N° 1430 tome VII - Avis sur le projet de loi de finances pour 2014 (n°1395)



N
° 1430

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2013

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2014
(n° 1395)

TOME VII

ÉCONOMIE

COMMERCE EXTÉRIEUR

PAR M. Joël GIRAUD

Député

——

Voir les numéros : 1395, 1428 (annexe 21), 1431 (tome VI).

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

LA SITUATION DU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS 7

I. LE MAINTIEN DE NOS ÉCHANGES À UN ASSEZ HAUT NIVEAU, EN DÉPIT D’UN CONTEXTE INTERNATIONAL FLUCTUANT ET PLUTÔT DÉFAVORABLE 7

A. LE REPLI DE NOS ÉCHANGES EN 2013, APRÈS LEUR RÉSISTANCE AU CONTEXTE INTERNATIONAL MOROSE EN 2012 7

B. LA PART DE MARCHÉ TOUJOURS DÉCLINANTE DE LA FRANCE, AUSSI BIEN AU NIVEAU MONDIAL QUE DANS L’UNION EUROPÉENNE 8

II. UN DÉFICIT COMMERCIAL TOUJOURS PRÉOCCUPANT, MAIS QUI NE S’AGGRAVE PLUS 10

A. LA TENDANCE À LA BAISSE DU DÉFICIT COMMERCIAL, MALGRÉ L’ACCROISSEMENT DE LA FACTURE ÉNERGÉTIQUE 10

B. LA FIN DE L’ÉROSION DU TAUX DE COUVERTURE OU L’AMORCE D’UNE NOUVELLE CHUTE ? 12

III. LES STRUCTURATIONS GÉOGRAPHIQUE, SECTORIELLE ET ENTREPRENEURIALE DE NOS ÉCHANGES COMMERCIAUX 13

A. DES ÉCHANGES ENCORE MAJORITAIREMENT ORIENTÉS VERS L’EUROPE BIEN QUE NOTRE DEUXIÈME PARTENAIRE, L’ASIE, COMBLE PETIT À PETIT SON RETARD 13

B. DES GRANDES DISPARITÉS SECTORIELLES 16

C. LA PERSISTANCE DE L’EXTRÊME CONCENTRATION DE L’APPAREIL EXPORTATEUR FRANÇAIS : L’AUGMENTATION DU NOMBRE D’EXPORTATEURS NE COMPENSE PAS L’INSUFFISANCE DE PME EXPORTATRICES 17

LA POURSUITE DE L’ADAPTATION DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN AU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS ET LA POLITIQUE COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE COMMERCE INTERNATIONAL 19

I. LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES POUR 2014 DES OPÉRATEURS DU COMMERCE EXTÉRIEUR 19

II. LA POURSUITE DE L’ADAPTATION DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN AU COMMERCE EXTÉRIEUR 22

A. LES ACTIONS SPÉCIFIQUES D’UBIFRANCE ET DE L’AFII ET LE PROJET DE RAPPROCHEMENT DES DEUX OPÉRATEURS 23

1. Ubifrance 23

2. L’AFII 25

3. Un nouveau projet de réforme : vers le rapprochement des deux opérateurs ? 26

B. LES COOPÉRATIONS DÉCENTRALISÉES, DES OUTILS ORIGINAUX DE SOUTIEN POUR DES « GRAPPES » DE PETITES ENTREPRISES, À MIEUX FAIRE CONNAÎTRE ET À DÉVELOPPER 27

III. UNE POLITIQUE COMMUNAUTAIRE CONTROVERSÉE 28

A. LE « SERPENT DE MER » DU NIVEAU DE L’EURO ET DE SON INCIDENCE SUR LA COMPÉTITIVITÉ DES PAYS EUROPÉENS 28

B. LA NÉCESSITÉ DE RÉTABLIR LA CONFIANCE AU SUJET DES NÉGOCIATIONS PORTANT SUR DES ACCORDS DE LIBRE-ÉCHANGE ET D’ASSURER LA RÉCIPROCITÉ DANS LES RAPPORTS COMMERCIAUX INTERNATIONAUX 30

EXAMEN EN COMMISION 35

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 39

INTRODUCTION

Étant donné le déficit « record » que le commerce extérieur de la France avait connu en 2011 (73 milliards d’euros), l’objectif fixé au début du quinquennat par le Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, semblait extrêmement ambitieux : rien moins que le retour à l’équilibre en 2017 de nos échanges commerciaux, hors énergie. Les chiffres de 2012 (déficit ramené à 67 milliards d’euros), et plus encore ceux qu’affichera l’année 2013 (probablement aux environs de 60 milliards d’euros), montrent que notre pays est sur ce point plutôt sur la bonne voie. L’amélioration est encore plus notable en ce qui concerne le déficit hors énergie : environ 10 milliards d’euros cette année, après 27 milliards l’année dernière.

Notre commerce extérieur n’est pas devenu pour autant florissant du jour au lendemain, son déficit demeurant très important et ses défauts majeurs perdurant, notamment le faible nombre d’entreprises exportatrices et l’extrême concentration des exportations, en volume, sur les plus grandes d’entre elles.

Reconnaissons tout de même que l’enrayement de notre déclin en la matière est le fruit d’une adaptation volontariste et concertée de notre système de soutien au commerce extérieur, qui s’est poursuivie en 2013 : rôle de pilote dévolu aux régions ; réajustement des missions d’Ubifrance, l’opérateur plus particulièrement chargé de l’aide à l’exportation (dont l’efficacité est désormais évaluée de manière plus qualitative que quantitative), notamment en fonction du volet international de la Banque publique d’investissement (BPI). Cette rénovation du système d’aides pourrait connaître une nouvelle étape importante en 2014 si le rapprochement entre Ubifrance et l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) était concrétisé, projet sur lequel votre rapporteur ne cache pas ses réserves.

Adopter la bonne stratégie est d’autant plus nécessaire que les crédits prévus pour 2014, dont nous présentons en particulier, dans le cadre de ce rapport pour avis, les actions relatives au commerce extérieur du programme 134 de la Mission « Économie », sont, plus encore que l’année dernière, soumis à la rigueur que la situation de notre économie impose.

Cette participation à l’effort budgétaire ne devrait pas trop affecter l’efficacité des activités des deux agences spécialement chargées de notre commerce extérieur grâce au réajustement de l’organisation des agences et de leurs actions, ainsi que de leur articulation avec les autres structures de soutien au commerce extérieur français.

LA SITUATION DU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS

La dépendance de notre commerce extérieur vis-à-vis du processus de mondialisation, de l’intrication des différentes zones économiques et de l’état général de l’économie mondiale semblait se confirmer à mesure que les fluctuations du contexte international se reflétaient dans le niveau des échanges de biens de la France avec l’étranger. Après la reprise de ceux-ci, très nette en 2010 (+ 14,5 % par rapport à 2009), puis encore relativement marquée en 2011, parallèlement à l’importante reprise depuis 2010 des échanges mondiaux, qui pouvait laisser espérer que la crise de 2008 était en voie de résorption, les échanges mondiaux se sont ralentis en 2012 (+ 2,3 % selon l’Organisation mondiale du commerce [OMC], qui prévoit + 2,5 % en 2013, après + 5,4 % en 2011 et + 13,8 % en 2010), notamment à cause de l’atonie de la zone euro, de la faible croissance des pays développés (fléchissement de la demande intérieure) et même des difficultés rencontrées par plusieurs économies émergentes. Or, la détérioration du contexte international ne s’est pas trop fait sentir pour la France en 2012, l’accroissement des échanges de biens perdurant malgré un ralentissement par rapport à 2010 et 2011, avec + 3,1 % à l’exportation et + 1,4 % à l’importation l’année dernière. Ce n’est qu’au premier semestre de 2013 qu’un repli a été enregistré : - 1,9 % pour les exportations et - 2,2 % pour les importations par rapport au second semestre de 2012.

