N° 3113 tome II - Avis de M. François Loncle sur le projet de loi de finances pour 2016 (n°3096)



N° 3113

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2016 (n°3096),

TOME II

ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT

Diplomatie culturelle et d’influence

PAR M. François LONCLE

Député

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Voir le numéro 3110

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I. UNE RELATIVE PRÉSERVATION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 185 9

A. LA PARTICIPATION DU PROGRAMME À L’EFFORT GÉNÉRAL DE MAÎTRISE DE LA DÉPENSE 9

1. Le récapitulatif des crédits ouverts en 2016 9

2. Les diminutions de crédits hors titre 2 pour 2016 11

3. L’évolution des emplois (ETP – emplois temps plein) en 2016 13

4. La participation des opérateurs à l’effort de réduction des dépenses 15

B. UNE RATIONALISATION DES MOYENS QUI IMPOSE DES CHOIX 20

1. La cartographie du réseau 21

2. Un réseau dont les ressources propres sont en progression constante 25

3. La question du statut des établissements à autonomie financière reste posée 29

4. La diplomatie globale française : qui veut le plus ne peut plus le moins 31

II. UNE GRANDE DIVERSITÉ D’ACTIONS AU SERVICE DE L’INFLUENCE FRANÇAISE 33

A. LA COOPÉRATION ARTISTIQUE ET LE RAYONNEMENT CULTUREL ET INTELLECTUEL DE LA FRANCE 33

1. L’Institut français de Paris, un opérateur à conforter 34

2. La coopération culturelle et artistique 37

3. Les actions de l’Ambassade à Rome et de l’Institut français Italia 40

B. L’ENSEIGNEMENT FRANÇAIS ET DU FRANÇAIS À L’ÉTRANGER 45

1. L’enseignement français à l’étranger 45

2. La coopération linguistique 47

3. Le français, un levier toujours fort pour l’influence de la France, l’exemple de l’Italie 48

C. L’ATTRACTIVITÉ DE LA FRANCE 53

1. L’attractivité de l’enseignement supérieur français 53

2. La valorisation de la recherche et de l’innovation françaises 56

3. La promotion de la destination France 60

CONCLUSION 63

TRAVAUX DE LA COMMISSION - EXAMEN DES CRÉDITS 65

LISTE DES PERSONNALITÉS RENCONTRÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR 71

INTRODUCTION

« Lorsque l’on parle de cette Maison maintenant, on a uniquement à la bouche la diplomatie économique et c’est très heureux que l’on en parle puisque je l’ai portée, mais c’est un peu lacunaire. Pour ma part, je ne sépare pas la diplomatie économique de la diplomatie culturelle, scientifique ou de la diplomatie stratégique. Tout cela représente une série de facettes qui composent l’influence française. Autant il serait impossible d’avoir une diplomatie vivante et rayonnante s’il n’y avait pas une force économique, autant la tradition de la France serait totalement perdue et pervertie s’il n’y avait pas une diplomatie culturelle fleurissante. » Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, Inauguration de la Villa Kujoyama à Kyoto, Japon, le 16 septembre 2014.

L’action culturelle extérieure au sens large est un pilier fondamental de l’influence française et votre Rapporteur faisait part de sa préoccupation lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015 que l’on néglige l’importance de cette action, par ailleurs multiple, et que l’on en vienne à mesurer l’influence française à la seule aune des ambitions économiques, notamment du redressement de notre solde commercial. Cette préoccupation s’est trouvée renforcée par les propos tenus par plusieurs interlocuteurs à l’étranger déplorant un désengagement de la France, y compris dans des territoires où sa présence économique se renforce.

Parce que le sentiment d’un certain délaissement de l’action culturelle extérieure ne doit pas s’installer, votre Rapporteur ne peut que souscrire à l’objectif que s’est fixé le ministre de réaffirmer le caractère essentiel de la diplomatie culturelle tel qu’il l’a exprimé en ces termes lors de son discours aux Journées du réseau le 17 juillet dernier : « Dans les mois qui viennent j’entends bien opérer, si cela est nécessaire, un certain rééquilibrage, non pas de réalité mais de perception et d’image. ».

Il n’en demeure pas moins que la perception et l’image doivent reposer sur une certaine réalité et donc sur quelques moyens budgétaires, sinon l’image devient mirage puis s’efface. L’ambition de l’action culturelle extérieure de la France, celle que porte au quotidien nos diplomates et notre réseau à l’étranger, ne se résume pas à accrocher de jolies cartes postales au tableau de quelques nostalgiques. Le présent rapport a pour objet, comme chaque année, de se frotter à la réalité des moyens conférés pour conduire cette action. S’ils ne sont pas déséquilibrés par rapport à ceux dévolus à la diplomatie économique, ils le sont sans conteste par rapport aux missions assignées.

Bien sûr, votre Rapporteur ne peut que se réjouir de la relative préservation des crédits du programme 185 dans le projet de loi de finances pour 2016, quoique masquant des disparités importantes. C’est cependant une maigre consolation au regard des chiffres bruts et de toute la palette des actions définies, toujours plus nombreuses d’une année sur l’autre. Ainsi, la présentation stratégique de la mission Action extérieure de l’État affirme : « Le programme 185 regroupe l’ensemble des crédits afférents au développement du tourisme, la culture, l’éducation, la coopération universitaire et scientifique et la francophonie, tous ces domaines d’activités s’inscrivant dans le cadre de l’orientation fixée par le Président de la République pour l’action extérieure de l’État et dénommée « diplomatie globale ».

Ses objectifs portent sur :

• la poursuite d’une politique d’attractivité de qualité à l’attention des élites étrangères ;

• le développement de la langue française […] ;

• la promotion de l’influence culturelle et intellectuelle de la France ;

• l’aide à la mise en place de partenariats scientifiques de haut niveau ;

• le développement de la diplomatie économique et la promotion du tourisme ;

• la promotion et la préservation des biens publics mondiaux. » (1).

L’année 2015 a été marquée par une action énergique en faveur de la promotion de la gastronomie, du débat d’idées autour de la conférence Paris Climat, de l’offre touristique. En outre, la communication autour de l’Euro 2016 a également commencé. Pour autant, les missions « traditionnelles » n’ont pas été réduites.

Le programme 185 est peu doté et ne regroupe pas l’ensemble des crédits de la politique culturelle extérieure. Ceux-ci relèvent aussi du programme 209 « Aide publique au développement » s’agissant de la francophonie, du programme 115 « Action audiovisuelle extérieure », du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et, dans une moindre mesure, du ministère de l’Éducation nationale et du ministère de la Culture et de la Communication.

Certains des interlocuteurs rencontrés dénoncent l’illisibilité de notre politique culturelle extérieure, son éparpillement institutionnel et sa dispersion au sein-même du ministère des Affaires étrangères entre plusieurs services dans une direction qui la dépasse largement – la culture est noyée dans le concept d’influence – sans l’englober totalement.

Dans ce contexte, la question se pose de la définition des priorités et même des choix. Des acteurs du réseau culturel, pourtant farouchement attachés à l’universalité sectorielle de la politique d’influence française, demandent de mettre un terme à certaines politiques ou actions car ils n’ont plus les moyens de toutes les mener de front. Concernant l’universalité géographique du réseau, il faut tirer les conséquences de l’exercice de refonte de la cartographie du réseau. Il était certes indispensable de le redéployer, afin de se positionner dans les pays émergents où la présence française était largement sous-dimensionnée. Toutefois, à l’image des priorités géographiques du contrat d’objectif et de moyens encore appliqué à l’Institut français, qui couvrent à peu près le monde entier, les décisions n’ont été prises qu’à moitié ou incomplètement assumées.

C’est d’ailleurs ce qui a conduit Votre Rapporteur à souhaiter approfondir cette année la question de la présence culturelle française en Europe et à opter pour un déplacement en Italie, à Rome et Milan, pour lequel il souhaite remercier chaleureusement l’ensemble des personnes qu’il a rencontrées, à commencer par Madame l’Ambassadrice Catherine Colonna et ses collaborateurs. Le choix a été fait il y a plusieurs années déjà de réduire la présence diplomatique française en Europe. Quel bilan en tirer et quelles orientations fixer désormais ?

Il existe avec l’Italie des enjeux majeurs de diplomatie économique puisque c’est notre deuxième partenaire économique, la deuxième puissance industrielle d’Europe et un pays très performant à l’international. La France partage aussi une vision commune de l’importance du patrimoine, de la culture et de la langue comme facteurs d’identité. L’Italie demeure un pays de présence française important, notamment en termes de maillage territorial et de diversité de l’offre. Mais il existe aussi une relation fantasmée, fondée sur l’idée d’une coopération bilatérale étroite, inébranlable et foisonnante. Ce fantasme traduit la croyance généralisée que la proximité entre la France et l’Italie et au-delà entre les sociétés européennes constitue un acquis définitif, qu’il y aurait une évidence franco-italienne, latine et européenne et que la France pourrait donc se désengager sans problèmes. C’est plus qu’un leurre. C’est une faute.

En réalité, la présence française est en recul même en Italie. L’État italien étant peu impliqué dans la dynamique bilatérale culturelle, les moyens manquent pour conforter un rayonnement culturel encore très fort, structuré autour de l’image de Paris comme capitale de la culture et des arts et une profonde francophilie qui est un héritage précieux. Au point que par moment votre Rapporteur s’est demandé ce qu’il en serait de l’influence française sans ces extraordinaires lieux, à commencer par le Palais Farnèse, qui drainent toute la société italienne.

Traversant une phase critique, l’Union européenne doit être consolidée. Dans cette optique, la culture et l’éducation sont les vecteurs prioritaires de la vitalité de l’association des peuples d’Europe. Or, la France n’a pas su profiter de l’effondrement des budgets de ses voisins pour revivifier sa présence. Il est sans doute trop tard pour réinvestir l’Europe et il s’avère plus judicieux de conforter le redéploiement vers les nouveaux pays émergents et l’Afrique, et d’abord le Maghreb comme le soulignait l’an passé votre Rapporteur. C’est néanmoins avec un grand regret que votre Rapporteur le constate et insiste pour que l’essentiel soit préservé en concentrant les maigres ressources sur les actions prioritaires.

La trajectoire triennale prévue par la lettre-plafond 2015-2017 prévoyait, pour l’ensemble de la mission Action extérieure de l’État, une diminution des crédits de 4,8 % sur la période et la suppression de 450 emplois (ETP). Ces demandes d’économies ont été revues à la hausse dans la lettre-plafond du Premier ministre d’avril 2015, sans donner lieu toutefois à une application pleine des demandes alors exprimées.

Si l’on neutralise l’enveloppe de crédits liés à l’organisation de la conférence Paris-climat, grâce à un abondement de 159,5 millions d’euros de compensation de la perte au change, les crédits de la mission Action extérieure de l’État se stabilisent à 4.689,6 millions d’euros (+0.08 %) et, à périmètre courant, s’établit à 4.831,43 millions d’euros.

Les crédits du programme 185 continuent leur diminution, mais sont relativement préservés en échappant pour une grande partie aux efforts nouveaux demandés ce printemps dans la lettre de cadrage du Premier ministre. Le taux de diminution des crédits est de 3,4 % hors dépenses de personnel alors qu’il était demandé de le porter à 5 %. De même, il faut reconnaître au ministre d’avoir systématiquement exclu le programme 185 de l’application des annulations de crédit en exécution (91 millions d’euros annulés).

Les crédits sont déjà si faibles, les emplois si réduits et les missions si vastes, qu’aller au-delà de ce qui est prévu dans le présent projet de loi aurait mis à l’agonie de nombreux projets et mis en péril la capacité à compenser les pertes par des ressources propres ou externes, le programme 185 ayant cette particularité que ses crédits génèrent de l’autofinancement.

Les crédits du programme diminuent de 3,9 % et de 3,4 % hors Titre 2 (dépenses de personnel) pour s’établir respectivement à 718,83 millions et 644,85 millions d’euros.

Plusieurs transferts concernent le programme 185 pour un montant cumulé de 3,68 millions d’euros, soit :

– un transfert interne du programme de dépenses de personnel (Titre 2) vers la subvention pour charge de service public d’Atout France, correspondant au remboursement de la masse salariale des agents mis à disposition par la DGE auprès de l’opérateur pour un montant de 3,59 millions ;

– un transfert interne au programme de dépenses de personnel (Titre 2) vers la subvention pour charges de service public de l’Institut Français correspondant à la masse salariale de 2 ETP transférés sous le plafond d’emploi de l’opérateur, pour un montant cumulé de 216 391 euros ;

– un transfert entrant de 41 767 euros du P105 vers le Titre 3 qui correspond à la prise en charge des dépenses de fonctionnement du Service de coopération et d’action culturelle (SCAC) de Rangoon installé dans les locaux de l’Institut français en Birmanie (10 567 euros) et des frais de fonctionnement du SCAC de Yaoundé qui est hébergé dans les locaux de l’Institut français (31 200 euros) ;

– un transfert entrant en provenance de la Direction générale des finances publiques (programme 156) au titre de la fermeture de certaines trésoreries auprès des ambassades de France à hauteur de 173 283 euros de crédits de titre 2 correspondant à la masse salariale de 1 ETP transféré ;

– un transfert sortant de 65 000 euros du titre 3 du programme 185 vers le programme 105 correspondant aux frais de missions des représentants spéciaux, dans une logique de simplification et de clarification, et afin de disposer d’une enveloppe unique sur le programme 105 ;

– un transfert sortant de 100 000 euros du titre 6 du programme 185 vers le titre 6 du programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires », au titre du renforcement des subventions aux opérateurs privés de l’adoption internationale habilités par le ministère, afin de leur permettre d’atteindre une efficacité comparable à celles des organismes privés des autres grands pays d’accueil.

La diminution des crédits hors titre 2 doit donc être ajustée pour tenir compte des transferts internes depuis le programme des dépenses de personnel vers les subventions aux opérateurs. En conséquence, la diminution à périmètre constant des crédits hors Titre 2 s’établit à 3,9 %.

Le tableau suivant présente l’évolution des crédits prévue par le projet de loi de finances pour 2016 par rapport à la loi de finances initiale pour 2015, et n’a rien de réjouissant.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS OUVERTS PAR ACTIONS/SOUS-ACTIONS

Actions et sous-actions

LFI 2015

PLF 2016

Evolution

AE=CP

AE=CP

%

Programme 185

747,92

718,83

-3.9

Titre 2

80,58

73,98

-

Hors titre 2

667,34

644,85

-3.4

HT2 avant transferts internes vers les subventions

 

640,99

-3,9

Action 1 – animation du réseau

44,07

42,76

-3

Sous-action 2 : Animation du réseau

3,7

3,64

-1,6

Sous-action 3 : Appui général au réseau

40,3

39,12

-2,9

Action 2 - Coopération culturelle et promotion du français

68,83

65,88

-4,3

Sous-action 1 : Langue française et diversité linguistique

22,1

21,49

-2,8

Sous-action 2 : Coopération et diffusion Culturelle

45,2

44,39

-1,8

Action 3 – Enjeux globaux

8,78

8,09

-7.9

Action 4 – Attractivité et recherche

106,23

100,35

-5,5

Sous-action 1 : Attractivité et enseignement supérieur

72,5

68,47

-5,6

Sous-action 2 : Recherche scientifique

33,7

31,88

-5,4

Action 5 –AEFE

409,04

394,41

-3.6

Action 6 –Développement international tourisme

30,38

33,35

+8,9

Développement international tourisme avant transfert

 

29,76

-2.04

Source : d’après les données des PAP annexés aux projets de loi de finances pour 2015 et 2016

RÉPARTITION DES CRÉDITS

 

2015 AE

2015 CP

2016 AE

2016 CP

Évolution

Évolution

Source : ministère des Affaires étrangères et du développement international

Les économies demandées pour 2016 sont réparties il est vrai avec le souci de préserver le réseau culturel et les actions prioritaires, même si cela ne peut être fait que de manière imparfaite.

La priorité a été portée sur la préservation des crédits de fonctionnement du réseau de coopération et d’action culturelle (crédits d’animation du réseau et de soutien aux actions de coopération), tant à l’étranger qu’en centrale et des crédits dévolus aux alliances françaises (Fondation et alliances locales).

En revanche, les crédits des échanges scientifiques et d’expertise et ceux des autres moyens bilatéraux d’influence repartent à la baisse. Les moyens destinés aux bourses de mobilité et aux échanges d’expertises et scientifiques participent aux réductions des dépenses publiques. Il s’y applique des mesures d’économies additionnelles, à hauteur de 4 millions d’euros pour les bourses (soit 67,4 millions d’euros inscrits dans le projet de loi, en baisse de 5,8 %) et de 1 million d’euros pour les échanges d’expertise (soit 15,4 millions inscrits), tout comme les crédits « autres moyens bilatéraux d’influence », qui diminuent de 5,6 % par rapport à 2015 (-1,5 million d’euros).

Les dotations pour opérations aux établissements à autonomie financière (Instituts français et Institut français de recherche à l’étranger) supportent également des économies, enregistrant une baisse de 2,2 %. Dans le cadre de la restructuration du réseau engagée il y a quelques années, la baisse des crédits dans les pays disposant d’un établissement à autonomie financière a été atténuée par des transferts de crédits. Cette ligne disparaît dans le projet de loi de finances pour 2016, absorbant ainsi une partie de la baisse globale des crédits (500.000 euros étaient encore affectés en 2015 à la restructuration du réseau).

Les Alliances françaises (383 alliances sont subventionnées par le ministère) voient les dotations stabilisées à 5,67 millions d’euros, et 1,35 millions d’euros pour la Fondation et ses délégations générale. Pour mémoire, l’aide apportée par le ministère à l’Alliance française se répartit comme suit :

– une subvention de fonctionnement à la Fondation Alliance française au titre de l’animation du réseau et sa professionnalisation qui s’est élevée à 660 013 euros en 2014 et à 690 013 euros en 2015 ;

– une subvention destinée aux délégations générales (à ce jour au nombre de 39 dans le monde), versée directement à la Fondation Alliance française, d’un montant de 932 474 euros en 2014 et 2015 ;

– des subventions pour opérations culturelles et linguistiques versées par les services de coopération et d’action culturelle (SCAC) des ambassades aux Alliances françaises locales pour un montant de 5 675 841 euros en 2014 (données RAP 2014).

Cette stabilisation est rassurante, car il est demandé aux Alliances françaises de se substituer au réseau public dans plusieurs pays. Votre Rapporteur a toujours été impressionné par la vitalité des alliances, notamment en Amérique latine, et connaît donc le rôle qu’elles jouent dans l’influence culturelle de la France. Néanmoins, il faut souligner que si l’on observe les baisses de crédits sur une période longue de dix ans, les Alliances auront été bien plus préservées que les Services de coopération et d’action culturelle et les Instituts français, alors que ces derniers assument aussi des missions très larges dans des zones à faible potentiel de ressources propres.

EVOLUTION DES MOYENS DÉVOLUS AUX ALLIANCES FRANÇAISES

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

En cours

Fondation (subvention de fonctionnement)

800 000€

800 000€

758 636€

758 636€

660 013€

690 013€

Crédits DGAF*

842 810€

860 864€

922 364€

922 364€

932 474 €

932 474€

Subventions aux AF locales **

7 385 525€

6 196 335€

5 932 621€

5 494 939€

5 675 841€

5 667 495€

Total général

9 028 335€

7 857 199€

7 613 621€

7 175 939€

7 268 328€

7 289 982€

* Depuis 2010, et conformément au rapport de la Cour des comptes, les subventions aux Délégations générales des Alliances françaises (DGAF) sont versées par le MAEDI directement auprès de la Fondation Alliance française de Paris et ne transitent plus par les postes.

** Il s’agit de subventions versées par les postes aux AF locales pour des opérations déléguées par les Services de coopération et d’action culturelle (SCAC).

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

Évolution et répartition des emplois à l’étranger affectés à la politique culturelle extérieure

 

Programme

Alliance Française

SCAC

EAF

Expertise Technique Internationale

Total

2015

PG 185

65

176

342

55

638

PG 209

216

354

500

202

1272

Total

281

530

842

257

1910

2014

PG 185

64

182

362

59

667

PG 209

221

357

508

221

1307

Total

285

539

870

280

1974

Le programme 185 participera encore, en 2016, aux suppressions de postes et à l’effort de maîtrise de la masse salariale, mais dans une moindre mesure que ce qui aurait résulté des demandes exprimées dans la lettre-plafond d’avril dernier. Sur le triennum 2015-2017, 450 suppressions d’ETP étaient prévues ; 300 suppressions supplémentaires étaient demandées. En 2016 finalement, 45 suppressions d’emplois  concernent les deux programmes 185 et 209 (5 en administration centrale et 40 dans le réseau), après 66 suppressions en 2014 et 69 en 2015.

