N° 3318 - Rapport de M. Hervé Gaymard sur la proposition de loi , modifiée par le Sénat, en deuxième lecture, relative au prix du livre numérique (n°3264)



N° 3318

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 avril 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE AVEC MODIFICATIONS PAR LE SÉNAT EN DEUXIÈME LECTURE, relative au prix du livre numérique,

PAR M. HervÉ GAYMARD,

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat : 1re lecture : 695 (2009-2010), 50, 51 et T.A. 10 (2010-2011).

2e lecture : 309, 339, 340 et T.A. 89 (2010-2011).

Assemblée nationale : 1re lecture : 2921, 3140 et T.A. 607

2e lecture : 3264

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AVANT-PROPOS DU RAPPORTEUR 5

INTRODUCTION 9

I.- LA POSITION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE 11

II.- LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN DEUXIÈME LECTURE 13

A. QUELQUES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE ONT ÉTÉ ACCEPTÉES PAR LES SÉNATEURS 13

B. DEUX IMPORTANTS POINTS DE DIVERGENCE RESTENT EN DISCUSSION 13

1. Le rétablissement de l’article 5 bis relatif à la rémunération des auteurs de livres numériques 13

2. Le rétablissement de la clause d’extraterritorialité aux articles 2 et 3 de la proposition de loi 14

III.- POUR UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE DANS LES TEXTES EUROPÉENS RÉGISSANT LE SECTEUR DU LIVRE NUMÉRIQUE 15

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 19

II.- EXAMEN DES ARTICLES 27

Article 2 : Fixation du prix de vente par l’éditeur 27

Article 3 : Respect du prix de vente fixé par l’éditeur 33

Article 5 bis : Rémunération des auteurs 35

Article 7 : Comité de suivi et clause de rendez-vous 39

TABLEAU COMPARATIF 43

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 45

AVANT-PROPOS DU RAPPORTEUR

Défendre la diversité culturelle à l’ère numérique

L’irruption du numérique dans l’univers du papier, pose immédiatement plusieurs questions. Comment garantir l’intégrité et la conservation durable des œuvres ? Comment défendre et promouvoir la diversité culturelle ? Comment assurer la rémunération de la création dans un modèle économique en devenir ?

Dans cet océan d’incertitudes, le législateur doit intervenir avec sagacité, afin de poser les principes à valeur universelle qu’il estime devoir protéger, sans se contenter d’une posture déclamatoire, ni entraver un marché en devenir.

C’est dans cet état d’esprit que les députés et sénateurs, en concertation avec le Ministère de la Culture, à l’écoute de tous les acteurs de la chaîne du livre, ont travaillé dans le prolongement du rapport « Pour le Livre » que j’ai remis à Madame la Ministre de la Culture, il y a exactement deux ans, en mars 2009.

Il convenait d’abord que le taux de TVA applicable au livre électronique homothétique soit le même que celui appliqué au livre papier, c’est à dire le taux réduit. Nous avons mené et gagné ce combat, lors de la discussion de la loi de finances pour 2011, avec effet au 1er janvier 2012. Au delà de la question fiscale, c’est la reconnaissance qu’un livre sous forme de fichier numérique est une œuvre de l’esprit, et non une prestation de service. C’est aussi la condition indispensable pour créer une offre légale attractive, car sinon, immanquablement, le piratage risque de se généraliser.

Quand on invoque la « rémunération de la création », c’est bien sûr aux auteurs que l’on pense, car sans eux –on hésite à le rappeler, telle est grande l’évidence-, il n’y aurait pas d’œuvres. A l’ère numérique, la question du mode de fixation de leurs droits est donc posée, car chacun sent bien qu’ils ne peuvent être identiques à ceux applicables au livre papier, dont la chaîne de fabrication est beaucoup plus longue et fait intervenir davantage d’intermédiaires. Pour autant, nous sommes là dans un domaine régi d’abord par une relation contractuelle entre auteurs et éditeurs. Mais il est du rôle du législateur de rappeler quelle est son intention et quel cadre de négociation il entend fixer aux différents protagonistes, et c’est pourquoi je propose l’adoption d’un amendement en ce sens. Cela ne nous dispensera pas, et j’en ai saisi Madame la Présidente de la Commission des Affaires Culturelles et de l’Education, de nous pencher sur cette question dans sa globalité, car, à l’ère numérique, plusieurs aspects du code de la propriété intellectuelle sont sans doute obsolètes. Si nous devons, dans la présente loi, fixer un cadre général, une réflexion plus poussée et concertée avec l’ensemble des acteurs est indispensable avant de procéder à une réforme globale de ce code.

Mais c’est également sur la question de la fixation du prix du fichier numérique, objet initial et unique de la présente proposition de loi, que les débats sont les plus âpres, dans le contexte particulier des descentes policières inouïes des agents de la Commission Européenne, confondant les éditeurs français avec un cartel de la drogue, que je voudrais solennellement dénoncer ici.

Peut-être, dans la confusion des débats qui prévaut depuis quelques semaines, faut-il recourir à Pascal, qui pourrait utilement nous aider avec sa boussole : « Quand tous vont vers le débordement, nul n’y semble aller. Celui qui s’arrête fait remarquer l’emportement des autres, comme un point fixe ».

Tentons donc de nous arrêter un moment.

Sur le fond, tout le monde est d’accord : l’objet de la présente proposition de loi est de permettre aux éditeurs de maîtriser la fixation du prix du fichier numérique, afin d’éviter que les distributeurs numériques ne leur imposent leurs prix, dans une course au moins-disant culturel et à la captation de la marge à leur profit, ce qui tuerait la rémunération de la création.

La présente proposition de loi, pionnière dans le monde, règle donc la question pour l’ordre juridique interne de la République Française.

Mais se pose immédiatement la question de l’extraterritorialité, puisque les plateformes de téléchargement des distributeurs ne connaissent évidemment pas les frontières. Notons à ce stade que cette question n’est pas seulement une question européenne, car s’il y a des plateformes de téléchargement au Luxembourg, on peut tout aussi bien en trouver à Kiev, à Anchorage, ou à Tien-Tsin…

Nos collègues du Sénat ont donc introduit en première lecture, puis rétablit en seconde lecture, une clause d’extraterritorialité qui rend la loi française applicable hors de nos frontières. C’est une innovation juridique intéressante, c’est même une première dans l’histoire du droit, dont il faut saluer la portée historique. Mais je crains qu’elle soit inopérante, car inapplicable. En effet, constatant demain qu’une plate-forme de téléchargement située hors de nos frontières brade des fichiers numériques détenus par des éditeurs français, que va-t-on faire ? Un premier avertissement avant l’escalade ? Puis la riposte graduée ? Une cyberattaque ? Une frappe préventive ? Poser la question est y répondre. Une telle disposition, et je le regrette, est tout simplement inapplicable. Or un parlementaire se doit d’adopter des lois applicables. C’est pourquoi je propose de revenir à la rédaction initiale.

Il est un moyen, qui ne mérite ni excès d’honneur, ni excès d’indignité, qui permet à l’éditeur de faire respecter par ses distributeurs le prix de vente du fichier numérique, c’est le contrat de mandat. Il est utilisé avec succès par de nombreux éditeurs américains, et a permis outre-atlantique de modifier la physionomie du marché du livre numérique. On le dit juridiquement fragile, encore que les opinions varient sur ce sujet. Rappelons que, dans son avis rendu sur le livre numérique le 18 décembre 2009, l’Autorité de la concurrence validait, sous des conditions bien précises, ce dispositif contractuel au regard des règles concurrentielles tant nationales et européennes. Ce contrat de mandat est en tout cas, au moment où nous légiférons, le seul moyen de traiter la question majeure de l’extraterritorialité.

À ce stade, j’entends beaucoup de voix s’élever : « Foin des considérations juridiques, faisons de la politique, et montrons à Bruxelles que notre résolution est intacte en adoptant la clause d’extraterritorialité ! ».

À ceux dont je comprends et partage le combat, car nos objectifs sont les mêmes, je voudrais faire plusieurs remarques.

D’abord que la question de l’extraterritorialité ne concerne pas seulement l’ordre juridique européen, car la dématérialisation ignore toutes les frontières. Il faut donc raisonner globalement. Et la seule question à laquelle il nous faut répondre est la suivante : comment, dans le monde entier, un éditeur peut-il garder la maîtrise du prix de son fichier numérique face aux distributeurs ? C’est à la fois une question de droit, et une question de rapports de force. Je m’étonne d’ailleurs, s’agissant du droit de la concurrence, que l’on s’intéresse beaucoup plus aux éditeurs qu’aux distributeurs numériques, domaine dans lequel la concentration et donc les abus de position dominante me semblent bien plus évidents.

Je voudrais ensuite leur dire qu’il y a un beau combat à mener auprès des institutions européennes, c’est à dire la Commission qui propose, ainsi que le Conseil et le Parlement qui désormais décident ensemble. Il est vrai que la Commission est animée par l’idéologie de la concurrence totale, qui est une interprétation un peu courte, et très dangereuse du monde dans lequel nous vivons. Que pour elle, la culture, la création, ne sont pas à prendre en considération. Je vous le dis, messieurs de la Commission, qui écoutez ou lirez ces débats, nous n’avons rien contre vous, mais nous ne sommes pas d’accord avec vous. Nous pensons que l’idée d’Europe est bien supérieure à cette « concurrence ou la mort » qui vous anime, que vous dénaturez et que vous faites rejeter cet idéal européen par les peuples, qui devrait pourtant les faire vibrer. Il faut donc obtenir par une action conjointe auprès du Parlement Européen, et des Etats-Membres une modification de la directive services (2006/123/CE) et de la directive sur le commerce électronique (2000/31/CE) afin que soit prise en compte la diversité culturelle telle qu’elle est mentionnée à l’article 167 du Traité.

C’est pourquoi, je proposerai, dans le cadre de la Commission des Affaires Européennes de notre Assemblée, l’adoption d’une résolution pour bien marquer notre volonté politique.

Je voudrais enfin souligner que l’adoption de cette inapplicable clause d’extraterritorialité fragiliserait l’ensemble du texte dans le cadre d’une procédure devant la Cour de Justice de l’Union européenne. Et donc le dispositif initial du texte applicable dans l’ordre juridique interne. J’entends bien que la procédure peut être longue, qu’entretemps des gages seraient pris pour que les éditeurs se renforcent dans un marché en décollage, qu’il faut un rempart même temporaire, même fragile juridiquement avant une offensive dont on ne sait quelle elle sera… Je pourrai allonger la liste des justifications, tant elles font florès. Je les comprends, elles m’attendrissent, mais elles me semblent davantage refléter le désarroi qu’une vision stratégique claire.

L’illusion lyrique fait chaud au cœur et à l’âme. Et dans nos tristes sociétés normées et conformistes, il faut encore vibrer. Mais il ne faut pas se payer de mots. Car c’est respecter les idées que l’on croit justes, et ceux que l’on défend, que d’adopter des lois applicables. C’est la raison pour laquelle, à ce stade, je propose de revenir à une rédaction proche de la rédaction initiale de cette proposition de loi, fruit d’un immense travail de concertation.

