N° 4127 tome VII - Avis de Mme Jeanine Dubié sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).



N
° 4127

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2017 (n° 4061)

TOME VII

ÉCONOMIE

COMMERCE EXTÉRIEUR

PAR Mme Jeanine DUBIÉ

Députée

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Voir les numéros : 4061 et 4125 (annexe 21).

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : ANALYSE DES CRÉDITS 9

I. LES CRÉDITS DE L’ACTION N° 7 DU PROGRAMME 134, DESTINÉS À L’OPÉRATEUR BUSINESS FRANCE 9

II. LES CRÉDITS DE L’ACTION N° 7 DU PROGRAMME 134, DESTINÉS À LA RÉMUNÉRATION DE BPIFRANCE ASSURANCE EXPORT (BPI-AE) AU TITRE DE SES PRESTATIONS RÉALISÉES POUR LE COMPTE DE L’ÉTAT 10

SECONDE PARTIE : RENFORCER L’ACCOMPAGNEMENT DES PME À L’EXPORT 13

I. LES PME : ACTEURS CLÉ DE L’EXPORT, POURTANT ENCORE EN GRANDE DIFFICULTÉ 13

A. DES DIFFICULTÉS RÉCURRENTES À L’INTERNATIONALISATION 13

1. Un manque d’expertise et de qualifications internes 13

2. Un sentiment d’isolement et une faible collaboration entre entreprises 14

3. Des marges financières insuffisantes 15

4. Une compétitivité difficile à établir dans la concurrence internationale 15

5. Un système de soutien dual, dont l’efficacité n’est pas acquise 17

a. Un foisonnement de dispositifs de soutien qui nuit à leur visibilité et à leur efficacité 17

b. Un soutien administratif inopérant car insuffisamment personnalisé 17

i. Business France : un soutien trop peu personnalisé et trop cher 17

ii. Les régions : un soutien trop hétérogène 20

ii. Bpifrance : un soutien élitiste, longtemps parallèle à celui de la Coface 22

c. Un soutien piloté par les professionnels plus efficace, mais doté de trop peu de moyens 24

i. Les CCI de France et les CCI françaises à l’international : un soutien efficace mais dont les moyens baissent 24

ii. Les conseillers du commerce extérieur de la France 26

iii. Les Opérateurs spécialistes du commerce international (OSCI) 26

iv. Les fédérations et confédérations d’entreprises 27

B. EN CONSÉQUENCE, DES PME PEU PRÉSENTES À L’INTERNATIONAL ET EN PROIE À UNE GRANDE VULNÉRABILITÉ 28

II. DE PREMIÈRES MESURES ENCOURAGEANTES, MAIS DES CRITIQUES PERSISTANTES 29

A. LA SIMPLIFICATION DU SYSTÈME DE SOUTIEN PAR UNE MEILLEURE COORDINATION ENTRE LES ORGANISMES ET UNE INFORMATION PLUS ACCESSIBLE 29

1. La simplification du système de soutien : des conventions multipartites aux résultats mitigés 29

a. L’amélioration de la coordination des organismes de soutien à l’export au travers de la signature de conventions multipartites 29

b. Des résultats mitigés : une complexité persistante et une méconnaissance, par les entreprises, des dispositifs existants 32

2. L’amélioration de l’accès à l’information : le lent développement du site France-international.fr 33

a. La clarification de l’information 33

b. Une montée en puissance trop lente du site France-international 33

B. LA SIMPLIFICATION DES DÉMARCHES À L’EXPORT ET L’ACCOMPAGNEMENT DES PME 33

1. La simplification des démarches à l’export 33

a. L’engagement de la simplification des mesures douanières 33

b. Des démarches à l’export encore trop nombreuses et complexes 34

2. L’amélioration de l’accompagnement public et privé 34

a. La structuration des familles à l’export et l’incitation à la collaboration 34

b. Les limites du dispositif : un isolement persistant des PME 35

III. DEUX PRIORITÉS : RENFORCER LA COMPÉTITIVITÉ DES PME ET AMÉLIORER LEUR ACCOMPAGNEMENT 35

A. RENFORCER LA COMPÉTITIVITÉ DES PME 35

1. La compétitivité-prix : cibler le crédit d’impôt compétitivité-emploi 36

2. La compétitivité hors-prix : valoriser la « marque France » 36

B. AMÉLIORER L’ACCOMPAGNEMENT 37

1. Poursuivre la clarification de l’organisation des soutiens publics 37

a. Améliorer la gestion de Business France 37

b. Poursuivre les partenariats noués entre Business France et les autres opérateurs 39

c. Harmoniser les dispositifs régionaux pour créer une concurrence égale entre PME 39

d. Garantir la stabilité de la stratégie française à l’export et des soutiens 40

e. Personnaliser l’accompagnement 40

2. Développer les soutiens privés 40

a. Inciter les grands groupes à entraîner les PME dans leur sillage : renforcer l’association Pacte PME 40

b. Conserver les moyens des CCI et mettre en œuvre leur modernisation 41

CONCLUSION 43

EXAMEN EN COMMISSION 45

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 49

INTRODUCTION

Le commerce extérieur est un secteur stratégique pour l’économie française. La France est aujourd’hui le 6ème exportateur mondial de biens et services, et les exportations s’élèvent à près de 30 % de son produit intérieur brut (PIB). Si l’Union européenne représente encore 60 % des échanges de la France, le poids des pays hors Union européenne croît : il atteint aujourd’hui 40 % contre 33 % il y a dix ans.

La France dispose d’atouts et de secteurs industriels forts et compétitifs. Les principaux excédents sont enregistrés dans le secteur aéronautique et spatial (17,6 milliards d’euros (Md€) en moyenne sur la période 2010-2015), dans la chimie, les parfums et les cosmétiques (9 Md€), dans les industries agroalimentaires, qui recouvrent les produits agricoles transformés (6,7 Md€) et les produits agricoles bruts (3,3 Md€), ainsi que dans la pharmacie (3 Md€).

Le pays connaît toutefois, depuis dix ans, un déficit commercial. Si ce déficit se résorbe depuis quelques années – il est passé de – 70 Md€ à – 45 Md€ entre 2011 et 2015 – cette résorption est essentiellement due à des facteurs exogènes. Ainsi, en 2015, les exportations, qui ont connu, en volume, un fort dynamisme (+ 6,7 %, soit un niveau inédit depuis quinze ans), ont été majoritairement soutenues par des facteurs indépendants des politiques publiques nationales, tels que la forte dépréciation de l’euro (- 6,7 % en 2015 par rapport à l’année 2014), ou la baisse du coût des matières premières. Seuls 20 % de l’amélioration constatée pouvaient être expliqués par une plus grande compétitivité des entreprises françaises à l’export (notamment grâce aux mesures de baisses de charges). Le déficit hors énergie et hors matériel militaire se détériorait de 2,4 Md€ (après une dégradation de 7,8 Md€ en 2014).

Source : DGE

Pour l’année 2016, les perspectives de résultats sont peu optimistes. Bien que la facture énergétique continuerait de s’alléger, les exportations accuseraient en revanche un fort ralentissement, progressant de 1,8 % en 2016, après une hausse de 6,1 % en 2015. Cette évolution s’expliquerait notamment par le faible dynamisme de la demande mondiale adressée à la France mais aussi par l’affaiblissement des effets positifs de la dépréciation passée de l’euro. Les importations ralentiraient elles aussi mais conserveraient un dynamisme plus élevé que celui des exportations (3,9 %, après 6,6 % en 2015), creusant le déficit commercial. Ainsi, dès les six premiers mois de l’année 2016, le déficit du commerce extérieur des biens et services s’est détérioré, à 9,7 Md€ (après 8,5 Md€ au 2ème semestre 2015) et les exportations ont reculé, à la fois en valeur (- 2,4 %) et en volume (- 0,1 %).

L’INSEE ATTEND POUR 2016 UNE LÉGÈRE DÉGRADATION DU DÉFICIT TOTAL

Données comptabilité nationale (source : INSEE)

C’est pourquoi, les crédits budgétaires du projet de loi de finances pour 2017 qui seront votés en soutien du commerce extérieur doivent faire l’objet d’une attention particulière : il s’agit de renforcer les atouts structurels de l’économie française, pour rendre les performances à l’export moins vulnérables aux variations conjoncturelles. Votre rapporteure, qui émet un avis favorable aux crédits de la mission pour ce qui concerne le commerce extérieur, appelle toutefois à mettre en œuvre une politique publique encore plus volontariste. La définition d’une véritable stratégie, notamment ciblée sur les petites et moyennes entreprises (PME) (1), est d’autant plus nécessaire que le contexte international est instable. L’année 2016 a ainsi vu, successivement, l’ouverture du marché iranien, la fermeture du marché russe sous l’effet des sanctions décidées par la communauté internationale, ou encore le référendum décidant de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Pour ces raisons, votre rapporteure a souhaité accorder une attention particulière aux PME, très présentes dans le tissu industriel français, mais pourtant peu représentées à l’export. Elle a, en particulier, souhaité établir l’inventaire des principales difficultés recensées par les exportateurs, de manière à interroger la pertinence des soutiens publics et privés actuels, et à formuler des propositions.

PREMIÈRE PARTIE : ANALYSE DES CRÉDITS

Les crédits destinés au financement et au soutien du commerce extérieur de la France sont rassemblés au sein du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », de la mission « Économie ».

Les politiques publiques inscrites sur le programme 134 visent à développer la compétitivité des entreprises et à favoriser un environnement économique propice à la croissance et à l’emploi. Elles s’articulent autour de cinq objectifs stratégiques qui mobilisent les services de la direction générale du Trésor (DGT), de la direction générale des entreprises (DGE), de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et de leurs opérateurs. Trois objectifs peuvent être mentionnés en ce qui concerne le commerce extérieur :

– favoriser le développement des entreprises par la mise à disposition d’outils de financement adéquats ;

– favoriser le développement des entreprises à l’international et les investissements étrangers en France ;

– soutenir la politique industrielle et le développement des services.

Au sein du programme 134, l’action n° 7, « Développement international des entreprises et attractivité du territoire » concentre les moyens consacrés au commerce extérieur. Elle a pour objectifs :

– l’information et le soutien des entreprises françaises, notamment les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), afin de favoriser leur internationalisation et leur développement sur les marchés extérieurs ;

– la prospection d’investissements étrangers ;

– la promotion du territoire français auprès des investisseurs internationaux susceptibles de s’y implanter et la mise en œuvre d’une stratégie de communication pour améliorer l’image de la France à l’international.

Pour la seconde année consécutive, la majorité des crédits de l’action n° 7 du programme 134 sont consacrés à l’opérateur Business France, créé le 1er janvier 2015 et résultant de la fusion entre Ubifrance et l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), intégré pour la première fois à la maquette budgétaire dans la loi de finances pour 2016.