Évolution et répartition des emplois en centrale affectés à la politique culturelle extérieur

 

Programme

Total

Prévisions 2016

185/209

85

2015

185/209

87

2014

185/209

89

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

Dans le cadre d’une meilleure maîtrise et d’un pilotage plus précis de l’emploi public, un plafond des autorisations d’emplois des établissements à autonomie financière pluridisciplinaires et de recherche a été mis en œuvre à compter de 2010. Ce plafond couvre l’ensemble des emplois des agents de droit local correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) ou assimilé à un CDI compte tenu des particularités locales du marché du travail. Les effectifs des personnels de droit local des établissements à autonomie financière s’établissent à 3.489 (prévision de 3.450 en fin d’exercice). Les effectifs sous plafond dans le réseau culturel fin 2015 s’établiraient à 2.429 ETP, dont 1.659 dans les établissements à autonomie financière et les services de coopération et d’action culturelle.

Rappelons que le MAEDI finance la mise à disposition de personnels expatriés dans les Alliances françaises, soit 294 agents en 2015, dont 83 VI et 211 expatriés, répartis dans 239 Alliances présentes dans 88 pays, pour environ 27 millions d’euros en 2014 et 33 millions d’euros en 2015 (estimation 2015).

Il faut évoquer enfin le « bol d’air » que pourrait représenter le transfert de la compétence gouvernance à l’Agence française de développement qui est aujourd’hui décidée. Le ministère ne serait plus alors qu’une autorité de tutelle, ce qui permettrait aux services culturels des pays dans lesquels la France intervient en assistance au développement de se recentrer sur la culture. Cela représente dans les Services de coopération et d’action culturelle des pays concernés une centaine de personnes (ETP) dont seule une vingtaine ne fait que cela. La suppression d’une partie des postes facilitera la mise en œuvre du schéma d’emplois tandis que les personnels restants pourront se recentrer sur l’action culturelle.

Dans le cadre de la participation des opérateurs à la réduction de la dépense publique, demandée dans la lettre de cadrage du Premier ministre, les subventions de ceux-ci sont diminuées en moyenne de 3 %. C’est certes plus que ce qui était initialement prévu, mais moins que la norme fixée aux opérateurs et, surtout, cette baisse ne s’applique pas de manière uniforme. Les subventions s’établissent ainsi, par ordre décroissant, à :

– 394,4 millions d’euros pour l’AEFE, soit -3,4 % par rapport à 2015 ;

– 29,36 millions d’euros pour l’Institut Français, soit -2 % par rapport à 2015 (hors transfert de masse salariale) ;

– 29,8 millions d’euros pour Atout France, soit -2 %, hors transfert de la masse salariale des ETP mis à disposition d’un montant de 3,6 millions d’euros ;

– 3,8 millions d’euros pour Campus France, soit -4 %.

• S’agissant de l’Institut français, votre Rapporteur ne peut qu’appeler à nouveau à la vigilance : les coupes budgétaires successives mettent en péril la capacité de l’Institut français à exercer ses missions, puisque du fait de ses coûts fixes, la variable d’ajustement ne peut que concerner les projets (2). La subvention versée aura en effet diminué de près de 22 % depuis la création de l’Institut. Pour 2016, la baisse de la dotation demeure comme prévu à -2 %, faisant passer la subvention sous les 30 millions d’euros (29,36 millions). Il n’était pas concevable que l’opérateur subisse les baisses demandées dans la lettre de cadrage.

À cet égard, la difficulté que l’Institut a eu à lever des cofinancements auprès de partenaires, en dehors des grands évènements de type Saisons culturelles peut se résorber partiellement, mais seulement partiellement. Les entreprises veulent cofinancer des opérations à grande visibilité. C’est pourquoi, l’idée d’un fonds de concours permanent a été abandonnée. Même si l’Institut français a aussi des marges de progression en matière de financements européens, ceux-ci sont fléchés et ne recoupent pas nécessairement les actions souhaitées ; ils ne peuvent donc pas vraiment compenser des baisses de crédits. Il est toutefois très heureux que cette année l’Institut français ait décroché un appel d’offres.

D’après l’opérateur, en 2015, la baisse de 1,35 million d’euros s’est traduite par une diminution significative du budget consacré aux accords avec les collectivités territoriales. Le dialogue noué a permis aussi de sortir de projets ayant peu d’avenir à l’international. Faisant suite à la décision de non rattachement du réseau à l’établissement, plusieurs programmes ont été arrêtés, par exemple le plan d’aide aux médiathèques du réseau, activité structurante, mais que l’Institut français n’a pas à prendre en charge s’il n’a plus de lien fonctionnel avec le réseau.

Dans le même ordre d’idée, le stage des partants dans le réseau culturel organisé par l’Institut français va être reconfiguré dans une version réduite à compter de 2016, limitée à la formation utile et sans aborder les considérations générales puisque les agents relèvent fonctionnellement du ministère. Certains programmes vont aussi devoir être arrêtés, comme le programme de résidence sur les critiques d’art qui visait à renforcer la place de la France dans les arts visuels.

• S’agissant de Campus France, pour la première année, son budget fera apparaître un déficit et les baisses programmées pour 2016 sont donc particulièrement inquiétantes, car c’est l’ensemble des financements de l’opérateur qui sont concernés.

Pour mémoire, Campus France bénéficie des crédits des actions suivantes du Programme 185 :

– 02 « Coopération culturelle et promotion du français », au sein de laquelle le montant des bourses et échanges d’expertise, à hauteur de 7,3 millions d’euros en 2016 ;

– 03 « Enjeux globaux », au sein de laquelle le montant des bourses et échanges d’expertise est prévu, à hauteur de 3,3 millions d’euros en 2016 ;

– 04 « Attractivité et recherche », au sein de laquelle la subvention pour charge de service public versée à Campus France est de 3,8 millions d’euros.

Campus France bénéficie aussi du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » qui inclut la dotation de la SCSP de 1,7 million d’euros l’an prochain. Enfin, au titre de l’action 02 « Coopération bilatérale », du programme 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement », 8,2 millions d’euros sont inscrits en faveur des bourses et échanges d’expertise.

Quel est le problème pour 2016 ? D’abord, la subvention pour charge de service public est réduite de 4 % à 3,8 millions d’euros. C’est donc le seul opérateur qui se voit finalement appliquer le tarif « fort ».

Ensuite, l’opérateur va subir la baisse du nombre de bourses, dès lors qu’il tire une partie de ses revenus de la gestion des bourses. Contrairement à l’an passé et après une année 2014 où il avait déjà été fait exception à ce principe, les bourses du gouvernement français enregistrent des baisses de crédit significatives : -5,6 % s’agissant des bourses de mobilité (67,57 millions d’euros) et -5,8 % s’agissant des autres moyens bilatéraux d’influence (25,8 millions d’euros).

De plus, certains pays étrangers sont en difficulté et ferment leurs programmes de bourses. C’est notamment le cas du programme Sciences sans frontières du gouvernement brésilien, ce qui se traduira par une perte de 500.000 euros de produits de gestion pour Campus France. Cette perte s’ajoute à celle, d’un montant équivalent, liée notamment à la fin des programmes syrien, irakien et yéménite. Campus France continue ses opérations de démarchage auprès de gouvernements étrangers, particulièrement en Amérique latine, et a notamment signé deux accords avec la Colombie. Les possibilités que se mettent en place de nouveaux programmes susceptibles de compenser l’arrêt des programmes précités sont limitées : les pays asiatiques en forte croissance ne proposent pas de soutien gouvernemental à l’expatriation étudiante (ce sont les familles qui financent).

Enfin, l’opérateur perd deux emplois sous plafond. Le plafond d’emplois de l’EPIC Campus France s’établit en 2015 à 258 ETP dont 233 ETP sous plafond et 25 ETP hors plafond. Un schéma d’emploi de -2 ETP par an sur le budget triennal 2015-2017 a été retenu, abaissant à 256 le nombre d’ETPT en 2016 (231 ETPT sous plafond et 25 ETPT hors plafond).

2016 constituera véritablement un moment critique dans la vie de l’opérateur, alors que les économies de structure ont déjà été effectuées. En outre, de nouveaux chantiers doivent être engagés au bénéfice des étudiants et de l’attractivité de notre pays, en particulier la modernisation de l’interface web et la création d’une plate-forme dédiée aux doubles-diplômes qu’il convient de valoriser. Clairement, les perspectives ne sont pas bonnes.

Pourtant, la France doit se battre si elle veut conserver la place de troisième destination universitaire qu’elle a retrouvée, dans un contexte de concurrence internationale très forte afin de capter un nombre croissant d’étudiants en mobilité (8 millions dans le monde en 2025 contre 4 millions aujourd’hui selon l’UNESCO). Le nombre de pays qui élaborent des stratégies d’accueil ne cesse de s’accroître, souvent sur des filières spécifiques (la médecine en Roumanie, le dentaire en Hongrie par exemple).

Le ministère compte sur la modernisation du système des bourses pour dégager des marges, mais cela paraît très optimiste.

• S’agissant de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), elle subit une baisse de 3,4 % de sa subvention, logée presque à la même enseigne que les autres opérateurs de l’État.

La dotation s’établira à 394,4 millions d’euros, contre 408,2 millions d’euros en loi de finances initiales pour 2015 et 403,238 millions effectivement ouverts. Le montant en volume est important (13,8 millions d’euros de baisse) compte tenu du poids du budget de l’AEFE. Le taux de mise en réserve n’est pas connu à ce stade.  

L’agence emploie 10.949 personnes. Les 6.253 emplois sous plafond sont stabilisés et se décomposent en 171 emplois au siège, 1.127 expatriés et 4.955 emplois de résidents.

Avec l’accélération de la baisse de la dotation, qui était prévue à -2 % en 2016, ce sont 32 millions d’euros d’économies prévues par le triennum que l’Agence doit réaliser en deux ans et non trois. Un virage délicat donc. Selon l’Agence, si l’on ajoute l’augmentation incompressible de la masse salariale (+10 millions d’euros, en raison du Glissement Vieillesse Technicité) et des frais de fonctionnement (+1.5 million du bureau des voyages et missions en raison du fort renouvellement des personnels en 2016), ainsi que la fin des recettes exceptionnelles non structurelles (10 millions), l’équilibre budgétaire demandera un effort en 2016 de 37,6 millions d’euros.

Cette anticipation d’une année est complexe à conduire en termes d’acceptabilité par les personnels et les familles. Pour y parvenir, l’Agence compte sur la dynamique naturelle des remontées (remontée des établissements sur la participation à la rémunération des résidents participation financière complémentaire de 6 % des frais de scolarité des établissements en gestion directe et conventionnés), mais aussi sur les mesures structurelles suivantes, envisageables grâce au dialogue de gestion que l’Agence a mis en place :

– l’Agence a demandé aux établissements en gestion directe qui ont des fonds de roulement importants (hors immobilier et sans affecter la qualité pédagogique) d’opérer des remontées supplémentaires, peut-être de l’ordre de 21,7 millions d’euros répartis entre une bonne quinzaine d’établissements. Cela n’aura pas d’incidence sur les frais de scolarité ;

– un cinquième des établissements conventionnés (environ 30 établissements) prendraient leur part sous la forme d’une augmentation exceptionnelle de la participation à la rémunération des résidents pendant deux-trois ans ;

– la transformation de poste d’expatriés en postes de résidents et de postes de résidents en recrutés locaux à compter du 1er septembre 2016 permettrait de dégager 2,2 millions d’euros en 2016 et 5 millions en année pleine. Ce doit être fait finement afin de ne pas déstabiliser les établissements. Il convient en effet de viser les pays où il existe un vivier d’enseignants disponibles, ce qui s’avère impossible dans des pays comme le Niger, le Nigéria ou le Burkina Faso. Il n’y aura aucun changement brutal de statut pour les personnels mais un changement progressif lors de mobilités ou à la suite de départs à la retraite.

Au-delà de 2016, si les baisses devaient se poursuivre, quelle solution devrait être envisagée ? Outre le rééquilibrage entre postes d’expatriés, de résidents et de recrutés locaux à l’occasion des redéploiements, resterait peut-être la voie de la modification des indemnités de résidence des expatriés, mais il convient d’être prudent sur les modalités de mise en œuvre d’une telle option, sans naturellement l’écarter.

Dans un contexte de baisse de la subvention, la question des emplois de l’AEFE doit être posée à la lumière des efforts consentis par le budget général de l’État en faveur de la création d’emplois au ministère de l’Éducation nationale. Aucune de ces créations ne bénéficie à ce jour au réseau d’enseignement français à l’étranger. Pourtant, un tiers des élèves des lycées français sont des Français qui devraient donc bénéficier de la priorité nationale. Si on appliquait cette priorité au réseau à hauteur d’un tiers, cela représenterait 600 enseignants supplémentaires, ce qui serait peu de chose pour l’Éducation nationale mais un apport énorme pour l’AEFE. Cela constituerait une aide incontestable pour mener le redéploiement des moyens qui a été acté en novembre 2014.

• S’agissant d’Atout France, sa dotation s’élèvera à 29,8 millions d’euros, en baisse de 2 % (600.000 euros d’économies). Concernant le plafond d’emplois du GIE, il s’établit en 2015 à 314 ETP sous plafond et 60 hors plafond. Pour 2016, le schéma d’emplois arrêté pour Atout France est de -2 ETPT sous plafond, conformément aux engagements pris par le ministère dans le cadre du triennum budgétaire 2015-2017. Le plafond d’emploi s’établira ainsi à 312 ETP sous plafond et 60 ETP hors plafond.

La subvention est complétée par un transfert interne au programme de dépenses de personnel correspondant au remboursement de la masse salariale des agents mis à disposition par la Direction générale des entreprises du ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique, pour un montant de 3,6 millions d’euros.

Le GIE semble relativement préservé, même si ses équivalents étrangers comparables sont mieux dotés. Sur la période 2010-2015, les subventions versées par l’État à Atout France pour charges de service public avaient connu une diminution nettement moins marquée que la baisse de l’ensemble des crédits ouverts en faveur de la politique du tourisme. Ainsi, la subvention versée au GIE avait diminué de 9,3 % entre 2010 et 2015 alors que les crédits totaux baissaient de 37,3 % sur la même période.

D’une part, en 2015, Atout France a bénéficié d’un transfert de recettes de visas d’1 million d’euros provenant d’un dégel, sans réduire sa prévision de déficit pour autant. Le GIP semble construire son budget 2016 en intégrant la reconduction de la mesure. D’autre part, le ministre a annoncé à la Conférence annuelle du Tourisme d’octobre 2015 l’attribution de 5 millions d’euros supplémentaires pour 2016 en faveur de la promotion touristique. Ils proviendront d’une attribution de produits correspondant aux deux tiers des recettes de visas supplémentaires de 2016 par rapport à l’année 2015, évalué à 6,6 millions d’euros dont 1,6 affectés aux services des visas. Le GIP gèrera donc 5 millions supplémentaires.

Ces montants apparaissent très élevés par rapport aux efforts demandés aux autres opérateurs qui concourent eux aussi à l’attractivité de la France comme destination touristique, par la valorisation de sa culture, de sa vie artistique et intellectuelle, de son enseignement supérieur…. Peut-on objectivement dire que Campus France ne participe pas aux recettes de visas ?

Plutôt que d’apporter à ce seul opérateur autant d’argent frais, il conviendrait d’examiner le mode de calcul de la réserve de protection qui est basée sur l’ensemble du budget de l’opérateur, c’est-à-dire sur la subvention mais aussi ses recettes de partenariat, conduisant à un taux de mise en réserve en progression alors que la subvention diminue. C’est assez contradictoire avec la demande d’accroissement de l’effet de levier.

RÉCAPITULATIF DES EMPLOIS DES OPÉRATEURS

Source : PAP annexé au projet de loi de finances pour 2016.

Le réseau de coopération et d’action culturelle se compose au 1er août 2015 de :

– 161 services de coopération et d’action culturelle (SCAC) ;

– 94 établissements à autonomie financière pluridisciplinaires fusionnés et 138 annexes dans 98 pays ;

– 4 établissements spécifiques à autonomie financière ;

– 27 EAF de recherche – Instituts Français à l’Étranger (IFRE) –dont 1 IFRE rattaché à l’EAF Afrique du Sud- et 17 antennes d’IFRE ;

– 383 Alliances françaises ayant reçu une dotation ou bénéficiant de personnel expatrié rémunéré par le Département (chiffres 2014).

Au sein de ces différentes structures sont déployés 145 espaces et 63 antennes Campus France.

S’ajoute à ce réseau public le réseau privé des Alliances françaises, associations autonomes de droit local, au nombre de 813 (labellisées) présentes dans 137 pays sur les 5 continents. 384 de ces Alliances françaises présentes dans 114 pays sont conventionnées directement avec le ministère et bénéficient d’un soutien, sous forme de subventions ou (et) de mise à disposition de personnels (3).

La généralisation de la fusion des Services de coopération et d’action culturelle (SCAC) et des établissements à autonomie financière (EAF) s’est achevée début 2013. Elle a eu un impact particulièrement important dans les pays à réseaux, notamment ceux où coexistaient un SCAC, un EAF en capitale et des EAF en province, comme c’était le cas de l’Italie. Dans ces pays, la fusion a pris la forme d’un dispositif unique piloté par le Conseiller de coopération et d’action culturelle /directeur d’Institut, les directeurs des EAF de province devenant des directeurs-adjoints.

Ce regroupement permet notamment d’améliorer le pilotage et la visibilité du dispositif (site internet unique, charte graphique unique, organisation d’opérations de dimension nationale), de rationaliser le fonctionnement (centralisation des services de gestion, harmonisation de la gestion du personnel), de viabiliser le modèle économique (mutualisation des risques financiers et des fonds de réserves, des équipements de gestion des cours, de la gestion des biens et de la commande). Dans les pays fortement décentralisés, cette rationalisation emporte néanmoins une certaine rigidité. Votre Rapporteur a pu l’observer en Italie, où les besoins d’autonomie sont forts compte tenu des réalités locales extrêmement variées et où la centralisation imposée dans les processus de décision et comptables génère certaines lourdeurs.

La cartographie du réseau continue d’évoluer et les efforts de rationalisation du réseau culturel à l’étranger seront poursuivis en 2016 dans le cadre général d’adaptation du réseau diplomatique français à l’étranger. À ce titre, un dispositif de coopération allégé est progressivement mis en place dans les vingt-six postes de présence diplomatique. Les grands postes ont également fait l’objet d’un examen attentif conduisant à quelques adaptations de moyens à la baisse. Une quinzaine d’antennes d’Institut français ont été fermées en 2015. Les suppressions ont notamment concerné l’Institut français du Cap-Vert, celui de l’Ouzbékistan, les antennes de Porto au Portugal, Beer-Shev’a en Israël, Košice en Slovaquie, Kharkiv en Ukraine et Tuzla en Bosnie-Herzégovine.

OUVERTURES ET FERMETURES EN 2014 ET 2015

 

Ouvertures

Fermetures

2014

Fin de l’expérimentation du rattachement à l’EPIC Institut français : retour de 8 « bureaux locaux » au statut EAF :

Cambodge, Chili, Danemark, Géorgie, Inde Royaume-Uni, Sénégal, Serbie

Création de 4 EAF issus des « bureaux locaux » de l’EPIC créés ex-nihilo :

Émirats arabes unis, Ghana, Koweït, Singapour

Chine / Hong Kong : ouverture d’une antenne du Centre d’Études Françaises sur la Chine Contemporaine à Pékin

Nigéria : fermeture de l’antenne de Zaria de l’Institut français de recherche en Afrique (IFRA – Ibadan), pour des raisons de sécurité

Liban / Syrie : transfert du siège de l’Institut français du Proche-Orient (IFPO) de Damas à Beyrouth. Maintien d’une antenne à Damas (en sommeil).