Ce qui importe avant tout est de voter une disposition applicable. C’est pourquoi j’ai proposé un amendement, adopté en commission, qui satisfait aux attentes légitimes exprimées dans le cadre du débat sur l’extraterritorialité. Il dispose que le prix d’un livre numérique vendu par contrat à un distributeur établi hors du territoire national ne peut être inférieur au prix déterminé par l’éditeur pour le territoire national.

Il faut parallèlement engager auprès des instances décisionnaires de l’Union Européenne un beau combat politique, qui n’est pas celui de la France contre Bruxelles, mais celui de tous les créateurs européens, de leur vitalité et de leur diversité.

Hervé GAYMARD

INTRODUCTION

Fruit d’une initiative commune, la présente proposition de loi a été déposée dans les mêmes termes à l’Assemblée nationale, par le rapporteur et plusieurs de ses collègues, et au Sénat, par M. Jacques Legendre, président de la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication, et par Mme Catherine Dumas. La proposition de loi a été examinée et adoptée avec modifications en première lecture au Sénat le 26 octobre 2010. Puis l’Assemblée l’a adoptée le 15 février dernier. Le Sénat l’a à nouveau examinée, en deuxième lecture, le 29 mars dernier.

Cette proposition de loi tend à fixer un cadre souple de régulation du prix du livre numérique, à mi-chemin entre l’organisation purement contractuelle du marché et l’encadrement législatif trop strict d’un marché naissant. Sur ce point, les deux chambres du Parlement sont d’un même avis.

Mais les positions de l’Assemblée nationale et du Sénat divergent encore sensiblement sur deux points majeurs – la « clause d’extraterritorialité » et les droits numériques des auteurs. C’est un texte profondément remanié sur ces deux points qui est soumis à notre Assemblée en deuxième lecture.

S’agissant de la clause d’extraterritorialité, le rapporteur estime toujours que la position des sénateurs, si elle est politiquement compréhensible, reste juridiquement et pratiquement indéfendable. En effet, cette extension des dispositions de la proposition de loi à l’ensemble des détaillants et distributeurs, qu’ils soient établis en France ou à l’étranger, risque de remettre en cause le principe même de la proposition de loi.

D’un point de vue juridique, ce dispositif n’est compatible ni avec le droit communautaire, ni avec le droit national. Rappelons que l’article 17 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique qui transpose en droit français la directive de 2000 sur le commerce électronique dispose que les activités de commerce électronique sont soumises à la loi de l’État membre sur le territoire duquel la personne qui l’exerce est établie. Par ailleurs, dans quel autre secteur d’activité la France fixe-t-elle des règles juridiques qui s’appliquent à des opérateurs situés hors de ses frontières, et notamment à des opérateurs hors Union européenne ?

Enfin, d’un point de vue pratique, la clause n’irait pas sans poser des problèmes. Comment, en effet, contrôler le respect des dispositions de la loi par des opérateurs établis à l’étranger, notamment encore une fois dans des pays hors Union européenne ?

S’agissant de la question des droits des auteurs à l’heure du numérique, même si le rapporteur continue de penser qu’il convient de laisser toutes ses chances à la négociation interprofessionnelle, il reconnaît que les négociations engagées en octobre 2010 entre le conseil permanent des écrivains (CPE) et le syndicat national de l’édition (SNE) sont depuis peu au point mort et qu’il conviendrait peut-être que le législateur fixe un cadre général à même de faciliter leur reprise. Ces négociations, qui ont malgré tout ont permis de dégager plusieurs points de consensus, doivent être confortées par un cadre législatif adéquat.

I.- LA POSITION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE
EN PREMIÈRE LECTURE

En première lecture, à l’initiative du rapporteur, l’Assemblée nationale avait apporté un certain nombre de modifications au texte qui avait été adopté par le Sénat.

Pour les raisons invoquées précédemment, la « clause d’extraterritorialité » avait été supprimée : seules les personnes établies en France étaient donc assujetties à l’obligation de fixer un prix de vente pour l’ensemble des livres numériques qu’elles éditent (article 2) ; par ailleurs, ce prix s’imposait aux personnes établies en France qui proposent des offres de livres numériques aux acheteurs situés dans notre pays (article 3).

À l’article 2, une exception, strictement définie, au principe de la fixation du prix de vente par l’éditeur avait été prévue au profit des éditions techniques et scientifiques, c’est-à-dire des livres numériques intégrés dans des offres associant à ces produits des contenus d’une autre nature et proposées sous la forme de licences d’utilisation destinées à un usage collectif et dans un but de recherche et d’enseignement.

L’Assemblée nationale avait par ailleurs supprimé l’article 5 bis prévoyant que la rémunération de l’auteur au titre de l’exploitation numérique d’une œuvre est fixée en tenant compte de l’économie générée, pour l’éditeur, par le recours à l’édition numérique, au motif notamment de son caractère inopérant.

Elle avait enrichi la rédaction de l’article 7 relatif à l’évaluation de la mise en œuvre de la loi pour prévoir la création d’un comité de suivi composé de quatre parlementaires et préciser que le rapport annuel d’application transmis au Parlement vérifie si le prix fixe du livre numérique permet une rémunération de la création et des auteurs compatible avec l’objectif de diversité culturelle.

Enfin, sur proposition conjointe du rapporteur et du groupe SRC, elle avait adopté un article additionnel (article 9) visant à permettre la poursuite dans les meilleures conditions de la construction de la Fondation Louis-Vuitton pour l’art contemporain dans l’enceinte du Jardin d’acclimatation à Paris.

II.- LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN DEUXIÈME LECTURE

La Commission de la culture du Sénat a examiné la proposition de loi en deuxième lecture le 9 mars dernier. En séance publique, le 29 mars, le texte adopté par la Commission n’a subi aucune modification. S’ils ont accepté quelques modifications introduites à l’Assemblée nationale, les sénateurs sont revenus sur deux points majeurs du texte tel qu’il avait été adopté par l’Assemblée nationale le 15 février dernier.

L’exception introduite à l’article 2 à l’égard des éditeurs scientifiques a été approuvée par la rapporteure du Sénat et cette disposition a été adoptée conforme. Les sénateurs ont également approuvé la création du comité de suivi parlementaire à l’article 7.

Enfin, à l’article 9, les sénateurs ont indiqué partager la préoccupation et la position de l’Assemblée nationale s’agissant de la validation du permis de construire de la Fondation Louis-Vuitton dans le Jardin d’Acclimation, tout en exprimant le souhait que ce type de démarche conserve un caractère exceptionnel.

Estimant que ces dispositions relevaient du niveau contractuel et que, telles que rédigées, elles étaient par ailleurs inapplicables, l’Assemblée nationale avait supprimé l’article 5 bis (1). À l’unanimité, la Commission de la culture du Sénat a souhaité rétablir cet article dans la rédaction adoptée par le Sénat en première lecture, « afin de garantir aux auteurs d'œuvres de l'esprit le bénéfice d'une rémunération juste et équitable lors de la commercialisation de leurs livres sur support numérique, leurs négociations contractuelles avec les éditeurs devant s'inscrire dans ce cadre ».

Le rapporteur proposera sur ce point un cadre alternatif et plus opérationnel que celui proposé par les sénateurs.

Pour des raisons de sécurité juridique, suite aux avis circonstanciés de la Commission européenne sur la proposition de loi, l’Assemblée nationale avait estimé que les dispositions de la proposition de loi ne devaient s’appliquer qu’aux seuls éditeurs (article 2) et détaillants (article 3) établis en France.

À l’unanimité, la Commission de la culture du Sénat a préféré revenir à la rédaction qu’elle avait adoptée en première lecture, à savoir l’application des dispositions à l’ensemble des éditeurs et détaillants, qu’ils soient établis en France ou non, à partir du moment où l’acheteur est situé en France.

Les sénateurs estiment que, si la Commission européenne a émis de fortes réserves, elle n’a pas « fermé la porte » puisqu’elle a posé au Gouvernement français une série de questions qui nécessitent des « réponses très argumentées afin de lever ces réserves ». Selon les sénateurs, le Gouvernement doit donc faire preuve d’un volontarisme politique fort, le combat étant moins juridique que politique. Il s’agirait de « sensibiliser les États membres et les institutions de l’Union européenne à la nécessité de mieux prendre en compte » la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’UNESCO en révisant à cette fin les directives invoquées dans les avis de la Commission.

Comme les sénateurs, le rapporteur estime fondamental que les directives touchant le secteur du livre numérique soient rapidement révisées pour mieux prendre en compte la « double nature, économique et culturelle » du secteur du livre, selon les termes de la Convention de l’UNESCO. Mais l’adoption d’un texte contraire aux normes européennes actuelles ne fera pas, selon lui, avancer le débat. Il serait même politiquement malhonnête de voter une loi inapplicable, risquant d’être invalidée par les instances européennes, ce qui créerait un vide juridique dangereux.

Il convient à l’inverse de « légiférer en tremblant », en excluant la clause d’extraterritorialité, tout en continuant à plaider, fermement, en ce sens auprès des instances européennes, et à s’appuyer sur le travail déjà conséquent réalisé par le Parlement européen sur ces sujets, pour faire avancer le point de vue de la France et de ses partenaires les plus impliqués, notamment l’Allemagne et l’Autriche.

III.- POUR UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA DIVERSITÉ CULTURELLE DANS LES TEXTES EUROPÉENS RÉGISSANT LE SECTEUR DU LIVRE NUMÉRIQUE

Rappelons qu’en droit, la vente de livres numériques sur internet relève de la prestation de services effectuée par la voie électronique et non de la vente d’une marchandise en tant que telle, contrairement à la vente de livres papier. La proposition de loi visant à établir une régulation de cette activité, il est donc nécessaire de s’assurer de la compatibilité d’un tel système avec le droit communautaire. En effet, toutes les mesures « qui interdisent, entravent ou rendent moins attrayant » l’exercice de la liberté d’établissement et de la liberté de prestation de services doivent être considérées comme constituant des restrictions aux articles 49 et 56 du Traité régissant le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (2).

La Commission européenne est donc dans son rôle en cherchant à vérifier la compatibilité du dispositif de la proposition de loi avec le Traité et avec deux directives relatives à certaines règles de fonctionnement du marché intérieur :

– la directive n° 2006/123/CE sur les services dans le marché intérieur (dite « directive services ») dont l’objectif est de supprimer les obstacles à la liberté d’établissement des prestataires de services et à la libre circulation des services entre les États membres ;

– la directive n° 2000/31/CE relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (dite « directive sur le commerce électronique ») dont l’objectif est d’assurer la libre circulation des services de l’information entre les États membres.

Le seul fondement juridique qui puisse justifier une restriction à la libre prestation de services au nom de la diversité culturelle est celui de l’article 167 du Traité qui dispose que « l’Union contribue à l’épanouissement des cultures des États membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale, tout en mettant en évidence l’héritage culturel commun. (…) L’Union tient compte des aspects culturels dans son action au titre d’autres dispositions des traités, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité de ses cultures ».

De même, les deux directives précitées prévoient que leurs dispositions ne portent pas atteinte « aux mesures prises au niveau communautaire ou au niveau national, dans le respect du droit communautaire, pour promouvoir la diversité culturelle et linguistique » (point 4 de l’article 1er de la directive de 2006 et point 6 de l’article 1er de la directive de 2000).

