N° 3040 - Rapport de M. Philippe Gosselin sur le projet de loi relatif à la garde à vue (n°2855)



N° 3040

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 décembre 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (N° 2855) relatif à la garde à vue,

PAR M. Philippe GOSSELIN,

Député.

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LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES AU PROJET DE LOI PAR VOTRE COMMISSION 9

INTRODUCTION 11

I. LE DROIT DE LA GARDE À VUE DOIT IMPÉRATIVEMENT ÊTRE RÉFORMÉ AVANT LE 1ER JUILLET 2011 13

A. LE DROIT ACTUEL DISTINGUE LA GARDE À VUE DE DROIT COMMUN DE RÉGIMES DÉROGATOIRES 13

1. La garde à vue de droit commun 13

a) Les conditions du placement en garde à vue et la durée de la mesure 13

b) Les droits de la personne gardée à vue 13

2. Les régimes dérogatoires 15

B. UNE RÉFORME AMBITIEUSE DE L’ENSEMBLE DE LA PROCÉDURE PÉNALE A ÉTÉ ENVISAGÉE 17

1. La garde à vue fait l’objet de critiques anciennes et récurrentes 17

a) Des pressions parfois dénoncées par les personnes placées en garde à vue 17

b) Un contrôle insuffisant des conditions de déroulement des gardes à vue 19

c) De multiples propositions de réformes ont été formulées 19

2. Une réforme d’ampleur de la procédure pénale a été préparée à la demande du Président de la République 20

a) Le discours du Président de la République du 7 janvier 2009 20

b) Les conclusions du comité Léger 21

c) L’élaboration de deux avant-projets de loi 22

C. DE RÉCENTS ARRÊTS ET DÉCISIONS RENDENT DÉSORMAIS URGENTE UNE RÉFORME AUTONOME DE LA GARDE À VUE 24

1. La décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 24

2. Les trois arrêts de la Cour de cassation du 19 octobre 2010 25

3. Le dépôt du présent projet de loi 26

II. LES ENJEUX DE LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE 26

A. LA RÉFORME DOIT CONCILIER TROIS OBJECTIFS MAJEURS 27

1. Réduire le nombre de gardes à vue et renforcer les droits des personnes gardées à vue 27

2. Préserver les capacités d’enquête des forces de l’ordre 28

3. Respecter les droits des victimes 29

B. LA RÉFORME DOIT TENIR COMPTE DES IMPLICATIONS DES JURISPRUDENCES NATIONALES ET EUROPÉENNES RÉCENTES 29

1. Les implications de la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 29

2. Les implications de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme… 31

a) … sur le contrôle de la garde à vue 31

b) … sur l’assistance par un avocat 33

c) … sur la question des régimes dérogatoires 34

3. Les implications des arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation 35

a) … sur l’assistance par un avocat 35

b) … sur la question des régimes dérogatoires 35

C. LA RÉFORME DOIT AUSSI TENIR COMPTE DES CONTRAINTES PRATIQUES QUI PÈSENT SUR LES ACTEURS DE LA CHAÎNE PÉNALE 36

1. Des contraintes humaines 36

2. Des contraintes géographiques 39

3. Des contraintes matérielles et financières 40

III. UN PROJET DE LOI COMPORTANT DE RÉELLES AVANCÉES, MAIS QUI DEVAIT ÊTRE AMÉLIORÉ ET COMPLÉTÉ 42

A. L’INSTAURATION DU PRINCIPE DE L’AUDITION LIBRE DES SUSPECTS A ÉTÉ REJETÉE PAR LA COMMISSION 42

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 42

2. La commission des Lois a décidé la suppression du dispositif 43

B. LA DÉFINITION DE LA GARDE À VUE, LA PRÉCISION DES MOTIFS QUI LA JUSTIFIENT ET SON CONTRÔLE 43

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 43

a) La définition de la garde à vue et des motifs qui la justifient 43

b) Le contrôle de la garde à vue est exercé par le procureur de la République 44

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 44

a) La définition de la garde à vue et des motifs qui la justifient est précisée 44

b) Le contrôle de la garde à vue est confié à un magistrat du siège 44

C. LA DURÉE DE LA GARDE À VUE DE DROIT COMMUN ET LES CONDITIONS DE SA PROLONGATION 45

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 45

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 45

D. LA RECONNAISSANCE DE NOUVEAUX DROITS À LA PERSONNE GARDÉE À VUE 46

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 46

a) Le droit de se taire 46

b) Le droit de faire prévenir un proche et l’employeur 46

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 46

E. LE DROIT RENFORCÉ À L’ASSISTANCE PAR UN AVOCAT 47

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 47

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 47

F. LES PRÉROGATIVES ET OBLIGATIONS DE L’AVOCAT ASSISTANT UNE PERSONNE GARDÉE À VUE 48

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 48

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 48

G. LES RÉGIMES DÉROGATOIRES ET LA RETENUE DOUANIÈRE 49

1. Les dispositions contenues dans le projet de loi 49

2. Les modifications apportées par la commission des Lois 49

a) Les régimes dérogatoires 49

b) La retenue douanière 50

H. LA PRISE EN COMPTE DES DROITS DE LA VICTIME 50

AUDITION DE M. MICHEL MERCIER, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTÉS 53

EXAMEN DES ARTICLES 79

Chapitre Ier — Dispositions relatives à l’encadrement de la garde à vue 79

Article 1er (art. 62-2 à 62-6 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Suppression de l’audition libre – Limitation du champ et des motifs de placement en garde à vue – Contrôle de la garde à vue et de son éventuelle prolongation 79

Article 2 (art. 63 et 63-1 du code de procédure pénale) : Procédure de placement en garde à vue – Durée de la garde à vue –Notification des droits 98

Après l’article 2 112

Article 3 (art. 63-2 du code de procédure pénale) : Droit de faire prévenir à la fois un proche et son employeur 112

Article 4 (art. 63-3 du code de procédure pénale) : Droit de la personne gardée à vue à être examinée par un médecin 114

Article 5 (art. 63-3-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Droit de la personne gardée à vue à l’assistance d’un avocat 117

Article 6 (art. 63-4 du code de procédure pénale) : Modalités et durée de l’entretien confidentiel avec un avocat 127

Article 7 (art. 63-4-1 à 63-4-4 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Possibilité pour l’avocat de consulter certains documents de la procédure et d’assister aux auditions de la personne placée en garde à vue 129

Article  7 bis (art. 63-4-5 [nouveau] du code de procédure pénale ; art. 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991) : Droit de la victime à être assistée par un avocat en cas de confrontation avec la personne gardée à vue 147

Après l’article 7 148

Article 8 (art. 63-5 du code de procédure pénale) : Droit des personnes gardées à vue au respect de leur dignité 149

Article  9 (art. 63-6 à 63-8 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Encadrement des mesures de sécurité et des fouilles pouvant être imposées aux personnes gardées à vue – Issue de la garde à vue 151

Article 10 (art. 64 du code de procédure pénale) : Procès-verbal de placement en garde à vue - Registre des gardes à vue 154

Chapitre II — Dispositions diverses 157

Article 11 A (art. 18 du code de procédure pénale) : Compétence nationale des officiers de police judiciaire 157

Article 11 (art. 61 et 62 du code de procédure pénale) : Prérogatives des officiers de police judiciaire – Audition de témoins 158

Article 12 (art. 706-88, 706-88-1 [nouveau] et 706-88-2 [nouveau] du code de procédure pénale) : Report de l’intervention de l’avocat pour les gardes à vue en matière de criminalité organisée – Possibilité de restreindre la liberté de choix de l’avocat en matière de terrorisme 159

Article 13 (art. 803-3 du code de procédure pénale) : Droits de la personne en cas de défèrement faisant suite à une garde à vue 165

Article 14 (art. 64-1, 65, 77,141-4, 154, 627-5, 695-27, 696-10, 712-16-3, 716-5, 812, 814 et 880 du code de procédure pénale) : Coordinations au sein du code de procédure pénale – Application des règles nouvelles de la garde à vue dans le cadre de l’enquête préliminaire et de l’exécution d’une commission rogatoire 167

Article 14 bis (art. 323, art. 323-1 à 323-10 [nouveaux] du code des douanes) : Harmonisation du régime de la retenue douanière avec le nouveau régime de la garde à vue 172

Article 14 ter (art. L. 3341-1 du code de la santé publique) : Possibilité de remise à un tiers de confiance d’une personne en état d’ivresse 174

Après l’article 14 175

Article 15 (art. 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante) : Garde à vue des mineurs 176

Après l’article 15 177

Article 15 bis (art. 127, 133 et 135-2 du code de procédure pénale) : Modalités d’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt lorsque la personne recherchée est interpellée à plus de 200 kilomètres du juge mandant 178

Article 16 (art. 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique) : Rétribution de l’avocat désigné d’office pour l’assistance d’une personne gardée à vue 180

Après l’article 16 182

Article 17 : Application outre-mer 182

Article 18 : Entrée en vigueur 183

Après l’article 18 184

TABLEAU COMPARATIF 185

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 225

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 233

ANNEXE 1 : TABLE RONDE, OUVERTE À LA PRESSE, SUR LES JURISPRUDENCES RELATIVES À LA GARDE À VUE 271

ANNEXE 2 : ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT EUROPÉEN APPLICABLE OU EN COURS D’ÉLABORATION 295

ANNEXE 3 : NOMBRE DE GARDES À VUE DÉCIDÉES EN 2009 303

ANNEXE 4 : CONTRAINTES HUMAINES PESANT SUR LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE 305

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 311

DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LE RAPPORTEUR 314

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES
AU PROJET DE LOI PAR VOTRE COMMISSION

—  La Commission a, à l’initiative du rapporteur et de M. Philippe Houillon, décidé la suppression du dispositif de l’audition libre, tel que prévu par l’article 1er du projet de loi.

—  Elle a, à ce même article, précisé la définition de la garde à vue en rapprochant dans un même article tous les critères qui la justifient : une personne ne peut être placée en garde à vue que si elle est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commette un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement et si la mesure constitue l’unique moyen de parvenir à la réalisation d’un des six objectifs fixés par le projet de loi (notamment empêcher la modification des preuves, la concertation avec des complices ou d’éventuelles pressions sur les témoins).

—  Elle a, contre l’avis du rapporteur, précisé que c’est sous le contrôle d’un juge du siège – le juge des libertés et de la détention ou, à défaut, le Président du tribunal de grande instance ou son délégué – et non du procureur de la République, que s’exécute la garde à vue (article 1er).

—  À l’initiative du rapporteur, la Commission a supprimé à l’article 2 la possibilité pour le procureur de la République de décider d’un placement en garde à vue : seul un officier de police judiciaire peut décider de la mesure.

—  À l’initiative de Mme Delphine Batho et contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement précisant qu’il est établi un procès-verbal unique de déroulement de la garde à vue (article 2).

—  La Commission a, à l’initiative de M. Éric Ciotti, précisé le champ d’application du droit au silence reconnu à la personne gardée à vue : le droit de se taire ne s’applique pas à la déclinaison de l’identité de l’intéressé (article 2).

—  La Commission a, à l’initiative de M. Jean-Pierre Decool, précisé que la « circonstance insurmontable » justifiant un report de l’appel à un proche et à l’employeur du gardé à vue par l’officier de police judiciaire devait être expressément mentionnée au procès-verbal de déroulement de la garde à vue (article 3).

—  La Commission a précisé et complété les dispositions relatives à l’assistance de la personne gardée à vue par un avocat (article 7) :

●  a été institué, à l’initiative du rapporteur, un « délai de carence » de deux heures, avant l’expiration duquel la première audition de la personne gardée à vue ne pourra pas débuter ; par exception et en cas d’urgence, l’audition pourra être débutée avant l’expiration de ce délai, sur autorisation du procureur de la République ;

●  le projet prévoyait la possibilité, dans les gardes à vue de droit commun, d’un report de douze heures, décidé par le procureur de la République, de la faculté pour l’avocat de consulter les procès-verbaux d’audition et d’assister aux auditions ; la Commission a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant la possibilité, pour les infractions punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement, d’un deuxième report, décidé par le juge des libertés et de la détention, de la présence de l’avocat lors des auditions, jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue ;

●  le projet limitait le rôle de l’avocat assistant à l’audition d’une personne gardée à vue à la possibilité de présenter des observations écrites, excluant toute intervention orale. La Commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant la possibilité pour l’avocat, à la fin de l’audition, de poser des questions.

—  À l’initiative de son rapporteur, la Commission a adopté un article 7 bis, prévoyant le droit pour la victime d’une infraction à être assistée par un avocat si elle est confrontée avec une personne gardée à vue qui est elle-même assistée.

—  À l’article 9, qui encadre les mesures de sécurité et les fouilles dont peut faire l’objet la personne gardée à vue, la Commission a adopté un amendement de M. Philippe Goujon prévoyant la possibilité pour la personne gardée à vue de conserver « certains objets intimes », en contrepartie de la signature d’une décharge.

—  À l’initiative de M. Jean-Jacques Urvoas, la Commission a, malgré l’avis défavorable du rapporteur, adopté un amendement prévoyant la compétence nationale des officiers de police judiciaire (article 11 A).

—  En matière de régimes dérogatoires de garde à vue, l’article 12 excluait l’application des nouvelles dispositions relatives au droit à l’assistance par un avocat. La Commission a adopté un amendement du Gouvernement, sous-amendé par le président Jean-Luc Warsmann et par le rapporteur. L’article adopté par la Commission prévoit, pour les infractions mentionnées à l’article 706-73 du code de procédure pénale, que :

●  l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue peut être reportée, jusqu’à la soixante-douzième heure de garde à vue en matière de trafic de stupéfiants et de terrorisme, et jusqu’à la quarante-huitième heure pour les autres infractions ;

●  le report est subordonné à l’existence de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ;

●  en enquête préliminaire ou de flagrance, la décision relève du procureur de la République jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue, puis du juge des libertés et de la détention au-delà. Dans le cas d’une information judiciaire, la compétence appartient au juge d’instruction ;

●  en matière de terrorisme, le juge des libertés et de la détention pourra décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités.

—  À l’initiative du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement modifiant le régime de la retenue douanière pour tirer les enseignements de la décision du Conseil constitutionnel du 22 septembre 2010 (article 14 bis).

—  À l’initiative du rapporteur, la Commission a réécrit l’article L. 3341-1 du code de la santé publique relatif au dégrisement pour prévoir qu’une personne en état d’ivresse qu’il n’est pas nécessaire d’entendre immédiatement après qu’elle a recouvré la raison peut être placée sous la responsabilité d’un tiers de confiance afin d’éviter de multiplier inutilement les placements en cellule de dégrisement (article 14 ter).

—  La Commission a adopté, à l’initiative du Gouvernement, un amendement tirant les conséquences du récent arrêt Moulin contre France de la Cour européenne des droits de l’Homme en matière d’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt d’une personne recherchée interpellée à plus de 200 kilomètres du juge mandant (article 15 bis).

MESDAMES, MESSIEURS,

« Nul homme ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu’elle a prescrites ».

Ainsi défini par l’article 7 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, le droit à la sûreté, proclamé par l’article 2 de cette même Déclaration, est également consacré par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, dont l’article 5 dispose que « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté » et définit les cas et les formes autorisant une privation légitime de liberté ainsi que les droits dont doit bénéficier toute personne privée de sa liberté.

Mesure policière d’enquête prévue par le code de procédure pénale, la garde à vue est une mesure privative de liberté, au cours de laquelle une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction est retenue par les enquêteurs, ces derniers pouvant pendant la durée de la mesure accomplir un certain nombre d’actes d’enquête, et notamment procéder à l’audition de la personne gardée à vue.

La garde à vue connaît aujourd’hui une crise double, liée d’une part à son explosion quantitative et d’autre part à son trop faible encadrement juridique.

Les gardes à vue ont connu un développement très important au cours des dix dernières années : leur nombre est passé de 336 718 en 2001 à 792 293 en 2009, dont 174 244 pour des infractions relevant du code de la route. Les raisons de cette augmentation considérable – certains diront incontrôlée – sont multiples : cette hausse tient tout d’abord en grande part à l’augmentation de certaines formes de délinquance quotidienne mais aussi de criminalité organisée. Sans doute une part de l’augmentation s’explique-t-elle aussi par l’introduction d’une culture du résultat dans le fonctionnement des services de police ayant conduit à retenir, pendant quelques années, le nombre de gardes à vue comme indicateur de l’activité des services. Mais une autre raison majeure de cette hausse importante du nombre de gardes à vue est juridique : depuis décembre 2000, la jurisprudence constante de la Cour de cassation impose le placement en garde à vue de toute personne devant être entendue dès lors qu’elle a fait l’objet d’une interpellation sous contrainte.

Deuxième facette de la crise de la garde à vue : son encadrement est devenu insuffisant au regard de l’évolution des exigences constitutionnelles et conventionnelles.

Cet encadrement est relativement récent en France. Sous l’empire du code d’instruction criminelle de 1808, les actes de recherche et d’investigation relevaient de la compétence exclusive des magistrats, qui devaient statuer rapidement sur la mise en œuvre d’une éventuelle mesure coercitive prolongée. Ainsi, le code d’instruction criminelle ne comportait aucune disposition sur l’arrestation par la police judiciaire et attribuait aux magistrats la conduite des enquêtes. La loi du 8 décembre 1897, en autorisant l’avocat à assister son client pendant les interrogatoires réalisés par les magistrats, a indirectement favorisé le développement des mesures de garde à vue : dans le but d’éviter la présence de l’avocat, parquet et police mirent en place des enquêtes officieuses, qui se traduisaient parfois par des rétentions arbitraires.

Ce n’est qu’en 1958 que le législateur consacra la garde à vue en l’inscrivant dans le code de procédure pénale, tout en l’entourant d’un minimum de garanties. Le dispositif initial, qui a subi un certain nombre de modifications, résulte aujourd’hui principalement de trois textes législatifs : les lois n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale et n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes, qui ont institué les droits dont dispose aujourd’hui la personne placée en garde à vue, et la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, qui a instauré en matière de criminalité organisée un régime de garde à vue dérogatoire tant sur le plan de la durée maximale de la mesure que s’agissant des droits de la personne gardée à vue.

Mais cet encadrement de la garde à vue se révèle aujourd’hui insuffisant au regard de ce que sont devenus, en 2010, les standards constitutionnels et européens. Le régime français de la garde à vue a ainsi été récemment déclaré contraire, à la fois à la Constitution, par une décision rendue le 30 juillet 2010 par le Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité, et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, par trois arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation, rendus le 19 octobre 2010. Le Conseil constitutionnel comme la Cour de cassation ont toutefois prévu que leur décision et arrêts ne prendraient effet qu’à compter du 1er juillet 2011.

Le droit de la garde à vue doit donc aujourd’hui être impérativement réformé avant cette date (I), ce qui ne saurait être fait sans que le législateur ait une pleine conscience des enjeux de la réforme (II). Prenant acte de ces enjeux et contraintes qui pèsent sur le législateur, votre commission des Lois a sensiblement modifié et complété le projet de loi (III).

I. LE DROIT DE LA GARDE À VUE DOIT IMPÉRATIVEMENT
ÊTRE RÉFORMÉ AVANT LE 1ER JUILLET 2011

Sans doute aurait-il été préférable – c’est en tout cas l’avis assez largement partagé par les personnes entendues par votre rapporteur – que le régime juridique de la garde à vue « à la française », qui distingue la garde à vue de droit commun de procédures dérogatoires, fût réformé dans le cadre d’une réforme globale de la procédure pénale. Toutefois, de récents arrêts et décisions rendent désormais urgente une réforme autonome de la garde à vue.

Le droit actuel de la garde à vue se caractérise par l’existence de deux régimes distincts : la garde à vue de droit commun, d’une part, et les régimes dérogatoires, d’autre part.

En application des articles 63, 77 et 154 du code de procédure pénale, dans le cadre respectivement d’une enquête de flagrance, d’une enquête préliminaire ou d’une instruction, tout officier de police judiciaire (OPJ) peut garder à sa disposition toute personne « à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ».

La durée initiale de la garde à vue est limitée à vingt-quatre heures, mais elle peut être prolongée pour la même durée sur autorisation du ministère public, dans le cadre d’enquêtes de flagrance ou préliminaire, ou du juge d’instruction, dans le cas où une information judiciaire est ouverte. Quel que soit le cadre de la garde à vue, l’OPJ prenant la décision de placement doit en aviser immédiatement l’autorité judiciaire compétente - procureur de la République ou juge d’instruction, selon le cas.

Les droits des personnes placées en garde à vue sont définis par les articles 63-1 à 63-4 du code de procédure pénale.

Le premier des droits reconnus à la personne placée en garde à vue est un droit à l’information : « Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l’article 63 ». Le droit à l’information comporte un double aspect : droit à être informé des faits qui sont reprochés, d’une part, droit à être informé de ses droits, d’autre part.

L’article 63-2 du code de procédure pénale prévoit le droit de faire prévenir un proche ou son employeur : « Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande (…) faire prévenir par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe, l’un de ses frères et soeurs ou son employeur de la mesure dont elle est l’objet ».

Ce droit n’est pas un droit absolu, le second alinéa de l’article prévoyant que « si l’officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l’enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s’il y a lieu, d’y faire droit ».

La personne gardée à vue a le droit d’être examinée par un médecin. L’article 63-3 du code de procédure pénale prévoit que « Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue » et que « Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier ».

À ce droit du gardé à vue de bénéficier, à sa demande, d’un examen médical, s’ajoute la faculté, ouverte au procureur de la République ou à l’officier de police judiciaire, « à tout moment » et « d’office », de « désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue ».

Enfin, le troisième alinéa de l’article 63-3 prévoit qu’« un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ».

La personne soumise à une mesure de garde à vue dispose du droit de « demander à s’entretenir avec un avocat », ce droit pouvant être exercé dès le début de la garde à vue (1). Selon les cas, l’avocat sera soit un avocat choisi, nommément désigné par la personne et que l’OPJ devra alors informer de la demande formulée, soit un avocat commis d’office par le bâtonnier si la personne « n’est pas en mesure d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté ».

Le rôle de l’avocat dans le cadre de cet entretien est strictement défini et encadré par les deuxième à cinquième alinéas de l’article 63-4. Ainsi, le deuxième alinéa dispose que « l’avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien », dont la durée maximale est fixée à trente minutes. Les seules informations dont il dispose préalablement à cet entretien sont « la nature et [la] date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête », dont doit l’informer l’officier de police judiciaire. L’unique prérogative dont dispose l’avocat à l’issue de l’entretien est de « présente[r], le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure ».

Aux termes du cinquième alinéa de l’article 63-3, l’avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.

L’avant-dernier alinéa de l’article 63-3 prévoit que lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut à nouveau demander à s’entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation, dans les mêmes conditions que celles décrites précédemment.

La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a institué des règles dérogatoires pour les affaires relevant de la criminalité organisée. La liste des infractions entrant dans la catégorie de la criminalité organisée est définie par l’article 706-73 du code de procédure pénale et inclut le terrorisme et le trafic de stupéfiants.

Article 706-73 du code de procédure pénale

« La procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue par le présent code, sous réserve des dispositions du présent titre :

1° Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8° de l’article 221-4 du code pénal ;

2° Crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l’article 222-4 du code pénal ;

3° Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ;

4° Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code pénal ;

5° Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;

6° Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;

7° Crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal ;

8° Crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;

8° bis (Abrogé)

9° Crime de destruction, dégradation et détérioration d’un bien commis en bande organisée prévu par l’article 322-8 du code pénal ;

10° Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ;

11° Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ;

12° Délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339-8, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ;

13° Délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;

14° Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° à 13° ;

15° Délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal, lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une des infractions mentionnées aux 1° à 14° ;

16° Délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il est en relation avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 15°.

Pour les infractions visées aux 3°, 6° et 11°, sont applicables, sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que celles des titres XV, XVI et XVII. »

Les adaptations par rapport aux règles de droit commun de la procédure pénale portent, s’agissant de la garde à vue, sur la durée maximale de celle-ci et sur les droits ouverts à la personne gardée à vue.

S’agissant de la durée de la garde à vue, l’article 706-88 du code de procédure pénale porte la durée totale maximale de la garde à vue à quatre-vingt-seize heures pour l’ensemble des infractions visées à l’article 706-73, sur décision écrite et motivée du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction lorsque la garde à vue est exécutée dans le cadre d’une commission rogatoire. Lorsqu’« il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ou que les nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement », la durée de la garde à vue peut, depuis la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme, exceptionnellement et dans les mêmes conditions, être portée à six jours.

S’agissant des droits de la personne gardée à vue, le dernier alinéa de l’article 63-4 prévoit, pour certaines des infractions relevant de la criminalité organisée visées par l’article 706-73, un report du moment de l’intervention de l’avocat à la quarante-huitième voire à la soixante-douzième heure. Le report sera de quarante-huit heures pour les infractions prévues aux 4°, 6°, 7°, 8° et 15° de l’article 706-73 : crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée, crimes et délits aggravés de proxénétisme, crime de vol commis en bande organisée, crimes aggravés d’extorsion, et délits d’association de malfaiteurs lorsqu’ils ont pour objet la préparation d’une autre infraction prévue par l’article 706-73. Le report est de soixante-douze heures pour les infractions prévues aux 3° et 11° du même article : crimes et délits de trafic de stupéfiants et crimes et délits constituant des actes de terrorisme.

Le dernier alinéa de l’article 63-4 disposant que « Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue par les enquêteurs dès qu’il est informé par ces derniers du placement en garde à vue », le report de l’intervention de l’avocat est applicable de plein droit, sans décision d’un magistrat, dès lors que la garde à vue est décidée pour l’une des infractions précédemment visées.

Dans le cas où une garde à vue est prolongée au-delà de quatre-vingt-seize heures pour une infraction terroriste, la personne gardée à vue peut bénéficier du droit à s’entretenir avec un avocat « à l’expiration de la quatre-vingt-seizième heure et de la cent-vingtième heure », sans que l’intervention de l’avocat puisse à nouveau être reportée ou écartée. Le huitième alinéa de l’article 706-88 prévoit que « La personne gardée à vue est avisée de ce droit dès la notification de la prolongation ».

Enfin, toujours dans le cas d’une prolongation au-delà de quatre-vingt-seize heures, le dernier alinéa de l’article 706-88 prévoit que, s’il n’a pas été fait droit à la demande de la personne gardée à vue de faire prévenir un proche ou son employeur, en application du second alinéa de l’article 63-2, la demande peut être réitérée à compter de la quatre-vingt-seizième heure.

Si la garde à vue, qui fait l’objet de critiques anciennes et récurrentes, doit être réformée, cette réforme aurait initialement dû trouver sa place dans le cadre de la rénovation de la procédure pénale souhaitée par le Président de la République en 2009.

Il est parfois reproché aux enquêteurs d’utiliser la phase de la garde à vue pour exercer des pressions sur les personnes soupçonnées et ainsi obtenir des aveux. L’ensemble des enquêteurs entendus par votre rapporteur a souligné que la police judiciaire avait abandonné, depuis plusieurs années déjà, la « culture de l’aveu » pour une « culture de la preuve » : l’aveu, certes, est recherché par les enquêteurs, mais il n’a de valeur que lorsqu’il vient corroborer des éléments matériels de preuve. Il n’en demeure pas moins que, dans la culture judiciaire française, si l’aveu n’est plus la « reine des preuves » qu’il a longtemps été, il conserve un poids réel dans les procédures pénales.

Dès lors, et sans qu’il soit ici question de stigmatiser les forces de police dont les méthodes d’investigation, dans l’immense majorité des cas, respectent la loi et témoignent d’un grand professionnalisme, la recherche d’aveux peut encore parfois déboucher sur des méthodes inappropriées de la part de certains enquêteurs. Le rapport de la commission d’enquête sur l’affaire dite d’Outreau avait ainsi consacré de longs passages aux pressions psychologiques parfois exercées sur les personnes placées en garde à vue, et notamment au témoignage de M. Alain Marécaux sur les « méthodes » utilisées par les policiers :

« Première méthode : les injures. Je suis assis, menotté, accroché au sol. Je souffre d’un problème de dos. J’ai deux vertèbres qui se décollent. J’en fais part au policier qui m’interroge. J’ai même demandé, le lendemain, à être vu par un médecin, comme la loi m’y autorisait. La réponse du policier fut : "Tu commences à nous emmerder avec tes problèmes. Tu veux des médicaments, tu en auras." Voilà la première méthode policière. C’est la violence, pour m’arracher des aveux. Je suis soumis à la question. Il faut qu’ils aient des aveux. Je suis coupable. Jamais il n’y a eu de présomption d’innocence dans ce dossier.

« La deuxième méthode, c’est le deal. Le policier qui est devant moi me dit que l’avocat ne sert à rien, que le meilleur avocat, c’est lui, et que si je reconnais tous les faits, ma femme et mes enfants seront libérés dans l’instant qui suit. Je vous prie de croire que quand vous avez devant vous un flic qui vous propose cela, quand vous vous dites que vous êtes embarqué dans une histoire grotesque, qu’une machine s’est mise en route, vous vous demandez si vous ne pourriez pas sauver votre femme et vos enfants. Mais je n’ai pas plié. Et là, nouveau flot d’injures, parce que je refuse d’avouer.

« La troisième méthode, c’est la méthode gentille. "Allez, avoue, et puis c’est tout. Ça va te faire du bien." Bien sûr le vouvoiement n’est pas de mise, le "monsieur" disparaît du discours des policiers. C’est "Marécaux, tu..." pendant quarante-huit heures » (2).

Le rapport de la commission d’enquête avait adressé des critiques très vives à ces pratiques, d’autant plus gênantes que les déclarations des gardés à vue les suivent tout au long de la procédure.

Dans son rapport pour 2008, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté fait état d’autres pratiques pouvant également être assimilées à des formes de pressions. Tel est le cas, par exemple, du retrait des lunettes et du retrait quasiment systématique pour les femmes de leur soutien-gorge.

Aux termes de l’article 41 du code de procédure pénale, « le procureur de la République contrôle les mesures de garde à vue. Il visite les locaux de garde à vue chaque fois qu’il l’estime nécessaire et au moins une fois par an ; il tient à cet effet un registre répertoriant le nombre et la fréquence des contrôles effectués dans ces différents locaux. ». L’article 65 du même code prévoit que « Les mentions et émargements prévus par le premier alinéa de l’article 64, en ce qui concerne les dates et heures de début et de fin de garde à vue et la durée des interrogatoires et des repos séparant ces interrogatoires, doivent également figurer sur un registre spécial, tenu à cet effet dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue ».

Les deux premiers rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté relèvent l’insuffisance du contrôle que les parquets exercent sur les mesures de garde à vue : d’une part, le contrôle que les parquets sont en mesure d’exercer est rendu difficile par une tenue des registres que le Contrôleur général qualifie de « variable selon les services » ; d’autre part, le contrôle que les parquets exercent effectivement est, lui aussi, qualifié de « variable » par le Contrôleur général.

Le rapport de la commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau, affaire dans laquelle l’institution judiciaire avait accordé trop d’importance à la parole, sans prendre suffisamment le soin de corroborer les différentes déclarations avec des éléments de preuve matériels, avait proposé d’« autoriser l’avocat à avoir accès au dossier de la procédure dès lors que la garde à vue est prolongée » : « L’avocat de l’intéressé aurait accès au dossier de la procédure au-delà des premières vingt-quatre heures et pourrait assister aux interrogatoires de son client. Cette procédure ne serait pas applicable aux crimes et délits relevant de la criminalité organisée ».

À l’Assemblée nationale et au Sénat, de nombreuses propositions de loi relatives à la garde à vue ont été déposées, particulièrement au cours des douze derniers mois (3). Trois d’entre elles ont été discutées en commission et en séance publique (4), mais ont été rejetées ou renvoyées en commission, Mme Michèle Alliot-Marie, alors garde des Sceaux, ayant fait valoir au cours des différentes discussions que « notre réflexion sur la garde à vue doit s’inscrire dans une approche globale de la procédure pénale » (5).

En effet, depuis le début de l’année 2009, avait été préparée, à la demande du Président de la République, une réforme d’ampleur de la procédure pénale, dans laquelle il aurait été souhaitable que la réforme de la garde à vue pût s’inscrire.

Dans son discours prononcé à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation le mercredi 7 janvier 2009, le Président de la République a exposé les grandes lignes d’une réforme de la procédure pénale en faveur « d’une justice rénovée » de nature à « rendre aux Français la justice qu’ils sont en droit d’attendre dans une société moderne ».

Après avoir rappelé que l’« arsenal nécessaire à la protection des Français doit être utilisé dans des conditions qui garantissent les libertés individuelles » et estimé que « notre procédure pénale n’est pas suffisamment respectueuse des droits des personnes », le Président de la République a expliqué que la réforme devrait respecter « le souci d’un dispositif équilibré et pleinement contradictoire » :

—  À cette fin était tout d’abord proposée la suppression du juge d’instruction en sa forme actuelle ; toutes les enquêtes seraient désormais menées sous l’autorité du parquet : « La confusion entre les pouvoirs d’enquête et les pouvoirs juridictionnels du juge d’instruction n’est plus acceptable. Un juge en charge de l’enquête ne peut raisonnablement veiller, en même temps, à la garantie des droits de la personne mise en examen », le Président d’ajouter : « le juge d’instruction, en la forme actuelle ne peut être l’arbitre. Comment lui demander de prendre des mesures coercitives, des mesures touchant à l’intimité de la vie privée alors qu’il est avant tout guidé par les nécessités de son enquête ? ».

—  Était en contrepartie envisagée la création d’un « juge de l’instruction », chargé du contrôle du déroulement des enquêtes : « Il est donc temps que le juge d’instruction cède la place à un juge de l’instruction, qui contrôlera le déroulement des enquêtes mais ne les dirigera plus », ainsi qu’un renforcement du contradictoire plus en amont : « C’est la prise en compte d’un réel débat contradictoire dès l’origine du procès qui nous donnera les voies et moyens d’un véritable habeas corpus à la française» Le Président de la République avait alors souligné qu’« il ne faut pas craindre (la) présence (des avocats) dès les premiers moments de la procédure. Elle est bien sûr une garantie pour leurs clients mais elle l’est aussi pour les enquêteurs qui ont tout à gagner d’un processus consacré par le principe contradictoire ».

—  Une rénovation de la procédure était également préconisée : « une audience publique sur les charges » devrait remplacer la mise en examen dans le cabinet du juge d’instruction, la préservation du secret de l’enquête, se substituerait au secret de l’instruction qui est « une fable à laquelle plus personne ne croit » ; le placement en détention provisoire devrait être décidé lors d’une « audience collégiale publique ».

M. Philippe Léger, ancien avocat général près la Cour de justice des Communautés européennes et ancien président de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, a été chargé par le garde des Sceaux de présider un comité de réflexion sur la réforme du code pénal et du code de procédure pénale, comité qui a été installé le 14 octobre 2008.

S’agissant de la réforme de la garde à vue, ce comité a estimé dans son rapport remis le 1er septembre 2009 que « malgré les garanties apportées, la garde à vue offre une place encore trop réduite aux droits de la défense. (…) Les membres du comité estiment qu’il convient de réformer la garde à vue suivant trois lignes directrices : l’augmentation des droits du gardé à vue, la restriction des cas de placement et la création d’une mesure coercitive d’une durée plus limitée que la garde à vue ». S’agissant des droits de la personne gardée à vue, le comité a proposé « d’accroître la place de l’avocat, tout en préservant l’efficacité de l’enquête, selon les règles suivantes :

« —  maintien de l’intervention de l’avocat dès le début de la mesure pour un entretien d’une demi-heure ;

« — possibilité d’un nouvel entretien avec l’avocat à la douzième heure, l’avocat ayant alors accès aux procès-verbaux des auditions de son client ;

« — présence possible de l’avocat aux auditions si la mesure de garde à vue est prolongée, soit à l’issue de la vingt-quatrième heure ».

Conformément aux orientations données par le Président de la République et dans le prolongement des préconisations du rapport Léger, le garde des Sceaux a annoncé au début de l’année 2010 la rédaction de deux avant-projets de loi se proposant de réécrire l’ensemble du code de procédure pénale ; un premier avant-projet de loi a été rendu public et soumis à concertation à partir du mois de mars 2010.

Cet avant-projet de loi, présenté sous la forme d’un code de procédure pénale entièrement nouveau et renuméroté (6), concerne les principes généraux de la procédure pénale et la phase d’enquête, y compris donc la garde à vue en tant que mesure de l’enquête. À l’image de l’actuel article préliminaire du code de procédure pénale, ce nouveau code s’ouvre sur un livre préliminaire énonçant les principes fondamentaux de la procédure pénale : équité et impartialité ; contradictoire et équilibre des droits ; égalité devant la loi ; séparation des autorités judiciaires ; présomption d’innocence ; respect des libertés individuelles, des droits de la défense et des droits des victimes.

Le livre premier concerne les dispositions générales et définit les principes directeurs de la procédure pénale, les règles relatives à l’« action pénale »
– nouvelle dénomination de l’action publique – et à l’action civile, ainsi que les catégories d’infractions soumises à des règles spécifiques de procédure pénale (criminalité organisée, infractions de nature sexuelle, délits de presse et infractions politiques, et délits pouvant faire l’objet de procédures simplifiées).

Le livre II définit le statut et les prérogatives des différentes « autorités judiciaires pénales » : les juridictions, le ministère public et la police judiciaire. Sont institués dans cette partie de l’avant-projet de loi les juridictions de l’enquête et des libertés : juge (JEL) et tribunal de l’enquête et des libertés pour le premier degré, et chambre de l’enquête et des libertés pour l’appel. Le rôle du JEL est double : « garantir le déroulement contradictoire, équitable et impartial de la procédure et contrôler que les investigations sont effectivement effectuées à charge et à décharge » ; « garantir le respect des libertés individuelles, en statuant en matière de contrôle judiciaire, d’assignation à résidence sous surveillance électronique et de détention provisoire, ainsi qu’en statuant (…) sur les demandes du procureur de la République tendant au prononcé de certaines mesures d’investigations et en contrôlant leur mise en œuvre ». L’ensemble d’une enquête, du début à la fin, doit être suivi par le même JEL.

Le rôle du parquet dans la direction des enquêtes est renforcé : en effet, le livre III remplace les trois cadres d’enquêtes existants – enquête de flagrance, enquête préliminaire, instruction préparatoire – par un cadre unique, l’« enquête judiciaire pénale ». Celle-ci est « conduite par le procureur de la République » et « effectuée sous le contrôle du juge de l’enquête et des libertés et du tribunal de l’enquête et des libertés ».

S’agissant de la garde à vue, elle est définie comme « une mesure de contrainte par laquelle une personne est, dans les conditions, selon les modalités et pour les durées prévues [ci-après], maintenue à la disposition des enquêteurs au cours de l’enquête judiciaire pénale ». L’avant-projet de loi limite son champ d’application aux crimes ou délits punis d’une peine d’emprisonnement et sa prolongation aux crimes ou délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à un an.

Décidée par l’OPJ, elle n’est possible que si, « pour les nécessités de l’enquête », elle est indispensable soit pour « garantir le maintien de la personne à la disposition des enquêteurs ou sa présentation ultérieure devant les autorités judiciaires », soit pour « empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels, ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, ou ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ». Elle est effectuée sous le contrôle du procureur de la République, qui « peut à tout moment ordonner qu’il soit mis fin à la mesure de garde à vue ».

La personne gardée à vue bénéficie de l’ensemble des droits actuellement prévus, sous réserve des évolutions suivantes :

—  S’agissant du droit pour la personne gardée à vue de faire prévenir de la mesure dont elle fait l’objet la personne de son choix, qui peut aujourd’hui être soit un proche soit l’employeur, l’avant-projet de loi étend ce droit en permettant de faire prévenir un proche et l’employeur.

—  S’agissant du droit à l’assistance d’un avocat, l’avant-projet de loi maintient le droit à un entretien confidentiel de trente minutes au début de la mesure puis toutes les vingt-quatre heures, et ajoute la possibilité d’un nouvel entretien à la douzième heure. Dès le début de la mesure, l’avocat peut obtenir à sa demande communication de la « copie des procès-verbaux d’auditions de la personne gardée à vue qui ont déjà été réalisées ». En cas de prolongation, il est prévu que « La personne peut également demander à ce que l’avocat assiste aux auditions dont elle fera l’objet. L’avocat peut poser des questions à l’issue de chaque audition. L’officier ou l’agent de police judiciaire peut s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou à la dignité de la personne. Mention de la question refusée est alors portée au procès-verbal ».

L’enregistrement audiovisuel des auditions est maintenu de façon obligatoire en matière criminelle, et devient possible en matière délictuelle sur décision de l’OPJ ou du procureur de la République ou à la demande de la personne gardée à vue. L’enregistrement audiovisuel est toutefois exclu « lorsque la personne a exercé son droit à être assistée par un avocat lors de ses auditions, (…) sauf instruction expresse du procureur de la République ».

Est également instituée une audition libre, possible lorsque les conditions de la garde à vue ne sont pas réunies. Cette audition libre, dont la durée maximale est fixée à quatre heures, est possible même lorsque la personne a été « appréhendée et ramenée par la contrainte dans les locaux du service de police judiciaire », à condition que la peine d’emprisonnement encourue ne soit pas supérieure à cinq ans.

Enfin, en matière de criminalité organisée, la possibilité de porter la durée totale des gardes à vue à quatre jours, voire à six jours en matière terroriste, est maintenue, sur décision du JEL. Est également maintenu, comme dans le droit actuel, le report de l’intervention de l’avocat, sous cette réserve que le report en matière de trafic de stupéfiants est abaissé de soixante-douze à quarante-huit heures et que le report à soixante-douze heures ne demeure applicable qu’en matière de terrorisme.

Mais, depuis la présentation de cet avant-projet de loi, sont intervenues des décisions du Conseil constitutionnel, de la Cour européenne des droits de l’Homme et de la Cour de cassation qui imposent désormais une réforme urgente et autonome de la garde à vue.

La décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 et les trois arrêts de la Cour de cassation du 19 octobre imposent, avant la date du 1er juillet 2011, une réforme autonome de la garde à vue, objet du présent projet de loi.

Saisi en application de larticle 61-1 de la Constitution par la Cour de cassation de plusieurs questions portant sur les règles applicables à la garde à vue, le Conseil constitutionnel a, dans sa décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010, déclaré les articles 62, 63, 63-1, 63-4 (alinéas 1er à 6) et 77 du code de procédure pénale contraires à la Constitution, et estimé qu’il n’y avait pas pour lui lieu de statuer sur les articles 706-73 et 63-4, septième alinéa, déclarés conformes à la Constitution dans des décisions antérieures.

Le Conseil a estimé que les dispositions censurées n’assuraient pas une conciliation équilibrée entre la recherche des auteurs d’infractions ou la prévention des atteintes à l’ordre public et l’exercice des libertés constitutionnellement garanties. Il a jugé que ces dispositions n’encadraient pas suffisamment les conditions du placement en garde à vue et de la prolongation de cette mesure et ne prévoyaient pas de garanties suffisantes pour l’exercice des droits de la défense.

Comme le lui permet le deuxième alinéa de l’article 62 de la Constitution (7), le Conseil a cependant assorti la déclaration d’inconstitutionnalité d’un délai de prise d’effet au 1er juillet 2011. Le Conseil constitutionnel, après avoir relevé que, « en principe, une déclaration d’inconstitutionnalité doit bénéficier à la partie qui a présenté la question prioritaire de constitutionnalité », a considéré que « l’abrogation immédiate des dispositions contestées méconnaîtrait les objectifs de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et entraînerait des conséquences manifestement excessives » et qu’il y avait en conséquence lieu « de reporter au 1er juillet 2011 la date de cette abrogation afin de permettre au législateur de remédier à cette inconstitutionnalité » (8).

Il revient donc désormais au législateur d’adopter une nouvelle rédaction de ces articles avant cette date.

Par trois arrêts du 19 octobre 2010, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que certaines règles actuelles de la garde à vue ne satisfont pas aux exigences de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, telles qu’interprétées par la Cour européenne de Strasbourg.

La chambre criminelle a estimé que, pour être conforme aux exigences de la Convention, la garde à vue doit respecter les principes suivants :

—  la personne placée en garde à vue doit être informée de son droit à garder le silence ;

—  elle doit, sauf si elle y renonce de façon « non équivoque » bénéficier de l’assistance d’un avocat dans des conditions lui permettant d’organiser sa défense et de préparer avec lui ses interrogatoires, auxquels l’avocat doit pouvoir assister ;

—  s’agissant des régimes dérogatoires, le fondement de la restriction au droit d’être assisté dès le début de la mesure par un avocat, en application de l’article 706-88 du code de procédure pénale, ne peut résider dans la seule nature de l’infraction et doit découler d’une « raison impérieuse » appréciée in concreto.

Toutefois, invoquant le « principe de sécurité juridique » et la « bonne administration de la justice » et estimant que les adaptations nécessaires ne pouvaient être réalisées immédiatement, la chambre criminelle a décidé de différer l’application des règles nouvelles qu’elle a fixées : celles-ci prendront effet lors de l’entrée en vigueur de la loi devant modifier le régime de la garde à vue, ou, au plus tard, comme l’avait déjà prévu le Conseil constitutionnel, le 1er juillet 2011.

Une réforme d’ensemble de la procédure pénale ne pourrait être adoptée d’ici le 1er juillet 2011. C’est pourquoi le Gouvernement a dû déposer un projet de loi d’un objet plus restreint, limité à la seule réforme de la garde à vue, mais tenant compte du résultat de la concertation engagée en mars 2010 sur la base de l’avant-projet de loi.

Ce projet de loi a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2010, sans que la procédure accélérée n’ait été engagée, ce qui, pour un texte représentant un enjeu aussi fondamental en termes de libertés publiques et de sécurité, apparaît comme une décision sage et opportune.

II. LES ENJEUX DE LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE

La présente réforme de la garde à vue est enserrée dans de multiples contraintes, à la fois juridiques et pratiques. La conciliation de ces différentes contraintes n’est pas aisée.

Le premier enjeu de la réforme consiste, comme pour toute réforme de procédure pénale, à concilier trois objectifs majeurs : la protection des droits des personnes mises en cause, la préservation de l’efficacité de la police et de la justice contre la délinquance, et la garantie des droits des victimes.

La réforme doit aussi se conformer aux récentes jurisprudences nationales et européennes relatives à la garde à vue. Pour éclairer ses travaux et avoir la vision la plus précise possible des contraintes juridiques résultant des différentes jurisprudences, votre commission des Lois a entendu d’éminents juristes (9), spécialistes des différentes jurisprudences encadrant la présente réforme, dans le cadre d’une table ronde organisée le 17 novembre dernier, dont le compte rendu figure en annexe 1.

Enfin, pour appréhender pleinement les contraintes pratiques auxquelles sont soumis les acteurs de la chaîne pénale chargés de mettre en œuvre la réforme, votre rapporteur a par ailleurs réalisé plusieurs déplacements sur le terrain : il s’est ainsi rendu à la brigade territoriale de gendarmerie nationale de Saint-Jean-de-Daye dans la Manche, au commissariat de police du XIIème arrondissement de Paris, ainsi qu’au tribunal de grande instance de Paris où il a pu observer le fonctionnement de la permanence du parquet chargée du traitement en temps réel.

La réforme de la garde à vue doit être menée par le législateur en recherchant la mise en œuvre la plus équilibrée possible des principes directeurs de la procédure pénale énoncés par l’article préliminaire du code de procédure pénale.

Article préliminaire du code de procédure pénale

« I. – La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties.

Elle doit garantir la séparation des autorités chargées de l’action publique et des autorités de jugement.

Les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles.

II. – L’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale.

III. – Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d’innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi.

Elle a le droit d’être informée des charges retenues contre elle et d’être assistée d’un défenseur.

Les mesures de contraintes dont cette personne peut faire l’objet sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire. Elles doivent être strictement limitées aux nécessités de la procédure, proportionnées à la gravité de l’infraction reprochée et ne pas porter atteinte à la dignité de la personne.

Il doit être définitivement statué sur l’accusation dont cette personne fait l’objet dans un délai raisonnable.

Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction. »

Parmi les principes fondamentaux énoncés par cet article, la réforme de la garde à vue doit en particulier s’efforcer de concilier trois objectifs majeurs :

—  mieux respecter la présomption d’innocence, en réduisant le nombre des gardes à vue et en renforçant les droits des personnes suspectées ;

—  garantir l’équilibre des droits des parties, et notamment de la partie poursuivante, en préservant les capacités d’enquête des forces de l’ordre ;

—  garantir les droits des victimes.

En matière de garde à vue, le renforcement de la présomption d’innocence impose tout d’abord de réduire le nombre de gardes à vue. En 2009, le nombre de gardes à vue s’est élevé à près de 800 000, si l’on inclut les gardes à vue « routières ». La « maîtrise du nombre des gardes à vue, en constante augmentation depuis plusieurs années », est d’ailleurs le premier objectif visé par l’exposé des motifs du projet de loi déposé par le Gouvernement.

Du fait de cette augmentation, un nombre croissant de nos concitoyens a été soumis à une mesure de garde à vue au cours des dernières années, avec dans un certain nombre de cas le sentiment d’une certaine inutilité de la mesure, voire d’un excès ou d’un abus de la part des forces de l’ordre eu égard à la gravité réelle de l’infraction reprochée.

L’augmentation du nombre de gardes à vue a mis en évidence un certain nombre de carences dans le déroulement et les conditions matérielles des gardes à vue. Compte tenu de l’ancienneté de certains locaux et, parfois, de l’insuffisance des mesures prises pour les maintenir propres et en bon état, ainsi que de l’usage trop fréquent des fouilles à nu, les gardes à vue ne respectent pas toujours la dignité de la personne humaine et sont, de ce fait, souvent ressenties comme humiliantes.

Outre la nécessité de réduire le nombre de gardes à vue, la réforme menée doit donc également améliorer les droits des personnes qui font l’objet de ces mesures : le droit à la dignité, tout d’abord, mais aussi les droits de la défense, qui ne sont aujourd’hui plus suffisants compte tenu du renforcement, relevé par le Conseil constitutionnel, de « l’importance de la phase d’enquête policière dans la constitution des éléments sur le fondement desquels une personne mise en cause est jugée ». Du reste, le renforcement du droit de la personne gardée à vue à l’assistance d’un avocat fait partie des contraintes juridiques qui pèsent sur le législateur (10).

La garde à vue constitue souvent dans une enquête un moment décisif pour l’élucidation d’une affaire. Tel peut être le cas, notamment, dans les affaires d’enlèvement d’enfant. Les aveux obtenus en garde à vue peuvent permettre d’éviter des drames. Des enquêteurs entendus par votre rapporteur ont rapporté plusieurs cas dans lesquels la garde à vue a été décisive pour la résolution de l’enquête : dans une affaire de crimes en série, l’auteur des faits a avoué en garde à vue être l’auteur de crimes pour lesquels les enquêteurs ne disposaient pas de preuves matérielles et précisé le lieu où ces derniers pourraient trouver les corps. Sans ces aveux, les affaires correspondantes demeureraient non résolues.

De même, les magistrats anti-terroristes entendus par votre rapporteur ont insisté sur l’importance de la phase de garde à vue, et particulièrement sur l’utilité des durées allongées permises par les règles dérogatoires en matière terroriste.

La préservation de la sécurité de nos concitoyens impose donc au législateur de mettre en place un régime de garde à vue qui, tout en respectant mieux la présomption d’innocence, ne désarmera pas les forces de l’ordre pour lutter aussi efficacement qu’ils le font aujourd’hui contre la délinquance.

Si la justice est rendue au nom du peuple français, la procédure pénale ne saurait oublier les victimes. De même qu’elles disposent de droits dans les phases de l’instruction et du jugement, elles doivent aussi disposer de droits renforcés dans la phase de la garde à vue si elles sont amenées à y participer.

En particulier, si, pendant une garde à vue, il est procédé à une confrontation entre une personne mise en cause et la victime, le principe de l’équilibre des droits des parties s’oppose à ce que la victime soit seule, sans assistance, au cours de cette confrontation, alors que la personne gardée à vue pourrait être assistée par un avocat. Il est donc absolument nécessaire aux yeux de votre rapporteur de prévoir le droit pour la victime à bénéficier d’un droit à assistance par un avocat en cas de confrontation avec la personne gardée à vue.

La réforme de la garde à vue doit tenir compte des implications des jurisprudences nationales et européennes récentes, émanant du Conseil constitutionnel, de la Cour européenne des droits de l’Homme et de la Cour de cassation.

Les requérants critiquaient le régime actuel de la garde à vue sous quatre angles :

—  l’atteinte à la dignité de la personne ;

—  la méconnaissance du principe selon lequel l’autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle ;

—  la méconnaissance du principe prohibant toute rigueur non nécessaire ;

—  la méconnaissance des droits de la défense, des exigences d’une procédure juste et équitable, de la présomption d’innocence et de l’égalité devant la loi et la justice (question de la place de l’avocat).

Le Conseil constitutionnel a tenu un raisonnement en plusieurs temps : s’il a noté que certaines dispositions du code de procédure pénale relatives à la garde à vue avaient déjà été validées dans plusieurs décisions de conformité, il a toutefois estimé que, compte tenu de l’ampleur quantitative prise par la garde à vue – il emploie le terme « banalisation » – et de l’importance qu’elle revêt désormais au cours de la procédure pénale  – le Conseil relève que la garde à vue est « souvent devenue la phase principale de constitution du dossier de la procédure en vue du jugement de la personne mise en cause », notamment en cas de comparution immédiate –, un réexamen de certaines de ces dispositions se justifie.

Procédant à ce réexamen, le Conseil a tout d’abord estimé que les articles relatifs à la garde à vue ne méconnaissent pas en eux-mêmes l’exigence de respect de la dignité de la personne, même s’il « est loisible au législateur de les modifier » sur ce point. Il a également considéré que ces articles ne méconnaissent pas non plus le principe selon lequel l’autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle (article 66 de la Constitution), dès lors que l’autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et du parquet.

En revanche, le Conseil a déclaré certaines des dispositions visées par la saisine (les articles 62, 63, 63-1, 63-4 – alinéas 1er à 6 – et 77) contraires à la Constitution au motif que les évolutions de la garde à vue, qui ne méconnaissent en elles-mêmes aucune exigence constitutionnelle, « doivent être accompagnées des garanties appropriées encadrant le recours à la garde à vue ainsi que son déroulement et assurant la protection des droits de la défense ».

Le Conseil a en effet jugé que ces articles méconnaissent les articles 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, pour les motifs suivants :

—  une personne peut être placée en garde à vue « quelle que soit la gravité des faits qui motivent une telle mesure » et « toute garde à vue peut faire l’objet d’une prolongation de vingt-quatre heures sans que cette faculté soit réservée à des infractions présentant une certaine gravité » ;

—  une personne placée en garde à vue ne bénéficie pas de « l’assistance effective » d’un avocat et ne reçoit pas la notification de son droit à garder le silence. Un tempérament est cependant apporté : « une telle restriction aux droits de la défense est imposée de façon générale, sans considération des circonstances particulières susceptibles de la justifier pour rassembler ou conserver des preuves ou assurer la protection des personnes ».

Par ailleurs, il faut noter qu’une décision du Conseil constitutionnel, rendue le 22 septembre 2010 sur une autre question prioritaire de constitutionnalité, a déclaré contraires à la Constitution les dispositions du code des douanes relatives à la retenue douanière, qui constitue en pratique une forme dérogatoire de garde à vue. Cette décision a été rendue au visa exprès de la décision du 30 juillet 2010, avec la même motivation que la décision concernant la garde à vue et en reportant l’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité à la même date du 1er juillet 2011. Une réforme de la retenue douanière est donc nécessaire dans le même délai que la réforme de la garde à vue (11).

Dans l’arrêt rendu dans l’affaire Medvedyev contre France (12) le 29 mars 2010, la Grande chambre de la Cour de Strasbourg a rappelé que l’article 5, paragraphe 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme vise à « assurer que la personne arrêtée soit aussitôt physiquement conduite devant une autorité judiciaire. Ce contrôle judiciaire rapide et automatique assure aussi une protection appréciable contre les comportements arbitraires, les détentions au secret et les mauvais traitements ».

Article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme
Droit à la liberté et à la sûreté

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales:

a) s’il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent;

b) s’il a fait l’objet d’une arrestation ou d’une détention régulières pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l’exécution d’une obligation prescrite par la loi;

c) s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle-ci;

d) s’il s’agit de la détention régulière d’un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou de sa détention régulière, afin de le traduire devant l’autorité compétente;

e) s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond;

f) s’il s’agit de l’arrestation ou de la détention régulières d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours.

2. Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience.

4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

5. Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation. »

La Cour estime que le contrôle juridictionnel doit répondre à quatre exigences :

—  la promptitude : le contrôle doit être rapide afin de réduire au minimum toute atteinte injustifiée à la liberté individuelle ;

—  l’automaticité : il ne doit être rendu tributaire d’une demande formée par la personne détenue ;

—  des exigences liées aux caractéristiques du magistrat, au nombre desquelles figurent  l’indépendance : « le magistrat doit présenter les garanties requises d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties, ce qui exclut notamment qu’il puisse agir par la suite contre le requérant dans la procédure pénale, à l’instar du ministère public », qualité que la Cour reconnaît expressément au juge d’instruction (13), 2° le pouvoir de libération : le magistrat « doit avoir le pouvoir d’ordonner l’élargissement, après avoir entendu la personne et contrôlé la légalité et la justification de l’arrestation et de la détention ».

—  et des exigences liées à la portée du contrôle exercé par le magistrat. Ces d’exigences sont à la fois de forme, le magistrat ayant l’obligation d’entendre personnellement l’individu traduit devant lui, et de fond, le magistrat ayant obligation de se prononcer selon des critères juridiques sur l’existence de raisons justifiant la détention.

La Grande Chambre ne précise plus (comme l’avait fait l’arrêt de première instance du 10 juillet 2008) que « le procureur de la République n’est pas une « autorité judiciaire » au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion » en raison de son manque d’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif. Mais elle n’en affirme par moins qu’agissant contre le requérant au cours de la procédure pénale, le procureur de la République ne présente pas les garanties requises d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties que doit présenter un magistrat.

Dans le très récent arrêt rendu en première instance dans l’affaire France Moulin contre France (14) le 23 novembre 2010, la Cour européenne a confirmé sa jurisprudence Medvedyev.

Dans cet arrêt, la Cour a rappelé que les « membres du ministère public (…) dépendent tous d’un supérieur hiérarchique commun, le garde des sceaux, ministre de la justice, qui est membre du gouvernement, et donc du pouvoir exécutif » et que « contrairement aux juges du siège, ils ne sont pas inamovibles ». Elle a jugé que « du fait de leur statut (…) les membres du ministère public, en France, ne remplissent pas l’exigence d’indépendance à l’égard de l’exécutif, qui, selon une jurisprudence constante, compte, au même titre que l’impartialité, parmi les garanties inhérentes à la notion autonome de "magistrat" au sens de l’article 5, paragraphe 3 ».

Dans deux décisions rendues en novembre 2008 et septembre 2009 qui concernaient la Turquie, la Cour européenne des droits de l’Homme a fait franchir à sa jurisprudence un pas important sur la question de l’assistance de l’avocat lors de la garde à vue, en reconnaissant d’abord, sur le fondement de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, le droit à l’assistance effective d’un avocat pendant la garde à vue (Salduz, 2008), puis en définissant avec précision ce que recouvre cette notion d’assistance effective (Dayanan, 2009). Dans une troisième décision rendue à l’encontre de la France, la CEDH a précisé que le droit à l’assistance par un avocat devait pouvoir s’exercer pendant les interrogatoires (Brusco, 2010).

Article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme
Droit à un procès équitable

« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

2. Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3. Tout accusé a droit notamment à:

a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui;

b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense;

c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent;

d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;

e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »

Dans l’arrêt Salduz (15), la Cour de Strasbourg a affirmé, dans un considérant de principe, que « l’article 6 exige normalement que le prévenu puisse bénéficier de l’assistance d’un avocat dès les premiers stades des interrogatoires de police ». La Cour en déduit qu’« il est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations incriminantes faites lors d’un interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat sont utilisées pour fonder une condamnation ».

Dans le deuxième arrêt, Dayanan (16), en sus de la confirmation du principe du droit à l’assistance effective d’un avocat pendant la garde à vue, la Cour a énoncé qu’« un accusé doit, dès qu’il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l’assistance d’un avocat et cela indépendamment des interrogatoires qu’il subit. En effet, l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. À cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer ».

Enfin, dans l’arrêt Brusco contre France (17), la Cour a condamné la France dans une affaire dans laquelle le requérant, à l’encontre duquel existaient des soupçons d’avoir commis une infraction, avait été placé en garde à vue en tant que témoin et, de ce fait, dû prêter serment (18). La Cour a considéré que cette obligation, pour une personne gardée à vue, de prêter serment avait porté atteinte au droit du requérant de ne pas s’auto-incriminer, qui constitue dans la jurisprudence constante de la CEDH un élément du droit à un procès équitable. À l’occasion de cette décision, la Cour a précisé à quel moment devait pouvoir s’exercer le droit à l’assistance d’un avocat : « la personne placée en garde à vue a le droit d’être assistée d’un avocat dès le début de cette mesure ainsi que pendant les interrogatoires, et ce a fortiori lorsqu’elle n’a pas été informée par les autorités de son droit de se taire ».

Dans le cas des régimes dérogatoires, l’arrêt Medvedyev impose la mise en place d’un contrôle particulier d’un juge du siège pour autoriser le report de l’intervention de l’avocat. De même, dans l’arrêt Salduz, la Cour de Strasbourg a considéré que le droit à l’assistance d’un avocat pendant la garde à vue « peut toutefois être soumis à des restrictions pour des raisons valables », la question posée étant alors de « savoir si la restriction litigieuse est justifiée et, dans l’affirmative, si, considérée à la lumière de la procédure dans son ensemble, elle a ou non privé l’accusé d’un procès équitable ».

Analysant les régimes dérogatoires prévus par le droit français à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne, le groupe de travail présidé par M. Yves Gaudemet a relevé que « Le droit à l’assistance d’un avocat peut être soumis à des restrictions obéissant à des raisons valables, ce qui implique, d’une part, la démonstration de raisons impérieuses et, d’autre part, que ces restrictions n’aient pas porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense, la procédure étant considérée in globo et in concreto. Ces raisons impérieuses ne peuvent pas être déterminées de façon objective, puisque la Cour apprécie les éléments in concreto dans chaque affaire. Elles ne peuvent relever ni d’un seuil général, encore moins de la nature de certaines affaires. Une législation qui ferait obstacle de manière systématique à l’assistance d’un conseil lors de la garde à vue est contraire à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme » (19).

Les dispositions du code de procédure pénale relatives à l’assistance par un avocat de la personne gardée à vue ont été déclarées contraires à l’article 6 de la Convention européenne de la Cour de cassation par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Dans une affaire de droit commun dans laquelle une chambre de l’instruction avait jugé une mesure de garde à vue contraire à cette disposition conventionnelle en raison de l’absence d’assistance effective de la personne gardée à vue par un avocat, la Cour de cassation a jugé que « pour prononcer l’annulation des procès-verbaux de garde à vue et des auditions intervenues pendant celle-ci, les juges énoncent que M. X a bénéficié de la présence d’un avocat mais non de son assistance dans des conditions lui permettant d’organiser sa défense et de préparer avec lui les interrogatoires auxquels cet avocat n’a pu, en l’état de la législation française, participer » et « qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a fait l’exacte application de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme » (20).

Dans les deux autres décisions rendues le 19 octobre 2010 (21), qui concernaient des affaires d’infractions à la législation sur les stupéfiants, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que le régime dérogatoire prévu par le septième alinéa de l’article 63-4 et l’article 706-88 du code de procédure pénale était également contraire à l’article 6 de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Dans la première des deux affaires, la chambre de l’instruction avait rejeté la demande d’annulation de certains actes de la procédure. Après avoir relevé que « pour rejeter la requête aux fins d’annulation d’actes de la procédure de M. T., l’arrêt se borne à relever l’absence, dans la Convention européenne des droits de l’Homme, de mention expresse portant obligation d’une assistance concrète et effective par un avocat de la personne gardée à vue dès la première heure de cette mesure et de notification d’un droit de se taire, et le défaut de condamnation expresse de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme pour ce motif », la Cour a jugé « qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a méconnu le texte conventionnel susvisé, d’où il résulte que, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’espèce, et non à la seule nature du crime ou délit reproché, toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit, dès le début de la garde à vue, être informée de son droit de se taire et bénéficier, sauf renonciation non équivoque, de l’assistance d’un avocat ».

Dans le deuxième arrêt, rendu dans une affaire dans laquelle la chambre de l’instruction avait annulé certains actes de procédure de la garde à vue, la chambre criminelle a, après avoir relevé que « pour accueillir partiellement la requête et annuler certains actes de la procédure, l’arrêt retient, notamment, que la restriction du droit d’être assisté dès le début de la garde à vue, par un avocat, imposée à M. B. en application de l’article 706-88 du code de procédure pénale ne répondait pas à l’exigence d’une raison impérieuse, laquelle ne pouvait découler de la seule nature de l’infraction » et « que l’intéressé, à l’occasion de ses interrogatoires, réalisés, pour l’essentiel, avant l’intervention de son conseil, et, en conséquence, sans préparation avec celui-ci ni information sur son droit de garder le silence, a été privé d’un procès équitable », jugé « qu’en prononçant par ces motifs, exempts d’insuffisance comme de contradiction, la chambre de l’instruction a fait l’exacte application de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme ».

De ces deux arrêts, il résulte donc que la mise en place d’un régime dérogatoire de garde à vue, s’agissant du droit de la personne à être assistée par un avocat, doit être justifiée par une « raison impérieuse », laquelle ne peut découler de la seule nature de l’infraction. Une appréciation concrète, au cas par cas, est donc requise.

Si les contraintes juridiques pesant sur la réforme de la garde à vue sont fortes, les contraintes pratiques, tant humaines, géographiques, matérielles que financières, ne le sont pas moins et ne sauraient être ignorées par le législateur au moment de réformer un pan essentiel de notre procédure pénale.

La première contrainte pratique que doit intégrer le législateur est une contrainte humaine, liée aux effectifs des acteurs de la chaîne pénale impliqués dans la garde à vue. Les jurisprudences constitutionnelle et européenne impliquent un accroissement de la présence et du rôle de l’avocat au cours de la garde à vue, mais ceux-ci sont-ils assez nombreux sur l’ensemble du territoire national et leur organisation est-elle adaptée pour faire face aux nouveaux besoins d’assistance des personnes gardées à vue ?

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme et, depuis la décision du 15 décembre 2010 de la Cour de cassation (22), peuvent être interprétées comme impliquant également un rôle accru des magistrats du siège dans le contrôle de la garde à vue, mais l’organisation des permanences des magistrats du siège permettrait-elle, le cas échéant, un contrôle effectif et renforcé dès l’entrée en vigueur de la réforme ?

Afin de mesurer aussi précisément que possible l’importance de cette contrainte humaine, votre rapporteur a réalisé un tableau (23), qui figure à l’annexe 4 du présent rapport, présentant, pour l’année 2009 et par département : le nombre de gardes à vue effectuées, à l’exception de celles effectuées dans les collectivités d’outre-mer et de celles consécutives à des infractions routières ; le nombre d’avocats inscrits au(x) barreau(x) du département ; le nombre de magistrats du parquet dans le ou les tribunaux du département ; le nombre de magistrats du siège ayant rang de président, de premier vice-président ou de vice-président, c’est-à-dire susceptibles d’exercer les fonctions de juge des libertés et de la détention aux termes de l’article 137-1 du code de procédure pénale ; le nombre total de magistrats du siège dans le ou les tribunaux du département. Ce tableau présente également un ratio du nombre de gardes à vue par catégorie d’acteurs participant aujourd’hui au déroulement ou au contrôle de la garde à vue ou susceptibles d’y participer ou de voir leur rôle accru demain après la réforme.

L’un des objectifs du projet de loi est d’aboutir à une baisse du nombre des gardes à vue. L’étude d’impact accompagnant le projet de loi fonde l’ensemble de ses évaluations sur une prévision de baisse du nombre de gardes à vue d’environ un tiers par rapport aux chiffres de 2009, soit 500 000 par an. Il apparaît néanmoins utile et pertinent d’examiner la situation en se fondant sur les derniers chiffres connus en matière de nombre de gardes à vue et d’effectifs d’avocats et de magistrats, en raison du caractère nécessairement incertain de l’évaluation de l’impact de la réforme sur le nombre de gardes à vue.

L’ensemble des données étudiées révèle une très grande disparité des situations sur le terrain.

Si l’on s’intéresse tout d’abord au nombre de gardes à vue par avocat en une année (24), l’écart entre les deux situations extrêmes (Paris : 3 ; Guyane : 194) est considérable. Concrètement, dans la situation idéale – mais qui n’est pas la réalité d’aujourd’hui – où tous les avocats participeraient aux permanences de garde à vue, chaque avocat inscrit dans ce dernier département devrait assumer chaque année l’assistance de 194 personnes placées en garde à vue…

La moyenne nationale s’établit à 12,2 gardes à vue par avocat et par an. Mais, si l’on calcule cette moyenne en excluant Paris dont le barreau compte 19 422 avocats – soit 40 % du total des avocats exerçant en France –, cette moyenne s’élève à 18 gardes à vue par avocat et par an. En outre, cette moyenne nationale hors Paris, qui se traduit par une charge déjà considérable pour les barreaux se situant simplement dans la moyenne, est dépassée de 50 % ou plus dans 21 départements (27 gardes à vue ou plus par avocat), et même de 100 % ou plus dans 12 départements (36 gardes à vue ou plus par avocat).

L’exemple du département de la Manche, dans lequel le nombre de gardes à vue par avocat est de 29, est à cet égard très révélateur des difficultés d’application pratique que posera inévitablement, dans un grand nombre de départements, l’organisation de permanences de garde à vue impliquant une présence et un rôle accrus des avocats. Au cours du déplacement qu’il a effectué au sein d’une brigade territoriale de la gendarmerie nationale de ce département, les échanges que votre rapporteur a eus avec le bâtonnier de Coutances ont mis en évidence que nombre de barreaux peinent déjà à répondre de façon systématique et rapide aux demandes d’un entretien de trente minutes par période de vingt-quatre heures de garde à vue. Dès lors, il semble essentiel à votre rapporteur de souligner que les barreaux ne pourront pas faire face aux nouveaux besoins d’assistance des personnes gardées à vue sans une profonde réorganisation de leurs systèmes de permanence pénale.

Les difficultés humaines sont du même ordre s’agissant des magistrats qui seront en charge du contrôle et de la prolongation des gardes à vue. Aujourd’hui déjà, policiers, gendarmes et magistrats reconnaissent eux-mêmes que le contrôle exercé par les parquets sur la nécessité des mesures de garde à vue est généralement assez formel, particulièrement lorsque l’avis de placement en garde à vue est réalisé par l’envoi d’une télécopie qui arrive en pleine nuit dans un bureau désert du tribunal. Le renforcement du contrôle des mesures de garde à vue, ainsi que l’affirmation du principe d’une présentation à un magistrat obligatoire préalablement à une prolongation, rendront nécessaire la mise en place de permanences renforcées au sein des juridictions pour que ce contrôle soit, comme l’exige la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, « effectif ».

Ici encore, les chiffres du nombre de gardes à vue par magistrat du parquet, par magistrat du siège dans le ou les tribunaux du département et par magistrat du siège ayant rang de vice-président, révèlent de fortes disparités entre les départements et, dans certains cas, des situations déjà extrêmement tendues. À la différence du nombre de gardes à vue par avocat, dont la moyenne varie fortement selon que l’on inclut ou exclut Paris et ses presque 20 000 avocats, la moyenne nationale du nombre de gardes à vue par magistrat est la même avec ou sans la capitale. Cette moyenne, en incluant Paris, s’établit à 417 gardes à vue par magistrat du parquet, 458 par magistrat du siège ayant rang de vice-président, et 141 par magistrat du siège dans le ou les tribunaux du département. Mais les disparités peuvent être fortes, par exemple entre les départements voisins du Rhône (541 gardes à vue par parquetier, 623 par magistrat du siège ayant rang de président, de premier vice-président ou vice-président, et 185 par magistrat du siège dans le ou les tribunaux du département) et de l’Isère (370,5 gardes à vue par parquetier, 338 par magistrat du siège ayant rang de vice-président, et 119,5 par magistrat du siège dans le ou les tribunaux du département).

Enfin, se pose la question de l’impact sur les services de police et les unités de gendarmerie d’une présentation physique systématique à un magistrat de la personne placée en garde à vue avant toute prolongation. L’étude d’impact accompagnant le projet de loi prévoit que le nombre de gardes à vue faisant l’objet d’une prolongation restera stable, soit 100 000 prolongations par an. La présentation de 100 000 personnes aura un coût important en termes d’effectifs de police et de gendarmerie mobilisés pour assurer l’escorte du mis en cause jusqu’au bureau du magistrat, mais aussi un possible effet de désorganisation des services que le législateur doit prendre en compte.

La deuxième contrainte pratique que le législateur doit prendre en compte pour adopter une réforme effectivement applicable de la garde à vue réside dans la grande diversité de la géographie française. L’étendue de certains départements ou les difficultés de déplacement propres à certains départements – pas uniquement ruraux ou de montagne mais également urbains – ne doivent pas être négligées.

Après la Guyane, la Gironde est le deuxième plus grand département français, avec une superficie de 10 000 kilomètres carrés. Le temps normal de trajet entre Bordeaux, siège de l’un des deux TGI du département, et Soulac-sur-Mer, où est implantée la brigade de gendarmerie la plus éloignée, est de 1 heure 45, pour une distance de 94 kilomètres. À ce temps ordinaire de trajet, il faut éventuellement ajouter les délais supplémentaires liés à l’entrée dans ou à la sortie de l’agglomération bordelaise.

Pour prendre un exemple de département de montagne, le temps normal de trajet entre Digne-les-Bains, siège du TGI du département des Alpes-de-Haute-Provence, et Jausiers, où est implantée la brigade de gendarmerie la plus éloignée, est également de 1 heure 45 pour une distance de 93 kilomètres. Mais ici, le facteur climatique peut allonger considérablement ce temps de trajet.

Enfin, même en zone urbaine, les aléas de la circulation automobile et les difficultés de circulation en transports collectifs « de banlieue à banlieue » peuvent rendre les déplacements difficiles. Ainsi, si le temps normal de trajet entre Nanterre, siège du TGI du département des Hauts-de-Seine, et Antony, où est implanté le commissariat de police le plus éloigné, est en principe de 40 minutes, ce temps peut se trouver à certaines heures de la journée considérablement allongé.

Cette contrainte géographique doit donc également guider le législateur amené à se prononcer sur la question de la possibilité pour les enquêteurs de commencer à entendre la personne gardée à vue avant l’arrivée de l’avocat, ainsi que sur les modalités de présentation à un magistrat des personnes dont la prolongation de garde à vue est demandée.

La réforme de la garde à vue ne saurait enfin se faire sans une prise en considération des contraintes matérielles et financières, plus particulièrement sur trois aspects : l’adaptation des locaux des services de police et unités de gendarmerie, l’équipement des sites en visioconférence et l’impact sur le budget de l’aide juridictionnelle.

—  Lors de ses deux déplacements dans des locaux de police et de gendarmerie, votre rapporteur a pu se rendre compte de l’exiguïté des locaux, qui pourrait rendre dans certains cas difficile de construire des salles réservées aux avocats afin que ceux-ci puissent consulter les dossiers et préparer la défense de leurs clients.

L’étude d’impact accompagnant le projet de loi indique que « Le coût unitaire de l’aménagement d’un espace dédié s’élève à 6 000 € par salle. L’équipement en locaux sera gradué, la possibilité pour les avocats de disposer d’un lieu de travail et d’entretien ne nécessitant pas d’emblée et systématiquement la mise à disposition d’un local en propre spécifiquement dédié ».

—  Se pose en outre la question de l’équipement des tribunaux et des locaux de police et de gendarmerie en équipements de visioconférence spécifiquement utilisés pour la présentation des gardés à vue.

Selon les éléments transmis à votre rapporteur par la Chancellerie, seules trois juridictions sont à ce jour équipées pour l’utilisation de la visioconférence entre les parquets et les commissariats de police (les unités de gendarmerie n’étant pas équipées) : il s’agit des tribunaux de grande instance de Strasbourg (depuis 2005), Marseille (depuis 2007) et Paris (depuis 2009). Quelques dizaines de visioconférences sont effectuées chaque mois par ces juridictions, avec les commissariats de police correspondants, essentiellement pour les prolongations de garde à vue des mineurs.

En dehors de ces juridictions, aucun équipement dédié à l’utilisation de la visioconférence dans le cadre des gardes à vue n’est en place dans les juridictions françaises même si, en cas de besoin toutefois, les appareils des salles d’audience ou de salles de réunion peuvent être ponctuellement utilisés par les parquets.

Seul du matériel certifié peut être utilisé pour la visioconférence dans un cadre judiciaire, pour des raisons de sécurité des communications – ce qui exclut tout recours à une webcam ou à des logiciels grand public – et pour la compatibilité des systèmes. Le coût du matériel standard utilisé (le Tandberg T 1000) est évalué à 3 900 euros, auxquels il convient encore d’ajouter le coût d’abonnement de la ligne téléphonique à la charge de chaque juridiction (25).

—  Enfin, l’extension de la présence et du rôle de l’avocat aura des répercussions financières sur le budget de l’aide juridictionnelle. L’évaluation financière figurant dans l’étude d’impact se fonde sur un objectif de réduction à 500 000 du nombre annuel de gardes à vue et évalue l’impact financier à un coût total compris entre 44,5 et 65,8 millions d’euros (TTC) en année pleine (26).

Selon l’étude d’impact, « la solution retenue pour rétribuer, sur le terrain de l’aide juridique, les avocats commis d’office intervenant au cours de la garde à vue repose sur le maintien d’une rétribution à l’acte pour chaque mission d’assistance, sur la base du tarif actuel, complétée par une indemnité d’astreinte pour tenir compte des sujétions nouvelles dans l’exercice des droits de la défense découlant de la réforme ». La rétribution à l’acte continuera d’être financée par une dotation « garde à vue » versée par l’État, dont le montant sera déterminé, comme actuellement, en fonction d’une prévision du nombre de missions d’assistance à accomplir au cours de l’année, qui sera versée en début d’exercice et pourra être ajustée en fonction de l’évolution de la consommation des crédits. En outre, chaque barreau qui aura conclu avec le tribunal de grande instance un protocole « permanence garde à vue » percevra une dotation complémentaire destinée à permettre aux barreaux d’allouer aux avocats de permanence de garde à vue un complément à leur rétribution de base, dit « indemnité d’astreinte » et dont le montant sera arrêté par le barreau.