Yémen / Arabie Saoudite : transfert du siège du Centre français d’Archéologie et Sciences sociales de Sanaa à Djeddah. Maintien d’une antenne à Sanaa.

Portugal : fermeture de l’antenne de Porto de l’Institut français du Portugal.

Israël : fermeture de l’antenne de Beer-Shev’a de l’Institut français d’Israël.

Slovaquie : fermeture de l’antenne de Kosice de l’Institut français de Slovaquie.

Bosnie-Herzégovine : fermeture de l’antenne de Tuzla de l’Institut français de Bosnie-Herzégovine

Colombie : fermeture de l’antenne de Medellin de l’Institut français de Colombie

2015

Chine : ouverture de l’antenne de Kunming de l’Institut français de Chine.

République Démocratique du Congo (RDC) : ouverture des antennes de Bukavu et Goma de l’Institut français de RDC.

Inde : ouverture des antennes de Bénarès, Cochin, Goa, Katmandou (Népal).

Laos : ouverture de l’antenne de Thakhek.

Autriche : fermeture de l’antenne d’Innsbruck de l’Institut français d’Autriche.

Ukraine : fermeture de l’antenne de Kharkiv de l’Institut français d’Ukraine.

Ouzbékistan : fermeture de l’Institut français d’Ouzbékistan.

Cap-Vert : fermeture de l’Institut français du Cap-Vert.

On soulignera que la cartographie repose sur une analyse de la répartition des compétences entre Alliances françaises et Instituts français. Les Alliances françaises conventionnées sont ainsi présentes dans 64 pays où n’existe aucun Institut français. Elles sont alors les relais de la coopération et de l’action culturelle pour les postes ayant compétence sur ces zones. A l’inverse, 42 pays sont couverts par des Instituts français alors qu’aucune Alliance française conventionnée n’y est active. Enfin, dans 50 pays, notre représentation se base aussi bien sur l’Institut français que sur une ou plusieurs Alliances françaises conventionnées. Les Alliances françaises complètent donc avantageusement le maillage offert par le réseau des Instituts français. En tout, ce sont donc 156 pays qui sont couverts par au moins un des deux réseaux culturels.

Depuis plusieurs années, un important travail est mené afin de rationaliser notre dispositif et supprimer les véritables « doublons ». À présent, la démarche va au-delà puisque, de plus en plus souvent, le choix consiste à demander au réseau des Alliances françaises de se substituer au réseau public. Fréquemment, l’action culturelle et linguistique a été recentrée sur l’Alliance française locale. Toutefois, dans des pays à dispositif allégé, comme en Ouzbékistan, et en Europe, notamment cette année pour la maison Descartes à Amsterdam et l’Institut de Kharkiv en Ukraine, l’Institut ou l’antenne est « transformé » en Alliance française créée en substitution. Encore faut-il s’assurer de l’équilibre économique d’une nouvelle Alliance et réfléchir au besoin de disposer d’un expatrié à sa tête pour maintenir dans l’orbite de la stratégie diplomatique cette association de droit local.

Sur le plan des emplois, l’exercice d’adaptation fait partie prenante de la programmation des effectifs puisque nombre de suppressions le sont au titre des différents chantiers entrepris pour moderniser le réseau : exercice grand poste et passage aux postes à présence diplomatique, par exemple. Ainsi, ces exercices de rationalisation, ont contribué à supprimer 35 emplois en 2014 et 40 en 2015.

L’effort d’adaptation passe également par le travail effectué par la Direction générale de la mondialisation pour redéployer des postes vers des pays émergents et des thématiques stratégiques. Cette volonté s’est traduite dans la programmation initiale des effectifs 2015 par un renforcement de la coopération culturelle dans des pays émergents (Chine, Iran, Brésil, Afrique du Sud) et le développement de la diplomatie économique dans des pays prioritaires (Ghana, Burundi, Angola, Mongolie). Deux postes ont, par exemple, été créés pour consolider la position des Alliances françaises dans les pays à fort potentiel que sont la Russie et la Corée du Sud. Par ailleurs, la coopération universitaire a été élargie de 3 postes supplémentaires permettant en particulier la recherche de programmes de bourses cofinancés. Enfin, la coopération scientifique a également été mise en avant avec la création de 4 postes dont deux auprès d’instituts scientifiques ou de recherche dans des pays partenaires (Afrique du Sud et Taiwan).

Pour que les acteurs du réseau puissent assurer leur mission, la mise en œuvre de la stratégie d’influence privilégie des moyens d’intervention capables de mobiliser des financements additionnels. L’amélioration des équilibres financiers, grâce aux recettes propres et à la recherche de nouveaux partenaires, est devenue une priorité, en particulier pour les recettes générées par les cours, une grande partie du temps des personnels étant consacrée à cette activité.

Atout France est également un opérateur dont le budget est essentiellement assuré par des ressources propres. Le sous-indicateur « Part du partenariat dans le budget d’Atout France », initialement intégré dans l’objectif 2 a été transféré dans l’objectif 3 « Améliorer le pilotage et l’efficience dans la gestion des crédits » - indicateur 3.1 « Dynamisation des ressources externes ». Cela permet d’avoir une vision globale des levées de l’autofinancement. L’indicateur 3.1 est structuré comme suit :

« 3.1.1. Montant des cofinancements levés par les postes

3.1.2. Part des ressources propres dans les ressources des établissements d’enseignement français à l’étranger

3.1.3. Taux d’autofinancement des établissements à autonomie financière pluridisciplinaires hors personnel MAEDI

3.1.4. Part du partenariat dans le budget d’Atout France »

Dans le cadre de programmes spécifiques et de formation des agents (avec l’Institut français de Paris), des moyens ont été mobilisés pour la réalisation de véritables études de marché. Ainsi, en ciblant mieux un public concerné par leurs activités, en redéfinissant les besoins de chaque partenaire, en mettant en œuvre des nouvelles technologies de communication, en élaborant des nouvelles méthodes d’enseignements, en mettant en place de cours de langue mieux adaptés à la demande, ces opérations ont permis d’améliorer les ressources propres des établissements à autonomie financière (EAF) et donc d’être plus performants en matière d’autofinancement.

Le taux d’autofinancement (recettes issues des cours de langue, billetterie, certification) de 60 %, hors expatriés, a été atteint en 2012 et même dépassé avec un taux de 66 % en fin d’exercice 2014 (plus de 50 % si on inclut la masse salariale des expatriés dans l’équation) représentant 130 millions d’euros. La tendance retenue est un maintien du taux d’autofinancement à 67 %, soit un niveau relativement élevé compte tenu des contraintes existantes. Ce taux important s’explique bien sûr de façon mécanique par la baisse des dotations, mais aussi et surtout, par la dynamique de levée de recettes que les EAF ont su créer. Une part substantielle de l’activité des établissements du réseau (Instituts français et Alliances françaises) repose désormais sur les cours de langues. En 2014, on dénombre à ce titre 1 098 000 inscriptions et 43,7 millions d’heures de cours de français dans l’ensemble des EAF et des AF conventionnées.

NOMBRE D’INSCRIPTIONS DANS LES EAF ET AF CONVENTIONNÉES EN 2014

Zones

AF

EAF

TOTAL

Amériques et Caraïbes

404 189

12 028

416 217

Afrique du Nord et Moyen-Orient

18 592

143 928

162 520

Afrique et Océan indien

98 943

17 686

116 629

Asie et Océanie

173 448

55 148

228 596

Union européenne

44 122

67 531

111 653

Europe (hors zone UE)

30 733

31 652

62 385

TOTAL

770 027

327 973

1 098 000

Source : ministère des Affaires étrangères

Les diplômes de langue française constituent aussi une source d’autofinancement majeure pour le réseau culturel français à l’étranger, même si les tarifs sont arrêtés localement par les ambassades et peuvent être très bas, voire gratuits.

DIPLÔMÉS DELF ET DALF (TOUTES VERSIONS CONFONDUES, HORS FRANCE) ANNÉE 2014

Zones

Diplômés

Afrique

42 445

Amérique du Nord

7 957

Amérique latine

47 256

Asie

35 810

Union européenne (sauf France)

158 759

Europe (hors zone UE)

20 898

Moyen-Orient

18 062

Océanie

820

TOTAL

332 007

Source : ministère des Affaires étrangères

On peut noter qu’il existe de fortes disparités entre les Instituts français et les Instituts français de recherche à l’étranger où le taux d’autofinancement est souvent peu favorable. En effet, certains IFRE ont un taux d’autofinancement nettement inférieur à 60 %, voire très faible (Russie, Iran, Yémen). Ces établissements restent fortement dépendants de l’aide de l’État, ayant peu de recettes propres et des difficultés à nouer des partenariats financiers. Si tous les établissements deviennent tributaires de leurs recettes propres d’activités et du potentiel local de développement de partenariats et de levée de fonds, certains établissements structurellement fragiles ont pu être plus directement affectés par la baisse des moyens dévolus à leur pays sur le programme 185. Selon l’articulation choisie entre les crédits d’intervention dédiés au SCAC (bourses par exemple) et les dotations versées à l’EAF, selon le profil des établissements, les effets concrets des réductions de crédits n’ont pas eu les mêmes conséquences. Au cours des auditions, il a bien été confirmé à votre Rapporteur que les baisses affectant le réseau seraient appliquées de manière à tenir compte des potentiels d’autofinancement.

S’agissant des Alliances françaises, la Fondation à Paris estime à environ 185 millions d’euros le montant des ressources propres de ces associations. Le taux d’autofinancement atteint 85 %. En fonction du pays où elles se trouvent, du nombre d’étudiants inscrits et des charges de fonctionnement, elles connaissent des situations très hétérogènes : outre les ressources propres (recettes de cours), les possibilités de lever des fonds, qu’il s’agisse de financements européens ou de mécénat privé, sont très variables. Au total, 29 % des Alliances françaises dans le monde bénéficient de cofinancements. En outre, l’enquête réalisée par la Fondation en 2013 auprès des 813 Alliances françaises révèle que 174 d’entre elles sont hébergées à titre gracieux. Cette mise à disposition de locaux par des propriétaires privés ou des institutions locales constitue un soutien indirect qu’il convient de prendre en considération. D’après cette même enquête, 40 % de l’ensemble des Alliances françaises reçoivent des fonds provenant de donateurs privés ou des subventions publiques locales.

Dans ce contexte, deux questions se posent :

– celle des emplois car si les crédits sont faibles, des emplois sont nécessaires pour inscrire les alliances locales dans l’orbite de la stratégie d’influence française ;

– celle du pilotage du réseau, avec un renforcement de la tête de réseau qu’est la Fondation à Paris. Deux postes ont été utilement créés en 2015 à cet effet. La question de l’attribution et de la ventilation par la Fondation des subventions aux alliances locales attribuées depuis Paris doit être étudiée. Pour le moment, le projet est lancé de renforcer la politique de mécénat de la Fondation, dont c’était initialement l’objet, avec une politique de communication modernisée.

Les résultats demeurent partout moins probants s’agissant des cofinancements, qui sont très concentrés sur l’Amérique latine et l’Asie, plus précisément dans des pays émergents où l’effet de levier est important. À cet égard, un soutien au réseau et un accompagnement des personnels sont nécessaires, de même que la formation de certains agents ou le recrutement de profils spécialisés. C’est la raison pour laquelle, conformément aux recommandations de votre Rapporteur, afin de mieux répondre aux enjeux induits par la recherche de financements extrabudgétaires, des compétences spécifiques en matière de levée de fonds sont recherchées de la part des COCAC-directeurs, directeurs adjoints, attachés universitaires, attachés culturels de nos EAF, notamment dans les pays prescripteurs. Certains agents du réseau sont par ailleurs mobilisés intégralement sur cette problématique. Une task force, pilotée par la DGM, en liaison avec la Direction de l’Union européenne et la Représentation permanente auprès de l’UE, réunissant l’ensemble des services compétents, a également été créée.

En Europe, le réseau EUNIC doit être mieux exploité. Il regroupe les instituts nationaux européens chargés de l’action culturelle. Créé en 2006, EUNIC est un chef de file reconnu en matière de coopération culturelle. Ses 34 membres représentant 28 pays sont présents dans plus de 150 pays avec plus de 2000 établissements et des milliers de partenaires locaux. L’action d’EUNIC porte sur les arts, les langues, la jeunesse, l’enseignement, les sciences, le dialogue interculturel et le développement. L’Institut français de Milan a ainsi pu conduire des projets pour lequel il ne disposait pas de financements suffisants, grâce à l’association avec des partenaires du réseau italiens et allemands, pour des projets ouverts parfois à des tiers. C’est le cas du marathon du piano, ou encore du festival de littérature européenne. Le « cluster » de Milan doit être mis à profit pour ce type de projets collaboratifs.

Mais il est un élément sur lequel il convient d’insister : la baisse des crédits publics ne peut être compensée par des cofinancements que si le montant des crédits demeure satisfaisant : il ne s’agit pas de financements extérieurs intégraux mais seulement de cofinancements, en ce sens que le réseau doit pouvoir porter une part du projet. Il est primordial de garantir l’effet de levier des cofinancements, estimé à 3,2 en moyenne. Préserver les moyens dédiés au réseau est tout à fait indispensable pour ne pas casser la dynamique vertueuse en place.

En Italie, l’Institut français s’appuie sur une Fondation des mécènes, la Fondation Nuovi Mecenati, qui existe depuis 2005, et qui intervient en complément des soutiens directs de parrainage d’un évènement particulier. C’est un formidable outil dédié à la création contemporaine (arts visuels, musique, danse, cinéma…) qui met en relation des jeunes artistes des deux pays avec un réseau de villes étendu. Les jeunes Italiens peuvent ensuite participer à des projets en France, notamment dans la musique. Il y a deux appels d’offres par an, chacun donnant lieu à une trentaine de propositions dont neuf ou dix sont sélectionnées et partiellement soutenues (principe de co-financement). Les projets retenus sont soumis à une condition de réalisation concrète (production ou résidence notamment), le but étant d’assurer la capillarité sur le territoire italien. Il est important de souligner que le président honoraire français de la Fondation est l’Ambassadeur de France. De plus, la Fondation accompagne les projets en fonction de critères précis fixés par le Service de coopération et d’action culturelle et répondant à des objectifs de politique culturelle extérieure de la France. La Fondation vit grâce aux financements, d’un montant d’environ 500.000 euros par an, de six entreprises françaises et italiennes, qui y trouvent intérêt car leurs représentants sont associés à tous les projets et la relation très étroite avec l’Ambassade de France leur permet de venir au Palais Farnèse et d’y organiser des soirées. On retrouve là le rôle fondamental du Palais Farnèse dans la politique culturelle française en Italie. Ce modèle n’est évidemment pas reproductible partout.

Il existe aussi une Fondation franco-italienne, RomaEuropa, dont le travail consiste à inviter des compagnies étrangères, à organiser des rencontres avec les compagnies italiennes et à planifier les tournées de ces dernières à l’étranger. Par exemple, la Fondation organise depuis trente ans à Rome un grand festival qui présente la création artistique contemporaine, ce qui est évidemment plus difficile en Italie que la culture classique et le patrimoine, et qui attire sur environ trois mois plus de 50.000 spectateurs. La programmation est très variée (danse, théâtre, musique, cinéma…) et propose un panorama de toutes les tendances récentes de l’art contemporain, faisant cohabiter les créations et les artistes de tous les continents. La moitié du financement est fourni par l’État, l’autre moitié provient des municipalités et des régions. Alors que le paysage est très changeant en Italie (notamment du fait de la perméabilité entre les mondes culturel et politique), la Fondation représente une continuité et offre une visibilité à la France, le festival constituant un vecteur important de la présence artistique et des nouvelles technologies françaises, auxquelles un programme est spécialement dédié depuis six ans.

Par ailleurs, les postes privilégient les opérations, soit très importantes et coûteuses, car des financements sont alors faciles à lever auprès de mécènes qui recherchent une visibilité, soit les tous petits projets, qui peuvent être financés par le réseau sur ses ressources. Les manifestations de moyenne importance, qui pourraient avoir un retentissement intéressant, notamment en direction de publics jeunes, et constituer un bon vecteur d’influence, sont souvent écartées de la programmation. C’est un pan entier de la production culturelle et artistique française, en particulier dans les arts vivants, qui ne trouve plus de relai. Cette question mérite d’être étudiée.

Pour finir, une étude a été réalisée cette année concernant les financements externes devant être développés. Elle a mis en lumière les faibles marges sur la plupart des options et a identifié comme meilleure source potentielle le développement des cours en ligne. L’Institut français et l’Alliance française sont associés dans la définition du cahier des charges. Il conviendra néanmoins de veiller à ce que cela n’affecte pas les inscriptions aux cours physiques.

Les développements qui précèdent en attestent : s’il est une réforme qui aura indiscutablement permis des gains d’efficacité et des économies budgétaires, c’est la fusion des SCAC et des EAF. Avoir conféré l’autonomie financière fut la condition et une des raisons du dynamisme de la levée de fonds et de l’autofinancement. Revenir sur cet acquis serait tout simplement catastrophique. Or, le statut juridique des EAF n’est pas compatible avec la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). En effet, le régime budgétaire et financier des établissements culturels n’apparaît pas conforme aux principes d’unité et d’universalité budgétaires posés par la LOLF, en ce qui concerne notamment l’enregistrement intégral des recettes et dépenses dans le budget général et la non affectation des recettes à des dépenses. Une décision doit être prise avant la fin de l’année. Trois solutions sont juridiquement envisageables.

La première est la transformation des établissements à autonomie financière (EAF) en établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) locaux. Elle s’avère problématique pour les petits EAF et incohérente avec la fin de l’expérimentation du rattachement. Elle risquerait surtout de les priver des exemptions fiscales dont ils bénéficient du fait de leur statut diplomatique. Elle doit donc être écartée.

La deuxième solution est le recours à une procédure d’attribution de produits (fonds de concours). Elle paraît disproportionnée, compte tenu du nombre d’EAF et des montants en jeu, mais elle est surtout calamiteuse pour l’autonomie financière des établissements. C’est la procédure en place pour les fonds issus du mécénat. Or, celle-ci est unanimement décriée pour sa lourdeur et sa lenteur (plusieurs mois pour disposer des sommes !). L’étendre aux recettes de cours reviendrait à tuer la réactivité du réseau et son dynamisme, en raison du faible montant des dotations budgétaires. Il en serait fini de l’ambition d’une diplomatie culturelle et d’influence d’ampleur.

La dernière solution consiste à prolonger le système actuel dans l’attente d’une modification de la LOLF instituant une dérogation ciblée. Le ministre des Affaires étrangères et du développement international a obtenu l’an passé cette prolongation de la dérogation, mais elle vient à expiration à la fin de l’année et aucune issue ne se dégage.

Votre Rapporteur demande instamment au Gouvernement de conforter les EAF culturels dans le rôle qui leur est assigné, en optant à nouveau pour cette dernière solution. Notre diplomatie culturelle et d’influence continue aujourd’hui de répondre à une multiplicité d’objectifs, de combiner partout de nombreux vecteurs d’influence, d’entreprendre chaque jour des projets et des opérations de toute nature avec un enthousiasme des personnels qui force l’admiration. Il conviendrait de ne pas ajouter à la fonte des moyens, la destruction des outils qui permettent d’y faire face.

À l’étranger, en Europe notamment, le statut des EAF est conforté dans sa capacité financière. L’absence directe de personnalité juridique ne fait pas obstacle à la candidature aux financements offerts par les instruments financiers de l’Union européenne, y compris désormais ERASMUS+, Europe Creative et tous les autres instruments d’action extérieure de l’UE, les directions générales de l’Union européenne ayant validé l’interprétation en ce sens. L’obstacle pour un système efficace se situe donc uniquement dans notre droit interne et il serait regrettable qu’il ne soit pas levé dans les meilleures conditions possibles.

La question de la cohérence des actions conduites dans le réseau recouvre d’abord celle de la coordination des différents volets de notre diplomatie. La création d’un Établissement à autonomie financière (EAF) unique par pays et l’intégration d’une partie des activités des Services de coopération et d’action culturelle (SCAC) dans les EAF ont apporté de grands changements. Les établissements à autonomie financière à vocation pluridisciplinaire ont vu leurs missions élargies : leur périmètre couvre désormais de façon intégrée la culture, la langue et l’attractivité.