Le considérant 63 de la directive de 2000 dispose par ailleurs que « l’adoption de la présente directive ne saurait empêcher les États membres de prendre en compte les différentes implications sociales, sociétales et culturelles inhérentes à l’avènement de la société de l’information. En particulier, elle ne devrait pas porter atteinte aux mesures destinées à atteindre des objectifs sociaux, culturels et démocratiques que les États membres pourraient adopter, conformément au droit communautaire, en tenant compte de leur diversité linguistique, des spécificités nationales et régionales ainsi que de leurs patrimoines culturels, et à assurer et à maintenir l’accès du public à un éventail le plus large possible de services de la société de l’information. Le développement de la société de l’information doit assurer, en tout état de cause, l’accès des citoyens de la Communauté au patrimoine culturel européen fourni dans un environnement numérique ».

Il s’agit donc de dispositions relativement vagues, peu contraignantes, voire « bavardes ». Que doit-on en effet par exemple précisément entendre par le fait que « l’Union tient compte des aspects culturels dans son action au titre d’autres dispositions des traités » ?

Par ailleurs, on peut relever une contradiction dans les dispositions prévues par les deux directives : le respect du droit communautaire étant mis au même niveau que la promotion de la diversité culturelle, la Commission et, en cas de litiges, les tribunaux européens restent seuls juges de l’adéquation des mesures prises au niveau national dans un objectif de diversité culturelle et de leur proportionnalité par rapport à la réalisation de cet objectif.

La Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion
de la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005

(entrée en vigueur le 18 mars 2007)

La France a adhéré à la Convention le 18 décembre 2006.

Par décision du 18 mai 2006 (2006/515/CE), le Conseil européen a également adhéré à cette convention au nom de la Communauté. Les textes européens doivent donc respecter ses principes.

La Convention dispose que « les activités, biens et services culturels ont une double nature, économique et culturelle, parce qu’ils sont porteurs d’identités, de valeurs et de sens et qu’ils ne doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale ».

Par ailleurs, l’article 6 (droits des parties au niveau national) de la Convention dispose que « dans le cadre de ses politiques et mesures culturelles (…) chaque Partie peut adopter des mesures destinées à protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles sur son territoire. Ces mesures peuvent inclure [des] mesures réglementaires qui visent à protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles ; (…) [des] mesures qui visent à fournir aux industries culturelles nationales indépendantes et aux activités du secteur informel un accès véritable aux moyens de production, de diffusion et de distribution d’activités, biens et services culturels ».

Un premier pas a été franchi par la directive services de 2006 puisque, contrairement à la directive sur le commerce électronique de 2000 qui ne le prévoit pas, son article 4 liste au rang des « raisons impérieuses d’intérêt général » susceptibles de restreindre l’exercice des libertés fondamentales reconnues par l’Union (notamment libre prestation de services et liberté d’établissement), « l’ordre public, la sécurité publique, la santé publique, (…) la propriété intellectuelle, la conservation du patrimoine national historique et artistique, des objectifs de politique sociale et des objectifs de politique culturelle ».

Il conviendrait donc d’affirmer de manière plus claire et plus précise dans les textes européens concernés, et notamment dans le Traité et les deux directives précitées, la prééminence de la promotion de la diversité culturelle sur les règles de fonctionnement du marché intérieur, dans certains secteurs culturels précisément listés (livre, cinéma, presse, spectacle vivant…), sur le modèle de ce qui existe pour la télévision.

En effet, les services de médias audiovisuels (SMA) – publics et privés –, qui sont régis par la directive n° 2007/65/CE du 11 décembre 2007 (3), bénéficient d’un régime bien plus protecteur que le secteur du livre en termes de préservation de la diversité culturelle.

La directive affirme ainsi, dans son considérant 4, que l’article 167 du traité « impose à la Communauté de tenir compte des aspects culturels dans son action au titre d’autres dispositions du traité, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité de ses cultures ». Elle reprend par ailleurs explicitement les termes de la Convention de l’UNESCO sur la double nature des biens culturels (Cf. encadré ci-dessus) et affirme que les services de médias audiovisuels ne « doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale » (considérant 5).

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine la présente proposition de loi en deuxième lecture au cours de sa séance du mercredi 6 avril 2011.

M. Hervé Gaymard, rapporteur. Le Sénat a rétabli un certain nombre de dispositions qu’il avait adoptées en première lecture et que nous avions modifiées. Deux sujets principaux restent à traiter : la rémunération des auteurs et l’extra-territorialité.

Sans rémunération, il n’y a pas de création. La vente de livres numériques, grâce à la disparition de certains coûts de fabrication et d’intermédiaires de la chaîne du livre, dégage des marges plus fortes que le livre papier. Elles doivent bénéficier aux auteurs. Mais il n’est pas question de modifier le code de la propriété intellectuelle au détour de cette proposition de loi. J’ai proposé à notre présidente d’ouvrir très vite une réflexion sur le droit d’auteur à l’ère numérique, la loi de 1957 étant inadaptée. Le commissaire européen en charge de ces questions, Michel Barnier, y réfléchit de son côté. Bref, le droit d’auteur en matière numérique sera un sujet d’ampleur à traiter dans les mois qui viennent. Dans le cadre du présent texte, je vous proposerai un amendement affirmant clairement que les auteurs doivent bénéficier des économies générées par le raccourcissement de la chaîne du livre.

J’en viens à l’extra-territorialité. La proposition tend à garantir que le prix du livre numérique est fixé par l’éditeur, afin d’éviter que les distributeurs numériques, qui n’ont pas le souci du mieux-disant culturel et de la rémunération de la création, ne se lancent dans une course à la baisse des prix des fichiers. Il est capital que l’éditeur garde la maîtrise de la fixation du prix, comme c’est le cas pour le livre papier. D’autres pays européens ont réfléchi à la question. L’Allemagne n’a pas légiféré explicitement, mais l’équivalent de notre loi sur le prix du livre y est applicable au livre numérique, par interprétation. Quant à l’Espagne, elle a conduit une démarche législative similaire à la nôtre.

Cette proposition de loi s’appliquera sans ambiguïté dès sa promulgation dans notre ordre juridique interne, mais le numérique ne connaît pas de frontières : rien n’empêche qu’un fichier soit téléchargé en France venant d’ailleurs, et donc peut-être à un prix différent – je ne parle que de l’offre légale, pas du piratage. La solution recommandée par de nombreux rapports, à commencer par celui de M. Patino, c’est le contrat de mandat, qui permet à un éditeur de garder hors de nos frontières la maîtrise du prix de vente de son livre numérique.

Deux objections ont été néanmoins soulevées à cet égard. La première est que le contrat de mandat est attaqué en justice dans plusieurs pays par de grands distributeurs numériques, et qu’on ne sait pas ce qui va en résulter. Les juristes sont partagés à son sujet. Pour autant, depuis deux ans, aux États-Unis, six éditeurs l’utilisent avec succès dans leurs relations avec les distributeurs numériques : ils ne sont plus obligés de brader leurs fichiers numériques. Du coup, certains distributeurs numériques ont vu leur part de marché réduite de moitié. Peut-être le contrat de mandat sera-t-il fragilisé dans certains États au gré de la jurisprudence, mais pour l’instant, montrons-nous pragmatiques : cette solution peut être retenue.

La deuxième crainte, c’est que même si le contrat de mandat fonctionne bien, la concentration des distributeurs numériques est telle, leur position si dominante, que les éditeurs ne seraient pas de taille à leur résister : la corde au cou, ils seraient obligés de vendre leurs fichiers numériques à vil prix. Pour ma part, je ne vois pas pourquoi un éditeur français vendrait son fichier par contrat de mandat moins cher que ce qu’il avait décidé au départ : avec les comparateurs de prix sur internet, c’est le prix le moins élevé qui deviendrait la référence, et cela reviendrait à scier la branche sur laquelle il est assis.

Mais l’objection n’est tout de même pas mince : il reste possible, dans notre économie concurrentielle, que les éditeurs soient obligés de céder face à des distributeurs quasi monopolistiques. Pour y répondre, les sénateurs ont voté une « clause d’extraterritorialité ». J’en partage l’inspiration, mais je pense qu’elle n’est pas applicable telle quelle. Le législateur français ne peut régler l’ordre juridique hors du territoire national.

L’argument des tenants de cette clause, c’est qu’ils ne font pas du droit, mais de la politique et qu’il faut montrer à Bruxelles « de quel bois on se chauffe ». Il est vrai que nous devons mener, tant à la Commission qu’au Conseil et au Parlement européen, une action vigoureuse pour défendre la diversité culturelle. Il faut notamment que la directive sur les services et la directive sur le commerce électronique intègrent la diversité culturelle comme c’est déjà le cas du traité régissant l’Union européenne.

Cela sera un beau combat, auquel doivent s’associer les membres de nos deux assemblées. Avec Michel Lefait, membre comme moi de la commission des affaires européennes, nous allons déposer une proposition de résolution sur ces sujets. Mais pour l’heure, la solution de nos collègues sénateurs n’est pas viable. Je proposerai plutôt, par l’amendement n° 19 AC, qu’un éditeur ne puisse, dans un contrat de mandat, vendre son fichier à un prix inférieur à celui qu’il a fixé sur le territoire national. Cela règle toutes les situations, que la plate-forme de téléchargement soit située en France – c’est la loi française qui s’applique, avec le prix fixé par l’éditeur – ou à l’étranger – en Europe et partout ailleurs dans le monde.

Il me semble que cette solution est à même de répondre à l’objection pertinente des partisans de l’extraterritorialité. Sur un sujet de cette importance politique, au meilleur sens du terme, notre devoir est de légiférer le mieux possible. Et pour cela, il faut une loi applicable.

M. Jacques Grosperrin. Merci au rapporteur pour ses propos rassurants sur le contrat de mandat. Il n’est pas possible de remodeler aujourd’hui la législation sur la propriété intellectuelle, mais il faut effectivement entamer la réflexion sur le droit d’auteur à l’ère numérique. En attendant, cette proposition de loi est fondamentale. Elle accompagne une mutation technologique qui ouvre de nouvelles opportunités aux professionnels, qui permet la mise à disposition légale d’un maximum d’œuvres et qui l’encadre dans le respect de notre patrimoine et du droit d’auteur. Elle permet également de préserver la diversité de la création littéraire et l’aménagement culturel de notre territoire, au travers des librairies.

Après la deuxième lecture au Sénat, le 29 mars, deux points demeurent en discussion. S’agissant du champ d’application de la loi, nous souhaitons en revenir aux seuls éditeurs établis en France, pour des raisons de compatibilité avec le droit communautaire. Ce sera la même logique que pour la loi Lang du 10 août 1981, relative au prix du livre – dont l’application extraterritoriale avait d’ailleurs été sanctionnée par le juge européen en 1985, dans l’arrêt Leclerc. Par ailleurs, les dispositions législatives des Allemands et des Espagnols ne comprennent aucune clause extraterritoriale.

Quant au second point, nous souhaitons que le contrat d’édition prévoie une rémunération juste et équitable des auteurs, établie de façon transparente.