Toutefois, le projet de loi initial limite l’extension de la présence de l’avocat en garde à vue aux régimes de droit commun. L’évaluation financière ne prend donc pas en compte le coût que pourra avoir la présence de l’avocat, même éventuellement différée ou aménagée, dans le cadre des gardes à vue relevant de la criminalité organisée ainsi que lors des retenues douanières. Selon les informations communiquées à votre rapporteur par le ministère de la justice, 23 344 condamnations ont été prononcées en 2009 pour des infractions relevant de la criminalité organisée. Il conviendra d’intégrer, dans l’évaluation de l’impact financier de la réforme sur le budget de l’aide juridictionnelle, le coût de l’intervention de l’avocat dans les gardes à vue prises en matière de criminalité organisée.

III. UN PROJET DE LOI COMPORTANT DE RÉELLES AVANCÉES, MAIS QUI DEVAIT ÊTRE AMÉLIORÉ ET COMPLÉTÉ

Le projet de loi comprend, sur nombre des points précédemment présentés, de substantielles avancées. L’esprit général du projet de loi a d’ailleurs été globalement salué par le Conseil national des Barreaux, qui dans une résolution adoptée le 10 septembre 2010 s’est félicité « des progrès introduits par ce projet de loi au regard des règles actuelles de la garde à vue, qui prévoit l’encadrement de cette mesure, la présence de l’avocat aux côtés de la personne gardée à vue pendant ses auditions, la reconnaissance des droits dont toute personne doit bénéficier pendant la garde à vue, le rétablissement du droit au silence et l’exigence de son déroulement dans des conditions matérielles assurant le respect de la dignité de la personne » (27).

Pour autant, il devait être amélioré et complété, pour tenir compte non seulement des dernières évolutions jurisprudentielles intervenues depuis son dépôt, mais aussi de considérations pratiques d’organisation du nouveau régime de la garde à vue.

L’article 1er du projet de loi pose expressément le principe, actuellement absent du code de procédure pénale, de l’audition libre d’une personne suspectée, présumée innocente, et du caractère subsidiaire du placement en garde à vue.

En dehors des cas où la personne suspectée fait l’objet d’un mandat de recherche ou a été conduite par la force publique dans les locaux des services de police judiciaire, la nécessité de l’entendre sur les faits dont elle est soupçonnée n’impose pas son placement en garde à vue dès lors qu’elle consent à être entendue librement. Ce consentement exprès doit alors être recueilli par un officier ou un agent de police judiciaire et être renouvelé à chaque nouvelle audition.

La Commission, à l’initiative de votre rapporteur et de M. Philippe Houillon, a supprimé le dispositif de l’audition libre tel que mis en place par l’article 1er du projet de loi. Le problème essentiel de ce dispositif était l’absence de reconnaissance des droits du suspect entendu librement.

Le dispositif ne prévoit pas de notification des droits de la personne librement entendue, notamment de son droit de se taire, si bien qu’il pourrait être abusé de l’ignorance de la personne des droits auxquels elle renonce en évitant la garde à vue. L’assistance de la personne par un avocat n’était de même pas prévue, ce qui semble contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, comme l’a estimé le professeur Sudre entendu lors de la table ronde (cf. compte rendu en annexe 1).

La garde à vue fait l’objet d’une définition précise : le nouvel article 62-3 du code de procédure pénale, introduit par l’article 1er du projet de loi dispose qu’elle constitue « une mesure de contrainte prise au cours de l’enquête par laquelle une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs » pour un certain nombre de motifs.

Le recours à la garde à vue est ainsi désormais limité en matière délictuelle aux cas dans lesquels une peine d’emprisonnement est encourue, ce qui n’était aujourd’hui pas prévu dans le cadre d’une enquête préliminaire. Par ailleurs, les motifs permettant de recourir à cette mesure sont désormais précisément énumérés par la loi (nouvel article 62-6 du code de procédure pénale) : il ne pourra désormais être procédé au placement en garde à vue d’une personne que lorsque cette mesure est l’unique moyen de :

—   soit permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;

—  soit garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République aux fins de mettre ce magistrat en mesure d’apprécier la suite à donner à l’enquête ;

—  soit empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

—  soit empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

—  soit empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;

—  soit garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser l’infraction. 

Le ou les motif(s) justifiant la garde à vue doivent être communiqués par les enquêteurs au procureur de la République lorsque ceux-ci l’avisent de la mesure et doivent être mentionnés dans le procès-verbal récapitulatif de la garde à vue.

L’article 1er pose le principe du contrôle du procureur de la République sur la garde à vue (nouvel article 62-5 du code de procédure pénale). Il est précisé que ce magistrat apprécie si le maintien de la personne en garde à vue et, le cas échéant, la prolongation de cette mesure sont nécessaires à l’enquête et proportionnés à la gravité des faits. Il est également indiqué que ce magistrat assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne gardée à vue et qu’il peut ordonner à tout moment que la personne gardée à vue soit présentée devant lui ou remise en liberté.

La commission des Lois a précisé la définition de la garde à vue en regroupant les dispositions des articles 62-3 et 62-6 introduits par le projet de loi : la garde à vue est définie comme une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, par laquelle une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs dès lors que cette mesure constitue l’unique moyen de parvenir à un des six objectifs mentionnés plus haut et que la Commission n’a pas modifiés.

La Commission a adopté, contre l’avis de votre rapporteur, un amendement confiant à un juge du siège – le juge des libertés et de la détention ou, à défaut, le président du tribunal de grande instance ou son délégué – le contrôle de la garde à vue, les commissaires aux Lois favorables à cet amendement faisant la distinction entre la « gestion » de la garde à vue qui incomberait au procureur de la République et le « contrôle » de la mesure qui devrait revenir à un magistrat indépendant.

Votre rapporteur estime que la rédaction ainsi adoptée pose des difficultés, notamment de cohérence avec les dispositions de l’article 41 du code de procédure pénale qui prévoit que le procureur de la République contrôle la garde à vue et qu’elle devra être revue d’ici à l’examen du projet de loi en séance publique. Il semble pour le moins délicat de dessaisir totalement le parquet du contrôle des gardes à vue, dans la mesure où il décide de l’opportunité des poursuites.

L’article 2 précise que seul un officier de police judiciaire peut, d’office ou sur instruction du procureur de la République, placer en garde à vue une personne lorsque les conditions prévues par la loi sont réunies, et qu’il doit alors en informer le procureur de la République dès le début de la mesure (nouvelle rédaction du I de l’article 63 du code de procédure pénale).

La durée de la garde à vue demeure de vingt-quatre heures.

La possibilité de prolongation pour vingt-quatre heures, décidée par le procureur de la République, est désormais limitée aux crimes ou aux délits punis d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an (nouvelle rédaction du II de l’article 63 du code de procédure pénale).

La prolongation ne peut être accordée qu’après présentation préalable de la personne à ce magistrat, cette présentation pouvant intervenir par un moyen de communication audiovisuelle. Elle peut cependant, à titre exceptionnel, être accordée par une décision écrite et motivée, sans présentation préalable.

La commission des Lois a adopté un amendement de votre rapporteur supprimant la possibilité pour le procureur de la République de décider d’un placement en garde à vue et réservant donc cette prérogative aux seuls officiers de police judiciaire, comme c’est le cas actuellement.

Elle n’est en revanche pas revenue sur la disposition prévoyant que c’est le procureur de la République qui décide de la prolongation de la mesure.

À l’initiative de Mme Delphine Batho et contre l’avis de votre rapporteur et du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement précisant qu’il est établi un procès-verbal unique de déroulement de la garde à vue (article 2).

Conformément aux exigences posées par le Conseil constitutionnel, est prévue la notification du droit au silence de la personne gardée à vue, celle-ci devant être informée qu’elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire (II de l’article 63-1 résultant de l’article 2 du projet de loi).

Principe introduit par la loi du 15 juin 2000 renforçant la présomption d’innocence, dont la rédaction a été modifiée par la loi du 4 mars 2002, le droit de se taire avait été supprimé par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure. Ce droit est ainsi rétabli par le présent projet de loi, dans une rédaction proche de celle de la loi de mars 2002.

En l’état actuel du droit, la personne gardée à vue peut demander à faire prévenir soit son employeur, soit une personne avec laquelle elle vit habituellement ou un parent en ligne directe. L’article 3 du projet de loi prévoit que désormais elle pourra à la fois faire prévenir l’un et l’autre, et que la demande devra être honorée dans un délai de trois heures à compter de la formulation de la demande.

La commission des Lois, à l’initiative de M. Éric Ciotti, a précisé le champ d’application du droit au silence reconnu à la personne gardée à vue : le droit de se taire ne s’applique pas à un certain nombre d’informations que la personne a le devoir de communiquer, à savoir son nom, son prénom, sa date de naissance, son lieu de naissance, son domicile et, le cas échéant, sa résidence. Votre rapporteur estime que la rédaction de ce nouvel alinéa, qui n’est pas sans poser quelques difficultés, devrait être précisée en vue de la séance publique (article 2).

La Commission a, à l’initiative de M. Jean-Pierre Decool, précisé que la « circonstance insurmontable » justifiant un report de l’appel au proche et à l’employeur du gardé à vue par l’officier de police judiciaire devait être expressément mentionnée au procès-verbal de déroulement de la garde à vue (article 3).

Reprenant en partie les dispositions de l’actuel article 63-4 du code de procédure pénale, dont les six premiers alinéas ont été déclarés contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel, les articles 5, 6 et 7 instituent un droit renforcé de la personne gardée à vue à être assistée par un avocat. Conformément aux jurisprudences tant nationales qu’européenne sur les droits de la personne gardée à vue, ce droit à demander à être assisté par un avocat s’exercera – comme aujourd’hui le droit de demander à s’entretenir avec un avocat – « dès le début de la garde à vue ». Aux termes du projet de loi, ce droit comprendrait désormais trois aspects :

1° le droit à demander à s’entretenir avec un avocat, reprise du droit existant ;

2° le droit à ce que l’avocat puisse consulter certains documents de la procédure, à savoir le procès-verbal de notification du placement en garde à vue et des droits qui y sont attachés et les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste ;

3° le droit pour la personne gardée à vue à ce que l’avocat assiste à ses auditions.

Le projet de loi prévoit toutefois la possibilité pour le procureur de la République, à la demande de l’officier de police judiciaire, de différer de douze heures la consultation des documents de la procédure et la présence de l’avocat aux auditions.

Le texte initial du projet de loi ne prévoyait expressément ni que les auditions peuvent débuter sans attendre l’arrivée de l’avocat, ni qu’elles ne peuvent pas débuter. Afin de tenir compte des contraintes géographiques et humaines liées aux effectifs de certains barreaux et de concilier l’effectivité du droit à assistance avec la nécessité de préserver l’efficacité des enquêtes, la Commission a adopté un amendement de son rapporteur instituant un « délai de carence » de deux heures, avant l’expiration duquel la première audition de la personne gardée à vue ne pourra pas débuter.

La Commission a également adopté un amendement de votre rapporteur précisant les motifs qui pourront fonder les dérogations au droit à l’assistance d’un avocat : la décision devra être justifiée par des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête », rédaction qui reprend la terminologie utilisée par la Cour européenne des droits de l’Homme.

Pour tenir compte de l’introduction par la Commission d’un délai de carence de deux heures, a été adopté un amendement de votre rapporteur permettant au procureur de la République, pour les mêmes raisons impérieuses que celles qui permettront le report de l’intervention de l’avocat ou de la consultation des procès-verbaux, d’autoriser l’OPJ à débuter les auditions sans attendre l’expiration du délai de deux heures.

Enfin, la Commission a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant la possibilité, pour les infractions punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement, d’un deuxième report – qui sera décidé par le juge des libertés et de la détention – de la présence de l’avocat lors des auditions, jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue.

Dans le texte initial du projet de loi, les prérogatives des avocats au cours des auditions auxquelles ils assistent sont définies par un nouvel article 63-4-3 du code de procédure pénale. Celui-ci prévoit qu’« À l’issue de chacun des entretiens prévus à l’article 63-4 et de chacune des auditions auxquelles il a assisté en application du 63-4-2, l’avocat peut présenter des observations écrites. Celles-ci sont alors jointes à la procédure ». Dans sa rédaction initiale, cet article exclut donc toute intervention orale de l’avocat au cours des auditions.

Les obligations imposées aux avocats sont quant à elles définies par le nouvel article 63-4-4, qui dispose que « Sans préjudice de l’exercice des droits de la défense, l’avocat ne peut faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue ni de son entretien avec la personne qu’il assiste ni des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions ».

La conception du rôle de l’avocat retenue par le projet de loi, celle d’un « avocat taisant » pendant toute la durée des auditions de garde à vue, n’est pas compatible avec la jurisprudence européenne s’agissant du rôle de l’avocat. Depuis l’arrêt Dayanan, la Cour européenne des droits de l’Homme a confirmé dans plusieurs décisions que la personne mise en cause doit pouvoir bénéficier de toute la « vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil », à savoir « la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention [qui] sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer ». Mais cette conception d’un avocat simple spectateur de l’audition de garde à vue n’est pas davantage conforme à ce qu’exige le renforcement du caractère contradictoire de notre procédure pénale.

C’est la raison pour laquelle la Commission a adopté un amendement de votre rapporteur prévoyant la possibilité pour l’avocat, à la fin de l’audition, de poser des questions. L’officier ou l’agent de police judiciaire pourra toutefois « s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou à la dignité de la personne », mention de la question refusée étant alors portée au procès-verbal.

Un seul article du projet de loi initial, l’article 12, est consacré aux régimes dérogatoires. Il a pour objet de maintenir les régimes de garde à vue applicables à la criminalité organisée en dehors du champ d’application des nouvelles règles issues du projet de loi et applicables à la garde à vue de droit commun. Conforme à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, qui n’avait pas remis en cause la conformité à la Constitution de ces régimes dérogatoires, l’article 12 ne pouvait rester en l’état en raison des décisions rendues le 19 octobre 2010 – c’est-à-dire six jours après le dépôt du projet de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale – par la Cour de cassation.

Dans ces deux décisions rendues dans des affaires d’infractions à la législation sur les stupéfiants, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que le régime dérogatoire prévu par le septième alinéa de l’article 63-4 et l’article 706-88 du code de procédure pénale était contraire à l’article 6 de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Par ailleurs, comme l’a précédemment souligné votre rapporteur, le régime de la retenue douanière a également été déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité (décision n° 2010-32 QPC du 22 septembre 2010).

Comme le régime de droit commun, les régimes dérogatoires de garde à vue et la retenue douanière doivent donc également être réformés avant la date du 1er juillet 2011, date que la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel ont retenue pour la prise d’effet de leurs décisions.

S’agissant des régimes dérogatoires, la Commission a adopté un amendement de rédaction globale de l’article 12 présenté par le Gouvernement, sous-amendé par son président Jean-Luc Warsmann et par votre rapporteur. L’article 12 adopté par la Commission prévoit, pour les infractions mentionnées à l’article 706-73 du code de procédure pénale, la possibilité que l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue soit reportée dans les conditions suivantes :

—  L’intervention de l’avocat pourra être reportée, jusqu’à la quarante-huitième heure de garde à vue pour toutes les infractions visées à l’article 706-73, à l’exception du trafic de stupéfiants et du terrorisme, pour lesquels le report pourra être décidé jusqu’à la soixante-douzième heure ;

—  Le report sera subordonné à l’existence de « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ». Il devra avoir pour objet soit de permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit de prévenir une atteinte aux personnes ;

—  En enquête préliminaire ou de flagrance, la compétence pour décider du report appartiendra au procureur de la République jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue, puis au juge des libertés et de la détention au-delà. Si une information judiciaire est ouverte, la compétence appartiendra au juge d’instruction. La décision du magistrat devra être écrite et motivée ;

—  Enfin, en matière de terrorisme, le juge des libertés et de la détention pourra décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats spécialement habilités à intervenir en cette matière.

Le régime de la retenue douanière est réformé par l’article 14 bis, issu d’un amendement du Gouvernement adopté par la Commission, avec avis favorable de votre rapporteur, sous réserve de l’adoption de sous-amendements de précision.

La rédaction des nouveaux articles 323-1 à 323-10 du code des douanes
– qui remplacent le 3. de l’article 323, qui était bien moins précis – tire donc les conséquences de la décision précitée du Conseil constitutionnel, en alignant très largement le régime de la retenue douanière sur celui de la garde à vue. Sont notamment prévus le droit à l’assistance effective d’un avocat et la notification du droit au silence.

Alors qu’il renforçait le droit de la personne gardée à vue à être assistée au cours de la garde à vue, le texte initial du projet de loi ne prévoyait aucune disposition permettant de garantir l’équilibre des droits des parties. Pourtant, comme l’a déjà souligné votre rapporteur en présentant les enjeux de la réforme de la garde à vue, s’il est procédé à une confrontation entre une personne gardée à vue et une victime, le principe de l’équilibre des droits des parties s’oppose à ce que la victime y participe seule, sans assistance, alors que la personne assistée serait assistée par un avocat.

C’est la raison pour laquelle la Commission a adopté un amendement de votre rapporteur introduisant dans le projet de loi un nouvel article 7 bis, qui prévoit le droit pour la victime d’une infraction à être assistée par un avocat si elle est confrontée avec une personne gardée à vue qui est elle-même assistée.

La victime devra être informée de ce droit avant la confrontation. Toujours dans un souci d’équilibre des droits des parties, l’avocat de la victime disposera pendant l’audition des mêmes prérogatives que l’avocat de la personne gardée à vue : consultation les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste, possibilité de poser des questions et de formuler des observations écrites à l’issue de l’audition.

L’assistance de la victime par un avocat en cas de confrontation pourra naturellement être prise en charge financièrement au titre de l’aide juridictionnelle.

AUDITION DE M. MICHEL MERCIER, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTÉS

Au cours de sa séance du jeudi 9 décembre 2010, la Commission procède à l’audition, ouverte à la presse, de M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le projet de loi relatif à la garde à vue (n° 2855).

M. le président Jean-Luc Warsmann. Monsieur le garde des Sceaux, je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue une nouvelle fois, persuadé que ce ne sera pas la dernière.

Je tiens, tout d’abord, à vous remercier des informations complémentaires que vous nous avez fait parvenir sur l’étude d’impact. Au regard de l’importance de la question, nous avons procédé à un examen approfondi du projet de loi : nous avons consacré une matinée à l’audition de juristes sur les jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’Homme, du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation. Nous vous auditionnons aujourd’hui, et nous entendons les articles du texte mercredi prochain.

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés. Je vous remercie pour l’accueil que vous voulez bien me réserver. Rencontrer régulièrement les membres de la commission des Lois de l’Assemblée nationale me réjouit et, pour tout dire, me rajeunit.

Le projet de loi relatif à la garde à vue est présenté dans un contexte de foisonnement juridique. Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le 30 juillet, et la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui a déjà rendu trois arrêts, siégera demain dans une affaire qui pourrait avoir des conséquences sur la garde à vue. La première chambre civile devrait à son tour statuer au début du mois de janvier 2011. Cette matière, stable durant des années, s’ouvre désormais, en partie grâce à la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui, avec la question prioritaire de constitutionnalité, a institué le contrôle de constitutionnalité par voie d’exception.

La réforme de la garde à vue que le Gouvernement veut porter et faire partager à la représentation nationale est ambitieuse. En élaborant ce projet de loi, nous avons veillé à concilier les deux impératifs de toute société démocratique que sont, d’une part, la recherche de la vérité et la poursuite des auteurs d’infractions et, d’autre part, la préservation des libertés constitutionnellement garanties.

La réforme de la garde à vue s’inscrit dans le cadre plus global de la réforme de la procédure pénale, initiée en octobre 2009. Mais la décision du Conseil constitutionnel nous conduit à présenter dès aujourd’hui un projet autonome. Comme vous le savez, la haute juridiction a jugé certaines dispositions existantes contraires à la Constitution, tout en prévoyant un délai de mise en conformité expirant le 1er juillet 2011. Nous avons donc, compte tenu des délais de saisine du Conseil constitutionnel, environ jusqu’au 30 mai pour achever la mise en œuvre de la réforme de la garde à vue. Mon intention étant d’éviter le recours à la procédure accélérée, je pense que nous serons amenés à nous voir souvent et à passer de longues nuits ensemble.

L’économie de ce texte repose sur un principe fondamental : la liberté est la règle, la mesure de police l’exception. Les personnes entendues dans le cadre d’enquêtes pénales resteront libres, le placement en garde à vue n’étant décidé qu’en cas de stricte nécessité.

Pourquoi, en effet, utiliser plus que de raison la coercition ? Dans un cas sur deux, les personnes aujourd’hui mises en cause sont entendues en dehors du cadre de la garde à vue. Néanmoins, le nombre de gardes à vue, en constante augmentation depuis plusieurs années, demeure trop élevé (790 000 en 2009). Il était essentiel de le limiter en prévoyant un encadrement strict du recours au placement en garde à vue et de renforcer les droits de ceux qui, lorsque cela se révèle nécessaire, y sont soumis.

Il s’agit, en premier lieu, de limiter le nombre de gardes à vue en encadrant le recours à cette procédure.

L’article 1er du projet de loi rappelle donc le principe de liberté de la personne auditionnée. Celle-ci doit être avisée par les enquêteurs de la nature et de la date présumée de l’infraction dont elle est soupçonnée ; elle doit exprimer son consentement à être entendue. Il s’agit là d’une avancée majeure puisque les personnes auditionnées hors garde à vue aujourd’hui n’ont accès ni à ces informations ni à ce droit. De plus, à tout moment, la personne peut mettre un terme à son audition, et son consentement est recueilli à chaque reprise d’audition.

Ce régime a vocation à s’appliquer à tous les cas dans lesquels la personne s’est rendue librement et spontanément dans les locaux de police, à la suite d’une convocation, ainsi que dans ceux où elle a accepté expressément de suivre les enquêteurs après son interpellation.

Ce dispositif est pleinement conforme aux jurisprudences constitutionnelles et conventionnelles, qui n’ont jamais exigé qu’une personne entendue librement au stade de l’enquête soit assistée d’un avocat.

Ce sont ainsi des dizaines de milliers de gardes à vue par an qui pourront être évitées. Que l’on pense, par exemple, aux gardes à vue qui suivaient des contrôles routiers ! Beaucoup d’entre elles n’étaient aucunement justifiées par les nécessités de l’enquête, mais elles étaient décidées par précaution, en l’absence de tout autre cadre juridique sûr.

Ce recours excessif au régime de la garde à vue, par souci légitime d’éviter des annulations de procédure, n’aura plus lieu d’être.

Cette première avancée de la réforme répond très largement au double impératif que j’évoquais : elle réduit le nombre de gardes à vue et permet de recentrer le travail des enquêteurs sur l’essence même de leur métier, à savoir la poursuite des investigations aux fins de la recherche de la vérité, plutôt que de l’alourdir par la gestion des formalités de la garde à vue ; elle préserve la liberté des personnes mises en cause, en évitant des mesures de coercition injustifiées.

En revanche, lorsqu’une mesure de garde à vue s’avérera nécessaire, elle sera encadrée de façon plus stricte. Le texte définit de façon précise la garde à vue et prévoit de limiter son utilisation aux investigations concernant les infractions punies d’une peine d’emprisonnement.

L’enquêteur devra justifier que le placement en garde à vue est l’unique moyen de permettre l’exécution des investigations, ou l’unique moyen d’empêcher la personne de modifier les preuves, de faire pression sur les témoins et les victimes, de se concerter avec ses complices. Ces critères, similaires à ceux fixés en matière de détention provisoire, permettent de concentrer la garde à vue sur son objectif essentiel : être un outil au service de l’enquête. Ces critères seront contrôlés, selon les cas, par un magistrat du parquet ou par le juge d’instruction saisi.

La garde à vue sera donc mieux encadrée et les droits du gardé à vue seront étendus.

Il s’agit, en deuxième lieu, d’introduire des avancées essentielles pour la protection des droits des individus placés en garde à vue.

L’objectif central du projet est l’assistance effective de l’avocat, dont la présence et les moyens d’intervention sont considérablement renforcés. La personne placée en garde à vue pourra être assistée tout au long de la procédure, et l’avocat aura accès au procès-verbal de notification et aux procès-verbaux d’audition. Le texte permet ainsi à la personne d’organiser sa défense et de préparer les auditions devant les services de police.

Par ailleurs, la personne placée en garde à vue doit être informée de son droit à conserver le silence. Cette exigence, rappelée par le Conseil constitutionnel en juillet dernier, est, dans la plupart des pays occidentaux, une norme, parfois même de niveau constitutionnel. Notre législation se devait de prévoir expressément cette disposition.

Le respect de la dignité des personnes est l’un des apports essentiels de la réforme. Les fouilles à corps, particulièrement humiliantes, étaient souvent plus mal vécues que la privation de liberté elle-même et faisaient l’objet de critiques récurrentes. Les fouilles intégrales menées pour des raisons de sécurité seront dorénavant prohibées, tandis que les fouilles effectuées pour les nécessités de l’enquête, assimilées à une perquisition, demeureront autorisées – ce sera le cas pour la recherche de stupéfiants.

Enfin, si le projet introduit des avancées majeures en termes de protection des droits, nous ne devons pas perdre de vue qu’il faut des cadres d’enquête souples et adaptés à toutes les formes de criminalité : des régimes dérogatoires sont indispensables pour répondre à des circonstances exceptionnelles.

Ni le juge constitutionnel, ni la Cour de cassation, ni la Cour européenne des droits de l’Homme n’ont contesté une telle nécessité. En cette matière aussi, tout est affaire de proportionnalité.

Le Conseil constitutionnel reprochait en effet au régime actuel de garde à vue une restriction des droits de la défense de portée générale, sans considération des circonstances particulières de l’espèce. En revanche, dès lors que peuvent être dûment motivées lesdites circonstances particulières, une dérogation est envisageable. Ainsi, le texte prévoit la possibilité, sur autorisation d’un magistrat, de différer de douze heures la participation de l’avocat aux auditions afin de permettre le bon déroulement d’investigations urgentes ou de prévenir une atteinte imminente aux personnes.

De même, la Cour de cassation a admis l’existence de régimes dérogatoires en précisant, dans trois arrêts du 19 octobre 2010, que des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’espèce » pouvaient justifier le report de l’assistance de l’avocat.

Il nous faut prendre en compte cette jurisprudence postérieure au dépôt du projet de loi. C’est la raison pour laquelle je présenterai un amendement prévoyant qu’en matière d’infractions à la législation sur les stupéfiants, de criminalité organisée et de terrorisme, la présence de l’avocat pourra être différée, sur autorisation du procureur de la République durant les vingt-quatre premières heures, et sur autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD) jusqu’à la quarante-huitième, voire jusqu’à la soixante-douzième heure en matière de trafic de stupéfiants et de terrorisme.

En droit commun, l’intervention de l’avocat pourra être différée de douze heures sur autorisation du procureur de la République, puis à nouveau de douze heures sur décision du juge des libertés et de la détention. Dans tous les cas, ce report devra être motivé en fonction des circonstances de l’espèce.

Il s’agit, en troisième lieu, d’améliorer le projet pour tenir compte de toutes les évolutions constitutionnelles et conventionnelles : c’est là un objectif affiché du Gouvernement.

Je présenterai tout d’abord, en accord avec le ministre du budget, un amendement sur la retenue douanière, qui vise à adapter cette forme spécifique de coercition aux exigences fixées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 22 septembre 2010.

Ce projet est aussi l’occasion de réformer une disposition que la Cour européenne des droits de l’Homme a censurée dans l’arrêt Moulin, le 23 novembre 2010. À ce propos, je voudrais vous mettre en garde contre les tentations de surinterprétation de cet arrêt, auxquelles certains commentateurs se sont parfois livrés.

La position de la Cour européenne des droits de l’Homme n’est pas nouvelle : cet arrêt confirme une jurisprudence de 1988, aux termes de laquelle le parquet ne peut être qualifié d’autorité judiciaire au sens de l’article 5, paragraphe 3, de la Convention européenne des droits de l’Homme, notamment parce qu’il est une partie poursuivante. Modifier le statut du parquet n’aurait aucune incidence puisqu’il resterait partie poursuivante, comme l’est d’ailleurs le juge d’instruction lorsqu’il rend une ordonnance de renvoi.

La Cour européenne des droits de l’Homme prend également soin de souligner qu’il « ne lui appartient pas de prendre position dans le débat concernant le statut du ministère public en France ».

L’arrêt Moulin apporte en revanche deux précisions : la présentation à un juge est nécessaire, même si la privation de liberté intervient sur le fondement d’un mandat délivré par un autre juge, et d’une garde à vue, contrôlée en l’espèce par un juge ; la privation de liberté doit être envisagée de manière globale même si elle a plusieurs fondements successifs (garde à vue, mandat d’amener). Pour toute privation de liberté supérieure à quatre jours, l’intervention d’un magistrat du siège est par conséquent nécessaire.

La Cour n’a cependant jamais condamné le pouvoir confié au procureur de la République de contrôler les gardes à vue pendant un délai de quarante-huit heures. La légitimité de celui-ci à assurer ce contrôle est pleine et entière. Au-delà de ce délai, notre droit prévoit l’intervention du juge des libertés et de la détention.

Ôter au procureur de la République le pouvoir de contrôler la garde à vue reviendrait d’ailleurs à donner au juge des libertés et de la détention le pouvoir de contrôler les politiques de poursuites rapides et de défèrement, actuellement sous le contrôle du parquet. Les conséquences sur la maîtrise des objectifs de politique pénale du Gouvernement seraient loin d’être négligeables.

Pour résoudre la difficulté soulevée par l’arrêt Moulin, je soumettrai à votre Commission un amendement qui tire les conséquences de cette jurisprudence en confiant le contrôle de la mise à exécution des mandats d’arrêt et d’amener au juge des libertés et de la détention.

D’autres amendements, précisant et enrichissant le dispositif envisagé, pourront être adoptés dès lors qu’ils ne remettent pas en cause son équilibre général. Ainsi, il paraît indispensable de prévoir, lors d’une confrontation entre un auteur présumé et sa victime, la possibilité que celle-ci soit également assistée d’un avocat. Il s’agit de garantir l’égalité des armes, dans une phase essentielle de la procédure.

Pour finir, j’insisterai, à ce stade, sur un point : la mise en œuvre de cette ambitieuse réforme.

Cette mise en œuvre exige une mobilisation des différents services de l’État, qu’il s’agisse des services de police ou des juridictions, un effort conséquent d’équipement (matériels de visioconférence pour faciliter les prolongations de garde à vue, locaux pour la consultation des dossiers par les avocats) et, surtout, un effort sans précédent en matière d’aide juridictionnelle. Nous avons déjà prévu des mesures en ce sens. Le budget consacré au financement de l’aide juridictionnelle a été augmenté en matière pénale : 80 millions d’euros supplémentaires seront ainsi alloués à la défense par les avocats des personnes placées en garde à vue.

Les barreaux devront participer pleinement à ces efforts. Je ne doute pas qu’ils sauront relever ce défi et assurer la défense effective de tous ceux qui, placés en garde à vue, où qu’ils soient sur le territoire de la République, souhaiteront bénéficier de leurs services.

Cette réforme impliquera aussi des modifications profondes de fonctionnement. Tous devront s’adapter à ces mutations afin que la nouvelle procédure pénale permette plus de respect des libertés publiques mais n’entraîne pas une moindre efficacité dans la recherche des auteurs d’infractions.

La réforme de la garde à vue était nécessaire, et elle est très attendue. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation, toujours en évolution, conforte l’ambition initiale du Gouvernement et nous pousse à aller plus loin. Les échanges que nous aurons en Commission puis en séance publique seront, je le sais, fructueux et vigoureux. Le projet répondra ainsi aux meilleurs standards européens.

L’équilibre que nous devons trouver ensemble est délicat : les droits de la défense doivent être protégés sans que la qualité des enquêtes s’en trouve affaiblie. Le législateur a souvent eu en cette matière un mouvement de balancier. Je souhaite adapter notre législation aux normes constitutionnelles et conventionnelles tout en préservant ce fragile équilibre. Pour parvenir à concilier ces différentes exigences, je sais pouvoir compter sur votre compétence.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. Il est vrai que les décisions récentes de la Cour européenne des droits de l’Homme, du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation donnent un tour particulièrement contraint au contexte juridique de cette réforme. Sans doute aurait-il été souhaitable d’engager une réforme globale de la procédure pénale, mais le calendrier nous impose d’examiner de façon autonome, tout autant que sereine, la question de la garde à vue.

L’équilibre que nous devons trouver est, certes, délicat. On ne doit ni décourager les forces de l’ordre ni donner le sentiment d’une moindre vigilance ou d’une quelconque impunité. Il nous faut par ailleurs nous préoccuper des victimes tout en respectant les droits de la défense.

Dire que la liberté est le principe, et la contrainte l’exception, est une approche séduisante. Pourtant, un certain nombre de difficultés se posent. Il ressort des auditions de juristes, d’experts et de praticiens que j’ai pu mener en tant que rapporteur, ou de celles organisées par la Commission, que, selon les jurisprudences, notamment celle de la Cour européenne des droits de l’Homme, la présence d’un avocat est nécessaire dès le début de l’audition libre. Dans ce cas, le dispositif prévu par le projet de loi ne tient plus.

La définition de la garde à vue, beaucoup plus stricte qu’actuellement, me paraît pertinente. Un certain nombre de questions méritent cependant encore d’être soulevées s’agissant de la protection des droits de la personne placée en garde à vue : comment se traduit l’effectivité de l’assistance de l’avocat ? À quel moment débute son intervention ? Faut-il prévoir un délai de carence ? À quels éléments du dossier a-t-il accès ? S’agit-il ou non d’un avocat « taisant » ?

Le droit au silence devait être instauré. C’est désormais un principe inscrit dans les mentalités, et, de fait, aujourd’hui, les personnes mises en cause qui ne veulent pas parler ne parlent pas.

Le respect de la dignité est essentiel. Avec la suppression des fouilles à corps disparaîtront les traumatismes psychologiques et le sentiment de déshumanisation qu’elles pouvaient provoquer.

Je partage votre approche des régimes dérogatoires. Le système français en matière de terrorisme, que nous envient les autres pays, est pertinent et efficace. Il serait fâcheux de le mettre à mal dans une période où les menaces sont particulièrement prégnantes. En matière de stupéfiants et de bande organisée, il convient de maintenir un régime spécifique. Hormis certaines adaptations nécessaires, le dispositif que vient de présenter M. le garde des Sceaux n’appelle pas de commentaires à ce stade.

En revanche, permettre au parquet de contrôler la prolongation des gardes à vue est une source de difficultés, pour ne pas dire une erreur. Même si l’interprétation des arrêts de la Cour européenne des droits de l’Homme, en particulier de l’arrêt Moulin, ne doit pas être trop extensive, il me semble que cette question doit être réexaminée, sans pour autant que soit rouvert le débat sur l’indépendance et le rôle du parquet.

Enfin, des moyens importants devront être mis en œuvre pour appliquer cette réforme, en termes tant de budget que d’organisation. Les barreaux des grandes villes pourront s’adapter facilement, mais je m’interroge sur la façon dont les « petits barreaux » pourront se mettre au diapason des nouvelles mesures.

M. Dominique Perben. Monsieur le garde des Sceaux, merci pour votre présentation. Vous avez évoqué des ajouts qui paraissent nécessaires, compte tenu des évolutions récentes des jurisprudences européenne et française.

Néanmoins, je ne vois pas l’intérêt d’introduire l’audition libre dans notre système législatif. Pourquoi inscrire dans la loi une pratique courante, qui veut que les personnes considérées comme témoins se rendent dans un commissariat pour répondre à un certain nombre de questions ? Pour encadrer un tel dispositif, il faudrait l’alourdir considérablement, ce qui le rendrait, de fait, ingérable.

La solution que vous proposez quant au contrôle du parquet me semble intelligente, en tout cas conforme à l’interprétation que j’ai de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme. Encore faudra-t-il voir dans quelles conditions le parquet peut reporter de douze heures l’intervention de l’avocat dans les affaires classiques, et motiver sa décision. Cela doit rester du domaine de l’exception et ne pas devenir un deuxième régime de droit commun.

Pour que l’enquête ait toutes les chances de réussir, la liberté de l’individu étant protégée et le droit des victimes garanti, la loi doit être précise sur les conditions de l’intervention de l’avocat. Un délai de carence doit être instauré afin d’éviter que l’enquête ne soit bloquée ou, au contraire, que celle-ci ne fasse fi de l’arrivée de l’avocat. La durée de ce délai de carence devra être encore précisée, l’emploi d’une formule de type « délai raisonnable », qui serait un nid à contentieux, devant être évité.

Par ailleurs, il conviendra de préciser si l’avocat intervient pendant l’interrogatoire ou à la fin de celui-ci. Je rappelle qu’il s’agit bien ici d’une phase d’enquête de police, et non d’une convocation devant le juge.

Enfin, il faudra définir le rôle, éventuel, de l’avocat de la victime.

La position de la Cour de cassation sur les régimes dérogatoires est différente de celle du Conseil constitutionnel, qui avait validé la loi de 2004, mais la décision de non-conformité à la jurisprudence européenne s’impose à nous. Pour autant, gardons à l’esprit que les organisations terroristes ou criminelles sont si puissantes aujourd’hui que, faute de donner à la justice tous les moyens de lutter contre elles, les États démocratiques devront se défendre avec des moyens non judiciaires, ce qui ne représentera un gain pour personne. Donnons au parquet la possibilité de différer la présence de l’avocat en motivant sa décision au cas par cas, le juge des libertés et de la détention intervenant après les premières vingt-quatre heures.

L’amendement du Gouvernement, qui tirera les conséquences de l’arrêt Moulin en confiant le contrôle de la mise à exécution des mandats d’arrêt et d’amener au juge des libertés et de la détention, me paraît tout à fait pertinent.

Le passage d’un système à l’autre doit se faire dans les meilleures conditions possibles pour les services de police et de gendarmerie, pour les magistrats et pour les avocats. À cet égard, et malgré le délai qui nous est imparti, j’attire votre attention sur la nécessité d’écrire une loi praticable dont les dispositions seront facilement applicables par les professionnels.

M. Jean-Paul Garraud. Nous voici à un moment important de la vie législative, où nous devons inventer un équilibre nouveau et délicat entre sécurité de nos concitoyens, exercice des libertés publiques et respect des libertés fondamentales.

Comme les policiers et les magistrats l’affirment, l’inflation du nombre de gardes à vue est en partie due à la loi du 15 juin 2000, votée ici à la quasi-unanimité, qui faisait de la garde à vue un élément de garantie des droits de la personne mise en cause par la justice. La décision du Conseil constitutionnel nous impose de modifier le régime de la garde à vue avant le 1er juillet 2011. Sans doute aurait-il été préférable d’inclure cette réforme dans celle, plus globale, de la procédure pénale, afin de bien en faire comprendre toute la cohérence.

Je rejoins Dominique Perben sur son appréciation de l’audition libre. Ce dispositif a été présenté comme nouveau, ce qui a fait naître une certaine confusion dans les esprits. Pourtant, la pratique qui consiste à convoquer une personne au commissariat pour procéder, avec son accord, à son audition, existe déjà. Elle est même beaucoup plus répandue, concernant les infractions mineures, que le placement en garde à vue, et donne à l’officier de police judiciaire un premier aperçu de l’affaire, en tout début de procédure.

La présence de l’avocat en garde à vue doit être conciliable avec la préservation du secret de l’enquête. Dans certaines affaires liées à la criminalité organisée ou au terrorisme, la sécurité de nos concitoyens en dépend. En contrepartie de l’extension de ses pouvoirs, la défense devra réformer son organisation afin d’assumer ces nouvelles responsabilités. Il faut aussi empêcher que l’absence de l’avocat ne paralyse l’enquête.

Monsieur le garde des Sceaux, vous avez répondu précisément à la question que je vous posais en séance, mardi dernier, sur les conséquences qu’il convenait de tirer de l’arrêt Moulin.

Je ne suis pas d’accord avec notre rapporteur sur le contrôle de la garde à vue : le parquet est une autorité judiciaire à part entière, ses magistrats ayant suivi la même formation et étant soumis aux mêmes règles de déontologie que les autres magistrats. Selon le Conseil constitutionnel, ils sont aptes à contrôler les gardes à vue pendant les quarante-huit premières heures. Je ne doute pas que cette question fera débat.

Enfin, il faut aller au bout de la logique de juridictionnalisation de la garde à vue et permettre à la victime de se faire assister, elle aussi, par un avocat. Il serait anormal de la laisser seule, surtout s’il s’agit d’une personne mineure ou vulnérable, lors d’une confrontation avec l’auteur présumé de l’infraction. Rapporteur pour avis depuis 2002 du budget de la justice, je suis conscient des sommes importantes que représente une telle réforme. Des crédits doivent impérativement être prévus pour la mettre en place.

Présidence de M. Sébastien Huyghe, vice-président

M. Dominique Raimbourg. La réforme que vous nous présentez, monsieur le garde des Sceaux, est difficile et compliquée. D’abord, elle intervient après que les juridictions nous ont adressé de nombreux avertissements, dont nous n’avons pas su tenir compte. La situation s’est même aggravée : les dispositions de la loi du 15 juin 2000 concernant la garde à vue, dont le législateur ne pensait pas qu’elle serait utilisée comme une mesure de protection dont la mise en œuvre était nécessaire, ont fait l’objet d’interprétations jurisprudentielles. Par ailleurs, le Président de la République a malencontreusement choisi de faire de la garde à vue un indicateur de l’efficacité policière.

Notre procédure pénale, est aujourd’hui déséquilibrée. Autrefois, une phase judiciaire succédait à une phase policière. Mais aujourd’hui, les juges d’instruction traitent 30 000 dossiers quand, dans le même temps, les tribunaux correctionnels prononcent 580 000 décisions, la plupart d’entre elles ne faisant donc l’objet d’aucune enquête contradictoire. Le paradoxe de cette réforme est le suivant : en isolant le temps de la garde à vue du reste de la procédure pénale, cette réforme nous amène à rendre l’enquête partiellement contradictoire, alors que toutes les opérations qui suivront ne le seront plus.

En outre, la difficulté de cette réforme tient au fait que la garde à vue n’est pas seulement une mesure d’enquête, mais remplit aussi deux autres fonctions. En permettant une rétention limitée dans le temps, elle prévient le renouvellement de l’infraction. Par ailleurs, elle permet d’adapter les moyens de la police et de la justice au traitement des dossiers. C’est précisément là que se pose le problème de la nuit. Selon des sondages réalisés par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, seules une heure et demie ou deux heures sur les treize heures que dure en moyenne une garde à vue sont consacrées à l’audition du mis en cause. Le service de quart, notamment la nuit, n’a pas les moyens de prendre immédiatement une décision sur les enquêtes et place les personnes en garde à vue dans l’attente du retour du service enquêteur. Par ailleurs, il n’est pas prévu de récupération des permanences de nuit pour les procureurs, ce qui fait que le fax de notification de garde à vue arrive souvent, la nuit, dans un bureau vide.

La question de l’audition libre est extrêmement complexe. Beaucoup d’affaires, selon la police, ne méritent pas une garde à vue. Mais si la garde à vue est considérée comme une mesure de protection, comment échapper à un tel dispositif ? Pour autant, pourquoi l’OPJ mettrait-il en œuvre une mesure aussi compliquée en se privant d’un certain nombre de moyens ? Cette difficulté est centrale, et je crains que nous n’ayons pas trouvé à ce jour de solution satisfaisante.

L’instauration d’un délai de carence, qui donne à l’avocat le temps d’arriver, est nécessaire. Mais sitôt ce délai expiré, l’enquête doit pouvoir commencer. Doit-on, pour définir le rôle de l’avocat en garde à vue, s’inspirer de son rôle dans la phase de l’instruction – avocat taisant pendant l’interrogatoire, puis posant un certain nombre de questions à son issue ? Enfin, qui arbitre le conflit entre l’OPJ et l’avocat ? À l’instruction, le juge clôt l’interrogatoire et saisit le bâtonnier. Qu’en est-il dans le temps contraint d’une garde à vue ?

Monsieur le garde des Sceaux, je partage votre avis selon lequel le procureur est la partie poursuivante. Dans un droit pensé de partie à partie, je ne vois pas comment le procureur pourrait porter atteinte aux droits de l’autre partie en différant l’intervention de l’avocat. Pour autant, je suis partisan de la protection du secret de l’enquête pendant un certain temps, surtout lorsqu’il y a pluralité d’auteurs et que leurs dépositions doivent demeurer secrètes tant que tous ne se sont pas expliqués sur leur rôle respectif.

La prolongation de la garde à vue ne peut pas non plus être du ressort de la partie poursuivante, mais forcément du juge des libertés et de la détention. Je suis bien conscient des difficultés que recouvre une telle proposition, dans la mesure où les juges des libertés et de la détention sont encore moins nombreux que les procureurs. Ces difficultés d’ordre démographique se poseront aussi pour la présence effective de l’avocat ; il sera difficile de mettre en œuvre la réforme sur l’ensemble du territoire, puisque l’on dénombre en France 52 000 avocats, dont 23 000 exercent à Paris.

Enfin, je partage les observations de M. Garraud sur la défense de la victime. Il n’est pas question que celle-ci se retrouve seule face à l’auteur présumé de l’infraction, assisté, quant à lui, d’un avocat.

M. Jean-Jacques Urvoas. Un texte est nécessaire, mais il faut veiller à ce que le poids de nouvelles contraintes juridiques et matérielles n’obère pas la capacité opérationnelle des services de police et de gendarmerie, qui agissent au nom des victimes et de la sécurité publique. C’est pourquoi, comme M. Raimbourg, je suis favorable, au nom du respect de l’égalité des armes et du contradictoire, à ce que les victimes soient elles aussi assistées d’un avocat.

Je me suis posé plusieurs questions en vous écoutant.

La réforme de la procédure pénale est-elle encore à l’ordre du jour de la présente législature ? Les auditions ont révélé une différence d’appréciation entre le ministère de l’intérieur et celui de la justice. Le premier semble considérer le texte comme une contrainte, qu’il s’agit de cantonner à des adaptations minimes, ce qui nous prive de toute faculté d’anticiper ses conséquences et ses moyens. La Chancellerie annonce en revanche une réforme globale de la procédure pénale, qui entraînera des modifications profondes de l’organisation et du fonctionnement de l’institution judiciaire. Convaincu que c’est grâce à la cohérence de la chaîne pénale qu’on relèvera le défi de la sécurité, je suis gêné que les deux ministères n’aient pas la même position.

Sur la forme, je comprends que vous déposiez des amendements pour prendre en compte une jurisprudence que la Cour de cassation n’avait pas encore rendue quand votre prédécesseur a déposé le projet de loi. Mais il est difficile pour les parlementaires de travailler sur un texte en partie caduc, et nous vous serions obligés de transmettre les amendements gouvernementaux avant mercredi. La réunion de notre Commission serait plus fructueuse et le principe d’égalité entre parlementaires de l’opposition et de la majorité serait mieux respecté.

Sur le fond, accepteriez-vous qu’un officier de police judiciaire exerce la police de l’audition pendant une garde à vue, ce qui s’avérerait nécessaire si un avocat ne respectait pas ses obligations ou perturbait les auditions ?

Je m’interroge également sur l’allégement de la procédure. J’ai rencontré la semaine dernière des représentants du barreau de Quimper, où sont inscrits 116 avocats, dont une vingtaine de pénalistes. Les contraintes qui pèsent sur ces avocats sollicités pour 350 gardes à vue par an, sur un total d’un millier, iront sans doute en s’aggravant. Pour alléger la procédure, êtes-vous favorable à l’enregistrement systématique des auditions de garde à vue, qui serait consacré comme pièce de procédure ? Une telle décision mettrait fin au système actuel, dans lequel l’enregistrement ne sert à rien, puisque seul compte le procès-verbal qui retranscrit intégralement l’audition. En outre, elle permettrait à l’OPJ de pallier l’absence éventuelle de l’avocat.

Êtes-vous favorable, comme les représentants des OPJ, à la rédaction d’un procès-verbal unique synthétisant les éléments clés de l’audition ? Le procédé réduirait le temps très long qu’exige la transcription intégrale des auditions, qui interdit aujourd’hui à l’enquêteur de se consacrer pleinement au fond de l’entretien.

Êtes-vous favorable à la dématérialisation du registre de garde à vue, qui permettrait au procureur d’effectuer le contrôle à distance ?

Êtes-vous favorable à la suppression, dans le cahier de garde à vue, de l’émargement, qui ne consacre actuellement aucun droit particulier, d’autant que l’intéressé signe tous les PV ?

Enfin, êtes-vous favorable au principe de la compétence nationale des OPJ ? La limitation territoriale, qui ne se comprend plus aujourd’hui, où l’on n’a plus affaire à une délinquance strictement locale, est trop souvent une cause de nullité. Pourquoi ne pas profiter du projet de loi pour supprimer cette anomalie ?

Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.

M. Sébastien Huyghe. Cette réforme imposée par la jurisprudence doit concilier plusieurs objectifs : permettre que l’enquête soit effectuée sans entrave, laisser au mis en cause la possibilité d’exercer ses droits légitimes à la défense, enfin respecter et protéger la victime. Veillons en effet à ne pas inverser les rôles en mettant quasiment celle-ci en accusation, alors que l’auteur présumé des faits serait considéré comme une victime potentielle du système, qui devrait être protégée à tout prix.

Notre marge de manœuvre est étroite entre deux risques politiques majeurs. Le premier serait de réglementer la garde à vue de manière si contraignante qu’elle compromettrait l’efficacité de la police, ce qui enverrait un signal désastreux tant aux Français, qui demandent chaque jour plus de sécurité, qu’aux forces de l’ordre, qu’il ne faut pas décourager. Le second consisterait à mettre en place un nouveau système que condamnerait la Cour européenne des droits de l’Homme, le Conseil constitutionnel ou les hautes juridictions de notre pays. Le problème vient en partie du fait qu’on nous impose une procédure de garde à vue en vigueur dans les systèmes judiciaires accusatoires, alors même que nous conservons notre système inquisitoire.

Si je salue l’action du Gouvernement qui a pris les devants en travaillant à une réforme globale de la procédure pénale, je regrette, pour des raisons de cohérence, que la jurisprudence l’ait obligé à commencer par la garde à vue. Bien que son projet de loi équilibré suscite l’adhésion du groupe UMP, certaines dispositions appellent des questions, notamment en ce qui concerne l’audition libre, apparemment peu conforme à la jurisprudence, laquelle nous impose de légiférer presque dans l’urgence.

Nous nous interrogeons sur la notification des droits, la présence de l’avocat, le consentement éclairé à la renonciation à un certain nombre de droits, et enfin sur la sécurité.

Dès lors que, depuis 2000, la jurisprudence considère que toute contrainte doit nécessairement déboucher sur une garde à vue, on ne peut envisager d’audition libre que si la personne suit les policiers sans entrave et de son plein gré, ce qui pose évidemment la question de la sécurité de la personne et de la police. Par ailleurs, quel doit être le rôle de l’avocat pendant la garde à vue ? Doit-il se taire, comme le prévoit apparemment le texte, ou pourra-t-il poser des questions à la fin de l’interrogatoire ? Nous saluons le fait que le texte prévoit, avant l’interrogatoire, un entretien de trente minutes. Mais que se passera-t-il si l’avocat intervient pendant l’audition ou qu’il se livre à des manœuvres dilatoires ? Est-il possible qu’il soit dessaisi du dossier, voire sanctionné ? Le délai de carence doit exister, mais celui-ci ne doit pas dépasser deux heures, pour ne pas paralyser l’enquête.

Nous sommes favorables à ce que la victime, au moins lors des confrontations, soit elle aussi assistée d’un avocat, pour respecter l’équilibre des armes.

Nous nous réjouissons également de la fin de la fouille intégrale systématique, aussi humiliante pour celui qui la subit que désagréable pour celui qui y procède.

Reste la question des moyens. L’agencement des locaux de police et de gendarmerie devra être revu si la personne mise en cause doit s’entretenir avec son avocat pendant trente minutes avant d’être interrogée. L’évaluation de l’aide juridictionnelle devra aussi être revue à la hausse. Il faudra prévoir un budget pour installer la visioconférence dans les commissariats et les gendarmeries.

Par ailleurs, dans les zones rurales, l’organisation des barreaux devra être revue, car ceux qui ne comptent qu’une vingtaine d’avocats auront sans doute du mal à mettre en œuvre la réforme.

Enfin, je me réjouis des avancées concernant les régimes dérogatoires et du fait que les mandats d’arrêt et d’amener exigeront désormais l’intervention du juge des libertés et de la détention.

M. Philippe Goujon. Nombre de notions me semblent devoir être précisées dans cette réforme d’importance, qui répond à la nécessité de maîtriser le nombre de gardes à vue. Mais comment s’étonner de l’augmentation de ces dernières, dès lors que leur nombre est devenu un indicateur de performance ? J’ajoute qu’elles permettent souvent une élucidation de l’enquête et que le recours à la garde à vue correspond à l’interprétation jurisprudentielle, notamment par la Cour de cassation, de la loi Guigou. Le texte obéit aussi au souci de garantir les droits du gardé à vue, tout en dotant les enquêteurs d’outils procéduraux adaptés à l’élucidation des faits les plus graves, notamment ceux punis d’emprisonnement.

Tout a évolué du fait des décisions de la Cour européenne des droits de l’Homme, sans doute influencée par le droit anglo-saxon. Peut-être avons-nous eu tort de ne pas faire valoir les principes de notre droit au sein des instances internationales. Nous voilà contraints de plaquer sur la procédure inquisitoire qui s’applique en France des mécanismes de protection des libertés adaptés à une procédure accusatoire, ce qui soulève de grandes difficultés.

C’est une réforme globale qu’il aurait fallu faire, quitte à changer de système ! La décision du Conseil constitutionnel, qui nous impose de procéder à la réforme de la garde à vue avant le 1er juillet 2011, ne nous facilite pas la tâche.

Nous sommes tous des défenseurs des libertés individuelles, mais comment ne pas insister, dans le contexte actuel, sur la nécessité absolue de ne pas entraver le travail des policiers ? La garde à vue est un moment décisif de l’enquête. Il y a d’ailleurs une corrélation frappante entre l’augmentation du nombre de gardes à vue et celle du taux d’élucidation. Entre 2002 et 2009, le nombre de gardes à vue a augmenté de 45 % dans l’agglomération parisienne, et le taux d’élucidation des faits de violence aux personnes, de 51 %.

À mon sens, tant que l’on ne change pas de système, la nature de la garde à vue ne doit pas être modifiée. Elle doit rester une phase policière et non devenir une étape quasi juridictionnelle, ce qui a plusieurs conséquences. L’une d’elles concerne l’arrivée de l’avocat, l’autre, le droit de garder le silence.

En outre, l’accès de l’avocat aux pièces du dossier doit être limité. En effet, soit la garde à vue intervient aussitôt après les faits, auquel cas le dossier est vide, soit elle résulte de l’enquête, et les PV ne constituent pas un dossier proprement dit : ce sont des documents épars, qui ne pourront être qualifiés de dossier qu’une fois mis en forme et transmis à l’autorité judiciaire. D’ailleurs, compte tenu du temps restreint de la garde à vue, l’accès à l’ensemble des PV semble matériellement impossible, puisque, dans les affaires très lourdes, ils représentent des centaines de pages.

Enfin, sans remettre en cause sa déontologie, il faut éviter qu’un avocat ait connaissance, avant même le magistrat, d’informations qui pourraient mettre en cause d’autres personnes que son client.

Je pense comme M. Perben que le délai de carence doit être précisé. Un délai de deux heures, peut-être un peu court en zone rurale, paraît raisonnable, mais demandera une réorganisation des barreaux. Observons qu’à Paris, dans les deux tiers des cas, les avocats ne se déplacent pas pour une garde à vue.

Aux termes de la réforme, l’entretien avec l’avocat changera de nature. Actuellement, lors de la garde à vue, l’avocat joue seulement un rôle d’information du gardé à vue, alors qu’il interviendra désormais pour organiser la défense et préparer les interrogatoires. En contrepartie, il ne devra intervenir qu’en fin d’audition, peut-être seulement sur des points de droit et non sur le fond.

On peut imaginer aussi que le gardé à vue dispose d’une quinzaine de minutes pour préparer chaque audition et qu’au terme de chacune d’elles l’avocat puisse émettre des observations écrites. Afin d’éviter d’éventuelles manœuvres dilatoires, la police de l’audition doit être effectuée par l’OPJ, sous le contrôle du procureur.

L’audition, moment privilégié dans la conduite de l’enquête, n’est pas et ne doit pas devenir un débat contradictoire. Lors d’une confrontation, la victime doit elle aussi, pour des raisons d’équilibre, être assistée d’un avocat. Reste à savoir quel doit être le statut des témoins. L’enregistrement doit devenir systématique et être considéré comme une pièce de procédure. Quant à savoir s’il faut continuer à disposer de pièces écrites, attention à ne pas imposer aux enquêteurs une surcharge de travail qui les empêcherait de mener l’enquête ! Évitons que l’alourdissement de la procédure ne leur impose de consacrer deux tiers de leur temps à des tâches matérielles !

Je me réjouis que le problème de la fouille soit réglé, dans le respect de la dignité de chacun, mais, en contrepartie, il faut exonérer la police de toute responsabilité qui découlerait de cette situation.

Si, dans certains cas particuliers, l’OPJ peut demander au parquet de prolonger la garde à vue pendant douze heures, un renouvellement supplémentaire de douze heures me semble à prévoir, notamment en cas de menace d’attentat ou quand il faut recueillir des preuves.

Pour ce qui concerne les régimes dérogatoires, je partage l’avis de M. Perben. En ce qui concerne l’arrêt Moulin, l’amendement sur le mandat d’amener me semble intéressant, mais le placement et le renouvellement sont à la charge du parquet. Peut-être le contentieux de la garde à vue pourrait-il relever du JLD, ce qui supposerait cependant une réorganisation des magistrats du siège.

L’audition libre, qui ne doit pas être un substitut de la garde à vue, doit être plus simple qu’elle n’est aujourd’hui prévue par le projet de loi. Si on la rend complexe et contraignante, la garde à vue restera le recours principal des enquêteurs. Aujourd’hui, le système semble fonctionner. On compte 1,6 million de personnes mises en cause, soit deux fois plus que de personnes gardées à vue. Il n’est donc pas certain qu’il faille créer le dispositif de l’audition libre, dispositif que la Cour européenne des droits de l’Homme peut récuser, au motif qu’il se déroule sans la présence d’un avocat, et auquel les enquêteurs reprocheront peut-être d’être plus lourd sur le plan administratif qu’une simple convocation.

M. Claude Goasguen. Depuis le début de l’audition, je ressens une certaine amertume.

Sur le fond, beaucoup de nos collègues considèrent qu’il s’agit d’une réforme contrainte, alors que nous nous apprêtons à traiter une question fondamentale de notre droit, dont nous débattons depuis plus de vingt ans. La question de la garde à vue se posait déjà quand la Commission des lois débattait du nouveau code pénal. En outre, il s’agit d’une question de justice quotidienne. La garde à vue, élément non de l’enquête mais de la procédure, doit, comme tel, être considérée comme un acte majeur et non comme une formalité de police. D’ailleurs, elle n’est pas neutre en termes de libertés publiques. Ne considérons donc pas que notre débat est contraint par des juridictions – Conseil constitutionnel, Cour de cassation, Cour européenne des droits de l’Homme –, quelle que soit l’estime qu’on leur porte !

La décision que nous allons prendre résulte d’une évolution positive. Notre société est désormais prête à accepter, comme d’autres démocraties, la présence plus active de l’avocat dès la première heure de la garde à vue. Il y a vingt ans, les bâtonniers étaient très réservés à cet égard, et bien peu de barreaux s’y sentaient prêts. Aujourd’hui, les avocats la réclament eux-mêmes, ce que je considère comme un progrès. Quant à la police, certes plus réservée, elle sera grandie si l’on instaure des procédures de justice dans les commissariats. La présence des défenseurs supprimera les procès qu’on lui intente presque toujours à tort. Dans notre monde où la sécurité est un problème, elle retrouvera une image sécurisante, car une personne qui entre en garde à vue ne doit pas avoir peur. Je rappelle qu’un pays comme les États-Unis, qui gère le problème de la sécurité aussi bien que nous, admet la présence d’un avocat dès la première heure de la garde à vue.

M. Philippe Goujon. Ils ont un système accusatoire !

M. Claude Goasguen. Pas à ce niveau-là ! Ne mélangeons pas tout ! La procédure inquisitoire reste la ligne directrice des gardes des Sceaux depuis des décennies. Nous ne sommes donc pas en train de bouleverser le système français, même si celui-ci évolue.

Les Allemands aussi se soumettent aux arrêts de la Cour européenne.

Récusant l’opposition entre accusatoire et inquisitoire, considérons plutôt que nous allons vers une procédure contradictoire : ce n’est parce que nous acceptons certaines évolutions que nous renonçons aux principes fondamentaux de notre droit !

Sur la forme, je regrette que, pour un sujet majeur – on procède à 800 000 gardes à vue par an –, nous examinions un texte différent de celui qui sera débattu en séance publique. Je ne vous en rends pas responsable, monsieur le garde des Sceaux, et je vous donne acte que la passation de pouvoir n’a rien arrangé. Je connais par ailleurs les contraintes de l’ordre du jour. Cependant, je souhaite que nous disposions du temps du temps nécessaire pour sous-amender vos amendements.

J’ai toujours été partisan d’autoriser l’intervention des avocats lors de la garde à vue. Ceux-ci devront s’y préparer.

Vous avez rappelé à juste titre que la justice doit être rendue partout de la même manière, mais il faut intégrer certaines évolutions technologiques. Lors de la garde à vue de mineurs, nous recourons à des moyens modernes qui n’ont pas transformé la nature de leur audition. Pourquoi ne pas prendre en compte les difficultés du barreau du Cantal, très différentes de celles du barreau parisien ? Le délai de carence, qui est une bonne mesure, doit souffrir certaines adaptations.

Je comprends mal la réticence française à l’égard des nouvelles technologies, par exemple celle des magistrats à l’égard de la visioconférence.

Sur la question des régimes dérogatoires, nous serons certainement condamnés, car la Cour européenne est vigilante, mais, à mon sens, il faut marquer notre spécificité, notamment en matière de lutte contre le terrorisme et le grand banditisme. Pour autant, je pense qu’il faut éviter dans le texte l’expression « bande organisée » qui, en droit, ne signifie rien. Je préférerais que l’on y définisse la notion de « grand banditisme ».

M. Jean-Paul Garraud défend vertement le rôle du procureur, qu’il préfère au JLD. Il faudra examiner un jour le problème de la sacro-sainte unité du corps, mais je pense modestement que le moment n’est pas opportun.

M. Philippe Houillon. À mon tour, je reviendrai sur la méthode.

Les députés ne disposent que de quelques jours pour amender un texte différent de celui qui sera débattu en séance publique. De ce fait, ils seront dessaisis du débat au profit des sénateurs, qui seuls auront pu examiner le projet de loi définitif.

M. le garde des Sceaux. Je tiens à ce que la discussion ait lieu à l’Assemblée nationale dans toute sa plénitude. C’est pourquoi je déposerai les amendements du Gouvernement dès cet après-midi.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Quant à moi, je repousse à lundi, dix-sept heures, la date limite pour le dépôt des amendements pour les députés.

M. Philippe Houillon. Merci de cette réponse, qui nous satisfait tous.

Sur le fond, nous avons la chance d’aborder une matière clairement balisée. Les décisions de la Cour européenne des droits de l’Homme sont claires, comme celle du Conseil constitutionnel et les trois arrêts rendus par la Cour de cassation. Ces juridictions considèrent que toute garde à vue appelle un contrôle prompt et automatique par un juge. J’entends dire que, dès lors qu’un arrêt juge trop long un délai de quatre jours et six heures, on peut en déduire qu’un délai inférieur conviendrait. À mon sens, cette déduction résulte d’une interprétation trop rapide de la jurisprudence. N’oublions pas que la CEDH emploie le terme « aussitôt ».

Par ailleurs, le contrôle de la garde à vue doit être effectué par un magistrat qui n’appartient pas au parquet. Les décisions ont été réitérées dans des termes clairs. Si l’on n’en tient pas compte, nous nous ferons sérieusement taper sur les doigts par la Cour européenne, ce qui a déjà commencé avec l’arrêt Moulin. C’est si vrai que, le 26 octobre, la Cour suprême du Royaume-Uni, saisie à peu près des mêmes questions sur le régime de la garde à vue en Écosse, a repris la jurisprudence de la CEDH en considérant qu’elle devait s’appliquer sans moratoire, quelque bouleversement qu’elle introduise dans la procédure.

Un autre principe concerne l’assistance effective de l’avocat et le fait qu’une personne soupçonnée ou mise en cause ne doit pas avoir à s’incriminer et puisse garder le silence.

Enfin, le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation se sont exprimés sur les régimes dérogatoires.

Le chemin étant clairement balisé, soit on applique la jurisprudence, soit on s’en tient à des demi-mesures qui nous exposeront à de nouvelles condamnations de la Cour européenne ou de la Cour de cassation. Veut-on, oui ou non, tenir compte de leur avis ? Certains répètent que la garde à vue est une phase non pas juridictionnelle mais policière. Là n’est pas le problème ; le fait est que la garde à vue constitue une privation de liberté, qui déclenche les garanties, et peu importe sa nature.

Pour le reste, il ne me semble pas possible, comme le prévoit le texte, de placer la garde à vue sous le contrôle du procureur. Celui du JLD poserait un autre problème : il n’existe pas partout de JLD, alors que les gardes à vue auront lieu dans tous les ressorts des tribunaux de grande instance. Il faut donc trouver une solution plus précise.

Quant à l’audition libre, le texte parle d’une « personne soupçonnée », ce qui exclut que l’on ne prévoit aucune garantie. Soit la personne entendue en audition libre dira ce que les policiers ont envie d’entendre, et l’audition prendra fin, soit l’on recourra à la passerelle vers la garde à vue prévue par le projet de loi. Il restera cependant un vide juridique. Certes, en prévoyant la garde à vue pour toutes les infractions donnant lieu à un emprisonnement, on balaie pratiquement tous les cas. Mais, en théorie, il faut bien qu’une personne mise en cause soit entendue à un moment ou un autre de l’enquête. Comment faire si la garde à vue n’est pas possible, et que la personne refuse d’être entendue en audition libre ? La meilleure solution serait sans doute d’instaurer une audition assistée, ce qui impliquerait de déplacer le curseur déclenchant la garde à vue. Pour aider à la réflexion, je rappelle que la détention provisoire – que l’on ne peut confondre avec la garde à vue – n’est possible que lorsqu’une peine de trois ans est encourue.

Je pense également qu’il faut réécrire les articles 5 à 7 du projet de loi, puisque la jurisprudence mentionne l’assistance effective de l’avocat, ce qui suppose défense et organisation de la défense, présence immédiate, présence aux interrogatoires et, le cas échéant, faculté d’effectuer des demandes d’actes, de façon que la procédure soit contradictoire. Ces mesures sont celles que nous avions préconisées dans le cadre de la Commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau, qui les avait votées à l’unanimité. Il ne s’agit pas de repousser la menace de l’accusatoire, qui n’est plus à l’ordre de jour. D’ailleurs, les expériences menées ailleurs – par exemple en Italie – n’ont pas été concluantes dès lors qu’elles n’allaient pas dans le sens de la culture du pays. En revanche, il faut aller vers le contradictoire. Cette modification de nos habitudes n’a rien d’un bouleversement révolutionnaire : il s’agit simplement d’adapter la manière pour le moins archaïque dont le pays des droits de l’Homme traite la privation de liberté.

Enfin, pour ce qui concerne les régimes dérogatoires, les arrêts de la Cour de cassation laissent la porte ouverte à la mise en place d’un système compatible avec la jurisprudence européenne et celle de la Cour de cassation. Il suffit que la décision soit liée, non à la nature de l’infraction, mais aux circonstances de l’affaire, ce qui ouvre le champ à la rédaction de textes qui permettent de protéger et les droits applicables et les circonstances, dans des affaires particulières.

(La séance, suspendue à 11 heures 50, est reprise à 11 heures 55.)

Mme George Pau-Langevin. Monsieur le garde des Sceaux, il ressort de nos débats que le projet de loi a besoin d’être renforcé. L’audition libre doit impérativement respecter les critères définis par les instances européennes, ce qui suppose d’introduire des garanties pour la défense. Par ailleurs, si le texte contient des avancées intéressantes, il exige des moyens qui ne sont pas prévus dans le budget de votre ministère. Le montant alloué à l’aide juridictionnelle n’est pas adapté aux nouvelles conditions de la garde à vue, car il faudra non seulement réorganiser les barreaux, mais aussi indemniser les avocats des petits barreaux, qui devront faire parfois une heure de trajet pour assister une personne en garde à vue, charge manifestement plus lourde que celle consistant à enchaîner plusieurs interventions au cours d’une même permanence en ville. Le tarif de l’aide juridictionnelle devra être modulé pour tenir compte de la variété des situations.

Je regrette également de ne trouver dans le texte aucune garantie significative pour la garde à vue des mineurs. Dans ma circonscription, deux jeunes filles de treize ans qui s’étaient battues en sortant du collège ont été mises en garde à vue de manière aberrante. Les conditions prévues dans le texte pourraient s’appliquer à leur cas. Or il va de soi que les mineurs doivent bénéficier de garanties supplémentaires.

Même si je suis convaincue de la nécessité de lutter contre le terrorisme, je vois mal en quoi la gravité de l’infraction devrait limiter les droits de la défense. Le dispositif dérogatoire doit donc être complété.

Enfin, je me réjouis que la pratique des fouilles à corps, particulièrement humiliante, soit encadrée, mais qui contrôlera et sanctionnera les abus en ce domaine ? Le texte prévoit qu’on ne recourra à cette pratique que pour répondre aux nécessités de l’enquête. Quelle conséquence le fait qu’une fouille soit décidée de manière abusive aura-t-elle sur la procédure ?

M. Serge Blisko. Je serai bref, car mes collègues ont posé beaucoup de questions judicieuses. J’aimerais cependant savoir si le texte modifie les conditions d’intervention du médecin au cours de la garde à vue, car c’est une épreuve que tous ne supportent pas.

En ce qui concerne les fouilles, mieux vaudrait préciser ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. Quand M. Raimbourg et moi-même avions visité le dépôt et la souricière du Palais de justice de Paris, qui, depuis lors, ont été améliorés, nous avions constaté que les personnes, qui, à l’issue de la garde à vue, attendaient d’être déférées devant un juge d’instruction ou en procédure accélérée, étaient fouillées à corps deux fois de suite, d’abord par un gendarme, puis par un policier – ou l’inverse – de manière attentatoire à leur dignité, pratiquement dans le même lieu et à quelques minutes d’intervalle. Il faut donc que le texte soit le plus précis possible. Par ailleurs, je continue de plaider pour l’utilisation de systèmes électroniques ou de résonance magnétique, qui évitent de recourir à des fouilles pénibles.

Certains collègues ont évoqué la difficulté de respecter le délai de carence dans les petits barreaux, où les avocats auront du mal à rejoindre le lieu de la garde à vue. Profitons de l’occasion pour mettre en place la visioconférence. À défaut, une simple chute de neige comme celle qui s’est produite hier suffira à nous faire condamner pour des raisons purement techniques. D’ailleurs, pourquoi faire peser sur les barreaux une charge qu’ils ne seront pas capables d’assumer, et qui ouvrira la porte à d’infinis contentieux ? La visioconférence est une opportunité tant pour l’avocat que pour le magistrat qui sera chargé de contrôler la mise en détention. Je vous demande donc de prévoir des crédits pour la mettre en place.

De même, les systèmes de vidéo-enregistrement, prévus dès 2000 dans les commissariats, doivent être efficaces. Si nous conservons le système de l’audition libre, la justice devra impérativement disposer d’enregistrements vidéos de qualité pour répondre à toute contestation. Trop souvent, les systèmes fonctionnent mal et l’on n’y recourt pas de manière systématique. Le dispositif est certes complexe, surtout pour moi qui suis sans doute le seul dans cette Commission à n’être ni magistrat, ni avocat, ni professeur de droit, mais il sera inattaquable si les moyens humains, financiers et techniques sont à la hauteur de ce que nous souhaitons.

M. le garde des Sceaux. Je remercie tous les membres de la Commission, qui ont été très actifs, sans doute en raison de l’importance du texte.

Monsieur Goasguen, je n’ai pas l’impression d’être sous la contrainte, puisque la réforme a été pensée depuis longtemps. Je vous concède qu’elle est encadrée par les décisions de juridictions qui s’imposent à nous, mais je la mets en œuvre avec enthousiasme. D’ailleurs, on agit mal quand on se persuade qu’on ne peut pas faire autrement. En l’espèce, il faut avoir une vision claire de notre droit, qui n’a rien d’intangible. Le doyen Carbonnier parlait jadis du « droit flexible », pour souligner qu’on doit l’adapter en permanence puisqu’il reflète les relations internes à la société.

Comme M. Goasguen et M. Houillon, je pense qu’il faut aller vers le contradictoire, ce qui ne signifie pas que l’on doive priver la société des moyens de se défendre – c’est un point sur lequel nous nous rejoignons tous.

Comme vous, monsieur Urvoas, je suis attaché à la cohérence de la chaîne pénale, car je ne vois aucun sens à opposer policiers et magistrats. Chacun joue un rôle différent, qui est défini dans notre bloc de constitutionnalité par la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, fondement du droit public républicain.

Je conviens, monsieur le rapporteur, que l’équilibre est difficile à trouver. Nous allons le chercher ensemble.

Comme M. Perben, M. Garraud et M. Huyghe, vous m’avez interrogé sur l’audition libre. Il ne s’agit pas de la réformer, mais de la traiter comme une donnée de fait, puisqu’on compte presque autant d’auditions libres que de gardes à vue, dont le nombre ne peut pas passer tout d’un coup de 800 000 à 1,6 million. D’ailleurs, le nombre d’avocats dont nous disposons ne permet pas de le faire. Mais nous en reparlerons dans les jours prochains.

Le problème des régimes dérogatoires est essentiel. Il n’est pas question de l’abandonner, puisque son efficacité est avérée, notamment pour lutter contre le terrorisme, le trafic de stupéfiants et la criminalité organisée. Dans ce domaine, nous sommes arrivés à un bon niveau de réponse, qu’il ne s’agit pas de diminuer. Il faut cependant aménager ces régimes, dans le respect de la position de la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Vous avez également évoqué le problème des moyens humains et financiers, qui se pose en effet. Je m’en tiendrai à une réponse formelle, en vous rappelant que c’est le Parlement qui vote le budget et décide des moyens…

M. le rapporteur. Voilà une réponse très formelle !

M. le garde des Sceaux. La commission des Lois ne m’en voudra pas de m’en tenir au droit ! Cela dit, je suis preneur de moyens, puisqu’une réforme ne vaut que par ceux qu’on lui consacre.

Reste à savoir qui, du parquet ou du JLD, doit contrôler la garde à vue. Si je suis d’accord sur l’évolution vers le contradictoire, je m’oppose à l’idée qu’on écarte le procureur qui, dans le système français, est un magistrat. Demain, 10 décembre, la chambre criminelle se prononcera sur son rôle. Attendons ses explications. Cela dit, le texte et les amendements que j’ai annoncés respectent pleinement la jurisprudence de la Cour de Strasbourg.

Le délai de quatre jours auquel il a été fait allusion ne se déduit pas d’une interprétation. Il est explicitement cité dans deux arrêts de la CEDH, l’un du 3 octobre 2006, l’autre du 3 février 2009. Ce dernier, Ipek et autres contre Turquie, précise expressément qu’un délai de quatre jours a été considéré comme conforme à l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Pendant ce laps de temps, il vous est proposé de faire intervenir successivement le procureur, qui prononce la première prolongation, et le juge des libertés, qui statue sur la seconde à la demande du procureur et rend une décision motivée. Cela dit, il faut conserver son efficacité à l’opération. M. Raimbourg a évoqué les permanences de nuit et la difficulté de trouver des magistrats. Le système qui vous est soumis en tient compte.

M. Perben a souligné à juste titre la nécessité d’un dispositif praticable, compte tenu du nombre de gardes à vue. La pire des choses serait d’opposer la liberté à l’efficacité : il serait dramatique que le respect des libertés publiques, des droits de la victime et de ceux du gardé à vue nuisent à la conduite de l’enquête.

Les modalités techniques de l’intervention de l’avocat doivent être réglées dans le détail, car, sur les grands principes, nous nous accordons tous. Le délai de carence réduisant d’autant la durée de la garde à vue, il est important que les barreaux, qui réclament la présence de l’avocat dès la première heure, s’organisent. Il appartiendra aux bâtonniers de mettre en place des permanences, avec un numéro dédié, de manière qu’un gardé à vue qui n’a pas d’avocat habituel puisse néanmoins se faire assister. Nous fixerons ensemble le délai de carence, mais celui-ci ne doit pas intervenir chaque fois que l’audition est reprise, ce qui prolongerait inutilement la procédure.

Quant à la nature de l’intervention de l’avocat, soyons honnêtes : le rôle d’un avocat est de parler, chacun en est conscient. La direction de l’interrogatoire revient cependant à l’OPJ chargé de mener l’enquête. L’avocat ne doit pas intervenir dans ses questions. À la fin de l’interrogatoire, il pourra éventuellement faire des remarques ou, si nécessaire, poser des questions à son client.

Sur le terrorisme et la criminalité organisée, je pense que nous sommes d’accord.

M. Garraud considère qu’il aurait été préférable d’engager une réforme globale de la procédure pénale et M. Urvoas m’a demandé non sans ironie si elle était toujours d’actualité. Ma réponse est positive. Oui, la Chancellerie continue d’y travailler avec des parlementaires, dont certains siègent dans votre Commission. Mais il n’échappe à personne qu’une législature ne dure que cinq ans, et que nous n’avons plus que dix-huit mois devant nous, ce qui nous laisse en fait peu de temps, une fois décomptées les périodes des élections cantonales, des congés obligatoires et celle réservée au budget. Nous commençons donc par la réforme de la garde à vue, parce que nous y sommes contraints par la jurisprudence, avant de poursuivre plus globalement la réforme de la procédure pénale.

M. Raimbourg n’a pas tort de souligner que la réforme de la garde à vue est difficile et compliquée, mais elle est aussi passionnante, comme le montre notre échange de ce matin. Si nous la réussissons, nous prouverons que, dans une démocratie, la protection de la liberté est source d’efficacité. C’est un point fondamental, qui nécessite des accords très larges. Vous avez prouvé qu’ils existent.

