N° 4129 tome III - Avis de Mme Luce Pane sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).


ogo2003modif

N° 4129

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈMELÉGISLATURE

EnregistréàlaPrésidencedel’Assembléenationalele 13 octobre 2016.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2017,

TOME III

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

SOLIDARITÉ

PAR Mme Luce PANE,

Députée.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 4061, 4125 (annexe n° 45).

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : PRÉSENTATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DE LA MISSION SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES 9

A. LE TAUX DE PAUVRETÉ EST STABILISÉ DEPUIS 2013 GRÂCE AU PLAN MIS EN œUVRE PAR LE GOUVERNEMENT 10

1. Le taux de pauvreté était en augmentation sous la législature précédente 10

2. Un plan de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, mis en œuvre depuis 2013 et amendé en 2015 11

3. Les résultats du plan : Une stabilisation du taux de pauvreté mais un coût non précisément connu 12

B. PARMI LES MESURES DU PLAN, LE PROGRAMME 304 FINANCE L’AIDE ALIMENTAIRE ET LA PRIME D’ACTIVITÉ 13

1. Les dépenses de RSA « socle » n’ont pas été imputées sur le programme 304 13

2. Le programme 304 finance la distribution d’aide alimentaire en nature 15

3. Plus de 4 milliards d’euros de prime d’activité seraient versés aux salariés pauvres en 2017 15

4. Le FNSA disparaît en 2017 et, avec lui, la trace des échanges de trésorerie entre l’État et les CAF dans les documents du programme 17

C. LE PROGRAMME 304 FINANCE LES DÉPENSES DE PROTECTION JUDICIAIRE MAIS PEU CELLES D’ACCOMPAGNEMENT SOCIAL 18

1. La prime d’activité et l’aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine ne donnent pas droit à un accompagnement social. 18

2. L’État et les départements s’accordent sur le partage des dépenses de protection des mineurs en danger et des mineurs étrangers isolés 19

3. Les dépenses de protection juridique des majeurs ont été reprises par l’État et imputées sur le programme 304 19

4. Un budget d’accompagnement social reconduit, en attendant une révision des cahiers des charges des structures concernées 20

5. Les dépenses d’intervention de l’État pour l’insertion des allocataires du RSA se cherchent encore une imputation budgétaire 21

D. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 137 POUR L’ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES PROGRESSENT DE 8 % 22

1. Le programme 137 promeut la culture de l’égalité entre les femmes et les hommes 23

2. Des crédits supplémentaires financeront le 5e plan de lutte contre les violences faites aux femmes 23

3. Un million et demi d’euros sont ajoutés à la lutte contre la prostitution 24

E. LE PROGRAMME 124 FINANCE L’ADMINISTRATION CENTRALE ET TERRITORIALE DES MINISTÈRES SOCIAUX 24

DEUXIÈME PARTIE : L’AIDE À LA JEUNESSE VULNÉRABLE OFFERTE PAR LES POINTS D’ACCUEIL ET D’ÉCOUTE DES JEUNES (PAEJ) 27

A. UN RÉSEAU GÉNÉRALISTE DE POINTS D’ACCUEIL ET D’ÉCOUTE DES JEUNES S’EST TISSÉ DANS L’INTERSTICE DES SERVICES PUBLICS 28

1. Les ministères de la ville et des affaires sociales créent en 1995 deux réseaux de prévention réservés aux moins de 26 ans 28

a. Le ministère de la ville ouvre des points d’écoute pour les toxicomanes majeurs de moins de 26 ans et leurs parents 28

b. Le ministère des affaires sociales expérimente en même temps des points d’accueil de jeunes fugueurs ou décrocheurs de 10 à 25 ans 29

c. PEJ et PAJ exercent dans l’interstice des compétences décentralisées et des codes de l’action sociale, de la santé publique comme du code civil 29

2. Les PAJ et PEJ sont réunis en 2002 dans un réseau généraliste d’une centaine d’accueils destinés mais non réservés aux adolescents 30

a. Une circulaire de 2002, toujours en vigueur, regroupe les points d’accueil sous un même cahier des charges qui restreint leur mission 30

b. La circulaire ne fixe plus de bornes d’âge au public accueilli et renvoie à un diagnostic local l’indication des besoins prioritaires 31

c. Sous ces réserves, la circulaire confirme les subventions de l’État mais exige une participation au moins équivalente d’autres financeurs 31

d. Les Espaces Santé Jeunes, ouverts par la Fondation de France dans les années 1990, rejoignent les PAEJ après 2002 32

B. LA DYNAMIQUE DE DEVELOPPEMENT DES PAEJ A ÉTÉ INTERROMPUE PAR LA REVISION GENERALE DES POLITIQUES PUBLIQUES 33

1. Le plan de cohésion sociale de 2005 prévoit de porter à 300 le nombre de PAEJ en répartissant entre eux un budget de 10 millions d’euros 33

2. La révision générale des politiques publiques supprime, entre 2010 et 2013, la moitié des crédits alloués aux PAEJ par la mission solidarité 35

a. La révision générale des politiques publiques ôte 5 millions d’euros en 5 ans aux PAEJ 35

b. Elle encourage l’ouverture de maisons des adolescents qui reprennent les missions des PAEJ et les complètent par des soins médicaux 35

3. Les PAEJ ont à nouveau fait l’objet d’un audit en 2015, à la demande de la direction générale de la cohésion sociale 37

C. LE SORT DES PAEJ RESTE INCERTAIN ALORS QUE CE SONT DES STRUCTURES UTILES 39

1. La réunion des MDA et des PAEJ, souhaitée par un rapport de l’IGAS, paraît abandonnée depuis la disjonction de leurs cahiers des charges 40

2. Les MDA pourraient être liées par convention aux établissements scolaires 41

3. Le nouveau cahier des charges des PAEJ pourrait les intégrer au service public régional de l’orientation 42

CONCLUSION 45

TRAVAUX DE LA COMMISSION 47

EXAMEN DES CRÉDITS 47

ANNEXE 1 : MONTANT, PAR DÉPARTEMENT, DES SUBVENTIONS BUDGÉTAIRES ALLOUÉES AUX PAEJ 51

ANNEXE 2 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE 55

INTRODUCTION

Depuis le début de la législature, le Gouvernement mène une politique de lutte contre la pauvreté et une autre d’insertion des jeunes, selon l’engagement pris par le Président de la République.

Il manquait un lien entre ces deux politiques. Les majeurs de moins de 26 ans ne bénéficiaient pas des minimas sociaux revalorisés. Le contrat de génération, qui devait leur transmettre le travail des aînés partant en retraite, n’avait pas rencontré le succès escompté.

Ce sont la garantie jeune et la prime d’activité qui ont noué ce lien. La garantie jeune sera généralisée en 2017. La prime d’activité, instaurée en 2016, est accordée aux actifs de moins de 26 ans plus largement que ne l’était le revenu de solidarité active (RSA).

Il est trop tôt pour savoir si ces deux aides sociales diminueront le chômage des jeunes sans qualification. Elles diminueront en tout cas leur taux de pauvreté, qui était en augmentation depuis la crise de 2008.

Le succès rencontré par la procédure informatique de simulation et d’attribution de la prime d’activité est tel que les 4 milliards de crédits prévus par la loi de finances pour 2016 devront être relevés de 200 millions d’euros dès cette année et de 140 millions d’euros supplémentaires l’an prochain.

Trois des quatre millions de foyers éligibles l’ont touchée au moins un trimestre au premier semestre 2016 même si un certain nombre d’entre eux, souvent inconnus des caisses d’allocations familiales auparavant, oublient de renouveler, chaque trimestre, les déclarations nécessaires pour l’obtenir ou bien n’y ont plus le droit, passant juste au-dessus des seuils d’éligibilité. La distribution de la prime sera améliorée par la réforme des minimas sociaux prévue par l’article 49 du projet de loi.

Le Gouvernement est parvenu à stopper la hausse des taux de pauvreté et de chômage, ininterrompue sous la législature précédente, par une politique qui ne se limite pas, bien sûr, à la distribution d’aides en espèces. L’aide alimentaire, par exemple, atteint des publics désocialisés, auxquels les procédures dématérialisées d’aide sociale ne conviennent guère.

Les prestations de services de l’aide sociale pourraient être formalisées par la généralisation des contrats personnalisés d’accompagnement social proposés aux allocataires inactifs, jusqu’à ce qu’ils renouent avec une activité. Ces prestations seront remodelées au fur et à mesure que le contrat de RSA et celui de la garantie jeune entrent pleinement en vigueur.

Mais cet accompagnement spécifique ne doit pas faire oublier un accompagnement plus généraliste, notamment pour les jeunes, car la question de l’insertion dépasse largement la question seule de l’emploi, du logement, ou de la formation.

À ce titre, les guichets d’accueil, anonymes et gratuits, des services publics d’aide sociale, comme les points d’accueil et d’écoute des jeunes (PAEJ) qui accompagnent les jeunes en difficulté sont utiles.

Ce réseau associatif, efficace et peu coûteux, se coordonne localement avec les autres accueils publics des jeunes sans être codifié ni adossé à une institution. Puisqu’il n’alimente pas d’indicateurs de performance, n’exige pas de contrat pour écouter et accompagner un jeune et ne facture pas à l’acte les entretiens qu’il procure, il a peiné à conserver le soutien de l’État avant 2012, ayant perdu la moitié des crédits budgétaires que lui allouait la mission solidarité.

Passé du programme 177 au 106 puis au 304, le réseau des PAEJ est le témoin d’une politique transversale et pluridisciplinaire, qui échappe aux grands champs d’action publique aujourd’hui délimités, entre action médico-sociale, politique éducative et service public de l’emploi.

Dans cet environnement institutionnel segmenté, le positionnement original des PAEJ peut apparaître comme fragilisé, ces derniers ayant du mal à trouver leur place. Cette situation mérite un état des lieux et une réflexion que la seconde partie du rapport entend nourrir.

*

* *

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 laisse au Gouvernement jusqu’au 10 octobre pour répondre aux questions écrites des rapporteurs budgétaires.

À cette date, 10 réponses sur 32 n’étaient pas parvenues à la rapporteure pour avis.

PREMIÈRE PARTIE :

PRÉSENTATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DE LA MISSION SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

La mission solidarité, insertion et égalité des chances vise à réduire la pauvreté et les inégalités et finance la protection judiciaire des personnes vulnérables. La maquette budgétaire de la mission est modifiée par la suppression du Fonds national des solidarités actives (FNSA), prévue par l’article 63 du projet de loi de finances, aux dépens du programme 304. Ce fonds remboursait aux caisses d’allocations familiales l’avance des minimas sociaux. Il laisse une dette de près de 100 millions d’euros qui pourrait être apurée par une loi de finances rectificative.

Cette modification de maquette budgétaire n’affecte pas la comparaison des exercices 2016 et 2017 de la mission. En 2017, elle sera dotée de 17,8 milliards d’euros d’autorisation d’engagement et de crédits de paiement, soit 500 millions de moins qu’en 2016, une situation due entièrement à la baisse des dépenses du programme 157, handicap et dépendance, qui fait l’objet d’un rapport spécifique.

Cette baisse des dépenses du programme 157, handicap et dépendance, est compensée pour moitié par une hausse des dépenses prévues au titre du programme 304 d’inclusion sociale et de protection des personnes. L’action de ce programme en faveur de l’activité passe en effet de 4,37 milliards d’euros en 2016 à 4,96 milliards d’euros en 2017, en raison du succès de la nouvelle prime et pour compenser la réaffectation au fonds de solidarité des recettes de taxes qui alimentaient le FNSA.

Le programme 304 finance également l’aide alimentaire, la qualification du travail social, la protection juridique des majeurs ainsi que des mesures d’accompagnement des enfants sous protection légale, des familles vulnérables, des anciens travailleurs migrants et des jeunes en difficulté. Les subventions allouées aux points d’accueil et d’écoute de ces derniers sont présentées dans la seconde partie de l’avis.

