N° 2266 tome VII - Avis de M. Jean-Christophe Fromantin sur le projet de loi de finances pour 2015 (n°2234)



N
° 2266

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234)

TOME VII

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

AFFAIRES MARITIMES

PAR M. Jean-Christophe FROMANTIN

Député

——

Voir les numéros : 2234, 2260 (Tome III, annexes 15 et 18).

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I. UN EXERCICE BUDGÉTAIRE TOUJOURS MARQUÉ PAR LA STABILITÉ 9

A. LES LIGNES DIRECTRICES DU PROJET DE LOI DE FINANCES 9

B. LES CRÉDITS DU PROJET DE LOI DE FINANCES 12

C. LES ACTIONS EXAMINÉES 13

1. L’action 01 « Sécurité et sûreté maritimes » 13

2. L’action 02 « Gens de mer et enseignement maritime » 13

3. L’action 03 « Flotte de commerce » 13

4. L’action 04 « Action interministérielle de la mer » 14

5. L’action 05 « Soutien au programme » 14

6. Les crédits portuaires du programme 203 « Infrastructures et services de transports » 14

II. LES INQUIÉTUDES DU MONDE MARITIME FRANÇAIS 17

A. UNE FLOTTE PÉTROLIÈRE MENACÉE DE DISPARITION ? 17

1. Un encadrement dicté par des impératifs de souveraineté 17

2. Un déclin du raffinage qui pourrait condamner la flotte pétrolière sous pavillon français 18

3. Une nouvelle donne stratégique à prendre en compte 19

B. LA SITUATION CRITIQUE DE LA SNCM 20

C. L’ASSUJETTISSEMENT DES GRANDS PORTS MARITIMES À LA TAXE FONCIÈRE 22

1. Une situation financière déjà complexe 22

2. Un revirement de jurisprudence potentiellement dévastateur 24

D. LE DRAGAGE DES CHENAUX D’ACCÈS, UNE HYPOTHÈQUE SUR L’AVENIR ? 28

1. Des volumes dragués importants 28

2. L’impératif maintien des tirants d’eau 29

3. Des coûts en augmentation 29

4. Des dotations de l’État insuffisantes 31

E. L’AUTOLIQUIDATION DE LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE 32

F. LA PÉRENNISATION DU FINANCEMENT DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DE SECOURS EN MER (SNSM) 35

G. LES BONNES PERSPECTIVES DE L’ENSEIGNEMENT MARITIME 36

1. La mutation achevée de l’enseignement secondaire 37

2. La création d’un brevet de technicien supérieur 37

3. La remise en ordre de l’École nationale supérieure maritime 38

4. La simplification de la filière professionnelle 39

5. Une démarche d’amélioration permanente 40

III. UNE CONDITION DE L’INSERTION DE LA FRANCE DANS LA MONDIALISATION : LA CONNEXION DES TERRITOIRES AUX GRANDS PORTS MARITIMES 41

A. LE GRAND PORT MARITIME DE LA ROCHELLE 43

1. Un établissement dynamique 43

2. Des liaisons et une stratégie modales au cœur du projet du port 43

3. Des investissements permanents 44

4. Perspectives et ambitions stratégiques 45

B. L’AXE PRIVILÉGIÉ DE L’HINTERLAND : LA VOIE FERRÉE PORTUAIRE 46

1. Un cadre réglementaire modernisé 46

2. Des perspectives de développement 47

C. UNE PREMIÈRE STRUCTURATION DE L’HINTERLAND : LE GIE HAROPA 48

1. Les atouts d’Haropa 49

2. Les principaux sujets d’infrastructure 49

a. L’accès fluvial de Port 2000 au Havre 49

b. La desserte ferroviaire du Havre et de Rouen 50

c. Le port « Seine Métropole Ouest » à Achères 50

3. La Seine comme corridor logistique 51

a. Les investissements sur Seine aval 51

b. Les investissements sur Seine amont 52

D. LES GRANDS PORTS MARITIMES MÉTROPOLITAINS ET LEUR CONNEXION À L’HINTERLAND 52

1. La part des modes non routiers dans les acheminements des ports 53

a. Trafic global et répartition modale 53

b. L’intermodalité dans chaque grand port maritime 54

c. Un bilan nuancé en fonction des types de marchandises 55

d. Comparaison européenne 56

2. Suivi des parts modales port par port 57

a. Port de Dunkerque 58

b. Port du Havre 59

c. Port de Rouen 59

d. Port de Nantes/Saint-Nazaire 60

e. Port de Bordeaux 61

f. Port de Marseille/Fos 61

EXAMEN EN COMMISSION 63

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 65

INTRODUCTION

Le 24 octobre 2012, à l’occasion de son premier rapport pour avis sur le budget des affaires maritimes, votre rapporteur déclarait : « Ce budget s’inscrit dans la continuité du passé récent. La réforme portuaire de 2008 a été digérée ; il est temps de former un nouveau projet pour notre compétitivité maritime. Pour ma part, si je déplore l’absence de signes forts dans ce projet de loi de finances, je ne reprocherai pas à l’exécutif de prendre un peu de temps pour arrêter des décisions si lourdes. »

Le 7 novembre 2013, lors de l’examen en commission des crédits de l’exercice suivant, le même constat s’imposait : « Une année a passé ; le constat n’a guère varié. La loi de finances initiale pour 2014 conserve à l’étiage le budget des affaires maritimes, permettant le maintien de l’existant sans réellement anticiper l’avenir. »

Le 6 novembre 2014, pour le troisième budget des affaires maritimes de la mandature, il semble que rien n’ait changé. L’excuse de la toute récente alternance n’a plus de pertinence ; la préparation d’assises ou d’un conseil décisif n’a plus à être évoquée. Au milieu de la 14e Législature, le monde de la mer attend encore une initiative forte, une vision stratégique, une perspective de long terme.

Bien sûr, la France évolue dans un contexte budgétaire contraint qui nécessite des efforts dans la gestion des finances publiques. De ce point de vue, la légère diminution des crédits alloués aux affaires maritimes ne saurait être absolument condamnée. Mais plus que l’inertie budgétaire, c’est l’absence de ligne directrice qui frappe l’observateur à la lecture des projets annuels de performances. Elle trahit le défaut d’ambition du Gouvernement, qui se limite à une prudence gestionnaire quand on attendrait du courage politique.

Au cours des deux dernières années, certaines options retenues donnent satisfaction – on pense notamment au développement structurant de l’enseignement maritime. D’autres choix publics sont nettement moins compréhensibles. Il en va ainsi du financement des infrastructures portuaires : non seulement l’État ne verse que la moitié des crédits nécessaires au dragage des chenaux d’accès, soit 48 millions d’euros au lieu d’une centaine, mais de surcroît Bercy obtient en justice l’assujettissement des ports à la taxe foncière sur les propriétés bâties, ce qui amputera leurs ressources de 25 millions d’euros. La combinaison de ces mesures de courte vue pourrait remettre en cause l’accessibilité des grands ports maritimes, donc leur pérennité même !

La stratégie maritime de la France reste à définir. Le budget présenté, par conséquent, demeure un instrument de gestion et non un programme d’action. Pour cette raison, votre rapporteur pour avis privilégiera une nouvelle fois l’abstention.

Depuis la loi de finances initiales pour 2013, la maquette du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » a été modifiée pour refléter l’intégration de la direction des pêches maritimes et aquaculture (DPMA) au ministère chargé de l’écologie. Cette évolution a donné lieu à la disparition de l’ancienne action 16 « Gestion durable des pêches et de l’aquaculture » du programme 154 « Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires », qui est désormais intégrée dans la nomenclature du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêches et aquaculture ». Votre rapporteur pour avis se félicite de cette stabilité du périmètre budgétaire qui permet d’apprécier, d’année en année, la réalité des choix financiers effectués.

La politique maritime, à travers le programme 205, coordonne l’action régulatrice de l’État aux niveaux du navire, du marin, de la mer et de ses ressources, dans un secteur à la fois ouvert au libre commerce mais aussi fortement encadré par le droit international – tant au sein de l’Organisation maritime internationale, de l’Organisation internationale du travail que de l’Union européenne. Elle comprend une action essentielle à la sécurité et la sûreté maritimes, l’organisation et l’accompagnement social de l’emploi maritime (formation, hygiène, santé, conditions de travail), le soutien à la qualité et au développement du pavillon français, la participation à la protection de l’environnement marin et littoral (à travers le plan POLMAR), la recherche d’un équilibre entre les différents usagers de la mer (marine de commerce, pêches et conchyliculture, nautisme, littoral) par une réglementation et une organisation adaptées, ainsi qu’une participation à l’action de l’État en mer en liaison avec les préfets maritimes et les préfets, et enfin une exploitation durable des ressources aquatiques.

Le volet « sécurité et affaires maritimes » (soit les actions 1 à 5) concourt à la mise en œuvre de la politique de l’État en termes de sécurité et d’emploi maritimes ainsi que la transcription sur le littoral des politiques du ministère chargé de l’environnement, notamment en termes de développement durable maritime et littoral. Quant au volet « gestion durable des pêches et de l’aquaculture » (soit l’action 6), il s’inscrit dans le cadre des objectifs généraux de la politique européenne commune de la pêche, visant à une exploitation durable des ressources aquatiques ; il ne relève toutefois pas de la compétence de votre rapporteur et ne sera donc pas évoqué dans le présent avis.

Si on en croit la programmation budgétaire pluriannuelle, le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêches et aquaculture » devait, pour la partie « affaires maritimes » qui fait l’objet du présent avis, connaître une légère réduction de ses plafonds entre 2015 et 2017 au titre de l’effort national engagé pour le contrôle des déficits publics.

Entre la loi de finances initiale pour 2014 et le projet de loi de finances pour 2017, le programme affiche une baisse de 3 % (soit 6 millions d’euros sur trois ans), et réalise ainsi, dans l’ensemble, un effort significatif de maîtrise des dépenses. La diminution se produit dans des proportions similaires pour les seuls crédits relatifs à la partie « affaires maritimes ». On notera avec intérêt que l’essentiel des efforts porte sur les actions relatives aux gens de mer et à l’enseignement maritime d’une part, à la flotte de commerce d’autre part, en raison de l’extinction progressive de dispositifs de soutien et de la réduction du nombre de bénéficiaires du système social spécifique des marins.

RÉPARTITION DES CRÉDITS, DANS UNE PERSPECTIVE PLURIANNUELLE,
PAR ACTION DU PROGRAMME 205

(millions d’euros)

LFI 2014

PLF 2015

PLF 2016

PLF 2017

Action

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Sécurité et sûreté maritimes

26,14

26,61

26,08

26,52

29,26

26,80

26,51

26,92

Gens de mer et enseignement maritime

30,20

30,20

30,21

30,21

28,21

28,21

27,21

27,21

Flotte de commerce

71,07

71,07

69,82

69,82

68,40

68,40

68,40

68,40

Action interministérielle de la mer

10,15

10,24

10,10

10,22

9,90

9,92

9,65

9,80

Soutien

6,05

6,45

7,46

6,46

6,06

6,46

6,06

6,46

Sous-total

143,61

144,56

143,66

143.22

141.82

139,78

137,82

138,78

Pêche et aquaculture

48,05

48,05

47,93

47,93

47,92

47,92

47,92

47,92

Total

191,66

192,61

191,59

191,15

189,74

187,70

185,74

186,70


Source : Medde

Sur le volet « sécurité et affaires maritimes », les axes stratégiques du budget sont :

● le maintien d’un programme d’investissements en matière de sécurité et de sûreté maritimes, en répondant aux exigences communautaires en matière de systèmes d’information (avec un accent particulier sur Marylin – sauvetage en mer – et Spationav v2 – surveillance du trafic maritime -), ainsi qu’en poursuivant la réparation et l’innovation des établissements de signalisation maritime ;

● la consolidation des moyens dédiés à l’enseignement maritime, avec le financement des classes de brevet de technicien supérieur (BTS) dans l’enseignement secondaire et un maintien de la dotation de l’école nationale supérieure maritime (ENSM) ;

● la poursuite de la construction d’un nouveau centre d’enseignement pour l’ENSM en son site du Havre, par une contribution à l’opération de 3 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2015, et de 1 million d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2016 ;

● le renforcement de la lutte contre les pollutions marines et du contrôle des pêches afin de permettre à la France de satisfaire aux exigences européennes en matière de protection de l’environnement et de la ressource halieutique.

Ainsi que l’indiquait déjà votre rapporteur à l’occasion du précédent exercice budgétaire, la préservation des fonctions des affaires maritimes et l’achèvement de la réforme de l’enseignement maritime impliquent, en contrepartie et compte tenu des contraintes pesant sur les finances publiques, une budgétisation au plus juste des dépenses d’intervention, afin de garantir la soutenabilité du programme, et une restriction des crédits d’investissement au strict minimum. Très clairement et pour la troisième année de la législature, le budget des affaires maritimes apparaît à l’étiage : une diminution des crédits alloués signifierait immanquablement un renoncement de la puissance publique à l’une de ses responsabilités régaliennes. Il semble que tel soit d’ailleurs déjà le cas en ce qui concerne les infrastructures portuaires, dont le dragage des chenaux n’est plus assuré comme il le devrait par le programme 203 « Infrastructures et services de transports ». Or la garantie de la sécurité maritime, la formation et la protection sociale des gens de mer, la tenue du pavillon français, ne sauraient être des éléments négociables pour la seconde zone économique exclusive mondiale, et moins encore à l’époque de la conteneurisation et d’une mondialisation commerciale qui emprunte très majoritairement la voie maritime.

En dépit de l’effort continu de maîtrise du déficit de l’État, par ailleurs souhaitable, le budget de la mer ne saurait constituer une variable d’ajustement. Sa faiblesse relative au sein du budget national – il équivaut à moins de 0,01 % du produit intérieur brut – priverait d’ailleurs toute réduction des crédits, même drastique, d’effet statistique identifiable.

Votre rapporteur pour avis constate, avec soulagement, que tel n’est pas le cas : si seul le socle obligatoire d’investissement, au vu des obligations internationales et européennes, a été assuré, la stabilité globale des autorisations d’engagements comme des crédits de paiement d’une année sur l’autre permettra à la France de tenir son rang au cours de l’exercice 2015.

PLF 2015 (en euros)

AE

CP

Part des CP

Action 1

Sécurité et sûreté maritimes

26 077 418

26 517 418

13,7 %

Action 2

Gens de mer et enseignement maritime

30 205 719

30 205 719

15,6 %

Action 3

Flotte de commerce

69 815 200

69 815 200

36 %

Action 4

Action interministérielle de la mer

10 099 359

10 221 343

5,3 %

Action 5

Soutien au programme

7 459 705

6 459 705

3,3 %

Sous-total

143 657 401

146 112 483

75,3 %

Action 6

Gestion durable des pêches et aquaculture

47 930 616

47 930 616

24,7 %

TOTAL

191 588 017

194 043 099

100 %

Le tableau ci-dessous présente l’évolution des crédits par rapport à la loi de finances initiale précédente.

 

LFI 2014

(pro format, en euros)

PLF 2015

(en euros)

Évolution

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 1

Sécurité et sûreté maritimes

26 118 328

26 607 347

26 077 418

26 517 418

-0,15 %

-0,34 %

Action 2

Gens de mer et enseignement maritime

30 201 719

30 201 719

30 205 719

30 205 719

+0,01 %

+0,01 %

Action 3

Flotte de commerce

71 065 000

71 065 000

69 815 200

69 815 200

-1,76 %

-1,76 %

Action 4

Action interministérielle de la mer

10 150 304

10 235 304

10 099 359

10 221 343

-0,5 %

-0,13 %

Action 5

Soutien au programme

6 054 729

6 454 729

7 459 705

6 459 705

+23,2 %

+0,08 %

Sous-total

143 589 080

144 564 099

143 657 401

143 219 385

+0,05 %

-0,93 %

Action 6

Gestion durable des pêches et de l’aquaculture

48 047 000

48 047 000

47 930 616

47 930 616

-0,24 %

-0,24 %

TOTAL

191 657 080

192 611 099

191 588 017

191 150 001

-0,04 %

-0,76 %

On constate une quasi-stagnation du budget des affaires maritimes dans leur ensemble. En ce qui concerne les autorisations d’engagement, les actions 3 et 4, portant soutien à la flotte commerce et action interministérielle de la mer, connaissent un tassement imputable à des effets démographiques et à l’achèvement d’investissements de long terme, leur diminution est plus que compensé par la croissance notable des dotations affectées à l’action 5, correspondant aux crédits de soutien au programme. Quant aux crédits de paiement, ils accusent en revanche une baisse de pratiquement 1 % sur les cinq actions relatives aux affaires maritimes stricto sensu.

La France agit dans le domaine de la sécurité et de la sûreté maritimes en tant qu’État du pavillon pour garantir le respect des normes à bord des navires français, en tant qu’État du port pour contrôler les navires de commerce étrangers en escale dans nos ports, et en tant qu’État côtier pour l’ensemble de la circulation maritime qui longe nos côtes, quels que soient la destination et l’objet de l’exploitation des navires en cause.

