N° 1432 tome V - Avis sur le projet de loi de finances pour 2014 (n°1395)


A. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 102 AUGMENTENT FORTEMENT 9

1. Le programme 102 accroît le financement du service public de l’emploi 9

a. Des moyens accrus accordés à Pôle Emploi 9

b. L’action des missions locales doit être davantage soutenue 11

2. Le fonds de solidarité indemnise plus de chômeurs en fin de droits 13

3. Les dépenses en faveur des contrats aidés augmentent 14

4. L’État crée une garantie jeune et conforte l’accompagnement des handicapés vers l’emploi 16

a. La préservation des crédits destinés aux salariés handicapés 16

b. Des moyens pour mettre en place la garantie jeune 16

5. La réforme du financement de l’insertion par l’activité économique est provisionnée par 25 millions d’euros 17

B. LE PROGRAMME 103 SE RECENTRE SUR LES MUTATIONS ÉCONOMIQUES 18

1. Les dotations de formation professionnelle sont affectées aux régions 18

2. Des économies sont faites sur la prime d’apprentissage et des dépenses fiscales 19

3. Une priorité est donnée à l’accompagnement des mutations économiques 21

4. Les contrats d’apprentissage stagnent, ceux de professionnalisation progressent 23

5. Les aides au développement de l’emploi et de l’entreprise sont reconduites 23

C. LE PROGRAMME 412 INVESTIT DANS LES FORMATIONS D’AVENIR 24

D. L’AFPA, EN PLEINE REFONDATION, RESTE MENACÉE À COURT TERME 25

1. L’État a créé l’AFPA pour sélectionner et qualifier une main d’œuvre ouvrière 26

2. La libéralisation de la formation et le déclin de l’emploi industriel déstabilisent l’association 28

3. L’État a préservé jusqu’en 2009 l’indépendance financière de l’AFPA à l’égard des régions et de l’ANPE 29

4. L’équilibre économique de l’AFPA n’a pas survécu à la perte de la subvention de l’État 32

5. Un plan de refondation de l’AFPA est adopté le 15 novembre 2012 39

6. Trois scénarios d’évolution pour l’AFPA restent envisageables 45

a. Une recapitalisation immobilière avant privatisation 45

b. Deux stratégies de service d’intérêt économique général (SIEG), l’une nationale, l’autre régionale 46

CONCLUSION 50

TRAVAUX DE LA COMMISSION : EXAMEN DES CRÉDITS 51

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 61

INTRODUCTION

La mission Travail et emploi comprend cinq programmes : 102 – Accès et retour à l’emploi, 103 – Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi, 111-Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail, 155 – Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail, qui est son programme support et 412 – Formation et mutations économiques.

Votre rapporteur donnera un avis sur les programmes 102, 103 et 412 avant de revenir sur la situation préoccupante de l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

Les dépenses couvertes par les crédits des programmes 102 et 103 ont trois objectifs principaux : l’accès à l’emploi, la qualification professionnelle de la main-d’œuvre, en particulier celle des demandeurs d’emploi, des jeunes sans diplôme et des personnes handicapées ou en situation de fragilité sociale et l’accompagnement des mutations économiques.

Le budget de l’emploi est prioritaire pour le Gouvernement. Il doit permettre de faire baisser un taux de chômage qui atteint 10,9 % de la population active au deuxième trimestre 2013 et 25,7 % des 15-24 ans. L’allongement de la durée moyenne des périodes d’inactivité est tout aussi préoccupant que la hausse de ce taux. 40 % des inscrits à Pôle emploi en mai 2013 l’étaient depuis plus d’un an, contre 38,4 % en août 2012.

Les jeunes et les chômeurs de longue durée qui restent longtemps sans emploi perdent leur qualification et s’éloignent, par découragement, du marché du travail. Le Gouvernement est résolu à lutter contre ce risque d’exclusion sociale et, en premier lieu, à obtenir une inversion de la courbe du chômage avant la fin de l’année.

Son engagement se traduit par la hausse des crédits de paiement de la mission Travail et Emploi de 10,3 milliards d’euros en 2013 à 11,1 milliards en 2014, alors que la prévision de la loi de programmation des finances publiques anticipait une baisse de 500 millions de ce budget.

La comparaison des budgets des deux principaux programmes de la mission doit tenir compte des modifications de structure du programme 103. 1,45 milliard d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement, correspondant aux anciennes dotations de décentralisation, et une centaine de millions d’euros de dépenses lui ont été enlevés. 1,2 milliard d’euros d’autorisations d’engagement et 390 millions d’euros de crédits de paiement lui sont ajoutés pour couvrir les dépenses des contrats de génération.

Abstraction faite de ces modifications de structure et du relèvement des crédits des emplois aidés en cours d’exercice, les programmes 102 et 103 reçoivent, à eux deux, dans le projet de loi de finances pour 2014, 700 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 1,6 milliard d’euros de crédits de paiement de plus que dans la loi de finances pour 2013.

Ces crédits supplémentaires profitent principalement à l’enveloppe des contrats aidés et des emplois d’avenir, dont le budget global passe de 3,1 milliards d’euros en 2013 à 4,25 milliards de crédits de paiement en 2014. Ces contrats doivent permettre, comme le Président de la République s’y est engagé, de donner un premier travail ou une nouvelle chance aux publics auxquels ils sont réservés, à savoir les jeunes de 16 à 25 ans qui rencontrent le plus de difficultés pour accéder à l’emploi, les demandeurs d’emploi de longue durée et les allocataires de minima sociaux.

L’effort fait sur les contrats aidés n’est pas seulement quantitatif. Il est aussi qualitatif. La durée moyenne des contrats uniques d’insertion va atteindre 12 mois. Les emplois d’avenir redonnent confiance, par un contrat de travail de trois ans ou d’un an renouvelable deux fois, à des jeunes, peu ou pas qualifiés. Ils ajoutent à l’emploi une obligation de formation et un suivi personnalisés.

Aux jeunes les plus isolés ou en grande précarité qui ne sont pas encore prêts pour un engagement professionnel de longue durée, l’État propose un premier emploi court ou une formation en même temps qu’une garantie de ressources. Il renforce l’insertion par l’activité économique qui a fait la preuve de son efficacité alors que son budget a été, bloqué pendant 10 ans par l’ancienne majorité.

Le programme 103 reçoit les crédits supplémentaires qui couvrent les dépenses du contrat de génération et la progression des contrats de sécurisation professionnelle. La montée en puissance des contrats de génération, lente en 2013, devrait s’accélérer en 2014 et 2015, après la signature des conventions de branche dont la négociation a pris du retard. Le report sur une fiscalité affectée aux régions, des 900 millions d’euros de dotation de décentralisation et la suppression de l’ancienne indemnité compensatoire forfaitaire recentrent ce programme sur l’accompagnement des mutations économiques.

En confiant aux régions, en un seul bloc de compétence, la formation professionnelle et les ressources budgétaires qui assuraient son financement public, l’État renforce le processus de décentralisation et leur donne clairement les moyens de conduire leur politique et de l’adapter à leurs bassins d’emploi. Mais cette décentralisation a fragilisé la position institutionnelle de l’AFPA qui assurait cette formation pour le compte de l’État.

Votre rapporteur avait déjà alerté la commission l’an dernier sur la dégradation de son bilan. Un plan de refondation a été adopté fin 2012 pour lui permettre d’en rétablir l’équilibre. La dernière partie de cet avis fera le point de la situation ainsi que des difficultés de mise en œuvre de ce plan. Ces dernières tiennent pour l’essentiel au fait que la place de cette association dans le service public de l’emploi et de la formation professionnelle, contestée par ses concurrents, lui avait été déniée par le précédent Gouvernement.

Celui-ci s’est en effet désintéressé du sort de l’AFPA avant d’être rappelé à la réalité par la dégradation brutale de ses comptes en 2012. L’association est bien sûr atypique sur le marché de la formation professionnelle actuelle. Elle a gardé une expertise et un savoir-faire dans des secteurs industriels longtemps mésestimés mais dont on comprend aujourd’hui l’intérêt économique pour le pays. Elle a gardé un maillage territorial inégalé dont ses concurrents font l’économie. Elle sait donner une qualification professionnelle et même le goût des métiers techniques à des populations qui ont lâché prise à l’école et parfois renoncé à chercher un emploi.

À l’heure où l’État lance un programme de 30 000 formations supplémentaires, voire nettement plus, il ne peut pas faire une croix sur cette association en la sommant de s’aligner sur des concurrents qui n’ont ni ses atouts ni ses charges. L’AFPA doit retrouver ses missions régionales, d’orientation et de formation professionnelle des publics les plus fragiles et les moins qualifiés et, sur le plan national, une mission de formation d’une main d’œuvre à des métiers rares, sur quelques plateaux techniques d’excellence.

Les objections élevées contre la délégation, à l’AFPA, d’un mandat public de requalification des demandeurs d’emplois les plus fragiles et des jeunes sans diplômes viennent d’une appréciation restrictive du cadre juridique européen dans lequel s’exercent les activités qui lui seraient confiées. Ces objections bloquent l’association dans une impasse économique qui la met en péril.

Le Premier ministre s’est engagé à soutenir sa réorganisation. Les régions, la nouvelle direction, les partenaires sociaux, le personnel, sont tous déterminés à la tirer d’affaire en l’adaptant aux besoins actuels des entreprises et des actifs. Il ne manque plus qu’une levée des obstacles juridiques et des risques de trésorerie qui inquiètent le ministère de finances. La prochaine loi de finances rectificative et la réforme annoncée de la formation professionnelle offrent une chance unique, peut-être la dernière, de lever ces obstacles et de sauver une association indispensable à la ré-industrialisation du pays et à la lutte contre le chômage de longue durée.

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 50 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues à votre rapporteur pour avis.

Le programme 102 finance le service public de l’emploi. Il indemnise, par l’intermédiaire du fonds de solidarité, les chômeurs qui ne bénéficient plus de l’assurance sociale. Il accorde des aides à l’emploi, sur contrats, aux personnes les plus éloignées du marché du travail.

Ce budget finance en particulier l’insertion sur le marché du travail des jeunes, dont le taux de chômage est inacceptable, ainsi que la réinsertion sur ce marché des chômeurs de longue durée et des publics les plus fragiles, exposés à la désocialisation.

Il reçoit de ce fait le principal des ressources nouvelles dégagées par le Gouvernement en faveur de l’emploi. Son budget passe de 5,7 milliards d’euros de crédits de paiement en 2013 à 7,2 milliards en 2014, soit 1,5 milliard d’euros de plus, qui permettent d’augmenter une nouvelle fois la dotation de Pôle Emploi, de faire face aux dépenses supplémentaires d’indemnisation des chômeurs en fin de droits et surtout de financer davantage de contrats aidés, en particulier les emplois d’avenir ainsi que la garantie jeune et l’insertion par l’activité économique.

Il accompagne la réorganisation des services de Pôle Emploi, afin d’améliorer l’accueil et l’orientation personnalisés des demandeurs d’emploi, en contrepartie du budget public considérable qui leur est alloué.

L’État subventionne Pôle Emploi selon une programmation budgétaire convenue. Il lui versera, en 2014, 1,537 milliard d’euros de subventions pour la dernière année d’exécution de la convention tripartite signée le 11 janvier 2012. Le budget de Pôle Emploi n’est pas seulement financé par l’État.

Il l’est aussi par l’Unédic, qui verse, chaque année, à l’opérateur, 10 % de l’assiette des contributions d’assurance chômage recouvrées l’année précédente. Ce mode de financement donne à Pôle Emploi une garantie de ressources annuelles supplémentaires qui ne l’incite pas à limiter ses frais de fonctionnement.

La convention tripartite entre l’État, l’Unédic et Pôle Emploi prévoyait que l’opérateur reviendrait à l’équilibre financier en 2014 et, qu’entre 2012 et 2014, l’État lui apporterait 1,36 milliard d’euros par an. Certes, les pertes de l’opérateur ont bien été réduites, d’un tiers, à près de 60 millions d’euros en 2012 et des trois quarts, à 12 millions d’euros selon la prévision faite pour 2013.

Mais la contribution de l’Unédic, qui était fixée à 3 milliards d’euros en 2012, a augmenté mécaniquement de plus de 110 millions par an, tandis que celle de l’État a été relevée tous les ans, de 51 millions en 2012, 56 millions en 2013 et 70 millions en 2014.

Les services de la direction du budget ont en outre indiqué à votre rapporteur qu’en plus de ces dotations supplémentaires, Pôle Emploi avait reçu 50 millions d’euros de l’État au titre de sa participation au plan de 30 000 formations prioritaires.

Dans un contexte budgétaire difficile pour l’État mais aussi pour l’Unédic, dont le déficit est passé de 2,8 milliards d’euros en 2012 à près de 5 milliards en 2013 et devrait être équivalent en 2014, les hausses de dotations consenties à Pôle Emploi peuvent paraître excessives alors que la fusion de l’ANPE et des Assédic était supposée apporter des économies d’échelles.

La hausse massive du chômage sur la période a bien sûr exigé une augmentation du nombre de conseillers affectés à l’accompagnement personnalisé des demandeurs d’emploi, en relation avec les missions locales et les Cap emploi. Pôle Emploi a dû redéployer des personnels et en recruter.

Sur trois ans, 6 000 conseillers supplémentaires auront été affectés à cet accompagnement, 2 000 par recrutement en 2012, autant par redéploiement interne en 2013 et encore autant par recrutement en 2014. Les effectifs de Pôle Emploi sont passés, entre 2012 et 2014, de 45 807 à 49 422 postes équivalents à des temps pleins.

C’est au paiement de ces dépenses de personnel supplémentaires que servent les hausses de dotations consenties par l’État. Au total, ces dépenses consomment les trois-cinquièmes du budget de Pôle Emploi, soit 3 milliards d’euros sur 5. Mais les dépenses immobilières et de frais de gestions progressent plus encore que celles de personnels pour atteindre plus d’un milliard d’euros. Les frais immobiliers ont augmenté de 5 % en 2012 et de 11 % en 2013.

Les dépenses d’intervention, qui permettent l’insertion professionnelle et l’accompagnement des demandeurs d’emplois, absorbent entre 800 et 900 millions d’euros selon les années, dépensés pour une large moitié en aides versées pour le développement de compétences, la mobilité ou l’embauche et, pour le reste, en prestations de placement, de formation ou d’accompagnement sous-traitées par appels d’offres.

Pôle Emploi verse aussi 86 millions d’euros d’allocation équivalent retraite (AER) à 7 350 bénéficiaires en 2014 et 66 millions d’euros d’allocations transitoires de solidarité (ATS) aux 5 200 salariés qui, depuis 2009, ont cotisé suffisamment longtemps pour bénéficier d’une pension complète mais n’ont pas encore atteint l’âge légal de départ en retraite. Les salariés qui se trouvaient dans cette situation avant 2009 sont encore indemnisés au même titre par le fonds de solidarité, pour une dépense de 79,3 millions d’euros partagée entre 6 445 allocataires.

La modification des règles de départ en retraite pénalisait 7 800 bénéficiaires de l’AER. Le Gouvernement leur a accordé, par un décret du 4 mars 2013, le bénéfice d’une ATS exceptionnelle, à l’expiration de leurs droits à l’indemnisation, jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge légal de départ, au plus tard le 31 décembre 2015.

Votre rapporteur estime que l’exigence, imposée par le décret, d’être indemnisable au titre de l’allocation d’assurance chômage ou de l’allocation spécifique de reclassement ou de l’allocation de transition professionnelle à la date du 31 décembre 2010, est pénalisante pour les salariés du même âge, qui n’étaient plus indemnisés, à cette date, par l’assurance chômage mais par l’État.

Un rapport, demandé par un amendement défendu par votre rapporteur et devenu l’article 10 bis du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraite, indiquera dans quelles conditions et à quel coût l’ATS pourrait leur être accordée, sans oublier les chômeurs nés dans les années suivantes.

Pôle Emploi rémunère, pour le compte de l’État, les fins de formation, financées par 73 millions d’euros de crédits budgétaires, complétés par 85 millions d’euros provenant du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Cette rémunération est destinée aux chômeurs en fin de droits qui achèvent une formation prévue par leur projet personnalisé, selon des modalités analogues à l’allocation de fin de formation (AFF) auparavant attribuée par le Fonds de solidarité, ou à l’allocation provisoire en faveur des demandeurs d’emploi en formation (AFDEF). Pôle Emploi distribue enfin les 40 millions d’euros d’allocations temporaires d’attente aux demandeurs d’asile, aux bénéficiaires de protections temporaires ou subsidiaires et aux anciens détenus.