Les crédits du programme 137, égalité entre les femmes et les hommes, augmentent de 2 millions d’euros, principalement au bénéfice du parcours de sortie de la prostitution. Les dépenses administratives et de personnel des trois ministères sociaux, regroupées dans le programme 124, augmentent en 2017 de 18 millions d’euros, en raison d’investissements de sécurité informatique et de revalorisations salariales, couvertes en 2016 par 7 millions d’euros prélevés sur le fonds de roulement des agences régionales de santé.

La pauvreté, mesurée en Europe par ménages fiscaux, en proportion du revenu médian, fait l’objet, en France métropolitaine, d’enquêtes de l’INSEE sur les revenus fiscaux et sociaux, qui déterminent le niveau de vie des ménages selon leur composition et dont les derniers résultats disponibles sont présentés dans le tableau suivant :

NOMBRE DE PERSONNES RECENSÉES DANS LES MÉNAGES DONT LE NIVEAU DE VIE EST INFÉRIEUR À UN SEUIL, PROPORTIONNEL AU REVENU MÉDIAN

 

Seuil de 40 %

Seuil de 50 %

Seuil de 60 %

 

Nombre
(en milliers)

Taux
(en %)

Nombre
(en milliers)

Taux
(en %)

Nombre
(en milliers)

Taux
(en %)

1996

2 030

3,6

4 550

8,1

8 179

14,5

1997

2 007

3,5

4 433

7,8

8 042

14,2

1998

1 671

2,9

4 257

7,5

7 873

13,8

1999

1 540

2,7

4 109

7,2

7 745

13,5

2000

1 579

2,7

4 165

7,2

7 838

13,6

2001

1 507

2,6

3 984

6,9

7 757

13,4

2002

1 340

2,3

3 746

6,5

7 495

12,9

2003

1 493

2,6

4 078

7,0

7 578

13,0

2004

1 461

2,5

3 896

6,6

7 382

12,6

2005

1 917

3,2

4 270

7,2

7 766

13,1

2006

1 867

3,1

4 188

7,0

7 828

13,1

2007

1 855

3,1

4 281

7,2

8 035

13,4

2008

1 910

3,2

4 272

7,1

7 836

13,0

2009

2 023

3,3

4 507

7,5

8 173

13,5

2010

2 128

3,5

4 755

7,8

8 617

14,1

2010

2 087

3,4

4 677

7,7

8 520

14,0

2011

2 158

3,5

4 856

7,9

8 729

14,3

2012

2 267

3,7

4 977

8,1

8 540

13,9

2012 (1)

2 474

4,0

5 245

8,5

8 824

14,3

2013

2 152

3,5

4 953

8,0

8 648

14,0

2014

2 269

3,6

5 032

8,1

8 760

14,1

(1) L’enquête a été rénovée en 2012. D’une part, l’impôt déduit du revenu d’une année donnée est désormais l’impôt payé durant cette même année. Il peut donc être dû au titre des revenus de l’année précédente. D’autre part, les majorations de pensions de retraite pour avoir élevé 3 enfants ou plus ainsi que l’avantage en nature constitué par la participation des employeurs aux contrats collectifs de complémentaire santé sont maintenant comptabilisés dans le revenu disponible.

Champ : France métropolitaine, individus vivant dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n’est pas étudiante.

Sources : CCMSA ; Cnaf ; Cnav ; DGFiP ; DGI ; Insee, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées 2000 à 2004 - enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2014.

Elle rapporte le revenu disponible dans chaque ménage, déduction faite des impôts, au nombre des unités de consommation. Ce rapport donne un revenu médian qui partage la population en deux classes égales par le nombre d’individus.

La pauvreté est estimée par l’effectif des ménages dont le niveau de vie est inférieur ou égal à 40, 50, 60 ou 70 % de ce revenu médian. Le seuil de 60 % est communément retenu comme taux de pauvreté par les enquêtes internationales.

Selon l’INSEE, le nombre de pauvres recensés en France a baissé entre 1997 et 2002 et puis de nouveau augmenté jusqu’à retrouver, en 2012, son niveau de 1996. Le revenu médian annuel était, en 2012, de 19 740 euros, ce qui portait le seuil de pauvreté à 11 840 euros, soit 987 euros par mois.

Pour arrêter la progression de la pauvreté, le comité interministériel de lutte contre l’exclusion du 21 janvier 2013 a adopté un plan pluriannuel qui prévoyait une revalorisation des minimas sociaux ainsi qu’une amélioration de l’accès des plus pauvres aux soins de santé, à l’hébergement d’urgence, au logement, aux services bancaires et à l’aide alimentaire.

Ce plan devait être réalisé en cinq ans, de 2013 à 2017. Les deux premiers exercices ont été évalués par une mission de l’inspection générale des affaires sociales, conduite par M. François Chérèque. Tenant compte des recommandations de cette mission. Le Gouvernement a amendé le plan par une feuille de route le 3 mars 2015 (1).

Cette feuille de route confirmait les hausses annuelles de 2 % du socle de revenu de solidarité active. Elle annonçait l’instauration de la prime d’activité, l’extension à l’ensemble du territoire de la garantie jeune, la généralisation du tiers payant et une fusion du RSA et de l’allocation de solidarité spécifique (ASS). Elle ajoutait enfin un sixième principe transversal d’accompagnement adapté et personnalisé aux cinq principes directeurs suivants du plan initial :

1. l’objectivité des écarts de revenus entre les plus riches et les plus pauvres qui ne permet plus de considérer les pauvres et les précaires comme une minorité marginale, peu ou prou responsable de sa situation ;

2. la non-stigmatisation ou fin de la dénonciation de la paresse ou de la malhonnêteté des ménages modestes ;

3. la participation des personnes en situation de pauvreté ou de précarité à l’élaboration et au suivi des politiques publiques ;

4. le juste droit qui assure que l’ensemble des citoyens bénéficient de ce à quoi ils ont droit, ni plus, ni moins contre l’absence d’information, la complexité administrative, la méfiance à l’égard de l’institution ou même la perte de la conviction d’avoir des droits ;

5. le décloisonnement des politiques sociales par une meilleure coordination des acteurs, publics, associatifs et privés, autour de l’accompagnement des personnes jusqu’à leur insertion réussie ;

6. l’accès effectif à un accompagnement, adapté et personnalisé

Un bilan des quatre premières années d’exécution du plan a été présenté en conseil des ministres le 13 avril 2016. Il indique que les revalorisations des minima sociaux et des prestations familiales, la généralisation du tiers payant et l’obligation d’affilier les salariés à une couverture complémentaire des frais de santé ont stabilisé le taux de pauvreté à 14 % de la population.

Il estime qu’une fois l’ensemble des mesures du plan montées en charge, « ce sont environ 2,6 milliards d’euros supplémentaires qui seront redistribués chaque année à 2,7 millions de ménages parmi les plus en difficulté (soit environ 1 000 euros en moyenne par an et par ménage d’ici fin 2017) ».

Les rapports de la mission d’évaluation de l’IGAS sur les deux premiers exercices regrettent de n’avoir pu évaluer les engagements financiers du plan. Certaines dépenses relèvent des lois de financement de la sécurité sociale, d’autres des budgets sociaux des collectivités territoriales.

Les dépenses imputées sur le budget général de l’État sont dispersées dans une trentaine de missions, dont celles de santé, de logement, du travail et de l’emploi. La direction du budget n’a pu fournir, lors des auditions, un état annuel de leur répartition sur les cinq exercices planifiés.

L’incidence du plan sur les dépenses de la mission solidarité est, pour le moment, limitée aux dépenses d’aide alimentaire et de prime d’activité du programme 304.

En revanche, les 11,5 milliards d’euros de dépenses d’allocations et le milliard d’euros de dépenses d’accompagnement du RSA relèvent du même objectif d’insertion et le Gouvernement doit s’impliquer davantage dans la politique d’insertion confiée aux départements.

D’ailleurs l’article 50 du projet de loi de finances engage le Gouvernement dans cette voie en créant un fonds et des conventions triennales d’appui aux politiques départementales d’insertion.

Selon l’évaluation préalable de cet article, ces conventions pourraient inclure des clauses minimales définies par une Caisse nationale d’appui aux politiques d’insertion, qui réunirait État, collectivités, experts, organisations syndicales, associations et personnes concernées.

Après l’échec, annoncé par le Gouvernement le 21 juin 2016, de ses négociations avec l’Assemblée des départements de France sur la reprise, par le budget général, de leurs dépenses de RSA, les allocations du RSA « socle » seront encore acquittées par les départements en 2017 et seules celles versées aux jeunes actifs seront subventionnées par le programme 304.

Les dépenses départementales sont relevées par décret de 2 % au 1er septembre de chaque exercice depuis 2013 afin d’aboutir, en 2017, à la hausse de 10 % prévue par le plan de lutte contre la pauvreté. Ce poste de dépenses avait fait l’objet de prévisions de la CNAF, transmises par la direction générale de la cohésion sociale et retranscrites dans le tableau suivant :

PRÉVISIONS ANNUELLES DE DÉPENSES DE RSA « SOCLE »

(en millions d’euros)

Année

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Prévision

8 212

8 994

9 830

10 721

11 455

11 572

11 970

Source : Note prévisionnelle de la CNAF pour l’ensemble des régimes (général et agricole) retranscrite dans les réponses de la direction générale de la cohésion sociale aux questions des rapporteurs depuis 2013.

L’augmentation prévue tenait, pour une part, aux revalorisations annuelles de 2 %. Leur coût est estimé à 66,2 millions d’euros en 2013 et 2014 et 34,5 millions d’euros en 2015. L’augmentation prévue des dépenses de RSA était aussi due à l’anticipation d’une hausse du nombre d’allocataires. Comme l’indique le tableau suivant, cette hausse s’est vérifiée jusqu’en 2015.

NOMBRE ANNUEL CONSTATÉ D’ALLOCATAIRES DU RSA SOCLE

Année

2011 (a)

2012 (b)

2013

2014

2015

Rsa socle

1 359 500

1 449 200

1 552 100

1 613 200

1 636 000

(a) Mise en place du RSA dans les départements d’outre-mer ; (b) Extension du RSA à Mayotte

Source : DREES (http://www.data.drees.sante.gouv.fr/ReportFolders/reportFolders.aspx?IF_ActivePath=P,335,336).

En 2016, en revanche, une baisse de 1,5 % du nombre d’allocataires indemnisés par les caisses d’allocations familiales apparaît dans la note de conjoncture publiée par la CNAF en septembre (2). Comme l’indique le graphique suivant, cette baisse est la première observée depuis longtemps :

DÉPENSES TRIMESTRIELLES DE RSA SOCLE DES CAF
ET NOMBRE DE LEURS ALLOCATAIRES

Source : Note de conjoncture n° 15 de la Cnaf ; champ : régime général, France entière.

Au premier semestre 2016, les caisses d’allocations familiales ont versé 5,26 milliards d’euros de RSA « socle », soit autant qu’au second semestre 2015.

Si la baisse du nombre d’allocataires se confirme, elle pourrait compenser le coût des revalorisations générales annuelles du RSA et faciliter la réforme des minimas sociaux préconisée en juillet 2013 et en mars 2016 par le précédent rapporteur pour avis de la Commission sur le budget de la solidarité, M. Christophe Sirugue.

Cette réforme est amorcée par l’article 49 du projet de loi de finances dont le paragraphe I facilite les changements de situation en stabilisant le montant des prestations de RSA et en évitant les recalculs en cours de trimestre.

Le paragraphe II de cet article simplifie l’accès des travailleurs non-salariés au RSA. Le paragraphe III automatise le basculement vers la prime d’activité des bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) qui reprennent un travail.

Le deuxième rapport d’évaluation du plan de lutte contre la pauvreté, publié en 2014, désignait l’aide alimentaire comme une porte d’accès aux droits sociaux et un moyen d’élever le taux de recours aux prestations en espèces.

Il se félicitait que le Gouvernement français ait pu conserver à la Croix-Rouge, aux Banques alimentaires, au Secours populaire et aux Restos du Cœur les 80 millions d’euros alloués annuellement de 2014 à 2020, sur appel d’offres, par un fonds européen pour la distribution gratuite de denrées alimentaires.

Le budget général ajoute 15 % aux versements de l’Union européenne, dont le programme 304 fait en partie l’avance, puisque ces versements sont consécutifs à la certification des factures acquittées. Le programme alloue en outre des subventions aux épiceries sociales, exclues des appels d’offres européens qui exigent la gratuité des distributions.