La priorité assignée à la diplomatie économique est venue compléter cet arsenal puisqu’il s’agit de coordonner l’action diplomatique et celle des entreprises, dans le but de favoriser le redressement économique, par le soutien aux entreprises françaises à l’international et par la promotion de la « destination France » pour les investisseurs étrangers. Cet axe stratégique n’est pas dotée de moyens budgétaires importants puisqu’il s’agit d’abord d’une mobilisation de l’outil diplomatique existant et de promouvoir les investissements étrangers en France. Enfin, le transfert de la compétence tourisme et l’an dernier de l’opérateur Atout France dans l’escarcelle du Ministère a achevé de lui donner la palette des outils pour promouvoir l’attractivité du territoire français. Cela a nécessité des ajustements au sein de l’administration centrale et dans les objectifs assignés aux postes, qui ont été largement présentés par votre Rapporteur dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2015.

S’il convient de se féliciter de l’extension des compétences du ministère dans le cadre d’une nouvelle diplomatie globale, votre Rapporteur ne peut que relayer les difficultés éprouvées par les postes à concilier l’ensemble des missions qui leur sont désormais confiées. Si l’on continue de diminuer les crédits, il devient nécessaire d’opérer des choix parmi tous les objectifs visés. Le Gouvernement ne détermine pas de préférences, ne fait jamais de choix, mais continue plutôt d’étendre le champ de compétences des services de coopération et d’action culturelle et des Instituts français.

Il y a de très belles réussites, comme la journée de la gastronomie, qui contribue sans conteste au rayonnement de la France. En Italie par exemple, l’opération « Goût de France » a consisté, d’une part, à organiser au Sofitel Villa Borghese pendant une semaine un dîner préparé par quatre chefs français et, d’autre part, à monter une opération de découverte des saveurs françaises, en encadrant une master class autour d’un menu franco-italien et avec la participation de 97 restaurants italiens. Une autre initiative intéressante a résidé dans l’instauration d’un dialogue entre les élèves Esabac (4) de Varèse et les concepteurs d’un jeu vidéo sur la Grande Guerre produit à Montpellier, moyen d’aborder ce thème sous un angle éducatif inattendu.

Le problème est que ces opérations sont très chronophages en termes d’organisation et exigent beaucoup de communication. C’est autant de temps qui ne peut être consacré aux champs traditionnels de l’action culturelle extérieure. En outre, ces opérations aspirent des capacités de co-financements, de mécénat, qui ne peuvent dès lors être mobilisées pour des projets conçus par le poste dans ses champs d’intervention fondamentaux comme la coopération culturelle et artistique ou la promotion du français. De plus, la réactivité est limitée lorsque les budgets sont faibles et des dépenses sont parfois engagées avec des fonds prévus pour d’autres opérations, dans l’attente de l’approbation des budgets intégrant les nouvelles manifestations.

La difficulté ne réside pas seulement dans la baisse des dotations. Des ressources complémentaires sont mobilisables et mobilisées, certes dans certaines limites et au détriment d’autres actions à financer. La difficulté supplémentaire, qui ne peut être surmontée, est la ressource humaine trop limitée. Le nombre de personnes chargées de mettre en œuvre la diplomatie culturelle et d’influence est devenu insuffisant pour assurer les missions confiées et opérer dans le même temps la recherche de financements qui est devenue indispensable tout au long de l’année. Le système s’autolimite.

Votre Rapporteur a déjà eu l’occasion de souligner que la levée des co-financements suppose d’apporter un financement. De la même façon, les programmes avec des partenaires européens doivent fonctionner de manière paritaire, ce qui n’est plus le cas de l’université franco-allemande où les financements allemands sont supérieurs aux financements français. Surtout, les recettes de cours ne peuvent rentrer que s’il y a des personnels pour assurer ces enseignements et l’offre culturelle associée.

À Milan, il faut compenser les baisses de recettes de cours liées à la crise par des apprentissages du français « sur-mesure » dans le cadre de la formation professionnelle. Mais on manque de ressources humaines pour répondre aux entreprises démarchées qui se tournent vers d’autres offres. Les entreprises demandent certains horaires, un nombre d’heures sur des périodes ramassées, un accès à la médiathèque et au cinéma, mais comment y répondre le soir par exemple avec le plafond d’emplois actuels ? Pourtant, le risque existe que les recettes de cours finissent par baisser, ce qui affecterait la solidité financière d’un Institut qui affiche aujourd’hui un taux d’autofinancement de 98 %.

Il résulte de ces constatations que l’heure est venue de hiérarchiser et d’opérer des choix. La politique étrangère est devenue une politique budgétaire, mais pas une politique pensée à hauteur des moyens conférés pour la conduire. Des conclusions politiques doivent être tirées.

Cela concerne aussi l’Institut français. Sa création n’a rien changé du point de vue des orientations stratégiques. Son offre n’est pas hiérarchisée. L’expérimentation du rattachement étant passée, le positionnement de l’Institut français doit être repensé de telle sorte que son offre soit hiérarchisée et cohérente avec les choix qu’il convient de faire pays par pays. Cela est néanmoins difficile puisque l’Institut français subit les mêmes contraintes que le réseau : à la fois, une baisse de moyens et un accroissement des demandes de la tutelle. Prenons quelques exemples à venir : la Foire du Livre de Francfort en 2017, les trop nombreuses Saisons (Corée puis Colombie pour 2016) (5), la mission engagée pour développer des ressources annexes pour laquelle un ETP a été mis à disposition depuis octobre 2015 et le grand portail de la culture extérieure que le ministre a annoncé et qui devrait consister d’abord en de l’éditorialisation de contenus existants à destination grand public... L’Institut français devra relever ces défis en 2016 avec 143 personnes.

Comme votre Rapporteur a déjà eu maintes fois l’occasion de le souligner, la diplomatie culturelle et d’influence de la France déborde très largement le seul cadre culturel. Cette partie a vocation à brosser à grands traits le tableau des actions multiples et diverses qui s’appuient sur les crédits et emplois du programme 185.

Au-delà de la perception du caractère essentiel de la culture dans l’influence de la France, le rééquilibrage entre les volets de la diplomatie globale implique un certain recentrage sur l’action culturelle extérieure. Cet accent est clairement exprimé dans le PAP annexé au projet de loi de finances pour 2016 quand est évoquée (page 117) la promotion de la culture et de la pensée françaises dans le monde :

« En 2016, ces actions seront mises en œuvre dans le cadre d’une stratégie rénovée visant à inscrire l’action culturelle extérieure, aux côtés de la diplomatie économique, au cœur de notre politique étrangère. Sa mise en œuvre mobilise tous les acteurs de notre diplomatie afin de faire converger les objectifs d’expansion économique et de rayonnement culturel. Cette stratégie culturelle et d’influence s’appuie sur l’ensemble du réseau de coopération et d’action culturelle à l’étranger (instituts et alliances), sur des partenariats renforcés et un opérateur pivot, l’Institut français, qui a vu ses compétences s’étendre, au-delà des échanges artistiques, au débat d’idées, à la promotion de la langue française et à la diffusion des savoirs ».

La singularité française, ce qui la rend aussi attractive, c’est d’abord sa culture. On rencontre partout dans notre réseau à l’étranger des personnes exceptionnelles qui se consacrent au rayonnement de la France. C’est ce système qui permet d’insuffler une vraie passion pour la culture.

La présente sous-partie vise à démontrer le foisonnement d’actions conduites par l’Institut français à Paris et les acteurs du réseau, qu’il s’agisse des Services de coopération et d’action culturelle, des Instituts français ou des Alliances françaises. Il est intéressant de souligner que l’accent va être mis, de nouveau serait-on tenté de dire, sur la compétence culturelle des conseillers de coopération et d’action culturelle et se traduire en administration centrale par la fin de la séparation entre la direction de la coopération culturelle et la direction du programme et du réseau, précisément pour que la première ait les moyens d’animer le réseau.

Cette sous-partie vise aussi à souligner l’impérieux besoin de hiérarchiser les priorités. S’étant rendu cette année en Italie, votre Rapporteur pose en filigrane la question des priorités en Europe. Comme partout ailleurs, on demande de développer les nouvelles politiques d’influence, comme le sport, la gastronomie, l’environnement, le tourisme…. Mais après des années de baisses de crédits et d’emplois qui ont particulièrement affecté le dispositif diplomatique en Europe, la coopération artistique et culturelle s’en ressent. En ce domaine, des priorités doivent être fixées et, s’il faut émettre des propositions, elles doivent concerner en premier lieu le cinéma, le livre, la création contemporaine et la modernisation des infrastructures (médiathèques, salles de cinéma etc.). L’Espagne, l’Allemagne et d’autres ont fait des choix. Il faudra en faire également.

L’Institut français à Paris est un EPIC créé par la loi relative à l’action extérieure de l’État (n°2010-873 du 27 juillet 2010). Il s’est substitué le 31 décembre 2010 à l’association Cultures France et a été pourvu d’un mandat élargi. Conformément à la loi, douze postes diplomatiques y avaient été rattachés, à titre expérimental, à partir du 1er janvier 2012. Cette expérimentation n’a pas donné de résultats concluants et il a été décidé de ne pas y donner suite. La fin de l’expérimentation a été formalisée par l’arrêté du 9 décembre 2013. Ce renoncement ne doit pas occulter l’apport essentiel de la création de l’Institut français, que l’on doit grandement à son équipe dirigeante et ses personnels, et doit au contraire enclencher une dynamique tendant à le conforter dans le paysage institutionnel.

L’Institut français est en effet parvenu à apporter une visibilité et une unité à l’action culturelle extérieure de la France, grâce à une marque bien identifiée. Il a su trouver sa place dans le paysage français et a réussi à s’ériger en interface avec l’ensemble des acteurs de la politique culturelle, en France et à l’étranger, étape d’autant plus indispensable qu’à Paris même les compétences sont éclatées. Une trentaine de conventions de partenariats a été signée avec les principaux opérateurs culturels français et européens.

Ensuite, un certain nombre d’actions de l’Institut français ont produit – et c’était un véritable besoin – un mouvement plus général de recentrage des activités en direction d’un appui plus direct au réseau. Des programmes communs en faveur du réseau ont été mis en place, comme le demandait la loi, par exemple en vue de la formation des agents.

Des priorités sectorielles ont été traduites en outils. L’Institut français a inscrit le numérique au cœur de ses moyens d’intervention et a développé de nombreuses plateformes thématiques qui sont autant de ressources essentielles pour la promotion à l’international de l’offre culturelle française : IF cinéma, plate-forme de téléchargement de films, IF MAPPS en matière d’arts visuel, IF VERSO, une plate-forme sur le livre numérique, CULTURETHEQUE, bibliothèque grand public numérique en français, IF DATA qui recense les acteurs des arts visuels. L’adhésion de l’Institut français aux outils modernes de communication a été immédiate ; les demandes de formation ont été nombreuses et les moyens modernes mis à disposition, notamment les plateformes, sont très utilisés.

L’année 2014 avait été une année de transition qui avait permis d’œuvrer à l’élaboration du futur contrat d’objectifs et de moyens de l’Institut français, dans le cadre d’un dialogue quadripartite entre l’Institut, le ministère des Affaires étrangères et du Développement international, le ministère de la Culture et de la Communication et le Secrétariat d’Etat chargé du Budget. Afin de donner un cadre à l’opérateur pour l’année en cours, une lettre de mission signée en juin 2014 avait été adressée à son président. Il y était rappelé que l’Institut français est chargé de porter une ambition renouvelée pour notre diplomatie culturelle, en répondant notamment à trois enjeux stratégiques, qui s’inscrivent dans le cadre des missions fixées par le décret :

– promouvoir une image innovante de la France en contribuant à une meilleure connaissance à l’international des créateurs français ;

– contribuer à la promotion de la langue, des savoirs et de la pensée française dans le monde ;

– participer à la stratégie d’influence de la France en attirant des talents et des projets innovants, en exportant ses produits culturels et son expertise, en assurant la présence française lors d’événements de renommée internationale.

2015 aura été une année très difficile pour l’Institut français et Votre Rapporteur souhaite manifester son soutien au personnel de l’Institut qui a bien évidemment été très affecté par la décision de non rattachement des Instituts français à l’établissement public parisien, après plusieurs années d’investissements dans ce projet très structurant de la création de l’établissement. Le passage éclair d’un nouveau Président (quatre mois seulement !) manifestement peu adapté au poste n’a pas arrangé les choses, d’autant qu’une nouvelle convention d’entreprise, entrée en vigueur le 1er septembre dernier, était négociée depuis quatre ans, ce qui a généré de nombreuses tensions.

Il convient de trouver les moyens de redonner des perspectives à un opérateur qui est un formidable outil et dont l’apport ne saurait être remis en cause. Par la qualité professionnelle de ses personnels dans les différents champs d’intervention et la mise au point d’instruments notamment numériques à la disposition du réseau, l’Institut français a su s’installer dans le paysage, à la fois à Paris grâce aux liens établis avec tous les acteurs de l’action culturelle, et à l’étranger comme interlocuteur privilégié du réseau. Il est un gage de professionnalisme et d’efficacité. Mais la question posée est désormais celle de la nature des actions qu’il finance.

L’élaboration du nouveau Contrat d’objectifs et de moyens (COM) est nécessairement dépendante des moyens budgétaires. Les axes stratégiques prioritaires de ce COM sont encore en discussion, alors qu’ils auraient dû être arrêtés il y a plus d’un an. En confortant l’Institut dans son rôle d’opérateur culturel central au service de l’ensemble du réseau et en lui fixant des priorités stratégiques resserrées, le prochain COM devra permettre à l’IF de pérenniser ses actions et d’inscrire sa mission dans une vision de long terme. Pour votre Rapporteur, compte tenu des contraintes budgétaires, il conviendrait :

– de privilégier l’accompagnement des acteurs du réseau ;

– de poursuivre le déploiement du numérique, qui permet aussi une réduction des coûts et rend de grands services au réseau ;

– de maintenir l’effort de professionnalisation du réseau – réseau qui en a grandement besoin, eu égard au nombre des contractuels, à leur recrutement et à la durée courte de leurs contrats – et de mieux associer l’Institut français au recrutement ;

– de travailler sur la question des publics, c’est-à-dire la recherche des nouveaux publics, notamment dans les nouvelles disciplines (musiques urbaines, jeux vidéo, réseaux numériques…), l’identification des publics potentiels, l’identification des publics effectifs des actions conduites et leur maintien dans la sphère d’influence, ceci étant absolument indispensable s’agissant des artistes accueillis en résidence, des personnalités d’avenir sélectionnées pour des programmes spécifiques, des bénéficiaires de bourses ou de stages… ;

– de fixer des priorités géographiques et sectorielles – on en revient à la question des choix, douloureux mais nécessaires ! – qui constituent des lignes d’actions claires. L’Afrique, particulièrement le Maghreb, et les pays émergents, devraient être clairement identifiés. L’avenir de l’Institut français passe par le croisement des priorités géographiques et sectorielles. Tout se décide maintenant.

Enfin, il faut arrêter d’empiler les nouvelles demandes. Quant aux Saisons, elles sont très compliquées à organiser, les financements ne sont pas toujours faciles à rassembler comme le démontre la saison avec la Corée du Sud et il n’est vraiment pas raisonnable d’en programmer plus d’une par an.

Les actions de coopération culturelle sur les crédits du programme 185 ont pour objectifs prioritaires de valoriser la culture et la langue française et de contribuer à la promotion de la diversité culturelle. Notre action culturelle se doit par ailleurs de conquérir de nouveaux publics, mais aussi de préserver nos atouts et de conserver l’avantage de notre pays sur ses concurrents.

Cependant, cette action de coopération culturelle doit se développer dans un cadre budgétaire contraint. C’est pourquoi l’État se recentre, depuis plusieurs années, sur ses fonctions de pilotage et de soutien aux artisans du rayonnement culturel de la France. Parallèlement, notre réseau culturel à l’étranger se déploie vers de nouveaux espaces (géographiques, audiovisuels mais aussi numériques) afin d’élargir son audience, de renforcer l’image de l’expertise française dans les métiers de la culture, de développer la contribution de notre pays aux débats d’idées et de promouvoir les industries culturelles créatives françaises. L’ensemble du réseau et l’Institut français sont fortement incités à mettre en œuvre toutes ces actions, en développant les partenariats financiers.

Les actions de coopération culturelle menées depuis trois ans par le réseau de coopération et d’action culturelle à l’étranger et par l’Institut français ont pour objectifs principaux de :

– développer les échanges culturels et artistiques de haut niveau et de diffuser une image d’excellence dans tous les domaines des arts visuels, des arts de la scène et des industries culturelles (livre, musique, cinéma, jeux vidéo …) ;

– apporter son soutien à la diffusion de la production audiovisuelle française, en lien avec les opérateurs comme France Médias Monde (c’est-à-dire RFI, France 24 et Monte Carlo Doualiya), TV5 Monde ou Unifrance ;

– accompagner la coopération entre professionnels culturels (musées, artistes, architectes et designers…), notamment dans le cadre des sessions d’accueil des cultures étrangères en France, et de participer à la formation des jeunes professionnels étrangers ;

– favoriser la participation française au débat mondial des idées (diversité culturelle et place du numérique, laïcité et actions de la société civile, développement durable, migrations...) ;

– renforcer la coopération avec les acteurs culturels nationaux et répondre aux demandes d’expertise des pays partenaires ;

– promouvoir la langue française et son enseignement à l’étranger, action à laquelle votre Rapporteur consacre un développement particulier.

Les postes soutiennent quelques 50 000 manifestations annuelles, un chiffre sans comparaison avec nos partenaires, dans les domaines les plus variés : musique, cinéma, littérature, théâtre, arts plastiques, photographie, architecture et patrimoine, conférence et débats d’idées etc. Toutes ne sont évidemment pas d’une même ampleur, mais toutes concourent au rayonnement de la France. L’Institut français joue aussi, bien évidemment, un rôle actif dans le financement des activités culturelles : promotion des échanges et des coopérations artistiques (6), diffusion non commerciale du patrimoine cinématographique, promotion du livre et des savoirs, promotion de la langue française, programme Afrique et Caraïbes en Créations, Fonds des cinémas du monde, grandes manifestations à l’étranger, programmes de résidences, projets communs avec des collectivités territoriales françaises….

Parmi toutes ces manifestations, certaines occupent une place particulière : il s’agit des Festivals, des Saisons et des Années, regroupés sous l’appellation commune de « Saisons culturelles » qui, depuis plus de 25 ans constituent une véritable marque de fabrique de l’ingénierie culturelle française et de l’action culturelle extérieure de l’État. L’Institut français à Paris, opérateur de l’État pour l’action culturelle extérieure, coordonne les échanges entre la France et les pays partenaires sous trois formats différents : les Années (de 8 à 12 mois), les Saisons (de 3 à 6 mois), les Festivals (de 1 à 3 mois).

PROGRAMMATION DES SAISONS (EN COURS ET PROCHAINES)

Les saisons en cours 

Rendez-vous - Festival de la France en Croatie (mai-septembre 2015). Son lancement a été marqué par le vernissage de l’exposition Rodin au Pavillon des arts de Zagreb (5 mai 2015), permettant de promouvoir l’excellence française en matière de création mais aussi en termes d’ingénierie culturelle (deux années de coopération entre les deux musées). Le festival vise tous les secteurs de la diplomatie d’influence avec des événements artistiques à forte visibilité, des débats d’idées (symposium régional sur le climat), une semaine économique, des rencontres scientifiques. En s’appuyant sur les ressources de notre coopération décentralisée, il consacre également un important volet de sa programmation à la gastronomie et au tourisme. Les actions à destination de la jeunesse et la couverture de l’ensemble du territoire garantissent le renouvellement des publics.

Le budget total du festival (hors coûts locaux) est de 500.000 €. Conscientes des contraintes budgétaires qui pèsent sur leurs budgets respectifs, les deux parties ont validé les principes généraux d’ingénierie et se sont accordées sur la création de deux fonds communs, l’un dédié à la communication d’un montant minimum de 150.000 €, abondé à parité, l’autre d’un montant minimum de 100.000 € pour l’aide à projets. Par ailleurs, notre Ambassade à Zagreb a mis en place un club d’affaires dynamique, réunissant les filiales des entreprises françaises et a levé 250.000 € de mécénat.

