la main.

Au-delà de la question des relations entre l’État et les collectivités territoriales, je souhaiterais avoir quelques précisions :

– quels sont les projets visés par les articles 4 et 5 du projet de loi ? S’agit-il seulement d’infrastructures de transport ? Les ZAC sont-elles concernées ? Je m’interroge de la même façon sur l’article 15-9 du code de l’urbanisme ;

– à l’article 7, les missions de la « Société du Grand Paris » (SGP) doivent être précisées : par qui, quand et comment les opérations d’aménagement seront-elles déterminées ? Sur quelles zones, avec quel périmètre et pour quoi faire ? Qui déterminera les zones sur lesquelles la SGP pourra exercer son droit de préemption et combien de gares y aura-t-il ?

– quant au SDRIF, s’agit-il du schéma toujours en vigueur, à savoir celui qui date de 1994 ou le Gouvernement va-t-il enfin transmettre le nouveau projet au Conseil d’État ?

– le Val-d’Oise est le seul département d’Île-de-France restant hors du tracé du Grand Paris (il n’est concerné qu’indirectement, à travers Roissy). Je souhaite que le Val-d’Oise soit pleinement intégré dans les projets d’infrastructures de transport, sous réserve bien sûr que le processus devienne démocratique.

M. Pierre Lasbordes. On ne peut que se satisfaire, monsieur le ministre, de ce projet de loi : en effet, il était attendu depuis vingt ans ! En tant qu’ancien élu local de Gif-sur-Yvette, je suis ces réflexions depuis longtemps. Toutefois, cette réforme ne doit pas s’effectuer dans n’importe quelles conditions : une véritable concertation avec les élus locaux est nécessaire et la gouvernance doit être améliorée. Il reste donc quelques points durs à régler. La solution proposée pour les transports est satisfaisante, mais quel en sera le financement ? Quelle solution d’attente sera trouvée pendant les dix années à venir car, d’ici là, il faut en effet améliorer la desserte du plateau de Saclay.

Enfin, j’insiste pour que la concertation associe l’ensemble des élus locaux et des collectivités territoriales.

M. François Brottes. Paris est en France mais Paris n’est pas la France ! L’étude d’impact n’apporte malheureusement aucune information sur l’effet qu’aura la réforme sur les autres régions.

Le projet vise à reproduire ce qui s’est passé avec les villes nouvelles, alors que le pouvoir était aux mains de la technostructure. La décentralisation a ensuite été lentement mise en œuvre.

Comment, en dérogeant aux principes qui s’imposent à l’ensemble des autres collectivités, ne pas ainsi siphonner les activités provinciales ? C’est le problème posé par les articles 20 à 28 de votre projet.

Quelle sera la ressource principalement employée, le texte ne faisant que dresser une liste de ressources potentielles ?

Comment un établissement public pourrait-il avoir des filiales privées ? Comment pourrait-il intervenir au-delà du périmètre du Grand Paris ? Ces dérogations aux règles s’appliquent aux sociétés d’économie mixte et aux CUMA par exemple, qui manient aussi des deniers publics.

En définitive, le dispositif envisagé aboutit à une extravagance totale, alors même que les collectivités perdent le levier d’action que leur offrait la taxe professionnelle.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale auprès du Premier ministre. Je vous remercie pour l’esprit et la qualité de vos interventions.

Monsieur Le Bouillonnec, vous le savez, la situation exige que l’on agisse rapidement. Il y a urgence car nos potentiels sont en train de s’affaiblir dans la compétition internationale. Cette nécessaire rapidité ne concernera pas seulement le métro automatique : ainsi, par exemple, la durée des procédures habituelles sera ramenée de sept à trois ans. Sur ces questions et leurs répercussions éventuelles sur les procédures de concertation, j’attends vos amendements.

Sans toucher aux délais de consultation du public, nous pourrons obtenir des progrès considérables grâce au tuilage des procédures successives.

Quant aux contrats de développement territorial, ils permettront la mise en place d’un réseau de transports très structurant.

Une fois l’implantation d’une gare décidée après débat public, le contrat précisera les limites d’intervention du territoire, les objectifs quantitatifs de développement urbain et les objectifs qualitatifs : logement, mixité sociale, le système de transports sur le territoire, la part de la valorisation foncière affectée au financement d’infrastructures.

Ce contrat aura un caractère normatif particulier : sans valeur législative, il pourra se substituer donc à tous les documents d’urbanisme existants.

La stratégie foncière sera déterminée en association entre l’État et les collectivités, sans aucun jacobinisme, mais dans le cadre d’une contractualisation respectueuse de l’esprit partenarial. Une dictature de l’État n’aurait rien d’efficace.

Monsieur Piron, oui, je répondrai volontiers à votre demande d’audition sur les questions d’urbanisme, de centralité et de périphérie. La situation d’une aire urbaine de 9 millions d’habitants est en effet exceptionnelle !

Monsieur Gosnat, la « Société du Grand Paris » est-elle assez démocratique ? Je ne sais pas. En revanche, je sais que les régions et les départements y seront représentés, que tous les territoires concernés par le « double huit » seront associés et que cette structure sera efficace. En outre, les travaux parlementaires permettront encore de prendre mieux en compte certains aspects : je compte sur votre participation et sur nos débats.

Monsieur Pupponi, nous n’avons pas le temps d’évoquer le SDRIF. S’il n’a pas été transmis au Conseil d’État, c’est seulement parce qu’après trois mois de négociation avec le président du conseil régional, un protocole d’accord permettant de gérer cette question délicate devait être soumis au conseil régional début octobre. M. Jean-Paul Huchon n’a pas souhaité le faire pour des raisons politiques. Il n’y a donc plus de protocole et nous reprendrons ce dossier après les élections régionales.

Monsieur Lasbordes, sur les points que vous avez évoqués, j’attends avec impatience vos amendements.

Monsieur Brottes, vous êtes trop fin économiste pour ne pas savoir que les différentes polarités se multiplient et ne soustraient pas : le voisinage des biotechnologies à Lyon et les nanotechnologies de Grenoble permet de faire émerger de nouvelles disciplines de recherche, comme les nanobiotechs !

M. Jean-Yves le Bouillonnec. Je souhaiterais soulever le problème des contrats. L’article 18 du projet de loi évoque une simple faculté de contractualisation. L’appréciation que vous portez sur cette question est rassurante, mais est en contradiction avec le texte. C’est un des enjeux que nous devrons aborder au cours de nos débats.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Nous n’avons pas entendu créer d’obligation.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IV

DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL ET PROJETS D’AMÉNAGEMENT

Article 18

Conclusion et régime des contrats de développement territorial

Cet article constitue, avec l’article 19, le Titre IV du projet de loi, relatif au « Développement territorial et [aux] projets d’aménagement ».

L’article 18 permet à l’État de constituer avec les communes ou établissements publics de coopération intercommunale qui le souhaitent des « contrats de développement territorial ». À titre liminaire, il convient de préciser que ce mécanisme ne doit pas être appréhendé isolément : parfaite continuité du reste du texte, le développement territorial visé par ces contrats est bien évidemment lié aux infrastructures de transports visées par les trois premiers titres du projet de loi.

La possibilité de conclure des contrats de développement territorial est limitée dans le temps puisqu’elle n’est permise que durant une période de dix-huit mois à compter de l’approbation du schéma d’ensemble des infrastructures composant le réseau public du Grand Paris (défini par l’article 2 du projet de loi) ou, pour ce qui concerne les seules communes comprises dans le périmètre du futur établissement public de Paris – Saclay, dix-huit mois à compter de la publication de la loi. Si, pour quelque motif que ce soit, aucun contrat n’est signé (le texte précise bien, en employant les mots « peuvent être conclus », qu’il ne s’agit que d’une faculté), il est prévu que ce soit le droit commun qui s’applique. Quelles que soient les qualités du système ainsi proposé, on peut y discerner un certain paradoxe : en effet, comment inciter des communes à signer de tels contrats tout en n’ouvrant cette possibilité que durant un délai de dix-huit mois ? A cet effet, votre rapporteur vous proposera un amendement permettant, sous certaines conditions, à des communes qui n’auraient pas signé un contrat de développement territorial au cours du délai de dix-huit mois imparti de pouvoir ultérieurement adhérer à un contrat existant.

