N° 2078 - Avis de M. Olivier Carré sur la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (1890)




N
° 2078

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 novembre 2009

AVIS

DÉPOSÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 1890) de simplification et d’amélioration de la qualité du droit,

PAR M. Olivier CARRÉ,

Député.

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Voir le numéro : 1890

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 7

I.– DISCUSSION GÉNÉRALE 7

II.– EXAMEN DES ARTICLES 11

SECTION 6 : DISPOSITIONS DE SIMPLIFICATION EN MATIÈRE FISCALE 11

ARTICLE 55 : SIMPLIFICATION DE LA TVA IMMOBILIÈRE 11

I.– LES CONTRADICTIONS ENTRE LE DROIT COMMUNAUTAIRE ET LE DROIT NATIONAL EN MATIÈRE DE FISCALITÉ IMMOBILIÈRE 11

A.– L’EUROPE GÉNÉRALISE UNE INVENTION FISCALE FRANÇAISE : LA TVA 11

B.– L’ÉVOLUTION DU DROIT FISCAL FRANÇAIS EN MATIÈRE IMMOBILIÈRE 12

C.– LES CONTRADICTIONS ENTRE LE DROIT NATIONAL ET LE DROIT EUROPÉEN 12

D.– LA NON-CONFORMITÉ DU DROIT FRANÇAIS SOURCE D’ÉVASION FISCALE 13

II.– LA MISE EN CONFORMITÉ DE NOTRE DROIT NATIONAL AVEC LA DIRECTIVE N° 112 DU 28 NOVEMBRE 2006 14

A.– LA MODIFICATION DE LA DÉFINITION DES TERRAINS À BÂTIR 14

B.– L’INVERSION DU REDEVABLE 15

C.– LA FIN DE L’EXONÉRATION DE TVA POUR LES TERRAINS À BÂTIR 16

D.– LA MODIFICATION DU RÉGIME DES MARCHANDS DE BIENS 17

E.– L’EXIGIBILITÉ DE LA TAXE DANS LE CAS D’UNE VENTE EN ÉTAT FUTUR D’ACHÈVEMENT 18

III.– QUELQUES MESURES DE SIMPLIFICATION DU DROIT 19

A.– LA GÉNÉRALISATION DE LA LIVRAISON À SOI-MÊME 19

B.– L’EXTENSION DU RÉGIME DE L’ARTICLE 1115 DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS 20

C.– LA SUPPRESSION DE QUELQUES DISPOSITIONS OBSOLÈTES 20

ARTICLE 56 : OPTION POUR LA TAXATION À LA TVA DES ENTREPRISES QUI RÉALISENT DES OPÉRATIONS BANCAIRES OU FINANCIÈRES 27

1.– La rigidité du système actuel de l’option pour la taxation 27

2.– La simplification proposée 28

ARTICLE 57 : SIMPLIFICATION DU RÉGIME DES ENTREPÔTS FISCAUX 30

I.– LE RÉGIME ACTUEL DES ENTREPÔTS FISCAUX 30

A.– LES GRANDS TRAITS DU RÉGIME 30

1.– Aperçu des opérations réalisables en suspension de TVA 30

2.– Principales conditions d’octroi des régimes d’entrepôt fiscal concernés par la réforme 31

B.– PRINCIPES DE FONCTIONNEMENT DU RÉGIME 31

1.– Dispositions générales 31

2.– Dispositions particulières aux régimes concernés par la réforme 32

3.– La cession et la circulation physique de biens placés en entrepôt fiscal 33

II.– LA SIMPLIFICATION DU RÉGIME 34

A.– L’INTÉRÊT D’UNE RÉFORME 34

B.– LES MODIFICATIONS PROPOSÉES 36

III.– ENTRÉE EN VIGUEUR 38

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 41

INTRODUCTION

La proposition de loi n° 1890 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit est la troisième déposée depuis le début de la législature. La présente proposition, longue de 136 pages et 150 articles, comporte notamment des dispositions relatives aux fichiers, des articles relatifs aux collectivités territoriales, à la protection de l’identité, aux groupements d’intérêt public, à l’urbanisme…

Elle inclut enfin trois articles fiscaux (55 à 57). La teneur de ces trois articles dont le premier réécrit ou modifie 18 articles du code général des impôts en 13 pages et 137 alinéas, rendait nécessaire un avis de la commission des Finances, d’autant que les modifications proposées vont au-delà d’une simplification du droit existant.

Il en est particulièrement ainsi de l’article 55, qui, comme le reconnaît le ministère de l’Économie dans l’étude d’impact, vise à mettre le droit français en conformité avec les dispositions européennes en modifiant les points suivants : le régime d’exonération fiscale des terrains à bâtir, l’inversion du redevable en matière de TVA immobilière, le régime des marchands de bien, le paiement de la TVA dans le cas des ventes en état futur d’achèvement.

Il apporte également modification du droit interne, en matière de définition de la notion de « terrain à bâtir » par exemple. Ces modifications, qui répondent à une réelle nécessité analysée ci-après, sont toutefois sans incidence sur l’économie générale du dispositif fiscal français en la matière.

L’article 56 simplifie la renonciation à l’option de TVA que peut choisir une entreprise d’investissement pour une partie de ses activités.

Enfin, l’article 57 transforme trois régimes d’entrepôts fiscaux –l’entrepôt national d’exportation, l’entrepôt national d’importation et le perfectionnement actif national- en un seul : le régime fiscal national suspensif.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.– DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 17 novembre 2009, la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire examine pour avis, sur le rapport de M. Olivier Carré, les articles 55, 56 et 57 de la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (n° 1890).

M. le président Didier Migaud. M. Jean-Luc Warsmann a déposé une nouvelle proposition de loi de simplification du droit – la troisième de cette législature –, dont les 150 articles traitent de sujets des plus variés. La Commission des lois en est, de façon tout à fait légitime, saisie au fond. Pour sa part, la Commission des finances a jugé indispensable de se saisir pour avis des articles fiscaux, au nombre de trois – les articles 55 à 57 –, d’autant qu’une simplification peut parfois recouvrir une modification du droit. Mais notre rapporteur pour avis va nous éclairer à cet égard.

M. Olivier Carré, rapporteur pour avis. La simplification est en effet un exercice délicat, et d’autres articles de cette proposition auraient peut-être mérité notre attention, mais je m’en suis bien évidemment tenu au cadre de notre saisine.

Le premier des trois articles que nous avons à examiner, l’article 55, réclame d’autant plus notre vigilance que c’est de surcroît un article complexe – il ne compte pas moins de 137 alinéas – qui touche à un sujet important pour notre économie : la TVA immobilière.

Les deux autres articles sont réellement des articles de simplification. L’article 56 vise à assouplir, en faveur des entreprises d’investissement, les modalités de l’option pour la taxation sur la valeur ajoutée et, surtout, de la dénonciation de cette option. Quant à l’article 57, il réduit de trois à une le nombre des procédures applicables aux entreprises ayant des activités de stockage ou de transformation en vue de l’exportation ou de l’importation. Cette simplification du régime dit des « entrepôts fiscaux » – une particularité au sein du droit communautaire – sera neutre du point de vue fiscal, mais sans aucun doute économiquement bénéfique.

J’insisterai donc sur l’article 55, le plus « consistant », tout en déplorant que nous ayons disposé de peu de temps pour l’examiner – au surplus, je viens d’être informé qu’il sera modifié par un amendement visant à prendre en compte les remarques du Conseil d’État, dont je n’ai pu prendre connaissance. La Commission des lois n’examinera cet amendement que demain et nous aurons donc à nous prononcer sur le texte en l’état, mais l’économie de celui-ci ne devrait pas être substantiellement modifiée.

En quoi consiste la simplification en l’espèce ? Dans le régime traditionnel de TVA, c’est le producteur de la valeur ajoutée finale qui reverse la TVA lorsqu’il vend son bien, à charge pour lui de déduire éventuellement la part afférente aux différentes prestations et fournitures auxquelles il a recouru. Dans le régime de la TVA immobilière, pour des raisons historiques, c’est dans un certain nombre de cas l’acquéreur du bien qui procède à ce reversement. Cette particularité est à peu près neutre du point de vue économique : que ce soit l’acheteur qui acquitte la TVA après avoir acheté à 100, ou qu’il achète à 119,6 et que ce soit le vendeur qui reverse 19,6, la différence n’est pas grande en termes de flux. Il n’en va pas de même si l’on considère la chaîne de la production de valeur ajoutée et de la récupération de TVA : l’État peut être exposé à devoir rembourser la TVA au producteur d’un bien immobilier sans être assuré que l’acquéreur de ce bien a acquitté cette TVA. C’est d’ailleurs afin d’éviter de telles entorses au principe même de la TVA que la directive est intervenue pour réglementer l’ensemble du processus au niveau communautaire ; il est apparu que la France ne s’écartait de ces règles que sur ce seul point, comme me l’a confirmé la Direction de la législation fiscale, mais cette anomalie, signalée par la Communauté, a entraîné l’ouverture d’un contentieux et il était donc urgent de nous mettre en conformité avec cette directive.

Cependant, cette mise en conformité n’est pas, en l’occurrence, le seul élément qui doive retenir notre attention. Ce qu’il faut aussi considérer, ce sont les « biais » dont souffre notre législation fiscale en raison de la sédimentation des dispositions au fil du temps. L’articulation entre TVA et droits de mutation ou entre immobilier et foncier pose ainsi des problèmes complexes. Si l’on construit sur un champ de betteraves, il y a sans aucun doute création de valeur, mais y a-t-il valeur ajoutée au sens économique, et si oui, faut-il la fiscaliser sachant qu’une plus-value l’est déjà ? Il s’agit là de questions classiques en matière de fiscalité immobilière, mais l’introduction de la TVA nous oblige à mettre de l’ordre dans ce domaine, et à simplifier. La production immobilière est une production de biens comme une autre, dans un champ marchand soumis à fiscalisation, avec une chaîne de production de la valeur ajoutée qui va du terrain à construire – l’une des novations du texte réside d’ailleurs dans la définition du terrain à bâtir – à l’acquisition du bien. C’est tout au long de cette chaîne que sont opérées des simplifications. Actuellement, il existe trois régimes distincts, applicables respectivement aux promoteurs, aux marchands de biens et aux acquéreurs, particuliers ou mutuelles qui font construire – ou qui construisent eux-mêmes : c’est le cas par exemple de tout le secteur social, dont un « cœur d’activité » consiste précisément à produire pour lui-même. Désormais, il n’existera plus que deux régimes, selon qu’on est ou non assujetti à la TVA, ce qui aura pour effet de supprimer l’anomalie que je mentionnais à l’instant.