Vous m’avez interrogé sur le statut du procureur. Pour être un élu provincial, je ne suis pas pour autant naïf, et je sais que le sujet revient chaque fois que les cours font leur rentrée. En réalité, le statut du procureur n’est pas tout à fait celui qui est proclamé. Tout à l’heure, je présiderai l’avant-dernière réunion du Conseil supérieur de la magistrature, dont je suivrai les avis. La question n’a pas de conséquences immédiates sur le texte, de même que la réforme du statut du procureur n’aurait guère d’influence sur la jurisprudence de la Cour européenne. Ce qui lui pose problème est moins le statut du procureur – elle le dit clairement dans l’arrêt Moulin – que le fait qu’il soit partie poursuivante. Les deux choses sont très différentes.

M. Dominique Perben. Elles sont liées !

M. le garde des Sceaux. Dans l’arrêt, les deux questions ne sont pas si liées. Certes, tout est dans tout et réciproquement, et les juristes que nous sommes savent que tout texte peut être interprété. Mais, à bien lire l’arrêt, on constate qu’il n’y a pas de lien entre les deux points. N’oublions pas, d’ailleurs, que, dans le système français, le rôle du procureur va de pair avec la règle du contradictoire.

Monsieur Urvoas, je considère que la police de l’interrogatoire incombe à l’OPJ, qui ne peut être désarmé : il doit avoir la pleine maîtrise des questions qu’il pose pour mener l’enquête dont il est responsable.

Le débat me permettra de revenir sur certaines questions techniques. Je suis favorable à l’utilisation des technologies modernes. Notre procédure reste écrite, mais on peut écrire avec un crayon ou en tapant sur un clavier. L’utilisation de la visioconférence pose toutefois un problème d’identification. Il faut que le Conseil national de l’ordre des avocats ou le barreau prenne des mesures afin qu’on sache précisément qui écoute et qui regarde l’interrogatoire.

M. Huyghe a fait remarquer que la marge de manœuvre était étroite. C’est juste, mais je suis sûr qu’il va nous aider à l’élargir et à trouver un bon équilibre.

M. Goujon a eu raison de rappeler qu’il ne faut pas décourager les policiers et les gendarmes. À cet égard, je pense comme M. Goasguen que la réforme doit au contraire nous permettre de mettre leur rôle en relief et de les rendre plus fiers de leur mission. Je considère que nous avons la meilleure police et la meilleure gendarmerie d’Europe. Dès lors, puisque les autres pays réussissent en appliquant les règles auxquelles nous allons nous conformer, nous réussirons aussi. Certes, il faudra changer certaines habitudes, mais j’ai toute confiance en la police et la gendarmerie. Je vois les hommes sur le terrain. Je sais comment ils sont formés. Ils rempliront pleinement leur rôle, ce qui nous tient particulièrement à cœur.

J’espère avoir dissipé l’amertume de M. Goasguen, sentiment dont il n’est pas coutumier. Je pense comme lui que la garde à vue est un élément de procédure essentiel.

M. Houillon a insisté sur le fait qu’il voulait connaître le texte définitif, ce qui sera possible dès ce soir. Nous avons dû tenir compte de la situation, car il faut toujours s’adapter.

Si nous réussissons à bâtir la réforme, nous rendrons le système français compatible avec le système européen. Pour la première fois, j’ai assisté récemment au Conseil de l’Union européenne « Justice et affaires intérieures ». C’est une réunion impressionnante, qui se tient dans une salle immense. La discussion était passionnante, car le Traité de Lisbonne donne aux questions de justice un relief nouveau. L’Europe est en train de construire une procédure pénale qui lui est propre. Cela se fera très vite. Plus encore que les décisions de la Cour de Strasbourg, ce sont celles de l’Union qui compteront désormais. Nous devons être attentifs à ces évolutions. Notre réforme doit conserver un caractère français, car la justice, qui est toujours l’expression d’une culture, ne peut être plaquée de l’extérieur. Non seulement la nôtre doit devenir compatible avec le système européen, mais notre réforme doit aussi l’aider à se construire, car, pour nous et pour notre avenir, il importe qu’il soit fort, solide, efficace et respectueux des droits de la victime comme des libertés publiques fondamentales. Nous avons donc un vrai rôle à jouer en Europe.

Madame Pau-Langevin, je vous remercie d’avoir noté que ce texte comportait des avancées intéressantes. Vous avez soulevé le problème des moyens et posé la question de la garde à vue des mineurs, qui ne bénéficient pas de garanties spécifiques.

M. Blisko m’a interrogé sur la présence du médecin pendant la garde à vue, qui ne me semble pas poser problème. Pour les fouilles, je préciserai ce qui est possible et ce qui ne l’est pas.

Enfin, je n’ai rien contre les technologies électroniques, mais il faut trouver les moyens de les mettre en place et de s’y former.

J’espère avoir répondu à tous.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Monsieur le garde des Sceaux, je vous remercie.

EXAMEN DES ARTICLES

La Commission examine le projet de loi relatif à la garde à vue au cours de sa séance du mercredi 15 décembre 2010.

Après l’exposé du rapporteur, la Commission procède à l’examen des articles.

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l’encadrement de la garde
à vue

Article 1er

(art. 62-2 à 62-6 [nouveaux] du code de procédure pénale)


Suppression de l’audition libre – Limitation du champ et des motifs de placement en garde à vue – Contrôle de la garde à vue et de son éventuelle prolongation

Dans la rédaction initiale du projet de loi, le présent article insérait à la suite de l’article 62-1 du code de procédure pénale, dont la rédaction demeure inchangée, cinq nouveaux articles 62-2 à 62-6 posant le principe de l’audition libre, définissant la garde à vue, précisant l’articulation éventuelle entre les deux mesures, précisant l’autorité chargée de contrôler la garde à vue et énumérant une liste de motifs justifiant le placement en garde à vue.

L’article 62-2 soulignait le caractère subsidiaire de la garde à vue par rapport à l’audition libre tandis que l’article 62-3 limitait doublement le champ du recours à la garde à vue, en précisant que cette mesure n’est possible :

—  qu’à l’encontre de personnes soupçonnées d’avoir commis ou tenté de commette un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement (nouvel article 62-3 du code de procédure pénale)

—  et si la mesure constitue l’unique moyen de parvenir à la réalisation d’un des objectifs fixés au nouvel article 62-6 (exécution des investigations, garantie de présentation de la personne, prévention de destruction de preuves ou de contacts avec d’éventuels complices, notamment, cf. infra).

Rappelons qu’en l’état actuel du droit, en vertu de l’actuel article 63 du code de procédure pénale, le placement en garde à vue doit être justifié « pour les nécessités de l’enquête » s’agissant de personnes à l’encontre desquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction. Ce placement est juridiquement possible pour tout crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement en enquête de flagrance (article 67 du code de procédure pénale) et pour toute infraction dans le cadre de l’enquête préliminaire (article 77 du même code).

Le comité présidé par M. Philippe Léger avait préconisé en septembre 2009 de restreindre les cas de placement en garde à vue et considéré qu’il devait « être expressément rappelé dans la loi que la garde à vue est une mesure coercitive et qu’une personne ne doit être placée en garde à vue que si la contrainte est absolument nécessaire. Dans les autres cas, la personne, même s’il existe des indices à son encontre, doit être entendue librement » (28).

La commission des Lois a sensiblement modifié la rédaction de cet article, supprimant le dispositif de l’audition libre, précisant la définition de la mesure de garde à vue et modifiant les conditions de son contrôle.

L’article 62-2 prévoyait qu’en principe désormais une personne à l’encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction « demeure libre lors de son audition par les enquêteurs ». Ce principe de l’audition libre du suspect découle du principe de présomption d’innocence, d’ailleurs rappelé expressément par cet article.

Ce n’est que dans le cas où les motifs de la garde à vue sont réunis que le placement en garde à vue peut être décidé, à savoir :

—  la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement (nouvel article 62-3) ;

—  et la mesure constitue l’unique moyen de parvenir à au moins un des six objectifs fixés par l’article 62-6.

Les modalités du placement en garde à vue sont fixées à l’article 63, réécrit par l’article 2 du présent projet de loi. Il est notamment expressément précisé que la durée de l’audition libre s’impute sur le délai de vingt-quatre heures de la garde à vue qui, le cas échéant, lui ferait suite.

L’audition libre doit être distinguée de la « retenue judiciaire pour les majeurs », qui figure dans le rapport du comité Léger et constitue une mesure coercitive d’une durée plus limitée que la garde à vue.

Le rapport du comité Léger préconisait d’interdire le placement en garde à vue d’une personne soupçonnée de faits pour lesquels une peine d’emprisonnement inférieure à un an est encourue, et, en contrepartie, d’instaurer une nouvelle mesure coercitive d’une durée plus limitée : la retenue judiciaire, échelon intermédiaire entre l’audition et la garde à vue. Dans cette perspective, toute personne soupçonnée d’une infraction pour laquelle la peine d’emprisonnement encourue est inférieure à cinq ans pourrait être placée, si la contrainte est nécessaire, sous ce régime de retenue judiciaire pour une durée maximale de six heures. Le procureur devrait être avisé de la mesure et pourrait à tout moment en décider la levée. La personne aurait le droit de s’entretenir avec un avocat dès la première heure et pourrait bénéficier d’un examen médical.

Si, au cours de la retenue, il apparaissait que des investigations plus importantes que la simple audition de la personne devaient être menées, la mesure aurait été transformée en garde à vue, le mis en cause bénéficiant alors de l’ensemble des droits afférents.

Tel n’est pas le schéma retenu par le Gouvernement pour le présent article :

—  l’audition libre, si elle vise à ce qu’un suspect soit entendu, n’est pas une mesure de contrainte : la personne « à l’encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction » est, si elle y consent expressément, entendue librement ; le suspect, préalablement informé par l’officier ou l’agent de police judiciaire d’une part de la nature et de la date présumée de l’infraction dont il est soupçonné et d’autre part du fait qu’il peut à tout moment mettre fin à cette audition, doit expressément consentir à son audition libre. Son consentement doit être mentionné dans le procès-verbal d’audition, de même que l’information préalable qu’il a reçue ;

—  l’audition libre, dans la rédaction proposée par le projet de loi, n’est pas bornée par des contraintes de temps : tout au plus peut-on estimer qu’elle ne peut durer plus de vingt-quatre heures, durée maximale d’une garde à vue sur laquelle la durée d’une éventuelle audition libre préalable s’imputerait ;

—  tout suspect, quelle que soit l’infraction qu’il est soupçonné d’avoir commise, peut en droit être entendu librement : le présent article ne prévoit en effet aucune peine maximale encourue permettent de recourir à l’audition libre ;

—  l’audition libre n’est en revanche pas possible (et la garde à vue obligatoire) lorsque le suspect fait l’objet d’un mandat de recherche ou lorsqu’il a été « conduit par la force publique dans les locaux des services de police judiciaire ».

Cette dernière formulation a été particulièrement critiquée par les représentants des syndicats de policiers qui ont jugé peu réaliste en pratique la distinction opérée entre l’interpellation d’une personne (qui n’exclut pas une audition libre, en application du III de l’article 62-4 dès lors que la personne appréhendée accepte expressément de suivre l’officier ou l’agent de police judiciaire) et sa conduite par la force publique dans les locaux des services. Mais ce n’est pas la seule critique qui a été adressée à ce dispositif.

Lors des auditions menées par votre rapporteur, il est apparu que l’instauration de l’audition libre suscitait de très vifs débats.

Pour ses défenseurs, l’intérêt majeur de l’instauration de l’audition libre réside dans la réduction qu’elle permet de la durée de présence du suspect dans les locaux de la police judiciaire. Aujourd’hui, toute personne qui a été interpellée est, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (29) entendue dans le cadre de la garde à vue, dont les garanties – obligation de notification préalable des droits, attente de l’arrivée de l’avocat et, s’il est demandé, examen médical – ont pour effet d’allonger la période de la retenue dans les locaux de police ou de gendarmerie. Du fait de la nécessité pour les officiers de police judiciaire de solliciter les instructions du parquet sur la suite à donner à la procédure, la garde à vue retarde, le cas échéant, le moment de la remise en liberté du suspect.

L’audition libre permettrait en outre à la personne consentante d’attendre d’être entendue à l’accueil du poste de police ou de gendarmerie plutôt que dans une cellule et d’éviter ainsi l’épisode - souvent décrit comme traumatisant - d’une éventuelle fouille à corps.

Nombreuses ont cependant les personnes entendues par votre rapporteur qui ont critiqué le dispositif de l’audition libre proposé par le présent article :

—  La principale critique a trait aux droits reconnus au suspect entendu librement. Nombreuses ont été les personnes qui ont plaidé pour qu’il ait les mêmes droits que le gardé à vue.

Il a tout d’abord été jugé nécessaire de prévoir une notification des droits de la personne librement entendue, afin d’éviter qu’il ne puisse être abusé de l’ignorance de la personne des droits auxquels elle renonce en évitant la garde à vue : devrait ainsi être expressément notifié le droit au silence. Il s’agit ainsi d’éclairer le consentement de la personne.

Le droit de la personne entendue librement à être assistée d’un avocat a été demandé : les représentants des avocats entendus par votre rapporteur ont plaidé en ce sens, estimant même la présence de l’avocat indispensable sauf à courir le risque du développement d’un contentieux des nullités de procédure au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme qui ne reconnaît aucune valeur probante aux aveux obtenus en l’absence d’un conseil. Maître Alain Mikowski, Président de la commission libertés et droits de l’Homme au Conseil national des barreaux, a ainsi estimé nécessaire de prévoir l’« audition assistée » des personnes soupçonnées d’avoir commis de petits délits, pour lesquelles la peine maximale encourue est de trois ans.

—  Certaines personnes entendues par votre rapporteur ont par ailleurs souhaité que soit instaurée une durée maximale d’audition libre. Pour M. Robert Gelli, Président de la Conférence nationale des procureurs de la République, la fixation d’une durée maximale aurait pour intérêt de donner un cadre clair à la personne qui consent à être entendue librement. Les représentants du Syndicat des commissaires de la police nationale ont en outre estimé que l’encadrement de la durée de l’audition libre serait de nature à protéger les investigations réalisées par les enquêteurs durant cette période dans le cas où serait à terme transposée à la garde à vue la jurisprudence traditionnelle en matière de « mise en examen tardive » : un placement jugé trop tardif en garde à vue pourrait conduire à l’annulation de tous les actes réalisés pendant la garde à vue et l’audition libre qui l’a précédée.

—  A aussi été évoquée la possibilité de limiter l’audition libre à des infractions de faible gravité, à l’image de ce que prévoyait le comité Léger. Votre rapporteur note d’ailleurs que l’instauration de l’audition libre a essentiellement pour vocation – Madame Michèle Alliot-Marie, alors garde des Sceaux l’avait souligné lors de la présentation du projet de loi – de réduire le formalisme du traitement de petits actes de délinquance peu complexes, tels que les vols à l’étalage ou les petits délits routiers, pour lesquels l’auteur reconnaît les faits et préfère s’expliquer rapidement auprès des forces de l’ordre.

La question de l’audition libre a été longuement abordée lors de la table ronde organisée sur les implications des récentes jurisprudences sur la réforme de la garde à vue (30). Le professeur Frédéric Sudre a estimé que l’audition libre prévue par le projet de loi n’était en l’état « pas compatible avec les différentes jurisprudences dans la mesure où ce dispositif permettrait d’échapper à l’application des garanties posées à l’article 6 de la Convention européenne » et rappelé que « pour la jurisprudence européenne, toute mise en accusation en matière pénale implique l’application des garanties du procès équitable » et que « la Cour a une conception toute matérielle de la notion d’accusation, très différente de celle de notre droit interne ». Dès lors, « toute personne soupçonnée d’une infraction, à partir du moment où ce soupçon peut avoir des répercussions importantes sur sa situation, doit être considérée comme accusée ».

Lors de cette même table ronde, le professeur Yves Gaudemet avait cependant apporté quelques nuances à ce jugement en rappelant que l’audition libre a été conçue comme une « alternative douce » à la garde à vue et que les contraintes juridiques devaient être combinées avec le « souci légitime de limiter le champ de la garde à vue, lequel est dicté par le principe de proportionnalité ». Ce principe peut être invoqué pour recourir à un dispositif moins contraignant que la garde à vue à l’encontre de personnes soupçonnées de faits mineurs.

Votre Commission a adopté deux amendements identiques, respectivement présentés par votre rapporteur et par M. Philippe Houillon, supprimant les articles 62-2 et 62-4 introduits par le présent article.

Votre rapporteur a estimé qu’en l’état, le dispositif proposé n’était pas compatible avec les exigences conventionnelles dans la mesure où il ne prévoit pas de notification des droits de la personne ni son assistance par un avocat. Il a toutefois estimé que l’article 40 de la Constitution ne permettait pas aux parlementaires de prévoir par amendement l’assistance du suspect par un avocat, le cas échéant commis d’office et ouvrant donc droit, sous certaines conditions, au bénéfice de l’aide juridictionnelle et qu’il était donc préférable, à ce stade, de supprimer le dispositif dans son ensemble.

Votre rapporteur note par ailleurs que le droit actuel n’interdit pas d’entendre un suspect en dehors de tout placement en garde à vue. La Cour de cassation elle-même l’a rappelé en 2003, jugeant qu’« aucune disposition légale n’impose à l’officier de police judiciaire de placer en garde à vue une personne entendue sur les faits qui lui sont imputés dès lors qu’elle a accepté d’être immédiatement auditionnée et qu’aucune contrainte n’a été exercée durant le temps strictement nécessaire à son audition où elle est demeurée à la disposition des enquêteurs » (31).

Lors de son audition par votre Commission le 9 décembre 2010, le ministre de la justice et des libertés a indiqué qu’environ la moitié des auditions de mis en cause sont réalisées sous le régime d’une audition librement consentie, sans placement en garde à vue.

Autre novation du projet de loi, la garde à vue est désormais expressément définie dans le code de procédure pénale, à l’article 62-3, que votre Commission a complété par la référence aux motifs la justifiant, motifs qu’il était illogique de voir figurer dans un autre article.

La garde à vue constitue une « mesure de contrainte prise au cours de l’enquête par laquelle une personne (…) est maintenue à la disposition des enquêteurs » dès lors que cette personne encourt une peine d’emprisonnement – ce qui n’était pas le cas aujourd’hui en matière d’enquête préliminaire – et que la mesure constitue l’unique moyen de parvenir à la réalisation d’au moins un des six objectifs dont la liste est précisée (cf. infra).

Les représentants de plusieurs syndicats de policiers entendus par votre rapporteur ont souligné qu’il était aujourd’hui extrêmement rare de placer en garde à vue un suspect lorsque celui-ci n’encourt aucune peine d’emprisonnement et estimé que l’instauration de ce « seuil » n’aurait que peu de conséquences pratiques. Maître Jean-Yves le Borgne, vice-Bâtonnier au Barreau de Paris, a même été jusqu’à le qualifier de « leurre », plaidant pour que lui soit substituée l’instauration d’un seuil de peine encourue fixé à trois ans d’emprisonnement, équivalent à celui exigé pour le placement en détention provisoire.

Deuxième versant de la limitation du champ du recours possible à la garde à vue, l’article 62-3 énonce une liste limitative d’objectifs dont la sauvegarde justifie le recours à une telle mesure : une mesure de garde à vue doit constituer l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des six objectifs fixés par l’article, à savoir :

—  permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation du suspect : il peut s’agir des confrontations avec la victime, notamment ;

—  garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République aux fins de mettre ce magistrat en mesure d’apprécier la suite à donner à l’enquête : il s’agit ici d’éviter tout risque de fuite ;

—  empêcher que le suspect ne modifie les preuves ou indices matériels : il s’agit ici d’éviter la disparition ou la destruction des éléments de preuve nécessaires à l’enquête ;

—  empêcher que le suspect ne fasse pression sur les témoins ou les victimes, ainsi que sur leur famille : il s’agit d’éviter que des témoignages décisifs pour la manifestation de la vérité ne soient faussés par des pressions que pourrait exercer le suspect ;

—  empêcher que le suspect ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices : il s’agit d’éviter que des complices ne s’accordent sur une version des faits contraire à la réalité, privant les enquêteurs des moyens d’exploiter les divergences de témoignages pour élucider une affaire ;

—  garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser l’infraction : il s’agit ici de lutter contre les actes de délinquance d’habitude, tels que les violences intrafamiliales.

Le présent article procède ainsi à une restriction des motivations, limitativement énumérées, du placement en garde à vue, le droit actuel, à l’inverse, le permettant « pour les nécessités de l’enquête », formulation bien plus large.

Lors de la table ronde sur les implications des jurisprudences récentes sur la réforme de la garde à vue, le professeur Frédéric Sudre a rappelé que la règle de la proportionnalité d’une mesure de contrainte découle directement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme aux yeux de laquelle, s’il peut exister d’autres moyens que la privation de liberté pour assurer l’ordre public, il convient d’y recourir.

La rédaction de l’article 62-3 s’inspire très largement de celle de l’article 144 du code de procédure pénale relatif aux motifs de placement en détention provisoire : dans sa rédaction issue de la loi pénitentiaire n°2009-1436 du 24 novembre 2009, cet article précise que « la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants (…) :

1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;

2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;

4° Protéger la personne mise en examen ;

5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;

6° Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;

7° Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire. Toutefois, le présent alinéa n’est pas applicable en matière correctionnelle. »

Dans sa rédaction initiale, le premier alinéa du nouvel article 62-5, applicable à l’enquête de flagrance et, par renvoi, à l’enquête préliminaire (cf. nouvelle rédaction de l’article 77 du code de procédure pénale issue de l’article 14 du projet de loi) précisait que le magistrat en charge du contrôle de la garde à vue est, comme le prévoit déjà le droit actuel, le procureur de la République, étant noté qu’en matière de commission rogatoire, la garde à vue est placée sous le contrôle du juge d’instruction, comme c’est le cas aujourd’hui (cf. nouvelle rédaction de l’article 154 du code de procédure pénale issue de l’article 14 du projet de loi).

La Commission a, à l’initiative de notre collègue Philippe Houillon et contre l’avis de votre rapporteur, adopté un amendement remplaçant le contrôle du procureur de la République par un contrôle exercé par le juge des libertés et de la détention ou, à défaut, du Président du tribunal de grande instance ou de son délégué.

La suite de l’article 62-5 précise quelles sont les prérogatives dont dispose ce magistrat.

Il est chargé par le deuxième alinéa d’apprécier si le maintien de la personne en garde à vue et, le cas échant, la prolongation de la mesure (32) respectent deux principes :

—  le principe de nécessité : le maintien de la garde à vue ou sa prolongation sont-ils nécessaires à l’enquête ?

—  le principe de proportionnalité : le maintien de la garde à vue ou sa prolongation sont-ils proportionnés à la gravité des faits dont la personne est soupçonnée ?

Le troisième alinéa précise que ce magistrat assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne placée en garde à vue, parmi lesquels figurent le droit de prévenir un proche et son employeur, le droit d’être examiné par un médecin, le droit à l’assistance d’un avocat qui peut, sauf exceptions, consulter le procès-verbal de notification du placement en garde à vue et assister aux auditions.

Le quatrième alinéa précise qu’il peut ordonner à tout moment que la personne gardée à vue soit présentée devant lui ou remise en liberté.

Le dernier alinéa de l’article 62-5 a quant à lui été supprimé par votre Commission, par coordination avec l’adoption de l’amendement confiant le contrôle de la garde à vue à un magistrat du siège : il précisait dans sa rédaction initiale les règles de compétence des procureurs de la République des différents ressorts, précisant que c’est le procureur de la République du lieu d’exécution de la garde à vue ou le procureur sous la direction duquel l’enquête est menée qui exerce les prérogatives visées à l’article.

Si votre rapporteur a pu dans un premier temps de sa réflexion exprimer quelques doutes sur la possibilité pour le projet de loi de prévoir une compétence du magistrat du parquet pour décider de la prolongation de la garde à vue ou de certaines atteintes aux droits de la défense (essentiellement le report de l’intervention de l’avocat), il n’est en revanche absolument pas favorable à ce que la garde à vue soit dans son entier placée sous le contrôle d’un magistrat du siège : aucune exigence conventionnelle n’existe en ce sens et une telle évolution constituerait une révolution juridique dont on mesure mal la portée. Il proposera une modification de cette disposition en vue de l’examen du projet de loi en séance publique.

M. Robert Gelli, président de la Conférence nationale des procureurs de la République a souligné lors de son audition par votre rapporteur que le procureur exerce un rôle de gardien des libertés individuelles, conformément à l’article 66 de la Constitution et au principe d’unicité du corps des magistrats. Le procureur exerce une mission de recherche de la vérité et non de simple accusateur au procès ; il contrôle les enquêtes réalisées par les forces de l’ordre au service de l’égalité des citoyens devant la loi pénale.

Nombreuses avaient cependant été les personnes entendues par votre rapporteur qui ont estimé que prévoir un contrôle entièrement réalisé par un magistrat du parquet méconnaît la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme qui, dans son arrêt du 29 mars 2010 Medvedyev contre France a estimé que le magistrat en charge du contrôle d’une mesure de privation de liberté « doit présenter les garanties requises d’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties, ce qui exclut notamment qu’il puisse agir par la suite contre le requérant dans le procédure pénale, à l’instar du ministère public ».

Tel n’est cependant pas le raisonnement suivi par le Conseil constitutionnel qui, dans sa décision du 30 juillet 2010 a confirmé sa jurisprudence désormais traditionnelle sur l’article 66 de la Constitution (33), en vertu duquel l’autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et du parquet.

Dans les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel relatifs à cette décision, on peut même lire : « l’argumentation selon laquelle le contrôle du parquet sur la garde à vue ne satisferait pas à la Convention européenne des droits de l’Homme résulte d’une lecture erronée de la jurisprudence de cette dernière. Si l’article 63 du code de procédure pénale implique que le procureur de la République soit averti du placement en garde à vue dans les plus brefs délais possible, ce qui signifie immédiatement, sauf circonstances particulières imposant le report de cette information, en revanche, l’article 5 § 3 de la Convention européenne n’a jamais signifié que la présentation devant une autorité judiciaire ait lieu immédiatement. » (34) Il est ajouté que « la Cour européenne n’a, à ce jour, jamais fixé à quel laps de temps correspond l’exigence de traduire « aussitôt » devant un juge une personne privée de liberté ».

En 1988 (35), la Cour européenne de Strasbourg, saisie d’une affaire de terrorisme dans laquelle la mesure de garde à vue avait duré quatre jours et six heures, a estimé que, même si la nature des infractions en cause pouvait justifier un délai plus long qu’en matière d’infraction de droit commun, « on élargirait de manière inacceptable le sens manifeste d’ « aussitôt » si l’on attachait aux caractéristiques de la cause un poids assez grand pour justifier une si longue détention sans comparution devant un juge ou « un autre magistrat » ».

Pour autant, la Cour n’a à ce jour fixé aucun délai maximal dans une procédure de droit commun. Tout au plus peut-on considérer qu’un délai de trois jours et vingt-trois heures violerait la Convention (36).

Les rédacteurs des Commentaires aux cahiers de conclure : « en tout état de cause, en droit français, le délai pendant lequel la privation de liberté d’une personne suspectée est placée sous le contrôle du parquet est plus court que le délai avant l’expiration duquel la Cour européenne exige l’intervention d’un juge » (37).

*

* *

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette l’amendement CL 50 de M. Michel Vaxès.

Puis elle est saisie des amendements identiques CL 175 du rapporteur et CL 102 rectifié de M. Philippe Houillon.

M. le rapporteur. Il s’agit, comme je viens de l’indiquer, de supprimer les dispositions relatives à l’audition libre.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, les amendements CL 20 de M. Noël Mamère, CL 118 de M. Jean-Pierre Decool et CL 104 de M. Philippe Houillon n’ont plus d’objet.

M. le président Jean-Luc Warsmann. On aurait d’ailleurs pu s’interroger sur la recevabilité de l’amendement CL 104.

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL 7 de M. Dominique Raimbourg, CL 176 du rapporteur et CL 107 de M. Philippe Houillon.

M. Dominique Raimbourg. Mon amendement tend à n’autoriser le placement en garde à vue que si l’infraction est punie d’une peine d’au moins trois ans d’emprisonnement – dans un souci de parallélisme des formes avec la détention provisoire – ou, pour les cas de délit flagrant, d’au moins six mois d’emprisonnement – ce qui correspond aux délits d’outrage et de rébellion.

Cela permettrait de réduire le nombre des gardes à vue pour les enquêtes préliminaires, tout en garantissant la possibilité pour les forces de l’ordre de placer en garde à vue ceux qui ont pratiqué l’outrage ou qui se sont rebellés au moment de leur interpellation.

M. Philippe Houillon. L’amendement CL 107 vise à remplacer la notion de « raisons plausibles » par celle de « raisons sérieuses », de façon à accroître l’objectivité du placement en garde à vue et à en maintenir le caractère exceptionnel.

Par ailleurs, si l’on veut diminuer le nombre de gardes à vue, il convient, par cohérence avec le dispositif de la détention provisoire, d’en limiter l’application aux infractions punies d’une peine d’emprisonnement d’au moins trois ans. Le projet n’exclut que les délits qui ne sont pas punis d’emprisonnement, alors qu’il n’y en a quasiment pas.

M. le rapporteur. Je préfère mon amendement CL 176, qui vise à intégrer dans la définition de la garde à vue les motifs pouvant la justifier.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, contrairement aux deux autres.

M. Jean-Paul Garraud. Je suis pour l’amendement du rapporteur et très hostile à ceux de Philippe Houillon et de Dominique Raimbourg : limiter les gardes à vue aux seuls cas où une peine de trois ans d’emprisonnement est encourue reviendrait à réduire considérablement leur nombre, au détriment de la manifestation de la vérité. Il ne faut pas confondre la garde à vue, phase policière, et la mise en examen, phase judiciaire : la première concerne non seulement les suspects, mais aussi les éventuels complices et, plus largement, des personnes dont la garde à vue est absolument essentielle pour parvenir à la manifestation de la vérité.

M. Claude Goasguen. Je crois au contraire que les deux amendements de nos collègues, qui me paraissent très intéressants et compatibles, ont l’avantage de rappeler que la garde à vue fait partie intégrante du procès, dans la mesure où elle constitue une atteinte à la liberté individuelle et aux libertés publiques. Comment peut-on distinguer deux phases, toutes deux attentatoires aux libertés, mais l’une processuelle et l’autre non ? Il convient d’en finir avec ce raisonnement, dont la doctrine française a abusé !

M. André Vallini. Ce débat me rappelle celui que nous avions eu il y a quelques semaines avec Jean-Paul Garraud, dont les compétences m’inspirent beaucoup d’estime en dépit de nos opinions divergentes, mais qui mène un combat d’arrière-garde. La judiciarisation de la garde à vue est inéluctable : c’est une phase du procès pénal.

M. Jean-Paul Garraud. Les principes sont importants, mais il faut savoir regarder les choses en face. Prenons l’exemple des affaires d’usage de stupéfiants : c’est grâce à l’interpellation des auteurs de ces petits délits et aux perquisitions qui sont faites chez eux que l’on peut remonter jusqu’aux gros trafiquants ! Parlant d’expérience, j’appelle votre attention sur ce point : en adoptant ces amendements, on coupera court aux enquêtes sur les trafics de stupéfiants et seuls des lampistes seront arrêtés.

M. Philippe Goujon. Nos concitoyens attendent davantage de sécurité : ayons le courage d’en tirer les conséquences. Le placement en garde à vue permet à la police de faire correctement son travail d’enquête ; il s’agit d’une phase policière, non juridictionnelle. Je suis donc pour ma part favorable à l’amendement du rapporteur.

M. Dominique Raimbourg. Monsieur Garraud, il est toujours possible de faire appel à la notion de circonstances aggravantes : l’usager de stupéfiants étant porteur de drogue, on peut lui reprocher un trafic. Au demeurant, une peine de trois ans d’emprisonnement est encourue pour un simple vol à l’étalage : peu d’infractions sont passibles de peines inférieures ; et en flagrant délit, très peu d’infractions sont passibles d’une peine inférieure à six mois d’emprisonnement.

M. Philippe Houillon. L’amendement du rapporteur évoque, parmi les objectifs du placement en garde à vue, le fait de « garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ». Il y a là un amalgame – entre le fait que le procureur de la République apprécie la suite à donner à l’enquête, ce qui est normal, et la « présentation » de la personne devant lui – qui est contraire à la jurisprudence européenne.

M. le rapporteur. Voici quelques exemples de crimes et délits qui, si l’on adoptait le critère des trois ans d’emprisonnement, échapperaient à la procédure de garde à vue : prise illégale d’intérêt, délit de fuite, non-révélation d’informations concernant la disparition d’un mineur, certains actes de pédophilie, atteintes sexuelles sans violence sur mineur par personne ayant autorité… Ils sont suffisamment graves pour que nous ne puissions pas adopter vos amendements.

Par ailleurs, l’expression « raisons plausibles » figure à l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

La Commission rejette l’amendement CL 7.

Elle adopte l’amendement CL 176.

En conséquence, l’amendement CL 107 tombe et les amendements CL 21 de M. Noël Mamère, CL 53 de M. Michel Vaxès, CL 8 de M. Dominique Raimbourg et CL 22 de M. Noël Mamère n’ont plus d’objet.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL 23 de M. Noël Mamère.

En conséquence de l’adoption des amendements identiques CL 175 et CL 102 rectifié, les amendements CL 24 de M. Noël Mamère, CL 6 de M. Dominique Raimbourg, CL 82 de M. Bernard Gérard, CL 51 de M. Michel Vaxès, CL 120 de M. Jean-Pierre Decool, CL 52 de M. Michel Vaxès, CL 105 et CL 106 de M. Philippe Houillon et CL 121 de M. Jean-Pierre Decool n’ont plus d’objet.

La Commission en vient à l’amendement CL 9 de M. Dominique Raimbourg.

M. Dominique Raimbourg. Cet amendement tend à préciser que la garde à vue s’exécute sous le contrôle du procureur de la République, qui doit s’assurer du respect de la dignité de la personne.

M. le rapporteur. Je suis bien entendu d’accord sur le fond, mais écrire cela dans la loi pourrait laisser penser que, si la garde à vue ne se déroulait pas dans les conditions souhaitées, le procureur serait tenu de prononcer la remise en liberté de la personne. Pour cette raison, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL 108 de M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon. Cet amendement tend à placer la garde à vue non pas sous le contrôle du procureur de la République, mais sous celui d’un magistrat du siège, le juge des libertés et de la détention : il n’appartient pas au parquet, qui est partie au procès, d’exercer le contrôle d’une mesure privative de liberté. C’est exactement ce que dit la Cour européenne des droits de l’Homme ; si nous n’optons pas pour cette solution maintenant, nous y viendrons plus tard car, chacun le sait bien, la France aura été à nouveau condamnée.

M. le rapporteur. Avis défavorable, bien sûr. La CEDH ne nous oblige nullement à faire appel à un juge du siège. Ne nous imposons pas de telles obligations, qui ne découlent pas davantage de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation !

M. Claude Goasguen. Je suis favorable à cet amendement, qui est dans la droite ligne de l’amendement précédent de Philippe Houillon. Ne croyez pas qu’en le rejetant, vous mettrez un terme au débat ! La Cour européenne, le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation finiront tôt ou tard par considérer comme une exigence qu’un juge du siège gère et contrôle les procédures attentatoires à la liberté individuelle et aux libertés publiques. Je sais bien qu’une majorité ne se dessine pas en ce sens, mais une censure du dispositif, avec les conséquences qu’elle aurait dans l’opinion, serait un camouflet supplémentaire pour le Gouvernement. Mieux vaut anticiper que, comme l’habitude en a été prise, agir à la suite de décisions juridictionnelles !

M. Jean-Paul Garraud. La Cour européenne des droits de l’Homme n’a jamais exigé l’intervention immédiate d’un juge pour toute mesure privative de liberté ; elle a simplement précisé que la présentation à un juge devait se faire dans un délai maximal de quatre jours pour les affaires de terrorisme et de grande criminalité et de trois jours pour les affaires de droit commun. Le dispositif proposé dans l’amendement – le contrôle du JLD dès le placement en garde à vue – n’a rien à voir avec sa jurisprudence !

Par ailleurs, un tel contrôle poserait des problèmes pratiques. Pour toute demande de prolongation de la garde à vue, il faudrait s’adresser à un juge étranger au dossier, à qui il faudrait expliquer l’affaire, et qui ne serait pas obligé de rendre sa décision immédiatement. S’il décidait de la mettre en délibéré, la garde à vue tomberait d’elle-même et la société se trouverait désarmée face à de graves délits. Je comprends les bons sentiments, mais il faut aussi regarder la réalité en face.

M. Noël Mamère. Il ne s’agit pas de bons sentiments, mais de la suite à donner à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme. Et ce n’est pas parce qu’une telle mesure n’a pas été exigée qu’il faut nous dispenser de la prendre. Le nombre des gardes à vue a doublé en quelques années, la France est régulièrement condamnée par la CEDH qui, dans toute sa jurisprudence, souligne que le procureur n’est pas un juge. Il est donc nécessaire de faire intervenir un juge du siège, c’est-à-dire un magistrat indépendant, afin de mieux garantir les libertés. C’est pourquoi l’amendement de Philippe Houillon va dans le bon sens.

M. Dominique Raimbourg. Il ne faut pas confondre la « gestion » de la garde à vue et son contrôle. La première revient au procureur : c’est à lui que téléphonent les officiers de police ; en revanche, le contrôle – c’est-à-dire les décisions contradictoires concernant le contentieux de la garde à vue – doit relever du juge des libertés et de la détention. Chacun doit rester à sa place.

M. Dominique Perben. Lorsque nous en viendrons au détail du processus, il sera temps de préciser les rôles respectifs du procureur et du juge ; mais à cet endroit du texte, il me paraît imprudent d’affirmer d’emblée un principe dont l’interprétation peut prêter à confusion.

M. André Vallini. Une partie de la majorité essaie de ruser avec la Cour européenne des droits de l’Homme et de contourner sa jurisprudence. Philippe Houillon et Claude Goasguen ont raison : si l’on s’en tient à un texte a minima, la France sera, tôt ou tard, à nouveau condamnée.

Par ailleurs, je ne comprends pas ce qui vous gêne dans le fait de transférer le contrôle de la garde à vue d’un magistrat du parquet à un magistrat du siège. Il n’est pas question de gêner le travail des policiers ! Que craignez-vous ?

M. Philippe Houillon. M. Perben conteste l’opportunité de fixer un principe à cet endroit du texte, mais je ne fais que proposer de remplacer celui qui figure à l’alinéa 9 du projet, selon lequel « la garde à vue s’exécute sous le contrôle du procureur de la République ». Comme l’a très bien dit M. Raimbourg, on confond deux choses différentes, et le contrôle lui-même doit évidemment être exercé par un juge du siège. Il vaut mieux ne rien écrire plutôt qu’affirmer un principe contraire aux exigences de la jurisprudence européenne.

Sur ce dernier point, monsieur Garraud, je vous renvoie à l’arrêt Moulin du 23 novembre 2010 de la CEDH, qui est extrêmement clair. Il rappelle que « La jurisprudence de la Cour établit qu’il faut protéger par un contrôle juridictionnel la personne arrêtée ou détenue parce que soupçonnée d’avoir commis une infraction » et précise que ce contrôle juridictionnel doit répondre à plusieurs exigences : la promptitude – et la Cour a jugé que le délai de quatre jours et six heures était trop long, mais elle n’a pas été saisie d’un délai de trois jours… –, le caractère automatique du contrôle et, s’agissant des caractéristiques et pouvoirs du magistrat, la nécessité que le magistrat n’exerce pas ensuite des poursuites à l’encontre de la personne concernée.

Si nous persistons à ignorer ses arrêts, la Cour de Strasbourg réagira. Nous ne pouvons pas à la fois nous gargariser d’être le pays des droits de l’Homme et ne pas suivre la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme.

M. le président Jean-Luc Warsmann. La jurisprudence de la Cour européenne demande qu’une personne interpellée soit présentée avec promptitude et automaticité à un magistrat – au sens où l’entend la Cour, c’est-à-dire un magistrat du siège. Dans les arrêts les plus durs qu’elle a rendus, la Cour a estimé que trois jours et vingt heures constituaient à cet égard un délai trop long. Le texte proposé par le Gouvernement prévoit que la présentation devant un magistrat intervient au maximum au bout de quarante-huit heures : c’est incontestablement beaucoup plus rapide. On ne peut donc pas affirmer que le texte du projet de loi est contraire à la jurisprudence actuelle de la Cour – même s’il est vrai que celle-ci peut évoluer à tout moment.

M. Philippe Houillon. Il est en effet vraisemblable qu’un délai de quarante-huit heures sera compatible avec la jurisprudence de la Cour, mais l’objet principal de notre discussion concerne le principe, inscrit dans le projet de loi, d’un contrôle de la garde à vue par le parquet.

M. Jean-Paul Garraud. La semaine dernière, à l’occasion des questions au Gouvernement, j’ai interrogé le garde des Sceaux sur les conclusions à tirer de l’arrêt Moulin. Celui-ci, il faut le souligner, ne concernait pas une garde à vue mais une opération de transfèrement effectuée sur mandat d’amener.

S’agissant du contrôle de la garde à vue, je voudrais tout d’abord rappeler qu’un magistrat du parquet est bien un magistrat, non un obscur agent du pouvoir. Il présente le grand avantage de savoir de quoi il parle, puisque c’est lui qui dirige l’enquête de police. Il me paraît important que celui qui dirige cette enquête – et qui respecte les règles déontologiques de tous les magistrats – puisse assurer le contrôle de la garde à vue. Si certains ici estiment que les magistrats du parquet ne sont pas des magistrats, cela pose bien entendu un autre problème.

Quant au juge des libertés et de la détention, que la grande réforme de la procédure pénale devrait faire disparaître, il est totalement ignorant du dossier. Comment pourrait-il prendre des décisions au sujet de la garde à vue ? Le seul résultat sera l’absence de contrôle réel et la remise du dispositif entre les seules mains des policiers.

M. Charles de La Verpillière. Pour ma part, je ne voterai pas l’amendement de Philippe Houillon car il tire de l’arrêt Moulin des conclusions allant au-delà de ce qu’a jugé la CEDH. Cela étant, l’alinéa 9 de l’article 1er, selon lequel « la garde à vue s’exécute sous le contrôle du procureur de la République », est peut-être inutilement provocateur. On pourrait le supprimer.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Aucun amendement de suppression n’a été déposé. Le cas échéant, vous pourrez le faire pour la réunion de la Commission en application de l’article 88.

M. Claude Goasguen. On fait un mauvais procès à Philippe Houillon. Alors qu’il a bien souligné le caractère ponctuel de l’arrêt Moulin, vous en tirez, vous, des conclusions définitives au sujet du délai de présentation devant un juge.

Par ailleurs, personne n’a dit que le procureur n’était pas un magistrat : prétendre le contraire est une argutie. Le seul argument qui me paraît crédible concerne la gestion de la garde à vue. Mais celle-ci serait justement laissée au procureur ! La gestion, ce n’est pas le contrôle. Qu’est-ce qui vous inquiète tant dans l’idée qu’un juge, qui aura besoin d’une heure ou deux pour se mettre au courant, exerce son contrôle ?

M. Noël Mamère. Notre collègue Garraud mène un combat d’arrière-garde. Les normes juridiques européennes s’imposent aux normes françaises. Or la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme est incontestable : le procureur n’est pas considéré comme un magistrat au sens où l’est un juge du siège. En outre, il ne peut pas être le contrôleur de sa propre gestion. Le principe de séparation entre le contrôleur et le contrôlé impose que le premier soit un juge du siège, en l’occurrence le juge des libertés et de la détention.

Mme George Pau-Langevin. Indiscutablement, le contrôle ne peut pas être confié à la partie poursuivante. Certes, c’est le parquet qui dirige l’enquête, mais le contrôle doit être confié à une autre autorité. Ceux qui s’y opposent au motif que cela pourrait entraver le fonctionnement de l’enquête invoquent les mêmes arguments à l’encontre de la présence de l’avocat dès la première heure de garde à vue ou de la reconnaissance de certains droits de la défense. C’est, comme on l’a dit, un combat d’arrière-garde.

M. Sébastien Huyghe. Les positions de la CEDH s’inspirent de la tradition anglo-saxonne, celle d’une procédure accusatoire. C’est pourquoi sa jurisprudence, même si elle ne l’a pas encore affirmé clairement, tend vers le principe d’un contrôle de la garde à vue par un magistrat du siège. Mais en France, nous restons dans un système inquisitoire : le procureur de la République mène ses investigations à charge et à décharge. On ne peut donc pas adopter une position aussi définitive à son sujet.

M. Philippe Houillon. Je n’ai jamais dit, bien entendu, que les membres du parquet n’étaient pas des magistrats. Ce que je dis, c’est que l’on ne peut pas confier à la partie poursuivante le soin d’apprécier les conditions de la privation de liberté de la partie qu’elle poursuit.

M. Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés. Personne ne conteste que le procureur de la République soit un magistrat chargé de la protection des libertés individuelles. Le contrôle qu’il exerce sur la garde à vue est reconnu par le Conseil constitutionnel depuis 1993, et a d’ailleurs été confirmé par une décision de 2010. C’est la loi « Sapin-Vauzelle » du 4 janvier 1993 qui a inscrit dans l’article 41 du code de procédure pénale ce pouvoir de contrôle, renforcé par la loi « Guigou » de juin 2000.

En ce qui concerne le délai de présentation devant un juge, on peut difficilement, il est vrai, tirer une règle générale des décisions successives de la Cour européenne des droits de l’Homme. On peut cependant observer que la Cour a toujours accepté un délai inférieur à trois jours. Je signale qu’aux alentours de 13 heures aujourd’hui, la chambre criminelle de la Cour de cassation devrait rendre un arrêt précisant ce qu’est le procureur de la République.

M. Bernard Derosier. Alors suspendons la séance !

M. le garde des Sceaux. C’est bien la première fois que l’on verrait le législateur attendre une décision de justice !

M. Bernard Derosier. C’est le Gouvernement qui l’attend !

M. le garde des Sceaux. Vous le jugez donc trop enclin à écouter tout le monde, les parlementaires comme les juges !

M. le président Jean-Luc Warsmann. La loi se vote au Parlement, nous en sommes tous convaincus.

M. Jean-Paul Garraud. Je remercie le ministre d’avoir rappelé certaines réalités juridiques.

Certains de nos collègues, tout en reconnaissant que le procureur est un magistrat, affirment qu’il ne peut que « gérer » la garde à vue, et non la contrôler. J’aimerais que l’on m’explique la différence. Je suppose que la prolongation de la garde à vue serait de la compétence du juge des libertés et de la détention, mais alors de quelles opérations de « gestion » s’agit-il ?

Certes le procureur est la partie poursuivante, mais ce n’est pas une partie comme une autre : il défend l’intérêt général. C’est pourquoi il est normal qu’il puisse mener certaines opérations ne relevant pas de la simple gestion, mais du contrôle de la garde à vue.

M. Michel Hunault. Je suis favorable à l’amendement. Pourquoi sommes-nous ici ? Parce que dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel, s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, a mis le Gouvernement en demeure de réformer la garde à vue. La CEDH est chargée de veiller au respect de la Convention européenne des droits de l’Homme, laquelle s’impose à tous les pays. Si l’on veut se conformer jusqu’au bout à la jurisprudence de la CEDH, il faut adopter l’amendement de Philippe Houillon, que je voterai. Nous n’avons pas à rougir de notre bilan en matière de libertés publiques : en trois ans, nous avons instauré le contrôle des prisons, adopté la loi pénitentiaire, institué la question prioritaire de constitutionnalité et entrepris de réformer la garde à vue – mais sur ce sujet il ne faut pas rester à mi-chemin.

M. Dominique Perben. Pour répondre à Philippe Houillon, certes l’alinéa 9 donne le sentiment qu’il pose un principe ; mais les alinéas suivants précisent le rôle du procureur de la République dans la mise en œuvre de la garde à vue, sans poser de question de principe. Je m’interroge donc sur l’intérêt de cet alinéa 9, qui pourrait représenter un chiffon rouge pour le Conseil constitutionnel – alors que cela ne correspond pas exactement à ce qui est explicité ensuite. D’ailleurs, l’ambiguïté de notre discussion montre bien le problème : nous sommes tous d’accord pour que le procureur de la République intervienne au début de la garde de la vue et conserve ses prérogatives pendant 48 heures, avant de passer le relais au juge.

M. Étienne Blanc. Le problème posé par l’alinéa 9 est plutôt d’ordre rédactionnel. Sur le fond, nous sommes tous d’accord : la poursuite relève du parquet et le contrôle appartient au siège. Ne pourrait-on pas, lorsque la Commission se réunira au titre de l’article 88, préciser que la garde à vue s’exécute sous la « direction » – et non le contrôle – du procureur de la République ? Ainsi, les missions respectives du siège et du parquet seraient respectées. Cette clarification rendrait le texte plus conforme à la jurisprudence de la CEDH.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Le rapporteur va y réfléchir.

La Commission adopte l’amendement CL 108.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL 177 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l’amendement de coordination CL 109 de M. Philippe Houillon.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL 178 du rapporteur n’a plus d’objet.

La Commission adopte l’amendement de conséquence CL 179 du rapporteur.

Puis elle rejette successivement, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement CL 122 de M. Jean-Pierre Decool, l’amendement CL 25 de M. Noël Mamère et l’amendement CL 130 de M. Jean-Pierre Decool.

Elle adopte l’article 1ermodifié.

Article 2

(art. 63 et 63-1 du code de procédure pénale)


Procédure de placement en garde à vue – Durée de la garde à vue –Notification des droits

Le présent article procède à la réécriture des articles 63 et 63-1 du code de procédure pénale, dont la rédaction actuelle a été déclarée inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010.

La nouvelle rédaction de l’article 63 se limite aux règles de procédure de placement en garde à vue et de durée de la mesure : la définition et les motivations du placement en garde à vue figurent désormais au nouvel article 62-3 (cf. article 1er).

Le I du nouvel article 63 a trait à la question de la procédure de placement en garde à vue et des échanges qui ont lieu entre l’officier de police judiciaire et le procureur de la République au tout début de la mesure.

L’autorité habilitée à placer une personne en garde à vue est inchangée : il s’agit de l’officier de police judiciaire.

Rappelons qu’en l’état actuel du droit, la décision de placement en garde à vue appartient à l’officier de police judiciaire, quel que soit le régime applicable aux investigations en cours : enquête de flagrance (article 63), enquête préliminaire (article 77) ou sur commission rogatoire (article 154). Ce point n’est pas modifié par le projet de loi (cf. coordinations opérées par son article 14).

La nouvelle rédaction de l’article 63 proposée par le projet de loi précisait cependant que « seul » un officier de police judiciaire peut ordonner le placement d’une personne en garde à vue et que ce placement est décidé par lui « d’office ou sur instruction du procureur de la République ».

Certaines personnes entendues par votre rapporteur se sont interrogées sur l’opportunité de prévoir qu’un même magistrat peut contrôler une mesure qu’il a lui-même ordonnée. Votre rapporteur note que si par le biais d’un renvoi par l’article 77 à l’article 63, les dispositions applicables à l’enquête de flagrance le seront aussi à l’enquête préliminaire, il n’est pas prévu par l’actuel article 77 de placement en garde à vue sur instruction du procureur de la République. Votre rapporteur a donc proposé à votre Commission, qui a adopté l’amendement, de supprimer les mots « d’office ou sur instruction du procureur de la République ».

L’actuel article 63 prévoit, dans sa dernière phrase, que l’officier de police judiciaire « informe dès le début de la garde à vue le procureur de la République ». La nouvelle rédaction, qui a fait l’objet d’un amendement rédactionnel à l’initiative de votre rapporteur, est plus précise, qui indique que cette information est donnée « par tout moyen », tandis qu’est définie la nature des précisions que l’officier de police judiciaire devra donner au procureur :

—  il lui « donne connaissance des motifs justifiant, en application de l’article 62-3, » le placement en garde à vue ;

—  il l’« avise de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne », en application du 2° de l’article 63-1 (cf. infra).

Il est en outre précisé que le procureur de la République peut modifier la qualification des faits retenue par l’officier de police judiciaire et que, dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne gardée à vue selon les modalités prévues à l’article 63-1.

Le II du nouvel article 63 a trait à la durée de la garde à vue et à son éventuelle prolongation.

Le premier alinéa du II précise que « la durée de la garde à vue ne peut excéder vingt-quatre heures ». Cette rédaction fait écho à l’actuelle première phrase du deuxième alinéa de l’article 63 qui dispose que « la personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures ».

Le III fixe quant à lui les règles de computation des délais dans deux cas particuliers : il précise ainsi que l’heure du début de la mesure de garde à vue est, selon les cas :

—  l’heure à laquelle la personne a été appréhendée avant son placement en garde à vue ;

—  l’heure à laquelle a débuté la période de l’audition libre si une telle période a précédé une garde à vue. Est ainsi précisé que la durée de l’audition libre s’impute sur le délai de vingt-quatre heures de la garde à vue qui, le cas échéant, lui ferait suite.

Le dernier alinéa précise en outre qu’en cas de gardes à vue multiples pour les mêmes faits, la durée des précédentes périodes de garde à vue s’impute sur la durée de la mesure.

Votre rapporteur avait proposé un amendement réécrivant l’alinéa par coordination avec la suppression de l’audition libre mais cet amendement n’a pas été adopté par votre Commission. Il déposera un amendement en ce sens en vue de la séance publique afin d’assurer la cohérence du texte adopté.

Le deuxième alinéa du II prévoit, comme c’est le cas aujourd’hui, la possibilité d’une prolongation de la garde à vue pour « un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus » sur autorisation écrite du procureur de la République. Toutefois, deux innovations majeures sont introduites :

—  la décision du procureur de la République doit être non seulement écrite mais aussi motivée ;

—  la prolongation n’est possible que si l’infraction dont la personne est soupçonnée est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an et si la prolongation est l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des six motifs définis à l’article 62-3.

La commission des Lois n’est pas revenue sur la compétence du procureur de la République en matière de prolongation de la garde à vue.

Le dernier alinéa du II précise que l’autorisation de prolongation de la garde à vue ne peut être accordée « qu’après présentation de la personne au procureur de la République ».

La présentation au magistrat est soit physique, la personne gardée à vue lui étant présentée avant la fin de la période initiale de garde à vue, soit réalisée par l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle, c’est-à-dire par visioconférence.

Il est cependant prévu que l’autorisation de prolongation peut « à titre exceptionnel » être accordée par une décision écrite et motivée, sans présentation préalable.

Votre rapporteur rappelle qu’en l’état actuel du droit, la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article 63 du code de procédure pénale dispose que le procureur de la République « peut subordonner (l’autorisation de prolongation) à la présentation préalable de la personne gardée à vue ». La logique se trouve donc inversée par le projet de loi, la présentation devenant le principe.

Votre rapporteur note qu’une telle évolution est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme : s’agissant de l’étendue du contrôle du magistrat sur une mesure privative de liberté, la Cour de Strasbourg exige un contrôle effectif et pose l’obligation au magistrat d’entendre personnellement l’individu traduit devant lui (38). Le magistrat doit contrôler la légalité et la justification de l’arrestation et de la détention et avoir le pouvoir d’ordonner, le cas échéant, l’élargissement du gardé à vue.

Le général Jacques Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale, a fait part à votre rapporteur de son inquiétude à l’égard de présentations systématiques au magistrat, sources potentielles de désorganisation des services enquêteurs et a plaidé pour le développement du recours à la visioconférence, dont il a relevé qu’elle était déjà utilisée par les tribunaux s’agissant du renouvellement des détentions provisoires.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 63-1 du code de procédure pénale précise que la personne gardée à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou sous son contrôle :

—  de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête ;

—  des droits mentionnés aux articles 63-2 (faire prévenir un proche ou son employeur), 63-3 (droit d’être examinée par un médecin) et 63-4 (droit de s’entretenir avec un avocat pour une durée maximale de trente minutes) ;

—  des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l’article 63 (vingt-quatre heures, susceptibles d’être prolongées pour la même durée).

Il prévoit que ces informations doivent être communiquées à la personne « dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits » ; si la personne est atteinte de surdité et ne sait ni lire ni écrire, elle doit être soit assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée, soit bénéficier d’un dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

Le procès-verbal reçoit mention des informations données à la personne gardée à vue, qui l’émarge. En cas de refus d’émargement, il en est fait mention dans le procès-verbal.

Le cinquième alinéa de l’actuel article 63-1 précise que, si la personne gardée à vue est remise en liberté à l’issue de la mesure sans qu’aucune décision n’ait été prise par le procureur de la République sur l’action publique, les dispositions de l’article 77-2 sont portées à sa connaissance.

Le dernier alinéa précise que, sauf en cas de circonstance insurmontable, les « diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue ».

Le présent article procède à la réécriture de l’article 63-1, dont certaines dispositions sont transférées dans d’autres articles : le cinquième alinéa actuel devient ainsi le second alinéa du nouvel article 63-8, tel que rédigé par l’article 9 du projet, son premier alinéa étant la reprise de l’avant-dernier alinéa de l’actuel article 63.

La nouvelle version de l’article 63-1 gagne en lisibilité, les informations dont doit bénéficier la personne dans les premières heures de sa garde à vue étant énumérées sous forme de liste. Les informations qui devront être données sont en outre enrichies des nouveaux droits conférés par le présent projet de loi.

Le présent article précise ainsi que cette information doit porter sur :

—  le placement en garde à vue, sa durée et des possibilités éventuelles de prolongation ;

—  la nature et la date présumée de l’infraction que la personne est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

—  les droits dont elle bénéficie, à savoir :

- le droit de faire prévenir un proche et son employeur, conformément aux nouvelles dispositions de l’article 63-2, résultant de l’article 3 du projet de loi ;

- le droit d’être examinée par un médecin, conformément aux dispositions de l’article 63-3 (cf. article 4 du projet de loi) ;

- le droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat, conformément aux dispositions des articles 63-3-1 à 63-4-2 (cf. articles 5 à 7 du projet de loi).

Le huitième alinéa du I de l’article, relatif aux personnes atteintes de surdité, est l’exacte reprise de l’actuel quatrième alinéa de l’article 63-1.

De même, le neuvième alinéa du I reprend la disposition relative à la mention au procès-verbal de l’information donnée par l’officier de police judiciaire en application de l’article et, le cas échéant, du refus de la personne de l’émarger.

Enfin, le II de l’article précise que la personne gardée à vue est informée « au début de son audition qu’elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui posées ou de se taire ».

Une telle rédaction est proche de celle de l’article 63-1 du code de procédure pénale issu de la loi n° 2002-307 du 4 mars 2002 complétant la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence, rédaction en vigueur jusqu’au 19 mars 2003 (c’est la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure qui avait supprimé toute mention du droit au silence).

Elle se distingue en revanche de la formulation initialement retenue par la loi du 15 juin 2000 qui précisait que « la personne gardée à vue est (…) immédiatement informée qu’elle a le droit de ne pas répondre aux questions qui lui seront posées par les enquêteurs ».

L’affirmation du droit de la personne gardée à vue à garder le silence est une exigence qui découle des jurisprudences récentes, qu’il s’agisse du Conseil constitutionnel (qui a relevé dans la décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010 que dans le système actuel, la personne « ne reçoit pas la notification de son droit de garder le silence ») ou de la Cour de cassation (qui, dans un arrêt M. T. du 19 octobre 2010, a estimé qu’il résulte de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme que, « toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit, dès le début de la garde à vue, être informée de son droit de se taire ».)

Outre un amendement de portée rédactionnelle de votre rapporteur, votre Commission a adopté deux amendements respectivement défendus par Mme Delphine Batho et M. Éric Ciotti.

Le premier amendement a pour objet de préciser que l’information des droits de la personne est portée au procès-verbal de déroulement de la garde à vue, afin de mettre en place un procès-verbal unique en remplacement de procès-verbaux multiples, pratique qui prévaut aujourd’hui dans la police nationale. Votre rapporteur, qui est par principe favorable à la simplification des lourdeurs procédurales injustifiées, a cependant émis un avis défavorable à une telle précision, qui n’est juridiquement pas nécessaire. Il apparaît en effet que, en l’état actuel des textes, rien n’empêcher les enquêteurs d’établir un procès-verbal unique, ce que font d’ailleurs les gendarmes comme l’a indiqué le ministre.

L’amendement de M. Éric Ciotti, quant à lui, réécrit le II de l’article relatif au droit au silence afin de préciser que ce droit ne s’applique pas à certaines informations que la personne gardée à vue a le devoir de communiquer : son nom, son prénom, sa date de naissance, son lieu de naissance, son domicile et le cas échéant sa résidence. Votre rapporteur, qui note qu’une telle précision pouvait être sous-entendue par l’expression « après avoir décliné son identité », s’est cependant rangé à cette suggestion, dont la rédaction pourrait cependant être précisée en vue de la séance publique.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 11 de M. Dominique Raimbourg.

M. Dominique Raimbourg. Cet amendement vise à préciser les pouvoirs de l’officier de police judiciaire et du procureur de la République. C’est l’OPJ qui place en garde à vue, mais c’est le procureur qui, dans la limite de vingt-quatre heures, fixe la durée de la garde à vue.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour un ensemble de raisons déjà exposées.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL 54 de M. Michel Vaxès.

M. Patrick Braouezec. Il nous paraît nécessaire qu’un officier de police judiciaire ne puisse placer une personne en garde à vue que sur instruction du procureur de la République.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Une telle modification rendrait le placement en garde à vue impossible en cas de flagrant délit, ce qui serait pour le moins fâcheux.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL 181 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je propose d’indiquer à l’alinéa 2 que « seul un officier de police judiciaire peut placer une personne en garde à vue », en supprimant donc les mots « , d’office ou sur instruction du procureur de la République, ».

M. Philippe Houillon. Dans l’exposé sommaire de l’amendement, on peut lire ceci : « Le magistrat chargé de contrôler la mesure ne peut être celui qui la décide ». L’affirmation est intéressante au regard du débat que nous avons eu tout à l’heure.

M. le rapporteur. Lors de la réunion de la Commission en application de l’article 88, je proposerai une nouvelle rédaction de l’alinéa 9 de l’article 1er.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte également l’amendement de précision rédactionnelle CL 182 du rapporteur.

M. Philippe Houillon retire l’amendement CL 110.

La Commission examine l’amendement CL 26 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Cet amendement tend à confier au juge des libertés et de la détention la décision d’autoriser la prolongation de la garde à vue.

M. Dominique Raimbourg. Cette prolongation portant atteinte à l’une des parties, il paraît normal que ce ne soit pas la partie poursuivante qui statue, mais le juge des libertés et de la détention. C’est techniquement possible : aujourd’hui, environ 100 000 gardes à vue donnent lieu à une prolongation – mais on peut penser que ce nombre devrait se réduire en même temps que le nombre total de gardes à vue –, et nous disposons de 500 juges des libertés et de la détention. Même si elle n’est pas formellement imposée par la Cour européenne des droits de l’Homme, cette mesure raisonnable nous mettrait à l’abri de tout recours et ferait progresser les libertés.

M. le rapporteur. Pour toutes les raisons déjà évoquées, avis défavorable.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je suis également très défavorable à un amendement dont l’adoption représenterait une révolution dans notre politique pénale.

M. Noël Mamère. C’est pourtant le bon sens, pour la garantie des libertés des personnes en garde à vue, que de confier ce rôle au JLD. Faisons en sorte que la réforme de la garde à vue ne soit pas simplement un affichage et ne trahisse pas l’esprit de la jurisprudence de la CEDH.

La Commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement CL 56 de M. Michel Vaxès.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL 183 du rapporteur.

En conséquence, les amendements CL 55 de M. Michel Vaxès, CL 27 de M. Noël Mamère, CL 123 de M. Jean-Pierre Decool et CL 85 de M. Éric Ciotti n’ont plus d’objet.

La Commission examine l’amendement CL 84 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. À la garde à vue de 24 heures, renouvelables une fois, prévue par le droit commun, et aux régimes dérogatoires prévus pour la criminalité organisée, les trafics de stupéfiants et le terrorisme, d’une durée maximale de 96 heures, nous vous proposons par cet amendement d’ajouter, en matière criminelle, la possibilité d’une deuxième prolongation de 24 heures supplémentaires, portant à 72 heures la durée maximale de la garde à vue dans des cas qui le justifieraient, notamment les enlèvements.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Ce régime serait incohérent avec les régimes dérogatoires prévus notamment pour la criminalité organisée.

M. Éric Ciotti. L’amendement CL 84 ne concerne pas la criminalité organisée, mais des meurtres en série, des enlèvements ou des actes de barbarie.

M. Philippe Goujon. Alors que la criminalité organisée recouvre des cas très divers, cet amendement, que j’ai cosigné, vise des situations extrêmes dans lesquels l’enquête policière suppose de disposer d’un peu de temps.

M. Daniel Vaillant. Je suis assez surpris par cet amendement : dans les cas évoqués par Éric Ciotti, il est possible de recourir à la détention provisoire.

M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement tient à conserver les régimes dérogatoires existants pour la criminalité organisée, le trafic de stupéfiants et le terrorisme. Il ne paraît pas opportun d’en créer un nouveau pour les autres matières criminelles ; les investigations peuvent toujours être diligentées après la garde à vue, au besoin dans le cadre d’une instruction avec placement en détention provisoire.

M. Christian Estrosi. J’insiste sur la nécessité d’adopter cet amendement, que j’ai moi aussi cosigné. Nous avons connu, au cours des dernières années, des cas d’enlèvement où la vie de femmes ou d’enfants s’est jouée à quelques heures. Il serait regrettable de ne pas donner aux policiers qui mènent l’enquête judiciaire le temps dont ils ont besoin. Ce n’est pas la mise en détention provisoire qui peut régler le problème.

M. Jean-Paul Garraud. La question soulevée par l’amendement est réelle. J’observe par ailleurs à l’attention de certains de mes collègues que, selon cet amendement, la seconde prorogation de la garde à vue serait autorisée par le JLD. Mais il conviendrait de mieux fixer le champ d’application de la disposition. Si nous parvenions à préciser juridiquement la notion d’enlèvement, nous pourrions rédiger un nouvel amendement pour la réunion de la Commission en application de l’article 88.

M. Philippe Houillon. Cet amendement vise à introduire une exception au principe, sans préciser les cas qui la justifieraient – ce qui pose problème.

M. le président Jean-Luc Warsmann. J’ajoute que les régimes dérogatoires vont être aménagés : leur déclenchement ne sera plus automatique du fait de la catégorie d’infractions, mais apprécié au cas par cas.

M. Éric Ciotti. Compte tenu des remarques qui viennent d’être faites, je retire l’amendement. Je le redéposerai pour la réunion au titre de l’article 88 en apportant les précisions souhaitées, en particulier la caractérisation de l’enlèvement.

L’amendement CL 84 est retiré.

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette l’amendement de coordination CL 111 de M. Philippe Houillon.

Puis elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement CL 57 de M. Michel Vaxès.

Elle examine ensuite l’amendement CL 28 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Nous souhaitons supprimer la possibilité d’utiliser un moyen de communication audiovisuelle pour la présentation au procureur de la République. La personne doit en effet pouvoir s’expliquer librement, et non à distance et entourée par les enquêteurs.

M. le rapporteur. Avis défavorable, un peu de souplesse étant nécessaire.

M. Michel Hunault. Je ne suis pas favorable à cet amendement, mais je comprends les préoccupations de ses auteurs. Ce texte va nécessiter une adaptation des lieux de garde à vue. Comment envisagez-vous son application concrète, monsieur le garde des Sceaux ?

M. le garde des Sceaux. Cette loi posera inévitablement des questions de moyens.

La Commission rejette l’amendement CL 28.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL 184 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL 58 de M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Ce texte devrait améliorer les conditions de la garde à vue, mais sa rédaction nous fait craindre qu’on en reste à la situation actuelle. Ainsi, selon la dernière phrase de l’alinéa 7, la prolongation de la garde à vue pourra « à titre exceptionnel, être accordée par une décision écrite et motivée, sans présentation préalable ». Il est à craindre que cette exception soit la règle, c’est pourquoi nous proposons de supprimer cette possibilité.

M. le rapporteur. Avis défavorable, dès lors qu’il ne pourra y avoir de dérogation qu’à titre exceptionnel.

M. Dominique Raimbourg. Les difficultés actuelles sont notamment liées à l’absence de contrôle effectif des procureurs sur les gardes à vue, les procureurs n’étant pas assez nombreux, notamment pour assurer comme il conviendrait les permanences de nuit dans les parquets. J’insiste sur la nécessité que les parquets assurent une réelle permanence 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL 185 du rapporteur.

M. Philippe Houillon. Présenté comme un amendement de conséquence, cet amendement indique que l’heure de début de la garde à vue peut être celle à laquelle l’audition débute : je m’en étonne…

M. le rapporteur. Pour être très honnête, c’est un amendement que j’ai rectifié hier soir à la demande du Gouvernement, vers lequel je me tourne.

M. le garde des Sceaux. Il faut savoir à partir de quand court le délai. La proposition est que l’heure de début de la garde à vue soit fixée, le cas échéant, soit à l’heure à laquelle la personne a été appréhendée, soit à l’heure à laquelle a débuté l’audition.

La Commission rejette l’amendement.

M. Philippe Houillon retire l’amendement CL 112.

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette successivement les amendements CL 126 de M. Jean-Pierre Decool et CL 29 de M. Noël Mamère.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL 186 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL 30 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Cet amendement porte sur le droit au silence. Il convient de notifier à la personne en garde à vue son droit de se taire et de ne pas répondre aux questions de l’enquêteur, afin de ne pas participer à sa propre incrimination. C’est un sujet essentiel, qui a été abordé par la CEDH et dont nous-mêmes avons déjà un peu débattu.

M. le rapporteur. Cela figure déjà à l’alinéa 19. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL 31 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Il s’agit ici de prévoir, pour les personnes qui ne comprennent pas le français, la notification des droits en présence d’un interprète.

M. le rapporteur. Avis défavorable car il est déjà prévu à l’alinéa 10 que l’information soit donnée dans une langue comprise par la personne mise en cause. Il ne serait pas raisonnable d’attendre un interprète.

M. Noël Mamère. Cela pose une nouvelle fois la question de savoir quand commence la garde à vue – avant l’arrivée de l’interprète ou à partir de son arrivée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL 97 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Actuellement, la garde à vue donne lieu à de multiples procès-verbaux attestant de ses conditions et du déroulement des interrogatoires. L’établissement de ces procès-verbaux en plusieurs exemplaires est une procédure extrêmement lourde. Dès lors que l’avocat est présent, il est possible de faire évoluer le système.

Nous faisons donc deux propositions. La première est l’établissement d’un seul procès-verbal de synthèse des auditions. Nous avions déposé un amendement en ce sens, qui prévoyait en outre l’enregistrement audiovisuel des interrogatoires, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 ; nous le redéposerons donc sous une autre forme en séance publique. Nous proposons en second lieu, par cet amendement CL 97, que le déroulement de la garde à vue fasse l’objet d’un unique procès-verbal, attestant de la notification des droits et des suites données à cette notification.

M. le rapporteur. Votre proposition est intéressante, j’en conviens, mais elle heurte les intérêts de la défense. Avis défavorable.

M. Éric Ciotti. Il faut veiller à ne pas fragiliser le déroulement de l’enquête ; à partir du moment où la présence de l’avocat est prévue, des simplifications sont nécessaires. Aujourd’hui, un procès-verbal de garde à vue pour alcoolémie représente 33 pages de rédaction pour les policiers ou les gendarmes… Je suis pour cet amendement, réclamé par beaucoup de policiers.

M. le rapporteur. Cet amendement pourrait sembler de bon sens, mais le procès-verbal unique, constitué au fur et à mesure, ne permettrait de délivrer les informations que très tardivement : cela ne va sans doute pas dans le sens des droits de la défense.

M. le garde des Sceaux. Rien n’interdit aujourd’hui de dresser un procès-verbal unique. Le fait de l’imposer serait introduire une rigidité supplémentaire dans la procédure.

Mme Delphine Batho. Aujourd’hui, en pratique, on établit de multiples procès-verbaux – notification des droits, avis à médecin, avis à avocat, avis à famille – à chaque fois en quatre exemplaires. Une simplification est nécessaire ! Le système que nous proposons ne serait nullement contraire aux droits de la défense.

M. le garde des Sceaux. C’est le plus souvent comme cela que procède la gendarmerie, parce que c’est le même officier de police judiciaire du début jusqu’à la fin de l’enquête. Lorsque c’est la police qui intervient, il en va différemment car plusieurs OPJ se succèdent. Je suis favorable au système, mais je considère qu’il ne faut pas l’imposer à la police.

M. le président Jean-Luc Warsmann. En quoi l’intervention de plusieurs officiers de police judiciaire empêche-t-elle le procès-verbal unique ?

M. le garde des Sceaux. Chaque OPJ qui intervient doit signer. Il faut donc à chaque fois un nouveau procès-verbal.

M. le rapporteur. La simplification est souhaitable dans son principe, mais à trop simplifier on peut créer des risques de nullité. 

M. Dominique Raimbourg. Les gendarmes parviennent à établir un document unique, même, me semble-t-il, en cas de changement d’OPJ. Les policiers sont très désireux de voir simplifier le système.

M. Jean-Paul Garraud. Au risque de surprendre certains, je soutiens l’amendement de Mme Batho, et je vais aussi parler au nom de Philippe Houillon et Claude Goasguen ! Il est très important de simplifier la procédure, et je crois techniquement possible d’établir un procès-verbal unique récapitulatif de la notification des droits. Il serait très souhaitable d’approfondir la question d’ici à la réunion de la Commission en application de l’article 88, afin de rédiger un amendement en ce sens.

M. Philippe Goujon. Sous l’impulsion heureuse de son président, notre Commission a toujours manifesté son souci d’aller plus loin dans la simplification administrative. Nous ferions œuvre utile en votant cet amendement, d’autant plus que les procès-verbaux dont il s’agit sont d’une extraordinaire complexité. Les policiers se plaignent du temps qu’ils passent à ces formalités et souhaitent eux-mêmes qu’il y ait une unification, laquelle ne met absolument pas en cause les droits de la défense.

M. le rapporteur. Les arguments entendus sont plutôt convaincants. Il faut cependant bien réfléchir aux conditions formelles de ce procès-verbal unique, afin d’éviter tout risque de nullité de la procédure.

M. François Vannson. Ce souci de simplification est justifié, mais il serait peut-être opportun de recueillir l’avis de ceux qui rédigent ces procès-verbaux, à savoir les gendarmes et les policiers.

M. Étienne Blanc. Tout cela est très intéressant, mais ne serions-nous pas dans le champ réglementaire ?

M. le président Jean-Luc Warsmann. La Commission semble majoritairement favorable à l’idée d’un procès-verbal unique, mais je suggère de travailler la question d’ici à notre réunion en application de l’article 88.

Mme Delphine Batho. Dans ce cas, votons cet amendement pour exprimer la volonté de la Commission, quitte à retravailler ensuite la formulation.

La Commission adopte l’amendement CL 97.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL 88 de M. Éric Ciotti et CL 32 de M. Noël Mamère.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Le rapporteur souhaitait transformer son amendement CL 187, qui vient ensuite, en sous-amendement à l’amendement CL 88, mais peut-être les auteurs de ce dernier accepteraient-ils de le rectifier. Il s’agirait de préciser que la personne placée en garde à vue est informée au début de « sa première » audition qu’elle a le choix de faire des déclarations ou de se taire.

M. Éric Ciotti. Je suis d’accord.

M. Noël Mamère. L’amendement CL 32 vise à informer clairement la personne placée en garde à vue qu’elle a le droit de se taire, alors que l’amendement de notre collègue Ciotti apporte des restrictions à ce droit.

M. le rapporteur. Avis favorable à l’amendement CL 88 rectifié, défavorable à l’amendement CL 32 et je retire l’amendement CL 187.

Mme George Pau-Langevin. Notre collègue Ciotti vise le cas où une personne donnerait une fausse identité ou refuserait de la donner. Mais je ne vois pas par quel moyen on pourrait obliger cette personne à donner sa véritable identité. Cet amendement apporte donc une fausse garantie.

M. Alain Vidalies. C’est un amendement qui n’a rien de juridique. On ne peut pas écrire dans un texte de droit pénal que la personne a le « devoir » de communiquer certaines informations ! Que va-t-on faire si elle ne le fait pas ? Ce n’est pas prévu… Cela n’a aucun sens.

M. Éric Ciotti. Mon amendement ne remet pas en cause le droit de se taire. Simplement, il énonce une réserve concernant l’état civil – nom, prénom, date de naissance, lieu de naissance, domicile et le cas échéant résidence –, que la personne doit communiquer.

La Commission adopte l’amendement CL 88 rectifié.

En conséquence, l’amendement CL 32 tombe et l’amendement CL 59 de M. Michel Vaxès n’a plus d’objet.

La Commission adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

La Commission examine ensuite l’amendement CL 96 de Mme Delphine Batho, tendant à insérer un article additionnel après l’article 2.

Mme Delphine Batho. À partir du moment où l’avocat est effectivement présent lors des auditions, il paraît normal de s’en tenir à un procès-verbal de synthèse, récapitulant les déclarations de la personne placée en garde à vue.

M. le rapporteur. Avis défavorable pour les raisons évoquées tout à l’heure.

La Commission rejette l’amendement.

Article 3

(art. 63-2 du code de procédure pénale)


Droit de faire prévenir à la fois un proche et son employeur

En l’état actuel du droit, l’article 63-2 du code de procédure pénale prévoit que toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, dans un délai de trois heures suivant le placement, faire prévenir de cette mesure une personne qui peut être :

—  soit une personne avec laquelle elle vit habituellement ou un parent en ligne directe, un frère ou une sœur,

—  soit son employeur.

Le deuxième alinéa de l’article prévoit que l’officier de police judiciaire, s’il estime que les nécessités de l’enquête commandent de ne pas faire droit à cette demande, doit en référer sans délai au procureur qui prend la décision d’y faire droit ou non.

Le présent article ne modifie pas ce second alinéa. Il prévoit en revanche que désormais la personne gardée à vue pourra prévenir deux personnes, à la fois 1° une personne avec laquelle elle vit habituellement ou un parent en ligne directe, un frère ou une sœur et 2° son employeur.