Cette action globale en faveur de la sécurité et de la sûreté maritimes est déclinée par des services spécialisés : les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), les centres de sécurité des navires (CSN), les services, la société nationale de sauvetage en mer (SNSM), et enfin le Bureau enquête accidents (BEA).

Les crédits de cette action se montent à 26,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 26,5 millions d’euros en crédits de paiement pour 2015, contre 26,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 26,6 millions d’euros en crédits de paiement dans la loi de finances initiale pour 2014.

L’élément humain est une composante essentielle et structurante du programme 205 qui se développe autour de deux thèmes : la formation des gens de mer et le développement de l’emploi maritime.

La formation maritime est un des leviers importants de la politique publique maritime en termes de sécurité mais aussi d’emploi et d’insertion professionnelle. Le dispositif de formation repose sur un réseau de centres secondaires et supérieurs répartis tout au long du littoral et outre-mer.

Le développement de l’emploi maritime constitue la seconde composante. En 2012, l’économie maritime française comptait 300 780 emplois directs. Ainsi, les 39 000 marins qui naviguent chaque année à la pêche et au commerce sont au cœur d’un secteur qui emploie 1,1 % de la population active du pays.

Les crédits de cette action se montent à 30,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2015, sommes inchangées par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.

Le transport maritime est une activité confrontée à une concurrence internationale particulièrement vive. Dans sa volonté de soutenir cette activité, l’État s’est assigné un triple objectif à travers les aides à la flotte de commerce : renforcer la compétitivité économique des entreprises de transport maritime face à la concurrence internationale ; soutenir l’emploi maritime par des dispositifs d’allègement de charges sociales et fiscales ; favoriser la qualité du pavillon français et la sécurité maritime grâce au rajeunissement de la flotte de commerce.

Les crédits de cette action se montent à 69,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2015, contre 71,1 millions en autorisations d’engagement et en crédits de paiement dans la loi de finances initiale pour 2014.

L’action civile de l’État en mer (AEM) est par essence une politique interministérielle. Les quarante-cinq missions assignées sont prises en charge par une dizaine de ministères qui interviennent aux côtés du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Les affaires maritimes participent à plus de 40 des 45 missions incombant à l’AEM et en coordonnent une quinzaine autour des thématiques de contrôle et surveillance des activités maritimes (police des pêches, de la navigation, de la sécurité des navires, des épaves, de l’environnement).

Les crédits de cette action se montent à 10,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 10,2 millions d’euros en crédits de paiement pour 2015, contre 10,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement dans la loi de finances initiale pour 2014.

Cette action regroupe des crédits qui contribuent au développement de politiques transversales des affaires maritimes (fonctionnement courant et immobilier des services déconcentrés) ainsi que le soutien logistique aux services déconcentrés. Le pic d’autorisations d’engagement prévu en 2015 a pour fin le renouvellement des baux des loyers marchands de la direction interrégionale de la mer Méditerranée sur trois ans.

Les crédits de cette action se montent à 7,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 6,5 millions d’euros en crédits de paiement pour 2015, contre 6,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 6,5 millions d’euros en crédits de paiement dans la loi de finances initiale pour 2014.

Si la plus grande fraction du programme 203 n’entre pas dans le périmètre du présent avis, puisque dévolue aux infrastructures ferroviaires, routières et aéroportuaires, une partie est consacrée aux équipements portuaires. Le tableau suivant indique les moyens consacrés à l’entretien des ports pour les années 2009 à 2015 – cette dernière donnée relevant de la prévision. Il inclut à la fois les crédits inscrits en loi de finances initiale et les dotations supplémentaires décidées dans le cadre du volet portuaire du plan de relance.

(millions d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Entretien des ports maritimes

(crédits budgétaires)

53

58,9

58,5

58,5

58,5

53,8

48,6

Plan de relance de l’économie

(crédits budgétaires)

50

0

0

0

0

0

0

La dotation d’entretien consacrée aux ports maritimes – c’est-à-dire les grands ports maritimes et le port autonome de la Guadeloupe – dans la loi de finances initiale au titre du programme 203 « Infrastructures et services de transport » atteint 48,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2014, contre 53,8 millions d’euros en loi de finances 2013.

Les dotations avaient vocation à augmenter sensiblement à la suite de la réforme des ports d’outre-mer qui a transformé, au 1er janvier 2013, les ports concédés de Fort-de-France, Dégrad-des-Cannes et Port-Réunion en grands ports maritimes. L’État devrait prendre en charge la totalité de la dépense, en application de l’article L. 111-4 du code des ports maritimes, alors qu’un cofinancement du concessionnaire de 1,8 million d’euros était jusqu’alors intégré.

En 2009, les crédits du plan de relance de l’économie se sont exceptionnellement ajoutés aux crédits d’entretien, avec une enveloppe totale de 50 millions d’euros permettant d’accélérer le rythme de réalisation des opérations. Ces crédits ont financé des opérations de gros entretien des ouvrages portuaires pour lesquelles les financements publics sont les plus nécessaires pour améliorer les conditions d’accueil des navires. Ils ont concouru aux objectifs de sécurité, de sûreté et de fiabilité des ports et d’amélioration de leur fonctionnement. Les actions d’amélioration des accès maritimes et terrestres des dessertes internes et relatives aux quais ont été privilégiées.

Votre rapporteur pour avis déplore la baisse continue et rapide des crédits du programme 203 destinés explicitement au financement des infrastructures portuaires relevant de l’État. La remise en cause de l’écotaxe par le Gouvernement, en dépit du vote du Parlement et sans que des dotations de remplacement soient prévues pour équilibrer à long terme le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), ne manque pas d’inquiéter les grands ports maritimes largement tributaires des recettes attendues pour moderniser leurs installations et entretenir les chenaux d’accès. Les difficultés suscitées par le désengagement de l’État feront l’objet d’un développement spécifique plus avant.

Au-delà des seules données budgétaires, le monde maritime français fait face à une série d’inquiétudes sur des domaines aussi divers que la pérennité de la flotte de transports de produits pétroliers, la compétitivité fiscale des grands ports maritimes ou encore l’entretien suffisant des infrastructures essentielles. Ces différents points sont en attente d’une réponse gouvernementale et, si la qualité de l’enseignement maritime français semble se renforcer d’année en année, l’action de l’État ne recueille pas partout – loin s’en faut – pareil satisfecit.

Héritée des circonstances délicates de la Reconstruction consécutive à la Seconde Guerre mondiale, l’obligation de pavillon sur les capacités de transport de pétrole brut figure désormais dans la loi n° 92-1443 du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier. Destinée à garantir la sécurité des approvisionnements stratégiques, elle dispose en son article 6 que :

« Tout propriétaire d’une unité de distillation atmosphérique dans une usine exercée de raffinage de pétrole brut en France métropolitaine est tenu de disposer, en propriété ou par affrètement à long terme, d’une capacité de transport maritime sous pavillon français proportionnelle aux quantités de pétrole brut qui entrent dans ladite usine.

Ces quantités sont celles qui ont été importées ou introduites sur le territoire national ; elles ne comprennent pas les quantités de pétrole brut qui sont transformées en produits non affectés à la consommation énergétique ; elles ne comprennent pas non plus les quantités de pétrole brut non affectées à la consommation nationale si celles-ci font l’objet d’un contrat de raffinage à façon ou d’un contrat de vente de produits ferme à long terme. »

Le décret n° 93-610 du 26 mars 1993 fixe le rapport entre la capacité de transport maritime et les quantités de pétrole brut servant d’assiette à l’obligation précitée. Son article premier précise que ce rapport est fixé à 5,5 %. Quant à l’article 2 du décret n° 93-279 du 4 mars 1993, il précise que : « La capacité s’apprécie en moyenne par année civile. La capacité de transport dont dispose l’assujetti peut varier au cours de l’année ; toutefois, sauf cas de force majeure apprécié par le ministre chargé de la marine marchande, elle ne peut être inférieure au niveau de l’obligation mentionnée au précédent alinéa de plus de 30 p. 100 ni pendant plus de quatre-vingt-dix jours consécutifs. Les excédents et les déficits journaliers constatés au cours de la même année peuvent se compenser. Les excédents du dernier semestre d’une année peuvent être reportés dans la limite de 15 p. 100 du niveau de l’obligation de l’année suivante, sous réserve du respect des dispositions du précédent alinéa. La capacité de chaque navire est mesurée en multipliant son tonnage de port en lourd, franc bord d’été en eau de mer, par la fraction d’année, calculée sur la base du nombre de jours, durant laquelle le navire a été effectivement sous pavillon français à la disposition de l’assujetti à l’obligation. »

La direction de l’énergie et la direction des affaires maritimes procèdent chaque année au contrôle du respect des obligations de pavillon par les propriétaires des industries de raffinage. Un procès-verbal fixe annuellement la capacité de transport sous pavillon français. Dans son précédent avis budgétaire, votre rapporteur pour avis soulignait que les obligations de pavillon avaient été respectées en 2012 : les compagnies pétrolières assujetties avaient réalisé une capacité de transport de 2,8 millions de tonnes de port en lourd (tpl). Il en est allé de même pour l’année 2013 : la capacité de transport a atteint 2,732 millions de tpl, soit l’équivalent de neuf Very Large Crude Carrier (navires d’une capacité comprise entre 200 000 et 310 000 tpl) pour une obligation fixée à 2,284 millions de tpl.

La crise du raffinage français, et au-delà les difficultés du secteur sur le continent européen, trouve son origine dans l’acquisition de capacités de transformation des hydrocarbures bruts par les pays producteurs du Moyen-Orient. Il résulte des baisses consécutives de l’outil de raffinage français une réduction mécanique de l’assiette de l’obligation de pavillon – la fermeture de l’usine de Petroplus, en Normandie, et la mise sous cocon de la raffinerie de Lyondell-Basel à Berre-L’Étang, toutes deux en 2012, ont ainsi un impact significatif.

Dans un contexte de marché très volatile, les opérateurs transportant du brut sous pavillon français ont maintenu leurs capacités de transport dans le périmètre de l’obligation de pavillon imposée par la loi du 31 décembre 1992. Mais celui-ci ne cesse d’être réduit avec le temps. Par conséquent, l’année 2014 est marquée par une dégradation notable de la situation pour les sociétés opérant sous pavillon français. Les taux de fret peu élevés sur des navires de moins de 50 000 UMS ont considérablement réduit les résultats d’exploitation des compagnies de transport (Sea Tankers, Socatra). Cette évolution s’est traduite par la disparition de BW Maritime France, en janvier 2013, et par celle de Maersk Tankers France, en 2014 (cinq navires retirés du pavillon et représentant une jauge totale de 133 159 UMS depuis le 1er janvier de l’année en cours).

 

Effectifs

Port en lourd en tonnes

2013

2014

2013

2014

Transporteurs de brut (VLCC)

10

9

3 107 213

2 807 763

Transporteurs de produits pétroliers (y compris pétrolier-chimiquiers)

35

34

651 852

646 832

Transporteurs de GPL

6

6

155 280

153 640

Transporteurs de GNL

3

3

183 400

183 400

Total

54

52

4 097 745

3 791 635

Le tableau ci-dessus retrace la composition de la flotte pétrolière au 1er janvier 2014 ainsi que son évolution en une année. Les précédents exercices avaient déjà été délicats puisque, entre le 1er juillet 2012 et le 1er juillet 2013, le pavillon français avait déjà enregistré huit sorties – cinq VLCC et trois transporteurs de produits pétroliers. Les derniers ont perpétué cette tendance. L’année 2013 a vu une réduction de 10 % de la flotte pétrolière sous pavillon français.

Le recul de la flotte pétrolière est une tendance durable depuis les années 1980 et la crise qui a frappé les supertankers après les chocs pétroliers. Après des années de stabilisation rendues possibles par la loi du 31 décembre 1992 qui se limite aux seuls navires transportant le pétrole brut, la crise commencée en 2008 affecte le cœur de la flotte sous pavillon français (brut et produits raffinés).

Une mission confiée au CGEDD et au CGEIET est chargée d’évaluer le bilan de la loi de 1992 et d’examiner les modalités possibles pour garantir l’approvisionnement énergétique de la France en cas de crise. Son rapport a été remis à l’été 2013. Le Gouvernement a finalement pris la mesure de la crise en décidant, à l’occasion du CIMER du 2 décembre 2013, de préparer une réforme de la loi de 1992 modifiant l’assiette de l’obligation, actuellement limitée au transport de pétrole brut, pour l’étendre à l’ensemble des navires de transports de produits pétroliers.

Alors qu’un projet de loi se faisait attendre sur ce sujet pourtant urgent, l’Assemblée nationale a souhaité accélérer la réaction publique. L’examen en séance publique du projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte a permis l’adoption de l’amendement n° 1565 portant extension de l’obligation formulée par la loi de 1992 aux transporteurs de produits raffinés.

La perte de capacité de transport pétrolier serait excessivement dangereuse pour la position stratégique de la France dans le monde, en la soumettant au bon vouloir de puissances étrangères pour son approvisionnement en hydrocarbures, et tragique pour la formation maritime nationale, en privant les jeunes officiers de navires sur lesquels acquérir leurs compétences. Comme l’indiquait dès l’an dernier votre rapporteur pour avis, il convient d’agir résolument pour l’empêcher, et il faut espérer que le Sénat approuve rapidement l’évolution votée par l’Assemblée nationale dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte. Cette avancée serait particulièrement appréciable, mais elle ne règlerait pas l’ensemble des problèmes nés du changement de la géopolitique du raffinage.

Alors que les taxes prélevées sur les produits pétroliers produisaient jusqu’à récemment une part substantielle des leurs recettes sans mobiliser de lourds investissements d’infrastructure, les grands ports maritimes français assistent avec inquiétude à la baisse continue des importations de brut. Ce mouvement structurel doit être appréhendé par les autorités politiques : dans un commerce en cours de mondialisation, l’avenir du transport maritime sera toujours davantage à la conteneurisation, toujours moins aux échanges de matières premières. Il convient d’adapter en conséquence l’outil et la politique portuaires.

La Société Nationale Corse Méditerranée (SNCM) a été privatisée en 2006. Elle est actuellement détenue à 66 % par Veolia Transdev, 25 % par la Compagnie générale maritime (CGMF) et 9 % par les salariés actionnaires. Veolia Transdev est contrôlé pour moitié par la Caisse des dépôts et consignations et pour l’autre moitié par Veolia Environnement. L’État détient 100 % des parts de la CGMF. Un accord signé en 2012 prévoyait la montée majoritaire (60 %) de la Caisse des dépôts et consignations au capital de Transdev, à la condition suspensive que les 60 % de la SNCM que détient Transdev soient préalablement transférés à Veolia Environnement. Cette opération a été repoussée.

Bien que le trafic maritime vers la Corse ait globalement reculé entre 2008 et 2012 (-0,6 % sur la période, -1,7 % la dernière année), l’activité commerciale de la SNCM a été marquée en 2012 par une augmentation de 31,1 % du nombre de passagers. Corsica Ferries a perdu 12 % de part de marché sur les quatre premiers mois de l’année 2012, au profit de la SNCM, qui gagne 8,5 %, et de la Méridionale, créditée de 3,5 % supplémentaires. Rapporté à l’année, l’écart reste cependant important entre les deux grands opérateurs : la compagnie italienne garde la tête avec 59 % de part de marché.

En revanche, le trafic continue de se dégrader vers le Maghreb et notamment vers l’Algérie. Sur l’année 2012 avec une offre réduite de 20,6 %, la SNCM affiche une baisse de son trafic de passagers de 14,4 % et de son trafic véhicule de 7 % par rapport à 2011. Le chiffre d’affaires de la SNCM a accusé un recul de 10,5 % par rapport à 2011. Sur la Tunisie, après un fort affaiblissement en 2011 (- 20 %) suscité par les événements politiques, le marché maritime progresse en 2012 de 13,5 % en passagers et de 16,2 % en véhicules. Toutefois le contexte demeure fragile.

Au 1er janvier 2013, la flotte de la SNCM, âgée en moyenne de dix-huit ans, était composée de 9 navires dont 5 paquebots transbordeurs et 4 cargos rouliers mixtes, soit un navire de moins qu’en 2011. La compagnie est l’un des cinq employeurs les plus importants de Corse. Selon le bilan de l’exercice 2013, l’effectif moyen salarié est de 1 840 personnes (569 sédentaires et 1 271 navigants). Si l’on ajoute à ce chiffre les salariés détachés dans d’autres sociétés ou sans solde, le total de l’effectif se monte à 2 086 personnes.

Malgré une progression de 5,8 % de son chiffre d’affaires en 2012 avec 191,5 contre 180,9 millions d’euros, la compagnie a enregistré un résultat net négatif de 14,3 millions d’euros (après 12,4 millions d’euros en 2011). De la même manière, le déficit d’exploitation s’est creusé de 21,8 à 27,3 millions d’euros entre 2011 et 2012. Les comptes 2013 ne sont pas encore approuvés mais la compagnie devrait enregistrer un résultat négatif de plus de 40 millions d’euros. De la même manière, le déficit d’exploitation devrait passer de 27,3 millions d’euros à 64,1 millions d’euros entre 2012 et 2013.