En son sein, 98,123 millions d’euros (M€) de crédits de paiement, sous forme de subvention pour charges de service public, sont destinés à couvrir les frais relatifs à la conduite de la mission de service public confiée à Business France par l’État. Cette mission consiste en la mise en œuvre des politiques publiques visant à promouvoir l’internationalisation de l’économie française autour des trois piliers définis dans le contrat d’objectifs et de performance pour les années 2015 à 2017 : export (développement international des entreprises implantées en France), attractivité et promotion de l’image de la France à l’international.

Les crédits alloués à l’opérateur sont en baisse de 3,2 % par rapport à 2016, passant de 101,3 M€ à 98,1 M€ en 2017. Ces crédits diminuent donc de plus de 7 M€, soit - 7 %, par rapport aux crédits versés en 2015, au cours de laquelle ils étaient supérieurs à 105 M€ (2).

De plus, le plafond d’emplois de Business France diminue également, de 11 équivalents temps plein travaillés (ETPT) par rapport à 2016, pour être porté à 1523 ETPT. Ces emplois sont rémunérés par l’opérateur.

Business France reçoit, par ailleurs, une subvention pour charges de service public provenant du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » de la mission « Aménagement du territoire » piloté par le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), d’un montant de 6,02 M€. Cette subvention lui permet, en plus de ses autres financements (3), de couvrir ses dépenses de personnel et de fonctionnement, ainsi que les dépenses liées à son action de promotion de l’attractivité de la France à l’étranger et d’accompagnement des investisseurs internationaux. Elle est toutefois également en baisse de 4,5 % par rapport à l’année 2016, où elle s’élevait à 6,3 M€.

En 2017, le périmètre de l’action n° 7 du programme 134 évolue, puisque la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 prévoit, à compter du 31 décembre 2016, le transfert des garanties publiques au commerce extérieur, jusque-là gérées par la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface), à un nouvel organisme, Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance. À compter de 2017, la rémunération du nouvel opérateur chargé de cette mission sera financée sur le programme 134, au titre de son action pour le compte de l’État.

Une nouvelle ligne de l’action n° 7 du programme 134 porte donc la rémunération de Bpifrance Assurance Export au titre de la gestion des garanties à l’export (4). Pour 2017, les crédits de cette ligne s’élèvent à 72,60 M€ en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Ils se décomposent en 54,4 M€ correspondant à la part fixe de la rémunération annuelle 2017 de Bpifrance Assurance Export, à laquelle s’ajoutent 12,20 M€ de frais exceptionnels liés au transfert et 6 M€ destinés à financer des investissements informatiques.

Le transfert à Bpifrance, au nom et pour le compte de l’État, de la gestion des garanties publiques à l’exportation, jusque-là assurée par la Coface, garantira un accès facilité des PME aux financements export. Ce transfert doit également permettre une économie de l’ordre de 20 % sur les coûts de gestion de l’opérateur.

Pris dans leur globalité, les crédits de soutien au commerce extérieur atteignent donc la somme de 170,7 M€. Cette somme est stable par rapport à l’année 2016 (où ils étaient alors dispersés entre plusieurs programmes). Ce soutien affiché au commerce extérieur en période de rigueur budgétaire est une bonne nouvelle : les crédits du commerce extérieur jouent un rôle important d’effet de levier sur les résultats des entreprises, et le retour attendu en matière, de croissance, d’emplois supplémentaires et de cohésion sociale justifie cette constance, y compris dans un contexte budgétaire contraint. En conséquence, votre rapporteure émet un avis favorable aux crédits de la mission « Économie », en ce qui concerne le soutien au commerce extérieur.

SECONDE PARTIE : RENFORCER L’ACCOMPAGNEMENT DES PME À L’EXPORT

Le déploiement à l’étranger des entreprises françaises est avant tout le fait des grands groupes. Alors que près des deux tiers des entreprises de taille intermédiaire (ETI) françaises étaient implantées à l’étranger en 2013, les petites et moyennes entreprises (PME) rencontraient de nombreuses difficultés dans leur développement à l’international, et dans la pérennisation de leur implantation. Ce constat souligne la nécessité pour les PME françaises de s’affirmer comme des exportateurs de long terme et de conquérir de nouveaux marchés à l’international. Leur savoir-faire et leur capacité d’innovation, dans de multiples secteurs, doivent être mis à profit pour renforcer le poids de la France dans les échanges internationaux : les PME seront alors des atouts clés dans la compétition internationale et une source de création d’emplois dans les territoires.

Les différents entretiens menés par votre rapporteure ont permis d’identifier, parmi les difficultés récurrentes des PME dans leur parcours à l’export, des obstacles liés à un manque de personnels qualifiés disposant, au sein de l’entreprise, de l’expertise indispensable à l’internationalisation, en différents domaines tels que :

– la connaissance des langues étrangères ;

– la maîtrise des outils numériques, cette maîtrise devant aller au-delà de la seule capacité à entretenir un site internet, pour s’étendre, notamment, à la capacité de vendre en ligne. À ce sujet, les représentants de Business France auditionnés par votre rapporteure reconnaissent le grand retard des entreprises françaises en matière de stratégie numérique et digitale, alors même que plusieurs dispositifs d’accompagnement existent ;

– la compréhension et la capacité d’analyse des marchés étrangers, indispensables pour définir un plan stratégique pérenne ;

– une compétence juridique et réglementaire minimale : les différences de réglementations dans les États cibles représentent souvent un obstacle que de petites PME ne parviennent pas à franchir, selon les représentants des chambres de commerce et d’industrie de France (CCI France), rencontrés par votre rapporteure. De même, selon les représentants des opérateurs spécialistes du commerce extérieur (OSCI), également auditionnés par votre rapporteure, la mise en conformité, ou « compliance » des PME avec les diverses législations des différents pays serait source de grande difficulté et conçue comme une prise de risques excessive, en particulier dans certains secteurs (agroalimentaire, secteur médical…). Par ailleurs, la protection des marques et des brevets coûte cher et représente un enjeu auquel les entreprises, notamment les plus petites, sont trop peu sensibilisées (5).

En outre, comme mentionné par les représentants de Business France, les PME affectant un salarié à plein temps aux enjeux du développement international sont très rares – alors même que celles qui conservent des vendeurs-représentants-placiers (VRP) au niveau régional sont nombreuses. Le plus souvent, le chef d’entreprise assume cette mission, parmi d’autres, sans y avoir été formé, ni disposer de suffisamment de temps à y accorder.

En second lieu, les entreprises font état, régulièrement, d’un sentiment de solitude dans leur développement à l’international. Elles auraient ainsi de grandes difficultés à se fédérer pour mutualiser des moyens ou des démarches.

Selon les représentants de CCI France auditionnés par votre rapporteure, la France souffrirait du manque d’élan des grands groupes, qui n’entraîneraient pas avec eux les PME avec lesquelles ils ont l’habitude de travailler. De même, selon la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), « il y a un vrai retard en France sur l’idée de chasser en meute ». Ceci est d’autant plus préjudiciable que le patriotisme économique des grands groupes vis-à-vis des entreprises nationales fonctionne, au contraire, bien mieux en Allemagne ou en Italie. Les deux catégories d’entreprises se rejettent la responsabilité de ce faible développement conjoint : les grandes entreprises auraient du mal à identifier les projets de leurs fournisseurs à l’international ; les PME ne sauraient pas à qui s’adresser au sein des grandes entreprises.

Ils ont pourtant tous deux à y gagner :

– les grandes entreprises peuvent avoir besoin de leurs fournisseurs pour développer leur activité sur place, ou pour remplir leurs obligations de compensation (l’État d’accueil exigeant, en contrepartie de la signature du contrat, qu’une partie des activités soit effectuée dans le pays) ;

– les PME bénéficieraient de la protection, de l’expérience et de la connaissance du marché par les grandes entreprises.

Le principal frein au développement des entreprises à l’export, en particulier des PME, réside dans l’insuffisance de marges financières pour financer ce développement.

Ainsi que l’indiquaient les représentants de CCI France, l’export nécessite des marges financières significatives, car s’internationaliser représente un coût, avant de générer des bénéfices. En effet, l’accès à l’information, tout comme le recrutement de salariés spécialisés ou le recours à un volontaire international en entreprise (VIE) coûtent cher. Le principal problème, selon ces représentants, ne résiderait pas tant dans les lacunes des dispositifs d’accompagnement que dans le manque de moyens des PME pour aller à l’international.

Ce manque de moyens est d’autant plus criant que les banques sont, le plus souvent, réticentes à prêter à de petites entreprises, dont le succès à l’étranger n’est pas assuré. Le marché du crédit fait alors défaut et l’intermédiation bancaire ne remplit plus son office. Comme l’indiquait l’OSCI, les difficultés des PME à trouver des financements bancaires sont encore plus significatives lorsque les entreprises souhaitent se développer dans des pays jugés « risqués », notamment en raison de l’extra-territorialité du droit américain, tels que l’Iran ou le Venezuela.

Pour aller à l’international, une entreprise doit commercialiser des produits de qualité, innovants, et à des coûts compétitifs.

Or, comme mentionné par les représentants de la CGPME à votre rapporteure, il est difficile pour des PME de concilier ces trois critères à la fois. Si l’innovation et la qualité ne posent pas de difficulté excessive, le maintien de prix compatibles avec la concurrence internationale est plus complexe, notamment en raison d’un coût du travail important en France, qui se répercute sur les prix de vente des produits. Ces derniers sont alors plus élevés que ceux de produits comparables de pays tels que l’Espagne ou l’Italie, qui reviennent sur le devant de la scène du commerce international. De même, les représentants de Business France rencontrés par votre rapporteure constataient une perte de compétitivité-coût des entreprises ces dernières années, due à l’importance des charges sociales, mais également au positionnement de milieu de gamme et au choix des prix de vente.

Pour faire face à cette difficulté, le crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE) a été mis en place en 2013, puis complété par le Pacte de responsabilité et de solidarité, dont le premier volet est entré en vigueur au 1er janvier 2015 et le second volet au 1er avril 2016. L’objectif affiché était de renforcer la compétitivité-prix des entreprises à l’international, en diminuant les charges sociales – pour une baisse totale du coût du travail de 35 Md€ sur les entreprises – de manière à rendre possible, sans baisse des salaires nets, une baisse des prix de vente. Le CICE a bénéficié, en 2015, à 1,2 million d’entreprises, pour un montant de 12,4 Md€. La mesure est chiffrée à 12,6 Md€ pour 2016 et à 15,7 Md€ pour 2017.