Cependant, les montants bruts de nos échanges demeurent à un niveau assez élevé puisque, pour les douze mois courant de septembre 2012 à août 2013, ils s’établissent à 436,5 et 496,5 milliards d’euros, respectivement pour les exportations et les importations, alors qu’ils étaient de 346,5 et 391,9 milliards en 2009, après le plongeon consécutif à la crise de 2008, et que la France ne semble pas devoir retomber aux niveaux qu’elle connaissait voici dix ans : 345,3 et 351 milliards en 2004.

De plus, s’il est courant de penser qu’une diminution des échanges internationaux a forcément un impact négatif sur la croissance, le graphique suivant permet de noter que la corrélation entre croissance des exportations et croissance du PIB mondial est devenue un peu moins forte depuis 2009, l’écart entre les deux n’étant plus proportionnel d’une année sur l’autre. Ainsi les deux croissances ont-elles été du même niveau en 2012, alors que la croissance moyenne des exportations de 1992 à 2002 était deux fois supérieure à celle du PIB pour la même période (environ 6 et 3 %).

CROISSANCE DU COMMERCE MONDIAL DE BIENS, EN VOLUME, ET DU PIB MONDIAL (2005-2012, EN POURCENTAGE, EN MOYENNE ANNUELLE)

Graph OMC prev augment commerce mondial

(Source : OMC - Rapport sur le commerce mondial 2013)

L’OMC attribue cette rétractation des échanges et leur moindre incidence sur le niveau du PIB au recours par les gouvernements à des mesures de réglementation, notamment non tarifaires, susceptibles de créer des distorsions préoccupantes pour la coopération internationale. Pour autant, le caractère assez limité de la progression du commerce mondial qui devrait être enregistrée en 2013 (2,5 % environ) a, selon l’OMC, contribué aux difficultés des différentes économies nationales. Un « rebond » est annoncé pour 2014, notamment si les prévisions selon lesquelles les États-Unis connaîtraient une forte reprise s’avéraient exactes.

(Exportations de marchandises du pays concerné rapportées aux exportations mondiales en valeur)

D’autres pays asiatiques (Corée du Sud et Hong Kong surtout, contrairement au Japon) gagnent des parts de marché au détriment des pays de l’Union européenne, y compris l’Allemagne (qui connaît une baisse d’autant plus spectaculaire pour un pays pourtant largement excédentaire qu’elle se situait au premier rang jusqu’en 2008, avant d’être dépassée par la Chine). Si ces tendances se confirmaient, la France rétrograderait dans les prochaines années derrière la Corée, la Russie (passée de 1,6 % des échanges mondiaux en 2000 à 2,9 en 2008, sa part stagnant plus ou moins depuis), voire Hong Kong (passé de 2,3 % en 2008 à 2,7 en 2012). Elle suivrait, dans le classement des pays exportateurs, la voie du déclin tracée par le Royaume-Uni, qui ne figure plus parmi les dix premiers, par la Belgique et par l’Italie, qui semble en sursis. Rappelons en outre que, si l’Allemagne perd des parts de marché vis-à-vis des pays émergents, asiatiques surtout, la France en perd aussi, sinon surtout, dans la zone euro, où se trouvent ses principaux partenaires (en premier lieu l’Allemagne…), comme le montre le tableau suivant :

ÉVOLUTION DE LA PART DE MARCHÉ DANS L’UNION EUROPÉENNE DE LA FRANCE ET DES PRINCIPAUX AUTRES EXPORTATEURS EUROPÉENS,
EN VALEUR (ÉCHANGES DE BIENS)

Malgré le déclin du commerce extérieur français relativement à ses principaux concurrents, ses chiffres globaux s’étaient quelque peu améliorés en 2012, le déficit ayant diminué de 7 milliards par rapport à 2011 pour s’établir à 67 milliards d’euros.

Les graphiques et tableaux suivants montrent clairement que le retournement de la situation s’est effectué au second semestre 2012, puisque les chiffres du premier semestre 2012 étaient dans la continuité de ceux de 2011. Ceux du second semestre 2012 laissaient espérer une nette décrue du déficit et ceux du premier semestre 2013 tendent à confirmer celle-ci : respectivement à 35,8 milliards d’euros, 31,4 et 30,0. Les dernières données connues pour les douze mois courant de septembre 2012 à août 2013 s’établissent juste en dessous de la barre des 60 milliards d’euros, le déficit annuel pour 2013 devant s’établir aux environs de celle-ci. Le déficit extérieur a par conséquent diminué d’environ 18,5 % en deux ans.

ÉVOLUTION DES ÉCHANGES COMMERCIAUX DE LA FRANCE, 2002 – MI-2013

(Exportations, importations : échelle de gauche. Soldes : échelle de droite)

Cette baisse du déficit commercial de la France est d’autant plus encourageante qu’elle est encore plus importante hors matériel militaire et hors énergie, la facture énergétique ayant été particulièrement préjudiciable aux chiffres globaux. Des soldes mensuels proches de l’équilibre ont été enregistrés durant le second semestre 2012 et depuis le début de l’année, le solde d’avril 2013 étant même excédentaire (+ 180 millions d’euros). L’objectif de résorption du déficit hors matériel militaire et hors énergie sous cinq ans, fixé par le Premier ministre au début du présent quinquennat, n’apparaît dès lors nullement utopique.

Pour autant, le triomphalisme ne saurait être de mise, le déficit de l’année 2011 ayant constitué un tel "record" qu’il ne pouvait être envisagé que la situation ne se rétablisse pas quelque peu. Si le déficit baisse en 2014 de la même façon, en volume, qu’en 2013, il aura fallu trois ans pour revenir au chiffre déjà préoccupant de 2010 (plus de 50 milliards du déficit), après la terrible détérioration de la situation entre 2010 et 2011 (hausse de 21,2 milliards du déficit). L’amélioration est en outre toute relative vu que notre commerce extérieur était encore à l’équilibre voici dix ans (2003) : au rythme de 7 milliards gagnés chaque année (performance de 2012 et 2013), le retour à l’équilibre n’interviendrait que dans dix ans, ce qui paraît encore bien optimiste aujourd’hui.

Un autre élément incite à ne pas trop vite se réjouir de la réduction du déficit commercial de la France en 2012 : elle résulte moins d’un accroissement important des exportations que d’un ralentissement de la tendance à la hausse des importations. Cela témoigne d’un reflux de la demande intérieure puisque, comme nous l’avons vu plus haut, pour les douze mois courant de septembre 2012 à août 2013, exportations et importations sont reparties à la baisse, de manière plus nette pour les secondes :

ÉVOLUTION DES ÉCHANGES DE LA FRANCE, 2003 – MI-2013

(Sources : Douanes, août 2013 – Échanges FAB-FAB, y compris matériel militaire)

Toutefois, parmi les prévisions sur la base desquelles le projet de loi de finances pour 2014 a été établi, figure une croissance des exportations de 1,2 % en volume en 2013 et de 3,5 % en 2014, en vertu notamment de la reprise progressive de la demande mondiale (due en particulier à un accroissement de l’activité dans la zone euro). Votre rapporteur ne saurait néanmoins ne pas inciter à la prudence quant à cette prévision de croissance des exportations française vu qu’elle est supérieure à celle qu’a faite le Fonds monétaire international (FMI) en juillet dernier (3,1 % pour les exportations en 2014, et 2,7 % pour les importations), même si le FMI avait auparavant sous-estimé, dans ses prévisions (0,2 % pour les importations et 1,4 % pour les exportations, en volume), la croissance des échanges de la France en l’année 2013.

Après une chute quasi continue depuis 1997, année qui correspondait à un pic exceptionnel (à 109,7 %), le taux de couverture français des importations par les exportations, passé sous la barre des 100 % en 2003, s’était stabilisé à un niveau assez bas (environ 86 % de 2008 à 2010). Des chiffres encourageants, publiés courant 2012, pouvaient laisser penser qu’après ce palier s’amorcerait une remontée. La tendance à la stagnation s’est hélas confirmée, le taux de 2012 (84 %) étant trop proche de celui de 2011 pour pouvoir y déceler l’esquisse d’un retournement de courbe. Espérons dès lors que ce palier des années 2011-2012 n’est pas le prélude à une nouvelle chute du taux de couverture français, comme ce fut le cas après le palier des années 2000-2003.