Année croisée France-Corée (septembre 2015-décembre 2016). Le lancement de l’Année croisée a été sera marqué, en septembre, par un ensemble de manifestations qui assureront une grande visibilité à la culture coréenne en France : un spectacle de danse et de musique traditionnelles au Théâtre national de Chaillot qui a accueilli accueillera l’événement de lancement de l’opération ; l’illumination de la Tour Effel aux couleurs de la Corée au cours de la même soirée ; des expositions au Musée des Arts Décoratifs (notamment sur les métiers d’art et le design coréens) et à Guimet (retraçant 5 siècles de peinture coréenne), mais aussi à Marseille, Saint-Etienne et Lille ; un « focus Corée » au Festival d’Automne.

Cette année croisée s’annonce complexe, en raison notamment de la durée de l’exercice (16 mois au total), d’une dissymétrie des moyens financiers mobilisés (budget de 3,5 M€ constitué de 900.000€ de fonds publics et de 2,6M€ de mécénat – à lever - pour la France ; financement 100 % public de 11 M€ pour la Corée en France) et de la difficulté à lever des fonds privés.

Les Saisons culturelles à venir

« Programme culturel franco-émirien - Dialogue avec le Louvre Abou Dabi » (décembre 2015 à février 2017). Six événements sont prévus, dont deux très importants (Groupe F, spécialisé dans la conception de spectacles pyrotechniques, en ouverture et le théâtre équestre de Bartabas en clôture). Le budget de l’opération est estimé à 3M€, à financer à parité par les parties émirienne et française (entièrement par du mécénat pour la part française).

Festival de l’Équateur en France (2016). L’Équateur envisage des manifestations se déroulant de février à novembre 2016. L’événement de lancement serait, au Quai Branly, l’inauguration d’une exposition sur le chamanisme. La contribution française est concentrée sur l’apport de conseils techniques et la communication institutionnelle.

Saison croisée France-Colombie (2017). La saison croisée fait l’objet d’un engagement présidentiel (déclaration conjointe du 26 janvier 2015, à l’occasion de la visite du Président Santos). Le commissariat général de la Saison est d’ores et déjà en place. L’établissement d’un budget prévisionnel de l’opération est en cours.

Année croisée France-Israël (2018). Cet événement doit marquer le 70ème anniversaire de la création de l’État d’Israël. Il a été décidé en novembre 2013, lors de la visite d’État du Président de la République, et inscrit dans la déclaration conjointe signée à cette occasion. Le dispositif d’organisation (commissariat, comité de mécènes) devrait être mis en place début 2016.

Année de la France au Qatar (2020). Ce projet a fait l’objet de contacts informels au niveau de notre Ambassade à Doha. L’organisation d’une saison serait l’occasion de valoriser l’expertise et le savoir-faire français en matière d’ingénierie culturelle, dont le Qatar se montre très demandeur, dans une logique de marché.

Enfin, la diplomatie culturelle comporte un volet intellectuel, celui des idées. Il s’agit de la promotion des échanges, du soutien aux divers moyens d’information et d’expression, mais aussi de ce que véhiculent et doivent véhiculer en termes de valeurs les actions et les acteurs français. L’influence de la France est indissociablement liée à celle de son histoire, de ses valeurs, de son droit, de la place du débat d’idées et de l’esprit critique. Par exemple, l’attrait des lycées français s’explique dans certaines régions du monde par le modèle de tolérance qu’il matérialise. La question de la laïcité est évidemment très importante. Les valeurs portées par les médias français à l’étranger, la manière de traiter l’information, sont essentiels. Plus généralement, en ces temps où l’obscurantisme et le fanatisme progressent, la bataille des idées est un impératif de premier plan et la diplomatie culturelle en est une arme puissante. Par l’organisation de débats, mais aussi par l’appui à l’éducation et à la diffusion de la culture et des arts, le réseau culturel joue un rôle crucial.

En Italie, la coopération artistique repose fondamentalement sur l’accord culturel bilatéral du 4 novembre 1949, texte fondateur de la coopération culturelle (littéraire, artistique, universitaire et scientifique) franco-italienne. Il a par la suite été complété par divers accords et échanges de lettres, en particulier la Déclaration conjointe du 9 décembre 2011 du Ministère de la Culture et de la Communication et de son homologue italien concernant le secteur musical (consolidation institutionnelle du projet bilatéral avec un partenariat triennal mettant en place des programmations musicales partagées et des projets pédagogiques croisés entre les conservatoires français et italiens). Une nouvelle déclaration conjointe entre le Ministère de la Culture et de la Communication et le Ministère de l’Université, de l’Instruction et de la Recherche - Haute Formation Musicale sera signée pour 2015-2017.

Dans le domaine du spectacle vivant, outre les festivals thématiques précédemment organisés par l’Institut français d’Italie, l’échange interculturel se manifeste par le soutien à la création contemporaine et aux projets multidisciplinaires portés par des réseaux de professionnels qui ont particulièrement à cœur de mettre en valeur le lien riche et vivace qu’entretiennent les deux pays. C’est cette singularité qui a été reconnue durant l’été 2013 par l’attribution du label « Relais spécialisé spectacle vivant » à l’Institut français d’Italie par la convention signée entre l’Institut français et les ministères français et italien des Affaires étrangères.

La collaboration depuis plusieurs années entre les conservatoires de musique français et italiens continue à représenter un exemple d’innovation dans les échanges entre les deux pays. Depuis 2011, plusieurs centaines d’étudiants et leurs professeurs ont travaillé pour réaliser des concerts, des master classes, des rencontres, des colloques. En 2015, on peut notamment indiquer parmi les dix évènements de haut niveau, embrassant plusieurs périodes historiques et divers styles musicaux : la réalisation du projet de musique baroque des Vèpres de Rubino (Lo Stellario della Beata Vergine Maria di Bonaventura) par six institutions de haute formation artistique musicale italiennes et françaises et joué aux Invalides à Paris, à la Cathédrale de Strasbourg et à la Cathédrale de Palerme en Sicile, lieu où a été créée l’oeuvre au XVIIème siècle. On peut également citer les projets d’Espace acoustique dédiés aux rencontres entre la musique, les nouvelles technologies et la recherche dans le secteur de la musique électronique. Enfin 2015 voit la création d’un projet européen pour la coopération bilatérale qui favorise la formation de commissions mixtes franco-italiennes d’évaluation des examens concluant les études entreprises auprès des conservatoires en Italie et en France. Dans un premier temps, ce projet impliquera six conservatoires en Italie et trois conservatoires en France.

Après une série des thématiques spécifiques (Suona francese, FranceDanse, Face à Face), la nouvelle Saison artistique de l’Institut français d’Italie, « la Francia in Scena », ouvre un nouveau cycle qui croise l’ensemble des disciplines artistiques : musique et en particulier les musiques actuelles, danse et cirque contemporains, théâtre et performance, art visuel et art contemporain. L’objet de cette programmation pluridisciplinaire sur tout le territoire italien est de rassembler une large palette de propositions artistiques reflétant la vitalité et l’innovation créative française contemporaine. Il s’agit de se concentrer sur les disciplines artistiques et culturelles qui encouragent la multidisciplinarité, l’innovation et la technologie, l’ouverture sur les réseaux artistiques européens, le jeune public, le public étudiant et universitaire.

Votre Rapporteur a pu voir l’excellente communication réservée à cette grande Saison qui rassemble donc, dans un souci d’efficacité y compris budgétaire, une palette d’actions dans tous domaines des arts. Pour l’ensemble des disciplines artistiques, le programme national est construit en interaction avec les Instituts en région, à la fois pour répondre aux spécificités du terrain et pour renforcer et animer nos partenariats au niveau local et améliorer notre visibilité régionale. De plus, chaque Institut français en région propose des actions qui complètent les actions nationales (invitation des artistes des divers festivals nationaux, résidences d’artistes, concerts, expositions...), permettant la mise en valeur de la richesse de la scène artistique française contemporaine, en partenariat avec les grandes institutions culturelles italiennes locales.

Indépendamment de Francia in Scena, plusieurs évènements récurrents permettent d’inscrire pleinement la France dans le paysage artistique italien. Votre Rapporteur en retiendra deux qui permettent de faire le point sur deux axes forts de la coopération artistique : le cinéma et le livre.

Le Festival du cinéma « Rendez-vous - Appuntamento con il nuovo cinema francese » dont la cinquième édition s’est tenue en avril de cette année, est organisé en coopération avec UniFrance et avec la participation de la Villa Médicis. Cet événement itinérant dans 6 régions italiennes, du sud au nord de la péninsule, a pour objectif de contribuer à promouvoir les films français récents à travers des projections et des avant-premières italiennes en version originale sous-titrée en italien. La manifestation va à la rencontre du public italien en lui proposant les dernières originalités de la création cinématographique française, à travers une programmation qui mélange tous les genres, de la production grand public à la plus sophistiquée, des succès du box-office aux films indépendants. Le festival permet également de présenter aux professionnels italiens une palette variée de titres français, pour la plupart inédits en Italie, marché encore prioritaire pour nos exportations. Rendez-Vous sert ainsi de vitrine de lancement pour les films français qui ont déjà un distributeur.

Cette année une quinzaine de talents (7) sont venus à Rome, Naples, Bologne, Palerme, Turin et Lecce, afin d’accompagner une quarantaine de projections, essentiellement des longs métrages de fiction, des documentaires et des films d’animation. Deux master classes, animées par des personnalités du cinéma italien, ont également permis à de nombreux étudiants italiens (en collaboration avec l’école Gian Maria Volonté, les universités Roma Tre, La Sapienza et La Luiss) de dialoguer avec Robert Guédigian à Rome et à Turin où il fut accueilli par le Président de la Mostra de Venise, Alberto Barbera. Une seconde master class a été organisée autour de Mathieu Amalric à la Villa Médicis.

« Rendez-vous » a rencontré un vif succès, tant sur le plan du public accueilli (7 500 spectateurs au total), que de l’estime exprimée par la profession (distributeurs, producteurs et critiques), ou de sa large couverture médiatique : interviews en télévision et en radio, nombreux articles et recensions dans la presse écrite nationale et locale (mensuelle, hebdomadaire et quotidienne) ainsi que sur internet. Cette édition a reçu le soutien de nombreux partenaires institutionnels, privés et médiatiques, consolidés et enrichis cette année encore. Le festival ambitionne de rayonner en Italie : initié en 2011 avec deux villes (Rome et Palerme), rejointes par Milan et Turin (et son Musée National du Cinéma) en 2012, puis Bologne (et sa Cinémathèque) en 2013. Il s’est installé également à Naples en 2014 avec un éclairage sur le jeune réalisateur Guillaume Brac, et il fut cette année accueilli à Lecce au sein de la 16ème édition du Festival Européen de Lecce.

Alors qu’en 2014, le cinéma italien a connu une baisse de 6,13 % du nombre de billets vendus par rapport à 2013 (91 465 599), le cinéma français et européen se porte très bien. Le cinéma européen a connu d’excellents résultats en 2014 avec l’augmentation de sa part de marché en Italie de 10,78 % à 17,24 %. La France (38 films sortis en salle en 2014) et le Royaume-Uni (29 films sortis en salle en 2014) restent les troisième et quatrième pays en nombre de films sortis en Italie l’an passé, derrière les États-Unis (141 films sortis en 2014) et l’Italie (157 films sortis en 2014). Pour l’année 2014, la France a connu une hausse de sa part de marché avec 5,94 % des entrées en 2014 (5,21 % des encaissements). Cette augmentation est imputable principalement à deux films présents dans le Top 20 de l’année, Belle et Sébastien (1 174 235 d’entrées) et Lucy (1 131 681 d’entrées). Mais La Belle et la Bête (797 938 entrées) et Le Sel de la Terre (253 032 entrées) se sont aussi distingués. En juillet, plus de vingt films français étaient déjà sortis au cinéma depuis le début de l’année 2015.

La France et l’Italie coopèrent aujourd’hui sur la partie finale du processus cinématographique, à savoir la distribution internationale. Notre proximité géographique et culturelle permet toutefois de chercher à favoriser une collaboration en amont. C’est pour cette raison que sous le parrainage des deux Ministères de la Culture, le Conseil National du Cinéma français et son homologue italien ont signé le mardi 21 mai 2013 à Cannes un accord bilatéral créant un fonds d’aide au développement de longs métrages, visant à développer des projets ambitieux en termes de coproduction artistique, avec une enveloppe annuelle de 500 000 euros. En avril 2015, 8 projets de films franco-italiens sur 27 présentés ont été aidés à hauteur de 250 000 euros.

Sur le plan événementiel, la promotion du livre et des auteurs français passe essentiellement par l’organisation de deux événements culturels réguliers, dont l’un consacré à la fiction : le Festival de la fiction française (l’autre est consacré aux sciences humaines) qui a lieu à l’automne. Le festival de la fiction française propose, pendant presque un mois à travers toute l’Italie, une quarantaine de rencontres avec des auteurs dans des librairies, des bibliothèques, dans les Instituts et les Alliances, à la Villa Medicis ou encore au Centre Saint-Louis. Les écrivains sélectionnés sont des auteurs de langue française dont un titre vient d’être publié en langue italienne. C’est donc un festival lié à l’actualité éditoriale, organisé en collaboration étroite avec les éditeurs italiens, qui a vocation non seulement à promouvoir la littérature française et francophone contemporaine, mais aussi à soutenir la chaîne du livre et l’industrie éditoriale en l’aidant à mieux faire connaître, diffuser et vendre les auteurs de langue française. À cette fin, un partenariat a été institué avec les bibliothèques de la ville de Rome et des festivals italiens (BookCity à Milan, Lucca Comics à Lucques, Bilbolbul à Bologne, Pisa Book Festival à Pise, le festival itinérant Ottobre africano).

En 2014, ce seront 23 auteurs qui se sont rendus en Italie, dans 14 villes, pour un total de 50 rencontres. Le budget du festival est d’environ 30 000 euros, 50 000 euros si on inclut les coproductions. En 2014, il a attiré 2 500 spectateurs, dans toute l’Italie. D’abord dédié au roman, le festival s’ouvre depuis 2013 aux autres modes d’expression de la fiction : la littérature pour la jeunesse, l’illustration, la bande-dessinée. En 2015, l’Institut français d’Italie a souhaité s’associer à la célébration du cinquantenaire de l’Ecole des loisirs, prestigieuse maison d’édition de jeunesse française, et ce, en collaboration avec sa filiale italienne Babalibri pour certains des auteurs invités.

Le festival intervient en complément d’une politique très dynamique du livre avec un programme d’aide à la publication (aide à l’acquisition de droits avec prise en charge de 50 % du coût et aide à la traduction avec prise en charge de 30 % du coût). L’avis du poste est également sollicité dans le cas des demandes formulées par les éditeurs auprès du Centre national du livre dans le cadre de ses dispositifs d’aide à l’extraduction (du français vers l’italien) et de ses bourses de séjour destinées aux traducteurs professionnels italiens. Les relations publiques s’établissent principalement dans les grands rendez-vous du livre en France (salon du livre de Paris, salon du livre et de la presse jeunesse en Seine-Saint-Denis) et en Italie (salon du livre de Turin, foire du livre de jeunesse de Bologne, Pisa Book Festival, foire de Rome Più libri più liberi, festival littéraire romain organisé par la Casa delle letterature, etc.). Au vu de l’importance et de la qualité de ces festivals en Italie, il s’agit de conserver et développer les relations de coopération avec ceux-ci.

La traduction, on ne le répètera jamais assez, est un vecteur essentiel de la diplomatie du livre. Le français est la deuxième langue traduite en Italie, certes très loin derrière l’anglais, avec en 2013 13,8 % des titres traduits, 8,2 % des exemplaires imprimés et pour un tirage moyen de 3 280 exemplaires. L’Italie est, en 2014, au 10ème rang des 50 premiers marchés d’exportation (17,3 millions euros, soit 2,5 % des parts de marché). Selon le rapport 2014 du Syndicat national de l’édition français, 835 titres français ont été cédés à des éditeurs italiens, contre 1 385 en 2013. Cette diminution est très largement due à la diminution des secteurs BD (qui représentent toutefois 235 titres sur 835, soit 28 %) et jeunesse, et sans doute à la contraction du marché italien. L’italien est également bien placé pour les achats de droits par les éditeurs français. Les traducteurs étant beaucoup moins bien rémunérés en Italie, l’aide de l’Institut français permet de choisir de meilleurs traducteurs. La traduction concerne également le sous-titrage des films, pour lequel l’Institut s’appuie sur les professeurs de français des universités.

Votre Rapporteur tient aussi à souligner l’importance des médiathèques dans la politique culturelle extérieure française. C’est un atout inestimable pour l’Institut français de Milan dont la salle de cinéma conditionne la réussite de sa politique d’offre de cours. Un travail d’expertise, réalisé durant l’hiver 2014 par un expert désigné et pris en charge par l’Institut français, a permis de constater la carence des moyens financiers (crédits d’acquisition insuffisants) et humains (un seul bibliothécaire dans la plupart des cas) dévolus aux médiathèques en Italie. La collaboration de l’Institut français de Rome avec les médiathèques est orientée vers le conseil en matière de modernisation (connaissances des publics notamment), de réaménagement (Florence), ainsi que vers le développement de la base bibliographique commune accessible sur internet, à laquelle Palerme s’est joint cette année (après Milan et Naples les années précédentes, ainsi que Florence).

En vue de favoriser encore davantage la mise en réseau, un développement de la plateforme de ressources numériques Culturethèque est en cours. 1.115 usagers sont aujourd’hui inscrits à Culturethèque, lancé « a minima » en 2013. Il s’agit aujourd’hui de spécialiser la plateforme générique mise en place par l’Institut français en fonction des activités et des ressources développées dans le réseau italien, et de mettre en place, parmi les médiathécaires du réseau, une chaîne éditoriale et décisionnaire à cette fin (éditorialisation de la plateforme ; intégration de cet outil dans les missions des bibliothécaires ; enrichissement du catalogue de ressources numériques littéraires, médias et audiovisuelles ; valorisation de Culturethèque auprès des usagers). Partout dans le réseau, un retard considérable a été pris sur le numérique dans les médiathèques alors que ce sont de vrais leviers d’influence. Mais encore une fois tous ces projets nécessitent des ressources humaines et on ne peut demander à une médiathèque d’être rentable. Comme l’a résumé un des interlocuteurs en Italie : une médiathèque rentable, c’est une librairie….

Le réseau français d’enseignement à l’étranger piloté par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger est présent dans 135 pays, avec 494 établissements scolaires français homologués.

Sur ces 494 établissements, l’AEFE gère directement 74 d’entre eux dits « établissements en gestion directe » (EGD) et a passé des conventions avec 156 autres établissements dits « conventionnés ». Les premiers sont des services déconcentrés de l’Agence, les seconds sont des entités juridiquement distinctes de l’Agence avec lesquelles celle-ci entretient des liens contractuels. Ces 230 établissements (en gestion directe et conventionnés) constituent le réseau proprement dit de l’AEFE. À la demande de l’État, l’AEFE a renforcé son rôle en matière d’animation du réseau homologué en signant des accords de partenariat avec des établissements autofinancés qui ne sont pas en gestion directe ou sous convention, soit 264 établissements.

Au total, les 494 établissements homologués par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche comptabilisent plus de 336.000 élèves scolarisés, dont environ un tiers est de nationalité française. Les effectifs s’affichent toujours en hausse, de 2 % cette année. Cette dynamique est portée par un accroissement de la demande et une qualité unanimement reconnue qui se traduit notamment par d’excellents résultats au baccalauréat (près de 15 000 bacheliers en 2015, avec un taux record de 96 % de réussite et 72 % de mentions). Parmi ces 494 établissements homologués, 87 sont gérés par la Mission laïque française.

En 2015, l’AEFE rémunère 10.914 emplois temps plein dans son réseau (dont 1,5 % au siège, 10,5 % d’expatriés, 49,1 % de résidents et 38,9 % de recrutés locaux des établissements en gestion directe. L’Agence organise la formation continue de ces personnels. Elle a aussi développé ces trois dernières années un vrai dialogue de gestion avec ses établissements.