Surtout, la situation financière de la compagnie paraît très délicate du fait de deux contentieux européens. La Commission européenne a, le 2 mai 2013, ordonné à la France de recouvrer 220 millions d’euros d’aides publiques jugées incompatibles avec les règles communautaires de la concurrence. Il s’agit de subventions versées par la collectivité territoriale de Corse à la compagnie depuis 2006 au titre du service complémentaire, c’est-à-dire d’une capacité accrue pendant les vacances scolaires avec deux ferries en plus des quatre navires qui effectuent les rotations normales. Les autorités françaises ont déposé un recours en annulation devant la juridiction européenne. Un contentieux relatif à la restructuration-privatisation de la SNCM est également en cours, d’une part sur les mesures prises lors de la restructuration de l’entreprise en 2002, et d’autre part sur les conditions de la privatisation en 2006. Par une décision du 11 septembre 2012, le Tribunal de première instance a annulé la décision de la Commission qui avait validé le processus.

La SNCM a établi un plan de restructuration visant à rétablir sa santé financière, qui a été validé le 20 juin 2013 par son conseil de surveillance. Ce plan prévoyait le renouvellement d’une partie de la flotte de la compagnie, et s’accompagnait de mesures destinées à améliorer la productivité. Deux des sept navires devaient être changés en 2016-2017, ainsi que deux autres en 2018. Compte tenu des difficultés financières de l’entreprise, la commande de nouveaux navires a été suspendue. Le relevé de décision du 9 juillet 2014, rédigé sous l’égide du médiateur Gilles Belier à l’issue du mouvement de grève des salariés, prévoit un processus de travail entre la SNCM, ses actionnaires et ses personnels afin d’élaborer un nouveau projet industriel qui permette de sauver le maximum d’emplois, de préserver les activités de l’entreprise et la continuité territoriale entre la Corse et le continent. Ce processus de travail doit s’étendre sur l’été et l’automne 2014.

La compagnie a semblé errer sans stratégie de gestion soutenable jusqu’au 4 septembre 2014. Ce jour, la Cour de justice de l’Union européenne a confirmé la position de la Commission sur le premier contentieux communautaire, soit l’illégalité des aides publiques françaises reçues par la compagnie maritime au moment de sa restructuration en 2002 et de sa privatisation en 2006. Les montants en jeu s’élèvent à 220 millions d’euros. Dans son arrêt, la Cour « rejette les pourvois de la SNCM et de la France et confirme ainsi l’annulation partielle de la décision de la Commission ». Il semble désormais particulièrement délicat de tracer un avenir : l’hypothèse d’un redressement judiciaire, défendu par les dirigeants de Transdev et par les coactionnaires, sera difficile à contourner. Il a été annoncé en comité d’entreprise le 3 novembre 2014. Le redressement judiciaire permettrait effectivement à la compagnie de ne pas exécuter les décisions européennes. Il supposerait, en contrepartie, d’accepter le risque d’une liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce.

Quant à l’Assemblée nationale, elle a créé une commission d’enquête de trente membres sur les conditions de la privatisation de la SNCM, dont la présidence a été confiée à Arnaud Leroy, membre de la commission du développement durable, et le rapport à Paul Giacobbi. Ses conclusions ont été déposées sous le numéro 1629 le 11 décembre 2013.(1) Elles n’ont guère été flatteuses pour l’État.

Il reste à évoquer les conséquences de cette situation sur les ports continentaux desservis par la SNCM et par Corsica Ferries, à savoir Marseille et Toulon. La concurrence entre les sociétés de transport ne s’est pas étendue aux infrastructures portuaires. Toulon et Marseille constituent, aussi bien du point de vue du transport de fret que de passagers, deux marchés géographiques pertinents. Sur la dernière décennie, le marché au départ de Marseille est resté stable. SNCM et Méridionale, codélégataires de la liaison de service public, ont transporté quasiment le même nombre de passagers en 2002 et 2011.

Compte tenu du changement de statut au 1er janvier 2013 du port autonome de Guadeloupe et des ports d’intérêt national de Martinique, de Guyane et de La Réunion, devenus Grands Ports Maritimes, il y a lieu, pour l’heure, de limiter l’essentiel des commentaires aux résultats financiers des GPM métropolitains.

Après plusieurs années marquées par le ralentissement de l’économie mondiale et la réforme portuaire de 2008, l’activité portuaire française n’a pas encore retrouvé en 2013, avec un chiffre d’affaires de 583,19 millions d’euros, le chiffre d’affaires d’avant-crise qui avait atteint près de 670 millions d’euros. Cependant, l’année 2013 marque une progression de 2,28 % par rapport au chiffre d’affaires 2012.

L’excédent brut d’exploitation, qui mesure les ressources dégagées par l’exploitation après imputation des charges externes et des charges de personnel, avait connu une baisse de 11,35 % en 2011 et de 9,74 % en 2012. Il accuse un nouveau recul en 2013, de l’ordre de 2,72 %. La régression cumulée sur les trois derniers exercices atteint donc 22,61 %.

La capacité d’autofinancement (CAF), qui correspond au résultat net augmenté des charges non décaissées et qui alimente le fonds de roulement, a chuté en 2013 à 86,9 millions d’euros pour l’ensemble des GPM, soit une baisse de 19,2 %.

Le montant total des investissements effectués dans les GPM en 2013 s’élève à 190,15 millions d’euros au lieu de 269 millions d’euros en 2012, soit une baisse de 29,32 %. Malgré cette forte réduction, l’endettement a augmenté de 2,67 %, soit 615 millions d’euros au lieu de 599 millions d’euros en 2012.

En millions d’euros

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014 (prév)

(unités)Chiffre d’affaires

653

669

629

643

604

570

583

586

Charges de personnel

324

355

332

332

312

296

312

316

EBE

184

174

160

179

158

143

139

125

CAF

173

70

146

146

104

107

86

73

Investissements

200

223

332

222

208

269

190

287

Endettement

337

428

539

560

561

599

615

664


Le ratio moyen dette brute / CAF reste préoccupant puisque très supérieur au ratio préconisé – allant de 3 à 4. Il s’est encore dégradé en 2013, passant de 5,57 l’année précédente à 7,07.

GPM métropolitains

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014 (prév)

Ratio dette brute/CAF

1,94

6,09

3,69

3,84

5,39

5,57

7,08

9,10

Ratio dette nette/CAF

0,69

2,54

1,46

2,40

3,47

3,37

5,20

NR

Trois GPM subissent une situation d’endettement particulièrement difficile. Il s’agit des GPM du Havre, de Nantes/Saint-Nazaire et de Marseille/Fos. Dans ces GPM, le ratio est très au-delà du ratio préconisé, notamment en ce qui concerne Marseille/Fos qui déplore en 2013 une capacité d’autofinancement pratiquement nulle. Les perspectives des budgets initiaux pour l’année 2014 laissent envisager une stabilisation du chiffre d’affaires. En revanche, celles-ci ne laissent pas entrevoir un redressement de l’excédent brut d’exploitation, ni de la CAF, ni de l’endettement.

Ratio dette brute/CAF

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014 (prév)

GPM du Havre

4,73

7,39

8,49

8,28

8,36

8,55

13,95

13,02

GPM Nantes/Saint-Nazaire

1,86

24,79

1,76

2,72

45,02

10,03

6,84

12,15

GPM Marseille/Fos

0,46

4,79

3,69

4,40

29,30

11,06

351,86

79,84

La situation financière des grands ports maritimes apparaît d’autant plus préoccupante que, en intégrant cette fois les établissements ultramarins nouvellement institués, l’endettement général prévisionnel passerait de 675,95 millions d’euros en 2013 à 778,17 millions d’euros en 2014, soit une progression de 15,12 %.

Dans ce contexte délicat mais conforme aux évolutions de long terme, une évolution jurisprudentielle intervenue au cours de l’été 2014 inquiète grandement les instances dirigeantes des grands ports maritimes. Il s’agit de l’arrêt des huitième et troisième sous-sections du Conseil d’État rendu le 2 juillet 2014, dont les motivations sont reproduites ci-après in extenso et dont les passages importants apparaissent en gras.

Conseil d’État, 2 juillet 2014

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le port autonome de La Rochelle, établissement public créé par décret du 20 décembre 2004, a bénéficié d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties conformément à l’interprétation formelle de la loi fiscale prévue par une décision ministérielle du 11 août 1942, reprise par une réponse ministérielle publiée au journal officiel de l’Assemblée nationale du 23 février 1981 et par la documentation administrative ; qu’il a été transformé en un grand port maritime par décret du 9 octobre 2008 et a pris le nom de grand port maritime de La Rochelle ; que le 15 novembre 2012, l’administration fiscale a refusé de lui accorder l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficiait le port autonome auquel il a succédé à raison de ces locaux ; que le ministre chargé du budget se pourvoit en cassation contre les articles 2 et 3 du jugement du 21 novembre 2013 par lesquels le tribunal administratif de Poitiers a déchargé le grand port maritime de La Rochelle des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 dans les rôles de cette commune et a mis à la charge de l’État une somme de 1 200 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu’une décision ministérielle du 11 août 1942, publiée au bulletin officiel des contributions directes de la même année, indique qu’un arrêté du 31 janvier 1942 a prévu que les ports autonomes seraient passibles à compter du 1er janvier 1942 de tous les impôts et taxes dus par les entreprises privées similaires mais reporte " à titre exceptionnel, au 1er janvier de l’année suivant celle de la cessation des hostilités l’application de l’arrêté du 31 janvier 1942 en tant qu’il est susceptible de modifier le régime des impôts directs applicables aux chambres de commerce maritimes et aux ports autonomes " ; que la réponse du ministre du budget à M. A..., député, publiée au journal officiel de l’Assemblée nationale du 23 février 1981, rappelle que, si " les terrains affectés à l’exploitation portuaire, de même que les constructions et installations appartenant aux ports autonomes sont, en principe, imposables à la taxe foncière sur les propriétés bâties (...) des décisions ministérielles prises après 1945, et maintenant une solution arrêtée pendant la seconde guerre mondiale, ont suspendu l’application de ces règles aux installations portuaires " ; qu’enfin, selon la documentation administrative de base référencée 6 C-121 du 15 décembre 1988, relative aux exonérations de taxe foncière sur les propriétés publiques, applicable aux impositions en litige : " en vertu de décisions ministérielles des 11 août 1942 et 27 avril 1943, le régime d’exonération des propriétés publiques antérieur au régime actuel qui résulte de l’article 4 de la loi du 28 juin 1941, continue de s’appliquer aux immeubles et installations dépendant des ports gérés par des ports autonomes ou des chambres de commerce " ; qu’il résulte de ce qui précède que l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties prévue par la décision ministérielle du 11 août 1942, reprise par la réponse ministérielle à M. A... et par la documentation administrative, bénéficie aux immeubles des ports autonomes ;

Considérant que la loi du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire a ajouté aux catégories des ports maritimes et de pêche, notamment à celle des ports autonomes, la catégorie des grands ports maritimes ; que les dispositions de cette loi interdisent aux grands ports maritimes d’exploiter les outillages utilisés pour les opérations de chargement, de déchargement, de manutention et de stockage liées aux navires à l’issue d’un délai qui ne peut excéder deux ans à compter de l’adoption de leur projet stratégique et prévoient la cession à des opérateurs de terminaux de la propriété de ces outillages ou, le cas échéant, des droits réels qui leur sont attachés ; que la loi prévoit également la conclusion, avec l’État et, le cas échéant, les collectivités territoriales intéressées ou leurs groupements, de contrats pluriannuels aux fins de préciser les modalités de mise en œuvre du projet stratégique des grands ports maritimes, ainsi que leur politique de versement de dividendes à l’État ; qu’ainsi, eu égard aux différences substantielles entre les grands ports maritimes créés par la loi et les ports autonomes, l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties prévue pour les seconds par la décision ministérielle du 11 août 1942, reprise par la réponse ministérielle à M. A... et par la documentation administrative mentionnées au point 2, ne saurait être regardée comme applicable aux premiers ;

Considérant que le tribunal administratif a jugé que la loi du 4 juillet 2008 n’avait pas substantiellement modifié le statut juridique du port de La Rochelle et que, par suite, le grand port maritime de La Rochelle pouvait se prévaloir de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficiait le port autonome de La Rochelle ; qu’il résulte de ce qui précède qu’il a ainsi commis une erreur de droit ; qu’il ne pouvait davantage se fonder, sans erreur de droit, sur les dispositions de l’article L. 5312-15 du code des transports, selon lesquelles " les règles applicables aux ports autonomes maritimes s’appliquent aux grands ports maritimes pour autant qu’il n’y est pas dérogé par des dispositions spéciales (...) ", qui n’ont en tout état de cause ni pour objet ni pour effet de rendre la doctrine précitée applicable aux grands ports maritimes ; qu’ainsi le ministre est fondé à demander l’annulation des articles 2 et 3 du jugement qu’il attaque ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 1380 du code général des impôts : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l’exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code " ; que l’article 1382 du même code dispose que : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° les immeubles nationaux, les immeubles régionaux, les immeubles départementaux pour les taxes perçues par les communes et par le département auquel ils appartiennent et les immeubles communaux pour les taxes perçues par les départements et par la commune à laquelle ils appartiennent, lorsqu’ils sont affectés à un service public ou d’utilité générale et non productifs de revenus (...) cette exonération n’est pas applicable aux immeubles qui appartiennent à des établissements publics autres que les établissements publics de coopération intercommunale, les syndicats mixtes, les pôles métropolitains, les ententes interdépartementales, les établissements publics scientifiques, d’enseignement et d’assistance ainsi que les établissements visés aux articles 12 et 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ni aux organismes de l’État, des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial " ; qu’aux termes du 1° de l’article 165 de l’annexe IV au même code : " Nonobstant toutes dispositions contraires, les établissements publics ayant un caractère industriel ou commercial sont passibles de tous les impôts directs et taxes assimilées applicables aux entreprises privées similaires " ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’en application de la loi fiscale, les immeubles appartenant à un grand port maritime sont passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties lorsqu’ils sont productifs de revenus ;

Considérant, d’autre part, qu’il résulte de ce qui a été dit plus haut qu’un grand port maritime ne peut se prévaloir, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la tolérance administrative exonérant les ports autonomes de la taxe foncière sur les propriétés bâties ;

Considérant qu’il en résulte que la demande du grand port maritime de La Rochelle tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 dans les rôles de cette commune doit être rejetée ; (…)

Les ports autonomes bénéficient d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu d’un texte remontant à la Seconde Guerre mondiale. Or l’administration fiscale a tiré argument de leur passage au statut de grands ports maritimes, conformément à la loi du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire, pour contester cette exonération au motif que le nouveau statut diffère suffisamment du précédent pour ne pas perpétuer la dérogation dont bénéficiaient les établissements portuaires. Cette interprétation pouvait apparaître audacieuse dans la mesure où un port reste un port, sans préjudice de la propriété de ses outillages et sans référence à son statut juridique. Elle semble également contraire à la volonté maintes fois exprimée par l’Assemblée nationale et le Sénat au cours des débats parlementaires : il s’agissait de doter les ports français d’une architecture juridique plus moderne et plus favorable ; il ne fut jamais question d’alourdir la fiscalité sur leurs propriétés à cette occasion. C’est donc en toute logique que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté les prétentions de l’administration fiscale à la fin de l’année 2013.

Toutefois, le ministre chargé du budget s’est pourvu devant le Conseil d’État qui, le 2 juillet 2014, a tranché en sa faveur dans une lecture particulièrement rigoureuse de la législation. S’il est vrai que les dérogations en vigueur ne visent pas explicitement les grands ports maritimes, qui furent créés bien plus tard, on aurait pu imaginer que le juge lirait la volonté implicite du Parlement de soutenir l’activité portuaire, d’autant qu’aucune action positive non plus qu’aucun débat n’indiquent jamais la volonté de ramener les grands ports maritimes dans le droit commun. Cette décision juridictionnelle n’est pas neutre politiquement et financièrement.

Du point de vue politique, elle signifie que, contrairement aux affirmations répétées du Gouvernement et aux votes en ce sens du Parlement, le statut de grand port maritime n’est finalement pas forcément plus avantageux que celui de port autonome. Il y a fort à craindre que des résistances se manifestent sur le terrain une fois que sera répandue la nouvelle de ce qu’il faut appeler une promesse non tenue par l’État.

Du point de vue financier, alors que les grands ports maritimes sont confrontés à une situation délicate, l’arrêt du Conseil d’État équivaut à une charge supplémentaire d’une portée non négligeable. D’après les renseignements collectés à l’occasion des auditions préparatoires au présent avis, les sommes en jeu pourraient atteindre 7 millions d’euros pour le seul grand port maritime du Havre, et excéder 25 millions d’euros pour l’ensemble des GPM métropolitains. Cette dernière somme représenterait un cinquième de leur excédent brut d’exploitation et un tiers de leur capacité d’autofinancement.