TAUX DE COUVERTURE DES IMPORTATIONS PAR LES EXPORTATIONS (EN %) DES DIX PREMIERS EXPORTATEURS MONDIAUX

 

2008

2009

2010

2011

2012

Chine

126

119

113

109

113

États-Unis

59

66

65

65

66

Allemagne

122

121

119

117

121

Japon

102

105

111

96

90

Pays-Bas

110

112

111

111

111

France

86

86

86

83

84

Corée

97

113

110

106

105

Russie

162

158

161

161

158

Italie

97

98

92

94

103

Hong Kong

94

94

91

89

89

(Biens - Exportations rapportées aux importations) (Source OMC : Données CAF-FAB)

Le tableau précédent présente cependant deux caractéristiques incitant à ne pas adopter un point de vue alarmiste à propos de ce taux :

– le taux de couverture des États-Unis, dont l’économie aurait amorti le choc de la crise de 2008 au point de recommencer à croître fortement l’année prochaine, est bien inférieur à celui de la France, comme de ceux de tous les grands pays industrialisés, y compris le Japon, dont le taux de couverture a portant subi une forte baisse suite aux catastrophes de mars 2011 ;

– hors le cas de la Russie, les taux ont plutôt tendance à se resserrer entre pays excédentaires et pays déficitaires, surtout en ce qui concerne les deux plus grands acteurs du commerce mondial, l’écart de taux entre eux s’étant réduit de vingt points, puisqu’il est passé de 67 % en 2008 (126 % pour la Chine, pour 298 milliards d’excédents commerciaux ; 59 % pour les États-Unis, pour 882 milliards de déficit) à 47 % en 2012 (113 % pour la Chine, pour 230 milliards d’excédents commerciaux ; 66 % pour les États-Unis, pour 790 milliards de déficit) ; on notera en revanche que l’écart entre la France et l’Allemagne est resté presque identique (36 % en 2008 ; 37 en 2012).

Les échanges commerciaux demeurent concentrés sur l’Union européenne, à près de 60 % (l’Allemagne restant de très loin notre premier partenaire : 17 %, contre 15 % en 2002), comme le montrent les graphiques suivants :

STRUCTURE GÉOGRAPHIQUE DES EXPORTATIONS FRANÇAISES EN 2012 (DONNÉES BRUTES) ET ÉVOLUTION ANNUELLE DU POIDS DE CHAQUE ZONE
(EN POINTS DE POURCENTAGES)

STRUCTURE GÉOGRAPHIQUE DES IMPORTATIONS FRANÇAISES EN 2012 (DONNÉES BRUTES) ET ÉVOLUTION ANNUELLE DU POIDS DE CHAQUE ZONE
(EN POINTS DE POURCENTAGES)

La prédominance de l’Europe a toutefois tendance à s’amoindrir. La part de l’UE est en effet passée, durant la décennie 2000, de 66 à 59 % pour les exportations et de 62 à 58 % pour les importations, la tendance étant surtout nette à partir de 2007. Il n’est dès lors pas étonnant que l’UE soit aussi la zone où notre déficit commercial est le plus important (1) : 42,3 milliards d’euros, ce qui représente les deux tiers du déficit total en 2012. Si l’on ajoute l’Asie, notre deuxième partenaire commercial et celui dont les parts de marché augmentent le plus ces dernières années, on obtient 80 % de ce déficit.

BALANCE COMMERCIALE DE LA FRANCE DANS L’UNION EUROPÉENNE

(Source : Dreyer (Iana), Commerce extérieur : refuser le déclin. Propositions pour renforcer notre présence dans les échanges internationaux, Institut Montaigne, juillet 2013, p.27)

Le recul de l’Europe comme cible des exportations françaises, encore tout relatif globalement, est néanmoins suffisamment net dans certains secteurs, notamment la mode, pour qu’un journal économique ait pu titrer au début de l’année : « Le prêt-à-porter français sauvé par les exportations » (2), la progression de ces dernières ayant été de 3,4 % en 2012. L’ensemble Chine – Hong Kong et les États-Unis sont devenus les deux principaux clients, avec des progressions spectaculaires (39,6 % pour Hong Kong et 27 % États-Unis) alors qu’en France même, les dépenses d’habillement féminin déclinent chaque année depuis 2008
(- 2,8 % en 2012). Le secteur estime par conséquent que la priorité n’est plus la zone euro en raison de ses difficultés économiques persistantes et que la conquête de nouveaux marchés (Indonésie, Mexique, Vietnam ou Corée du Sud) devrait être plus porteuse.

Notons enfin que notre déficit commercial avec les États-Unis et le Canada s’est assez considérablement accru ces dernières années, passant de 2,1 milliards d’euros en 2008 à 6,8 milliards d’euros en 2012.

Le constat des grandes disparités sectorielles dans notre commerce extérieur ayant été maintes fois établi et cette tendance ne s’amenuisant guère, votre rapporteur se contentera sur ce sujet d’appeler votre attention sur le contraste, sinon le paradoxe, qui ressort du tableau suivant :

PRINCIPALES VARIATIONS DES SOLDES ENTRE LE SECOND SEMESTRE 2012 ET LE PREMIER SEMESTRE 2013

(Source : Douanes – Données estimées FAB-FAB, CVS-CJO ; en millions d’euros)

On y remarque que l’excédent commercial des secteurs les plus dynamiques, par exemple celui de la construction aéronautique et spatial en 2012 (aux environs de 20 milliards d’euros ; notamment grâce à une forte croissance des ventes d’Airbus), qui fait suite à des années 2010 et 2011 déjà très bonnes, se confirme au premier semestre 2013 – il en est de même pour les secteurs pharmaceutique et agroalimentaire. Mais l’aéronautique figure pourtant parmi les secteurs connaissant une diminution de son solde entre le deuxième semestre 2012 et le premier de 2013. A contrario, le solde énergétique s’est un peu amélioré au premier semestre 2013, et même beaucoup relativement aux autres secteurs, mais reste cependant de loin le plus déficitaire. Un constat similaire peut être fait, dans une moindre mesure, à propos des secteurs de l’habillement et de l’informatique-électronique.

Tout en bas du tableau, les chiffres relatifs aux véhicules automobiles sont tous deux fortement négatifs, que ce soit en ce qui concerne l’évolution du solde que le solde du premier semestre 2013 : la situation du secteur automobile reste par conséquent très préoccupante.

La structure entrepreneuriale des échanges commerciaux de la France ne connaît pas de modification fondamentale. Le principal point à noter, positif, est la légère remontée du nombre d’entreprises exportatrices de biens en 2012. Alors qu’il avait baissé de 12 % entre 2000 et 2009, passant de 132 000 à 116 000, il avoisine aujourd’hui les 120 000 (+ 2,9 % par rapport à 2011).

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’EXPORTATEURS DE BIENS, DE NOUVEAUX EXPORTATEURS ET D’ENTREPRISES CESSANT D’EXPORTER, DE 2002 À 2012

(Source : Douanes)

ÉVOLUTION ANNUELLE DU NOMBRE D’ENTREPRISES FRANÇAISES EXPORTATRICES ET DES MONTANTS EXPORTÉS, 1994-2012

(Source : Douanes)

Le nombre de nouveaux exportateurs a augmenté de manière plus significative (+ 7,8 % par rapport à 2011) tandis que le nombre d’entreprises cessant d’exporter diminuait de 12 %.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’EXPORTATEURS « ENTRANTS » ET « SORTANTS »

(Source : Douanes, DG Trésor)

Malgré ces améliorations, le nombre d’entreprises exportatrices de biens reste très faible, à la fois comparé au nombre total d’entreprises françaises (3,6 millions (3)) et comparé au nombre d’entreprises exportatrices de nos partenaires et concurrents européens (près de 300 000 en Allemagne).