Pôle emploi n’est pas le seul opérateur du service public de l’emploi. Les missions locales et les maisons de l’emploi partagent avec lui l’accueil, l’orientation, le placement et l’accompagnement des publics les plus fragiles, en particulier celui des jeunes.

En première ligne dans la lutte contre le chômage des jeunes, les missions locales étaient déjà chargées de l’accompagnement des contrats d’insertions dans la vie sociale, des contrats unique d’insertion et des prescriptions de formations.

L’État leur a confié, avec Cap emploi, le dispositif des emplois d’avenir. Les missions locales négocient avec les employeurs les termes de ces contrats et les modalités de l’obligation de la formation afférente.

Elles n’abandonnent pas le jeune une fois le contrat signé mais le suivent sur toute la durée de son exécution. Ces dernières vont également accompagner les bénéficiaires de la garantie jeune. Ce surcroît de travail n’a pas été compensé par la subvention de 30 millions d’euros, prévue par le programme des emplois d’avenir pour financer leur accompagnement, réduite à 25 millions par les réserves de crédits, et qui sous-estime le coût réel du suivi des emplois par les missions locales.

Alors que ces dernières se sont fortement mobilisées pour atteindre l’objectif de 100 000 contrats signés fin 2013, le budget de d’accompagnement porté à 45 millions d’euros pour 150 000 contrats en 2014 persiste dans cette même sous-estimation. Votre rapporteur estime à 60 millions d’euros le coût réel de l’accompagnement des contrats en 2014.

Cette charge nouvelle s’ajoute aux autres prestations des missions locales, couvertes par une dotation de 178,8 millions d’euros qui n’a pas été revalorisée depuis plusieurs années alors que l’efficacité manifeste de leur intervention auprès des jeunes, que les sociologues appellent parfois les jeunes invisibles, dont elles gagnent la confiance, conduit désormais plus de 1,3 million d’entre eux à pousser leur porte.

Pour soutenir leur action, votre rapporteur propose de relever leur subvention pour charges de service public de 12 millions d’euros et souhaite obtenir un engagement du Gouvernement sur le relèvement des crédits d’accompagnement des emplois d’avenir.

La question des maisons de l’emploi revient chaque année. Leur budget perd 26 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 23 millions d’euros de crédits de paiement en 2014.

Restent 26 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 40 millions d’euros de crédits de paiement dont 26 de fonctionnement, 10 d’investissement et 4 liés aux actions prévues par les contrats de plan État-Régions.

Ces maisons de l’emploi, qui n’ont plus vocation à faire un travail d’accompagnement depuis la création de Pôle Emploi, ont recentré leur activité sur le diagnostic, l’expertise et la prospective territoriale.

Étant donné que la planification, la commande et le financement des formations relèvent désormais exclusivement des régions, tandis que la politique de l’emploi reste partagée avec l’État, la dotation budgétaire de ces maisons pourrait être convertie en une dotation de décentralisation affectée aux budgets régionaux. Ces dernières seront mieux à même que l’État d’apprécier les besoins réels de financement de ces maisons, qui sont contrastés selon les bassins.

Un Fonds de solidarité créé par la loi du 4 novembre 1982 indemnise des demandeurs d’emploi qui ne sont plus éligibles à l’assurance chômage. Les dépenses du Fonds seront de 2,6 milliards d’euros en 2014, en augmentation de 10 % par rapport à 2013, en raison de l’accroissement du chômage de longue durée.

Ces dépenses sont couvertes pour moitié par le produit de la contribution exceptionnelle de solidarité de 1 %, perçue sur le traitement des fonctionnaires et des salariés des secteurs public et parapublic, ce produit étant estimé à 1,4 milliard d’euros en 2014. 141 millions d’euros seront tirés du prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement. Une contribution du budget de l’État apportera le reste, soit un 1,1 milliard d’euros.

Abstraction faire des dépenses de fonctionnement du fonds, qui laissent apparaître une hausse des provisions pour risques et charges d’exploitation, passées, entre 2012 et 2013, de 55 à 413 millions d’euros, les ressources du fonds financent l’allocation de solidarité spécifique (ASS). Elle devrait coûter 2,442 milliards d’euros en 2014, soit 282 millions d’euros de plus que l’année précédente. Cette allocation devrait être versée, à 431 488 bénéficiaires en 2014 au lieu de 379 283 attendus en 2013, soit une hausse de 13 %.

Outre la part d’allocation équivalent retraite déjà mentionnée, le fonds verse un reliquat de 10 millions d’euros de l’ancienne allocation de fin de formation (AFF), 42 millions d’euros d’aide à la création ou à la reprise d’entreprise (ACCRE), à 7 164 bénéficiaires, et 76 millions d’euros de primes mensuelles d’intéressement forfaitaires de 150 euros aux 45 511 bénéficiaires de l’ASS qui ont repris une activité professionnelle d’une durée au moins égale à 78 heures par mois.

Les effectifs des bénéficiaires des allocations du Fonds de solidarité, depuis la crise de 2008, hors allocation transitoire de solidarité (ATS), ont évolué comme suit :

Effectif

2008

2009

2010

2011

2012

2013 (PAP)

2014 (PAP)

ASS

328 531

341 615

343 104

367 401

379 355

379 280

431 488

ACCRE ASS

6 099

4 195

5 858

6 693

6 941

7 250

7 164

Prime forfaitaire

17 873

30 015

33 446

36 614

39 450

42 511

AER

84 203

62 553

41 019

24 568

17 447

10 750

6 445

AFF

44 138

28 251

13 149

8 873

1 837

1 290

1 248

APS (*)

121

203

79

129

84

77

81

AFD (*)

598

741

1 704

663

539

603

(*) Effectif moyen mensuel.

Le programme 102 prévoit le versement de 4,25 milliards d’euros d’aides aux contrats de travail signés par des personnes particulièrement exposées au chômage, dont les trois quarts vont aux contrats uniques d’insertion et aux emplois d’avenir.

La loi de finance initiale pour 2012 prévoyait la conclusion de 340 000 contrats uniques d’insertion, dont 90 000 cofinancés avec les conseils généraux pour les bénéficiaires du RSA. Ce contingent initial a été relevé en cours d’année de 127 000 unités, les budgets correspondant atteignant près de 2,2 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 1,8 milliard de crédits de paiement.

En 2013, une prévision initiale de 390 000 contrats a été augmentée, conformément au plan pluriannuel, adopté le 21 janvier 2013 lors de la réunion du Comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE), de 42 000 contrats d’accompagnement dans l’Éducation nationale et 50 000 contrats classiques.

Le projet de loi de finances prévoit à nouveau le financement, en 2014, de 280 640 contrats uniques d’insertion chaque mois, en tenant compte des 340 000 contrats uniques d’insertion conclus au cours l’année et de l’échéance progressive des contrats des années précédentes, retardée du fait de l’allongement de leur durée moyenne. 300 000 nouveaux contrats d’accompagnement dans l’emploi devraient être signés en 2014 dans le secteur public ou associatif et 40 000 contrats initiative emploi dans le secteur marchand.

Le budget de ces contrats atteint à 2,3 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 1,9 milliard d’euros de crédits de paiement, afin de financer leur forte progression au second semestre 2013 et l’allongement de leur durée moyenne de 7,1 mois en 2012, à 7,8 mois au premier semestre 2013 puis 9,3 mois au second semestre. Leur durée moyenne devrait atteindre 10,6 mois en 2014, très proche, compte tenu des ruptures anticipées, de l’objectif des 12 mois fixé par le Gouvernement.

L’affectation de ces crédits budgétaires sera modifiée, au second semestre de l’année prochaine, par la transformation de 90 000 contrats, exécutés dans les chantiers et ateliers d’insertions, en contrats à durée déterminée, ouvrant droit à l’aide au poste d’insertion.

L’allongement de la durée des autres contrats témoigne de l’attention portée par le Gouvernement et le service public de l’emploi, non pas seulement aux objectifs quantitatifs du plan pluriannuel, mais aussi à l’amélioration qualitative de contrats qui offrent une véritable expérience professionnelle.

Leurs publics prioritaires restent les chômeurs de très longue durée, inscrits au moins 18 mois à Pôle emploi dans les 24 derniers mois, les plus de 50 ans, les bénéficiaires du RSA ainsi que les jeunes ne répondant pas aux conditions d’accès aux emplois d’avenir.

Les emplois d’avenir ont été créés par la loi du 26 octobre 2012, conformément aux engagements pris par le Président de la République, en faveur de l’emploi et de la jeunesse. Ces emplois offrent à des jeunes, sortis sans diplôme du système scolaire et n’ayant pas acquis, par la suite, de qualification professionnelle, un emploi plus long que ceux proposés en contrat unique d’insertion.

100 000 contrats d’avenir devraient être signés en 2013, au cours d’une montée en charge décrite par le rapport d’information de notre collègue Jean-Marc Germain. 50 000 contrats supplémentaires sont attendus en 2014, d’une durée moyenne comprise entre deux et trois ans. Les contrats d’avenir représentent une dépense budgétaire estimée à 1,29 milliard d’euros en 2014, contre 1,9 milliard pour les contrats uniques d’insertion, trois fois plus nombreux mais deux fois plus courts. Les aides que l’État apporte à tous ces contrats transitent par l’Agence des Services et de Paiement (ASP), établissement public à caractère administratif placé sous la double tutelle des ministères du travail et de l’agriculture.

DÉPENSES PRÉVISIONNELLES DE L’AGENCE DES SERVICES DE PAIEMENT EN 2014 :

 

PLF 2014

 

AE

CP

Subventions pour charges de service public (P102)

46 373 218

46 373 218

Frais de gestion de l’ASP

46 373 218

46 373 218

Total Transferts P102

4 138 985 563

3 795 146 387

CUI non marchand

2 198 293 570

1 807 942 205

CUI marchand

164 497 679

135 626 273

Contrats d’accès à l’emploi DOM

12 479 904

12 479 904

Contrats emploi consolidés DOM

885 274

885 274

Contrats emploi solidarité

10 000 000

10 000 000

Emplois d’avenir

1 170 869 693

1 246 253 288

Aides au poste des entreprises adaptées

289 865 602

289 865 602

Insertion par l’activité économique (IAE)

222 000 000

222 000 000

Allocation CIVIS

50 000 000

50 000 000

Garantie jeunes – volet aide

20 093 841

20 093 841

Total Transferts P103

338 500 000

330 610 090

Activité partielle

120 000 000

120 000 000

Rémunération des stagiaires AFPA

39 500 000

39 500 000

Rémunérations des stagiaires - actions qualifiantes

146 000 000

146 000 000

Dispositifs PIJ - création d’entreprise outre-mer

1 500 000

1 500 000

NACRE

31 500 000

23 610 090

Outre le service public de l’emploi et les contrats aidés, le programme 102 alloue 876 millions d’euros à l’accompagnement personnalisé vers l’emploi de jeunes et de personnes handicapées ou en grande précarité. 337 millions d’euros d’aides sont destinés à favoriser l’embauche de salariés handicapés.

Ce budget, qui avait augmenté de plus de 7 % en 2013, est, cette année, reconduit à l’identique puisque les deux budgets précédents n’avaient pas été entièrement consommés. Sur cette somme, 290 millions d’euros sont destinés à l’aménagement du poste de travail.

40 millions d’euros seront versés sous forme de subventions aux entreprises qui emploient majoritairement des handicapés et 7 millions d’euros seront réservés aux plans régionaux d’insertion des travailleurs handicapés. Il est à noter que la création des 1 000 places supplémentaires prévues, par le pacte pour l’emploi dans les entreprises adaptées, a été reportée à 2015.

La majeure partie de ces crédits alloués à l’accompagnement renforcé des jeunes vers l’emploi est gérée par les 466 missions locales déjà évoquées. À leur budget de fonctionnement de 178,8 millions d’euros s’ajoutent 50 millions d’euros versés aux bénéficiaires d’un contrat d’insertion dans la vie sociale (CIVIS), 22 millions d’euros d’aides servies par le fonds d’insertion professionnelle des jeunes (FIPJ). Le Gouvernement expérimente en 2014 une approche nouvelle, la garantie jeune, destinée à réinsérer par étapes, dans la vie sociale puis dans le travail, les moins de 25 ans qui, sortis du système scolaire sans diplôme, demeurent sans emploi et sans formation professionnelle.

30 millions d’euros provisionnent cette garantie jeune, apportée par l’État à un contrat annuel renouvelable, convenu entre un jeune et sa mission locale. Ce contrat prévoit une formation, une reprise de scolarité ou un premier emploi court ou en intérim. Un suivi du jeune est assuré par la mission tout au long de l’année, en contrepartie d’une allocation d’un montant équivalent au RSA, soit 433,75 euros par mois, cumulable avec des revenus d’activité mais également versée pendant les périodes d’inactivité.

Le ministre du travail a décrit, lors du conseil des ministres du 2 octobre dernier, le déploiement de cette garantie. Les premiers contrats ont été signés en septembre dernier. Ils ne concernent que dix territoires pilotes. L’extension progressive du dispositif est prévue jusqu’en 2016. Elle permettra d’atteindre un nombre annuel de bénéficiaires de 10 000 en 2014, 30 000 en 2015 et jusqu’à 100 000 par la suite.

Le coût total de cette garantie tient compte de l’allocation versée et de la charge financière de l’accompagnement du jeune par la mission locale, qui est estimée à 1 600 euros par an. Il pourrait être allégé, pour le budget de l’État, par une aide complémentaire européenne qui est attendue à l’issue du sommet pour l’emploi des jeunes en Europe, qui se tiendra à Paris le 12 novembre.

Le budget d’accompagnement des jeunes préserve les écoles de la deuxième chance, cofinancées aux deux tiers par les collectivités territoriales et le fonds social européen, qui conservent leurs 12 000 places et leur subvention de 24 millions d’euros. Le budget préserve aussi l’établissement public d’insertion de la Défense, qui conserve ses 18 centres défense 2e chance, ses 2 000 places et 67 millions d’euros de subventions, dont 45 millions sont imputés sur le programme 102 et 22 sur le programme 147 de la politique de la ville.

Les projets d’insertion par l’activité économique reçoivent, en 2014, 15 millions d’euros supplémentaires, qui s’ajoutent aux 10 millions d’euros votés grâce à un amendement de votre commission l’an dernier. Le projet de la loi de finances pour 2014 porte cette dotation à 222 millions d’euros. Ce budget abonde les fonds départementaux d’insertion. Il apporte une aide à la création de postes dans les entreprises d’insertion (EI), les entreprises d’intérim (ETTI), les associations intermédiaires (AI) et les ateliers et chantiers d’insertion (ACI).

Les entreprises d’insertion avaient été négligées sous les deux législatures précédentes. Les aides dont elles pouvaient bénéficier avaient été soumises, depuis 2002, à un double plafonnement, du nombre de postes pouvant être subventionnés dans une même entreprise, et du montant de l’aide attribuée à chaque poste.

Votre rapporteur avait obtenu l’an dernier, par amendement, que le plafond des postes des entreprises d’insertion, qui sont les acteurs majeurs du secteur et ceux qui, par leur activité économique, ont le plus fort potentiel de création d’emplois, soit revalorisé à hauteur de 10 millions d’euros. Finalement, cette aide a été répartie entre les quatre structures d’insertion par l’activité économique dans la lutte contre le chômage, 3,5 millions d’euros seulement allant finalement aux entreprises d’insertion.

Le Gouvernement a accepté de relever à nouveau le budget de l’insertion par l’activité économique de 15 millions d’euros en 2014, portant l’aide au poste des structures les plus efficaces à 10 500 euros, afin de rattraper le retard, déjà partiellement comblé l’an dernier, pris depuis 2002 sur l’inflation. Il a surtout accepté que cette aide soit indexée sur l’évolution du SMIC à partir de 2015, quand 90 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi, transformés en postes d’insertion dans les chantiers, auront, entretemps, augmenté les effectifs de bénéficiaires. Le rapporteur propose, par amendement, de sécuriser les financements du Fonds de solidarité européen en le faisant porter par l’État.