Votre rapporteur pour avis appelle le ministre du budget à ne pas hypothéquer l’avenir dans une course aux économies de court terme. Il est certain que les sommes en jeu, dérisoires au regard des dettes maastrichtiennes de la France, pèseront lourd sur les capacités de développement de l’outil portuaire français, pourtant indispensable à la bonne insertion de la France dans la mondialisation. De surcroît, l’intention du Parlement de perpétuer au bénéfice des grands ports maritimes les avantages dont bénéficiaient les ports autonomes n’a jamais soulevé la moindre interrogation. Il conviendrait, par conséquent, d’expliciter la loi fiscale sur ce point afin de circonscrire les craintes suscitées par l’arrêt du Conseil d’État.

La quantité de sédiments marins dragués en 2009, en France métropolitaine et départements d’outre-mer, est de 49,2 millions de mètres cubes. Environ 81 % de ces sédiments sont collectés par les sept grands ports maritimes métropolitains. La question du dragage des accès conditionne, en effet, la poursuite de leur activité. Or ceux-ci déplorent un effet de ciseaux entre des coûts sans cesse croissants et des dotations correspondantes toujours insuffisantes. Le 6 octobre 2014, la Cour des comptes a publié un rapport particulier sur la gestion du groupement d’intérêt économique (GIE) Dragages-Ports pour les exercices 2005 à 2012. Créé en 1979, ce GIE rassemble l’État et les grands ports maritimes métropolitains pour répondre, au meilleur coût, aux besoins de dragage des ports en optimisant l’emploi des dragues. La Cour a profité de l’occasion pour dresser un bilan de situation. Peu enthousiasmant, le constat d’un désengagement de l’État dressé par les juges corrobore le ressenti des acteurs du monde maritime rencontrés par votre rapporteur pour avis.

Les volumes dragués sur les grands ports maritimes métropolitains sont constants sur la période 2005-2012, relève la Cour des comptes, en dépit de fluctuations liées aux travaux d’investissements au Havre et à Rouen. Les volumes strictement liés à l’entretien sont, eux, en légère augmentation pendant la période (2 %).

Les ports les plus exposés sont logiquement les ports d’estuaire (Bordeaux, Nantes/Saint-Nazaire et Rouen), chacun pour 25 % à 35 % suivant les années. La profondeur des voies d’accès doit être entretenue régulièrement, voire quotidiennement à Rouen, pour permettre l’accès aux navires.

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Le dépôt de sédiments dans les lits des fleuves couplé à l’augmentation continue de la taille des navires, et donc de leur tirant d’eau, fait du dragage une condition de la survie économique des grands ports maritimes d’estuaire.

Le port de Bordeaux, spécialisé dans les trafics de vracs solides et liquides, reçoit des navires qui peuvent difficilement se présenter à pleine charge. Les passages doivent être programmés en fonction de la marée pour bénéficier du maximum de flux disponible. La Cour des comptes indique que, entre 2010 et 2012, plus de 45 % du trafic a été réalisé avec des bateaux de plus de dix mètres de tirant d’eau alors que, en l’absence de dragage, le tirant d’eau maximum serait de l’ordre de sept mètres et les trafics réduits de plus de 90 %.

Selon les calculs du grand port maritime de Rouen, disposer d’un tirant d’eau inférieur à 10 mètres se traduirait par la perte d’un tiers du trafic actuel. Cette proportion devrait se renforcer à l’avenir avec l’augmentation progressive de la taille des navires.

On aurait toutefois tort de penser que seuls les ports d’estuaire déploient une activité économique que mettrait en péril un défaut de dragage. Celui-ci est indispensable au bon fonctionnement du port de Dunkerque, où la sédimentation peut atteindre plus d’un mètre par an, et où les navires accueillis avec un tirant d’eau de plus de 14 mètres comptent pour 40 à 50 % du trafic total – en particulier pour l’acheminement de minerai et de charbon.

La Cour des comptes pointe une augmentation des dépenses d’entretien des accès des ports (soit principalement le dragage mais aussi, notamment, les écluses) entre l’année 2005 (84 millions d’euros) et l’exercice 2012 (99 millions d’euros). Du fait des volumes pratiquement constants, cette croissance s’explique avant tout par la multiplication des contraintes auxquelles doivent faire face les grands ports maritimes pour mener à bien les opérations de dragage, et notamment dans le cadre des opérations de clapage – opération consistant à déverser en mer des substances (généralement, déchets ou produits de dragage), en principe à l’aide d’un navire dont la cale peut s’ouvrir par le fond. Ainsi donc :

● Au Havre, le port est autorisé à immerger les sédiments dragués sur un site de clapage unique situé au large d’Octeville-sur-Mer. L’autorisation, délivrée en 2004 et renouvelée en 2009, devrait être reconduite en 2014. Cependant, la saturation du site pourrait entraîner une gestion à terre des sédiments et des surcoûts afférents ;

● À Dunkerque, quatre sites de clapage sont utilisés, mais le traitement des sédiments dont l’immersion est désormais prohibée représente un surcoût d’environ 600 000 euros ;

● À Nantes/Saint-Nazaire, les autorités portuaires ont épuisé le site traditionnel de clapage et ont dû se reporter vers une nouvelle zone plus éloignée vers le large de 2,5 milles nautiques, soit environ 10 % de surcoût (1 million d’euros) ;

● Une situation similaire s’est produite à Rouen, où la saturation du site du Kannik a conduit à reporter les clapages vers les zones plus éloignées de Machu et d’Octeville, soulevant des interrogations sur le respect de l’environnement dans les nouveaux sites et occasionnant des surcoûts allant de 20 % à 35 % ;

● Le grand port maritime de Bordeaux drague tous les ans 8,5 millions de mètres cubes de sédiments qu’il immerge en dix-sept zones, toutes situées le long de l’estuaire, ce qui permet de réduire le temps de route et les coûts. Cependant, dans le cadre du plan de gestion des sédiments, le nombre de sites de clapage pourrait être réduit, notamment sur les passes amont ;

● Pour ce qui concerne enfin La Rochelle, l’activité de dragage est de moins en moins bien perçue au sein d’une zone classée Natura 2000 et à proximité d’exploitations ostréicoles. L’autorisation actuelle expirera en 2019, ce qui laisse un temps suffisant pour déterminer des modalités alternatives.

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L’article L. 111-4 du code des ports maritimes dispose que le coût d’entretien des accès incombe à l’État dans les conditions suivantes : « L’État supporte les frais de l’entretien et de l’exploitation des écluses d’accès, de l’entretien des chenaux d’accès maritimes, de la profondeur des avant-ports, des ouvrages de protection contre la mer. Il supporte, dans les mêmes conditions, pour l’exécution de ces travaux, les dépenses relatives aux engins de dragage dont le régime de propriété et les conditions d’exploitation sont fixés par décret en Conseil d’État. Le programme et le montant des dépenses de ces opérations sont arrêtés chaque année par décision de l’autorité compétente. ».

L’article L. 111-5 du même code établit, pour sa part, que les dépenses d’investissement sont prises en charge par l’État à hauteur de 80 %, notamment pour le « creusement des bassins » et les « création et extension des chenaux d’accès maritimes et des plans d’eau des avant-ports ».

La Cour des comptes souligne que la dotation annuelle de l’État a régressé de 2005 à 2008 avant de s’accroître de nouveau en 2009 pour atteindre le niveau de 2005, puis le dépasser en 2010. Elle a de nouveau diminué en 2011, puis en 2012. Le montant des dotations aux ports se réduit en 2011 et 2012 en raison d’une légère contraction des crédits accordés en loi de finances (58,5 millions d’euros au lieu de 58,9 millions d’euros en 2010) et de dépenses supplémentaires survenues éligibles sur cette ligne budgétaire. La Cour des comptes constate surtout la violation de l’article L. 111-4 du code des ports maritimes : l’État n’assume pas les charges liées à l’entretien des chenaux d’accès, les 99 millions d’euros de dépenses de 2012 ayant été partiellement compensés par une dotation de 51 millions d’euros !

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Cet effet de ciseaux entre coûts et ressources devrait encore s’accroître avec le projet de loi de finances pour 2015 : celui-ci alloue 48,6 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement pour l’entretien des accès et des ouvrages d’accès des grands ports maritimes. Ainsi que le déplore la Cour des comptes pour les exercices précédents, dans la mesure où la préservation des chenaux constitue une nécessité absolue pour la poursuite de l’activité des grands ports maritimes, ceux-ci seront contraints d’absorber les sommes non compensées sur leur budget propre – ainsi que sur celui du groupement d’intérêt économique Dragages-Ports.

Votre rapporteur pour avis s’insurge contre le mépris opposé par le Gouvernement à la lettre de la loi, alors même qu’il en sollicite une application particulièrement rigoriste sur la question de la taxe foncière sur les propriétés bâties. La France ne gagnera rien à dissimuler une fraction du déficit de l’État derrière la mise en friche de ses établissements publics nationaux, en l’occurrence de ses grands ports maritimes. Ceux-ci représentent l’interface entre le pays et un commerce international mondialisé. Saboter leur fonctionnement revient à renoncer à nos atouts dans la compétition internationale. Il est essentiel que le Gouvernement le réalise et qu’il honore les engagements qui lui sont imposés par la loi.

Les États membres de l’Union européenne ont la liberté d’opter pour un système d’autoliquidation de la TVA d’importation ou de conserver le régime traditionnel de décaissement du montant de la TVA auprès de l’administration douanière. Seize États membres ont déjà intégré dans leur législation le mécanisme de l’autoliquidation fiscale de la TVA à l’importation, soit à titre de règle de droit commun, soit à titre optionnel et selon des modalités locales. En Belgique et aux Pays-Bas, par exemple, les importateurs peuvent ainsi déclarer mensuellement la TVA d’importation ce qui leur permet d’éviter un décaissement.

La France n’applique pas cette procédure : sur le territoire français, la TVA à l’importation en provenance d’un pays tiers à l’UE est d’abord acquittée auprès de l’administration douanière avant d’être déduite, ce qui induit un mouvement financier impactant la trésorerie des importateurs.

Cette situation a une incidence sur les flux logistiques. Une fraction du commerce international se réoriente vers les pays de l’Union européenne où est pratiquée l’autoliquidation de la TVA import : de nombreux conteneurs destinés à la France transitent ainsi par les ports belges et néerlandais – au moyen d’une déclaration d’échange de biens (DEB) et d’un transport routier complémentaire. La moitié du trafic de conteneurs destinés à la France transite désormais par les ports belges et néerlandais, contre 20 % dans les années 1990 ; bien que les mécanismes douaniers n’expliquent évidemment pas le phénomène dans son intégralité, il convient de limiter les dispositions qui affaiblissent la compétitivité nationale. Le mécanisme actuel de TVA à l’importation, dans lequel l’importateur français doit décaisser une TVA, est à l’origine de nombreux détournements de trafics sur les ports du Nord (Anvers, Rotterdam et Hambourg principalement). En effet, un régime douanier spécifique « 42 » (mise en libre pratique suivie d’une livraison intracommunautaire) permet aux importateurs français de ne pas avancer la TVA dans ces conditions. Le dédouanement dans un de ces ports permet de considérer l’introduction consécutive des biens en France comme une acquisition intracommunautaire et d’ainsi d’autoliquider la TVA.

Cette dissymétrie fiscale admise par le droit communautaire, perpétuée par les législations nationales et orchestrée par les administrations douanière et fiscale, pénalise ainsi directement la compétitivité des opérateurs français situés à proximité de la frontière, au premier rang desquels le grand port maritime de Dunkerque. Elle est globalement perçue comme contre-productive, tant par les pouvoirs publics que par les gros importateurs qui doivent mettre en place des mécanismes logistiques et comptables complexes, et par les entreprises françaises qui subissent un handicap concurrentiel face à leurs homologues européens.

Votre rapporteur pour avis a consulté des sources faisant état de quelque 8 000 emplois et 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires qui échapperaient à la France en raison de l’impossibilité d’une autoliquidation de la TVA. Si ces chiffres sont impressionnants, ils doivent être appréhendés avec la plus grande précaution étant entendu que rien ne permet la vérification empirique des hypothèses sur lesquels ils reposent. Quoi qu’il en soit, la réalité des flux logistiques captés par l’étranger n’est pas contestable. Il est donc de rétablir un équilibre afin que les plateformes françaises en général, et le grand port maritime de Dunkerque en particulier, puissent se confronter à la concurrence à armes égales.

Des mesures de simplification ont été annoncées à l’occasion du Conseil stratégique de l’attractivité tenu le 17 février 2014. Le Président de la République a décidé des mesures de fluidification des mécanismes en douane. Dès janvier 2015, dans le cadre de la procédure de domiciliation unique (PDU), régime simplifié de dédouanement à domicile, les entreprises pourront reporter la TVA due sur les marchandises importées sur leur déclaration courante de TVA. La procédure annoncée est simple, accessible aux PME tout comme aux grands opérateurs français ou étrangers ; elle correspond aux souhaits émis de longue date par les professionnels français.

La nouvelle procédure présenterait également de nombreux avantages :

● Une meilleure perception globale de la TVA, particulièrement pour les frais liés à des factures émises après l’opération de douane : contrôles qualité, frais de stationnement, frais de surestaries (2), etc.;

● Une plus grande efficacité administrative, les services fiscaux gagnant compétence sur la totalité de la procédure et libérant les douanes de cette mission ;

● Une simplification des écritures fiscales pour les importateurs grâce à l’harmonisation entre achats communautaires et achats de pays tiers ;

● Une responsabilité directe des importateurs vis-à-vis des services fiscaux, dégageant celle des transitaires et permettant à ceux-ci de ne plus financer l’avance de TVA auprès de la douane ;

● Une égalité des acteurs économiques français avec les opérateurs des pays voisins déjà dotés de cette procédure, ce qui mettrait un frein aux importations destinées au marché français qui transitent par Rotterdam ou Anvers pour des raisons de déport de la TVA, et favoriserait le développement des activités logistiques en France.

L’autoliquidation de la TVA import n’en est cependant encore qu’au stade de projet. Si des annonces ont été effectuées, si le Gouvernement travaille à son application, des interrogations demeurent qui ont prévenu sa généralisation immédiate. Certains ont avancé une réticence de l’administration des douanes à se départir d’une de ses prérogatives historiques au profit des services fiscaux. Si rien ne permet d’affirmer l’inexistence de tels doutes, il serait malvenu d’y voir la motivation du temps de réflexion pris par les pouvoirs publics. Les délais semblent principalement justifiés par le fait que les mécanismes d’autoliquidation sont propices aux fraudes à la TVA de type « carrousel ».

La Libre Belgique, article du 21 janvier 2013

La fraude "carrousel" est une fraude à la TVA, impliquant plusieurs entreprises établies dans au moins deux Etats membres de l’Union européenne. La fraude consiste à obtenir la déduction ou le remboursement de la TVA afférente à une livraison intracommunautaire (LIC) de biens alors que cette TVA n’a pas été reversée, de façon abusive, au Trésor.

Le carrousel nécessite une transaction intracommunautaire. Le fraudeur établit une société bidon A dans un pays de l’Union européenne – par exemple la Belgique. Cette société A va acheter un bien dans un autre pays de l’Union européenne – par exemple la France – à la société B. Intracommunautaire, cet achat se fait hors taxe.

A vend ensuite le bien à la société C, établie elle aussi en Belgique. Cette vente se fera en dessous du prix d’achat, mais avec la TVA de 21 % incluse. C pourra ensuite récupérer, en la réclamant au Trésor, la TVA qu’il a payée à A.

De son côté, A, qui a facturé TVA comprise à C, doit s’acquitter du montant de la TVA au Trésor. Ce versement doit se faire dans les trois mois. Mais A, à la tête de laquelle il y a bien souvent un homme de paille pour brouiller les pistes, a disparu dans la nature avec la caisse. Dans le jargon, A est le "Missing Trader", aussi appelée la société défaillante.

Le schéma peut-être plus complexe, avec entre A et C, une, voire plusieurs sociétés tampons. L’imagination est ici sans limites. Tout l’art des fraudeurs est de faire, dans les trois mois avant qu’il y ait un contrôle TVA, tourner le carrousel à plusieurs reprises entre A, B et C. La société C revend à B. La roue tourne et le Trésor est ainsi floué à plusieurs reprises. Les marchandises peuvent cependant à un moment sortir du circuit.

Dans ces carrousels, le fisc considère qu’aucune des trois sociétés n’est de bonne foi. Une des entreprises est en effet l’organisatrice de la fraude tandis que les deux autres doivent inévitablement s’en rendre compte de la fraude à cause des prix. Au niveau judiciaire, la charge de la preuve est plus lourde.