Ainsi que l’a bien dit le rapporteur, légiférer le mieux possible, c’est adopter des lois applicables. C’est ce que le groupe UMP entend faire ce matin.

M. Marcel Rogemont. Les propos du rapporteur traduisent une avancée de sa réflexion. C’est la preuve que le travail parlementaire, lorsqu’il se fait normalement, est utile à la nation. L’élaboration de la loi demande du temps et de la précision.

Doit-on ou non modifier, à l’occasion de ce texte, le code de la propriété intellectuelle ? On ne peut pas ne pas se poser cette question. Un seul exemple : le droit d’auteur est protégé pendant 50 ans au Canada, contre 70 ans chez nous. Les livres de Camus sont donc aujourd’hui diffusés au Canada, et accessibles ainsi aux Français, sans droits d’auteur, au détriment de Gallimard… Cela montre bien que la question du droit d’auteur est au centre du débat sur les biens culturels numériques. Il faut être aux aguets et modifier le code dès que la réflexion est suffisamment avancée.

S’agissant de la rémunération des auteurs, les choses évoluent dans le bon sens. Comme en première lecture, nous veillerons à ce que l’on prévoie de leur verser une rémunération juste et équitable dans le cadre de l’exploitation numérique de leurs œuvres.

Quant à l’extraterritorialité, je pense que l’on peut revendiquer la singularité, ou l’exception culturelle – peu importe le terme – non seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour les autres. Souvent, dans ce domaine, la France a agi et l’Europe a suivi. Nous avons la responsabilité morale de faire en sorte que l’Union européenne soit en permanence interpellée sur ces questions. Le groupe SRC avait été particulièrement attentif en première lecture ; sortir du cadre juridique strict obligerait l’Union européenne à nous interpeller et lancerait un débat utile.

Par conséquent, le groupe SRC aura à cœur de défendre ses amendements et sera attentif aux évolutions introduites par le rapporteur et par les autres commissaires.

Mme Marie-Hélène Amiable. Lorsqu’il avait été présenté en première lecture, nous avions salué ce texte qui vise à réguler le secteur en plein essor du livre numérique, dans la continuité de la loi de 1981.

Les divergences sont désormais au sein de la majorité : après que le Sénat a rétabli le texte dans sa rédaction de première lecture, on nous propose aujourd’hui des amendements visant à détricoter ce qu’ont fait, à l’unanimité, nos collègues sénateurs.

S’agissant de l’extraterritorialité, le ministre de la culture a pourtant clairement validé la position des sénateurs, en déclarant qu’il était normal que les éditeurs puissent contrôler la valeur du livre, quel que soit le lieu d’implantation du diffuseur. Il faut que la compétition se joue à armes égales, a-t-il ajouté : il serait paradoxal que certaines plates-formes échappent à la régulation. Dans ses avis rendus le 13 décembre 2010 et le 31 janvier 2011, la Commission européenne a d’ailleurs indiqué qu’elle pourrait envisager la possibilité, sous certaines conditions, de considérer la protection de la créativité et de la diversité culturelle comme un « impératif d’intérêt général ». Nous pensons donc qu’il faut maintenir cette clause d’extraterritorialité qui permettra d’empêcher les géants commerciaux de s’emparer du livre numérique dans le seul but de dégager des profits, et acter que seront assujettis à l’obligation de fixer un prix de vente non seulement les éditeurs établis en France, mais aussi Amazon, Apple et Google.

Nous serons, par ailleurs, attentifs à la dimension protectrice de ce texte, tant à l’égard des auteurs que des éditeurs et des diffuseurs du livre numérique.

Enfin, nous soutiendrons les dispositions que les sénateurs ont adoptées en faveur d’une rémunération juste et équitable des auteurs.

M. le rapporteur. Je crois que nous partageons tous les mêmes objectifs. Toutefois, le texte tel qu’il nous est revenu du Sénat ne sera pas applicable, tout simplement parce qu’on ne peut légiférer que pour l’ordre juridique interne ! On peut se payer de mots, mais une clause générale d’extraterritorialité ne fonctionnera pas.

Afin de parvenir au résultat souhaité, il vaut mieux prévoir que l’éditeur français, détenteur des fichiers, ne pourra pas les vendre à des prix différents à un distributeur établi en France – à qui la loi sera applicable – et à un distributeur établi à l’étranger, avec lequel il aurait signé un contrat. C’est une solution juridique que je n’ai trouvée que très récemment, à l’issue de longs échanges avec les uns et les autres ; elle peut paraître prosaïque, mais je pense qu’elle fonctionnera – et c’est tout ce qui m’importe.

Nous travaillons sur un sujet neuf, complexe et en rapide mutation. Nous avions d’ailleurs décidé d’adopter une démarche minimaliste et de fixer un rendez-vous législatif périodique. N’ayons pas la présomption de penser que cette proposition de loi réglera tous les problèmes ! Nous légiférons, à un moment donné, sur une situation donnée.

Par ailleurs, je partage ce qui a été dit sur les risques d’une concentration excessive dans la distribution de contenus culturels numériques. Il serait bon, pour la diversité culturelle et la rémunération de la création, que la Commission européenne fasse preuve de la même vigilance, en matière d’abus de position dominante et de droit de la concurrence, dans ce secteur économique que dans les autres. On ne l’a pas beaucoup entendue jusqu’à présent, alors qu’un acteur de ce secteur possède 85 % de parts de marché, ce qui devrait sembler plutôt suspect !

M. Patrick Bloche. Monsieur le rapporteur, le droit n’est pas une science exacte, mais le produit d’un rapport de forces ! L’enjeu de ce texte est de savoir si la France souhaite ou non titiller la Commission européenne en introduisant une clause d’extraterritorialité pour la fixation du prix du livre numérique. Tel était le sens de notre interpellation du ministre lors de l’examen en première lecture.

Par ailleurs, on n’a pas assez fait la distinction entre l’article 2 et l’article 3, et l’on a tendance à se prononcer globalement, qui en faveur de l’extraterritorialité, qui en faveur de la compatibilité avec le droit européen. Ne pourrions-nous pas donner raison au Sénat sur l’article 3, c’est-à-dire introduire une clause d’extraterritorialité pour les plates-formes de distribution de livres à destination des acheteurs français, et ne pas le suivre sur l’article 2, car cela risquerait de pénaliser les éditeurs étrangers – y compris ceux qui publient en édition originale –, ce qui n’est pas notre objectif ?

Lorsque nous examinions le texte en première lecture, des négociations avaient lieu entre le Conseil permanent des écrivains (CPE) et le Syndicat national de l’édition (SNE). Elles ont échoué. Je pense qu’aujourd’hui, plus que jamais, il revient au législateur de mettre en place un cadre incitant à la négociation et de garantir une juste rémunération des auteurs – que ce texte ne doit pas oublier.

M. Lionel Tardy. Je me réjouis du parallèle établi par le rapporteur entre droit, politique et applicabilité des textes : on aimerait entendre plus souvent de tels propos, en particulier dans le domaine de la culture, où l’on a tendance à faire de la politique sans toujours tenir compte du droit !

Je déplore que nos délais soient si serrés, puisque le texte doit être examiné demain après-midi en séance plénière, une semaine seulement après son adoption par le Sénat, alors qu’il existe un désaccord entre les deux assemblées sur plusieurs points, dont l’extraterritorialité.

Je m’étonne également de la manière dont le dossier est conduit par le ministère de la culture, qui soutient une position à l’Assemblée nationale puis son contraire au Sénat, sans que l’on comprenne les raisons de son revirement…

Il faut toujours faire attention quand on légifère sur l’économie numérique : on ne peut pas faire un texte franco-français parce qu’internet ignore les frontières ; en outre, on a connu, depuis 1981, un très fort développement du droit européen, qui nous contraint énormément, notamment sur ces questions d’extraterritorialité.

Enfin, ce texte me laisse une impression désagréable. Il a été souhaité par un secteur économique qui, dans le même temps, semble vouloir verrouiller le marché. Si la Commission européenne a ordonné des perquisitions spectaculaires, ce n’est sans doute pas sans de solides raisons. Peut-être ne connaissons-nous pas tous les tenants et les aboutissants de cette affaire.

Mme Monique Boulestin. Je me félicite des avancées observées entre la première et la seconde lecture.

Nous souhaitons qu’une rémunération juste et équitable soit garantie aux auteurs. Il convient à la fois de respecter la chaîne du livre et d’anticiper le devenir du livre numérique, car il ne faudrait pas se limiter au livre homothétique.

Je veux également insister sur la clause d’extraterritorialité, car nous ne pouvons demeurer en deçà des préconisations du ministre de la culture. De surcroît, notre rôle est de faire des propositions et de parvenir, grâce à nos amendements, à un consensus.

Mme Colette Langlade. La rémunération reste une question délicate : le contrat de mandat risque d’être juridiquement fragile et de susciter de la méfiance, car il provoquera une forte concentration des distributeurs numériques. Dans ces conditions, l’éditeur parviendra-t-il à conserver la maîtrise du prix du livre numérique ?

M. le rapporteur. Monsieur Bloche, en bon bismarckien, vous estimez que la force précède le droit, mais il nous appartient aussi d’adopter des lois qui puissent être appliquées !

Je suis d’accord avec vous : il convient de distinguer l’article 2 et l’article 3 ; la question de l’extraterritorialité ne se pose en réalité que pour ce dernier.

Quant aux négociations entre le SNE et le CPE, elles n’ont pas échoué, elles sont simplement interrompues ; il serait utile que le législateur donne un signal clair.

Monsieur Tardy, les perquisitions des inspecteurs européens se sont déroulées dans des conditions ahurissantes : on aurait cru avoir affaire à un cartel de la drogue ! D’ailleurs, la Commission, comprenant sans doute qu’elle avait eu la main un peu lourde, a rappelé dans son communiqué de presse du 2 mars que le fait de conduire de telles inspections ne signifie pas qu’elle dispose de preuves conclusives d’un comportement anticoncurrentiel et ne préjuge en rien de l’issue de l’enquête elle-même. Une certaine retenue s’impose à propos de cette affaire désastreuse.

Vous avez raison, madame Boulestin, il faudra un jour examiner les autres formes de création numérique ; mais, dans le cadre de ce texte, il n’est question que du livre homothétique.

Madame Amiable, l’amendement que je propose répond parfaitement aux préoccupations du ministre, puisqu’il vise à éviter que le livre numérique soit vendu à des distributeurs implantés à l’étranger à un prix inférieur à celui pratiqué en France.

Madame Langlade, l’objectif de la présente proposition de loi – qui, je le rappelle, a été élaborée dans un climat de consensus – est précisément que la maîtrise du prix du fichier numérique reste à l’éditeur, soit en vertu de la loi, dans le cadre national, soit par l’intermédiaire du contrat de mandat, dont mon amendement précisera qu’il ne pourra pas fixer un prix différent du prix de référence.

Avant de passer à l’examen des articles, je voudrais faire deux remarques supplémentaires.

D’abord, le problème des plates-formes de téléchargement ne concerne pas que la France et l’Europe. Quand bien même on réglerait la question au niveau européen, cela ne concernerait pas les plates-formes implantées sur d’autres continents. De ce point de vue, mon amendement a l’avantage de traiter le sujet à la source.