La réflexion sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger a fixé les orientations sur le développement maîtrisé du réseau d’enseignement français à l’étranger qui seront intégrées au prochain contrat d’objectifs et de moyens de l’AEFE. Un plan d’actions a été arrêté. L’AEFE a adopté le 12 juin 2014 son plan d’orientations stratégiques 2014-2016 et une réunion interministérielle sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger a eu lieu le 20 novembre 2014 sous la présidence du ministre des Affaires étrangères. Ses conclusions sont structurantes pour la rédaction du Contrat d’objectifs et de moyens de l’Agence. Il est intéressant de noter aussi que cette réunion a manifesté la volonté d’intégrer la Mission laïque française dans la réflexion sur l’avenir du réseau.

Si l’objectif recherché est d’inscrire les établissements d’enseignement français dans la stratégie globale de la présence et de l’influence française, tout en préservant la qualité qui fait la force de notre réseau et son attractivité, il faut conforter ses deux grandes priorités et une mission essentielle (8) que sont la scolarisation des enfants français pour accompagner la diplomatie économique et le rayonnement de la langue et de la culture françaises, en répondant et en suscitant la demande des étrangers de scolarisation de leurs enfants dans un établissement français, particulièrement dans les pays néo-émergents La contrainte de coût conduit à promouvoir des homologations à coût réduit. C’est par exemple le cas en Colombie où une école française s’est ouverte à Medellin (l’AEFE prendra à sa charge seulement l’aide à l’homologation et la mise à disposition d’une expertise pédagogique).

Le ministre a défini quatre axes de travail :

1) Redéployer nos moyens vers les régions prioritaires de notre diplomatie et vers les zones de croissance des communautés françaises ;

2) Explorer les nouvelles voies de développement de notre réseau ;

3) Structurer l’offre d’enseignement français complémentaire au réseau homologué ;

4) Renforcer nos liens avec les anciens élèves du réseau afin de développer l’attractivité de la France.

À l’issue de la réunion interministérielle du 20 novembre 2014 précitée, un relevé de conclusions conjoint aux deux ministères a été adopté afin de renforcer le pilotage de notre réseau. Ce texte prévoit notamment l’instauration d’une conférence interministérielle sur les moyens et les ressources humaines qui permettra d’anticiper l’allocation annuelle des ressources humaines par réseau (homologué et complémentaire) et par programmes de mobilité, y compris sous forme de redéploiements. Le premier exercice a eu lieu le 1er juillet 2015.

Le détachement est un outil précieux, y compris pour la Mission laïque française qui ne pourrait pas gérer beaucoup d’établissements si elle ne bénéficiait pas de cet apport du ministère de l’Éducation nationale. On pourrait avoir davantage d’établissements avec un pourcentage de détachés adéquat. On peut souligner par exemple que 7 % des personnels des établissements de la Mission laïque française au Liban sont des détachés alors que ce taux est presque de 100 % en Europe et dans certains pays d’Afrique. Il y a donc des marges de redéploiement pour aboutir à un meilleur équilibre. Mais le système est assez rigide car ces postes ont été étiquetés « résidents ». Pourtant, la décision a été prise d’ajuster progressivement le plafond d’emploi pour transférer des personnels des zones les mieux dotées, en particulier l’Europe, vers les régions géographiques prioritaires : les grands pays émergents d’Asie, le Golfe et l’espace francophone.

Par ailleurs, l’accent a été mis aussi depuis 2012 sur la diversification de l’enseignement en français. Il s’agit de faciliter l’intégration d’une offre éducative en français au sein des systèmes éducatifs nationaux : développement de filières bilingues francophones, de sections européennes et internationales et promotion du label FrancEducation. Suite aux recommandations du Plan d’actions, les conditions d’attribution du label FrancÉducation ont été modifiées, à partir de la campagne 2015, par le décret 2014-1483 du 10 décembre 2014. L’objectif est d’assouplir les critères d’obtention, sans déroger à la qualité des enseignements. Les principales conditions d’attribution sont aujourd’hui les suivantes : 20 % minimum d’enseignement en français, présence d’au moins un professeur francophone titulaire d’un diplôme de niveau master ou équivalent, présentation des élèves aux certifications de langue française DELF-DALF ou certification de français professionnel, existence d’un environnement francophone et mise en place d’un plan de formation continue. 35 nouveaux établissements ont été labellisés lors de la commission du 29 juin 2015, ce qui porte à 91 le nombre d’établissements labellisés. L’objectif, à l’horizon 2015, d’un réseau comptant une centaine d’établissements est atteint.

S’agissant de la coopération linguistique, les crédits du programme 185 ne peuvent donner une vision compète de l’action de la France en faveur de la francophonie, dès lors que le programme 209 regroupe les contributions aux organisations multilatérales (dont l’OIF) et leurs opérateurs, et qu’y sont inscrits les crédits de l’action culturelle menée dans les pays éligibles à l’aide publique au développement (langue française et promotion de la diversité culturelle et linguistique). Plus de 19 millions d’euros sont inscrits sur le programme 185 auxquels s’ajoute 1,5 millions pour le département « langue française » de l’Institut français. Les actions conduites par le réseau, l’Institut français, mais aussi les partenaires (TV5 Monde, la Fédération internationale des professeurs de français, le Centre international d’études pédagogiques notamment) sont multiples, mais peuvent être regroupées autour de plusieurs axes :

– L’organisation ou la participation à des manifestations ou programmes francophones : « Semaine de la Francophonie », ainsi que des centaines de manifestations francophones (concours, évènements autour de l’art de vivre à la française, manifestations dédiées à la création littéraire et au débat d’idées) ;

– Les programmes de mobilité destinés à des francophones : SafirLab (accompagnement d’une trentaine de jeunes acteurs du développement de la rive Sud de la Méditerranée dans la mise en œuvre de projets inscrits dans le champ des médias ou de la société civile), CultureLab (environ 170 participants de 18 à 30 ans impliqués dans le domaine de la culture et issus d’une quarantaine de pays) et Labcitoyen (quelques 110 jeunes de 18 à 25 ans investis dans leur pays dans la défense des droits de l’homme et ayant une bonne maîtrise du français) ;

– La formation au français en Europe qui vise principalement les hauts fonctionnaires des pays de l’UE et des Etats voisins de l’UE qui ne sont ni pas membres ni associés ou observateurs de l’OIF, les hauts fonctionnaires des institutions européennes et les formateurs du réseau des établissements culturels en charge de ces différents publics. En outre, le ministère organise régulièrement, en collaboration avec l’ENA, des séminaires de préparation à la présidence du Conseil de l’UE ;

– La formation des professeurs de français : les SCAC jouent un rôle structurant dans la formation continue des enseignants, la mise en place de dispositifs de formation constituant la part congrue de leur programmation annuelle. Ils coopèrent étroitement avec les associations de professeurs de français, qui sont regroupées au sein de la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF), partenaire recevant une subvention annuelle du MAEDI. La Fondation Alliance française de Paris mène également un plan de professionnalisation des recrutés locaux de son réseau, avec l’aide d’une subvention du ministère des Affaires étrangères. Il convient de mentionner également le programme d’utilisation renforcée des technologies de l’information et de la communication au service de l’enseignement (TICE) pour l’apprentissage de la langue française hors pays francophones, piloté par l’Institut français.

Certains s’étonnent souvent que la part de l’action du réseau culturel à l’étranger consacrée à la diffusion de la langue française soit aussi importante alors que les outils d’influence sont nombreux. Ils en déduisent souvent que la diplomatie française est obsolète dans son approche, ce en quoi ils ont totalement tort. La langue est un levier puissant d’influence, surtout pour la France qui dans l’imaginaire est associée à son patrimoine culturel, sa littérature, la singularité de sa pensée et sa langue. La bataille d’influence se jour d’abord sur la force de l’imaginaire, ce qui fait que l’on se tourne vers un pays plutôt qu’un autre. La langue, la culture et Paris, c’est le triptyque qui sert d’appât et contribue à la diffusion des politiques d’influence.

Comme le soulignait à juste titre le rapport de la Cour des Comptes, rédigé pour le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, sur le réseau culturel de la France à l’étrange : « une des clés de la présence de la langue française est son statut dans le système scolaire ou universitaire local, pour peu qu’il soit efficace » (9). Trois grands types d’actions doivent être promus à cet égard :

– l’assistance à la consolidation des systèmes éducatifs des pays où le français est langue totale ou partielle d’enseignement, par la formation des enseignants et par l’accompagnement de programmes de perfectionnement ou de francisation ;

– le développement de l’enseignement bilingue au travers de sections internationales ou de filières francophones d’excellence, particulièrement dans les pays où le français jouit d’un statut particulier ;

– le développement de l’offre de cours de langue française dans le système éducatif local.

Votre Rapporteur a longuement développé dans son rapport de l’an passé la manière dont au Maroc ces trois leviers sont activés dans le système éducatif local. Il est intéressant de s’appuyer sur l’exemple de l’Italie pour démontrer ce qui peut être fait dans un pays européen pour maintenir une influence, c’est-à-dire sur un continent où la France se désengage en termes de présence diplomatique et culturelle. De son déplacement, votre Rapporteur retient plusieurs enseignements.

Tout d’abord, en 2014, dans les écoles italiennes, 1.897.969 élèves étudiaient le français, du primaire au lycée. Ces chiffres sont considérables si l’on tient compte du fait qu’en 2008 une loi a introduit le principe de l’anglais obligatoire pour tous et a conduit à la suppression d’une deuxième langue vivante dans beaucoup d’établissements (la réforme Gelmini a consisté à introduire des lycées linguistiques et à ne maintenir que l’anglais et les langues anciennes obligatoires dans les autres lycées). La spécificité de l’Italie repose en effet sur l’autonomie financière et pédagogique des lycées. Le français conserve largement sa première place dans le choix de la LV2 (68 % des élèves pour le choisissent au collège et 27 % au lycée). Malgré un contexte de crise, 41 000 certifications ont été délivrées en 2014 ; l’Italie restant ainsi à la deuxième place mondiale.

Néanmoins, au collège, la baisse du nombre d’apprenants de français est légère mais régulière, à raison d’environ 1 % par an et cela au bénéfice exclusif de l’espagnol qui passe de 16 % en 2008 à 22 % en 2013. L’espagnol est choisi pour les raisons suivantes : l’afflux de jeunes diplômés de langue espagnole, non titulaires, dans les collèges ; des professeurs jeunes, une image très positive auprès des élèves (langue de la danse, de la fête, de «Violetta», l’héroïne télévisuelle du moment) et l’image d’une langue facile, très proche de l’italien, qui garantit la réussite des élèves, argument percutant pour les familles.

Au lycée, le français LV2 a subsisté dans la filière économique et sociale du lycée sciences humaines, mais surtout dans la filière tourisme et la filière marketing des instituts techniques (366 650 élèves), ainsi que dans la filière hôtellerie des instituts professionnels. Dans ce cadre, le français est considéré comme un atout essentiel à l’employabilité. Ces filières sont de plus en plus demandées par les futurs lycéens. Le français a évidemment également subsisté dans les lycées linguistiques, également très prisés.

Dans le même temps, a été signé l’accord Esabac (24 février 2009) qui connaît un succès unique dans l’histoire des doubles diplômes de fin d’études secondaires. Les nouveaux lycées linguistiques plébiscitent cette formule, en cohérence avec leur propre histoire de lycées à parcours expérimental, mais aussi les lycées scientifiques et les lycées classiques les plus prestigieux d’Italie. Les Instituts techniques italiens ont également ouvert des sections Esabac dans leur filière marketing et tourisme.

Ainsi, à la rentrée 2014, 279 lycées au total proposaient cet enseignement bilingue d’excellence. La demande étant très forte, l’hypothèse de progression des lycées Esabac était de 50 supplémentaires à la rentrée 2015. À ce jour, il y a 108 nouvelles adhésions enregistrées, soit 287 lycées proposant cette filière : succès colossal. Ce sont autant d’élèves, en plus des 12 000 actuels qui sortiront de du lycée en étant quasi-bilingues français / italien. Un Esabac technologique est également en train d’être créé.

Ajoutons que le label FrancEducation vient d’être délivré pour la première fois à une école primaire italienne à la rentrée 2014 (École du Sacré Cœur à Rome). Le développement du label en Italie est un défi du fait du « tout anglais » à l’école (tous les moyens en formation linguistique des maîtres se centrent sur la langue anglaise à ce jour). Par ailleurs, l’École de Vintimille est un cas unique d’école française sur le territoire italien, totalement bilingue, comptant 12 heures d’enseignement en français et 12h d’enseignement en italien. Les programmes sont ceux du Ministère français de l’éducation nationale et la gestion administrative de l’école est assurée par l’académie de Nice.

La place du français est en recul en Italie comme partout en Europe, mais on ne peut pas dire que l’attrait pour le français diminue. Très clairement, deux orientations stratégiques sont nécessaires pour notre diplomatie. Il est particulièrement regrettable que le français soit délaissé dans les régions frontalières et que l’anglais s’installe comme la langue des affaires entre les entrepreneurs français et italiens (certains ajouteront dans un anglais médiocre, le niveau moyen d’anglais étant faible dans les deux pays). À l’université, le français s’effondre : ce n’est plus que la quatrième ou cinquième langue étudiée. Il est par exemple troublant, alors que la France finance les travaux de reconstruction de la ville de L’Aquila suite au violent séisme de 2009, que le département de français de l’université de la ville ait fermé.

La première orientation consiste à relancer l’offensive à l’échelle de l’Union européenne pour qu’une deuxième langue étrangère soit obligatoire au cours de l’intégralité du secondaire. La pente ne pourra pas être remontée si le français est parlé par une proportion plus réduite encore de la population. Les difficultés budgétaires en Italie expliquent la restriction de l’offre de langues, mais le tout-anglais n’est pas l’avenir de l’Europe ; l’apprentissage de deux langues vivantes étrangères est un préalable à la diversité culturelle qui caractérise l’Europe. Cela supposera de la part de la France de s’assurer qu’il existe un vivier de professeurs formés (cf. infra), y compris à l’université.

La seconde orientation est de poursuivre les efforts pour modifier l’image du français et en faire une langue de la réussite, complémentaire à l’anglais. Le dispositif Esabac est dans ce cadre un outil précieux. Il ne faut pas décevoir les attentes placées par les familles qui ont fait le choix d’inscrire leurs enfants dans cette filière qui leur ouvre l’espace économique francophone et l’aire culturelle et artistique de la France. Il conviendra notamment de veiller à l’excellence pédagogique et à la réussite de la mobilité que ce programme permet, sachant que 191 élèves Esabac avaient candidaté cette année à la plateforme admission post-bac.

À cet égard, le ministère de l’Éducation italien a recours à l’expertise méthodologique et disciplinaire Esabac du secteur éducatif et linguistique de l’Institut français qui met les compétences professionnelles des attachés de coopération pour le français et de professeurs bénéficiant de l’échange « Jules Verne » (programme d’échanges de professeurs accepté sans réciprocité avec l’Italie) au service de l’excellence de l’enseignement dans la filière.

Au vu de l’augmentation prévue du nombre de sections Esabac dès la rentrée 2015, le service éducatif et linguistique de l’Ambassade a offert une voie complémentaire à sa coopération en organisant en 2014 et en 2015 une opération de formation de formateurs italiens Esabac, appuyée par le fonds bilingue de l’Institut français. Il a également créé une plate-forme numérique originale, dans la mesure où celle-ci approfondit les compétences langagières des professeurs en matière d’enseignement de l’histoire. Ce dispositif de formation de formateurs a permis de former 40 formateurs, un par académie en histoire et un par académie en littérature. Une suggestion intéressante a été formulée au cours du déplacement de votre Rapporteur en Italie : le développement d’une offre d’enseignement en français en histoire de l’art et patrimoine.

Il va de soi que les actions programmées par l’Institut français et destinées aux élèves Esabac participent de l’attractivité de cette filière et doivent être poursuivies, d’autant qu’elles ont un impact au-delà de ce public.

L’Institut français poursuit le développement du site VIZAVI Italie, portail-clé de l’enseignement français et bilingue en Italie. Ce site propose aux classes bilingues des projets pilotes tels « le concours de la fiction historique », « le festival du cinéma VO », « la liste Goncourt, le choix de l’Italie ». Ce dernier projet, organisé de septembre 2015 à mars 2016 avec la coopération éducative est conçu par l’Institut français d’Italie et réalisé en association avec l’Académie Goncourt. Pour la troisième année consécutive, 60 lycéens italiens des sections bilingues Esabac, originaires de toute la péninsule, sont invités à choisir leur œuvre préférée parmi les 15 livres en français de la première sélection du Prix Goncourt français. Le prix est décerné à Rome, en présence de membres illustres de l’Académie Goncourt (en 2014 étaient ainsi accueillis Paule Constant, Pierre Assouline et Bernard Pivot). Sa remise est couplée avec un événement littéraire romain à dimension nationale (le salon du livre romain Più libri più liberi, le festival littéraire Libri come, etc.), ainsi qu’avec l’attribution du prix Strega (équivalent du prix Goncourt en Italie). Cette initiative, centrée sur la critique littéraire, offre un support pédagogique original aux classes Esabac. Il contribue par ailleurs à promouvoir la littérature contemporaine de langue française en Italie.

Dans les autres filières, la concurrence très vive qui existe avec l’espagnol incite à prouver que la maîtrise du français est une langue utile, comme le souligne l’attractivité des filières Esabac. Des actions de promotion régulières dans les établissements, de présentation des perspectives d’études en France et de maintien de contacts réguliers avec les proviseurs, souvent francophones, doivent être conduites. La campagne de promotion orchestrée par l’Institut français à la rentrée de septembre 2015 apparaît efficace et la qualité de nos attachés de coopération pour le français, qui rayonnent sur tout le territoire, est largement reconnue. La formation des professeurs italiens au français pourrait être accrue également, en adaptant le dispositif actuel du Service de coopération et d’action culturelle de formation des conseillers pédagogiques Esabac et en élargissant le programme des assistants de langue française prévu par l’accord culturel de 1949 (115 pour l’année scolaire 2014-2015).

Le maintien du français dans les filières économiques et certaines filières professionnelles est à la fois très encourageant et très cohérent avec le développement de formations au français spécialisé par nos Instituts et Alliances. La défense du français comme langue de travail est ainsi une action complémentaire à amplifier. Des opérations d’envergure ont eu lieu à Milan, à Turin et à Rome en présence de plusieurs ambassadeurs du monde francophone. L’objectif est de fournir un espace de parole aux entreprises, aux salariés et plus globalement aux partenaires économiques, afin de débattre et de témoigner de la valeur économique et interculturelle de la langue française et de l’intérêt stratégique du bi- pluri-linguisme dans les affaires.

C’est depuis Paris qu’une action résolue doit être engagée auprès de nos grands partenaires européens. Les ministres français des Affaires étrangères, de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur doivent continuer d’insister auprès du Ministère italien de l’Instruction (MIUR) sur la nécessité de mieux tenir compte du français pour des raisons pratiques et économiques : pouvoir comprendre et communiquer, c’est s’ouvrir au marché de l’emploi francophone et bilatéral.

De manière complémentaire, l’Institut français a lancé, à la rentrée 2013, des projets dans les écoles primaires de cinq régions : Lombardie - Ligurie - Piemont - Vallée d’Aoste – Sicile, avant de les étendre. Cela vise à soutenir l’éducation plurilingue et la citoyenneté européenne, mais aussi à favoriser le choix du français au collège face à l’espagnol. Une attention particulière doit être accordée aux régions frontalières. Il en est ainsi du nord de l’Italie, où la connaissance passive du français se perd. La possibilité de capter les chaines de télévision nationales françaises, comme c’était le cas il y a quelques années encore, doit être réétudiée.

Enfin, comme toujours en matière de promotion de la diversité linguistique, la France doit s’interroger sur la manière dont elle organise la réciprocité. Le dispositif Esabac est moins performant en France et, de manière générale, l’enseignement de l’italien est très largement perfectible…

La stratégie en matière d’attractivité de notre enseignement supérieur repose sur trois orientations : 1) le développement des mobilités encadrées ; 2) la priorité aux filières scientifiques, économiques, de gestion, de droit et d’ingénieurs, aux niveaux master et doctorat ; 3) une augmentation de la proportion des ressortissants de pays émergents.

La France a accueilli plus de 289 924 étudiants étrangers en 2012 et elle est remontée au troisième rang des pays d’accueil l’an dernier. Le nombre de ceux-ci a été ainsi multiplié par deux en dix ans. Selon le Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en 2013-2014, la France a accueilli 295 084 étudiants étrangers parmi lesquels 217 926 (73,8 %) sont inscrits à l’université. Les étudiants étrangers représentent 12,1 % du total des étudiants et 41,4 % du total des doctorants. Ils représentent près de 40 % de la mobilité entrante. La France accueille 4 fois plus d’étudiants internationaux qu’elle n’en envoie à l’étranger.