La commission du développement durable s’est déjà heurtée à ces pratiques délictuelles lorsqu’elle s’est penchée sur le fonctionnement des marchés de quotas d’émissions de gaz à effet de serre. Les fraudeurs avaient mis en place un carrousel dont la valeur a finalement été estimée à cinq milliards d’euros. Devant la menace d’une multiplication de ces pratiques, la volonté des pouvoirs publics de temporiser apparaît plus compréhensible. Il n’en demeure pas moins que l’activité logistique du nord de la France souffre d’une concurrence déloyale qui la prive d’une partie de ses flux. Votre rapporteur pour avis demande instamment au Gouvernement de construire au plus vite un système d’information permettant un contrôle en temps réel des importateurs propre à limiter les risques de fraude, de façon à autoriser au plus vite l’autoliquidation de la TVA import sur le territoire national.

L’organisation du sauvetage en mer en France repose principalement sur les sept centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) et les deux centres de coordination du sauvetage (MRCC) (3) de Papeete et de Nouméa. Ils ont coordonné 10 144 opérations en 2013 contre 11 121 en 2012. Le nombre de personnes impliquées atteint 23 432. Les bénévoles de la SNSM ont pris toute leur part dans ces actions de sauvetage puisqu’ils ont été engagés dans 3 372 opérations au profit de 7 604 personnes, soit approximativement un tiers des missions effectuées au cours de l’année 2013.

Les ressources de l’association se sont élevées à 25,9 millions d'euros. Les dons, legs et cotisations constituent la principale ressource à hauteur de 12,6 millions d’euros, suivie des prestations diverses pour 4,3 millions d’euros (assistance aux biens, encadrement des manifestations, formations) et des subventions publiques de fonctionnement pour 4 millions d’euros, dont une dotation de l’État de 2,31 millions d’euros. La contribution des collectivités publiques et des donateurs privés à l'investissement représente 3,8 millions d’euros.

Quant aux dépenses de l’association, elles se sont élevées à 26,2 millions d’euros. L'amortissement de l'investissement est le principal poste à 7,9 millions d’euros, suivi des frais généraux à 5,2 millions d’euros et les charges de personnels à 4,3 millions d’euros.

Ainsi, en 2013, l’association a présenté un compte de résultat en léger déficit – à hauteur de 290 000 euros.

Votre rapporteur pour avis a été alerté des craintes de la SNSM devant les conséquences indirectes de la réforme territoriale actuellement discutée par le Parlement sur sa pérennité financière. L’association redoute que la disparition de la clause de compétence générale des régions et des départements empêche la contribution à son budget de ses collectivités territoriales qui fournissent environ 16 % de ses ressources. En particulier, les régions et les départements financent aujourd’hui la moitié des investissements.

Le Gouvernement et le Secrétariat général de la mer ont engagé une réflexion avec les collectivités locales pour étudier différentes options permettant un mode de financement durable. Votre rapporteur pour avis n’est guère inquiet des effets de la réforme territoriale dans la mesure où tous les niveaux de collectivités devraient demeurer libres d’abonder des financements accordés par la collectivité chef de file – et on voit mal une collectivité côtière refuser toute subvention à une mission de service public aussi évidente que le secours en mer. Toutefois, votre rapporteur pour avis tient à saisir l’occasion du débat en cours pour recommander au Gouvernement d’engager avec la SNSM une démarche de contractualisation des financements, de sorte que les exercices budgétaires à venir bénéficient d’une lisibilité accrue.

Votre rapporteur pour avis souhaite achever ce chapitre sur une note positive en évoquant, non pas un point d’inquiétude pour les marins français ou le retard accusé par une réforme attendue de longue date, mais une évolution de long terme en cours de parachèvement dont les premières réalisations s’inscrivent dans une dynamique positive.

Le ministère chargé de la mer a entrepris, à la suite de la loi de modernisation sociale de 2002 et avec l’appui des partenaires sociaux, une profonde restructuration de l’enseignement maritime et de ses filières. Cette transformation des processus de formation ainsi que les nouvelles exigences internationales et européennes expliquent la continuation de ce chantier, voire sa vocation à ne jamais cesser. Les objectifs principaux des travaux en cours sont :

● la modernisation et le renforcement de l’attractivité des filières de formations initiales, tant supérieures que secondaires ;

● la relance de la promotion sociale avec la possibilité effective d’accéder aux postes les plus élevés quelle que soit l’origine scolaire ou professionnelle ;

● l’amélioration de la lisibilité des cursus ;

● l’adaptation des formations à l’inclusion de passerelles entre les différents secteurs maritimes (commerce, pêche, plaisance professionnelle) et à l’organisation de mobilités vers d’autres secteurs économiques ;

● la mise en œuvre, tant à la pêche qu’au commerce, des nouvelles dispositions internationales et européennes relatives à la formation des gens de mer.

Suite à la mise en place en 2009 de la rénovation de la voie professionnelle, la formation initiale de l’enseignement secondaire s’organise désormais, au sein des lycées professionnels maritimes (LPM), en deux cycles :

● un cycle court de deux ans conduisant au certificat d’aptitude professionnelle ;

● un cycle de référence de trois ans, après la classe de troisième du collège, conduisant au baccalauréat professionnel et constitué par les classes de seconde, première et terminale professionnelles.

Un premier bilan de la préparation du baccalauréat professionnel en trois ans au lieu de quatre précédemment a été réalisé en 2013. Des groupes de travail ont été réunis au cours de l’année scolaire 2013-2014 sous le pilotage de l’inspecteur général de l’enseignement maritime afin de réviser les référentiels pédagogiques de ces formations.

Un décret du 3 juin 2014 a doté l’enseignement maritime d’un brevet de technicien supérieur maritime (BTSM) permettant de développer une offre de formation similaire à celles de l’Éducation nationale et de l’enseignement agricole. La création d’un règlement général spécifique pour le BTSM énonce les objectifs suivants :

● répondre aux besoins des secteurs économiques de la pêche, du commerce et de la plaisance en termes d’emplois. Les évolutions techniques exigent des jeunes marins une acquisition de compétences de plus en plus larges, notamment dans le domaine des techniques de pêche, de gestion de l’environnement et de maintenance des systèmes embarqués modernes ;

● valoriser et rendre attractifs les métiers de la mer ;

● offrir aux élèves, en complément de brevets maritimes, des diplômes nationaux identifiables facilitant leur reconversion future, aspect d’autant plus fondamental que les carrières de navigants peuvent être relativement courtes ;

● compléter la dynamique née de la création du baccalauréat professionnel en trois ans et répondre aux demandes des parents d’élèves, en offrant la possibilité d’accéder à terme à un niveau de formation supérieur au sein de l’Ecole nationale supérieure maritime (ENSM).

Deux spécialités ont été créées dans les domaines de la « pêche et de la gestion de l’environnement marin » et dans celui de la « maintenance des systèmes électro-navals ». Depuis la rentrée de septembre 2014, deux classes de chacune de ces spécialités sont ouvertes dans les lycées professionnels maritimes. Deux classes de mise à niveau permettront, en outre, aux élèves qui ne sont pas issus de l’enseignement maritime de rejoindre les classes de BTSM.

En conséquence de ces ouvertures de cursus, la dotation allouée aux lycées maritimes a progressé de près de 22 % entre 2012 et 2014, passant de 3,41 millions d’euros à 4,15 millions d’euros. L’arrivée de quelque soixante-dix nouveaux étudiants est équilibrée par un transfert de vingt-cinq emplois temps-plein d’enseignants du ministère de l’Éducation nationale vers le ministère de l’Écologie entre 2014 et 2016.

Une nouvelle équipe dirigeante est à la tête de l’établissement depuis fin 2012. Les mesures engagées alors ont permis un rétablissement de la situation financière au cours de l’exercice 2013. Ces économies ont été réalisées par la réduction des effectifs du personnel de l’école et par une surveillance accrue des dépenses. Au 31 décembre 2013, l’école totalisait ainsi 109 agents pour les fonctions supports, soit 15 de moins qu’un an auparavant. L’établissement a notamment travaillé sur le regroupement des achats pour ses quatre sites. Dans cette perspective, une comptabilité analytique est tenue depuis le 1er janvier 2013. L’exercice 2014 doit confirmer ce redressement avec une subvention pour charges de service public de 18,32 millions d’euros, étant entendu que cette dotation est maintenue inchangée dans le projet de loi de finances pour 2015 en dépit de l’accroissement du nombre d’élèves.

Le conseil d’administration de l’école a adopté le 10 décembre 2013 son projet d’établissement. Celui-ci porte à la fois sur la formation initiale et sur la formation continue. L’objectif premier est la formation des officiers de marine marchande, mais l’école compte explorer l’interface des activités maritimes et terrestres avec des formations supérieures et post-supérieures. Le projet d’établissement est entré en application à la rentrée 2014 avec le début de la spécialisation de chacun des sites. Marseille accueille tous les élèves de première année de la filière des officiers de première classe alors que Le Havre forme la très grande majorité des élèves de cinquième année. Saint-Malo continue à assurer la formation des officiers mécaniciens et Nantes celle des officiers de pont.

L’ENSM a été auditée au cours de l’année 2014 par la Commission des titres d’ingénieur en vue du renouvellement de son accréditation. Tirant les leçons de l’expérience des trois années précédentes, et compte tenu de la délivrance simultanée du titre d’ingénieur et du diplôme d’études supérieures de la marine marchande (DESMM), le futur cursus comportera cinq ans et demi de formation au lieu des cinq ans actuels. Cette double qualification offre une plus grande attractivité de la profession d’officier de marine marchande et facilite les réorientations professionnelles. Ainsi, le développement de nouvelles formations para-maritimes au niveau du master est à l’étude.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la définition d’une stratégie cohérence au sein de l’ENSM après des premières années relativement chaotiques. L’instauration d’une procédure rigoureuse dans la gestion des ressources humaines et dans la programmation des dépenses est à même de générer des économies substantielles en des temps contraints pour les finances publiques. Toutefois, il y a lieu de s’interroger sur les raisons pour lesquelles ces mesures de bon sens n’ont été adoptées que très récemment. Les échecs du passé ne donnent lieu à profit qu’à la condition d’en identifier les causes et d’en tirer les leçons.

Outre la filière académique de formation des officiers de la marine marchande (dite filière A), existe une voie professionnelle (dite filière B) qui apparaît comme un outil de promotion sociale. Le comité spécialisé de la formation professionnelle maritime (CSFPM) a décidé une simplification de la filière B, fondée sur la modularité des formations et dont la définition précise est en cours avec la participation active des partenaires sociaux.

Cette évolution vise à garantir la conformité des cursus au commerce et à la plaisance professionnelle avec les exigences des amendements apportés en 2010 à Manille à la convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (convention STCW), entrés en vigueur le 1er janvier 2012 et dont la mise en place doit être effectuée avant le 1er janvier 2017.

De même, pour le secteur de la pêche, les cursus doivent désormais prendre en compte des dispositions de la convention internationale sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille (convention STCW-F). Ces évolutions sont entrées en vigueur le 29 septembre 2012, une phase transitoire de 5 ans ayant là encore été prévue pour leur pleine application.

Les projets de cursus sont présentés devant le CSFPM depuis 2013. Les premiers textes ont été publiés – le cursus de niveau bac+3 des officiers chefs de quart machine est ainsi mis en place sur trois ans avec un nouveau référentiel pédagogique depuis la rentrée scolaire 2014. Cette évolution permet de favoriser les temps d’embarquement interscolaire et, plus important encore, de se conformer au schéma européen licence/master/doctorat (LMD).

Cette réforme de la filière B doit parvenir à son terme en début d’année 2015 pour une mise en place de l’ensemble des nouveaux cursus à la rentrée de septembre 2015.

La direction des affaires maritimes a mis en place en 2008 une procédure de délivrance des titres professionnels maritimes gérée par l’application informatique ITEM. Cet outil permet aux services déconcentrés chargés de la mer d’enregistrer et de délivrer tous les titres du commerce, de la pêche et de la plaisance professionnelle. En centralisant leur enregistrement dans une base nationale unique, consultable par les États du monde entier, et leur édition par l’Imprimerie nationale sur un papier sécurisé (30 000 documents par an), cette modernisation répond aux engagements internationaux de la France et aux exigences de lutte contre la fraude. Une mise à jour de l’application, apportée en août 2013, permet désormais la délivrance des baccalauréats professionnels.

Par ailleurs, dans le cadre de la directive 2009/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009, le processus relatif à la délivrance des brevets fait l’objet d’une certification depuis septembre 2012. Un audit externe de suivi s’est déroulé en juin 2014 ; il a souligné les progrès effectués et la forte implication des agents dans les processus concernés.

La mise en mouvement des territoires de la République est conditionnée par leur capacité d’insertion dans les flux commerciaux et logistiques de la mondialisation. Ce constat confère un rôle fondamental à chaque métropole : assurer à la fois des fonctions de mobilité des personnes et de gestion des échanges de marchandises, tant avec les territoires qui dépendent d’elle qu’avec les autres espaces métropolitains. La question des transports est donc fondamentale et, dans un monde où le commerce emprunte préférentiellement les voies maritimes, sa réponse réside dans un adossement des métropoles aux grands ports maritimes.

La fragmentation des processus industriels et la nécessité pour les entreprises de trouver leur place dans des chaînes de valeurs internationalisées mettent l’accent sur l’importance stratégique du transport par conteneurs. Les progrès de la construction navale, qui permettent à des porte-conteneurs de plus en plus gros (18 000 EVP – équivalents vingt pieds – maintenant), contribuent à écarter les coûts de transport des prévisions des entreprises : il revient moins cher de traverser l’Atlantique que de rallier Lyon depuis Paris. La conséquence directe de cette évolution est l’accroissement de la part des biens importés dans nos systèmes productifs et, à rebours, la perspective d’exportations facilitées.

La connexion des territoires français aux flux de la mondialisation est la clef de l’amélioration de la compétitivité nationale. C’est la raison pour laquelle chaque région doit s’assurer que la relation entre un port d’envergure internationale et son hinterland soit la plus fluide et la plus fiable possible. De nombreux progrès sont à accomplir car Rotterdam et Anvers sont de loin, aujourd’hui, les premiers ports français. La captation de l’activité économique détériore fortement les positions économiques et l’attractivité de la France.

Votre rapporteur pour avis a souhaité consacrer une part significative de ses travaux sur le projet de loi de finances pour 2015 à la question de l’hinterland en raison du tour pris, à l’été, par les discussions sur la réforme territoriale et sur la nouvelle carte des régions françaises. L’objectif général d’une modernisation de l’architecture institutionnelle ne soulève pas le débat, non plus que les regroupements voués à constituer des ensembles territoriaux plus vastes disposant d’une taille et d’une population critiques pour rivaliser dans la compétition internationale. Mais la stratégie suivie par le Gouvernement a rapidement semé le doute. Les interfaces entre le territoire et le monde, que sont les grands ports maritimes et les corridors logistiques, ne sont aucunement entrées en ligne de compte au moment de proposer une nouvelle carte. Est-il cohérent de réunir dans la même super-région les grands ports de Bordeaux et de La Rochelle, alors que la super-région voisine amalgamant Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées en serait dépourvue ? Dans le débat sur l’avenir de la Loire-Atlantique, personne ne s’est interrogé sur la correspondance entre région de rattachement et hinterland portuaire. D’une façon générale, la cartographie des flux n’a pas été un élément de discussion. On ne peut que le déplorer.

Relier chaque métropole au plus près de zones portuaires et aéroportuaires connectées au reste du monde, afin d’être le plus performant possible dans la nouvelle organisation modulaire du commerce international et de favoriser les échanges, reste un objectif des réseaux transeuropéens de transport (RTE-T). La carte ci-dessous, qui émane de la Commission européenne, montre toutefois combien la France ne doit pas se contenter de cette initiative : elle fait partie des pays les moins bien quadrillés sans qu’un climat polaire ne vienne l’expliquer, et nombre de ses territoires sont laissés à distance significative de ces canaux d’échanges continentaux. Il convient par conséquent de ne renoncer à aucun prix à un aménagement national du territoire, sous peine de voir de pleines régions reléguées hors de la mondialisation et du progrès économique.

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Votre rapporteur pour avis a poursuivi ses visites d’installations portuaires à l’occasion des projets annuels de loi de finances. Après Marseille-Fos en 2012 et Le Havre en 2013, il s’est rendu cet automne sur le site du grand port maritime de La Rochelle, qui présente la spécificité de structurer lui-même la desserte de son hinterland en menant une activité de logisticien à travers un opérateur ferroviaire de proximité. Cet exemple permettra d’évoquer, par la suite, les projets en cours et les outils de structuration des autres grands ports maritimes.

Le grand port maritime s’est substitué au port autonome par décret n° 2008-1036 du 9 octobre 2008. En 2014, comme tous les grands ports maritimes métropolitains, le port de La Rochelle amorce un nouveau cycle par des instances de gouvernance renouvelées (conseil de surveillance, conseil de développement) et par l’adoption d’un nouveau projet stratégique.