Il modifie également le délai dans lequel ces personnes sont prévenues : alors que le droit actuel prévoit, par renvoi aux dispositions de l’article 63-1, un délai de « trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue », le présent article prévoit un délai de « trois heures à compter du moment où la personne a formulé la demande », ce qui est plus cohérent avec la pratique constatée : il peut arriver que la personne gardée à vue ne formule sa demande qu’en cours de mesure, à un moment où le délai de trois heures à compter du placement en garde à vue serait écoulé. En outre, est ajoutée la possibilité de ne pas faire application de ce délai « en cas de circonstance insurmontable ».

Votre commission des Lois a adopté, outre un amendement de votre rapporteur réparant une erreur de coordination, un amendement de M. Jean-Pierre Decool indiquant que la « circonstance insurmontable » justifiant qu’il ne soit pas fait droit à la demande du gardé à vue soit « mentionnée au procès-verbal ».

*

* *

La Commission adopte l’amendement de coordination CL 188 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL 124 de M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Je propose que la « circonstance insurmontable » soit motivée sur le procès-verbal.

M. le rapporteur. Sous réserve du remplacement du mot « motivées » par le mot « mentionnée », au singulier, et du mot « sur » par le mot « au », avis favorable.

M. Jean-Pierre Decool. J’accepte.

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Elle examine ensuite l’amendement CL 33 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Il convient de ramener le délai prévu à cet article de trois heures à deux heures.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL 60 de M. Michel Vaxès.

M. le rapporteur. Il a exactement le même objet.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4

(art. 63-3 du code de procédure pénale)


Droit de la personne gardée à vue à être examinée par un médecin

Le présent article a pour objet de préciser les dispositions du code de procédure pénale relatives au droit de la personne gardée à vue d’être examinée par un médecin.

Parmi les droits dont bénéficie la personne gardée à vue depuis la loi du 4 janvier 1993 (39), figure le droit d’être examinée par un médecin, prévu par l’article 63-3 du code de procédure pénale. Aux termes du premier alinéa de cet article, « Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois ». À ce droit du gardé à vue de bénéficier, à sa demande, d’un examen médical, s’ajoute la faculté ouverte au procureur de la République ou à l’officier de police judiciaire, « à tout moment » et « d’office », de « désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue ». Outre ces deux cas de demande d’examen médical par la personne gardée à vue, le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire, le troisième alinéa de l’article 63-3 prévoit qu’« un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ». Enfin, le quatrième alinéa de cet article dispose que « Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue » et que « Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier ».

Le dernier alinéa de l’article 63-1 prévoit le délai dans lequel les enquêteurs doivent permettre au gardé à vue de bénéficier de son droit à être examiné par un médecin : « Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue ».

Le présent article apporte à l’article 63-3 du code de procédure pénale deux modifications :

1° D’une part, il définit avec davantage de précision l’objet de l’examen médical. Actuellement, l’objet de l’examen médical est défini par le quatrième alinéa de l’article 63-3, qui prévoit que « Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier ». Cette définition est toutefois non exhaustive, en raison de l’emploi de l’adverbe notamment. Pour autant, les autres objectifs potentiels ne sont pas précisément définis par le texte. Par ailleurs, sur un plan rédactionnel, l’objet de l’examen médical semble n’être défini qu’incidemment, au détour d’une phrase prévoyant le versement au dossier du certificat.

Pour ces raisons, le présent article supprime, dans le quatrième alinéa de l’article 63-3, les termes « par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue », et remplace cette définition incomplète et incidente par une phrase, située au premier alinéa, prévoyant que « Le médecin se prononce sur l’aptitude au maintien en garde à vue et procède à toutes constatations utiles ». L’objet de l’examen se trouve ainsi défini, dans le même alinéa que celui prévoyant qu’il constitue un droit de la personne gardée à vue, de manière plus précise et exhaustive : l’examen vise en premier lieu à établir l’aptitude de la personne au maintien en garde à vue, et, en second lieu, à permettre la réalisation de toutes autres constatations utiles sur l’état de santé de la personne gardée à vue.

2° D’autre part, l’article tire les conséquences formelles de la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 63-1, qui a pour conséquence de faire disparaître de la loi la disposition prévoyant le délai dans lequel les enquêteurs doivent accomplir les diligences tendant à permettre au gardé à vue de bénéficier de son droit à être examiné par un médecin. Le premier alinéa de l’article 63-3 est donc complété par une phrase disposant que « Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences prévues au présent alinéa doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a formulé la demande ».

Cette phrase, qui reprend la règle du délai de trois heures que prévoyait l’article 63-1 du code de procédure pénale, se montre toutefois plus précise et réaliste que l’ancienne rédaction, en prévoyant que le point de départ du délai est la demande de la personne gardée à vue, et non plus le moment du placement en garde à vue, la demande d’être examinée par un médecin pouvant être formulée plus tardivement.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL 34 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. L’expression « aptitude au maintien en garde à vue » ne saurait être conservée, pouvant donner lieu à toutes sortes d’interprétations. Mon amendement tire les conséquences de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme sur les abus en la matière, en posant le principe qu’il ne saurait y avoir de garde à vue lorsqu’elle est incompatible avec l’état de santé de l’intéressé. Il précise que le médecin délivre un certificat médical qui est versé au dossier.

M. le rapporteur. Cet amendement n’apporte rien : dans la pratique, c’est bien sur la compatibilité du maintien en garde à vue avec la santé de la personne que le médecin doit se prononcer. Quant au versement du certificat médical au dossier, il est déjà prévu par l’article 63-3, alinéa 4 du code de procédure pénale. Avis défavorable, donc.

M. Noël Mamère. Vous ne me convaincrez pas que l’expression « l’aptitude au maintien en garde à vue » est semblable à celle que je propose…

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette successivement, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements CL 35 de M. Noël Mamère et CL 61 de M. Michel Vaxès.

Elle est saisie de l’amendement CL 36 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Le certificat médical attestant l’incompatibilité de l’état de santé de la personne avec la garde à vue doit avoir un caractère impératif.

M. le rapporteur. C’est déjà le cas en pratique, et c’est prévu par la circulaire d’application du code de procédure pénale. Je ne vois donc pas l’intérêt de cet amendement.

M. Noël Mamère. Comme il est indiqué dans l’exposé des motifs, la Commission nationale de déontologie de la sécurité a formulé des recommandations à ce sujet. Si elle l’a fait, c’est qu’elle avait été saisie ; c’est donc qu’il y a un problème.

Mme George Pau-Langevin. Je m’étonne qu’on nous dise qu’il est inutile d’adopter une disposition législative parce qu’il y a une circulaire…

M. le rapporteur. Aujourd’hui, quand le médecin a constaté l’inaptitude, il n’y a pas de garde à vue. C’est déjà une obligation, que la circulaire ne fait que rappeler.

M. Jean-Paul Garraud. En cas d’état de santé incompatible avec la garde à vue, les procès-verbaux n’ont aucune valeur juridique : ils ne peuvent qu’être annulés.

La Commission rejette l’amendement CL 36.

Puis elle adopte l’article 4 sans modification.

Article 5

(art. 63-3-1 [nouveau] du code de procédure pénale)


Droit de la personne gardée à vue à l’assistance d’un avocat

L’article 5 énonce le droit de la personne gardée à vue à être assistée par un avocat dès le début de la mesure, définit les modalités de désignation de l’avocat et prévoit l’information de l’avocat désigné de la nature et de la date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête. Le rôle accru que jouera l’avocat au cours de la garde à vue après l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions soulève une difficulté nouvelle, à laquelle le législateur doit porter une attention particulière : plusieurs personnes placées en garde à vue dans une même affaire peuvent-elles être assistées par le même défenseur ?

Aujourd’hui, le droit à l’avocat pendant la garde à vue, tel qu’il est prévu par l’article 63-4 du code de procédure pénale, est limité à un droit à demander, dès le début de la garde à vue, à s’entretenir confidentiellement avec un avocat, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes. Ce régime d’assistance a été jugé contraire à la fois à la Constitution par le Conseil constitutionnel et à la Convention européenne des droits de l’Homme par la Cour de cassation.

Dans sa décision du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a estimé contraires à la Constitution les dispositions de l’article 63-4 du code de procédure pénale définissant le rôle de l’avocat pendant la garde à vue, aux motifs que cet article « ne permet pas à la personne ainsi interrogée, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, de bénéficier de l’assistance effective d’un avocat » et « qu’une telle restriction aux droits de la défense est imposée de façon générale sans considération des circonstances particulières susceptibles de la justifier pour rassembler ou conserver les preuves ou assurer la protection des personnes » (40).

Les dispositions du code de procédure pénale relatives à l’assistance par un avocat de la personne gardée à vue ont également été déclarées contraires à l’article 6 de la Convention européenne de la Cour de cassation par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Ainsi, dans une affaire de droit commun dans laquelle une chambre de l’instruction avait jugé une mesure de garde à vue contraire à cette disposition conventionnelle en raison de l’absence d’assistance effective de la personne gardée à vue par un avocat, la Cour de cassation a jugé que « pour prononcer l’annulation des procès-verbaux de garde à vue et des auditions intervenues pendant celle-ci, les juges énoncent que M. X a bénéficié de la présence d’un avocat mais non de son assistance dans des conditions lui permettant d’organiser sa défense et de préparer avec lui les interrogatoires auxquels cet avocat n’a pu, en l’état de la législation française, participer » et « qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a fait l’exacte application de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme » (41).

Reprenant en partie les dispositions de l’actuel article 63-4 du code de procédure pénale, dont les six premiers alinéas ont été déclarés contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel, l’article 5 énonce un droit renforcé de la personne gardée à vue à être assistée par un avocat. Les jurisprudences constitutionnelles, judiciaires et européennes conduisent désormais à considérer le seul droit de la personne gardée à vue à demander à s’entretenir avec un avocat comme insuffisant pour garantir « l’exercice des libertés constitutionnellement garanties » et le droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la CEDH.

Pour ces raisons, le projet de loi donne un contenu considérablement renforcé au droit de la personne gardée à vue à l’assistance d’un avocat, énoncé par le nouvel article 63-3-1 du code de procédure pénale créé par le présent article. Conformément aux jurisprudences tant nationales qu’européenne sur les droits de la personne gardée à vue, ce droit à demander à être assisté par un avocat s’exercera – comme aujourd’hui le droit à demander à s’entretenir avec un avocat – « dès le début de la garde à vue ».

Aux termes du projet de loi, ce droit comprendra trois aspects :

1° le droit à demander à s’entretenir avec un avocat, reprise du droit existant, prévu par l’article 63-4 du code de procédure pénale dans sa nouvelle rédaction issue de l’article 6 du projet de loi ;

2° le droit à ce que l’avocat puisse consulter certains documents de la procédure, prévu par le nouvel article 63-4-1 du code de procédure pénale créé par l’article 7 du projet de loi ;

3° le droit pour la personne gardée à vue à ce que l’avocat assiste à ses auditions, prévu par le nouvel article 63-4-2 du code de procédure pénale également créé par l’article 7 du projet de loi.

S’agissant des modalités de désignation de l’avocat, le projet de loi reprend, dans le nouvel article 63-3-1 du code de procédure pénale créé par le présent article, les règles actuellement énoncées par les deux premiers alinéas de l’article 63-4. Il est ainsi prévu que, si la personne gardée à vue demandant à être assistée par un avocat « n’est pas en mesure d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bâtonnier ». Dans ce cas, le deuxième alinéa de l’article 63-4 prévoit que « Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai ».

Enfin, s’agissant des informations que doit recevoir l’avocat désigné, le projet de loi reprend à droit constant les dispositions de l’actuel troisième alinéa de l’article 63-4, en prévoyant que « L’avocat désigné est informé par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête ».

Le projet de loi est silencieux sur la question de savoir si plusieurs personnes gardées à vue dans une même affaire peuvent avoir le même défenseur.

Dans une telle situation, la seule règle applicable aujourd’hui est celle prévue par l’article 7 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat, qui dispose que « L’avocat ne peut être ni le conseil ni le représentant ou le défenseur de plus d’un client dans une même affaire s’il y a conflit entre les intérêts de ses clients ou, sauf accord des parties, s’il existe un risque sérieux d’un tel conflit ». Toutefois, le rôle accru de l’avocat au cours de la garde à vue (42) fait naître, en sus du risque de conflit d’intérêts que l’application de la règle déontologique précitée permet normalement de résoudre, une difficulté supplémentaire.

Lorsque plusieurs personnes sont placées en garde à vue pour des mêmes faits, leurs auditions au cours de la garde à vue permettent de confronter leurs déclarations et de mettre en évidence leurs éventuelles contradictions. Dans ces conditions, il apparaît relativement évident que si ces personnes sont assistées par le même conseil, celui-ci sera inévitablement amené, dans l’exercice normal de sa mission et aux fins d’assurer la défense de ses clients, à leur révéler des informations dont il a eu connaissance en consultant les procès-verbaux d’audition ou en assistant aux auditions des autres mis en cause. En outre, le temps réduit de la garde à vue oblige parfois les enquêteurs à effectuer des auditions simultanées ; si les personnes gardées à vue ont le même défenseur, les auditions simultanées seront impossibles, ce qui conduira à un allongement inutile de la durée des gardes à vue. Pour ces deux raisons, de garantie du secret de l’enquête d’abord, matérielles ensuite, l’efficacité des enquêtes complexes serait alors considérablement réduite.

Pour répondre à cette difficulté, votre rapporteur avait présenté un amendement complétant l’article 5 par un alinéa disposant qu’« un même avocat ne peut assister plusieurs personnes gardées à vue pour les mêmes faits ». MM. Éric Ciotti et Philippe Goujon avaient également proposé des amendements visant à répondre à cette même difficulté. Au cours de la discussion en Commission de cet amendement, ont été soulevés les difficultés d’application pratique d’une telle disposition, notamment dans les petits barreaux, ainsi que le fait que cet amendement manifesterait à l’égard de la profession d’avocat une « défiance » qui n’aurait pas lieu d’être. Votre rapporteur souligne que l’objet de son amendement n’était nullement de contester le respect par la profession d’avocat des règles très strictes de déontologie qui s’imposent à elle (43). Au contraire, il partage entièrement les propos qu’avait tenus le chef de l’État, le 9 janvier 2009, sur la déontologie des avocats : « Parce que les avocats sont auxiliaires de justice et qu’ils ont une déontologie forte, il ne faut pas craindre leur présence dès les premiers moments de la procédure » (44).

Mais avoir toute confiance dans l’attention portée par la profession d’avocat à l’effectivité de ses règles de déontologie ne signifie pas qu’il faille laisser sans réponse le problème réel soulevé par la possibilité que plusieurs personnes gardées à vue dans une même affaire aient le même conseil. L’amendement présenté entendait proposer une solution permettant de régler cette difficulté, qui ne relève pas principalement de la déontologie et de la régulation des conflits d’intérêts, mais bien davantage de la préservation de l’efficacité des enquêtes. Si votre rapporteur a retiré son amendement, il demeure convaincu que la loi doit apporter une réponse aux graves difficultés que ne manquerait pas de créer l’assistance de plusieurs personnes gardées à vue dans une même affaire par le même avocat.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL 91 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Cet amendement concerne le cas très précis où plusieurs coauteurs ou complices présumés sont placés en garde à vue et souhaitent recourir au même avocat. L’avocat, passant d’un client à l’autre, peut communiquer des informations de nature à fragiliser l’enquête. Voilà pourquoi je propose que l’officier de police judiciaire puisse saisir le procureur de la République, qui appréciera s’il y a conflit d’intérêts et, dans ce cas, saisira le bâtonnier afin qu’un autre avocat soit désigné.

M. le rapporteur. Je partage évidemment la préoccupation d’Éric Ciotti, mais je lui propose de retirer son amendement au profit de mon amendement CL 154, par lequel je propose d’introduire une seule phrase, très claire, selon laquelle « Un même avocat ne peut assister plusieurs personnes gardées à vue pour les mêmes faits ».

M. Claude Goasguen. L’amendement d’Éric Ciotti est inapplicable : que se passera-t-il si le bâtonnier refuse ? On ne prévoit pas de sanction. Mais l’amendement du rapporteur est encore pire !

Sur le plan des principes, toute personne a le droit de choisir son avocat. Et dans la pratique, imaginez quatre adolescents mis en garde à vue parce qu’ils ont attaqué un magasin de chaussures : il faudra, pour cause de « conflit d’intérêts », quatre avocats différents ! C’est absurde. Vous allez rendre les auditions impossibles ! Il ne s’agit pas ici du terrorisme ou de la grande criminalité...

M. Philippe Houillon. Il y a encore un troisième amendement, l’amendement CL 144 de M. Philippe Goujon, qui va dans le même sens. Mais on ne peut pas éluder le principe du libre choix de l’avocat. Par ailleurs, il n’appartient pas à l’OPJ ni au procureur de la République de juger de la contradiction d’intérêts ; les avocats sont soumis à des règles déontologiques, une juridiction est chargée d’apprécier les cas de non-respect. Il n’y a aucune raison de changer cette architecture.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Les principes existent, mais on ne peut pas nier que la présence de l’avocat modifie les choses. Un avocat intervenant pour plusieurs personnes mises en cause dans la même affaire va avoir connaissance, au fur et à mesure, des procès-verbaux des auditions : il pourra en tenir compte en préparant l’audition suivante. Cela doit-il nous conduire à adopter des dispositions à ce sujet ? Vous allez en décider.

M. Patrick Braouezec. Comme notre collègue Goasguen, je pense que dans certaines situations, l’amendement CL 91 sera inapplicable. Par ailleurs, c’est un problème de déontologie des avocats ; je ne vois pas comment nous pourrions légiférer là-dessus.

M. le président Jean-Luc Warsmann. J’aimerais que, d’ici à notre réunion en application de l’article 88, nous soyons éclairés sur la manière dont les choses se passent dans les autres pays européens.

M. le garde des Sceaux. Je rappelle que nous ne parlons pas d’un procès, mais d’une phase d’enquête. Le but de la garde à vue est d’avancer dans cette enquête, même s’il est tout à fait normal d’instituer des garanties pour la personne gardée à vue. J’imagine mal que l’hypothèse évoquée par M. Claude Goasguen se réalise car j’espère bien que des gamins qui ont volé une paire de baskets ne seront pas placés en garde à vue. Mais je propose que l’on approfondisse cette question d’ici à la fin des travaux de la Commission, afin de rechercher la meilleure solution.

M. Dominique Perben. On ne peut porter atteinte à une liberté que pour des motifs suffisants. Nous ne sommes pas ici dans le cas du terrorisme ou la criminalité organisée. On ne peut pas limiter la liberté de choix de l’avocat sur simple décision d’un OPJ ; adopter une telle disposition serait prendre le risque d’une annulation par le Conseil constitutionnel.

M. Jean-Paul Garraud. Des faits anodins peuvent conduire à des affaires très sensibles. Très souvent, de plus, plusieurs personnes placées en garde à vue pour une même affaire se rejettent les responsabilités. Si elles sont assistées par un seul et même avocat, outre le risque de conflit d’intérêts, il faudra attendre que l’audition de la première personne s’achève pour commencer celle de la deuxième, et ainsi de suite. La garde à vue se résumera à une série de procès-verbaux d’audition, sans qu’il soit possible de mener une véritable enquête aboutissant à la manifestation de la vérité.

Par ailleurs, comment juger d’un conflit d’intérêts alors que personne n’a encore parlé ? Devant un juge d’instruction ou à l’audience, où l’on dispose des auditions antérieures, l’avocat peut se déporter. C’est beaucoup plus délicat au début d’une affaire. Et s’il revient à l’avocat d’apprécier la situation au regard des règles déontologiques, dans quels délais l’Ordre pourra-t-il trancher en cas de difficulté ? Le risque est que l’on perde beaucoup de temps, alors que les premières heures de l’enquête sont déterminantes pour la manifestation de la vérité.

M. Philippe Goujon. Comme l’a souligné le garde des Sceaux, il s’agit d’une phase d’enquête. Il faut pouvoir mener les investigations dans les meilleures conditions ; l’avocat n’a pas à décider de la façon dont les choses vont se passer. Lorsque plusieurs dizaines de suspects sont placés en garde à vue, comment respecter les délais impartis s’il n’y a qu’un seul avocat ?

L’amendement de notre collègue Ciotti – de même que mon amendement CL 144, qui est proche – propose une solution souple permettant également, dans les cas simples, la présence d’un seul avocat. Contrairement à ce qu’a dit M. Perben, la décision ne revient pas à l’OPJ : celui-ci avertit le procureur de la République, lequel pourra saisir le bâtonnier pour qu’un autre avocat soit désigné.

M. Claude Goasguen. Que se passera-t-il si le bâtonnier refuse ?

M. Philippe Goujon. Les avocats doivent s’organiser pour permettre la mise en œuvre de la loi.

M. Dominique Raimbourg. À défaut d’y apporter une réponse satisfaisante, l’amendement de M. Ciotti pose correctement le problème, celui du conflit qui peut naître entre l’OPJ et l’avocat. Il ne faut d’ailleurs pas se focaliser sur les affaires graves. Le cas de la bagarre entre des personnes ivres à la sortie d’un bar, faisant un blessé sérieux, est parmi les plus difficiles à débrouiller. Il est inenvisageable qu’un seul avocat puisse assister l’ensemble des protagonistes.

Lorsqu’une instruction est ouverte, la régulation passe par le juge d’instruction, lequel, en cas de conflit, met fin à l’interrogatoire et procède à une nouvelle convocation ultérieurement. Dans le dispositif proposé, c’est impossible. Il est donc impératif de trouver un système de régulation du conflit entre l’OPJ et l’avocat. Le bâtonnier étant la seule instance à même de trancher, l’Ordre devra s’organiser pour répondre, dans le délai de la garde à vue, à une éventuelle contestation, faute de quoi nous allons au-devant de conflits très importants.

M. Jean-Michel Clément. Les avocats ont tous rencontré des situations où ils pouvaient très bien intervenir pour quatre personnes impliquées dans une même affaire, et d’autres cas où ils se rendaient rapidement compte que ce n’était pas possible. Cette loi ne pourra pas être appliquée sans les avocats ; il faut leur faire confiance pour s’organiser en conséquence.

Mme Brigitte Barèges. Il est un peu désagréable que l’on crée une suspicion à l’égard des membres d’un Ordre qui sont tenus par des règles déontologiques et par le serment qu’ils ont prêté. Les avocats sont capables de régler eux-mêmes les questions de conflits d’intérêts. Je sais bien qu’aujourd’hui l’on suspecte tout le monde, mais pourquoi ne pas leur faire confiance ?

Par ailleurs, il faut rappeler une question d’ordre pratique : si le barreau de Paris peut organiser des permanences assurant la disponibilité d’un certain nombre d’avocats pour les gardes à vue, les petits barreaux auront beaucoup de difficultés à envoyer autant d’avocats que de personnes gardées à vue. Rappelons que la garde à vue est une période assez courte, dans une procédure pénale qui laisse le temps de s’organiser ultérieurement.

M. le rapporteur. Il doit être clair que nous ne faisons aucun procès d’intention ; il s’agit, d’une certaine manière, de protéger les avocats eux-mêmes. Et surtout, il s’agit de répondre aux nécessités pratiques de l’enquête : le fait de devoir mener des auditions successives allongerait considérablement la procédure.

M. Alain Vidalies. On ne peut pas, pour des raisons d’ordre pratique, remettre en cause un principe – même si, monsieur le ministre, la question pratique doit être résolue.

Quant à l’amendement de M. Ciotti – évidemment impossible à voter dans sa rédaction actuelle puisque personne ne peut, au stade de la garde à vue, être appelé « coauteur » ou « complice » –, il pose un vrai problème. Aujourd’hui, l’avocat a déjà l’obligation de se déporter en cas de conflit d’intérêts ; dans le cas contraire, il commet une faute et encourt une sanction. On peut réfléchir à l’idée d’une information du bâtonnier, mais il ne faut surtout pas que cela devienne la pratique habituelle.

M. Claude Goasguen. En l’état, les amendements proposés ne me semblent pas acceptables. Mieux vaut fixer les règles de principe et nous mettre d’accord sur les exceptions éventuelles. Le principe est qu’il faut respecter la liberté pour la personne de choisir son avocat. Sans doute des questions se posent-elles dans un nombre – assez réduit – de cas ; examinons-les, mais ne nous exposons pas, en retenant une rédaction hâtive, à un risque d’inconstitutionnalité.

Mme George Pau-Langevin. Que l’OPJ puisse estimer que la présence du même avocat aux côtés de deux suspects nuit au bon déroulement de l’enquête revient à faire peser sur la profession le soupçon de collusion.

À mon avis, il n’appartient pas à l’OPJ d’apprécier l’existence d’un conflit d’intérêts, d’autant que l’enquête n’en est qu’à son début et que peu de déclarations ont été recueillies.

Alors que nous nous interrogions sur la possibilité de trouver un avocat de permanence pour les gardes à vue, voilà que nous en voulons plusieurs ! Cela ne me semble pas raisonnable.

M. Émile Blessig. Nous légiférons sous la contrainte du temps puisque le Conseil constitutionnel nous a donné jusqu’au 1er juillet prochain. Alors que ce texte constitue une novation fondamentale, nous raisonnons en appliquant à la garde à vue les principes de l’instruction, phase différente qui, en outre, n’est pas encadrée par les mêmes délais. Des dispositions que nous adopterons dépendra une bonne partie de l’efficacité de l’enquête et de l’établissement de la vérité.

L’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme garantit le droit à un procès équitable. Dans l’hypothèse où l’on constaterait le non-respect des règles en matière de conflit d’intérêts, l’avocat serait sanctionné, certes, mais on pourrait aussi conclure par la suite que la personne poursuivie n’a pas, pour sa défense, bénéficié de conditions équitables.

C’est à une véritable révolution que la profession d’avocat se trouve en réalité confrontée, tant en matière de conflits d’intérêts qu’en matière d’accès au droit sur l’ensemble du territoire. A été évoqué devant nous le problème de départements comme l’Ardèche, où les déplacements sont difficiles.

Bref, il me semble que l’ensemble de la profession doit réfléchir à l’optimisation de la mise en œuvre de ce texte, faute de quoi on risque d’assister à une concentration des gardes à vue dans certains lieux et à l’accentuation du problème de l’accès au droit dans d’autres parties du territoire.

M. Philippe Houillon. Tout le monde convient qu’une question se pose, mais elle relève de l’organisation – parce que la garde à vue est enfermée dans un calendrier restreint et qu’il faut, en cas de conflit d’intérêts, trouver une solution dans un délai bref. De grâce, ne répondons pas à une question d’organisation en portant atteinte à des principes ! Réfléchissons plutôt, avant la réunion au titre de l’article 88 du Règlement, à un nouvel amendement répondant à cette question d’organisation.

Mme Maryse Joissains-Masini. La personne poursuivie doit pouvoir choisir son avocat comme elle l’entend, c’est un principe fondamental. Nous mettons en danger cette liberté avec des dispositions qui n’ont aucune pertinence à ce stade de la procédure.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Pour conclure ces échanges, il me semble que, dans notre quasi-totalité, nous voyons une difficulté sans avoir encore trouvé le moyen de la résoudre. Je propose que les amendements soient retirés par leurs auteurs et qu’à l’occasion de notre réunion en application de l’article 88, le cas échéant en présence du ministre, nous traitions de ce sujet, parmi d’autres sujets de fond.

M. Éric Ciotti. Je me range volontiers à votre proposition, monsieur le président, et je retire mon amendement bien qu’il soit conciliable, de mon point de vue, avec la liberté du choix de l’avocat. Dans le dispositif que je propose, l’OPJ n’a pas le pouvoir de décision : il saisit le procureur qui, lui-même, saisit le bâtonnier.

L’amendement CL 91 est retiré.

M. le rapporteur. Je retire également l’amendement CL 154, en précisant toutefois que, dans sa décision du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a rappelé deux principes à valeur constitutionnelle : le respect des droits de la défense, bien entendu, mais aussi la prévention des atteintes à l’ordre public.

L’amendement CL 154 est retiré.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Acceptez-vous également de retirer l’amendement CL 144, monsieur Goujon ?

M. Philippe Goujon. Oui.

L’amendement CL 144 est retiré.

M. le président Jean-Luc Warsmann. La Commission des lois se rapprochera de la Commission des affaires européennes, pour disposer d’informations de droit comparé ; elle abordera également les aspects financiers de la question. Mais, je souhaite que le Gouvernement procède également à des études sur ces sujets.

La Commission est saisie des amendements CL 90 de M. Éric Ciotti, CL 15 de M. Dominique Raimbourg et CL 125 de M. Jean-Pierre Decool.

M. Éric Ciotti. L’amendement CL 90 vise à permettre à l’officier de police judiciaire de débuter l’audition de la personne gardée à vue dès le moment où l’avocat a été prévenu. En effet, l’absence de l’avocat ne doit pas constituer un obstacle au déroulement de l’enquête. Je suis toutefois prêt à me ranger à l’idée d’un délai.

M. le rapporteur. Un délai de carence paraît nécessaire. Je propose, dans mon amendement CL 214 à l’article 7, de le fixer à deux heures.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Dans le dispositif proposé par le rapporteur, il est possible de commencer l’audition une fois écoulé un délai de deux heures après que l’avocat a été prévenu. Si, pour des raisons liées à l’enquête, l’OPJ a besoin de commencer sans délai, il demande au procureur une dérogation.

M. Dominique Raimbourg. L’amendement CL 15 tend à préciser que l’OPJ doit porter à la connaissance de l’avocat les éléments sur la base desquels il entend conduire son interrogatoire.

M. Jean-Pierre Decool. L’amendement CL 125 a été cosigné par plus de cinquante collègues. Il tend à fixer un délai maximum de deux heures entre l’avis donné à l’avocat pour assister la personne gardée à vue et le début de l’audition. Passé ce délai raisonnable, l’audition pourrait débuter, même en l’absence d’avocat.

M. le rapporteur. La durée de deux heures me paraît la bonne, mais je suggère à mes collègues de retirer l’amendement CL 125 puisqu’il sera satisfait par mon amendement à l’article 7, plus complet.

M. le président Jean-Luc Warsmann. L’amendement du rapporteur présente l’avantage de prévoir l’hypothèse où il est nécessaire de procéder à l’audition immédiatement. La plupart des personnes que la Commission a entendues ont demandé que l’on fixe un délai mais ont souligné que, dans certaines situations, on a besoin d’aller très vite.

M. Éric Ciotti. Je retire mon amendement au profit de celui du rapporteur.

L’amendement CL 90 est retiré.

M. Alain Vidalies. Le délai de deux heures est sans doute pertinent pour 90 % du territoire, mais la loi concerne l’ensemble du territoire… Dans le département des Landes, il peut y avoir 170 kilomètres entre certaines gendarmeries et les villes où se trouvent les avocats. La question se pose également dans les départements de montagne.

M. le rapporteur. L’important est que le délai de carence existe. Une durée de deux heures paraît raisonnable. Si on accroît le délai, la suite de la procédure sera différée d’autant. Par ailleurs, un dispositif spécifique est prévu pour l’outre-mer : en l’absence d’avocat, le justiciable pourra bénéficier de l’assistance d’un tiers.

M. Noël Mamère. Notre rapporteur semble confondre interrogatoire et garde à vue. M. Vidalies l’a souligné : si on fixe un délai de deux heures, tout le monde ne sera pas égal devant la loi. Il serait plus conforme à l’esprit du texte d’indiquer simplement que l’audition ne peut commencer que lorsque l’avocat est présent.

M. Philippe Houillon. La solution proposée par notre rapporteur pourrait convenir s’il n’avait déposé un autre amendement à l’article 7, l’amendement CL 163, selon lequel le procureur de la République peut autoriser l’OPJ à ne pas attendre l’expiration du délai de deux heures…

M. Guy Geoffroy. La question du délai de carence me paraît avoir plus sa place à l’article 5 qu’à l’article 7. Il me semblerait plus cohérent avec l’organisation du texte d’adopter l’amendement CL 125, quitte à ce que notre rapporteur propose à l’article 7, lors de notre réunion en application de l’article 88 du Règlement, un amendement complémentaire.

M. le rapporteur. Ces dispositions me paraissent réellement avoir davantage leur place à l’article 7, lequel traite de tout ce qui entoure l’audition, qu’à l’article 5, où il est question du choix de l’avocat. J’invite donc mes collègues à retirer leur amendement CL 125. À défaut, avis défavorable, comme à l’amendement CL 15 de Dominique Raimbourg.

La Commission rejette successivement les amendements CL 15 et CL 125.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Les amendements CL 154 et CL 144 ont été retirés.

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Article 6

(art. 63-4 du code de procédure pénale)


Modalités et durée de l’entretien confidentiel avec un avocat

L’article 6 réaffirme le droit de la personne gardée à vue à demander, dès le début de la mesure, à s’entretenir confidentiellement avec un avocat, pendant une durée de trente minutes.

Alors que ce droit était, jusqu’ici, le seul aspect du droit de la personne gardée à vue à une assistance, il constitue dans le projet de loi le premier des trois volets d’un droit renforcé de la personne gardée à vue à être assisté par un avocat. L’article 6 reprend les termes de l’actuel article 63-4 du code de procédure pénale, sous réserve de modifications rédactionnelles.

Les deux premiers alinéas de l’article 63-4, dans la rédaction que lui donne l’article 6, définissent les modalités et la durée de l’entretien avec l’avocat : « L’avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien » ; « La durée de l’entretien ne peut excéder trente minutes ».

Le troisième alinéa, qui reprend l’actuel sixième alinéa de l’article 63-4, prévoit le droit à demander un nouvel entretien confidentiel de trente minutes en cas de prolongation de la mesure : « Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut, à sa demande, s’entretenir à nouveau avec un avocat dès le début de la prolongation ». Ce nouvel entretien doit se dérouler dans les mêmes conditions de confidentialité et a la même durée maximale de trente minutes.

La Commission a adopté deux amendements identiques présentés par le Gouvernement et par M. Michel Vaxès, tendant à supprimer le dernier alinéa de l’actuel article 63-4 du code de procédure pénale, que l’article 6 du projet de loi initial ne modifiait pas. En effet, au moment du dépôt du projet de loi, ce dernier alinéa, relatif au report de l’intervention de l’avocat dans les régimes relevant de la criminalité organisée, n’avait pas été déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 2010. Mais les décisions de la Cour de cassation du 19 octobre 2010 ont déclaré contraires à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme les règles prévues en matière de report de l’avocat dans le cadre des régimes dérogatoires, rendant nécessaire la suppression du dernier alinéa de l’article 63-4 du code de procédure pénale (45).

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CL 2 du Gouvernement et CL 62 de M. Michel Vaxès.

M. le garde des Sceaux. Cet amendement CL 2 est lié à l’amendement CL 4 à l’article 12. Il s’agit des cas de criminalité organisée, de trafic de stupéfiants ou de terrorisme. Les règles relatives à l’assistance d’un avocat dès le début de la garde à vue sauf décision d’un magistrat motivée par des raisons impérieuses ont leur place à l’article 706-88 du code de procédure pénale, non à l’article 63-4 concernant les gardes à vue de droit commun. Elles tirent les conséquences de trois arrêts rendus le 19 octobre 2010 par la Cour de cassation.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte les deux amendements identiques.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL 159 du rapporteur.

Elle est saisie des amendements identiques CL 37 de M. Noël Mamère et CL 63 de M. Michel Vaxès.

M. Noël Mamère. Il s’agit de permettre à l’avocat de s’entretenir un peu plus longuement – une heure au lieu de trente minutes – avec la personne gardée à vue : cela nous paraît mieux correspondre aux exigences de la défense – et c’est conforme aux souhaits de la Cour de Strasbourg.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour des raisons pratiques : il y aura déjà un délai de carence de deux heures, auquel va s’ajouter la consultation des procès-verbaux ; il ne faut pas allonger à l’excès les délais, d’autant qu’une durée d’une demi-heure me paraît très raisonnable.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL 160 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL 134 de M. Jean-Paul Garraud.

M. Jean-Paul Garraud. À la demande de l’OPJ et lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient, le procureur de la République doit pouvoir différer la présence de l’avocat ou limiter la consultation des procès-verbaux des auditions. De même, en cas de circonstances exceptionnelles, le procureur de la République doit pouvoir, sur demande motivée de l’OPJ, déroger à la règle d’un entretien de trente minutes entre la personne gardée à vue et son avocat.

M. le rapporteur. Cet amendement rompt l’équilibre du projet. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 6 modifié.

Article 7

(art. 63-4-1 à 63-4-4 [nouveaux] du code de procédure pénale)


Possibilité pour l’avocat de consulter certains documents de la procédure
et d’assister aux auditions de la personne placée en garde à vue 

Le présent article a pour objet de renforcer le droit de la personne gardée à vue à être assistée par un avocat, d’une part, en permettant à cet avocat de consulter certains documents de la procédure, et, d’autre part, en prévoyant que l’avocat peut assister aux auditions de la personne gardée à vue. Dans un souci de conciliation de l’effectivité de l’assistance par l’avocat avec la préservation de l’efficacité des enquêtes, il prévoit que la première audition de la personne gardée à vue ne pourra débuter avant l’expiration d’un « délai de carence » de deux heures suivant l’avis adressé à l’avocat. Il organise toutefois des possibilités de dérogation à ces droits nouveaux. Il définit enfin les prérogatives et obligations de l’avocat présent au cours de la garde à vue.

Le droit de la personne gardée à vue à être assistée par un avocat, qui était jusqu’ici limité au droit à demander à s’entretenir confidentiellement avec un avocat pour une durée ne pouvant excéder trente minutes, est complété par deux nouveaux aspects.

Premièrement, aux termes du premier alinéa du nouvel article 63-4-1 du code de procédure pénale, l’avocat choisi par la personne gardée à vue ou désigné par le bâtonnier pourra, à sa demande, consulter certains documents de la procédure. Les documents auxquels l’avocat pourra avoir accès seront, d’une part, « le procès-verbal établi en application de l’article 63-1 constatant la notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés », et, d’autre part, « les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste ». La Commission a adopté un amendement de M. Philippe Goujon précisant que l’avocat « ne peut en revanche en demander ou prendre une quelconque copie ».

Deuxièmement, l’avocat de la personne gardée à vue pourra désormais assister aux auditions de celle-ci. Le premier alinéa du nouvel article 63-4-2 du code de procédure pénale, dans le texte initial du projet de loi, disposait que « L’avocat peut assister aux auditions de la personne gardée à vue ». Afin de mettre davantage en évidence le fait que la présence de l’avocat aux auditions est un droit de la personne gardée à vue, qu’elle est libre de demander ou de ne pas demander à exercer, la Commission a adopté un amendement de votre rapporteur modifiant la formulation du projet de loi initial. Le texte adopté par la Commission prévoit ainsi que « La personne gardée à vue peut demander que l’avocat assiste à ses auditions ».

Le texte initial du projet de loi ne prévoyait expressément ni que les auditions peuvent débuter sans attendre l’arrivée de l’avocat, ni qu’elles ne peuvent pas débuter. Cependant, un silence de la loi sur cette question essentielle serait inévitablement source d’insécurité juridique.

Afin de tenir compte des contraintes géographiques et humaines liées aux effectifs de certains barreaux (46) et de concilier l’effectivité du droit à assistance avec la nécessité de préserver l’efficacité des enquêtes, la Commission a adopté un amendement de votre rapporteur instituant un « délai de carence » de deux heures, avant l’expiration duquel la première audition de la personne gardée à vue ne pourra pas débuter.

S’agissant du droit actuel de la personne gardée à vue de s’entretenir avec un avocat, la Cour de cassation juge qu’« aucune disposition légale ou conventionnelle n’impose à l’officier de police judiciaire, qui a tenté vainement de joindre, dès le début de la mesure de garde à vue, le bâtonnier de l’Ordre des avocats ou son délégataire, de différer l’audition de la personne qui fait l’objet de cette mesure » (47). Si elle était appliquée au droit nouveau de la personne gardée à vue à ce que l’avocat assiste à ses auditions, cette jurisprudence pourrait aboutir à une situation d’insécurité juridique liée à la valeur probatoire des déclarations recueillies sans attendre l’arrivée de l’avocat, dès lors qu’un temps raisonnable ne lui aurait pas été laissé pour pouvoir se rendre sur le lieu où se déroule la garde à vue. Toutefois, il ne serait pas davantage envisageable de prévoir qu’aucune audition ne peut avoir lieu avant l’arrivée de l’avocat. Une telle disposition pourrait encourager les manœuvres dilatoires, paralyser les enquêtes et aboutir à un allongement inutile de la durée des gardes à vue.

L’amendement adopté par la Commission prévoit donc que si la personne gardée à vue demande que l’avocat assiste à ses auditions, « la première audition ne peut être débutée avant l’expiration d’un délai de deux heures suivant l’avis adressé, dans les conditions prévues à l’article 63-3-1, à l’avocat choisi ou au bâtonnier, de la demande formulée par la personne gardée à vue d’être assistée par un avocat ». Si l’avocat ne s’est pas présenté à l’issue de ce délai, l’officier de police judiciaire pourra décider de débuter l’audition. La Commission a complété ce dispositif par un autre amendement prévoyant la possibilité pour l’OPJ d’obtenir du procureur de la République l’autorisation de débuter les auditions sans attendre l’expiration de ce délai, si des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête rendent nécessaire une audition immédiate.

Dans le cas où l’avocat se présenterait après l’expiration du délai de deux heures alors qu’une audition est en cours, celle-ci sera interrompue, si la personne gardée à vue le demande, pour permettre l’entretien confidentiel de trente minutes avec l’avocat. Si la personne gardée à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci pourra assister à l’audition ou confrontation en cours dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire.

Plusieurs policiers et gendarmes entendus par votre rapporteur lui ont indiqué que, dans la majorité des affaires, ce délai de carence ne serait pas préjudiciable à l’efficacité des enquêtes. En effet, ces deux heures pourront être utilisées pour l’accomplissement des premières formalités liées au placement en garde à vue et pour l’exercice des autres droits de la personne gardée à vue que sont l’avis à la famille et à l’employeur et l’examen médical.

Le projet de loi prévoit la possibilité pour le procureur de la République, à la demande de l’officier de police judiciaire, de différer de douze heures la consultation des documents de la procédure et la présence de l’avocat aux auditions. Les conditions de la mise en œuvre de cette dérogation au droit de la personne gardée à vue à bénéficier des deux nouveaux volets du droit à assistance sont définies par le deuxième alinéa du nouvel article 63-4-2. Aux termes de cet alinéa, la compétence pour décider de cette dérogation appartiendra au procureur de la République, à la demande de l’officier de police judiciaire. La décision du procureur de la République devra être « écrite et motivée ».

La Commission a adopté plusieurs amendements tendant à améliorer et compléter ces possibilités de dérogations :

—  Tout d’abord, ont été adoptés deux amendements identiques de votre rapporteur et de M. Philippe Houillon tendant à supprimer le deuxième alinéa de l’article 63-4-1, qui prévoyait – au sujet des procès-verbaux que l’avocat aura désormais le droit de consulter – que « la consultation de ces pièces peut être limitée dans les cas et conditions prévues par l’article 63-4-2 ». Cet alinéa était inutile, puisqu’il ne faisait qu’annoncer la possibilité que la consultation des procès-verbaux d’audition soit limitée, alors que les motifs pour lesquels et les conditions dans lesquelles cette consultation peut être limitée sont définies dans l’article suivant (article 63-4-2 du code de procédure pénale).

—  Ensuite, un amendement de votre rapporteur a précisé les motifs qui pourront fonder les dérogations au droit à l’assistance d’un avocat : la décision devra être justifiée par des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ». Elle devra se fonder sur l’un des deux objectifs suivants : soit « permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves », soit « prévenir une atteinte imminente aux personnes ».

Cette rédaction reprend la terminologie utilisée par la Cour européenne des droits de l’Homme qui, pour qualifier les motifs pouvant autoriser une exception au principe selon lequel une personne gardée à vue doit être assistée par un avocat, emploie l’expression « raisons impérieuses » : « il faut, en règle générale, que l’accès à un avocat soit consenti dès le premier interrogatoire d’un suspect par la police, sauf à démontrer, à la lumière des circonstances particulières de l’espèce, qu’il existe des raisons impérieuses de restreindre ce droit » (arrêt Salduz).

—  En troisième lieu, pour tenir compte de l’introduction par la Commission d’un délai de carence de deux heures, avant l’expiration duquel la première audition de la personne gardée à vue ne pourra débuter, a été adopté un amendement de votre rapporteur permettant au procureur de la République, pour les mêmes raisons et dans les mêmes conditions que celles prévues par le projet de loi pour permettre le report de l’intervention de l’avocat ou de la consultation des procès-verbaux, d’autoriser l’OPJ à débuter les auditions sans attendre l’expiration du délai de deux heures. Cette possibilité trouvera son utilité dans les cas d’urgence tels que l’enlèvement d’une personne, où il peut être nécessaire de débuter des auditions sans aucune perte de temps, dans le but de retrouver sans délai la personne enlevée.

—  Enfin, la Commission a adopté un amendement du Gouvernement prévoyant la possibilité d’un deuxième report, jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue, de la présence de l’avocat lors des auditions. Ce deuxième report ne sera possible que pour les infractions punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement et devra être décidé par le juge des libertés et de la détention. Le Gouvernement a indiqué, à l’appui de son amendement, que cette disposition pourrait être utile dans des situations exceptionnelles telles qu’une garde à vue pour des faits d’enlèvement et de séquestration d’un mineur, où il peut être nécessaire de permettre aux enquêteurs d’agir avec la plus grande diligence durant l’ensemble des premières vingt-quatre heures.

Deux articles nouveaux, les articles 63-4-3 et 63-4-4, définissent les prérogatives et obligations de l’avocat assistant une personne placée en garde à vue.

●  S’agissant des prérogatives des avocats au cours des auditions auxquelles ils assistent, le nouvel article 63-4-3 prévoyait, dans le texte initial du projet de loi, qu’« À l’issue de chacun des entretiens prévus à l’article 63-4 et de chacune des auditions auxquelles il a assisté en application du 63-4-2, l’avocat peut présenter des observations écrites. Celles-ci sont alors jointes à la procédure ». Cet article reprend le contenu de l’actuel quatrième alinéa de l’article 63-4, en étendant la faculté ouverte à l’avocat de présenter des observations écrites jointes à la procédure, actuellement prévue uniquement à la suite de l’entretien confidentiel de trente minutes, à la suite des auditions auxquelles l’avocat aura assisté.

Dans sa rédaction initiale, cet article excluait donc toute intervention orale de l’avocat au cours des auditions. Les gendarmes et policiers entendus par votre rapporteur lors de ses déplacements, les syndicats de policiers entendus lors des auditions ainsi que les directeurs généraux de la gendarmerie nationale et de la police nationale se sont d’ailleurs prononcés en faveur de cette interprétation, ou ont, pour certains, estimé qu’une clarification du texte sur ce point serait nécessaire.

Toutefois, on peut s’interroger, comme l’ont fait notamment les représentants des avocats et des syndicats de magistrats entendus par votre rapporteur, sur la compatibilité d’un tel rôle de l’avocat, limité à des observations écrites présentées en fin d’audition sans possibilité de poser de question au cours de celle-ci, avec les exigences de la Cour européenne des droits de l’Homme. En effet, depuis l’arrêt Dayanan, la Cour de Strasbourg a répété dans plusieurs de ses arrêts que la personne mise en cause doit pouvoir bénéficier de toute la « vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil », à savoir « la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention [qui] sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer ».

Dès lors, la conception du rôle de l’avocat retenue par le projet de loi, celle d’un « avocat taisant » pendant toute la durée des auditions de garde à vue, n’est ni compatible avec la jurisprudence européenne, ni conforme à la nécessité de renforcer le caractère contradictoire de notre procédure pénale et particulièrement de la phase de la garde à vue. C’est la raison pour laquelle la Commission a adopté un amendement de votre rapporteur prévoyant la possibilité pour l’avocat, à la fin de l’audition, de poser des questions, sur le modèle de ce que prévoit l’actuel article 120 du code de procédure pénale à l’instruction. Toutefois, l’officier ou l’agent de police judiciaire pourra « s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou à la dignité de la personne ». Mention de la question refusée sera alors portée au procès-verbal.

●  S’agissant des obligations imposées aux avocats, le nouvel article 63-4-4 dispose que « Sans préjudice de l’exercice des droits de la défense, l’avocat ne peut faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue ni de son entretien avec la personne qu’il assiste ni des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions ».

Cet article reprend le contenu de l’actuel cinquième alinéa de l’article 63-4, aux termes duquel « L’avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue », sous réserve de deux modifications. Premièrement, l’interdiction faite à l’avocat de communiquer des éléments dont il a eu connaissance lors de son intervention auprès de son client placé en garde à vue est étendue aux informations dont il a eu connaissance « en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions ». Deuxièmement, cette interdiction pour l’avocat de faire état d’informations dont il a eu connaissance au cours d’une garde à vue est assortie d’une réserve, puisque l’interdiction est édictée « sans préjudice de l’exercice des droits de la défense ».

Cette disposition constitue une déclinaison, pour la garde à vue, de la règle édictée par l’article 11 du code de procédure pénale, aux termes duquel « Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète ». La violation de cette règle par un avocat peut faire l’objet de deux types de sanctions, pénales et disciplinaires.

Sur le plan pénal, un avocat qui dévoilerait des informations dont il aurait eu connaissance dans le cadre d’une garde à vue se rendrait coupable, selon les cas, soit de violation du secret professionnel, punie par l’article 226-13 du code pénal d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende, soit du délit d’entrave à l’exercice de la justice prévu par l’article 434-7-2 du code pénal en cas de révélation volontaire d’informations issues d’une enquête « à des personnes qu’[il] sait susceptibles d’être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est réalisée dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité », délit puni de deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende, ces peines étant portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende si l’enquête « concerne un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement relevant des dispositions de l’article 706-73 du code de procédure pénale ». La peine complémentaire d’« interdiction d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise » est prévue pour la première infraction (article 226-31 du code pénal), mais pas pour la seconde, pourtant plus grave (48).

Sur le plan disciplinaire, l’article 5 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat dispose que « l’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours ». La violation de cette règle peut entraîner des poursuites disciplinaires, engagées soit par le bâtonnier, soit par le procureur général. Ces poursuites, soumises au conseil de discipline des avocats (institué depuis 2005 au niveau de chaque cour d’appel) et, en cas d’appel, à la cour d’appel, peuvent déboucher sur le prononcé de peines disciplinaires allant de l’avertissement à l’interdiction d’exercer pendant une durée de trois ans au plus voire à la radiation.

Le rôle accru des avocats au cours de la garde à vue impliquera qu’ils exercent leurs fonctions avec un sens accru des responsabilités. La faculté que leur ouvre le projet de loi de poser des questions à l’issue des auditions, à la suite de l’adoption par la Commission d’un amendement en ce sens, ne devra pas être détournée par des prises de parole qui auraient pour effet ou pour objet de fragiliser le rôle de direction des auditions de l’officier de police judiciaire. L’accès à des informations couvertes par le secret de l’enquête, via la consultation des procès-verbaux d’audition et la présence aux auditions, ne devra pas aboutir à une perte d’efficacité des enquêtes, notamment dans les cas où plusieurs personnes gardées à vue auraient le même défenseur (49). En conséquence, la mise en œuvre des sanctions pénales et disciplinaires prévues par les textes devra, pour être réellement dissuasive, être effective : des poursuites devront être engagées et des sanctions prononcées aussi souvent qu’un avocat aura violé les règles déontologiques ou pénales encadrant son intervention en garde à vue.

Votre rapporteur avait proposé trois amendements tendant à favoriser la mise en œuvre de ce principe de responsabilité accrue des avocats, en contrepartie de leur rôle accru pendant la garde à vue. Le premier amendement prévoyait la possibilité pour l’OPJ de demander le remplacement d’un avocat qui perturberait gravement le déroulement de l’audition. Le deuxième amendement prévoyait que l’OPJ informe le procureur général près la Cour d’appel de toute violation par l’avocat de l’interdiction de divulguer des informations dont il a eu connaissance au cours de la garde à vue, ainsi que de tout comportement de l’avocat perturbant gravement le déroulement d’une audition à laquelle il assiste. Cette information systématique avait pour but de permettre au procureur général d’exercer pleinement ses prérogatives de poursuite disciplinaire, ainsi que, lorsque les faits l’auraient justifié, de donner instruction au procureur de la République compétent d’engager d’éventuelles poursuites pénales. Le dernier amendement prévoyait de compléter la liste des peines complémentaires encourues pour l’infraction prévue par l’article 434-7-2 du code pénal par la peine complémentaire d’interdiction d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise (50).

La discussion de ces amendements au cours de la réunion de la Commission a montré la volonté partagée par les membres de la commission des Lois de rechercher des solutions appropriées pour répondre aux difficultés nouvelles soulevées par le rôle accru des avocats au cours de la garde à vue. Toutefois, les solutions proposées par ses amendements semblant devoir être approfondies et améliorées, votre rapporteur les a retirés, en vue de rechercher de nouvelles rédactions pour la discussion du projet de loi en séance publique.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 38 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, nous proposons que l’avocat ait accès à l’ensemble du dossier de la procédure, et non pas seulement à ce que le procureur de la République veut bien lui montrer.

M. le rapporteur. Avis défavorable : il n’est pas question que l’avocat puisse avoir accès à l’ensemble des éléments du dossier, alors que l’on se trouve encore dans une phase policière.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement de précision CL 161 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l’amendement CL 39 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. L’avocat doit également avoir accès au certificat médical.

M. le rapporteur. L’appréciation de la compatibilité de l’état de santé avec le maintien en garde à vue relève du seul médecin. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL 113 de M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon. Il s’agit de tirer les conséquences des arrêts de la Cour de cassation, indiquant qu’il faut permettre à la personne en garde à vue d’« organiser sa défense » et à l’avocat de préparer avec elle les interrogatoires. Dans ce but, je propose qu’il ait accès à toutes les pièces du dossier, à tout moment pendant la garde à vue.

M. le rapporteur. Comme pour l’amendement CL 38, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL 16 de M. Dominique Raimbourg.

M. Dominique Raimbourg. Il faut au moins que l’avocat connaisse les documents sur la base desquels l’interrogatoire va se faire – mais à ce stade, le dossier peut très bien ne pas être constitué.

M. le rapporteur. Pour les mêmes raisons, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL 143 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Il s’agit de préciser que l’avocat ne peut demander ou faire une copie des procès-verbaux qu’il consulte.

M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL 141 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, rejette l’amendement CL 64 de M. Michel Vaxès.

Elle est saisie des amendements identiques CL 162 du rapporteur et CL 114 de M. Philippe Houillon.

M. le rapporteur. Il convient de supprimer le troisième alinéa car il est inutile.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement CL 214 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit du délai de carence – de deux heures – dont nous avons parlé.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CL 115 de M. Philippe Houillon, CL 40 de M. Noël Mamère, CL 142 de M. Philippe Goujon, CL 41 et CL 42 de M. Noël Mamère, CL 135 de M. Jean-Paul Garraud et CL 65 de M. Michel Vaxès n’ont plus d’objet.

La Commission examine l’amendement CL 138 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Mon souhait d’instaurer un délai de carence de deux heures est satisfait, mais je demande en outre que ce délai ne s’impute pas sur la durée globale de la garde à vue.

M. le rapporteur. Vous demandez donc que la garde à vue dure vingt-six heures… Avis défavorable.

M. Dominique Raimbourg. Je suis évidemment contre cet amendement, mais je voudrais faire deux observations. D’une part, il faut que les enregistrements soient généralisés. D’autre part, il ne faut pas rester dans le flou quant à l’intervention des avocats, dont la culture est différente de celle des OPJ. Si l’on veut éviter les conflits, il faut préciser le rôle de l’avocat pendant l’audition.

M. le rapporteur. Sur le deuxième point, nous sommes d’accord, mais nous en reparlerons plus loin.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Le rapporteur proposera tout à l’heure que l’OPJ déroule ses questions et qu’à la fin de l’audition, l’avocat puisse intervenir.

M. le rapporteur. Quant à la question des enregistrements, que l’on peut étendre à celle de l’introduction de la visioconférence, elle ne peut pas être traitée par des amendements d’origine parlementaire : elle relève du Gouvernement.

M. Philippe Goujon. L’enregistrement peut être une très bonne chose, mais à condition qu’il libère les policiers d’obligations procédurales écrites.

Je retire mon amendement.

M. le garde des Sceaux. Je suis tout à fait favorable à l’enregistrement et à la visioconférence, mais il faut en effet diminuer parallèlement les écrits, faute de quoi on va provoquer la paralysie complète. Je suis tout prêt à lancer avec vous une réflexion sur ce sujet.

Mme Delphine Batho. Nous avions déposé un amendement tendant à ce qu’il y ait, d’une part, un seul procès-verbal des auditions, et d’autre part un enregistrement de l’ensemble des interrogatoires. Il a été jugé irrecevable au regard de l’article 40, mais le Gouvernement pourra le reprendre.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL 139 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. S’agissant d’une phase d’enquête, dans laquelle l’OPJ interroge le suspect, l’audition ne doit pas donner lieu à un débat. Je propose que l’avocat puisse poser des questions à l’issue de l’audition dans la limite de 15 minutes.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Vous écrivez dans la deuxième phrase que l’OPJ peut « s’opposer » aux questions, ce que je ne comprends pas très bien… L’avocat pose ses questions ; l’OPJ peut les laisser sans réponse.

M. le rapporteur. Cet amendement pourrait être retiré car le problème sera réglé plus loin.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL 140 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Cet amendement tend à préciser que l’officier ou l’agent de police judiciaire exerce la police de l’audition.

M. le rapporteur. Nous allons prévoir un encadrement plus large.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements identiques CL 116 de M. Philippe Houillon et CL 128 de M. Jean-Pierre Decool.

M. le rapporteur. Avis défavorable, le texte étant équilibré.

M. Noël Mamère. Ces amendements reviennent exactement à ce que j’ai proposé tout à l’heure. Il me semble normal que l’avocat ait le droit de consulter l’ensemble du dossier.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine l’amendement CL 14 de M. Dominique Raimbourg.

M. Dominique Raimbourg. Nous proposons que ce soit le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, et non le procureur de la République lui-même, qui puisse autoriser l’officier de police judiciaire à différer la présence de l’avocat.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. Philippe Houillon. Si cet amendement n’est pas adopté, j’imagine que l’amendement CL 163 du rapporteur, qui le suit immédiatement, va l’être : le procureur de la République pourra donner à l’OPJ l’autorisation de ne pas respecter les droits de la défense ! Comment voter cela ? C’est totalement contraire aux principes du procès équitable – ainsi qu’à ce qui a été voté tout à l’heure. Le parquet est la partie poursuivante.

M. le garde des Sceaux. C’est le langage de Strasbourg !

M. Philippe Houillon. La jurisprudence européenne s’impose à nous !

M. le garde des Sceaux. Avis défavorable, comme je l’étais à l’amendement que la Commission a voté tout à l’heure.

M. Alain Vidalies. Pourquoi ne voulez-vous pas que la décision soit prise par le JLD ? Pourquoi prendre le risque de voir censurer des dispositions aussi déséquilibrées ?

M. le garde des Sceaux. Nous nous sommes déterminés sur la base de considérations pratiques. Nous n’avons pas suffisamment de juges des libertés et de la détention. Nous devons répondre à une exigence d’efficacité ; à cet égard, j’aimerais que la loi ne soit pas applicable seulement dans les grandes villes… Certaines dispositions votées ce matin seront difficiles à appliquer partout.

M. le président Jean-Luc Warsmann. À quelles dispositions faites-vous allusion ?

M. le garde des Sceaux. S’il y a 23 000 avocats à Paris, dans certains départements il y en a très peu, et on aura beaucoup de mal à en trouver qui puissent arriver dans les deux heures.

Et s’il fallait en outre faire appel aux JLD, comment ferait-on ? On ne va pas organiser des permanences de nuit des JLD… Le procureur de la République reste un magistrat, et il est le protecteur des libertés individuelles.

Dans les pays étrangers, c’est souvent la police qui reporte l’avocat : c’est le cas en Angleterre et au Pays de Galles, ou encore en Belgique.

M. Noël Mamère. Sans doute aurait-il fallu changer le statut du parquet avant de faire cette réforme car la situation va être ingérable…

Je m’étonne, monsieur le ministre, de vous entendre nous expliquer que l’on va porter atteinte à certains principes, et notamment à celui de l’équité, pour cause d’absence de moyens ! En tant que ministre, votre rôle est aussi de faire en sorte que ces moyens existent…

Vous nous dites par ailleurs que le procureur est un magistrat, mais ce n’est pas l’avis de la Cour européenne des droits de l’Homme ; par conséquent, nous allons être de manière récurrente traduits devant la juridiction européenne, et condamnés. Sur le plan des principes, on ne peut pas accepter que le procureur, qui dépend du garde des Sceaux, décide de la présence de l’avocat ; il faut que la décision relève d’un magistrat du siège, le JLD.

Concernant l’argument selon lequel la loi ne serait pas applicable partout de la même manière, dois-je, monsieur le ministre, vous rappeler l’enquête de l’Union syndicale des magistrats ? Qu’un juge d’instruction de Senlis ait attendu un greffier pendant six mois en dit long sur la justice dans notre pays.

M. Claude Goasguen. Monsieur le ministre, de deux choses l’une. Ou bien nous sommes en train de discuter d’une loi de finances rectificative – et c’est plutôt la portée de votre propos, puisque vous nous parlez de problèmes de moyens –, ou bien nous débattons de principes de droit pénal, et il vous reviendra de faire en sorte que la loi soit appliquée. Il est inutile de la voter si vous nous dites qu’elle ne pourra pas l’être !

Certes le procureur est un magistrat, mais il est partie prenante au procès. Il ne saurait y avoir un tel déséquilibre entre celui qui requiert et celui qui défend : permettre à la partie qui fait le réquisitoire de dire que l’avocat ne doit pas être là n’est pas sérieux. Évitons de subir la censure du Conseil constitutionnel !

M. le garde des Sceaux. Le Conseil constitutionnel, dans le considérant 26 de la décision du 30 juillet 2010, consacre le rôle du procureur de la République dans la garde à vue.

M. Claude Goasguen. Dans l’ancien système…

M. Jean-Paul Garraud. Encore une fois, il s’agit de la phase policière. Le procureur de la République dirige l’action de la police judiciaire ; il est donc naturel qu’il ait un certain nombre de pouvoirs. Le JLD a un rôle différent.

Par ailleurs, le parquet est indivisible ; lorsqu’on parle du procureur de la République, on vise donc aussi son équipe. Vouloir remplacer le procureur de la République et son équipe, qui prennent des décisions essentielles, par un JLD est une très grande erreur : il n’y a pas de service de JLD, on ne peut pas remplacer un JLD par un autre. En outre, le JLD est un juge, qui peut mettre en délibéré : comme il ne connaît pas le dossier, il faudra le lui exposer, et il ne prendra pas de décision immédiate. Avec un tel système, il n’y aura plus que des mis en examen ; on retardera au maximum la garde à vue et on avancera de plus en plus la mise en examen…

M. Dominique Raimbourg. Quoi qu’on pense de la jurisprudence de la CEDH, elle existe. Veut-on fragiliser toutes les enquêtes en cours, ou trouver une solution qui évitera que les personnes concernées se tournent vers la Cour européenne ? Je sais bien que nous manquons de moyens, mais nous pouvons, par exemple, nous donner trois ans pour mettre en place le système.

M. Philippe Houillon. Si nous en sommes là, c’est parce que voilà des années que l’on débat de l’organisation de la garde à vue sans régler le problème.

L’argument du ministre est qu’il n’y a pas assez de JLD ; cela signifie a contrario que si les JLD étaient assez nombreux, ce sont eux qui devraient intervenir : cela valide, au niveau des principes, tout ce que nous avons dit et ce qui a été voté tout à l’heure.

La Commission rejette l’amendement CL 14.

Elle en vient à l’amendement CL 163 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je l’ai déjà présenté.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine les amendements CL 89 de M. Éric Ciotti et CL 133 de M. Jean-Paul Garraud.

M. Éric Ciotti. Mon amendement est défendu.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La possibilité de différer jusqu’à la vingt-quatrième heure l’intervention de l’avocat est prévue par l’amendement à venir CL 3 du Gouvernement, qui encadre ce report par la double condition que la personne soit placée en garde à vue pour un crime ou délit puni de cinq ans de prison ou plus et que la décision soit prise par le JLD, sur requête du procureur.

M. Jean-Paul Garraud. Nous proposons dans ces amendements que cette possibilité de renouveler une fois le report de douze heures appartienne au procureur de la République.

M. Dominique Raimbourg. Le procureur est la partie poursuivante… S’agissant de l’amendement du Gouvernement, je constate que l’on veut faire appel aux JLD, dont on nous a pourtant dit tout à l’heure qu’ils étaient peu nombreux.

Sur le fond, ces amendements remettent en cause le droit à être assisté pendant la garde à vue.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Le Gouvernement propose que, dès lors qu’il y a une atteinte importante à la règle de présence de l’avocat, on fasse appel au JLD. Comme le parquet assure des permanences, le procureur pourra, dès le début de la garde à vue, constituer le dossier qu’il remettra au JLD pour que celui-ci statue. Les amendements de nos collègues, en revanche, me paraissent vraiment difficiles à retenir…

M. Jean-Paul Garraud. Je maintiens le mien. Le parquet est au centre du dispositif. Quant au JLD, la commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau avait proposé sa suppression. Faire appel à un juge déconnecté du dossier présente un danger considérable. Dans la grande réforme de la procédure pénale qui va arriver, on prévoit d’ailleurs de supprimer le JLD.

Mme George Pau-Langevin. Même si quelqu’un a commis un acte grave, il a le droit d’être assisté en garde à vue par un avocat. On nous propose ici de vider le principe de tout contenu.

M. Claude Goasguen. Nous nous apprêtons par cette loi à modifier une grande partie de notre procédure pénale. Il faut en tirer les conséquences ! Le JLD ne doit pas être regardé tel qu’il est actuellement, le procès change de nature : l’arrivée de l’avocat dès la première heure signifie l’intégration de cette procédure au procès. Cela change tout ! Ou bien on s’engage résolument dans la réforme, ou bien on se retrouve pris dans une contradiction.

M. Alain Vidalies. Je partage largement ce que vient de dire Claude Goasguen.

L’alinéa 5 de cet article dit que « en considération des circonstances particulières de l’enquête », en particulier « pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves », des dérogations sont possibles. Il précise : « L’autorisation du procureur de la République est écrite et motivée ». En réalité, en fait de motivation, on se contentera d’évoquer l’existence de circonstances particulières. Que personne ne pense qu’il y aura une explication : il en allait exactement de même pour les décisions des juges d’instruction. Il n’y aura donc aucun contrôle possible sur les raisons justifiant la décision prise par le parquet.

M. Guy Geoffroy. Notre collègue Garraud me paraît faire une utilisation erronée des conclusions de la commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau. Celle-ci avait exprimé le souhait de la collégialité, ce qui ne voulait pas dire qu’elle voulait jeter le JLD aux orties.

Par ailleurs, nous ne savons pas ce qu’il en sera demain mais aujourd’hui le JLD existe : il faut travailler dans le cadre du droit actuel ; je ne sais pas selon quel calendrier et dans quelles conditions nous allons aborder la réforme de la procédure pénale.

Dans ce contexte, l’objectif poursuivi me semble devoir être atteint par l’amendement CL 3 du Gouvernement – cohérent avec l’amendement de Philippe Houillon que la Commission a adopté tout à l’heure.

M. Émile Blessig. On le sent bien, le texte sur lequel nous travaillons ce matin n’apporte pas aux uns et aux autres beaucoup de satisfaction. Puisqu’il est 13 heures, monsieur le président, je serais tenté de demander une suspension de séance pour savoir ce que la Cour de cassation pense du statut du procureur… Il est clair en effet que la mission du procureur est au cœur du débat. Comment légiférer utilement si nous ne sommes pas d’accord sur le statut du parquet ?

Nous examinons, pressés par les délais fixés par le Conseil constitutionnel, un texte qui a d’énormes incidences tant sur la fonction d’avocat que sur l’organisation du procès. Nous allons avoir du mal à assurer les équilibres nécessaires.

M. Philippe Goujon. Il est en effet difficile de légiférer sur la garde à vue en dehors de la réforme de la procédure pénale. Nous sommes amenés à plaquer des dispositions sur un système qui n’est pas fait pour les accueillir.

M. Jean-Paul Garraud. C’est pour les juges d’instruction que la commission d’enquête sur l’affaire d’Outreau avait prôné la collégialité.

Je le répète, ne confondons pas la phase juridictionnelle et la phase d’enquête.

La Commission rejette les amendements identiques CL 89 et CL 133.

Puis elle adopte l’amendement CL 164 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL 136 de M. Philippe Goujon et CL 92 de M. Éric Ciotti.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL 44 de M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Si l’avocat est présent dès le début de la garde à vue, il faut qu’il bénéficie du droit de consulter les procès-verbaux d’audition, afin de pouvoir assurer la défense de son client.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

M. Dominique Raimbourg. Monsieur le président, jusqu’à quelle heure allons-nous continuer nos travaux ? Ne peut-on pas les suspendre ?

M. le président Jean-Luc Warsmann. Sachant que nous devons examiner cet après-midi, en séance publique, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, je préfère que nous achevions l’examen du texte ce matin.

La Commission examine l’amendement CL 165 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel tendant à mieux distinguer les deux autorisations de report des droits que pourra demander l’officier de police judiciaire.

M. Philippe Houillon. Je le redis, on ne peut pas donner à la partie poursuivante le pouvoir de faire varier la géométrie des droits de la défense !

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte l’amendement CL 3 du Gouvernement.

La Commission est saisie de l’amendement CL 166 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à encadrer les interventions de l’avocat présent à une audition, en lui permettant de poser des questions à la fin de celle-ci, dans un souci d’équilibre.

La Commission adopte l’amendement.

M. Noël Mamère. Monsieur le président, nous examinons ce texte à marche forcée, alors même qu’il n’y a pas eu de débat préalable.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Je ne peux pas vous laisser dire cela, c’est tout à fait inexact !

M. Noël Mamère.  Vous ne nous laissez pas le temps de discuter des amendements. Par ailleurs, certains d’entre nous doivent participer à d’autres réunions, notamment les membres de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique. Les conditions d’un bon travail législatif ne sont pas réunies !

M. le président Jean-Luc Warsmann. Chaque collègue qui a voulu s’exprimer a pu le faire : il y a eu jusqu’à quinze interventions sur un même amendement.

La Commission examine l’amendement CL 157 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à permettre le remplacement d’un avocat qui perturberait anormalement le déroulement de l’audition.

M. Philippe Houillon. Permettez-moi de vous rappeler que l’arrêt Moulin souligne que les avocats occupent une situation centrale dans l’administration de la justice et que leur qualité d’intermédiaires entre les justiciables et les tribunaux permettent de les qualifier d’auxiliaires de justice. Il faudra bien en tenir compte un jour…

M. Jean-Paul Garraud. Et que fait-on quand un avocat perturbe le bon déroulement d’une audition ? Nous savons fort bien que cela arrive !

Mme Brigitte Barèges. L’officier de police judiciaire peut également la perturber. Vous faites un procès d’intention aux avocats !

M. le rapporteur. Il ne s’agit pas de faire un procès d’intention à qui que ce soit. Je souhaite que l’avocat puisse intervenir sans difficulté ; simplement, il convient de prévoir une mesure d’urgence en cas de perturbation grave d’une audition.

M. Dominique Raimbourg. S’agissant du procureur, je suis en désaccord avec l’analyse juridique de Jean-Paul Garraud ; en revanche, je pense qu’il faut prendre en considération ce qu’il a dit sur les rôles respectifs du procureur et du juge des libertés et de la détention, même si la Cour européenne des droits de l’Homme nous impose de mettre en place un système protecteur. On a trop tendance à croire que le second protège mieux les libertés que le premier. Pourtant, le procureur est instruit du déroulement de l’enquête, l’officier de police judiciaire lui transmettant régulièrement les informations nécessaires, alors que le juge, homme de dossiers, est souvent moins bien placé. Ne disqualifions pas le procureur, dont le rôle de contrôle de l’enquête doit être préservé.

Quant à l’avocat, il se trouve nécessairement, avec l’officier de police judiciaire, dans une situation éminemment conflictuelle. Si un conflit naît, il ne peut pas être réglé par une procédure disciplinaire ; c’est le bâtonnier qui doit arbitrer. Par ailleurs, aucune profession n’étant parfaite, les avocats ont sans doute des efforts à faire en matière d’application des règles déontologiques.

Mme George Pau-Langevin. Un conflit entre l’avocat et le procureur ou l’officier de police judiciaire est un risque quotidien, qui n’est pas propre à la garde à vue. Pourquoi introduire un mécanisme spécifique ? En l’espèce, l’avocat est isolé, dans un commissariat, entouré de policiers : c’est plutôt lui qui se trouve dans une situation difficile !

Mme Maryse Joissains-Masini.  On nous propose de prendre des décisions graves pour les avocats, dans le cadre d’un texte qui ne les vise pas. Les comportements visés par l’amendement sont exceptionnels. Ne stigmatisez pas l’ensemble d’une profession !

M. le rapporteur. Mon objectif est simplement de veiller à l’équilibre de la procédure et de ne pas désarmer l’officier de police judiciaire. Toutefois, je vous propose, dans un souci d’apaisement, de retirer cet amendement afin d’en retravailler la rédaction.

L’amendement CL 157 est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL 167 du rapporteur.

Puis elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement CL 86 de M. Éric Ciotti.

En conséquence du retrait de l’amendement CL 157, le rapporteur retire l’amendement CL 168.

Puis la Commission adopte l’article 7 modifié.

Article  7 bis

(art. 63-4-5 [nouveau] du code de procédure pénale ;
art. 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991)


Droit de la victime à être assistée par un avocat en cas de confrontation
avec la personne gardée à vue

Cet article, issu de l’adoption par la Commission d’un amendement de votre rapporteur sous-amendé par le Gouvernement, a pour objet de prévoir le droit pour la victime d’une infraction à être assistée par un avocat si elle est confrontée avec une personne gardée à vue qui est elle-même assistée.

L’article préliminaire du code de procédure pénale dispose que « La procédure pénale doit (…) préserver l’équilibre des droits des parties » (I) et que « L’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale » (II). Si, pendant une garde à vue, il est procédé à une confrontation entre une personne mise en cause et la victime, le principe de l’équilibre des droits des parties implique que la victime ait la possibilité d’être assistée par un avocat si la personne gardée à vue a elle-même cette possibilité.

C’est ce que prévoit l’article 7 bis adopté par la Commission, qui ajoute un nouvel article 63-4-5 dans le code de procédure pénale disposant que « Si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue qui est assistée d’un avocat lors de son audition, elle peut demander à être également assistée par un avocat choisi par elle, ou son représentant légal si elle est mineure, ou, à sa demande, désigné par le bâtonnier ». L’article prévoit que la victime doit être informée de ce droit avant qu’il soit procédé à la confrontation. À sa demande, l’avocat de la victime pourra – comme l’avocat de la personne gardée à vue – consulter les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste, poser des questions et formuler des observations écrites à l’issue de l’audition.

Un sous-amendement du Gouvernement a complété l’amendement de votre rapporteur par un paragraphe II, modifiant l’article 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, afin de prévoir que l’assistance de la victime par un avocat en cas de confrontation pourra être prise en charge financièrement au titre de l’aide juridictionnelle.

*

* *

La Commission est d’abord saisie de l’amendement CL 158 du rapporteur, faisant l’objet des sous-amendements CL 216 et CL 217 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Mon amendement tend à replacer la victime au centre du dispositif. Il paraît en effet nécessaire qu’en cas de confrontation, elle puisse bénéficier de l’assistance d’un avocat disposant des mêmes droits que celui de la personne gardée à vue.

Toutefois, compte tenu du retrait des amendements CL 157 et CL 168, il convient de rectifier l’avant-dernier alinéa en le rédigeant ainsi : « L’article 63-4-3 est applicable. ».

Par ailleurs, afin d’éviter de tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, l’amendement précise que les frais d’avocat sont à la charge de la victime.

M. le garde des Sceaux. Le sous-amendement CL 217 vise précisément à « lever le gage », en permettant la prise en charge de ces frais par l’État au titre de l’aide juridictionnelle.

Quant au sous-amendement CL 216, je le retire.

Le sous-amendement CL 216 est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte le sous-amendement CL 217.

Puis elle adopte l’amendement CL 158 rectifié et ainsi sous-amendé.

Après l’article 7

La Commission examine l’amendement CL 100 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Nous nous réjouissons de l’adoption de l’amendement précédent, qui reprend une proposition du groupe SRC, que nous avions faite notamment à l’occasion de l’examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes.

L’amendement CL 100 vise à permettre à une personne de bénéficier du soutien d’un avocat dès lors qu’elle a été victime d’une violence physique.

M. le rapporteur. Avis défavorable : l’amendement est satisfait par l’amendement précédent, qui prévoit que « la victime est informée de ce droit avant qu’il soit procédé à la confrontation ».

Mme Delphine Batho. Précisément, l’amendement CL 100 ne concerne pas uniquement les situations de confrontation avec la personne mise en cause.

M. Dominique Raimbourg. Il s’agit d’une incitation indirecte à mettre en place une permanence pour les victimes, comme il en existe une pour les auteurs présumés d’une infraction.

M. le garde des Sceaux. J’oppose à cet amendement l’article 40 de la Constitution.

L’amendement CL 100 n’est plus soumis au débat.

La Commission en arrive à l’amendement CL 93 de M. Éric Ciotti.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette cet amendement.

Article 8

(art. 63-5 du code de procédure pénale)


Droit des personnes gardées à vue au respect de leur dignité

L’article 8 a pour objet de rappeler que les mesures de garde à vue doivent respecter la dignité de la personne.

Dans sa décision du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a rappelé la valeur constitutionnelle du principe de la dignité de la personne : « Considérant que le Préambule de la Constitution de 1946 a réaffirmé que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ; que la sauvegarde de la dignité de la personne contre toute forme d’asservissement et de dégradation est au nombre de ces droits et constitue un principe à valeur constitutionnelle ». Faisant application de ce principe à la mesure privative de liberté que constitue la garde à vue, le Conseil constitutionnel a considéré « qu’il appartient aux autorités judiciaires et aux autorités de police judiciaire compétentes de veiller à ce que la garde à vue soit, en toutes circonstances, mise en oeuvre dans le respect de la dignité de la personne » et « qu’il appartient, en outre, aux autorités judiciaires compétentes, dans le cadre des pouvoirs qui leur sont reconnus par le code de procédure pénale et, le cas échéant, sur le fondement des infractions pénales prévues à cette fin, de prévenir et de réprimer les agissements portant atteinte à la dignité de la personne gardée à vue et d’ordonner la réparation des préjudices subis ».