Toutefois, l’effectivité réelle du CICE sur les gains de compétitivité à l’export est contestée. En effet, par construction, le CICE est un dispositif qui cible un large éventail d’entreprises. L’application de la mesure à la masse salariale inférieure à 2,5 SMIC conduit à orienter en grande partie le dispositif sur les entreprises de services, où les rémunérations sont plus faibles, alors même que la plupart de ces entreprises ne sont pas exportatrices et sont donc abritées de la concurrence internationale. Selon le rapport 2015 du comité de suivi du CICE, les entreprises exportatrices, le plus souvent industrielles, ne bénéficient que de 48 % du CICE. À l’inverse, les entreprises qui n’exportent pas du tout captent la moitié de l’enveloppe totale. De même, dans son rapport de 2016 sur le suivi du CICE, France Stratégie indiquait que si le CICE a permis aux entreprises de travailler à la reconstitution de leurs marges, il n’y a pas eu d’effet observable sur l’investissement, la recherche et développement ou les exportations.

C’est pourquoi, comme l’indiquaient les représentants de CCI France auditionnés par votre rapporteure, le CICE n’a pas permis aux PME de prendre de l’avance dans leurs démarches à l’export : il leur a seulement permis de combler une partie, mais non l’intégralité, de leur retard. Un chef d’entreprise membre de la CGPME donnait un exemple concret : le CICE aurait rapporté à sa PME, en 2016, 28 000 euros, une somme insuffisante pour faire la différence à l’export.

De la même manière, l’industrie, premier secteur exportateur, ne touchait que 15 % du premier volet « responsabilité » du Pacte, mis en œuvre en janvier 2015. Ce premier volet consistait en une exonération complète au niveau du salaire minimum de croissance (SMIC) des cotisations patronales versées aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF), hors cotisations d’assurance chômage. Il était donc ciblé sur les bas salaires et touchait principalement des secteurs relativement peu exposés à la concurrence internationale : services aux particuliers, commerce, services aux entreprises. Depuis le 1er avril 2016 et la mise en place du second volet du pacte, le dispositif a été complété par la baisse de 1,8 point des cotisations familiales pour les salaires allant jusqu’à 3,5 fois le SMIC. L’extension de ces dispositions aux salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC depuis le 1er avril 2016 devrait être plus favorable aux secteurs exportateurs et l’industrie devrait bénéficier de 25 % de ces baisses de cotisations octroyées. Votre rapporteure salue cette évolution.

Il est complexe, pour certaines PME, de se repérer dans le maquis des soutiens qui leur sont proposés. Ceux-ci sont à la fois publics, parapublics et privés, et interviennent à différents stades du processus d’internationalisation, selon des modalités et des critères différents. Il en résulte une certaine confusion et une grande difficulté à identifier le bon interlocuteur pour répondre à une question donnée.

Selon l’association Régions de France (ex-Association des régions de France), auditionnée par votre rapporteure, « les PME sont particulièrement sensibles à la simplification et à la lisibilité du dispositif d’accompagnement à l’export. En effet, un trop grand foisonnement des initiatives en faveur tant de la sensibilisation à une démarche d’export que de l’accompagnement a contribué, d’une part, à faire perdre en clarté le continuum du parcours à l’export et les actes d’intervention véritables de ces acteurs (conseil, garantie, assurance…) et, d’autre part, à empêcher un suivi individualisé et dans le temps de ces entreprises ».

De plus, et de façon paradoxale, la multiplicité de ces soutiens ne permet pas nécessairement d’apporter une réponse satisfaisante aux préoccupations des entreprises. Les soutiens publics sont jugés trop « administratifs », et les soutiens privés manquent parfois de moyens pour mener à bien leurs actions. En réalité, il faut aux PME, le plus souvent, « se débrouiller seules » et ce malgré l’apparente profusion des soutiens.

Créé le 1er janvier 2015, et résultant de la fusion d’Ubifrance et de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), Business France est un établissement public, placé sous la triple tutelle du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, du ministre des affaires étrangères et du développement international, et du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Levier opérationnel au service de la compétitivité de la croissance et de l’emploi, Business France déploie une stratégie destinée à aider les entreprises françaises à exporter et les entreprises étrangères à s’installer en France. Ses activités s’organisent autour de trois grands axes :

– l’aide à l’export notamment par l’organisation de salons. Business France organise des événements internationaux (600 par an) pour aider les entreprises dans leur action commerciale à l’international. Ces manifestations sont sélectionnées selon les secteurs et les pays les plus porteurs d’opportunités. En participant à ces événements, les entreprises réunies sous la bannière « France » profitent d’une meilleure visibilité auprès des acteurs locaux. De façon concrète, Business France achète, auprès des organisateurs, des mètres carrés de salon, les mieux situés possible, puis les scinde et les revend aux entreprises, à un prix inférieur à celui qui leur aurait été appliqué si elles les avaient achetés elles-mêmes ;

– la gestion du dispositif du volontariat international en entreprise (VIE). Business France met à disposition, en permanence, un vivier de candidats et peut aider une entreprise à trouver un profil spécifique. L’opérateur prend en charge la gestion administrative et juridique du VIE (aspects contractuels, versement des indemnités, protection sociale). Les dépenses liées au recours à un VIE sont éligibles au prêt pour l’export de Bpifrance. 2 500 PME font appel à un VIE et 75 % des VIE développent effectivement des courants d’affaires au cours de leur première année d’exercice ;

– l’accompagnement individualisé d’entreprises souhaitant se projeter à l’international, la recherche d’investissements étrangers en France et la communication destinée à améliorer l’image de la France à l’international.

L’établissement public s’appuie sur un réseau de 92 sites, répartis dans 70 pays. À l’étranger, l’action de l’agence s’exerce dans le cadre de la mission de coordination et d’animation assurée par l’ambassadeur.

Selon les responsables de la CGPME rencontrés par votre rapporteure, toutefois, le soutien apporté par Business France est inopérant, et ne correspond pas aux besoins des PME. Ces représentants indiquaient ainsi : « les stands sont beaux, mais c’est trop cher pour le service rendu. Il n’y a pas assez d’appui en amont ». La politique de Business France correspondrait davantage aux attentes des ETI qu’à celles des PME.

Plusieurs personnes auditionnées reprochaient également au soutien de Business France de n’être pas suffisamment personnalisé : il s’agirait d’un soutien « standard », et trop rigide pour être applicable aux PME. Comme indiqué par l’OSCI, les interlocuteurs au sein de Business France ne seraient pas des chefs d’entreprise, et ne percevraient pas nécessairement les besoins concrets des PME, notamment dans la durée, au-delà de la seule phase d’amorçage.

Par ailleurs, parmi les personnes auditionnées par votre rapporteure, plusieurs indiquaient regretter la facturation trop chère des prestations de Business France, parfois supérieure à celle des prestations équivalentes offertes par des opérateurs privés (6). En effet, l’agence propose aux entreprises des services payants : produits éditoriaux sur étagères, veilles sur mesure, programme d’évènements collectifs, prestations individuelles de prospection, ou mise en place et gestion de VIE. Le niveau de facturation, fondé sur le principe du ticket modérateur, inclut une intensité variable de subvention selon le type de prestations ou le profil de l’entreprise bénéficiaire. Lorsque cette prestation est rendue « dans le marché », le principe est celui d’une facturation couvrant l’intégralité des coûts directs et indirects engagés. La CGPME, qui a comparé les coûts de missions organisées par Business France, d’une part, et par elle-même, d’autre part, estime que les prix facturés par Business France, par exemple pour accompagner une délégation d’entreprises au Chili, sont excessifs et inaccessibles à certaines PME.

Votre rapporteure entend toutefois la réponse que les représentants de Business France ont apportée à ces critiques, lorsqu’elles leur ont été exposées :

– une partie de la stratégie de l’opérateur a été réorientée de manière à personnaliser davantage l’accompagnement. Il ne s’agira désormais plus de « faire du nombre », d’accompagner autant d’entreprises que possible, mais au contraire de sélectionner un plus petit nombre de PME, afin de leur prodiguer un soutien plus individualisé, et dans la durée. Ces entreprises seront celles qui présentent le potentiel le plus important, et pour lesquelles l’export fait partie intégrante du plan de développement stratégique. Ainsi, l’opérateur n’accompagnera plus que 10 000 entreprises par an, et 3 000 PME feront l’objet d’un accompagnement renforcé d’ici à 2017 (7). Votre rapporteure appelle toutefois cette politique de sélection à ne pas être trop « élitiste » : s’il est vrai que les trois millions de PME que compte la France n’ont pas nécessairement vocation à exporter, il est probable que davantage que les 3 000 qui seront choisies le pourraient ou le devraient ;

– en outre, Business France a indiqué ne pas privilégier les ETI par rapport aux PME, mais plutôt les entreprises de croissance, structurées pour aller à l’export, déterminées et avec un potentiel, par rapport aux autres entreprises, notamment à celles pour lesquelles l’export n’est qu’un moyen de développement subsidiaire, après épuisement du marché national. Le critère du nombre de salariés n’est ainsi pas le critère déterminant.

– quant à la facturation des prestations, Business France indique qu’en tant qu’établissement public industriel et commercial (EPIC), il lui revient de générer des recettes, pour compléter celles issues de la subvention versée par l’État, cette dernière ne finançant que 50 % de son budget. L’opérateur précise que cette subvention nationale lui permet, déjà, de facturer ses prestations moins cher que leur coût réel, et, en tout état de cause, moins cher que celles d’opérateurs privés non subventionnés. En outre, en abaisser les tarifs ferait courir deux risques : cela rendrait nécessaire une augmentation de la subvention versée à Business France, pour maintenir son budget constant, et conduirait à transférer la charge du bénéficiaire de la prestation vers le contribuable ; cela pourrait être considéré comme une concurrence déloyale vis-à-vis des opérateurs privés du commerce extérieur proposant les mêmes prestations aux mêmes publics. Une action de l’OSCI devant l’Autorité de la concurrence prouve que ce risque n’est pas uniquement théorique (8).

Les régions accompagnent les entreprises qui souhaitent exporter ou qui exportent, notamment à travers :

– des dispositifs d’aide au financement des coûts fixes de l’exportation, pour juguler l’imperfection du marché du crédit : subventions, prêts sous forme d’avance remboursable pour le cofinancement d’une étude de marché, d’un diagnostic export, d’une participation à un salon, etc…

– le financement d’organismes (chambres consulaires, etc…) pour la mise en place d’actions collectives destinées aux entreprises ;

– la participation à des fonds de garantie pour inciter les banques à financer les PME dans leurs projets à l’export.

Depuis 2012, les régions sont « pilotes » de l’action publique de l’export, et ont lancé la mise en œuvre des plans régionaux d’internationalisation des entreprises (PRIE). Les PRIE sont destinés à fixer des objectifs et des actions associés et à organiser sur leur territoire le dispositif d’appui à l’export, en associant l’ensemble des acteurs concernés (Bpifrance, la Coface, les CCI, les conseillers du commerce extérieur de la France…) autour d’un diagnostic, d’axes stratégiques, et d’un plan d’action.