Situé sur la façade Atlantique, le port est directement accessible depuis l’océan. Ses atouts tiennent à sa situation géographique à équidistance des grands ports maritimes de Bordeaux et de Nantes/Saint-Nazaire et à sa proximité de la péninsule ibérique. Sixième grand port maritime français, devant Bordeaux, avec près de dix millions de tonnes de marchandises traitées, c’est également le premier port français pour l’importation de produits forestiers et le second port français – derrière Rouen – pour l’exportation des céréales. Ce dernier point n’est pas sans lien avec le fait que M. Xavier Beulin, président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), ait accepté de prendre la présidence du conseil de surveillance du grand port maritime.

En outre, le port a engagé de nombreuses actions visant à améliorer son acceptabilité environnementale et sociétale – actions Ville-Port, certification ISO 14001, évaluation ISO 26000. La proximité des quais avec la ville de La Rochelle et l’île de Ré induit des enjeux environnementaux forts qui contraignent le port à un dialogue permanent avec les associations locales de protection de l’environnement.

Le Port de La Rochelle bénéficie de dessertes routières de qualité avec une connexion à l’autoroute A10 (vers Paris) via le réseau national majoritairement à 2x2 voies (RN11 et RN248), et à l’autoroute A837 (vers Bordeaux). La liaison vers Nantes via l’autoroute A83 est plus délicate dans la mesure où elle suppose la traversée de villages. Le réseau routier assure la quasi-totalité de la desserte du port, avec une part modale non routière de 13 %, mais néanmoins en constante progression depuis 2008.

La section routière entre Saintes et Limoges constitue l’un des maillons de la liaison Centre Europe Atlantique (RCEA) intéressant particulièrement le port de La Rochelle par ses connexions avec le sillon rhodanien et le réseau autoroutier de l’Est de la France. Son aménagement à 2x2 voies se poursuit.

Concernant la desserte ferroviaire, la liaison avec le réseau ferré national s’effectue par une ligne unique à partir de la gare de La Rochelle ville, au sein d’une zone urbaine. Ce sujet constitue une préoccupation majeure pour le port ainsi que pour la communauté d’agglomération de La Rochelle. Un groupe de travail piloté par le préfet de région a conclu à la nécessaire amélioration de la desserte ferroviaire du Port. Un programme d’études devrait être prochainement engagé pour évaluer une possible augmentation de la capacité de la desserte, dans l’attente d’un contournement ferroviaire raccordé à la ligne La Rochelle – Poitiers. Ceci empêcherait une saturation de cette ligne à très court terme, compte tenu des importantes perspectives de développement de trafics du port et de l’utilisation d’une portion de l’infrastructure par des trains de voyageurs depuis 2008.

En tant que gestionnaire d’infrastructure du réseau ferré portuaire, le port de La Rochelle poursuit depuis 2008 – date du transfert des voies par Réseau ferré de France – un important programme de rénovation, de rationalisation et de mise en sécurité afin d’assurer une meilleure productivité et un embranchement ferroviaire de qualité à chacun de ses terminaux. Ces investissements visent à améliorer l’offre de service, et à permettre une collecte plus avancée dans l’hinterland du port et au-delà.

Le 8 octobre 2010, le grand port maritime s’est associé avec l’opérateur ferroviaire privé Eurocargorail pour constituer un opérateur ferroviaire portuaire, OFP La Rochelle. Dans le cadre des réflexions issues du conseil de coordination interportuaire de la façade atlantique, des synergies sont apparues par la suite avec le grand port maritime de Nantes/Saint-Nazaire qui partage avec La Rochelle la même stratégie de report modal, ainsi qu’une fraction d’hinterland. En conséquence, le port de La Rochelle a ouvert le capital de l’OFP à celui de Nantes-Saint-Nazaire, formant ensemble OFP Atlantique. Cet opérateur offre des services de traction ferroviaire complète pour les clients des deux ports sur l’ensemble du territoire français. Il réalise des trafics sur toutes distances (en pratique jusqu’au Rhône) pour tous produits : vracs liquides (produits pétroliers, engrais…), vracs solides (céréales, carbonate de calcium…), produits industriels (pâte à papier, bouteilles de verre…).

Le grand port maritime connaît une croissance remarquable de son activité qui impose des investissements afin de satisfaire la demande. On notera principalement les travaux effectués sur l’Anse Saint-Marc (enrochements et digues), l’aménagement de terre-pleins dans le secteur de la Repentie, la mise en sécurité ferroviaire ou encore la création d’un second poste à quai à l’Anse Saint-Marc 2.

Le montant de l’enveloppe financière retenue pour le CPER 2007-2013 et son avenant s’élève à 52,09 millions d’euros dont 10 millions d’euros à la charge de l’État, auxquels se sont ajoutés 8 millions d’euros versés dans le cadre du plan de relance portuaire.

Le nouveau plan stratégique 2014-2019 entend soutenir le développement du report modal ferroviaire qu’il espère porter à 20 %, soit un doublement du volume de marchandises acheminées par fer. Le port poursuit ses investissements, aussi bien sur le domaine public maritime qu’au sein de son hinterland. De façon particulièrement intéressante, il entend se positionner en qualité d’organisateur de trafic ferroviaire en lien avec ses clients, notamment en recherchant une meilleure productivité des capacités de circulation et une massification des flux. C’est donc un métier de logisticien qui serait assumé afin de satisfaire les demandes des entreprises desservies, ainsi que l’indique la feuille ci-dessous extraite d’une présentation du projet stratégique du port.

Le positionnement comme un acteur de la logistique par une meilleure maîtrise des flux vers et depuis l’hinterland répond également à un besoin de l’établissement, qui doit diversifier son portefeuille de trafics afin d’engager une dynamique de développement vers de nouvelles filières. Son activité actuelle est trop dépendante des céréales et des hydrocarbures, ce dernier secteur connaissant une attrition des flux, comme il a été exposé précédemment.

Dans l’objectif du port de recevoir douze millions de tonnes de marchandises d’ici 2019, OFP Atlantique a vocation à jouer un rôle important en complément du service classique procuré par l’opérateur historique. La société par actions simplifiée a convoyé 330 000 tonnes de marchandises en 2013, soit un tiers du trafic ferroviaire portuaire total, et plus de 400 000 tonnes en 2014. La croissance est donc appréciable, dopée par un taux de service moyen de 93 %. Le travail engagé sur le territoire pour identifier les filières ne bénéficiant pas de conditions optimales d’acheminement et leur proposer des solutions « clef en main » semble porter ses fruits : l’étude cartographique montre que La Rochelle étend son hinterland jusqu’à, paradoxalement, menacer celui du port de Rouen dans le transport céréalier. Il restera à améliorer les conditions de passage de mode à mode pour développer l’efficacité de la plateforme portuaire pour parfaire l’ambition logistique de l’établissement.

Votre rapporteur pour avis a été particulièrement séduit par la démarche proactive engagée par les instances dirigeantes du grand port maritime, dans une approche partagée des différentes parties prenantes. Il est certain que la baisse tendancielle des trafics traditionnels doit conduire les ports à aborder de nouveaux marchés, mais il apparaît d’autant plus pertinent de le faire en proposant aux entreprises du territoire une porte sur le commerce mondial dont elles étaient jusqu’à présent privées. Le modèle est à généraliser, et il est bon que le port de Nantes/Saint-Nazaire ait souhaité construire des synergies pour un développement harmonieux de l’activité.

Depuis plusieurs années, différentes réflexions ont conduit à considérer que les voies ferrées portuaires avaient vocation à être gérées par les établissements portuaires plutôt que par Réseau Ferré de France, gestionnaire du réseau ferré national. Le statut juridique et les modalités de gestion ont été définis par l’ordonnance n° 2005-898 du 2 août 2005 portant actualisation et modernisation des livres III et IV du code maritime. Elle a permis l’incorporation des voies ferrées portuaires au domaine des ports autonomes, puis des grands ports maritimes.

Aux termes de l’article R. 411-2 du code des ports maritimes, chaque autorité portuaire a défini, parmi les voies ferrées relevant de sa compétence, celles ayant le caractère de voies ferrées portuaires et, sous réserve qu’elles ne soient pas indispensables à la circulation publique, celles ayant le caractère d’installations terminales embranchées. Le code des ports maritimes précise également, dans son article R. 411-3, que l’autorité portuaire assure la gestion de la circulation sur les voies ferrées portuaires et, à ce titre, l’égal accès à ces voies. Des conventions de raccordement avec Réseau ferré de France définissent les obligations et responsabilités de chacune des parties sur leurs infrastructures respectives.

Environ mille kilomètres de voies ferrées sont aujourd’hui gérés par les grands ports maritimes, avec toutefois de fortes disparités dans leur répartition. Les ports du Havre, de Dunkerque et de Marseille sont gestionnaires d’environ la moitié de ce total.

Conformément au décret n° 2007-1867, chaque autorité portuaire a établi et publié, après consultation des entreprises ferroviaires utilisant le réseau des voies ferrées portuaires relevant de sa compétence et des usagers du transport du fret, un document de référence (DRR) exposant les caractéristiques du réseau et précisant les conditions permettant d’y accéder. Ce document précise notamment les principes de tarification et les tarifs des redevances d’utilisation ; il fixe les modalités de répartition des capacités et les procédures d’attribution de celles-ci.

Les autorités portuaires sont appelées à jouer un rôle majeur dans l’entretien et la gestion de ces voies, dont il convient de souligner certaines spécificités par rapport à la définition générique des opérateurs ferroviaires de proximité :

● leur zone d’implantation est cantonnée, par les limites géographiques du port et de ses voies ferrées internes, au sein des circonscriptions portuaires ;

● les voies internes des ports appartiennent aux autorités portuaires et non à Réseau ferré de France ;

● leur trafic socle est largement supérieur à ce qui est constaté sur une petite ligne ou un ensemble de petites lignes capillaires fret intérieures puisque le port est un point de passage massifié du fret ;

● les destinations et provenances des marchandises à partir et vers le port sont par conséquent plus nombreuses.

Les grands ports maritimes doivent aujourd’hui adapter leur desserte ferroviaire à leur plan de développement, et le traduire en besoins de sillons afin de fournir une offre commerciale et technique adaptée.

Certains ont engagé un vaste programme d’investissement. Ainsi le grand port maritime de Marseille a investi plus de 140 millions d’euros au cours de la période 2009-2013, dont 77 millions d’euros à la seule charge du port, pour dynamiser la desserte ferroviaire et atteindre les objectifs de report modal. Par ailleurs, le port souhaite augmenter l’offre de plateformes multimodales en réalisant un terminal d’autoroute ferroviaire sur les bassins Est de Marseille.

Cette politique volontariste de report modal vers le rail est également menée à Dunkerque. Dans le CPER 2007-2013, 60 millions d’euros ont été contractualisés pour des opérations d’amélioration de la desserte ferroviaire. Il s’agit notamment de l’électrification du faisceau de Loon-Plage pour ouvrir le port sur des trafics de conteneurs traités en trains entiers, et de la réalisation du barreau de Saint-Georges d’un coût de 26,3 millions d’euros dont 9,6 millions d’euros à la charge du Port.

Les dessertes ferroviaires font parfois l’objet de freins. Ainsi, bien que le port de Bordeaux soit accessible par le rail, seuls deux terminaux possèdent un réseau ferroviaire actif. Plusieurs goulets d’étranglement ont été identifiés : le bouchon ferroviaire sera résorbé à l’issue de plusieurs années de travaux jusqu’en 2015. Le port de Bordeaux poursuit sa collaboration avec les chargeurs céréaliers pour le développement des pré-acheminements ferroviaires. L’amélioration des accès et le renforcement des voies ferrées portuaires permettront d’améliorer la compétitivité des services déjà en place. Toutefois, la remise en cause récente de la pérennité de certaines voies ferrées capillaires, dédiées au fret, pourrait remettre en cause l’efficacité de ces actions.

Dès 2009, en signant avec RFF un protocole d’accord, les ports du Havre et de Rouen ont souhaité inscrire les systèmes ferroviaires dont ils sont propriétaires dans un cadre qui garantisse la performance et l’articulation avec le réseau national. En termes d’organisation et d’actions concrètes, les deux ports ont mis en place un bureau horaire commun qui couvre leurs réseaux ferrés et le triage havrais de Soquence.

Les ports, ayant déjà investi dans la réhabilitation de leurs infrastructures ferroviaires, s’engagent désormais dans la mise en œuvre de la stratégie nationale portuaire, dont l’un des axes majeurs consiste en l’amélioration de l’offre logistique intégrée. L’objectif de l’État est de rendre les modes massifiées plus compétitifs, et plus spécifiquement le mode ferroviaire par rapport au mode routier, ce qui faciliterait aussi la desserte des territoires et des entreprises qui s’y trouvent.

La concentration de l’activité de transport maritime, observable depuis plusieurs dizaines d’années, s’organise autour de quelques acteurs mondiaux dominants dont le pouvoir de négociation vis-à-vis des ports va croissant. Il en résulte une concurrence forte entre ports européens. La compétition se joue notamment sur une comparaison des coûts portuaires, la fiabilité de la prestation logistique globale constituant un autre paramètre déterminant. Cette concurrence pousse à l’adaptation des infrastructures portuaires vers une massification des flux et, par conséquent, à la création de grands hubs mondiaux.

Dans ce contexte, pour les ports de l’axe Seine – les Grands ports maritimes du Havre et de Rouen ainsi que le port autonome fluvial de Paris – il devenait urgent d’établir une stratégie pour conforter leur positionnement sur l’hinterland séquanien. En tant qu’axe permettant de fluidifier le transport de marchandises via le port du Havre jusqu’aux principaux centres de consommation, à la condition expresse de dessertes et d’un réseau logistique performants, la vallée de la Seine entre Paris et Le Havre est donc devenue, à l’évidence, un territoire stratégique pour permettre à la capitale d’accroître son rayonnement économique et aux ports français de concurrencer les ports du nord de l’Europe. C’est pourquoi les ports de l’axe Seine ont créé, le 19 janvier 2012, le groupement d’intérêt économique (GIE) Haropa, avec une forte prégnance de la question de leurs dessertes.

Les trois ports de l’axe Seine combinent de nombreux atouts :

● Le grand port maritime du Havre est le premier port français pour les conteneurs. Il possède des qualités nautiques de premier plan, le seul port en eau profonde d’Europe avec Rotterdam. Sa localisation est stratégique puisqu’il est le premier port touché sur la route de l’Asie ;

● Le grand port maritime de Rouen est le premier port européen pour le commerce des céréales et possède des liens commerciaux historiques avec les marchés africains et les départements, régions et collectivités d’outre-mer ;

● Le port autonome de Paris est le premier port intérieur français et la Seine permet une navigation toute l’année. La desserte fluviale est étendue avec une voie d’eau très utilisée par l’activité du BTP et la filière céréalière.

La création d’Haropa a marqué le début d’une nouvelle collaboration interportuaire entre les trois ports de l’axe Seine, qui cherche à trouver son équivalent pour les établissements de la façade Atlantique. Toutefois, ce GIE ne rend pas moins importante la stratégie de développement de chacun des trois ports. Du point de vue institutionnel, il ne se substitue pas aux ports et ne les dessaisit d’aucune de leurs prérogatives. Le conseil d’administration est composé des directeurs généraux des trois ports, sa présidence étant assurée à tour de rôle par l’un d’entre eux.

Outre la mise en œuvre d’une stratégie commune, l’un des principaux sujets et enjeux communs pour les ports de l’axe Seine est celui de leurs dessertes ferroviaires, fluviales, mais aussi routières lorsque ce dernier mode est pertinent du point de vue économique et de l’amélioration de leur offre.

C’est un sujet désormais récurrent : une concertation avec l’ensemble des professionnels concernés est engagée par le grand port maritime du Havre depuis 2012. Des études sont en cours pour définir la solution la plus appropriée. L’option retenue tiendra compte des effets de la mise en service du chantier multimodal du Havre prévue au deuxième semestre 2014.

L’itinéraire alternatif reliant Serqueux et Gisors doit être aménagé et électrifié. À plus long terme, la question de la destination des sillons libérés pour le fret dans le cadre de la réalisation de la ligne nouvelle Paris-Normandie sera également posée.

La remise en état et la modernisation de la section Serqueux-Gisors sont inscrites parmi les premières priorités de la Commission Mobilité 21. Le scénario retenu par le Gouvernement est destiné à offrir une desserte améliorée entre le port du Havre et l’Île-de-France, en ouvrant un accès par le nord de la région francilienne, contournant l’agglomération rouennaise et évitant les « points durs » du réseau ouest francilien. Ce projet deviendra indispensable en tant qu’itinéraire alternatif au moment où les travaux prévus sur l’axe ferroviaire entre Mantes et Rouen perturberont les circulations des trains de conteneurs.

Une première phase de travaux s’est déjà déroulée sur la période 2013-2014. Les études de modernisation de la ligne sont en cours avec l’objectif d’une enquête d’utilité publique au début de l’année 2015.

Le projet « Port Seine Métropole Ouest », porté par le Port autonome de Paris, est l’un des deux volets d’une ambition visant à constituer, à la confluence de la Seine et de l’Oise, une plate-forme multimodale d’ambition nationale. Celle-ci permettra de répondre aux besoins propres du territoire, mais aussi aux chantiers du Grand Paris pour l’évacuation des déblais par voie fluviale, et plus généralement de participer à l’organisation d’une chaîne logistique performante le long de la Vallée de la Seine. Elle répond aux objectifs de report modal au bénéfice des modes de transports massifiés pour une meilleure compétitivité de l’axe Seine.