Conformément aux orientations fixées, 47,9 % des étudiants étaient en master et 13,9 % en doctorat. La part de l’Amérique latine et de l’Asie se renforce, mais la hausse des effectifs d’étudiants chinois est moins forte que celle des étudiants marocains. Le Maroc est ainsi le premier pays d’origine des étudiants étrangers suivi par la Chine, l’Algérie, la Tunisie et l’Italie. Le faible coût des études en France produit des effets contrastés sur l’attractivité de notre pays : il est clairement un avantage pour les étudiants italiens, dont le nombre est en très forte augmentation, alors qu’il rebute certaines élites étrangères.

L’EPIC Campus France a été créé par la loi relative à l’action extérieure de l’État du 27 juillet 2010. Il est placé sous la tutelle conjointe du ministre des Affaires étrangères et du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Il a notamment pour objectifs la promotion à l’international du système d’enseignement supérieur et de formation professionnelle français (soutenue par 235 Espaces Campus France dans 119 pays), la valorisation du réseau des anciens étudiants et des chercheurs étrangers ayant poursuivi des études en France et l’accueil des étudiants et chercheurs étrangers. À l’étranger, les Espaces Campus France assurent les missions que leur confient les services de coopération et d’action culturelle et relaient celles de Campus France telles que définies dans les conventions annuelles signées entre chaque poste et l’opérateur. C’est aussi le poste qui est à l’initiative de la création d’un Espace ou d’une antenne, étant entendu que le projet doit respecter la grille de labellisation prévue par l’opérateur Campus France et être approuvé par le ministère.

Déployés dans les principaux pays d’origine de la mobilité étudiante entrante en France, les espaces Campus France à procédure CEF sont au nombre de 33, dans les pays suivants : Algérie, Argentine, Bénin, Brésil, Burkina Faso, Cameroun, Chili, Chine, Colombie, Congo, Corée du Sud, Côte d’Ivoire, États-Unis, Gabon, Guinée, Inde, Indonésie, Iran, Japon, Liban, Madagascar, Mali, Maroc, Maurice, Mexique, Pérou, Russie, Sénégal, Taiwan, Tunisie, Turquie, Union des Comores et Vietnam. La procédure concerne 78 implantations d’espaces ou d’antennes Campus France. Au lieu de 42 % en 2006, les Espaces CEF couvrent près de 85 % des demandes de visa long séjour pour études. La procédure génère une recette de l’ordre de 12 millions d’euros pour 134 000 dossiers. En 2015, 246 établissements d’enseignement supérieur ont adhéré au dispositif CEF contre 82 en 2006.

Il faut souligner que la politique d’attractivité est aussi portée par la politique migratoire. Le projet de loi relatif au droit des étrangers, en cours d’examen, devrait apporter des innovations en termes de droit de séjour : carte pluriannuelle pour les étudiants, création d’un « passeport talents » aux conditions attractives pour les étrangers qualifiés etc. Enfin, dans le domaine des visas, les délais de délivrance ont été raccourcis.

Campus France, qui a opéré une montée en puissance remarquable et dont la qualité des équipes est unanimement reconnue, a achevé la période de transition issue de la fusion des opérateurs et a refondé son organisation autour des priorités qui ont été dégagées, en particulier l’accueil des étudiants étrangers et leur suivi. La convention d’objectifs et de moyens de Campus France a fixé des orientations tout à fait bienvenues, visant à améliorer l’accueil et l’hébergement des étudiants, notamment des boursiers. Outre la création d’une direction de l’Accueil et de la vie étudiante, ces objectifs se sont traduits en actions concrètes dès 2014 :

– mise en place d’un système d’information partagé avec le CNOUS visant à faciliter l’accueil dans les résidences universitaires des étudiants boursiers gérés par Campus France : l’outil a été mis en place et sert aussi à gérer les dossiers des étudiants tout au long de leur séjour, y compris pour les flux financiers. La rapidité de réponse, la qualité de l’accueil, la fiabilité des informations échangées avec le CNOUS sont ainsi en progrès notable ;

– aide à la constitution de guichets uniques d’accueil des étudiants étrangers en France par les établissements en partenariat avec les préfectures et l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Ces guichets sont désormais au nombre de 24. De son côté, Campus France informe les étudiants sur son site et dans le cadre de la procédure CEF ;

– développement d’une offre adéquate de services d’accueil et d’information (du type « hot line », dispositif d’accueil à l’aéroport, etc.), promotion des outils en ligne facilitant l’arrivée et les démarches des étudiants.

Une évaluation externe des bourses du gouvernement français a été engagée. Un appel d’offres est en cours de publication en vue de sélectionner le prestataire en charge de cette évaluation. Les travaux d’évaluation se dérouleront sur 12 mois à compter d’octobre 2015. Le comité de pilotage de l’évaluation, qui regroupera les principales parties prenantes de la politique des bourses, est en cours de constitution. Cette évaluation répond à un double objectif : d’une part, de redevabilité vis-à-vis des citoyens, dans la mesure où elle portera un regard rétrospectif sur les actions réalisées, et d’autre part, d’apprentissage, dans un but prospectif. L’évaluation s’attachera à apporter des éléments de réflexion destinés à contribuer à la définition d’un cadre stratégique pertinent, clair et lisible, en accord avec les enjeux actuels de la coopération scientifique et universitaire. Elle permettra ainsi de repenser le dispositif des bourses en vue d’améliorer son efficacité, et, à moyen terme, d’accroître l’attractivité et l’influence de la France.

Par ailleurs, la fabrication d’un outil de mise en réseau des personnes ayant étudié en France (alumni) a été érigée au rang de priorité. Cette mission a été confiée, l’an passé, à Campus France et figure parmi les objectifs du contrat d’objectifs et de moyens de l’opérateur. Un comité d’orientation a été instauré et il associe les usagers, les associations d’anciens élèves, les établissements et le réseau français, mais aussi les entreprises. Le cahier des charges a été élaboré, en lien avec les établissements d’enseignement supérieur et les entreprises, et dix pays expérimentateurs ont été choisis : Allemagne, Brésil, Colombie, Gabon, Japon, Jordanie, Koweït, Philippines, Turquie, Vietnam. France Alumni (10) a été lancé fin 2014. Il a été déployé dans près de 20 pays et compte environ 15 000 inscrits. Ce réseau sera développé par l’ensemble du réseau diplomatique d’ici 2017.

Le projet est techniquement articulé autour d’une plateforme centrale, administrée et alimentée par Campus France, et des sites locaux et autonomes, animés par les ambassades participant au réseau. La plateforme permet de disposer d’un annuaire des anciens étudiants étrangers en France et d’un dispositif d’une plateforme d’échanges et d’informations. Elle offre aux alumni divers services interactifs : offres de formations, de bourses et d’emplois ; information culturelle en France et à l’étranger ; groupes thématiques de discussions, etc. Elle constitue également un instrument au service des établissements d’enseignement supérieur, des entreprises et de tous les partenaires désireux de contribuer à son animation et à son rayonnement.

En 2015, deux autres nouveaux outils sont mis en ligne. L’application « Immersion France » permet aux étrangers de retrouver toute l’offre française de séjours linguistiques et culturels et d’être mis en relation avec un centre de langues. Enfin, la plateforme Études en France aide les étudiants étrangers d’une trentaine de pays de postuler plus facilement auprès d’un établissement français.

Enfin, Campus France développe un rôle de fédérateur précieux : fédérateur des établissements, des collectivités territoriales, des centres de recherche, en vue d’organiser la mobilité. Il a ainsi obtenu des fonds européens pour des projets de mobilité. Cette capacité à aller chercher les fonds européens est une excellente nouvelle. C’est une vraie vision intégrée qui émerge et relie à la fois la coopération scientifique et universitaire et la politique de mobilité… À cet égard, il convient de réfléchir à la possibilité de conforter le rôle d’opérateur public commun de Campus France pour l’internationalisation de l’enseignement supérieur français, y compris s’agissant des mobilités sortantes.

Il s’agit d’un sujet assez ancien, mais qui devrait s’accélérer avec la mission en cours à l’Inspection générale du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Deux options sont à l’étude : l’intégration de l’agence Erasmus + pour la partie enseignement supérieur à Campus France ou le regroupement avec le CNOUS. Votre Rapporteur tient à prendre position sur ce sujet pour affirmer à quel point il serait absurde et totalement à rebours de la réforme de 2010 de reconstituer une composante internationale au sein du CNOUS. L’intégration dans Campus France des activités internationales du CNOUS a été très difficile à mettre en œuvre. Campus France est parfaitement capable de gérer ces bourses sortantes et c’est le sens de l’histoire impulsée par la loi relative à l’action extérieure de l’État que d’en faire l’opérateur des mobilités internationales.

L’une des missions du ministère des Affaires étrangères est de contribuer à conforter le rayonnement de la France sur la scène scientifique internationale. Dans ce domaine, il définit sa stratégie en étroite collaboration avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), les institutions de recherche (universités, grandes écoles, organismes de recherche) et le secteur privé. Ces différents partenaires, qui cofinancent la plupart des programmes de coopération scientifique, participent à la définition et à la mise en œuvre de la diplomatie scientifique et de la stratégie d’attractivité du territoire français.

Le ministère s’appuie notamment sur le réseau des conseillers et des attachés pour la science et la technologie auprès des ambassades. Ce réseau s’assure de l’adéquation entre les demandes exprimées par les partenaires et l’offre française. Cet intérêt se traduit notamment par une implication financière des partenaires étrangers à un niveau suffisant (généralement 50 %) dans nos programmes bilatéraux de coopération. Le réseau est également chargé de stimuler l’émergence de projets innovants permettant d’accroître le rayonnement scientifique de la France à l’étranger. Par ailleurs, un volet attractivité est financé par le programme 185 : il s’agit des programmes de mobilité scientifique et de formation à la recherche (53 Partenariats Hubert Curien - PHC) cofinancés à parité avec les pays partenaires (7,6 millions d’euros en 2012) qui génèrent environ 4800 mobilités (entrantes et sortantes) par an. Les PHC visent à développer les échanges scientifiques et technologiques entre les laboratoires des communautés scientifiques des deux pays autour de la formation de doctorants en cotutelle de thèse.

Notre diplomatie scientifique a fait l’objet en 2013 d’une tentative de définition (11), avec une déclinaison par régions : formation des élites du Sud, contribution aux coopérations régionales en Afrique, appui à la constitution d’un espace euro-méditerranéen et naturellement coopération avec les pays de l’OCDE et les pays émergents. L’objectif est de resserrer les liens entre les acteurs de la science française et le réseau diplomatique, en vue de fortifier la place de nos chercheurs et de nos entreprises dans la compétition internationale, d’associer plus étroitement le monde scientifique aux enjeux de politique étrangère et d’intéresser les chercheurs aux besoins du développement, par la formation et la valorisation des capacités scientifiques des pays du Sud.

Toute la difficulté dans la mise en œuvre de ce document d’orientation est liée au fait que le ministère dispose de crédits très limités, encore en diminution, et que les institutions scientifiques et de recherche ont leur dynamisme propre. Le pilotage au niveau local par les équipes culturelles ne semble pas nécessairement aller de soi. Ces équipes sont généralement sous-dotées pour pouvoir jouer un rôle d’intermédiation. Pour autant, ces difficultés devront être levées, car la coopération scientifique est un levier d’influence, dans les pays où la langue française est peu présente comme dans ceux où au contraire l’on peut s’appuyer sur la composante culturelle et historique de la tradition de la France pour développer une image moderne et technologique. Une telle évolution ne peut se produire sans stratégie interministérielle.

Alors qu’ils sont essentiels dans notre dispositif de coopération scientifique et participent de l’influence de la France dans le monde des sciences et de la francophonie scientifique, les Instituts français de recherche à l’étranger (IFRE) sont chaque année un peu plus en difficulté. Outre la réduction du nombre d’expatriés, entre 2012 et 2014, l’aide du MAEDI en dotations de fonctionnement a connu une baisse de 7,9 %. Le budget consolidé (dotations des tutelles, masses salariales et cofinancements) atteignait 25 millions d’euros (56% MAEDI, 33% CNRS et 11% sur fonds propres liés essentiellement à la performance des Instituts dans les appels à projets de recherche).

Pour faire face à ces contraintes budgétaires, le MAEDI et le CNRS encouragent fortement les Instituts à développer les financements sur appels à projets (notamment Agence Nationale de la Recherche et Espace Européen de la Recherche), en leur nom propre ou en association avec des organisations scientifiques françaises et européennes. La mise en place de cofinancements et de projets de recherche conjoints avec les écoles françaises à l’étranger, les universités françaises (dans le cadre de Groupements d’intérêts scientifiques, GIS) et étrangères (dans le cadre de Groupement de recherche international, GDRI) sont également prospectés.

La cartographie des Instituts français de recherche à l’étranger a été simplifiée : réduction de 27 à 23 établissements, fermeture de 4 antennes régionales et gain de 15 emplois (ETP). Votre Rapporteur souhaite appeler à la plus grande vigilance. S’il faut, sans doute, améliorer leur performance et surtout assurer une meilleure visibilité de leurs travaux, les fermetures, y compris par regroupement, doivent être évitées au maximum. Et arrivé à un certain étiage, couper c’est fermer ! Les crédits programmés pour 2015 et 2016 sont, respectivement, d’un montant de 5,25 millions d’euros et de 5,05 millions d’euros, soit une baisse de 3,8 %. C’est assez désespérant…

Le coût d’une baisse de crédits et a fortiori d’une fermeture est, d’abord, la perte de la capacité de la France à produire une expertise sur un pays, car rien ne remplace la connaissance de terrain. La recherche depuis la France par l’intermédiaire de contacts à l’étranger ne produit pas les mêmes résultats. L’existence des instituts et de leurs antennes garantit la production d’une connaissance mobilisable et doit permettre de disposer d’un certain nombre de chercheurs formés. Là est le défi. Les fermetures ne répondront pas au vrai problème qui est celui du manque de chercheurs de terrain sur certains pays. Le cas de la Libye est à cet égard exemplaire. La disparition d’une antenne dans un pays émergent comme l’Éthiopie est une perspective inquiétante. La France est le seul pays à avoir ce réseau ; il faut qu’elle optimise cet outil.

La diplomatie scientifique française doit aussi permettre de mettre en valeur l’excellence des acteurs français de la recherche et de l’innovation. Votre Rapporteur est revenu assez dubitatif de son déplacement en Italie à ce sujet.

En premier lieu, le déplacement a été l’occasion de visiter l’Exposition universelle de Milan. Sans porter un jugement sur l’opportunité de cette exposition et sur son coût, votre Rapporteur pensait que l’objet de ces expositions était, pour chaque pays, de proposer une vitrine de ses savoir-faire et donc de renforcer son rayonnement scientifique et technique. Le thème de l’exposition, « Nourrir la planète », était de ce point de vue une opportunité pour la France, pays dans lequel le secteur agricole représente 2 millions d’emplois, où l’agro-alimentaire est le premier secteur économique et qui dispose d’institutions de recherche et d’entreprises ultra-performantes.

Or, même s’il faut accorder à notre pavillon, qui aura coûté 22 millions d’euros, d’être un des seuls à avoir suivi le thème et à ne pas avoir fait une campagne de promotion touristique, il est assez déroutant. C’est une réussite architecturale incontestable, qui conforte l’image d’une discipline d’excellence française, mais l’intérieur du pavillon consiste en une accumulation d’objets hétéroclites du sol au plafond, sorte d’installation conceptuelle sur le thème de la diversité des modes alimentaires dans le temps et l’espace. De l’esthétique sans doute, mais peu de didacticiels, peu de place pour les savoir-faire français, pas de technologies, aucune dimension économique, et à la sortie un sac avec une baguette de pain ou un croissant. Quelle image de la France s’agissait-il de véhiculer ?

En second lieu, le pôle universitaire et scientifique de l’Ambassade à Rome fait l’objet d’une rationalisation qui se traduit par le rapatriement de ses compétences dans le giron de l’attaché universitaire, ce qui constitue d’ailleurs encore une extension des compétences du Service de coopération et d’action culturelle.

Le problème est que ce rapatriement se traduit par la suppression sèche du poste d’attaché scientifique, alors qu’il existe en Italie un programme innovation, le seul existant avec celui aux États-Unis. Ce programme vise à attirer des jeunes chercheurs Italiens en France dans une approche de diplomatie économique. Le budget est faible (5.847 euros sur les 15.040 euros dévolus à la coopération scientifique en Italie), mais les co-financements sont élevés (effet de levier de trois) pour couvrir notamment une vingtaine de bourses de doctorants italiens inscrits en double-diplômes, un programme de mobilité de jeunes chercheurs de quelques semaines à quelques mois et surtout des voyages d’accroche des innovateurs italiens. Concrètement, l’attaché repérait des petites entreprises de croissance italiennes et associait les gros incubateurs nationaux (ou régionaux) publics et privés. Le Royaume-Uni, la Suisse et de grandes entreprises comme Microsoft conduisent aussi ce type de programmes mais la France détient la première position et il serait vraiment regrettable que ce programme souffre de la rationalisation engagée.

Car cette rationalisation révèle un problème de pilotage de la diplomatie scientifique qui dans des pays comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni relèvent de la diplomatie économique et se caractérise par l’octroi de subventions à des partenaires ce qu’un Institut ne peut pas faire (il peut seulement rémunérer en qualité de prestataires de services). Il manque une vision globale.

Depuis avril 2014, les compétences du ministère des Affaires étrangères, désormais ministère des Affaires étrangères et du Développement international, ont été étendues au commerce extérieur, à la promotion du tourisme et à l’attractivité du territoire. Cela a engendré un changement de périmètre du programme 185 qui intègre désormais la subvention à notre agence de développement touristique « Atout France », transférée du programme 134 vers le programme 185. Cela a aussi donné lieu à une réorganisation au sein de l’administration centrale qui devrait s’achever en 2016 avec notamment la transformation du pôle Tourisme en véritable sous-direction à la Direction générale de la mondialisation.

Atout France, agence de développement touristique de la France, a été créé par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques qui œuvrait à la structuration de l’offre touristique auprès des collectivités locales, et des opérateurs privés et de la Maison de la France, l’agence de promotion touristique de la France qui était un groupement d’intérêt économique. Atout France compte 384 collaborateurs en France et à l’étranger et 33 bureaux dans 30 pays.

Le GIE a pour mission d’appuyer le développement du secteur touristique en mettant en commun les moyens auparavant éclatés entre la connaissance du secteur, l’ingénierie de l’offre et la promotion internationale de cette offre. La première valeur ajoutée de cet opérateur est de coordonner l’ensemble des actions des partenaires qui contribuent à la promotion du tourisme, qu’il s’agisse des collectivités territoriales, des hôteliers, des voyagistes etc. Atout France utilise notamment les fonds publics accordés par l’État pour mobiliser d’autres partenaires, démultipliant ainsi la masse financière consacrée à cette politique. Cet effet de levier doit être recherché, afin d’accroître l’efficience de l’action de l’État dans le secteur du tourisme. Il convient de souligner que ses ressources propres excèdent le montant de sa dotation : elles s’élèveraient ainsi à près de 33 millions d’euros, en légère baisse. Le GIE compte plus de 1200 adhérents, dont 850 entreprises.

La France, bien que première destination mondiale pour les touristes étrangers, a vu ses parts de marché dans le tourisme international reculer. Elle a perdu depuis 2002 son rang de leader européen en matière de recettes issues des visiteurs étrangers (2ème place européenne et 3ème place mondiale, après les États-Unis et l’Espagne). Pour retrouver la première place dans ce secteur économique clé en termes d’emploi, d’investissements, de balance des paiements et de recettes fiscales, le plan « Destination France 2020 » a synthétisé les plans d’action pour parvenir à cet objectif.

L’offre touristique française a besoin d’être modernisée et mieux commercialisée. L’opérateur français doit pouvoir accompagner ses partenaires dans la conduite de leurs projets, sur le plan de l’ingénierie et de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage, apporter une assistance à l’export du savoir-faire des opérateurs du tourisme français et aussi accorder une attention particulière à la promotion de projets structurants et innovants pour le maillage de notre territoire en équipements touristiques.