L’histoire complexe de la fiscalité immobilière a souvent conduit à des confusions, en raison notamment d’une double taxation, la TVA s’étant à un moment substituée en partie aux droits de mutation lorsque ceux-ci ont été abaissés. C’est toute cette histoire qui est balayée et cette législation nettoyée : d’après le tableau comparatif que nous avons établi, nous passerions d’une trentaine de cas de figure à seulement six ou sept. Non seulement nous ferons ainsi l’économie de contentieux communautaires, mais nous éviterons l’évasion fiscale due à la séparation étanche entre producteur et acquéreur, chacun pouvant se prévaloir d’une législation, dans un cas pour exercer un droit à déduction d’une taxe qu’il n’a pas collectée, dans l’autre pour ne pas l’acquitter.

Nous nous sommes assurés auprès de Bercy que toutes les professions concernées avaient été consultées, ce que je n’ai pu faire moi-même, faute de disposer du temps nécessaire pour organiser des auditions. Nous avons également vérifié qu’il n’y avait pas de biais, s’agissant de la récupération de TVA, par rapport à la législation actuelle : ce point est particulièrement important pour les organismes HLM qui sont assujettis à la fois à la taxe sur les salaires et, pour la partie « livraison à soi-même », à la TVA, ainsi que pour les opérations d’aménagement dans la mesure où, le terrain à bâtir étant désormais défini – de façon à mon avis pertinente – comme terrain pour lequel des droits à construire sont ouverts dans un plan d’occupation des sols, se posait la question de savoir où faire commencer la chaîne de la valeur ajoutée – ce sera à la viabilisation : auparavant, il y a une plus-value, mais non une valeur ajoutée.

L’article 56 est plus simple : les entreprises d’investissement peuvent opter entre la taxe sur les salaires et la TVA pour un certain nombre de leurs activités, et renoncer à la TVA si elles le jugent plus avantageux. Mais cette renonciation les obligeait à un véritable parcours du combattant, et c’est à quoi remédie cet article, sans aucune incidence sur les comptes de l’État.

L’article 57 traite des entrepôts fiscaux, c’est-à-dire des entrepôts qui relèvent de la Direction générale des douanes et droits indirects, où se déroulent des opérations économiques d’importation, d’exportation ou de transformation, qui appelaient toute une série de déclarations dès qu’on passait d’un lieu à un autre. Désormais, plusieurs lieux pourront être considérés comme un entrepôt unique dès lors qu’ils figurent sur une même déclaration d’un acteur économique et que l’administration fiscale a tous les moyens de procéder à des contrôles.

Il faut aujourd’hui remplir une déclaration dès qu’un bien transite d’un endroit à un autre. On perd donc un temps considérable en paperasserie. Pour y remédier, cette proposition de loi tend à placer dans une même enveloppe fiscale les différentes opérations réalisées pourvu qu’elles soient bien localisées et bien identifiées. L’administration fiscale et l’administration des douanes disposeront ainsi d’éléments tangibles pour effectuer des contrôles sur les opérations de transit et de transformation à l’intérieur des nouveaux « abris » fiscaux.

Il s’agit donc bien d’une mesure de simplification : dans le cadre du nouveau « régime national fiscal suspensif », il n’existera plus qu’un seul type d’entrepôt fiscal, lequel remplacera les actuels entrepôts d’exportation, d’importation et de transformation dans une parfaite neutralité fiscale en matière de TVA intracommunautaire.

M. Charles de Courson. S’agissant de l’article 55, le rapporteur s’est-il interrogé sur l’application de ces dispositions aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics ? Beaucoup de communes réalisent des opérations immobilières, notamment des lotissements. Dans le système actuel, elles peuvent opter pour la TVA ou bien en rester au régime des droits de mutation à titre onéreux. Vont-elles conserver un droit d’option ou bien seront-elles automatiquement assujetties à la TVA ?

M. le rapporteur pour avis. J’avoue que je n’ai pas étudié cette question, car j’ai surtout considéré ce dispositif du point de vue des transactions.

M. le président Didier Migaud. Je tiens à saluer le travail du rapporteur, qui a dû examiner ces articles dans des conditions de délai très contraintes.

J’ajoute qu’il nous serait très utile d’obtenir du président de la Commission des lois communication de l’avis rendu par le Conseil d’État sur les articles dont nous nous sommes saisis pour avis. Il faut veiller à partager l’information.

La Commission passe ensuite à l’examen des articles du projet de loi dont elle est saisie pour avis.

II.– EXAMEN DES ARTICLES

La proposition de loi se compose de 150 articles répartis en 7 chapitres, d’importance inégale. La commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire s’est saisie pour avis des trois articles fiscaux.

SECTION 6 :
DISPOSITIONS DE SIMPLIFICATION EN MATIÈRE FISCALE

ARTICLE 55 : SIMPLIFICATION DE LA TVA IMMOBILIÈRE

Le présent article a pour principal objet d’assurer la mise en conformité du droit français avec la directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée mais aussi de simplifier quelques règles obsolètes. Il concerne exclusivement les opérations immobilières.

I.– LES CONTRADICTIONS ENTRE LE DROIT COMMUNAUTAIRE ET LE DROIT NATIONAL EN MATIÈRE DE FISCALITÉ IMMOBILIÈRE

Impôt indirect sur la consommation, la taxe à la valeur ajoutée (TVA), invention française de 1957, a consisté à substituer à une taxation auprès des vendeurs finaux, nombreux et peu contrôlables, un prélèvement au fur et à mesure du processus de production et de création de la valeur ajoutée. Son intérêt économique et sa fiabilité en ont fait son succès.

La première directive européenne TVA, en 1967, s’est imposée à tous les États membres qui ont abandonné tout autre impôt sur le chiffre d’affaires, ce qui a facilité la mise en place du marché commun ainsi que la libre circulation des biens et services.

L’étape décisive du processus d’harmonisation a eu lieu en 1977, avec la sixième directive TVA, tendant à unifier les diverses règles nationales relatives à son champ d’application, à son assiette et à l’exercice du droit à déduction.

Plusieurs directives ultérieures sont intervenues pour éliminer des divergences existant encore entre régimes nationaux et ont procédé à des ajustements à la marge.

La directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 a réécrit celle de 1977 en incorporant les modifications intervenues entre ces deux dates : c’est désormais le texte communautaire traitant de la TVA auquel les droits nationaux doivent se conformer.

Si la France a bien appliqué les dispositions communautaires en matière de biens meubles, elle a, en revanche, pendant toutes ces années, conservé des règles particulières concernant les immeubles.

Depuis le dix-neuvième siècle, les immeubles sont fiscalement « saisis » au moment des mutations, au moyen des droits d’enregistrement qui pèsent sur l’acquéreur. Ce dispositif a été conservé, d’autant qu’ils représentent, pour les collectivités locales, une recette essentielle. Pour les immeubles neufs (immobilier en cours de construction ou achevé depuis moins de cinq ans), auxquels ces droits étaient plus difficiles à appliquer directement, la « TVA immobilière » a été créée en 1963 : elle reste toutefois, par imprégnation des principes gouvernant les droits d’enregistrement, un impôt prélevé auprès de l’acquéreur, qui obéit à une logique inverse de celle de la TVA consistant à faire des vendeurs, les producteurs de TVA, les redevables.

Au risque économique d’une taxation « en cascade » que présente cette forme d’imposition, s’ajoute aujourd’hui un risque de nature juridique : ce dispositif n’a certes pas fait l’objet jusqu’ici d’observations particulières de la part de la Commission européenne, laquelle n’y voyait pas de réel enjeu, mais récemment, un risque juridique est apparu comme l’ont révélé plusieurs litiges, venus devant les tribunaux administratifs, qui ont mis en lumière l’insécurité juridique engendrée par la coexistence d’une législation communautaire et d’une législation nationale différentes concernant l’immobilier.

On relèvera trois niveaux de non-conformité de la TVA immobilière française :

– première difficulté : dans une logique basée sur le droit d’enregistrement, l’acquéreur est le redevable alors que dans une logique de TVA, c’est le vendeur qui est redevable. Pour surmonter cette contradiction, un régime spécifique de TVA a été mis en place en 1963 : depuis cette date, pour la seule matière immobilière, c’est l’acquéreur qui est le redevable. Or, cette exception aux principes généraux de la TVA s’est rapidement retrouvée en opposition avec le droit communautaire pour qui le redevable, dans le cas de cet impôt, doit toujours être le vendeur ;

– deuxième difficulté : lorsque les droits de mutation ont été sensiblement réduits en 1998 (taux de 5,09 %), la TVA était au taux de 19,6 %. La taxe s’applique toujours aux immeubles d’habitation destinés à être vendus après construction. En revanche, le législateur national a prévu (article 257-7 du code général des impôts) d’exclure les terrains à bâtir acquis par des particuliers pour la construction de maisons d’habitation du champ d’application de la TVA immobilière au profit d’une taxation aux droits d’enregistrement, ceci en contradiction avec la directive de 2006 qui prévoit que ces opérations ne peuvent être exonérées de la TVA ;

– troisième difficulté : les marchands de biens connaissent un régime particulier de TVA sur leur marge (article 257-6 du code général des impôts), ce qui est là aussi contradictoire avec le principe de la taxation aux différentes étapes de la production, et déduisent la TVA qui a grevé les frais d’aménagement.