Ces contrats peuvent être conclus dans le seul but de mettre en œuvre les objectifs définis à l’article 1er de la loi qui contribuent tous à l’ambitieux projet du Grand Paris. Traduisant ainsi un véritable partenariat entre l’État et les collectivités territoriales, un co-pilotage en matière d’aménagement, chaque contrat porte donc sur le développement d’un territoire donné constitué par un ensemble de communes qui ne peut être que d’un seul tenant et doit par ailleurs exclure toute enclave ; il précise à cet effet les objectifs poursuivis en matière de développement économique, d’aménagement urbain, de logement et de déplacements. Outre la définition des modalités de mise en œuvre, le contrat de développement territorial précise également les opérations d’aménagement et les projets d’infrastructures nécessaires à la mise en œuvre de ces objectifs. Enfin, en fonction des objectifs stratégiques de développement des territoires qui sont poursuivis, il peut prévoir la création de zones d’aménagement différé18 sur le territoire desquelles soit l’État, soit les communes, soit encore les établissements publics de coopération intercommunale, disposent d’un droit de préemption à titre principal. En outre, la question de savoir si ce droit de préemption est accordé à titre principal ou subsidiaire doit en principe figurer dans le contrat de développement territorial : son usage et ses modalités d’exercice résultent donc uniquement de la libre volonté des parties signataires.

Enfin, il convient de préciser que, lorsque le droit de préemption est établi au profit d’un bénéficiaire autre qu’une commune et que celui-ci renonce à exercer son droit (soit en le faisant savoir de façon explicite, soit en laissant s’écouler un délai de trois mois à compter de la déclaration préalable d’aliénation faite par le propriétaire privé et non de deux comme dans le droit commun), le huitième alinéa de cet article permet aux communes de demeurer bénéficiaires d’un droit de préemption à titre subsidiaire, par exception au droit en vigueur19.

La Commission est saisie d’un amendement CE 21 de M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Le projet de loi ne comporte actuellement aucune indication quant au financement et à la réalisation des équipements et infrastructures qui vont incomber aux diverses collectivités et établissements publics, nécessaires au bon accueil des activités et des populations à venir sur le territoire de Paris-Saclay. Il importe, pour le succès de l’opération, que cet effort d’investissement soit concerté et précisé avec l’ensemble des acteurs du territoire dans le cadre d’une procédure contractuelle, en y associant également la Région Île-de-France et les deux conseils généraux concernés.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je suis défavorable à cet amendement, parce que la procédure prévue par cet article se veut particulièrement souple ; or votre amendement multiplie les détails procéduraux. En outre, votre amendement introduit les départements et les régions, quand le projet de loi vise à instaurer un dialogue direct entre l’État et les communes, au moyen d’une contractualisation que pour ma part je souhaite obligatoire.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Je suis défavorable à cet amendement.

M. Pierre Lasbordes. On s’interdit alors tout financement par les régions et les départements puisque l’alinéa 1er de l’article 18 restreint la contractualisation à l’État et aux communes.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. L’article 18 établit les modalités de signature des contrats, mais la question du financement constitue une question distincte. Rien n’interdit dans cet article de faire appel aux financeurs que vous évoquez.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CE 22 de son rapporteur.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. L’objectif poursuivi dans cet amendement est de ne pas figer les possibilités de contractualisation : une commune attenante à un ensemble de communes pourrait ainsi se joindre au contrat conclu par ces dernières. Ce système aurait pour effet de laisser un peu de « respiration » au contrat, tout en veillant à ce que ses clauses initiales ne soient modifiées.

M. Michel Piron. En ne prévoyant pas expressément cette faculté, y faisait-on obstacle ? A l’inverse, une telle précision ne constitue-t-elle pas une incitation à attendre ?

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Mon amendement prévoit qu’il peut être fait usage de cette faculté au-delà du délai prévu de 18 mois.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Précisions encore une fois que cette faculté s’exerce sous réserve du respect des clauses du contrat initial.

M. Pierre Goldberg. Je constate que le contrat peut actuellement être signé par l’État, d’une part, les communes et les EPCI, d’autre part.

Cela signifie qu’une commune membre d’un EPCI, à qui bien souvent la compétence « aménagement » a été transférée, ne pourrait donc pas entreprendre des démarches en vue d’une adhésion individuelle au contrat.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Vous avez raison. Une commune n’appartenant pas à un EPCI compétent en matière d’aménagement pourra se joindre au contrat, ce qui ne sera pas le cas des communes membres d’un tel EPCI.

M. Pierre Golbderg. La mention, dans votre amendement, selon laquelle « toute commune » peut adhérer au contrat, n’est-elle donc pas trop restrictive ?

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Dans ce cas, je vous propose de rectifier mon amendement en précisant : « toute commune ou EPCI ».

M. Pierre Gosnat. Je tiens à préciser que le groupe GDR ne prendra part à aucun vote.

M. Jean-Yves le Bouillonnec. Il en va de même du groupe SRC.

L’amendement CE 22 ainsi rectifié est adopté.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 18 ainsi modifié.

Article 19

Dispositions relatives à la mise en œuvre des contrats de développement territorial

Cet article ne fait que décrire la mise en oeuvre de la procédure détaillée au précédent article. En effet, il permet aux communes et aux établissements publics signataires d’un contrat de développement territorial de conclure de nouveaux contrats avec des tiers afin de les mettre en œuvre. Ces contrats « subséquents » peuvent ainsi porter tant sur la conception du projet d’aménagement global que sur l’élaboration d’une proposition de révision simplifiée du document d’urbanisme ou la maîtrise d’ouvrage des travaux d’équipement concourant à la réalisation du projet d’aménagement.

Bien qu’ils n’en adoptent pas la dénomination, ces contrats ne constituent en réalité qu’une forme particulière des « contrats de partenariat » créés en 200420, qui permettent à une personne publique (les collectivités territoriales étant les premières utilisatrices de ce procédé extrêmement souple) de confier à un tiers, pour une période déterminée, une mission globale ayant pour objet la conception, le financement, la construction ou la transformation, l’entretien, la maintenance, l’exploitation ou la gestion d’ouvrages, d’équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public21.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 19 sans modification.

Après l’article 19

La Commission examine l’amendement CE 31 de son rapporteur.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. J’ai fait allusion à cet amendement en introduction de notre réunion.

Je vais le retirer mais je souhaite que l’on ouvre cette discussion pour l’avenir ; nous n’en sommes en effet qu’au stade de la préfiguration du Grand Paris.

A l’occasion de l’examen de futurs projets de loi, lorsque les neufs pôles seront constitués, il serait bon que l’on prévoit des directives locales d’aménagement afin d’éviter le quiproquo que nous avons constaté tout à l’heure au sujet des objectifs assignés à chacun des pôles, quitte à ce qu’une contractualisation soit possible.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Le moment venu, nous examinerons cette proposition avec la plus grande bienveillance.

L’amendement CE 31 est retiré.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES AU PROJET DE CRÉATION D’UN PÔLE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE
SUR LE PLATEAU DE SACLAY

La Commission examine deux amendements CE 12 et CE 11 de M. Pierre Lasbordes portant sur les intitulés du titre V et de son chapitre II.

M. Pierre Lasbordes. L’étude d’impact jointe au projet de loi évoque importance de l’agriculture : il me semblerait donc bienvenu de l’évoquer dans le Titre V mais aussi dans l’intitulé du chapitre Ier.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je serais favorable à l’amendement CE 11 à condition que vous retiriez le CE 12.

L’amendement CE 12 est retiré et l’amendement CE 11 est adopté.

CHAPITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC DE PARIS - SACLAY

Article 20

Création de l’« établissement public de Paris – Saclay »

Premier article du titre V du projet de loi, l’article 20 est central puisqu’il crée l’« Établissement public de Paris – Saclay ».

De prime abord, on peut s’étonner de voir cet établissement créé par une loi. En effet, seules les « catégories d’établissement public » nécessitent, aux termes de l’article 34, alinéa 8, de la Constitution, d’être créées par une loi22. Or, en l’espèce, tant l’exposé des motifs que le texte même de l’article 20 (dans son premier alinéa) précisent que l’établissement public de Paris – Saclay a un « caractère industriel et commercial » : sa nature juridique ne semble donc pas justifier de devoir recourir à l’instrument législatif. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs eu l’occasion de préciser que devaient être regardés comme entrant dans une même catégorie d’établissements publics, au sens de l’article 34 de la Constitution, seuls ceux « dont l’activité s’exerce territorialement sous la même tutelle administrative et qui ont une spécialité analogue »23. En l’espèce, le doute était permis. En effet, compte tenu de ses différentes finalités, l’établissement public de Paris – Saclay s’apparente à certains établissements d’aménagement existants dont les missions s’avèrent particulièrement diversifiées (on peut ainsi citer l’exemple de l’établissement public de gestion du quartier d’affaires de La Défense) : la catégorie existant déjà, la création de l’établissement public de Paris – Saclay pouvait apparemment être effectuée par décret.

Pour autant, le choix a consisté à recourir à la loi. Même si cette option s’avère plutôt rare (la plupart des établissements publics créés relevant en effet des deux catégories éprouvées que sont les établissements publics administratifs et les établissements publics industriels et commerciaux), force est de constater qu’elle se justifie pleinement ici. D’une part, l’établissement public de Paris – Saclay remplit un nombre de missions tel qu’il ne peut se réduire au modèle de l’établissement public industriel et commercial stricto sensu : c’est d’ailleurs le même raisonnement qui a conduit le législateur à créer en 2006 l’établissement public de sécurité ferroviaire24 qui, bien que remplissant des finalités de nature industrielle et commerciale, recélait plusieurs spécificités justifiant que l’on recourt à la loi. D’autre part, le fait de créer cet établissement public par la loi illustre la volonté du Gouvernement d’agir de façon particulièrement volontariste et dans la durée. Il était donc logique, pour ces différentes raisons, de devoir recourir à la loi pour créer cette nouvelle personne publique : tel est l’objet
du Titre V du projet de loi.

Pour bien comprendre l’importance de cette nouvelle personne morale de droit public, il convient en premier lieu de s’attacher à sa dénomination : le fait qu’elle allie les noms de « Paris » et de « Saclay » n’est pas le fruit du hasard. Il s’agit, bien au contraire, d’illustrer l’ambition portée par ce projet de loi qui, en souhaitant faire de la région – capitale un pôle d’attraction incontournable au plan mondial, vise à cette fin à mobiliser toutes les énergies et tous les potentiels. Ainsi, l’aménagement du Plateau de Saclay, première étape d’un projet beaucoup plus vaste qui devra être conduit sur la durée, ne peut être appréhendé isolément sans, par exemple, prendre également en considération la place fondamentale occupée par Paris (qui bénéficie naturellement d’un potentiel estudiantin sans équivalent sur le reste du territoire national). Par ailleurs, la concrétisation de cette synergie réside bien évidemment dans la constitution d’un important réseau de transport projeté entre la capitale et la petite couronne, objet des titres I à IV du présent projet de loi.

Etablissement public de l’Etat de nature industrielle et commerciale, l’« Établissement public de Paris – Saclay » a donc vocation à être soumis à un régime juridique mixte puisque, tout en étant dominé par les règles de droit privé, il bénéficiera dans le même temps des prérogatives attachées à toute personne publique (insaisissabilité des deniers publics, possibilité de posséder un domaine public…). Soumis au principe de spécialité comme tout établissement public, le deuxième alinéa de l’article 20 dispose que sa vocation consiste à développer
le « pôle scientifique et technologique de rayonnement international du Plateau de Saclay », un des neuf pôles (le projet de loi préférant employer le terme de « clusters »
25) sélectionnés par le Gouvernement pour répondre au souhait du Président de la République de faire de la région capitale une des régions les plus innovantes au plan mondial dans les années à venir.

Il est vrai que le Plateau de Saclay offre, de ce point de vue, des atouts considérables en rassemblant sur son territoire de multiples établissements d’enseignement supérieur parmi lesquels on peut citer l’École Polytechnique
(à Palaiseau), HEC (à Jouy-en-Josas), l’École Centrale (à Châtenay-Malabry), Supélec (à Gif-sur-Yvette), l’École normale supérieure de Cachan, une partie de l’Université de Paris XI « Paris-Sud » (principalement basée autour d’Orsay) et des laboratoires issus des plus grands organismes de recherche français, qu’il s’agisse du CEA (Commissariat à l’énergie atomique), du CNRS (Centre national de la recherche scientifique), de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) ou de l’INRIA (Institut national de recherche en informatique et automatique). Le Plateau a vocation à accueillir 23 établissements d’enseignement supérieur ou de recherche : outre ceux déjà présents sur site, on peut
signaler l’intérêt à venir s’installer qu’ont pu manifester des établissements aussi prestigieux que l’ENSAE (École nationale de la statistique et de l’administration économique), AgroParisTech ou certains laboratoires de l’École des Mines de Paris. Au total, le pôle du Plateau de Saclay regrouperait à terme plus
de 47 000 étudiants et 17 000 chercheurs en tous domaines.

Il faut enfin préciser que la constitution de ce pôle de dimension internationale participe d’un plus vaste mouvement qui a également vu la récente constitution d’un pôle à Paris – Est. Ainsi, ce vaste complexe, appelé à se développer au fil du temps à l’instar de ses coreligionnaires, compte d’ores et déjà un pôle scientifique et technique de plus de 1 500 doctorants, chercheurs et ingénieurs (au sein d’un ensemble où cohabitent le Laboratoire central des Ponts et Chaussées, l’École nationale des sciences géographiques, l’Université de Paris XII Val-de-Marne, l’École des Ponts Paris Tech, l’Institut français d’urbanisme ou l’École nationale supérieure d’architecture, de la ville et des territoires) et le pôle de compétitivité « Advancity » (qui regroupe une centaine d’acteurs franciliens dans les domaines académique et industriel parmi lesquels on peut citer le Polytechnicum de Marne-la-Vallée, l’École centrale des travaux publics, les groupes Phytorestore ou Véolia).

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

Article 21

Missions assignées à l’« établissement public de Paris – Saclay »

Cet article décrit les différentes missions qui incombent à l’établissement public de Paris – Saclay. Il s’agit notamment de :

– réaliser des opérations d’équipement et d’aménagement prévues par l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme et les acquisitions foncières nécessaires ;

– réaliser des investissements destinés à favoriser l’implantation d’organismes exerçant des activités d’enseignement supérieur, de recherche et d’entreprises ;

– collecter des fonds auprès de tiers afin de contribuer aux activités dans le domaine de l’enseignement supérieur, de la recherche, de l’industrie mais aussi dans celui de la création d’entreprises ;

– mettre à disposition des organismes d’enseignement supérieur et de recherche et des entreprises des structures de formation et d’information, de réception et d’hébergement et de restauration ;

– fournir à ces organismes et entreprises des prestations en matière de dépôt et d’entretien des brevets, de protection de la propriété intellectuelle et industrielle, de création et de financement des entreprises ;

– assurer des missions d’assistance aux maîtres d’ouvrage et pouvoirs adjudicateurs d’opérations immobilières ayant pour objet le développement du pôle scientifique et technologique ;

– favoriser la circulation des connaissances, des innovations, des bonnes pratiques, la mobilité professionnelle, la diffusion des offres d’emploi et de stage et les rapprochements entre les milieux scientifiques et économiques ;

– promouvoir l’image de marque du pôle ;

– contribuer à la mise en valeur et à la protection des espaces agricoles, naturels et forestiers.