En outre, la concentration sur les plus grandes entreprises ne s’amenuise point : en 2012, moins de 1 % des exportateurs réalisent plus de 70 % des exportations totales et les mille premiers exportateurs de biens, soit 0,85 % du total, réalisent 71,5 % du total. Ce sont les grands groupes français internationalisés, ainsi que les filiales françaises de groupes étrangers, qui « trustent » la plupart des exportations français : les trois quarts en 2012.

PART D’ENTREPRISES EXPORTATRICES ET MONTANT EXPORTÉ PAR TAILLE EN 2012

(Source : Douanes)

LA POURSUITE DE L’ADAPTATION DES DISPOSITIFS DE SOUTIEN AU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS ET LA POLITIQUE COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE COMMERCE INTERNATIONAL

Dans le cadre de la mission « Économie », les crédits consacrés au commerce extérieur relèvent pour l’essentiel du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », qui regroupe les instruments de soutien aux entreprises, notamment en direction des petites et moyennes entreprises (PME) des secteurs de l’industrie, du commerce, de l’artisanat, de l’artisanat, des services et du tourisme. La maquette du projet de loi de finances pour 2014 (PLF 2014) est sur ce point identique à celle du PLF pour 2013 : les crédits demandés pour 2014 concernent pour l’essentiel la mise en œuvre opérationnelle du dispositif en faveur du commerce extérieur, c’est-à-dire les prestations menées par les opérateurs Ubifrance (agence pour le développement international des entreprises) et AFII (Agence Française pour les Investissements Internationaux), respectivement au sein des actions n° 7 (« Développement international des entreprises ») et n° 20 (« Financement des entreprises et attractivité du territoire ») du programme n° 134.

Les missions d’Ubifrance consistent principalement à soutenir le développement des entreprises françaises, notamment les PME/ETI, afin de favoriser leur internationalisation et leur développement sur les marchés extérieurs. Dans ce but, elle réalise ou coordonne les actions d’information, de promotion, de coopération technique industrielle et commerciale et de volontariat international en entreprises (VIE). La réforme qu’a connue Ubifrance depuis 2010 a en outre renforcé son rôle dans la définition de priorités géographiques et sectorielles, impliquant notamment l’identification des attentes des entreprises et la connaissance du tissu économique des pays dans lesquels l’agence intervient.

L’AFII contribue au développement des PME et des ETI grâce à des interventions en garantie et cofinancement permettant de soutenir leur financement, à la prospection et à l’accompagnement d’investissements étrangers, à la promotion du territoire français auprès des investisseurs internationaux susceptibles de s’y implanter et la valorisation de l’image économique de la France à l’étranger.

Aussi bien Ubifrance que l’AFII exercent leurs missions sous la tutelle de la direction générale du Trésor (DG Trésor) en s’appuyant sur les réseaux des services économiques (SE) de la DG Trésor, qui relèvent de l’action n° 2 (« Développement international de l’économie française ») du programme n° 305 (« Stratégie économique et fiscale ») de la mission « Économie ». Les moyens de cette dernière action sont en légère baisse : les crédits passent de 93,2 millions d’euros dans la loi de finances (LFI) pour 2013 à 91,9 millions dans le PLF pour 2014 – une stabilisation étant prévue pour 2015 (92 millions) – et cinquante-cinq emplois sont supprimés (29 en ETPT [équivalent temps plein annuel travaillé] dans le PLF pour 2014 et 26 prévus en 2015), ce qui doit les porter à 803 en 2015.

Les crédits des actions n° 7 et 20 du programme n° 134 représentent à eux deux 13,9 % (respectivement 9,6 et 4,3 %) des autorisations d’engagement (AE) pour 2014 du programme n° 134, soit une diminution d’un point par rapport aux AE de ces actions pour 2013 (14,9 %), alors que, proportionnellement, ces crédits avaient connu une augmentation sensible ces dernières années, puisqu’ils en représentaient 12,08 % des AE dans le PLF pour 2012, 11,32 % dans le PLF pour 2011 et 9,59 % dans le PLF pour 2010.

Un léger rééquilibrage budgétaire entre les crédits de l’action n° 7 et ceux de l’action n° 20 doit être noté, les premiers passant de 12,5 à 9,6 % des AE pour 2014 du programme n° 134 tandis que les seconds passent de 2,4 à 4,3 % (la hausse est encore plus spectaculaire en chiffres brut, les AE pour cette action passant de 19,7 millions d’euros dans la LFI pour 2013 à 43,7 millions d’euros dans le PLF 2014). Il résulte des deux points suivants :

– la fin, en 2012, du transfert à Ubifrance, initié en 2009, de l’activité d’appui commercial aux entreprises qui relevait auparavant du réseau international de la DG Trésor ;

– l’intégration à l’action n° 20 des dépenses d’intervention de Bpifrance financement (ex OSEO), qui gère des fonds de garantie permettant de répondre aux défaillances de marché en facilitant l’accès au crédit des entreprises lorsqu’il fait l’objet d’un rationnement, et de Bpifrance investissement (ex FSI), qui intervient en couverture des investissements réalisés par certains fonds de capital-risque afin d’encourager l’investissement en fonds propres ; les autorisations d’engagement se montant à 29,8 millions d’euros pour l’ensemble de ces dépenses d’intervention.

Dépenses liées aux opérateurs de l’État

Réalisé 2011

Réalisé 2012

Prévision 2013

PLF 2014

Programmes

Subventions à Ubifrance

- Fonctionnement

- Intervention


102,2

77,2

25


100,4

77,4

23


103,9

81,3

22,6


97,8

97,8

*

134

Subventions de l’AFII

- Programme 134

- Programme 112


24


21,1

14,3

6,8


20,8

14,1 (5)

6,7


20,5

13,9

6,6

134

112

Dépenses fiscales et sociales

Réalisé 2011

Réalisé 2012

Prévision 2013

PLF 2014

Programmes

- Crédit d’impôt pour prospection commerciale

13

13

16

16 (6)

134
(dépense fiscale n°210312)

- Dispositif VIE

ND

ND

ND

ND

 

L’astérisque figurant à la ligne « Subventions à Ubifrance : Intervention » de la colonne « PLF 2014 » s’explique par l’une des principales nouveautés relatives à cet organisme : l’absence de distinction, dans le PLF 2014, entre les dépenses d’intervention et les dépenses de fonctionnement dans la dotation d’Ubifrance. La fongibilité de ces deux types de dépenses résulte de la réorganisation de l’agence, qui vise à moins disperser ses actions, à concentrer ses dépenses d’intervention (moins de salons, notamment) et à donner la priorité à l’accompagnement des entreprises dans la durée (par des chargés d’affaires internationaux déployés au sein des directions régionales de Bpifrance, l’objectif étant de 1 000 ETI [entreprises de taille intermédiaire] et PME de croissance).

La rénovation des activités d’Ubifrance et de l’AFII s’accompagne d’une baisse des moyens qui leur sont affectés, de manière très nette en ce qui concerne la première (- 6,1 millions d’euros, soit - 5,87 %), de manière moindre en ce qui concerne la seconde (- 0,3 million d’euros), mais sans que cela soit négligeable non plus (- 1,45 %), surtout que la tendance est ancienne en ce qui concerne l’AFII (alors que l’effort budgétaire avait été plus favorable à Ubifrance les années précédentes). Les deux agences participent donc à l’effort de maîtrise du coût des opérateurs de l’État puisque la diminution de leurs crédits cumulés (- 6,4 millions d’euros, soit - 5,13 %) représente 8,77 % de la diminution totale des crédits de la mission « Économie », qui est de 73 millions d’euros en 2014 par rapport au budget 2013 (hors investissements d’avenir et contribution au CAS Pensions), soit 4 %, grâce notamment à une diminution de 140 équivalents plein temps (ETP) en 2014. La maîtrise du coût des deux agences est toutefois inférieure à celle de l’ensemble des dépenses de fonctionnement, d’intervention et d’investissement portées par la mission, qui diminuent pour leur part de près de 7 % en crédits de paiement.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS D’UBIFRANCE ET DE L’AFII, 2012-2014

 

2012

2013
(budget primitif)

2014
(projection)

Ubifrance

- Plafond d’emploi

- Effectif

1418

1394

1393

1393

1385

1385

AFII

- Plafond d’emploi

- Effectif

155

148

152

151

150

148

Il convient aussi de rappeler à la fois qu’Ubifrance dispose de ressources propres, générées par ses produits d’information et ses services d’accompagnement commercial répondant aux besoins des entreprises sur les marchés extérieurs et que les moyens publics alloués à la politique de soutien à l’internationalisation des entreprises comprennent aussi des dépenses d’organismes financés par taxes affectées, dont celles du CNC (« Soutiens sélectifs à l’exportation à l’industrie du cinéma ») à Ubifrance.