Pendant plusieurs décennies, ni les autorités françaises ni les autorités européennes n’ont tenté de surmonter cette opposition entre les deux droits qui ne portait à conséquence ni sur le jeu de la libre concurrence (les immeubles ne sont, par nature, pas délocalisables) ni sur le montant total des sommes récoltées. Deux éléments nouveaux sont venus attirer l’attention des services fiscaux et doivent inciter notre pays à réagir :

– d’une part la Commission européenne vient d’engager une procédure contentieuse à l’égard du dispositif français que chacun s’accorde à reconnaître formellement non-conforme. Si rien n’est fait, la France court le risque d’être condamnée à l’issue d’une procédure qui peut prendre deux à trois ans ;

– d’autre part, le hiatus existant entre le droit national et le droit communautaire rend possible une forme d’évasion fiscale certes pour l’instant très limitée, mais réelle.

Les services fiscaux ont relevé deux cas d’évasions fiscales avérées, qui ne peuvent pas être qualifiées de fraudes puisque s’appuyant sur les contradictions entre le droit national et le droit européen, mais qui portent néanmoins préjudice aux ressources publiques : lorsque deux opérateurs réalisent une opération sur un terrain à bâtir, l’acquéreur doit s’acquitter, selon le droit français, de droits d’enregistrement faibles (0,715 %). Mais cette vente, en vertu des règles fiscales européennes, ne peut être exonérée de TVA et doit donc être taxée à 19,6 %.

Le cédant ne peut être recherché en paiement de la taxe puisque le droit interne désigne son acquéreur comme redevable. Par ailleurs, l’administration ne peut s’opposer à l’exercice de la déduction de la taxe qui a grevé les dépenses qu’il a engagées pour la réalisation de l’opération dès lors que le droit communautaire l’y autorise. Mais l’acquéreur peut à son tour invoquer le droit communautaire pour refuser d’acquitter la taxe ainsi que le prévoit le droit interne. Cette position a été confortée par un arrêt du tribunal administratif de Versailles en 2001. Les conditions sont dès lors réunies pour que la taxe ayant grevé les dépenses d’amont soit déduite, et donc remboursée, sans que l’administration ne puisse avoir la garantie que l’un des opérateurs acquittera la TVA sur l’opération.

Selon la direction de la législation fiscale, cette fraude, qui suppose d’une part que le vendeur et l’acquéreur soient de mauvaise foi et probablement complices, reste marginale et le montant du préjudice ne dépasse probablement pas quelques centaines de milliers d’euros. Pour autant, cette possibilité ne doit pas perdurer dans notre législation.

C’est pourquoi il est proposé de modifier, par le présent article, le dispositif de la TVA immobilière pour le rendre compatible avec la directive 2006/112 sans pour autant modifier les équilibres actuels entre les parties ni le niveau des ressources des collectivités locales et de l’État.

Le Rapporteur pour avis souligne que, d’après les informations qu’il a obtenues, les professionnels consultés ont approuvé les modifications proposées.

II.– LA MISE EN CONFORMITÉ DE NOTRE DROIT NATIONAL AVEC LA DIRECTIVE N° 112 DU 28 NOVEMBRE 2006

Dans l’optique de l’élaboration du projet de refonte de la TVA immobilière, la direction de la législation fiscale du ministère de l’Économie, de l’industrie et de l’emploi a mené, au cours du mois de juin 2009, une vaste concertation visant à recueillir l’avis des professionnels concernés. A ce titre ont été consultés la Fédération des promoteurs constructeurs (FPC), le Syndicat national de l’aménagement et du lotissement (SNAL), la Fédération française du bâtiment (FFB), le Conseil supérieur du notariat (CSN) et la Fédération des entreprises publiques locales (FEPL). Le ministère a recueilli l’avis des principales organisations représentatives des collectivités locales, à savoir l’Association des maires de France (AMF), l’Association des départements de France (ADF) et l’association des communautés urbaines de France (ACUF). Enfin, des conseils spécialisés en TVA dans le domaine de l’immobilier (Fidal, Bureau Francis Lefebvre, société d’avocats Taj) ont également été entendus.

Dans le cas où le terrain à bâtir est vendu par un professionnel, celui-ci est actuellement soumis à un système de taxation de la marge en application de l’article 257 du code général des impôts. Ce système n’est pas conforme à la directive n° 112 du 28 novembre 2006 car il revient à utiliser la TVA comme un impôt direct. Concrètement, l’aménageur est taxé sur la marge et bénéficie de la déduction de la TVA. Actuellement, l’acquéreur paie un droit d’enregistrement de 5,09 % sur le prix total et une TVA de 19,6 % sur les aménagements. Le présent article propose d’appliquer la TVA à cette opération, en changeant le redevable et en modifiant la définition du terrain à bâtir.

Le II du présent article propose de modifier le point 2 de l’article 257 du code général des impôts, afin de définir comme « terrains à bâtir » les terrains situés dans un secteur désigné comme constructible du fait de leur classement par un plan local d’urbanisme ou par un document d’urbanisme en tenant lieu dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l’urbanisation, ou par une carte communale dans une zone constructible. Cette définition large permet de faire entrer dans le champ du nouveau dispositif l’ensemble de ce que le langage courant appelle « terrain à bâtir ».

Le droit communautaire permet de taxer la marge réalisée par un opérateur. En effet, l’article 392 de la directive du 28 novembre 2006 autorise les États membres à considérer que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition, la base d’imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d’achat. Concrètement, celui qui achètera un terrain à bâtir sans droits à déduction de TVA et qui le revendra sera taxé sur la marge réalisée. C’est que prévoit la rédaction proposée du IX qui modifie l’article 268 du code général des impôts.

Dans le cas où un aménageur achète un terrain à bâtir à un particulier, cette transaction ne pourra pas faire l’objet d’une perception de TVA. Pour autant, en revendant ce même terrain avec des aménagements, une TVA de 19,6 % sera perçue sur la différence entre le prix de vente et le prix du foncier – c’est-à-dire sur les aménagements.

Ce dispositif n’engendrera pas de pertes de recettes pour les collectivités territoriales, car le présent article maintient le principe d’une taxation au titre des droits d’enregistrement. C’est l’objet du XXI du présent article qui prévoit, à l’article 1594 F quinquies du même code, que sont soumis à la taxe de publicité foncière ou au droit d’enregistrement de 0,715 %, « les mutations à titre onéreux de terrains à bâtir et d’immeubles neufs mentionnés au 2 du I de l’article 257 lorsqu’elles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, sauf application des modalités prévues à l’article 268 », à l’exception de « celles qui sont visées au I du A de l’article 1594-0 G », c’est-à-dire celles visées par le XXII du présent article.

Comme nous l’avons vu, en matière de TVA immobilière, l’acquéreur est actuellement le redevable, par opposition au droit commun.

Cette « inversion du redevable » crée les conditions d’une perte de recettes fiscales pour le budget de l’État dans la mesure où cédant et acquéreur peuvent se prévaloir chacun d’une législation, dans un cas, pour exercer un droit à déduction d’une taxe qu’il n’a pas collectée, dans l’autre pour ne pas l’acquitter.

La suppression de cette « inversion du redevable », rendue possible par la définition simple du terrain à bâtir dès lors que la soumission à la TVA de la livraison n’est plus tributaire de l’engagement pris par l’acquéreur, rendra le droit fiscal français en la matière conforme à la directive européenne n° 112 du 28 novembre 2006 et sera de nature tout à la fois à mettre fin aux montages identifiés permettant d’éluder la taxe. La procédure en sera simplifiée d’autant.

La loi du 15 mars 1963 qualifie de terrain à bâtir toute parcelle pour laquelle l’acquéreur prend l’engagement de construire dans l’acte qui constate la mutation à son profit, sans considération de la nature du terrain ou de sa situation au regard des règles d’urbanisme. Cet engagement, qui conditionne l’exonération de droits d’enregistrement doit, sauf prorogation accordée par l’administration, être réalisé dans les quatre ans de l’acquisition. Le dispositif implique un suivi administratif sur la même durée des acquisitions de terrains concernés en vue, s’il y a lieu, de remettre en cause l’avantage consenti initialement par une application rétroactive des droits de mutation à la charge de l’acquéreur assortie de l’intérêt de retard.

La TVA appliquée à l’origine ayant, quant à elle, été normalement déduite par l’acquéreur qui l’a autoliquidée, la non réalisation de l’engagement est neutre en matière de TVA. Dès lors que la manifestation de la volonté de l’acquéreur joue un rôle essentiel, celui-ci a été désigné comme le redevable de la taxe par l’article 285 du code général des impôts.

Avec l’article 40 de la loi n° 98-1266 de finances pour 1999, le législateur a adopté un amendement du gouvernement, qui a réduit fortement les droits de mutation pour les particuliers achetant un terrain à bâtir. Ces droits, supérieurs à 16 % ont été abaissés à 5,09 %, soit un taux proche de celui qu’il aurait payé s’il avait bénéficié d’un taux réduit de TVA. En contrepartie, l’achat d’un tel terrain est exonéré de TVA. Cette mesure était destinée à relancer le secteur de la construction. Mais cette exonération de TVA des acquisitions de terrains à bâtir par les particuliers est en contradiction avec la directive qui prévoit une taxation systématique de tous les terrains. C’est une des raisons pour lesquelles la Commission européenne a entamé une procédure contentieuse à l’encontre de la France.

Ce système présente, en outre, un effet pervers : la cession ne faisant pas l’objet d’une soumission à la TVA, les personnes concernées ne peuvent bénéficier du droit à la déduction de celle-ci. C’est pourquoi le présent article propose un dispositif permettant de rendre la TVA applicable à ces opérations sans, pour autant, modifier l’équilibre financier actuel. Dans le cas d’une cession d’un terrain à bâtir d’un particulier à un autre particulier, le présent article ne change rien : la cession sera frappée des seuls droits d’enregistrement.

Le régime national actuel des marchands de biens prévoit une taxation systématique sur la marge des transactions réalisées par les marchands de biens là où la directive ne prévoit qu’une taxation sur option s’agissant des immeubles non neufs et des terrains ne constituant pas des terrains à bâtir. Le dispositif national actuel revient par conséquent à priver les acteurs économiques de la possibilité d’opter.

La mise en place d’une option d’entreprise pour la taxation des livraisons de terrains ne répondant pas à la définition de « terrain à bâtir » et des immeubles achevés depuis plus de cinq ans, option conforme à la réglementation européenne, offrira plus de souplesse aux opérateurs en leur permettant notamment d’échapper à des rémanences antiéconomiques dans les opérations réalisées entre assujettis qui conduisent aujourd’hui, selon le ministère de l’Économie, « à des contournements hasardeux ».