Pour autant, il n’a pas déclaré les dispositions légales relatives à la garde à vue inconstitutionnelles en raison des conditions matérielles dans lesquelles elles se déroulent, faisant valoir « que la méconnaissance éventuelle de cette exigence dans l’application des dispositions législatives précitées n’a pas, en elle-même, pour effet d’entacher ces dispositions d’inconstitutionnalité ; que, par suite, s’il est loisible au législateur de les modifier, les dispositions soumises à l’examen du Conseil constitutionnel ne portent pas atteinte à la dignité de la personne » (51).

Il est difficile pour votre rapporteur de porter une appréciation générale sur l’état des locaux de garde à vue et sur le respect de la dignité des personnes placées en garde à vue s’agissant des conditions dans lesquelles elles sont détenues. La lecture des rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté révèle que l’état des locaux de garde à vue peut être très variable d’un endroit à un autre, en fonction de l’ancienneté des locaux, de la fréquence de leur utilisation, des modalités et de la fréquence de leur nettoyage, ou encore de la fréquence de nettoyage des couvertures (52). Les conditions dans lesquelles les personnes gardées à vue peuvent se restaurer et se laver, notamment avant une présentation au parquet pour une audience d’orientation pénale, constituent également des éléments devant être pris en compte dans le respect de la dignité.

Sur cette question du respect de la dignité des personnes gardées à vue, votre rapporteur tient à souligner l’importance des contrôles réguliers et inopinés effectués par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, depuis son institution par la loi du 30 octobre 2007 (53). Ces contrôles, qui peuvent donner lieu à des recommandations rendues publiques, permettront, à moyen terme, d’améliorer les conditions matérielles d’hébergement dans les locaux de garde à vue. Ainsi, lors de leurs auditions, les directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie nationale ont tous deux souligné l’incitation forte à une remise à niveau de leurs locaux de privation de liberté que constituent les contrôles effectués par le Contrôleur général.

Le nouvel article 63-5 du code de procédure pénale, tel qu’il résulte de l’article 8 du projet de loi, comprend deux alinéas énonçant le droit des personnes gardées à vue au respect de leur dignité. Le premier alinéa dispose que « La garde à vue doit s’exécuter dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne ». Il donne au principe constitutionnel de respect de la dignité de la personne une déclinaison légale particulière dans le domaine de la garde à vue.

Le second alinéa, qui prévoit que « Seules peuvent être imposées à la personne gardée à vue les mesures de sécurité strictement nécessaires », consacre le principe général de stricte nécessité des mesures de sécurité imposées aux personnes gardées à vue. Il introduit les deux articles suivants – articles 63-6 et 63-7 nouveaux, créés par l’article 9 du projet de loi – qui définissent les motifs et la nature des mesures de sécurité et des fouilles auxquelles peuvent être soumises les personnes gardées à vue.

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Article  9

(art. 63-6 à 63-8 [nouveaux] du code de procédure pénale)


Encadrement des mesures de sécurité et des fouilles pouvant être imposées aux personnes gardées à vue – Issue de la garde à vue

L’article 9, qui crée dans le code de procédure pénale trois nouveaux articles numérotés 63-6 à 63-8, a pour objet, d’une part, d’encadrer les mesures de sécurité et les fouilles pouvant être imposées aux personnes gardées à vue, et, d’autre part, de définir le sort de la personne gardée à vue à l’issue de la mesure.

Le nouvel article 63-6 du code de procédure pénale définit les mesures de sécurité auxquelles peuvent être soumises les personnes gardées à vue, étant rappelé que l’article 63-5, dans sa rédaction issue de l’article 8 du projet de loi, subordonne ces mesures de sécurité à un principe général de nécessité.

L’article 63-6 définit tout d’abord l’objet des mesures de sécurité : il doit s’agir de mesures « ayant pour objet de s’assurer que la personne gardée à vue ne détient aucun objet dangereux pour elle-même ou pour autrui ». L’article 63-6 prévoit ensuite que ces mesures « sont limitativement énumérées par arrêté de l’autorité ministérielle compétente », mais qu’« Elles ne peuvent consister en une fouille intégrale » (54). Il appartiendra donc à l’autorité ministérielle compétente de définir quelles mesures, à l’exclusion des fouilles intégrales, pourront être mises en œuvre dans le cadre des mesures de garde à vue pour garantir la sécurité des personnes gardées à vue à vue et de toute autre personne. En pratique, il s’agira essentiellement de fouilles par palpation et de l’utilisation de moyens de détection électronique.

Lors de son audition par votre rapporteur, M. Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, a présenté cette mesure comme une garantie contre le risque de fouilles inutiles – que permettrait a contrario une disposition qui autoriserait l’OPJ à procéder à une fouille intégrale en lui laissant une marge d’appréciation sur sa nécessité – et vécues de façon humiliante par les personnes qui en font l’objet. Il a par ailleurs estimé que cette disposition permettait de protéger la responsabilité des personnels en charge de la surveillance de la personne gardée à vue : en effet, si une personne gardée à vue utilise un objet qu’elle avait dissimulé pour attenter à sa vie ou à celle des personnels de police, il ne pourra être reproché à l’OPJ de ne pas avoir procédé à une fouille qu’il n’avait légalement pas le droit d’opérer. Certains policiers entendus par votre rapporteur lors de ses visites et de ses auditions ont toutefois émis des inquiétudes sur cet article, estimant qu’il comportait un risque tant pour la sécurité des personnels que pour celle des personnes gardées à vue elles-mêmes.

La Commission a adopté un amendement de M. Philippe Goujon complétant le nouvel article 63-6 relatif aux mesures de sécurité par un alinéa prévoyant la possibilité pour la personne gardée à vue de demander à conserver « certains objets intimes », assortie en contrepartie de la signature d’une « décharge exonérant l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire de toute responsabilité pénale, civile ou administrative, au cas où elle utiliserait ces objets pour attenter à sa vie ou à son intégrité physique ». Cette disposition vise à apporter une réponse à la difficulté soulevée par la pratique, relevée et critiquée notamment par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, consistant dans certains endroits à retirer systématiquement lunettes et soutien-gorge aux personnes gardées à vue, afin de prévenir tout risque d’agression ou de suicide, alors même que ce risque est en réalité infime.

Le nouvel article 63-7 définit les conditions dans lesquelles il peut être procédé à une fouille intégrale, c’est-à-dire à une fouille à nu, et à des investigations corporelles internes. S’agissant tout d’abord de la fouille intégrale, le premier alinéa de l’article 63-7 prévoit qu’il ne peut y être procédé que si une telle fouille est « indispensable, pour les nécessités de l’enquête ». Dans ce cas, l’article prévoit que la fouille « doit être décidée par un officier de police judiciaire et réalisée dans un espace fermé par une personne de même sexe que la personne faisant l’objet de la fouille ». La précision selon laquelle la fouille doit être réalisée « dans un espace fermé » résulte de l’adoption par la Commission d’un amendement de M. Jean-Pierre Decool. La disposition prévoyant l’identité de sexe entre la personne fouillée et la personne réalisant la fouille correspond d’ores et déjà à la pratique observée dans les faits par policiers et gendarmes.

Quant aux investigations corporelles internes, le second alinéa de l’article 63-7 les soumet aux mêmes conditions que la fouille intégrale : il ne pourra y être procédé que si elles sont indispensables « pour les nécessités de l’enquête ». Condition supplémentaire liée au caractère intrusif de l’acte en question, l’article prévoit que ces investigations « ne peuvent être réalisées que par un médecin requis à cet effet ».

Le nouvel article 63-8 définit le sort de la personne gardée à vue à l’issue de la mesure. Reprenant la substance de l’actuel troisième alinéa de l’article 63 du code de procédure pénale, déclaré contraire à la Constitution, tout en en simplifiant la rédaction, le premier alinéa prévoit qu’« À l’issue de la garde à vue, la personne est, sur instruction du procureur de la République, soit remise en liberté, soit déférée devant ce magistrat ».

Quant au second alinéa du nouvel article 63-8, reprenant la règle qui figurait au cinquième alinéa de l’actuel article 63-1, également déclaré contraire à la Constitution, il prévoit que « Si la personne est remise en liberté à l’issue de la garde à vue sans qu’aucune décision n’ait été prise par le procureur de la République sur l’action publique, les dispositions de l’article 77-2 sont portées à sa connaissance ». Aux termes de cet article 77-2, « toute personne placée en garde à vue au cours d’une enquête préliminaire ou de flagrance qui, à l’expiration d’un délai de six mois à compter de la fin de la garde à vue, n’a pas fait l’objet de poursuites, peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s’est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d’être donnée à la procédure ».

*

* *

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL 169 et CL 213 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL 145 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Cet amendement tend à permettre aux personnes gardées à vue de demander à conserver certains objets intimes, tels que des lunettes, et, partant, à exonérer de toute responsabilité l’officier ou l’agent de police judiciaire en cas d’incident lié à leur usage.

M. le garde des Sceaux. Le Gouvernement est plutôt défavorable à cet amendement.

M. le rapporteur. L’article 8 pose le principe de nécessité des mesures de sécurité.

M. Dominique Raimbourg. Exonérer l’officier de police judiciaire de toute responsabilité par la signature d’une décharge me semble une bonne idée car cela permettrait d’éviter certaines fouilles.

Mme Delphine Batho.  La référence aux objets intimes vise particulièrement la situation des femmes placées en garde à vue.

M. Jean-Paul Garraud. Je suis d’accord avec Dominique Raimbourg et Delphine Batho. Tout ce qui peut éviter les situations humiliantes va dans le bon sens.

M. le garde des Sceaux. Je me range à votre avis.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement CL 131 de M. Jean-Pierre Decool.

L’amendement CL 129 de M. Jean-Pierre Decool est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL 117 de M. Philippe Houillon.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10

(art. 64 du code de procédure pénale)


Procès-verbal de placement en garde à vue - Registre des gardes à vue

Le présent article procède à la réécriture de l’article 64 du code de procédure pénale relatif au contenu du procès-verbal de placement en garde à vue (I) et au registre des gardes à vue (II). Il a l’objet de cinq amendements de précision, adoptés à l’initiative de votre rapporteur.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 64 précise les mentions que doit comporter le procès-verbal d’audition établi par l’officier de police judiciaire. Il s’agit de :

—  la durée des interrogatoires auxquels la personne a été soumise ;

—  la durée des repos qui ont séparé ces interrogatoires ;

—  les heures auxquelles la personne a pu s’alimenter ;

—  le jour et l’heure à partir desquels elle a été gardée à vue ;

—  le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit amenée devant le magistrat compétent ;

—  les demandes faites en application des articles 63-2 (droit de faire contacter un proche ou l’employeur), 63-3 (droit de se faire examiner par un médecin) et 63-4 (droit de s’entretenir avec un avocat) et de la suite qui leur a été donnée ;

—  les motifs de la garde à vue.

L’article précise enfin que la mention doit être spécialement émargée par la personne gardée à vue et qu’il est fait mention de tout refus de sa part.

Le présent article procède à la réécriture de l’article pour le rendre plus lisible, les mentions que doit comporter le procès-verbal étant présentées sous forme de liste, dans un ordre plus logique.

Devront désormais figurer au procès-verbal :

—   Les motifs du placement en garde à vue, par référence à la liste fixée à l’article 62-3 (cf. article 1er du projet de loi) ;

—   La durée des auditions de la personne gardée à vue et des repos qui ont séparé ces auditions, les heures auxquelles elle a pu s’alimenter, le jour et l’heure à partir desquels elle a été gardée à vue, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit déférée devant le magistrat compétent ;

—   Le cas échéant, les auditions de la personne gardée à vue effectuées dans une autre procédure pendant la durée de la garde à vue ;

—   Les informations données et les demandes faites en application des articles 63-2 (droit de faire contacter un proche et l’employeur, 63-3 (droit de sa faire examiner par un médecin) et 63-3-1 (droit à l’assistance d’un avocat) et les suites qui leur ont été données ;

—   S’il a été procédé à une fouille intégrale ou à des investigations corporelles internes.

L’article précise également que ces mentions doivent être spécialement émargées par la personne gardée à vue et qu’il est fait mention de tout refus de sa part.

La question du contenu du procès-verbal a été soulevée par de nombreuses personnes entendues par votre rapporteur, et notablement par les syndicats de policiers qui ont déploré le formalisme dans lequel sa rédaction est enserrée et la perte de temps subséquente pour les enquêteurs, transformés de plus en plus en « greffiers » selon le syndicat indépendant des commissaires de police.

La rédaction « en temps réel » des procès-verbaux, pourtant prévue par le code de procédure pénale dont l’article 66 précise que les  « procès-verbaux dressés par l’officier de police judiciaire en exécution des articles 54 à 62 sont rédigés sur le champ et signés par lui sur chaque feuillet du procès-verbal », est difficilement appliquée en pratique, notamment s’agissant des procès-verbaux de perquisition. Dans un tel contexte, des difficultés pratiques ne manqueront pas de se poser pour la communication à l’avocat dès son arrivée dans les locaux de tous les éléments de l’enquête en cours. Votre rapporteur estime que les méthodes de travail des policiers seront appelées à évoluer. M. Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, lui a confié être « raisonnablement optimiste » sur ce point, notant que la police nationale avait toujours su s’adapter aux nombreuses évolutions législatives la concernant.

Le II du présent article précise le contenu du registre des gardes à vue qui doit, depuis 1993, être tenu dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue.

Ces dispositions ont vocation à se substituer à l’actuel article 65 du code de procédure pénale (abrogé en conséquence par le 1° de l’article 14 du projet de loi).

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi n° 93-1013 du 24 août 1993, le premier alinéa de cet article précise que « les mentions et émargements prévus par le premier alinéa de l’article 64, en ce qui concerne les dates et heures de début et de fin de garde à vue et la durée des interrogatoires et des repos séparant ces interrogatoires, doivent également figurer sur un registre spécial, tenu à cet effet dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue. »

Le registre de garde à vue peut être contrôlé à tout moment par le procureur de la République dans le cadre du pouvoir général de contrôle que lui confère l’article 41 du code de procédure pénale.

Le premier alinéa du présent article apporte plusieurs modifications à cette rédaction :

—  il vise par coordination non plus l’article 64 mais les 2° à 5° du I de cet article ;

—  il substitue le terme « auditions » à celui de « interrogatoires » ;

—  il précise que le registre peut « être tenu sous forme dématérialisée ».

Le dernier alinéa est l’exacte reprise du dernier alinéa de l’actuel article 65, qui précise que « Dans les corps ou services où les officiers de police judiciaire sont astreints à tenir un carnet de déclarations, les mentions et émargements prévus à l’alinéa précédent doivent également être portés sur ledit carnet. Seules les mentions sont reproduites au procès-verbal qui est transmis à l’autorité judiciaire. »

Les militaires de la gendarmerie nationale tiennent en effet un carnet de déclarations depuis le décret du 20 mai 1903 portant règlement sur le service de la gendarmerie (55), carnet qui doit être présenté à toute demande des autorités judiciaires. Le décret n° 83-936 du 21 octobre 1983 a par ailleurs autorisé les officiers et agents de police judiciaire de la police nationale à utiliser un tel carnet. Depuis la loi précitée du 24 août 1993 ce document, lorsqu’il existe, doit contenir des mentions et émargements relatifs à la garde à vue.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 99 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho.  C’est un amendement de cohérence avec celui qui a été adopté tout à l’heure.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement l’amendement de coordination CL 190, les amendements de précision CL 191, CL 192 et CL 193 et l’amendement rédactionnel CL 196 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 10 modifié.

Chapitre II

Dispositions diverses

Article 11 A

(art. 18 du code de procédure pénale)


Compétence nationale des officiers de police judiciaire

Cet article est issu d’un amendement présenté par MM. Jean-Jacques Urvoas et Dominique Raimbourg : il vise, afin de faciliter la circulation des officiers de police judiciaire en charge d’une enquête sur l’ensemble du territoire, à préciser qu’ils sont « compétents sur tout le territoire », dans des « conditions précisées par décret en Conseil d’État ». Il est précisé que lorsque l’officier de police judiciaire sort des limites territoriales de son rattachement, il « avise de sa venue le procureur compétent dans le département ainsi que le directeur de la police ou de la gendarmerie départementalement compétent ».

Votre Commission a adopté cet amendement contre l’avis de votre rapporteur, qui juge que l’objet du texte doit se limiter à la question de la garde à vue et estime nécessaire de maintenir une compétence territoriale des officiers de police judiciaire, sous le contrôle des procureurs dans chaque ressort. Votre rapporteur note en outre que, tel qu’il est rédigé, cet amendement entre en contradiction avec la rédaction actuelle du premier alinéa de l’article 18, non modifié, qui dispose que « les officiers de police judiciaire ont compétence dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles ».

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 148 de M. Jean-Jacques Urvoas portant article additionnel avant l’article 11.

M. Dominique Raimbourg. Cet amendement tend à rendre les officiers de police judiciaire compétents sur l’ensemble du territoire national, de manière à faciliter leur circulation et à les dispenser de faire appel à un officier de police judiciaire territorialement compétent lorsqu’ils sortent de leur territoire d’affectation.

M. le rapporteur. Avis défavorable : le contrôle par le parquet suppose une compétence territoriale précise.

M. le garde des Sceaux. Avis défavorable également.

La Commission adopte l’amendement.

Article 11

(art. 61 et 62 du code de procédure pénale)


Prérogatives des officiers de police judiciaire – Audition de témoins

Le présent article modifie les articles 61 et 62 du code de procédure pénale relatifs aux prérogatives des officiers de police judiciaire dans l’enquête de flagrance et aux auditions de témoins.

En l’état actuel du droit, l’article 61 du code de procédure pénale ne comporte qu’un alinéa qui précise que l’officier de police judiciaire peut défendre à toute personne de s’éloigner du lieu de l’infraction jusqu’à la clôture de ses opérations.

L’article 62 quant à lui comprend cinq alinéas, dont les quatre premiers ont trait aux prérogatives des officiers de police judiciaire en matière d’auditions de témoins : l’officier de police judiciaire peut entendre toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits ou sur les biens saisis, au besoin en la contraignant par la force publique.

Le dernier alinéa traite quant à lui de la possibilité de retenir un témoin - c’est-à-dire une personne à l’encontre de laquelle il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction - pour son audition. Une telle audition a un régime distinct de celui de la garde à vue : la loi a en effet d’abord restreint – loi du 4 janvier 1993 – puis interdit – loi du 15 juin 2000 - le placement en garde à vue des simples témoins. Le dernier alinéa de l’article 62 dispose que les témoins ne peuvent être « retenus que le temps strictement nécessaire à leur audition ».

Le présent article opère une réorganisation des articles 61 et 62 : le I transfère les quatre premiers alinéas de l’article 62 à l’article 61, in fine, si bien que l’article 61 comprend désormais un bloc cohérent de dispositions relatives aux prérogatives des officiers de police judiciaire. Le II en tire une conséquence formelle au nouveau troisième alinéa de cet article.

Le III modifie l’article 62 afin de limiter la durée de la possible rétention de témoins en vue de leur audition à quatre heures. Il s’agit d’une mise en cohérence avec les autres cas dans lesquels une personne peut être retenue par les forces de l’ordre alors même qu’elle n’est soupçonnée d’aucune infraction : l’article 78-3 du code de procédure pénale prévoit ainsi en matière de vérifications d’identité que la rétention de la personne ne peut excéder quatre heures.

En revanche, si le témoin accepte de déposer auprès des services enquêteurs, l’audition peut durer tout le temps nécessaire.

Le IV complète l’article 62 par un nouvel alinéa précisant les règles régissant un éventuel passage de statut de témoin à celui de suspect : si, au cours de l’audition d’un témoin, il apparaît qu’existent des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, il est précisé qu’il ne peut être « maintenu sous la contrainte à disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à vue ».

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* *

La Commission adopte l’amendement de coordination CL 197 du rapporteur.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL 119 de M. Jean-Pierre Decool.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL 198 du rapporteur.

Elle adopte l’article 11 modifié.

Article 12

(art. 706-88, 706-88-1 [nouveau] et 706-88-2 [nouveau] du code de procédure pénale)


Report de l’intervention de l’avocat pour les gardes à vue en matière
de criminalité organisée – Possibilité de restreindre la liberté de choix
de l’avocat en matière de terrorisme

L’article 12, qui a fait l’objet d’un amendement de réécriture globale du Gouvernement, sous-amendé par votre rapporteur et par le président Jean-Luc Warsmann, a pour objet de définir les règles dérogatoires susceptibles d’être appliquées aux gardes à vue exécutées en matière de criminalité organisée.

Dans sa rédaction initiale, l’article 12 du projet de loi maintenait les régimes dérogatoires en dehors du champ d’application des nouvelles règles issues du présent projet de loi et applicables à la garde à vue de droit commun. Mais deux arrêts rendus le 19 octobre 2010 par la Cour de cassation ont rendu nécessaire une révision de ces régimes dérogatoires.

L’article 12 adopté par la Commission, qui ne modifie ni les durées maximales des gardes à vue en cette matière ni l’autorité compétente pour décider des différents reports (56), définit les conditions dans lesquelles l’intervention de l’avocat peut être reportée pour les infractions relevant de la criminalité organisée : une décision d’un magistrat, fondée sur des raisons impérieuses tenant aux circonstances de l’espèce, sera nécessaire ; la durée maximale du report variera selon la nature de l’infraction motivant le placement en garde à vue.

Enfin, l’article 12 prévoit, en matière de terrorisme, une possibilité de restriction de la liberté de choix de l’avocat.

L’article 12, dans le texte initial du projet de loi, complétait l’article 706-88 du code de procédure pénale, qui prévoit les règles particulières en matière de garde à vue applicables aux infractions relevant de la criminalité organisée prévues par l’article 706-73 du même code, par un alinéa disposant que « Les dispositions des articles 63-4-1 et 63-4-2 ne sont pas applicables aux personnes gardées à vue pour l’une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 ».

Conforme à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, qui n’avait pas remis en cause la conformité à la Constitution de ces régimes dérogatoires, l’article 12 ne pouvait rester en l’état en raison des décisions rendues le 19 octobre 2010 – c’est-à-dire six jours après le dépôt du projet de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale – par la Cour de cassation.

Dans sa décision du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel avait estimé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la constitutionnalité des dispositions applicables aux gardes à vue en matière de criminalité organisée, en se fondant sur les « dispositions combinées du troisième alinéa de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée et du troisième alinéa de son article 23-5 », desquelles il résulte « que le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qui a déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ». Or, les dispositions applicables en matière de criminalité organisée avaient déjà été expressément déclarées conformes à la Constitution dans la décision n° 2004-492 DC du 2 mars 2004 relative à la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (57). Le Conseil constitutionnel en a conclu « qu’en l’absence de changement des circonstances, depuis la décision du 2 mars 2004 susvisée, en matière de lutte contre la délinquance et la criminalité organisées, il n’y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de procéder à un nouvel examen de ces dispositions » (58).

Mais dans deux décisions rendues le 19 octobre 2010 dans des affaires d’infractions à la législation sur les stupéfiants, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que le régime dérogatoire prévu par le septième alinéa de l’article 63-4 et l’article 706-88 du code de procédure pénale était contraire à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Dans la première des deux affaires, la chambre de l’instruction avait rejeté la demande d’annulation de certains actes de la procédure. Après avoir relevé que « pour rejeter la requête aux fins d’annulation d’actes de la procédure de M. T., l’arrêt se borne à relever l’absence, dans la Convention européenne des droits de l’Homme, de mention expresse portant obligation d’une assistance concrète et effective par un avocat de la personne gardée à vue dès la première heure de cette mesure et de notification d’un droit de se taire, et le défaut de condamnation expresse de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme pour ce motif », la Cour a jugé « qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a méconnu le texte conventionnel susvisé, d’où il résulte que, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’espèce, et non à la seule nature du crime ou délit reproché, toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit, dès le début de la garde à vue, être informée de son droit de se taire et bénéficier, sauf renonciation non équivoque, de l’assistance d’un avocat » (59).

Dans le deuxième arrêt, rendu dans une affaire dans laquelle la chambre de l’instruction avait annulé certains actes de procédure de la garde à vue, la chambre criminelle de la Cour de cassation a, après avoir relevé que « pour accueillir partiellement la requête et annuler certains actes de la procédure, l’arrêt retient, notamment, que la restriction du droit d’être assisté dès le début de la garde à vue, par un avocat, imposée à M. B. en application de l’article 706-88 du code de procédure pénale ne répondait pas à l’exigence d’une raison impérieuse, laquelle ne pouvait découler de la seule nature de l’infraction » et « que l’intéressé, à l’occasion de ses interrogatoires, réalisés, pour l’essentiel, avant l’intervention de son conseil, et, en conséquence, sans préparation avec celui-ci ni information sur son droit de garder le silence, a été privé d’un procès équitable », jugé « qu’en prononçant par ces motifs, exempts d’insuffisance comme de contradiction, la chambre de l’instruction a fait l’exacte application de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme » (60).

Les 1° et 2° de l’article 12, issus d’un amendement du Gouvernement modifié par trois sous-amendements rédactionnels de votre rapporteur, définissent les modalités du report de l’intervention de l’avocat pour les infractions relevant de la criminalité organisée.

L’intervention de l’avocat pourra être reportée, jusqu’à la quarante-huitième heure pour toutes les infractions visées à l’article 706-73 à l’exception du trafic de stupéfiants et du terrorisme, ou à la soixante-douzième heure de la garde à vue pour ces deux dernières catégories d’infractions (3° et 11° de l’article 706-73).

La durée maximale de ces reports facultatifs de l’intervention de l’avocat est donc la même que la durée du report automatique de l’entretien avec l’avocat prévue – dans leurs textes actuels – par le dernier alinéa de l’article 63-4 et le sixième alinéa de l’article 706-88. Il sera donc possible, dans les affaires graves de criminalité organisée, que l’avocat intervienne dans la garde à vue au même moment que celui auquel il pouvait, sous le régime antérieur, s’entretenir avec son client. Mais ce report de l’intervention de l’avocat ne sera plus appliqué de plein droit dès lors qu’est retenue une qualification pénale entrant dans le champ de la criminalité organisée, puisqu’il sera subordonné à une appréciation concrète de sa nécessité.

Conformément à l’exigence de la jurisprudence européenne reprise par la Cour de cassation que la nécessité du report donne lieu à une appréciation in concreto, le texte adopté par la Commission prévoit que le report sera subordonné à l’existence de « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête », et devra avoir pour objet soit de permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit de prévenir une atteinte aux personnes.

Pour tenir compte de la gravité des infractions en cause, la formulation retenue pour définir les motifs pouvant justifier le report est volontairement plus large que celle retenue, à l’article 7, pour justifier un report de douze ou vingt-quatre heures de la présence de l’avocat aux auditions de la personne gardée à vue dans des affaires de droit commun.

En enquête préliminaire ou de flagrance, la compétence pour décider du report appartiendra au procureur de la République jusqu’à la vingt-quatrième heure de garde à vue, puis au juge des libertés et de la détention au-delà, jusqu’à quarante-huit ou soixante-douze heures (selon la catégorie d’infractions).

Si une information judiciaire est ouverte, la compétence appartiendra au juge d’instruction.

Dans tous les cas, la décision du magistrat devra être écrite et motivée.

À partir du moment où il pourra intervenir, l’avocat bénéficiera de l’ensemble des prérogatives prévues aux articles 6 et 7 du projet de loi : entretien confidentiel de trente minutes, présence aux interrogatoires de son client et consultation des procès-verbaux de placement en garde à vue et d’auditions de la personne.

À l’initiative de son président, M. Jean-Luc Warsmann, la Commission a complété l’amendement du Gouvernement par un 3° créant dans le code de procédure pénale un nouvel article 706-88-2. Ce nouvel article prévoit qu’en matière de terrorisme, « le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République à la demande de l’officier de police judiciaire, ou le juge d’instruction lorsque la garde à vue intervient au cours d’une instruction, peut décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités. Les avocats inscrits sur cette liste sont élus par les membres du Conseil de l’ordre du barreau de Paris ».

Dans les affaires de terrorisme, la présence de l’avocat en garde à vue, quand bien même elle serait différée en application des dispositions présentées précédemment, créera deux risques particuliers qu’il est nécessaire de prendre en compte pour maintenir un équilibre entre, d’une part, les droits de la défense, et, d’autre part, l’efficacité de l’enquête et la prévention des actes terroristes. Le premier risque résidera dans la possibilité que la personne gardée à vue soit assistée par un avocat défendant la même cause idéologique qu’elle ; le risque de fuites serait alors considérable. Le second risque sera, compte tenu de la personnalité, de la dangerosité et des moyens dont disposent certains auteurs d’actes terroristes, que des pressions soient exercées par la personne gardée à vue sur les avocats désignés pour qu’ils préviennent leurs complices ou fassent disparaître des preuves. C’est pour répondre à ce double risque que l’article adopté par la Commission crée une possibilité de restriction à la liberté pour la personne gardée à vue de choisir son avocat.

Une règle similaire existe en Espagne. Les collèges d’avocats y ont organisé un système de permanences et de désignations par « tour d’office » qui est utilisé aussi bien pour les affaires de droit commun dans lesquelles la personne mise en cause fait la demande d’être assistée lors de sa garde à vue que dans les affaires de terrorisme. La désignation d’un avocat d’office relève de la compétence exclusive du barreau. Pour être désigné d’office dans une affaire, un avocat doit obligatoirement être inscrit sur la liste correspondante ; il ne peut être inscrit que sur une seule liste. Dans les affaires terroristes, le juge saisi de l’affaire peut décider la mise au secret, qui emporte deux conséquences. D’une part, le gardé à vue en matière de terrorisme est privé de son droit à faire avertir de son arrestation une personne de son choix. D’autre part, s’il n’est pas privé de son droit constitutionnel à l’assistance d’un avocat, le gardé à vue perd sa liberté de choix : il est obligatoirement assisté par un avocat commis d’office désigné par l’Ordre des avocats. En outre, l’avocat voit ses prérogatives ordinaires réduites : il ne peut pas s’entretenir en privé avec le gardé à vue à l’issue des actes pratiqués par les autorités d’enquête et auxquels il aura assisté. La seule condition pour s’inscrire sur la liste nationale du tour d’office en matière de terrorisme est une ancienneté minimale de cinq ans. 900 avocats y sont inscrits.

Toutefois, la mise en place d’une telle liste risquant de se heurter à des difficultés pratiques et de susciter un important contentieux si devaient être définis des critères pour pouvoir prétendre à l’inscription sur cette liste, a été retenue la solution d’une élection par les pairs. Le traitement des affaires de terrorisme étant centralisé à Paris, les avocats inscrits sur la liste d’avocats habilités à intervenir en matière de terrorisme seront élus par les membres du Conseil de l’ordre du barreau de Paris.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 4 du Gouvernement faisant l’objet de sous-amendements.

M. le garde des Sceaux. Trois arrêts, rendus le 19 octobre 2010 par la Cour de cassation, ont constaté l’incompatibilité avec l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme des dispositions du code de procédure pénale relatives à l’intervention de l’avocat dans le cadre des gardes à vue dérogatoires. L’amendement en tire les conséquences. En matière de criminalité organisée, de trafic de stupéfiants et de terrorisme, la règle sera l’assistance d’un avocat dès le début de la garde à vue, sauf décision d’un magistrat motivée par des raisons impérieuses. Le report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la quarante-huitième ou la soixante-douzième heure de la garde à vue, selon l’infraction, sera décidé par le procureur de la République jusqu’à la vingt-quatrième heure, et par le juge des libertés et de la détention au-delà.

La Commission examine d’abord le sous-amendement CL 153 de M. Dominique Raimbourg.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit de confier au juge des libertés et de la détention la décision de reporter l’intervention de l’avocat.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. le garde des Sceaux. Également.

La Commission rejette le sous-amendement.

Puis elle adopte le sous-amendement rédactionnel CL 171 du rapporteur.

Elle en vient au sous-amendement CL 137 de M. Philippe Goujon.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il vise à permettre au parquet de décider le report jusqu’à la quarante-huitième heure.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

M. le garde des Sceaux. De même.

La Commission rejette le sous-amendement.

Elle adopte ensuite les sous-amendements rédactionnels CL 172 et CL 173 du rapporteur.

Puis elle est saisie du sous-amendement CL 215 du président de la Commission.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il vise, en matière d’infraction terroriste, à permettre au juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur à la demande de l’officier de police judiciaire – ou du juge d’instruction lorsque la garde à vue intervient au cours de l’instruction – de décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités, les avocats inscrits sur cette liste étant élus par les membres du Conseil de l’ordre du barreau de Paris.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. le garde des Sceaux. Sagesse.

La Commission adopte le sous-amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement CL 4 sous-amendé.

En conséquence, l’article 12 est ainsi rédigé.

Article 13

(art. 803-3 du code de procédure pénale)


Droits de la personne en cas de défèrement faisant suite à une garde à vue

L’article 13 a pour objet d’étendre les droits de la personne déférée à l’issue d’une garde à vue dans l’attente de sa présentation au procureur de la République ou devant le juge d’instruction saisi.

Actuellement, l’article 803-2 du code de procédure pénale dispose que « Toute personne ayant fait l’objet d’un défèrement à l’issue de sa garde à vue à la demande du procureur de la République comparaît le jour même devant ce magistrat ou, en cas d’ouverture d’une information, devant le juge d’instruction saisi de la procédure. Il en est de même si la personne est déférée devant le juge d’instruction à l’issue d’une garde à vue au cours d’une commission rogatoire, ou si la personne est conduite devant un magistrat en exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt ». Par exception, l’article 803-3 dispose qu’« En cas de nécessité et par dérogation aux dispositions de l’article 803-2, la personne peut comparaître le jour suivant et peut être retenue à cette fin dans des locaux de la juridiction spécialement aménagés, à la condition que cette comparution intervienne au plus tard dans un délai de vingt heures à compter de l’heure à laquelle la garde à vue a été levée, à défaut de quoi l’intéressé est immédiatement remis en liberté ».

Au cours de cette retenue au sein du dépôt de la juridiction, dont la durée maximale est fixée à vingt heures, la personne retenue bénéficie de droits alignés sur le régime de la garde à vue. Ainsi, le deuxième alinéa de l’article 803-3 prévoit que « la personne doit avoir la possibilité de s’alimenter et, à sa demande, de faire prévenir par téléphone une des personnes visées à l’article 63-2, d’être examinée par un médecin désigné conformément aux dispositions de l’article 63-3 et de s’entretenir, à tout moment, avec un avocat désigné par elle ou commis d’office à sa demande, selon les modalités prévues par l’article 63-4 ».

L’article 13 du projet de loi apporte deux modifications aux dispositions de l’article 803-3. D’une part, son 1° opère une coordination avec la nouvelle numérotation des articles relatifs aux droits de la personne gardée à vue, en remplaçant le renvoi à l’article 63-4 par un renvoi à l’article 63-3-1, qui prévoit désormais un droit de la personne gardée à vue à l’assistance d’un avocat – droit au contenu plus étendu que le seul droit à s’entretenir avec un avocat pendant une durée maximale de trente minutes (61). D’autre part, le 2° de l’article complète le deuxième alinéa de l’article 803-3 par une phrase disposant que « L’avocat peut demander à consulter le dossier de la procédure ».

La personne retenue étant toujours privée de liberté, il importe en effet, conformément aux jurisprudences nationales et européennes précédemment rappelées, de garantir son droit à être assistée et défendue, en préparation de la présentation judiciaire dont elle va faire l’objet à l’issue de sa garde à vue.

La Commission adopte l’article 13 sans modification.

Article 14

(art. 64-1, 65, 77,141-4, 154, 627-5, 695-27, 696-10, 712-16-3, 716-5, 812, 814 et 880 du code de procédure pénale)


Coordinations au sein du code de procédure pénale – Application des règles nouvelles de la garde à vue dans le cadre de l’enquête préliminaire et de l’exécution d’une commission rogatoire

Cet article procède à diverses coordinations au sein du code de procédure pénale.

Le 1° A, introduit par amendement de votre rapporteur, procède à des coordinations sémantiques à l’article 64-1, relatif aux enregistrements en matière criminelle et non modifié sur le fond, afin de remplacer le terme « interrogatoire » par le terme « audition » employé par le projet de loi.

Le abroge l’article 65 dont les dispositions relatives au registre de la garde à vue se retrouvent insérées au II de l’article 64 par l’article 10 du projet de loi.

Le réécrit l’article 77 relatif à la garde à vue dans le cadre d’une enquête préliminaire. Dans sa rédaction actuelle, cet article reprend, dans une rédaction distincte quoique proche, les dispositions de l’article 63 applicable en flagrance. Afin de mieux unifier le droit applicable, la nouvelle rédaction de l’article 77 procède à un simple renvoi aux articles relatifs à la garde à vue en flagrance, qui seront applicables dans le cadre d’une enquête préliminaire. Il s’agit des articles suivants :

—  article 62-2, relatif au caractère subsidiaire de la garde à vue par rapport à l’audition libre, dont le contenu a été supprimé par votre Commission (article 1er du projet de loi) ;

—  article 62-3 (introduit par l’article 1er du projet de loi) relatif à la définition de la garde à vue ;

—  article 62-4, relatif à l’audition libre dont le contenu a été supprimé par votre Commission (article 1er du projet de loi) ;

—  article 62-5 (introduit par l’article 1er du projet de loi) relatif au contrôle des magistrats exercé sur la garde à vue ;

—  article 62-6 fixant la liste des six motifs justifiant un placement en garde à vue, dont le contenu a été supprimé par votre Commission du fait de sa réintégration à l’article 62-3 (article 1er du projet de loi) ;

—  article 63 (réécrit par l’article 2 du projet de loi) précisant la procédure de placement en garde à vue par l’officier de police judiciaire, fixant la durée maximale de la mesure à vingt-quatre heures, ainsi que les conditions d’une éventuelle prolongation pour la même durée ;

—  article 63-1 (réécrit par l’article 2 du projet de loi) relatif aux informations qui doivent être données à la personne gardée à vue dès le début de la mesure, au titre desquelles figure le droit de se taire ;

—  article 63-2 (modifié par l’article 3 du projet de loi) autorisant la personne gardée à vue à prévenir un proche ainsi que son employeur ;

—  article 63-3 (modifié par l’article 4 du projet de loi) relatif au droit de la personne garde à vue à demander à être examinée par un médecin ;

—  article 63-3-1 (introduit par l’article 5 du projet de loi) relatif à l’assistance par un avocat, le cas échéant commis d’office ;

—  article 63-4 (modifié par l’article 6 du projet de loi) relatif à l’entretien de trente minutes avec l’avocat en début de mesure ;

—  article 63-4-1 (introduit par l’article 7 du projet de loi) autorisant l’avocat à consulter le procès-verbal constatant la notification de la garde à vue et des droits, ainsi que les procès-verbaux d’audition ;

—  article 63-4-2 (introduit par l’article 7 du projet de loi) permettant à l’avocat d’assister aux auditions de la personne gardée à vue mais prévoyant la possibilité d’un report de la présence de l’avocat, pour une durée maximale de douze heures ;

—  article 63-4-3 (introduit par l’article 7 du projet de loi) permettant à l’avocat de poser des questions à la fin des auditions auxquelles il assiste et de présenter des observations écrites à l’issue ;

—  article 63-4-4 (introduit par l’article 7 du projet de loi) relatif à l’interdiction pour l’avocat de faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue de son entretien avec la personne ;

—  article 63-5 (réécrit par l’article 8 du projet de loi) affirmant le principe de l’exécution des mesures de garde à vue dans des conditions assurant le respect de la dignité des personnes ;

—  article 63-6 (introduit par l’article 9 du projet de loi) encadrant les mesures de sécurité et interdisant la fouille intégrale à titre de mesure de sécurité ;

—  article 63-7 (introduit par l’article 9 du projet de loi) limitant aux nécessités de l’enquête et encadrant le recours à la fouille intégrale et aux investigations corporelles internes ;

—  article 63-8 (introduit par l’article 9 du projet de loi), relatif à la fin de la mesure de garde à vue ;

—  article 64 (réécrit par l’article 10 du projet de loi) relatif au procès-verbal de notification de placement en garde à vue et au registre de garde à vue ;

—  article 64-1 relatif à l’enregistrement audiovisuel des interrogatoires (modifié sur la forme au 1° A du présent article).

Le modifie les articles 141-4 et 712-16-3 du code de procédure pénale, respectivement introduits par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants et par la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale. Ces deux articles, aux rédactions très proches, permettent aux services enquêteurs d’appréhender toute personne surveillée par la justice à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a manqué aux obligations qui lui incombent, soit dans le cadre d’un contrôle judiciaire (article 141-4), soit dans le cadre d’un suivi par un juge de l’application des peines (article 712-16-3).

Ces deux articles prévoient alors que la personne peut, « sur décision d’un officier de police judiciaire, être retenue vingt-quatre heures au plus dans un local de police ou de gendarmerie afin que soit vérifiée sa situation et qu’elle soit entendue sur la violation de ses obligations. »

Le troisième alinéa de ces deux articles précise que la personne ainsi retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire de la nature de l’obligation qu’elle est soupçonnée avoir violée et du fait qu’elle peut exercer les droits prévus « par les troisième et quatrième alinéas de l’article 63-1, par les articles 63-2 et 63-3 et par les quatre premiers alinéas de l’article 63-4 ». Le 3° du présent article substitue à ces références, par coordination avec les modifications opérées par le projet de loi, les références aux « articles 63-2 à 63-4 ». Sont ainsi visés les droits de faire prévenir un proche et l’employeur, le droit de se faire examiner par un médecin et le droit à l’assistance par un avocat.

Le quatrième alinéa de ces articles précise que les pouvoirs conférés au procureur de la République par les articles 63-2 et 63-3 sont respectivement exercés par le juge d’instruction ou le JAP ou le magistrat qui le remplace.

Le cinquième alinéa rend les articles 64 et 65 applicables à cette mesure. L’article 65 étant abrogé par le présent article, il convient, par coordination de supprimer la référence à l’article 65, ce que fait le présent 3°.

Le du présent article réécrit l’article 154 relatif à l’application du régime de la garde à vue dans le cadre d’une commission rogatoire lancée par un juge d’instruction. Dans sa rédaction actuelle, cet article précise les règles permettant aux enquêteurs de « garder à leur disposition » une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, pour les nécessités de l’exécution d’une commission rogatoire.

Le présent article réécrit plus simplement l’article 154, en rendant applicable à ce cadre d’enquête les dispositions des articles 62-2 à 64-1 (soit les mêmes articles que ceux rendus applicables à l’enquête préliminaire, cf. supra). Il convenait cependant de préciser que, dans le cadre d’une instruction, les prérogatives conférées par ces articles au procureur de la République sont exercées par le juge d’instruction. C’est ce que fait le deuxième alinéa de l’article 154. Cet alinéa dispose en outre que lors de la délivrance de l’information prévue au I de l’article 63-1 (cf. article 2 du projet de loi), « il est précisé que la garde à vue intervient dans le cadre d’une commission rogatoire ».

Le du présent article modifie les articles 627-5, 695-27 et 696-10 du code de procédure pénale qui prévoient qu’une personne appréhendée en vertu respectivement d’une demande d’arrestation aux fins de remise, d’un mandat d’arrêt européen ou d’une demande d’extradition doit être conduite dans un certain délai devant un magistrat (la première dans un délai de vingt-quatre heures devant le procureur de la République territorialement compétent, les deux dernières dans un délai de quarante-huit heures devant le procureur général territorialement compétent). Ces trois articles prévoient que, pendant ces délais, les dispositions des articles 63-1 à 63-5 sont applicables. Le présent article remplace cette dernière mention par la mention de l’application des articles 63-1 à 63-7, par coordination avec l’introduction de nouveaux articles relatifs aux droits des personnes gardées à vue par le projet de loi. Sont en conséquence applicables aux personnes appréhendées en vertu d’une des trois situations : la notification de leurs droits, le droit de prévenir un proche et l’employeur, le droit d’être examiné par un médecin, le droit à l’assistance d’un avocat et l’interdiction du recours aux fouilles de sécurité.

Le du présent article modifie l’article 716-5 du code de procédure pénale qui prévoit que toute personne arrêtée en vertu d’un extrait de jugement ou d’arrêt portant condamnation à une peine d’emprisonnement ou de réclusion peut être retenue pour une durée de vingt-quatre heures dans un local de police ou de gendarmerie, aux fins de vérifications de son identité, de sa situation pénale ou de sa situation personnelle. Le quatrième alinéa de l’article prévoit que la personne ainsi arrêtée est immédiatement avisée qu’elle peut exercer les droits prévus aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 (premier et deuxième alinéas). Le présent 6° supprime cette dernière précision, rendant l’ensemble de l’article 63-4 applicable.

Le modifie l’article 812 du code de procédure pénale applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

Cet article précise, dans sa rédaction actuelle que « pour l’application des articles 63, 77 et 154, lorsque les conditions de transport ne permettent pas de conduire devant le magistrat compétent la personne retenue, l’officier de police judiciaire peut prescrire à cette personne de se présenter à lui périodiquement, à charge d’en informer immédiatement le magistrat compétent. Ce dernier décide de la mainlevée de la mesure ou de son maintien pour une durée qu’il fixe et qui ne peut se prolonger au-delà du jour de la première liaison aérienne ou maritime. » Le présent article tire la conséquence de la fusion opérée par le projet de loi des régimes des articles 63, 77 et 154 en remplaçant cette triple référence par celle de « pour l’application des dispositions sur la garde à vue ».

Le du présent article modifie les articles 814 et 880 du code de procédure pénale, le premier applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie et le second à Mayotte. Ces articles prévoient des adaptations des dispositions relatives à la présence de l’avocat en garde à vue au regard des contraintes particulières prévalant dans ces collectivités ultramarines : lorsque le déplacement d’un avocat paraît matériellement impossible, « l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 » peut avoir lieu avec une personne choisie par la personne gardée à vue (à la condition que cette personne ne soit pas elle-même mise en cause et n’ait fait l’objet d’aucune condamnation). Par coordination avec les nouveaux droits conférés par le projet de loi à la personne gardée à vue (assistance d’un avocat), le présent article remplace la mention de l’entretien par « les attributions dévolues à l’avocat par les articles 63-4 à 63-4-3 ».

Votre Commission a adopté un amendement de votre rapporteur précisant la rédaction de ce 8° : si les prérogatives nouvelles de l’avocat sont confiées à une personne non tenue au secret professionnel, votre rapporteur estime en effet qu’il convient de prévoir par amendement une sanction en cas de divulgation d’informations dont elle aurait ainsi eu à connaître : est étendue à ces cas l’application de la peine existante d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, sans préjudice de l’application de l’article 434-7-2 du code pénal qui prévoit une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende pour « toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler sciemment ces informations à des personnes qu’elle sait susceptibles d’être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est réalisée dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité ». Ces peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende si l’enquête ou l’instruction concerne un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement relevant des dispositions de l’article 706-73 du code de procédure pénale.

*

* *

La Commission adopte successivement l’amendement de coordination CL 199 du rapporteur, puis son amendement rédactionnel CL 200.

Elle examine ensuite l’amendement CL 201 du rapporteur.

M. le rapporteur. Par coordination, il convient de rectifier l’amendement en supprimant les mots « et que l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle prévue au quatrième alinéa de l’article 63-4-2 n’est pas matériellement possible ».

La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.

Elle adopte ensuite l’article 14 modifié.

Article 14 bis

(art. 323, art. 323-1 à 323-10 [nouveaux] du code des douanes)


Harmonisation du régime de la retenue douanière avec le nouveau régime
de la garde à vue

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement adopté par la Commission, ainsi que de neuf sous-amendements essentiellement rédactionnels de votre rapporteur. Il vise à tirer les enseignements de la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-32 QPC du 22 septembre 2010 ayant déclaré inconstitutionnelles les dispositions actuelles du code des douanes relatives à la retenue douanière et à encadrer le déroulement de la retenue douanière dans des conditions similaires à ce qui est prévu pour la garde à vue.

En l’état actuel du droit, c’est le 3. de l’article 323 du code des douanes qui définit le régime de la retenue douanière.

Son champ d’application est constitué des délits douaniers constatés en flagrant délit par un agent des douanes ou de toute autre administration.

Les principaux délits douaniers (62) sont les suivants :

—  les délits douaniers de première classe sont définis par les articles 414 et 414-1 du code des douanes qui punissent de trois ans d’emprisonnement la contrebande (détention, transport, importation ou exportation) de marchandises prohibées ou fortement taxées. La peine est portée à dix ans s’il s’agit de « marchandises dangereuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publiques, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé des douanes, soit lorsqu’ils sont commis en bande organisée » ;

—  les délits de deuxième classe sont constitués du blanchiment douanier, puni de 10 ans d’emprisonnement (article 415 du code des douanes,), des relations financières illicites avec l’étranger punies de cinq ans d’emprisonnement (article 459 du code) et du défaut de déclaration de transfert de capitaux, puni d’une amende proportionnelle du quart des sommes en cause (article 465 du code).

À l’origine, le 3. de l’article 323 du code des douanes ne comportait qu’une courte disposition permettant la « capture des prévenus » sans que soit prévue aucune garantie particulière. La loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières a complété cet article par les six alinéas destinés à imposer un cadre à la retenue douanière dont certaines dispositions se rapprochent du régime applicable à la garde à vue. Ont ainsi été prévues :

—  l’information immédiate du procureur de la République ;

—  une durée de vingt-quatre heures susceptible de prolongation pour la même durée sur autorisation du procureur de la République ;

—  la consignation des déclarations sur des procès-verbaux dressés par l’administration des douanes : le « procès-verbal de constat », établi par les agents des douanes, mentionne la durée des interrogatoires et des repos qui ont séparé ceux-ci, ainsi que le jour et l’heure du début et de la fin de la retenue. Ces mêmes mentions figurent par ailleurs sur un « registre spécial » tenu dans les locaux de douane.

—  l’imputation de la durée de la retenue douanière sur une éventuelle garde à vue qui lui ferait suite.

Toutefois, la retenue judiciaire se distingue aujourd’hui assez nettement de la garde à vue (63) :

—  la retenue douanière n’est possible que pour les délits flagrants, lorsque l’auteur est pris sur le fait, ce qui exclut qu’il y soit recouru en enquête préliminaire ;

—  si la personne placée en retenue doit être immédiatement informée des motifs de ce placement (64), elle ne bénéficie pas du droit de faire prévenir un proche ou d’obtenir la visite d’un médecin ; c’est seulement le procureur de la République qui peut se transporter sur les lieux pour en vérifier les modalités, se faire communiquer les procès-verbaux et registres tenus par les agents des douanes et, s’il l’estime nécessaire, désigner un médecin ;

—  la personne retenue n’a pas non plus droit à un entretien avec un avocat.

Dans sa décision précitée, le Conseil constitutionnel a déclaré le 3. de l’article 323 non conforme à la Constitution, la date de prise d’effet de cette déclaration d’inconstitutionnalité étant repoussée au 1er juillet 2011 (65). Il a estimé que le 3° de l’article 323 ne permet pas à la personne retenue contre sa volonté de « bénéficier de l’assistance effective d’un avocat pendant la phase d’interrogatoire », qu’une telle « restriction aux droits de la défense est imposée de façon générale sans considération des circonstances particulières susceptibles de la justifier pour rassembler ou conserver les preuves ou assurer la protection des personnes ».

Le Conseil a noté qu’en outre « la personne en retenue douanière ne reçoit pas la notification de son droit de garder le silence ».

Le présent article tire donc les enseignements de cette décision en alignant le régime de la retenue douanière sur celui de la garde à vue sur ces deux points : le droit à l’assistance effective d’un avocat et la notification du droit au silence. Il abroge le 3. de l’article 323, remplacé par un dispositif beaucoup plus complet figurant aux nouveaux articles 323-1 à 323-10, dont la rédaction est largement inspirée du présent projet de loi en matière de garde à vue.

*

* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 1 rectifié du Gouvernement faisant l’objet de sous-amendements.

M. le garde des Sceaux. Cet amendement encadre le déroulement de la retenue douanière.

La Commission adopte successivement le sous-amendement de coordination CL 203 du rapporteur, ses sous-amendements de précision CL 204, CL 206, CL 207 et CL 208 et ses trois sous-amendements rédactionnels CL 209 à CL 212.

Elle adopte l’amendement CL 1 rectifié sous-amendé.

Article 14 ter

(art. L. 3341-1 du code de la santé publique)


Possibilité de remise à un tiers de confiance d’une personne en état d’ivresse

La Commission a adopté un amendement de votre rapporteur tendant à insérer un article additionnel modifiant l’article L. 3341-1 du code de la santé publique relatif au placement en cellule de dégrisement.

Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit qu’une « personne trouvée en état d’ivresse dans les rues, chemins, places, café, cabarets ou autres lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais au poste le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison ».

Le dernier alinéa (IV) du nouvel article 62-4 du code de procédure pénale introduit par l’article 1er du présent projet de loi, supprimé par amendement de votre rapporteur, précisait l’articulation entre un placement en cellule de dégrisement, mesure de police administrative, et une éventuelle audition libre ou mesure de garde à vue qui lui ferait suite. Il prévoyait que cette personne, à l’issue de son placement en cellule de dégrisement, peut être entendue librement ou placée en garde à vue selon les conditions de droit commun.

Lors de l’audition du ministre par votre Commission, notre collègue Bernard Roman a soulevé la question du placement trop systématique en cellule de dégrisement, lors même que dans certains cas, un tel placement pourrait être évité en permettant qu’un tiers assume la responsabilité de la personne. Cette observation rejoint une suggestion faite à votre rapporteur par les représentants du syndicat des commissaires de la police nationale, qui avaient plaidé lors de leur audition pour que soit modifié l’article L. 3341-1 du code de la santé publique afin de prévoir la possibilité d’une remise à la famille ou à un tiers de confiance.

Tel est l’objet de l’amendement proposé par votre rapporteur et adopté par la Commission.

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* *

La Commission est saisie de l’amendement CL 202 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à permettre la remise à des tiers de confiance de personnes trouvées en état d’ivresse qu’il n’est pas nécessaire d’entendre immédiatement à l’issue d’une phase de dégrisement. C’est une solution pragmatique…

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 14

M. le président Jean-Luc Warsmann. L’amendement CL 17 de M. Dominique Raimbourg se trouve satisfait.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CL 149 et CL 150 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Article 15

(art. 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante)


Garde à vue des mineurs

L’article 15 a pour objet d’étendre au placement en garde à vue des mineurs les nouvelles dispositions, issues des articles précédents du projet de loi, relatives aux conditions de la garde à vue et aux droits des personnes placées sous ce régime.

Les règles particulières applicables au placement en garde à vue des mineurs sont prévues par l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. Aux termes du I de cet article, seuls les mineurs de plus de treize ans peuvent être placés en garde à vue. Toutefois, l’article prévoit qu’« à titre exceptionnel, le mineur de dix à treize ans contre lequel il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu’il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement peut, pour les nécessités de l’enquête, être retenu à la disposition d’un officier de police judiciaire avec l’accord préalable et sous le contrôle d’un magistrat du ministère public ou d’un juge d’instruction spécialisés dans la protection de l’enfance ou d’un juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder douze heures ». Cette retenue peut être prolongée à titre exceptionnel par décision motivée de ce magistrat pour une durée qui ne saurait non plus excéder douze heures, après présentation devant lui du mineur, sauf si les circonstances rendent cette présentation impossible. Pour les mineurs de dix à treize ans, l’entretien confidentiel de trente minutes avec un avocat est obligatoire.

L’information des parents ou du responsable d’un mineur de dix à treize ans retenu ou d’un mineur de plus de treize ans gardé à vue est obligatoire, sauf décision contraire du procureur de la République ou du juge chargé de l’information, « pour la durée que le magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures ou, lorsque la garde à vue ne peut faire l’objet d’une prolongation, douze heures ». L’examen du mineur par un médecin est également obligatoire.

De la même façon qu’un majeur, un mineur placé en garde à vue peut dès le début de la garde à vue demander à s’entretenir avec un avocat. Le IV de l’article 4 prévoit que « Lorsque le mineur n’a pas sollicité l’assistance d’un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux qui sont alors avisés de ce droit lorsqu’ils sont informés de la garde à vue ».

S’agissant de la possibilité de prolonger un placement en garde à vue, le V exclut la prolongation de la garde à vue pour les mineurs âgés de treize à seize ans pour les délits punis d’une peine inférieure à cinq ans d’emprisonnement. Le second alinéa de ce même V impose, pour la prolongation de la garde à vue d’un mineur, quel que soit son âge, sa « présentation préalable du mineur au procureur de la République ou au juge d’instruction du lieu d’exécution de la mesure ». Cette présentation préalable peut s’effectuer au moyen de la visioconférence, pratique que votre rapporteur a pu observer lors de son déplacement dans le commissariat du XIIème arrondissement de Paris et qui donne pleine satisfaction.

Enfin, alors que, pour les majeurs placés en garde à vue, l’enregistrement audiovisuel des interrogatoires n’est obligatoire qu’en matière criminelle, le VI de l’article 4 de l’ordonnance de 1945 prévoit l’enregistrement audiovisuel systématique de tous les interrogatoires des mineurs placés en garde à vue, quelle que soit la nature des faits pour lesquels ils sont entendus.

L’article 15 procède à trois adaptations rendues nécessaires par les modifications apportées par les articles précédents du projet de loi.

Premièrement, le I de l’article 4 de l’ordonnance de 1945, qui prévoit la possibilité d’une retenue judiciaire d’un mineur de dix à treize ans « pour les nécessités de l’enquête », est modifié pour soumettre le placement sous ce régime de retenue aux mêmes conditions que celles prévues pour la garde à vue, prévues par l’article 62-6 du code de procédure pénale tel qu’il résulte de l’article 1er du projet de loi.

Deuxièmement, le III, qui prévoit l’examen médical obligatoire des mineurs retenus ou gardés à vue, est modifié pour tenir compte des modifications apportées par l’article 4 du projet de loi à l’article 63-3 du code de procédure pénale.

Troisièmement, comme pour les majeurs, le droit des mineurs à s’entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue laisse la place à un droit plus large à « être assisté par un avocat, conformément aux dispositions des articles 63-3-1 à 63-4-3 du code de procédure pénale ».

La Commission adopte l’article 15 sans modification.

Après l’article 15

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL 152 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Article 15 bis

(art. 127, 133 et 135-2 du code de procédure pénale)


Modalités d’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt lorsque la personne recherchée est interpellée à plus de 200 kilomètres du juge mandant

Le présent article, issu d’un amendement du Gouvernement adopté par la Commission, tend à tirer les conséquences de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme France Moulin contre France du 23 novembre 2010.

Dans cet arrêt, la Cour de Strasbourg a condamné la France pour violation de l’article 5, paragraphe 3, de la Convention de sauvegarde (66) au motif que la requérante avait été privée de sa liberté pendant plus de cinq jours avant d’être présentée à un magistrat du siège.

En l’espèce, la requérante avait été placée deux jours en garde à vue dans le cadre d’une commission rogatoire, avant d’être placée en détention provisoire durant trois jours en exécution d’un mandat d’amener décerné par le juge d’instruction saisi.

Dans cet arrêt, la Cour de Strasbourg a condamné les modalités d’exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt lorsque la personne recherchée est interpellée à plus de 200 kilomètres du juge mandant.

Une personne interpellée dans de telles conditions doit normalement être conduite dans les vingt-quatre heures devant le juge mandant. Toutefois, si une présentation dans ce délai n’est pas possible, la personne doit être présentée au procureur de la République du lieu d’arrestation dans les vingt-quatre heures, puis déférée au juge mandant dans les quatre jours (ou six jours si le transfèrement s’effectue de ou vers un département d’outre-mer) à compter de la notification du mandat.

Lorsqu’un mandat d’amener est décerné à la suite d’une garde à vue, une personne peut donc être privée de liberté jusqu’à six (ou huit jours) sans intervention d’un magistrat du siège.

En conséquence, l’amendement du Gouvernement prévoit l’intervention du juge des libertés et de la détention dans les vingt-quatre heures en cas de mise à exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt lorsque la personne a été interpellée à plus de 200 kilomètres du siège de la juridiction saisie :

—  L’article 127 du code de procédure pénale prévoit le cas d’une personne recherchée en vertu d’un mandat d’amener qui serait trouvée à plus de 200 kilomètres du siège du juge d’instruction qui a délivré le mandat : il prévoit que s’il n’est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant ce magistrat, elle est conduite devant le procureur de la République du lieu de l’arrestation.

Le I du présent article remplace cette présentation devant le procureur par une présentation devant le juge des libertés et de la détention.

—  L’article 133 du code de procédure pénale prévoit qu’une personne arrêtée en vertu d’un mandat d’arrêt doit être présentée dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation devant le juge d’instruction ayant délivré ce mandat, ou, à défaut, devant le président du tribunal ou la juge qu’il aura désigné afin qu’il soit procédé à son interrogatoire et, le cas échéant, statué sur son placement en détention provisoire.

Le deuxième alinéa de cet article prévoit, par dérogation à ce principe, qu’une personne arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d’instruction ayant délivré le mandat, doit être conduite dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation devant le procureur de la République du lieu de l’arrestation qui reçoit ses déclarations après l’avoir avertie qu’elle est libre de ne pas en faire. Le 1° du II du présent article substitue à l’intervention du procureur de la République celle du juge des libertés et de la détention.

En conséquence, le troisième alinéa de l’article, qui dans sa rédaction actuelle prévoit que le procureur informe sans délai le magistrat qui a délivré le mandat et requiert le transfèrement, est réécrit par le 2° du II pour, là encore, prévoir l’intervention du juge des libertés et de la détention.

—  L’article 135-2 du code de procédure pénale traite de deux cas particuliers : celui de la découverte après le règlement de l’information judiciaire d’une personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt, et celui de la délivrance d’un mandat d’arrêt après l’ordonnance de règlement.

Dans ces cas, la procédure suivie est la suivante : le procureur de la République du lieu de l’arrestation est avisé de la rétention de la personne, qui ne peut durer plus de vingt-quatre heures pendant lesquelles il est fait application des articles 63-2 et 63-3 du code de procédure pénale.

La personne est ensuite conduite devant le procureur de la République du ressort de la juridiction de jugement saisie des faits afin que ce magistrat présente la personne devant le juge des libertés et de la détention qui peut, soit placer la personne sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu’à sa comparution devant la juridiction de jugement, soit la remettre en liberté.

Le cinquième alinéa de l’article prévoit que, par dérogation aux principes ainsi posés, dans le cas où la personne a été arrêtée à plus de 200 kilomètres du siège de la juridiction de jugement et où il n’est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur de la République du ressort de la juridiction de jugement saisie des faits, la personne est présentée devant le procureur de la République du lieu de son arrestation. Le 1° du III du présent article remplace ce dernier magistrat par le juge des libertés et de la détention du lieu de l’arrestation. Ce magistrat ordonne alors le transfèrement de la personne, qui doit comparaître devant lui dans les quatre jours de la notification du mandat ; ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement entre un département d’outre-mer et la France métropolitaine ou un autre département d’outre-mer.

Le 2° du III procède à une modification de conséquence au sixième alinéa de cet article.

*

* *

La Commission examine ensuite l’amendement CL 5 du Gouvernement.

M. le garde des Sceaux. Cet amendement tend à tirer les conséquences de l’arrêt Moulin contre France rendu le 23 novembre 2010 par la Cour européenne des droits de l’Homme. La France a été condamnée parce que la requérante avait été privée de sa liberté pendant plus de cinq jours avant d’être présentée à un magistrat du siège – deux jours en garde à vue, puis trois jours en exécution d’un mandat d’amener émis par le juge d’instruction.

Il s’agit de prévoir l’intervention du juge des libertés et de la détention à la place du procureur en cas de mise à exécution d’un mandat d’amener ou d’arrêt.

M. le rapporteur. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Article 16

(art. 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique)


Rétribution de l’avocat désigné d’office pour l’assistance
d’une personne gardée à vue

L’article 16 procède, dans l’article 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique qui définit les modalités de rétribution des avocats désignés d’office pour assister une personne placée en garde à vue, à une coordination rendue nécessaire par les modifications apportées par les articles précédents du projet de loi.

Actuellement, l’article 64-1 de la loi du 10 juillet 1991 dispose que « L’avocat désigné d’office qui intervient dans les conditions prévues à l’article 63-4 du code de procédure pénale a droit à une rétribution ». Le présent article modifie cet article pour prévoir que « L’avocat désigné d’office qui intervient au cours de la garde à vue dans les conditions prévues par le code de procédure pénale a droit à une rétribution ».

Aux termes des troisième et quatrième alinéas de cet article 64-1 de la loi de 1991, « l’État affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions ainsi assurées par les avocats » ; « Le montant de la dotation est calculé selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, en fonction du nombre des missions effectuées par les avocats désignés d’office ». Fixée à 61 €, elle est majorée de 31 € lorsque l’intervention a lieu entre 22 heures et 7 heures et de 23 € lorsque l’intervention a lieu hors des limites de la commune du siège du tribunal de grande instance (67). Ces deux majorations sont cumulables, sauf si l’avocat est appelé à intervenir pour plusieurs personnes gardées à vue dans un même lieu lors d’un même déplacement.

Selon l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, « le nombre de personnes gardées à vue assistées d’un avocat commis d’office rétribué par l’État s’est élevé (…) à 197 994 en 2009 », donnant lieu à 149 514 interventions rétribuées (68) (dont 36 560 ayant donné lieu à un déplacement de nuit et 68 366 à un déplacement hors des limites de la commune du siège du TGI). En 2009, le montant des rétributions versées par les Caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) aux avocats commis d’office s’est élevé à 15,45 millions d’euros (TTC).

L’étude d’impact évalue l’impact financier attendu de l’extension du droit de la personne placée en garde à vue à être assistée au cours de cette mesure : selon le mode de calcul retenu pour la rémunération des avocats (69), le coût total de la réforme au titre de l’aide juridique serait compris entre 44,5 et 65,8 millions d’euros (TTC) en année pleine (70). Ce résultat est obtenu en se fondant sur les prévisions suivantes : une baisse du nombre de gardes à vue à 500 000, dont 100 000 faisant l’objet d’une prolongation ; un taux moyen d’intervention de l’avocat en garde à vue de 80 %, soit 400 000 interventions ; un nombre de permanences d’avocats à organiser de 120 000 pour répondre au besoin de ces 400 000 interventions.

Selon l’étude d’impact, « la solution retenue pour rétribuer, sur le terrain de l’aide juridique, les avocats commis d’office intervenant au cours de la garde à vue repose sur le maintien d’une rétribution à l’acte pour chaque mission d’assistance, sur la base du tarif actuel, complétée par une indemnité d’astreinte pour tenir compte des sujétions nouvelles dans l’exercice des droits de la défense découlant de la réforme ». La rétribution à l’acte continuera d’être financée par une dotation « garde à vue » versée par l’État, dont le montant sera déterminé, comme actuellement, en fonction d’une prévision du nombre de missions d’assistance à accomplir au cours de l’année, qui sera versée en début d’exercice et pourra être ajustée en fonction de l’évolution de la consommation des crédits. En outre, chaque barreau qui aura conclu avec le tribunal de grande instance un protocole « permanence garde à vue » percevra une dotation complémentaire destinée à permettre aux barreaux d’allouer aux avocats de permanence de garde à vue un complément à leur rétribution de base, dit « indemnité d’astreinte » et dont le montant sera arrêté par le barreau.

Le Gouvernement a indiqué, en conclusion de l’étude de l’impact financier de la réforme au titre de l’aide juridique, avoir proposé aux responsables du CNB un « suivi conjoint et mensuel de la mise en œuvre du nouveau régime, permettant, mi-2011 par exemple, une adaptation du nouveau système d’aide juridictionnelle, si le besoin en apparaissait indispensable ». Il a en outre souligné que le système proposé avait le mérite de la « plasticité » : « la situation des barreaux par rapport aux besoins liés à la réforme de la garde à vue rend en effet nécessaire, a fortiori dans un premier temps, l’adoption d’organisations adaptées que seul le bâtonnier de chaque barreau est en mesure de proposer ; c’est dans cet esprit que l’indemnité d’astreinte serait versée au barreau, à charge pour le bâtonnier d’en répartir l’enveloppe en fonction des situations de son barreau ».

La Commission adopte l’article 16 sans modification.

Après l’article 16

La Commission est saisie de l’amendement CL 174 du rapporteur.

M. le rapporteur. Compte tenu de nos débats, je le retire.

L’amendement est retiré.

Article 17

Application outre-mer

Le présent article précise les conditions d’application des dispositions de la loi dans les collectivités ultramarines : elles seront applicables à l’ensemble du territoire de la République.

Outre les DOM régis par le principe d’identité législative, auxquels s’ajoutera à compter de mars 2011 Mayotte, ces dispositions seront donc applicables à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, en Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna, dans les TAAF et en Nouvelle-Calédonie.

La Commission adopte l’article 17 sans modification.

Article 18

Entrée en vigueur

Le dernier article du texte précise la date d’entrée en vigueur de ses dispositions, fixée au premier jour du deuxième mois suivant sa publication au Journal officiel et au plus tard le 1er juillet 2011.

Cette date d’entrée en vigueur est cohérente avec la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010 qui a déclaré les actuels articles 62, 63, 63-1, 63-4 (alinéas 1er à 6) et 77 du code de procédure pénale contraires à la Constitution, tout en assortissant cette déclaration d’inconstitutionnalité d’un délai de prise d’effet au 1er juillet 2011.

Le Conseil constitutionnel, après avoir relevé que « en principe, une déclaration d’inconstitutionnalité doit bénéficier à la partie qui a présenté la question prioritaire de constitutionnalité », a en effet considéré que « l’abrogation immédiate des dispositions contestées méconnaîtrait les objectifs de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et entraînerait des conséquences manifestement excessives » et qu’il y avait en conséquence lieu « de reporter au 1er juillet 2011 la date de cette abrogation afin de permettre au législateur de remédier à cette inconstitutionnalité » (71).

La chambre criminelle de la Cour de cassation a d’ailleurs considéré de la même manière que les nouvelles règles de procédure rendues nécessaires par la contrariété du régime actuel avec l’article 6 de la Convention de sauvegarde « ne peuvent s’appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa mise en oeuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bonne administration de la justice » et « que ces règles prendront effet lors de l’entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue, ou, au plus tard, le 1er juillet 2011 » (72).

Au 1er juillet 2011, les articles déclarés inconstitutionnels par le Conseil constitutionnel seront abrogés. Il appartient donc au Parlement, avant cette date, d’adopter définitivement les nouvelles rédactions appelées à remplacer les dispositions censurées.

Dans l’hypothèse où l’examen parlementaire serait rapide, il conviendrait cependant de ne pas attendre le 1er juillet 2011 pour appliquer les nouvelles dispositions, c’est pourquoi le présent article prévoit utilement la possibilité d’une date d’entrée en vigueur anticipée, après un délai d’un mois suivant la publication du texte, permettant aux enquêteurs, aux magistrats et aux avocats de prendre connaissance des nouvelles règles qu’ils auront à appliquer.

La Commission adopte l’article 18 sans modification.

Après l’article 18

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement l’amendement CL 18 de M. Dominique Raimbourg et l’amendement CL 98 de Mme Delphine Batho.

Puis la Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi relatif à la garde à vue, dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

___

Texte du projet de loi

___

Texte adopté par la Commission

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Projet de loi relatif à la garde à vue

Projet de loi relatif à la garde à vue

 

CHAPITRE IER

CHAPITRE IER

 

Dispositions relatives à l’encadrement de la garde à vue

Dispositions relatives à l’encadrement de la garde à vue

 

Article 1er

Article 1er

 

Après l’article 62-1 du code de procédure pénale, sont insérés les articles 62-2 à 62-6 ainsi rédigés :

(Alinéa sans modification)

Code de procédure pénale

Art. 62-3 et 62-6. – Cf. infra.

Art. 63. – Cf. infra art. 2.

« Art. 62-2. – La personne à l’encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, présumée innocente, demeure libre lors de son audition par les enquêteurs. Elle ne peut être placée en garde à vue que dans les cas et conditions prévus par les articles 62-3, 62-6 et 63.

« Art. 62-2. – Supprimé

(amendements identiques
CL102 rectifié et CL175)

 

« Art. 62-3. – La garde à vue est une mesure de contrainte prise au cours de l’enquête par laquelle une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs pour l’un des motifs prévus par l’article 62-6.

« Art. 62-3. – 
… contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, par laquelle une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs dès lors que cette mesure constitue l’unique moyen de parvenir à au moins un des objectifs suivants :

   

« 1° Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;

   

« 2° Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;

   

« 3° Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

   

« 4° Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

   

« 5° Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;

   

« 6° Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser l’infraction.

(amendement CL176)

 

« Art. 62-4. – I. – Hors les cas où la personne mentionnée à l’article 62-3 fait l’objet d’un mandat de recherche ou a été conduite par la force publique dans les locaux des services de police judiciaire, la seule nécessité de l’entendre sur les faits dont elle est soupçonnée n’impose pas son placement en garde à vue dès lors qu’elle consent à son audition.

« Art. 62-4. – Supprimé

(amendements identiques
CL102 rectifié et CL175)

 

« Le consentement de la personne à son audition est recueilli après qu’elle a été informée par l’officier ou l’agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l’infraction dont elle est soupçonnée ainsi que des dispositions du II. Cette information et le consentement de la personne sont mentionnés dans le procès-verbal d’audition.

 
 

« II. – À tout moment, la personne entendue dans les conditions prévues au I peut mettre un terme à son audition. À chaque reprise de l’audition, son consentement est à nouveau recueilli et mentionné au procès verbal.

 
 

« III. – Pour l’application des dispositions du I, la personne est considérée comme s’étant rendue librement dans les locaux du service ou de l’unité de police judiciaire lorsqu’elle s’y est présentée spontanément ou à la suite d’une convocation des enquêteurs ou lorsque, ayant été appréhendée, elle a accepté expressément de suivre l’officier ou l’agent de police judiciaire.

 

Code de la santé publique

Art. L. 3341-1. – Cf. infra art. 14 ter.

« IV. – Lorsqu’il est nécessaire de procéder à son audition, la personne placée en chambre de sûreté en application de l’article L. 3341-1 du code de la santé publique en raison de son état d’ivresse peut être entendue, à l’issue de ce placement, dans les conditions prévues par le I du présent article.

 
 

« Art. 62-5. – La garde à vue s’exécute sous le contrôle du procureur de la République.

« Art. 62-5. – 
… du juge des libertés et de la détention ou, à défaut, du président du tribunal de grande instance ou de son délégué.

(amendement CL108)

 

« Ce magistrat apprécie si le maintien de la personne en garde à vue et, le cas échéant, la prolongation de cette mesure sont nécessaires à l’enquête et proportionnés à la gravité des faits dont la personne est soupçonnée.






… faits que la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre.

(amendement CL177)

 

« Il assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne gardée à vue.

(Alinéa sans modification)

 

« Il peut ordonner à tout moment que la personne gardée à vue soit présentée devant lui ou remise en liberté.

(Alinéa sans modification)

 

« Les pouvoirs conférés au procureur de la République par le présent article sont exercés par le procureur de la République du lieu d’exécution de la garde à vue ou par le procureur de la République sous la direction duquel l’enquête est menée. »

Alinéa supprimé

(amendement CL109)

 

« Art. 62-6. – Une personne ne peut être placée en garde à vue que si la mesure garantissant le maintien de la personne à la disposition des enquêteurs est l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants :

« Art. 62-6. – Supprimé

(amendement CL179)

 

« 1° Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;

 
 

« 2° Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République aux fins de mettre ce magistrat en mesure d’apprécier la suite à donner à l’enquête ;

 
 

« 3° Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

 
 

« 4° Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

 
 

« 5° Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;

 
 

« 6° Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser l’infraction. »

 
 

Article 2

Article 2

Code de procédure pénale

Les articles 63 et 63-1 du même code sont remplacés par les dispositions suivantes :

(Alinéa sans modification)

Art. 63. – L’officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l’enquête, placer en garde à vue toute personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il en informe dès le début de la garde à vue le procureur de la République.

« Art. 63. – I. – Seul un officier de police judiciaire peut, d’office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue.

« Art. 63. – I. – 
… peut placer …

(amendement CL181)

 

« L’officier de police judiciaire en informe par tout moyen le procureur de la République dès le début de la mesure.

« Dès le début de la mesure, l’officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l’article 62-3, ce placement et l’avise de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne en application du 2° de l’article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues à l’article 63-1.

 

« Il lui donne connaissance des raisons qui justifient le placement en garde à vue et l’avise de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne en garde à vue en application du 2° de l’article 63-1. Cette qualification peut être modifiée par le procureur de la République. En ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne selon les modalités prévues par l’article 63-1.

Alinéa supprimé

(amendement CL182)

 

« II. – La durée de la garde à vue ne peut excéder vingt-quatre heures.

« II. – (Alinéa sans modification)

La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures. Toutefois, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite du procureur de la République. Ce magistrat peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne gardée à vue.

« Toutefois, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République, si l’infraction dont la personne est soupçonnée est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an et si la prolongation de la mesure est l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs énumérés à l’article 62-6.





… l’infraction que la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre est un …

… parvenir à au moins un des objectifs mentionnés aux 1° à 6° de l’article 62-3.

(amendement CL183)

Sur instructions du procureur de la République, les personnes à l’encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l’exercice de poursuites sont, à l’issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.

« L’autorisation ne peut être accordée qu’après présentation de la personne au procureur de la République. Cette présentation peut être réalisée par l’utilisation d’un moyen de communication audiovisuelle. Elle peut cependant, à titre exceptionnel, être accordée par une décision écrite et motivée, sans présentation préalable.





… de télécommunication audiovisuelle …

(amendement CL184)

Pour l’application du présent article, les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil constituent un seul et même ressort.

Art. 62-3 et 62-6. – Cf. supra art. 1er.

« III. – Pour la computation de la durée de la garde à vue, l’heure du début de la mesure est fixée, le cas échéant soit à l’heure à laquelle la personne a été appréhendée avant son placement en garde à vue, soit à l’heure à laquelle a débuté la période d’audition libre de la personne lorsque le placement en garde à vue a été décidé au cours ou à l’issue de cette audition.

« III. – (Sans modification)

 

« Si une personne a déjà été placée en garde à vue pour les mêmes faits, la durée des précédentes périodes de garde à vue s’impute sur la durée de la mesure.

 

Art. 63-1. – Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l’article 63.

« Art. 63-1. – I. – La personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits :

« Art. 63-1. – I. – (Alinéa sans modification)

Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne gardée à vue ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention.