Les dépenses budgétaires d’aide alimentaire s’élevaient à 45 millions d’euros en 2015 et étaient estimées à 43,6 millions d’euros en 2016 et 42 millions d’euros en 2017, ce dernier montant étant réparti comme suit :

– 12,58 millions d’euros soit 15 % du versement européen annuel ;

– 8,2 millions d’euros d’achats de denrées au profit des épiceries sociales ;

– 4,5 millions d’euros de subventions aux têtes de réseau nationales des associations habilitées à distribuer l’aide alimentaire ;

– 14,8 millions d’euros de subventions déconcentrées pour accueillir les personnes bénéficiaires de l’aide alimentaire ;

– 2,1 millions d’euros de subventions à France AgriMer qui gère et fait l’avance de l’aide aux associations nationales.

Le plan de lutte contre la pauvreté prévoyait une réforme du RSA activité et de la prime pour l’emploi. Le rapport de mission remis au Premier ministre en juillet 2013 par M. Christophe Sirugue constatait que le RSA activité n’avait pas trouvé son public, puisque seul un tiers des bénéficiaires potentiels le demandait tandis que la prime pour l’emploi était distribuée trop largement, et proposait quatre scénarios de réforme.

Le scénario retenu a été adopté par la loi n° 2015-994 relative au dialogue social et à l’emploi qui a instauré, dans le code de la sécurité sociale, une prime d’activité qui relève les revenus du travail les plus faibles et incite les allocataires inactifs des minimas sociaux à accepter un emploi, fut-il précaire ou à temps partiel.

Au cours du premier semestre 2016, 3 088 798 foyers ont perçu au moins lors d’un trimestre une prime dont le montant mensuel moyen est estimé à 165 euros. Comme l’indique le tableau suivant, la prime perçue par les 41 % d’anciens allocataires du RSA activité est plus élevée que celle versée aux 27 % d’allocataires qui ne touchaient pas d’aide des Caf auparavant.

Les revenus d’activités mensuels moyens des premiers sont de 829 euros, ceux des allocataires connus des Caf à un autre titre que le RSA de 1 308 euros et ceux des nouveaux immatriculés de 1 143 euros.

MONTANT MOYEN DE PRIME D’ACTIVITÉ VERSÉ

Selon l’origine du droit

Montant moyen juillet

idem juin

Bascule automatique du RSA

197,52 €

199,98 €

Non basculant, foyer déjà connu de la Caf

153,65 €

157,11 €

Non basculant, nouvelle immatriculation

116,27 €

119,28 €

Ensemble

164,66 €

166,20 €

Source : DGCS.

Le taux de recours de la prime est difficile à établir, faute de connaissance précise de la base éligible. Selon les estimations du directeur général de la CNAF, il doublerait déjà celui du RSA activité pour atteindre, fin septembre 2016, 68 % du public visé par l’étude d’impact de la prime et dépasserait en décembre l’objectif de 70 % visé par la ministre des affaires sociales et de la santé.

Le succès de cette prime est lié au fait qu’elle n’a pas le caractère stigmatisant d’un minimum social et à la simplicité des procédures à suivre pour l’obtenir, puisqu’elle peut être estimée et demandée en ligne. La répartition des 2 millions de foyers allocataires en juillet 2016, reproduite dans le tableau suivant, indique que les caisses d’allocations familiales ont immatriculé au second trimestre 430 000 ménages auxquels elles ne versaient aucune allocation auparavant :

NOMBRE DE FOYERS BÉNÉFICIAIRES EN JUILLET 2016

selon l’origine du droit

Nombre de foyers

%

Bascule

891 354

43 %

Allocataire déjà connu

765 309

37 %

Immatriculation

431 084

21 %

Ensemble

2 087 747

100 %

Source : DGCS.

À la fin du premier semestre 2016, 2,114 milliards d’euros de crédits budgétaires inscrits au programme 304 avaient été remboursés aux caisses d’allocations familiales ou de mutualité sociale agricole qui font l’avance de la prime. 3,95 milliards d’euros avaient été provisionnés dans ce but par la loi de finances pour 2016.

Le directeur général de la cohésion sociale, entendu en audition le 27 septembre 2016, a confirmé que les remboursements devraient dépasser de 200 millions d’euros cette provision, comme l’avait indiqué le secrétaire d’État au budget lors de son audition du 18 mai 2016 par la commission des finances.

Le projet de loi de finances pour 2017 estime à 4,34 milliards d’euros le coût budgétaire de la prime d’activité, en tenant compte du basculement automatique de l’ASS vers la prime prévue par l’article 49 et des droits nouveaux qu’il accorde aux travailleurs indépendants lorsqu’ils ne se versent pas ou peu de rémunération, dont le coût budgétaire est estimé à 10 millions d’euros en 2017 et entre 31 et 62 millions d’euros l’année suivante, compensé par des économies sur l’ASS.

Le fonds national des solidarités actives (FNSA) retraçait le remboursement, par l’État, de la trésorerie avancée par les caisses d’allocations familiales, de mutualité sociale agricole et de Pôle Emploi qui versent le RSA jeunes actifs, l’aide personnalisée de retour à l’emploi et la prime de Noël. Le fonds remboursait aussi aux caisses les frais de gestion de la prime d’activité sur une base forfaitaire.

Ce fonds, régi par l’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles et confié à la Caisse des dépôts et consignations, avait été instauré par un décret n° 2009-30 du 9 janvier 2009 sur le modèle du fonds de solidarité et du fonds national d’aide au logement.

Ses dépenses étaient couvertes par des parts changeantes de recettes de taxes, prélevées sur celles affectées au fonds de solidarité pour financer l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et au fonds de solidarité vieillesse.

Ces recettes de taxes affectées, souvent insuffisantes, devaient être complétées par des subventions budgétaires de la mission solidarité. Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire de la mission solidarité en 2015, la Cour des Comptes regrettait ainsi que ce fonds soit chroniquement sous-budgétisé au point d’accumuler une dette de près de 100 millions d’euros en 2015. Elle en demandait la suppression ainsi que celle du fonds de solidarité.

En 2016, les dépenses du FNSA sont estimées à 14 millions d’euros de RSA socle pour les jeunes actifs, à 552 millions d’euros de prime de Noël pour les bénéficiaires du RSA, de l’ASS, de l’allocation l’équivalent retraite et de l’allocation transitoire de solidarité (ATS) et à 60 millions d’euros de frais de gestion de la prime d’activité.

Ces dépenses devaient être couvertes par 15,2 % de la contribution de solidarité de 1 % assise sur les rémunérations des fonctionnaires ou des agents publics, soit une recette estimée à 200 millions d’euros, et par une subvention d’équilibre de 426 millions d’euros du programme 304.

L’article 63 du projet de loi de finances propose de supprimer le FNSA en 2017. Les dépenses qu’il acquittait seraient imputées sur le programme 304, qui ne provisionnerait plus que 10 millions d’euros de RSA « socle » pour les jeunes actifs en 2017, mais 556 millions d’euros pour les primes de Noël et 65 millions d’euros de frais de gestion de la prime d’activité.

La dette qui sera léguée par le fonds à la fin de l’exercice 2016, dont le montant n’a pas été estimé dans les réponses fournies aux questions des rapporteurs, si elle n’est pas résorbée par le projet de loi de finances rectificative pour 2016, sera reprise par le budget général.

Les échanges de trésorerie qui ont produit cette dette subsisteront entre l’État, l’ACOSS et les liquidateurs des aides sociales après la disparition du FNSA. Ils apparaîtront dans le jaune annexé au projet de loi de finances de l’année qui dresse le bilan des relations financières entre l’État et la protection sociale, dans des états de trésorerie semestriels et dans l’annexe 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La prime d’activité et la prime de Noël ne figurent pas parmi les 28 prestations, citées par l’article D. 272-2 du code de l’action sociale et des familles, qui peuvent donner lieu à une mesure d’accompagnement social personnalisé.

N’y figure pas non plus l’aide au retour des anciens travailleurs migrants hébergés en foyers ou en résidence sociale (ARFS), que le programme 304 finance par un budget de 60 millions d’euros en 2016, réduit à 10 millions après une annulation de 50 millions d’euros de crédit par décret du 2 juin 2016, faute de succès de la mesure et reconduit à ce montant en 2017.

Cette aide n’exige pas la signature d’un contrat d’accompagnement mais un engagement sur l’honneur du bénéficiaire à séjourner plus de six mois à l’étranger.

L’accueil d’urgence et l’orientation des mineurs isolés étrangers ont fait l’objet d’un accord entre l’État et l’Assemblée des départements de France, repris par un décret du 24 juin 2016. Ce décret prescrit un remboursement forfaitaire des dépenses engagées par les services départementaux d’aide sociale à l’enfance. Le programme 304 provisionne 15 millions d’euros à cette fin en 2017.

Le partage entre l’État et les départements du financement du groupement d’intérêt public de l’enfance en danger (GIPED) n’est pas modifié par le projet de loi de finances pour 2017. Il répartit 2,3 millions d’euros de subventions entre :

– le service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger (STANED) ;

– les cellules départementales de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes (CRIP) qui reçoivent les signalements ;

– l’intervention du médecin référent de l’équipe d’évaluation des informations recueillies ;

– les observatoires national et départementaux qui consolident statistiquement les informations recueillies et évalue les pratiques de prévention, de dépistage et de prise en charge des mineurs.

La direction générale de la cohésion sociale indique toutefois que cette subvention devrait être réunie, en cours d’exercice, à celle de 2,5 millions d’euros allouée à l’Agence française de l’adoption (AFA) en proportion des accompagnements réalisés pour l’adoption internationale des moins de 15 ans.

La création d’un groupement d’intérêt public commun au GIPED et à l’AFA, par l’État, les départements et les associations concernées, serait à l’étude. Son mode de financement n’est pas précisé alors que celui du GIPED est forfaitaire tandis que celui de l’AFA tient compte du nombre de conventions préalables signées avec les candidats à l’adoption.

La principale incidence budgétaire attendue du principe d’accompagnement social personnalisé introduit dans le code de l’action sociale et des familles devait être la diminution des remboursements, sur factures, des frais de mandat judiciaire de protection des majeurs.

Des prévisions d’économies pour 2013, faites en 2007 pour justifier ce principe, avaient été mises en doute par la Cour des Comptes et avaient suscité des réserves de la part du rapporteur au fond de la commission des lois, saisie en première lecture du projet de loi (3).

Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de juillet 2014, cité dans l’avis budgétaire de l’an dernier, les a démenties, imputant une part des surcoûts relevés aux difficultés d’instruction des remboursements, partagés entre l’État, les caisses d’allocations familiales et les départements.

En 2016, l’État a repris aux dépens du programme 304, le remboursement des frais qui incombait auparavant aux caisses d’allocations familiales. L’avis budgétaire de l’an dernier indiquait que le budget prévu de 637,4 millions d’euros serait insuffisant.

La réserve de précaution du programme 304, qui s’élevait au 26 septembre 2016 à 409 millions d’euros sera sans doute consommée par les dépenses du FNSA et de la prime d’activité avant de rembourser l’intégralité des frais des mandataires dus en 2016. De plus, la modification du barème de participation des bénéficiaires au paiement de ces frais, qui devrait en limiter la progression, n’interviendra qu’en 2017. La révision de l’assiette des ressources prises en compte pour estimer cette participation est toujours en cours de négociation.

Des crédits supplémentaires devront donc être ajoutés au programme 304 par la loi de financement rectificative pour 2016 tandis que ceux prévus en 2017 sont relevés de 10 millions d’euros pour atteindre 650 millions d’euros.

Trois réseaux d’accompagnement, gratuits et sans engagement formalisé ni tarification à l’acte, étaient financés par des subventions budgétaires du programme 106 avant qu’il ne soit repris par le programme 304 en 2015.

Les 5,3 millions d’euros versés au réseau d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents ont été mis à la charge de la branche famille en 2013. Sont restées dans le programme 304, les subventions allouées, sur cahier des charges, au réseau déconcentré d’accompagnement des familles vulnérables par les établissements d’information, de consultation et de conseil familial (EICCF) et d’accompagnement des jeunes par des points d’accueil et d’écoute (PAEJ).