Atout France est un acteur important, qui peut gagner en efficacité. Un audit est en cours qui devrait le faire évoluer en tenant compte naturellement de ses liens étroits avec les collectivités territoriales françaises. Le rapatriement de la compétence tourisme dans le giron du ministère des Affaires étrangères permet déjà de démultiplier l’action du GIP en lui permettant de couvrir 70 pays à partir de ses 32 bureaux grâce au relai des ambassades, mobilisées par le ministre. Au total, 3000 actions de promotion de la destination France ont ainsi été menées dans 70 pays en 2014. Par ailleurs, le nom de domaine France.fr a été transféré à Atout France pour construire un site exclusivement consacré au tourisme en France.

Il convient toutefois d’apporter quelques nuances alors que le discours général porte l’ambition d’accueillir 100 millions de visiteurs par an à partir de 2020. Une France devenue un pays à vocation essentiellement touristique, avec une valorisation de ses terroirs, de sa gastronomie, de son patrimoine, pour une clientèle devenue majoritairement chinoise, indienne et russe rappelle le roman d’un auteur français lauréat du prix Goncourt… D’abord, tous les pays ne sont pas des marchés pour le tourisme, la demande en forte croissance provenant surtout des grands pays émergents (56 % des visas attribués en 2014 l’ont été à des Chinois). Ensuite, il y a une limite d’acceptabilité en France-même et il faut se départir de la vision purement financière attachée au tourisme. Pour caricaturer, les Français ne veulent pas forcément que la côte atlantique ressemble aux côtes espagnoles, sans compter l’offre hôtelière insuffisante en dehors des centres névralgiques. Les étrangers qui y viennent régulièrement non plus d’ailleurs. S’il faut indubitablement améliorer l’accueil des touristes et renforcer l’impact économique du tourisme, l’afflux touristique n’est pas une fin en soi.

CONCLUSION

Dans ce mouvement de baisse continue des crédits, des points de rupture apparaissent. Les efforts de rationalisation ont été engagés il y a plusieurs années, ont porté leur fruit, mais ils ne suffisent pas à assumer une action culturelle extérieure universelle, désormais complétée de nombreuses opérations relevant de l’influence et de la promotion de la destination France. Plutôt que des questions, votre Rapporteur soumet plusieurs réflexions alimentées par les rencontres qu’il a pu faire dans le cadre de cet avis depuis le début de la législature et plus largement dans l’exercice de sa fonction de membre de la Commission des Affaires étrangères.

La première concerne l’impérieuse nécessité de conforter le statut des établissements à autonomie financière (Instituts français pour l’essentiel) et de ne pas le mettre en conformité avec la loi organique relative aux lois financières d’une manière qui les priverait de l’efficacité gagnée depuis quelques années et qui conditionne l’équation financière et la réactivité du réseau culturel à l’étranger.

La deuxième réflexion concerne les budgets. La situation est vraiment délicate, car leurs ressources externes sont limitées, parfois dépendantes de facteurs exogènes comme les recettes de gestion de bourses des gouvernements étrangers pour Campus France, et parce que les baisses de crédits et d’emplois affectent clairement les dépenses d’intervention. Votre Rapporteur comprend parfaitement que le programme participe à l’effort général, mais penser à l’après-2016 est préoccupant.

Votre Rapporteur en appelle déjà à une concertation interministérielle pour que les ministères dont les moyens ont été accrus ou préservés prennent leur juste part dans le volet extérieur de leur politique, à commencer par le ministère de l’Éducation nationale dès lors que l’augmentation de ses moyens humains a concerné exclusivement le réseau national et d’aucune sorte le réseau à l’étranger. Le financement de l’université franco-allemande est également cité dans ce rapport.

Un meilleur co-pilotage doit aussi être recherché, qu’il s’agisse du rôle du ministère de la Culture pour l’Institut français ou du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche pour la diplomatie scientifique ou a contrario du ministère des Affaires étrangères pour l’audiovisuel extérieur. La politique culturelle extérieure ne doit-elle d’ailleurs pas être mieux identifiée dans une architecture institutionnelle lisible, avec un nombre plus limité d’interlocuteurs ?

De surcroît, les opérateurs historiques sont étranglés, sans parler du réseau qui ne coûte presque plus rien à l’État. Le sort réservé à Atout France, dont il serait temps de changer le nom, est donc assez privilégié. Cet opérateur n’est pas encore bien configuré, il peut largement gagner en efficacité et il bénéficie cette année d’un million d’euros, anticipe le versement dans ses compte de la même somme en 2016 et se voit attribuer en gestion encore 5 millions d’euros supplémentaires. Cette manne ne devrait-elle pas être un peu mieux répartie entre l’ensemble des acteurs français à l’étranger qui concourent à l’attractivité de la France dans le cadre d’une diplomatie d’influence globale, qu’il s’agisse de Campus France, de l’AEFE ou évidemment du réseau culturel ?

Enfin, la dernière réflexion, qui fut le « fil rouge » de ce rapport, concerne le besoin, désormais, d’opérer des choix, qui croisent de vraies priorités géographiques et de vraies priorités sectorielles, impliquant que certaines actions soient abandonnées de manière assumée et que des moyens humains soient mobilisés en nombre suffisant sur ces priorités. Ce sont des instructions à donner aux postes et des orientations stratégiques à fournir aux opérateurs, à commencer par l’Institut français. On n’a pas à ce jour tiré toutes les conséquences de la fonte du budget affecté à l’action culturelle extérieure, ni de la fin de l’expérimentation du rattachement. Il faut aller au bout de la logique budgétaire, s’il n’y en a pas d’autre ce que bien sûr votre Rapporteur déplore.

S’agissant de l’Europe, la priorité doit être celle de la culture et des arts, à commencer par la création contemporaine, le cinéma et le livre. La question de la langue se pose partout, mais ce doit être une action prioritaire en Afrique. En Europe, la langue est d’abord un vivier de recettes, mais les opérations en faveur de la francophonie demandent beaucoup d’énergie pour un résultat faible. Ce qu’il faut faire, c’est un lobbying politique intense en faveur de la présence d’une deuxième langue vivante obligatoire à l’école et un accompagnement du réseau par le soutien aux filières d’excellence et à la formation des professeurs de français.

Pour certains instruments, le saupoudrage de petites enveloppes n’a pas de sens et il faut plutôt assurer la cohérence entre les messages politiques et les actes. Si l’on prend l’exemple des bourses d’étude et de recherche, des crédits fléchés pour les étudiants réfugiés syriens et irakiens, souvent de très bon niveau, qui souhaitent s’inscrire dans nos universités devraient être envisagés ; un énorme travail d’accueil d’étudiants iraniens mériterait aussi d’être effectué. Il faut gager de telles priorités.

Ce ne sont que quelques exemples, mais ils illustrent le questionnement profond qui est aujourd’hui celui de ceux qui sont farouchement attachés au rayonnement culturel et intellectuel de la France, qui considèrent que c’est un pilier fondamental de son influence dans le monde, et qui réclament les moyens d’éviter la diplomatie cosmétique.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

EXAMEN DES CRÉDITS

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de M. Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du développement international (12), le lundi 26 octobre 2015, la Commission des affaires étrangères examine, pour avis, les crédits pour 2016 du programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » de la mission «  Action extérieure de l’État », sur le rapport de M. François Loncle.

La commission est saisie des amendements AE9 et AE11.

M. Pouria Amirshahi, député. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement des interventions précédentes sur l’importance du réseau, pour notre pays, pour notre coopération car sur 330 000 élèves scolarisés par ce réseau, 200 000 ne sont pas français. Il s’agit donc d’un enjeu stratégique majeur pour la diffusion de la culture française dans le monde d’accueillir ces jeunes et de tenir compte des augmentations du coût qui ont été évoquées.

Je suis bien conscient des contraintes budgétaires et j’ai bien entendu les réponses du ministre, que je prends comme des encouragements, puisqu’il nous rejoint sur le constat. Le présent amendement entend précisément donner un coup de pouce au ministre en augmentant par transfert les subventions de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) de 15 104 000 euros afin de revenir au niveau de 2014.

J’ajoute que dans beaucoup de pays il ne s’agit pas de venir en aide à des familles aisées. De plus en plus d’expatriés français subissent une augmentation du coût de la scolarité et si une part revient aux familles, une autre au concours des États qui accueillent les écoles françaises, une troisième revient à l’État français par l’attribution d’une subvention pour charges publiques. C’est cette part qui diminue. J’ajoute que la diminution était de 2 % l’année dernière, 3,4 % cette année et qu’en 2017, on arriverait à une baisse de 4 %. Avec mes collègues cosignataires et sans doute d’autres, vous comprendrez que je sois enclin à demander une modification de cette ligne budgétaire.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Je donne la parole à Thierry Mariani pour présenter l’amendement AE9.

M. Thierry Mariani, député. J’interviens dans la droite ligne de ce que j’ai défendu précédemment et j’aurais peu de choses à ajouter à ce qui vient d’être dit par mon collègue Amirshahi car nous partageons le même constat. Ce constat est simple : 9 millions d’euros de moins en 2014, 8,2 millions de moins en 2015, 14,6 millions en 2016. Depuis trois ans, les budgets de l’AEFE sont en baisse. Qu’il s’agisse des enseignants, des crédits d’investissement, des crédits de scolarité, il y a forcément un impact, même si les établissements peuvent dans une certaine mesure s’adapter. La première année, on trouve des économies, la deuxième plus difficilement et la troisième on n’y parvient plus. Cela finit par entraîner des conséquences, qu’on ne raconte pas le contraire.

L’éducation nationale est une priorité pour ce Gouvernement. Faisons en sorte qu’il s’agisse d’une priorité pour les Français en France comme pour les Français à l’étranger, qu’ils n’aient pas le sentiment d’être traités différemment.

Enfin, je l’ai peut-être dit avec passion, mais je vous assure que l’on ne sait pas quoi répondre aux parents qui sont obligés d’enlever leurs enfants de l’école française à cause du coût de la quotité de frais d’inscription restant à leur charge. Cela créé parfois des situations dramatiques pour les familles.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Quel sont les avis des rapporteurs ?

M. François Loncle, rapporteur. Je comprends bien les préoccupations de mes collègues et il serait effectivement agréable de pouvoir augmenter une ligne du budget du programme 185, mais je suis défavorable à ces amendements pour trois raisons.

Tout d’abord, la diminution des subventions à l’AEFE est inférieure à la norme de 4 % fixée pour les opérateurs qui s’applique à un opérateur du programme 185 : Campus France. Encore une fois, modérer la diminution de la subvention prévue pour l’AEFE, c’est aggraver à enveloppe constante celles prévues pour le réseau ou d’autres opérateurs, comme Campus France donc et l’Institut français, en grande difficulté.

Ensuite, le ministre a évoqué la qualité de la direction actuelle qui conduit des réformes structurelles qui devraient aboutir à une amélioration du système actuel et qui permettent de faire face aux diminutions

Enfin, j’insiste à nouveau – Yves Durand l’a fait également – sur le fait qu’on peut s’étonner que les nombreuses créations d’emplois du ministère de l’Éducation nationale ne bénéficient pas du tout au réseau de l’enseignement français à l’étranger. Pourtant, un tiers des élèves du réseau à l’étranger sont des Français qui devraient bénéficier de cette priorité. J’ajoute que si on appliquait cette priorité au réseau à hauteur d’un tiers, cela permettrait de recruter 600 enseignants de plus, ce qui serai peu de choses pour l’Éducation nationale mais un apport énorme pour l’AEFE. Cela aiderait incontestablement l’AEFE à conduire les redéploiements d’effectifs.

C’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements, mais favorable à ce que le ministre prenne langue avec sa collègue de l’Éducation nationale pour obtenir l’an prochain une participation accrue du ministère de l’Éducation nationale au financement de l’enseignement français à l’étranger.

M. Philippe Baumel, rapporteur. On peut être sensible à l’argumentation de nos collègues, mais il convient de regarder la consommation effective des crédits. Il se trouve que certains crédits sur la ligne budgétaire consacrée à l’AEFE ne sont pas consommés. Peut-être faudrait-il commencer par regarder ce qu’il en est.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Je passe la parole à M. Coronado qui est cosignataire d’un amendement.

M. Sergio Coronado, député. Je vous remercie de me donner la parole. Dans le même sens que les deux intervenants précédents, je souhaiterais restituer le contexte de ces amendements pour montrer qu’il s’agit d’une erreur stratégique que de diminuer la subvention. L’opérateur se déploie dans un contexte extrêmement concurrentiel d’offre éducative, parfois changeant. Cela explique que les lignes ne soient pas toujours consommées. Certaines opérations immobilières sont réalisables au moment où elles sont envisagées, puis cessent de l’être un peu plus tard en raison d’une évolution des prix, comme ce fut le cas récemment à Buenos Aires. C’est pour cette raison que certains crédits ne sont pas consommés.

La baisse des subventions de l’AEFE est un très mauvais choix stratégique car cela empêche l’Agence de participer à l’accroissement du réseau. Certaines ouvertures récentes d’établissements se sont faites sans participation financière de l’Agence. Par exemple le lycée français de Medellin, juste inauguré, n’a reçu aucune subvention, alors qu’il accueillera sur 10 ans environ 1.500 élèves. C’est un problème. En outre, cela affaiblit l’opérateur dans sa relation avec les fondations et les associations locales. Il s’agit d’établissements privés locaux qui soit ont reçu une homologation de la France, soit ont signé une convention avec l’agence.

Or, on assiste de plus en plus souvent à des « déconventionnements » ou des « déshomologations », c’est-à-dire à des ruptures de relations avec la France. Le lycée français de Mexico, principal établissement français à l’étranger, s’est ainsi déconventionné de fait avant la visite du président de la République. Des tentatives similaires ont eu lieu à Rio de Janeiro et à Montevideo.

Le réseau a du mal à se déployer. Lui couper les jambes en réduisant sa voilure budgétaire aujourd’hui n’est pas un bon choix stratégique.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Je partage évidemment les préoccupations qui ont été exprimées par les députés des Français de l’étranger. Nous savons l’importance de ce réseau des lycées français ; il est un vecteur majeur de notre influence et une vitrine de l’excellence française.

Toutefois, je partage l’avis des rapporteurs. La solution réside dans une plus grande implication de l’Éducation nationale qui a par ailleurs un budget bien plus élevé que le ministère des Affaires étrangères. Nous reconnaissons tous les immenses qualités de l’Agence mais nous sommes dans un contexte actuel de contrainte budgétaire. Je suis défavorable à ces amendements, bien qu’ils mettent l’accent sur un vrai sujet.

La commission rejette les amendements AE9 et AE11.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Nous examinons maintenant l’amendement AE10.

M. Thierry Mariani, député. Cet amendement complète le précédent et concerne les bourses.

Je veux insister sur les chiffres.

En 2008, l’aide à la scolarité était de 67 millions d’euros. En 2012, elle était de 125 millions.

L’aide à la scolarité pour les Français de l’étranger a quasiment doublé sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

M. Philippe Cordery, député. Pour ceux qui ont les moyens !

M. Thierry Mariani, député. Aujourd’hui, ceux qui n’ont pas les moyens n’ont pas de bourse.

La scolarité était quasiment gratuite. Vous avez décidé d’annuler cela.

Vous avez dit que la baisse de trente millions serait compensée par une augmentation des bourses, mais vous n’avez pas tenu vos engagements, sauf brièvement en 2015. En 2016, on est à 115 millions.

Ainsi, l’aide à la scolarité des expatriés a diminué de 10 % alors que le nombre des expatriés augmentait.

Vous avez attribué la hausse des coûts de la scolarité à l’ancien gouvernement, mais ce n’est pas vrai. Cette évolution est due à une évolution structurelle qui entraîne notamment une hausse des prix du foncier, et cela va continuer, comme vous le savez parfaitement.

Je demande simplement que l’on traite les expatriés de la même façon que les Français de métropole. Je vous le rappelle, Madame la Présidente, ce sont des enfants que l’on retire de l’école française.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Quel est l’avis du rapporteur ?

M. Philippe Baumel, rapporteur. Défavorable.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Je partage l’avis défavorable du rapporteur.

La commission rejette l’amendement AE10.

Mme Elisabeth Guigou, présidente. Je mets maintenant les crédits aux voix

Suivant l’avis du rapporteur, la commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », tels qu’ils figurent à l’état B annexé à l’article 24 du projet de loi de finances pour 2016.

LISTE DES PERSONNALITÉS RENCONTRÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR

M. Jérôme Clément, président de la Fondation Alliance française, et M. Bertrand Commelin, secrétaire général (jeudi 1er  octobre 2015)

M. Denis Pietton, président de l’Institut français, Mme Anne Tallineau, directrice générale déléguée et M. Nicolas Gomez, secrétaire général (vendredi 2 octobre 2015)

Mme Sophie Béjean, présidente du Conseil d’administration de Campus France et Mme Béatrice Khaiat, directrice générale (vendredi 2 octobre 2015)

Mme Anne-Marie Descôtes, directrice générale de la Mondialisation, du développement et des partenariats du ministère des affaires étrangères et du développement international, M. René Troccaz, directeur des programmes et du réseau, M. Alain Verninas, chef de mission à la mission des programmes et M. Pierre Lanapats, directeur adjoint de la direction de la coopération culturelle, universitaire et de la recherche (mardi 6 octobre 2015)

Mme Teresa Cremisi, éditrice, ancienne PDG de Flammarion (jeudi 8 octobre 2015)

M. Jean-Christophe Deberre, directeur général de la Mission laïque française et Mme Danielle Petit, adjointe au directeur général et chef du service administratif, financier et juridique (jeudi 8 octobre 2015)

Mme Hélène Farnaud-Defromont, directrice de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, et Mme Raphaëlle Dutertre, responsable des relations avec les élus (jeudi 8 octobre 2015)

M. Emmanuel Lebrun-Damiens, conseiller budget et administration au ministère des affaires étrangères et du développement international et M. René Troccaz, directeur des programmes et du réseau (jeudi 8 octobre 2015)

M. Christian Mantéi, directeur général Atout France et M. Patrick Lasserre, secrétaire général (jeudi 8 octobre 2015)

M. Eric Tallon, Conseiller de coopération et d’action culturelle, et directeur de l’Institut Français Italia : présentation du dispositif français en Italie et problématique spécifique de ce dispositif à Rome, déjeuner de travail

Mme Monique Veaute, présidente de la Fondation RomaEuropa : réunion sur la coopération artistique

Mme Fabienne Rondelli, attachée de coopération éducative : entretien sur les enjeux de la coopération éducative en Italie

M. Paolo Reale, proviseur du Convitto Nazionale, et ses collaborateurs : visite de l’établissement et réunion associant également des représentants du MIUR autour de l’Esabac

festival de cinéma de l’isola Tiberina : débat entre Mario Sesti, Fanny Ardant et Ettore Scola avant la projection du film « La Famiglia » de Ettore Scola.

le vendredi 3 juillet

Mme Catherine Colonna, ambassadrice de France à Rome : petit déjeuner de travail

M. Benoit Tadié, attaché de coopération universitaire et M. Denis Moura, attaché scientifique : réunion autour de priorités thématiques et de l’adaptation du dispositif

Mme Catherine Virlouvet, directrice de l’Ecole française de Rome, et ses collaborateurs : Visite de l’École et point de situation

Mmes Cécile Moscovitz, Anouk Aspisi, Alix Davonneau : point sur les nouvelles actions : sport, gastronomie, jeux vidéo, francophonie, design, architecture

Son Exc. Ludovico Ortona, ambassadeur, président de la Fondation Nuovi Mecenati : Entretien avec sur la politique de mécénat du poste, la Fondation Nuovi Mecenati et son rôle au côté de l'Ambassade en termes d'influence et de coopération culturelle, réunion associant Mme Violène Verduron ;

Mme Chiara Fortuna de la direction générale du Ministère des Biens et activités culturelles et Mme Isabella Ferretti, éditeur (6thand2nd), partenaire du festival de Littérature porté par l’Ambassade : déjeuner sur les politiques audiovisuelle et du livre

M. Olivier Jacquot, directeur de l’Institut français de Rome, sous la tutelle de l’Ambassade de France près le Saint-Siège : Entretien et visite du Centre Saint-Louis par le directeur

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