« 1° De son placement en garde à vue ainsi que de la durée de la mesure et de la ou des prolongations dont celle-ci peut faire l’objet ;

« 1° (Sans modification)

Les informations mentionnées au premier alinéa doivent être communiquées à la personne gardée à vue dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits.

« 2° De la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

« 2° (Sans modification)

 

« 3° De ce qu’elle bénéficie des droits suivants :

« 3° Du fait qu’elle bénéficie :

 

« – droit de faire prévenir un proche et son employeur conformément aux dispositions de l’article 63-2 ;

« – du droit …
… employeur, conformément à l’article …

 

« – droit d’être examinée par un médecin conformément aux dispositions de l’article 63-3 ;

« – du droit … … médecin, conformément à l’article …

 

« – droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat conformément aux dispositions des articles 63-3-1 à 63-4-2.

« – du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux articles 63-3-1 à 63-4-3

(amendement CL186)

Si cette personne est atteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

« Si la personne est atteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec elle. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

(Alinéa sans modification)

Si la personne est remise en liberté à l’issue de la garde à vue sans qu’aucune décision n’ait été prise par le procureur de la République sur l’action publique, les dispositions de l’article 77-2 sont portées à sa connaissance.

« Mention de l’information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal et émargée par la personne gardée à vue. En cas de refus d’émargement, il en est fait mention.



… procès-verbal de déroulement de la garde à vue et …

(amendement CL97)

Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue.

« II. – La personne placée en garde à vue est informée au début de son audition qu’elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. »

« II. – 
… de sa première audition qu’elle a le choix de faire …

… taire. Toutefois ce droit de se taire ne s’applique pas aux informations suivantes que la personne a le devoir de communiquer : son nom, son prénom, sa date de naissance, son lieu de naissance, son domicile et le cas échéant sa résidence. »

(amendement CL88 rectifié)

Art. 63-2. – Cf. infra art. 3.

Art. 63-3. – Cf. infra art. 4.

Art. 63-3-1. – Cf. infra art. 5.

Art. 63-4. – Cf. infra art. 6.

Art. 63-4-1, 63-4-2 et 63-4-3. – Cf. infra art. 7.

   
 

Article 3

Article 3

 

L’article 63-2 du même code est ainsi modifié :

(Alinéa sans modification)

Art. 63-2. – Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir dans le délai prévu au dernier alinéa de l’article 63-1, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe, l’un de ses frères et sœurs ou son employeur de la mesure dont elle est l’objet.

1° Au premier alinéa, les mots : « ou son employeur » sont supprimés. Le même alinéa est complété par la phrase : « Elle peut en outre faire prévenir son employeur. » ;

1°  … les mots : « dans le délai prévu au dernier alinéa de l’article 63-1 » et « ou … … par une phrase ainsi rédigée : « Elle …

(amendement CL188)

Si l’officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l’enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s’il y a lieu, d’y faire droit.

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

2° (Alinéa sans modification)

 

« Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences prévues au premier alinéa doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a formulé la demande. »

insurmontable, qui doit être mentionnée sur le procès-verbal, les …

(amendement CL124 rectifié)

 

Article 4

Article 4

 

L’article 63-3 du même code est ainsi modifié :

(Sans modification)

Art. 63-3. – Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois.

1° Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Le médecin se prononce sur l’aptitude au maintien en garde à vue et procède à toutes constatations utiles. Sauf en cas de circonstance insurmontable, les diligences prévues au présent alinéa doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a formulé la demande. » ;

 

À tout moment, le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire peut d’office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue.

   

En l’absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l’officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire.

   

Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier.

2° Au quatrième alinéa, les mots : « par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue » sont supprimés.

 

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu’il est procédé à un examen médical en application de règles particulières.

Art. 63-1. – Cf. supra. art. 2.

   
 

Article 5

Article 5

 

Après l’article 63-3 du même code, il est inséré un article 63-3-1 ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« Art. 63-3-1. – Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à être assistée par un avocat. Si elle n’est pas en mesure d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bâtonnier.

 
 

« Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai.

 
 

« L’avocat désigné est informé par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête. »

 
 

Article 6

Article 6

 

Les six premiers alinéas de l’article 63-4 du même code sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

L’article 63-4 du même code est ainsi rédigé :

(amendements identiques CL2 et CL62)

Art. 63-4. – Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à s’entretenir avec un avocat. Si elle n’est pas en mesure d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bâtonnier.

   

Le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai.

   

L’avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien. Il est informé par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête.

« L’avocat désigné peut communiquer avec la personne gardée à vue dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien.

… désigné dans les conditions prévues à l’article 63-3-1 peut …

(amendement CL159)

À l’issue de l’entretien dont la durée ne peut excéder trente minutes, l’avocat présente, le cas échéant, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.

« La durée de l’entretien ne peut excéder trente minutes.

(Alinéa sans modification)

L’avocat ne peut faire état de cet entretien auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue.

   

Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut également demander à s’entretenir avec un avocat dès le début de la prolongation, dans les conditions et selon les modalités prévues aux alinéas précédents.

« Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une prolongation, la personne peut, à sa demande, s’entretenir à nouveau avec un avocat dès le début de la prolongation dans les conditions et pour la durée prévues aux alinéas précédents. »






… aux deux premiers alinéas. »

(amendement CL160)

Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 4°, 6°, 7°, 8° et 15° de l’article 706-73, l’entretien avec un avocat ne peut intervenir qu’à l’issue d’un délai de quarante-huit heures. Si elle est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 3° et 11° du même article, l’entretien avec un avocat ne peut intervenir qu’à l’issue d’un délai de soixante-douze heures. Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue par les enquêteurs dès qu’il est informé par ces derniers du placement en garde à vue.

   

Art. 63-3-1. – Cf. supra art. 5.

   
 

Article 7

Article 7

 

Après l’article 63-4 du même code, sont insérés les articles 63-4-1 à 63-4-4 ainsi rédigés :

(Alinéa sans modification)

Art. 63-1. – Cf. supra art. 2.

« Art. 63-4-1. – À sa demande l’avocat peut consulter le procès-verbal établi en application de l’article 63-1 constatant la notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés ainsi que les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste.

« Art. 63-4-1. – 

application du dernier alinéa du I de …


… assiste. Il ne peut en revanche en demander ou en prendre une quelconque copie.

(amendements CL161 et CL143)

 

« Toutefois, la consultation de ces pièces peut être limitée dans les cas et conditions prévues par l’article 63-4-2.

Alinéa supprimé

(amendements identiques
CL162 et CL114)

 

« Art. 63-4-2. – L’avocat peut assister aux auditions de la personne gardée à vue.

« Art. 63-4-2. – La personne gardée à vue peut demander que l’avocat assiste à ses auditions. Dans ce cas, la première audition ne peut être débutée avant l’expiration d’un délai de deux heures suivant l’avis adressé, dans les conditions prévues à l’article 63-3-1, à l’avocat choisi ou au bâtonnier, de la demande formulée par la personne gardée à vue d’être assistée par un avocat.

   

« Si l’avocat ne se présente pas à l’expiration du délai prévu au premier alinéa, l’officier de police judiciaire peut décider de débuter l’audition ou la confrontation.








Art. 63-4. – Cf. supra. art. 6.

 

« Si l’avocat se présente après l’expiration du délai prévu au premier alinéa alors qu’une audition ou confrontation est en cours, celle-ci est interrompue, à la demande de la personne gardée à vue, afin de lui permettre de s’entretenir avec son avocat dans les conditions prévues à l’article 63-4. Si la personne gardée à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci peut assister à l’audition ou confrontation en cours dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire.

(amendement CL214)

 

« Toutefois, à la demande de l’officier de police judiciaire, le procureur de la République peut autoriser celui-ci à différer la présence de l’avocat lors des auditions pendant une durée ne pouvant excéder douze heures lorsque cette mesure apparaît indispensable, en considération des circonstances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes. L’autorisation du procureur de la République est écrite et motivée.



… celui-ci soit à débuter immédiatement l’audition de la personne gardée à vue sans attendre l’expiration du délai de deux heures prévu au premier alinéa, soit à différer …
… indispensable, pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances …

(amendements CL163 et CL164)

 

« Dans le cas prévu au deuxième alinéa du présent article, le procureur de la République peut décider, à la demande de l’officier de police judiciaire, que, pendant la durée fixée par l’autorisation, l’avocat ne pourra consulter les procès-verbaux d’audition de la personne gardée à vue.

(Alinéa sans modification)

   

« Lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, la présence de l’avocat lors des auditions peut, dans les limites fixées au deuxième alinéa, être différée, au-delà de la douzième heure, jusqu’à la vingt-quatrième heure, par décision écrite et motivée du juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République.

(amendement CL3)

   

« Art. 63-4-3. – À l’issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l’avocat peut poser des questions. L’officier ou l’agent de police judiciaire peut s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou à la dignité de la personne. Mention de la question refusée est portée au procès-verbal.

Art. 63-4. – Cf. supra art. 6.

« Art. 63-4-3. – À l’issue de chacun des entretiens prévus à l’article 63-4 et de chacune des auditions auxquelles il a assisté en application du 63-4-2, l’avocat peut présenter des observations écrites. Celles-ci sont alors jointes à la procédure.

« À l’issue de chaque entretien avec la personne gardée à vue et de chaque audition ou confrontation à laquelle il a assisté, l’avocat …

… sont jointes …

(amendement CL166)

 

« Art. 63-4-4. – Sans préjudice de l’exercice des droits de la défense, l’avocat ne peut faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue ni de son entretien avec la personne qu’il assiste ni des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions. »

« Art. 63-4-4. – 



… ni des entretiens avec …

(amendement CL167)

   

Article 7 bis (nouveau)

   

I. – Après l’article 63-4 du même code, il est inséré un article 63-4-5 ainsi rédigé :

   

« Art. 63-4-5 – Si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue qui est assistée d’un avocat lors de son audition, elle peut demander à être également assistée par un avocat choisi par elle, ou son représentant légal si elle est mineure, ou, à sa demande, désigné par le bâtonnier.

   

« La victime est informée de ce droit avant qu’il soit procédé à la confrontation.

   

« À sa demande, l’avocat peut consulter les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste.

Art. 63-4-3. – Cf. supra. art. 7

 

« L’article 63-4-3 est applicable. »

Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique

Art. 64-1. – L’avocat désigné d’office qui intervient dans les conditions prévues à l’article 63-4 du code de procédure pénale a droit à une rétribution.

 

II. – Après le premier alinéa de l’article 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

   

« Les dispositions du premier alinéa sont également applicables lorsque l’avocat intervient pour assister une victime lors d’une confrontation avec une personne gardée à vue. »

(amendement CL158 rectifié
et sous-amendement CL217)

L’État affecte annuellement à chaque barreau une dotation représentant sa part contributive aux missions ainsi assurées par les avocats.

   

Cette dotation est versée sur le compte spécial prévu par l’article 29.

   

Le montant de la dotation est calculé selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, en fonction du nombre des missions effectuées par les avocats désignés d’office.

   
 

Article 8

Article 8

Code de procédure pénale

L’article 63-5 du même code est ainsi rédigé :

(Sans modification)

Art. 63-5. – Lorsqu’il est indispensable pour les nécessités de l’enquête de procéder à des investigations corporelles internes sur une personne gardée à vue, celles-ci ne peuvent être réalisées que par un médecin requis à cet effet.

« Art. 63-5. – La garde à vue doit s’exécuter dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne.

 
 

« Seules peuvent être imposées à la personne gardée à vue les mesures de sécurité strictement nécessaires. »

 
 

Article 9

Article 9

 

Après l’article 63-5 du même code, sont insérés les articles 63-6 à 63-8 ainsi rédigés :

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 63-6. – Les mesures de sécurité ayant pour objet de s’assurer que la personne gardée à vue ne détient aucun objet dangereux pour elle-même ou pour autrui sont limitativement énumérées par arrêté de l’autorité ministérielle compétente. Elles ne peuvent consister en une fouille à corps intégrale.

« Art. 63-6. – 



… sont définies par …


… fouille intégrale.

(amendements CL169 et CL213)

   

« La personne gardée à vue peut demander à conserver lors de son placement en garde à vue certains objets intimes. Dans ce cas, elle signe une décharge exonérant l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire de toute responsabilité pénale, civile ou administrative, au cas où elle utiliserait ces objets pour attenter à sa vie ou à son intégrité physique.

(amendement CL145)

 

« Art. 63-7. – Lorsqu’il est indispensable, pour les nécessités de l’enquête, de procéder à une fouille à corps intégrale d’une personne gardée à vue, celle-ci doit être décidée par un officier de police judiciaire et réalisée par une personne de même sexe que la personne faisant l’objet de la fouille.

« Art. 63-7. – 

… fouille intégrale …

… réalisée dans un espace fermé par …

(amendements CL131 et CL213)

 

« Lorsqu’il est indispensable, pour les nécessités de l’enquête, de procéder à des investigations corporelles internes sur une personne gardée à vue, celles-ci ne peuvent être réalisées que par un médecin requis à cet effet.

(Alinéa sans modification)

 

« Art. 63-8. – À l’issue de la garde à vue, la personne est, sur instruction du procureur de la République, soit remise en liberté, soit déférée devant ce magistrat.

« Art. 63-8. – (Sans modification)

Art. 77-2. – Cf. annexe.

« Si la personne est remise en liberté à l’issue de la garde à vue sans qu’aucune décision n’ait été prise par le procureur de la République sur l’action publique, les dispositions de l’article 77-2 sont portées à sa connaissance. »

 
 

Article 10

Article 10

 

L’article 64 du même code est ainsi rédigé :

(Alinéa sans modification)

Art. 64. – Tout officier de police judiciaire doit mentionner sur le procès-verbal d’audition de toute personne gardée à vue la durée des interrogatoires auxquels elle a été soumise et des repos qui ont séparé ces interrogatoires, les heures auxquelles elle a pu s’alimenter, le jour et l’heure à partir desquels elle a été gardée à vue, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit amenée devant le magistrat compétent. Il mentionne également au procès-verbal les demandes faites en application des articles 63-2, 63-3 et 63-4 et la suite qui leur a été donnée.

« Art. 64. – I. – L’officier de police judiciaire établit un procès-verbal mentionnant :

« Art. 64. – I. – (Alinéa sans modification)

« 1° Les motifs justifiant le placement en garde à vue, conformément aux 1° à 6° de l’article 62-3 ;

(amendement CL190)

« 1° Les motifs du placement en garde à vue par référence aux dispositions de l’article 62-6 ;

 
 

« 2° La durée des auditions de la personne gardée à vue et des repos qui ont séparé ces auditions, les heures auxquelles elle a pu s’alimenter, le jour et l’heure à partir desquels elle a été gardée à vue, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a été soit libérée, soit amenée devant le magistrat compétent ;







… soit déférée devant …

(amendement CL191)

 

« 3° Le cas échéant, les auditions de la personne gardée à vue effectuées dans une autre procédure pendant le temps de la garde à vue ;

« 3° 

… pendant la durée de …

(amendement CL192)

 

« 4° Les informations données et les demandes faites en application des articles 63-2, 63-3 et 63-3-1 et la suite qui leur a été donnée ;

« 4° 

… et les suites qui leur ont été données ;

(amendement CL193)

 

« 5° S’il a été procédé à une fouille intégrale ou à des investigations corporelles internes.

« 5° (Sans modification)

Cette mention doit être spécialement émargée par les personnes intéressées, et, au cas de refus, il en est fait mention. Elle comportera obligatoirement les motifs de la garde à vue.

« Ces mentions doivent être spécialement émargées par la personne gardée à vue. En cas de refus, il en est fait mention.

(Alinéa sans modification)

Art. 62-3 et 62-6. – Cf. supra art. 1er.

Art. 63-2. – Cf. supra art. 3.

Art. 63-3. – Cf. supra art. 4.

Art. 63-3-1. – Cf. supra art. 5.

« II. – Les mentions et émargements prévus aux 2° et 5° du I concernant les dates et heures du début et de fin de garde à vue et la durée des auditions et des repos séparant ces auditions ainsi que le recours à des fouilles intégrales ou des investigations corporelles internes figurent également sur un registre spécial, tenu à cet effet dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue. Ce registre peut être tenu sous forme dématérialisée.

« II. – (Alinéa sans modification)

 

« Dans les corps ou services où les officiers de police judiciaire sont astreints à tenir un carnet de déclarations, les mentions et émargements prévus à l’alinéa précédent sont également portés sur ledit carnet. Seules les mentions sont reproduites au procès-verbal qui est transmis à l’autorité judiciaire. »




… prévus au premier alinéa du présent II sont également portés sur ce carnet. Seules …

(amendement CL196)

 

CHAPITRE II

CHAPITRE II

 

Dispositions diverses

Dispositions diverses

   

Article 11 A (nouveau)

Art. 18. – Les officiers de police judiciaire ont compétence dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles.

 

Après le premier alinéa de l’article 18 du code de procédure pénale, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

   

« Toutefois les officiers de police judiciaire sont compétents sur tout le territoire dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État.

   

« Lorsqu’il sort des limites territoriales de son rattachement, l’officier de police judiciaire compétent sur tout le territoire avise de sa venue le procureur compétent dans le département ainsi que le directeur de la police ou de la gendarmerie départementalement compétent. »

(amendement CL148)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
 

Article 11

Article 11

Art. 61. – L’officier de police judiciaire peut défendre à toute personne de s’éloigner du lieu de l’infraction jusqu’à la clôture de ses opérations.

I. – Les quatre premiers alinéas de l’article 62 du même code sont placés à la suite du premier alinéa de l’article 61.

I. – (Sans modification)

   

bis (nouveau). – Au début du deuxième alinéa de l’article 61 résultant du I du présent article, les mots : « L’officier de police judiciaire » sont remplacés par le mot : « Il ».

(amendement CL197)

Art. 62. – L’officier de police judiciaire peut appeler et entendre toutes les personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits ou sur les objets et documents saisis.

   

Les personnes convoquées par lui sont tenues de comparaître. L’officier de police judiciaire peut contraindre à comparaître par la force publique les personnes visées à l’article 61. Il peut également contraindre à comparaître par la force publique, avec l’autorisation préalable du procureur de la République, les personnes qui n’ont pas répondu à une convocation à comparaître ou dont on peut craindre qu’elles ne répondent pas à une telle convocation.

II. – Au troisième alinéa de l’article 61 résultant du I du présent article, les mots : « à l’article 61 » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa ».

II. – (Sans modification)

Il dresse un procès-verbal de leurs déclarations. Les personnes entendues procèdent elles-mêmes à sa lecture, peuvent y faire consigner leurs observations et y apposent leur signature. Si elles déclarent ne savoir lire, lecture leur en est faite par l’officier de police judiciaire préalablement à la signature. Au cas de refus de signer le procès-verbal, mention en est faite sur celui-ci.

   

Les agents de police judiciaire désignés à l’article 20 peuvent également entendre, sous le contrôle d’un officier de police judiciaire, toutes personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits en cause. Ils dressent à cet effet, dans les formes prescrites par le présent code, des procès-verbaux qu’ils transmettent à l’officier de police judiciaire qu’ils secondent.

   

Les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire à leur audition.

III. – Le cinquième alinéa de l’article 62 du même code, devenu le premier alinéa, est complété par les mots : « , sans que cette durée ne puisse excéder quatre heures. »

III. – (Sans modification)

 

IV. – Après le cinquième alinéa de l’article 62 du même code, devenu le premier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

IV. – (Alinéa sans modification)

Art. 63. – Cf. supra art. 2.

« S’il apparaît, au cours de l’audition de la personne, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle ne peut être maintenue sous la contrainte à la disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à vue. Son placement en garde à vue lui est alors notifié dans les conditions prévues par l’article 63. »

… prévues à l’article …

(amendement CL198)

 

Article 12

Article 12

Art. 706-88. – Pour l’application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relatives à l’une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent, la garde à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune.

L’article 706-88 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

I. – L’article 706-88 du même code est ainsi modifié :

Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d’instruction.

   

La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.

   

Lorsque la première prolongation est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l’officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention.

   

Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l’issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d’instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l’objet d’une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures.

 

1° Le sixième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

La personne dont la garde à vue est prolongée en application des dispositions du présent article peut demander à s’entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l’article 63-4, à l’issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure ; elle est avisée de ce droit lorsque la ou les prolongations lui sont notifiées et mention en est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention. Toutefois, lorsque l’enquête porte sur une infraction entrant dans le champ d’application des 3° et 11° de l’article 706-73, l’entretien avec un avocat ne peut intervenir qu’à l’issue de la soixante-douzième heure.

 

« Par dérogation aux dispositions des articles 63-4, 63-4-1 et 63-4-2, lorsque la personne est gardée à vue pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, l’intervention de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes, pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction mentionnée au 3° ou au 11° de l’article 706-73, pendant une durée maximale de soixante-douze heures.

   

« Le report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la fin de la vingt-quatrième heure est décidé par le procureur de la République, d’office ou à la demande de l’officier de police judiciaire. Le report de l’intervention de l’avocat au-delà de la vingt-quatrième heure est décidé, dans les limites fixées à l’alinéa précédent, par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République. Lorsque la garde à vue intervient au cours d’une commission rogatoire, le report est décidé par le juge d’instruction. Dans tous les cas, la décision du magistrat, écrite et motivée, précise la durée pour laquelle l’intervention de l’avocat est différée.

   

« Lorsqu’il est fait application des deux alinéas qui précèdent, l’avocat dispose, à partir du moment où il est autorisé à intervenir en garde à vue, des droits prévus par les articles 63-4 et 63-4-1, le premier alinéa de l’article 63-4-2 et l’article 63-4-3. » ;

   

2° Ses quatre derniers alinéas deviennent l’article 706-88-1.

S’il ressort des premiers éléments de l’enquête ou de la garde à vue elle-même qu’il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ou que les nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement, le juge des libertés peut, à titre exceptionnel et selon les modalités prévues au deuxième alinéa, décider que la garde à vue en cours d’une personne, se fondant sur l’une des infractions visées au 11° de l’article 706-73, fera l’objet d’une prolongation supplémentaire de vingt-quatre heures, renouvelable une fois.

 

II. – Au premier alinéa du nouvel article 706-88-1, après les mots : « au deuxième alinéa », sont insérés les mots : « de l’article 706-88 ».

À l’expiration de la quatre-vingt-seizième heure et de la cent-vingtième heure, la personne dont la prolongation de la garde à vue est ainsi décidée peut demander à s’entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l’article 63-4. La personne gardée à vue est avisée de ce droit dès la notification de la prolongation prévue au présent article.

   

Outre la possibilité d’examen médical effectué à l’initiative du gardé à vue, dès le début de chacune des deux prolongations supplémentaires, il est obligatoirement examiné par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire. Le médecin requis devra se prononcer sur la compatibilité de la prolongation de la mesure avec l’état de santé de l’intéressé.

   

S’il n’a pas été fait droit à la demande de la personne gardée à vue de faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe, l’un de ses frères et sœurs ou son employeur, de la mesure dont elle est l’objet, dans les conditions prévues aux articles 63-1 et 63-2, elle peut réitérer cette demande à compter de la quatre-vingt-seizième heure.

   

Art. 63-4 – Cf. supra art. 6.

Art. 63-4-1 et 63-4-2. – Cf. supra art. 7.

Art. 706-73. – Cf. annexe.

« Les dispositions des articles 63-4-1 et 63-4-2 ne sont pas applicables aux personnes gardées à vue pour l’une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-73. »

Alinéa supprimé

   

III. – Après l’article 706-88, il est inséré un article 706-88-2 ainsi rédigé :



Art. 706-73. – Cf. annexe.

 

« Art. 706-88-2. – Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée au 11° de l’article 706-73, le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République à la demande de l’officier de police judiciaire, ou le juge d’instruction lorsque la garde à vue intervient au cours d’une instruction, peut décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités.

   

« Les avocats inscrits sur cette liste sont élus par les membres du Conseil de l’ordre du barreau de Paris. »

(amendement CL4 et sous-amendements CL171, CL172, CL173 et CL215)

 

Article 13

Article 13

Art. 803-3. – En cas de nécessité et par dérogation aux dispositions de l’article 803-2, la personne peut comparaître le jour suivant et peut être retenue à cette fin dans des locaux de la juridiction spécialement aménagés, à la condition que cette comparution intervienne au plus tard dans un délai de vingt heures à compter de l’heure à laquelle la garde à vue a été levée, à défaut de quoi l’intéressé est immédiatement remis en liberté.

Le deuxième alinéa de l’article 803-3 du même code est ainsi modifié :

(Sans modification)

Lorsqu’il est fait application des dispositions du présent article, la personne doit avoir la possibilité de s’alimenter et, à sa demande, de faire prévenir par téléphone une des personnes visées à l’article 63-2, d’être examinée par un médecin désigné conformément aux dispositions de l’article 63-3 et de s’entretenir, à tout moment, avec un avocat désigné par elle ou commis d’office à sa demande, selon les modalités prévues par l’article 63-4.

1° La référence à l’article 63-4 est remplacée par la référence à l’article 63-3-1 ;

 
 

2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « L’avocat peut demander à consulter le dossier de la procédure. »

 

L’identité des personnes retenues en application des dispositions du premier alinéa, leurs heures d’arrivée et de conduite devant le magistrat ainsi que l’application des dispositions du deuxième alinéa font l’objet d’une mention dans un registre spécial tenu à cet effet dans le local où ces personnes sont retenues et qui est surveillé, sous le contrôle du procureur de la République, par des fonctionnaires de la police nationale ou des militaires de la gendarmerie nationale.

   

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la personne a fait l’objet, en application des dispositions de l’article 706-88, d’une garde à vue ayant duré plus de soixante-douze heures.

   

Art. 63-3-1. – Cf. supra art. 5.

   
 

Article 14

Article 14

 

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

(Alinéa sans modification)

   

1° A (nouveau) L’article 64-1 est ainsi modifié :

Art. 64-1. – Les interrogatoires des personnes placées en garde à vue pour crime, réalisés dans les locaux d’un service ou d’une unité de police ou de gendarmerie exerçant une mission de police judiciaire font l’objet d’un enregistrement audiovisuel.

 

a) Au premier alinéa, le mot : « interrogatoires » est remplacé par le mot : « auditions » et le mot : « réalisés » est remplacé par le mot : « réalisées » ;

L’enregistrement ne peut être consulté, au cours de l’instruction ou devant la juridiction de jugement, qu’en cas de contestation du contenu du procès-verbal d’interrogatoire, sur décision du juge d’instruction ou de la juridiction de jugement, à la demande du ministère public ou d’une des parties. Les huit derniers alinéas de l’article 114 ne sont pas applicables. Lorsqu’une partie demande la consultation de l’enregistrement, cette demande est formée et le juge d’instruction statue conformément aux deux premiers alinéas de l’article 82-1.

 

b) À la première phrase du deuxième alinéa, le mot « interrogatoire » est remplacé par le mot : « audition » ;

Le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement réalisé en application du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

   

À l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la date de l’extinction de l’action publique, l’enregistrement est détruit dans le délai d’un mois.

   

Lorsque le nombre de personnes gardées à vue devant être simultanément interrogées, au cours de la même procédure ou de procédures distinctes, fait obstacle à l’enregistrement de tous les interrogatoires, l’officier de police judiciaire en réfère sans délai au procureur de la République qui désigne, par décision écrite versée au dossier, au regard des nécessités de l’enquête, la ou les personnes dont les interrogatoires ne seront pas enregistrés.

 

c) Au cinquième alinéa, les mots : « tous les interrogatoires » sont remplacés par les mots : « toutes les auditions » et les mots : « dont les interrogatoires ne seront pas enregistrés » par les mots : « dont les auditions ne seront pas enregistrées » ;

Lorsque l’enregistrement ne peut être effectué en raison d’une impossibilité technique, il en est fait mention dans le procès-verbal d’interrogatoire qui précise la nature de cette impossibilité. Le procureur de la République en est immédiatement avisé.

 

d) À la première phrase du sixième alinéa, le mot : « interrogatoire » est remplacé par le mot : « audition » ;

(amendement CL199)

Le présent article n’est pas applicable lorsque la personne est gardée à vue pour un crime mentionné à l’article 706-73 du présent code ou prévu par les titres Ier et II du livre IV du code pénal, sauf si le procureur de la République ordonne l’enregistrement.

   

Un décret précise en tant que de besoin les modalités d’application du présent article.

   

Art. 65. – Les mentions et émargements prévus par le premier alinéa de l’article 64, en ce qui concerne les dates et heures de début et de fin de garde à vue et la durée des interrogatoires et des repos séparant ces interrogatoires, doivent également figurer sur un registre spécial, tenu à cet effet dans tout local de police ou de gendarmerie susceptible de recevoir une personne gardée à vue.

Dans les corps ou services où les officiers de police judiciaire sont astreints à tenir un carnet de déclarations, les mentions et émargements prévus à l’alinéa précédent doivent également être portés sur ledit carnet. Seules les mentions sont reproduites au procès-verbal qui est transmis à l’autorité judiciaire.

1° L’article 65 est abrogé ;

1° (Sans modification)

Art. 77. – L’officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l’enquête, garder à sa disposition toute personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il en informe dès le début de la garde à vue le procureur de la République. La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures.

2° L’article 77 est ainsi rédigé :

2° (Sans modification)

Le procureur de la République peut, avant l’expiration du délai de vingt-quatre heures, prolonger la garde à vue d’un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus. Cette prolongation ne peut être accordée qu’après présentation préalable de la personne à ce magistrat. Toutefois, elle peut, à titre exceptionnel, être accordée par décision écrite et motivée sans présentation préalable de la personne. Si l’enquête est suivie dans un autre ressort que celui du siège du procureur de la République saisi des faits, la prolongation peut être accordée par le procureur de la République du lieu d’exécution de la mesure.

   

Sur instructions du procureur de la République saisi des faits, les personnes à l’encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l’exercice de poursuites sont, à l’issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.

   

Pour l’application du présent article, les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil constituent un seul et même ressort.

   

Les dispositions des articles 63-1, 63-2, 63-3, 63-4, 64, 64-1 et 65 sont applicables aux gardes à vue exécutées dans le cadre du présent chapitre.

« Art. 77. – Les dispositions des articles 62-2 à 64-1 relatives à la garde à vue sont applicables lors de l’enquête préliminaire. » ;

 

Art. 141-4. – . . . . . . . . . . . . .

3° Les articles 141-4 et 712-16-3 sont ainsi modifiés :

3° (Sans modification)

La personne retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature de l’obligation qu’elle est soupçonnée avoir violée et du fait qu’elle peut exercer les droits prévus par les troisième et quatrième alinéas de l’article 63-1, par les articles 63-2 et 63-3 et par les quatre premiers alinéas de l’article 63-4.

– au troisième alinéa, les mots : « par les troisième et quatrième alinéas de l’article 63-1, par les articles 63-2 et 63-3 et par les quatre premiers alinéas de l’article 63-4 » sont remplacés par les mots : « par les articles 63-2 à 63-4. » ;

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Les articles 64 et 65 sont applicables à la présente mesure. La personne retenue ne peut faire l’objet d’investigations corporelles internes au cours de sa rétention par le service de police ou par l’unité de gendarmerie.

– au cinquième alinéa, les mots : « Les articles 64 et 65 sont applicables » sont remplacés par les mots : « L’article 64 est applicable » ;

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 712-16-3. – . . . . . . . . . . .

   

La personne retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature de l’obligation qu’elle est soupçonnée avoir violée et du fait qu’elle peut exercer les droits prévus par les troisième et quatrième alinéas de l’article 63-1, par les articles 63-2 et 63-3 et par les quatre premiers alinéas de l’article 63-4.

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Les articles 64 et 65 sont applicables à la présente mesure.

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
 

4° L’article 154 est ainsi rédigé :

4° (Sans modification)

Art. 154. – Lorsque l’officier de police judiciaire est amené, pour les nécessités de l’exécution de la commission rogatoire, à garder à sa disposition une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, il en informe dès le début de cette mesure le juge d’instruction saisi des faits. Ce dernier contrôle la mesure de garde à vue. L’officier de police judiciaire ne peut retenir la personne plus de vingt-quatre heures.

« Art. 154. – Les dispositions des articles 62-2 à 64-1 relatives à la garde à vue sont applicables lors de l’exécution des commissions rogatoires.

 

La personne doit être présentée avant l’expiration du délai de vingt-quatre heures à ce magistrat ou, si la commission rogatoire est exécutée dans un autre ressort que celui de son siège, au juge d’instruction du lieu d’exécution de la mesure. A l’issue de cette présentation, le juge d’instruction peut accorder l’autorisation écrite de prolonger la mesure d’un nouveau délai, sans que celui-ci puisse excéder vingt-quatre heures. Il peut, à titre exceptionnel, accorder cette autorisation par décision écrite et motivée sans présentation préalable de la personne.

« Les attributions conférées au procureur de la République par ces articles sont alors exercées par le juge d’instruction. Lors de la délivrance de l’information prévue au I de l’article 63-1, il est précisé que la garde à vue intervient dans le cadre d’une commission rogatoire. » ;

 

Pour l’application du présent article, les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil constituent un seul et même ressort.

   

Les dispositions des articles 63-1, 63-2, 63-3, 63-4, 64, 64-1 et 65 sont applicables aux gardes à vue exécutées dans le cadre de la présente section. Les pouvoirs conférés au procureur de la République par les articles 63-2, 63-3 et 64-1 sont alors exercés par le juge d’instruction. L’information prévue au troisième alinéa de l’article 63-4 précise que la garde à vue intervient dans le cadre d’une commission rogatoire.

   

Art. 63-1. – Cf. supra art. 2.

   

Art. 627-5. – Toute personne appréhendée en vertu d’une demande d’arrestation aux fins de remise doit être déférée dans les vingt-quatre heures au procureur de la République territorialement compétent. Dans ce délai, les dispositions des articles 63-1 à 63-5 du présent code lui sont applicables.

5° Au premier alinéa des articles 627-5, 695-27 et 696-10, la référence à l’article 63-5 est remplacée par la référence à l’article 63-7 ;

5° (Sans modification)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 695-27. – Toute personne appréhendée en exécution d’un mandat d’arrêt européen doit être conduite dans les quarante-huit heures devant le procureur général territorialement compétent. Pendant ce délai, les dispositions des articles 63-1 à 63-5 sont applicables.

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 696-10. – Toute personne appréhendée à la suite d’une demande d’extradition doit être conduite dans les quarante-huit heures devant le procureur général territorialement compétent. Les articles 63-1 à 63-5 sont applicables durant ce délai.

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 716-5. – . . . . . . . . . . . . .

   

La personne arrêtée est immédiatement avisée par l’officier de police judiciaire qu’elle peut exercer les droits prévus par les articles 63-2, 63-3 et 63-4 (premier et deuxième alinéa).

6° Au quatrième alinéa de l’article 716-5, les mots : « (premier et deuxième alinéas) » sont supprimés ;

6° (Sans modification)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 812. – Pour l’application des articles 63, 77 et 154, lorsque les conditions de transport ne permettent pas de conduire devant le magistrat compétent la personne retenue, l’officier de police judiciaire peut prescrire à cette personne de se présenter à lui périodiquement, à charge d’en informer immédiatement le magistrat compétent. Ce dernier décide de la mainlevée de la mesure ou de son maintien pour une durée qu’il fixe et qui ne peut se prolonger au-delà du jour de la première liaison aérienne ou maritime.

7° Au premier alinéa de l’article 812, les mots : « Pour l’application des articles 63, 77 et 154 » sont remplacés par les mots : « Pour l’application des dispositions sur la garde à vue » ;

7° 



… dispositions relatives à la …

(amendement CL200)

Le fait de se soustraire à l’obligation définie au précédent alinéa est puni d’un an de prison et 15 000 € d’amende.

   
   

Les articles 814 et 880 sont ainsi modifiés :

Art. 814. – En Nouvelle-Calédonie, lorsque la garde à vue se déroule en dehors des communes de Nouméa, Mont-Doré, Dumbea et Paita et que le déplacement d’un avocat paraît matériellement impossible, l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 peut avoir lieu avec une personne choisie par la personne gardée à vue, qui n’est pas mise en cause pour les mêmes faits ou pour des faits connexes et qui n’a fait l’objet d’aucune condamnation, incapacité ou déchéance mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire. Les dispositions des deuxième et quatrième alinéas de l’article 63-4 sont applicables à la personne choisie, qui en est informée par l’officier de police judiciaire.

8° Au premier alinéa des articles 814 et 880, les mots : « l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 peut avoir lieu avec », sont remplacés par les mots : «les attributions dévolues à l’avocat par les articles 63-4 à 63-4-3 peuvent être exercées par » et les mots : « des deuxième et quatrième alinéas de l’article 63-4 », sont remplacés par les mots : « de l’article 63-4-4. »

a) Au premier alinéa, les mots : « que le déplacement d’un avocat paraît matériellement impossible » sont remplacés par les mots : « que l’avocat ne peut se déplacer sur le lieu où se déroule la garde à vue », les mots : « l’entretien …

   

b) le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

Le fait pour une personne, qui a été appelée à intervenir dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, de faire état auprès de quiconque de cet entretien dans le but d’entraver le cours de la justice est puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.

 

« Sans préjudice de l’application de l’article 434-7-2 du code pénal, le fait pour une personne, qui a été appelée à intervenir dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, de faire état auprès de quiconque de l’entretien, des auditions ou du contenu des procès-verbaux consultés dans le but d’entraver le cours de la justice est puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. » ;

Les dispositions des alinéas précédents s’appliquent dans le territoire de la Polynésie française, lorsque la garde à vue se déroule dans une île où il n’y a pas d’avocat et que le déplacement d’un avocat paraît matériellement impossible.

   

Dans les territoires des îles Wallis-et-Futuna, il peut être fait appel pour l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 à une personne agréée par le président du tribunal de première instance. Lorsque cette personne n’est pas désignée par la personne gardée à vue, elle l’est d’office par le président de cette juridiction. Les dispositions des deuxième au quatrième alinéas de l’article 63-4 et celles du deuxième alinéa du présent article sont applicables à la personne choisie, qui en est informée par l’officier de police judiciaire.

 

9° (nouveau) À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 814, les mots : « des deuxième au quatrième alinéas de l’article 63-4 » sont remplacés par les mots : « de l’article 63-4-4 ».

(amendement CL201 rectifié)

Art. 880. – Lorsque le déplacement d’un avocat ou d’une personne agréée en application de l’article 879 paraît matériellement impossible, l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 peut avoir lieu avec une personne choisie par la personne gardée à vue, qui n’est pas mise en cause pour les mêmes faits ou pour des faits connexes et qui n’a fait l’objet d’aucune condamnation, incapacité ou déchéance mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire. Les dispositions des deuxième au quatrième alinéas de l’article 63-4 sont applicables à la personne choisie, qui en est informée par l’officier de police judiciaire.

   

Le fait pour une personne qui a été appelée à intervenir dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, de faire état auprès de quiconque de cet entretien dans le but d’entraver le cours de la justice est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Art. 63-4, 63-4-2, 63-4-3 et 63-4-4. – Cf. supra. art. 6.

   

Code pénal

Art. 434-7-2. – Cf. annexe.

   
   

Article 14 bis (nouveau)

Code des douanes

 

Le paragraphe 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre XII du code des douanes est ainsi modifié :

Paragraphe 1
Personnes appelées à opérer des saisies, droits et obligations des saisissants

 


1° Son intitulé est complété par les mots : « et retenue douanière ».

Art. 323. – 1. Les infractions aux lois et règlements douaniers peuvent être constatées par un agent des douanes ou de toute autre administration.

   

2. Ceux qui constatent une infraction douanière ont le droit de saisir tous objets passibles de confiscation, de retenir les expéditions et tous autres documents relatifs aux objets saisis et de procéder à la retenue préventive des objets affectés à la sûreté des pénalités.

   

3. Ils ne peuvent procéder à la capture des prévenus qu’en cas de flagrant délit.

 

2° Le 3 de l’article 323 est abrogé ;

Le procureur de la République en est immédiatement informé.

   

La durée de la retenue ne peut excéder vingt-quatre heures sauf prolongation d’une même durée autorisée par le procureur de la République.

   

Pendant la retenue, le procureur de la République peut se transporter sur les lieux pour vérifier les modalités de la retenue et se faire communiquer les procès-verbaux et registres prévus à cet effet. S’il l’estime nécessaire, il peut désigner un médecin.

   

Les agents mentionnent, par procès-verbal de constat, la durée des interrogatoires et des repos qui ont séparé ces interrogatoires, le jour et l’heure du début et de la fin de la retenue.

   

Ces mentions figurent également sur un registre spécial tenu dans les locaux de douane.

   

Lorsque les personnes retenues sont placées en garde à vue au terme de la retenue, la durée de celle-ci s’impute sur la durée de la garde à vue.

   
   

3° Sont ajoutés dix articles 323-1 à 323-10 ainsi rédigés :

   

« Art. 323-1. – Les agents des douanes ne peuvent procéder à l’arrestation et au placement en retenue douanière d’une personne qu’en cas de flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement et lorsque cette mesure est justifiée par les nécessités de l’enquête douanière.

   

« Art. 323-2. – La durée de la retenue douanière ne peut excéder vingt-quatre heures.

Code de procédure pénale

 

« Toutefois, la retenue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République.

Art. 63. – Cf. supra. art. 2.

 

« L’autorisation est accordée dans les conditions prévues au II de l’article 63 du code de procédure pénale.

   

« Art. 323-3. – Dès le début de la retenue douanière, le procureur de la République dans le ressort duquel est constaté le flagrant délit en est informé par tout moyen.

   

« Il est avisé de la qualification des faits qui a été notifiée à la personne.

   

« Si la mesure doit être exécutée dans un autre ressort que celui du procureur de la République où l’infraction a été constatée, ce dernier en est informé.

   

« Art. 323-4. – La retenue douanière s’exécute sous le contrôle du procureur de la République qui assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne retenue.

   

« Il peut se transporter sur les lieux pour vérifier les modalités de la retenue et se faire communiquer les procès-verbaux et registres prévus à cet effet.

Art. 63-2-. – Cf. supra. art. 3

Art. 63-3. – Cf. supra. art. 4

Art. 63-3-1. – Cf. supra. art. 5

Art. 63-4-1, 63-4-2 63-4-3 et 63-4-4. – Cf. supra. art. 7

 

« Art. 323-5. – La personne placée en retenue douanière bénéficie du droit de faire prévenir un proche et son employeur, d’être examinée par un médecin et de l’assistance d’un avocat dans les conditions et sous les réserves définies aux articles 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4, 63-4-1, 63-4-2, 63-4-3 et 63-4-4 du code de procédure pénale. Les attributions conférées à l’officier de police judiciaire par les articles 63-2, 63-3, 63-3-1 et 63-4-2 du même code sont exercées par un agent des douanes.

Code des douanes

Art. 414 et 415. – Cf. annexe.

Code de procédure pénale

Art. 706-88. – Cf. supra. art. 12.

Art. 706-73. – Cf. annexe.

 

« Lorsque la personne est retenue pour un délit douanier mentionné au dernier alinéa de l’article 414 ou à l’article 415 du présent code ou pour un délit connexe à une infraction mentionnée à l’article 706-73 du code de procédure pénale, l’intervention de l’avocat peut être différée dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l’article 706-88 du même code.

Art. 63-1. – Cf. supra. art. 2

 

« Art. 323-6. – La personne placée en retenue douanière est immédiatement informée par un agent des douanes, dans les conditions prévues à l’article 63-1 du code de procédure pénale :

   

« 1° De son placement en retenue ainsi que de la durée de la mesure et de la prolongation dont celle-ci peut faire l’objet ;

   

« 2° De la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

Art. 323-5. – Cf. supra. art. 14 bis.

 

« 3° Du fait qu’elle bénéficie des droits énoncés à l’article 323-5 du présent code ;

   

« 4° Du fait qu’elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

   

« Mention de l’information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal et émargée par la personne retenue. En cas de refus d’émargement, il en est fait mention.

Art. 63-5. – Cf. supra. art. 8.

Art. 63-6 et 63-7. – Cf. supra. art. 9.

 

« Art. 323-7. – Les articles 63-5 et 63-6 et le premier alinéa de l’article 63-7 du code de procédure pénale sont applicables en cas de retenue douanière.

   

« Les mesures de sécurité mentionnées à l’article 63-6 du même code sont limitativement énumérées par arrêté du ministre chargé des douanes.

   

« Les attributions conférées à l’officier de police judiciaire par l’article 63-7 du même code sont exercées par un agent des douanes.




Art. 64. – Cf. supra. art. 10.

 

« Art. 323-8. – Le procès-verbal de retenue douanière est rédigé conformément aux dispositions du I de l’article 64 du code de procédure pénale.

   

« Figurent également sur un registre spécial tenu, éventuellement sous forme dématérialisée, dans les locaux de douane susceptibles de recevoir une personne retenue, les mentions prévues au premier alinéa du II du même article 64.






Art. 28-1. – Cf. annexe.

 

« Art. 323-9. – À l’issue de la retenue douanière, le procureur de la République peut ordonner que la personne retenue soit présentée devant lui, un officier de police judiciaire ou un agent des douanes habilité en application de l’article 28-1 du code de procédure pénale ou qu’elle soit remise en liberté.

   

« Lorsque les personnes retenues sont placées en garde à vue au terme de la retenue, la durée de celle-ci s’impute sur la durée de la garde à vue.

Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante

Art. 4. – Cf. infra. art. 14 quater, 14 quinquies et 15.

 

« Art. 323-10. – En cas de flagrant délit douanier commis par un mineur, la retenue douanière se déroule selon les conditions prévues à l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. »

(amendement CL1 rectifié et sous-amendements CL203, CL204, CL206, CL207, CL208, CL209, CL211 et CL212)

   

Article 14 ter (nouveau)

Code de la santé publique

 

L’article L. 3341-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

Art. L. 3341-1. – Une personne trouvée en état d’ivresse dans les rues, chemins, places, cafés, cabarets ou autres lieux publics, est, par mesure de police, conduite à ses frais au poste le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison.

 

« Art. L. 3341-1. – Une personne trouvée en état d’ivresse dans les lieux publics, est, par mesure de police, conduite à ses frais dans le local de police ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison.

   

« Lorsqu’il n’est pas nécessaire de procéder à l’audition de la personne mentionnée au premier alinéa immédiatement après qu’elle a recouvré la raison, elle peut, par dérogation au premier alinéa, être placée par un officier ou un agent de police judiciaire sous la responsabilité d’une personne qui se porte garante d’elle. »

(amendement CL202)

 

Article 15

Article 15

Ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée

L’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi modifié :

(Sans modification)

Art. 4. – I. – Le mineur de treize ans ne peut être placé en garde à vue. Toutefois, à titre exceptionnel, le mineur de dix à treize ans contre lequel il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu’il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement peut, pour les nécessités de l’enquête, être retenu à la disposition d’un officier de police judiciaire avec l’accord préalable et sous le contrôle d’un magistrat du ministère public ou d’un juge d’instruction spécialisés dans la protection de l’enfance ou d’un juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder douze heures. Cette retenue peut toutefois être prolongée à titre exceptionnel par décision motivée de ce magistrat pour une durée qui ne saurait non plus excéder douze heures, après présentation devant lui du mineur, sauf si les circonstances rendent cette présentation impossible. Elle doit être strictement limitée au temps nécessaire à la déposition du mineur et à sa présentation devant le magistrat compétent ou à sa remise à l’une des personnes visées au II du présent article.

1° Au premier alinéa du I, les mots : « pour les nécessités de l’enquête », sont remplacés par les mots : « pour l’un des motifs prévus par l’article 62-6 du code de procédure pénale » ;

 

Les dispositions des II, III et IV du présent article sont applicables. Lorsque le mineur ou ses représentants légaux n’ont pas désigné d’avocat, le procureur de la République, le juge chargé de l’instruction ou l’officier de police judiciaire doit, dès le début de la retenue, informer par tout moyen et sans délai le bâtonnier afin qu’à commette un avocat d’office.

   

II. – Lorsqu’un mineur est placé en garde à vue, l’officier de police judiciaire doit informer de cette mesure les parents, le tuteur, la personne ou le service auquel est confié le mineur.

   

Il ne peut être dérogé aux dispositions de l’alinéa précédent que sur décision du procureur de la République ou du juge chargé de l’information et pour la durée que le magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures ou, lorsque la garde à vue ne peut faire l’objet d’une prolongation, douze heures.

   

III. – Dès le début de la garde à vue d’un mineur de seize ans, le procureur de la République ou le juge chargé de l’information doit désigner un médecin qui examine le mineur dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l’article 63-3 du code de procédure pénale.

2° Au III, les mots : « le quatrième alinéa de l’article 63-3 » sont remplacés par les mots : « l’article 63-3 » ;

 

IV. – Dès le début de la garde à vue, le mineur peut demander à s’entretenir avec un avocat. Il doit être immédiatement informé de ce droit. Lorsque le mineur n’a pas sollicité l’assistance d’un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux qui sont alors avisés de ce droit lorsqu’ils sont informés de la garde à vue en application du II du présent article.

3° La première phrase du IV est remplacée par une phrase ainsi rédigée : « Dès le début de la garde à vue, le mineur peut demander à être assisté par un avocat, conformément aux dispositions des articles 63-3-1 à 63-4-3 du code de procédure pénale. »

 

V. – En cas de délit puni d’une peine inférieure à cinq ans d’emprisonnement, la garde à vue d’un mineur âgé de treize à seize ans ne peut être prolongée.

   

Aucune mesure de garde à vue ne peut être prolongée sans présentation préalable du mineur au procureur de la République ou au juge d’instruction du lieu d’exécution de la mesure.

   

VI. – Les interrogatoires des mineurs placés en garde à vue visés à l’article 64 du code de procédure pénale font l’objet d’un enregistrement audiovisuel.

   

L’enregistrement ne peut être consulté, au cours de l’instruction ou devant la juridiction de jugement, qu’en cas de contestation du contenu du procès-verbal d’interrogatoire, sur décision du juge d’instruction, du juge des enfants ou de la juridiction de jugement, à la demande du ministère public ou d’une des parties. Les huit derniers alinéas de l’article 114 ne sont pas applicables. Lorsqu’une partie demande la consultation de l’enregistrement, cette demande est formée et le juge d’instruction statue conformément aux deux premiers alinéas de l’article 82-1 du code de procédure pénale.

   

Le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement original ou une copie réalisée en application du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

   

Lorsque l’enregistrement ne peut être effectué en raison d’une impossibilité technique, il en est fait mention dans le procès-verbal d’interrogatoire qui précise la nature de cette impossibilité. Le procureur de la République ou le juge d’instruction en est immédiatement avisé.

   

À l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la date de l’extinction de l’action publique, l’enregistrement original et sa copie sont détruits dans le délai d’un mois.

   

Un décret précise en tant que de besoin les modalités d’application du présent VI.

   

VII. – Les dispositions de l’article 706-88 du code de procédure pénale, à l’exception de celles de la deuxième phrase de son dernier alinéa, sont applicables au mineur de plus de seize ans lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’une ou plusieurs personnes majeures ont participé, comme auteurs ou complices, à la commission de l’infraction.

   

Code de procédure pénale

 

Article 15 bis (nouveau)

Art. 127. – Si la personne recherchée en vertu d’un mandat d’amener est trouvée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d’instruction qui a délivré le mandat, et qu’il n’est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant ce magistrat, elle est conduite devant le procureur de la République du lieu de l’arrestation.

 

I. – À l’article 127 du code de procédure pénale, les mots : « procureur de la République » sont remplacés par les mots : « juge des libertés et de la détention ».

Art. 133. – La personne saisie en vertu d’un mandat d’arrêt est présentée dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation devant le juge d’instruction ou à défaut le président du tribunal ou le juge désigné par celui-ci pour qu’il soit procédé à son interrogatoire et qu’il soit le cas échéant statué sur son placement en détention provisoire dans les conditions prévues par l’article 145. À défaut, la personne est remise en liberté. Les dispositions de l’article 126 sont applicables.

 

II. – L’article 133 du même code est ainsi modifié :

Si la personne est arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d’instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation devant le procureur de la République du lieu de l’arrestation qui reçoit ses déclarations après l’avoir avertie qu’elle est libre de ne pas en faire. Mention est faite de cet avis au procès-verbal.

 

1° Au deuxième alinéa, les mots : « procureur de la République » sont remplacés par les mots : « juge des libertés et de la détention » ;

   

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

Le procureur de la République informe sans délai le magistrat qui a délivré le mandat et requiert le transfèrement. Si celui-ci ne peut être effectué immédiatement, le procureur de la République en réfère au juge mandant.

 

« Le juge des libertés et de la détention informe sans délai le magistrat qui a délivré le mandat et ordonne le transfèrement. Si celui-ci ne peut être effectué immédiatement, le juge des libertés et de la détention en avise le juge mandant. »

Lorsqu’il y a lieu à transfèrement, la personne doit être conduite à la maison d’arrêt indiquée sur le mandat dans les délais prévus à l’article 130. Les dispositions de l’article 130-1 sont applicables.

   

Art. 135-2. – Si la personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt est découverte après le règlement de l’information, il est procédé selon les dispositions du présent article.

 

III. – L’article 135-2 du même code est ainsi modifié :

Le procureur de la République du lieu de l’arrestation est avisé dès le début de la rétention de la personne par les services de police ou de gendarmerie. Pendant cette rétention, il est fait application des dispositions des articles 63-2 et 63-3. La rétention ne peut durer plus de vingt-quatre heures.

   

La personne est conduite dans les meilleurs délais et au plus tard dans les vingt-quatre heures de son arrestation devant le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement saisie des faits. Après avoir vérifié son identité et lui avoir notifié le mandat, ce magistrat la présente devant le juge des libertés et de la détention.

   

Le juge des libertés et de la détention peut, sur les réquisitions du procureur de la République, soit placer la personne sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu’à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l’article 144, rendue à l’issue d’un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions des quatrième à neuvième alinéas de l’article 145. Si la personne est placée en détention, les délais prévus par les quatrième et cinquième alinéas de l’article 179 et par les huitième et neuvième alinéas de l’article 181 sont alors applicables et courent à compter de l’ordonnance de placement en détention. La décision du juge des libertés et de la détention peut faire, dans les dix jours de sa notification, l’objet d’un appel devant la chambre des appels correctionnels si la personne est renvoyée devant le tribunal correctionnel et devant la chambre de l’instruction si elle est renvoyée devant la cour d’assises.

   

Si la personne a été arrêtée à plus de 200 kilomètres du siège de la juridiction de jugement et qu’il n’est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur de la République mentionné au troisième alinéa, elle est conduite devant le procureur de la République du lieu de son arrestation, qui vérifie son identité, lui notifie le mandat et reçoit ses éventuelles déclarations après l’avoir avertie qu’elle est libre de ne pas en faire. Ce magistrat met alors le mandat à exécution en faisant conduire la personne à la maison d’arrêt et il en avise le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement. Celui-ci ordonne le transfèrement de la personne, qui doit comparaître devant lui dans les quatre jours de la notification du mandat ; ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement entre un département d’outre-mer et la France métropolitaine ou un autre département d’outre-mer. Il est alors procédé conformément aux dispositions des troisième et quatrième alinéas.

 






1° Au cinquième alinéa les mots : « devant le procureur de la République du lieu de son arrestation » sont remplacés par les mots : « devant le juge des libertés et de la détention du lieu de son arrestation » ;

La présentation devant le juge des libertés et de la détention prévue par les dispositions ci-dessus n’est pas nécessaire si, dans les délais prévus pour cette présentation, la personne peut comparaître devant la juridiction de jugement saisie des faits.

 


2° Au sixième alinéa les mots : « les dispositions ci-dessus » sont remplacés par les mots : « le quatrième alinéa ».

(amendement CL5)

Les dispositions du présent article sont également applicables aux mandats d’arrêt délivrés après l’ordonnance de règlement. Elles ne sont toutefois pas applicables lorsque, postérieurement à la délivrance du mandat d’arrêt décerné au cours de l’instruction ou après son règlement, la personne a été condamnée à une peine privative de liberté, soit en matière correctionnelle par un jugement contradictoire ou réputé contradictoire, soit en matière criminelle par un arrêt rendu par défaut ; elles ne sont de même pas applicables lorsque le mandat a été délivré à la suite d’une telle condamnation. Dans ces cas, sans qu’il soit nécessaire de la présenter devant le juge des libertés et de la détention, la personne arrêtée est placée en détention provisoire jusqu’à l’expiration des délais de recours et, en cas de recours, jusqu’à sa comparution devant la juridiction de jugement, sans préjudice de son droit de former des demandes de mise en liberté.

   

Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique

Article 16

Article 16

Art. 64-1. – L’avocat désigné d’office qui intervient dans les conditions prévues à l’article 63-4 du code de procédure pénale a droit à une rétribution.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Au premier alinéa de l’article 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, les mots : « dans les conditions prévues à l’article 63-4 du code de procédure pénale » sont remplacés par les mots : « au cours de la garde à vue dans les conditions prévues par le code de procédure pénale ».

(Sans modification)

 

Article 17

Article 17

 

La présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

(Sans modification)

 

Article 18

Article 18

 

La présente loi entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication au Journal officiel et au plus tard le 1er juillet 2011.

(Sans modification)

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Art. 414 et 415.

Code pénal 226

Art. 434-7-2.

Code de procédure pénale 226

Art. 28-1, 77-2, 706-73.

Décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat 230

Art. 1er à 7.

Code des douanes

Art. 414. – Sont passibles d’un emprisonnement maximum de trois ans, de la confiscation de l’objet de fraude, de la confiscation des moyens de transport, de la confiscation des objets servant à masquer la fraude et d’une amende comprise entre une et deux fois la valeur de l’objet de fraude, tout fait de contrebande ainsi que tout fait d’importation ou d’exportation sans déclaration lorsque ces infractions se rapportent à des marchandises de la catégorie de celles qui sont prohibées ou fortement taxées au sens du présent code.

La peine d’emprisonnement est portée à une durée maximale de dix ans et l’amende peut aller jusqu’à cinq fois la valeur de l’objet de la fraude soit lorsque les faits de contrebande, d’importation ou d’exportation portent sur des marchandises dangereuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publiques, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé des douanes, soit lorsqu’ils sont commis en bande organisée.

Art. 415. – Seront punis d’un emprisonnement de deux à dix ans, de la confiscation des sommes en infraction ou d’une somme en tenant lieu lorsque la saisie n’a pas pu être prononcée et d’une amende comprise entre une et cinq fois la somme sur laquelle a porté l’infraction ou la tentative d’infraction ceux qui auront, par exportation, importation, transfert ou compensation, procédé ou tenté de procéder à une opération financière entre la France et l’étranger portant sur des fonds qu’ils savaient provenir, directement ou indirectement, d’un délit prévu au présent code ou d’une infraction à la législation sur les substances ou plantes vénéneuses classées comme stupéfiants.

Code pénal

Art. 434-7-2. – Sans préjudice des droits de la défense, le fait, pour toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler sciemment ces informations à des personnes qu’elle sait susceptibles d’être impliquées comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est réalisée dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.

Lorsque l’enquête ou l’instruction concerne un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement relevant des dispositions de l’article 706-73 du code de procédure pénale, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende.

Code de procédure pénale

Art. 28-1. – I. – Des agents des douanes de catégories A et B, spécialement désignés par arrêté des ministres chargés de la justice et du budget, pris après avis conforme d’une commission dont la composition et le fonctionnement sont déterminés par décret en Conseil d’État, peuvent être habilités à effectuer des enquêtes judiciaires sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d’instruction.

Ces agents ont, pour l’exercice des missions prévues par le présent article, compétence sur l’ensemble du territoire national.

Ils sont compétents pour rechercher et constater :

1° Les infractions prévues par le code des douanes ;

2° Les infractions en matière de contributions indirectes, d’escroquerie sur la taxe sur la valeur ajoutée et de vols de biens culturels ;

3° Les infractions relatives à la protection des intérêts financiers de l’Union européenne ;

4° Les infractions prévues par les articles L. 2339-1 à L. 2339-11, L. 2344-7 et L. 2353-13 du code de la défense ;

5° Les infractions prévues par les articles 324-1 à 324-9 du code pénal ;

6° Les infractions prévues au code de la propriété intellectuelle ;

7° Les infractions prévues aux articles 56 et 57 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne ;

8° Les infractions connexes aux infractions visées aux 1° à 7°.

Toutefois, sous réserve des dispositions du II, ils n’ont pas compétence en matière de trafic de stupéfiants.

II. – Pour la recherche et la constatation des infractions prévues par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal et des infractions qui leur sont connexes, le procureur de la République ou le juge d’instruction territorialement compétent peut constituer des unités temporaires composées d’officiers de police judiciaire et d’agents des douanes pris parmi ceux mentionnés au I. Le procureur de la République ou le juge d’instruction désigne le chef de chaque unité qu’il constitue.

Les unités temporaires agissent sous la direction du procureur de la République ou du juge d’instruction mandant, conformément aux dispositions du présent code. Elles ont compétence sur toute l’étendue du territoire national.

III (Abrogé).

IV. – Les agents des douanes désignés dans les conditions prévues au I doivent, pour mener des enquêtes judiciaires et recevoir des commissions rogatoires, y être habilités personnellement en vertu d’une décision du procureur général.

La décision d’habilitation est prise par le procureur général près la cour d’appel du siège de leur fonction. Elle est accordée, suspendue ou retirée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Dans le mois qui suit la notification de la décision de suspension ou de retrait de l’habilitation, l’agent concerné peut demander au procureur général de rapporter cette décision. Le procureur général doit statuer dans un délai d’un mois. À défaut, son silence vaut rejet de la demande. Dans un délai d’un mois à partir du rejet de la demande, l’agent concerné peut former un recours devant la commission prévue à l’article 16-2. La procédure applicable devant cette commission est celle prévue par l’article 16-3 et ses textes d’application.

V. – Pour l’exercice des missions mentionnées aux I et II, les agents des douanes sont placés sous la direction du procureur de la République, sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre de l’instruction du siège de leur fonction dans les conditions prévues par les articles 224 à 230.

VI. – Lorsque, sur réquisition du procureur de la République, les agents des douanes mentionnés aux I et II procèdent à des enquêtes judiciaires, il est fait application des articles 54 (deuxième et troisième alinéas), 55-1, 56, 57 à 62, 63 à 67, 75 à 78.

Lorsque ces agents agissent sur commission rogatoire d’un juge d’instruction, il est également fait application des articles 152 à 155.

Ces agents sont autorisés à déclarer comme domicile l’adresse du siège du service dont ils dépendent.

Au cours des procédures confiées sur réquisition ou commission rogatoire à ces agents, les dispositions des articles 100 à 100-7, 122 à 136, 694 à 695-3, 706-28, 706-30-1 et 706-73 à 706-106 sont applicables ; lorsque ces agents agissent en application des articles 706-80 à 706-87, ils sont également compétents en matière d’infractions douanières de contrebande de tabac manufacturé, d’alcool et de spiritueux et de contrefaçon de marque, ainsi que pour celles prévues à l’article 415 du code des douanes et aux articles L. 716-9 à L. 716-11 du code de la propriété intellectuelle. Ces agents peuvent être assistés par les personnes mentionnées aux articles 706 et 706-2 agissant sur délégation des magistrats.

Ces agents peuvent également faire application des dispositions du titre XXIX du livre IV au cours des enquêtes judiciaires et sur commissions rogatoires qui leur sont confiées.

Par dérogation à la règle fixée au 2 de l’article 343 du code des douanes, l’action pour l’application des sanctions fiscales peut être exercée par le ministère public, en vue de l’application des dispositions du présent article.

VII. – es agents des douanes mentionnés aux I et II sont placés sous la direction administrative d’un magistrat de l’ordre judiciaire selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.

VIII. – Les agents de l’administration des douanes mentionnés aux I et II ne peuvent, à peine de nullité, exercer d’autres attributions ou accomplir d’autres actes que ceux prévus par le présent code dans le cadre des faits dont ils sont saisis par l’autorité judiciaire.

Art. 77-2. – Toute personne placée en garde à vue au cours d’une enquête préliminaire ou de flagrance qui, à l’expiration d’un délai de six mois à compter de la fin de la garde à vue, n’a pas fait l’objet de poursuites, peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s’est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d’être donnée à la procédure. Cette demande est adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Ces dispositions ne sont pas applicables aux enquêtes portant sur l’un des crimes ou délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73.

Art. 706-73. – La procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue par le présent code, sous réserve des dispositions du présent titre :

1° Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8° de l’article 221-4 du code pénal ;

2° Crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l’article 222-4 du code pénal ;

3° Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ;

4° Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code pénal ;

5° Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;

6° Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;

7° Crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal ;

8° Crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;

8° bis (Abrogé)

9° Crime de destruction, dégradation et détérioration d’un bien commis en bande organisée prévu par l’article 322-8 du code pénal ;

10° Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ;

11° Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ;

12° Délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339-8, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ;

13° Délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ;

14° Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° à 13° ;

15° Délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal, lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une des infractions mentionnées aux 1° à 14° ;

16° Délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il est en relation avec l’une des infractions mentionnées aux 1° à 15°.

Pour les infractions visées aux 3°, 6° et 11°, sont applicables, sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que celles des titres XV, XVI et XVII.

Décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat

TITRE IER
PRINCIPES ESSENTIELS DE LA PROFESSION D’AVOCAT.

Art. 1. – Les principes essentiels de la profession guident le comportement de l’avocat en toutes circonstances.

Art. 2. – La profession d’avocat est une profession libérale et indépendante quel que soit son mode d’exercice.

Art. 3. – L’avocat exerce ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité, dans le respect des termes de son serment.

Il respecte en outre, dans cet exercice, les principes d’honneur, de loyauté, de désintéressement, de confraternité, de délicatesse, de modération et de courtoisie.

Il fait preuve, à l’égard de ses clients, de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence.

Art. 4. – Sous réserve des strictes exigences de sa propre défense devant toute juridiction et des cas de déclaration ou de révélation prévues ou autorisées par la loi, l’avocat ne commet, en toute matière, aucune divulgation contrevenant au secret professionnel.

Art. 5. – L’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours.

Il ne peut transmettre de copies de pièces ou actes du dossier de la procédure à son client ou à des tiers que dans les conditions prévues à l’article 114 du code de procédure pénale.

TITRE II
DEVOIRS ENVERS LES CLIENTS.

Art. 6. – La profession d’avocat concourt à l’accès à la justice et au droit.

L’avocat est tenu de déférer aux désignations et commissions d’office, sauf motif légitime d’excuse ou d’empêchement admis par l’autorité qui a procédé à la désignation ou à la commission.

Dans le cadre d’une convention conclue en application de l’article 57 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, l’avocat peut, à l’issue d’une consultation juridique gratuite donnée notamment dans une mairie, ou une maison de justice et du droit, accepter de prendre en charge les intérêts de la personne qu’il reçoit et qui en fait la demande.

Art. 7. – L’avocat ne peut être ni le conseil ni le représentant ou le défenseur de plus d’un client dans une même affaire s’il y a conflit entre les intérêts de ses clients ou, sauf accord des parties, s’il existe un risque sérieux d’un tel conflit.

Sauf accord écrit des parties, il s’abstient de s’occuper des affaires de tous les clients concernés lorsque surgit un conflit d’intérêt, lorsque le secret professionnel risque d’être violé ou lorsque son indépendance risque de ne plus être entière.

Il ne peut accepter l’affaire d’un nouveau client si le secret des informations données par un ancien client risque d’être violé ou lorsque la connaissance par l’avocat des affaires de l’ancien client favoriserait le nouveau client.

Lorsque des avocats sont membres d’un groupement d’exercice, les dispositions des alinéas qui précèdent sont applicables à ce groupement dans son ensemble et à tous ses membres. Elles s’appliquent également aux avocats qui exercent leur profession en mettant en commun des moyens, dès lors qu’il existe un risque de violation du secret professionnel.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CL1 rectifié présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Insérer l’article suivant :

« Le paragraphe 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre XII du code des douanes est ainsi modifié :

« 1° Le 3 de l’article 323 est abrogé ;

« 2° Sont ajoutés dix articles 323-1 à 323-10 ainsi rédigés :

« Art. 323-1. – Les agents des douanes ne peuvent procéder à l’arrestation et au placement en retenue douanière d’une personne qu’en cas de flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement et lorsque cette mesure est justifiée par les nécessités de l’enquête douanière.

« Art. 323-2. – La durée de la retenue ne peut excéder vingt-quatre heures.

« Toutefois, la retenue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République.

« L’autorisation est accordée dans les conditions prévues à l’article 63 II du code de procédure pénale.

« Art. 323-3. – Dès le début de la mesure de retenue, le procureur de la République dans le ressort duquel est constaté le flagrant délit, est informé par tout moyen.

« Il est avisé de la qualification des faits qui a été notifiée à la personne.

« Si la mesure doit être exécutée dans un autre ressort que celui du procureur de la République où l’infraction a été constatée, ce dernier en est informé.

« Art. 323-4. – La retenue douanière s’exécute sous le contrôle effectif du procureur de la République qui assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne retenue.

« Il peut se transporter sur les lieux pour vérifier les modalités de la retenue et se faire communiquer les procès-verbaux et registres prévus à cet effet.

« Art. 323-5. – La personne placée en retenue douanière bénéficie du droit de faire prévenir un proche et son employeur, d’être examinée par un médecin et de l’assistance d’un avocat dans les conditions et sous les réserves définies aux articles 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4, 63-4-1, 63-4-2 63-4-3 et 63-4-4 du code de procédure pénale. Les attributions conférées à l’officier de police judiciaire par les articles 63-2, 63-3, 63-3-1 et 63-4-2 du code de procédure pénale sont exercées par un agent des douanes.

« Lorsque la personne est retenue pour un délit douanier visé aux articles 414 alinéa 2 et 415 ou pour un délit connexe à une infraction mentionnée à l’article 706-73 du code de procédure pénale, l’intervention de l’avocat peut être différée conformément aux dispositions des alinéas six à huit de l’article 706-88 du code de procédure pénale.

« Art. 323-6. – La personne placée en retenue douanière est immédiatement informée par un agent des douanes, dans les conditions prévues à l’article 63-1 du code de procédure pénale :

« 1° De son placement en retenue ainsi que de la durée de la mesure et de la prolongation dont celle-ci peut faire l’objet ;

« 2° De la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

« 3° De ce qu’elle bénéficie des droits énoncés à l’article 323-5 ;

« 4° De ce qu’elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

« Mention de l’information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal et émargée par la personne retenue. En cas de refus d’émargement, il en est fait mention.

« Art. 323-7. – Les dispositions des articles 63-5, 63-6 et 63-7 (premier alinéa) du code de procédure pénale sont applicables en cas de retenue douanière.

« Les mesures de sécurité mentionnées à l’article 63-6 sont limitativement énumérées par arrêté du ministre chargé des douanes.

« Les attributions conférées à l’officier de police judiciaire par l’article 63-7 du code de procédure pénale sont exercées par un agent des douanes.

« Art. 323-8. – Le procès-verbal de retenue douanière est rédigé conformément aux dispositions du I de l’article 64 du code de procédure pénale.

« Il figure également sur un registre spécial tenu, éventuellement sous forme dématérialisée, dans les locaux de douane susceptibles de recevoir une personne retenue, les mentions prévues au premier alinéa du II de l’article 64.

« Art. 323-9. – À l’issue de la retenue, le procureur de la République peut ordonner que la personne retenue soit présentée devant lui, un officier de police judiciaire ou un agent des douanes habilité en application de l’article 28-1 du code de procédure pénale ou qu’elle soit remise en liberté.

« Lorsque les personnes retenues sont placées en garde à vue au terme de la retenue, la durée de celle-ci s’impute sur la durée de la garde à vue.

« Art. 323-10. – En cas de flagrant délit douanier commis par un mineur, la retenue douanière se déroule selon les conditions prévues à l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. »

Amendement CL2 présenté par le Gouvernement :

Article 6

Rédiger ainsi l’alinéa 1 :

« L’article 63-4 du même code est ainsi rédigé : »

Amendement CL3 présenté par le Gouvernement :

Article 7

Après l’alinéa 6, insérer l’alinéa suivant :

« Lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, la présence de l’avocat lors des auditions peut, dans les limites fixées au deuxième alinéa, être différée, au-delà de la douzième heure, jusqu’à la vingt-quatrième heure, par décision écrite et motivée du juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République. »

Amendement CL4 présenté par le Gouvernement :

Article 12

Rédiger ainsi cet article :

« I. – L’article 706-88 du même code est ainsi modifié :

« 1° Le sixième alinéa est remplacé par les trois alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation aux dispositions des articles 63-4, 63-4-1 et 63-4-2, lorsque la personne est gardée à vue pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, l’intervention de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes, pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction mentionnée au 3° ou au 11° de l’article 706-73, pendant une durée maximale de soixante-douze heures.

« Si le report est décidé pour une durée n’excédant pas vingt-quatre heures, la décision est prise par le procureur de la République, d’office ou à la demande de l’officier de police judiciaire. Le report de l’intervention de l’avocat au-delà de la vingt-quatrième heure est décidé, dans les limites fixées à l’alinéa précédent, par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République. Lorsque la garde à vue intervient au cours d’une commission rogatoire, le report est décidé par le juge d’instruction. Dans tous les cas, la décision du magistrat doit être écrite et motivée et préciser la durée pour laquelle l’intervention de l’avocat a été différée.

« Lorsqu’il a été fait application des deux alinéas qui précèdent, l’avocat dispose, à partir du moment où il a été autorisé à intervenir en garde à vue, des droits prévus par les articles 63-4, 63-4-1 (premier alinéa), 63-4-2 (premier alinéa) et 63-4-3. » ;

« 2° Ses quatre derniers alinéas deviennent l’article 706-88-1.

« II. – Au premier alinéa du nouvel article 706-88-1, après les mots : « au deuxième alinéa », sont insérés les mots : «de l’article 706-88 ». »

Amendement CL5 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 15

Insérer l’article suivant :

« I. – À l’article 127 du code de procédure pénale, les mots : « procureur de la République » sont remplacés par les mots : « juge des libertés et de la détention ».

« II. – L’article 133 du même code est ainsi modifié :

« 1° Au deuxième alinéa, les mots : « procureur de la République » sont remplacés par les mots : « juge des libertés et de la détention » ;

« 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Le juge des libertés et de la détention informe sans délai le magistrat qui a délivré le mandat et ordonne le transfèrement. Si celui-ci ne peut être effectué immédiatement, le juge des libertés et de la détention en avise le juge mandant. » ;

« III. – L’article 135-2 du même code est ainsi modifié :

« 1° Au cinquième alinéa les mots : « devant le procureur de la République du lieu de son arrestation » sont remplacés par les mots : « devant le juge des libertés et de la détention du lieu de son arrestation ».

« 2° Au sixième alinéa les mots : « les dispositions ci-dessus » sont remplacés par les mots : « le quatrième alinéa ». »

Amendement CL6 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 1er

Compléter l’alinéa 4 par les mots : « dont la durée ne peut excéder quatre heures ».

Amendement CL7 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 1er

I. – Supprimer l’alinéa 3.

II. – Après l’alinéa 8 insérer les trois alinéas suivants :

« Art. 62-4-1. – La garde à vue constitue une mesure de contrainte par laquelle une personne, est, dans les conditions, selon les modalités et pour les durées prévues par les présents articles, maintenue contre sa volonté à la disposition des enquêteurs pour la mise en œuvre de tous les actes utiles à la manifestation de la vérité.

« La garde à vue doit se dérouler dans des conditions matérielles et morales compatibles avec le respect de la dignité de la personne humaine.

« Le placement en garde à vue n’est possible que si l’infraction est punie d’une peine de trois ans d’emprisonnement ou, en cas de délit flagrant, d’une peine de six mois d’emprisonnement. »

Amendement CL8 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 1er

À l’alinéa 3, substituer aux mots : « puni d’emprisonnement » les mots : « puni de trois ans d’emprisonnement ou en cas de délit flagrant de six mois d’emprisonnement ».

Amendement CL9 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 1er

Substituer aux alinéas 9 à 13 l’alinéa suivant :

« Art. 62-5. – La garde à vue s’exécute sous le contrôle du procureur de la République qui s’assure dans tous les cas que la mesure se déroule dans des conditions compatibles avec le principe du respect de la dignité de la personne. »

Amendement CL11 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 2

Rédiger ainsi les alinéas 2 à 7 de cet article :

« Art. 63. – I. – L’officier de police judiciaire peut d’office, ou sur instruction du procureur de la République ou du juge d’instruction, placer en garde à vue une personne.

« L’officier de police judiciaire agissant d’office, donne connaissance au procureur de la République, sans délai et directement, des circonstances qui justifient le placement et le maintien en garde à vue ; il l’avise de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne.

« Si l’officier de police judiciaire n’obtient pas confirmation par le procureur de la République du maintien d’une personne en garde à vue dans un délai de quatre heures, la garde à vue prend fin.

« Le Procureur de la République apprécie si le placement en garde à vue est conforme aux conditions prévues par le présent code. Si le procureur de la République estime que la décision de placement en garde à vue n’est pas justifiée, il ordonne qu’il y soit mis fin immédiatement.

« En fonction de la gravité de l’infraction, le procureur de la République fixe la durée de la garde à vue, qui ne pourra excéder vingt-quatre heures sans préjudice des articles…

« II. – La durée de la garde à vue ne peut excéder vingt-quatre heures.

« Toutefois, si les nécessités de l’enquête le justifient, La prolongation de la garde à vue est autorisée par le juge des libertés et de la détention saisi, soit à la requête du procureur de la République, soit par le juge d’instruction, pour une durée maximale prévue par le présent code.

« Sa décision est motivée au regard de la légalité de la mesure et des circonstances de l’affaire.

« La personne gardée à vue est présentée au juge des libertés et de la détention, son avocat étant présent ou avisé en temps utile. Le juge peut décider que son audition sera, le cas échéant, effectuée par des moyens de télécommunication visés à l’article 706-71. »

Amendement CL14 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 7

I. – Dans la première phrase de l’alinéa 5 et à l’alinéa 6, substituer aux mots : « le procureur de la République » les mots : « le juge des libertés et de la détention saisi par le procureur de la République ».

II. – Rédiger ainsi la dernière phrase de l’alinéa 5 :

« L’autorisation du juge des libertés et de la détention est écrite et motivée ; elle est rendue sans forme. »

Amendement CL15 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 5

Remplacer l’alinéa 4 par deux alinéas ainsi rédigés :

« À son arrivée, l’avocat prend connaissance de la date et de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, de la teneur des indices mettant en cause la personne gardée à vue, de la notification du placement en garde à vue et des droits qui y sont attachés ainsi que, le cas échéant, du procès-verbal d’interpellation, des procès-verbaux d’audition déjà réalisés ainsi que.