Toutefois, selon la CGPME, le soutien apporté par les régions françaises est moins efficace que celui apporté, par exemple, par les Länder allemands, qui offrent un véritable appui à la structuration à l’international.

De plus, le système régional souffre d’une trop grande hétérogénéité, qui peut être source de distorsions de concurrence. Ainsi, malgré la réforme territoriale et la délimitation des treize nouvelles régions, moins nombreuses que les vingt-deux précédentes, les politiques menées par chacune d’entre elles restent très hétérogènes, ce qui créée potentiellement une distorsion de concurrence pour les entreprises et contribue, en tout état de cause, au manque de clarté et de cohérence de la stratégie nationale d’aide à l’export. Selon un sondage OpinionWay réalisé en juin 2016 pour CCI International (9), si 37 % des PME estiment que leur région est un atout pour leur développement à l’international, ces chiffres sont très variables :

– les pourcentages d’entreprises interrogées déclarant que leur région est un atout dans leur développement à l’international sont significativement supérieurs à la moyenne en Île-de-France (51 % de satisfaction) et dans les Hauts-de-France (53 % de satisfaction) ;

– les pourcentages d’entreprises interrogées déclarant que leur région est un atout dans leur développement à l’international sont significativement inférieurs à la moyenne en Bretagne (21 % de satisfaction),
Bourgogne-Franche-Comté (26 % de satisfaction) et Centre-Val-de-Loire (16 % de satisfaction).

À titre d’illustration, la plupart des régions confient à leurs agences régionales de développement ces missions de développement international. Avec la réforme des régions, une nouvelle carte se dessine pour ces outils, qui ne semble pas apporter davantage de clarté :

– la Normandie a mis en place une agence de développement de la Normandie (ADN) ;

– les trois agences des trois anciennes régions de Nouvelle Aquitaine ont été regroupées en une agence unique, mais implantée sur quatre sites ;

– la région des Hauts-de-France a étendu l’action de l’ex-agence de la région Nord-Pas-de-Calais à l’ensemble du territoire des Hauts-de-France ;

– la région Bretagne a créé une agence spécifique pour le commerce extérieur : Bretagne Commerce International, née de la fusion de Bretagne International et de CCI International Bretagne.

L’hétérogénéité est particulièrement visible dans le cadre du soutien au dispositif du VIE. Ainsi, en 2015, 20 régions sur 22 finançaient le VIE, à des degrés d’intensité différents, mais de façon majoritairement orientée vers les PME, critère compatible avec les exigences européennes. En 2016, malgré la réforme territoriale, la typologie des financements du VIE reste très variable :

– certaines régions appliquent un système de forfait : un montant de 10 000 à 15 000 euros est versé à l’entreprise en fonction de la zone géographique concernée (« Proche Export » ou « Grand Large »). Il en est ainsi dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur et dans l’ancienne région Nord-Pas-de-Calais ;

– d’autres régions garantissent un taux de financement, généralement de 50 %, appliqué sur les indemnités du VIE et les frais de gestion et de protection sociale. C’est le cas de la majorité des régions, notamment la Normandie, l’ancienne région Lorraine, l’ancienne région Midi-Pyrénées, l’ancienne région Bourgogne, la Corse et l’outre-mer ;

– la Région Pays de la Loire finance quant à elle à 100 % les missions commerciales d’une durée de 12 mois ;

– Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes avaient une politique de non-financement, mais une réflexion est en cours dans les nouvelles régions Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes, en raison de la fusion.

Bpifrance permet de répondre aux défaillances de marché en facilitant l’accès au crédit des entreprises lorsqu’il fait l’objet d’un rationnement en raison de l’application de règles prudentielles. Il s’agit en particulier de résoudre les difficultés de financement que rencontrent les PME pour accéder aux marchés financiers. Bpifrance a octroyé 5,4 Md€ de garanties en 2015 et prévoit de monter à 5,8 Md€ en 2016. Ces garanties portent sur une fraction variable du risque mais constituent un élément déclencheur dans la décision de la banque de mettre en place un financement au profit de l’entreprise.

Par ailleurs, Bpifrance a créé, en 2015, une offre de crédits-export de petits montants et de rachat de crédits fournisseur, afin de pallier la défaillance de marché observée sur ce type de produits. En pratique, Bpifrance propose désormais, à destination des entreprises exportatrices (essentiellement des PME et des ETI), des financements export d’un montant compris entre quelques millions d’euros et 25 M€, ainsi que, en cofinancement avec des banques commerciales, des crédits pouvant atteindre 75 M€. Les premières opérations ont été réalisées en 2015.

Selon la CGPME toutefois, Bpifrance propose des aides inadaptées, car calibrées pour les ETI et non pour les PME. Les difficultés spécifiques aux PME, telles que la moindre capacité financière ou l’absence de « taille critique » ne sont pas prises en compte. Ainsi, comme mentionné par une PME interrogée (10), les crédits de Bpifrance ne seraient attribués qu’en fonction de critères de fonds propres très stricts, qui pénaliseraient les petites entreprises et entraveraient leur développement à l’international.

Par ailleurs, le soutien de Bpifrance a longtemps coexisté avec celui de la Coface (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur), société d’assurance-crédit dont la mission était de protéger les entreprises exportatrices contre les risques liés au taux de change, aux impayés, ou aux frais de prospection. La Coface apportait des garanties portant sur des risques non assurables par le marché privé (11), au travers de dispositifs tels que l’assurance-crédit, l’assurance prospection, la garantie de change ou la garantie du risque exportateur.

La distinction entre la garantie du risque lié au financement des actions de prospection (par la Coface) et le financement des dépenses d’internationalisation (par Bpifrance) générait une grande confusion qui nuisait à la bonne connaissance, donc à la bonne utilisation des dispositifs, entraînant un fort taux de non-recours par des entreprises qui auraient pourtant pu y être éligibles.

Les dispositifs proposés par la Coface :

– l’assurance-crédit : l’assurance-crédit consiste à couvrir, à moyen ou à long terme, les exportateurs contre le risque d’interruption de leur contrat, et les banques contre le risque de non-remboursement des crédits à l’exportation octroyés à un acheteur étranger, public ou privé, pour l’achat de biens ou de services français. Toutefois, l’assurance-crédit bénéficie essentiellement aux grands contrats de fourniture de biens d’équipement ;

– l’assurance prospection : l’assurance prospection a pour objet d’accompagner les actions de prospection commerciale des PME (12) dans les pays étrangers, en indemnisant les dépenses liées à ces actions en cas d’échec total ou partiel de celles-ci. En 2009, l’objectif d’atteindre 10 000 bénéficiaires de la procédure à l’horizon 2012 a été fixé. Cet objectif a été dépassé, le nombre de bénéficiaires de l’assurance prospection étant aujourd’hui de l’ordre de 13 000 (en incluant l’A3P (13)) ;

– la garantie de change : la garantie de change permet d’assurer les exportateurs contre la baisse éventuelle du cours des devises de facturation d’un contrat dont la signature et l’entrée en vigueur sont incertaines ;

– la garantie du risque exportateur : la garantie du risque exportateur recouvre deux types de garanties, la garantie des cautions et la garantie des préfinancements. La garantie des cautions facilite l’émission par les établissements de crédit, pour le compte des exportateurs, des cautions relatives aux contrats internationaux ; la garantie des préfinancements permet de garantir les banques, lorsque celles-ci accordent aux exportateurs des prêts leur permettant de financer le besoin de trésorerie lié à l’exécution de leurs contrats d’exportation.

En définitive, les différents professionnels auditionnés par votre rapporteure indiquent que les acteurs « administratifs » tels que Business France ou Bpifrance proposent des aides inadaptées aux préoccupations et difficultés concrètes des PME, car trop peu opérationnelles et calibrées pour des entreprises de plus grande taille. Le monde de « l’administration » ne saurait pas répondre aux attentes du monde de « l’entreprise ».

Les chambres de commerce et d’industrie implantées en France jouent un rôle de facilitateur et d’accélérateur. Elles accompagnent les PME dans la définition de leur projet, dans l’élaboration d’une structure financière et de ressources humaines adaptée. Elles apportent leur assistance à la préparation de demandes d’aides financières auprès des régions ou d’autres organismes, et organisent des salons, ainsi que des journées de formation ou de rencontres. Elles sont ainsi la première et la principale porte d’entrée des entreprises souhaitant aller à l’international.

Les chambres de commerce et d’industrie françaises implantées à l’international, partenaires des CCI et des entreprises, proposent un accompagnement individualisé afin d’optimiser l’expansion des entreprises françaises à l’international, et de faciliter leur implantation tout en en limitant les coûts. Comme indiqué par sa documentation de présentation, le réseau, qui comprend 115 chambres de commerce et d’industrie françaises à l’international, dans 85 pays, anime les communautés d’affaires, promeut les intérêts des entreprises françaises à l’étranger et les produits français à l’international, informe les entreprises sur les marchés internationaux et les pratiques d’affaires locales, accompagne les entreprises, favorise leur développement à l’étranger (ou en France pour les entreprises locales) et forme les collaborateurs des entreprises françaises et locales dans le pays d’implantation.

L’ensemble de ces chambres de commerce sont regroupées sous la bannière CCI International.

Selon la CGPME, les CCI et les chambres des métiers mènent une action intéressante, car elles mettent en relation des entreprises souhaitant exporter avec des professionnels ayant l’expérience des démarches à suivre, des difficultés potentielles, ou des solutions opérationnelles à apporter.

Toutefois, comme indiqué par les représentants rencontrés par votre rapporteure, les CCI sont confrontées à des contraintes financières et doivent sélectionner les dispositifs d’appui ou les entreprises accompagnées. Le montant de la taxe pour frais de chambres, perçue par les CCI, a ainsi diminué de 37 % entre 2013 et 2017, et 2 500 emplois ont dû être supprimés en 2015 et 2016. Pour l’année 2017, le projet de loi de finances prévoit une nouvelle baisse de 60 M€ de la taxe pour frais de chambres (- 15,95 %), baisse toutefois moins importante que celle qui avait été imposée en 2016, de 130 M€.

La réduction des moyens des CCI

L’article 9 de la loi du 23 juillet 2010, modifié par l’article 41 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010, a institué une taxe pour frais de chambres (TFC) destinée à financer une partie des missions du réseau, à l’exception des activités marchandes. La taxe est constituée de deux contributions :

– une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (TA-CFE), dont le taux est voté annuellement par chaque CCI de région à compter de 2013, sans pouvoir excéder le taux de l’année précédente ;

– une taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (TA-CVAE), dont le taux est fixé au niveau national. Le produit de la TA-CVAE est versé à un fonds de financement des chambres de région et, depuis 2016, à CCI France.