Les autorisations d’engagement du programme 103 diminuent marginalement de 30 millions d’euros mais atteignent encore près de 3,7 milliards d’euros en 2014. Sous couvert d’une stabilité apparente, des mouvements de crédits entre les actions traduisent un recentrage du programme 103, et donc de la politique du ministère du Travail et de l’Emploi, sur l’accompagnement des restructurations économiques des entreprises.

La formation professionnelle et l’apprentissage ne relèvent plus de l’État et sont dévolus aux régions. Leur bloc de compétences devrait être étendu par la prochaine loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires.

Le financement de ces politiques par les dotations de décentralisation du programme 103 est progressivement remplacé par un financement sur des recettes fiscales nationales, reversées aux régions, afin de leur donner les moyens d’une politique autonome. Les dotations de décentralisation supprimées en 2014 s’élevaient à 901 millions d’euros en 2013, ainsi répartis :

DOTATIONS DE COMPENSATION DU COÛT DES COMPÉTENCES TRANSFÉRÉES

 

PLF 2013

Enveloppe de rééquilibrage au titre de l’aménagement du territoire

10 651 782

Compensation de la revalorisation de la rémunération des stagiaires

9 225 583

Apprentissage Mayotte

6 000 958

Actions décentralisées en faveur des jeunes

870 387 409

Frais de gestion de l’ASP liés à la décentralisation des actions

5 068 540

Total

901 334 272

Ces dotations compensaient le coût financier du transfert aux régions de formations qualifiantes et pré-qualifiantes des jeunes de moins de 26 ans et des populations rurales ainsi que la rémunération des stagiaires.

Pour les remplacer, les articles 24 quater et 25 du projet de loi de finances pour 2014 prévoient d’affecter aux régions, à la collectivité territoriale de Corse et au Département de Mayotte, selon une répartition proportionnelle fixée légalement par avance, au prorata de ce que chaque collectivité perçoit en 2013, une fraction du produit de quatre taxes :

– la cotisation foncière des entreprises ;

– le prélèvement de 1 % en sus du montant de la cotisation sur leur valeur ajoutée ;

– la taxe d’habitation ;

– la taxe intérieure de consommation sur les carburants.

La substitution de recettes régionales, proposée par l’article 25, laisse de côté l’indemnité compensatrice forfaitaire qui s’élevait à 551 millions d’euros en 2013. Cette indemnité permettait aux régions de verser une prime aux entreprises qui employaient un apprenti.

L’article 77 remplace cette ancienne prime d’apprentissage par une nouvelle, réservée aux employeurs de moins de 11 salariés. Le coût de cette nouvelle prime pour les régions est estimé à 430 millions d’euros en 2014, en raison de frais de transition entre les deux régimes de prime et 230 millions en régime de croisière.

La compensation des 430 millions d’euros a fait l’objet de négociations de dernière minute. Dans le projet de loi de finances initial, cette compensation reposait sur les fonds du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », décrits par le programme 787.

Le projet de loi trouvait dans ce compte 250 millions d’euros distraits de la compensation des anciennes primes d’apprentissage en 2012, parce que cette somme n’aurait pas servi au paiement des anciennes primes mais à celui d’actions de développement de l’apprentissage. Il puisait aussi 140 millions d’euros sur les 200 millions de crédits de péréquation de la taxe d’apprentissage et 100 millions d’euros dans le fonds de roulement du compte.

Ce mode de financement aurait conduit à priver les régions de ces sommes. L’amendement 801 du Gouvernement, devenu article 23 bis, finance finalement la nouvelle prime d’apprentissage par une économie, de 117 millions en 2014 et 235 millions en 2015, sur le crédit d’impôt accordé aux entreprises qui embauchent un apprenti, en le réservant aux entreprises de moins de 11 salariés.

Cette économie n’est pas reversée directement aux régions. Elle passe par une affectation de recettes équivalentes de taxe intérieure de consommation sur les carburants, prévue par l’article 24 quater.

À ces 117 millions d’euros s’ajoutent, en 2014, 50 millions, au lieu de 100, pris sur le fonds de roulement du compte d’affectation spéciale et 263 millions d’euros au moins, pris sur les crédits des contrats de génération, qui progressent moins vite que prévu. Ce solde donne lieu à la reconstitution d’une compensation de prime d’apprentissage dans le programme 103.

Cette compensation momentanée mise à part, la réforme de la prime et du crédit d’impôt permet une économie 550 millions d’euros sur la compensation des primes d’apprentissage versées par les régions aux entreprises de plus de 11 salariés. Ce n’est pas la seule économie réalisée sur les dépenses du programme 103.

En effet, l’article 78 du projet de loi de finances soumet les exonérations de cotisations employeurs, accordées aux organismes d’intérêt général ayant leur siège social dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), au barème dégressif déjà appliqué aux embauches, faites par des entreprises et des organismes d’intérêt général de moins de 50 salariés, implantés dans les mêmes zones.

Ce barème dégressif s’ajoute à la restriction de l’exonération aux organismes de moins de 500 salariés qui avait été adoptée par amendement, sur proposition du Gouvernement, l’an passé, afin de gager des dépenses en faveur de l’insertion économique. Les rémunérations inférieures ou égales à 1,5 fois le SMIC resteront totalement exonérées.

L’exonération ne diminuera progressivement que pour les rémunérations égales ou supérieures au seuil de 2,4 fois le SMIC, ce qui permettra de reporter l’aide sur des postes d’insertion économique plus faiblement rémunérés.

La compensation, à la sécurité sociale, de ces exonérations, par le programme 103, s’élevait initialement à 151 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2013. Le plafonnement voté en première lecture a abaissé cette compensation à 134 millions. Le barème dégressif mis en place pour 2014 permet une économie supplémentaire de près de 31 millions d’euros.

De la même manière, l’extinction progressive des exonérations de cotisations sociales en zone de restructuration de la défense, limitée à 5 ans, réduit leur compensation aux organismes de sécurité sociale de 30,8 millions d’euros en 2013, à 8,5 millions d’euros en 2014.

La fin de la compensation, en 2014, de l’exonération temporaire de charges consentie, en 2012, aux très petites entreprises qui embauchaient un jeune de moins de 26 ans, permet une autre économie budgétaire de 35 millions d’euros.

4 millions d’euros sont économisés sur les allocations spéciales versées aux préretraités par le fonds national de l’emploi (ASFNE), le coût des 2 473 derniers bénéficiaires étant encore de 45 millions d’euros.

L’échéance progressive des conventions de cessation d’activité conclues entre 2000 et 2005 épargne encore 8 millions d’euros au budget 2014, soit la moitié de somme allouée l’année précédente.

Les transferts recentrent le programme 103 sur l’accompagnement des mutations économiques dont les dépenses nouvelles ou en hausses sont couvertes par les économies précédemment décrites.

Parmi les dépenses supplémentaires figurent 130 millions d’euros d’aides versées aux contrats de génération, dont la progression est plus lente qu’attendu, 10 millions d’euros de plus pour l’indemnisation du chômage partiel et une hausse de 50 millions d’euros de l’aide aux contrats de sécurisation professionnelle (CSP).

Le contrat de génération a été mis en place par une loi du 1er mars 2013. Il consiste en une aide de 4 000 euros par an pendant 3 ans pour le recrutement, en contrat à durée indéterminée, de jeunes de moins de 26 ans, lorsque ce recrutement est accompagné du maintien en activité d’un salarié d’au moins 57 ans. Un peu plus de 10 000 contrats ont été signés en 2013 pour un taux de refus de 10 %. L’objectif initial de 85 000 contrats, signés la première année, ne sera pas atteint. Celui de 100 000 contrats par an, les années suivantes, ne le sera pas en 2014.

L’étude d’impact du projet de loi prévoyait que l’aide accordée à ces contrats était, comme les autres dépenses prévues par le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, gagée par des économies sur la dépense publique. Sur la base des prévisions initiales, le coût des aides aux contrats de génération se répartissait comme suit :

IMPACT FINANCIER DU CONTRAT DE GÉNÉRATION

(en millions d’euros)

2013

2014

2015

2016

2017

181,3

539

790,4

919,4

901,3

Source : Rapport n° 570 de M. Christophe Sirugue.

Le coût des contrats signés en 2013 devait être pris en charge par Pôle Emploi, qui réalise, du fait du faible nombre de contrats signés, une économie substantielle. Le coût des aides prévues en 2014, difficilement prévisible pour le moment, était encore estimé par le projet annuel de performance à 200 millions d’euros pour les contrats signés en 2013 et 190 millions d’euros pour ceux attendus en 2014, soit 390 millions d’euros de crédits de paiement au total.

Les autorisations d’engagement correspondant aux aides versées aux contrats de génération étaient évaluées à 1,2 milliard d’euros. Comme indiqué précédemment, au moins 263 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement seront prélevés sur ce budget pour être réaffectés à la dotation de compensation de la nouvelle prime d’apprentissage. Des économies peuvent encore être réalisées sur les 127 millions d’euros de crédits de paiement restant.

L’indemnisation du chômage partiel connaît une forte progression à la suite de la simplification de la mesure, convenue dans l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et reprise par la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013.

Le budget correspondant, de 30 millions d’euros dans la loi de finances pour 2012, avait été relevé à 70 millions d’euros par la loi de finances pour 2013. À nouveau augmenté de 40 millions d’euros en cours d’exercice, il reçoit 10 millions d’euros de plus dans le projet de loi de finances pour 2014, atteignant 120 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement.

La dotation globale de restructuration de 23,5 millions d’euros qui finance les conventions de chômage partiel et celle de 8 millions d’euros qui finance les cellules d’appui à la sécurisation professionnelle sont reconduites à l’identique.

Par ailleurs, le CSP qui est proposé par Pôle Emploi aux salariés licenciés pour motifs économiques, lorsqu’ils peuvent prétendre à l’allocation de retour à l’emploi (ARE), leur assure, pendant un an, le maintien de 80 % de leur ancien salaire brut annuel. Le coût de cette rémunération est pris en charge par l’employeur, dans la limite de l’indemnité de préavis, par l’Unedic dans la limite de 800 euros et par l’État.

Le succès de ce contrat, qui est passé d’un flux annuel estimé à 97 000 bénéficiaires pour 2013 à 110 000 en 2014, aboutit au relèvement des dépenses budgétaires de 70 à 120 millions d’euros, ce qui correspond à une indemnisation mensuelle moyenne de 182 euros par personne.

La première action du programme 103 permet enfin d’amortir les mutations des conséquences économiques en versant 80 millions d’euros aux entreprises de moins de 300 salariés afin de les aider, par une ingénierie ou par des financements de formation, à mettre en place une gestion prévisionnelle de leurs emplois et de leurs compétences (GPEC), bien qu’elles n’y soient pas légalement contraintes.

Ces aides sont allouées soit dans le cadre d’accords pluriannuels de branche ou de filière, conclus avec l’État au niveau national, soit au niveau des territoires, voire même entreprise par entreprise, lorsqu’il s’agit de sauver en urgence des emplois dans une PME subitement confrontée à un retournement du marché. Relevées de 25 millions d’euros au cours de l’exercice 2013, elles sont reconduites en 2014. 11,3 millions d’euros permettent à Pôle Emploi de passer des marchés de prestations de diagnostic et de formation ayant le même objet.

La deuxième action du programme 103, dépouillée de cinq des six dotations de décentralisation, conserve encore un budget de 1,8 milliard d’euros pour le financement de la formation, en attendant la réforme de la taxe d’apprentissage, annoncée dans un projet de loi de finances rectificative à venir cet automne.

En dépit des souhaits des gouvernements successifs de développer la formation en alternance et en particulier l’apprentissage, les effectifs annuels d’apprentis n’ont pas atteint le seuil des 500 000, les emplois d’avenir pouvant représenter une forme concurrente d’embauches, à moins qu’il ne s’agisse d’un contrecoup de la crise économique persistante.

Les crédits budgétaires de compensation des exonérations de cotisations sociales, consenties aux contrats d’apprentissage et de professionnalisation, sont en hausse sensible, passant de 1,25 milliard d’euros à 1,417 milliard d’euros en 2014. Cette hausse s’explique par la suppression d’un taux de chute de 21 %, auparavant appliqué au nombre des contrats entrant dans le calcul de la compensation de leurs exonérations de charges sociales.

Les contrats de professionnalisation ne suivent pas l’évolution des contrats d’apprentissage. Leur nombre progresse régulièrement. Le programme 103 compense les exonérations de cotisations consenties à une partie d’entre eux par un budget de 16 millions d’euros en 2014 contre 14,6 millions en 2013. Les crédits de financement des validations des acquis de l’expérience (VAE) restent stables.

Les dépenses d’accès à la formation professionnelle, hors la dotation de l’AFPA, sur laquelle votre rapporteur reviendra dans la suite de l’avis, sont maintenues, à l’exception de 10 millions d’euros économisés sur la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle. Le projet de loi de finances anticipe une baisse de 6,4 % des formations indemnisées tout en maintenant à 1 129 euros par an la rémunération moyenne prise en charge.

Le programme 103 comprend une troisième action en faveur du développement de l’emploi, dont les crédits budgétaires, qui financent les dispositifs locaux d’accompagnement (DLA), les conventions de promotion de l’emploi (CPE) et la création ou la reprise d’entreprise par le dispositif NACRE, ainsi que plusieurs subventions et primes à la création d’emploi, sont reconduits à l’identique (à l’exception de trois compensations d’exonérations de cotisations sociales, dont votre rapporteur a déjà évoqué la baisse).

La compensation partielle des exonérations de cotisations sociales minimales accordées aux auto-entrepreneurs, aux dépens des régimes de sécurité sociale des indépendants, est provisionnée à hauteur de 64,5 millions d’euros. Cette compensation ne tient pas compte de la réduction par décret, annoncée par le Gouvernement, de la cotisation maladie minimale du régime social des indépendants (RSI) afin de le rapprocher du régime des auto-entrepreneurs. Elle ne tient pas compte non plus de l’abaissement des seuils de chiffre d’affaires autorisant l’accès à ce régime, qui est proposé par le projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.

Cette compensation avait été limitée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, afin de ne pas mettre à la charge de l’État l’ensemble des cotisations minimales au régime de retraite des indépendants, dont les auto-entrepreneurs étaient dispensés, ce qui leur aurait accordé une retraite sans contrepartie contributive.

Cette compensation était évaluée à 156 millions d’euros en 2012, témoignant du succès du régime de l’auto-entrepreneur. Elle a été réduite de 70 millions par un amendement du Gouvernement et estimée à 30 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2013, compte tenu de l’alignement des taux proposés simultanément par le projet de loi de financement de la sécurité sociale. En attendant l’abaissement des seuils autorisant l’accès au régime de l’auto-entrepreneur, le budget 2014 provisionne 64,5 millions d’euros de compensation d’exonérations.

Un programme 412, d’investissements d’avenir dans la formation et les mutations économiques, est ajouté à la nomenclature budgétaire cette année. Il prévoit d’allouer 150 millions d’euros sur 4 ans à des projets locaux de partenariats pour la formation professionnelle et l’emploi des jeunes, des demandeurs d’emploi et des salariés en reconversion.

Les fonds seront déposés sur un compte ouvert à la Caisse des dépôts et consignations. L’opérateur du programme est un consortium chargé de sélectionner, sur appel d’offres, de nouvelles formations ou des projets immobiliers créant des places d’hébergement pour des stagiaires.

Le rapport relatif à la mise en œuvre et au suivi des investissements d’avenir ne mentionne pas ce nouveau programme. 50 millions d’euros pourraient avoir été prélevés, en juillet dernier, sur les 500 millions du programme d’investissement dans la formation en alternance.

En attendant la signature d’une convention entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations sur les règles d’allocation de ces fonds, le projet annuel de performances reste évasif sur la nature des projets financés. Il n’exclut ni n’impose qu’il s’agisse de projets régionaux de développement de la formation professionnelle. Il prévoit aussi bien de financer des formations innovantes que des hébergements.

Ce budget pourrait permettre aux régions de rénover des centres de formation de l’AFPA dont elles auraient récupéré les terrains selon les modalités prévues par l’article 8 du projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires.

Cet article offre aux régions, sur leur demande, « les biens mis… à la disposition de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes à la date du 31 décembre 2013, figurant sur une liste dressée par arrêté des ministres chargés de la formation professionnelle et des collectivités territoriales. »

Des projets indépendants des politiques régionales pourraient également être reçus. Il ne semble pas cependant que l’AFPA soit particulièrement appelée à bénéficier elle-même des fonds de ce programme, en dépit des besoins manifestes de l’association et de l’étroite correspondance entre les missions qui lui sont assignées par son plan de refondation et l’objet du programme 412.