Compte tenu de la diversité des statuts juridiques qui vont ainsi cohabiter et surtout de la multiplicité des activités qui vont s’exercer sur ce périmètre, l’établissement public de Paris – Saclay a vocation à devenir non un prestataire de services (ses fonctions ne se limitant naturellement pas à distribuer des subsides à ceux qui en feraient la demande) mais à devenir un « ensemblier », chargé d’animer un espace et d’établir une synergie entre différents acteurs qui, malheureusement, n’ont que peu d’opportunité de travailler les uns avec les autres. De ce point de vue, c’est à la fois la justification et la conséquence de l’existence d’un établissement public spécifique sur le Plateau de Saclay.

La Commission est saisie des amendements CE 2 et CE 3 de M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Ces amendements ont pour objet de préciser les activités du futur établissement public et, notamment, d’étendre son champ d’intervention à la protection de l’activité agricole et du patrimoine hydraulique, particulièrement riche sur le plateau de Saclay.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je serais favorable à l’amendement CE 3 à condition que vous retiriez le CE 2.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Je partage l’avis du rapporteur.

L’amendement CE 2 est retiré et l’amendement CE 3 est adopté.

La Commission est saisie d’un amendement CE 6 de M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Cet amendement prévoit un bilan de l’activité d’aménagement de l’établissement public au bout de quinze ans.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je suis défavorable à cet amendement. On ne peut pas fixer de limite a priori à la durée d’accomplissement des missions d’aménagement dévolues à l’établissement public. On peut imaginer que, dans le cadre de ses missions de contrôle de l’application de la loi, notre commission évalue l’action conduite par cet établissement, mais limiter dans le temps des missions dont la réalisation peut excéder le terme que vous fixez ne me parait pas raisonnable.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. J’étais pour ma part plutôt favorable à cet amendement, car il me paraissait constituer une incitation à ce que l’établissement public réalise ses missions avec diligence.

M. Pierre Goldberg. Je souscris à l’idée qu’une évaluation est nécessaire, mais le bilan de l’établissement public dépendra aussi de sa gouvernance et de l’influence des collectivités territoriales sur son devenir.

La limite temporelle que vous proposez pose en outre la question de l’équilibre financier d’une opération d’aménagement et de sa durée d’amortissement, qui peut s’avérer plus longue que les prévisions initiales ne le laissaient supposer. Si cet équilibre n’était pas atteint au bout de quinze ans, une grave menace pèserait alors sur les collectivités territoriales.

M. François Pupponi. La limite que vous proposez d’instaurer me semble problématique mais soulève tout de même une question sous-jacente : celle de la responsabilité de l’entretien, de l’aménagement et du financement des opérations réalisées par l’établissement public.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je pourrais être favorable à votre amendement s’il était rerédigé car, dans sa rédaction actuelle, si l’établissement public n’a pu mener à bien les opérations qui lui ont été confiées dans un délai de quinze ans, il ne prévoit pas dans quelles conditions elles seraient alors menées à leur terme.

M. Michel Piron. Je suis d’accord avec notre rapporteur, et rien n’interdit de dissoudre l’établissement public au bout de quinze ans, ou même avant, s’il s’est acquitté de ses missions. La limite que vous proposez me paraît trop abstraite.

M. Pierre Lasbordes. La création de cet établissement public inquiète les collectivités territoriales, qui redoutent qu’en lui accordant un blanc-seing, elles soient durablement dépossédées de leur compétence en matière de permis de construire.

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. J’étais favorable à cet amendement qui me semblait permettre d’éviter l’écueil de ces établissements publics qui ne meurent jamais, même si leur mission est accomplie. Pour autant, les missions visées dans le cas d’espèce excèdent le seul domaine de l’aménagement ; il parait dont difficile de les limiter dans le temps et je me rallie donc à l’opinion du rapporteur.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je comprends les intentions de l’auteur de l’amendement, mais il risque de créer un précédent qui nous sera opposé dans toutes les opérations d’aménagement. On pourrait peut-être imaginer un système plus souple avec une clause de rendez-vous conduisant l’établissement à produire un rapport dressant le bilan de son action.

L’amendement CE 6 est retiré.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 21 ainsi modifié.

Article 22

Modalités de gouvernance de l’« établissement public de Paris – Saclay »

Cet article est relatif à la gouvernance de l’établissement public de Paris – Saclay. Celui-ci a ainsi vocation à être géré par un conseil d’administration, lui-même composé de quatre collèges représentant respectivement l’État, des collectivités territoriales de la région Île-de-France et de leurs groupements, des personnalités qualifiées dans le domaine universitaire et scientifique ainsi que des personnalités ayant une expérience de chef d’entreprise ou de cadre dirigeant d’entreprise. Tout en spécifiant que les représentants des deux premiers collèges (représentant donc l’État et des collectivités territoriales) disposeront de la majorité des sièges au sein du conseil d’administration, cette diversité de profils témoigne avant tout de l’émulation qu’a vocation à susciter la constitution du pôle sur le Plateau de Saclay.

Certaines précisions auraient néanmoins pu être apportées dès ce stade sans que l’on soit contraint d’attendre la parution du décret en Conseil d’État annoncé par l’article 27 du présent projet de loi. On peut ainsi s’étonner de la composition du deuxième collège, censé être le représentant « des collectivités territoriales d’Île-de-France et de leurs groupements ». Si l’on s’en tient à la lettre de cette disposition, force est de constater qu’elle exclut par exemple les députés élus dans les circonscriptions couvertes par l’aménagement projeté du Plateau de Saclay puisqu’ils représentent la Nation et non pas une collectivité territoriale quelconque. A contrario, peuvent théoriquement siéger au conseil d’administration, des élus de départements, de communes ou d’établissements publics de coopération intercommunale situés, par exemple, en Seine-et-Marne ou dans le Val-d’Oise alors que ces deux départements ne sont nullement affectés, tout du moins de manière directe, par le développement du pôle du Plateau de Saclay. Il importe donc de clarifier certains points qui, contrairement à ce que l’on pourrait éventuellement penser, peuvent légitimement relever de la loi et ne pas seulement être inclus dans un texte réglementaire : là encore, l’exemple de l’établissement public de gestion du quartier d’affaires de La Défense le démontre parfaitement26. C’est la raison pour laquelle votre rapporteur, afin de dissiper les doutes qui peuvent légitimement naître d’une telle disposition, vous proposera un amendement tendant à préciser la composition du deuxième collège du conseil d’administration de l’établissement public de Paris – Saclay.

Outre leur qualification particulière, le dernier alinéa de l’article précise que les membres du conseil d’administration disposeront d’un mandat renouvelable de cinq ans. On remarquera que le projet de loi a volontairement choisi de ne spécifier aucune éventuelle incompatibilité avec l’exercice du mandat de membre du conseil d’administration afin, précisément, de laisser la plus grande liberté de choix possible parmi les acteurs. Dans la même logique, le projet n’a pas souhaité préciser que les représentants siégeant dans les troisième et quatrième collèges devaient représenter des établissements scientifiques ou des entreprises d’ores et déjà installées sur la Plateau de Saclay. Il appartiendra donc aux autorités compétentes de faire porter leur choix sur des personnalités dont l’expérience et le profil seront autant de gages de compétence et d’impartialité : il y va non seulement de la crédibilité de l’établissement public mais aussi de l’efficacité de son action.

La Commission examine l’amendement CE 8 présenté par M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Je souhaite évoquer, par cet amendement, la question fondamentale de la gouvernance de l’établissement public.

Celui-ci comprend quatre collèges, celui des élus, celui de l’État, celui des personnalités qualifiées et celui des chefs d’entreprise. En apparence, l’État n’est pas majoritaire, mais il désigne les membres de trois collèges sur quatre, ce qui va inévitablement marginaliser les élus locaux.