Par ailleurs, l’article 55 procède à deux aménagements complémentaires du régime des marchands de biens :

– le IX prévoit l’application d’un régime de TVA sur marge, conforme aux prescriptions de la directive et limité par conséquent à la livraison d’un terrain à bâtir ou d’un terrain ou immeuble pour lesquels une option a été formulée lorsque l’acquisition du bien vendu n’a pas ouvert droit à déduction. De la sorte, les conditions sont réunies pour que, en dépit de leur réintégration dans le champ de la taxe, les livraisons de terrains à bâtir aux particuliers qui les destinent à la construction d’une maison individuelle supportent une charge fiscale équivalente à celle qu’elles supportent actuellement, à savoir une TVA sur la marge du cédant à laquelle s’ajoutent les droits de mutation ;

– le XIX du présent article supprime l’article 852 du code général des impôts qui impose des contraintes, devenues inutiles, mises en œuvre à une époque où il n’existait pas, pour les opérateurs concernés, d’obligations comptables à partir desquelles l’administration fiscale pouvait être en mesure de suivre les opérations. Le nouveau dispositif serait, désormais, ouvert à tous les professionnels agissant en tant que tels, quelle que soit la nature de leur intervention dans le circuit de production du terrain à bâtir (achat ou revente, lotissement, aménagement, commercialisation).

Les règles nationales applicables pour les ventes en état futur d’achèvement (VEFA) qui prévoient l’exigibilité de la taxe au moment de la signature de l’acte entre le professionnel et le particulier ne sont pas conformes à la directive européenne selon laquelle seule une exigibilité de la taxe au fur et à mesures des versements, ou à la livraison, est concevable. C’est pourquoi l’article 55 propose de reporter l’exigibilité de la taxe lors de l’encaissement du prix pour les ventes en état futur d’achèvement de manière à mettre fin aux incertitudes juridiques et aux avantages indus de trésorerie dont bénéficient certains opérateurs au détriment du budget de l’État.

L’article 55 propose par ailleurs de limiter l’assujettissement des particuliers à la première livraison d’un immeuble dans les cinq ans de son achèvement aux seuls cas où l’immeuble a été acquis en VEFA, ce qui exclut par conséquent les cas où l’immeuble a été bâti par le particulier. Cette évolution permet au particulier qui n’est pas en mesure d’opérer la déduction faute d’être en possession les factures de travaux de construction grevés de TVA, ou d’avoir supporté de la TVA sur l’assiette foncière de la construction, de ne plus être redevable de l’impôt, avec pour effet d’alléger le coût d’acquisition pour l’acquéreur suivant.

À l’inverse, la soumission à la TVA de la première cession par un particulier, dans les cinq ans de son achèvement, d’un immeuble qu’il a acquis en VEFA permettant la déduction de la taxe ayant grevé l’acquisition est maintenue dès lors qu’elle conduit, dans la très grande majorité des cas, à une charge fiscale moindre du fait de la déduction de la TVA d’amont et de la soumission corrélative aux droits de mutation au taux réduit de 0,715 %.

Sous le régime actuel, un particulier qui achète un terrain pour y construire lui-même sa maison et qui la revend avant cinq ans se voit appliquer une TVA de 19,6 % sur cette construction. Or, par définition, il n’est pas en mesure de déduire une quelconque TVA, s’il a lui-même construit sa maison. Cette situation est d’autant plus injuste que si ce même particulier attend le délai de cinq ans, il n’a à s’acquitter que des droits de mutations au taux habituel, soit 5,09 %.

Le dispositif proposé mettra le droit fiscal français en matière immobilière en conformité avec le droit européen. Il évitera à la France une probable condamnation devant les juridictions européennes. Même si les règles de droit semblent, en apparence, profondément modifiées, le Rapporteur pour avis souligne que le dispositif proposé est fiscalement et budgétairement neutre. Il n’induit aucun transfert de ressources fiscales entre les collectivités territoriales et l’État.

Compte tenu de l’importance, dans l’article 55, des dispositions relatives à la mise en conformité du droit fiscal français, en matière immobilière, avec le droit européen, le rapporteur pour avis proposera un amendement complétant le titre de la section.

III.– QUELQUES MESURES DE SIMPLIFICATION DU DROIT

La mise en conformité du droit français au droit communautaire n’est pas le seul objet de l’article 55. Certains principes juridiques, telles les livraisons à soi-même (LASM), sont généralisés tandis que des éléments de doctrine fiscale reçoivent une consécration législative.

La livraison à soi-même (LASM) est un concept juridique qui permet de traiter tous les opérateurs de la même façon. Sans ce mécanisme, une entreprise qui détient un terrain pour y faire construire un bâtiment ne serait pas taxée sur le terrain alors que celle qui achète un immeuble neuf l’est. Grâce à ce concept, la première entreprise fait l’objet d’une taxation « pour ordre » qui permet de ne pas la traiter différemment de la seconde.

Le II du présent article propose de généraliser le dispositif de livraisons à soi-même (LASM), prévu par l’article 257 du code général des impôts, afin d’assurer, conformément aux principes de l’article premier de la directive européenne sur la TVA, la neutralité de la taxe selon qu’un immeuble est acquis auprès d’un promoteur ou construit par son utilisateur lui-même.

L’article 55 généralise donc la livraison à soi-même dans le but d’éviter les distorsions de concurrence, tout en assouplissant les exigences procédurales. Une exception toutefois : le dispositif proposé dispensera de livraison à soi-même les bâtiments vendus dans les deux ans qui suivent leur achèvement, dans la mesure où cette formalité, désormais inutile, n’induit aucune modification fiscale.

En effet, dans ce cas, le code général des impôts ne prévoit pas la perception de taxe. C’est ce que confirme le XI du présent article, qui dispose, à l’article 260 du même code, que la liquidation de la taxe exigible au titre des livraisons à soi-même mentionnées au 1° du a) du 3 du I de l’article 257 peut être effectuée jusqu’au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenu l’achèvement de l’immeuble. Elle fait l’objet de la déclaration mentionnée à l’article 287 du même code, dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État.

Bien que la directive n’oblige pas à remettre en cause les règles historiques relatives aux droits de mutation, l’article 55 propose d’accompagner l’aménagement des mécanismes de TVA d’une modernisation de ces règles afin d’en simplifier la gestion et la compréhension, notamment en donnant force légale et en clarifiant diverses solutions doctrinales.

Ainsi, le XX de l’article propose une banalisation du régime de faveur de l’article 1115 du code général des impôts, consistant à étendre à tout professionnel prenant l’engagement de revendre dans un délai de cinq ans (la doctrine prévoit déjà une prorogation automatique d’une année du délai légal de quatre ans) la suspension des droits d’enregistrement (sauf taxe de publicité foncière au taux réduit) sur leurs acquisitions de terrains et d’immeubles bâtis. Le II de l’article 1594-0 G, modifié par le XXII du présent article prévoit également la reconduction de l’exonération de droits de mutation lorsque l’acquéreur d’un terrain, ou d’un immeuble ancien dont la démolition est envisagée, prend l’engagement de construire dans le délai de quatre ans. Le régime de prorogation de ce délai sur décision de l’administration est par ailleurs allégé et sécurisé par une solution d’acceptation tacite, l’administration ayant en outre à motiver son refus éventuel. Cette modification du IV de l’article 1594-0 G du même code est opérée par le XXII du présent article.

Le présent article procède donc à l’inversion de la charge de la preuve : le délai est prolongé sauf si l’administration prouve qu’il n’y pas d’intention de construire.

Par ailleurs, les possibilités de substitution entre engagements prévus aux articles 1115 et 1594-0 G du code général des impôts, actuellement admises à certaines conditions par la doctrine administrative, sont formalisées par le XXII du présent article, de manière à garantir aux opérateurs une plus grande souplesse dans la gestion de leurs opérations.

Le II de l’article 55 de la proposition de loi purge l’article 257 du code général des impôts de quelques dispositions devenues obsolètes. La rédaction proposée ne reprend pas, par exemple, les livraisons à soi-même de viandes, actuellement prévues au 9° de l’article 257 ni les quantités de boissons manquantes chez les entrepositaires agréés visées au 11° de la rédaction actuelle de cet article.

De même, la mention spécifique concernant les livraisons à soi-même d’ouvrages de circulation routière donnant lieu à la perception de péages soumis à la TVA est supprimée. En effet, le droit commun permet d’ores et déjà d’accéder au même résultat.

*

* *

Le double tableau ci-après résume l’évolution de la fiscalité immobilière avant et après l’entrée en vigueur de des présentes dispositions, prévue pour le 1er janvier 2011. Le lecteur admettra, qu’à défaut de devenir totalement limpide, la situation de la fiscalité immobilière se trouve réellement simplifiée.