Le projet fait l’objet d’un débat public commencé le 15 septembre 2014 et organisé par la Commission nationale du débat public. Il porte sur une surface de 120 hectares majoritairement utilisatrice de la voie fluviale. L’extraction du plus important gisement de granulats alluvionnaires à proximité de Paris et la création d’un pôle de BTP pérenne procurera une solution idéale aux besoins en matériaux du projet du Grand Paris. La date de début des travaux est estimée à 2018 pour une mise à disposition des premiers équipements portuaires à partir de 2020.

Port Seine-Métropole Ouest, port fluvial trimodal, a ainsi pour objectifs de créer de la valeur et de l’emploi (500 à 1 000 emplois de 2020 à 2040), de participer à l’élan économique du Grand Paris en apportant des solutions pour sa construction, et de développer le transport fluvial au bénéfice de l’ensemble de la région – ce qui représenterait une économie quotidienne de 450 camions sur le réseau local en 2025.

Le projet est également un projet d’aménagement qualitatif défini en cohérence avec les projets alentours, aspect auquel les maires sont très attentifs. La création d’une darse (bassin intérieur), de préférence à l’installation de manutentions portuaires directement au bord du fleuve, permet par exemple de préserver la berge de Seine et d’en renforcer son caractère naturel tout en y insérant une promenade ouverte au public.

L’axe Seine, d’une longueur de 547 kilomètres, se décompose en onze sections de navigation, réparties entre Seine amont et Seine aval – Paris jouant le rôle de point de référence. En 2013, ce sont 22,2 millions de tonnes de fret qui ont été transportées par voie fluviale sur l’ensemble du Bassin Seine-Oise, ce qui correspond à 4,2 milliards de tonnes-kilomètres. Ces volumes rendent compte d’un léger repli de 0,4 % en tonnes et de 0,7 % en tonnes-kilomètres par rapport à l’année précédente en raison d’une baisse d’activité de la filière du BTP, qui représente plus de la moitié des trafics, et de la filière des conteneurs, qui pour la première fois depuis 1998 a marqué une pause dans sa progression compte tenu de la baisse des trafics dans les ports maritimes.

Les installations de transbordement ont bénéficié d’aides publiques, de type « embranchements fluviaux » sur l’Axe Seine et l’Yonne. À ce jour, l’établissement public Voies navigables de France a octroyé 21 aides sur le périmètre de la Seine amont et 13 aides sur celui de la Seine aval, pour un investissement global de 30,8 millions d’euros. L’aide moyenne par dossier atteint 158 000 euros avec un maximum de 497 000 euros et un minimum de 12 900 euros. Ces installations de transbordement engendrent un trafic supplémentaire annuel de 5 millions de tonnes.

En Île de France, le CPER 2007-2013 portait sur trois éléments majeurs. La mise en service du barrage de Chatou est effective depuis l’été 2013 ; elle sera suivie par la démolition de l’ancien à l’automne 2014. Les études de restauration des barrages de Suresnes, Méricourt et Bougival ont été lancées fin 2012, avec la perspective d’un début des travaux en 2015. Quant à la digue de Croissy-sur-Seine, après les travaux d’urgence de renforcement réalisés en 2007 et 2008, une seconde phase de travaux de confortement est programmée à l’horizon 2015/2016.

En Haute-Normandie, le CPER couvrait la construction de la passe à poissons de Notre-Dame de la Garenne, la rénovation des écluses d’Amfreville ainsi que la restauration des bajoyers de l’écluse 4 de Notre-Dame de la Garenne. L’ensemble de ces opérations a été réalisé. Il prévoyait par ailleurs la rénovation des barrages de Poses et Port-Mort, projet pour lequel des compléments de financement sont recherchés dans la programmation 2015-2020 pour un montant de 18,9 millions d’euros.

À la suite du débat public sur la mise au grand gabarit de Bray-Nogent qui s’est tenu du 2 novembre 2011 au 17 février 2012, le conseil d’administration de VNF a décidé en juin 2012 de poursuivre les études du projet d’accès des bateaux de classe Va (2 500 tonnes) jusqu’à Nogent-sur-Seine. Le projet, évalué par la commission Mobilité 21, vise à aménager un tronçon de 27 kilomètres à partir de l’écluse de la Grande Bosse, à l’aval immédiat de Bray-sur-Seine. Cet aménagement permettrait de relier, sans rupture de charge, Nogent-sur-Seine au bassin parisien et au-delà, aux ports du Havre et de Rouen. Il est inscrit en première priorité : son engagement doit intervenir avant 2030. Une déclaration d’utilité peut être envisagée à l’horizon 2018. Pour la période 2015-2020, la poursuite de ces investissements est prévue dans les mandats adressés aux préfets de région concernant les CPER Ile-de-France et Haute-Normandie ainsi qu’au travers du CPIER Vallée de la Seine.

Divers autres projets de modernisation et de reconstruction, moins structurants mais nécessaires, ont également été réalisés : barrages du Coudray et de Vives-Eaux, fiabilisation des écluses de la Haute Seine, modernisation des écluses de la Petite Seine.

La compétitivité des ports s’apprécie au regard de quatre critères : l’offre maritime caractérisée par le nombre et la qualité des lignes maritimes ; les performances du port au regard, en particulier, de ses équipements, de l’efficacité des entreprises de manutention et de la situation sociale ; l’offre logistique ; la qualité et le coût des dessertes terrestres. C’est sur ce dernier point que votre rapporteur pour avis a souhaité concentrer son attention, étant entendu que les autorités politiques ont, au cours des dernières années, multiplié les évolutions législatives et règlementaires pour permettre aux grands ports maritimes de construire leur stratégie avec la plus grande pertinence.

On sait que l’ordonnance n° 2005-898 du 2 août 2005 a confié aux grands ports maritimes la gestion et la propriété des voies ferrées portuaires. Ils ont ensuite désigné, après mise en concurrence, leurs propres gestionnaires d’infrastructure délégués. La loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008, portant réforme portuaire, a intégré l’amélioration de la qualité des dessertes parmi les facteurs clés du plan de relance des ports français, confiant aux ports la promotion de l’offre de dessertes ferroviaires et fluviales en coopération avec les opérateurs concernés. Les GPM ont été chargés de la valorisation des dessertes ferroviaires portuaires favorisant le développement de modes de transport massifié de marchandises et par conséquent le report modal vers des modes alternatifs à la route. La loi de 2008 conforte ainsi le rôle d’aménageur des autorités portuaires.

Dans ce contexte, au-delà de sa participation dans les contrats de projet État-Région, l’État a augmenté sa contribution aux investissements portuaires. Pendant cette même période, les grands ports maritimes ont eu pour objectif de capter des parts supplémentaires de trafic de leur hinterland naturel tout en contribuant au rééquilibrage des parts modales. La stratégie nationale portuaire, annoncée le 24 mai 2013, entend placer les ports au cœur de la chaîne logistique d’approvisionnement des territoires et faire des dessertes ferroviaires et fluviales des ports un point essentiel pour le développement des modes massifiés. Votre rapporteur pour avis soutient cette démarche avec enthousiasme en souhaitant qu’elle ne demeure pas de vains mots. 

La direction générale des infrastructures des transports et de la mer a communiqué à votre rapporteur pour avis les données de suivi de la part de marché des modes non routiers pour les acheminements à destination et en provenance des grands ports maritimes. L’analyse prend en compte les modes ferroviaires et fluviaux à l’exclusion des marchandises acheminées par tubes – oléoducs et gazoducs. En effet, ce dernier type de transport n’est pas susceptible de faire l’objet d’un report modal.

Les cinq trafics suivants, dont le calcul repose sur une méthodologie commune à l’ensemble des ports, permettent de suivre les parts de marché des modes non routiers à destination et en provenance des ports : les acheminements de vracs solides, les acheminements de vracs liquides, les acheminements de marchandises diverses hors rouliers et conteneurs, les acheminements de conteneurs, et enfin les acheminements cumulés des quatre trafics précédents.

Entre 2007 et 2012, les parts de marché du fret non routier sont restées relativement stables, voire ont connu une légère décroissance. La progression régulière des acheminements fluviaux est, en effet, annulée par la crise durable dans laquelle s’enfonce le fret ferroviaire, dont l’activité a reculé d’un tiers en l’espace de cinq ans.

ÉVOLUTION 2007-2012 DES PARTS DE MARCHÉ SELON LES MODES HORS OLÉODUCS/GAZODUCS (TRAFICS EN MILLIONS DE TONNES) POUR L’ENSEMBLE DES GPM.

(en millions de tonnes)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Trafic total

304

307

271

272

276

264

Trafics susceptibles de pré ou de post acheminement

89

92

84

92

94

89

Routier

65

68

61

68

69

67

Fer

15

15

12

13

14

10

Fluvial

9

9

11

11

11

12

Total fret non routier

24

24

23

24

25

22

Source : DGITM

RÉPARTITION EN POURCENTAGE DES TRAFICS SUSCEPTIBLES DE PRÉ OU DE POST ACHEMINEMENT HORS OLÉODUCS ET GAZODUCS POUR L’ENSEMBLE DES GPM.

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Trafics susceptibles de pré ou de post acheminement

29 %

29,7 %

30,8 %

33,8 %

34 %

33,6 %

Routier

73,2 %

73,4 %

72,6 %

74,3 %

74 %

75,5 %

Fer

16,6 %

16,6 %

14,5 %

14,1 %

14 %

11,5 %

Fluvial

10,2 %

10 %

12,9 %

11,6 %

12 %

13 %

Total fret non routier

26,8 %

26,6 %

27,4 %

25,7 %

26 %

24,5 %

Source : DGITM

En 2012, le trafic de l’ensemble des grands ports maritimes a diminué de 12 millions de tonnes (- 4,5 %) par rapport à 2011, passant de 276 à 264 millions de tonnes, soit le plus bas niveau depuis 2007. Les effets de la crise économique et de la baisse structurelle des trafics d’hydrocarbures sont encore très perceptibles. Un tiers des marchandises traitées ont fait l’objet d’un pré ou post acheminement. Ce chiffre est stable depuis 2010.

Le mode fluvial enregistre une légère progression de sa part de marché parmi les modes de pré et post acheminement. En effet, cette part passe de 10,2 % en 2007 à 13 % en 2012 et se traduit par une progression en tonnage. Pour la première fois en 2012, les pré et post acheminements par voie fluviale dépassent les flux ferroviaires. A contrario, la part de marché du mode ferroviaire continue à se dégrader. Sur la même période, la part de marché du mode routier progresse d’un point depuis 2007 pour atteindre 75,5 % en 2012.

La part modale des trafics non-routiers de pré ou post acheminements baisse entre 2007 et 2012 pour passer de 26,8 % à 24,5 %. La situation est toutefois variable selon les ports en fonction des marchandises acheminées, de la qualité des dessertes à disposition et de la stratégie de développement poursuivie.

La part modale non routière approche 50 % pour le grand port maritime de Dunkerque : ce dernier traite beaucoup de vracs solides à usage industriel (charbon, minerai de fer) nécessitant l’emploi de moyens de transport massifiés. Les volumes de ces vracs avaient beaucoup diminué entre 2007 et 2012 du fait des difficultés économiques, ce qui expliquait la diminution de la part modale des trafics non routiers (- 19 points). En 2013, la part des modes alternatifs a toutefois recommencé à augmenter. Le Havre et Rouen connaissent une situation comparable à une échelle cependant moindre.

La part modale des pré et post acheminements non routiers est faible à Bordeaux (inférieur à 10 % en 2007) car l’activité repose sur des trafics à rayonnement régional pour lesquels l’emploi de moyens massifiés est moins pertinent.

Marseille/Fos enregistre une progression de la part modale non routière dans les pré et post acheminements entre 2007 et 2012 avec une hausse de près de 4 points. Pour ce GPM, les modes ferroviaire et fluvial progressent ensemble avec une hausse marquée pour la voie d’eau.

Le mode de calcul de la part ferroviaire au port de Nantes/Saint-Nazaire a évolué entre 2010 et 2011 et ne prend plus en compte les marchandises destinées à être transformées localement. Ce changement ne remet pas en cause les conclusions générales pour l’ensemble des GPM : entre 2007 et 2010, la tendance était plutôt à la hausse de la part modale du fer, qui a cependant diminué entre 2011 et 2013.

Sur la période 2007-2012, la part de marché des pré et post acheminements portuaires par les voies ferroviaires et fluviales a connu une constante diminution passant de 26,8 % à 24,5 % (l’année 2012 représentant le niveau le plus faible). Le mode fluvial continue sa progression (+ 3 points depuis 2007) à la différence du mode ferroviaire (- 5 points). Les évolutions sont très différentes selon le type de marchandises.

S’agissant des vracs liquides, les transports non routiers enregistrent une baisse entre 2007 et 2012, de 26 % à 18,6 %, consécutivement à la chute des trafics – notamment les produits pétroliers. Par ailleurs, ces vracs empruntent surtout des canalisations.

Pour les vracs solides, la part de marché des modes fluviaux et ferroviaires a enregistré une progression, passant de 36,8 % à 40,5 %, soit un taux d’usage supérieur de 10 points comparé au trafic global. Néanmoins, ce taux tend à se stabiliser, voire à diminuer en 2012. Les vracs solides (céréales, minerais énergétiques ou sidérurgiques) sont adaptés aux modes de transports massifiés.

ÉVOLUTION DES PARTS MODALES DES MODES FER ET FLUVIAL ENTRE 2007 ET 2012 POUR L’ENSEMBLE DES GPM

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Trafics totaux

Fer

16,6 %

16,5 %

14,5 %

14,1 %

13,9 %

11,5 %

Fluvial

10,2 %

10 %

12,1 %

11,6 %

12,1 %

13 %

Total

26,8 %

26,5 %

26,6 %

25,7 %

26 %

24,5 %

Vracs liquides

Fer

18,8 %

14,5 %

14 %

13,2 %

11,4 %

9,3 %

Fluvial

7,2 %

6,5 %

7,7 %

7,6 %

8,8 %

9,3 %

Total

26 %

21 %

21,7 %

20,8 %

20,2 %

18,6 %

Vracs solides

Fer

22,1 %

23 %

19,5 %

20,1 %

22,8 %

19 %

Fluvial

14,7 %

15,2 %

20,9 %

18,3 %

18,6 %

21,5 %

Total

36,8 %

38,2 %

40,4 %

38,4 %

41,4 %

40,5 %

Conteneurs

Fer

7 %

9,6 %

8,5 %

7,6 %

6,7 %

6,3 %

Fluvial

8,4 %

7,1 %

8,9 %

8,3 %

9,1 %

9,5 %

Total

15,4 %

16,7 %

17,4 %

15,9 %

15,8 %

15,8 %

Marchandises diverses hors conteneur

Fer

20,6 %

13,8 %

12,7 %

7,9 %

7,3 %

6,8 %

Source :

Fluvial

3,7 %

3,8 %

2,3 %

2,6 %

3 %

3 %

Total

24,3 %

17,6 %

15 %

10,5 %

10,3 %

9,8 %

Source : DGITM

Enfin, en ce qui concerne les marchandises diverses, la part des pré et post acheminements par mode non routiers chute lourdement sur la période 2007-2012, passant de 24,3 % à moins de 10 % avec une accélération de la baisse à partir de 2009. Cette baisse est liée à la diminution des trafics globaux de marchandises diverses. Le mode ferroviaire y dépasse encore le mode fluvial.

Entre 2008 et 2010, la part modale des modes non routiers des pré et post acheminements des conteneurs est comprise entre 19 % et 58 % dans les ports de la rangée nord-européenne, et entre 2 % et 30 % dans les ports de la Méditerranée. Les parts de marché des modes non routiers sont plus importantes au nord du continent en raison de la qualité supérieure des infrastructures, du réseau hydrographique et des reliefs différents.

La part modale fluviale est importante dans les ports de Rotterdam (30 %) et Anvers (32 %), situés respectivement aux embouchures du Rhin, principal axe de navigation en Europe, et de l’Escaut. La part modale ferroviaire est prédominante dans les ports d’Hambourg (30 %), Brème (53 %) et Zeebrugge (45 %). La part modale de la route reste ultra-majoritaire dans les ports espagnols de Valence (93 %), Barcelone (98 %) et Algésiras (98 %).