Depuis 2013, toutefois, les recettes affectées aux CCI ont été continuellement réduites :

– le taux national de la TA-CVAE a été réduit sur la période 2011-2014 (fixé à 6,3 % en 2013, il est porté à 5,6 % en 2014), et diminue, depuis 2014, corrélativement à la baisse du plafond de la TA-CVAE (un dispositif est prévu pour que toute nouvelle baisse du plafond de la TA-CVAE se traduise par une baisse du taux de la TA-CVAE) ;

– l’article 39 de la loi de finances pour 2013 a étendu aux CCI le dispositif de plafonnement des taxes affectées mis en place par la loi de finances pour 2012 ;

– à la suite de la mission Queyranne-Jürgensen-Demaël de 2013 sur les interventions économiques en faveur des entreprises, qui avait chiffré à 400 M€ la réduction possible du montant des taxes affectées aux réseaux consulaires en 2014 et 2015, la loi de finances initiale pour 2014 a mis en place une baisse de 270 M€ de la TFC, pour en limiter le montant à 1 098 M€. Cette baisse était opérée par une réduction du plafond de la TA-CVAE de 100 M€ (- 12,21 %) et par un prélèvement exceptionnel de 170 M€ le fonds de financement des CCI de régions, dont ont été exonérées les chambres d’outre-mer.

– la loi de finances pour 2015 a prévu une baisse de 213 M€ de la TFC et un prélèvement exceptionnel de 500 M€ a été effectué sur les CCI disposant au 31 décembre 2013 de plus de 120 jours de couverture de leurs charges d’exploitation par leur fonds de roulement.

 

2013

2014

2014/13

2015

2015/14

2016

2016/15

2017

2017/16

2017/13

plafonds de TFC

1 368 000

1 268 000

- 7,31 %

1 055 117

- 16,79 %

925 117

- 12,32 %

865 117

- 6,49 %

- 36,76 %

dont TACFE

549 000

549 000

0,00 %

549 000

0,00 %

549 000

0,00 %

549 000

0,00 %

0,00 %

dont TACVAE

819 000

719 000

- 12,21 %

506 117

- 29,61 %

376 117

- 25,69 %

316 117

- 15,95 %

- 61,40 %

TFC nette

1 339 131

1 239 131

- 7,47 %

1 026 248

- 17,18 %

896 248

- 12,67 %

836 248

- 6,69 %

- 37,55 %

Prélèvements exceptionnels

 

170 000

 

500 000

 

 

 

 

 

 


(En milliers d’euros)

Source : questionnaires budgétaires

Les conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) constituent un réseau de chefs d’entreprise et d’experts de l’international, choisis pour leur compétence et leur expérience, et au service du développement de la présence économique française dans le monde. Ces conseillers sont présents dans toutes les régions et dans plus de 140 pays. Leurs missions recouvrent le conseil aux pouvoirs publics, l’appui aux entreprises, la promotion de l’attractivité de la France et la formation des jeunes à l’international.

Ils mènent un large éventail d’actions : participation aux diverses instances de conseil économique, au ministère, en région et dans les ambassades à l’étranger ; mise en place d’enquêtes, publication de notes et de recommandations ; organisation de colloques, forums et symposiums ; parrainage de PME à l’international ; soutien au développement du dispositif VIE et sensibilisation des jeunes aux métiers de l’international.

Au 1er juillet 2016, les CCEF sont environ 3 800 membres actifs (contre 3 400 en 2010) dont 74 % résident à l’étranger et 26 % en France. Par grande zone géographique, l’Afrique/Océan indien représente 13 % des CCEF, l’Amérique latine 7 %, l’Amérique du Nord 8 %, l’Asie Pacifique 15,5 %, l’Asie centrale 2,5 %, l’Europe 19 % et le Maghreb/proche et moyen Orient 9 %.

L’OSCI est la fédération des entrepreneurs spécialistes du commerce international. Elle regroupe les acteurs privés de l’accompagnement à l’international, et se positionne en complément, voire en concurrence, des dispositifs publics de soutien. Elle comprend des sociétés qui offrent une gamme diversifiée de services d’accompagnement à l’international et de commercialisation de produits : les sociétés d’accompagnement à l’international (SAI), les sociétés de gestion export (SGE) et les sociétés de commerce international (SCI). Ces sociétés contribuent aux exportations indirectes (14). Le périmètre des activités réalisées par la société spécialisée est variable en fonction de la spécificité des marchés locaux, des projets commerciaux de l’entreprise exportatrice etc.

Leurs prestations s’inscrivent dans le cadre général du dispositif français de soutien à l’export et apportent aux PME une approche singulière d’export de terrain. Ces opérateurs sont en capacité d’accompagner, dans la durée, des entreprises sur des projets industriels complexes dans des pays difficiles et éloignés des zones de production françaises. Les OSCI ont en commun une expertise du terrain et une culture du résultat qui en font les partenaires naturels des entreprises. En outre, l’organisation professionnelle participe à l’écosystème du commerce extérieur et entretient des relations avec ses principaux acteurs.

Les fédérations d’entreprises mènent, elles aussi, une action à l’international. Ainsi, la CGPME développe une politique volontariste de soutien à l’internationalisation des PME. Elle axe son action sur le multi-sectoriel, et accompagne des profils d’entreprises très différents (notamment, récemment, en Iran et en Turquie), allant de l’entreprise primo-exportatrice à l’exportatrice confirmée, de celle qui réalise un chiffre d’affaires annuel de 600 000 euros à celle qui en réalise un de plus de 2,3 Md€.

La CGPME s’assure de la satisfaction des entreprises accompagnées par la soumission systématique d’un questionnaire. Des critères plus objectifs permettent également d’en rendre compte : lors d’un déplacement récent d’une délégation française en Ukraine, 50 % des entreprises ont conclu des contrats de partenariats avec des entreprises ukrainiennes à l’issue de la mission. Par ailleurs, alors même que ces entreprises doivent payer pour faire partie des différentes délégations, elles font le plus souvent le choix de revenir et de participer à nouveau, signe qu’elles y trouvent un intérêt justifiant le prix facturé.

La CGPME va, parfois, à l’encontre les conseils d’organismes tels que Business France. Ainsi, alors que Business France avait conseillé à des PME de ne pas aller en Iran, la confédération a tout de même organisé le déplacement d’une délégation. Selon les représentants rencontrés par votre rapporteure, les entreprises en sont revenues satisfaites, et des contrats fructueux ont été conclus. « La CGPME s’est alors débrouillée non seulement sans Business France, mais plus encore contre Business France », selon les membres rencontrés.

La CGPME regrette toutefois de ne pas avoir un soutien financier suffisant pour financer cet accompagnement.

L’ensemble de ces difficultés conduisent à une faiblesse du nombre de PME françaises exportatrices, autour de 120 000 aujourd’hui, soit quatre fois moins qu’en Allemagne et deux fois moins qu’en Italie, qui en comptent respectivement 400 000 et 200 000. Selon les données de CCI International, seules 41 % des PME sont présentes à l’international, contre 62 % des ETI et grandes entreprises. Pour ces entreprises, l’internationalisation représente un risque (par exemple de défaut de paiement, d’évolution des devises, etc.) avant d’être une opportunité, et certaines ne l’envisagent qu’en dernier recours, lorsque le marché national ne suffit plus à assurer les profits nécessaires ou à écouler le stock.

Par ailleurs, en 2015, si 96 % des exportateurs de biens sont des PME, elles ne représentent que le quart (15 %) des exportations en volume. En revanche, les 1 000 premiers exportateurs de biens, soit 0,8 % du total des entreprises, représentent 71,3 % des exportations et les multinationales représentent la quasi-totalité des exportations françaises. L’appareil exportateur français est ainsi concentré aux mains des grandes entreprises.

CONCENTRATION DE L’APPAREIL EXPORTATEUR FRANÇAIS

Enfin, parmi les PME, le taux de rotation est particulièrement important, et la capacité à s’établir de façon pérenne sur un marché étranger particulièrement difficile. Comme l’indiquaient les représentants de Business France, beaucoup d’entreprises, notamment de PME, ont un premier contrat à l’export, mais sans permanence ensuite. Ainsi, en 2015, alors que 31 000 entreprises, soit un quart des exportateurs, commencent une activité d’exportation, 27 400 la cessent dans le même temps (soit 23 % des exportateurs recensés en 2014). La taille de l’opérateur est un facteur explicatif important du maintien à l’international : 90 % des « entrants » comme des « sortants » sont des exportateurs de moins de 20 salariés ; 26 % des exportateurs de moins de 20 salariés en 2014 n’exportent plus en 2015, alors que seuls 9 % des plus de 250 salariés cessent d’exporter. De même, la proportion de défaillances parmi les exportateurs adossés à un groupe, donc avec des moyens financiers plus conséquents, est faible. Ainsi, en 2015, seulement 14 % des opérateurs sous contrôle d’un groupe cessent leur activité à l’exportation contre 35 % pour les exportateurs indépendants et 60 % pour les primo-exportateurs indépendants.

Si ce renouvellement participe à la compétitivité économique, il reflète aussi la vulnérabilité des exportateurs occasionnels, qui s’essayent à l’international sans toujours confirmer cet essai. Selon l’OSCI, « les PME s’épuisent très vite », avant d’avoir le temps de réaliser l’apprentissage nécessaire à la durabilité de leur activité.

Business France, levier opérationnel de la politique gouvernementale à l’export, n’a pas vocation à accomplir l’ensemble des missions d’accompagnement : les autres acteurs, publics, parapublics ou privés, ont également leur place, à la condition que les responsabilités de chacun soient clarifiées et que les entreprises puissent être orientées facilement. De façon positive, plusieurs conventions entre les différents acteurs de l’export ont été signées, de manière à préciser les rôles respectifs, à éviter les redondances, et à améliorer la lisibilité du dispositif global pour les PME. Votre rapporteure salue ces premières démarches, tout en soulignant certaines limites.

Dès 2013, une convention a été signée entre Business France et Bpifrance afin de créer un guichet unique pour la prospection et le financement. Quarante conseillers aux affaires internationales (CAI) ont été déployés pour proposer aux entreprises françaises un dispositif d’accompagnement personnalisé dans la durée pour leur développement international. Bpifrance, la Coface et Business France ont, par ailleurs, noué un partenariat et créé le label « Bpifrance export » en mai 2013. Ce label, sous lequel sont commercialisés tous les dispositifs de soutien financier publics existants, a vocation à améliorer et à simplifier l’offre des trois acteurs en matière de soutien à l’export et à favoriser l’accès des PME aux produits en améliorant la lisibilité de cette offre.