« Les présentes dispositions s’appliquent à chaque renouvellement de la mesure de garde à vue. »

Amendement CL16 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 7

Compléter l’alinéa 2 par les mots : « et les pièces du dossier mettant en cause la personne gardée à vue ».

Amendement CL17 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Après l’article 14

Insérer l’article suivant :

« L’article L. 3341-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé

« Art. L. 3341-1. – Une personne trouvée en état d’ivresse dans un lieu public peut soit :

« – être confiée à une personne proche qui répondra de sa sûreté.

« – être conduite à ses frais, par un transporteur privé, au sein d’une association habilitée pour y demeurer jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison,

« – être, par mesure de police, conduite à ses frais au poste le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison. »

Amendement CL18 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Après l’article 18

Insérer l’article suivant :

« Dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement dépose un rapport au Parlement afin d’évaluer, d’une part, l’évolution du nombre annuel des mesures de garde à vue prononcées et notifiées, de mesurer, par Cour d’appel, l’activité des juges des libertés, et de la détention liées à l’exécution de la présente loi, ainsi que le taux d’élucidation, le taux de relaxe et le taux d’acquittement dans les procédures où un placement en garde à vue aura été décidé. »

Amendement CL20 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

À l’alinéa 2 de cet article, substituer aux mots : « des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, » les mots : « un ou plusieurs indices laissant présumer la commission d’une infraction, ».

Amendement CL21 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

À l’alinéa 3 de cet article, après les mots : « de commettre un crime ou un délit puni » insérer les mots : « d’au moins 5 ans ».

Amendement CL22 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

À l’alinéa 3 de cet article, après les mots : « de commettre un crime ou un délit puni » insérer les mots : « d’au moins 3 ans ».

Amendement CL23 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

Après l’alinéa 3 de cet article, insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« À titre exceptionnel, il peut être dérogé au seuil de l’article 62-3 du Code de procédure pénale, sur décision du Procureur de la République prise immédiatement et motivée par la stricte nécessité de ménager, en fonction des circonstances de l’espèce, la possibilité de défèrement de l’intéressé. »

Amendement CL24 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

Supprimer l’alinéa 4.

Amendement CL25 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

Après l’alinéa 20 de cet article, ajouter un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« 7° Permettre plusieurs auditions justifiées par la complexité de l’enquête ».

Amendement CL26 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

I. – À l’alinéa 6, substituer aux mots : « procureur de la République » les mots : « juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République ».

II. – La première phrase du septième alinéa est ainsi rédigée :

« La personne gardée à vue doit être présentée au juge des libertés et de la détention qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. »

Amendement CL27 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

À l’alinéa 6 de cet article, substituer aux mots : « supérieure ou égale à un an » par les mots : « supérieure ou égale à trois ans ».

Amendement CL28 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Supprimer les deux dernières phrases de l’alinéa 7.

Amendement CL29 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Au douzième alinéa de cet article, après les mots : « de la nature » insérer les mots : « , du ou des lieux ».

Amendement CL30 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Après le seizième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« – droit de se taire et de ne pas répondre aux questions qui seront posées par l’enquêteur. »

Amendement CL31 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Après l’alinéa 17 de cet article, insérer un nouvel alinéa rédigé ainsi :

« Si la personne ne comprend pas le français et/ou qu’elle ne sait ni lire ou écrire, le recours au formulaire écrit ne peut avoir lieu que pour son information immédiate en l’absence de disponibilité de l’interprète. Dès l’arrivée de l’interprète, les droits de la personne lui seront à nouveau notifiés par celui-ci afin qu’elle puisse alors demander toute précision sur les dispositions qui ne seraient pas claires pour elle. »

Amendement CL32 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Rédiger ainsi l’alinéa 19 :

« II. – La personne placée en garde à vue est immédiatement informée qu’elle a le droit, après avoir décliné son identité, de ne pas répondre aux questions qui lui seront posées par les enquêteurs. »

Amendement CL33 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 3

Au quatrième alinéa de cet article, substituer aux mots : « de trois heures » les mots : « de deux heures ».

Amendement CL34 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 4

I. – Dans le deuxième alinéa, substituer aux mots : « l’aptitude au maintien en garde à vue » les mots : « la compatibilité du maintien de la mesure de garde à vue avec l’état de santé de la personne gardée à vue ».

II. – Après la deuxième phrase de cet alinéa, insérer une phrase ainsi rédigée :

« Le médecin délivre un certificat médical qui est versé au dossier. »

Amendement CL35 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 4

Au deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « de trois heures » les mots : « de deux heures ».

Amendement CL36 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 4

Insérer un quatrième alinéa à cet article :

« 3° Lorsque le médecin délivre un certificat médical d’incompatibilité de l’état de santé de la personne avec la garde à vue, celui-ci a un caractère impératif. »

Amendement CL37 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 6

À l’alinéa 3 de cet article, substituer aux mots : « trente minutes » les mots : « une heure ».

Amendement CL38 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Rédiger ainsi le deuxième alinéa de cet article :

« À sa demande, l’avocat peut consulter le dossier de la procédure. »

Amendement CL39 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Dans le deuxième alinéa, après les mots : « y étant attachés » insérer les mots : « , le certificat médical établi en application de l’article 63-3, ».

Amendement CL40 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Au quatrième alinéa de cet article, substituer au mot : « assister » le mot : « participer ».

Amendement CL41 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Ajouter une phrase ainsi rédigée au quatrième alinéa :

« Il peut également participer aux confrontations et reconstitutions auxquelles participe son client, dans les mêmes conditions. »

Amendement CL42 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Ajouter une phrase ainsi rédigée au quatrième alinéa :

« L’avocat est avisé par tout moyen de la possibilité d’assister à l’audition de son client, au moins deux heures avant celle-ci. Aucune audition ne peut avoir lieu avant l’arrivée de l’avocat ou dans les deux heures suivant l’information de celui-ci. »

Amendement CL44 présenté M. Noël Mamère, Mme Anny Poursinoff et MM. Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Supprimer le sixième alinéa de cet article.

Amendement CL50 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 1er

Substituer aux alinéas 1 à 8 les deux alinéas suivants :

« Après l’article 62-1 du code de procédure pénale, est inséré l’article 62-2 ainsi rédigé :

« Art. 62-2. – La garde à vue est une mesure de contrainte prise au cours de l’enquête par laquelle une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans est maintenue à la disposition des enquêteurs pour l’un des motifs prévus à l’article 62-6. »

Amendement CL51 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 1er

Substituer à l’alinéa 5 les alinéas suivants :

« Le consentement de la personne à son audition est recueilli après qu’elle ait été immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits :

« 1° De la durée de l’audition libre qui ne peut excéder une durée de quatre heures ;

« 2° De la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;

« 3° De ce qu’elle bénéficie des droits suivants :

« – droit de faire prévenir un proche et son employeur conformément aux dispositions de l’article 63-2 ;

« – droit d’être examinée par un médecin conformément aux dispositions de l’article 63-3 ;

« – droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat conformément aux dispositions des articles 63-3-1 à 63-4-2. Dans ce cas, la durée de l’audition libre pourra être portée à six heures.

« 4° De ce qu’elle a le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

« 5° Des dispositions du II.

« Si la personne est atteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec elle. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

« Cette information et le consentement de la personne sont mentionnés dans le procès-verbal d’audition. »

Amendement CL52 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 1er

Après l’alinéa 5, insérer l’alinéa suivant :

« Le régime de cette audition est exclusif de tout port d’entraves et de tout placement en cellule. »

Amendement CL53 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 1er

À l’alinéa 3, substituer aux mots : « puni d’emprisonnement », les mots : « puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans ».

Amendement CL54 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

Substituer aux alinéas 2, 3 et 4 l’alinéa suivant :

« Seul un officier de police judiciaire peut, sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue. »

Amendement CL55 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « un an », les mots : « cinq ans ».

Amendement CL56 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « procureur de la République », les mots : « juge des libertés et de la détention, à la requête du parquet, ».

Amendement CL57 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

À l’alinéa 7, substituer aux mots : « procureur de la République », les mots : « juge des libertés et de la détention ».

Amendement CL58 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

Supprimer la dernière phrase de l’alinéa 7.

Amendement CL59 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 2

À l’alinéa 19, substituer au mot : « choix », le mot : « droit ».

Amendement CL60 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 3

À l’alinéa 4, substituer au mot : « trois », le mot : « deux ».

Amendement CL61 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 4

À l’alinéa 2, substituer au mot : « trois », le mot : « deux »

Amendement CL62 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 6

Rédiger ainsi le premier alinéa de cet article :

« L’article 63-4 du même code est ainsi rédigé : »

Amendement CL63 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 6

À l’alinéa 3, substituer au mot : « trente minutes », les mots : « une heure ».

Amendement CL64 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 7

Supprimer les alinéas 3, 5 et 6.

Amendement CL65 présenté MM. Michel Vaxès, Patrick Braouezec, Mme Marie-Hélène Amiable, MM. François Asensi, Alain Bocquet, Jean-Pierre Brard, Mme Marie-George Buffet, MM. Jean-Jacques Candelier, André Chassaigne, Jacques Desallangre, Marc Dolez, Pierre Gosnat, Mme Jacqueline Fraysse, MM. André Gerin, Maxime Gremetz, Jean-Paul Lecoq, Roland Muzeau, Daniel Paul et Jean-Claude Sandrier :

Article 7

Compléter le quatrième alinéa par la phrase suivante :

« L’avocat peut poser des questions et formuler des observations orales. »

Amendement CL82 présenté par M. Bernard Gérard :

Article 1er

Compléter l’alinéa 4 par les mots : « qui ne peut excéder quatre heures ».

Amendement CL84 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Article 2

Compléter l’alinéa 6 par les deux phrases suivantes :

« En matière criminelle, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures. Cette seconde prorogation est autorisée, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d’instruction. »

Amendement CL85 présenté par MM. Éric Ciotti et Christian Estrosi :

Article 2

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « un an » les mois : « six mois ».

Amendement CL86 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Article 7

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 11 du code de procédure pénale. »

Amendement CL88 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Article 2

Rédiger ainsi l’alinéa 19 :

« II. – La personne placée en garde à vue est informée au début de son audition qu’elle a le choix de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. Toutefois ce droit de se taire ne s’applique pas aux informations suivantes que la personne a le devoir de communiquer : son nom, son prénom, sa date de naissance, son lieu de naissance, son domicile et le cas échéant sa résidence. »

Amendement CL89 présenté par MM. Éric Ciotti et Christian Estrosi :

Article 7

À l’alinéa 5, après les mots : «douze heures », insérer les mots : « renouvelable une fois dans les mêmes formes ».

Amendement CL90 présenté par MM. Éric Ciotti et Christian Estrosi :

Article 5

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« Dès lors que l’avocat a été prévenu, l’officier de police judiciaire peut débuter l’audition de la personne gardée à vue. »

Amendement CL91 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Article 5

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« Si dans une même procédure, une personne gardée à vue, désigne un avocat déjà choisi ou nommé par un coauteur, un complice, un témoin ou tout autre personne amenée à témoigner dans cette affaire, et que cela risque de créer un conflit d’intérêt ou de nuire au bon déroulement de l’enquête, l’officier de police judiciaire peut avertir le procureur de la République afin que ce dernier puisse saisir le bâtonnier aux fins qu’un autre avocat puisse être désigné pour défendre la personne gardée à vue. »

Amendement CL92 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Article 7

Après l’alinéa 5, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’officier de police judiciaire a seul, le pouvoir de direction de l’audition.

« L’avocat peut formuler toutes observations écrites qu’il jugera utiles qui seront jointes au procès-verbal de l’audition.

« Néanmoins, si son comportement a pour effet de troubler le bon déroulement de l’audition, l’officier de police judiciaire peut saisir le procureur de la République afin que ce dernier puisse autoriser la poursuite de l’audition hors la présence de l’avocat.

« Cette décision doit être écrite et motivée. »

Amendement CL93 présenté par MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi et Philippe Goujon :

Après l’article 7

Insérer l’article suivant :

« Après le 3° de l’article 706-73 du code procédure pénale, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration sur mineurs de moins de 15 ans visés aux article 224-5. »

Amendement CL96 présenté par Mme Delphine Batho et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« Après le troisième alinéa de l’article 62 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne gardée à vue est assistée d’un avocat en application de l’article 63-4-2, l’officier de police judiciaire dresse à l’issue des auditions un seul procès-verbal récapitulant le sens des déclarations recueillies. »

Amendement CL97 présenté par Mme Delphine Batho et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 2

Rédiger ainsi l’alinéa 18 :

« Mention de l’information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal de déroulement de la garde à vue et émargée par la personne gardée à vue. En cas de refus d’émargement, il en est fait mention. »

Amendement CL98 présenté par Mme Delphine Batho et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Après l’article 18

Insérer l’article suivant :

« Dans les trois mois suivant la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création, dans les grandes zones urbaines, de locaux spécifiques aux gardes à vue, permettant l’audition et la garde à vue des personnes dans des conditions optimales, en regroupant sur un même site les locaux destinés aux interrogatoires, aux mesures de sécurité, ainsi qu’à l’exercice des droits des personnes par le biais d’un bureau des médecins, des avocats, des interprètes. »

Amendement CL99 présenté par Mme Delphine Batho et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 10

Rédiger ainsi l’alinéa 2 :

« Art. 64. – I. – L’officier de police judiciaire établit un procès-verbal unique relatif au déroulement de la garde à vue mentionnant : »

Amendement CL100 présenté par Mme Delphine Batho et les commissaires membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Après l’article 7

Insérer l’article suivant :

« Après le 3° de l’article 53-1 du code de procédure pénale, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis Lorsqu’elles ont été victimes d’une atteinte à l’intégrité physique susceptible d’entraîner une incapacité de travail et ont déposé plainte de ce fait, des possibilités qui leur sont ouvertes de s’entretenir rapidement avec un avocat ; ».

Amendement CL102 rectifié présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Supprimer les alinéas 2 et 4 à 8.

Amendement CL104 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Après le mot : « infraction », substituer à la fin de la première phrase de l’alinéa 2 les mots et la phrase suivante : « punie d’une peine d’emprisonnement de moins de trois ans, présumée innocente, peut être entendue, par les enquêteurs, assistée d’un avocat. Cette audition ne peut excéder une durée de six heures ».

Amendement CL105 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

I. – Au début de l’alinéa 6, insérer la phrase suivante :

« L’audition de la personne assistée d’un avocat ne peut excéder une durée de six heures. »

II. – Au même alinéa, après les mots : « dans les conditions prévues » insérer les mots : « à l’article 62-2 ».

Amendement CL106 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 7 :

« III. – La personne faisant l’objet d’une audition assistée d’un avocat est informée par un officier de police judiciaire préalablement au début de l’audition des raisons de la nature et de la date présumée de l’infraction dont elle est soupçonnée, de la durée de l’audition, de son droit de s’entretenir avec un avocat pendant trente minutes avant le début de cette mesure et de son droit de garder le silence. Cette information de la personne est mentionnée dans le procès-verbal d’audition. »

Amendement CL107 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« Art. 62-3. – La garde à vue est une mesure de contrainte prise au cours de l’enquête par laquelle une personne contre laquelle il existe une ou plusieurs raisons sérieuses de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’au moins trois années d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs pour l’un des motifs prévus par l’article 62-6. »

Amendement CL108 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 9 :

« Art. 62-5. – La garde à vue s’exécute sous le contrôle du juge des libertés et de la détention ou, à défaut, du président du tribunal de grande instance ou de son délégué. »

Amendement CL109 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 1er

Supprimer l’alinéa 13.

Amendement CL110 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 2

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République » les mots : « par décision motivée du juge des libertés et de la détention ou, à défaut, du président du tribunal de grande instance ou de son délégué auquel la personne est présentée » et aux mots : « un an » les mots « trois ans ».

Amendement CL111 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 2

À la fin de la première phrase de l’alinéa 7, substituer aux mots : « au procureur de la République » les mots : « au juge des libertés et de la détention ou à défaut au président du tribunal de grande instance ou de son délégué ».

Amendement CL112 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 2

À l’alinéa 8, substituer au mot : « libre » par le mot : « assistée par un avocat ».

Amendement CL113 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 7

Compléter l’alinéa 2 par les mots et la phrase suivante : « et toutes les autres pièces contenues dans le dossier concernant la personne placée en garde à vue. L’avocat a également accès à toutes les pièces du dossier à tout moment pendant la garde à vue. ».

Amendement CL114 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 7

Supprimer l’alinéa 3.

Amendement CL115 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 4 :

« Art. 63-4-2. – L’avocat peut assister aux auditions de la personne gardée à vue, à la fin de chaque audition il peut poser des questions et former des demandes d’actes auprès des enquêteurs qui sont consignées dans le procès-verbal. »

Amendement CL116 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 7

Supprimer les alinéas 5 et 6.

Amendement CL117 présenté par M. Philippe Houillon :

Article 9

Rédiger ainsi l’alinéa 5 :

« Art. 63-8. – À l’issue de la garde à vue, la personne est sur instruction du procureur de la République soit remise en liberté soit déférée devant le juge des libertés et de la détention ou, à défaut, devant le président du tribunal de grande instance ou son délégué. »

Amendement CL118 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 1er

À l’alinéa 2, substituer au mot «plausibles » le mot : « sérieuses ».

Amendement CL119 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 11

À l’alinéa 5, substituer au mot : «plausibles » le mot : « sérieuses ».

Amendement CL120 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 1er

À l’alinéa 5, après le mot « soupçonnée » insérer les mots : « de son droit de garder le silence pendant l’audition ».

Amendement CL121 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 1er

À l’alinéa 8, après les mots : « à l’issue de ce placement, » insérer les mots : « et dès lors que ses facultés mentales ne sont plus altérées, ».

Amendement CL122 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Eric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 1er

À l’alinéa 14, après les mots : « Une personne ne peut être placée en garde à vue que si », insérer les mots : « les faits reprochés relèvent d’une peine criminelle ou d’une peine correctionnelle d’au moins trois ans d’emprisonnement et ».

Amendement CL123 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 2

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « supérieure ou égale à un an » les mots : « au moins égale à trois ans ».

Amendement CL124 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 3

À l’alinéa 4, après les mots : « sauf en cas de circonstance insurmontable, » insérer les mots : « et qui doivent être motivées sur le procès-verbal ».

Amendement CL125 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 5

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Un délai maximum de deux heures peut s’écouler entre l’avis donné à l’avocat, dans les conditions prévues au deuxième alinéa et le début de l’audition de l’intéressé. Pendant ce laps de temps, les questions posées à l’intéressé ne pourront porter que sur son identité. Au terme de ce délai, la personne pourra être interrogée, même en l’absence d’avocat. »

Amendement CL126 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 2

Compléter l’alinéa 11 par la phrase suivante :

« En cas de prolongation de la garde à vue, l’intéressé est alors dûment informé des éléments motivant ladite prolongation ainsi que de ses droits »

Amendement CL128 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 7

Supprimer les alinéas 5 et 6.

Amendement CL129 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 9

Compléter l’alinéa 3 par la phrase suivante :

« Dans tous les cas, cette fouille ne doit pas avoir de caractère vexatoire et doit se dérouler dans le respect de la dignité humaine. »

Amendement CL130 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 1er

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« En aucun cas, une mesure de garde à vue ne saurait être arbitraire et se substituer à une mesure de privation de liberté. »

Amendement CL131 présenté par MM. Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Mme Françoise Branget, MM. Bernard Brochand, François Calvet, Jean-Yves Cousin, Bernard Debré, Lucien Degauchy, Daniel Fasquelle, Sauveur Gandolfi-Scheit, Jean-Jacques Gaultier, Franck Gilard, François-Michel Gonnot, Mme Anne Grommerch, M. Jacques Grosperrin, Mmes Françoise Hostalier, Jacqueline Irles, Marguerite Lamour, MM. Thierry Lazaro, Michel Lejeune, Lionnel Luca, Jean-Philippe Maurer, Pierre Morel-A-L’Huissier, Alain Moyne-Bressand, Mme Béatrice Pavy, MM. Éric Raoult, Jean Roatta, Mme Valérie Rosso-Debord, M. François de Rugy, Mme Françoise de Salvador, MM. Bruno Sandras, Fernand Siré, Éric Straumann, François-Xavier Villain, Michel Voisin, André Wojciechowski, Mme Marie-Jo Zimmermann, Gabrielle Louis-Carabin, Fabienne Labrette-Ménager, MM. Lionel Tardy, Olivier Jardé, Pierre Lasbordes, Mme Marie-Louise Fort, MM. Michel Zumkeller, et Arnaud Robinet :

Article 9

À l’alinéa 3, après le mot : « réalisée », insérer les mots : « dans un espace fermé, ».

Amendement CL133 présenté par MM. Jean-Paul Garraud, Yves Albarello, Mmes Jacqueline Irles, Arlette Grosskost, MM. Lionnel Luca, Philippe Meunier, Jacques Myard, Christian Vanneste et Philippe Vitel :

Article 7

À l’alinéa 5, après les mots : « douze heures » insérer les mots : « renouvelable une fois dans les mêmes formes ».

Amendement CL134 présenté par MM. Jean-Paul Garraud, Yves Albarello, Mmes Jacqueline Irles, Arlette Grosskost, MM. Lionnel Luca, Philippe Meunier, Jacques Myard, Christian Vanneste et Philippe Vitel :

Article 6

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Toutefois cet entretien peut être limité dans les cas et conditions prévus par l’article 63-4-2 du code de procédure pénale. »

Amendement CL135 présenté par MM. Jean-Paul Garraud, Yves Albarello, Mmes Jacqueline Irles, Arlette Grosskost, MM. Lionnel Luca, Philippe Meunier, Jacques Myard, Christian Vanneste et Philippe Vitel :

Article 7

Compléter l’alinéa 4 par la phrase suivants :

« Dès son arrivée dans le locaux du service de police judiciaire, l’avocat peut assister aux auditions en cours ou aux auditions à venir. »

Amendement CL136 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck et Jean-Claude Bouchet :

Article 7

Compléter l’alinéa 5 par la phrase suivants :

« Cette autorisation peut être renouvelée pour un nouveau délai de 12 heures sur décision écrite et motivée du juge des libertés et de la détention saisi par le procureur de la République. »

Amendement CL137 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck et Jean-Claude Bouchet :

Article 12

I. – À la première phrase du troisième alinéa du 1° du I, substituer aux mots : « 24 heures » les mots : « 48 heures ».

II. – À la deuxième phrase du même alinéa, substituer aux mots : « vingt-quatrième heure » les mots : « quarante-huitième heure ».

Amendement CL138 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Daniel Spagnou, Jacques Myard, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Remiller, Bernard Gérard, Jean-Claude Flory et Jean-Claude Bouchet :

Article 7

Après l’alinéa 4, insérer les deux alinéas suivants :

« Si celui-ci ne se présente pas dans un délai maximal de deux heures après avoir été désigné, l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire peut commencer les auditions du gardé à vue.

« Le délai prévu à l’alinéa précédent ne s’impute pas sur la durée de 24 heures fixée au premier alinéa du II de l’article 63. »

Amendement CL139 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck, Bernard Gérard et Jean-Claude Bouchet :

Article 7

Après l’alinéa 4, insérer l’alinéa suivant :

« L’avocat peut poser des questions à l’issue de chaque audition, dans la limite de 15 minutes maximum. L’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire peut s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou sans rapport avec celle-ci. S’il le souhaite, l’avocat consigne les questions refusées dans ses observations écrites versées à la procédure. »

Amendement CL140 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck et Jean-Claude Bouchet :

Article 7

Après l’alinéa 4, insérer l’alinéa suivant :

« L’officier ou l’agent de police judiciaire exerce la police de l’audition. À ce titre, si l’avocat compromet, par ses interventions, le bon déroulement de l’audition, l’officier ou l’agent de police judicaire en réfère au procureur de la République qui peut autoriser, sur décision écrite et motivée, la poursuite de l’audition hors de la présence de l’avocat. »

Amendement CL141 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck et Jean-Claude Bouchet :

Article 7

I. – Supprimer les alinéas 3, 5 et 6.

II. – Après l’alinéa 8, insérer les deux alinéas suivants :

« Art. 63-4-5. – Par dérogation aux dispositions des articles 63-4, 63-4-1 et 63-4-2, l’intervention de l’avocat peut être différée en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes relatives au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes, pendant une durée maximale de 24 heures.

« Le report de l’intervention de l’avocat pendant les 12 premières heures est décidé par le procureur de la République, d’office ou à la demande de l’officier de police judiciaire. Le report de l’intervention de l’avocat au-delà de la 12e heure est décidé, dans les limites fixées à l’alinéa précédent, par le juge des libertés et de la détention statuant sur requête du procureur de la République. »

Amendement CL142 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck et Jacques Remiller :

Article 7

Compléter l’alinéa 4 par les mots : « , à l’exception de tout autre acte d’enquête ».

Amendement CL143 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Claude Bouchet et Jacques Remiller :

Article 7

Compléter l’alinéa 2 par la phrase suivante :

« Il ne peut en revanche en demander ou en prendre une quelconque copie. »

Amendement CL144 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Éric Ciotti, Christian Estrosi, Bernard Gérard, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Jean-Claude Flory, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Claude Bouchet et Jacques Remiller :

Article 5

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Si l’avocat désigné assiste déjà une autre personne concomitamment gardée à vue dans la même enquête et que cette situation est susceptible de nuire au bon déroulement des investigations ou de rendre impossible l’audition simultanée de plusieurs suspects, le procureur de la République, d’office ou saisi par l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire, peut demander au bâtonnier de désigner un autre défenseur. »

Amendement CL145 présenté par M. Philippe Goujon, Mmes Arlette Grosskost, Jacqueline Irles, MM. Bernard Gérard, Daniel Spagnou, Jacques Myard, Jean-Marc Roubaud, Jean-Claude Flory, Philippe Vitel, Jean-Pierre Schosteck, Étienne Pinte et Jacques Remiller :

Article 9

Après l’alinéa 2, insérer l’alinéa suivant :

« La personne gardée à vue peut demander à conserver lors de son placement en garde à vue certains objets intimes. Dans ce cas, elle signe une décharge exonérant l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire de toute responsabilité pénale, civile ou administrative, au cas où elle utiliserait ces objets pour attenter à sa vie ou à son intégrité physique. »

Amendement CL148 présenté par Jean-Jacques Urvoas et Dominique Raimbourg :

Avant l’article 11

Insérer l’article suivant :

« Le premier alinéa de l’article 18 du code de procédure pénale est complété par les deux alinéas suivants :

« Toutefois les officiers de police judicaire sont compétents sur tout le territoire dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État.

« Lorsqu’il sort des limites territoriales de son rattachement, l’officier de police judiciaire compétent sur tout le territoire avise de sa venue le procureur compétent dans le département ainsi que le directeur de la police ou de la gendarmerie départementalement compétent. »

Amendement CL149 présenté par Jean-Jacques Urvoas et Dominique Raimbourg :

Après l’article 14

Insérer l’article suivant :

« Le I de l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi rédigé :

« I. – Le mineur de treize ans ne peut être placé en garde à vue. Toutefois, à titre exceptionnel, le mineur de dix à treize ans contre lequel il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu’il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’au moins de cinq ans d’emprisonnement peut, pour les nécessités de l’enquête, être retenu à la disposition d’un officier de police judiciaire avec l’accord préalable et sous le contrôle d’un magistrat du ministère public ou d’un juge d’instruction spécialisés dans la protection de l’enfance ou d’un juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder six heures non renouvelable.

« Lorsque les représentants légaux n’ont pas désigné d’avocat, le procureur de la République, le juge chargé de l’instruction ou l’officier de police judiciaire doit, dès le début de la retenue, demander par tout moyen et sans délai au bâtonnier de commettre un avocat d’office. Le mineur retenu ne peut faire l’objet d’aucune mesure de contrainte. »

Amendement CL150 présenté par Jean-Jacques Urvoas et Dominique Raimbourg :

Après l’article 14

Insérer l’article suivant :

« Le II de l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi rédigé :

« II. – Tout mineur âgé de treize à dix huit ans à l’encontre duquel il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu’il a commis ou tenté de commettre une infraction, peut faire l’objet d’une retenue judicaire dans les conditions prévues au I. »

Amendement CL152 présenté par Jean-Jacques Urvoas et Dominique Raimbourg :

Après l’article 15

Insérer l’article suivant :

« Lorsqu’un mineur âgé de dix à dix huit ans, est placé en retenue judiciaire ou en garde à vue entre 21 heures et six heures, l’officier de police judiciaire peut, sauf si la nature des faits et des nécessités de l’enquête l’en empêchent, demander au représentant légal du mineur de venir sans délai le prendre en charge. Le représentant légal qui prend en charge le mineur émarge dans un registre prévu à cet effet.

« Après présentation préalable devant un officier de police judiciaire de permanence, le mineur, accompagné de son représentant légal, reçoit une convocation à comparaître.

« La convocation contient, sous peine de nullité, le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance, l’adresse du mineur et de son représentant légal. Il est également mentionné les faits qui sont reprochés au mineur, la date et le lieu de commission des faits, la date et l’heure de la convocation, ainsi que le nom de l’avocat choisi, ou commis d’office si le son représentant légal n’est pas en mesure d’en désigner un. L’avocat est directement informé de sa désignation, par le représentant légal du mineur.

« L’officier de police judiciaire peut contraindre à comparaître par la force publique, avec l’autorisation préalable du procureur de la République, le mineur, accompagné de son représentant légal, qui n’a pas répondu à la convocation à comparaître. »

Amendement CL153 présenté par M. Dominique Raimbourg et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche :

Article 12

Remplacer les trois premières phrases du cinquième alinéa de cet amendement par une phrase ainsi rédigée :

« Le report est décidé par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République ou, si la garde à vue intervient au cours d’une commission rogatoire, par le juge d’instruction. »

Amendement CL154 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 5

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Un même avocat ne peut assister plusieurs personnes gardées à vue pour les mêmes faits. »

Amendement CL157 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Après l’alinéa 7, insérer l’alinéa suivant :

« Si le comportement de l’avocat au cours d’une audition ou confrontation à laquelle il assiste perturbe gravement le déroulement de l’audition, le procureur de la République peut, à la demande de l’officier de police judiciaire, demander au bâtonnier de désigner un avocat en remplacement de l’avocat précédemment désigné. S’il est fait droit à la demande de l’officier de police judiciaire, celui-ci en informe immédiatement le bâtonnier. Le premier alinéa de l’article 63-4-2 est applicable. »

Amendement CL158 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Après l’article 7

Insérer l’article suivant :

Après l’article 63-4 du même code, il est inséré un article 63-4-5 ainsi rédigé :

« Art. 63-4-5 – Si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue qui est assistée d’un avocat lors de son audition, elle peut demander à être également assistée par un avocat choisi par elle, ou son représentant légal si elle est mineure, ou, à sa demande, désigné par le bâtonnier.

« La victime est informée de ce droit avant qu’il soit procédé à la confrontation.

« À sa demande, l’avocat peut consulter les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste.

« Les deux premiers alinéas de l’article 63-4-3, le dernier alinéa de l’article 63-4-3 et l’article 63-4-4 sont applicables.

« Les frais d’avocat sont à la charge de la victime. »

Amendement CL159 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 6

À l’alinéa 2, après le mot : « désigné », insérer les mots : « dans les conditions prévues à l’article 63-3-1 ».

Amendement CL160 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 6

À la fin de l’alinéa 4, substituer aux mots : « alinéas précédents », les mots : « deux premiers alinéas ».

Amendement CL161 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

À l’alinéa 2, après les mots : « en application », insérer les mots : « du dernier alinéa du I ».

Amendement CL162 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Supprimer l’alinéa 3.

Amendement CL163 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

À la première phrase de l’alinéa 5, après les mots : « autoriser celui-ci », insérer les mots : « soit à débuter immédiatement l’audition de la personne gardée à vue sans attendre l’expiration du délai de deux heures prévu au premier alinéa, soit ».

Amendement CL164 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

À la première phrase de l’alinéa 5, substituer aux mots : « en considération des » les mots : « pour des raisons impérieuses tenant aux ».

Amendement CL165 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 6 :

« Dans les mêmes conditions, le procureur de la République peut décider que, pendant une durée ne pouvant excéder douze heures, l’avocat ne pourra consulter les procès-verbaux mentionnés à l’article 63-4-1. »

Amendement CL166 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Substituer à l’alinéa 7 les deux alinéas suivants :

« Art. 63-4-3. – À l’issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l’avocat peut poser des questions. L’officier ou l’agent de police judiciaire peut s’opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ou à la dignité de la personne. Mention de la question refusée est portée au procès-verbal.

« À l’issue de chaque entretien avec la personne gardée à vue et de chaque audition ou confrontation à laquelle il a assisté, l’avocat peut présenter des observations écrites. Celles-ci sont jointes à la procédure. »

Amendement CL167 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

À l’alinéa 8, substituer aux mots : « de son entretien », les mots : « des entretiens ».

Amendement CL168 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« L’officier de police judiciaire informe le procureur général près la Cour d’appel de toute violation par l’avocat de l’interdiction résultant de l’alinéa précédent, ainsi que de tout comportement de l’avocat, pendant une audition ou confrontation à laquelle il assiste, perturbant gravement le déroulement de l’audition. »

Amendement CL169 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 9

À la première phrase de l’alinéa 2, substituer aux mots : « limitativement énumérées », le mot : « définies ».

Sous-amendement CL171 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL4 présenté par le Gouvernement :

Article 12

Rédiger ainsi le début de la première phrase du troisième alinéa du 1° du I de cet amendement :

« Le report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la fin de la vingt-quatrième heure est décidé par le procureur… (le reste sans changement) ».

Sous-amendement CL172 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL4 présenté par le Gouvernement :

Article 12

Après les mots : « la décision du magistrat », rédiger ainsi la fin de la dernière phrase du troisième alinéa du 1° du I de cet amendement : « , écrite et motivée, précise la durée pour laquelle l’intervention de l’avocat est différée. »

Sous-amendement CL173 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL4 présenté par le Gouvernement :

Article 12

Au dernier alinéa du 1° du I de cet amendement, substituer, par deux fois, aux mots : « a été », le mot : « est ».

Amendement CL174 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Après l’article 16

Insérer l’article suivant :

« À la première phrase du troisième alinéa de l’article 434-44 du code pénal, après les mots : « l’une des infractions prévues », sont insérés les mots : « à l’article 434-7-2, ». »

Amendement CL175 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 1er

Supprimer les alinéas 2 et 4 à 8.

Amendement CL176 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 1er

Substituer à l’alinéa 3 les sept alinéas suivants :

« Art. 62-3. – La garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, par laquelle une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs dès lors que cette mesure constitue l’unique moyen de parvenir à au moins un des objectifs suivants :

« 1° Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;

« 2° Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;

« 3° Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

« 4° Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

« 5° Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;

« 6° Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser l’infraction. »

Amendement CL177 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 1er

À l’alinéa 10, substituer aux mots : « dont la personne est soupçonnée », les mots : « que la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre ».

Amendement CL178 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 1er

Substituer à l’alinéa 13 les deux alinéas suivants :

« Le procureur de la République compétent pour contrôler les mesures de garde à vue, en ordonner la prolongation et décider de l’issue de la mesure est celui sous la direction duquel le service ou l’unité de police judiciaire mène l’enquête.

« Le procureur de la République du lieu où est exécutée la mesure est toutefois également compétent pour la contrôler et en ordonner la prolongation. »

Amendement CL179 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 1er

Supprimer les alinéas 14 à 20.

Amendement CL181 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

À l’alinéa 2, supprimer les mots : « , d’office ou sur instruction du procureur de la République, ».

Amendement CL182 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

Substituer aux alinéas 3 et 4 l’alinéa suivant :

« Dès le début de la mesure, l’officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l’article 62-3, ce placement et l’avise de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne en application du 2° de l’article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues à l’article 63-1. »

Amendement CL183 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

Après les mots : « si l’infraction », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 6 : « que la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an et si la prolongation de la mesure est l’unique moyen de parvenir à au moins un des objectifs mentionnés aux 1° à 6° de l’article 62-3. »

Amendement CL184 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

À la deuxième phrase de l’alinéa 7, substituer au mot : « communication », le mot : « télécommunication ».

Amendement CL185 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

Rédiger ainsi l’alinéa 8 :

« III. – L’heure de début de la garde à vue est fixée, le cas échéant, soit à l’heure à laquelle la personne a été appréhendée, soit à l’heure à laquelle a débuté son audition. »

Amendement CL186 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

Rédiger ainsi les alinéas 13 à 16 :

« 3° Du fait qu’elle bénéficie :

« – du droit de faire prévenir un proche et son employeur, conformément à l’article 63-2 ;

« – du droit d’être examinée par un médecin, conformément à l’article 63-3 ;

« – du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux articles 63-3-1 à 63-4-3. »

Amendement CL187 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 2

À l’alinéa 19, substituer aux mots : « son audition », les mots : « sa première audition ».

Amendement CL188 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 3

Rédiger ainsi l’alinéa 2 :

« 1° Au premier alinéa, les mots « dans le délai prévu au dernier alinéa de l’article 63-1 » et « ou son employeur » sont supprimés. Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle peut en outre faire prévenir son employeur. » ;

Amendement CL190 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 10

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« 1° Les motifs justifiant le placement en garde à vue, conformément aux 1° à 6° de l’article 62-3 ; »

Amendement CL191 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 10

À l’alinéa 4, substituer au mot : « amenée », le mot : « déférée ».

Amendement CL192 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 10

À l’alinéa 5, substituer aux mots : « le temps » les mots : « la durée ».

Amendement CL193 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 10

À l’alinéa 6, substituer aux mots : « la suite qui leur a été donnée » les mots : « les suites qui leur ont été données ».

Amendement CL196 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 10

Après le mot : « émargements  » rédiger ainsi la fin de la première phrase de l’alinéa 10 : « prévus au premier alinéa du présent II sont également portés sur ce carnet. ».

Amendement CL197 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 11

Après l’alinéa 1, insérer l’alinéa suivant :

« I bis. – Au début du deuxième alinéa de l’article 61 résultant du I du présent article, les mots « L’officier de police judiciaire » sont remplacés par le mot : « Il ». »

Amendement CL198 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 11

À la dernière phrase de l’alinéa 5, substituer au mot : « par », le mot : « à ».

Amendement CL199 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 14

Après l’alinéa 1, insérer les cinq alinéas suivants :

« 1° A L’article 64-1 est ainsi modifié :

« a) Au premier alinéa, le mot « interrogatoires » est remplacé par le mot : « auditions » et le mot « réalisés » est remplacé par le mot « réalisées » ;

« b) À la première phrase du deuxième alinéa, le mot « interrogatoire » est remplacé par le mot : « audition » ;

« c) Au cinquième alinéa, les mots « tous les interrogatoires » sont remplacés par les mots : « toutes les auditions » et les mots « dont les interrogatoires ne seront pas enregistrés » par les mots « dont les auditions ne seront pas enregistrées » ;

« d) À la première phrase du sixième alinéa, le mot « interrogatoire » est remplacé par le mot : « audition »

Amendement CL200 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 14

À l’alinéa 13, substituer au mot : « sur », les mots : « relatives à ».

Amendement CL201 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 14

Substituer à l’alinéa 14 les alinéas suivants :

« 8° Les articles 814 et 880 sont ainsi modifiés :

« a) au premier alinéa, les mots : « et que le déplacement d’un avocat paraît matériellement impossible » sont remplacés par les mots : « , que l’avocat ne peut se déplacer sur le lieu où se déroule la garde à vue et que l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle prévue au quatrième alinéa de l’article 63-4-2 n’est pas matériellement possible », les mots « l’entretien prévu au premier alinéa de l’article 63-4 peut avoir lieu avec », sont remplacés par les mots : «les attributions dévolues à l’avocat par les articles 63-4 à 63-4-3 peuvent être exercées par » et les mots : « des deuxième et quatrième alinéas de l’article 63-4 », sont remplacés par les mots : « de l’article 63-4-4. »

« b) le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Sans préjudice de l’application de l’article 434-7-2 du code pénal, le fait pour une personne, qui a été appelée à intervenir dans les conditions prévues à l’alinéa précédent, de faire état auprès de quiconque de l’entretien, des auditions ou du contenu des procès-verbaux consultés dans le but d’entraver le cours de la justice est puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.

« 9° À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article 814, les mots : « des deuxième au quatrième alinéas de l’article 63-4 » sont remplacés par les mots : « de l’article 63-4-4 ». »

Amendement CL202 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Après l’article 14

Insérer l’article suivant :

« L’article L. 3341-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 3341-1. – Une personne trouvée en état d’ivresse dans les lieux publics, est, par mesure de police, conduite à ses frais dans le local de police ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison.

« Lorsqu’il n’est pas nécessaire de procéder à l’audition de la personne mentionnée au premier alinéa immédiatement après qu’elle a recouvré la raison, elle peut, par dérogation au premier alinéa, être placée par un officier ou un agent de police judiciaire sous la responsabilité d’une personne qui se porte garante d’elle. »

Sous-amendement CL203 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Après le premier alinéa, insérer l’alinéa suivant :

« 1° A Son intitulé est complété par les mots : « et retenue douanière ».

Sous-amendement CL204 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Au troisième alinéa du 2°, après le mot : « retenue », insérer le mot : « douanière ».

Sous-amendement CL206 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Rédiger ainsi le sixième alinéa du 2° :

« Art. 323-3. – Dès le début de la retenue douanière, le procureur de la République dans le ressort duquel est constaté le flagrant délit en est informé par tout moyen. »

Sous-amendement CL207 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Au neuvième alinéa du 2°, supprimer le mot : « effectif ».

Sous-amendement CL208 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Rédiger ainsi le douzième alinéa du 2° :

« Lorsque la personne est retenue pour un délit douanier mentionné au dernier alinéa de l’article 414 ou à l’article 415 ou pour un délit connexe à une infraction mentionnée à l’article 706-73 du code de procédure pénale, l’intervention de l’avocat peut être différée dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale. »

Sous-amendement CL209 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Aux seizième et dix-septième alinéas du 2°, substituer aux mots : « De ce » les mots : « Du fait ».

Sous-amendement CL211 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Au début du vingt-troisième alinéa du 2°, substituer aux mots : « Il figure », le mot : « Figurent ».

Sous-amendement CL212 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur, à l’amendement CL1 présenté par le Gouvernement :

Après l’article 14

Au début du vingt-quatrième alinéa du 2°, après les mots : « la retenue », insérer le mot : « douanière ».

Amendement CL213 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 9

I. – À la dernière phrase de l’alinéa 2, supprimer les mots : « à corps ».

II. – Procéder à la même suppression à l’alinéa 3.

Amendement CL214 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Article 7

Substituer à l’alinéa 4 les trois alinéas suivants :

« Art. 63-4-2. – La personne gardée à vue peut demander que l’avocat assiste à ses auditions. Dans ce cas, la première audition ne peut être débutée avant l’expiration d’un délai de deux heures suivant l’avis adressé, dans les conditions prévues à l’article 63-3-1, à l’avocat choisi ou au bâtonnier, de la demande formulée par la personne gardée à vue d’être assistée par un avocat.

« Si l’avocat ne se présente pas à l’expiration du délai prévu au premier alinéa, l’officier de police judiciaire peut décider de débuter l’audition ou la confrontation.

« Si l’avocat se présente après l’expiration du délai prévu au premier alinéa alors qu’une audition ou confrontation est en cours, celle-ci est interrompue, à la demande de la personne gardée à vue, afin de lui permettre de s’entretenir avec son avocat dans les conditions prévues à l’article 63-4. Si la personne gardée à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci peut assister à l’audition ou confrontation en cours dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire. »

Sous-amendement CL215 présenté par M. Jean-Luc Warsmann à l’amendement CL4 présenté par le Gouvernement :

Article 12

Compléter cet amendement par le paragraphe suivant :

« III. – Après l’article 706-88, il est inséré un article 706-88-2 ainsi rédigé :

« Art. 706-88-2. – Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée au 11° de l’article 706-73, le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République à la demande de l’officier de police judiciaire, ou le juge d’instruction lorsque la garde à vue intervient au cours d’une instruction, peut décider que la personne sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste d’avocats habilités.

« Les avocats inscrits sur cette liste sont élus par les membres du Conseil de l’ordre du barreau de Paris. »

Sous-amendement CL216 présenté par le Gouvernement à l’amendement CL158 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Après l’article 7

Supprimer l’avant dernier alinéa de cet amendement.

Sous-amendement CL217 présenté par le Gouvernement à l’amendement CL158 présenté par M. Philippe Gosselin, rapporteur :

Après l’article 7

I. – Remplacer le dernier alinéa de cet amendement par les deux alinéas suivants :

« II. – Après le premier alinéa de l’article 64-1 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du précédent alinéa sont également applicables lorsque l’avocat intervient pour assister une victime lors d’une confrontation avec une personne gardée à vue. »

II. – En conséquence, faire précéder le début de cet amendement par la référence : « I ».

ANNEXE 1 : TABLE RONDE, OUVERTE À LA PRESSE, SUR LES JURISPRUDENCES RELATIVES À LA GARDE À VUE

Lors de sa réunion du mercredi 17 novembre 2010, la commission des Lois a tenu une table ronde, ouverte à la presse, sur les jurisprudences relatives à la garde à vue avec MM. les professeurs Yves Gaudemet, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, président du groupe de travail sur les aspects constitutionnels et conventionnels de la réforme de la procédure pénale, Didier Rebut, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, chercheur-associé à l’Institut de criminologie de Paris et Frédéric Sudre, professeur à l’Université de Montpellier.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Mes chers collègues, l’ordre du jour appelle la table ronde, ouverte à la presse, sur les jurisprudences relatives à la garde à vue. Nous entendrons dans ce cadre MM. Yves Gaudemet, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, qui a présidé le groupe de travail sur les aspects constitutionnels et conventionnels de la réforme de la procédure pénale, Didier Rebut, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, chercheur associé à l’Institut de criminologie de Paris, et Frédéric Sudre, professeur à l’Université de Montpellier. Messieurs les professeurs, je vous souhaite la bienvenue.

Si j’ai souhaité que la Commission des lois commence ses travaux sur la réforme en cours de la garde à vue par cette table ronde, c’est que l’évolution des règles relatives à la garde à vue est rendue nécessaire par la décision du 30 juillet 2010, dans laquelle le Conseil constitutionnel a estimé que les dispositions actuelles concernant les gardes à vue de droit commun « n’assuraient pas une conciliation équilibrée entre la recherche des auteurs d’infractions ou la prévention des atteintes à l’ordre public et l’exercice des libertés constitutionnellement garanties ». Il a toutefois décidé de reporter l’abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles au 1er juillet 2011, afin de permettre au législateur de revenir sur cette inconstitutionnalité.

De plus, depuis le dépôt du projet de loi qui découle directement de cette décision, trois arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation sont intervenus, qui devront être intégrés à notre réflexion avant le passage du texte en Commission des lois, prévu pour le 8 décembre prochain, et l’examen en séance publique, qui pourrait avoir lieu le 15 décembre, si la Conférence des présidents en décide bien ainsi.

Enfin, il importe au législateur français de connaître les implications précises des jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), tant en matière de contrôle des mesures privatives de liberté que sur la question des droits dont bénéficieront les personnes gardées à vue.

Un questionnaire ayant été remis à chacun de nos invités, je vous propose de procéder en quatre étapes. Nous aborderons d’abord les implications des jurisprudences nationales et européennes sur le champ de la garde à vue, à partir de trois questions. Quel est, au regard des jurisprudences, le champ des infractions pouvant justifier un placement en garde à vue dans les affaires de droit commun ? Quels motifs peuvent justifier ce placement en garde à vue ? Le projet d’audition libre est-il compatible avec les différentes jurisprudences ?

M. Yves Gaudemet, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas, président du groupe de travail sur les aspects constitutionnels et conventionnels de la réforme de la procédure pénale. Je vous remercie, monsieur le président, de la confiance que vous nous faites par provision en nous invitant : nous ferons tout pour l’honorer.

Le rapport dont vous avez eu communication est le fruit d’une initiative de Mme Michèle Alliot-Marie, alors garde des sceaux, qui souhaitait être éclairée sur le cadre constitutionnel et conventionnel – il s’agit essentiellement, à ce dernier égard, de la Convention européenne des droits de l’Homme – dans lequel il convient d’inscrire, dans le droit français, la réforme de la procédure pénale.

Il est vite apparu que la mise en œuvre en France du contrôle prioritaire de constitutionnalité aurait pour effet d’harmoniser les exigences découlant de notre Constitution avec celles de la Convention européenne des droits de l’Homme : en effet, dès lors que le Conseil constitutionnel, saisi d’une question touchant à la réforme de la procédure pénale, notamment de la garde à vue, maintiendrait une jurisprudence qui serait en deçà des exigences conventionnelles, la non-conformité de notre Constitution à ces mêmes exigences éclaterait aussitôt aux yeux de tous. De plus, l’actualité nous a servis au travers des deux arrêts « Medvedyev contre France » de la Cour de Strasbourg.

Je tiens, avant d’entrer dans le vif du sujet, à préciser que M. Frédéric Sudre est un des meilleurs connaisseurs de la jurisprudence de la Convention européenne des droits de l’Homme, que M. Didier Rebut est un de nos grands pénalistes et que je suis, pour ma part, un constitutionnaliste. Le champ de la question est donc couvert par les trois branches du droit concernées.

Il n’y a pas, à l’heure actuelle, d’implications directes et nécessaires des jurisprudences du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation ou de la Cour européenne de Strasbourg sur le champ des infractions pouvant justifier le placement en garde à vue.

Le projet de loi prévoit en revanche une organisation nouvelle qui, sans être directement commandée par ces jurisprudences, est inspirée du louable souci de limiter le nombre des gardes à vue. L’audition libre deviendrait ainsi la forme normale d’information en cas de soupçon, la garde à vue ne concernant plus que les personnes soupçonnées d’infractions punies d’une peine d’emprisonnement – ce qui n’est pas le cas actuellement. De même, la prolongation de la garde à vue au-delà de vingt-quatre heures, jusqu’à quarante-huit heures, ne serait possible que si la peine encourue est égale ou supérieure à un an. Sans doute ces dispositions nouvelles sont-elles l’effet indirect du principe de proportionnalité, qui gouverne toute la jurisprudence de la Cour de Strasbourg : pour celle-ci, en effet, toute mesure directement attentatoire à la liberté individuelle et entrant, de ce fait, dans le champ de l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme, ne doit être autorisée par la loi qu’en cas de soupçon portant sur une infraction susceptible, si elle est constatée, d’entraîner une peine d’une certaine importance.

M. Frédéric Sudre, professeur à l’Université de Montpellier. La jurisprudence européenne ne permet pas de délimiter le champ des infractions pouvant justifier un placement en garde à vue. La Cour européenne a une conception très matérielle des choses : le critère à ses yeux essentiel, c’est la privation de liberté, laquelle entre dans le champ d’application de la Convention européenne des droits de l’Homme, notamment de l’article 5, paragraphe 3, et de l’article 6 relatif aux garanties du procès équitable.

Or la garde à vue est bien une privation de liberté ou est, du moins, considérée comme telle : de ce fait, quelles que soient les infractions commises, elle entre bien dans le champ de la Convention.

S’agissant des motifs, le texte du projet de loi me paraît compatible avec la jurisprudence européenne : il ne peut y avoir privation de liberté que s’il existe des raisons plausibles de soupçonner une personne d’avoir commis une infraction – tels sont, du reste, les mots utilisés dans le texte. Le texte respecte donc bien ce qui est, aux yeux de la Cour de Strasbourg, la condition sine qua non de la privation de liberté. Il convient également de noter que c’est le principe de proportionnalité qui fonde la jurisprudence de la Cour : s’il peut exister d’autres moyens que la privation de liberté pour assurer l’ordre public, il convient d’y recourir.

L’audition libre, telle qu’elle est prévue par le texte, n’est pas, en revanche, compatible avec les différentes jurisprudences, dans la mesure où ce dispositif permettrait d’échapper à l’application des garanties posées à l’article 6 de la Convention européenne. En effet, pour la jurisprudence européenne, toute mise en accusation en matière pénale entraîne l’application des garanties du procès équitable. De plus, la Cour a une conception toute matérielle de la notion d’accusation, très différente de celle de notre droit interne. Pour elle, toute personne soupçonnée d’une infraction, à partir du moment où ce soupçon peut avoir des répercussions importantes sur sa situation, doit être considérée comme accusée. Or, le texte le précise, une personne sera placée sous le régime de l’audition libre parce qu’elle sera soupçonnée d’avoir commis une infraction : la jurisprudence européenne la considérera donc comme accusée et cette personne devra relever, de ce fait, du champ des garanties prévues à l’article 6 de la Convention. Si la philosophie du projet de loi vise, par le biais de l’audition libre, à empêcher l’application des garanties dont doivent bénéficier les personnes placées en garde à vue, alors la disposition est assez radicalement contraire au droit européen.

M. Didier Rebut, professeur à l’Université Paris II Panthéon-Assas. Je tiens à préciser d’emblée que ni la Cour de cassation ni le Conseil constitutionnel n’ont joué un rôle moteur dans l’évolution de la jurisprudence relative à la garde à vue. Ces deux juridictions n’ont agi que sous la pression de la Cour européenne des droits de l’Homme. C’est vrai du Conseil constitutionnel, dont la décision ne peut être comprise qu’à la lumière de la jurisprudence européenne. C’est également vrai de la Cour de cassation qui, en matière de défense des droits de la personne gardée à vue, s’est contentée d’enregistrer les décisions de la Cour européenne et du Conseil constitutionnel, ce qui, évidemment, est très décevant de sa part. Elle n’a avancé sur la question que parce qu’elle n’avait plus le choix. Une telle attitude n’est pas défendable et justifie ma sévérité à l’encontre de cette juridiction dont les décisions ne font que reprendre celles de la Cour européenne.

J’ajoute que les jurisprudences nationales n’ont jamais abouti à délimiter le champ des infractions pouvant justifier le placement en garde à vue, tout type d’infraction pouvant donner lieu à un tel placement. C’est donc au législateur qu’il appartient de fixer un éventuel seuil. S’agissant de l’audition libre, il n’existe également aucune exigence en droit interne. Du reste, le droit européen ne prendra pas en considération les jurisprudences éventuelles de Cour de cassation ou du Conseil constitutionnel en la matière : il jugera en fonction de ses propres critères. C’est lui seul qu’il convient donc d’interroger sur le sujet.

M. Yves Gaudemet. Il est vrai que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme nous « dépayse » à tous égards dans la mesure où sa démarche est casuelle : elle vérifie, pour chaque dossier, le respect de la proportionnalité ou de l’équilibre entre les atteintes à la liberté individuelle et les contraintes de la procédure pénale. Comme il est difficile de transposer en principes ses décisions, on ne saurait affirmer que, formellement, elle consacre ou interdit telle ou telle disposition, ce qui rend évidemment très difficile le travail du législateur.

Je tiens à souligner que l’audition libre a été introduite dans le projet de loi dans l’intention très louable de limiter le champ d’application de la garde à vue. Chacun s’accorde en effet à considérer que le nombre annuel des gardes à vue en France – près de 800 000 – est excessif, certaines d’entre elles étant du reste abusives, c’est-à-dire non justifiées par la politique pénale que conduisent légitimement les autorités publiques.

L’audition libre a donc été conçue comme une alternative douce à la garde à vue et cela n’apparaît pas illégitime dès lors que le principe de proportionnalité commande de réserver cette dernière aux personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions relativement graves puisque punies de peines d’emprisonnement. Cependant, est-ce bien d’alternative qu’il s’agit ?

Il convient en effet de noter que, de par son appellation même, « l’audition libre » est placée sous le signe de la liberté, ce qui en fait toute l’ambiguïté : puisque le présumé innocent demeure libre de ne pas se présenter à sa convocation devant les enquêteurs, son régime rejoint celui des témoins. Les textes lèveront-ils cette ambiguïté ou faudra-t-il pour cela s’en remettre à la pratique ? Je l’ignore.

Il n’en reste pas moins que si la vision qu’a M. Sudre de l’audition libre est exacte sur le plan juridique – elle est en effet fondée sur la Convention européenne des droits de l’Homme –, elle doit être combinée au souci légitime de limiter le champ de la garde à vue, lequel est dicté par le principe de proportionnalité. Il convient en effet de recourir à un autre dispositif que la garde à vue à l’encontre de personnes soupçonnées de faits mineurs.

M. le président. Monsieur le professeur Sudre, vous avez effectivement déclaré que l’audition libre, telle qu’elle est actuellement prévue dans le projet de loi, est contraire à la jurisprudence européenne : votre jugement porte-t-il sur le principe même de l’audition libre ou sur l’insuffisance des garanties protégeant la personne interrogée dans le cadre de l’audition libre ?

M. Frédéric Sudre. Mes propos ne visaient en aucun cas le principe de l’audition libre. Je tiens à rappeler deux choses : la Cour européenne a une démarche casuistique. De plus, elle ne s’arrête pas aux qualifications du droit interne mais à ce qu’elles recouvrent. Il en sera ainsi de la « garde à vue » et de l’« audition libre ». Elle vérifiera si le dispositif concerne le champ pénal et entraîne donc l’application des garanties afférentes à ce champ. L’arrêt Brusco du 14 octobre 2010 a, certes, condamné la France pour un régime antérieur de garde à vue, dans lequel la personne devait prêter serment. Toutefois, cet arrêt est intéressant dans la mesure où celle-ci avait été entendue comme témoin. Or, pour la Cour européenne, cette personne aurait dû être considérée comme accusée, au sens de la Convention européenne, dès lors qu’il existait des raisons plausibles de la soupçonner, et elle aurait dû bénéficier des garanties afférentes au procès équitable, alors que, pour le Gouvernement français, on ne se trouvait pas dans le champ de l’accusation. Aucune qualification de droit interne n’interdira donc à la Cour européenne des droits de l’Homme de recourir à une qualification différente.

Ce n’est donc pas le principe d’un éventuel aménagement de la garde à vue qui est critiquable, mais le fait que la personne placée sous le régime de l’audition libre ne bénéficiera pas de la totalité des garanties qui doivent être accordées à toute personne considérée par la Cour européenne comme étant soumise à une accusation.

M. Philippe Gosselin. L’audition libre n’a pas pour objet de contourner la jurisprudence européenne. Cela reviendrait, du reste, à adopter une mesure susceptible d’être aussitôt attaquée devant la Cour européenne des droits de l’Homme. Elle procède d’une volonté de faire de la garde à vue l’exception. La porte est étroite. Il est vrai que si l’audition libre est destinée à se dérouler, dans les faits, sinon en droit, dans les mêmes conditions que la garde à vue, sa création ne présente aucun intérêt. Selon vous, de quelle marge de manœuvre le législateur dispose-t-il ?

M. Yves Gaudemet. La personne est convoquée mais elle est libre de se rendre ou non à son audition : telle est, je le répète, l’ambiguïté du dispositif. Ce qui fait la différence, toutefois, avec celui qui régit les témoins, c’est que, dans le cadre de l’audition libre, comme le précise le texte lui-même, la personne, tout en étant présumée innocente, est « soupçonnée », ce que la Cour européenne des droits de l’Homme traduit par « accusée ». Cette personne devra dès lors bénéficier des garanties ou, du moins, dans un premier temps, de certaines des garanties requises par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Il serait d’autant plus dommage que le mieux tuât le bien que l’intention des auteurs du texte est d’instaurer un dispositif moins agressif qui sera le seul moyen de limiter, à terme, le champ de la garde à vue. La Cour européenne devra se montrer sensible au principe de proportionnalité inscrit dans le dispositif. Du reste, elle n’est indifférente ni aux systèmes nationaux ni aux difficultés rencontrées par le législateur national, comme le montrent les deux arrêts Medvedyev.

Convient-il de tuer la garde à vue au nom des principes rappelés par M. Frédéric Sudre ? Je ne le cache pas : il sera difficile de concilier les garanties prévues par la Convention européenne et la spécificité de l’audition libre, qui repose sur le principe de liberté.

M. Frédéric Sudre. On peut avoir du mal à comprendre pourquoi des personnes sur lesquelles pèsent également des soupçons plausibles relèveraient de deux régimes différents. Par ailleurs, la modulation des garanties est une question d’autant plus délicate qu’elle n’a jamais été prise en considération par la Cour européenne. Aux yeux de celle-ci existent des garanties fondamentales, notamment la notification du droit de se taire et le droit à l’assistance effective d’un avocat dès l’arrestation, c’est-à-dire au premier moment de privation de la liberté, lequel précède la garde à vue proprement dite. Il convient de souligner que, même dans le cas de l’audition libre, la personne sera soumise à une contrainte. Il est donc difficile de prédire où la Cour de Strasbourg fera passer la frontière entre l’audition libre et la garde à vue. Je le répète : sa démarche est casuistique. C’est pourquoi, compte tenu de sa conception matérielle de l’accusation, je ne suis pas certain qu’elle soit sensible à la distinction subtile que le droit français opérera entre les personnes relevant de l’audition libre et celles relevant de la garde à vue. Ces personnes étant toutes soupçonnées, il s’agira à ses yeux d’une distinction purement formelle.

M. Philippe Gosselin. Même avec l’introduction du principe de proportionnalité ?

M. Frédéric Sudre. Ce principe entraîne une réflexion sur la modulation des garanties. Toutefois, la Cour européenne lie intimement le droit de garder le silence, qui est à ses yeux fondamental, au droit à la présence d’un avocat dès la première heure de privation de liberté, parce que c’est précisément l’avocat qui informe la personne de son droit à garder le silence. Il me paraît donc difficile de dissocier les deux garanties.

M. Jean-Paul Garraud. Ne pourrait-on pas soutenir que, sur le plan juridique, l’audition libre existe déjà ? C’est le régime des témoins. L’instauration d’un dispositif intermédiaire appelé « audition libre » ne me paraît donc pas pertinente. Du reste, une même personne peut passer du régime des témoins à celui de la garde à vue si des soupçons finissent par peser sur elle. Par ailleurs, l’audition libre risque de constituer un piège à nullité des actes de la procédure car elle ne fera que la compliquer davantage encore alors qu’il conviendrait au contraire de la simplifier.

Je suis frappé par la juridictionnalisation de la garde à vue, qui tend à reproduire ce qui s’est passé avec le juge d’instruction à la fin du XIXe siècle
– présence de l’avocat, accès au dossier –, comme si les garanties d’un procès équitable devaient être appliquées dès la garde à vue. Or celle-ci, qui relève de la phase policière, diffère fondamentalement de la phase juridictionnelle. Il n’y a donc aucune raison d’anticiper dès la garde à vue le recours à la procédure prévue devant le juge d’instruction. Les garanties d’un procès équitable concernent-elles la garde à vue ? Celle-ci sert au lancement de l’enquête, qui peut être très complète. Des témoins sont également entendus. Il ne faut pas faire de confusion juridique entre les phases policière et juridictionnelle, même si le régime de la garde à vue doit garantir les droits des personnes suspectées comme des victimes.

Mme George Pau-Langevin. Les victimes ne sont pas placées en garde à vue.

M. Philippe Gosselin. Que faites-vous des confrontations ?

M. Jean-Paul Garraud. Pourquoi anticiper sur la phase juridictionnelle ? Il ne convient pas d’appliquer à la garde à vue les garanties d’un procès équitable.

M. Bernard Roman. Prévoir un statut intermédiaire, permettant de se dispenser de certaines garanties, se heurte à une difficulté majeure.

Il ne convient pas, sous peine de favoriser certaines dérives, de distinguer une phase relevant de la police d’une phase relevant de la justice. En effet, la police agit en permanence sous le contrôle, voire sur l’injonction du juge. Personne n’est placé en garde à vue sans que le parquet, qui peut immédiatement s’y opposer, en soit informé. La garde à vue relève donc de la procédure judiciaire.

Je crains que le nouveau dispositif ne soit, dès sa mise en œuvre, contesté par les instances mêmes qui nous ont conduits à réformer la garde à vue. Ce serait le contraire de ce que nos concitoyens attendent de législateurs responsables !

Peut-être nous manque-t-il, pour bien appréhender la question du champ de la garde à vue, une typologie précise des 800 000 gardes à vue annuelles. Monsieur le président, la Chancellerie ne pourrait-elle nous fournir toutes les informations nécessaires à ce sujet ? Combien de gardes à vue pourraient-elles être évitées si on se contentait de placer sous ce régime les personnes soupçonnées de délits pouvant entraîner une peine de prison ? Je me rappelle un ami placé toute une nuit par la police de Lille en garde à vue pour un taux d’alcoolémie de 0,6 gramme alors que, s’il avait été contrôlé en zone rurale, la gendarmerie l’aurait raccompagné chez lui ! Une typologie des gardes à vue permettrait certainement d’alléger le travail des policiers et des magistrats tout en respectant la logique de proportionnalité entre la privation de liberté et la nature des délits soupçonnés.

M. Alain Vidalies. Par-delà son caractère quelque peu saugrenu, l’idée ayant présidé au dispositif de l’audition libre s’explique peut-être par la volonté de recourir à une double échappatoire.

La première consisterait, à la suite de M. Garraud, à inventer un nouveau concept reposant sur la distinction entre phase « policière » et phase « juridictionnelle ». Il conviendrait alors de préciser le plus tôt possible si les principes ayant entraîné les décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation s’appliqueraient aux deux phases.

La seconde échappatoire est plus subtile : elle repose sur la proportionnalité. Les garanties de l’article 6 peuvent-elles être modulées selon l’adage : « À petit délit, petites garanties » ? Existe-t-il la moindre jurisprudence susceptible de nous encourager à suivre la piste suggérée par notre rapporteur, M. Gosselin ? Le principe de proportionnalité pourrait-il ouvrir la voie à un compromis en la matière ? Ce sont des questions de principe sur lesquelles la commission des Lois doit se pencher à la lumière des décisions de la Cour européenne.

M. André Vallini. À la fin du XIXe siècle, c’est vrai, l’autorisation donnée aux avocats d’assister leur client dans le bureau du juge d’instruction a été précédée d’un vif débat. M. Garraud se demande s’il est opportun d’abonder dans le sens d’une juridictionnalisation de la garde à vue. J’y suis personnellement favorable car elle permet d’augmenter les droits et les garanties de tous les citoyens. De plus, depuis quelques années, l’influence de la garde à vue sur la suite du procès pénal ne cesse de croître. Il est ainsi très difficile de revenir sur les aveux obtenus durant ce temps, alors même qu’ils ont été obtenus sous la pression ou dans des conditions contestables. Dois-je rappeler l’affaire d’Outreau ? Dans quantité d’affaires, lorsque la police commence à faire fausse route durant cette phase, même des magistrats compétents ne sont pas toujours capables d’orienter le dossier dans une nouvelle direction. Il est donc capital de favoriser la juridictionnalisation de la garde à vue.

Enfin, ne tourne-t-on pas autour du pot depuis des mois sur la question de la présence de l’avocat dès le commencement de la garde à vue ? Tous les pays européens, y compris l’Espagne qui est confrontée au terrorisme de l’ETA, prévoient cette présence, et la France, patrie des droits de l’Homme, continue de s’interroger sur le sujet !

M. Dominique Perben. La décision du Conseil constitutionnel, si vous me permettez l’expression, ne « mange pas de pain » puisqu’elle ne concerne pas les dispositions relatives au terrorisme et à la criminalité organisée, notamment celles que j’ai fait adopter dans le cadre de la loi dite « Perben II ». La Cour de cassation a, quant à elle, fini le travail en se fondant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Ne nous trompons pas de débat ! Le vrai sujet n’est pas la présence de l’avocat dès la première heure de garde à vue : elle est acquise.

Mme George Pau-Langevin. Presque !

M. Dominique Perben. Il convient maintenant de l’inscrire dans la loi.

En revanche, la question porte sur les dispositions pratiques que le législateur, dans le respect de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, a le devoir d’adopter pour protéger la population, notamment des réseaux mafieux ou terroristes.

M. Jean-Christophe Lagarde. La voie est étroite, en raison notamment de la difficulté posée, en France comme dans d’autres pays, par des organisations criminelles qui disposent d’importants moyens, notamment des meilleurs avocats, pour rendre les enquêtes plus malaisées.

Pour préciser la suggestion de M. Roman, je propose que deux de nos collègues soient missionnés auprès du ministère de l’intérieur afin d’étudier la typologie des gardes à vue prononcées. Les ministres de l’intérieur successifs ainsi que les syndicats de policiers nous ont, bien sûr, expliqué qu’elles étaient toutes indispensables. Mais nous voyons bien que ce n’est pas le cas – on pourrait multiplier à l’envi les exemples. Ainsi, le dégrisement d’une personne ayant conduit sous l’empire d’un fort degré d’alcoolémie exige-t-il vraiment son placement en garde à vue ? On pourrait attendre que l’intéressé recouvre ses esprits. Une mission parlementaire serait donc utile pour clarifier les choses.

Un autre élément me paraît inquiétant du point de vue du respect des libertés publiques. Le recours aux enquêtes préliminaires tend à devenir systématique et celles-ci à aller de plus en plus loin. Auparavant, un magistrat demandait une telle enquête au procureur afin de savoir s’il existait des raisons objectives de considérer qu’une infraction avait été commise. Maintenant, dans un nombre croissant de cas, l’enquête de police se poursuit quasiment jusqu’à ce que l’affaire soit en état d’être jugée, et c’est seulement alors que les droits de la personne mise en cause sont ouverts. Je comprends parfaitement qu’en face d’un crime, une enquête soit nécessaire avant d’expliciter des soupçons. Pour autant, une personne placée en garde à vue doit savoir ce qu’on lui reproche, avoir au moins connaissance des déclarations proférées à son encontre. Car beaucoup de choses découlent de ce qui est dit en garde à vue. Cela entre dans notre thème de discussion relatif au nouveau rôle dévolu à l’avocat et à la possibilité pour lui d’accéder au dossier ou aux pièces de la procédure. Doit-il avoir accès à tout ? Nous devons travailler à cette question. Aujourd’hui une personne peut répondre à une simple convocation de police et se retrouver en garde à vue quelques instants plus tard sans aucun moyen de savoir ce qu’on lui reproche. Un traquenard judiciaire est ainsi facile à monter.

Le vrai sujet réside dans la méthode policière et dans ce qu’enseignent les écoles de police. Notre pays est l’un des rares, depuis des siècles, à pratiquer la culture de l’aveu plutôt que celle de la preuve, les indices servant surtout à obtenir le premier et non à établir la seconde : un dossier comportant un aveu est considéré comme définitivement bouclé. Le Parlement devrait donc exercer un contrôle sur la formation des policiers, notamment des officiers de police judiciaire, afin que l’orientation de leurs enquêtes vise moins à réunir des indices susceptibles de faire « craquer » un suspect qu’à faire concorder ces indices afin d’établir des preuves irréfutables.

Certes la jurisprudence de la Cour européenne s’impose à nous mais il faut parvenir à dissocier le crime organisé et le terrorisme des autres incriminations, peut-être à partir du quantum des peines encourues.

M. Jacques Valax. Coexistent deux principes et deux écoles pour les défendre. Le premier, auquel je suis très attaché, est celui de la liberté : il exige la présence immédiate de l’avocat. Le second réside dans la nécessité de prouver les éléments de l’infraction. Or on perçoit à cet égard une angoisse sous-jacente, provenant de la crainte que la présence de l’avocat ne rende plus difficile l’établissement de la preuve de la culpabilité. Autrement dit, plus la personne soupçonnée bénéficierait de droits et de protections, moins la vérité serait susceptible d’apparaître. Si l’on pousse ce raisonnement jusqu’au bout, cela conduit à considérer que la garde à vue empêche d’établir la vérité : c’est donc un raisonnement pernicieux.

La culture de l’aveu appartient à un temps révolu. Seule celle de la recherche des preuves matérielles doit prospérer, ce que rendent possible les progrès techniques dont bénéficie aujourd’hui la police judiciaire. Il ne faut donc pas rester arc-bouté sur de vieux schémas. Je maintiens donc que la présence de l’avocat s’impose dès la première heure.

M. Julien Dray. Je soutiens la demande d’une typologie des gardes à vue. On se rendra alors vite compte de la dérive de cette procédure, devenue une facilité d’enquête afin d’extorquer des aveux le plus rapidement possible. Elle s’explique par le manque de moyens de la police judiciaire mais traduit aussi une certaine paresse dans la conduite des enquêtes : on considère que l’obtention d’aveux ne peut qu’accélérer l’instruction.

La présence de l’avocat dès la première heure n’est d’aucune utilité si celui-ci n’a pas accès au dossier. Il ne sert que de soutien psychologique et de réconfort moral jusqu’à la vingtième heure. Le système est même pervers car, le plus souvent, dans une affaire sérieuse, l’avocat conseille d’abord à son client d’en dire le moins possible afin de ne pas compliquer son travail ultérieur de défenseur. Le premier réflexe protecteur consiste à exercer le droit au silence, ce qui, parfois, peut contribuer à bloquer le déroulement d’une enquête. En effet, le dialogue peut contribuer à éviter, par la suite, des procédures trop longues.

Demeure la question lancinante des conditions matérielles de la garde à vue. Celles-ci constituent aujourd’hui un moyen de pression. Car, contrairement à tout ce que l’on a dit depuis dix ans, elles ne se sont pas améliorées. La nourriture est désastreuse. La venue du médecin intervient selon des modalités très discutables : on fait souvent appel à SOS médecins, qui effectue alors un ensemble de visites aux termes d’un contrat financier qui lie cet organisme à l’administration. Les praticiens ont tendance à passer sur un certain nombre de situations ou à se montrer extrêmement prudents. Il faut donc procéder à une analyse approfondie des conditions de déroulement des gardes à vue. On s’apercevra alors de la dénaturation de la procédure judiciaire, si même l’on ne peut pas parler d’une paralysie, du fait de la multiplication des actes de procédure visant à « détricoter » ce qui s’est passé durant la garde à vue.

M. Emile Blessig. Je m’associe à la demande d’inventaire et de typologie des gardes à vue, en fonction notamment de la nature des infractions concernées. Mais il faut étudier également les conséquences et, surtout, les modalités d’organisation de la présence effective de l’avocat dès la première heure. Dans les zones rurales, ou même dans certaines villes, on risque en effet de se heurter à des difficultés dans l’application de cette mesure. Or il est impératif d’assurer une égalité d’accès aux droits de la défense et au ministère d’un avocat sur l’ensemble du territoire. Nous devons en tenir compte au moment de légiférer : ne prenons pas le risque de faire une bonne loi dont la mise en oeuvre concrète ne pourrait être que critiquable !

M. Noël Mamère. Notre groupe parlementaire de la Gauche démocrate et républicaine avait déposé, en février 2010, une proposition de loi portant réforme de la garde à vue, qui n’a pas été retenue. Nous proposions notamment de rendre obligatoire la présence de l’avocat dès la première heure. Il s’agit évidemment d’une mesure nécessaire mais à quoi servirait-elle si elle se limitait à un entretien de trente minutes et si l’avocat n’avait pas accès au dossier pénal ? Par ailleurs, nous exigions la notification du droit au silence.

Je m’associe moi aussi à la demande d’un inventaire de la garde à vue, devenue une facilité inévitable pour compenser la réduction des effectifs de la police et, surtout, l’instrument d’une primauté de la police sur la justice. Nous suggérions donc, dans notre proposition, un certain nombre de pistes : il s’agissait en particulier de faire dépendre la garde en vue de la qualification de l’infraction et de la subordonner à une autorisation préalable de l’autorité judiciaire.

On ne peut donc que se réjouir du débat d’aujourd’hui mais il me semble qu’on tourne un peu autour du pot. Il est clair que notre droit n’est pas conforme à la Convention européenne des droits de l’Homme. Il n’y a donc pas matière à se torturer les méninges pour découvrir comment tordre le cou à celle-ci ou comment échapper à ses prescriptions. Avancer l’idée de l’audition libre revient à prendre les parlementaires, les juristes et les magistrats pour des imbéciles. Dans cette Commission qui contribue à l’élaboration de l’État de droit, essayons plutôt d’élaborer un texte conforme à la Convention européenne, ainsi qu’aux principes édictés par les pères fondateurs de nos libertés. Cela implique notamment de garantir le droit au silence et de renoncer à des pratiques qui ont conduit à faire passer le nombre de gardes à vue de 250 000 à 600 000, évolution effrayante dans un État de droit comme le nôtre. Le justiciable doit bénéficier de toutes les garanties inscrites dans la Convention européenne.

M. Philippe Houillon. Je ne suis pas certain de l’utilité d’un régime dérogatoire. Ne court-on pas le risque que, fût-il validé par le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation maintienne sa jurisprudence ou bien que la Cour européenne invalide ce dispositif ? Si nous devons néanmoins travailler à un tel régime, où pourrait-on placer le curseur de la dérogation ? Quelles modalités prévoir ? L’idée de soumettre l’autorisation de dérogation à un juge du siège serait-elle acceptable, réserve faite des difficultés d’application ?

Mme Delphine Batho. La typologie des gardes à vue dont nous aurions besoin devrait aussi retracer l’évolution du recours à cette procédure au fil du temps. Le nombre de gardes à vue s’est accru de 71% depuis 2002 parce qu’on a voulu faire augmenter artificiellement le taux d’élucidation des crimes et des délits. En effet, l’appareil statistique de la police nationale comptabilise les faits comme élucidés dès lors qu’une garde à vue est prononcée. Tel est l’effet pervers de la politique du chiffre, le ministre de l’Intérieur brandissant comme un trophée cette augmentation du nombre de gardes à vue.

La présence de l’avocat se révèle indispensable. Dès lors, se pose la question de savoir comment l’organiser matériellement et, plus largement, comment faire que la garde à vue se déroule dans des conditions enfin décentes. D’autres pays ont aménagé des bâtiments spéciaux comprenant, par exemple, un bureau pour les avocats, un service médical et des locaux d’interrogatoire modernes. Or, ce qu’il serait possible de faire en ville sur ce modèle pourrait ne pas l’être en milieu rural.

Il faut sortir de la culture de l’aveu. On invoque, pour justifier un régime dérogatoire, les affaires de terrorisme et de criminalité organisée. Cependant, il me semble que c’est plutôt lorsqu’ils sont confrontés à des faits de violences sexuelles ou familiales que les enquêteurs rencontrent les plus graves difficultés. Dans ce domaine spécifique, on ne dispose, le plus souvent, d’aucun élément de preuve matérielle. Or la pression psychologique exercée au cours de gardes à vue permet plus facilement d’établir la vérité en obtenant des aveux…

L’avocat étant présent, dans quelle mesure et à partir de quel moment peut-on considérer qu’il devient le garant du respect des droits de la personne incriminée ? Si ce point était acquis, on pourrait alors alléger les procédures écrites, actuellement très lourdes, en particulier s’agissant de prendre acte de la notification des droits de la personne entendue. Ne pourrait-on, par exemple, se contenter d’un procès-verbal de synthèse, à la fin des auditions ?