On peut imaginer de corriger ce déséquilibre en augmentant le nombre de représentants par collège, mais d’après ce que je sais, le poids de chaque collège serait quasiment identique.

Comment faire en sorte que les élus locaux, notamment les maires, soient pleinement parties prenantes dans la gestion de cet établissement public, qui peut également concerner des élus sans mandat local comme les députés ou les sénateurs.

Notre rapporteur a indiqué son intention de présenter un amendement destiné à garantir une meilleure association des élus locaux : j’en prends acte même si pour ma part j’aurais souhaité la constitution d’un collège consultatif.

M. François Pupponi. Je partage l’analyse de notre collègue. L’expérience des autres établissements publics d’aménagement montre que les communes et intercommunalités y ont été pleinement associées, avec profit. J’ajoute que la question soulevée ici se posera également s’agissant de la composition du conseil de surveillance de la « Société du Grand Paris ». Je ne suis pas favorable aux conseils d’administration pléthoriques, mais la représentation du bloc communal me semble indispensable.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La question posée par l’amendement est celle de la gouvernance, un débat de même nature a lieu au sujet du « Grand Londres » ainsi qu’en Allemagne. Je souscris aux propos de M. Lasbordes lorsqu’il indique que ce sont les élus qui, sur le terrain, rendent des comptes aux citoyens. Il n’est donc pas concevable que les élus locaux ne soient pas impliqués dans des choix qui les concernent au premier chef. On constate d’ailleurs que M. Christian Blanc dialogue avec ces élus, ce dialogue doit se poursuivre au sein de l’instance.

M. Pierre Lasbordes. Dans ces conditions, pourquoi ne pas donner la fonction de président-directeur général à un élu ?

M. Serge Poignant, président. Monsieur Lasbordes, j’observe que deux autres des amendements que vous avez déposés ont des objets similaires à celui que nous discutons actuellement ; s’ils ne devaient pas être adoptés, ceux-ci deviendraient sans objet, il faut consulter le rapporteur.

L’amendement CE 8 est retiré par son auteur.

La Commission est saisie de l’amendement CE 9 de M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. L’amendement que je présente à l’instant est proche du précédent. Il s’agit de créer un premier collège réunissant des représentants de l’État, de la Région Île-de-France et des départements des Yvelines et de l’Essonne. Ce qui m’importe, c’est la présence d’un collège au sein duquel les élus disposent d’une voix consultative. Si c’est là le sens de l’amendement du rapporteur que nous allons examiner, je m’y rallierai volontiers.

La Commission est saisie de l’amendement CE 26 du rapporteur.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Cet amendement prévoit que le deuxième collège du conseil d’administration comprend des représentants de l’Essonne et des Yvelines ainsi que des députés ou sénateurs élus dans les circonscriptions couvertes par ces deux départements.

Je souhaite d’ailleurs sous-amender l’amendement pour réparer l’oubli des régions dans la constitution du collège. Le deuxième collège du conseil d’administration est actuellement composé « des représentants de collectivités territoriales de la région Île-de-France et de leurs groupements ». Or cela conduit à exclure les députés élus sur le périmètre du Plateau de Saclay, intéressés au premier chef par son aménagement, au seul motif qu’ils représentent la nation et non les collectivités territoriales. Par ailleurs, la formulation actuelle permet à des élus de collectivités situées dans les départements du Val-d’Oise, de Seine-et-Marne ou de Seine-Saint-Denis par exemple de siéger dans ce collège alors qu’ils ne sont pas directement concernés par l’aménagement du Plateau de Saclay.

Cet amendement vise donc à garantir que les représentants des collectivités territoriales habilités à siéger au sein du conseil d’administration seront les premiers concernés et seront donc issus, d’une façon ou d’une autre, des départements de l’Essonne et des Yvelines, c’est-à-dire des départements inclus dans le périmètre d’aménagement du Plateau. Il est important qu’existe une relation entre la compétence territoriale de l’élu local et le périmètre au sein duquel celle-ci s’exerce.

M. François Pupponi. Je comprends la logique de cet amendement. Cependant, la situation de l’Île-de-France aujourd’hui est que bien des pôles emploi sont éloignés des pôles logement. Le plateau de Saclay concerne tous les départements franciliens.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. J’entends votre argument. Cependant, le plateau de Saclay est un projet à vocation scientifique et technologique : le maire de Cachan, par exemple, n’est pas nécessairement compétent dans ces domaines !

M. Daniel Goldberg. La question initialement posée par M. Lasbordes est de savoir qui aura la main sur Saclay : or, l’amendement du rapporteur ne règle pas tout. Il ne dit pas notamment quelles seront les communes pressenties parmi les 47 concernées. En outre, comment assurer un contrôle global de l’établissement aux élus concernés ? Enfin, la carte géographique du périmètre concerné montre des communes qui ne recoupent pas les périmètres de l’opération d’intérêt national et celui du schéma régional.

M. Pierre Lasbordes. Comment seront désignés les membres du collège ?

M. Christian Blanc, secrétaire d’État chargé du développement de la région capitale, auprès du Premier ministre. Par décret en Conseil d’État.

M. Pierre Lasbordes. Les élus locaux sont donc dépossédés !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Permettez-moi de vous rappeler que mon amendement apporte au moins un début de solution.

Le secrétaire d’État s’en remet à la sagesse de la commission : l’amendement est adopté ainsi sous-amendé.

Six amendements de portée voisine (CE 1, CE 9, CE 10, CE 16, CE 17 et CE 18) sont retirés par leur auteur, M. Pierre Lasbordes.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 22 ainsi modifié.

Article 23

Direction générale de l’« établissement public de Paris – Saclay »

Cet article dispose que la direction générale de l’établissement public est confiée au président du conseil d’administration qui, à cet effet, porte le titre de président directeur général.

Il est prévu que celui-ci soit nommé par décret du Président de la République parmi les membres du conseil d’administration. Cette disposition peut étonner. En effet, selon que l’on se réfère aux établissements publics créés par une loi ou par un décret, les options diffèrent. Le président du conseil d’administration est parfois nommé par le conseil lui-même, en son sein27 ; il arrive également qu’il soit nommé par décret du Président de la République28 et, solution intermédiaire, qu’il soit « nommé parmi les membres du conseil, sur proposition de celui-ci, par décret »29. Néanmoins, quelle que soit la solution retenue, il semblerait que, d’une façon générale, l’avis du conseil d’administration soit toujours requis pour la nomination de son président lorsqu’il s’agit d’une nouvelle catégorie d’établissement public. On peut citer les exemples du président des conseils d’administration de « Réseau ferré de France », des établissements de coopération culturelle, de l’établissement public de sécurité ferroviaire ou de l’ÉPAD. Le projet de loi a pourtant choisi l’option de recourir à la nomination par décret présidentiel. Cette option peut se comprendre : l’établissement public de Paris – Saclay étant un établissement public de l’État (ainsi que le spécifie le premier alinéa de l’article 20 du projet de loi)30 et, dans le même temps, l’État n’ayant pas la majorité des voix au conseil d’administration, la contrepartie consiste à ce que le président directeur général de l’établissement soit nommé par décret présidentiel. De plus, et contrairement à la situation existant dans les établissements publics d’aménagement où coexistent un président (qui est élu mais qui ne bénéficie que de peu de compétences) et un directeur général (qui dispose de la réalité des pouvoirs), l’article 23 a souhaité ne pas multiplier les hiérarchies qui n’aboutiraient qu’à rendre plus complexe la gouvernance de l’établissement. Néanmoins, ces arguments n’emportent pas totalement la conviction de votre rapporteur qui proposera un amendement visant à permettre aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat d’auditionner le candidat pressenti à la présidence de l’établissement public préalablement à sa nomination. L’avis rendu ne lierait pas le Président de la République qui, comme le propose actuellement le projet de loi, demeurerait l’autorité compétente pour procéder à ladite nomination.