Le projet de loi de finances pour 2017 affecte 8,13 millions d’euros aux EICCF et 5,36 millions d’euros aux PAEJ, qui font l’objet de la seconde partie de l’avis. Mais ces deux réseaux ont fait l’objet d’audits demandés par la direction générale de la cohésion sociale qui recommandent d’indexer leur financement sur un décompte plus précis de leur fréquentation.

Leurs cahiers des charges sont en cours de révision et leur imputation budgétaire pourrait être modifiée. Celle de la subvention des PAEJ dépend de la réforme du service public régional de l’orientation inscrite à l’article 16 du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté.

Le sort des dépenses d’indemnisation et d’insertion des allocataires du RSA reste suspendu à des négociations entre l’État et les départements que le Gouvernement souhaite partager entre une négociation collective nationale et des négociations conventionnelles, département par département.

L’article 50 du projet de loi de finances pour 2017 incite les départements à déléguer au service public de l’emploi l’insertion de leurs allocataires. Il modifie pour cela les règles de l’article L. 3334-16-2 du code général des collectivités territoriales qui régissent l’affection de la troisième part du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FDMI), qu’il proroge.

L’article instaure en outre un fonds d’appui aux politiques d’insertion au bénéfice des départements (FAPID). Il est doté de 50 millions d’euros prélevés, à titre exceptionnel, sur les ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

Ce fonds subventionnera davantage les départements qui consacrent une grande part de leur budget au RSA et ceux qui soumettront les contrats d’insertion conclus avec leurs allocataires à des objectifs convenus avec l’État.

L’article subordonne le versement du principal des subventions à la souscription, par chaque département, d’une convention d’appui aux politiques d’insertion que lui proposera l’État. Il renvoie à un décret en Conseil d’État les conditions de préparation et de renouvellement de ces conventions.

L’évaluation préalable de l’article indique que leur contenu et les modalités de leur suivi seront confiés à une caisse nationale d’appui aux politiques d’insertion (CNAPI).

Parmi les clauses qui seraient rendues obligatoires ou licites par une convention collective nationale, négociée par les administrateurs de la CNAPI, celle d’accompagnement des allocataires vulnérables retient plus particulièrement l’attention de la rapporteure.

L’avis budgétaire de l’an dernier rappelait que la protection judiciaire des majeurs avait été réservée aux incapables par la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 qui l’a réformée, tandis qu’un accompagnement social était instauré, par degrés, au bénéfice des allocataires, vulnérables ou indigents, de l’une des prestations visées à l’article D. 271-2 du code de l’action sociale et des familles.

La rapporteure indiquait que les services sociaux des départements n’étaient guère enclins à solliciter les juges pour mettre en œuvre l’accompagnement social de troisième degré ou l’accompagnement judiciaire.

L’intervention de leurs services repose sur l’adhésion de l’allocataire et sur la relation de confiance qu’il établit avec le travailleur social dans la négociation et l’exécution du contrat d’accompagnement.

La réforme des règles en vigueur a fait l’objet d’états généraux du travail social, réunis par le Président de la République le 25 janvier 2013. Le plan d’action du Gouvernement en faveur du travail social et du développement social, présenté au conseil des ministres du 21 octobre 2015 l’annonce pour décembre 2016.

Dans l’avant-propos de ce plan, la ministre des affaires sociales et la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion constatent que :

« La crise connue depuis 2008, avec la massification des problèmes économiques et sociaux a définitivement montré les limites d’une approche strictement individuelle.

« L’intensification des tâches et l’empilement des dispositifs ont conduit à multiplier et à segmenter les accompagnements pour les personnes, ainsi qu’à accroître les tâches administratives pour les professionnels du travail social au risque qu’ils perdent leurs repères professionnels. Les employeurs publics et privés reconnaissent ces limites. »

Ce plan d’action organise un premier accueil social inconditionnel de proximité des bénéficiaires d’aide sociale et la formation en alternance des travailleurs sociaux.

Il prévoit aussi l’expérimentation de référents des parcours personnels complexes d’insertion sociale afin de rechercher un équilibre plus sûr entre une position contractuelle à l’égard d’un allocataire vulnérable et une position administrative à l’égard des services d’insertion de l’État et des services sociaux des départements.

1,9 million d’euros sont réservés, parmi les dépenses de qualification du travail social de l’action 15 du programme 304, à la mise en œuvre de ce plan.

Le programme 137 « égalité entre les femmes et les hommes » est doté, en 2017, de 29,8 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement, contre 27,6 millions d’euros en 2016.

Il comprend trois actions principales, de promotion de la culture de l’égalité, de lutte contre les violences sexistes et de prévention de la prostitution, auxquelles s’ajoute un million d’euros de crédits de communication et d’accueil de jeunes en service civique.

Ces actions seront coordonnées par deux plans interministériels, celui pour rééquilibrer les relations hommes-femmes en entreprise, présenté par la ministre des Droit des femmes le 4 octobre 2016 et un 5e plan de lutte contre les violences faites aux femmes, en cours d’élaboration.

3 millions d’euros subventionnent, soit au niveau national, soit sur appel à projets, les associations en faveur de l’égalité professionnelle, politique et sociale, qui œuvrent à élargir les choix professionnels des jeunes filles pour parvenir à une mixité d’un tiers des métiers en 2025, ou qui accompagnent les négociations collectives de branche et d’entreprise sur l’égalité professionnelle.

Près d’un million d’euros sont versés aux 54 bureaux d’accompagnement individualisé vers l’emploi des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) et à 33 de ces centres qui n’offrent pas de prestation d’accompagnement individuel.

1,3 million d’euros est affecté au financement d’études et de recherches sur l’égalité entre les femmes et les hommes, réalisées par l’Institut national des études démographiques (INED) et d’expérimentations cofinancées par le fonds social européen.

16,75 millions d’euros sont prévus en 2017 pour couvrir les dépenses de prévention et de lutte contre les violences sexistes, contre 16 millions d’euros en 2016.

Le Centre National d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles (CNIDFF), l’Association européenne contre les violences faites aux femmes (AVFT), le collectif féministe contre le viol (CFCV) et le Mouvement français pour le planning familial (MFPF) reçoivent les 2,35 millions d’euros de subventions prévus par les conventions pluriannuelles d’objectifs passées entre l’État et ces têtes de réseaux nationales.

À la suite des recommandations faites en avril 2016 par le Haut conseil à l’égalité sur le 4e plan de lutte contre les violences faites aux femmes, les crédits alloués au nouveau plan ont augmenté d’un million, à 9,1 millions d’euros.

Ce supplément permettra d’ouvrir davantage de sites d’accueil de jour, de lieux d’accueil, d’écoute et d’orientation des victimes et de garantir la continuité du service téléphonique assuré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), avec le concours des associations nationales tête de réseau, de Femmes solidaires, Voix de Femmes et de la fédération nationale du Groupe pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles féminines, des mariages forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants (GAMS).

5,2 millions d’euros de crédits déconcentrés sont reconduits au profit de 107 centres d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF), répartis sur le territoire et en vue d’actions associatives plus ponctuelles.

Les crédits de l’action 15 du programme 137 progressent depuis 2014 selon le tableau suivant :

MOYENS ALLOUÉS À LA PRÉVENTION ET À LA LUTTE CONTRE LA PROSTITUTION ET LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS

Crédits de paiement consommés en 2014 et 2015 et prévus initialement en 2016 et 2017
en millions d’euros

Année

2014

2015

2016

2017

Crédits

2,028

2,183

4,99

6,63

Source : Rapports de performance pour 2014 et 2015, réponses au questionnaire de la rapporteure pour 2016 et 2017.

Près de la moitié des crédits est attribuée aux associations nationales et locales qui informent le public et qui accompagnent les personnes prostituées dans un cadre contractuel renouvelé pour la période 2016-2018.

3,8 millions d’euros sont versés au fonds institué par l’article 7 de la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

Ce fonds est alimenté en outre par les recettes de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués conformément au 1° de l’article 225-24 du code pénal.

Il subventionne l’insertion sociale et professionnelle des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution, auxquelles l’État verse une allocation lorsqu’elles ne peuvent recevoir les minimas sociaux de droit commun.

Les dépenses des programmes 124 de la mission solidarité, et 155 de la mission travail et emploi relèvent du secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales, auquel ont été rattachées, en 2013, leurs directions support.

Le programme 124 paye les dépenses d’administration centrale des ministères ainsi que celles des réseaux territoriaux des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), des directions régionales de la jeunesse des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) et des agences régionales de santé (ARS).

En 2016, les crédits de paiement ouverts par la loi de finances initiale se montaient à 730 millions d’euros de dépenses de personnel, 758 millions d’euros de dépenses de fonctionnement et 8 millions d’euros de crédits d’intervention. 18 millions d’euros ont été annulés par un décret du 2 juin 2016.

Le projet de loi de finances pour 2017 augmente les dépenses de personnel du programme de 10 millions d’euros de crédits de paiement et celles de fonctionnement, nominalement, de 2 millions d’euros.

Mais compte tenu du transfert au programme 333, par un décret du 22 mars 2016, de 5,7 millions d’euros de frais de déplacement et de bureautique destinés aux directions territoriales, remis aux préfets de région, ces dépenses de fonctionnement augmentent en fait de près de huit millions d’euros. La direction du budget souhaitait les réduire de 5 % mais la sécurisation des systèmes d’information exige des investissements supplémentaires.

Les effectifs, qui devaient être réduits de 150 emplois, ne le seront que de 80, principalement par l’ajout de 50 postes aux DRJSCS pour gérer la montée en charge du service civique. En outre, la réforme de la justice a transféré temporairement 100 emplois dans les directions régionales de la cohésion sociale pour résorber les dossiers en souffrance dans les tribunaux des affaires de sécurité sociale et du contentieux de l’incapacité.

Le programme 124 finance les ARS, opérateurs de l’État dotés de l’autonomie juridique, composés de personnels issus des directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales et des caisses d’assurance maladie.

Les ARS sont engagées depuis avril 2015 dans un exercice de regroupement régional lié à la refonte de la carte des régions. Au terme de la phase de consultation et d’expertise sur les schémas d’organisation proposés, les premières réformes sont intervenues le 1er janvier 2016 et les conséquences en termes d’effectifs s’étaleront jusqu’en 2018.

On relèvera l’articulation de ce nouveau paysage des ARS avec l’implantation des nouvelles directions régionales et le maintien de relais locaux par le rétablissement des délégations territoriales supprimées.

Cette réforme s’est faite à enveloppe quasi constante et sa réussite doit beaucoup à un plan national d’accompagnement des ressources humaines, négocié avec les organisations syndicales.

Ce plan s’est inspiré des recommandations du rapport de M. Dominique Libault sur les parcours professionnels des agents de droit privé entre les ARS et la CNAM, remis le 20 mars 2015 au secrétariat général. (4)

Ce plan diminue les emplois ayant un statut COMEX qui autorise une rémunération plus élevée en reclassant les directeurs généraux qui n’ont pas quitté l’administration ainsi que d’autres cadres dirigeants ou des agents comptables désormais en surnombre.

Il répartit les 100 postes supprimés chaque année entre 2016 et 2018 tout en tenant compte de la revalorisation indiciaire, accordée en contrepartie d’un abattement annuel sur les primes et indemnités, appelée transfert primes/points et d’une hausse du point d’indice au 1er février 2017.

Au cours de l’exercice de ce plan, les dépenses de rémunération du personnel des agences régionales de santé ont évolué selon le tableau suivant :

DÉPENSES DE RÉMUNÉRATION DU PERSONNEL DANS LA SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC ALLOUÉE AUX AGENCES RÉGIONALES DE SANTÉ

Opérateur

2015

2016

2017

AE = CP

651 484 000

659 680 000

665 336 000

Source : réponse du ministère des affaires sociales et de la santé à une question écrite posée par les rapporteurs

DEUXIÈME PARTIE :

L’AIDE À LA JEUNESSE VULNÉRABLE OFFERTE PAR LES POINTS D’ACCUEIL ET D’ÉCOUTE DES JEUNES (PAEJ)

Le Président de la République avait pris, au début de son mandat, un engagement en faveur de la jeunesse et plus particulièrement en faveur de l’insertion sociale des jeunes.