Ensuite, il faut porter le débat sur la diversité culturelle à l’ère numérique au plan européen. Tel est le sens de la proposition de résolution que Michel Lefait, membre du groupe SRC, et moi-même allons déposer dans le cadre de la Commission des affaires européennes. Il serait bon qu’elle soit adoptée solennellement dans l’hémicycle avant l’été, afin de marquer la volonté politique unanime de l’Assemblée nationale sur le sujet.

Mais il faut aussi porter le débat au plan mondial – c’est un sujet quasiment onusien. Il est frappant que nous ayons tant de mal à encadrer l’essor du numérique alors qu’à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, nos prédécesseurs avaient réussi à mettre en place des organisations internationales pour réguler le développement des télécommunications.

Une bonne nouvelle vient de nous parvenir des États-Unis. Les éditeurs et auteurs américains avaient intenté un procès contre Google et ses numérisations sauvages, mais au bout de quelques mois, ils avaient dû, en raison du montant des frais d’avocats, renoncer à leurs poursuites et accepter une transaction. Or, le procureur américain a bloqué cette transaction et la procédure a été gelée plusieurs mois. Et le juge Chin, chargé de l’affaire au fond, vient de donner tort à Google.

La justice américaine vient donc de faire un pas important pour le respect du droit d’auteur. On peut espérer qu’elle sera aussi vigilante sur les abus de position dominante. Le combat mondial n’est donc pas perdu – mais il ne faut pas avoir d’états d’âme et savoir utiliser tous les outils à notre disposition.

M. Christian Kert, président. Nous passons maintenant à l’examen des articles.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 2

Fixation du prix de vente par l’éditeur

L’article 2 de la proposition de loi pose le principe de la fixation du prix de vente des livres numériques par l’éditeur. Hormis le premier alinéa, les autres alinéas de cet article ont été adoptés sans modification par les sénateurs.

Dans sa rédaction initiale, le premier alinéa de l’article 2 prévoyait que seuls les éditeurs établis en France étaient assujettis à cette obligation. Ce principe d’établissement en France visait à restreindre le champ d’application de la loi au territoire national dans le respect du droit communautaire. À l’inverse, dans la rédaction initiale de la proposition de loi, était visé l’ensemble de la diffusion commerciale de l’éditeur, et non pas uniquement les livres numériques diffusés en France.

Puis, en première lecture, à l’unanimité, le Gouvernement s’en remettant à la sagesse du Sénat, celui-ci avait choisi d’étendre ces dispositions à toute personne, même non établie en France, à partir du moment où l’acheteur était situé en France, créant de ce fait une « clause d’extraterritorialité ».

Afin de s’assurer de la compatibilité d’un tel système avec le droit communautaire et plus particulièrement avec deux directives relatives à certaines règles pour le fonctionnement du marché intérieur, la directive n° 2006/123/CE sur les services dans le marché intérieur (dite « directive services ») et la directive n° 2000/31/CE relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (dite « directive sur le commerce électronique ») et conformément à la procédure de notification régie par la directive 98/34/CE, les autorités françaises ont notifié à la Commission européenne le 13 septembre 2010, la proposition de loi relative au prix du livre numérique, dans sa rédaction initiale. La Commission a rendu un premier avis le 13 décembre 2010.

À la suite des modifications substantielles apportées à la proposition de loi lors des débats parlementaires au Sénat, et notamment de l’introduction d’une clause d’extraterritorialité aux articles 2, 3 et 5, les autorités françaises ont de nouveau notifié à la Commission européenne la proposition de loi dans sa rédaction issue du Sénat le 4 novembre 2010. Un nouvel avis circonstancié a été émis le 31 janvier dernier.

Dans son premier avis du 13 décembre 2010, la Commission estimait déjà que l’application des dispositions initiales de la proposition de loi aux entreprises établies en France pourrait restreindre la liberté d’établissement (article 49 du Traité) et la libre prestation de services (article 56 du Traité) et également être incompatible avec l’article 3, paragraphe 2, de la directive sur le commerce électronique. Elle estimait que, « dans la mesure où un objectif de diversité culturelle pourrait justifier une quelconque restriction pouvant être imposée par la proposition de loi à la liberté d’établissement et à la libre prestation de services, (…) ces restrictions ne semblent ni adéquates par rapport à l’objectif de diversité culturelle visé, ni proportionnelles à la réalisation de cet objectif ». Elle demandait à la France des réponses argumentées et précises sur différents points afin de vérifier l’adéquation et la proportionnalité des mesures prises.

Il semblait donc d’autant plus difficile de pouvoir justifier des dispositions imposant à une entreprise établie dans un autre État membre le respect du prix fixé par l’éditeur uniquement pour les commandes en provenance de la France, ce que le deuxième avis rendu fin janvier a confirmé.

En conséquence, à l’Assemblée nationale, le rapporteur a souhaité revenir à la rédaction initiale afin que l’éditeur fixe le prix du fichier numérique uniquement si celui-ci est acheté sur un site hébergé en France.

En effet, toute extension au-delà de nos frontières risque de remettre en cause le principe même de la proposition de loi. La clause d’extraterritorialité est en effet problématique à double titre :

– D’un point de vue juridique, ce dispositif n’est compatible ni avec le droit communautaire, ni avec le droit national. Une telle disposition est notamment incompatible avec la directive dite « services » de 2006 sur la liberté d’établissement des prestataires de services et la libre circulation des services entre les États membres. D’autre part, une loi sur le prix unique du livre numérique qui s’appliquerait indistinctement aux entreprises établies sur le territoire national ou sur le territoire d’un autre État membre se heurterait au principe de l’application de la loi du pays d’origine, tous deux posés par la directive de 2000 sur le commerce électronique.

Certes, la directive sur le commerce électronique précise que ces dispositions ne doivent pas porter atteinte aux mesures prises au niveau communautaire ou au niveau national « pour promouvoir la diversité culturelle et linguistique et assurer la défense du pluralisme ».

Mais la Commission indique dans son avis que, si elle « peut envisager la possibilité, sous certaines conditions, de considérer la protection de la créativité et de la diversité culturelle comme un impératif d’intérêt général », les restrictions imposées par la présente proposition de loi ne sont ni adéquates ni proportionnelles.

Rappelons que, s’agissant du livre papier, la loi Lang de 1981 avait d’ailleurs du être modifiée dès 1985 afin de ne plus concerner les livres importés en provenance d’un autre État européen. Cette exception était la conséquence de l’arrêt Leclerc de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) du 10 janvier 1985. Dans cet arrêt, la Cour validait l’essentiel du dispositif issu de la loi Lang en estimant qu’il n’était pas contraire au Traité mais elle déclarait non conformes au Traité les dispositions de la loi qui prévoyaient la fixation d’un prix unique de vente pour les livres en provenance d’autres États membres. En effet, selon la CJCE, ces dispositions constituaient « des mesures d’effet équivalant à des restrictions quantitatives ».

Il faut se garder de reproduire ici les mêmes erreurs, d’autant plus que la disposition prévue pour le livre numérique est encore plus large puisqu’elle s’applique à tous les détaillants, qu’ils soient établis en Europe ou ailleurs dans le monde. Dans quel autre secteur d’activité la France fixe-t-elle des règles juridiques qui s’appliquent à des opérateurs situés hors de ses frontières ? Même si la préservation de la diversité culturelle doit rester le cœur de la préoccupation du législateur, le rapporteur estime que la loi n’est pas un outil adéquat hors de nos frontières.

Comme le signalait Jacques Toubon, aujourd’hui ambassadeur de l’harmonisation de la TVA pour les livres numériques, à la table ronde organisée le 26 janvier dernier conjointement par la commission des affaires européennes et par la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, les arguments qui « porteront » à Bruxelles seront fondés non uniquement sur de grands discours sur la diversité culturelle, mais sur l’exposé des faits économiques justifiant le maintien du prix du livre.

– D’un point de vue pratique, une clause d’extraterritorialité n’irait pas sans poser des problèmes pratiques. Comment, en effet, contrôler le respect de ces dispositions par des opérateurs établis à l’étranger, notamment dans des pays hors Union européenne ? Et surtout, le recours au contrat de mandat semble dans ce cas plus protecteur pour les éditeurs, comme eux-mêmes le reconnaissent. Ainsi, aux États-Unis, les six grands éditeurs américains travaillent actuellement dans ce cadre avec Amazon, avec succès, puisque la signature de ces contrats de mandat a permis de rééquilibrer les parts de marché des différents distributeurs de livres numériques.

Pourtant, à nouveau à l’unanimité, les sénateurs ont tenu à revenir à leur rédaction de première lecture, au motif que, si la Commission européenne a émis de fortes réserves, elle n’a pas « fermé la porte » puisqu’elle a posé au Gouvernement français une série de questions qui nécessitent des « réponses très argumentées ».

Cette prise de position a été renforcée par les récentes perquisitions menées le 1er mars dernier par la direction générale de la concurrence de la Commission européenne dans les maisons d’édition, notamment françaises, perquisitions liées à des soupçons d’entente entre éditeurs sur les prix des livres numériques. Certains acteurs estiment que la Commission tente par ce biais de remettre en cause la pertinence juridique du contrat de mandat.

Même s’il déplore les méthodes utilisées par la Commission dans le cadre de ces perquisitions, le rapporteur estime que le contrat de mandat n’est menacé, ni en droit national, ni au niveau européen. Comme l’indiquait la Commission elle-même dans son communiqué de presse du 2 mars, « le fait de conduire de telles inspections ne signifie pas que la Commission dispose de preuves conclusives d’un comportement anticoncurrentiel et ne préjuge en rien de l’issue de l’enquête elle-même ».

Rappelons d’ailleurs que dans son avis n° 09-A-56 sur le livre numérique rendu le 18 décembre 2009, l’Autorité de la concurrence validait, sous certaines conditions, ce dispositif contractuel au regard des règles concurrentielles nationales et européennes.

Certes, tant en droit interne qu’en droit communautaire, les ententes sur les prix sont considérées comme portant une atteinte grave à la concurrence. Mais, selon l’Autorité de la concurrence, « pour qu’une entente soit prohibée tant en droit interne qu’en droit communautaire, un accord de volonté des parties à l’accord est nécessaire, ce qui implique une autonomie de leur volonté. Dans un contrat de mandat, le mandataire perd l’autonomie de sa volonté au profit du mandant. Les obligations imposées au mandataire quant aux contrats qu’il conclut pour le compte du commettant ne relèvent donc pas de l’article L. 420-1 du code de commerce ni de l’article 101§1 du Traité ».

En droit communautaire, les contrats de mandat appartiennent à la catégorie plus vaste des « contrats d’agence ». Le point 12 des lignes directrices de la Commission européenne sur les restrictions verticales (4) définit ce type de contrats de la manière suivante : « les contrats d’agence couvrent les cas dans lesquels une personne physique ou morale (l’agent) est investie du pouvoir de négocier et/ ou de conclure des contrats pour le compte d’une autre personne (le commettant), soit en son nom propre soit au nom du commettant en vue de l’achat de biens ou de services par le commettant ou de l’achat de biens ou de services fournis par le commettant ».