L’amendement CE 15 de M. Pierre Lasbordes ayant pour objet d’établir une distinction entre le poste de président-directeur général et le poste de directeur général de l’établissement est retiré par son auteur.

Sur avis favorable du secrétaire d’État, la commission adopte l’amendement CE 28 du rapporteur pour avis prévoyant que le président-directeur général est nommé après avoir été entendu par les commissions compétentes des deux assemblées parlementaires.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de l’article 23 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 23

Compétences du président-directeur général de l’établissement public

La Commission examine l’amendement CE 27 présenté par le rapporteur pour avis portant article additionnel et déterminant les principales compétences qui incomberont au futur président-directeur général de l’établissement.

M. Daniel Goldberg. Cet amendement est utile même si la terminologie de « président-directeur général » est curieuse. Pourquoi ne pas plutôt préciser les compétences du conseil d’administration ?

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. L’article 21 apporte ces précisions, mon amendement concerne seulement le président-directeur général.

La Commission adopte l’amendement.

Article 24

Ressources de l’« établissement public de Paris – Saclay »

L’article 24 énonce classiquement les ressources dont le futur établissement public est appelé à bénéficier. Il s’agit :

– des dotations, subventions, avances, fonds de concours ou participations apportées par l’Etat, l’Union européenne, les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics ou sociétés nationales, ainsi que toutes personnes publiques ou privées françaises ou étrangères ;

Cette disposition revêt un caractère classique ; on remarquera, à cet égard, qu’elle figure également au premier rang des ressources dont bénéficie l’établissement public « Société du grand Paris », créé par l’article 7 du présent projet de loi. Bien qu’on ne puisse encore présumer de leur futur volume, il sera intéressant d’étudier l’évolution des montants en provenance des fonds européens compte tenu de l’encouragement manifesté par l’Union à la constitution de « clusters » conformément d’ailleurs aux conclusions de la Présidence française de l’Union européenne en décembre 2008.

– le produit des redevances pour services rendus ;

– le produit de la cession des biens meubles et immeubles ;

À terme, il devrait s’agir là des ressources principales de l’établissement public dans la mesure où elles correspondent à la rémunération qu’il percevra au titre de son travail d’aménageur. Il s’agira par exemple du produit de la vente de charges foncières et de terrains mis en valeur.

– le produit des emprunts ;

– les dons et legs ;

– tous autres concours financiers.

La multiplicité des ressources potentielles ne doit pas masquer pour autant l’évolution de leur structure au fil du temps. En effet, dans un premier temps, il est vraisemblable que les ressources de l’établissement public seront dans leur grande majorité constituées par les dotations publiques : en raison de sa jeunesse et faute de ressources propres développées, cet apport extérieur permettra ainsi à l’établissement public de faire face aux nombreuses dépenses qui lui incomberont en matière d’infrastructures et d’acquisitions foncières. Ce n’est que dans un second temps, une fois adopté son rythme de croisière, que l’établissement public pourra davantage compter sur des ressources d’une autre nature, soit qu’elles demeurent publiques (mais elles seront délivrées par des collectivités territoriales ou d’autres personnes publiques), soit qu’elles seront de nature privée.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Article 25

Périmètre du domaine foncier de l’« établissement public de Paris – Saclay »

Cette disposition est, elle aussi, relativement classique permettant à l’État de transférer à l’établissement public de Paris – Saclay une partie de ses biens immobiliers, à l’exclusion des forêts domaniales. La seule limite imposée consiste à vérifier que les biens en question sont inclus dans le périmètre d’intervention de l’établissement public tel qu’il figure actuellement à l’annexe A du projet de loi, sous réserve de modifications ultérieures.

Le second alinéa concerne plus spécifiquement l’Université de Paris XI. En effet, l’article L. 719-14 du code de l’éducation31 permet à l’État de « transférer aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel qui en font la demande la pleine propriété des biens mobiliers et immobiliers appartenant à l’État qui leur sont affectés ou sont mis à leur disposition ». Ce transfert, qui s’exerce à titre gratuit, permet ainsi aux établissements d’enseignement supérieur de devenir propriétaires et gestionnaires de leur domaine foncier, élément fondamental de leur autonomie de fonctionnement. En l’espèce, ce second alinéa vise simplement à étendre cette disposition à l’Université d’Orsay (Paris XI) alors que le domaine considéré appartient en l’occurrence non à l’État mais à l’établissement public de Paris – Saclay.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Article 26

(annexe III de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation
du secteur public)

Dérogation apportée à l’application de la loi relative à la démocratisation
du secteur public

Compte tenu des spécificités de l’établissement public de Paris – Saclay, cet article est à la fois logique et inévitable.

La loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public comporte trois annexes. L’annexe III énumère un certain nombre d’établissements et d’entreprises publics (parmi lesquels on peut citer la Banque de France, le Théâtre national de Chaillot, le Théâtre national de l’Odéon et la Comédie française) qui sont exclus du champ d’application de l’ensemble des dispositions du titre II de ladite loi, titre relatif à « la démocratisation des conseils d’administration ou de surveillance »32. Une des principales caractéristiques de ces établissements consiste à être gérés par un conseil d’administration ou de surveillance qui comporte, outre des représentants de l’État et des personnalités qualifiées (choisies eu égard à leurs connaissances techniques ou scientifiques notamment), des « représentants des salariés ».

Or, ainsi que le mentionne explicitement l’article 22 du présent projet de loi, l’établissement public de Paris – Saclay ne comporte pas de représentant des salariés : il est donc logique et inévitable d’exclure de manière explicite l’application de ce titre. Pour autant, et le projet de loi s’en garde bien, il n’est pas pour autant question d’exclure l’établissement public de Paris – Saclay de l’application des autres dispositions de la loi précitée.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Article 27

Précisions relatives aux modalités de fonctionnement
de l’« établissement public de Paris – Saclay »

Véritable « disposition balai », cet article renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de déterminer les règles d’application du premier chapitre du Titre V relatif au « projet de création d’un pôle scientifique et technologique sur le Plateau de Saclay ». Il lui revient notamment de préciser les règles d’organisation et de fonctionnement de l’établissement (déterminées dans ses grandes lignes par l’article 22 du projet de loi), les modalités d’exercice de sa tutelle et du contrôle de l’État (y compris sur ses filiales), les conditions dans lesquelles le Commissaire du Gouvernement peut s’opposer aux délibérations du conseil d’administration et, enfin, son régime financier et comptable.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

CHAPITRE II

DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES RELATIVES À LA MISE EN œUVRE DU PROJET DE PÔLE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE SUR LE PLATEAU DE SACLAY

Article 28

(Section III [nouvelle] du code de l’urbanisme)

Instauration d’une zone de protection naturelle, agricole et forestière sur le Plateau de Saclay

D’emblée, le Gouvernement a décidé d’inscrire ce projet de loi dans une perspective de développement durable : la préservation d’une zone dédiée participe pleinement de cette volonté.

Cet article introduit donc, dans le premier chapitre (« Dispositions particulières à Paris et à la région d’Île-de-France ») du Titre IV du Livre Ier du code de l’urbanisme (« Règles générales d’aménagement et d’urbanisme »), une section III dénommée « Zone de protection naturelle, agricole et forestière du Plateau de Saclay ».

Dans son principe général, cette idée est quelque peu ancienne. Ainsi, le SDRIF (schéma directeur de la région Île-de-France) pour l’année 1994 disposait déjà qu’« il est indispensable de les [les espaces boisés d’Île-de-France] préserver de l’urbanisation en assurant leur intégrité, notamment en veillant au respect de leurs lisières »33. Par ailleurs, il indiquait qu’il était essentiel de « garantir autant que possible le maintien et le développement d’espaces naturels encore existants dans la Ceinture verte [et que cela passait notamment] par le maintien d’une agriculture périurbaine aux portes de l’agglomération (entre 10 et 30 kilomètres autour de Paris) qui est essentiel pour offrir des espaces de respiration aux habitants et qui pourraient être le lieu d’un développement du maraîchage et de l’horticulture »34. Quant au SDRIF pour l’année 200835, il précise que « le plateau de Saclay est également stratégique pour le maintien d’une agriculture diversifiée (agriculture traditionnelle, de proximité, périurbaine), compte tenu de la qualité exceptionnelle de ses terres », allant même jusqu’à préconiser « la préservation d’au moins 2 300 ha d’espace agricole sur le plateau »36.