EVOLUTION DES RECETTES COMMERCIALES D’UBIFRANCE (HORS SUBVENTIONS, INDEMNITÉS VIE ET FRAIS DE TRANSPORT)

 

2009R

2010R

2011R

2012R

2013 (1)

2014 (2)

Recettes commerciales

48 182

54 706

62 481

64 312

59 991

61 037

Crédits d’intervention reçus / recettes commerciales

37,9 %

36,5 %

40,1 %

35,7 %

30 %

SO

(1) BP après DM 1 - (2) Budget en cours de préparation

Les dispositifs de soutien au commerce extérieur font l’objet d’une telle profusion de structures et de plans qu’il est impossible de tous les présenter en détails dans le cadre restreint de ce rapport pour avis. Mentionnons juste pour mémoire, avant d’examiner comment se poursuit l’adaptation des principaux dispositifs, quelques-uns des plans et structures connexes qui contribuent au soutien de notre commerce extérieur :

– Plans régionaux pour l’internationalisation des entreprises (PRIE ; dix conclus pour l’instant) permettant de mener à bien l’objectif, annoncé par la ministre du Commerce extérieur le 12 septembre 2012, de conférer aux régions le rôle de pilotes pour l’export : fixation des objectifs en termes de secteurs et de pays prioritaires ; détermination des actions associées ; organisation sur leur territoire du dispositif d’appui à l’export, en associant l’ensemble des acteurs concernés (Bpifrance, incluant le réseau régional d’Ubifrance ; CCI ; pôles de compétitivité) ;

– Plan d’action pour la diplomatie économique du ministère des affaires étrangères (neuf représentants spéciaux à l’étranger, notamment Mme Martine Aubry en Chine et M. Jean-Pierre Chevènement en Russie ; sept Ambassadeurs de l’export pour les régions ; 102 conseils économiques dans des ambassades) ;

– Pacte de confiance signé le 28 mai 2013 par le Gouvernement avec le réseau des Chambres de commerce et de l’industrie (151 CCI) ;

– Promotion du développement à l’international des pôles de compétitivité (Convention conclue en janvier 2013 entre Ubifrance et la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services ; nouvelle offre de financement et d’accompagnement des pôles lancée par le Gouvernement le 22 mai 2013) ;

– Mise en place d’un accès unique à « l’appui export » pour les entreprises (portail Internet unifié, qui devrait être ouvert début 2014 ; annuaire de l’export ; réseau social des exportateurs ; etc.).

Sont aussi évoquées plus loin, un peu plus longuement, les coopérations décentralisées, qui constituent des dispositifs relevant plus des régions que de l’État, mais que le ministère entend encourager.

L’achèvement de la dévolution des moyens issus du réseau international de la DG Trésor a fait d’Ubifrance le principal interlocuteur des PME dans le monde, via ses implantations locales ou ses partenaires locaux, afin notamment de mieux leur faire tirer parti de la croissance des pays émergeants en saisissant les occasions de s’y implanter que cette croissance génère. Ubifrance s’appuie en effet désormais sur un réseau de quatre-vingts bureaux, répartis dans soixante pays.

Parallèlement, le contrat d’objectifs et de performances (COP) triennal dans lequel s’est engagée l’agence en 2012 a moins mis l’accent sur ses objectifs quantitatifs pour privilégier des objectifs qualitatifs fixés pour mesurer et renforcer l’impact des activités de l’agence sur le développement à l’international des entreprises françaises :

– exclusion des accompagnements des SIDEX (dispositif supprimé en 2012) et opérations labellisées (passage de 20 000 accompagnements en 2011 à 14 000 en 2012) du périmètre des activités prises en compte dans le calcul de l’efficience de l’agence ;

– prise en compte des flux de volontaires internationaux en entreprises (VIE) et non plus le nombre de VIE en poste (soit 4 800 départs en 2012 au lieu de 7 403 en poste fin 2012) ;

– importance accordée à la concrétisation des actions d’accompagnements en « courants d’affaires », un courant d’affaire étant un accord commercial (signé ou en cours de négociation avec signature dans les deux ans de l’accompagnement par Ubifrance) ou une obtention de commandes dans les six mois suivant l’accompagnement.

DÉCOMPTE DES COURANTS D’AFFAIRES AU TITRE DE L’ANNÉE 2012

   

Nb de clients distincts accompagnés

Nb de courants d’affaires

(a)

Courants d’affaires conclus dans les six mois suivant l’accompagnement

1 983

2 775

(b)

Courants d’affaires prévus six mois à deux ans après l’accompagnement

1 747

2 974

(c)

Coefficient de transformation des courants d’affaires prévus en courants d’affaires réalisés (Référence = accompagnements 2010)

31 %

31 %

(d) = (b) x (c)

Extrapolation des courants d’affaires réalisés
six mois à deux ans après l’accompagnement

541

922

(e) = (a) + (d)

Estimation des courants d’affaires réalisés
dans les deux ans après l’accompagnement

2524

3697

(Source : IPSOS)

L’objectif d’amélioration de la qualité du service rendu aux entreprises dans leur démarche de prospection des marchés étrangers ayant modifié le calcul de l’indicateur d’efficience du dispositif, la baisse du ratio depuis 2012 n’est guère significative dans le tableau suivant, qui présente toutefois l’intérêt de synthétiser la manière dont l’action d’Ubifrance est évaluée et comment elle pourrait évoluer dans les années à venir.

TABLEAU DE SUIVI DES ACTIVITÉS D’UBIFRANCE ET DE LEUR EFFICIENCE

Les cibles pour 2015 seront déterminées par le prochain COP, qui doit entrer en vigueur en 2014.

Votre rapporteur considère qu’il est souhaitable qu’Ubifrance privilégie le ciblage et la personnalisation, plutôt que le « saupoudrage » des aides, car la réflexion doit porter sur la manière de mettre le maximum de moyens là où les opportunités sont les plus fortes.

Le rôle de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) n’est pas moins crucial que celui d’Ubifrance, dans la mesure où le nombre d’emplois en France assurés par les filiales des vingt mille entreprises qui y sont installés et qui opèrent sur le territoire est estimé à près de deux millions. En outre, ces entreprises assurent 30 % des exportations françaises et génèrent 20 % des dépenses de recherche et développement en France. Le travail de communication qu’accomplit l’AFII pour promouvoir l’image de la France, en premier lieu en direction des pays américains (Canada et États-Unis), mais aussi des grands pays émergents (Brésil, Chine et Inde), est donc primordial. Une campagne a été menée en 2012 autour de trois thèmes : l’innovation et la R&D (notamment pour inciter les entreprises nord-américaines à nouer, en France, des partenariats avec des sociétés françaises) ; l’image d’un pays porté sur l’avenir ; la France comme porte d’accès au marché européen, à l’Afrique et au Moyen Orient (la Chine, l’Inde et le Brésil étant plus particulièrement les cibles pour ce dernier thème).