Une convention stratégique entre Business France, CCI international et CCI France international a été signée le 11 mars 2015. Elle a permis d’élaborer un projet d’accompagnement ciblé, d’ici fin 2017, de 3 000 TPE et PME disposant d’un potentiel export, avec l’objectif de développer des courants d’affaires pour un tiers d’entre elles. La convention définit les rôles de chaque organisme dans l’accompagnement : CCI France prépare les entreprises à l’international, valide et structure leur projet en posant un diagnostic et définit un plan d’action personnalisé ; Business France prospecte les marchés et développe les courants d’affaires ; les CCI françaises à l’international aident les entreprises à s’implanter, à se structurer et à se pérenniser sur le marché cible. L’accord a également vocation à être décliné à l’étranger à travers des conventions prenant en compte les spécificités du contexte local et associant l’ensemble des acteurs (15).

Par ailleurs, une convention tripartite a également été signée le 11 mars 2015 entre le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF), Business France et l’État, afin de renforcer le rôle des CCEF dans la mission de parrainage avec l’aide de Business France. Cette convention se veut avant tout un document récapitulant les principaux axes d’intervention concrets des CCEF sur les missions qui leur sont attribuées par le décret du 17 juin 2010 modifié. Elle prévoit notamment le parrainage de 500 PME et la désignation et la mise en ligne des coordonnées d’un référent PME en charge d’une fonction de parrainage dans la plupart des sections à l’étranger.

Le transfert des garanties publiques à l’exportation de la Coface au groupe Bpifrance, prévue pour être effective au 31 décembre 2016, permet d’achever la simplification amorcée dans la distribution des produits de soutien à l’export et à l’internationalisation des entreprises. Ainsi, la loi de finances rectificative pour 2015 prévoit, à son article 103, le transfert des garanties publiques au commerce extérieur de la Coface vers Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance. Le principe du transfert a été détaillé par une convention signée le 18 avril 2016 entre Coface et Bpifrance et sera complété par une convention de gestion État-Bpifrance. Ce transfert d’activité devrait permettre de redynamiser la distribution des produits de soutien public aux PME et consacrera l’émergence d’un point d’accès unique et complet pour les entreprises françaises, le soutien à l’internationalisation des entreprises rejoignant le soutien à la création, au développement et à l’innovation. De plus, le maillage territorial de Bpifrance contribuera à la promotion de ces outils. En outre, le coût pour l’État de la gestion des garanties publiques à l’exportation devrait diminuer de 20 %.

De plus, le 29 septembre 2016, Business France et Régions de France ont signé un accord de coopération, qui définit les responsabilités respectives des parties et les relations entre elles. Il s’agit de garantir, au niveau national et au niveau local, une même vision de l’accompagnement à l’export, par la définition de priorités ou de critères identiques, ou, à tout le moins, cohérents. Cet accord prévoit notamment que les volets dédiés des schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, pilotés par les régions sont, au niveau territorial les outils structurants de l’action publique d’accompagnement des entreprises à l’export. En parallèle, Business France s’engage à partager sa connaissance des marchés en rapprochant les filières d’excellence et les savoir-faire régionaux avec les opportunités sectorielles des pays à potentiel. Business France a également pour objectif de signer avec chacune des régions une convention pour préciser les modalités d’appui aux entreprises de la région concernée. La faillite, en 2015, d’ERAI (Entreprise Rhône-Alpes International), agence indépendante créée par la région Rhône-Alpes pour accompagner l’internationalisation, facilite la reconnaissance de la légitimité des représentants de Business France en région.

En outre, votre rapporteure salue la signature, le 2 novembre 2016, de la convention entre Business France et l’OSCI, annoncée par M. Matthias Fekl lors du second forum des PME à l’international. Une telle convention était indispensable pour accroître la complémentarité des actions des organismes publics et privés. Les services offerts aux entreprises reflétaient déjà cette complémentarité, Business France intervenant principalement en « amorçage » des démarches commerciales, et les OSCI en « ancrage » local de l’exportateur. La convention permettra notamment d’amplifier les synergies opérationnelles entre le secteur public et le secteur privé afin d’accompagner le plus d’entreprises exportatrices à l’international. À l’image des accords signés avec les CCI françaises à l’étranger, la convention institue un partenariat privilégié mais non exclusif entre Business France et l’OSCI. Elle pourra être complétée par les accords signés entre les bureaux Business France et les représentants de l’OSCI dans les pays couverts.

Le Conseil stratégique de l’export : l’aboutissement de la volonté de coordination

Illustration de la volonté de coordination, le Conseil stratégique de l’export (CSE), rassemblant l’ensemble des acteurs concourant au commerce extérieur, a été installé en mars 2016. Prévu par l’article 6 du décret du 22 décembre 2014 relatif à l’agence Business France, le CSE, présidé par le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, réunit les principaux acteurs publics et privés intervenant dans le soutien à l’internationalisation des entreprises : Business France, Régions de France, CCI International, CCI France, CCI France International, le Comité national des conseils du commerce extérieur de la France, Bpifrance, la Coface, Medef International, la CGPME, l’OSCI, la direction générale du Trésor, la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, la direction générale des entreprises, la direction générale des douanes et des droits indirects, la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises ainsi que plusieurs personnalités qualifiées. Le CSE, vise à mieux coordonner l’action de tous les acteurs de l’accompagnement à l’export et à faire circuler l’information. Cette instance est la structure de concertation sur la stratégie et de suivi des actions, notamment en vue d’élaborer un rapport annuel au Parlement sur la politique de commerce extérieur.

Pourtant, malgré les mesures de simplification du dispositif institutionnel de soutien, les entreprises sont encore, souvent, désorientées face à la complexité qui persiste. Comme indiqué par les représentants de Business France, il demeure encore un trop grand nombre d’acteurs, ce qui génère une certaine « cacophonie » et une grande hétérogénéité du soutien.

Ainsi, selon un sondage réalisé en juin 2016 (16) par OpinionWay pour CCI International, à la question « Quels sont tous les organismes accompagnant les entreprises dans le développement à l’international que vous connaissez, ne serait-ce que de nom ? », 64 % des entreprises interrogées n’étaient en mesure de citer aucun organisme. Parmi les 36 % citant au moins un organisme, le nombre moyen d’organismes mentionnés était inférieur à 2 (1,9). Si les chambres de commerce et d’industrie en France étaient citées par 20 % des entreprises interrogées, Business France n’était mentionné que par 8 % des entreprises interrogées et Bpifrance par 5 % des entreprises seulement. La Coface était citée par 9 % des entreprises, les chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger par 7 % des entreprises, les banques ou organismes financiers par 5 % des entreprises, les régions et conseils régionaux par 2 % des entreprises interrogées, les ambassades par 1 % des entreprises et les consultants privés par 1 % des entreprises.

Les efforts de clarification et de diffusion de l’information sur les responsabilités de chaque organisme public ou privé de soutien doivent donc, indéniablement, être poursuivis, car une trop faible connaissance des dispositifs peut conduire à un fort taux de non-recours d’entreprises pourtant éligibles. Cette clarification, notamment au niveau local, constitue l’un des principaux enjeux identifiés par le ministère des affaires étrangères et du développement international en matière de commerce extérieur, pour les mois à venir.

La mesure n° 2 des quinze mesures annoncées lors du premier forum des PME à l’international visait à créer un annuaire de contacts propres aux PME parmi les réseaux en France et à l’étranger des conseillers du commerce extérieur de la France. Cette mesure a été mise en œuvre.

De plus, des travaux devaient être engagés pour améliorer la lisibilité des sites internet publics consacrés à l’internationalisation des entreprises et les liens entre eux. Ces travaux ont permis de créer le portail de l’international (« France-international »), point d’entrée unique permettant aux entreprises de trouver les réponses à toutes leurs questions en quelques clics : le site comporte peu de textes, mais beaucoup de renvois vers les sites des organismes, privés ou publics, compétents pour chaque question posée.

La mesure n° 4 des quinze mesures annoncées lors du premier forum des PME à l’international visait à simplifier les procédures douanières, notamment par leur dématérialisation et par la création d’un guichet unique. Cette mesure a été partiellement mise en œuvre : à ce stade, le taux de dématérialisation des procédures douanières d’import/export, gage d’accessibilité et de facilitation des démarches, a dépassé les 85 % de l’ensemble des formalités de douane. Il devrait encore être amélioré par la montée en puissance du chantier du Guichet unique national (GUN) douanier, permettant, à terme, une totale dématérialisation des opérations nécessitant l’intervention de plusieurs services d’État (services vétérinaires, offices professionnels, etc.).

Pour autant, la simplification des démarches est loin d’être achevée : les douanes exigent ainsi, encore, une déclaration mensuelle, par les entreprises, de leurs exportations en Union européenne. Cette déclaration représente une charge administrative importante, alors qu’elle n’est utilisée qu’à des fins statistiques, et que les données sont déjà renseignées par les transitaires (17). De plus, selon la CGPME, au niveau intra-européen, la simplification annoncée n’a pas conduit à une différence notable par rapport à la situation antérieure. Dans les exportations vers la Chine, une légère amélioration est perceptible, mais n’est pas encore totalement satisfaisante.

Les autres démarches (dépôts des statuts, ouverture de comptes bancaires, communication, recrutement de collaborateurs…) représentent encore un coût financier et un coût en temps de travail importants, qui conduisent à des abandons trop précoces des tentatives de développement international par les entreprises, notamment les plus petites.

Pour concentrer l’accompagnement et les moyens sur les couples pays/secteurs les plus pertinents pour les PME, et comme proposé par la mesure n° 8, six familles prioritaires à l’export ont été lancées depuis 2012 : mieux vivre en ville, mieux se soigner, mieux communiquer, mieux se nourrir, mieux voyager, mieux se divertir et se cultiver. Des fédérateurs ont été nommés et les feuilles de route pour 2016 préparées.

Des actions devaient, par ailleurs, être menées pour sensibiliser les grands groupes à la nécessité d’entraîner dans leur sillage les PME avec lesquelles ils travaillent, pour favoriser leur implantation à l’international. Dès 2010, l’association Pacte PME, fédérant 53 grands comptes privés et publics, 20 pôles de compétitivité et 21 organisations professionnelles, a été créée pour renforcer les liens entre grands comptes et PME dans le but de contribuer à l’internationalisation des PME et de faire émerger des ETI. Pacte PME a absorbé les activités de « Pacte PME international », qui consistait à favoriser les actions de portage à l’international entre grands groupes et PME, après la dissolution de l’association en 2012. Ce travail de coopération entre grands groupes et PME est en cours de continuation. Il fait partie des objectifs du Conseil stratégique de l’export.

Selon des PME et des acteurs auditionnés par votre rapporteure, la structuration en « famille à l’export » ou en « filières » n’apporte pas de réponse satisfaisante au sentiment d’isolement des entreprises souhaitant se développer à l’export. En effet, au sein d’une même filière, les entreprises sont souvent concurrentes, et la collaboration peine à se déployer. Par ailleurs, les filières font parfois elles-mêmes concurrence à Business France, pour organiser leurs propres salons à l’étranger, conduisant à une moins bonne clarté de l’offre française à l’international.