Les politiques de formation, d’emploi et d’insertion, partagées entre les ministères et les collectivités territoriales, ont été réunies par le Gouvernement, au profit des décrocheurs, par la garantie jeune.

Un décret d’application de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue va réglementer le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie des bénéficiaires de cette garantie, qui sera généralisée le 1er janvier 2017.

Mais, parmi les jeunes les plus en difficulté, ceux qui n’auront pas confiance dans l’éducateur ou le conseiller auxquels ce parcours va les soumettre, peuvent être tentés de fuir l’aide apportée par les services sociaux et les services publics de l’emploi et de l’éducation, pour s’isoler dans la maladie ou tomber dans l’addiction, la marginalité ou la délinquance.

Pour que la garantie jeune profite également aux plus vulnérables, les missions locales qui la négocient doivent pouvoir s’appuyer sur le concours des points d’accueil et d’écoute des jeunes (PAEJ) et des maisons des adolescents (MDA) qui peuvent retenir les jeunes en déshérence et les convaincre d’accepter l’aide des services publics qui leur sont destinés.

Nés à la même époque d’initiatives parallèles, semblables par leur forme juridique et la multiplicité de leurs financeurs, complémentaires par leur implantation territoriale et leurs prestations, les unes sociales, les autres médicales, PAEJ et MDA sont en concurrence pour des subventions publiques limitées.

Parce qu’ils sont hétérogènes et informels, parce qu’ils n’alimentent pas des indicateurs quantitatifs de performances, parce qu’ils ne sont pas médicalisés, les PAEJ n’ont pas conservé, lors de la révision générale des politiques publiques, le soutien public acquis aux MDA, alors qu’ils accueillent un public aussi vulnérable mais peut-être socialement moins favorisé. Le ministère envisage de les rapprocher du futur service public régional de l’orientation.

Les PAEJ sont nés de la réunion, en 2002, d’accueils de fugueurs et de jeunes toxicomanes, créés en 1995, ouverts en réponse à un besoin exprimé par la consultation nationale des jeunes menée l’année précédente.

Cette consultation avait suivi le retrait des décrets d’application de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative à l’emploi, au travail et à la formation professionnelle, dont une disposition instaurait un contrat d’insertion professionnel pour les moins de 26 ans. Le comité désigné pour organiser la consultation avait insisté, dans sa synthèse des réponses collectées, sur le besoin exprimé d’interlocuteurs adultes extérieurs à la famille et aux institutions d’enseignement.

Des points d’accueil et d’écoute de jeunes en difficulté furent imaginés par plusieurs cabinets ministériels, à l’invitation du Premier ministre de l’époque, sans lien avec les permanences ou bureaux d’accueil, d’information ou d’orientation subventionnés par les services publics de l’emploi, de l’éducation nationale ou de la jeunesse et des sports, parce qu’ils étaient destinés à des publics qui ne fréquentaient pas ces services.

Le plan gouvernemental de lutte contre la drogue et la toxicomanie du 14 septembre 1995 prévoyait l’expérimentation, dans de grandes agglomérations, de points d’écoute de jeunes toxicomanes (PEJ) et de leurs parents (PEJP).

Ces lieux d’accueil devaient répondre à des détresses urgentes et aider les jeunes toxicomanes, par un dialogue avec un psychologue, à retrouver suffisamment d’équilibre et de détermination pour accepter de suivre une thérapie. Ils devaient également les aider dans leurs démarches auprès des services sociaux ou de santé et leur proposer une médiation pour rétablir les liens rompus avec leurs parents, tout en permettant à ces derniers d’exprimer leur détresse.

Une circulaire des ministres de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration du 10 avril 1997 confirme le financement, par le budget du ministère de la ville, de 36 permanences associatives d’accueil, d’écoute et d’accompagnement socio-éducatif ouvertes depuis 1995 dans des lieux banalisés.

Le ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville ouvre, sur le même principe, dans quelques grandes agglomérations, des lieux d’accueil de jeunes, proies d’un mal-être, d’un conflit familial, d’un échec scolaire ou fugueur.

Ces accueils, libres et confidentiels, leur proposent une écoute, un accompagnement psychologique et une médiation familiale, tout en leur facilitant l’accès aux services publics de médecine et d’aide sociale.

Une circulaire du 14 juin 1996 pérennise le financement, sur appel à projet et cahier des charges, de ces points d’accueil de jeunes (PAJ), destinés à prévenir la fugue et la déscolarisation.

La circulaire précise que « les jeunes marginalisés ont souvent parcouru une trajectoire faites d’échecs et de ruptures auxquels il aurait été souhaitable de prêter une plus grande attention au moment où ils se sont produits. »

Elle ajoute que : « Difficultés relationnelles, conflits familiaux, fugue, mal vivre, échec scolaire, conduites dépendantes (tabac, alcool, drogue), violence, constituent donc des symptômes qui appellent une réponse précoce à travers un travail d’écoute et de médiation, si on ne veut pas voir s’accroître le nombre de grands marginaux. »

La circulaire ne fait pas de distinction entre majeurs et mineurs. Elle précise même que « tout en sachant que ces démarches de prévention recoupent pour partie le champ de compétence des conseils généraux, le Gouvernement, intéressé par des approches expérimentales, a décidé d’encourager leur développement. » Elle insiste toutefois sur les restrictions juridiques posées à l’hébergement de mineurs sans autorisation parentale.

La qualification juridique des publics visés par ces réseaux d’accueil et d’écoute est déterminée, dans les circulaires, par des limites d’âges différentes. Elle l’est ensuite soit par une déshérence qui aurait soustrait un mineur à ses tuteurs légaux et à ses éducateurs, soit par une toxicomanie qui aurait altéré la santé ou le jugement d’un majeur.

Les prestations de services attendues des lieux d’accueil qui leur sont ouverts relèvent du code de l’action sociale et des familles et des compétences qu’il délègue aux départements, lorsqu’il s’agit de porter assistance à des mineurs. La lutte contre la toxicomanie et les maladies infectieuses qu’elle répand est, en revanche, à l’époque, de la compétence de l’État.

En expérimentant un accompagnement des jeunes de moins de 26 ans, ces circulaires inventent un droit qui s’inspire à la fois des politiques de la jeunesse et de la distinction juridique faite, avant le décret du 20 septembre 1792, entre enfants et mineurs.

Cette distinction réservait le nom de mineur aux plus de 14 ans et moins de 25 ou 30 ans, selon les coutumes provinciales qui les plaçaient sous la tutelle du maître du foyer, à moins d’une émancipation par le mariage et le départ.

Ce droit social des jeunes était déjà implicite dans les restrictions posées, par le code du travail et celui de l’action sociale et des familles, à l’accès des majeurs de moins de 26 ans à l’emploi et à l’aide sociale.

Il est rabattu par la circulaire du 12 mars 2002 qui réorganise les deux réseaux d’accueil sans plus faire mention de limites d’âge.

En 2002, le ministère de l’emploi et de la solidarité, qui a repris la politique de la ville, abroge, par une circulaire du 12 mars, les deux précédentes et regroupe les 73 PEJ et PAJ subventionnés sous l’appellation de Points d’accueil et d’écoute des jeunes (PAEJ), sous la tutelle conjointe de la direction générale de l’action sociale et de la direction générale de la santé.

La circulaire rappelle que les conseils généraux disposent de la compétence en matière d’inadaptation sociale de la jeunesse en vertu des articles L. 221-1 et L. 121-2 du code de l’action sociale et des familles.

Elle rappelle aussi l’existence de programmes d’accompagnement à la scolarité et de prévention spécialisée, de cellules de veille éducative, des programmes locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, des plans interministériels de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances et des programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS), en direction des personnes en situation de précarité, ainsi que celle d’une stratégie nationale d’action en matière de prévention du suicide.

Elle invite enfin les missions locales et les Permanences d’Accueil, d’Information et d’Orientation (PAIO) à renforcer leur prise en compte des besoins psychologiques des jeunes.

Et pourtant elle maintient des points d’accueils subventionnés par l’État pour prévenir « les conduites à risque des jeunes, qu’il s’agisse du risque de désocialisation ou de risques pour la santé ».

Elle leur enjoint d’adopter une approche généraliste plutôt que spécialisée des difficultés qui leur sont exposées et de s’en tenir à une première écoute ou à une information des jeunes sur les services publics qui leur sont destinés et sur les droits sociaux qui leur sont accessibles, dans les établissements sociaux et de santé ou de psychiatrie.

La circulaire insiste pour que les PAEJ renoncent à offrir un hébergement aux fugueurs et une thérapie, un échange de seringues ou un accompagnement social prolongé aux toxicomanes.

Elle ne fait plus mention de bornes d’âge pour caractériser le public qui doit être accueilli. Elle cite les adolescents et les jeunes majeurs rencontrant diverses difficultés en priorité mais sans exclusive.

Elle confie à un diagnostic local, réalisé par un groupe inter-partenarial, animé par un consultant et placé sous l’autorité du Préfet et du représentant du conseil général, le soin de cibler plus précisément ce public et de choisir une implantation du PAEJ qui complète l’offre existante de services publics de droit commun. La circulaire invite les préfets à réserver les nouveaux PAEJ aux quartiers d’habitat social et aux petites localités situées en milieu semi urbain.

Elle assigne à l’équipe d’accueil et d’écoute la mission de convaincre les jeunes qui viennent d’eux-mêmes chercher une aide extérieure ou sont invités à se présenter par un enseignant ou un éducateur, de se rendre dans la structure médicale ou sociale de droit commun la plus appropriée à leur état.

L’équipe doit, pour y parvenir, dissiper par un ou deux entretiens, les craintes, les réserves ou l’attitude de rejet, manifestées à l’égard de ces services publics par les jeunes accueillis.

La circulaire garantit aux points d’accueil qui satisfont le nouveau cahier des charges un financement de 2,5 équivalents temps plein (ETP), qu’elle partage cependant entre des subventions de l’État, hors celles du Fonds Interministériel de la ville qui ne peuvent dépasser 50 % du budget de fonctionnement, des subventions complémentaires du département ou d’autres financeurs et des prestations en nature telle que la mise à disposition d’un local ou de personnels.

La circulaire regroupe dans une même ligne budgétaire les 4,65 millions d’euros alloués aux 73 PEJ et PEJP par les programmes de lutte contre les pratiques addictives et 1,5 million d’euros de crédits d’action sociale de lutte contre l’exclusion et l’intégration versés aux PAJ.

En 1993, la Fondation de France lance un programme intitulé « Santé des Jeunes » pour favoriser l’accès des jeunes toxicomanes aux soins, éviter les ruptures de traitement et prévenir la transmission de maladies infectieuses.

Elle publie ensuite trois appels à projets pour l’installation, sans habilitation administrative ni référence au code de la santé publique, d’espaces santé jeunes (ESJ) dédiés à l’information des jeunes sur les risques de l’addiction aux drogues et de transmission de maladies infectieuses.

Une trentaine de lieux d’accueil sont ouverts, selon un modèle associatif dressé par un bureau d’études spécialisé en santé, par des municipalités, des hôpitaux, des missions locales ou des associations. Les deux tiers sont installés dans des quartiers urbains des Hauts de Seine et de Provence, à l’initiative de municipalités qui portent le projet ou le délèguent à une association.

La Fondation de France, qui avait financé leur ouverture par une dotation initiale et contribué aux premières années d’exploitation, se retire en 2002. Les espaces santé jeunes, passés de 27 à une quarantaine, se regroupent, deux ans plus tard, en une Fédération nationale (FESJ) qui obtient l’agrément Jeunesse et sport.

Ils demandent et obtiennent des subventions de l’État destinées aux PAEJ, sans abandonner leur mission de prévention des maladies infectieuses, puisqu’elles ne dispensent pas de soins.

Installés dans des quartiers très urbanisés, les ESJ partagent leur activité entre des consultations ou des interventions en milieu scolaire sur l’hygiène et la prévention des maladies infectieuses, assurées par des professionnels de santé, et des entretiens sur rendez-vous. Ils salarient en moyenne trois équivalents temps pleins pour un budget moyen supérieur d’un tiers à celui des autres PAEJ.