Avant le 1er janvier 2011

objet de la mutation

ACHETEUR

Marchand de biens

Particulier

Assujetti

Vendeur

Marchand de biens

(dont lotisseurs)

Terrain nu

Engagement de revendre : TVA sur marge (art. 257-6°) + DMTO à 0,715 %1 (art. 1115)

TVA sur marge (art. 257-6°) + DMTO à 5,09 %2

TVA sur marge (art. 257-6°) + DMTO à 5,09 %

Terrain à bâtir (TAB)3

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut, règles applicables aux terrains nus) :

- TVA sur le prix total (art. 257-7) par autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)4

- Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Les terrains destinés à la construction d’un immeuble à usage d’habitation sont soumis à la TVA sur la marge (combinaison art.257-7° 1 a 4ème alinéa et art. 257-6°) + DMTO à 5,09 %

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut, règles applicables aux terrains nus) :

– TVA sur le prix total (art. 257-7), autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)5

– Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Immeuble neuf6

TVA sur le prix total (art. 257-7) et DMTO réduits à 0,715 % (art.1594 F quinquies)

Immeuble autre qu’un immeuble neuf7

Si engagement de revendre : TVA sur marge (art.257-6) et DMTO réduits à 0,715 % ( art.1115)

ou

Si engagement de construire : cf règles applicables aux TAB

TVA sur marge (art. 257-6°)

+

DMTO à 5,09 %

TVA sur marge (art. 257-6°) et DMTO 5,09 %

Ou

Si engagement de construire : cf règles applicables aux TAB

Particulier

Terrain nu

Hors champ d’application TVA: DMTO réduits à 0,715 % (art.1115) si engagement de revendre ou à 5,09 % à défaut d’engagement

Hors champ TVA - DMTO à 5,09 %

Hors champ TVA - DMTO à 5,09 %

TAB

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut règles applicables aux terrains nus) :

– TVA sur le prix total (art. 257-7) par autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)

– Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Hors champ TVA - DMTO à 5,09 %

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut, règles applicables aux terrains nus) :

– TVA sur le prix total (art. 257-7) par autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)

– Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Immeuble neuf


TVA sur le prix total (art. 257-7) et DMTO réduits à 0,715 % (art.1594 F quinquies)

Immeuble autre qu’un immeuble neuf

Si engagement de revendre : Hors champ TVA et DMTO réduits à 0,715 % (art. 1115)

Si engagement de construire : cf règles TAB

Hors champ TVA - DMTO 5,09 %

Hors champ TVA - DMTO 5,09 %

Ou :

Si engagement de construire : cf règles TAB

Assujetti n’intervenant pas en qualité de marchand de biens (promoteurs)

Terrain nu

Hors champ d’application TVA: DMTO réduits à 0,715 % (art.1115) si engagement de revendre ou à 5,09 % à défaut d’engagement

Hors champ TVA - DMTO à 5,09 %

Hors champ TVA - DMTO à 5,09 %

TAB

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut, règles applicables aux terrains nus) :

- TVA sur le prix total (art. 257-7) par autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)

- Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Les terrains destinés à la construction d’un immeuble à usage d’habitation sont soumis à la TVA sur la marge (combinaison art.257-7° 1 a 4ème alinéa et art. 257-6°) + DMTO à 5,09 %

Engagement de construire conférant au terrain sa qualité de TAB (à défaut, règles applicables aux terrains nus) :

– TVA sur le prix total (art. 257-7) par autoliquidation par l’acquéreur (art. 285-3)

– Exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

Immeuble neuf

TVA sur le prix total (art. 257-7) et DMTO réduits à 0,715 % (art.1594 F quinquies)

Immeuble autre qu’un immeuble neuf

Si engagement de construire : TVA (art.257-7) et exonération de DMTO (1594-0 G)

ou

SI engagement de revendre : TVA sur marge (art.257-6) et DMTO réduits à 0,715 % ( art.1115)

Hors champ TVA - DMTO 5,09 %

Hors champ TVA - DMTO 5,09 %

Ou :

Si engagement de construire : cf règles TAB

Après le 1er janvier 2011

objet de la mutation

Acheteur

Assujetti à la TVA

Non assujetti à la TVA

Vendeur

Assujetti à la TVA

Terrain NAB

Exonéré de TVA (art. 261-5-2°), mais option possible (260-5° bis) pour une taxation sur le prix total + DMTO à 5,09 % (sauf engagement de revendre, DMTO à 0,715 – art. 1115)

Exonéré de TVA (art. 261-5-2°), mais option possible (260-5° bis) pour une taxation sur le prix total + DMTO à 5,09 %8

TAB9

TVA :

- sur le prix total, lorsque le terrain avait ouvert droit à déduction lors de son acquisition par le cédant.

- sur la marge lorsque le terrain n’avait pas ouvert droit à déduction lors de son acquisition par le cédant.

DMTO :

- engagement de construire : exonération de DMTO (art. 1594-0 G)

- engagement de revendre : DMTO réduits à 0,715 % (art. 1115)

- aucun engagement : DMTO de droit commun.

TVA :

- sur le prix total, lorsque le terrain avait ouvert droit à déduction lors de son acquisition par le cédant10

- sur la marge lorsque le terrain n’avait pas ouvert droit à déduction lors de son acquisition par le cédant.

DMTO :

– 5,09 % lorsque la mutation est soumise à la TVA sur la marge

– 0,715 % lorsque la mutation est soumise à la TVA sur le prix total (art. 1594 F quinquies)

Immeuble neuf

TVA sur prix total + DMTO réduits à 0,715 % (art. 1594 F quinquies)

Immeuble autre qu’un immeuble neuf

Exonéré de TVA (art. 261-5-2°), mais option possible (260-5° bis) pour une taxation sur le prix total + DMTO à 5,09 % (sauf engagement de revendre - art. 1115), ou application du régime de la marge (et DMTO de droit commun)

Exonéré de TVA (art. 261-5-2°), mais option possible (260-5° bis) pour une taxation sur le prix total + DMTO à 5,09 %11

Non assujetti à la TVA

Terrain NAB

TVA : hors du champ d’application

DMTO

- engagement de construire: exonération de DMTO (art. 1594-0G)

- engagement de revendre : DMTO réduits à 0,715 % (art. 1115)

- aucun engagement : DMTO de droit commun.


Hors du champ d’application de la TVA – DMTO à 5,09 %

TAB

TVA : hors du champ d’application

DMTO :

- engagement de construire: exonération de DMTO (art. 1594-0G)

- engagement de revendre : DMTO réduits à 0,715 % (art. 1115)

- aucun engagement : DMTO de droit commun.

Hors du champ d’application de la TVA - DMTO à 5,09 %

Immeuble neuf

Si le cédant avait au préalable acquis immeuble cédé comme immeuble à construire : TVA sur le prix total (257-I-3-b 1°) et DMTO réduits à 0,715 % (art. 1594 F quinquies)

Si le cédant n’avait pas acquis l’immeuble en tant qu’immeuble à construire, hors champ TVA - DMTO à 5,09 % (sauf engagement de revendre, DMTO à 0,715 % art. 1115)

Si le cédant avait au préalable acquis immeuble cédé comme immeuble à construire : TVA sur le prix total (257-I-3-b 1°) et DMTO réduits à 0,715 % (art. 1594 F quinquies)

Si le cédant n’avait pas acquis l’immeuble en tant qu’immeuble à construire, hors champ TVA et DMTO à 5,09 %

Immeuble autre qu’un immeuble neuf

Hors du champ d’application de la TVA - DMTO à 5,09 %, sauf engagement :

- de revendre (DMTO à 0,715 % - art. 1115) ;

- de construire (exonération de DMTO : art. 1594-0G).

Hors du champ d’application de la TVA - DMTO à 5,09 %

La Commission examine l’amendement CF 1 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Cet amendement tend à supprimer l’article 55. Comme vient de l’indiquer le président de la Commission, notre rapporteur a réalisé un travail remarquable. Toutefois, il n’est pas raisonnable de nous demander de nous prononcer dans de telles conditions : l’exposé des motifs se limite à quatre lignes alors que l’article 55 est long de treize pages !

M. Michel Bouvard. La proportion était identique pour l’article 2 du projet de loi de finances.

M. Jérôme Cahuzac. On voit qu’il vous a marqué !

Il faut que le pouvoir exécutif cesse de traiter ainsi le Parlement.

M. le président Didier Migaud. Je vous rappelle, cher collègue, qu’il s’agit d’une proposition de loi.

M. Jérôme Cahuzac. Certes, mais nul n’ignore d’où ces propositions viennent en réalité.

Puisque le Président Migaud a évoqué nos rapports avec la Commission des lois, je relève que ce n’est pas la première fois que le Président Warsmann dépose des propositions de loi dont des dispositions relèvent d’autres commissions, notamment de celles des finances et des affaires sociales, mais j’ignorais encore que ses compétences juridiques – incontestées – devaient l’amener à proposer de modifier des dispositifs tels que la CRDS et le bouclier fiscal. Comme l’a démontré la récente affaire de la scientologie, nous risquons d’adopter des dispositions sans mesurer pleinement leurs effets, quel que soit le travail réalisé par les rapporteurs.

Il faut revenir à un travail sérieux, comme c’était la tradition dans cette maison. Si nous vous proposons de supprimer l’article 55, c’est pour en finir avec ces façons de procéder qui ne nous paraissent pas dignes de notre Parlement.

M. Jean-Louis Dumont. Notre collègue n’a pas tort. On peut légitimement s’interroger sur les conséquences qu’emporteront ces dispositions. Il est question de simplification, mais encore faudrait-il savoir pour qui, pour quoi et à quel coût.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Il ne s’agit pas seulement de simplifier les dispositions en vigueur, mais aussi d’éliminer le biais qui résulte actuellement de leur application.

Je rappelle, tout d’abord, que la chaîne de remboursement a été considérablement simplifiée dans l’intérêt des acteurs économiques : les contrôles que j’ai pu connaître en tant que chef d’entreprise n’existent plus. Les irrégularités sont donc impossibles à détecter sauf remboursements manifestement trop importants – et ce sont des dizaines de milliers d’euros qui sont en jeu. La jurisprudence interdisant de contester le choix des acquéreurs, qui peuvent opter pour le paiement de la TVA ou pour celui de droits de mutation, il est difficile de remonter au producteur en cas d’anomalie.

Cet article sert plusieurs buts : Jérôme Cahuzac a rappelé, dans son exposé des motifs, qu’il tendait à mettre les dispositions en vigueur en conformité avec le droit communautaire, mais il a aussi pour objet de réduire leur complexité, source d’un certain nombre de comportements anormaux qu’il ne faut pas laisser perdurer. Il me paraît en outre plus simple que le producteur de la valeur ajoutée paie la TVA due après déduction des montants déjà acquittés pour les fournitures. C’est l’esprit même de cet impôt, qui a fait école dans le monde et qui a été repris au niveau communautaire – à telle enseigne que ce n’est plus notre droit qui s’applique dans ce domaine, mais les directives européennes qui se sont succédé depuis plusieurs années.

Je ne reviens pas sur les ventes à soi-même en matière de construction HLM ni sur les opérations d’aménagement, questions qui n’ont pas de secret pour notre collègue Jean-Louis Dumont. Chacun sait qu’il existe un certain nombre de biais dans ces différents domaines.

Je me suis efforcé d’évaluer les conséquences de cet article en examinant quelles dispositions il vient modifier, mais je n’avais pas décelé son éventuel impact sur les collectivités territoriales. Je vais examiner cette question de plus près afin d’apporter une réponse à notre collègue de Courson et, si besoin est, je proposerai de préciser le texte.