Votre rapporteur propose que ces crédits d’investissements servent à cette refondation, sans laquelle l’AFPA, encore menacée, pourrait disparaître à brève échéance. Ils serviraient notamment à l’investissement et à la maintenance des centres de formation d’intérêt et de recrutement national.

L’AFPA a donné à la reconstruction du pays, après la deuxième guerre mondiale, et au rattrapage industriel de son économie, dans les années suivantes, la main d’œuvre ouvrière qualifiée dont il avait besoin. Elle a ensuite été associée à la lutte contre le chômage menée par les services de l’État et par l’ANPE.

Mais les méthodes de recrutement et de qualification des stagiaires et l’organisation nationale et centralisée des formations qui avaient fait le succès de l’association, placée sous l’autorité des services de l’État, sont devenues des handicaps à mesure que la formation professionnelle des jeunes et des demandeurs d’emploi, sans cesser d’être financée sur des prélèvements obligatoires, a été régionalisée, individualisée et ouverte à la concurrence.

Depuis plusieurs années, l’AFPA cède des parts de marché sur ce qui est devenu un marché concurrentiel des formations. Elle a frôlé la cessation de paiement en 2012. Sa situation financière reste précaire et son plan de refondation fragile, en dépit de la détermination de la nouvelle direction à sauver l’association. Cette direction a le soutien du Gouvernement mais son plan suscite des interrogations.

Votre rapporteur a souhaité revenir brièvement sur les étapes qui ont conduit cette association à cette situation avant de faire le point sur sa refondation et de soumettre au Gouvernement, avant l’examen, par le Sénat, de l’acte III de la décentralisation et à quelques semaines du dépôt des projets de loi de finances rectificative et de réforme de la formation professionnelle, quelques idées pour l’avenir immédiat de cette association.

Les pouvoirs publics se sont saisis de la formation professionnelle peu avant la deuxième guerre mondiale, alors que l’effort industriel devait être à la fois soutenu et orienté vers les besoins de guerre, par une planification centralisée de la production, tandis que la mobilisation d’une grande partie de la main-d’œuvre qualifiée dans les armées impliquait, comme lors de la guerre précédente, la formation d’une main-d’œuvre de substitution.

Au cours de la première guerre mondiale, ce surplus de main-d’œuvre étrangère et féminine, ajouté aux effectifs d’ouvriers rappelés du front, avait été formé sur le tas. Dans l’entre-deux-guerres, l’État ne s’était préoccupé que de la réadaptation professionnelle des blessés.

C’est une pénurie de main-d’œuvre qualifiée qui a conduit les partenaires sociaux, dans les années 1930, en pleine crise économique et alors que 500 000 chômeurs étaient secourus, à mettre sur pied la première institution de formation professionnelle, à laquelle succédera, 30 ans plus tard, l’AFPA.

Le Centre de formation professionnelle des jeunes chômeurs (CFPJC) est créé en décembre 1934, sous la forme d’une association régie par la loi de 1901, par l’Union des industries métallurgiques et minières, par un syndicat de métallurgistes et par l’Office de placement des chômeurs de la Seine.

Cette initiative est prise comme modèle par les services du ministère du Travail lorsqu’ils ont à planifier un nouvel effort de guerre. Un décret du 30 octobre 1935, relatif à l’aide financière de l’État aux centres de formation professionnelle des chômeurs, soumet les centres de formation à une politique d’agrément et leur accorde en échange des subventions publiques.

Les centres, soumis à ce régime réglementaire d’agrément, ne sont pas transformés en une régie d’État. Le ministère laisse les organisations patronales de la métallurgie les constituer en associations tout en s’invitant aux conseils d’administration à partir de 1939.

À la Libération, le ministère du Travail réquisitionne les centres de formation des chômeurs et en installe de nouveaux dans les établissements techniques de formation initiale existants, publics et privés, et dans les écoles d’apprentissage.

En dépit de l’hostilité de l’Inspection des finances aux structures associatives enchevêtrées, il maintient la forme associative et centralisée des instances sectorielles de formation professionnelle de la main-d’œuvre en écartant le projet concurrent d’étatisation.

Un décret du 11 janvier 1949 rassemble dans l’Association nationale interprofessionnelle pour la formation rationnelle de la main-d’œuvre (ANIFRMO), les précédentes associations constituées, par secteur économique, dans la métallurgie et le bâtiment, pour faire face aux besoins de la reconstruction du pays.

Ce faisant, l’État établit un monopole de fait de la formation professionnelle des adultes en confiant à cette association, qu’il contrôle et finance, la gestion administrative et le contrôle technique du réseau associatif des centres professionnels. Il réglemente l’ouverture des nouveaux centres pour les contraindre à rejoindre ce réseau.

L’association nationale est un instrument de la politique du ministère du Travail, qui place ses directeurs à la tête des services administratifs centraux. Son organisation centralisée est justifiée par la planification de la production industrielle, qui prend le relais de la production de guerre puis de reconstruction et se poursuit jusque dans les années 1980.

Elle permet aussi la reconnaissance, par le préambule de la Constitution de 1946, d’un droit à la formation professionnelle, effectif et cogéré avec les partenaires sociaux, au nom duquel les syndicats d’ouvriers et de salariés obtiennent d’être représentés, aux côtés des représentants des syndicats patronaux et de l’administration centrale de l’État, dans les instances dirigeantes de l’association.

L’ANIFRMO change de nom en décembre 1965 pour devenir l’AFPA mais elle ne change pas d’organisation, même si ses relations avec le ministère du Travail se distendent quand, en 1967, les bureaux de placement de l’administration sont remplacés par une agence, l’ANPE, qui s’introduit en tiers dans les relations entre le ministère et l’AFPA.

Dès ce moment, le transfert des psychologues de l’AFPA vers l’ANPE et le changement de statut de l’association sont envisagés. La forme associative et tripartite du réseau n’est sauvée que par mai 1968. Mais le ministère, dont l’association reçoit instructions et financements, attend de l’association qu’elle s’investisse dans les secteurs économiques en essor tandis que le bâtiment et la métallurgie représentent toujours la très grande majorité des stagiaires formés, et ce jusqu’aux années 1980.

La reconnaissance, par l’accord national interprofessionnel du 9 juillet 1970, sur la formation et le perfectionnement professionnels, puis par la loi du 16 juillet 1971, portant organisation de la formation professionnelle, d’un droit individuel à la formation, accordant un congé légal, financé par une contribution obligatoire des entreprises, fait naître un marché concurrentiel qui répond à des demandes individuelles de formation qui ne sont plus planifiées.

L’individualisation des formations et la libéralisation de leur commerce profitent à de nouveaux organismes de formation qui ne sont plus soumis à la tutelle technique et administrative de l’AFPA. L’association, de son côté, n’investit que très lentement ce nouveau marché.

Son expérience dans la transmission rapide de savoir-faire techniques, ses méthodes guidées par l’ingénierie et ses liens avec le secteur secondaire donnaient en six mois des qualifications ouvrières dans l’industrie et le bâtiment et assuraient à ses stagiaires un taux de placement très élevé.

Mais ces qualifications ouvrières n’intéressaient ni les jeunes ni les salariés en congés individuels de formation. Elles ont marginalisé l’association sur le nouveau marché des formations professionnelles, conquis par des organismes privés engagés dans la tertiarisation de l’économie.

Désorientée par l’obsolescence de ses savoir-faire traditionnels et par la diminution des besoins de l’industrie en ouvriers qualifiés, l’association a été prise de court lorsqu’un nouveau secteur public de la formation professionnelle, composé des instituts universitaires de technologie et des groupements d’établissements publics (GRETA), s’est emparé de la formation initiale et continue aux techniques industrielles nouvelles.

L’AFPA a cru pouvoir, dans les années 1980, se rabattre sur la formation professionnelle de chômeurs de plus en plus nombreux, pris en charge par le service de l’emploi. L’ANPE lui a adressé 70 % des 150 000 à 160 000 demandeurs d’emplois envoyés en formation chaque année, tandis que les psychologues de l’association en orientaient le double. Ces formations, dont le volume a atteint 65 millions d’heures en 1995, étaient financées par une dotation budgétaire de l’AFPA, équivalente à un milliard d’euros.

Mais dans cette nouvelle activité, l’AFPA s’est trouvée à nouveau confrontée à une libéralisation des commandes de formation consécutive à une décentralisation institutionnelle, à la prédominance de secteurs économiques dans lesquels elle était peu présente et à une prise en charge plus sociale que technique des chômeurs en formation.

En confiant la formation professionnelle aux régions, l’État les a progressivement incitées à adopter une politique de formation qui leur soit propre et à choisir leurs organismes de formation. La régionalisation de la formation professionnelle aurait dû entraîner une régionalisation parallèle de l’AFPA, la mettant au service de la politique de formation des conseils régionaux.

Mais en différant jusqu’en 2009 le transfert des crédits budgétaires de cette formation professionnelle subventionnée et en les affectant à la lutte nationale contre le chômage de masse, conduite par un service public de l’emploi resté national, le ministère du Travail et de l’Emploi a maintenu à l’AFPA une subvention d’un milliard puis de 700 millions d’euros, différant son adaptation au nouveau contexte économique et institutionnel de la formation professionnelle.

Lorsque la loi du 7 janvier 1983, relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, reconnaît aux régions une compétence générale d’organisation de la formation professionnelle continue, l’État conserve encore la maîtrise des 4/5e du budget public de formation.

L’État n’a pas méconnu la position de plus en plus délicate de l’AFPA entre deux politiques de formation professionnelle, celle des chômeurs et celle des publics subventionnés par les régions. Mais il s’est surtout préoccupé de l’organisation administrative de l’association et non de son orientation stratégique.

L’association passe sous la tutelle de la délégation à l’emploi qui assouplit la centralisation du réseau pour l’adapter aux besoins locaux de main-d’œuvre et impose à l’AFPA de négocier des partenariats avec les branches professionnelles et de s’adapter aux besoins locaux et régionaux, sans pour autant l’exonérer des prestations imposées par le service public de l’emploi.

Ces objectifs contradictoires finissent par créer des tensions administratives. Elles se font jour lors de la contractualisation des rapports entre l’AFPA et l’État qui remplace, au début des années 1990, l’ancienne planification. Devant choisir entre des stratégies régionales et nationales qu’elle voulait également ménager, contrainte par son mode d’organisation et de financement de privilégier les objectifs assignés par l’État, l’association a suivi la politique nationale de son ministère de tutelle plutôt que les politiques régionales.

Cette politique nationale substitue aux anciens objectifs planifiés de qualification d’une main-d’œuvre ouvrière, des mesures temporaires de lutte administrative contre le chômage de masse et les autres effets sociaux des crises économiques. Elle associe davantage l’AFPA au service public de l’emploi.

Cette politique s’infléchit en 1993 lorsque le Gouvernement décide de détacher l’AFPA de ce service public. Alors que la récession de 1993 provoque une forte reprise du chômage, le contrat de progrès signé le 19 janvier 1994 invite la direction générale de l’association à adopter des méthodes de gestion d’entreprises, par centres de résultats et à donner une autonomie aux directions régionales, afin de leur permettre de négocier des plans de formation avec les conseils régionaux et les entreprises.

La direction générale envisage alors de scinder les activités de l’association pour détacher celles de formation, exercées pour les entreprises et les régions, des prestations accomplies pour le service public de l’emploi. Ces dernières seraient encadrées par la convention passée avec l’État en contrepartie de leur financement par le budget général tandis que l’association aurait une entière liberté dans l’organisation de ses activités concurrentielles.

La direction de l’association rechigne toutefois à rendre autonomes les directions régionales, dans la crainte que leur absorption dans un service public régionalisé de la formation professionnelle ne réduise à rien ses activités concurrentielles et n’empêche sa privatisation, en la privant de l’essentiel de ses centres et de ses compétences d’échelle nationale.

Indécis, le Gouvernement de l’époque hésite à réformer d’autorité l’AFPA. Alors que la loi quinquennale du 20 décembre 1993 donne aux régions la responsabilité de la formation professionnelle, son article 77 maintient toute l’association dans le service public de l’emploi en lui conférant une mission d’intérêt général sous la tutelle de l’État.

Ce désaveu conduit le directeur général à la démission, après celle de son prédécesseur deux ans plus tôt. La nouvelle direction générale accepte alors de s’en remettre entièrement aux commandes du service public de l’emploi. Elle négocie avec le ministère un contrat de progrès de quatre ans, qui couvre l’ensemble de ses activités. Elle se résout à proposer des stages de moins en moins qualifiants à des publics de plus en plus en difficulté, en échange du maintien des subventions.

La tension croissante entre la position de l’AFPA et celle de sa tutelle administrative est exposée très clairement par Guy Métais, directeur de l’AFPA de 1979 à 1985, qui revient sur l’évolution de l’association au cours des années 1980 et 1990 dans une note du 5 février 1998 :

« L’AFPA construit les formations avec une démarche d’ingénieur : repérage clair du niveau et des compétences à obtenir, méthodes de recrutement psychotechniques pour apporter aux stagiaires et à l’institution la garantie d’un taux de réussite élevé tout en tenant compte du potentiel réel du candidat, de sa motivation, de ses acquis plus que de ses connaissances scolaires ; organisation rationnelle de l’apprentissage des contenus et des pratiques ; sanction par des jurys de professionnels, par ailleurs très associés à l’élaboration des formations. »

« Il n’est donc pas étonnant que les méthodes de l’AFPA aient donné des résultats, même avec des travailleurs en difficulté. Il n’est pas étonnant non plus que les industriels aient apprécié de telles méthodes et les aient souvent reprises dans leurs propres centres de formation… »

« Cette vue n’était pas celle des tutelles. Animées par des fonctionnaires de haut niveau et qui n’ont jamais été confrontés aux problèmes réels de compétences et au fonctionnement du marché du travail, ils considèrent souvent la formation comme un pansement sur la plaie du chômage, qui permet de présenter quelque chose à une personne en difficulté sans vraiment croire aux résultats. Les stages deviennent alors une occasion de retirer les personnes le plus longtemps possible des statistiques, mais en coûtant le moins cher possible… »

Apparaît aussi en creux, dans ce témoignage, l’incompatibilité croissante entre un réseau constitué pour former une main-d’œuvre ouvrière qualifiée à une production industrielle et une économie de sous-production, dans laquelle l’emploi industriel qualifié a disparu et où ne subsistent que des emplois de services, qu’une formation générale et un apprentissage sur le tas suffisent à pourvoir, ou bien des emplois de techniciens, de cadres et d’ingénieurs, qui relèvent de l’enseignement supérieur.

La disparité entre des formations qualifiantes spécialisées et des stages d’accompagnement vers l’emploi destinés à des chômeurs de longue durée et des publics en grande difficulté, pris en charge par le service public de l’emploi, a fini par placer l’AFPA en délicatesse avec ses commanditaires locaux, de moins en moins satisfaits de se voir imposer un prestataire obligé, qui vit de subventions garanties et conduit sa propre politique en accord avec son ministère de tutelle.

La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité permet aux régions de faire prévaloir leur planification du développement des formations professionnelles, sans leur donner encore la maîtrise de tous les crédits du budget de l’État qui financent ces formations. Plusieurs d’entre elles sont alors disposées à intégrer dans leur patrimoine les centres de formation de l’AFPA et à passer des conventions avec l’association qui lui garantisse un volume d’activité.

Mettant en avant les économies d’échelle que lui procurent ses services centraux de direction, de gestion, de recherche et d’ingénierie, ainsi que ses formations d’échelle nationale, l’association reste réticente à se soumettre à la planification régionale et laisse de côté les projets de décentralisation qui lui sont soufflés par les conseils régionaux. Elle veut rester une institution nationale et cherche encore auprès des services de l’ANPE et des directions régionales de l’emploi des commandes de formation qui correspondent à son offre technique.

La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, qualifiée d’acte II de la décentralisation, confirme la compétence publique exclusive des régions en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi.

Elle prévoit le transfert progressif aux régions des 741 millions d’euros de dotations de fonctionnement et d’investissement de l’AFPA. Ce transfert comprend une période transitoire de 2007 à 2009, pendant laquelle les régions ont la possibilité de récupérer les crédits par anticipation, à condition de convenir avec l’AFPA de leur maintien à l’euro près, ce qu’on fait la plupart des régions, après des négociations longues et difficiles.