L’Autorité de la concurrence indique dans son avis que « le facteur déterminant pour apprécier si un contrat rentre dans cette définition réside dans le risque commercial et financier que supporte l’agent en ce qui concerne les activités pour lesquelles le commettant l’a désigné. Ce risque doit être nul ou négligeable (5). Les contrats d’agence ne répondant pas strictement à cette condition peuvent tomber sous le coup de l’article 101§1 du Traité (en cas d’affectation du commerce entre États membres) (…) L’appréciation de l’applicabilité du droit des ententes à des contrats d’agence se fait donc au regard des risques supportés par l’agent et de son autonomie dans la détermination de sa stratégie commerciale ».

En droit interne, la qualification de contrat d’agence repose sur les mêmes bases, l’Autorité de la concurrence se basant sur les lignes directrices de la Commission pour analyser les potentielles situations d’entente. Dans le cadre de l’avis rendu sur le livre numérique, l’Autorité liste donc précisément les critères pour que les contrats signés entre détaillants et éditeurs ou distributeurs respectent les exigences d’un vrai contrat d’agence (6). Elle conclut en indiquant que « le contrat de mandat, ou plus précisément de commission, apparaît ainsi comme une solution possible. Dans ce cadre, les relations contractuelles entre éditeurs (ou distributeurs) et détaillants devront cependant se conformer pleinement aux exigences d’un véritable « contrat d’agence » afin de respecter le droit de la concurrence ».

Le rapporteur réaffirme ici sa position et souhaite, par amendement, revenir à une rédaction plus conforme à l’esprit de la loi : l’éditeur français doit fixer le prix du fichier numérique si celui-ci est acheté sur un site hébergé en France par un acheteur français. Si le site est hébergé à l’étranger, l’éditeur français pourra imposer son prix au site étranger concerné, au moyen d’un contrat de mandat. On disposera donc bien d’une « boîte à outils » complète.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC 1 du rapporteur et AC 16 de M. Lionel Tardy.

M. le rapporteur. Je propose d’assujettir uniquement les éditeurs établis en France à l’obligation de fixer un prix de vente pour les livres numériques qui y sont diffusés.

M. Lionel Tardy. Mon amendement va dans le même sens. Il s’agit de savoir si cette loi doit concerner les seuls éditeurs français ou également les étrangers. Dans le premier cas, nous défavoriserions les acteurs français face à la concurrence des plates-formes américaines. Dans le second cas, nous serions en contradiction flagrante avec le droit européen ; la première chose que ferait un Américain serait de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne. On attendrait deux ans pour s’entendre dire finalement que notre loi étant contraire au droit européen, elle ne peut pas être appliquée !

Aucune solution n’est satisfaisante, mais, à tout prendre, autant ne pas heurter de front la Commission européenne : nous avons suffisamment de sujets de conflits pour ne pas en rajouter ! Je propose donc de revenir à la rédaction d’origine.

M. le rapporteur. Avis défavorable à l’amendement AC 16. Le texte doit se limiter à la diffusion commerciale, en France, des productions des éditeurs français.

La Commission adopte l’amendement AC 1 du rapporteur.

En conséquence, l’amendement AC 16 de M. Lionel Tardy devient sans objet.

La Commission examine l’amendement AC 14 de M. Patrick Lebreton.

M. le rapporteur. Il est satisfait par l’article 8 de la proposition de loi, qui prévoit que les dispositions de la loi s’appliquent outre-mer. Par ailleurs, la dématérialisation supprime les frais de port. Avis défavorable.

 La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC 5 de M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Il s’agit d’étendre aux lycées et aux collèges l’exception prévue à l’alinéa 3.

M. le rapporteur. L’exception vise les seules bibliothèques de recherche et universitaires car les bibliothèques scolaires n’utilisent pas vraiment ce type de services. De plus, l’amendement viderait le dispositif de son sens en étendant démesurément les exceptions. Enfin, la conjugaison des alinéas 1 et 2 de l’article 2 permettra en tant que de besoin aux bibliothèques scolaires de bénéficier de prix adaptés, puisqu’il est prévu que le prix fixé par l’éditeur « peut différer en fonction du contenu de l’offre et de ses modalités d’accès ou d’usage ». Avis, pour ces raisons, défavorable.

 La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC 13 de Mme Marie-Hélène Amiable. 

Mme Marie-Hélène Amiable. Par cet amendement, déjà déposé en première lecture, nous proposons d’introduire une exemption afin de protéger les droits des auteurs ayant recours aux nouveaux modèles de création et d’exploitation des oeuvres que sont les licences libres.

M. le rapporteur. Vous voudriez que la loi protège les droits des auteurs ayant recours aux licences libres tout en les excluant du champ d’application de la proposition, ce qui est contradictoire. Je rappelle d’autre part que le texte ne prend pas position sur la question des mesures techniques de protection, les DRM, qui relèvent des éditeurs. Rien n’empêchera un auteur ou un éditeur de publier un ouvrage sans DRM, de ce fait reproductible à l’infini. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AC 6 de M. Marcel Rogemont.

M. Patrick Bloche. Il est rédigé dans le même esprit que celui qui vient d’être examiné. Il faut tenir compte des nouveaux modèles de création et d’exploitation des œuvres et pour cela introduire une exemption concernant la diffusion commerciale qui autorise la copie sans limitation. Il y a là sujet à une réflexion approfondie et notre Commission devrait donner un premier signal à tous les créateurs.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC 7 de M. Marcel Rogemont.

Mme Monique Boulestin. Cet amendement étend aux œuvres écrites numériques l'exception introduite en 2006 dans le code de la propriété intellectuelle, permettant d'utiliser des extraits d'œuvres protégées par le droit d'auteur à des fins d'illustration de l'enseignement et de la recherche.

M. le rapporteur. La complexité du régime des exceptions au droit d’auteur fait les délices des juristes. Ouvrir ce chantier de sa révision à l’ère du numérique par le biais de cette proposition ne peut se concevoir : le sujet mérite un texte spécifique. En outre, l’amendement revient sur une partie de l’exception pédagogique prévue par la loi de 2006 relative aux droits d’auteurs et aux droits voisins dans la société de l’information. Or, le livre numérique étant appelé à jouer un rôle fondamental dans l’enseignement et la recherche, on peut penser que des modèles économiques seront définis qui permettront d’utiliser les livres numériques dans un cadre pédagogique sans recourir à une exception au droit d’auteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 2 ainsi modifié.


Article 3


Respect du prix de vente fixé par l’éditeur

Dans sa rédaction issue du Sénat, l’article 3 de la proposition de loi oblige toutes les personnes – établies en France ou à l’étranger – qui exercent une activité de vente de livres numériques, ci-après qualifiés de détaillants, à respecter le prix de vente fixé par l’éditeur pour les livres numériques qu’ils commercialisent, à partir du moment où l’acheteur se situe en France.

Dans sa rédaction initiale, l’article 3 de la proposition de loi prévoyait que les détaillants établis en France devaient respecter le prix fixé par l’éditeur, dans les conditions définies à l’article 2. Une même offre devait donc être vendue au même prix quel que soit le canal de vente utilisé, mais uniquement si le détaillant était établi en France. Cette disposition visait à respecter strictement les règles fixées par le droit communautaire.

En première lecture, à l’unanimité, et par coordination avec la modification intervenue à l’article 2, le Gouvernement s’en remettant à la sagesse des sénateurs, les dispositions de l’article 3 de la proposition de loi avaient été étendues à tous les détaillants, y compris ceux établis hors de France, à partir du moment ou les acheteurs sont situés sur le territoire national.

À l’Assemblée, par coordination avec la position défendue par le rapporteur à l’article 2 s’agissant de la clause d’extraterritorialité, les députés avaient modifié l’article 3 afin que le prix fixe ne s’impose qu’aux détaillants établies en France qui proposent des offres de livres numériques aux acheteurs situés dans notre pays.

En deuxième lecture, par coordination également avec leur position sur l’article 2, les sénateurs sont revenus sur cette rédaction en reprenant les dispositions qu’ils avaient adoptées en première lecture.

Par cohérence avec la position qu’il défend à l’article 2, le rapporteur propose de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire prévoir que le prix fixé par l’éditeur ne s’impose qu’aux détaillants établis en France qui vendent des livres numériques à des acheteurs situés dans notre pays.

*

La Commission examine les amendements identiques AC 2 du rapporteur et AC 18 de M. Lionel Tardy.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. Patrick Bloche. Et même un peu plus ! La Commission pourrait faire avancer les choses en distinguant plus clairement la fixation du prix de vente par l’éditeur, dont traite l’article 2, du respect par le distributeur du prix de vente fixé par l’éditeur, objet de cet article. Cela permettrait de faire droit à la revendication d’extraterritorialité pour ce qui concerne le respect du prix de vente. Le groupe SRC votera contre cet amendement.

M. le rapporteur. Nous nous sommes déjà longuement expliqués à ce sujet.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle examine l’amendement AC 19 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à répondre à votre inquiétude : il prévoit la nullité de toute clause contractuelle qui fixerait un prix de vente au public inférieur au prix fixé par l’éditeur pour le territoire français. La nouvelle rédaction que je vous propose permet donc de rendre l’article 3 applicable, et de répondre au souci exprimé par les sénateurs et un certain nombre d’acteurs du secteur du livre. Le « désir d’extraterritorialité » cessera dès lors d’être un simple phantasme !

M. Marcel Rogemont. Il serait bon de compléter l’exposé sommaire de l’amendement pour dire que cette inquiétude a aussi été exprimée en première lecture par certains députés, ce qui n’a pas peu contribué à l’avancée de la réflexion.

M. le rapporteur. J’en conviens volontiers.

M. Marcel Rogemont. Toutefois, l’amendement nous ayant été soumis à l’ouverture de la réunion, nous réserverons notre vote jusqu’à son examen en séance publique, après avoir pris le temps nécessaire à l’analyse de ses implications. Pour l’instant, nous nous abstiendrons.

Mme Marie-Hélène Amiable. Tout comme notre groupe, pour la même raison.

La Commission adopte l’amendement. 

Elle adopte ensuite l’article 3 ainsi modifié.

Article 5 bis

Rémunération des auteurs

L’article 5 bis, initialement issu d’un amendement de M. David Assouline adopté en séance par les sénateurs contre l’avis du Gouvernement, mais avec l’avis favorable de M. Jacques Legendre, président de la Commission de la culture, avait été supprimé par l’Assemblée nationale en première lecture. Il a été rétabli par les sénateurs dans sa rédaction initiale.

Le dispositif complète l’article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle pour prévoir une juste rémunération des auteurs lorsque l’exploitation numérique d’une œuvre déjà publiée sous forme imprimée engendre une économie pour l’éditeur.

La disposition sénatoriale vise à garantir aux auteurs, selon les termes de M. Assouline, « une rémunération juste et équitable dans le cadre de l’exploitation de leur œuvre sur support numérique » (7), au motif que les dispositions de la proposition de loi visent à faire bénéficier de l’évolution technologique considérable que constitue le numérique l’ensemble de la filière du livre, du libraire à l’imprimeur, tout en oubliant les auteurs, alors qu’ils sont « à l’origine de la chaîne ! ».