Pour ma part, je défendrai un amendement CF 3 tendant à modifier le titre de la section 6 : son objet n’est pas uniquement de simplifier le droit en vigueur, comme l’indique son titre actuel, mais aussi de le mettre en conformité avec les dispositions communautaires. C’est là le cœur du dispositif qui nous est proposé, bien qu’il emporte également diverses conséquences qui nous semblent aller dans le bon sens. J’observe en particulier que cet article n’alourdira pas la charge des contribuables, même s’il n’est pas très aisé d’y voir clair, comme d’autres que moi ont déjà eu l’occasion de le relever.

M. le président Didier Migaud. Je précise que nous examinerons votre amendement CF 3 après les amendements de suppression des articles. Si ces amendements étaient adoptés, il serait en effet sans objet.

Nous devrons réfléchir à la qualité du travail législatif que nous réalisons. La Commission des lois travaille en effet de façon quelque peu solitaire, alors que d’autres commissions sont concernées par les modifications qu’elle propose. Nous nous sommes saisis pour avis de trois articles de nature fiscale, mais la Commission des affaires économiques et celle des affaires sociales, elles aussi concernées par ce texte, n’ont pas eu le temps d’être consultées.

Cela me semble d’autant plus regrettable que ce texte n’a pas pour seul objet de simplifier le droit en vigueur : comme l’a rappelé le rapporteur, il tend également à transposer une directive européenne qui modifie notre dispositif de TVA immobilière, ce qu’il aurait été plus logique de faire en loi de finances. Il faut donc avouer que ce texte comporte quelques bizarreries.

La Commission rejette l’amendement CF 1.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 55 sans modification.

ARTICLE 56 :
OPTION POUR LA TAXATION À LA TVA DES ENTREPRISES QUI RÉALISENT DES OPÉRATIONS BANCAIRES OU FINANCIÈRES

De manière générale, les opérations bancaires et financières sont exonérées de la TVA, conformément à l’article 261 C-1° du code général des impôts qui transpose les actuelles dispositions de la directive n°2006/112 de la Communauté européenne.

Toutefois, la directive précitée dans son article 137.1.a, comme l’article 260.B du code général des impôts, indiquent que les opérations bancaires et financières peuvent, sur option du prestataire, être soumises à la TVA, sauf pour une liste déterminée d’opérations énumérées par ces dispositions.

Le régime d’option établi lors de l’adoption de ces dispositions est extrêmement rigide et n’est plus adapté aux conditions actuelles de gestion. Le présent article a pour objet d’assouplir les modalités avec lesquelles les entreprises prestataires pourront renoncer à l’option.

On soulignera que la facilitation apportée par le présent article a déjà été autorisée par l’administration fiscale par une instruction du 3 août 2005, prise à la suite des dispositions législatives de 2004 ayant autorisé les établissements concernés à résilier les options souscrites dans le passé. Il s’agit donc en partie de pérenniser une mesure admise par voie doctrinale à titre transitoire jusqu’en 2010.

L’option concerne à la fois les opérations effectuées au profit des assujettis et des non assujettis. Elle couvre par exemple les opérations, autres que la garde et la gestion, portant sur les valeurs mobilières à l’exception des émissions obligataires, la gestion des OPCVM et des fonds communs de créances, les opérations sur comptes, effets de commerce et chèques, les opérations d’affacturage et les opérations sur titres-restaurant.

Par exception, un certains nombre d’opérations sont exonérées de TVA sans possibilité d’option, comme par exemple les cessions de valeurs mobilières et de titres de créances négociables ou les opérations portant sur les devises et les monnaies. Également, certaines opérations sont exclues du périmètre de l’option en fonction des opérateurs qui les réalisent à raison de leur mode d’organisation ou des missions qui leur sont confiées : les opérations effectuées par les organismes dépendant de la banque fédérale des banques populaires par exemple. Ces opérations sont limitativement énumérées dans une liste figurant à l’article 260 C du code général des impôts.

L’option est exercée globalement, pour l’ensemble des opérations incluses dans son périmètre. Elle prend effet à compter du premier jour du premier mois suivant celui au cours duquel elle est déclarée à l’administration fiscale et couvre obligatoirement une période de cinq ans. Elle est renouvelable par tacite reconduction pour une nouvelle période de cinq ans.

Le prestataire assujetti à l’option peut la dénoncer mais cette dénonciation ne peut intervenir qu’à l’issue de chaque période de cinq ans, en effectuant la dénonciation deux mois avant l’expiration de la période. Ce système apparaît aujourd’hui trop rigide. Toutefois, par dérogation à cette règle, l’option est obligatoirement reconduite pour cinq années lorsque l’entreprise a bénéficié d’un remboursement de crédit de TVA pendant une période couverte par l’option ou à l’issue de celle-ci. Là encore, la règle apparaît trop stricte sans justification suffisante.

En 1977, lors de l’imposition de la TVA sur les services financiers, le calcul économique montrait un intérêt des entreprises à opter pour la taxation, car elle leur permet de déduire la TVA sur leurs dépenses d’amont et diminue leur cotisation de taxe sur les salaires. Depuis l’instruction fiscale de 2005, beaucoup d’entreprises ont décidé de renoncer à l’option, et il est devenu manifeste que les modalités de renonciation sont apparues beaucoup trop rigides.

Dans le contexte économique actuel, la reconduction de plein droit d’une option en cas de remboursement de crédit de TVA et l’impossibilité de l’assujetti de revenir sur son choix d’option avant l’expiration d’un délai de cinq ans, y compris à la suite d’un renouvellement tacite, sont des contraintes excessives. Le ministère du Budget précise que cette rigidité était mieux compréhensible lorsque le suivi des remboursements de TVA était mal maîtrisé.

Depuis que la renonciation à l’option a été introduite en 2005, elle a été massivement utilisée. C’est notamment les grandes banques de réseau qui ont recouru à cette faculté de dénonciation, préférant, sur un plan commercial, ne pas faire figurer la TVA sur les diverses prestations – commissions en pratique – qu’elles facturent à leurs clients consommateurs finaux, c'est-à-dire les particuliers.

Dans le système proposé, une fois exercée, l’option s’appliquera pour une durée de cinq années dont celle au cours de laquelle elle a été exercée, soit en pratique quatre ans et un mois au minimum. Au-delà de ce délai, elle pourra être dénoncée à tout moment.

En outre, l’octroi d’un remboursement de crédit de TVA à l’entreprise ayant opté sera sans incidence sur le régime d’option. Cette évolution respecte le principe de neutralité de la TVA et des principes généraux régissant le droit à déduction de la TVA résultant du droit communautaire.

Il convient de souligner que le même assouplissement est prévu pour la taxation sur option à la TVA applicable aux collectivités locales pour certains de leurs services publics et les bailleurs d’immeubles. Cependant les dispositions les concernant sont d’ordre réglementaire sur délégation expresse du législateur (articles 260 et 260 A du code des impôts).

L’assouplissement proposé par le présent article n’a aucune incidence sur les finances publiques.

*

* *

La Commission examine l’amendement CF 2 de M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Nous proposons de supprimer cet article pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure à propos de l’article 55.

M. le rapporteur pour avis. Avis défavorable. Je répète qu’il s’agit, cette fois, d’un simple article de simplification.

La Commission rejette cet amendement.

Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 56 sans modification.

ARTICLE 57 :
SIMPLIFICATION DU RÉGIME DES ENTREPÔTS FISCAUX

Dans le cadre de l’organisation des activités de commerce international, l’ « entrepôt fiscal » désigne un régime suspensif du paiement de la TVA pendant un laps de temps déterminé. Il existe actuellement cinq modalités d’entrepôt fiscal.

Le présent article tend à simplifier les trois régimes qui relèvent de la Direction générale des douanes et droits indirects : l’entrepôt national d’exportation, l’entrepôt national d’importation et le perfectionnement actif national en leur substituant un seul régime : le régime fiscal national suspensif.

I.– LE RÉGIME ACTUEL DES ENTREPÔTS FISCAUX

L’article 277 A du code général des impôts institue cinq régimes d’entrepôt fiscal permettant d’effectuer des opérations en suspension du paiement de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pendant la durée du placement sous ce régime, qui est exclusivement fiscal. Il n’a pas pour effet de suspendre d’autres dispositions nationales comme des mesures de politique nationale ou communautaire, des normes ou des droits d’accises.

Sous certaines conditions, les régimes d’entrepôt fiscal permettent d’effectuer les opérations suivantes :

− acheter des biens sur le marché intérieur ou acquérir des biens communautaires en suspension de TVA, afin de les stocker ou de les transformer. Cette suspension n'est pas applicable aux marchandises nationales ou communautaires utilisées lors d'un processus de transformation de marchandises placées sous le régime du perfectionnement actif national ;

− importer et stocker ou transformer en suspension de TVA des biens en provenance des départements d’outre-mer ou des autres territoires exclus du territoire fiscal de la Communauté européenne ;

− importer et stocker ou transformer en suspension de TVA des marchandises tierces préalablement mises en libre pratique ;

− céder en suspension de TVA les biens placés sous ce régime, sous réserve qu'ils restent placés sous le régime de l'entrepôt fiscal ;

− effectuer en suspension de TVA, certaines prestations de service sur des biens placés sous l'un des régimes pendant la durée de séjour ;

− effectuer en suspension de TVA certaines prestations de services afférentes aux livraisons, importations ou acquisitions intra-communautaires de biens destinés à être placés sous l'un de ces entrepôts.

Actuellement, outre les trois régimes d’entrepôt fiscal qui relèvent de la Direction générale des douanes et droits indirects, deux relèvent de la Direction générale des finances publiques : l’entrepôt de stockage de biens négociés sur un marché à terme international et l’entrepôt destiné à la fabrication de biens réalisés en commun par des entreprises, qui ne sont pas concernés par le présent article. Ces deux régimes sont très spécifiques et ne nécessitent pas, a priori, de refonte.