Le budget de l’association est encore, en 2007, d’un milliard d’euros, couvert aux deux tiers par la dotation d’État. Elle ne reçoit que 60 millions d’euros des régions et autant de l’Union européenne. Mais le mode d’attribution de prestations d’intérêt public, financées sur des deniers publics, à un opérateur unique désigné sans appel d’offres préalable fait l’objet de controverses juridiques avec les concurrents de cet opérateur, même si le montant de la dotation est marginal comparé au volume du marché de la formation professionnelle comme l’indique la répartition des produits financiers de la formation professionnelle en 2007 :

RÉPARTITION EN POURCENTAGE DES PRODUITS DES FORMATIONS
SELON LE STATUT DES PRESTATAIRES EN 2007

Origine des produits reçus

Entreprises

Organismes collecteurs

Pouvoirs publics pour leurs agents

Pouvoirs publics pour d’autres publics

Particuliers

Autres organismes de formation

Autres produits

Ensemble

Statut des prestataires

               

AFPA

2,1

6,8

0,1

8,1

0,7

0,1

1,4

3,9

Autres établissements publics ou parapublics

1,5

1,9

58,3

6,3

3,2

3,5

8,0

7,7

Éducation nationale et Greta

8,1

8,0

6,4

20,1

24,2

7,4

9,8

12,0

Individuels

4,5

4,5

2,5

1,7

3,7

23,9

2,0

4,2

Organismes consulaires

2,5

2,5

0,7

1,7

2,4

1,8

3,2

2,2

Privé à but lucratif

55,3

42,7

23,6

17,1

44,6

39,4

33,0

38,8

Privé à but non lucratif

26,0

33,6

8,4

45,0

21,2

23,9

42,6

31,2

Ensemble

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

En % des financeurs

32,8

17,6

7,6

23,0

7,5

3,8

7,7

100,0

Source : Réponse ministérielle au questionnaire budgétaire du PLF 2008.

Le contrat de progrès 1999-2003 passé avec l’État assurait, pour apaiser ses concurrents, qu’en contrepartie de l’aide que l’État lui apporte, « l’AFPA n’a pas vocation à conquérir des parts de marché dans le secteur de la formation professionnelle ».

L’association n’avait dès lors pas intérêt à développer son offre aux entreprises et n’a pas pu s’imposer en acteur de référence, autonome et concurrentiel, auprès d’elles. En 2009, seuls 130 millions d’euros de ressources propres du budget de l’AFPA viennent de formations assurées pour le compte de branches et d’entreprises.

Pour autant, rassemblés dans la Fédération de la formation professionnelle, les concurrents de l’AFPA n’ont eu de cesse de contester, depuis 1996, la légalité des subventions directes versées par l’État à l’association alors qu’elle ne disposait d’aucun monopole légal sur la formation professionnelle mais seulement d’un privilège de fait, en raison de sa participation au service public de l’emploi.

La Fédération a obtenu une première satisfaction de principe de la part de l’autorité de la concurrence en 2000. Elle l’a à nouveau saisie en décembre 2006. L’avis du 18 juin 2008 confirme le caractère concurrentiel, au sens du droit européen, du marché de la formation professionnelle, puisque celle-ci « ne correspond pas, dans sa globalité, à un service public ».

Mais cette fois le Conseil, soutenu par le Gouvernement de l’époque, en a déduit que la concurrence ne devait pas seulement être posée en principe. Elle devait être respectée en pratique, par l’absence de distorsions dans l’attribution de subventions ou de commandes publiques de prestations de formation, même pour celles destinées aux demandeurs d’emploi.

Autrement dit « l’AFPA devrait ainsi être mise en concurrence avec d’autres opérateurs plus fréquemment qu’autrefois, dans le cadre d’appels d’offres. » Elle devait aussi se défaire des activités d’évaluation et d’orientation des demandeurs d’emploi assurées par ses psychologues afin d’organiser leur parcours d’accès à la formation, l’avis du Conseil suggérant que la preuve de leur indépendance à l’égard de leur employeur et de leur neutralité à l’égard de ses concurrents n’était pas faite.

Dans la première conception de ce qui allait devenir Pôle Emploi, le Gouvernement avait envisagé d’intégrer l’AFPA dans le service public de l’emploi. Dans le projet de loi de finances pour 2007, l’association reçoit encore 700 millions d’euros de subvention de fonctionnement et 41 millions de subventions d’investissement.

Passé les élections de 2007, le nouveau Gouvernement décide de se séparer de l’AFPA en lui supprimant sa dotation, en la faisant disparaître des opérateurs budgétaires de l’État et en renonçant aussi à la partager entre Pôle Emploi et les conseils régionaux.

Il décide de ne reprendre dans Pôle Emploi, par l’article 53 de la loi de 2009 sur la formation professionnelle, que les 916 psychologues et négocie avec Mme Neelie Kroes, commissaire européenne chargée de la concurrence, la conversion de l’association en établissement public industriel et commercial.

La perte des psychologues a été mal ressentie par l’association. Non seulement elle perdait une compétence de haute valeur sur le marché du travail, comme en témoigne l’acharnement de ses concurrents à l’en dépouiller, mais ces psychologues n’ont pas pu transmettre à Pôle Emploi leur savoir-faire, alors que l’établissement se trouvait noyé par la remontée inattendue du chômage. Ils ont été reclassés parmi les conseillers de Pôle Emploi et pressés de prendre leur part du traitement administratif des dossiers.

Privée de ses services d’orientation, qu’elle a essayé de reconstituer avec les moyens du bord, l’association a été menée par le Gouvernement vers une privatisation par étape, qui devait être gagée par une dotation en capital d’au moins 500 millions d’euros, versée entre 2009 et 2013.

Dans un premier temps, elle devait recevoir gratuitement la propriété des immeubles qu’elle louait à l’État. La propriété de ces terrains reste sujette à controverse tout comme leur valeur comptable et celle du bâti qu’ils portent. L’ensemble pouvait être estimé à près 550 millions d’euros et la cession des terrains, à elle seule, était supposée doter l’association d’un capital de 400 millions d’euros, lui tenant lieu d’actifs négociables et de garanties auprès de ses créanciers.

L’opération audacieuse de déclassement et de cession gratuite à l’AFPA des terrains a été insérée par un amendement dans le texte du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, au cours de sa première lecture au Sénat, le 23 septembre 2009. En apparence, elle devait garantir la pérennité des activités de l’association.

Mais la disposition, votée sans contrepartie financière ni obligations de service public pour l’association, a été soumise au Conseil constitutionnel par la voie d’une question préalable posée par le Conseil d’État. Ce dernier devait se prononcer sur la légalité du refus, opposé par le ministère, à une demande de cession des mêmes terrains à deux conseils régionaux, qui tentaient ainsi de s’opposer au plan de privatisation du Gouvernement et d’obtenir que les terrains et les centres leur soient cédés plutôt qu’à l’association, espérant peut-être la sauver malgré elle et malgré le Gouvernement.

Le Conseil a déclaré la cession contraire à la Constitution le 17 décembre 2010. Cette décision a immédiatement pesé sur les comptes de 2011 de l’association puisque la dotation d’entretien des bâtiments de 80 millions d’euros n’était déjà plus provisionnée par l’État dans le budget 2010.

Son projet de privatisation étant rompu, le Gouvernement a laissé la régionalisation de la formation professionnelle faire son œuvre en prenant le risque, évoqué lors d’une audition conduite par votre rapporteur, de réduire l’association et son personnel à une position défensive désespérée.

La constance du budget de formation de l’État assurait à l’AFPA des recettes stables qui lui permettaient de préserver son organisation ou de l’adapter nationalement à long terme, selon un plan de charge prévisible. La division régionale des commandes, imposée depuis 2009, ne lui assure plus cette stabilité.

L’association a essayé de la rétablir en entamant une négociation avec l’association des régions de France (ARF) et en lui ouvrant ses nouvelles instances dirigeantes, tandis que l’État et les partenaires sociaux se retiraient du Conseil d’administration. Elle a réformé, dans l’urgence, ses structures administratives, habituées à une commande nationale, pour leur permettre de répondre aux procédures régionales de passation des marchés.

La période transitoire de transfert des crédits budgétaires s’achevant le 1er janvier 2010, les régions ont publié, fin 2009, leurs appels d’offres pour tout ou partie des prestations auparavant attribuées à l’AFPA. À partir de 2011, les appels d’offres sont devenus le mode d’achat principal des conseils régionaux.

Or leurs procédures varient par leurs modes d’allotissement, la temporalité des commandes et même par les critères de choix des offres, qui correspondent à des orientations régionales différentes des politiques de formation et à des publics prioritaires qui ne sont pas nécessairement les mêmes d’une région à l’autre.

La part du chiffre d’affaires de l’association réalisée par voie de subvention est passée de 70 % en 2009 à 39 % en 2011. Celle des appels d’offres atteint 79 % en 2012. La part des marchés régionaux de formation allant à l’AFPA s’est progressivement réduite, passant de 487 millions d’euros en 2009, à 459 millions en 2010, 396 millions en 2011 et 374 millions en 2012.

Elle est cependant très variable d’une région à l’autre comme l’indique le tableau ci-après.

RÉPARTITION DES COMMANDES RÉGIONALES DE FORMATIONS
ADRESSÉES À L’AFPA

(en millions d’euros)

TITRE TABLEAU

Sous-titre tableau (*)

(unités)

CA comptabilisé

Crédits décentralisés

2008

2009

2010

2011

2012

prévisions 2013

01 – Alsace

14,9

14,0

7,0

22,5

18,7

17,6

15,9

02 – Aquitaine

18,24

18,9

18,9

18,7

18,6

19,5

17,3

03 – Auvergne

13,47

10,7

13,4

9,6

8,8

7,2

7,7

04 – Bourgogne

13,7

14,5

15,0

12,1

10,4

10,6

10,8

05 – Bretagne

25,83

27,1

27,0

26,9

26,2

23,4

23,3

06 – Centre

19,68

21,2

21,1

20,8

19,2

18,5

19,4

07 – Champagne-Ardenne

13,46

14,8

16,7

15,6

13,8

16,1

14,9

08 – Corse

6,37

0,1

6,5

6,4

6,4

6,3

6,6

09 – Franche-Comté

10,41

11,2

12,1

10,2

9,3

8,4

8,2

10 – Ile-de-France

44,34

45,0

45,0

44,0

44,2

40

42,3

11 – Languedoc-Roussillon

20,33

21,1

21,6

17,4

15,8

15,2

16,2

12 – Limousin

17,78

18,3

18,2

15,0

17,4

15,2

15,8

13 – Lorraine

24,61

1,2

26,9

25,2

22,3

19,1

22,7

14 – Midi-Pyrénées

22,08

23,4

24,0

21,2

21,0

21,1

19,7

15 – Nord-Pas-de-Calais

36,73

38,1

37,9

38,1

36,1

36,8

36,5

16 – Basse-Normandie

14,3

16,0

16,7

16,6

15,9

15,8

16,5

17 – Haute-Normandie

13,04

14,1

14,1

14,0

12,0

10,8

10,5

18 – Pays-de-la-Loire

30,99

32,0

31,5

30,6

30,9

30,3

25,7

19 – Picardie

12,99

15,2

16,2

12,8

8,1

4,7

6,2

20 – Poitou-Charentes

14,22

15,1

10,2

12,9

13,1

13,8

14,1

21 – PACA

34,56

37,1

37,6

36,1

34,4

39,5

38,1

22 – Rhône-Alpes

35,69

39,6

39,1

38,9

28,1

16,4

22,4

23 – PME- TRANSITION

 

0,0

0,0

0,0

1,6

0,5

0,9

24 – AFPA Siège Social

 

0,1

0,2

0,1

0,1

0

 

Tous Centres de Résultat

457,72

448,8

477,0

465,8

432,3

406,8

411,7

Source : Réponse ministérielle au questionnaire budgétaire du rapporteur

Entre 2008 et 2012, sur l’ensemble de ses marchés, publics et privés, l’association a perdu plus de 30 000 stagiaires et plus de 8 millions d’heures de formation :

PERTES EN NOMBRE ANNUEL DE STAGIAIRES PAR FINALITÉ PUIS PAR NOMBRE D’HEURES, SELON LES FINANCEURS ET LA NATURE DES PRESTATIONS

Financeurs

Entrées 2008

Entrées 2009

Entrées 2010

Entrées 2011

Entrées 2012

État (publics spécifiques)

30 707

10 153

9 589

6 962

2 060

État déconcentré

11 519

15 177

12 772

14 286

19 080

Conseils régionaux

66 601

76 635

69 722

64 876

61 307

Autres coll. territoriales

11 344

4 458

3 914

2 185

1 231

CSP Opca

   

2 887

3 958

4 955

Entreprises

60 479

67 824

69 263

67 542

58 536

Total

180 650

174 247

168 147

159 809

147 169

Finalité

Entrées 2008

Entrées 2009

Entrées 2010

Entrées 2011

Entrées 2012

Formation

138 438

144 931

144 765

136 639

125 245

Préformation

18 370

16 903

14 332

15 238

16 263

Préinsertion

23 842

12 413

9 050

7 932

5 661

Total général

180 650

174 247

168 147

159 809

147 169

Financeurs

Heures de formation 2008

Heures de formation 2009

Heures de formation 2010

Heures de Formation 2011

Heures de Formation 2012

État (publics spécifiques)

12 117 991

6 882 660

6 727 264

6 913 198

2 203 875

État déconcentré

4 607 330

5 489 945

6 117 862

4 781 357

8 898 931

Conseils régionaux

39 747 007

45 370 910

41 997 922

39 801 083

37 886 075

Autres coll. territoriales

3 087 012

513 196

1 482 172

152 247

140 596

CSP Opca

   

299 135

2 404 386

2 967 008

Entreprises

10 846 529

11 655 017

11 855 533

10 240 800

9 892 176

Total

70 405 869

69 911 728

68 479 888

64 293 071

61 988 661

Finalité

Heures de Formation 2008

Heures de Formation 2009

Heures de Formation 2010

Heures de Formation 2011

Heures de Formation 2012

Formation

61 150 980

62 546 990

63 049 974

59 492 205

56 382 218

Préformation

6 213 028

5 526 143

3 614 810

3 423 828

4 367 660

Préinsertion

3 041 861

1 838 595

1 815 104

1 377 038

1 238 783

Total général

70 405 869

69 911 728

68 479 888

64 293 071

61 988 661

Non seulement l’attribution des formations publiques sur appel d’offres a exigé une conversion de l’AFPA à un modèle entrepreneurial, entièrement décentralisé, qui est étranger à son histoire et à ses méthodes, mais elle oblige l’association à financer un besoin en fonds de roulement en augmentation, sans pouvoir faire appel à des fonds propres, la réduisant à puiser dans sa trésorerie.

À mesure qu’elle perd, les uns après les autres, les marchés de formation passés par les régions pour dépenser les crédits supplémentaires obtenus de l’État, l’association rencontre des difficultés auprès de ses banques, non plus seulement pour obtenir des prêts d’investissements mais même pour assurer sa trésorerie et payer ses personnels.

Dans l’urgence, l’AFPA tente de gagner des parts de marché dans les formations de branche et d’entreprise, en mettant en œuvre l’individualisation de ses formations, en réduisant leur nombre et leur durée tout en faisant des économies de frais de personnel et d’entretien de ses locaux.

Pour autant, les entreprises ne lui procurent que 150 à 160 millions d’euros de recettes et les demandeurs d’emplois représentent encore, en 2012, 57 % des stagiaires tandis que les salariés en congé individuel de formation n’en représentent que 4 % :

STAGIAIRES ENTRÉS EN FORMATION (HORS ENSEIGNEMENT À DISTANCE)

 

2011

2012

Écart (en %)

Demandeurs d’emploi

88 309

83 678

-5.2 %

Salariés

71 500

63 491

-11,2 %

dont :

CIF

5 438

5 864

+7,8 %

PFE

62 104

52 672

-15,2 %

autres salariés (CRP/CSP)

3 958

4 955

+25,2 %

L’adaptation de l’association n’a pas été assez rapide pour que ses baisses de dépenses compensent ses pertes de recettes. La perte des commandes publiques s’est traduite dans les comptes par un déficit d’exploitation, immédiatement reporté sur les résultats.