M. Philippe Gosselin. Voilà que nous relançons le débat général sur la garde à vue ! J’avais cru comprendre que l’objet de cette table ronde était plutôt de cerner des questions très précises.

Le projet que nous allons examiner est clair, le problème de la présence de l’avocat durant la garde à vue ne se pose plus.

Je voudrais cependant répondre à M. Dray et à Mme Batho sur la politique du chiffre, en rappelant que c’est la Cour de cassation elle-même qui, dans des arrêts de décembre 2000 et de juin 2003, a étendu sa jurisprudence en demandant le placement en garde à vue dans un certain nombre de cas, parce que le régime de celle-ci lui paraissait spécialement protecteur. Les 71% d’augmentation mentionnés ne résultent donc pas seulement de directives gouvernementales !

M. le président Jean-Luc Warsmann. Nous avons, il est vrai, commencé ce débat par une discussion générale, mais elle était nécessaire. Je propose donc que nos invités répondent maintenant aux questions posées sur le champ de la garde à vue.

M. Didier Rebut. Aujourd’hui, nous n’avons pas le choix. Le champ d’application de la garde à vue dépend de l’accusation, c’est-à-dire des raisons plausibles de soupçonner la commission d’une infraction. Mais on ne peut étendre le statut du témoin à quelqu’un qui ferait l’objet d’une suspicion. La Cour de cassation l’a clairement indiqué : dès lors qu’existe une suspicion, on doit basculer dans le régime de la garde à vue et le respect ou non de ce point engage la validité de la procédure ultérieure. Tel est l’état actuel du droit. Si donc on veut réduire le champ de la garde à vue, il faut trouver d’autres biais. Une des pistes possibles réside dans la formule de l’audition libre. Le droit interne est silencieux à cet égard mais, comme je l’ai dit, on peut glaner des éléments dans la jurisprudence européenne. En effet, si, en leur état actuel, les jurisprudences de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel n’excluent pas une telle formule, ces deux hautes juridictions abordent ce type de question en considérant d’abord ce qu’a dit la Cour européenne, ne serait-ce que parce qu’elles n’aiment pas être censurées par celle-ci – même si la Cour de cassation en a un peu plus l’habitude que le Conseil ! Cela signifierait en effet, soit qu’elles défendent mal les droits de l’Homme, soit que la Constitution française n’est pas assez respectueuse de ces droits. L’appréhension du régime de l’audition libre par nos juridictions nationales dépend donc des informations provenant du droit européen. Or, selon le professeur Sudre, à qui je m’en remets à ce sujet, le régime actuellement proposé serait contraire à la Convention européenne.

Celle-ci admet toutefois que l’on puisse renoncer à certains droits lorsqu’on en est informé. Mais est-ce valable pour tous les droits, et dans quelle mesure ? Je laisse à mon collègue le soin de se prononcer sur ces points.

M. Frédéric Sudre. Dès lors qu’existent des raisons plausibles de soupçonner une personne, on entre en effet dans le champ d’application de l’accusation en matière pénale, et des stipulations de la Convention européenne.

Le débat sur la juridictionnalisation est clos. Au regard de la Cour européenne, les garanties du procès équitable, notamment les droits de la défense, doivent être respectées dès la phase de l’instruction préliminaire et de l’interrogatoire de police. La jurisprudence de la Cour est constante en la matière.

M. Yves Gaudemet. Le projet de loi fait notablement évoluer le champ de la garde à vue : celle-ci ne pourra être prononcée que si la personne est passible d’une peine d’emprisonnement, et ne pourra être renouvelée que si cette peine de prison est égale ou supérieure à un an. Cela conduit à limiter le champ de la garde à vue et à réduire le nombre de ces mesures, comme tout le monde le souhaite. Seront ainsi éliminées les gardes à vue « disciplinaires », à des fins d’intimidation, utilisées parfois contre des gens qu’on ne soupçonne de rien – nous avons connu des exemples récents, dans lesquels il ne s’agissait que de punir des individus.

La connaissance de la typologie des gardes à vue nous aiderait grandement à apprécier dans quelle mesure le champ de cette mesure se trouverait ainsi restreint. Peut-être alors n’aurions-nous plus besoin de l’audition libre pour laquelle, visiblement, on n’est pas parvenu à un dispositif juridiquement équilibré. On reste en effet pris dans une contradiction : à partir du moment où une personne est soupçonnée, s’appliquent à elle les garanties protectrices des droits de l’Homme et, cependant, on ne veut pas qu’il s’agisse d’une garde à vue « au petit pied ».

M. Didier Rebut. La chancellerie détient déjà des statistiques, dont certaines très précises – ainsi pour les gardes à vue consécutives à des infractions routières.

À côté de la question des garanties, se pose celle de la nécessité de la garde à vue, qui n’est pas toujours respectée. Pour qu’elle le soit davantage, s’offrent deux possibilités.

On pourrait, en premier lieu, invoquer le principe général de nécessité. Cependant, la chambre criminelle de la Cour de cassation refuse aujourd’hui d’en contrôler le caractère substantiel. À la question de savoir si le juge pourrait remettre en cause une garde à vue au motif qu’elle n’était pas nécessaire, elle a répondu qu’il n’appartenait pas au juge judiciaire d’apprécier ce point. On pourrait naturellement, par voie législative, contraindre la Cour à exercer ce contrôle, auquel elle se refuse pour des raisons tenant probablement à ce que la justice, redevable à la police du travail qu’elle effectue, ne souhaite pas froisser cette dernière…

On pourrait aussi essayer de contraindre la Cour en fixant des critères formels, par exemple en posant que seules certaines infractions peuvent donner lieu à une garde à vue et le juge serait alors obligé de constater, le cas échéant, que la nature de l’infraction n’autorisait pas un placement en garde à vue. Il en irait de même pour le renouvellement. La Cour de cassation se trouverait ainsi contrainte à exercer un contrôle de légalité formelle comportant des éléments de nécessité.

M. le président. Nous en venons au deuxième thème de la table ronde : le placement en garde à vue et le contrôle de la mesure. Je rappelle les deux questions que nous avions formulées par écrit : faut-il faire évoluer le système actuel de placement en garde à vue par un officier de police judiciaire ? Faut-il confier le contrôle de la garde à vue à un magistrat du siège ?

M. Yves Gaudemet. La jurisprudence de la Cour européenne doit constituer la référence pour le législateur français : c’est elle qui fixe les standards. Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation ont ainsi dû accomplir un exercice de rattrapage, le premier ayant utilisé la possibilité de tenir compte d’un changement de circonstances pour revenir sur une loi, relative au régime douanier, qu’il avait déclarée conforme à la Constitution. Il revient au législateur national de s’aligner sur cette position.

Faut-il faire évoluer la jurisprudence concernant le régime actuel de placement en garde à vue par un officier de police judiciaire ? Et faut-il confier le contrôle de cette garde à un magistrat du siège ? S’agissant d’une mesure privative de liberté, la jurisprudence européenne impose aujourd’hui un tel contrôle, ce qui ne signifie pas que le parquet est dessaisi de la conduite de la garde à vue. Mais un magistrat du siège, disposant seul de la qualité de magistrat au sens de cette jurisprudence, doit intervenir, non pour en surveiller les modalités, notamment la conduite des interrogatoires, mais pour vérifier que l’atteinte ainsi portée à la liberté de l’individu est bien proportionnée à ce que requièrent l’ordre public et la politique pénale. Il remplit donc une mission particulière qui se surajoute à celle du parquet chargé de contrôler les opérations de garde à vue.

La qualité d’officier de police judiciaire permet de placer une personne en garde à vue. Cependant, si les OPJ étaient peu nombreux il y a cinquante ans, cette qualité, aujourd’hui extrêmement répandue, s’est diluée. Nous nous étions donc demandé si, pour certaines infractions, la décision de placer en garde à vue ne devait pas être réservée à une certaine catégorie d’officiers de police judiciaire pourvus d’une habilitation spécifique. Mais la réflexion n’a guère avancé sur ce point.

M. Frédéric Sudre. Il faut bien distinguer la décision de placement en garde à vue et le contrôle juridictionnel de celle-ci. Que la décision soit prise par un officier de police judiciaire n’est pas anormal, sous la réserve que vient d’indiquer le professeur Gaudemet et sous celle, peut-être, de préciser la qualité d’officier de police judiciaire. Mais la jurisprudence européenne exige que, dès l’instant où il y a privation de liberté, un contrôle juridictionnel s’exerce. Celui-ci doit remplir certaines conditions : la promptitude, l’automaticité – la personne ne doit pas avoir à solliciter elle-même un contrôle –, et surtout un contrôle exercé par un magistrat ou par une autorité judiciaire au sens de la Convention européenne des droits de l’Homme. Or, toute la jurisprudence de la Cour européenne démontre qu’en France, le procureur de la République n’a pas cette qualité : il n’est pas un magistrat. La Cour a déjà condamné plusieurs États sur ce fondement, en particulier l’Italie et la Roumanie. Dans son arrêt Medvedyev contre France, sans statuer directement sur la question, elle a néanmoins clairement rappelé ses exigences. D’une part, le magistrat, au sens de la Convention européenne, doit être indépendant de l’exécutif, ce qui n’est pas le cas du procureur de la République, placé dans une situation de subordination hiérarchique. D’autre part, ce magistrat doit pouvoir se prévaloir d’une impartialité fonctionnelle, c’est-à-dire ne pas être susceptible d’exercer ensuite des poursuites contre la personne qu’il aura lui-même placée en garde à vue, ce qui n’est pas non plus le cas du procureur de la République. Le contrôle de la garde à vue et de sa prolongation ne peut donc appartenir, aux termes de la Convention européenne, qu’à un magistrat du siège.

M. André Vallini. Il faut distinguer l’indépendance statutaire du procureur, dont je voudrais qu’il bénéficie un jour, et son indépendance fonctionnelle, que je ne souhaite pas lui voir accorder.

M. Frédéric Sudre. Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l’Homme a glissé de la notion d’indépendance organique à celle d’impartialité fonctionnelle. Elle considère qu’un magistrat engageant des poursuites ne peut, ensuite, contrôler le bien-fondé de la procédure correspondante. Ce qui pose aussi, en France, le problème du juge d’instruction.

M. Didier Rebut. Sur ce thème, nous n’avons pas d’indications particulières en provenance de la Cour de cassation. Le placement en garde en vue peut être décidé par un officier de police judiciaire ou par un « parquetier », mais son contrôle ne peut relever que d’un magistrat au sens de l’article 6 de la Convention européenne.

M. Frédéric Sudre. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est en retrait sur celle de la Cour européenne. Dans sa décision QPC du 30 juillet 2010 concernant la garde à vue, il a réaffirmé que l’autorité judiciaire comprenait à la fois les magistrats du siège et du parquet. C’est vrai en droit interne, mais non au regard de la Convention européenne.

M. le président. Nous en venons au troisième thème de notre table ronde : les implications des jurisprudences nationales et européennes sur les droits de la personne gardée à vue, avec deux questions : « la notification des droits prévue par le texte est-elle conforme aux jurisprudences ? » et : « le rôle nouveau dévolu à l’avocat est-il suffisant ? Notamment, l’avocat doit-il pouvoir accéder au dossier ou aux pièces de la procédure et doit-il pouvoir poser des questions lors des auditions ? »

M. Yves Gaudemet. L’intervention de l’avocat est maintenant chose acquise. Mais il faut savoir que, dans deux cas sur trois, il ne vient pas. C’est un constat de fait que le législateur doit prendre en compte.

La présence de l’avocat exigée par la Convention européenne vise la présence « utile », consistant, non à participer directement à la défense de la personne gardée à vue mais à l’informer de son droit à garder le silence et, sachant ce qui lui est reproché et connaissant peut-être certains éléments du dossier, à lui assurer une assistance psychologique.

M. Philippe Houillon. Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par assistance psychologique ?

M. Frédéric Sudre. La jurisprudence de la Cour européenne, tout en étant très claire, laisse subsister une certaine incertitude. Si le texte de la Convention parle d’assistance, elle sanctionne de façon très nette l’absence de l’avocat. Elle exige donc sa présence physique, dès le placement en garde en vue et lors du premier interrogatoire de police. Une ambiguïté demeure cependant sur le rôle exact qu’il a à tenir, plus précisément sur la question de son accès au dossier.

La Cour européenne ne s’est jamais clairement prononcée à ce sujet mais elle a donné une définition du rôle de l’avocat laissant nettement entendre que celui-ci doit avoir accès au dossier. Ainsi elle a considéré qu’il doit pouvoir exercer librement « les éléments fondamentaux de la défense », qu’elle a énumérés en ces termes : « la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention. » J’incline à penser que les cinq premiers éléments mentionnés supposent un accès substantiel au dossier. Mais il règne, je le répète, une certaine incertitude à cet égard.

Par ailleurs, la jurisprudence européenne, affirme de façon constante en matière de garantie des droits communs, que le droit de se défendre implique pour l’accusé un droit d’accès à son dossier et à la communication des pièces de la procédure. À mon sens, il ressort donc de l’ensemble de la jurisprudence européenne que l’avocat doit avoir accès au dossier, au moins en partie, dès le début de la garde à vue.

M. Didier Rebut. Les récents arrêts de la Cour de cassation s’inscrivent tout à fait dans cette perspective. La Cour reprend bien évidemment les critères de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme et ceux de la jurisprudence européenne, puisqu’il s’agissait d’examiner la conformité des règles de la garde à vue au droit européen. Se référant à la notion d’assistance effective, elle considère que l’assistance prévue par le droit français est aujourd’hui insuffisante. La décision du Conseil constitutionnel s’appuie sur la même notion, ce qui montre bien la pression exercée par la Cour européenne des droits de l’Homme sur les deux juridictions françaises. On peut dire que les trois juridictions vont désormais dans le même sens : l’assistance de l’avocat doit être prévue dès la première heure.

Le récent arrêt de la CEDH, où il est clairement fait mention de l’« assistance pendant les interrogatoires », me semble mettre fin au débat sur le sens à donner au mot « assistance », débat à la faveur duquel certains voulaient repousser le moment où l’avocat est effectivement présent. Je ne vois pas comment cette assistance pendant les interrogatoires pourrait se faire par téléphone, ou de façon intermittente.

Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation sont également clairs sur ce point, le premier sans le dire car il n’est pas censé appliquer le droit européen, la seconde en le disant car elle est censée contrôler la conformité de nos textes à la Convention européenne des droits de l’Homme. Dans ce domaine, la Cour de cassation a estimé que notre droit n’est pas conforme au droit européen parce qu’il ne prévoit la présence de l’avocat ni dès le début de la garde à vue ni pendant les interrogatoires.

En ce qui concerne l’accès au dossier, la jurisprudence de la CEDH peut paraître peu explicite mais il est tout de même précisé que l’avocat doit être en mesure d’accomplir sa mission. Celle-ci ne saurait se résumer au fait d’être présent et de réconforter la personne placée en garde à vue – d’autres qu’un avocat pourraient tout aussi bien remplir ce rôle. Elle vise, indique la Cour, à « construire une défense », ce qui suppose la connaissance d’un minimum d’éléments d’information.

Le débat porte sur le degré d’information nécessaire : l’avocat doit-il avoir accès à toutes les pièces, doit-on avoir la possibilité d’en retrancher certaines ? Dans certaines législations européennes, la possibilité de ne pas communiquer l’intégralité du dossier relève de la décision d’un magistrat.

Cette question nous mène à celle des régimes dérogatoires, que nous verrons par la suite.

M. le président. Je vous propose d’y venir dès maintenant.

Le projet de loi se limite aux gardes à vue de droit commun, mais son champ devra être élargi à la retenue douanière et aux régimes dérogatoires. Quelles contraintes jurisprudentielles pèsent sur ces deux champs ?

M. Yves Gaudemet. Sauf erreur de ma part, la jurisprudence de la Cour de Strasbourg ne prévoit ni ne reconnaît les régimes exceptionnels en tant que tels. Elle admet cependant que, à titre exceptionnel et au cas par cas, on puisse faire reculer les garanties de droit commun pour des raisons d’ordre public. Il semble difficile de traduire cette position en termes de régime dérogatoire.

Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour ne comporte aucune indication concernant la durée et la reconduction de telles mesures à partir du moment où est garanti le contrôle d’un magistrat au sens de la Convention européenne des droits de l’Homme – c’est-à-dire d’un magistrat du siège.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel, contrastée en apparence mais complétée par celle de la Cour de cassation, fait apparaître la nécessité conventionnelle d’étendre, dans leur principe, les garanties exigées pour la garde à vue de droit commun aux régimes dérogatoires. Mais cela n’exclut pas la possibilité de reconduction pour des durées plus longues dès lors que la garantie du magistrat du siège existe, et cela n’interdit pas, à titre exceptionnel – d’où la difficulté à l’inscrire dans la loi –, un équilibre un peu différent entre les garanties découlant de la Convention européenne des droits de l’Homme et les nécessités de la poursuite pénale et de l’ordre public.

M. Frédéric Sudre. La Cour européenne de Strasbourg ne s’est pas prononcée expressément sur le principe des régimes dérogatoires mais elle a eu à connaître de problèmes de garde à vue dans le cadre de tels régimes et a jugé qu’ils ne sont pas en eux-mêmes contraires à la Convention européenne des droits de l’Homme et que le code de procédure pénale peut parfaitement les prévoir. Mais la Cour estime qu’une législation ne peut faire obstacle de façon systématique à certains droits, dont celui à l’assistance d’un avocat pour les personnes gardées à vue. Aussi les régimes dérogatoires doivent-ils circonscrire très précisément les restrictions apportées aux droits de la défense, ce qu’ils ne font pas aujourd’hui puisqu’ils s’appliquent de façon automatique et systématique.

Ce sont en effet l’automaticité et la systématicité qui sont contraires à la Convention européenne : selon la Cour, « une restriction systématique sur la base de dispositions légales pertinentes suffit à conclure à un manquement aux exigences de l’article 6 de la Convention ». Quant à savoir s’il peut y avoir des restrictions circonstancielles clairement définies, je crois qu’il faut être très prudent. La Cour, en effet, a durci sa position. Si, dans le passé, elle a pu admettre que l’absence d’avocat lors de la garde à vue, notamment en matière de terrorisme, était compatible avec la Convention européenne pour peu que les garanties du droit de la défense fussent respectées ultérieurement, elle a considéré dans une jurisprudence plus récente que l’absence de l’avocat a « irrémédiablement nui » aux droits de la défense même si la procédure ultérieure les a garantis, et elle a prononcé une sanction.

Bref, il n’existe pas d’incompatibilité radicale entre la jurisprudence de la Cour et les régimes dérogatoires, mais il me semble que les aménagements doivent être extrêmement prudents pour ce qui est de la garantie des droits de la défense.

M. Didier Rebut. Sur ce point, la position de la Cour de cassation se situe, une nouvelle fois, dans le prolongement de celle de la CEDH. S’appuyant sur la jurisprudence européenne, la Cour de cassation estime en effet qu’il est possible de déroger à la présence de l’avocat mais que cette exception doit être circonstanciée, c’est-à-dire qu’elle doit tenir à des raisons impérieuses. Or le régime dérogatoire français actuel s’organise autour de qualifications générales et c’est cela qui est récusé. Il n’est pas possible de disposer que toute infraction, sous le prétexte qu’elle est qualifiée de telle ou telle manière, doit entraîner le report de la présence de l’avocat : il faut circonstancier ce report en établissant une motivation au cas par cas.

Mme Marietta Karamanli. Bien que l’intervention de l’avocat soit désormais acquise, on doit prendre en compte la situation de fait décrite par le professeur Gaudemet et par M. Dominique Perben : en règle générale, l’avocat ne se déplace pas. À l’instar du médecin, qui doit accéder aux analyses pour établir un diagnostic et défendre le patient contre la maladie, l’avocat ne pourrait-il, moyennant l’accès au dossier, trouver dans le sentiment de son utilité une véritable motivation ?

M. Claude Goasguen. La présence, comme l’assistance, peut être seulement passive. Il faut préciser ces notions. L’avocat pourra-t-il poser des questions, répondre directement, parler, suggérer des réponses ? Quelle sera sa participation ?

Une explicitation des dispositions dérogatoires semble désormais nécessaire. Qui la fera, sinon le magistrat du siège ? Comment en établir les modalités pour respecter le cadre général ?

M. Étienne Blanc. La jurisprudence européenne permet-elle aux avocats de demander un acte au stade de la garde à vue ? C’est un élément important de la philosophie du projet de loi, qui vise à permettre la préparation de la défense future dès la garde à vue.

Par ailleurs, il sera difficile d’assurer la présence physique de l’avocat dans certaines parties du territoire. Ne pourrait-on parfois substituer à cette présence physique une présence par visioconférence, comme on le fait aux États-Unis et en Grande-Bretagne ?

M. Philippe Goujon. Le projet de loi devra préciser le cadre d’intervention dévolu à l’avocat. Dans le dispositif actuel, bien souvent, l’avocat n’est pas présent au début de la garde à vue pour des raisons matérielles, techniques, etc.

D’autre part, lorsque plusieurs personnes sont placées en garde à vue dans le cadre d’une même enquête, faut-il que plusieurs avocats aient accès au dossier, ce qui permettrait à un avocat de connaître des informations concernant un autre prévenu et pourrait poser des problèmes ?

Enfin, vous semblez avoir une interprétation assez large du principe de l’accès au dossier par l’avocat. Votre argumentation pourrait conduire à réclamer aussi la présence de l’avocat pendant les perquisitions.

Mme George Pau-Langevin. Et alors ?

M. Philippe Goujon. Considérez-vous, messieurs les professeurs, que l’avocat doit assister à certains actes de procédure et d’enquête ? Cela ne risque-t-il pas de nuire à la conduite de l’enquête, dont nous sommes nombreux à penser qu’elle doit se dérouler dans des conditions décentes ?

M. le président. Beaucoup d’intervenants ont posé la question des statistiques. Je tiens à préciser que j’ai demandé au ministre de l’intérieur, dans un courrier en date du 8 juin dernier, des statistiques au sujet de l’évolution du nombre de gardes à vue au cours des dix dernières années, en distinguant les mesures décidées dans le cadre du droit commun, celles qui concernent la criminalité organisée et celles qui concernent les infractions routières. J’ai demandé également la répartition par infraction des gardes à vue décidées en 2009, leur répartition en fonction de leur durée effective, ainsi que le nombre de confrontations avec des victimes.

N’ayant pas obtenu de réponse à ce jour, je vais relancer le ministère car les éléments de l’étude d’impact du projet de loi sont assez pauvres.

M. Yves Gaudemet. Lorsque le Conseil constitutionnel a eu à statuer sur ces questions et a ouvert la jurisprudence du changement de circonstances lui permettant de revenir sur une loi, il s’est fondé sur des données statistiques qu’il a recueillies auprès des ministères de la justice et de l’intérieur. Ces chiffres doivent être disponibles, puisque le Conseil justifie notamment le changement de circonstances par la multiplication des gardes à vue et a sans doute étayé sa réflexion sur une analyse assez fine de celles-ci.

M. le président. L’idéal serait de disposer de chiffres par catégorie, par infraction, par chapitre de code. On saurait alors exactement le nombre de gardes à vue que l’on interdit lorsque l’on remonte le seuil ou le type d’infraction permettant le recours à cette procédure ou son renouvellement.

M. Dominique Perben. Ayant été garde des sceaux peu après les événements de New York et ayant beaucoup travaillé avec l’attorney general des États-Unis, je sais que nous devrons continuer à nous battre tous les jours contre le terrorisme. Au risque de choquer, je tiens à dire que si les procédures judiciaires devaient être trop contraignantes, nous risquerions de passer à des pratiques de type militaire. C’est ce qui est arrivé aux États-Unis. Si les règles de droit ne permettent pas à un pays de se défendre, il se défendra en mettant ces règles entre parenthèses. Il n’y pas lieu de s’en réjouir, bien entendu, mais c’est ce que l’histoire nous enseigne. Les conversations personnelles que j’ai eues avec John Ashcroft au sujet de Guantanamo m’ont permis de bien comprendre pourquoi les États-Unis ont préféré rester sous statut militaire pour mener certaines actions plutôt que de se placer sous statut judiciaire. Ce n’est nullement un modèle – à l’époque, j’avais dit à l’attorney general ce que j’en pensais –, mais c’est un vrai sujet. Un pays peut se trouver à un moment donné dans la nécessité historique de devoir se défendre. S’il ne peut le faire dans le cadre du droit général, il le fera autrement.

Je reconnais volontiers que le problème se pose différemment pour la criminalité organisée, mais le travail mené sur ce sujet avec de grands policiers et de grands magistrats m’avait convaincu qu’il fallait faire quelque chose. Comme me le disait un jour un juge, il arrive que le seul choix de l’avocat montre que l’on ne s’est pas trompé... Il est notoire que certaines mafias ont des avocats en leur sein !

M. Philippe Vuilque. En général, la présence auprès de la personne gardée à vue est assurée par l’avocat qui se trouve disponible, pas nécessairement par celui qui prendra en charge sa défense par la suite. Cela ne risque-t-il pas de fragiliser la procédure ?

Mme George Pau-Langevin. Des pays comme l’Espagne, pourtant confrontés au terrorisme, ne font pas de difficultés en ce qui concerne la présence de l’avocat. Je doute que la seule présomption de terrorisme suffise à justifier les règles dérogatoires prises au début de la garde à vue. On l’a vu avec l’affaire de Tarnac : ce qui était présenté comme un vaste complot terroriste s’est dégonflé à mesure que l’instruction avançait. Nous devons veiller à ce que d’éventuelles dispositions dérogatoires ne reposent pas sur la seule qualification de terrorisme avancée par les policiers au début de l’enquête.

M. Philippe Gosselin. Si le droit espagnol ne prévoit pas d’exclusion de principe de l’avocat dans les affaires de terrorisme, il existe en revanche une procédure d’agrément des avocats. Certains se trouvent donc écartés, peut-être pour les raisons évoquées précédemment.

M. Didier Rebut. En Espagne, c’est le barreau qui établit la liste des avocats pouvant intervenir dans ce type de procédure. La personne gardée à vue devra choisir dans cette liste. Au surplus, en matière de terrorisme, l’entretien avec l’avocat n’est pas confidentiel. Les restrictions sont donc importantes.

M. Dominique Perben. Cela change tout.

Mme George Pau-Langevin. C’est néanmoins une piste.

M. Frédéric Sudre. Pour ce qui est de la présence de l’avocat et de la possibilité que celui-ci demande un acte, la Cour européenne des droits l’Homme n’apporte pas de réponse précise. Elle indique seulement que cette présence doit être effective et utile et que l’avocat participe à la construction de la défense. Son appréciation se faisant in concreto et in globo, elle ne dresse pas de liste : c’est au vu de l’espèce qu’elle considère si, globalement, les droits de la défense ont été respectés. Elle n’entre dans le détail qu’au moment de l’examen de l’affaire. De ce point de vue, on ne saurait dégager une démarche abstraite et a priori du juge européen.

Je crois néanmoins que la jurisprudence implique que l’avocat dispose des moyens de préparer efficacement la défense.

Par ailleurs, la Cour a déjà considéré qu’un procès mené par visioconférence était compatible avec la garantie d’un procès équitable. Elle ne s’est pas prononcée en matière de garde à vue mais ce moyen me semble incompatible avec ce qu’elle énonce. La raison principale de la présence de l’avocat dès l’interrogatoire de police est d’éviter que des aveux ne soient extorqués. On imagine mal une assistance effective par visioconférence à ce stade.

La Cour, monsieur Perben, n’interdit nullement les régimes dérogatoires – du reste, elle a été confrontée à la législation antiterroriste adoptée au Royaume-Uni. Elle précise seulement qu’il ne peut s’agir de régimes d’exception tels que la Convention européenne des droits de l’Homme puisse être mise entre parenthèses. Certaines garanties doivent demeurer. Le régime dérogatoire ne peut découler automatiquement de la nature de l’infraction : il doit y avoir « des raisons impérieuses ». La difficulté tient donc à la définition des circonstances pouvant justifier le régime dérogatoire. En toute hypothèse, la Cour exigera la garantie de certains droits, dont, me semble-t-il, le contrôle juridictionnel sans lequel un régime dérogatoire n’est guère envisageable.

M. Claude Goasguen. Les difficultés d’accès dans certaines régions et en certaines saisons rendront très difficile la présence d’un avocat. L’usage de la visioconférence est-il à ce point rédhibitoire ?

M. Frédéric Sudre. Pas rédhibitoire mais difficilement conciliable avec l’esprit de la jurisprudence européenne. La CEDH, déjà saisie de la question de l’usage de la visioconférence dans les procédures destinées aux mineurs, estime souvent que les preuves recueillies par ce biais ne sont pas compatibles avec les exigences du procès équitable. Là encore, elle n’interdit pas la visioconférence en tant que telle. Tout dépend de l’utilisation qu’on en fait.

M. Didier Rebut. S’agissant des régimes dérogatoires, la Cour européenne des droits de l’Homme, tout comme la Cour de cassation, exige une motivation concrète. Le magistrat pourra rédiger cette motivation en quelques lignes : objectif d’efficacité aidant, on ne lui demandera sans doute pas de s’étendre sur plusieurs pages. Mais il ne pourra pas se contenter d’invoquer la nature de l’infraction pour justifier le report de la présence de l’avocat. Certes, un contrôle juridictionnel est nécessaire, mais je pense que le procureur de la République, sous l’autorité duquel la garde à vue a lieu, est tout à fait habilité à prendre cette décision.

M. Yves Gaudemet. Au-delà du problème de la visioconférence, la présence systématique de l’avocat impose une réorganisation de l’intervention de la défense. Tout un travail de recherche de moyens et d’organisation est nécessaire pour mettre en place le support matériel sans lequel la réforme ne connaîtra aucune application concrète.

Enfin – mais cela pourrait faire l’objet d’une autre table ronde –, M. Goujon a évoqué la présence éventuelle de l’avocat lors des perquisitions. Or toute une jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme tend à étendre les dispositions de l’article 6 – droit à un procès équitable – à l’article 8, qui garantit le droit à la protection de la vie privée et familiale.

Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, de la confiance que vous nous avez accordée.

M. le président. Je vous remercie à mon tour. À l’issue de cette table ronde, nous avons une vision claire des données juridiques de la question.

ANNEXE 2 : ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT EUROPÉEN APPLICABLE OU EN COURS D’ÉLABORATION

(application de l’article 86, alinéa 7, du Règlement :
document transmis par la Commission des affaires européennes)

Paris, le 8 décembre 2010

Il convient de distinguer le droit de l’Union européenne, qui est intervenu de manière relativement récente sur les droits des suspects dans la procédure pénale et le droit issu de la Convention européenne des droits de l’Homme (Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales) qui a donné lieu à une abondante jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme.

I. Le droit de l’Union européenne

1.1 Les traités

La coopération judiciaire pénale telle qu’elle résulte du chapitre 4 du Titre V de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) en vigueur depuis le 1er décembre 2009, pourra porter sous certaines conditions sur les droits des personnes dans la procédure pénale.

Le premier aliéna de l’article 82 TFUE dispose que « la coopération judiciaire en matière pénale dans l’Union est fondée sur le principe de reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires et inclut le rapprochement des dispositions législatives et réglementaires des États membres dans les domaines visés au paragraphe 2 et à l’article 83 ».

Ledit paragraphe 2 de l’article 82 dispose que « dans la mesure où cela est nécessaire pour faciliter la reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires, ainsi que la coopération policière et judiciaire dans les matières pénales ayant une dimension transfrontière, le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de directives conformément à la procédure législative ordinaire, peuvent établir des règles minimales. Ces règles minimales tiennent compte des différences entre les traditions et systèmes juridiques des États membres. » Elles portent notamment sur « les droits des personnes dans la procédure pénale » (l’article 83 traite des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement graves revêtant une dimension transfrontalière).

Des freins peuvent cependant être posés par un Etat membre qui estimerait qu’un projet de directive porterait atteinte aux aspects fondamentaux de son système de justice pénale. Il peut alors demander que le Conseil européen soit saisi (« clause de frein »). Dans ce cas, la procédure législative est suspendue (3 de l’article 82 TFUE).

Après discussion, si un consensus est dégagé, le Conseil européen, dans un délai de quatre mois à compter de cette suspension, renvoie le projet au Conseil, et la procédure reprend.

Dans le même délai, en cas de désaccord, et si au moins neuf États membres souhaitent instaurer une coopération renforcée sur la base du projet de directive concerné, la « clause de frein » est contrebalancée par une « clause d’accélérateur » pour la mise en œuvre de la coopération renforcée. L’autorisation de procéder à une coopération renforcée est accordée et les dispositions relatives à la coopération renforcée s’appliquent.

Ces dispositions ont été instituées pour contrebalancer l’application de la majorité qualifiée au Conseil(73) en lieu et place de l’unanimité qui s’appliquait avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en matière de coopération judiciaire pénale.

Le rôle des parlements nationaux est spécifiquement reconnu pour la coopération judiciaire pénale. Si une initiative parait contraire au principe de subsidiarité, le seuil d’avis motivés à compter duquel la proposition doit être réexaminée est d’un quart des voix des parlements nationaux, au lieu d’un tiers pour les autres politiques européennes (article 69 TFUE).

1.2 Les travaux engagés

Un premier projet de texte sur les droits procéduraux dans la procédure pénale avait été déposé en 2004 par la Commission européenne. Il portait sur le droit à l’interprétation et à la traduction, le droit de communiquer, le droit à l’assistance d’un avocat et l’information des suspects sur leurs droits. D’un champ très large, le projet avait suscité une vive hostilité et les négociations avaient été abandonnées en 2007.

En novembre 2009, suivant une approche plus progressive, le Conseil a adopté une « feuille de route » visant à renforcer les droits procéduraux des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales. Cette feuille de route comprenait plusieurs mesures à mettre en œuvre : le droit à la traduction et à l’interprétation, l’information relative aux droits et à l’accusation, l’assistance d’un conseiller juridique et l’aide juridictionnelle, la communication avec les proches, les employeurs et les autorités consulaires, les garanties particulières pour les suspects ou personnes poursuivies qui sont vulnérables et un livre vert sur la détention provisoire.

Les travaux engagés auront un impact sur le régime français de la garde à vue. A l’heure actuelle, seule la directive relative au droit à l’interprétation a été adoptée.

La directive relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans les procédures pénales a été adoptée le 20 octobre 2010 (directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010).

Cette directive prévoit que, dès lors qu’une personne est informée qu’elle est suspectée ou poursuivie dans le cadre d’une procédure pénale, les « États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes poursuivies qui ne parlent ou ne comprennent pas la langue de la procédure pénale concernée se voient offrir sans délai l’assistance d’un interprète durant cette procédure pénale devant les services d’enquête et les autorités judiciaires, y compris durant les interrogatoires menés par la police » (article 2).

Si cela est nécessaire pour garantir le caractère équitable de la procédure, les États membres veillent à la mise à disposition d’un interprète lors des communications entre les suspects ou les personnes poursuivies et leur conseil juridique ayant notamment un lien direct avec tout interrogatoire (article 2).

Il appartient aux Etats membres de veiller à la mise en place d’une procédure permettant de vérifier si les suspects ou les personnes poursuivies parlent et comprennent la langue de la procédure pénale et s’ils ont besoin de l’assistance d’un interprète. La décision concluant qu’un interprète n’est pas nécessaire doit pouvoir être contestée (article 2).

La personne doit bénéficier, dans un délai raisonnable, de la traduction écrite de tous les documents essentiels pour lui permettre d’exercer ses droits de défense et pour garantir le caractère équitable de la procédure : parmi ces documents essentiels figure toute décision privative de liberté (article 3). Il convient de souligner que l’article 7 du présent projet de loi prévoit que, pendant la première période de garde à vue, l’avocat pourra avoir accès aux procès-verbaux de notification de placement en gade à vue ainsi qu’aux procès-verbaux d’audition déjà réalisés de la personne gardée à vue, sauf opposition du parquet.

La directive devra être transposée dans un délai de trois ans suivant sa publication. A l’heure actuelle, sur la question de la garde à vue, l’article 63-1 du code de procédure pénale dispose que l’information de la personne gardée à vue sur ses droits doit être communiquée à la personne « dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits. Si cette personne est atteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec des sourds. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité. »

Une proposition de directive relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales a été présentée par la Commission en juillet 2010 et est actuellement en cours d’examen.

La position des autorités françaises dans ces négociations sera liée aux termes dans lesquels sera adopté le présent projet de loi, qui réforme substantiellement la procédure de la garde à vue.

La proposition initiale de la Commission européenne visait à créer un droit à être informée de ses droits pour toute personne soupçonnée ou poursuivie dans le cadre d’une procédure pénale. Ces informations devraient être fournies par oral ou par écrit. Elles porteraient, a minima, sur les droits suivants : droit à l’assistance d’un avocat, le cas échant, à titre gracieux, le droit d’être informé des charges retenues contre soi et, le cas d’échant, d’accès au dossier, le droit à l’interprétation et à la traduction, le droit d’être présenté à un juge rapidement en cas d’arrestation (article 3).

Par ailleurs, pour les personnes privées de liberté au cours d’une procédure, l’information devrait être effectuée par écrit (déclaration des droits article 4).

Les autorités françaises souhaitent que les dispositions s’appliquant aux personnes privées de liberté soient clairement identifiées comme étant le cœur du texte et bien différenciées de celles applicables de manière générale en dehors de toute arrestation.

L’article 7 de la proposition initiale dispose que lorsqu’une personne est arrêtée au cours de la procédure pénale, elle-même ou son avocat devrait avoir accès aux pièces pertinentes du dossier pour déterminer la légalité de l’arrestation ou de la détention. Il est rappelé que l’article 7 du présent projet de loi prévoit que, pendant la première période de garde à vue, l’avocat pourra avoir accès aux procès-verbaux de notification de placement en gade à vue ainsi qu’aux procès-verbaux d’audition déjà réalisés de la personne gardée à vue, sauf opposition du parquet. Cette évolution du droit français va dans le sens de la proposition de directive relative au droit à l’information. Toutefois, ledit article 7 n’est pas encore stabilisé, tant il pose de difficultés à nombre d’Etats membres.

*

* *

Enfin, l’article 48 de la charte des droits fondamentaux désormais intégrée dans le traité, ce qui lui donne valeur juridique contraignante, dispose que le respect des droits de la défense est garanti à tout accusé.

II. La convention européenne des droits de l’Homme

2.1 Le droit à un procès équitable

L’article 6 de la convention européenne des droits de l’Homme établit le droit à un procès équitable. La Cour européenne des droits de l’Homme a été amenée à préciser les droits énoncés par l’article 6.

Article 6 de la convention européenne des droits de l’Homme

« 1 Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

2 Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3 Tout accusé a droit notamment à :

a être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui;

b disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense;

c se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent;

d interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;

e se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »

La Cour a précisé la notion de procès équitable et, dans ses arrêts Salduz contre Turquie (27 novembre 2008) et Dayanan contre Turquie (13 octobre 2009), jugé que l’accès à un avocat doit être consenti « dès le premier interrogatoire d’un suspect par la police, sauf à démontrer, à la lumière des circonstances particulières de l’espèce, qu’il existe des raisons impérieuses de restreindre ce droit ».

Dans l’arrêt Dayanan, la Cour a rappelé qu’elle « estime que l’équité d’une procédure pénale requiert d’une manière générale, aux fins de l’article 6 de la Convention, que le suspect jouisse de la possibilité de se faire assister par un avocat dès le moment de son placement en garde à vue ou en détention provisoire. »

La Cour a également rappelé dans l’arrêt Salduz que l’article 93 des Règles minimales pour le traitement des détenus (résolution (73)5 du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe) est ainsi libellé : « Un prévenu doit, dès son incarcération, pouvoir choisir son avocat (...), et (...) recevoir des visites de son avocat en vue de sa défense. Il doit pouvoir préparer et remettre à son avocat ou recevoir de lui des instructions confidentielles. Sur sa demande, toutes facilités doivent lui être accordées à cette fin. (...) Les entretiens entre le prévenu et son avocat peuvent se dérouler à portée de la vue mais non à portée de l’ouïe, directe ou indirecte, d’un fonctionnaire de la police ou de l’établissement. »

Dans son arrêt Brusco contre France du 14 octobre 2010, la Cour constate que M. Brusco n’a pas été informé au début de son interrogatoire du droit de se taire, de ne pas répondre aux questions posées, ou encore de ne répondre qu’aux questions qu’il souhaitait. Elle relève en outre qu’il n’a pu être assisté d’un avocat que vingt heures après le début de la garde à vue (délai prévu à l’article 63-4 du code de procédure pénale). L’avocat n’a donc été en mesure ni de l’informer sur son droit à garder le silence et de ne pas s’auto-incriminer avant son premier interrogatoire ni de l’assister lors de cette déposition et lors de celles qui suivirent, comme l’exige l’article 6 de la Convention.

Au final, il a été porté atteinte au droit de M. Brusco de ne pas contribuer à sa propre incrimination et de garder le silence. L’article 6 §§ 1 et 3 a été violé.

« 44.  La Cour rappelle que le droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination et le droit de garder le silence sont des normes internationales généralement reconnues qui sont au cœur de la notion de procès équitable […]

45.  La Cour rappelle également que la personne placée en garde à vue a le droit d’être assistée d’un avocat dès le début de cette mesure ainsi que pendant les interrogatoires, et ce a fortiori lorsqu’elle n’a pas été informée par les autorités de son droit de se taire. »

Enfin, la Cour de Cassation a, dans trois arrêts du 19 octobre 2010 (nos 5699, 5700 et 5701), jugé que certaines règles actuelles de la garde à vue étaient contraires aux exigences de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme telles qu’interprétées par la Cour européenne.

Les gardes à vue devraient respecter des principes suivants pour respecter l’article 6 de la convention:

- la restriction au droit, pour une personne gardée à vue, d’être assistée dès le début de la mesure par un avocat, doit répondre à l’exigence d’une raison impérieuse, qui ne peut découler de la seule nature de l’infraction;

- la personne gardée à vue doit être informée de son droit de garder le silence;

- la personne gardée à vue doit bénéficier de l’assistance d’un avocat dans des conditions lui permettant d’organiser sa défense et de préparer avec lui ses interrogatoires, auxquels l’avocat doit pouvoir participer.

Le communiqué rendu par la Cour suite aux arrêts précise « la chambre criminelle s’est trouvée face à une situation juridique inédite: une non-conformité à la Convention européenne des droits de l’Homme de textes de procédure pénale fréquemment mis en oeuvre et par ailleurs en grande partie déclarés inconstitutionnels, dans le cadre du contrôle a posteriori du Conseil constitutionnel, cette déclaration ayant un effet différé dans le temps [(voir la décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010 du Conseil constitutionnel)].

Des adaptations pratiques importantes qui ne peuvent être immédiatement mises en oeuvre s’imposent à l’évidence à l’autorité judiciaire, aux services de police judiciaire et aux avocats. La chambre criminelle a donc décidé de différer l’application des règles nouvelles en prévoyant qu’elles prendront effet lors de l’entrée en vigueur de la loi devant modifier le régime de la garde à vue ou, au plus tard, le 1er juillet 2011.

Les règles nouvelles ne s’appliquent donc pas aux gardes à vue antérieures à cette échéance. La chambre criminelle considère que ces arrêts ont aussi pour but de sauvegarder la sécurité juridique, principe nécessairement inhérent au droit de la Convention européenne des droits de l’Homme. Ils assurent enfin la mise en oeuvre de l’objectif de valeur constitutionnelle qu’est la bonne administration de la justice, laquelle exige que soit évitée une application erratique, due à l’impréparation, de règles nouvelles de procédure. »

2.2 Le droit à la liberté et à la sûreté

L’article 5, paragraphe 3, de la CEDH dispose que « toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l’intéressé à l’audience. »

L’appréciation du délai dans lequel une personne doit être traduite devant un juge relève d’un examen au cas par cas. Un arrêt récent concernant la France portait ainsi sur une situation très spécifique. Dans son arrêt Medvedyev contre France du 29 mars 2010, la Cour a précisé que ces dispositions visent à ce que la personne arrêtée soit aussitôt physiquement conduite devant une autorité judiciaire. « Le contrôle juridictionnel lors de la première comparution doit avant tout être rapide ». « En l’espèce, la présentation des requérants à des juges d’instruction, lesquels peuvent assurément être qualifiés de « juge ou autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » au sens de l’article 5 § 3, est intervenue treize jours après leur arrestation en haute mer ». La Cour a jugé qu’il n’y avait pas eu de violation de l’article 5, paragraphe 3 de la CEDH. En revanche, dans son arrêt Brogan et autres contre Royaume-Uni du 29 novembre 1988, la Cour a indiqué : « aux yeux de la Cour, même la plus brève des quatre périodes litigieuses, à savoir les quatre jours et six heures de garde à vue de M. McFadden […], va au-delà des strictes limites de temps permises par la première partie de l’article 5 par[agraphe] 3 ». Il s’agissait en l’espèce d’une garde à vue liée à des infractions terroristes.

Dans son arrêt Moulin contre France du 23 novembre 2010, la Cour a remis en cause le rôle du parquet suite à une garde à vue au regard de l’article 5 de la convention et du droit à être aussitôt traduit devant un juge ou tout autre magistrat habilité à exercer des fonctions judiciaires. En l’espèce, la personne avait été placée en garde à vue pendant 48 heures, la garde à vue ayant été préalablement prolongée après 24 heures par un juge d’instruction n’ayant pas entendu la personne. A l’issue de cette garde à vue, elle a été présentée au procureur adjoint, qui ordonna sa conduite en maison d’arrêt en vue de son transfèrement ultérieur devant les juges d’instruction, un mandat d’amener ayant été émis à son encontre par ces juges. La personne a ensuite été présentée aux juges d’instruction trois jours après.

La Cour a estimé « que le procureur adjoint de Toulouse, membre du ministère public, ne remplissait pas, au regard de l’article 5 § 3 de la Convention, les garanties d’indépendance exigées par la jurisprudence pour être qualifié, au sens de cette disposition, de « juge ou (...) autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ».

60. En conséquence, la Cour constate que la requérante n’a été présentée à un « juge ou (...) autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires », en l’espèce les juges d’instruction d’Orléans, en vue de l’examen du bien-fondé de sa détention, que le 18 avril 2005 à 15 h 14, soit plus de cinq jours après son arrestation et son placement en garde à vue. »

La Cour a conclu qu’il y avait bien eu violation de l’article 5, paragraphe 3, de la convention.

ANNEXE 3 :
NOMBRE DE GARDES À VUE DÉCIDÉES EN 2009

 

Nombre total de
gardes à vues
décidées en 2009

dont gardes à vues
de plus de
24 heures

Proportion
de gardes à vue
de plus
de 24 heures

Ensemble des crimes ou délits

580 108

100 380

17,3 %

Atteintes aux biens

172 055

31 287

18,2 %

dont :

     

Vols spécialisés

59 781

14 406

24,1 %

- dont cambriolages et vols avec entrée par ruse

28 906

8 699

30,1 ¨%

Vols simples

58 128

5 749

9,9 %

Vols avec violence

19 576

6 783

34,6 %

- vols avec arme

5 928

3 323

56,1 %

- vols sans arme

13 648

3 460

25,4 %

Destructions et dégradations

34 570

4 349

12,6 %

- dont incendies volontaires

6 005

1 623

27,0 %

Atteintes volontaires à l’intégrité physique (hors vols)

124 769

26 043

20,9 %

dont :

     

Violences non crapuleuses

96 823

18 845

19,5 %

- coups et blessures volontaires

76 148

13 855

18,2 %

- homicides, tentatives ou violences volontaires suivies de mort

2 052

1 305

63,6 %

- prises d’otages non crapuleuses et séquestrations

1 198

618

51,6 %

- violences, mauvais traitements et abandons d’enfants

3 440

591

17,2 %

- violences à dépositaires de l’autorité

13 985

2 476

17,7 %

Violences sexuelles

12 258

4 687

38,2 %

- viols

6 590

3 001

45,5 %

- harcèlements sexuels et autres agressions sexuelles

5 668

1 686

29,7 %

Menaces ou chantages

15 546

2 399

15,4 %

- dont menaces ou chantages pour extorsion de fonds

3 146

772

24,5 %

Escroqueries et infractions économiques et financières (hors infractions à la législation du travail)

27 097

5 472

20,2 %

dont :

     

- Infractions économiques et financières (hors infractions à la législation du travail)

3 627

977

26,9 %

Infractions révélées par l’action des services

211 081

31 532

14,9 %

dont :

     

Recels

26 088

4 365

16,7 %

Infractions à la législation sur les stupéfiants

83 673

20 595

24,6 %

- dont trafic et revente sans usage

11 095

7 339

66,1 %

- dont usage-revente

14 612

7 258

49,7 %

- dont usage

54 171

5 043

9,3 %

Infraction à la police des étrangers

80 063

3 640

4,5 %

- dont infractions aux conditions générales d’entrée et de séjour des étrangers

74 050

2 669

3,6 %

- dont aide à l’entrée, à la circulation et au séjour des étrangers

2 584

767

29,7 %

Faux document administratif

4 870

778

16,0 %

- dont faux documents d’identité

2 656

486

18,3 %

Autres infractions révélées par l’action des services

1 550

693

44,7 %

- dont proxénétisme

801

519

64,8 %

Autres infractions

45 106

6 046

13,4 %

- dont atteintes sexuelles

7 623

1 133

14,9 %

Source : Institut National des Hautes Études de la Sécurité et de la Justice.

ANNEXE 4 : CONTRAINTES HUMAINES PESANT SUR LA RÉFORME DE LA GARDE À VUE

Le tableau suivant présente, pour l’année 2009 et par département :

—  le nombre de gardes à vue effectuées, à l’exception de celles consécutives à des infractions routières, pour lesquelles ni le ministère de l’intérieur ni le ministère de la justice ne disposent de statistiques nationales par département ;

—  le nombre d’avocats inscrits au(x) barreau(x) du département ;

—  le nombre de magistrats du parquet dans le ou les tribunaux du département ;

—  le nombre de magistrats susceptibles d’exercer les fonctions de juge des libertés et de la détention aux termes de l’article 137-1 du code de procédure pénale du siège, c’est-à-dire les magistrats du siège ayant rang de président, de premier vice-président ou de vice-président dans le ou les tribunaux du département ;

—  le nombre de magistrats du siège dans le ou les tribunaux du département.

Il a été réalisé avec les données communiquées par le ministère de l’intérieur s’agissant du nombre des gardes à vue, par le Conseil national des barreaux s’agissant du nombre d’avocats inscrits au(x) barreau(x) du département, et par la direction des services judiciaires s’agissant du nombre de magistrats.

Ce tableau ne comprend pas les collectivités d’outre-mer, pour lesquelles les données communiquées à votre rapporteur étaient incomplètes.

Département

Gardes à vue décidées en 2009

Avocats inscrits à un barreau du département

Magistrats du parquet

Magistrats du siège susceptibles d’exercer les fonctions de JLD

Magistrats du siège

Gardes à vue par…

Numéro

Nom

… avocat inscrit au barreau

… magistrat du parquet

… magistrat du siège susceptibles d’exercer les fonctions de JLD

… magistrat du siège

01

Ain

3 429

119

8

8

25

28,8

428,6

428,6

137,2

02

Aisne

3 849

118

11

9

30

32,6

349,9

427,7

128,3

03

Allier

1 866

105

8

7

26

17,8

233,3

266,6

71,8

04

Alpes-de-Haute-Provence

838

50

3

3

10

16,8

279,3

279,3

83,8

05

Hautes-Alpes

589

46

3

3

9

12,8

196,3

196,3

65,4

06

Alpes-Maritimes

13 681

1 525

31

36

93

9,0

441,3

380,0

147,1

07

Ardèche

1 233

46

4

3

14

26,8

308,3

411,0

88,1

08

Ardennes

1 468

55

6

6

17

26,7

244,7

244,7

86,4

09

Ariège

913

32

3

2

9

28,5

304,3

456,5

101,4

10

Aube

2 132

83

7

7

23

25,7

304,6

304,6

92,7

11

Aude

2 440

130

8

6

22

18,8

305,0

406,7

110,9

12

Aveyron

1 528

43

4

2

11

35,5

382,0

764,0

138,9

13

Bouches-du-Rhône

23 259

2 190

54

51

159

10,6

430,7

456,1

146,3

14

Calvados

5 554

341

13

14

43

16,3

427,2

396,7

129,2

15

Cantal

398

40

3

2

8

10,0

132,7

199,0

49,8

16

Charente

1 659

116

6

7

19

14,3

276,5

237,0

87,3

17

Charente-Maritime

2 781

270

12

12

35

10,3

231,8

231,8

79,5

18

Cher

1 317

85

5

5

17

15,5

263,4

263,4

77,5

19

Corrèze

1 207

98

5

5

16

12,3

241,4

241,4

75,4

2A

Corse-du-Sud

1 610

99

5

5

15

16,3

322,0

322,0

107,3

2B

Haute-Corse

1 418

127

5

5

16

11,2

283,6

283,6

88,6

21

Côte-d’Or

3 374

269

11

10

31

12,5

306,7

337,4

108,8

22

Côtes-d’Armor

2 320

155

7

7

25

15,0

331,4

331,4

92,8

23

Creuse

351

17

3

1

8

20,6

117,0

351,0

43,9

24

Dordogne

1 581

116

8

9

27

13,6

197,6

175,7

58,6

25

Doubs

2 919

202

11

10

30

14,5

265,4

291,9

97,3

26

Drôme

3 236

216

9

9

26

15,0

359,6

359,6

124,5

27

Eure

4 594

121

12

9

32

38,0

382,8

510,4

143,6

28

Eure-et-Loir

2 529

133

8

7

25

19,0

316,1

361,3

101,2

29

Finistère

3 709

447

13

12

42

8,3

285,3

309,1

88,3

30

Gard

5 286

292

15

13

45

18,1

352,4

406,6

117,5

31

Haute-Garonne

9 058

1 084

22

21

66

8,4

411,7

431,3

137,2

32

Gers

840

46

3

3

10

18,3

280,0

280,0

84,0

33

Gironde

12 501

1 133

30

24

88

11,0

416,7

520,9

142,1

34

Hérault

9 310

872

21

22

70

10,7

443,3

423,2

133,0

35

Ille-et-Vilaine

4 546

550

21

19

57

8,3

216,5

239,3

79,8

36

Indre

1 192

50

5

4

15

23,8

238,4

298,0

79,5

37

Indre-et-Loire

3 075

215

9

10

30

14,3

341,7

307,5

102,5

38

Isère

7 780

540

21

23

65

14,4

370,5

338,3

119,7

39

Jura

1 069

60

5

4

14

17,8

213,8

267,3

76,4

40

Landes

1 819

109

9

4

20

16,7

202,1

454,8

91,0

41

Loir-et-Cher

1 399

64

5

4

15

21,9

279,8

349,8

93,3

42

Loire

5 145

263

12

10

42

19,6

428,8

514,5

122,5

43

Haute-loire

687

38

4

3

11

18,1

171,8

229,0

62,5

44

Loire-Atlantique

9 022

728

28

20

65

12,4

322,2

451,1

138,8

45

Loiret

4 347

202

12

13

35

21,5

362,3

334,4

124,2

46

Lot

662

49

3

3

9

13,5

220,7

220,7

73,6

47

Lot-et-Garonne

2 100

100

7

5

22

21,0

300,0

420,0

95,5

48

Lozère

346

13

2

1

4

26,6

173,0

346,0

86,5

49

Maine-et-loire

4 057

284

10

9

34

14,3

405,7

450,8

119,3

50

Manche

2 695

93

9

7

24

29,0

299,4

385,0

112,3

51

Marne

4 438

271

13

12

40

16,4

341,4

369,8

111,0

52

Haute-Marne

1 277

30

5

4

12

42,6

255,4

319,3

106,4

53

Mayenne

1 309

69

4

5

15

19,0

327,3

261,8

87,3

54

Meurthe-et-Moselle

4 890

306

19

17

53

16,0

257,4

287,6

92,3

55

Meuse

1 230

25

6

4

17

49,2

205,0

307,5

72,4

56

Morbihan

2 924

185

12

11

36

15,8

243,7

265,8

81,2

57

Moselle

7 953

421

22

25

84

18,9

361,5

318,1

94,7

58

Nièvre

1 040

51

4

4

14

20,4

260,0

260,0

74,3

59

Nord

29 586

1 204

62

49

176

24,6

477,2

603,8

168,1

60

Oise

6 566

197

18

16

76

33,3

364,8

410,4

86,4

61

Orne

1 289

65

6

5

18

19,8

214,8

257,8

71,6

62

Pas-de-Calais

23 780

296

30

26

91

80,3

792,7

914,6

261,3

63

Puy-de-Dôme

3 032

294

12

11

39

10,3

252,7

275,6

77,7

64

Pyrénées-Atlantiques

4 658

414

13

14

41

11,3

358,3

332,7

113,6

65

Hautes-Pyrénées

1 482

69

5

6

15

21,5

296,4

247,0

98,8

66

Pyrénées-Orientales

6 612

240

12

11

35

27,6

551,0

601,1

188,9

67

Bas-Rhin

8 401

724

22

21

82

11,6

381,9

400,0

102,5

68

Haut-Rhin

4 261

300

18

17

71

14,2

236,7

250,6

60,0

69

Rhône

20 553

2 199

38

33

111

9,3

540,9

622,8

185,2

70

Haute-Saône

1 197

32

5

3

14

37,4

239,4

399,0

85,5

71

Saône-et-Loire

2 515

138

10

7

31

18,2

251,5

359,3

81,1

72

Sarthe

2 700

151

10

8

29

17,9

270,0

337,5

93,1

73

Savoie

3 584

221

11

11

27

16,2

325,8

325,8

132,7

74

Haute-Savoie

5 740

372

14

14

42

15,4

410,0

410,0

136,7

75

Paris

56 819

19 422

123

132

353

2,9

461,9

430,4

161,0

76

Seine-Maritime

11 405

561

28

24

78

20,3

407,3

475,2

146,2

77

Seine-et-Marne

17 344

334

34

31

85

51,9

510,1

559,5

204,0

78

Yvelines

14 354

601

29

23

75

23,9

495,0

624,1

191,4

79

Deux-Sèvres

1 357

81

5

3

15

16,8

271,4

452,3

90,5

80

Somme

5 717

227

13

11

40

25,2

439,8

519,7

142,9

81

Tarn

2 299

123

6

6

19

18,7

383,2

383,2

121,0

82

Tarn-et-Garonne

1 592

78

5

4

14

20,4

318,4

398,0

113,7

83

Var

9 598

572

25

21

68

16,8

383,9

457,0

141,1

84

Vaucluse

4 655

328

13

12

39

14,2

358,1

387,9

119,4

85

Vendée

2 485

145

8

7

25

17,1

310,6

355,0

99,4

86

Vienne

2 371

221

8

7

27

10,7

296,4

338,7

87,8

87

Haute-Vienne

1 925

147

7

7

23

13,1

275,0

275,0

83,7

88

Vosges

1 884

112

6

5

22

16,8

314,0

376,8

85,6

89

Yonne

3 197

88

8

7

25

36,3

399,6

456,7

127,9

90

Territoire de Belfort

1 026

39

4

3

10

26,3

256,5

342,0

102,6

91

Essonne

14 943

304

30

22

74

49,2

498,1

679,2

201,9

92

Hauts-de-Seine

18 263

1 870

35

37

109

9,8

521,8

493,6

167,6

93

Seine-Saint-Denis

33 596

451

50

41

123

74,5

671,9

819,4

273,1

94

Val-de-Marne

21 692

444

32

30

91

48,9

677,9

723,1

238,4

95

Val d’Oise

15 633

361

28

21

66

43,3

558,3

744,4

236,9

971

Guadeloupe

5 350

237

12

9

36

22,6

445,8

594,4

148,6

972

Martinique

4 885

165

10

9

25

29,6

488,5

542,8

195,4

973

Guyane

10 482

54

7

6

17

194,1

1497,4

1747,0

616,6

974

Réunion

5 387

189

13

12

42

28,5

414,4

448,9

128,3

                     

TOTAL

603 994

49 607

1 449

1 318

4 274

12,2

416,8

458,3

141,3

TOTAL hors Paris

547 175

30 185

1 326

1 186

3 921

18,1

412,7

461,4

139,5

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

CONTRÔLE GÉNÉRAL DES LIEUX DE PRIVATION DE LIBERTÉ

 M. Jean-Marie DELARUE, Contrôleur général

COMMISSION NATIONALE CONSULTATIVE DES DROITS DE L’HOMME

—  M. Yves REPIQUET, président

PERSONNALITÉS QUALIFIÉES

 M. Philippe LÉGER, président du Comité de réflexion sur la réforme du code pénal et du code de procédure pénale

 Mme Mireille DELMAS-MARTY, professeur au Collège de France

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

 M. Frédéric PÉCHENARD, directeur général de la police nationale

 Général Jacques MIGNAUX, directeur général de la gendarmerie nationale

SYNDICATS DE MAGISTRATS

● Union syndicale des magistrats (USM)

 Mme Catherine VANDIER, vice-présidente

 M. Nicolas LÉGER, conseiller national

● Syndicat de la magistrature (SM) 

 Mme Clarisse TARON, présidente

 M. Benoist HUREL, secrétaire général adjoint

● Force ouvrière (FO) magistrats

 M. Emmanuel POINAS, secrétaire général

MAGISTRATS

 M. Robert GELLI, président de la Conférence nationale des Procureurs

 M. Marc TRÉVIDIC, Président de Association française des magistrats instructeurs, vice-président chargé de l’instruction au Tribunal de grande instance de Paris (pôle anti-terroriste)

 M. Gilbert THIEL, premier juge d’instruction au Tribunal de grande instance de Paris (pôle anti-terroriste)

 M. Jean-Louis BRUGUIÈRE, ancien chef du pôle antiterroriste du Tribunal de grande instance de Paris, magistrat honoraire

SYNDICATS DE POLICIERS

● Syndicat des commissaires de la police nationale

 Mme Sylvie FEUCHER, secrétaire générale

 M. Emmanuel ROUX, secrétaire général adjoint

 M. Olivier AUBRY, commissaire de police

● Syndicat indépendant des commissaires de police – CFDT

 M. Olivier BOISTEAUX, président

 M. Jean-Paul MEGRET, secrétaire national 

 M. Thierry HUGUET

● Syndicat national des officiers de police (SNOP)

 Mme Chantal PONS-MESOUAKI, secrétaire nationale

● Synergie officiers

 M. Francis NÉBOT, secrétaire national

 M. Christophe GESSET, conseiller technique

 Mme Isabelle TROUSLARD, conseiller technique

● Alliance Police nationale

 M. Laurent LACLAU-LACROUTS, conseiller spécial

 M. Thierry MAZÉ, secrétaire national Paris

 M. Pierre AZÉMA, délégué national

● Syndicat général de la police (SGP-FO – Unité police)

 M. Henri MARTINI secrétaire général adjoint

 M. Laurent YSERN, délégué national

AVOCATS

● GIE Conseil national des Barreaux – Ordre des avocats de Paris – Conférence des Bâtonniers

 Me Alain POUCHELON, Président de la Conférence des Bâtonniers

 Me Alain MIKOWSKI, Président de la commission Libertés et Droits de l’Homme au Conseil National des Barreaux

 Me Jean-Yves LE BORGNE, Vice-Bâtonnier au Barreau de Paris

 Me Vincent NIORE, membre du conseil de l’ordre

ASSOCIATIONS DE DÉFENSE DES VICTIMES

● Institut national d’aide aux victimes et de médiation (INAVEM)

 Mme Michèle de KERCKHOVE, vice-présidente

● Institut pour la justice

 M. Xavier BEBIN, délégué général

 M. Jean PRADEL, professeur de droit pénal

 Mme Audrey LINY, responsable des relations institutionnelles

DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS PAR LE RAPPORTEUR

Brigade territoriale de gendarmerie nationale de Saint-Jean-de-Daye (Manche) – table ronde en présence de :

— Colonel Jacques RAZAFINDRANALY, commandant du groupement de gendarmerie départementale de la Manche

— Lieutenant-Colonel Laurent TAVENEAU, commandant en second du groupement de gendarmerie départementale de la Manche

— Chef d’escadron Gilles PIRIOU, adjoint au Commandant du groupement

— Capitaine Nicolas BÉNÉVENT, commandant en second la compagnie de Saint-Lô

— Capitaine Jean-Philippe SOTIN, Officier adjoint chargé de la Police Judiciaire (OAPJ)

— Major Philippe MAUDUY, commandant la communauté de brigades de Saint-Jean-de-Daye

— Adjudant-chef Daniel DAUVIN, commandant la brigade motorisée de Saint-Lô

— Adjudant-chef Serge POURTET, commandant en second la brigade autonome de Carentan

— Adjudant Jean-Marc GOUR, commandant la brigade de Saint-Lô

— Maréchal des logis-chef Sébastien PASSION , gradé d’encadrement de la brigade de Saint-Clair-sur-l’Elle

M. Renaud GAUDEUL, Procureur de la République du Tribunal de grande instance de Coutances

M. François LAVALLIÈRE, juge d’application des peines au Tribunal de grande instance de Coutances

Me Didier PETIT-ETIENNE, Bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Coutances

Commissariat du XIIème arrondissement de Paris

M. Philippe CARON, Directeur territorial

— M. Laurent MERCIER, Commissaire central adjoint du XIIème arrondissement accompagné de personnels du service d’accueil, de recherche et d’investigation judiciaires (SARIJ) du XIIème arrondissement

— M. Patrice DEMOLY, Commissaire divisionnaire à la brigade de répression de la délinquance économique

— M. Arnaud VERHILLE, Commissaire, chef du SARIJ du XVIIIème arrondissement

Tribunal de grande instance de Paris

— M. Jean-Claude MARIN, procureur de la République de Paris

— Mme Dominique PLANQUELLE, procureur adjoint de Paris

— M. Dominique BORRON, secrétaire général du parquet de Paris

© Assemblée nationale

1 () La loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale avait initialement prévu que ce droit pouvait s’exercer « lorsque vingt heures se sont écoulées depuis le début de la garde à vue ». La loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes avait ensuite prévu que ce droit pouvait s’exercer « dès le début de la garde à vue ainsi qu’à l’issue de la vingtième heure ». Cet entretien supplémentaire à l’issue de la vingtième heure, généralement inutile si la garde à vue n’était pas prolongée et faisant double emploi avec l’entretien du début de la prolongation en cas de prolongation, avait été supprimé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

2 () Rapport (n° 3125) de MM. André Vallini, Président, et Philippe Houillon, Rapporteur, au nom de la commission d’enquête chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dite d’Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur renouvellement, page 198.

3 () Au cours des douze derniers mois, ont été déposées :

—  à l’Assemblée nationale, les propositions de loi nos 2181 de M. Manuel Aeschlimann tendant à instituer la présence de l’avocat durant tous les actes de la procédure établis au cours de la garde à vue, 2191 de M. François Goulard visant à imposer l’audition immédiate des personnes mises en garde à vue, 2193 de M. Michel Hunault tendant à rendre obligatoire la présence de l’avocat dès la première heure de garde à vue, 2295 de M. André Vallini visant à instituer la présence effective de l’avocat dès le début de la garde à vue, 2356 de M. Noël Mamère portant réforme de la garde à vue, 2364 de M. Jean-Jacques Candelier tendant à garantir les droits de la défense des personnes placées en garde à vue, 2406 de M. Hervé de Charette tendant à l’amélioration des droits de la défense dans la procédure de la garde à vue, 2410 de M. André Wojciechowski visant à réformer le droit relatif à la garde à vue et 2952 de M. Jean-Pierre Decool visant à modifier les dispositions applicables en matière de garde à vue ;

—  au Sénat, au cours de la session 2009-2010, les propositions de loi nos 201 rectifiée de Mme Alima Boumediene-Thiery portant réforme de la garde à vue, 208 de M. Jacques Mézard tendant à assurer l’assistance immédiate d’un avocat aux personnes placées en garde à vue, 286 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat tendant à encadrer la garde à vue.

4 () À l’Assemblée nationale, la proposition de loi n° 2295 de M. André Vallini visant à instituer la présence effective de l’avocat dès le début de la garde à vue a été discutée en commission le 24 février 2010 et en séance le 25 mars 2010.

Au Sénat, la proposition de loi n° 208 de M. Jacques Mézard tendant à assurer l’assistance immédiate d’un avocat aux personnes placées en garde à vue a été discutée en commission le 24 février 2010 et en séance le 24 mars 2010, et la proposition de loi n° 201 rectifiée de Mme Alima Boumediene-Thiery portant réforme de la garde à vue a été discutée en commission le 31 mars 2010 et en séance le 29 avril 2010.

5 () Débats Assemblée nationale, première séance du jeudi 25 mars 2010.

6 () La numérotation de chaque article, sous la forme xxx-xx, indique sa place dans le code. Le chiffre des centaines correspond à celui du livre, celui des dizaines à celui du titre, et celui des unités à celui du chapitre. Le chiffre après le tiret indique la place de l’article dans le chapitre.

7 () « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause. »

8 () Considérant n° 30.

9 () Les professeurs Yves Gaudemet, Frédéric Sudre et Didier Rebut.

10 () Cf. infra, B.

11 () Le Gouvernement a présenté un amendement en ce sens, adopté par la Commission et devenu l’article 14 bis.

12 () CEDH, arrêt Medvedyev et autres contre France, 29 mars 2010, requête n° 3394/03.

13 () Les juges d’instruction sont « assurément susceptibles d’être qualifiés de « juge ou autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » au sens de l’article 5, paragraphe 3, de la Convention ».

14 () CEDH, arrêt France Moulin contre France, 23 novembre 2010, requête n° 37104/06.

15 () CEDH, arrêt Salduz contre Turquie, 27 novembre 2008, requête n° 36391/02.

16 () CEDH, arrêt Dayanan contre Turquie, 13 octobre 2009, requête n° 7377/03.

17 () CEDH, arrêt Brusco contre France, 14 octobre 2010, requête n°  1466/07.

18 () La commission des faits datait de 1998 et la procédure s’était déroulée en 1999. La possibilité de placer un témoin en garde à vue, qui existait alors dans le cadre d’une instruction préparatoire, a été supprimée par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

19 () Rapport du groupe de travail présidé par M. Yves Gaudemet sur les aspects constitutionnels et conventionnels de la réforme de la procédure pénale, remis le 5 mai 2010 au garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés, page 13.

20 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvoi n° 5700.

21 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvois nos 5699 et 5701.

22 () Cass. Crim. 15 décembre 2010 : dans cet arrêt, la Cour a estimé que « si c’est à tort que la chambre de l’instruction a retenu que le ministère public est une autorité judiciaire au sens de l’article 5, paragraphe 3, de la Convention européenne des droits de l’Homme, alors qu’il ne présente pas les garanties d’indépendance et d’impartialité requises par ce texte et qu’il est partie poursuivante, l’arrêt n’encourt pas pour autant la censure, dès lors que le demandeur a été libéré à l’issue d’une privation de liberté d’une durée [25 heures] compatible avec l’exigence de brièveté imposée par ledit texte conventionnel ».

23 () Ce tableau a été réalisé avec les données communiquées par le ministère de l’intérieur s’agissant du nombre des gardes à vue, par le Conseil national des barreaux s’agissant du nombre d’avocats inscrits au(x) barreau(x) du département, et par la direction des services judiciaires s’agissant du nombre de magistrats.

24 () En prenant pour postulat que tous les avocats participent aux permanences pénales de garde à vue, ce qui n’est en pratique pas le cas compte tenu des spécialisations d’un grand nombre d’entre eux.

25 () Un projet d’acquisition de matériel meilleur marché est en cours d’analyse. Il suppose l’utilisation d’une autre technologie, fondée sur le protocole IP, non encore déployée au niveau national, mais qui présente l’avantage de ne pas impliquer un coût d’abonnement pour les juridictions.

26 () En 2011, compte tenu des délais de la discussion parlementaire et de la rédaction de l’article 18 du projet de loi, qui prévoit que « La présente loi entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication au Journal officiel et au plus tard le 1er juillet 2011 », il est probable que la réforme ne sera applicable qu’à partir du début du second semestre.

27 () Résolution du Conseil national des Barreaux adoptée par l’Assemblée générale des 10 et 11 septembre 2010.

28 () Rapport du Comité de réflexion sur la justice pénale, pages 19 et 20.

29 () Depuis le 6 décembre 2000, la Cour de cassation a fait du placement en garde à vue une obligation pour tout interrogatoire faisant suite à une interpellation et une privation de liberté, si brève soit-elle. Dès lors que des mesures de contraintes sont prises à l’encontre d’un suspect, celui-ci doit par conséquent être placé en garde à vue et bénéficier des droits prévus par le code de procédure pénale.

30 () Voir compte rendu en annexe 1.

31 () Cass. Crim. 02.09.2003

32 () La prolongation de la garde à vue de droit commun au-delà de vingt-quatre heures effectuée par le procureur de la République a été validée par le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée du 11 août 1993, le Conseil estimant que « si l’intervention d’un magistrat du siège peut être requise pour certaines prolongations de la garde à vue, l’intervention du procureur de la République dans les conditions prévues par la loi déférée ne méconnaît pas les exigences de l’article 66 de la Constitution ».

33 () C’est dans la décision n° 93-326 DC du 11 août 1993 que le Conseil constitutionnel a pour la première fois jugé que « l’autorité judiciaire qui, en vertu de l’article 66 de la Constitution, assure le respect de la liberté individuelle, comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet ».

34 () Commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 30 – Commentaire de la décision n° 2010-14/22 QPC – juillet 2010, p. 17.

35 () CEDH, 29 novembre 1988, Brogan et autres c. Royaume-Uni.

36 () CEDH, cinquième section, 6 novembre 2008, Kandjov c. Bulgarie

37 () Commentaires précités, p 18

38 () Cf. arrêt Medvedyev c. France précité.

39 () Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale.

40 () Considérant n° 28.

41 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvoi n° 5700.

42 () L’avocat pourra désormais consulter les procès-verbaux d’audition de la personne gardée à vue et assister à ses auditions.

43 () Voir, en annexe au tableau comparatif, les articles 1er à 7 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat.

44 () Discours de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, lors de l’audience solennelle de début d’année de la Cour de cassation, 7 janvier 2009.

45 () Voir infra, article 12.

46 () Sur ces contraintes, voir l’exposé général du présent rapport.

47 () Crim. 28 avril 2004, Bull. crim. n° 102.

48 () L’article 434-44 du code pénal, qui définit les peines complémentaires encourues pour les infractions du chapitre « Des atteintes à l’action de la justice » (articles 434-1 à 434-47), prévoit cette peine pour les « infractions prévues au troisième alinéa de l’article 434-9, à l’article 434-33 et au second alinéa de l’article 434-35 », mais pas pour celle prévue à l’article 434-7-2.

49 () Sur cette difficulté, voir supra le commentaire de l’article 5.

50 () Cet amendement portait article additionnel après l’article 16.

51 () Décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010, considérants nos 19 et 20.

52 () Voir, sur le site Internet du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (http://www.cglpl.fr/), les rapports de visite des commissariats de police de Besançon et de Boulogne-Billancourt et des brigades territoriales de gendarmerie de Migennes, Ecole-Valentin et Chambray-lès-Tours.

53 () Loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

54 () La Commission a adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur remplaçant l’expression « fouille à corps intégrale », redondante, par celle de « fouille intégrale », déjà utilisée par l’article 57 de la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009.

55 () Décret abrogé par la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale

56 () L’article 706-88 du code de procédure pénale porte la durée totale maximale de la garde à vue à quatre-vingt-seize heures pour l’ensemble des infractions visées à l’article 706-73. Lorsqu’« il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ou que les nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement », la durée de la garde à vue peut exceptionnellement, depuis la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme, être portée à six jours.

La compétence pour prolonger la garde à vue au-delà de quarante-huit heures appartient soit au juge des libertés et de la détention, soit au juge d’instruction lorsque la garde à vue est exécutée dans le cadre d’une commission rogatoire. La décision du magistrat doit être écrite et motivée.

57 () Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004.

58 () Considérants nos 12 et 13.

59 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvoi n° 5699.

60 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvoi n° 5701.

61 () Voir supra, sous le commentaire de l’article 5.

62 () Depuis la loi du 17 décembre 1814, il n’existe plus de crimes en matière douanière.

63 () La Cour de cassation a jugé en mars 1994 que « si la durée de la retenue douanière est imputable sur celle de la garde à vue, aucune disposition légale n’étend à la première le régime prévu pour la seconde par l’article 63-1 du code de procédure pénale » 

64 () Cass. crim, 24 mai 2000, n° 99-87839, Bull. crim. 2000, n° 201, p. 589

65 () Les 1. et 2. de l’article 323 du code des douanes, également déférés au Conseil constitutionnel mais qui ne concernent pas la retenue douanière - ils donnent compétence aux agents des douanes pour constater les infractions et procéder aux saisies nécessaires, ont déclarés conformes à la Constitution.

66 () « Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires »

67 () Décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, article 132-2. Sauf indication contraire, les montants donnés s’entendent hors taxes.

68 () Comme le souligne l’étude d’impact, « L’avocat prêtant son concours peut être amené à assister plusieurs personnes gardées à vue lors d’une intervention », ce qui explique la différence entre le nombre d’interventions rétribuées et le nombre de personnes assistées.

69 () Les barreaux auront le choix entre deux solutions pour rétribuer les avocats de permanence :

1° ils pourront conserver une rémunération au moyen du forfait de rétribution de base par intervention (61 € hors majoration) complété par une indemnité d’astreinte journalière (hypothèse haute) ;

2° ils pourront mettre en place une rémunération au moyen d’un forfait de permanence se substituant à la rétribution de base (hypothèse basse).

70 () En 2011, compte tenu des délais de la discussion parlementaire et de la rédaction de l’article 18 du projet de loi, qui prévoit que « La présente loi entrera en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication au Journal officiel et au plus tard le 1er juillet 2011 », il est probable que la réforme ne sera applicable qu’à partir du début du second semestre.

71 () Considérant n° 30.

72 () Cour de cassation, chambre criminelle, 19 octobre 2010, pourvoi n° 5700.

73 () La procédure applicable à la coopération judiciaire pénale (art 82 TFUE, 2ème alinéa du 1) est la procédure législative ordinaire de codécision (article 294 TFUE), dans laquelle le Conseil statue à la majorité qualifiée (article 16 TUE, paragraphe 3). Cette majorité qualifiée est, jusqu’en 2014, subordonnée à trois critères cumulatifs (73,9 % des droits de vote, 62 % de la population et majorité des Etats membres). La nouvelle majorité qualifiée est définie par l’article 238 TFUE.