Au-delà des difficultés pratiques de mise en œuvre d’une telle disposition – qui jugera de « l’économie générée » et selon quels critères ? –, le rapporteur continue de penser qu’il convient de laisser toutes ses chances à la négociation interprofessionnelle, d’autant plus que de telles dispositions relèvent principalement des relations contractuelles entre partenaires privés.

Pour autant, le législateur ne peut se désintéresser de ce problème, comme le rapporteur l’a déjà indiqué en première lecture. C’est la raison pour laquelle la clause de rendez-vous prévue à l’article 7 avait été améliorée en première lecture à l’Assemblée, afin de faire un point au bout d’un an et d’envisager une évolution législative dans le cas où la situation de blocage entre éditeurs et auteurs perdurerait.

Par ailleurs, le rapporteur reconnaît que les négociations interprofessionnelles engagées en octobre 2010, même si elles ont permis de dégager plusieurs points de consensus, sont depuis peu au point mort, et qu’il conviendrait peut-être que le législateur fixe un cadre général à même de permettre leur reprise.

Ces négociations entre le Conseil permanent des écrivains (CPE) et le Syndicat national de l’édition (SNE) sur les conditions de cession des droits numériques, devaient aboutir à un texte commun pour le Salon du livre de Paris, qui s’ouvrait à partir du 18 mars 2011, sur les points suivants : le contrat d’édition numérique, la durée limitée du contrat, le bon à diffuser numérique, la rémunération, l’exploitation permanente et suivie et la reddition des comptes.

Au terme de ces discussions et de six réunions de travail, le SNE et le CPE ne sont pas parvenus à un accord sur l’ensemble de ces points (8), notamment pour ce qui concerne deux points fondamentaux : la durée du contrat et les conditions de rémunération.

S’agissant de la durée du contrat, dans son communiqué de presse du 16 mars dernier, le CPE indique qu’« à défaut d’un contrat à durée limitée, il a été discuté une clause dite de " réexamen " permettant une renégociation des conditions de rémunération pour l’exploitation numérique ». Les conséquences de ce réexamen n’ont toutefois pas fait l’objet d’un accord entre les parties.

S’agissant des conditions de rémunération, le SNE proposait aux auteurs un pourcentage strictement identique à celui existant pour l’édition papier. Restant attaché au principe de la rémunération proportionnelle, le CPE demande à ce que ce taux soit réévalué pour l’édition numérique de telle sorte que le montant de rémunération soit au moins équivalent en valeur absolue à celui obtenu pour l’édition papier, ce qui n’est pas accepté par le SNE.

Pour autant, un consensus a été trouvé sur plusieurs points :

– une instance de liaison entre le SNE et la Société des gens de lettres (SGDL) a été mise en place afin d’intervenir sur les questions contractuelles dans le domaine de l’édition physique et numérique, notamment en cas de différend entre un auteur et un éditeur ;

– auteurs et éditeurs ont acté la mise en oeuvre d’un bon à diffuser numérique. L’auteur aura ainsi la possibilité de valider le fichier numérique avant sa diffusion ;

– les deux parties sont également d’accord pour que les dispositions contractuelles relatives à l’exploitation numérique des œuvres figurent clairement et distinctement dans le contrat d’édition, mais alors que les éditeurs plaident pour un seul et même contrat, les auteurs préféreraient que deux contrats distincts soient signés ;

– un accord a été trouvé sur une définition de l’exploitation permanente et suivie des œuvres sous forme numérique et sur les modalités de récupération des droits numériques par l’auteur en cas de mauvaise ou de non exploitation de l’œuvre au format numérique.

À l’issue d’une période qui reste à déterminer à compter de la signature du contrat, l’auteur pourra à tout moment demander à l’éditeur de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour remplir ces conditions. À défaut, l’auteur pourra recouvrer ses droits numériques. Comme l’indiquait le CPE dans son communiqué de presse du 16 mars, « la possibilité pour l’auteur de récupérer ses droits constitue une condition essentielle pour le CPE, compte tenu des incertitudes actuelles sur les modalités de développement du marché numérique ».

Le rapporteur proposera donc un amendement prévoyant explicitement que l’exploitation numérique de leurs œuvres s’accompagne d’une rémunération juste et équitable pour les auteurs. Le contrat d’édition signé entre l’auteur et l’éditeur doit le garantir explicitement. Par ailleurs, l’éditeur devra rendre compte des modalités de calcul de cette rémunération de façon explicite et transparente.

*

La Commission examine l’amendement AC 17 de M. Lionel Tardy, de suppression de l’article.

M. Lionel Tardy. L’article avait été supprimé par l’Assemblée nationale en première lecture. Nous avions estimé que la question de la rémunération des auteurs et du statut des droits numériques n’entrait pas dans le champ de ce texte. Outre cela, le dispositif proposé était d’une complexité redoutable : rien ne prouve que l’édition numérique entraîne des économies pour l’éditeur et, à supposer que cela soit le cas, nul ne sait sur quelles bases ces économies seraient calculées, ni par qui. Aucune réponse n’ayant été apportée à ces questions, nous devons maintenir notre position initiale.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Je pense comme vous qu’une réflexion d’ensemble sur la rémunération des auteurs s’impose. Dans l’intervalle, rien n’interdit un signal. C’est l’objet de l’amendement AC 3 que je vous soumettrai dans un instant.

M. Lionel Tardy. Je maintiens que cet article, parce qu’il fait référence au code de la propriété intellectuelle, n’a pas sa place dans ce texte ; qu’il n’est pas établi que le passage au numérique est source d’économies pour l’éditeur et que nous ne pouvons légiférer dans le flou. Enfin, si des économies sont constatées, il n’y a pas de raison particulière de favoriser les auteurs.

La Commission rejette l’amendement AC 17.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AC 3 du rapporteur et AC 8 et AC 9 de M. Marcel Rogemont, ainsi que les sous-amendements AC 10, AC 11 et AC 12 de M. Marcel Rogemont à l’amendement AC 3 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement AC 3 vise à ce que l’exploitation numérique de leurs œuvres s’accompagne d’une rémunération juste et équitable pour les auteurs. L’article est réécrit pour que le contrat d’édition signé entre l’auteur et l’éditeur le garantisse clairement. Par ailleurs, l’éditeur devra rendre compte de façon explicite et transparente des modalités de calcul de la rémunération, laquelle doit viser toutes les formes d’exploitation de l’œuvre – achat au titre ou par partie, abonnements, recettes publicitaires… – et son caractère « juste et équitable » doit être apprécié en proportion du nombre de ventes et de téléchargements.

M. Marcel Rogemont. Je me réjouis que le rapporteur soit désormais favorable au maintien d’un article qui porte sur le code de la propriété intellectuelle ; cela montre que des progrès ont été accomplis depuis l’examen de la proposition en première lecture. L’excellente rédaction de l’amendement AC 3, qui mentionne explicitement l’obligation d’une rémunération « juste et équitable » calculée de façon « transparente » me conduit à retirer les amendements AC 8 et 9.

Les amendements AC 8 et AC 9 sont retirés.

M. Patrick Bloche. Les sous-amendements AC 10, AC 11 et AC 12 tendent à modifier le code de la propriété intellectuelle pour conforter la situation des auteurs en prévoyant un contrat séparé, en cas d’édition numérique. Il serait paradoxal qu’ils ne trouvent pas leur compte aux économies permises par la dématérialisation.

M. le rapporteur. Je ne suis favorable à aucun des trois sous-amendements. L’amendement AC 3 représente un progrès important, et traiter des questions relatives aux droits des auteurs à l’ère du numérique par le biais de sous-amendements me semble malvenu. D’autre part, sur le fond, préconiser un contrat séparé pour les cessions portant sur des droits d’exploitation d’un livre numérique n’implique-t-il pas que livre imprimé et livre numérique seraient des œuvres différentes ? Les contrats séparés ne se justifient pas pour des publications différentes de la même œuvre – c’est d’ailleurs pourquoi il n’y a pas de contrats séparés pour une édition « classique » et une édition au format de poche.

Il est nécessaire, je l’ai dit, d’engager dans les meilleurs délais une réflexion d’ensemble sur ces questions pendantes, mais cela ne saurait se faire dans le cadre du texte en discussion.

M. Marcel Rogemont. Pour l’exploitation et pour la rémunération, l’univers physique et l’univers numérique diffèrent. Pour les ouvrages numérisés, la notion d’épuisement perd sa signification : les auteurs n’ont plus de moyen d’action sur la manière dont on expose et promeut leurs œuvres, ce qui est dommageable pour eux. Il faut leur laisser la possibilité de récupérer leurs droits ; c’est à quoi tendent les trois sous-amendements.

M. le rapporteur. Je pense, comme vous, qu’une réflexion s’impose sur l’adéquation de la loi de 1957 à l’âge du numérique. Je considère toutefois que ce sujet d’une complexité extrême doit faire l’objet d’une réflexion d’ensemble. Il serait prématuré de traiter certains aspects seulement de la question par le biais d’amendements ou de sous-amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les sous-amendements AC 10, AC 11 et AC 12.

Puis elle adopte l’amendement AC 3.

La Commission adopte l’article 5 bis ainsi rédigé.

Article 7

Comité de suivi et clause de rendez-vous

L’article 7 de la proposition de loi prévoit la création d’un comité de suivi chargé de suivre la mise en oeuvre de la proposition de loi et composé de deux députés et deux sénateurs, désignés par les commissions chargées des affaires culturelles auxquelles ils appartiennent.

Il dispose également qu’après consultation du comité de suivi et avant le 31 juillet de chaque année, le Gouvernement présente au Parlement un rapport annuel sur l’application de la loi au vu de l’évolution du marché du livre numérique. Ce rapport devra comporter une étude d’impact sur l’ensemble de la filière.

Cette clause de rendez-vous est indispensable compte tenu des évolutions très rapides du marché du livre numérique.

Rappelons que, dans sa rédaction initiale, l’article prévoyait uniquement la remise d’un rapport d’application au Parlement un an après l’entrée en vigueur du texte. En première lecture à l’Assemblée nationale, le rapporteur a tenu à améliorer le dispositif en prévoyant la création de ce comité de suivi parlementaire. La création de tels comités est devenue une pratique usuelle du législateur, qui les a institués, par exemple, pour suivre l’application des lois relatives à l’université (2007), à l’audiovisuel public (2009), au service civique (2010) ou à la numérisation des salles de cinéma (2010).

Par ailleurs, afin de reprendre, dans l’esprit, les dispositions supprimées à l’article 5 bis de la proposition de loi, était également précisé que le rapport du Gouvernement devait se pencher sur les effets de l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique sur la rémunération des auteurs.

En deuxième lecture, sur proposition de la rapporteure, les sénateurs ont rétabli l’article 5 bis et, par conséquent, supprimé cet alinéa de l’article 7, devenu selon eux « superfétatoire, ceci d’autant plus que l’étude d’impact concernera bien les auteurs puisqu’ils font partie intégrante de la filière visée au premier alinéa ».

Le rapporteur proposera un amendement visant à rétablir la disposition adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture qui prévoyait que le rapport du Gouvernement se penche sur les effets de l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique sur la rémunération des auteurs, car il lui semble que la mention explicite de ce point est importante.

Il proposera également que le rapport vérifie l’impact positif de la loi du point de vue du lecteur, qui doit grâce à son application bénéficier d’une offre légale plus abondante et plus diversifiée.