Ce déficit atteint 11 millions d’euros en 2010 puis 55 millions d’euros en 2011. Saisi par l’urgence de la dégradation des comptes, le Gouvernement accorde à l’association une première rallonge budgétaire de 50 millions d’euros en cours d’exercice, quand le projet de loi de finances pour 2011 ne lui laissait que 74 millions d’euros de subventions, dont 57 millions d’euros sur le programme 102 et 5,7 millions sur le 103, pour la certification.

L’exercice 2012 ne produit qu’un chiffre d’affaires de 809,6 millions d’euros, l’association ayant perdu près d’un quart de ses ressources en quatre ans. Le nombre d’entrées en formation baisse de 7,9 % et le volume des heures de 3,6 %. Le budget de l’association est révisé deux fois.

Le besoin de trésorerie, d’abord couvert par des opérations de court terme (découverts, billets de trésorerie, nantissements, cessions de créances), renouvelées régulièrement auprès des cinq banques créancières de l’association, s’élève, à la fin du premier semestre 2012, à environ 150 millions d’euros.

Les banques demandent alors des garanties. Incapable d’en fournir, l’AFPA saisit le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) le 31 mai 2012 et tente de faire rentrer de l’argent en accélérant le recouvrement de ses créances sur factures. Elle obtient une suspension des concours bancaires et de la part patronale des créances fiscales et sociales. Ces mesures lui permettent de passer l’été et de négocier un échéancier de remboursement.

Source : extrait du budget révisé 2011 de l’AFPA.

Le changement de Gouvernement redonne espoir à l’AFPA. Passées les mesures d’urgence, les deux inspections générales des finances et des affaires sociales sont missionnées pour proposer un plan stratégique de sauvetage de l’association lui permettant de rétablir ses comptes en 2015.

Le bureau de l’AFPA adopte, le 14 novembre 2012, à l’unanimité des collèges, un plan de redressement financier, suggéré par les inspections générales et les ministères, qui a pour objet de rétablir, en trois ans, l’équilibre des comptes, alors que le déficit est passé à 91 millions. L’État le soutient en apportant immédiatement un concours de 20 millions d’euros.

Le 14 janvier 2013, le Premier ministre se rend, accompagné du ministre délégué à la formation professionnelle et à l’apprentissage, au centre AFPA de Caen. Il propose un plan de refinancement de l’association de 430 millions d’euros, apportés pour moitié par l’État et pour moitié par des prêts bancaires, garantis par la passation, entre l’État et l’association, de baux emphytéotiques administratifs de 50 ans.

L’engagement pris par le Premier ministre convainc les banques créancières, à savoir BNP Paribas, la Société générale, la Banque populaire Rives de Paris, la Caisse des dépôts et consignations et la Compagnie générale d’affacturage, de négocier et d’accepter, en mai 2013, un protocole de financement sur trois ans du plan de refondation de l’association.

Le protocole prévoit des avances de trésorerie et 216 millions d’euros de prêts d’investissement en contrepartie du respect des objectifs du plan de refondation. L’association doit relever son chiffre d’affaires en réduisant ses coûts et en adaptant son maillage territorial.

Elle compte sur les baux emphytéotiques administratifs négociés avec France Domaine pour passer des conventions de sous-location avec des promoteurs et des gestionnaires spécialisés dans l’hébergement de stagiaires, afin de trouver de nouvelles recettes stables dans les loyers qui lui seront versés.

Elle compte aussi bien sûr sur le soutien financier promis par l’État. Une première tranche d’obligations associatives est émise en juin 2013 à hauteur de 110 millions d’euros. L’État y souscrit en puisant dans le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », sans compensation de crédits par la mission Emploi. Mais la direction du Trésor obtient un taux d’intérêt de 4 % pour prêter sur 20 ans des fonds qu’elle emprunte à un taux moitié moindre, estimant le prêt risqué, autrement dit l’avenir de l’association incertain.

De la même façon, France Domaine n’entend pas céder les terrains à bail pour une redevance modique ou symbolique, selon l’usage des baux emphytéotiques administratifs conclus avec le titulaire d’une délégation de service public. Les deux premiers baux, sur les 5 exigés par le protocole bancaire, ne sont toujours pas signés.

Après 9 mois de mise en œuvre, les résultats du plan de refondation sont mitigés. Mis à part 1 200 stagiaires supplémentaires en contrats de sécurisation professionnelle, tous les autres secteurs d’activité de l’AFPA sont encore en baisse au premier semestre 2013 comme l’indique le tableau suivant :

COMPARAISON DES EFFECTIFS ET DES VOLUMES DE FORMATION DE L’AFPA DES PREMIERS SEMESTRES 2012 ET 2013

Financeurs

Entrées juin 2013

Entrées juin 2012

Évolution 2013/2012

Heures de formation juin 2013

Heures de formation juin 2012

Évolution 2013/2012

État (publics spécifiques)

1 326

1 366

– 2,9%

737 047

1 281 112

– 42,5%

État déconcentré

4 527

10 699

– 57,7%

1 954 333

5 318 295

– 63,3%

Conseils régionaux

36 366

33 352

9,0%

20 350 389

20 079 242

1,4%

Autres coll. terr.

641

575

11,5%

59 680

65 638

– 9,1%

CSP Opca

3 612

2 409

49,9 %

1 963 642

1 402 918

40,0%

Entreprises

22 584

27 338

– 17,4%

4 939 620

5 162 891

– 4,3%

Total

69 056

75 739

– 8,8%

30 004 711

33 310 096

– 9,9%

L’excédent brut d’exploitation de l’association est en déficit de 45 millions d’euros fin août. Le compte de résultats, compte tenu des provisions de restructurations, l’est également de 88 millions d’euros. Le nouveau président de l’AFPA, désigné en juin 2012, entendu par votre rapporteur, reste toutefois confiant en raison de perspectives plus positives au second trimestre 2013 qu’au premier.

La nouvelle direction met tout en œuvre pour sauver l’association selon le plan de refondation tout en maintenant une structure nationale doublée par des partenariats régionaux. Elle est parvenue à diminuer les coûts fixes de ses formations en reportant des dépenses d’équipement et de maintenance, en réduisant les effectifs de son siège social et en ne remplaçant pas les postes de formateur libérés par des départs en retraite.

Le personnel de l’association, qui atteignait encore 11 400 postes équivalents à des temps pleins en 2006, est passé à 10 679 en 2009, après le départ des 916 psychologues vers Pôle Emploi puis à 9 014 en 2012. Les premiers objectifs de réduction, prévus en deux ans par le plan de refondation, ont été atteints en un an. 650 postes équivalents temps plein sont supprimés en 2013, au prix d’une hausse des provisions pour restructuration.

Les dépenses de personnel sont passées de 710 millions d’euros en 2008 à 600 millions d’euros en 2012. Elles devraient atteindre 576,7 millions d’euros en 2013. Elles représentent encore les trois quarts des charges d’exploitation. Les frais de fonctionnement (hors coûts de restructuration) s’établissent à plus ou moins 220 millions d’euros.

En avance sur les réductions de dépenses exigées de l’association par le protocole, homologué par le tribunal de grande instance de Bobigny, la trésorerie de l’AFPA reste dépendante des recettes qui sont, pour le moment, tirées du chiffre d’affaires des formations :

Source : Réponse ministérielle à une question budgétaire.

Le chiffre d’affaires prévu par le plan de refondation pour l’exercice 2013 était de 800 millions d’euros. Le protocole conclu six mois plus tard l’a ramené à 784 millions d’euros. Il devrait atteindre 760 millions d’euros à la fin de l’année, soit un écart de 24 millions d’euros par rapport à l’objectif du plan.

L’excédent brut d’exploitation serait déficitaire de 13 millions d’euros en 2013 mais excédentaire de 19 millions en 2014. Compte tenu du coût des restructurations, le compte de résultats devrait accuser une perte de 35 millions d’euros en 2013, qui inquiète la direction du budget, qui voit disparaître, en trésorerie et en subvention d’équilibre des comptes, la dotation en capital souscrite sous forme obligataire.

Le Président de l’association met tout en œuvre pour relever le chiffre d’affaires en 2014 jusqu’aux objectifs prévus par le plan de refondation. L’AFPA compte sur le plan des 30 000 formations prioritaires annoncées par le Président de la République et financées pour un tiers par l’État, en attendant les 70 000 prévues sans contrepartie budgétaire en 2014.

Ces formations sont destinées à des secteurs et des métiers qui offrent des opportunités d’emploi à court ou moyen terme et pour lesquels l’AFPA dispose d’une offre de formation faite de plateaux techniques éprouvés et de personnels qualifiés, apportant une garantie de qualification et de placement aux stagiaires.

Pourtant, sur les 150 millions d’euros de ce plan de formation, dont Pôle Emploi devrait recevoir la tierce part financée par l’État, l’AFPA n’aura décroché que 5 millions d’euros de commandes en 2013 mais en attend 17 millions en 2014, pour former 5 000 stagiaires. L’association espère aussi récupérer une partie des formations prévues par les emplois d’avenir et les contrats de sécurisation professionnelle.

Du côté des entreprises, la constitution, dans la prochaine réforme de la formation professionnelle, d’un compte individuel de formation pourrait lui apporter un surcroît de commandes. L’AFPA espère atteindre un chiffre d’affaires auprès des entreprises de 253 millions en 2017 par une progression de 6,3 % par an. Cette progression de 90 millions d’euros de parts de marché, gagnées sur le secteur de la commande privée de formation ne convainc guère les directions du ministère des finances.

L’association souhaite également prendre une part de marché plus importante dans l’accompagnement des restructurations et des plans sociaux. Elle a mis en place une organisation commerciale dédiée aux grands comptes afin de devenir un opérateur de référence pour la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences imposée aux grandes entreprises.

Elle est prête à revoir l’organisation de ses formations pour en réduire ou en partager la durée, quitte à diviser davantage la certification des qualifications professionnelles pour mutualiser des modules, ce qui exige cependant des accords négociés avec les représentants des branches.

La répartition des stagiaires par secteurs, publiée dans le rapport d’activité de l’association pour 2011 et reproduite dans le graphique ci-dessous, indique que l’industrie et le bâtiment représentent encore la moitié de ses formations :

RÉPARTITION PAR SECTEUR DES FORMATIONS DE L’AFPA EN 2011

Source : Rapport d’activité de l’AFPA pour 2011

Un changement profond d’orientation et d’organisation des activités de l’AFPA demande un temps de conception, de maturation et de mise en œuvre. Le soutien de l’État et des banques doit lui permettre d’éviter, pendant cette période déterminante pour son avenir, un incident de paiement, alors que l’érosion de son activité assèche sa trésorerie et que la baisse de ses commandes touche même les formations de publics dits spécifiques, qui étaient encore financées et attribuées directement par l’État il y a deux ans.

Celles des Français de l’étranger, des personnes placées sous main de justice, des demandeurs d’emploi résidents d’outre-mer désirant suivre une formation disponible uniquement en métropole ainsi que les formations commandées par le ministère de la Défense, lui étaient auparavant tacitement réservées. Elles lui sont désormais attribuées sur appel d’offres, passé par le ministère de la défense pour les formations de ses personnels en reconversion et par le ministère de l’emploi pour les autres.

Mais elles ne représentent plus qu’un faible volume d’activité. En 2012, l’AFPA a formé 724 résidents d’outre-mer, 923 militaires en reconversion, 316 détenus et 82 Français de l’étranger. En outre, l’acte III de la décentralisation prévoit de confier aux régions la formation des stagiaires des ministères de la Justice et des Affaires étrangères.

Le président de l’AFPA s’est ému de la baisse spectaculaire des formations de personnes handicapées qui étaient, avant 2012, payées par l’État ou les régions et assurées par l’AFPA.

L’AFPA a formé 10 239 personnes handicapées en 2011 dont 4 365 sur subvention de l’État. Elle n’en a plus formé que 4 630 en 2013 dont 1 400 seulement au titre des publics spécifiques. Entretemps, l’État a confié à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH), par la loi de finances pour 2011, la responsabilité et le financement de formations destinées aux travailleurs handicapés.

L’AFPA a certes obtenu le marché de formation passé par l’AGEFIPH en 2012 et accueilli 7 843 personnes handicapées la même année. Mais la part des formations que ce marché lui assure a baissé en deux ans parce que l’État n’a pas transféré à l’AGEFIPH le budget correspondant aux formations qu’il lui déléguait, estimant sans doute que les réserves financières de l’association lui permettraient de les financer elle-même, ce qui ne s’est pas produit.

Le président de l’AFPA estime que cette baisse de commandes publiques représente la majeure partie des 30 millions d’euros de recettes manquantes en 2013. Ces pertes de recettes engagent l’AFPA dans une course contre la montre pour sa survie, qui la met à la merci du moindre incident d’exploitation.

Votre rapporteur a mené de nombreuses consultations et auditions sur cette évolution de l’AFPA à marche forcée. Il constate que la plupart des parties prenantes s’accordent désormais sur le diagnostic.

Selon le premier scénario, l’AFPA serait transformée en une entreprise de formation comme les autres. Compte tenu de la dégradation de ses comptes et de l’investissement financier nécessaire pour remettre en état et aux normes ses centres de formation, un changement rapide de statut devrait s’accompagner d’une dévolution des terrains qu’elle occupe afin qu’elle se refinance sur leur cession et ne conserve de ses 216 centres de formation que les plus rentables.

C’est le scénario qui avait été négocié par le précédent Gouvernement avec la commissaire européenne. Il se heurte aux limites propres aux opérations immobilières envisagées dans un premier temps sous forme de cession gratuites et reprises sous forme de baux emphytéotiques administratifs.

Pour le moment, ce scénario paraît suspendu au rapport de la Cour de la Comptes et à l’adoption de la loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires. Il est à noter néanmoins que, sur le plan comptable, une transformation de l’AFPA en entreprise lui permettrait de bénéficier du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

La partie immobilière de ce scénario est entravée par l’opposition de France Domaine à la cession de baux emphytéotiques à faible redevance, pour un usage et un bénéficiaire finaux qui restent indéterminés. Cette opposition se manifeste par des négociations serrées sur le montant des redevances exigées de l’AFPA alors que celle-ci devra supporter les charges du propriétaire, en particulier la taxe foncière et la remise aux normes des bâtiments qui seraient maintenus ouverts au public voire destinés à la formation de handicapés.

Le ministère des finances estime sans doute qu’une redevance trop faible pourrait être considérée par les concurrents de l’AFPA comme un avantage indu procuré à l’association dans la compétition pour les marchés publics de formation sans contrepartie. Il veille peut-être aussi à ne pas grever d’un bail de 50 ans des terrains qui pourraient être, d’ici peu, cédés aux régions, d’autant qu’un bail emphytéotique administratif qui impose au locataire l’ensemble des charges des propriétaires perd son intérêt lorsqu’il est loué au prix du marché.

Si l’État se désengage de l’AFPA, il ne lui reste qu’à reconquérir des parts de marchés auprès des régions et des entreprises. L’association dispose d’un réseau de centres dont la couverture territoriale pourrait intéresser les régions mais elles estiment, de leur côté, ne pas avoir à financer les coûts de sa structure administrative centrale et de ses centres de formation d’échelle nationale, qui sont le fleuron de l’AFPA.

Il est probable que le choix de l’un ou l’autre segment de marché entraînerait un plan social qui supprimerait plusieurs milliers d’emploi, sans exclure pour autant que, sur le segment restant, l’association puisse rivaliser avec à des concurrents commercialement agressifs et plus proches de leurs clients.

Le droit européen, qui définit ce qu’est un service d’intérêt économique général, a été assoupli par le traité de Lisbonne et par l’interprétation qu’en a donnée, le 20 décembre 2011, la Commission européenne, sous le nom de paquet Almunia.

Selon cette interprétation, les services de réinsertion sur le marché du travail et d’aide aux groupes vulnérables peuvent être délégués, hors des conditions de concurrence, habituellement exigées et vérifiées par la Commission, par des concessions de longue durée attribuées sans appel d’offres, pour peu que les prix des prestations correspondent au coût réel du marché et que leur compensation par les deniers publics soit détaillée et transparente.

Cette concession correspond à un mandat de service public, qui implique que le besoin social pris en charge par les finances publiques soit clairement identifié, sans quoi les concurrents évincés par le titulaire du mandat obtiendraient la reconnaissance d’un abus de position dominante ou d’une concurrence déloyale.