Mme Verena Sabatino, vice-présidente de la FESJ entendue par la rapporteure, décrit l’approche du mal-être adolescent dans ces lieux ouverts :

« Ils ont besoin d’un alibi pour pousser la porte, par exemple celui de questions du quotidien. Les entretiens durent une heure et demie voire deux heures. On attend. On les accompagne à leur rythme. C’est tout de suite mais ce n’est pas rapide. On partage un café. On sort. On donne du temps et de la valeur à leur parole, ce qui n’est pas le cas des réseaux sociaux et de leur quotidien.

« Ils ont besoin d’un adulte et d’un lieu pour parler de soi. Ce lieu ne doit pas être stigmatisant mais facile à mobiliser. On doit pouvoir accueillir tous les jeunes comme ils sont, de manière anonyme s’ils le souhaitent. Il faut savoir accueillir sur le flux et pas seulement sur rendez-vous, accueillir dans l’immédiateté et dans leur urgence, dans leur temporalité. »

L’un des 20 programmes du plan de cohésion sociale du 30 juin 2004 veut améliorer l’information des jeunes sur leurs droits sociaux, par la création de guichets uniques d’accueil et développer les lieux d’écoute de leurs difficultés, indépendamment du programme d’accompagnement vers l’emploi de 800 000 jeunes en difficulté par des contrats aidés conclus en mission locale ou en PAIO.

La loi de finances pour 2005 (5) ajoute 18,6 millions d’euros à l’action sociale de lutte contre l’exclusion et d’intégration du budget Santé, famille, personnes handicapées et cohésion sociale pour financer le programme des maisons-relais, la mise en place de guichets uniques sociaux et la création des points d’accueil écoute jeunes prévus par le plan de cohésion sociale.

Une circulaire de la direction générale de l’action sociale du 6 janvier 2005 (6) prescrit la création de 100 PAEJ ou antennes de proximité par an entre 2005 et 2008, en sus des 180 PAEJ existants, sans modification de leur cahier des charges.

Elle ajoute aux 6,1 millions d’euros, reconduits depuis 2002 et imputés à partir de 2006 sur le programme 177 de la mission solidarité, le supplément de 3 millions d’euros de crédits déconcentrés affecté par la loi de finances à l’ouverture des nouveaux PAEJ et indique que ces crédits peuvent être complétés par ceux du Fonds d’intervention pour la ville, qui a pris le relais du fonds interministériel.

Sans modifier le cahier des charges de 2002, la circulaire précise les attributions des PAEJ en les distinguant de celles des missions locales et des maisons des adolescents de la manière suivante :

« Les points jeunes offrent l’opportunité de moyens nouveaux, d’un appui renforcé à la présence en milieu péri-urbain et semi-rural, grâce notamment à la mutualisation des moyens des uns et des autres, d’une mise en cohérence plus forte des professionnels dans un cadre qui leur offre autonomie et complémentarité d’intervention vis-à-vis des structures spécialisées ou généralistes de droit commun. »

« Les PAEJ ont vocation à inscrire systématiquement leur action dans un réseau, dont celui des Maisons des Adolescents, là où il existe, et dont ils peuvent constituer une expression avancée en direction de jeunes non pris en compte dans le contexte actuel. »

Les 35 départements ne disposant pas de PAEJ devaient être les premiers bénéficiaires des crédits supplémentaires distribués par les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS) tandis que des antennes mobiles ou locales seraient ouvertes dans les milieux périurbains ou semi-ruraux des départements déjà pourvus d’un point d’accueil.

Les directions départementales définissent le besoin local d’un point ou d’une antenne en reprenant les diagnostics établis entre 2002 et 2004, choisissent le porteur du projet selon les termes du cahier des charges de 2002, lui allouent les 30 000 à 40 000 euros de subventions prévus par département et sollicitent les collectivités territoriales pour compléter un budget de fonctionnement minimal d’un PAEJ estimé à 108 000 euros.

La circulaire indique qu’en 2004, « l’état des lieux du dispositif national a révélé la fragilité de certaines structures existantes. Cette fragilité peut tenir à deux causes principales qui ont parfois conduit à des fermetures :

« – Une sous-budgétisation. C’est notamment le cas pour celles des structures dont les moyens financiers et en nature sont au total inférieurs à l’équivalent de 100 000 € annuels (hors antennes).

« – Une mauvaise définition du concept.

« Certains PAEJ ont dû fermer parce qu’ils ont été trop connotés ou instrumentalisés par certains partenaires, par exemple, dans une logique de santé mentale ou d’insertion professionnelle, plus attentive aux jeunes déjà connus qu’aux jeunes en souffrance souvent invisibles, ou parce que le service offert était trop restreint par rapport à l’attente du public, ou la mise en réseau insuffisante ou encore le diagnostic territorial mal posé. »

Pour éviter ces écueils, la circulaire exige qu’un PAEJ dispose d’un local indépendant, de l’autonomie juridique et rémunère au moins deux équivalents temps pleins et qu’une antenne soit ouverte au moins quatre heures par semaine.

81 PAEJ sont installés en 2005, 38 en 2006 et 5 seulement en 2007, faute de participation des collectivités territoriales sollicitées au budget de fonctionnement des établissements choisis. À la fin de l’année 2008, 239 PAEJ et 183 antennes accueillaient 75 325 bénéficiaires lors de quatre à cinq entretiens en moyenne, les mineurs étant le plus souvent reçus en présence de leurs parents.

Les subventions versées à partir des crédits du programme 177 ne couvrent plus alors que le tiers du coût moyen annuel d’un PAEJ. Elles atteignent en 2007, leur plus haut niveau de financement, à 10 millions d’euros.

SUBVENTIONS BUDGÉTAIRES ALLOUÉES PAR LA MISSION SOLIDARITÉ AUX PAEJ

(En millions d’euros par programme de la mission solidarité)

Exercice

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Programme

177

177

177

177

177

177

Dépense

9,6

10,8

9,7

9,7

8

6,9

Exercice

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Programme

106

106

106

304

304

304

Dépense

5,9

4,6

4,7

4,7

4,8

5,36 *

(*) Crédits de paiement inscrits au programme, avant application de la réserve de précaution qui devrait les réduire à 4,8 millions d’euros.

Sources : RAP pour les exercices 2006 à 2015 ; Instruction DGCS du 24 juin 2016 pour l’exercice 2016 et PAP pour l’exercice 2017.

À la suite des suppressions de crédits budgétaires décidées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et mises en œuvre entre 2010 et 2013, des PAEJ ferment ou suppriment leurs antennes locales. 80 points d’accueil créent une association nationale des points accueil et écoute jeunes (ANPAEJ) pour les représenter auprès des pouvoirs publics.

Les services rendus par les PAEJ ont préservé la plupart d’entre eux d’une fermeture consécutive à la perte de la moitié des subventions versées par l’État. Ils ont cependant dû ajuster leurs effectifs et leurs heures d’ouverture au budget dont ils disposaient encore, financé principalement par des collectivités locales qui étaient incitées à subventionner, à la même époque, les maisons des adolescents (MDA) qui se sont généralisées dans les départements.

Une première opération Pièces Jaunes lancée en 1990 par la Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France avait permis de financer des Maisons des Parents à proximité des services hospitaliers de pédiatrie.

En 1999, le groupe hospitalier du Havre avait créé une Maison de l’adolescent sur le même modèle. Suivant son exemple et encouragée par la conférence de la Famille du 29 juin 2004, la fondation lance, la même année, un second programme de prise en charge d’adolescents suicidaires, anorexiques et boulimiques dans des Maisons des Adolescents, inauguré par l’ouverture de la Maison de Solenn de l’Hôpital Cochin.

Le Gouvernement accompagne cette initiative. Le rapport d’objectifs de santé publique, annexé à la loi n° 2004-806 du 9 août 2004, lance un appel à projets pour l’ouverture de maisons des adolescents, subventionnées par l’État.

La loi de finances initiale pour 2005 affecte 3 millions d’euros aux interventions en faveur de la famille et de l’enfance du budget Santé, famille, personnes handicapées et cohésion sociale pour la mise en œuvre de la mesure d’aide au démarrage des maisons des adolescents décidée lors de la conférence de la famille 2004.

Une lettre circulaire interministérielle du 4 janvier 2005, d’application du plan national de santé mentale, en décline les objectifs, consistant notamment à limiter l’impact sur la santé de la violence, des comportements à risque et des conduites addictives, et précise les conditions d’attribution, sur cahier des charges, de subventions aux maisons des adolescents.

Le cahier des charges annexé à la circulaire reprend les missions confiées auparavant aux PAEJ et les complète par des cures psychothérapeutiques voire par des soins psychiatriques.

Il vise l’accueil, l’écoute, l’information et l’orientation des adolescents de 11 à 25 ans, que leurs préoccupations soient médicales, sexuelles, psychiques, scolaires, juridiques ou sociales, l’évaluation des situations, leur prise en charge médicale et psychologique et l’accompagnement éducatif, social et juridique des patients et de leurs familles.

Ce cahier des charges, repris par de nouveaux appels à projets lancés en 2009 et 2010 pour parvenir à l’ouverture d’une maison par département, prévoit une aide au démarrage de la Fondation de France et de la Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France et de la Direction générale de l’Action sociale et une subvention de fonctionnement dans le cadre de l’ONDAM.

Entre 2005 et 2010, 106 projets de maisons des adolescents ont bénéficié d’une aide au démarrage pour un montant global de subvention de l’État de 14 millions d’euros et deux espaces santé jeunes sont devenus des maisons des adolescents.

La concurrence entre ces maisons et les PAEJ pour les subventions publiques de l’État, des régions et des départements, manifeste dans leurs cahiers des charges respectifs même si l’on peut y voir une recherche de complémentarité, a été évoquée par les présidents de leurs deux associations nationales lors de leur audition respective par la rapporteure.

M. Marc Leray, président de l’ANPAEJ a expliqué : « qu’il n’y avait pas de personnels sanitaires dédiés aux adolescents alors qu’ils nécessitent des consultations plus longues que 10 minutes en cabinet libéral. Des fonds sanitaires ont été mobilisés en 2005 pour créer des maisons des adolescents composées de personnels sanitaires spécialisés.

« Mais 85 % des jeunes ne sont pas malades et leurs problèmes n’ont pas à être médicalisés. Le modèle unique des maisons des adolescents a été programmé dans tous les départements. Ces maisons ont aussi un volet social mais sans moyens tandis que les régions ont pris les financements existants des PAEJ pour les verser aux maisons des adolescents.

« Cela a eu des effets contreproductifs et destructeurs des liens, au profit de logiques hospitalières et d’effets de vitrine. Les maisons des adolescents sont nécessaires et nous sommes complémentaires mais confrontés à des contraintes hospitalières et politiques. »

Pour M. Patrick Cottin, président de l’Association nationale des maisons des adolescences (ANMDA) et directeur de la Maison des adolescents de Nantes :

« La réduction des crédits PAEJ en 2010 est intervenue en même temps que la montée en charge des maisons des adolescents. Un lien entre l’ouverture des maisons et la fermeture des points a pu être fait à l’époque mais la situation est, depuis, apaisée.

« Nous avons pu élaborer un document commun avec les PAEJ et souhaitons un continuum entre la prévention et les soins. Les PAEJ en sont le versant social et les maisons des adolescents le versant soin et sanitaire. Cela paraissait une complémentarité naturelle. »

Un audit, commandé en 2014 au cabinet Alenium Consultants par la direction générale de la cohésion sociale, a dressé un état statistique de 181 PAEJ, déployant 243 antennes, qui ont répondu au questionnaire adressé à l’ensemble des bénéficiaires des subventions de la ligne PAEJ du programme 304. 142 de ces bénéficiaires n’ont pas répondu.

Le rapport d’audit, rendu le 6 juillet 2015 (7), indique que 77 % des répondants sont des personnes morales qui exercent d’autres activités que la tenue de PAEJ. Il peut s’agir de missions locales, de maisons des adolescents voire de bureaux d’information jeunesse comme celui de Nevers mais plus fréquemment de municipalités ou d’associations municipales d’action sociale.