*

La Commission examine l’amendement AC 4 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de rétablir la disposition adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en première lecture, prévoyant que le rapport du Gouvernement se penche sur les effets sur la rémunération des auteurs de l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC 15 de M. Patrick Lebreton.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 7 ainsi modifié.

M. Marcel Rogemont. Le groupe SRC s’abstiendra sur l’ensemble du texte.

La Commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

En conséquence, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture

___

Texte adopté par le Sénat

en deuxième lecture

___

Texte adopté par la

Commission

___

Proposition de loi relative

au prix du livre numérique

Proposition de loi relative

au prix du livre numérique

Proposition de loi relative

au prix du livre numérique

…………………………………………………………………………………………………………………………………….

Article 2

Article 2

Article 2

Toute personne établie en France qui édite un livre numérique dans le but de sa diffusion commerciale est tenue de fixer un prix de vente au public pour tout type d’offre à l’unité ou groupée. Ce prix est porté à la connaissance du public.

Toute personne qui édite un livre numérique dans le but de sa diffusion commerciale en France est …

… public.

Toute personne établie en France qui …

… public.

Amendement n° 1AC

Ce prix peut différer en fonction du contenu de l’offre et de ses modalités d’accès ou d’usage.

Alinéa sans modification

 

Le premier alinéa ne s’applique pas aux livres numériques, tels que définis à l’article 1er, lorsque ceux-ci sont intégrés dans des offres proposées sous la forme de licences d’utilisation et associant à ces livres numériques des contenus d’une autre nature et des fonctionnalités. Ces licences bénéficiant de l’exception définie au présent alinéa doivent être destinées à un usage collectif et proposées dans un but professionnel, de recherche ou d’enseignement supérieur, dans le strict cadre des institutions publiques ou privées qui en font l’acquisition pour leurs besoins propres, excluant la revente.

Alinéa sans modification

Alinéa sans modification

Un décret fixe les conditions et modalités d’application du présent article.

Alinéa sans modification

Alinéa sans modification

Article 3

Article 3

Article 3

Le prix de vente, fixé dans les conditions déterminées à l’article 2, s’impose aux personnes établies en France proposant des offres de livres numériques aux acheteurs situés en France.

Le …

… personnes proposant des offres de livres numériques aux acheteurs situés en France.

Le …

… personnes établies en France proposant …

… en France.

   

Est nul et réputé non écrit toute contrat ou toute clause autorisant la vente d’un livre numérique à un prix de vente inférieur à celui fixé dans les conditions déterminées à l’article 2.  

Amendements nos 2AC et 19AC

…………………………………………………………………………………………………………………………………….

Article 5 bis

Article 5 bis

Article 5 bis

Supprimé

L'article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsqu'une œuvre étant publiée sous forme imprimée est commercialisée sous forme numérique, la rémunération de l'auteur au titre de l'exploitation numérique est fixée en tenant compte de l'économie générée, pour l'éditeur, par le recours à l'édition numérique. »

Le contrat d’édition garantit aux auteurs, lors de la commercialisation ou de la diffusion d’un livre numérique, que la rémunération résultant de l’exploitation de ce livre est juste et équitable. L’éditeur rend compte à l’auteur du calcul de cette rémunération de façon explicite et transparente. 

Amendement no 3AC

…………………………………………………………………………………………………………………………………….

Article 7

Article 7

Article 7

Un comité de suivi composé de deux députés et deux sénateurs, désignés par les commissions chargées des affaires culturelles auxquelles ils appartiennent, est chargé de suivre la mise en œuvre de la présente loi. Après consultation du comité de suivi et avant le 31 juillet de chaque année, le Gouvernement présente au Parlement un rapport annuel sur l’application de la présente loi au vu de l’évolution du marché du livre numérique, comportant une étude d’impact sur l’ensemble de la filière.

Alinéa sans modification

Alinéa sans modification

Ce rapport vérifie, notamment, si l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique permet une rémunération juste et équitable de la création et des auteurs compatible avec l’objectif de diversité culturelle poursuivi par la présente loi.

Alinéa supprimé

Ce rapport vérifie notamment si l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique profite au lecteur en suscitant le développement d’une offre légale abondante, diversifiée et attractive et favorise une rémunération juste et équitable de la création et des auteurs, permettant d’atteindre l’objectif de diversité culturelle poursuivi par la présente loi.

Amendement no 4AC 

…………………………………………………………………………………………………………………………………….

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AC 1 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 2

À la première phrase de l’alinéa 1, après les mots : « Toute personne », insérer les mots : « établie en France ».

Amendement n° AC 2 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 3

Après le mot : « personnes », insérer les mots : « établies en France ».

Amendement n° AC 3 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 5 bis

Rédiger ainsi cet article :

« Le contrat d’édition garantit aux auteurs, lors de la commercialisation ou de la diffusion d’un livre numérique, que la rémunération résultant de l’exploitation de ce livre est juste et équitable. L’éditeur rend compte à l’auteur du calcul de cette rémunération de façon explicite et transparente. »

Amendement n° AC 4 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 7

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Ce rapport vérifie notamment si l’application d’un prix fixe au commerce du livre numérique profite au lecteur en suscitant le développement d’une offre légale abondante, diversifiée et attractive et favorise une rémunération juste et équitable de la création et des auteurs, permettant d’atteindre l’objectif de diversité culturelle poursuivi par la présente loi. »

Amendement n° AC 5 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 2

À la seconde phrase de l’alinéa 3, supprimer le mot : « supérieur ».

Amendement n° AC 6 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 2

Après l’alinéa 3, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa ne s’applique pas à toute diffusion commerciale autorisant, sans limitation quantitative, la copie et la redistribution du livre par tout acquéreur. »

Amendement n° AC 7 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 2

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

II. – Au neuvième alinéa (e) de l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : « partitions de musique », les mots : « et des œuvres réalisées pour une édition numérique de l’écrit » sont supprimés.

Amendement n° AC 8 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 5 bis

Rédiger ainsi cet article :

« Lorsqu’une œuvre est commercialisée ou diffusée sous une forme numérique, son exploitation doit générer au profit de l’auteur de celle-ci une rémunération proportionnelle d’un montant par exemplaire au moins égal à celui perçu pour la forme imprimée de l’édition première.

« A défaut de pouvoir garantir à l’auteur que le produit du pourcentage prévu au contrat générera une rémunération au moins équivalente, l’éditeur doit s’engager à verser à l’auteur un minimum garanti par exemplaire commercialisé ou diffusé sous une forme numérique.

« Des minima, par secteurs de l’édition, seront fixés par une négociation professionnelle collective entre représentants des éditeurs et des auteurs, organisée par le ministère de la culture. »

Amendement n° AC 9 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 5 bis

Compléter l’alinéa 2 par cette phrase :

« Cette rémunération doit être juste et équitable. »

Sous-amendement n° AC 10 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 5 bis

Sous-amendement à l’amendement n° AC 3 du Rapporteur

Compléter cet amendement par les deux alinéas suivants :

« II. – L’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les cessions portant sur des droits d’exploitation sous une forme numérique d’un livre, dont la première édition envisagée dans des conditions professionnelles l’est sous une forme librairie et nécessitant une adaptation de tout ou partie de l’œuvre à la diffusion sous forme numérique, doivent faire l’objet d’un contrat écrit séparé sur un document distinct du contrat relatif à l’édition proprement dite de l’œuvre imprimée. »

Sous-amendement n° AC 11 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 5 bis

Sous-amendement à l’amendement n° AC 3 du Rapporteur

Compléter cet amendement par les deux alinéas suivants :

« II. – L’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la première édition envisagée dans des conditions professionnelles l’est pour une forme numérique, elle doit faire l’objet d’un contrat écrit, adapté à l’exploitation numérique envisagée, séparé de celui proposé aux auteurs pour l’édition en librairie. »

Sous-amendement n° AC 12 présenté par M. Marcel Rogemont et les commissaires du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Article 5 bis

Sous-amendement à l’amendement n° AC 3 du Rapporteur

Compléter cet amendement par les deux alinéas suivants :

« II. – L’article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat distinct ou le document distinct prévu aux 4 et 5 ci-dessus devra prévoir dans le détail : la durée déterminée et précise de cession, les conditions de rémunération proportionnelle de l’auteur ou des coauteurs de l’œuvre, les conditions d’exploitation du livre numérique ou de l’adaptation dans sa forme numérique du livre papier et les modalités de redditions de comptes à l’auteur pour ces exploitations. »

Amendement n° AC 13 présenté par Mmes Marie-Hélène Amiable, Huguette Bello, Marie-George Buffet et M. Marc Dolez

Article 2

Compléter l’alinéa 3 par les mots :

« ou à toute diffusion commerciale autorisant, sans limitation quantitative et sans en rendre compte au diffuseur, la copie et la redistribution du livre par tout acquéreur ».

Amendement n° AC 14 présenté par M. Patrick Lebreton

Article 2

Après l’alinéa 2, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ce prix ne peut différer en fonction du lieu d’achat sur le territoire national, y compris si l’acheteur se trouve dans une collectivité d’outre-mer. »

Amendement n° AC 15 présenté par M. Patrick Lebreton

Article 7

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Dans les six mois suivant la publication de la présente loi, le gouvernement présente au Parlement un rapport sur la fracture numérique dans les collectivités d’outre-mer. »

Amendement n° AC 16 présenté par M. Lionel Tardy

Article 2

À la première phrase de l’alinéa 1, après les mots : « toute personne », insérer les mots : « établie en France ».

En conséquence, supprimer les mots : « en France ».

Amendement n° AC 17 présenté par M. Lionel Tardy

Article 5 bis

Supprimer cet article.

Amendement n° AC 18 présenté par M. Lionel Tardy

Article 3

Après le mot : « toute personne », insérer les mots : « établie en France ».

Amendement n° AC 19 présenté par M. Hervé Gaymard, rapporteur

Article 3

Compléter cet article par l’alinéa suivant :

« Est nul et réputé non écrit tout contrat ou toute clause autorisant la vente d’un livre numérique à un prix de vente inférieur à celui fixé dans les conditions déterminées à l’article 2. »

© Assemblée nationale

1 () L’article disposait que « lorsqu’une œuvre étant publiée sous forme imprimée est commercialisée sous forme numérique, la rémunération de l’auteur au titre de l’exploitation numérique est fixée en tenant compte de l’économie générée, pour l’éditeur, par le recours à l’édition numérique ».

2 () Arrêt du 15 janvier 2002 de la CJCE, affaire C-439/99, Commission/Italie, point 22.

3 () Visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle.

4 () Communication n° 2010/C 130/01 de la Commission européenne du 19 mai 2010.

5 () Voir notamment l’arrêt du 15 septembre 2005 du Tribunal de première instance des communautés européennes, Daimler-Chrysler, Affaire T-325/01.

6 () Voir notamment pages 28 à 30 de l’avis n° 09-A-56 précité le descriptif précis de ces critères.

7 () Compte-rendu des débats en séance publique au Sénat, 26 octobre 2010.

8 () Voir communiqués de presse du 16 mars 2011 pour le CPE et du 17 mars 2011 pour le SNE.