Les résultats de l’AFII en ce qui concerne l’aide au développement de l’implantation en France des projets internationaux peuvent être résumés par le tableau suivant :

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE PROJETS DÉTECTÉS PAR L’AFII ET DIFFUSÉS
AUX AGENCES RÉGIONALES POUR LE DÉVELOPPEMENT, 2007-2012

Année

Nombre

2007

951

2008

1 054

2009

1 163

2010

1 123

2011

1 095

2012

1 147

Le nombre de projets détectés par l’AFII s’est accru assez nettement depuis 2007 (le chiffre de 2012 étant supérieur d’un cinquième) tout en restant chaque année à un haut niveau (plus de 1 000 projets). L’objectif du Contrat d’objectifs et de performance (COP 2012-2014) conclu entre l’État et l’agence fin 2011 (1 000 projets diffusés) a été dépassé de en 2012 de près de 1,5 %, avec une augmentation du nombre de projets diffusés de 4,7 % par rapport à 2011.

Un travail de préfiguration du rapprochement entre Ubifrance et l’AFII, afin d’en arrêter les modalités institutionnelles et pratiques, a été confié le 20 septembre dernier à l’Inspection générale des Finances (IGF) par le Premier ministre. Ces résultats devraient être présentés d’ici fin novembre 2013. L’idée de fusionner les agences chargées l’une de promouvoir auprès des entreprises étrangères l’attractivité du territoire français, l’autre la conquête de marchés extérieurs par les entreprises implantées en France s’inspire de l’organisation existant dans la plupart des grands pays exportateurs. La Suède a par exemple choisi cette option depuis le 1er janvier 2013. A l’heure où les chaînes de valeur mondiale s’enchevêtrent, où l’imbrication des économies s’amplifie et où les exportations dépendent de plus en plus des importations, les arguments ne manquent pas pour soutenir ce projet.

Votre rapporteur est néanmoins plutôt défavorable à ce projet de rapprochement entre Ubifrance et l’AFII. En effet, de très nombreuses, voire trop nombreuses réformes avaient impacté ces dernières années le réseau international de Bercy. Le ministère du commerce extérieur est parvenu depuis 2012 à fixer une feuille de route, validée suite à une concertation bien menée. La qualité et la légitimité des services économiques internationaux ont notamment été reconnues : il est important de pouvoir s’appuyer sur ce réseau de professionnels qui sont des experts de la diplomatie économique. D’une part, leur rôle de coordination des acteurs économiques locaux est clairement affiché tout en continuant avec la conception des politiques économiques et commerciales du gouvernement. La clarté de la gouvernance et la bonne mise en œuvre de ce plan stratégique, qui s’inscrit dans la volonté de modernisation de l’action publique est essentielle ; il en va de la lisibilité des actions de la France à l’international et donc de son efficacité.

Ces fonctions régaliennes mais également commerciales doivent se nourrir l’une et l’autre. Mais il faut prendre garde de ne pas les confondre. Dans cette perspective, l’éventualité d’un rapprochement de l’AFII et d’Ubifrance ne viendrait-elle pas remettre en cause cet équilibre ? S’il pourrait être opportun de mutualiser un certain nombre de leurs activités au sein d’une agence qui les « chapeauterait » et qui les inciterait à travailler ensemble, votre rapporteur estime imprudent de fusionner ces deux entités dans la mesure où leurs missions sont différentes par nature, les métiers de l’export et ceux de l’investissement étranger faisant appel à des compétences et à une culture spécifiques. Le risque de voir se dissoudre les missions commerciales dans un domaine trop strictement régalien pourrait être contre-productif. Aux yeux de votre rapporteur, une réforme de plus de notre système de soutien au commerce extérieur pourrait être une réforme de trop.

L’effort devrait donc plutôt se porter sur la définition du périmètre d’intervention du volet export de la Banque Publique d’Investissement (BPI) et sur ses rapports avec les missions d’Ubifrance et de Coface. Pour ne prendre qu’un seul exemple, nos collègues Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat, dans leur rapport sur l’évaluation du soutien public aux exportations, présenté le 4 juillet 2013 au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, ont proposé que les activités de la direction des garanties publiques de Coface soient intégrées au sein de Bpifrance Export. Votre rapporteur prend acte que le gouvernement n’envisage pas de retenir cette idée « choc » et séduisante, car il estime que l’opération serait difficile à réaliser à la fois sur les plans technique (transfert de personnel, des données informatiques intégrées au sein du groupe Coface), financier (car l’encours de la Coface agissant pour le compte de l’État est important au regard du bilan de la BPI) et budgétaire (pour éviter les risques de consolidation). Pour autant, l’unification du réseau de distribution des aides publiques devrait demeurer un objectif à moyen terme.

Dans son rapport pour avis de l’année dernière, votre rapporteur avait appelé l’attention, parmi les structures d’aide à l’exportation, sur les coopérations décentralisées, soutenues financièrement par le ministère des Affaires étrangères, ainsi que par d’autres ministères, et accompagnées par les collectivités locales. Peut être mentionnée, par exemple, la coopération Alpes / Sichuan (Chine). Cette dernière bénéficie de crédits de l’État (ministère des Affaires étrangères pour la coopération décentralisée, DATAR, Régions PACA et Rhône-Alpes) et est pilotée par le consulat général de France à Chengdu, sans intervention de l’agence Ubifrance, le réseau classique d’experts en diplomatie économique s’avérant en l’occurrence un point d’appui à la fois plus accessible et plus efficace pour certaines zones éloignées des grandes métropoles. Après une phase de trois ans de mise en place du dispositif, ont été générés ces trois dernières plus de vingt contrats pour un montant global d’environ trente millions d’euros dans le domaine de l’équipement et de l’aménagement de la montagne afin de contribuer à son développement sportif et touristique. Notons que la plupart ont été signés par de très petites entreprises (TPE) et qu’il s’agit donc d’un moyen efficace d’aider celles-ci à exporter leur savoir-faire, ce dont elles ont bien sûr souvent plus besoin que les grands groupes.

Il se confirme donc que le développement des coopérations décentralisées, qui vont bien au-delà d’un jumelage ou d’une simple collaboration technique, doit être encouragé par le gouvernement. Aussi votre rapporteur se félicite-t-il que la ministre du commerce extérieur, Mme Nicole Bricq, lors de son audition du 29 octobre dernier, ait manifesté son vif intérêt pour un type de structure collaborative qui favorise les regroupements d’entreprises (sous forme de clusters). Ce travail d’entreprises en « grappe », propices à la diminution de leurs coûts à l’exportation, fait partie de l’ « économie de réseaux » que le ministère entend promouvoir. Il est par conséquent conscient de devoir se rapprocher des élus territoriaux pour mener ce genre d’actions, d’autant plus que l’identification des acteurs locaux susceptibles de s’y engager est moins du ressort de l’État que des régions. Le rôle fédérateur de l’association nationale France Clusters, qui a pour objectif de favoriser l’échange d’expériences entre clusters (60 000 entreprises de croissance en France), pôles de compétitivité et grappes d’entreprises doit à cet égard être souligné.

L’incidence du niveau de l’euro sur les résultats de notre commerce extérieur fait l’objet de débats récurrents, et même de controverses. Ils opposent en particulier la France à l’Allemagne, cette dernière ne trouvant pas la monnaie européenne surévaluée (d’autant que son niveau est adapté à la structure de l’économie allemande, ce qui serait l’une des raisons de ses succès à l’international) : l’invocation de l’euro ne serait qu’un prétexte pour ne pas entreprendre des réformes structurelles pouvant améliorer la compétitivité de la France, de la même manière que l’Allemagne en a menées au début des années 2000. C’est la position qu’adopte peu ou prou Mme Bricq, ministre du commerce extérieur français.