Un mandat de service public de sécurisation des parcours professionnels a pu être attribué par l’État en 2012, pour 5 ans, à l’association pour l’emploi des cadres (APEC). Il est pris comme modèle par les organisations syndicales qui proposent d’en transposer le principe à l’AFPA. Il impose toutefois une nette séparation entre activités marchandes et prestations subventionnées, dans des conditions qui pourraient impliquer une division de l’AFPA entre ses différentes clientèles.

Votre Rapporteur estime qu’il est cependant possible de maintenir l’organisation nationale de l’AFPA en accordant à ses directions régionales l’autonomie suffisante, qui leur a été refusée en 1993, pour entrer en négociation avec les commanditaires territoriaux, tout en préservant des services gérés par un siège central.

Les directions régionales recevraient un mandat de service public des régions tandis que l’association recevrait un mandat national, mis en place pour les formations d’intérêt et de recrutement national dans le cadre de la réforme annoncée de la formation professionnelle.

Le projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires prévoit la création d’un service public régional qui garantirait l’accès de toute personne à la formation professionnelle. Les régions seraient compétentes pour la formation de tous les publics. Elles participeraient à la lutte contre l’illettrisme. Elles financeraient l’acquisition des compétences clés. Elles coordonneraient l’achat public de formations pour leur compte et pour le compte de Pôle emploi.

L’article L. 6121-3 du code du travail serait modifié selon les termes du paquet Almunia, pour permettre aux régions de financer des formations personnalisées et suivies, offertes gratuitement à des jeunes et des adultes rencontrant des difficultés particulières d’apprentissage ou d’insertion, afin de leur donner un diplôme ou un titre professionnel équivalent au plus au baccalauréat.

Le projet de loi prévoit que ces formations suivies pourraient être déléguées à des organismes habilités. La procédure de constitution d’un SIEG pour assurer ce service serait définie par un décret en Conseil d’État mais plusieurs régions l’ont déjà expérimentée, en prenant soin d’attribuer les mandats de service sur appel d’offres. Elle permet d’introduire des critères de qualité dans l’appréciation des réponses aux appels d’offres et de ne pas s’en tenir à une stricte logique de moins-disant.

Une régionalisation de l’association pourrait lui permettre de s’adapter aux plans de formation des régions et de Pôle Emploi, en renonçant aux formations d’échelle nationale que les régions sont peu enclines à financer, puisqu’elles ne profitent que marginalement à leur population et à leur économie. L’AFPA devrait se spécialiser dans la formation et l’accompagnement des publics les plus fragiles et les plus éloignés de l’emploi.

Mis à part l’erreur que fut le transfert à Pôle Emploi de psychologues chevronnés, indispensables à l’orientation et au suivi de ces publics, l’association est capable d’apporter un premier niveau de qualification professionnelle à ceux qui n’ont pas suivi une scolarité initiale complète.

Elle a les compétences et le savoir-faire nécessaires pour les ramener par étape vers l’emploi, par une formation et un accompagnement personnalisés, de longue durée, qui ne soient pas détachés d’un métier et d’une production. Dans cette hypothèse, les formations organisées seraient nécessairement coûteuses parce qu’elles feraient appel à un personnel nombreux et qualifié.

Ce scénario repose sur un effort financier important de la part des régions, au détriment de formations plus rapides et destinées à des publics plus larges et plus proches de l’emploi. Il repose aussi sur une contribution des départements qui ont en charge des prestations d’aide sociale assorties de formations.

Il laisse de côté la question des formations professionnelles de recrutement et d’intérêt national qui étaient la spécialité de l’AFPA. Ces formations correspondent à des besoins localement insuffisants pour qu’une région puisse en supporter seule le coût pour les autres. Pour ces formations d’excellence, un mandat d’un SIEG national confié à l’AFPA en complément de ses mandats régionaux.

La régionalisation de la formation professionnelle diminue la mobilité inter-régionale des stagiaires, 88 % d’entre eux étant formés dans leur région de résidence. Elle affecte l’individualisation des formations et leur accessibilité puisque toutes les régions ne peuvent leur proposer l’ensemble des formations disponibles sur le territoire.

La mobilité des stagiaires demandeurs d’emploi pose aussi un problème de financement. Ce sont les régions dans lesquelles sont installés des centres de formation de recrutement national qui payent les frais d’hébergement, de transport et de formation des chômeurs qui viennent d’une autre région, sans contrepartie financière de celle-ci ni de celle dans laquelle le stagiaire formé trouvera finalement du travail dans sa spécialité.

Ce mode de financement invite les régions à adapter strictement leur offre de formation aux besoins de leurs bassins d’emploi et laisse disparaître les formations de recrutement national.

L’AFPA estime que ces formations correspondent à 45 des 240 titres qu’elle délivre et représentent un coût de formation de 200 millions d’euros. Elle a perdu la moitié de son chiffre d’affaires sur ces formations en deux ans, cette perte entraînant celle de pans entiers de compétence.

Pour continuer d’offrir des formations qui ne sont rentables qu’à l’échelle nationale ou à celles de plusieurs régions, un service national d’intérêt économique général pourrait être mis en place, dans le cadre de la politique gouvernementale de ré-industrialisation.

Ce service devrait suffisamment réduire le coût horaire de ces formations pour les régions pour qu’elles ne les suppriment pas de leurs commandes. Il devrait prendre en charge les investissements et la maintenance des plateaux techniques ainsi que l’hébergement et la restauration de stagiaires venus de tout le pays.

Ce service compléterait les services publics régionaux d’orientation et de qualification dans les branches professionnelles qui n’ont pas encore les moyens de former la main d’œuvre dont elles ont besoin et restaurerait une mobilité géographique des stagiaires entre leurs régions de résidence.

CONCLUSION

Votre rapporteur s’interroge autant sur la meilleure stratégie pour l’AFPA. Le Gouvernement s’est engagé à soutenir le plan de refondation. Il a accompagné la recapitalisation de l’association. Mais les commandes de formation des publics prises en charge par l’État peinent à suivre et les conditions de négociation des baux emphytéotiques et des taux d’intérêts des obligations associations ne laissent pas d’interroger.

Une option de dévolution des terrains aux régions figure dans le projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires. Elle permettrait une renégociation, avec les régions et l’État, du maillage territorial des centres. Mais s’ils ne peuvent plus servir de garantie financière à l’AFPA, il faut trouver un autre mode de financement de ses investissements, par exemple par les programmes d’investissement d’avenir.

Les régions hésitent à confier des mandats de service à une association qui ne se soumet qu’à regret à leur planification et qui garde des ambitions nationales. Le Gouvernement souhaite réindustrialiser le pays en misant sur 34 filières d’avenir mais lorsque l’AFPA soutient qu’elle peut former la main d’œuvre de 27 d’entre elles, l’argument ne semble pas porter et le plan des 30 000 puis 70 000 formations prioritaires lui échappe en grande partie.

Ces atermoiements de part et d’autre aboutissent à délaisser des plateaux techniques et des savoir-faire que l’on a crus inutiles puisqu’ils n’avaient plus de rentabilité immédiate alors qu’il faudrait au contraire les réactiver, quitte à les mutualiser, pour accompagner l’effort de ré-industrialisation engagé par le Gouvernement.

Votre rapporteur souhaite interroger le Gouvernement sur l’avenir de l’AFPA, qui paraît presque aussi incertain fin 2013 qu’il l’était un an plus tôt. Il pourrait être opportun de reconstituer une forme de service public à la fois régional et national pour dispenser des formations qualifiantes de rayonnement et de recrutement national.

Le tout État n’est plus possible. Le tout régions ferait disparaître des fleurons et un savoir-faire pédagogique. Il faut trouver un moyen de conjuguer les deux, qui serait la première illustration du nouvel équilibre à trouver entre l’État et les régions en matière de formation que devra définir la future loi de formation professionnelle. En attendant, il faut veiller à éviter tout incident de trésorerie qui mettrait l’AFPA en défaut de paiement.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

EXAMEN DES CRÉDITS

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social (1), la Commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2014 de la mission « Travail et emploi » sur le rapport de M. Jean-Patrick Gille sur les crédits relatifs à l’emploi, sur le rapport de M. Francis Vercamer sur les crédits relatifs au travail, et sur le rapport de M. Gérard Cherpion sur les crédits relatifs au compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », lors de sa séance du 30 octobre 2013.

Mme la Présidente Catherine Lemorton. Avant de demander l’avis de nos rapporteurs pour avis sur les crédits 2014, il nous faut examiner plusieurs amendements. Nous sommes tout d’abord saisis de trois amendements de crédits pouvant faire l’objet d’une discussion commune et portant sur les maisons de l’emploi. Le premier n’est pas défendu, Mme Lévy étant absente, nous examinons donc les amendements II-7, présenté par MM. Vercamer et Richard, et II-A56, présenté par Mmes Le Callennec et Louwagie.

M. Arnaud Richard. Je vais tenter d’être concis. Le ministre a produit une réponse habile, et nous le prendrons au mot, mais le choix du Gouvernement de réduire de 50 % les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2014 ne nous paraît pas un choix judicieux pour les maisons de l’emploi. C’est le meilleur moyen de les tuer, comme cela a été dit à l’instant. Nous proposons donc d’extraire 26 millions d’euros de la ligne de crédits des contrats de génération, qui totalise 1 265 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 390 millions d’euros de crédits de paiement, pour les réaffecter aux maisons de l’emploi et retrouver l’étiage du budget précédent.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. Tous les ans, nous avons un long débat sur les maisons de l’emploi, comme ça a été le cas lors de la discussion générale tout à l’heure. Il me semble dommage que le débat ne porte que sur les crédits de ces maisons, car il s’agit d’un débat de fond sur les choix à effectuer pour organiser la coordination et le pilotage des politiques de l’emploi dans les territoires entre l’État, Pôle emploi, les régions, compétentes en matière de développement économique et de formation, et les communes, très sollicitées par les demandeurs d’emploi.

Ce dispositif, d’initiative locale, reçoit un financement de l’État. Il existe aujourd’hui 170 maisons de l’emploi, tous les territoires ne sont donc pas couverts. L’État n’a pas bien défini les objectifs à poursuivre, d’où la difficulté de mener un travail d’évaluation, comme c’est rappelé chaque année. Le rapport établi par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) démontre d’ailleurs la diversité des structures existantes.

Sont également implantés dans les territoires, les missions locales, les plans locaux pour l’insertion et l’emploi (PLIE), qui récemment se sont rapprochés des maisons de l’emploi, les Cap emploi, qui accompagnent les travailleurs handicapés. Comme l’a souligné Monique Iborra dans son rapport d’information sur Pôle emploi et le service public de l’emploi de juin dernier, nous devons accomplir un travail de rapprochement de ces différents dispositifs de coordination, d’expertise, de diagnostic et reposer la question de l’accompagnement au plus près des territoires, car c’est l’échelon le plus efficace pour aider les publics en difficulté.

Nous en venons à la question, posée chaque année au sein de ce « club » des maisons de l’emploi : qui doit payer cette coordination territoriale ? Si les pouvoirs locaux en prennent la charge, l’État et Pôle emploi ont tendance à se retirer. Si l’État assume cette charge, cela démobilise les territoires. Le ministre l’a affirmé : celui qui décide, paie. Or, on ne peut pas réfléchir dans ces termes pour la question qui nous occupe : il s’agit, au contraire, de rapprocher les structures et de les coordonner.

Chaque année, ce débat nous agite. Si l’on reconduit les crédits, rien ne va changer. Je pense que nous devons avoir le courage d’ouvrir la discussion de fond. Le ministre a fait une ouverture, en indiquant que les crédits relatifs à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) seront renforcés, bien qu’il nous faille obtenir des garanties à ce sujet. Sur les territoires d’implantation des maisons de l’emploi, il me semble que le travail de GPEC doit être accompli par celles-ci. Ces crédits supplémentaires ne doivent pas servir à financer des consultants.

À mon sens, nous devons suivre cette piste de réforme et faire bouger les choses, plutôt que de reporter encore ce débat de fond, comme je le constate, chaque année, en tant que parlementaire, après l’avoir vécu pendant 30 ans, au niveau professionnel, dans le secteur de la formation. Nous devons progresser sur la question de savoir comment nous organisons le service public de l’emploi dans les territoires.

J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement de MM. Vercamer et Richard, et demande que l’on travaille sur les questions de fond sous-tendant notre débat et que l’on explore la piste ouverte par le ministre ce soir sur les crédits de GPEC.

M. Jean-Marc Germain. Le débat sur l’efficacité du service public de l’emploi dans les territoires constitue un débat important. J’ai entendu le ministre affirmer qu’il souhaitait, d’une part, une évolution des crédits différenciée selon les maisons de l’emploi et, d’autre part, un nouveau partenariat avec l’État, par le biais de l’attribution de crédits de GPEC, mais nous avons besoin de davantage de précisions. Nous avons, en particulier, besoin de savoir, quelles maisons de l’emploi verront leur budget maintenu et lesquelles verront leurs moyens diminuer, sur le fondement d’une évaluation de leur fonctionnement. Nous devons également étudier les modalités de contractualisation pour l’attribution de crédits de GPEC aux maisons de l’emploi, qui pourraient permettre de pallier les réductions de budget. À titre personnel, je voterai contre l’amendement présenté, mais je souhaite que l’on puisse avancer sur ce sujet d’ici l’examen en séance publique de la mission « Travail et emploi ».

Mme la Présidente. Nous examinons maintenant un amendement présenté par Mme Louwagie. Madame, vous avez déposé un autre amendement, dans le même esprit, que nous examinerons juste après, peut-on considérer que votre prise de parole vaut présentation des deux amendements ?

Mme Véronique Louwagie. Bien sûr, j’allais vous le proposer. En termes d’emploi, on ne peut s’exonérer de la situation actuelle qui impose de partir des territoires et des bassins de vie pour déterminer les besoins d’emploi présents, avec les offres non pourvues, et à venir, avec les postes appelés à se libérer suite à des départs en retraite par exemple. Il est fondamental d’établir des cartographies de l’emploi et des besoins à venir, au plus près des entreprises et des bassins de vie. Les maisons de l’emploi répondent à cet objectif, et leur disparition nous placerait devant une grande difficulté. La réponse du ministre, autour de la GPEC territoriale, souligne le rôle des maisons de l’emploi.

Certes, comme en fait état le rapport de l’IGAS, coexistent des situations très différentes, mais pourquoi ne pas réfléchir à ce que les maisons de l’emploi qui ne fonctionnent pas puissent améliorer leur fonctionnement et leur accorder des crédits, car elles apportent un service réel aux territoires. Je ne crois pas que les missions locales ou Cap emploi aient vocation à remplir le rôle aujourd’hui joué par les maisons de l’emploi. Leur action ne se fonde pas sur un diagnostic des besoins économiques et d’emploi réalisé auprès des entreprises.

Par ailleurs, je pense que l’année 2014 ne constitue pas le bon moment pour cesser les financements, car les cahiers des charges ont été établis pour la période 2011-2014. Il me semble regrettable de mettre fin aux crédits des maisons de l’emploi au cours de la dernière année du cahier des charges. Il aurait fallu au moins les maintenir jusqu’en 2014 et mener un travail de réflexion pour 2015. Retenir une diminution cette année n’est pas judicieux.

M. Christophe Cavard. On comprend l’émotion de certains parlementaires qui défendent leurs maisons de l’emploi, issues du plan de cohésion sociale, soutenu par plusieurs députés ici présents, mais tous les acteurs sont unanimes quant au constat de l’hétérogénéité des situations.

Comme le soulignaient le ministre et notre collègue Jean-Marc Germain, à quoi sert d’accorder de manière uniforme des crédits à des territoires, parfois à vide, et dont certains connaissent des doublons ? Le budget présenté pour 2014 renforce les moyens de Pôle emploi, en finançant 4 000 postes supplémentaires en 2013 et 2014, ce dont on ne peut que se réjouir, dont une partie du personnel mène ces politiques de coordination.

Nous pouvons prendre acte aujourd’hui que le budget des maisons de l’emploi doit être revu à la baisse, tout en tenant compte des analyses démontrant le bon fonctionnement ou la nécessaire réorientation de la structure étudiée, en lien avec les différents acteurs de l’emploi et les collectivités territoriales.