De plus, l’appartenance à une famille prioritaire n’est pas gage de bonne performance à l’export. Ainsi, le déficit de la famille « mieux communiquer » s’est dégradé à nouveau en 2015 (de 15,6 Md€ en 2014 à 16,5 Md€ en 2015). Les exportations de la famille « Mieux vivre en ville » ont reculé modérément. L’excédent français sur les écoproduits – qui constituent près des trois-quarts des exportations de la famille « mieux se nourrir » – se réduit, passant de 2,3 Md€ à 1,6 Md€ sur l’année, conséquence de la contraction des exportations (- 5,9 % à 8,6 Md€), tandis que les importations augmentent de 2,8 % (à 7,0 Md€). Dans les deux nouveaux secteurs identifiés en 2014 et 2015 (industries culturelles et tourisme), le solde se dégrade également.

Enfin, la notion de filière ne tient pas compte de la potentielle transversalité ou multisectorialité de certains produits : beaucoup ne trouvent leur place dans aucune filière.

Par ailleurs, la collaboration entre grands groupes et PME est encore très lacunaire. Plusieurs entreprises parmi celles interrogées ne connaissaient pas le dispositif Pacte PME ; d’autres le jugeaient trop large pour être efficace. Beaucoup mentionnaient l’absence d’intérêt ou l’indifférence persistante des grands groupes à la situation des PME gravitant autour d’eux et souhaitant se développer à l’international. Seules 5 % des PME françaises ont, aujourd’hui, une action conjointe à l’international avec un grand groupe et la solidarité nationale, de façon générale, demeure faible.

Si le crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE) n’a pas encore totalement porté ses fruits, c’est notamment parce qu’il n’a pas été suffisamment ciblé sur les entreprises exportatrices ou souhaitant le devenir.

C’est pourquoi, votre rapporteure propose de maintenir le dispositif, qui représente indéniablement une aide non négligeable, mais de le cibler sur les entreprises à vocation internationale, telles que les entreprises artisanales ou industrielles. Un critère de conditionnalité pourrait être introduit, assis sur la part du chiffre d’affaires réalisé à l’export.

Il en résulterait la possibilité de concentrer les allégements sur les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale, de manière à leur permettre de combler leur retard et de prendre de l’avance, en rendant le coût du travail, puis le prix de vente des produits, plus compétitifs.

Les labels sont aujourd’hui un facteur de réussite des entreprises françaises, notamment des PME, à l’international. Pourtant, leur efficacité est limitée par leur trop grande complexité. Certains sont auto-déclaratifs (Made in France, Fabriqué en France), quand d’autres sont attribués par un organisme de certification (Origine France garantie). Les pourcentages de matières françaises, ou les étapes de réalisation devant avoir lieu sur le sol français diffèrent d’un label à l’autre, brouillant la visibilité de la « marque France ».

Ainsi, dans le secteur alimentaire par exemple, cohabitent les marques « Origine France garantie », « Made in France » ; « Label rouge », ainsi que les appellations régionales, pour lesquels les critères d’attribution et de contrôle varient. Le label « Entreprise du patrimoine vivant » valorise également les savoir-faire, au-delà de la valorisation des seuls produits.

LES LABELS ATTESTANT DE L’ORIGINE FRANÇAISE D’UN PRODUIT

L’importance des fonds publics alloués à l’opérateur Business France, et le caractère stratégique du commerce extérieur, justifient qu’une attention particulière soit portée à la pertinence de l’allocation des sommes et à la bonne gestion de l’opérateur. Le contrat d’objectifs et de moyens de Business France, signé par les ministres de tutelle de l’opérateur le 7 octobre 2015 et approuvé par le conseil d’administration, reflète les priorités stratégiques fixées par les pouvoirs publics. Quatre axes ont été identifiés :

1° Mieux accompagner les entreprises : Business France devra progressivement diminuer le nombre de ses accompagnements collectifs pour se concentrer sur les salons offrant le plus de retombées et réduire ses événements au profit d’un accompagnement de plus long terme, individualisé et répondant aux besoins des entreprises, en particulier des PME. Business France devrait accompagner plus de 9 400 entreprises à l’international chaque année. Surtout, l’opérateur s’engage à ce que 39 % des entreprises ainsi accompagnées soient en mesure de signer des contrats (contre 34 % en 2014) ;

2° Identifier et suivre les PME et ETI à fort potentiel en régions : pour s’assurer de la pérennité des démarches d’internationalisation des PME et ETI, Business France s’engage avec Bpifrance et les régions dans un suivi dans la durée et sur mesure de 1 000 PME et ETI de croissance qu’elle accompagne en structurant leur plan d’internationalisation et en les conseillant à chacune des étapes de leur conquête de marchés internationaux ;

3° Mesurer la satisfaction des entreprises accompagnées : ce tournant qualitatif se traduira par une enquête organisée par un tiers (institut de sondage), qui interrogera les clients passés de Business France sur la probabilité qu’ils recommandent les services de l’agence à leurs pairs. Les tutelles fixent un objectif de plus de 60 % d’entre elles se déclarant comme satisfaites au point de conseiller les services de Business France ;

4° Amplifier le succès du VIE : les tutelles fixent un objectif de 10 000 VIE en poste d’ici à 2017. En outre, un indicateur de mesure du placement de VIE au sein des PME et ETI a été développé et prévoit qu’en 2017, 4 000 VIE soient en poste dans des PME et ETI.

Votre rapporteure recommande qu’un suivi attentif de la mise en œuvre effective de l’ensemble de ces objectifs soit assuré.

Au-delà de ces objectifs stratégiques, c’est toute la gestion de l’opérateur qui doit être rationalisée, notamment par la mise en mise en place de nouvelles procédures et outils de gestion : l’installation d’un comité d’audit ou l’élaboration d’un schéma de comptabilité analytique.

Enfin, votre rapporteure recommande de stabiliser la subvention versée à l’opérateur, de manière à lui permettre de continuer à facturer ses prestations en deçà des tarifs du marché, pour en faire bénéficier autant de PME que possible. Après une baisse de 7 % entre 2015 et 2016, dont 3 % entre 2016 et 2017, il est indispensable de conserver, voire d’accroître les moyens alloués à Business France pour les années à venir. En cas contraire, l’opérateur risquerait d’être contraint de facturer plus cher ses prestations, ce qui nuirait à leur efficacité auprès des PME.

Il est essentiel de poursuivre les partenariats noués entre Business France et les autres opérateurs afin d’optimiser les synergies, de limiter les redondances, et de garantir une affectation la plus efficace possible des deniers publics.

En particulier, les liens entre Business France et les CCI françaises à l’international doivent être renforcés et conduire à une meilleure organisation du soutien à l’étranger. Ainsi, les représentants de CCI international appelaient à la rationalisation des implantations des bureaux de Business France. Ils regrettaient que, dans certains pays, un bureau de CCI International et un bureau de Business France soient présents et accomplissent des missions comparables alors que, dans d’autres pays, aucun des deux organismes n’est représenté. Selon les responsables de CCI international rencontrés par votre rapporteure, Business France serait réticent à organiser une quelconque répartition des implantations. Selon le ministère des affaires étrangères, tutelle de Business France, interrogé sur cette question, Business France comme les CCI françaises à l’international souhaitent être présents dans les pays qui « rapportent » le plus (États-Unis, Singapour), alors que l’un comme l’autre peinent à s’établir dans les pays qui ne seront « rentables » que dans plusieurs années. La CGPME confirmait l’existence, dans certains pays, d’une rivalité entre les CCI et Business France (notamment en Iran), qui expliquerait la réticence des deux organismes à mettre en place une mutualisation, sous quelque forme que ce soit. Quelle que soit la réalité de la concurrence, votre rapporteure appelle, au nom de l’intérêt général, à la rationalisation des implantations des différents organismes français à l’étranger, de manière tout à la fois, à éviter les doublons et à combler les « trous dans la raquette ». Les choix stratégiques faits par le ministère des affaires étrangères et la direction générale du Trésor, transcrits dans les orientations données à Business France dans le cadre du contrat d’objectifs et de performances, doivent comporter une analyse de la rationalité de chaque implantation, tenant compte des autres dispositifs présents dans le pays, adoptant une vision stratégique à long terme, et ne se limitant pas aux seules considérations de rentabilité immédiate.

Une entreprise ne peut s’implanter à l’étranger que dans la durée. Cette implantation doit être pensée sur le long terme, pour connaître les marchés, maintenir le contact avec les prospects, développer des relations de confiance, ou maîtriser les réglementations et les formalités.

C’est pourquoi, la diplomatie économique doit être stabilisée. En conséquence, la tutelle du ministère des affaires étrangères sur le commerce extérieur doit être préservée, de manière à inscrire les politiques publiques engagées dans la durée. De façon plus large, les pouvoirs publics français doivent définir une stratégie à moyen terme et assurer la constance des dispositifs de soutien ou des priorités affichées. Cela implique notamment de conserver, pour plusieurs années, les familles prioritaires à l’export, les mesures de garanties financières et leurs critères d’attribution, ou encore les labels de valorisation des produits français à l’étranger (dès lors que ceux-ci auront été clarifiés).

Il est indispensable d’inciter les grands groupes à entraîner, dans leur sillage, de petites entreprises, pour les accompagner à l’international. Certaines le font déjà, mais les grandes réussites – comme EDF emmenant 60 PME de la filière nucléaire dans son installation en Chine, ou Thalès s’implantant en Inde avec son fournisseur Atos – masquent une réalité beaucoup plus contrastée.

Le renforcement de l’association Pacte PME et de ses actions est nécessaire pour permettre aux entreprises de « chasser en meute » et de devenir plus fortes à l’international. Les points mentionnés par la convention signée, le 15 février 2016, entre Pacte PME et Business France, doivent faire l’objet d’un suivi particulier. Il s’agit notamment de garantir :

– la réalisation d’un recueil de bonnes pratiques recensant des actions conjointes des grandes entreprises et des PME à l’international ;

– l’amélioration de l’hébergement des VIE par des grands groupes ;

– la participation de Business France à un programme de renforcement de trente PME du secteur aéronautique ;

– l’appui de Pacte PME à l’identification d’entreprises dans le cadre du programme d’accompagnement des 3 000 entreprises.

De plus, il conviendrait d’inciter également les ETI et les plus grosses PME à chasser en meute avec les plus petites PME : cela garantirait une collaboration plus efficace que si les seuls grands groupes étaient mis à contribution. Une incitation financière pourrait éventuellement être envisagée.