Tout en reprenant cette philosophie générale, le présent projet de loi a souhaité, dans son article 28, faire preuve de davantage de pragmatisme.

Tout d’abord, il fait allusion à la préservation d’une « zone de protection naturelle, agricole et forestière » : la zone dédiée sur le plateau de Saclay ne reçoit donc aucune destination spécifique, étant entendu qu’il est tout à fait envisageable de faire cohabiter des zones naturelles et des zones cultivées. Cette alternative permet en premier lieu de tenir compte des zones et espaces qui seraient couverts par une réglementation spécifique telle que la loi sur la protection des monuments naturels ou la loi de protection des sites37, prenant ainsi en considération la situation géographique privilégiée du Plateau, bordé par l’Yvette au sud, la Bièvre au nord et la Mérantaise à l’ouest… En second lieu, le fait de ne préciser aucune destination particulière pour cette zone protégée permet de faire face à
l’avenir : compte tenu de l’évolution prévisible de la population mondiale (plus
de 9 milliards d’individus sont attendus sur notre planète à l’horizon 2050), des besoins alimentaires afférents et des changements climatiques attendus, nul ne peut dire aujourd’hui si l’on aura besoin à terme de terres agricoles ou de surfaces boisées. Le projet de loi veille ainsi à préserver les deux options : il s’agit là incontestablement d’une mesure de sagesse.

Ensuite, cet article fait preuve de pragmatisme dans la méthode employée pour déterminer la surface de la zone à préserver. Alors qu’il aurait pu choisir la voie de la facilité, le Secrétariat d’État chargé du développement de la région capitale a préféré n’inscrire dans la loi aucune surface précise qu’il conviendrait de protéger. Hormis le fait qu’il est difficile de délimiter à ce stade la surface considérée, le projet de loi a surtout souhaité donner la priorité à la consultation des populations locales : à cet effet, il est prévu que la zone soit « délimitée après enquête publique conduite dans les conditions définies par le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement » (alinéa 5). De ce fait, inscrire dans la loi une superficie donnée reviendrait à faire fi de l’avis des habitants, lesquels pourraient décider de préserver une surface différente. Une fois la zone précisément délimitée (par décret en Conseil d’État), les communes intéressées disposeront d’un délai de six mois pour rendre compatible leur plan local d’urbanisme.

Enfin, il convient de souligner que cette zone dédiée est destinée à être gérée non seulement par les collectivités territoriales mais aussi par l’établissement public de Paris – Saclay conformément aux orientations générales du projet de loi qui prend pleinement en compte les contraintes liées au développement durable. En outre, il est spécifié que, lorsqu’il concerne la gestion forestière, le programme d’action conclu entre l’établissement public et les collectivités intéressées est établi en accord avec l’Office national des forêts38 et le Centre régional de la propriété forestière39, qui représente les propriétaires privés et leurs intérêts (alinéa 13).

M. Pierre Lasbordes retire un amendement CE 4 tendant à maintenir 2 300 hectares de terres dévolues à l’activité agricole au sein de la « zone de protection naturelle, agricole et forestière » prévue par le présent article.

Puis il retire six amendements de portée voisine (amendements CE 5, CE 7, CE 13, CE 14, CE 19 et CE 20).

Sur l’avis favorable du secrétaire d’État, la Commission adopte un amendement de précision n° 29 ainsi qu’un amendement rédactionnel CE 30 tous deux présentés par le rapporteur pour avis.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article ainsi modifié.

Article 29

(article 1-5 [nouveau] de l’ordonnance relative à l'organisation des transports de voyageurs en Île-de-France)

Constitution et modalités de fonctionnement du syndicat mixte de transports sur le Plateau de Saclay

Cet article vise à la réalisation d’un syndicat mixte de transports entre l’établissement public de Paris - Saclay et les communes ou leurs groupements en matière de transports, la liste des communes incluses dans le périmètre d’intervention du syndicat figurant à l’annexe B du présent projet de loi.

Dérogeant à l’article 1er de l’ordonnance créant le Syndicat des transports d’Île-de-France40, l’article 29 insiste à sa façon sur l’aspect multidimensionnel de l’aménagement du Plateau de Saclay, qui est loin de se réduire à la simple réalisation d’un « cluster » scientifique et technologique. Géré par un comité syndical représentant l’ensemble des personnes publiques concernées (départements de l’Essonne et des Yvelines, communes, établissements publics territoriaux…) au sein duquel l’établissement public de Paris – Saclay est assuré de disposer de 40 % des voix (alinéa 5), les collectivités territoriales étant représentées au prorata de leur population, ce syndicat mixte est dirigé par un président élu parmi les membres du conseil syndical à la majorité qualifiée des deux tiers. Quant aux modalités d’organisation et de fonctionnement, elles sont renvoyées à un décret en Conseil d’État, ainsi que le prévoit l’alinéa 21 du présent article.

La tâche principale de ce syndicat mixte consiste naturellement à élaborer un plan local de transport qui permette de desservir efficacement les différents établissements situés sur le plateau de Saclay, qu’il s’agisse des établissements d’enseignement supérieur, des entreprises ou des organismes de recherche. Sur le principe, ce système ne peut que susciter l’adhésion unanime ; le SDRIF établi pour l’année 2008 indiquait également que l’excellence du pôle que l’on souhaitait constituer sur le Plateau de Saclay nécessitait « de tenir compte également, dans l’organisation de ces réseaux, des capacités, à terme, de desserte en transports collectifs destinés à maximiser les échanges, y compris avec les grands pôles de développement économique, ainsi que les liaisons avec les principaux carrefours d’échanges (aéroports, gares d’interconnexion) et les centres de congrès »41. Plus que jamais, et comme le projet de loi le souhaite dans son Titre III relatif à « la réalisation et gestion du réseau de transport public du Grand Paris », la circulation des idées et des potentiels présuppose la circulation efficace des individus !

L’élaboration de ce plan ainsi que sa mise en œuvre reposent avant tout sur la volonté de faire collaborer ensemble le syndicat mixte et le Syndicat des transports d’Île-de-France. Loin de vouloir les opposer ou les faire se concurrencer, l’article 29 du projet de loi vise au contraire à permettre au plan local propre au Plateau de Saclay de s’appliquer en accord avec les grandes orientations définies au niveau régional. Ainsi, une fois que le syndicat mixte a établi son plan local d’urbanisme, il est prévu que celui-ci le transmette ensuite au Syndicat des transports d’Île-de-France afin que les deux parties puissent, dans un délai de six mois à compter de ladite transmission, définir ensemble les conditions d’application du plan local. Soit les deux parties parviennent à un accord et, dans ce cas, le STIF demeure, y compris sur le périmètre du Plateau de Saclay, l’autorité organisatrice des services de transport. Soit elles ne parviennent pas à s’entendre et, dans ce cas seulement, le syndicat mixte devient autorité organisatrice des services de transport. S’inscrivant dans un mouvement plus général inauguré par la loi d’orientation des transports intérieurs42, le projet de loi confie ensuite à l’autorité organisatrice des services de transport, le soin de déterminer quels seront les exploitants, selon quelles modalités ils devront travailler et quelles seront les conditions générales d’exploitation des services ainsi créés.