PARTS DE MARCHÉ DES PRÉ ET POST ACHEMINEMENTS DES CONTENEURS SELON LES MODES HORS OLÉODUCS/GAZODUCS DES PRINCIPAUX PORTS EUROPÉENS EN 2008

(en millions de tonnes)

Routier

Fer

Fluvial

Nord de l’Europe

Anvers

60

8

32

Rotterdam

59

11

30

Brème

42

53

5

Zeebrugge

55

45

1

Hambourg

67

30

3

Le Havre

81

9

10

Méditerranée

La Spezia

70

30

0

Gênes

80

20

0

Marseille

78

16

6

Valence

93

7

0

Barcelone

98

2

0

Algesiras

98

2

0

Sources : Wolters, 2010, European port-hinterland networks : strategies, modal split and players. European Intermodal association

Le grand port maritime du Havre affiche une part de marché des modes non routiers inférieure à celles des autres principaux ports de la rangée Nord européenne. Le port de Marseille, dont les parts de marchés des modes non routiers sont équivalents à celles du port du Havre, se situe dans la moyenne haute des ports méditerranéens, mais il est aussi le seul à disposer d’un débouché fluvial avec le Rhône. Cet atout logistique devrait être davantage mis en valeur.

Votre rapporteur pour avis a compilé des données sur les sept grands ports maritimes français, qu’il juge utile de communiquer à l’ensemble des parlementaires. Dans la mesure où le grand port maritime de La Rochelle a fait l’objet d’un développement spécifique préalable en raison de sa stratégie logistique originale, il n’en sera pas fait mention ici.

Le mode ferroviaire reste le mode privilégié pour la desserte du grand port maritime de Dunkerque. Le port est desservi par voie ferrée (essentiellement tournée vers Lille et l’artère nord-est) et un canal à grand gabarit (3 000 tonnes) avec deux restrictions en tirant d’air au niveau de Blaringhem. Il est enfin connecté aux autoroutes A16 et A25.

En 2013, la part modale des transports massifiés est en hausse et atteint 48 %, contre 43 % l’année précédente.

Le transport ferroviaire représente à lui seul 33 % des acheminements terrestres ; il a notamment bénéficié de la récupération de trafics de pondéreux à destination du nord-est de la France. Les trafics ferroviaires générés par la zone industrialo-portuaire (9,9 millions de tonnes en 2013), qui empruntent les voies du port, contribuent à faire de Dunkerque le premier pôle de fret ferroviaire français. Une part importante de ces trafics emprunte l’artère ferroviaire Nord-Est.

La part modale de la voie d’eau s’affiche également en hausse de 15 % (+ 1 point par rapport à 2012), en particulier grâce à la très bonne tenue des flux céréaliers destinés à la grande exportation. S’y rajoutent 1,3 million de tonnes de trafic fluvial généré par la zone industrialo-portuaire et transitant également par les quais du port. Au total, Dunkerque est le premier port fluvial de la région Nord Pas-de-Calais.

La part modale des transports routiers est donc en recul de 52 % contre 57 % en 2012.

Les transports massifiés sont au cœur de la stratégie d’élargissement de l’hinterland du port, qui se traduit par des programmes d’investissements en matière ferroviaire, fluviale et routière. Le port a notamment créé en octobre 2013 la société Nord Ports Shuttle, en partenariat avec la chambre de commerce et d’industrie du Grand Lille, la compagnie fluviale de transport et le terminal des Flandres. Cette société opère une navette fluviale interportuaire de transport de conteneurs entre le Terminal des Flandres de Dunkerque et les ports intérieurs de Lille (LCT) et de Dourges (LDCT). Le service mis en place offre deux rotations par semaine avec une barge de capacité 75 conteneurs EVP.

Par ailleurs, en 2013, la Commission européenne a inscrit le port de Dunkerque comme nœud du réseau central des réseaux transeuropéens de transport connecté au corridor multimodal Mer du Nord-Méditerranée. L’inscription du port sur ce corridor doit permettre l’ouverture de l’hinterland de Dunkerque vers l’Europe du Nord-Ouest et devrait faciliter l’obtention du concours financier de l’Union européenne dans le cadre des projets d’infrastructure du port. En 2015, Dunkerque rejoindra le corridor de fret ferroviaire n° 2, offrant ainsi aux opérateurs l’accès à des sillons internationaux vers le Benelux, l’Allemagne et la Suisse.

En 2013, sur les 68 millions de tonnes de trafic du port du Havre, 58 ont fait l’objet d’un pré ou post acheminement terrestre. La majorité de ces acheminements (34,3 millions de tonnes soit 58,3 %) se fait par pipelines. Hors transbordement et pipelines, la répartition modale du trafic de marchandises fait apparaître une part prépondérante du mode routier.

Pour les conteneurs (en EVP), le volume 2013 a été acheminé par voie de transbordement (0,64 MEVP), par rail (0,08 MEVP), par fleuve (0,18 MEVP) et par route (1,57 MEVP). Hors transbordement, les parts modales en EVP sur les acheminements terrestres sont de 4,5 % pour le fer, 9,9 % pour le fleuve et 85,6 % pour la route. Exprimées en tonnage, ces parts modales sont respectivement de 5,2 %, 10,8 % et 84 %.

Le port du Havre n’est pas relié par voie fluviale à l’ensemble de son hinterland, ce qui explique une part modale fluviale modeste. En revanche, le grand bassin économique de l’Île-de-France est bien irrigué par le réseau séquanien, région avec laquelle le trafic fluvial sur le port du Havre s’élève à 102 000 EVP soit 56 % du trafic fluvial conteneurisé. La part modale du fluvial sur cette région au départ ou à destination du Havre est supérieure à 25 %.

La mise en service en 2010 du raccordement direct de La Brèque, pour 90 millions d’euros, permet désormais de connecter directement le réseau ferré portuaire havrais au réseau ferré national, en évitant le triage historique de Soquence. Le développement du fret ferroviaire de et vers le port du Havre reste handicapé par la capacité disponible et la fiabilité de sa desserte longue distance (ligne Le Havre-Rouen-Paris et franchissement de la région parisienne), qui font l’objet de projets et démarches d’amélioration.

Le conseil de surveillance a approuvé, lors de sa séance du 4 juin 2010, la réalisation d’un chantier multimodal dont la vocation est d’offrir à tous les opérateurs longue distance, fluviaux comme ferroviaires, un accès performant à l’ensemble des terminaux dont ceux de Port 2000. À l’issue de l’enquête publique et de l’avis favorable rendu par le commissaire enquêteur, le conseil de surveillance a autorisé le lancement des travaux. Ils avancent conformément à la programmation, avec une mise en service prévue en fin d’année 2014.

Les investissements les plus significatifs ont été réalisés dans le cadre du GIE Haropa ; ils ont déjà été évoqués par votre rapporteur pour avis. Il n’est donc pas nécessaire d’y revenir.

En 2013, les parts modales sont de 5,9 % pour le fer, 21 % pour le fluvial (contre 16,8 % en 2012) et 73,2 % pour la route (contre 61,5 % en 2012). Le port bénéficie, pour sa desserte routière, d’infrastructures performantes grâce aux autoroutes A13, A28 et A29. D’autres axes contribuent à compléter la qualité de ces dessertes routières telles que les RN154, RN31 et RD6014 notamment pour le transport des produits agroalimentaires et phytosanitaires (céréales, engrais, etc.). Cependant, il reste encore à concrétiser certains projets pour permettre l’amélioration des conditions de circulation, tout particulièrement dans l’agglomération rouennaise.

Afin d’assurer la pérennité de l’accessibilité du réseau ferré portuaire, des études relatives à la viabilité de la tranchée couverte le long des quais urbains de Rouen et à la faisabilité économique et technique d’un nouvel accès au sud vont être conduites. Dans le but d’élargir l’hinterland pour la desserte des céréales et des autres filières, le port va réaliser, avec le projet REAL GRAIN, un diagnostic de performance des itinéraires existants et promouvoir des plateformes de massification.

En matière fluviale, les investissements les plus significatifs ont été réalisés dans le cadre du GIE Haropa ; ils ont déjà été évoqués par votre rapporteur pour avis.

En 2013, la répartition modale du trafic de marchandises dans le port de Nantes/Saint-Nazaire fait apparaître une part dominante du mode routier (42,4 % contre 39,7 % en 2012). La part ferroviaire diminue et ne représente plus que 1,9 %, principalement en raison de l’arrêt du trafic de la raffinerie de Donges. La part du mode fluvial atteint 6,1 % contre 6,8 % en 2012.

Les pré et post-acheminements terrestres des trafics portuaires sont assurés, par ordre décroissant, par transport routier, par conduite (oléoduc, gazoduc), par transport fluvial et enfin par transport ferroviaire. Le transport par oléoduc ou par gazoduc est réservé à la raffinerie Total de Donges et au terminal méthanier Elengy de Montoir.

Les terminaux du port de Nantes-St Nazaire bénéficient de raccordements au réseau routier relativement bien adaptés au trafic actuel, vers les grands axes de circulation. Néanmoins, le raccordement de ces axes vers le sud, le sud-est de la France et le reste de l’Europe, pâtit de la structure radiale des maillages centrés sur Paris. Le réseau routier de proximité comporte deux difficultés : l’encombrement du périphérique nantais et le problème de limitation de tonnage des poids lourds à 40 tonnes empruntant le pont de Saint-Nazaire. Cette restriction oblige à procéder à un long détour par Nantes pour franchir l’estuaire de la Loire pour les poids lourds de 44 tonnes.

Le transport fluvial est limité à l’estuaire de la Loire, soit une section d’une cinquantaine de kilomètres à grand gabarit. Il est utilisé pour approvisionner la centrale thermique EDF de Cordemais et pour acheminer les tronçons d’Airbus de l’A320 et A380 de Nantes (usine de Bouguenais) à Saint-Nazaire (usine de Gron).

Le port est directement connecté au réseau ferré national au travers de son propre réseau local (Réseau Ferré Portuaire). Celui-ci dessert l’ensemble de ses terminaux portuaires ainsi que les clients qui y sont embranchés. L’établissement bénéficie d’un double accès ferroviaire, l’un par le nord (ligne Le Mans/Rennes/Savenay), l’autre par Nantes et Angers. Il est également concerné par la transversale ferroviaire Nantes/Lyon en cours de réalisation.

Le grand port maritime est entré au capital de l’opérateur ferroviaire portuaire Atlantique en partenariat avec La Rochelle et Eurocargorail. Cette participation doit concourir à la diversification des opérateurs et de l’offre de transport.

Les installations portuaires réparties le long de l’estuaire de la Gironde sont, pour la plupart, desservies par la voie ferrée et la route. Toutefois, les trafics portuaires sont majoritairement acheminés par voie routière, les pré et post-acheminements ferroviaires ne représentant qu’environ 5 % des tonnages portuaires directs. Le port de Bordeaux est relié au réseau autoroutier par les autoroutes, A10 et A63 sur l’axe Nord-Sud et par les autoroutes A62, A65 et A89 sur l’axe Est-Ouest en direction de Toulouse, Pau et Clermont-Ferrand. Les principales difficultés rencontrées sont liées à la circulation, tant routière que ferroviaire autour de l’agglomération bordelaise.

La suppression du bouchon ferroviaire de Bordeaux consiste, essentiellement, en une mise à quatre voies entre la gare de Bordeaux Saint-Jean et la bifurcation de Cenon. La seconde phase et dernière phase du projet s’achèvera en 2015.

En 2013, à l’instar des autres grands ports maritimes, la répartition modale des trafics portuaires du port de Marseille laisse apparaître une part prépondérante du mode routier. Toutefois, la part des modes massifiés sur ces trafics a crû légèrement (stabilité pour le fluvial et augmentation du ferroviaire) et le nombre de conteneurs ainsi transportés a augmenté de 10 % entre 2012 et 2013 (respectivement +17 % pour le ferroviaire et +3,5 % pour le fluvial). Ainsi les parts modales pour le transport terrestre de conteneurs sont-ils en 2013 de 8 % pour le fer, 8 % pour le fleuve et 84 % pour la route.

Le port de Marseille est relié au réseau autoroutier avec l’ouverture de l’A54 entre Arles et Salon qui a finalisé la liaison Italie/Espagne. Le raccordement de ses bassins ouest (à Fos) présente toutefois un handicap, avec des sections urbaines ou périurbaines.

La quasi-totalité des terminaux est desservie par le rail. Pour le trafic de conteneurs, des services ferroviaires rallient régulièrement Lyon, Bordeaux, Rennes, Le Havre, Anvers, Ludwigshafen, Paris. La desserte ferroviaire des nouveaux terminaux à conteneurs de Fos 2XL est essentielle dans une perspective d’accroissement de la part modale ferroviaire. À cet égard, et au-delà des points spécifiques de congestion, le traitement de la saturation du nœud ferroviaire lyonnais et la modernisation du sillon alpin constituent deux enjeux déterminants pour la desserte ferroviaire du port. Le contrat de projets État-Région a prévu une enveloppe de 26 millions d’euros pour l’ouverture d’une section ferroviaire entre le port de Marseille et Avignon aux navettes d’autoroute ferroviaire et aux conteneurs « high cube » transportés par les trains de transport combiné. En parallèle, le port a pour objectif de développer ses dessertes terrestres massifiées ; il a lancé en 2011, un appel à projets pour la réalisation et l’exploitation d’un terminal de transport combiné à Mourepiane. Le projet représente un investissement global de 60,5 millions d’euros. Le trafic, à l’ouverture du terminal, avoisinerait 80 000 unités de transport intermodal (UTI). La cible à dix ans est de 150 000 UTI.

Le port de Marseille-Fos est identifié comme port du réseau central du nouveau Réseau Trans Européen de Transport (RTE-T) ; Marseille est inscrit sur les corridors Mer du Nord-Méditerranée et Méditerranéen de ce réseau. C’est une orientation importante en faveur de la consolidation et de l’extension de l’hinterland du port car, sur la période 2014-2020, le grand port maritime pourra participer aux instances de gouvernance de ces axes majeurs pour son développement.

Le port rencontre des difficultés pour sa desserte routière au niveau des terminaux de Fos. Le pôle conteneurs est desservi par la RD268. Cet axe à deux voies est utilisé pour le transit des marchandises, mais aussi pour les déplacements de particuliers, notamment des nombreux employés travaillant sur les différents secteurs de la zone de Fos. Conçu à une époque où le trafic de marchandises était nettement plus faible, et largement inachevé, le schéma de desserte actuel de la zone de Fos génère des difficultés, de capacité, de sécurité et occasionne des nuisances pour les riverains. Le port, face à l’importance de l’enjeu lié à ses dessertes, participe donc aux côtés de l’État et des collectivités locales à des opérations d’amélioration du réseau routier à hauteur de 17 millions d’euros.

Enfin, les terminaux de Fos sont accessibles aux barges fluviales. Le Rhône jusqu’à Lyon, puis la Saône jusqu’à Saint-Jean-de-Losne, sont navigables pour des unités de grand gabarit. En 2013, 78 218 EVP ont été chargés ou déchargés, ce qui représente une hausse de 3,5 % par rapport à 2012 (elle-même en progression de 13 % par rapport à 2011). La part modale du conteneur fluvial s’élève pour 2013 à 7,4 % (et 9 % pour les bassins de Fos, seuls desservis par le fleuve). Afin d’améliorer sa part modale fluviale, le port envisage la réalisation d’une liaison fluviale des terminaux à conteneurs de Fos au canal du Rhône. Cette opération fait l’objet de nombreuses concertations en raison de son impact environnemental.

Institué en 2008 à l’initiative du port de Marseille-Fos, le partenariat Medlink Port regroupe autour de Marseille/Fos, avec le soutien de Voies navigables de France, neuf ports intérieurs et le port de Sète. Ce partenariat a été conforté avec la création, en 2011, du comité des ports dans le cadre duquel le grand port maritime de Marseille a animé une mission de développement des trafics en lien avec la Compagnie nationale du Rhône.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné pour avis, sur les rapports pour avis de MM. Jacques Krabal, Michel Lesage, François-Michel Lambert, Guillaume Chevrollier, Rémi Pauvros, Jacques Alain Bénisti et Jean-Christophe Fromantin, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (voir compte rendu officiel de la commission élargie du jeudi 6 novembre  2014, sur le site Internet de l’Assemblée nationale) (4).

*

* *

À l’issue de la commission élargie, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a délibéré sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Le Président Jean-Paul Chanteguet. Nous en venons à l’examen par notre commission des crédits demandés au titre de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Je rappelle que MM. Jacques Krabal, Michel Lesage, François-Michel Lambert et Rémi Pauvros, émettent un avis favorable, que MM. Guillaume Chevrollier et Jacques Alain Bénisti émettent quant à eux un avis défavorable à l’adoption des crédits et que M. Jean-Christophe Fromantin propose de s’abstenir.

La commission a alors donné un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Auditions à Paris

Cabinet de M. le Secrétaire d’État chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche

M. François Lambert, conseiller mer, outremer, transport fluvial

Union des ports français

M. Hervé Martel, directeur général du Grand Port Maritime du Havre

Personnalité qualifiée

M. Frédéric Cuvillier, député, ancien ministre des Transports, de la Mer et de la Pêche

Auditions à La Rochelle

Grand port maritime

M. Michel Puyrazat, président du Directoire et directeur Général

M. Philippe Guillard, membre du directoire et président d’OFP Atlantique

M. René Muratore, président du conseil de développement

Collectivités territoriales

M. Jean-François Fountaine, maire, président de la communauté d’agglomération

© Assemblée nationale