Comme je l’ai dit souvent dans les réunions de l’association des départements de France (ADF), le plan de cohésion sociale comportait déjà des dispositifs qui donnaient le sentiment que le coût de la politique publique de l’emploi était renvoyé aux collectivités territoriales, alors que la compétence demeurait du ressort de l’État.

On ne peut pas défendre un amendement de principe visant à maintenir le budget à son niveau actuel, mais nous devons ouvrir le débat sur le rôle des maisons de l’emploi dans le service public de l’emploi aujourd’hui, autour de diagnostics précis.

M. Michel Liebgott. Sous le précédent Gouvernement, les crédits des maisons de l’emploi avaient connu une forte baisse, de 30 millions d’euros, et, lorsque nous la dénoncions, nous n’obtenions pas de réponse. Aujourd’hui, la diminution des crédits proposée par le Gouvernement est inférieure à celle votée par la précédente majorité, et le ministre nous a donné un début de réponse, même s’il n’est pas totalement satisfaisant.

Sous la précédente législature, nos amendements étaient purement et simplement rejetés et les ministres n’accomplissaient aucun effort de proposition. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, et cela tombe plutôt bien car les crédits GPEC augmentent de 20 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2014. Il existe donc un vrai potentiel à mobiliser, au travers d’appels à projet pour sélectionner les maisons de l’emploi justifiant de bénéficier de cet engagement de l’État, en partenariat avec les collectivités territoriales. La procédure proposée est intelligente, reste à analyser le niveau des crédits nécessaires d’ici l’examen de la mission « Travail et emploi » en séance publique.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis sur le travail. J’ai entendu les propos du ministre, qui affirme que les diminutions de crédits n’affecteront pas toutes les maisons de l’emploi, et qu’elles ne s’appliqueront pas de manière uniforme. Nous avons déjà entendu ce discours à maintes reprises. Chaque année, le ministre affirme ce principe, et, ensuite, l’administration applique une diminution uniforme, car c’est la solution la plus simple. Je ne crois donc plus à ce discours : toutes les maisons de l’emploi connaitront une diminution de crédits de 50 % l’année prochaine.

En effet, aucun travail n’a été accompli en amont : nous aurons besoin d’un certain temps pour définir les axes de développement de la GPEC et de mise en œuvre des préconisations du rapport de juin dernier de Mme Iborra. Nous allons donc devoir entériner cette diminution de 50 % des crédits, qui va par ailleurs tuer quelques maisons de l’emploi, et, comme il en restera moins, le Gouvernement augmentera peut-être le budget l’année prochaine.

Ce matin j’assistais à la commission élargie sur la mission dédiée aux politiques de la ville. J’ai interrogé le ministre de la ville à propos des structures en faveur de l’emploi, dont les missions locales et les maisons de l’emploi, situées dans les quartiers en difficulté. Le ministre m’a répondu qu’il avait signé plusieurs conventions, dont une avec le ministre chargé de l’emploi, pour que ces structures reçoivent davantage de crédits l’année prochaine. Je m’interroge donc sur la mise en œuvre concrète de cette convention, puisque M. Michel Sapin ne l’a pas évoquée dans son intervention toute à l’heure.

Sur la coordination des structures, je préside moi-même une maison de l’emploi. Nous avons créé un groupement d’intérêt public, regroupant trois entités, ce qui a produit d’importantes économies de gestion. J’invite le Gouvernement à inciter l’ensemble des maisons de l’emploi à appliquer cette démarche permettant des économies d’échelle et une réduction des budgets. Mais demander aux maisons de l’emploi de licencier du personnel, car ce sera la traduction concrète de la baisse aujourd’hui proposée, alors que nous vivons une période difficile en matière sociale et économique, me semble un mauvais signal envoyé aux territoires.

J’ai apprécié l’intervention de M. Marsac tout à l’heure : effectivement les maisons de l’emploi constituent d’abord un lieu de coordination des structures locales, avec les élus locaux, car, même si Pôle emploi a procédé à la fusion de l’ANPE et des Assédic, de très nombreuses structures concourent encore à la politique territoriale de l’emploi et requièrent une véritable coordination de l’État, des régions, des intercommunalités, des communes et de Pôle emploi.

M. Arnaud Richard. Je ne comprends pas que l’on mégotte pour accorder 26 millions d’euros sur les 3 691 millions d’euros du programme 103 à un dispositif qui fonctionne, peut-être pas partout très bien, mais qui a le mérite d’exister dans une période où le Gouvernement fait de l’emploi une priorité. M. Vercamer a très bien expliqué que l’administration centrale, quel que soit l’engagement pris par le Gouvernement applique, en cas de baisse des crédits de subventions, un coup de rabot identique à toutes les structures. M. Liebgott a indiqué que la baisse appliquée par la précédente majorité était plus forte. C’est faux. Nous en sommes à une baisse de 50 % alors que j’avais obtenu, avec votre soutien, alors que j’étais rapporteur à la place de Jean-Patrick Gille, une diminution, au cours du débat parlementaire sur la loi de finances pour 2012, de la baisse comparable des subventions des maisons de l’emploi proposée par le précédent Gouvernement. Les propos du ministre sur la spécialisation des maisons de l’emploi dans la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) sont intéressants. Mais ils laissent supposer une prime à la vertu pour les maisons locales efficaces et peu coûteuses qui ne verra pas le jour. Le budget des maisons de l’emploi qui coûtent très cher, peut-être trop cher, sera raboté comme celui des autres, nous le savons très bien. Ces dernières coûtent tellement cher que l’on n’arrive pas à les raboter davantage que les autres.

Mme Monique Iborra. Je suis surprise de la place que prennent les maisons de l’emploi dans nos réunions d’élus nationaux qui sont encore dominées par des « intérêts locaux », qui seront moins présents lorsque nous auront un mandat unique. Mme Dalloz et M. Richard confirmaient que les maisons de l’emploi font avant tout de la GPEC. En réalité, comme nous l’avons vu sur place au cours de notre mission d’information, les grandes maisons de l’emploi, qui ont des frais de structure énormes, assument les compétences que leur confient les agglomérations qui les financent, c'est-à-dire le recrutement des bénéficiaires des clauses d’insertion. Or ces agglomérations ne sont pas les structures territoriales qui ont le plus de problèmes de financement. Si les communautés urbaines ou d’agglomération veulent confier à ces maisons de l’emploi les missions de développement économique qui vont leur être reconnues par la loi, qu’elles adaptent en conséquence les financements qu’elles leur versent. Ce n’est plus à l’État de les soutenir depuis la création de Pôle Emploi, bien que vous ne vouliez pas le reconnaître. Les petites maisons de l’emploi, beaucoup moins nombreuses, peuvent faire de la GPEC territoriale si elles ont en les compétences, bien qu’il s’agisse d’une tâche compliquée.

Mme Véronique Louwagie. Nous ne défendons pas les maisons de l’emploi installées dans nos circonscriptions mais celles qui fonctionnent bien. Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, souvent cité à leur propos, indique que certaines sont des portes d’entrée vers l’emploi. Pourquoi ne pas faire de la dernière année d’exécution du cahier des charges qui leur a été fixé en 2009 par un arrêté du ministre, une année d’amélioration de leur fonctionnement et de réorganisation des maisons les plus coûteuses au lieu de leur porter un coup fatal en diminuant de moitié leurs crédits budgétaires ?

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. On peut demander au Gouvernement de définir les objectifs attendus des maisons de l’emploi en contrepartie du financement apporté par l’État et les critères permettant de vérifier si ces objectifs sont atteints, comme cela les règles du jeu seront claires. Il ne s’agit pas de tuer les maisons de l’emploi. Je milite pour l’approche territoriale de l’emploi à laquelle les maisons de l’emploi ont apporté leur contribution. Nous devons prendre nos responsabilités d’élus en construisant un service public local de l’emploi qui sollicite davantage les agglomérations et les régions qui seront responsables du développement économique et de la formation. J’émets un avis défavorable sur les deux amendements en attendant les précisions qui seront apportées par le Gouvernement avant la séance publique.

La commission n’adopte pas les deux amendements II-AS 7 et II-AS 6.

La commission est saisie de deux amendements sur l’insertion par l’activité économique, l’un n° II-AS 10 de M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi, l’autre n° II-AS 5 de M. Christophe Cavard, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. Mon amendement complète la réforme proposée par le Gouvernement qui ajoute 15 millions au budget de l’insertion par l’activité économique qui avait été relevé de 10 millions d’euros, sur ma proposition, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2013. La substitution budgétaire des financements du Fonds Social Européen (FSE) par des crédits de l’État, qui va s’étendre jusqu’à la fin de l’année 2014, est une bonne chose parce que les entreprises peinaient à remplir tous les critères d’éligibilité imposés pour obtenir les aides du FSE. Dans l’attente de l’indexation de l’aide au poste sur le SMIC en 2015, les entreprises d’insertion pourraient cependant être confrontées à des difficultés financières. C’est pourquoi je propose de majorer de 15 millions d’euros leurs crédits de paiement afin de sécuriser cette substitution. Cette majoration est gagée par une économie sur les crédits de paiement des contrats de génération.

M. Christophe Cavard. Mon amendement concerne la même ligne budgétaire mais il a un tout autre objet que le précédent puisqu’il concerne non pas les entreprises d’insertion mais les chantiers d’insertion. La transformation, à laquelle nous sommes favorables, des contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) accomplis sur les chantiers d’insertion, en contrats à durée déterminée d’insertion (CDDI) entraînera un surcoût de frais de fonctionnement pour les chantiers qui utilisent ces mécanismes. Comme ces CDDI, qui rapprochent heureusement leurs bénéficiaires du droit commun du travail, sont pris en compte dans les effectifs et la masse salariale des chantiers d’insertion, ces structures vont franchir les seuils légaux de 10 salariés pour passer à 30 ou 40 salariés. Mon amendement propose de donner à ces chantiers les moyens d’accompagner le changement de structure impliqué par cette hausse des effectifs pris en compte.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. M. Cavard a fait part au ministre du risque qu’il évoque par un amendement d’appel. Le surcoût, pour les chantiers, d’un franchissement des seuils légaux d’effectifs, lors de la réforme de l’insertion par l’activité économique, pourrait être pris en charge dans le cadre d’une modulation de l’aide au poste prévue par cette réforme. Nous avons du temps pour étudier cette compensation. Puisque l’appel lancé par M. Cavard a été entendu, je lui propose de retirer son amendement.

M. Christophe Cavard. Je retire mon amendement. Nous aurons à nouveau ce débat en séance publique. Je rappelle cependant que les contrats d’accompagnement pour l’emploi étaient pris en charge à 95 % par l’État, voire à 105 % du SMIC horaire brut dans certains cas et bénéficiaient d’un accompagnement social de 1 000 euros par poste. La réforme prévoit une enveloppe globale de 20 500 euros par poste, moindre que l’aide précédente.

L’amendement II-AS5 est retiré.

La commission adopte l’amendement n° II-AS10.

La commission est saisie d’un amendement II-AS9 de M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. L’amendement abonde la dotation de l’État aux missions locales de 12 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement pour arriver à une enveloppe budgétaire de 200 millions d’euros. Le financement par l’État du fonctionnement des missions locales est gelé depuis plusieurs années alors que ces structures sont mises en difficultés par la hausse régulière de leurs charges de personnel, équivalente à un glissement vieillesse-technicité (GVT). Leur budget global a certes été relevé par la dotation de financement des emplois d’avenir mais l’accompagnement de ces emplois a exigé des renforts d’effectifs. Tout le monde a souligné le travail accompli par les missions dans le dispositif des emplois d’avenir mais je remarque que les crédits de ce dispositif qui devaient couvrir la charge de leur accompagnement ne sont pas non plus suffisants. Dans l’immédiat, je propose de relever leur budget de fonctionnement régulier.

La commission adopte l’amendement n° II-AS9.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits, ainsi modifiés, de la mission Travail et emploi figurant à l’état B de l’article 44.

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » figurant à l’état D de l’article 46

Articles rattachés à la mission Travail et Emploi

La commission est saisie d’un amendement n° II-AS8 à l’article 77 rattaché à la mission Travail et Emploi de M. Gérard Cherpion, rapporteur pour avis, sur le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».

M. Gérard Cherpion, rapporteur pour avis sur le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». Cet amendement suit le propos que j’ai tenu au ministre. Les entreprises de plus de 10 salariés seront exclues à terme du bénéfice de la prime d’apprentissage. 60 % des entreprises de moins de 11 salariés ont des apprentis. 80 % des entreprises de moins de 20 salariés en ont aussi. L’article 77 du projet de loi de finances pénalise ces entreprises qui forment des apprentis et développent l’apprentissage. Je souhaite que cette prime leur soit accordée, en relevant à 20 salariés le seuil prévu par l’article 77.

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur pour avis sur l’emploi. Il est trop tard pour demander à M. Cherpion comment il compte financer le surcoût sur plusieurs années, pour les régions et donc pour l’État qui leur compense ce coût, d’une prime d’apprentissage dont le seuil d’octroi serait relevé. Sa remarque est cependant pertinente. Les entreprises de moins de 11 salariés représentent 64 % des apprentis. Celles de moins de 20 salariés en emploient 80 %. Accorder à toutes la prime d’apprentissage occasionnerait un surcoût important dont je ne vois pas comment le compenser dans le budget. Le ministre a cependant rappelé que la réforme de cette prime avait deux objectifs, le premier de faire des économies budgétaires, le second d’en renforcer l’efficacité en la réservant aux entreprises pour laquelle l’octroi de cette prime pèse dans la décision d’embaucher un apprenti. En relevant le seuil d’octroi, on n’atteint plus ces deux objectifs. Je propose à M. Cherpion de retirer son amendement en attendant que nous puissions revoir avec le ministère le seuil le plus pertinent avant la discussion en séance publique. A défaut de retrait, je donnerai un avis défavorable à l’amendement.

M. Gérard Cherpion, rapporteur pour avis sur le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». Les régions consultées pensent que le seuil de 20 salariés est le plus pertinent car il englobe 80 % des apprentis. L’indemnité forfaitaire compensatoire actuelle qui est dénommée prime d’apprentissage n’est aujourd’hui pas ciblée. La nouvelle prime d’apprentissage proposée par l’article 77, accordée aux entreprises de moins de 20 salariés, n’occasionneraient donc pas un surcoût par rapport à l’indemnité actuelle mais une économie moindre que celle attendue. Dans l’attente de la réponse du ministre, je retire mon amendement.

L’amendement n° II-AS8 est retiré.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 77 sans modification.

L’amendement n° II-AS1 sur l’article 78 n’est pas soutenu.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 78 sans modification.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2014 de la mission « Travail et emploi ».

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) Mme Marie-Andrée Seguin, représentante au conseil d’orientation de l’AFPA

Ø Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-Michel Pottier, président de la commission formation-éducation

Ø Comité national des entreprises d’Insertion (CNEI) – M. Kenny Bertonazzi, président, et M. Olivier Dupuis, secrétaire général

Ø Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue socialDélégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) Mme Emmanuelle Wargon, déléguée générale à l’emploi et à la formation professionnelle, Mme Marianne Kermoal-Berthomé, sous-directrice financement et modernisation, et M. Jean-Marc Huart, directeur des politiques de formation et du contrôle

Ø Syndicat CGT de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (CGT-AFPA) – M. Christian Filliot, secrétaire général, et Mme Catherine Ribot, membre du secrétariat national

Ø Association des régions de France (ARF) – M. François Bonneau, président du conseil régional du Centre, représentant de l’association des régions de France

Ø Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) – M. Yves Barou, président, et M. Christophe Donon, directeur de la stratégie

Ø Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) – M. Jean Grosset, secrétaire général adjoint, et Mme Vanessa Jereb, chargée de mission

Ø Ministère de l’économie et des finances – Contrôle général économique et financier M. Jean Berthezene, contrôleur général économique et financier, représentant le service auprès de l’AFPA

Ø Confédération générale du travail (CGT)  M. Jean-Philippe Maréchal et M. Christian Filliot

Ø Ministère de l’économie et des finances Direction du budget M. Gautier Bailly, sous-directeur, et M. Jean-Pierre Testaud, chef du bureau de l’emploi et de la formation professionnelle de la 6e sous-direction

Ø FO Cadres M. Éric Pérés, représentant au conseil d’orientation de l’AFPA

Ø CFE-CGC – M. Pierre-Malo Hecquet, délégué national secteur emploi formation, M. Franck Boissart, conseiller technique, et M. Bernard Collot, président du SNPEA

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