Votre rapporteure recommande de stabiliser les moyens budgétaires alloués aux CCI et de cesser de leur appliquer des mesures d’économies et des prélèvements exceptionnels : il est indispensable de laisser à ces organismes les moyens de faire le travail qui leur a été confié. À ce titre, votre rapporteure demande que les éventuelles baisses à venir de la taxe pour frais de chambres (TFC) soient limitées aux seuls efforts réalisés par l’ensemble des opérateurs de l’État et autres organismes subventionnés pour concourir à la politique de réduction des dépenses publiques, à due concurrence des montants perçus par chacun et de leurs capacités à réaliser des économies. Ceci correspond à la politique mise en œuvre par la loi de finances pour 2017 : la baisse de 60 M€ de la taxe pour frais de chambres prévue dans le projet de loi de finances pour 2017 est limitée à la capacité du réseau des CCI à contribuer à la politique gouvernementale de réduction des dépenses publiques et des prélèvements pesant sur les entreprises. Votre rapporteure note également avec satisfaction qu’aucun nouveau prélèvement exceptionnel n’est prévu ni en 2016, ni en 2017. Il importe que ces deux principes de définition de la TFC soient maintenus pour les années à venir.

Cette stabilisation des moyens – moyennant la contribution légitime à la réduction des dépenses publiques – doit s’accompagner de la poursuite de la rationalisation du réseau, dont la nouvelle organisation se mettra en place au début de l’année 2017 (18). Les priorités et les objectifs des CCI seront redéfinis au 1er semestre 2017, dans le cadre des nouvelles conventions d’objectifs et de moyens conclues entre l’État et chaque CCI de région. Votre rapporteure recommande que ces conventions d’objectifs et de moyens soient l’occasion de définir des cibles réalistes mais ambitieuses en matière de développement du commerce extérieur. Elles devront, en particulier, fixer des objectifs quantitatifs en termes d’accompagnement à l’export et de taux de transformation en contrats d’affaires des entreprises accompagnées.

CONCLUSION

Indéniablement, les PME sont exposées à des difficultés particulières dans leur parcours à l’export : elles manquent souvent de l’expertise nécessaire en leur sein, souffrent de l’absence des marges financières suffisantes, et peuvent être désorientées face à la complexité des dispositifs de soutien public et privés.

Votre rapporteure reconnaît et salue toutefois les efforts qui ont été engagés pour leur apporter une aide adaptée, au travers de la définition de filières, de la mise en place de facilités de financement, de la signature de conventions entre les différents organismes, de la simplification de l’accès à l’information ou encore de la personnalisation de l’accompagnement. Ces efforts n’ont, à ce jour, pas porté tous leurs fruits. Les organismes de soutien demeurent encore trop peu connus, les filières ne sont pas toutes efficaces, les entreprises peinent à collaborer les unes avec les autres, et l’information, tout comme la réalisation de l’ensemble des démarches, représentent encore un temps, un coût et une énergie que les entreprises ne sont pas toujours en mesure d’investir.

Votre rapporteure estime cependant que des solutions, de différentes natures, existent pour améliorer et simplifier le parcours à l’export des PME, de manière à employer au mieux les atouts que celles-ci représentent pour l’économie française. Peuvent notamment être citées, parmi les solutions à envisager, les propositions suivantes :

– le ciblage du CICE sur les entreprises exportatrices ;

– la valorisation de la « marque France » ;

– la clarification des responsabilités des organismes de soutien, et leur coordination, via la poursuite de la signature de partenariats ;

– l’amélioration de la gestion de l’opérateur Business France ;

– l’harmonisation des politiques régionales de soutien à l’export ;

– la personnalisation de l’accompagnement, par la mise en relation des chefs d’entreprise souhaitant exporter avec d’autres chefs d’entreprise ayant effectué les mêmes démarches avant eux ;

– l’incitation faite aux grands groupes et aux ETI d’entraîner, dans leur sillage, des PME à l’export ;

– la stabilisation des politiques publiques de soutien à l’export et des subventions accordées aux organismes tels que Business France ou CCI International.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de M. Lionel Tardy (Entreprises), Mme Jeanine Dubié (Commerce extérieur), Mme Corinne Erhel (Communications électroniques et économie numérique), M. Jean Grellier (Industrie) et Mme Annick Loch (Postes), les crédits de la mission « Économie » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 4 novembre 2016, sur le site internet de l’Assemblée nationale (19)).

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À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Économie ».

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La commission examine l’amendement II-CE 47.

Mme Frédérique Massat. Je demande à M. Jean Grellier de bien vouloir présenter son amendement.

M. Jean Grellier. C’est un amendement que j’ai déposé avec M. Jean-René Marsac, co-président du groupe d’études sur l’économie sociale et solidaire. Cet amendement vise à rétablir une dotation de 500 000 euros en faveur du Conseil national des chambres françaises de l’économie sociale et solidaire (CNEES), comme cela avait été fait dans le projet de loi de finances pour 2016, puisque la même « punition » leur avait été infligée. Mme Karine Berger proposera une rectification de cet amendement.

Mme Frédérique Massat. Je donne la parole au rapporteur pour avis sur les crédits des « Entreprises », M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy, rapporteur pour avis. Les crédits de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) augmentent cette année de 21,9 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE), soit de 4,8 %, et de 16,5 millions d’euros en crédits de paiement (CP), soit de 3,6 %. Cette hausse vise à compenser les moindres attributions de produits qui résulteront de l’entrée en vigueur, au 1er janvier 2017, du principe de gratuité des données publiques prévu par la loi pour une République numérique.

Les crédits consacrés à l’économie sociale et solidaire (ESS) connaissent une hausse des autorisations d’engagement de 130 000 euros, soit de 3 %, mais une baisse en crédits de paiement d’environ 500 000 euros. Votre amendement, qui augmente de 500 000 euros les AE comme les CP, me paraît donc justifiable pour l’augmentation des CP, puisqu’il s’agit de préserver le même budget que l’an dernier, mais moins pour les AE, qui, eux, augmentent.

Plus largement, on observe depuis 2012 une forte redirection des crédits vers l’économie sociale et solidaire. Contrairement à d’autres actions comme l’artisanat, l’économie sociale et solidaire me paraît être bien lotie. J’émets donc un avis défavorable.

Mme Frédérique Massat. Mme Karine Berger, vous aviez une rectification ?

Mme Karine Berger. Je pense que la démarche de notre collègue Jean Grellier est la bonne car il faut que nous maintenions en AE et en CP les moyens de l’économie sociale et solidaire. Toutefois, la ponction du budget déjà très tendu de l’Insee est problématique. Le rapporteur spécial, M. Joël Giraud, me l’a confirmé. Ma proposition de rectification, sur la suggestion de MM. Jean Grellier et Jean-René Marsac, est de prendre ces 500 000 euros non pas sur le programme « Statistiques » mais sur le programme « Stratégie économique et fiscale ». Je vais être tout à fait franche avec vous Mme la présidente, si la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) nous donnait plus de possibilités, j’irai chercher ces 500 000 euros sur le programme que je présenterai cet après-midi dans le cadre de l’examen de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », notamment sur la ligne relative aux cabinets ministériels de Bercy. Cette possibilité n’est malheureusement pas possible, sauf si le Gouvernement s’y rallie dans l’hémicycle.

Mme Frédérique Massat. Je propose que cet amendement soit redéposé en séance par les mêmes signataires. Mme Karine Berger, vous pourrez vous y associer.

M. Jean Grellier. Je vais le retirer et le redéposer en séance.

L’amendement II-CE 47 est retiré.

La commission examine l’amendement II-CE82.

Mme Corinne Erhel, rapporteure pour avis. Les opérateurs de télécommunications font aujourd’hui l’objet d’une injonction contradictoire. D’une part, l’ambition du Gouvernement et des collectivités territoriales dans la couverture du territoire en haut débit mobile (3G, 4G) se traduit par une forte pression exercée sur ces opérateurs pour qu’ils accélèrent leur effort d’investissement dans les infrastructures. D’autre part, l’imposition des stations radioélectriques est calculée de façon proportionnelle : plus un opérateur fait l’effort d’investir, plus sont taux de pression fiscale augmente. Ainsi, 74 000 nouvelles stations radioélectriques devraient être déployées sur le territoire entre 2016 et 2024. Avec le maintien du système actuel, les charges d’IFER augmenteraient sensiblement.

Cet amendement propose non pas de réduire l’IFER payé par les opérateurs télécoms, mais de prévoir un mécanisme de plafonnement fixé au plus à 200 millions d’euros. Cette somme représentant la recette attendue pour 2016 : il n’y aurait donc pas de perte de matière fiscale.

L’amendement II-CE82 est accepté.

Conformément aux avis favorables de Mme Jeanine Dubié, rapporteure pour avis sur les crédits du « Commerce extérieur », Mme Corinne Erhel, rapporteure pour avis sur les crédits « Communications électroniques et économie numérique », M. Jean Grellier, rapporteur pour avis sur les crédits de « Industrie », Mme Annick Le Loch, rapporteure pour avis sur les crédits des « Postes » et contrairement à l’avis défavorable de M. Lionel Tardy, rapporteur pour avis sur les crédits « Entreprises », la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

CCI International et CCI France International

– M. Jean-François Gendron, président de CCI International

– M. Christophe Duday, directeur réseau CCI International et relations européennes

– M. Jérôme Pardigon, directeur des relations institutionnelles, CCI France

Direction générale des entreprises et direction générale du Trésor

– Mme Sandrine Gaudin, cheffe du service des affaires bilatérales et de l’internationalisation des entreprises de la direction générale du Trésor

– M. Xavier Merlin, chef du Service de l’action territoriale, européenne et internationale – DGE

Association des régions de France

– M. Marcel Saddier député, président de la commission tourisme

– Mme Marie-Reine du Bourg, conseillère aux relations parlementaires

– M. Fabrice Hellier, conseiller technique développement économique, innovation, tourisme

Confédération générale des PME (CGPME)

– M. Pierre Kuchly, délégué trésorier de la CGPME Île-de-France

– M. Pierre-Jean Baillot

Opérateurs spécialistes du commerce extérieur

– M. Étienne Vauchez, président de l’OSCI et président d’Export Entreprises

– M. Fabien Buhler, vice-président de l’OSCI et président du groupe Devexport

– Mme Agathe Hartemann, déléguée générale de l’OSCI

Business France

– M. Frédéric Kaplan, directeur général délégué

– M. Lorenzo Cornuault, directeur région et chargé des relations institutionnelles

– M. Axel Baroux, directeur réseau international

Ministère des affaires étrangères – mission du commerce extérieur et de l’attractivité

– M. Jean-Emmanuel Maury, chef de la mission du commerce extérieur et de l’attractivité

– M. Sébastien Prévost, chef du pôle « Acteurs du commerce extérieur »

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