De cette volonté de travailler en commun résulte également la disposition selon laquelle, à compter de l’expiration du délai de six mois au terme duquel doivent être déterminées les conditions d’application du plan local de transport par le STIF, court un nouveau délai de six mois que les deux parties doivent mettre à profit pour conclure une convention dont l’objet principal consiste à déterminer clairement les conditions de participation de chacune des parties au financement des services appelés à être gérés par l’autorité organisatrice de transport. À défaut, c’est au préfet de région qu’il revient de fixer ces conditions de participation.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification, puis elle rend un avis favorable sur l’ensemble des articles 18 à 29 du projet de loi.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CE 1 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Après les mots : « chef d’entreprise »,

rédiger ainsi la fin de l’alinéa 5 :

« , de cadre dirigeant d’entreprise ou de responsable d’exploitation agricole. »

Amendement CE 2 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 21

Compéter l’alinéa 1er par la phrase suivante :

« Il assure les conditions du maintien de l’activité agricole ainsi que la protection et la pérennité du patrimoine hydraulique. ».

Amendement CE 3 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 21

Compléter l’alinéa 11 par les mots suivants : « et du patrimoine hydraulique ».

Amendement CE 4 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter la première phrase de l'alinéa 4 par les mots suivants :

« , dont une zone de 2 300 hectares dédiée exclusivement à l’activité agricole. »

Amendement CE 5 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter l’alinéa 5 par la phrase suivante :

« A l’intérieur de cette zone, la surface agricole utile sera d’au moins 2 300 hectares, d’un seul tenant, sur les communes dont la liste figure à l’annexe A. ».

Amendement CE 6 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 21

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Les missions d’aménagement de l’établissement public seront limitées à une durée de 15 ans, renouvelable. ».

Amendement CE 7 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter l’alinéa 11 par la phrase suivante :

« Les associations représentatives agréées pour la protection de l’environnement sont consultées pour cette définition. ».

Amendement CE 8 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

À l’alinéa 1er, substituer au mot : « quatre », le mot : « six ».

Amendement CE 9 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« 5° Le collège des personnalités représentatives du mouvement associatif, siégeant à titre consultatif. ».

Amendement CE 10 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« 6° Le collège des parlementaires élus sur le territoire relevant de l’établissement public et ne figurant pas dans les collèges précédents. Ces parlementaires siègent à titre consultatif. ».

Amendement CE 11 présenté par M. Pierre Lasbordes et M. Michel Raison

Titre V

Chapitre II

Rédiger ainsi l’intitulé de ce chapitre :

« Dispositions spécifiques relatives à la mise en œuvre du projet de pôle scientifique, technologique et agricole sur le Plateau de Saclay »

Amendement CE 12 présenté par M. Pierre Lasbordes

Titre V

Rédiger ainsi l’intitulé de ce titre :

« Dispositions relatives au projet de création d’un pole scientifique, technologique et agricole sur le plateau de Saclay ».

Amendement CE 13 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter l’alinéa 11 par la phrase suivante :

« Aucune réduction de cette zone ne peut être autorisée. ».

Amendement CE 14 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter l’alinéa 10 par la phrase suivante :

« Ces changements de mode d’occupation du sol doivent néanmoins permettre de conserver une superficie d’au moins 2 300 hectares dédiée à l’activité agricole. ».

Amendement CE 15 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 23

Rédiger ainsi cet article :

« Le Président du Conseil d’administration est élu parmi les membres du deuxième collège. Le directeur général de l’établissement est nommé par décret, parmi les membres du conseil d’administration. ».

Amendement CE 16 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Compléter l’alinéa 2 par les mots suivants :

«  , de la Région Île-de-France, des Départements de l’Essonne et des Yvelines ; »

Amendement CE 17 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Après le mot : « représentants », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 3 : « des communes mentionnées à l’annexe A et de leurs groupements ; ».

Amendement CE 18 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 22

Après le mot : « disposent », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 6 : « chacun d’au moins un tiers des sièges au sein du conseil d’administration ».

Amendement CE 19 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

À la dernière phrase de l’alinéa 4, après le mot : « délimitée », insérer les mots : « dans un délai de 12 mois à compter de la promulgation de la loi relative au Grand Paris, ».

Amendement CE 20 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 28

Compléter l’alinéa 4 par la phrase suivante :

« Cette zone comporte au moins 50 % d’espaces naturels dont au moins 2 300 hectares de terres agricoles. ».

Amendement CE 21 présenté par M. Pierre Lasbordes

Article 18

I. - À l’alinéa 1er, après les mots : « Grand Paris », supprimer les mots : « , ou, pour ce qui concerne les communes situées dans le périmètre de l’établissement public Paris-Saclay prévu au titre V, pendant une période de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi ».

II. - Après l’alinéa 11, insérer l’alinéa suivant :

« VI. – Pour ce qui concerne les communes situées dans le périmètre de l’établissement public Paris-Saclay prévu au titre V, un contrat de développement territorial peut être conclu dans un délai de 18 mois à compter de la publication de la présente loi. Il est établi dans les formes prévues ci-dessus mais associe en outre les départements de l’Essonne et des Yvelines, ainsi que la Région Île-de-France. Il doit notamment préciser la part des équipements publics et infrastructures revenant à l’État, à l’Établissement Public Paris-Saclay, à la Région, aux Départements de l’Essonne et des Yvelines, aux Communes et à leurs établissements publics de coopération intercommunale d’autre part, de même que leur financement et leur échéancier. Ce contrat est révisable tous les 5 ans. »

III. – Au dernier alinéa, substituer en conséquence à la référence : « VI », la référence « VII ».

Amendement CE 22 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 18

Après l’alinéa 2, insérer l’alinéa suivant :

« Toute commune ou établissement public de coopération intercommunale, sous réserve qu’il soit attenant à un ensemble de communes tel que défini par le précédent alinéa, peut, sans préjudice des délais mentionnés à l’alinéa premier, adhérer à un contrat de développement territorial existant. »

Amendement CE 26 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 22

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« 2° Le collège des représentants de l’Essonne et des Yvelines, qu’ils soient élus des communes, de leurs groupements ou des départements eux-mêmes. Ce collège peut également comprendre des députés ou des sénateurs élus dans les circonscriptions couvertes par ces deux départements ainsi qu’un représentant de la région Île-de-France. La perte d’un mandat électoral entraîne la démission d’office du conseil d’administration ; il est alors pourvu au remplacement de l’élu démissionnaire dans les meilleurs délais ; ».

Amendement CE 27 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article additionnel après l’article 23

Insérer l’article suivant :

Le président-directeur général dirige l’action de l’établissement public. Ordonnateur des dépenses et des recettes, il représente l’établissement en justice et dans tous les actes de la vie civile. Il passe des contrats et signe tous les actes pris au nom de l’établissement. Il prépare et exécute les décisions du conseil d’administration. Il recrute le personnel et a autorité sur lui. Il peut déléguer sa signature.

Amendement CE 28 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 23

A la fin de la deuxième phrase, insérer les mots :

« , après avoir été auditionné par les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. »

Amendement CE 29 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article 28

A l’alinéa 8, après le mot : « décret », Insérer les mots : « en Conseil d’État visé à l’alinéa 4 du présent article ».

Amendement CE 30 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

A l’alinéa 12, substituer au mot : « relation », le mot : « concertation ».

Amendement CE 31 présenté par M. Patrick Ollier, rapporteur au nom de la commission des affaires économiques

Article additionnel après l’article 19

Insérer le titre et l’article suivant :

Titre IV bis : Dispositions communes aux pôles scientifiques et technologiques du « Grand Paris »

Dans le cadre d’une directive globale d’aménagement du pôle, l’État détermine, en concertation avec les collectivités territoriales intéressées, le périmètre d’action de l’établissement public chargé de la gestion d’un pôle scientifique et technologique ainsi que les objectifs assignés à ce dernier. Sur le fondement des principes ainsi établis, l’État et les collectivités concernées signent un contrat que l’établissement public est ensuite chargé de mettre en œuvre.

© Assemblée nationale