Cependant, au sortir de la première conférence ministérielle des « Amis de l’énergie », le 23 octobre 2013, le ministre du redressement productif, M. Arnaud Montebourg, qui était l’initiateur de cette conférence réunissant une dizaine de ministres européens de l’industrie, a multiplié les déclarations liant la nécessaire réindustrialisation de l’Europe au niveau de l’euro : « La monnaie européenne est trop forte, elle est trop chère. Il faut modifier la politique monétaire de toute urgence. La relance de l’industrie passe par une monnaie qui permette d’être concurrentiels sur les marchés internationaux, ce qui n’est pas du tout le cas aujourd’hui », a-t-il notamment déclaré le 24 octobre 2013 au site « EurActiv.fr ». Le ministre a précisé, selon La Tribune du 29 octobre 2013 (7), que ce diagnostic était fondé sur des analyses publiées par la direction du Trésor, ainsi que par le Fonds Monétaire International, pour lequel la politique monétaire de l’UE manquerait de souplesse, et que les bénéfices d’une légère dévaluation pouvaient être chiffrés : « Si l’euro était dévalué de 10 % [...], nous gagnerions 150 000 emplois. » M. Montebourg a réaffirmé sa position le 6 novembre 2013 à l’Assemblée nationale, devant la commission élargie pour la mission « Économie », en rappelant que le pilotage politique de la monnaie était du ressort de l’Euro Groupe. Le commissaire européen à l’Industrie, M. Antonio Tajani, abonde dans le même sens : « L’euro est trop fort pour la compétitivité de nos entreprises », tout en apportant un sérieux bémol : « Ce n’est pas la position de la Commission mais c’est ma position personnelle. » (8)

Les déclarations de MM. Montebourg et Tajani rejoignent en tout cas l’appel lancé en février dernier par le président de la République français, M. François Hollande, en faveur d’une politique de change de la zone euro. Une « guerre des monnaies » en catimini semble de nouveau être menée au niveau mondial, de manière préoccupante, des pays disposant de leur souveraineté dans ce domaine étant suspectés de faire fluctuer la leur à leur avantage (Chine, mais aussi USA et Japon). Dès lors, le niveau élevé de l’euro, qui serait dû au renforcement de sa crédibilité grâce à l’action menée par de la Banque Centrale Européenne (BCE), paraît loin d’être seulement déterminée par le marché. Le chef de l’État, M. François Hollande, avait à cet égard demandé « une réforme du système monétaire international » lors du neuvième « Forum de dialogue Asie-Europe », qui s’était tenu à Vientiane (Laos) le 5 novembre 2012, la sous-évaluation du yuan, par exemple, pouvant s’apparenter à ses yeux à de la « concurrence déloyale ».

Aux yeux de votre rapporteur, « l’arme monétaire » ne peut plus être mise de côté, même si elle ne constituerait bien évidemment pas la panacée !

Face au blocage des négociations multilatérales au niveau mondial, menées sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (9), l’UE s’est engagée dans une série de négociations d’accords de libre-échange (ALE) avec des pays économiquement si importants (Corée, Singapour, Canada, Japon, USA) qu’ils induiront forcément un bouleversement de nos rapports internationaux. Même si les premières analyses de l’ALE avec la Corée du Sud montreraient que l’UE en auraient largement bénéficié, la conclusion définitive des ALE encore en cours de négociations nécessite de rétablir une confiance qui tend à s’éroder – et ce dans plusieurs directions : entre les pays européens et les partenaires avec lesquels sont engagés ce genre de négociations ; entre chacun des pays européens, et bien sûr en premier lieu la France, et l’Union européenne, le mandat fixé à la commission tout comme son respect devant faire l’objet de la plus grande transparence possible ; entre les autorités négociant ces ALE, les entreprises et les peuples européens, dont certains craignent d’en subir les conséquences.

Sur le premier point, la révélation, par le journal The Guardian de l’ampleur de l’espionnage tous azimuts (dirigeants, entreprises, ambassades, etc.) par les services de renseignements des États-Unis d’Amérique (« scandale de la NSA ») jette le trouble sur les rapports transatlantiques, leur réciprocité et les relations de confiance qui devraient prévaloir l’année même où les négociations portant sur le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) ont été officiellement engagées en juillet dernier entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (EU). Il s’agit d’une négociation aux implications d’une ampleur inédite puisque les zones UE et EU représentaient plus de 40 % des échanges mondiaux en 2011 (33,1 % pour les 27 pays de l’UE et 8,1 % pour les États-Unis). Les principales pierres d’achoppement risquant de rendre difficiles ces négociations sont les suivantes : les droits de douane, les États-Unis estimant que l’Europe a des taux supérieurs aux siens sur les produits agricoles, alors que l’UE devrait mettre en cause le « Buy American Act » (limitant l’accès aux marchés publics) ; les questions sanitaires (l’UE ayant cependant levé récemment les interdictions sur le bœuf aux hormones, ainsi que sur le commerce du porc vivant et des bœufs lavés à l’acide lactique) ; les indications géographiques (IG), qui se démarquent de la conception américaine de la protection intellectuelle ; les normes phytosanitaires et les OGM.

Sans aller jusqu’à préconiser la suspension de ces négociations, même si elle n’a pas seulement été réclamée par des dirigeants politiques opposées à cet accord et réputés anti-européens (puisque M. Martin Schulz, président du Parlement européen et candidat pressenti des socialistes allemands pour le scrutin européen de mai 2014, a adopté ce point de vue), votre rapporteur estime que la rupture du climat de confiance occasionnée par les révélations sur l’espionnage nord-américain devrait susciter l’exigence d’une remise à plat générale par les chefs d’État et de gouvernement européens. Poursuivre le processus « comme si de rien n’était » ne pourrait qu’alimenter la défiance qui monte dans les peuples européens. À cet égard, votre rapporteur comprend les regrets exprimés par Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, dans un communiqué de presse du 18 octobre 2013, à propos du refus de publication du mandat de négociation de la Commission européenne relatif au PTCI. À la lumière des révélations récentes concernant les relations transatlantiques, la demande française devrait à tout le moins être renouvelée, avec vigueur et persévérance. Car la politique communautaire gagnerait à la fois à être plus transparente et à mieux associer les États membres : aussi votre rapporteur ne peut-il également qu’appuyer Mme Bricq dans ses demandes pour obtenir le plus rapidement possible communication du texte de l’accord négocié par la commission. Il en est de même en ce qui concerne l’ALE entre l’Union européenne et le Canada, conclu le 18 octobre 2013 mais dont la ratification nécessiterait que les États soient mieux informés de son contenu final. Et votre rapporteur considère que la France a raison de soutenir le point de vue du commissaire européen à l’industrie, M. Antonio Tajani, qui préconise que des études d’impact soient réalisées sur tous les ALE signés.

Car le rétablissement de la confiance, globalement et dans toutes les relations qu’impliquent ces ALE, est une nécessité pour qu’ils n’alimentent plus les peurs vis-à-vis d’une mondialisation dont les peuples ne seraient nullement invités à maîtriser les tenants et aboutissants, comme en témoignent les titres de deux des rares ouvrages en français consacrés au PTCI, qui visent explicitement à alerter l’opinion publique contre les atteintes à la démocratie et à la souveraineté populaire dont ils seraient le bras armé (10) : Grand marché transatlantique : Dracula contre les peuples (11), par Patrick Le Hyaric (député au Parlement européen et directeur du journal L’Humanité) ; Le grand marché transatlantique. Les multinationales contre la démocratie (12), par Ricardo Cherenti et Bruno Poncelet, préface de Jean-Luc Mélenchon (député au Parlement européen).

Par ailleurs, votre rapporteur se réjouit que la ministre du commerce défende le principe de la réciprocité dans les échanges et espère que le projet de règlement visant à l’application du principe de réciprocité dans l’ouverture des marchés publics de l’UE, présenté par la Commission européenne le 21 mars 2012 et auquel une majorité d’États membres (l’Allemagne en premier lieu) s’oppose encore (par crainte des mesures de rétorsion), finira par aboutir, dès l’année prochaine si possible. Il convient à cet égard de noter que trois pays concernés par les accords de libre-échange (ALE) susmentionnés (Canada, Singapour et États-Unis), pourtant très développés du point de vue économique et dont on ne peut dès lors considérer qu’ils auraient besoin une protection particulière, sont peu ouverts en ce qui concerne leurs marchés publics.