Un PAEJ accueille en moyenne 491 personnes par an, qu’il reçoit, sur appel téléphonique ou après un passage à l’accueil, en entretiens. Un tiers des reçus sont mineurs, les plus de 15 ans venant seuls aux entretiens, un tiers majeurs et 20 % sont des parents ou des adultes venant s’entretenir d’un tiers absent.

Les PAEJ accueillent des publics plus jeunes et plus vulnérables que ceux qui peuvent s’engager dans un parcours d’insertion professionnelle, sous la prescription d’une mission locale.

Les fugues et la toxicomanie sont désormais très minoritaires dans les motifs d’entretien déclarés dans les réponses. Prévalent, pour moitié, un mal-être catégorisé par la circulaire de 2002 comme relevant d’une prévention primaire ; pour près d’un tiers un facteur de risque secondaire, sans décrochage ni rupture familiale et, pour 20 %, un état tertiaire justifiant une prise en charge sans délai.

Près d’un tiers des PAEJ qui ont répondu à l’enquête ne tiennent plus aucune permanence d’accueil sans rendez-vous préalable, soit par manque d’effectif, soit, plus fréquemment, parce que la prise d’un rendez-vous engage davantage dans une démarche de dialogue et de prise en compte des propos tenus.

La distribution des effectifs salariés des PAEJ, déclarée dans les réponses et reproduite ci-dessous, confirme qu’ils rémunèrent en moyenne moins de deux équivalents temps pleins, partagés, par demi-journées, entre 2 et 5 intervenants. 16 % des PAEJ ne déclarent qu’un seul salarié ; 20 % en déclarent plus de 5.

Source : Rapport Alenium Consultants du 6 juillet 2015 pour la DGCS.

La plupart des PAEJ emploient un psychologue, qui est souvent le responsable salarié de l’association. L’effectif salarié correspond à un budget moyen de 131 500 euros, 53 % des répondants disposant d’un budget annuel de moins de 100 000 euros. Toutefois, parmi les PAEJ, les espaces santé jeunes ont des budgets de 200 000 euros en moyenne, pour lesquels ils doivent solliciter davantage de financeurs.

Si l’État reste le premier financeur des PAEJ, les dépenses budgétaires du programme 304 représentent moins d’un dixième de leurs subventions, soit l’équivalent de celles versées par les agences régionales de santé.

Lorsque le PAEJ est adossé à une mission locale ou à un bureau d’information jeunesse, il peut être financé par les crédits des contrats de ville, du budget de l’emploi ou celui de la jeunesse, qui représentent, selon l’enquête, l’équivalent des crédits versés par le programme 304.

Source : Rapport Alenium Consultants du 6 juillet 2015 pour la DGCS

Les communes et leurs établissements de coopération apportent une contribution double de celle des départements, par leurs subventions mais aussi par la mise à disposition de locaux. Régions, départements et agences régionales de santé peuvent toutefois préférer financer une maison des adolescents dont l’activité est mieux connue par des indicateurs quantitatifs que celle des PAEJ.

Lors de son audition par la rapporteure, la direction générale de la cohésion sociale a expliqué qu’elle ne se désintéressait pas des jeunes en difficulté et de l’aide que leur apportent les PAEJ mais qu’elle suivait prioritairement les majeurs qui souscrivent, au sortir de l’aide sociale à l’enfance ou d’une protection judiciaire, un contrat d’accompagnement individuel avec un département.

Elle prépare d’ailleurs une circulaire au sujet de ces contrats « jeune majeur » pour assurer la continuité de leur accompagnement. Elle étudie également le moyen, par une convention passée entre l’État, un département, une mission locale et un foyer de jeunes travailleurs, d’offrir une formation AFPA, une garantie jeune et un logement locatif, sous caution du programme Visale ou des CROUS, aux décrocheurs qui ne seraient plus hébergés par leur famille.

Mme Nadine Dussert, directrice générale, et M. Salim Didane, directeur de la prospective de l’Union nationale pour l’habitat des jeunes (UNHAJ), ont expliqué au cours de leur audition, que si les jeunes français quittent le foyer de leurs parents plus tôt que les jeunes italiens ou espagnols et plus tard que les jeunes anglais, hollandais ou scandinaves, les jeunes décrocheurs, qui ne sont ni au travail ni à l’école, sont plus dépendants que les autres des ressources familiales pour trouver un hébergement.

Les jeunes qui rompent avec leur famille, lorsqu’ils sont issus de milieux ruraux ou de quartiers défavorisés, peuvent rapidement se trouver dans une situation d’urgence, en logement précaire ou hébergés en CHRS au prix de journée, dans un public mixte qui n’est pas favorable à leur rebond.

Ces jeunes décrocheurs, qui étaient suivis par les politiques sanitaires et sociales de l’État tant qu’elles étaient liées, ne l’ont plus été lorsque la révision générale des politiques publiques a séparé la politique sanitaire de celle de cohésion sociale, jusqu’à ce que le nouveau Président de la République s’engage en faveur de la jeunesse et que le Gouvernement propose aux jeunes inactifs la garantie d’une caution locative et d’un contrat d’insertion.

Un rapport d’évaluation des maisons des adolescents, remis en octobre 2013 à la ministre des affaires sociales et de la santé par deux membres de l’Inspection générale des affaires sociales, Mme Fadéla Amara et M. Pierre Naves, recommande de lier les PAEJ aux MDA comme le préconisait la circulaire de 2005, les premiers devenant les antennes des secondes dans les quartiers difficiles ou auprès des populations isolées en milieu rural ou périurbain.

Au cours de son audition par la rapporteure, le directeur général de la cohésion sociale, M. Jean-Philippe Vinquant, a indiqué qu’à l’origine de l’audit des PAEJ, commandé en 2014, il y avait l’idée qu’en l’absence d’actualisation des diagnostics territoriaux, leur réseau était devenu redondant mais que :

« l’étude nous a dit que non, parce que la coordination locale a bien ciblé les besoins, scientifiquement ou non, et privilégié ici un PAEJ, comme le Val-de-Marne, qui a fait le choix de ne pas installer de maison des adolescents, là un PAEJ-MDA dans un seul lieu physique, ou encore un PAEJ spécialisé à Metz dans un type de population sur les jeunes errants tandis que les jeunes en moindre difficulté sont orientés vers d’autres structures.

Les représentants de la sous-direction de l’inclusion sociale, de l’insertion et de lutte contre la pauvreté ont ajouté qu’il fallait des réseaux très ouverts, à bas seuil, pour l’accueil immédiat des jeunes en difficulté et celui de leur famille ou de leurs proches, à côté des dispositifs des maisons des adolescents, plus ciblés sur les souffrances psychiques, la boulimie, l’anorexie ou la prévention du suicide.

Le rapport d’étude d’Alenium Consultants dresse une typologie des relations entre les MDA et les PAEJ, établie à la suite d’entretiens et de visites. Cette typologie indique que seuls 38 % des PAEJ ont des interactions régulières avec les maisons des adolescents. Le rapport ajoute que les partenariats existants sont « souvent bilatéraux et ne constituent pas un véritable réseau répondant aux problématiques de la jeunesse vulnérable. »

Il reconnaît que PAEJ et MDA sont en concurrence pour les subventions des agences régionales de santé et des départements alors qu’ils sont très liés aux établissements scolaires dans lesquels leurs intervenants peuvent être appelés. Les missions locales et les centres médico-psychologiques ne viennent qu’en second rang des interlocuteurs les plus fréquemment cités par dans les réponses des PAEJ au questionnaire.

Deux nouveaux cahiers des charges ont été élaborés pour les PAEJ et les MDA par le ministère des affaires sociales et de la santé, d’abord conjointement puis séparément, celui des MDA étant en cours d’approbation tandis que celui des PAEJ est retenu par la direction générale de la cohésion sociale.

Le nouveau cahier des charges des PAEJ devrait formaliser des conventions incluant des indicateurs de pilotage par l’activité qui permettent de calibrer les subventions publiques sur l’activité d’accueil et le nombre d’entretiens. En attendant sa parution, la direction générale de la cohésion sociale a publié, le 24 juin 2016, une instruction relative aux orientations stratégiques et aux principes de gestion des PAEJ qui entend augmenter leur activité et lier les subventions reconduites à la signature d’une convention incluant des indicateurs d’activité.

Cette anticipation du prochain cahier des charges pourrait suggérer que, parmi les 137 PAEJ sur 315 mentionnés dans l’instruction de 2016 comme n’ayant pas répondu au questionnaire de l’audit, l’activité pourrait être insuffisante ou trop différente de celle exigée par le cahier des charges de 2002 encore en vigueur pour que leurs subventions soient reconduites.

La rapporteure a entendu M. Jean-Louis Brison, inspecteur d’académie et M. Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales, désigné par Mme Rose Moro, pédo-psychiatre, chef de service à la maison de Solenn et professeure à l’Université Paris-Descartes pour le remplacer, sur le rapport qu’ils ont remis le 21 janvier 2016 au Président de la République.

Ce rapport, qui n’a pas été rendu public, répond à une lettre de mission interministérielle qui leur demandait comment aider les personnels de l’éducation nationale à repérer les élèves de plus de 10 ans en souffrance psychologique ou psychique, à diriger ceux qui ont été repérés vers les professionnels qui les prendront en charge et aider les personnels à accomplir les missions.

Il devrait inspirer un plan d’action qui lierait, à la suite du rapport des trois inspections générales de mai 2016 sur la santé scolaire dans le cadre de la refonte du travail des psychologues scolaires chargées de l’orientation (COPSI), par une convention académique, les établissements scolaires à un millier de professionnels de santé.

Ces derniers seraient sollicités pour des projets pédagogiques et pour une analyse de cas de mal être ou de souffrance psychique repérés dans l’établissement et inviter l’équipe médico-sociale de l’établissement à prendre en charge cette souffrance avant qu’elle ne se cristallise ou la confier au besoin à une équipe extérieure, comme celle des MDA.

Ce plan d’action ne s’étendrait pas à la prise en charge du mal-être ou des souffrances psychiques des adolescents décrocheurs, qui avait justifié l’ouverture des PAEJ, la ministre de l’éducation nationale ayant toutefois envisagé que la scolarité soit rendue obligatoire jusqu’à 18 ans. Les décrocheurs de plus de 16 ou 18 ans seraient ensuite pris en charge par le service public régional de l’orientation.

Les régions étaient depuis 1993 compétentes pour accueillir, informer et orienter les jeunes en formation professionnelle en mettant en réseau les missions locales, les PAIO et les espaces jeunes par un plan régional de développement de formation des jeunes ou en ouvrant des maisons de la formation professionnelle. Elles exercent cette mission en concurrence avec le service public de l’emploi depuis 2008.

La loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie crée un droit à l’information, à l’orientation et à la qualification professionnelles, exercé auprès d’un service public d’orientation délégué, labellisé par le comité de coordination régional de l’emploi et la formation professionnelle (CCREFP) et financé par l’État, les régions et le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP).

Le paragraphe I de l’article 16 du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté ajoute le pilotage des politiques de jeunesse et d’information des jeunes aux compétences dont la région est la collectivité territoriale chef de file désignée par l’article 1111-9 du code général des collectivités territoriales.

Le paragraphe II confie aux régions la coordination des politiques d’information à destination de la jeunesse par une rédaction de l’article L. 6111-3 qui lie au service public régional de l’orientation (SPRO) les structures du réseau information jeunesse, à savoir le Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ), les centres régionaux de l’information jeunesse (CRIJ) et 1 500 points ou bureaux d’information de la jeunesse (PIJ-BIJ), dans des conditions prévues par décret.

Sont explicitement inclus dans ce SPRO les organismes offrant aux jeunes de seize à trente ans une information sur l’accès aux droits sociaux et aux loisirs, le réseau information jeunesse et les missions locales mais pas les PAEJ.

De même, l’article 17, qui codifie un droit des jeunes à une information individualisée sur leurs droits à l’assurance maladie et à la prévention, ne fait pas mention du rôle des Espaces santé Jeunes.