Elles concernent :

– le demandeur, qui doit être un assujetti établi en France ou le représentant d'un assujetti établi dans un autre État membre de l'Union européenne et désigné en application du I de l'article 289 A du CGI ;

– la nature des biens, étant exclus ceux qui font l’objet d’interdictions ou de restrictions justifiées par des raisons de moralité publique, d’ordre public, de sécurité publique ou de protection de la santé et également ceux qui sont destinés à être livrés au commerce de détail, c’est-à-dire qui sont destinés à la consommation finale.

Pour les entrepôts nationaux d'exportation et d'importation, la demande doit être déposée par l'entreposeur, titulaire du régime, c’est-à-dire la personne qui gère un entrepôt et qui en est titulaire. Pour le régime du perfectionnement actif national, la demande doit être déposée par la personne qui souhaite effectuer ou faire effectuer les opérations de transformation ou de fabrication.

L’ouverture d’un entrepôt ainsi que les changements modifiant un élément constitutif d’un entrepôt doivent être autorisés par l’administration. Sous réserve des dispositions particulières applicables à chaque type d’entrepôt fiscal, l’article 85 A de l’annexe III du code général des impôts dispose que « la décision autorisant l'ouverture de l'entrepôt fiscal détermine les éléments constitutifs de ce régime, ses conditions d'octroi et de fonctionnement, ainsi que, le cas échéant, la durée pendant laquelle le bénéfice du régime est accordé ».

Les opérateurs sont soumis à un certain nombre d’obligations, parmi lesquelles figurent les suivantes.

Chaque entrée et sortie d’un bien d’un régime d’entrepôt fiscal fait l’objet d’une déclaration. Sur autorisation, et sous conditions, le déclarant peut cependant déposer une déclaration récapitulative pour une durée n’excédant pas un mois.

Le titulaire de l’autorisation d’ouverture de l’entrepôt doit tenir deux registres : l’un relatif aux stocks et aux mouvements de biens placés sous l’entrepôt, l’autre relatif aux opérations effectuées sous l’entrepôt. Il doit être en possession du double des factures et de différentes pièces justificatives relatives aux opérations effectuées.

La sortie des biens du régime ainsi que le retrait de l’autorisation d’ouverture d’un entrepôt fiscal mettent fin à la suspension du paiement de la TVA. Toutefois, aucune taxe ne doit être acquittée lors de la sortie du régime si l'opération en cause (livraison, importation, acquisition intra-communautaire ou prestation de services) bénéficie par ailleurs d'une exonération légale.

Lors de la sortie des biens du régime d’entrepôt fiscal, la taxe due doit correspondre à celle qui aurait été acquittée si chacune des opérations réalisées en suspension avait été imposée. Si le bien n’a fait l’objet d’aucune livraison pendant son placement sous le régime, la taxe due est celle qui se rapporte à l’opération effectuée avant le placement du bien sous le régime, à laquelle s’ajoute la taxe relative aux prestations de services afférentes à cette opération et celle qui porte sur les prestations de services effectuées pendant le placement sous le régime. Si le bien a fait l’objet d’une ou plusieurs livraisons pendant son placement sous le régime, sa sortie entraîne le paiement de la taxe exigible au titre de la dernière livraison réalisée en suspension de taxe. Aucune taxe n’est due lorsque le bien avait été placé sous le régime par le propriétaire en dehors de toute transaction et n’a fait l’objet, pendant son placement, d’aucune livraison et d’aucune prestation de services.

Le régime de l’entrepôt national d’exportation concerne les marchandises françaises ou communautaires destinées à l’exportation (directe ou après passage par le régime du perfectionnement actif national) qui se trouvent libres de toute sujétion douanière sur le marché intérieur.

Le régime de l’entrepôt national d’importation s’applique aux marchandises en provenance des départements d’outre-mer, d’un autre territoire fiscal de l’Union européenne ou de pays tiers, qui sont mises en libre pratique et placées simultanément sous ce régime.

Le régime du perfectionnement actif national permet d’importer et de transformer certaines marchandises en provenance des pays visés dans le régime de l’entrepôt national d’importation.

Parmi les dispositions qui varient selon le régime appliqué, il convient de relever les suivantes :

Le délai de séjour des marchandises sous le régime est variable. Il est actuellement limité à deux ans dans le régime de l’entrepôt national d’exportation (prolongeable à titre exceptionnel), illimité sous le régime de l’entrepôt national d’importation et limité à la durée nécessaire pour effectuer la transformation et l’écoulement du produit obtenu dans le cadre du régime du perfectionnement actif national.

L’apurement du régime dépend également du régime appliqué. Le régime de l’entrepôt national d’exportation est apuré par l’exportation vers un pays tiers à l’Union européenne, un département d’outre-mer, un autre territoire exclu du territoire fiscal de l’Union européenne, par destruction ou abandon. Le reversement sur le marché intérieur peut cependant être autorisé à titre exceptionnel, sous réserve de la régularisation de l’opération au regard de la taxation. Le régime de l’entrepôt national d’importation est apuré par la mise à la consommation en France métropolitaine, la livraison vers un autre État membre de l’Union européenne, la réexportation vers un département d’outre-mer, vers un territoire exclu du territoire fiscal de l’Union européenne, un pays tiers à l’Union européenne, la destruction ou l’abandon. Le régime du perfectionnement actif national est apuré de la même manière, à l’exception de la mise à la consommation en France, qui ne peut être autorisée qu’à titre exceptionnel.

Les biens placés sous l’un des régimes d’entrepôt fiscal peuvent faire l’objet d’une cession sous ce régime en suspension de TVA, sous réserve qu’il y ait maintien du bien sous le régime.

La circulation physique entre deux entrepôts fiscaux se conçoit uniquement entre deux entrepôts situés sur le territoire métropolitain. Lorsqu'un bien doit être expédié vers un autre État membre de l’Union européenne, il doit d'abord faire l'objet d'une sortie du régime de l'entrepôt fiscal sous couvert d'une déclaration de sortie puis être soumis aux formalités liées aux livraisons intra-communautaires (dépôt d'une déclaration d'échange de biens).

Il convient de réaliser certaines formalités sauf lorsque la circulation physique de marchandises d'un lieu de stockage vers un autre lieu de stockage ne s'accompagne pas d'un changement de propriétaire ou d'une modification du type d'entrepôt.

Le transfert entre deux entrepôts fiscaux de type différent est possible uniquement dans certains cas : d’un entrepôt national d'exportation vers le régime du perfectionnement actif national ; d’un entrepôt national d'importation vers le régime du perfectionnement actif national ; du régime du perfectionnement actif national vers un entrepôt national d'importation. Ce transfert doit être autorisé par l’autorité de délivrance du régime initial.

Sous réserve du respect de certaines conditions, ni la circulation entre entrepôts du même type, ni le transfert entre entrepôts de type différent ne met fin au régime de suspension de TVA.

II.– LA SIMPLIFICATION DU RÉGIME

La multiplication des régimes d’entrepôt fiscal et d’entrepôt douanier va de paire avec la mise en œuvre de dispositions propres à chaque régime en matière de placement des biens, de durée de séjour ou de sortie du régime. Un même opérateur qui souhaiterait utiliser les trois régimes suspensifs fiscaux gérés par la Direction générale des douanes et des droits indirects devrait présenter trois demandes d’autorisation et gérer trois séries d’obligations identiques.

Du fait, notamment, de la complexité de ces régimes, l’utilisation des entrepôts fiscaux régis par la douane est marginale. On dénombrait en 2008 82 autorisations en vigueur d’entrepôt national d’exportation, 89 d’entrepôt national d’importation et 65 de perfectionnement actif national. Seuls 10 opérateurs utilisaient simultanément plusieurs types d’entrepôts fiscaux. En comparaison, 1 429 autorisations d’entrepôts douaniers étaient en vigueur à la même époque.

Le présent article propose de substituer un « régime national fiscal suspensif » aux trois régimes d’entrepôt fiscal gérés par la Direction des douanes et des droits indirects.

La grande majorité des règles applicables en matière d’entrepôt fiscal sont d’ordre réglementaire. Le Rapporteur pour avis n’est donc pas en mesure d’apprécier dans le détail le régime qui résulterait de l’adoption du présent article. Un certain nombre d’éléments ont cependant été portés à sa connaissance et peuvent dès lors être mentionnés. Ils devront se traduire par l’adoption de textes de nature réglementaire pour se voir conférer un effet en droit positif.

 L’inclusion de nouvelles fonctions

Le ministère du Budget indique dans l’évaluation préalable du projet d’article que celui-ci pourrait permettre d’ajouter d’autres fonctions aux fonctions couvertes par les anciens régimes et notamment s’appliquer :

– aux biens destinés à être exportés hors de la Communauté mais maintenus sur le territoire pour des raisons spécifiques, ce qui concerne notamment certains contrats de vente d’avions militaires avec formation de personnels en France ;

– aux biens destinés à être vendus dans des boutiques hors taxes des ports et aéroports ;

– aux biens et services vendus en France pour des installations et infrastructures utilisées pour les besoins d’organismes internationaux dans le cadre d’accords internationaux, lorsque ces opérations sont au final financées par un organisme international exonéré de TVA ;

– aux biens non passibles de droits de douanes qui viennent séjourner temporairement en France et qui ne peuvent bénéficier du régime douanier de l’admission temporaire en exonération totale de droits.

● Une « dématérialisation » des entrepôts

L’un des objectifs sous-tendant la réforme serait de procéder à une certaine « dématérialisation » des entrepôts. Le régime national fiscal suspensif deviendrait un statut fiscal pour la marchandise plutôt qu’une situation purement physique à laquelle s’attacherait une conséquence fiscale.

Aujourd'hui un façonnier qui importe des biens pour les travailler doit les localiser physiquement dans un local où ils doivent demeurer. S'il souhaite sous-traiter toute ou partie de son activité de transformation, il est nécessaire que le sous-traitant vienne travailler dans le local du donneur d'ordre ou dispose lui-même d'un régime suspensif pour recevoir les biens et réaliser sa prestation. La grande complexité de ces opérations ne favorise pas la fluidité des opérations économiques.