Ce principe de réciprocité devrait valoir pour d’autres secteurs que les marchés publics et concerner en particulier les USA et la Chine, avec laquelle la Commission européenne a été autorisée par les États membres, le 18 octobre 2013, à lancer des négociations en vue d’un accord d’investissement, afin de favoriser l’accès des entreprises et investisseurs de chaque partenaire au marché de l’autre. Une communication large et régulière est également nécessaire au sujet de ces négociations, surtout à la fin d’une année qui a vu les contentieux commerciaux entre la Chine et l’UE se multiplier (panneaux solaires, par exemple).

D’aucuns considèrent qu’une certaine « crispation » sur le principe de réciprocité est le fait de pays craintifs face au phénomène inéluctable de la mondialisation et, de ce fait, rétifs à l’ouverture des marchés. Or, le dernier rapport annuel sur la mondialisation de la société Ernst & Young, rendu public en janvier 2013, montre que la France, malgré les idées reçues, voire les procès d’intention, est plutôt ouverte sur le monde (puisqu’elle se classe 14e, en progression de sept places depuis 1995), guère moins que les grands pays européens les plus intégrés dans les échanges mondiaux (10e et 11e places pour le Royaume-Uni et l’Allemagne) et plus que de grands pays réputés plus acquis à la mondialisation (25e et 43e places pour les USA et le Japon).

Notons aussi qu’un cadre pour la négociation d’un accord international sur les services (Trade in Services Agreement – Tisa) a été adopté le 6 décembre 2013 par un groupe de vingt-trois membres de l’OMC, les « très bons amis des services » (parmi lesquels figurent notamment l’Australie, le Canada, les États-Unis, la Corée du Sud, Hong Kong, Israël, le Japon, la Turquie et l’Union européenne) et qu’a été confié à la Commission européenne, le 18 mars dernier, un mandat de négociation à ce sujet, dans lequel la France a obtenu que soit mentionné explicitement le maintien de la réserve européenne sur les services publics et le principe de l’exclusion des services audiovisuels du changement des engagements de l’Union européenne – principe qui a également été acté dans le mandat de négociation du PTCI.

Enfin, en ce qui concerne les relations avec les États-Unis, votre rapporteur encourage ses confrères à se remémorer les propos tenus le 12 décembre 2012 devant la commission des affaires économiques (13) par M. Philippe Caduc, président-directeur général de l’Agence pour la diffusion de l’information technologique (ADIT). Nous y étaient décrits de manière percutante à quel point les États-Unis avaient bâti un dispositif d’intelligence économique permettant d’exercer une extrême pression dans la compétition pour les marchés internationaux, comment, parallèlement, les secteurs stratégiques nord-américains étaient fermés aux entreprises extérieurs (en matière de cybersécurité par exemple), comment le soft power états-unien s’exerçait aussi bien en matière d’image et d’influence qu’au travers d’Organisations non gouvernementales (ONG) prescriptives de droits et de normes, telles Transparency International (qui exercerait aujourd’hui une sorte de magistère moral dans le monde sur les questions de corruption), etc. Est-il besoin de préciser que la France, et même l’UE, accusent sur tous ces points un retard considérable ?

EXAMEN EN COMMISION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean Grellier (Industrie), Mme Anne Grommerch et M. Daniel Fasquelle (Entreprises), M. Éric Straumann (Tourisme), M. Joël Giraud (Commerce extérieur), M. Damien Abad (Consommation), Mme Corinne Erhel (Communications électroniques et économie numérique) et Mme Michèle Bonneton (Postes), les crédits de la mission « Économie » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 6 novembre 2013, sur le site internet de l’Assemblée nationale (14).

*

* *

À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Économie ».

La Commission est saisie d’un amendement n° II-CE12 de Mme Sophie Dion et plusieurs de ses collègues.

M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Cet amendement a trait à un sujet que nous avons été nombreux à évoquer cet après-midi, et qui concerne le FISAC. Alors que nous souhaitons tous sa mobilisation au service de nos commerces de proximité, le budget du FISAC baisse cette année encore pour n’être plus que de 20 M€. Le présent amendement, en augmentant les crédits du FISAC de 5 M€, vise à porter son budget au niveau de celui qui était le sien l’année dernière.

M. le président François Brottes. Je crains, Monsieur le rapporteur, que l’avis de la Commission ne soit négatif.

La Commission rejette l’amendement de M. Daniel Fasquelle.

Puis elle examine l’amendement n° II-CE13 de Mme Laure de La Raudière et plusieurs de ses collègues.

M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à alerter les pouvoirs publics sur la diminution des aides apportées à La Poste pour la distribution de la presse. La subvention pour La Poste au titre du transport de la presse est passée de 249 M€ en 2013 à 150 M€ dans le projet de loi de finances pour 2014, soit une baisse de près de 100 M€. Cette diminution est extrêmement problématique pour la presse spécialisée qui représente 1 300 publications imprimées, diffusées à 341 millions d’exemplaires par an, presque exclusivement par voie postale. C’est une presse de proximité qui a besoin de La Poste pour être diffusée, Internet n’étant pas un canal adapté pour ce genre de produits.

Mme Michèle Bonneton, rapporteure pour avis. Cette question a déjà été évoquée tout à l’heure en présence de Mme la ministre.

Comme vous, je m’interroge sur la chronologie.

Comme j’ai eu l’occasion de le souligner, le contrat d’entreprise signé le 1er juillet dernier prévoyait que la compensation versée par l’État à La Poste au titre de sa mission de transport et de distribution de la presse serait de 200 M€ pour 2014. Quelques jours plus tard, le Gouvernement a décidé de réduire de 50 M€ cette dotation afin de faire supporter par La Poste une partie du financement du CICE dont elle bénéficie.

On peut en discuter mais, néanmoins, sur le fond, il me semble plutôt légitime que les entreprises chargées d’une mission de service public et bénéficiaires du CICE participent elles aussi à l’effort budgétaire de l’État. Il s’agit d’ailleurs d’une mesure transversale. De plus, il me semble plutôt injuste de faire supporter à l’INSEE et à la Direction générale du Trésor (essentiellement via les études réalisées par la Banque de France), comme vous le proposez, le financement d’une fraction du CICE dont bénéficie La Poste ! Cela voudrait dire que ces organismes paieraient une partie du CICE dont bénéficie La Poste : il y a là quelque chose de paradoxal.

Enfin, j’indique que des négociations sont d’ailleurs en cours entre les éditeurs de presse et La Poste à ce sujet et il me semble légitime de les laisser aller à leur terme. Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à cet amendement.

M. le président François Brottes. Je vous remercie pour cet éclairage, Madame la rapporteure. Je crois que M. Daniel Fasquelle n’ignore en rien la teneur des accords Schwartz signés en 2008 qui s’engageaient effectivement vers une diminution des aides à la presse. La diminution de 50 M€ devrait sans difficulté garantir cet équilibre compte tenu de ce que La Poste va recevoir au titre du CICE.

Ce qui me semble plus problématique, M. Fasquelle, c’est ce que vous enlevez aux autres programmes de la Mission « Économie »…

M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Je préfère que l’on s’assure du soutien apporté à la presse. Vous nous dites, Monsieur le Président, qu’il faut attendre un hypothétique accord signé en tenant compte de ce que La Poste pourrait avoir dans le cadre du CICE : nous y voyons pour notre part une vraie usine à gaz qui démontre par ailleurs que ce Gouvernement donne d’un côté ce qu’il reprend de l’autre. C’est extrêmement problématique et je maintiens donc cet amendement.

La Commission rejette l’amendement de M. Daniel Fasquelle.

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À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Économie ».

Conformément à l’avis de M. Jean Grellier, Mme Corinne Erhel, Mme Michèle Bonneton et M. Joël Giraud, rapporteurs pour avis, et contrairement à l’avis de MM. Daniel Fasquelle, Éric Straumann et Damien Abad, rapporteurs pour avis, la Commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie » pour 2014.

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