Dans le mécanisme tel qu’il a été présenté au Rapporteur pour avis, une fois que le régime aura été souscrit par le donneur d'ordre, les biens pourront être considérés comme en suspension lorsqu'ils se trouveront chez ce donneur d'ordre mais également chez un sous-traitant. La contrainte pour le façonnier donneur d'ordre sera d'indiquer clairement lors de la souscription du régime l'existence de cette sous-traitance et l'endroit où elle sera effectuée.

● Le recentrage du dispositif autour du destinataire des opérations

À l’issue de la réforme, le demandeur du régime serait la personne assujettie à la TVA, qui est le destinataire des opérations qui seront réalisées en suspension. L’objectif est de faire en sorte que les autorisations soient délivrées aux entreprises qui réalisent les opérations fiscales en suspension de la TVA, plutôt qu'à des intermédiaires qui n'utilisent pas les entrepôts pour leurs propres besoins mais disposent de locaux et facturent l'entrepôt comme service à d'autres opérateurs.

Il ne s'agit pas de mettre un terme à l'activité de ces intermédiaires mais de recentrer la demande sur l'opérateur qui utilise le régime. Si la gestion du régime est confiée par le demandeur à une tierce personne, la demande pourra alors être présentée par cette tierce personne au nom et pour le compte du mandant.

● Une simplification du régime

Le nouveau régime devrait permettre aux opérateurs utilisant actuellement plusieurs régimes, d’introduire une seule demande et d’opter pour les fonctions qui les intéressent.

Les possibilités de transfert entre les différents régimes devraient être étendues.

● La suppression de certaines contraintes

Les contraintes qui pourraient être supprimées sont les suivantes :

– l’interdiction d’utiliser des biens d’origine communautaire ou nationale dans le cas des opérations de transformations actuellement réalisées sous le régime du perfectionnement actif national ;

– la suppression pour les biens non sensibles de l’obligation de stocker les marchandises dans un local agréé par l’administration (sans préjudice pour cette dernière de la possibilité de connaître le lieu où ces biens sont conservés) ;

– l’obligation tenant à la délivrance d’attestations permettant de justifier de la situation des biens.

Le présent article prévoit aux paragraphes 1 à 7 de supprimer les trois types de régimes d’entrepôt fiscal régis par la Direction générale des douanes et des droits indirects et de créer à la place un régime national fiscal suspensif assurant les trois fonctions propres à chacun des régimes précédents (stockage à l’importation, à l’exportation et transformation).

Le paragraphe 9 du présent article indique que l’autorisation d’ouverture d’un régime d’entrepôt fiscal, délivrée par le ministre du budget, détermine les principales caractéristiques de l’entrepôt ou du régime national fiscal suspensif demandé. Cela est déjà prévu par l’article 85 A de l’annexe III du code général des impôts. Au-delà de la légalisation d’un dispositif réglementaire, il convient de remarquer que le ministre du budget pourrait bénéficier, à l’issue du présent article et sous réserve des dispositions réglementaires qui seront adoptées, d’une liberté beaucoup plus grande dans la modulation du régime qu’il est susceptible d’accorder. Si cela est un facteur de simplification pour les entreprises qui utilisent plusieurs régimes d’entrepôt fiscal, il ne faudrait pas que cela conduise à une plus grande disparité dans la détermination des caractéristiques de l’entrepôt ou du régime suspensif. Le rapporteur pour avis souhaite donc que les critères d’admission ou de rejet au bénéfice du régime suspensif et de détermination de ses caractéristiques soient explicités.

Les paragraphes 12, 13 et 14 du présent article insèrent un 4° au 3 du II de l’article 277 A du code général des impôts. Ils prévoient que lorsque des biens placés sous un régime national fiscal suspensif, en vue de leur exportation hors de France sont reversés sur le marché national, il est fait application d’un intérêt de retard sur la taxe due. L’intérêt de retard est celui qui est mentionné au III de l’article 1727 du code général des impôts, soit 0,4 % par mois.

Le paragraphe 15 du présent article étend la dérogation prévue au 4 du II de l’article 277 A du code général des impôts, qui dispose actuellement que le redevable de la taxe est dispensé du paiement lorsque le bien fait l’objet d’une exportation ou d’une livraison exonérée en vertu de l’article 262 ter du même code, qui concernent certaines livraisons ou acquisitions intracommunautaires. Le présent article étend la dispense de paiement de la TVA aux biens qui font l’objet d’une livraison ou d’une exportation en vertu de l’article 262 du même code qui concerne de nombreuses opérations dont certaines livraisons de biens en dehors de la Communauté européenne.

Les paragraphes 19, 20 et 21 du présent article visent à simplifier les obligations résultant de la tenue du registre des stocks et des mouvements de biens, ainsi que du registre des opérations effectuées sous l’entrepôt. Ils permettent d’attribuer aux assujettis une autorisation leur permettant de regrouper les informations contenues dans les registres dans une comptabilité-matière identifiant les biens placés sous le régime visé, ainsi que la date d’entrée et de sortie des biens.

Les paragraphes 10, 16, 17, 18, 23, 24, 25, 26 et 27 du présent article mettent en cohérence divers articles du code général des impôts avec la rédaction de l’article 277 A du même code, telle qu’issue du présent article.

Le paragraphe 22 du présent article est également un paragraphe de mise en cohérence. Il a cependant une plus grande portée. Le régime du perfectionnement actif national étant inclus dans le régime national fiscal suspensif, il est, à l’issue du présent article, compris dans le périmètre du b du 3° de l’article 302 F ter du code général des impôts.

Le paragraphe 11 du présent article est destiné à prendre en compte la situation des biens importés de pays tiers qui viennent séjourner temporairement en France sous le régime douanier de l'admission temporaire en exonération totale des droits et taxes. Ce régime permet d'importer sur le territoire de la Communauté européenne un bien en provenance d'un pays tiers sans lui faire supporter les droits et taxes exigibles (pendant une durée limitée). C'est par exemple le cas de l'importation par une galerie d'une œuvre d'art en vue d'une vente éventuelle. Le présent article propose d’inclure les biens en provenance du territoire d'un autre État membre exclu du territoire fiscal au sens de l'article 5 de la directive 2006/112/CE, ainsi que les biens provenance des départements d’outre-mer mentionnés à l’article 294, 3 du code général des impôts, afin que ces flux ne soient pas moins bien traités en matière de TVA que les flux avec les pays tiers. II s'agit ici de réparer un oubli et de compléter le dispositif afin d’obtenir un traitement équitable dans les relations entre la France métropolitaine et les départements d’outre-mer.

III.– ENTRÉE EN VIGUEUR

Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2011.

Le cas pratique d’une PME

La société P. fabrique et vend des chaussures dans le monde entier. Réalisant des opérations à l’import / export, elle décide d’ouvrir un entrepôt fiscal suspensif de TVA afin d’éviter de supporter la charge de trésorerie due au portage de la TVA déductible. Cette entreprise peut être intéressée par trois situations de suspension de la taxe :

- entrepôt d’exportation si elle souhaite stocker des marchandises destinées à l’exportation ;

- entrepôt d’importation si elle souhaite stocker des marchandises importées et n’acquitter la TVA qu’en sortie de régime, voire pas du tout en cas d’exportation ou de livraison intracommunautaire ;

- entrepôt de perfectionnement actif si elle souhaite transformer ou faire transformer des marchandises sous le régime.

Actuellement, elle doit déposer une demande d’ouverture de régime auprès des services de la douane et créer un entrepôt, pour chacune de ces situations.

Si l’article 57 est adopté, elle n’aura à déposer qu’une seule demande d’ouverture, qui rassemblera les diverses « fonctions » au sein d’un régime suspensif unique. Elle indiquera par exemple que la « fonction export A » située dans un local à Lille est destinée à recevoir des marchandises qui seront exportées ; que la « fonction perfectionnement actif B » comprend une installation à Lens qui lui appartient et où est effectué le travail à façon de biens en vue de leur prochaine exportation, ainsi qu’une installation à Douai, tenue par un sous-traitant (la possibilité d’inclure les sous-traitants dans le périmètre du régime étant désormais ouverte).

Cette entreprise bénéficiera également de plus de souplesse dans la gestion de ses stocks « inter-entrepôts ». Si elle a besoin dans son établissement A d’un bien stocké dans le B, le nouveau régime l’y autorisera désormais. Le précédent régime soumettait à autorisation la plupart des mouvements entre entrepôts, y compris d’un même titulaire.

Les règles de gestion des biens en fonction de leur pays de provenance seront également assouplies. Grâce au transfert entre fonctions autorisé par la réforme, la société P. aura le droit de transférer des biens qu’elle avait placés sous la fonction « exportation » vers la fonction « perfectionnement actif » et de les utiliser dans le cadre de son activité de travail à façon. Avant la réforme, les biens en provenance du territoire national ou d’un autre État membre ne pouvaient être placés sous un régime de perfectionnement actif.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 57 sans modification.

Avant l’article 55.

La Commission est saisie de l’amendement CF 3 du rapporteur.

M. le rapporteur pour avis. Je ne reviens pas sur cet amendement que j’ai déjà eu l’occasion de présenter.

M. Jean-Louis Dumont. Une telle modification de titre nous a rarement paru aussi justifiée.

M. Michel Diefenbacher. Je n’ai pas d’objection contre l’adoption de cet amendement, mais ne faudrait-il pas également modifier le titre du chapitre Ier ?

M. le président Didier Migaud. Le rapporteur pourra se faire l’écho de cette suggestion auprès de la Commission des lois. Cela étant, on peut considérer que « la qualité des normes » visée par le titre du chapitre Ier comprend la mise en conformité de notre droit avec les directives communautaires.

La Commission adopte l’amendement CF 3.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 

N° CF 1

AMENDEMENT

présenté par
M. Jérôme Cahuzac et les membres du groupe SRC

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ARTICLE 55

Supprimer cet article.

N° CF 2

AMENDEMENT

présenté par
M. Jérôme Cahuzac et les membres du groupe SRC

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ARTICLE 56

Supprimer cet article.

N° CF 3

AMENDEMENT

présenté par
M. Olivier Carré, Rapporteur pour avis au nom de la commission des Finances

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ARTICLE ADDITIONNEL
AVANT L’ARTICLE 55

Rédiger ainsi l’intitulé de la section 6 : « Dispositions de mise en conformité du droit français avec le droit européen et de simplification en matière fiscale ».

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