La réflexion conduite par la direction générale de la cohésion sociale sur le sort des PAEJ, qui retient la parution de leur nouveau cahier des charges, semble le lier au SPRO puisque la justification de l’action 17 du programme 304 par le projet de performances pour 2017 indique que :

« Si les fonctions remplies par les PAEJ apparaissent aujourd’hui plus que nécessaires, leur maintien, voire leur renforcement, doit s’accompagner d’une réflexion sur les missions, l’organisation et le fonctionnement de ces structures. »

« La phase de concertation engagée permettra d’aboutir à l’évolution de l’offre de services des PAEJ et à la rénovation de leur cahier des charges en décembre 2016 afin d’optimiser l’offre de services des PAEJ, réaffirmer leur place dans les dispositifs d’accueil, d’orientation et d’accompagnement des jeunes en particulier avec le service public régional de l’orientation (SPRO) et veiller à leur articulation avec les autres dispositifs chargés de l’accueil et de l’accompagnement des jeunes les plus vulnérables. »

La direction générale n’a pas précisé ses intentions au cours de son audition par la rapporteure, en attendant l’adoption définitive du projet de loi.

Si l’on comprend le sens du rapprochement du réseau des PAEJ avec le Service Public Régional d’Orientation, les PAEJ ayant vocation à travailler de concert avec l’ensemble des acteurs présents sur les territoires et agissant auprès des jeunes, il ne pourrait être bénéfique qu’à une double condition.

D’abord, la spécificité de l’accueil libre et global de ces structures doit être conservée. Le fait de proposer aux jeunes en situation de vulnérabilité un lieu proche, qui leur offre une vraie écoute, sans segmenter les questions soulevées par ces derniers est précieux et fait des PAEJ des soutiens. Ils peuvent aussi être des portes d’entrée, le cas échéant, sur la diversité des accompagnements spécialisés, offerts par l’État et les collectivités territoriales.

Ensuite, un tel rapprochement n’est utile que s’il débouche sur une pérennisation du financement de ces structures économes et souples, et sur un renforcement des liens avec les autres acteurs de l’accompagnement et de la jeunesse, pour un travail plus efficace et proche des préoccupations des territoires.

Ainsi, dans l’attente des conclusions des travaux en cours et de la révision du cahier des charges des PAEJ, les financements prévus au programme 304 sont reconduits pour 2017

CONCLUSION

Lors de son audition, M. Marc Leray, président de l’association nationale des points d’accueil et d’écoute des jeunes avait bien rappelé le rôle des PAEJ et leurs spécificités, qui en font des structures originales et utiles :

« Le PAEJ est situé dans les interstices de l’organisation sociale, au point où le lien social risque de se rompre. Malgré les rigueurs financières et les variations du portage politique, le maintien de ces points de contact démontre leur pertinence. Ils trouvent des financements auprès d’une quinzaine d’interlocuteurs annuels. Combien d’institutions ont autant de financeurs ? S’ils n’étaient pas efficaces, ils auraient disparu.

On peut en effet souscrire à cette analyse. D’ailleurs les rapports qui se sont intéressés au sort des PAEJ ainsi que les auditions qui ont pu être menées pour l’élaboration du présent avis budgétaire convergent. Les PAEJ, de par leur souplesse d’organisation, leur adaptabilité aux problématiques des territoires et les rapports qu’ils ont pu nouer avec les acteurs de terrain, sont impliqués dans toutes les dimensions de la vulnérabilité des jeunes (école, formation, emploi, logement, santé, social…).

Comme le rappelle justement M. Leray : « Les PAEJ sont un dispositif d’action sociale sans équivalent parce qu’il est désinstitutionnalisé, ce qui permet de retrouver le contact avec le public décrocheur qui a perdu la possibilité de s’adresser aux institutions de droit commun. »

À travers les PAEJ, « l’État peut intervenir directement auprès du public des décrocheurs, fédérer et piloter l’action publique à tous les échelons du territoire, alors que les compétences de jeunesse sont partagées entre les collectivités et que les politiques de cohésion sociale, de la famille, et de la ville sont divisées entre plusieurs administrations. »

Au-delà de la question précise de l’évolution du rôle et du positionnement des PAEJ, c’est la question de la segmentation des politiques publiques de la jeunesse qui peut être interrogée.

En effet chaque collectivité territoriale, chaque service public dispose de ses lieux d’accueils, de ses codes et de ses démarches, sans qu’il soit facile, pour les jeunes en situation de vulnérabilité, de savoir à qui s’adresser et même sur quelles problématiques.

Cette situation est renforcée par une tendance, à cet âge de transition, à se replier sur soi et à rejeter toute forme d’institution. C’est dans ce contexte qu’il faut envisager les dispositifs de soutien à la jeunesse vulnérable, en décloisonnant les champs d’action pour se concentrer sur l’essentiel qu’est l’insertion sociale et le bien-être de la jeunesse.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, de Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, et de Mme Pascale Boistard, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l’autonomie, (voir le compte rendu de la commission élargie du 9 novembre 2016 à 9 heures (8)) la commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2017 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sur le rapport de Mme Luce Pane (solidarité) et de Mme Kheira Bouziane-Laroussi (handicap et dépendance).

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 63 rattaché à la mission.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements nos II-AS18 et II-AS19 de Mme Kheira Bouziane-Laroussi.

Mme Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis. Les interventions de Mmes les ministres leur ont permis de répondre à plusieurs questions posées dans mon rapport. Ces amendements entendent revenir sur la ponction de 29 millions d’euros sur les budgets de l’Association pour la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) et du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) pour financer les emplois d’avenir des personnes handicapées et sur l’annonce que le Gouvernement entend dispenser les universités du versement de la totalité des contributions dues au FIPHFP pour 2017. Si le premier prélèvement a pour objet de financer les emplois d’avenir, qui bénéficient notamment aux personnes en situation de handicap, l’utilisation de ces fonds pour la nécessaire sécurisation des campus, apparaît comme une ponction injustifiée des fonds destinés à la formation et à l’emploi des personnes handicapées.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Je souhaiterais abonder dans le sens de notre rapporteure pour avis. Cette décision est incompréhensible par les associations du monde du handicap et les parlementaires. Je m’en étais ouvert au ministre délégué au budget. Je souhaiterais que nous puissions revenir sur cette mesure.

M. Christian Hutin, président. Je souscris également à cette proposition.

Mme Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis. Je souhaiterais cependant retirer ces amendements, pour pouvoir retravailler leurs exposés sommaires d’ici à la séance publique.

Les deux amendements nos II-AS18 et II-AS19 sont retirés.

La Commission examine l’amendement n° II-AS20 de Mme Kheira Bouziane-Laroussi.

Mme Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis. Cet amendement rejoint la problématique défendue en commission élargie par Mme Annie Le Houerou. Il demande au Gouvernement de déposer un rapport relatif à la prise en charge par la prestation de compensation du handicap des charges induites par la vie et les soins à domicile actuellement non couvertes par la solidarité nationale.

La Commission adopte l’amendement n° II-AS20.

La Commission examine l’amendement n° II-AS3 de M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Cet amendement sollicite du Gouvernement un rapport sur la situation des personnes handicapées vivant en couple et qui ne peuvent bénéficier de l’allocation aux adultes handicapées du fait du niveau de revenu de leur conjoint.

Malgré la réponse en commission élargie de Mme la ministre sur le montant plafond des revenus considérés – elle a évoqué le chiffre de 2 500 euros mensuels – je considère que quelle que soit la situation matrimoniale de la personne handicapée, cette prise en compte la place dans une situation de dépendance vis-à-vis de son conjoint. Il s’agit souvent de femmes qui se retrouvent en situation de handicap et sans ressources du fait des revenus de leur conjoint.

Mme Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis. Je suis favorable à la demande de M. Lurton. Pour une personne en situation de handicap, être mis en situation de dépendance vis-à-vis de son conjoint est préjudiciable à la liberté individuelle et incite au surplus les intéressés à frauder sur la réalité de leur vie commune.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Cette demande est bienvenue car elle revient sur un sujet récurrent, qui met des couples dans des situations impossibles. Il est difficile d’y répondre sans un rapport complémentaire de celui rendu par M. Christophe Sirugue. Si je ne souscris pas à tout l’exposé sommaire de l’amendement, je pense qu’il est nécessaire d’avancer sur cette question.

M. Yves Censi. J’ai cosigné cet amendement car les lois de 1975 et 2005 ont permis des progrès, mais cette question pose un problème au sein du dispositif de l’allocation aux adultes handicapés. Ce n’est pas parce qu’on se marie que l’on améliore son niveau de vie ou sa situation vis-à-vis du handicap. Ce rapport pourra faire avancer le débat.

M. Gilles Lurton. Le rapport de M. Christophe Sirugue évoque ce problème ; cependant, la règle de l’irrecevabilité financière nous interdit de faire plus que de demander un rapport.

M. Christian Hutin, président. Cette situation ajoute en effet un « handicap sentimental » au handicap des personnes concernées.

La Commission adopte l’amendement n° II-AS3.

La Commission examine l’amendement n° II-AS21 de Mme Kheira Bouziane-Laroussi.

Mme Kheira Bouziane-Laroussi, rapporteure pour avis. Cet amendement demande au Gouvernement un rapport sur le nombre de médecins du travail en activité. Comme l’a évoqué la ministre en commission élargie, nombre de demandeurs d’emploi handicapés ont plus de cinquante ans. La médecine du travail est sinistrée : il faut se pencher sur la question de la désaffection envers cette profession et les difficultés d’accès. Il y a une nécessité d’avoir plus de médecins du travail dans notre pays.

M. Alain Ballay. Face au manque de candidats, sont souvent évoquées de possibles passerelles entre la médecine généraliste et la médecine du travail. Mais une passerelle pourrait être imaginée afin de permettre aux médecins du travail d’exercer en ville, ce qui renforcerait l’attractivité de la profession.

M. Yves Censi. La médecine du travail est une profession sinistrée, dont la moyenne d’âge est très élevée. De nombreux postes ne sont pas pourvus. Or une politique de santé publique doit passer prioritairement par un renforcement de la médecine du travail, indispensable notamment pour la prévention des pathologies mentales au sein des entreprises.

Suivant l’avis de ses rapporteures pour avis, la Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », tels qu’ils figurent à l’état B, sans modification.

ANNEXE 1 :
MONTANT, PAR DÉPARTEMENT,
DES SUBVENTIONS BUDGÉTAIRES ALLOUÉES AUX PAEJ

Régions, selon la dénomination de 2015

n° dép.

Département

Crédits de paiement consommés en 2015

PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR

4

Alpes-de-Haute-Provence

43 715

5

Hautes-Alpes

12 407

6

Alpes-Maritimes

124 343

13

Bouches-du-Rhône

120 701

83

Var

65 371

84

Vaucluse

18 271

BASSE NORMANDIE

14

Calvados

46 342

50

Manche

31 840

61

Orne

 

CORSE

20A

Corse-du-Sud

19 995

20B

Haute-Corse

 

BOURGOGNE

21

Côte-d’Or

30 000

58

Nièvre

21 235

71

Saône-et-Loire

10 000

89

Yonne

12 232

FRANCHE COMTÉ

25

Doubs

 

39

Jura

 

70

Haute-Saône

 

90

Territoire de Belfort

 

MIDI-PYRENEES

9

Ariège

13 307

12

Aveyron

6 552

31

Haute-Garonne

90 462

32

Gers

6 766

46

Lot

7 382

65

Hautes-Pyrénées

8 049

81

Tarn

18 513

82

Tarn-et-Garonne

10 118

AQUITAINE

24

Dordogne

 

33

Gironde

41 403

40

Landes

 

47

Lot-et-Garonne

 

64

Pyrénées-Atlantiques

 

LANGUEDOC-ROUSSILLON

11

Aude

30 850

30

Gard

19 292

34

Hérault

196 185

48

Lozère

40 000

66

Pyrénées-Orientales

95 555

BRETAGNE

22

Côtes d’Armor

114 369

29

Finistère

63 072

35

Ille-et-Vilaine

28 277

56

Morbihan

33 638

PAYS-DE-LA-LOIRE

44

Loire Atlantique

50 259

49

Maine-et-Loire

36 110

53

Mayenne

 

72

Sarthe

18 024

85

Vendée

 

CENTRE

18

Cher

13 165

28

Eure-et-Loir

13 165

36

Indre

13 165

37

Indre-et-Loire

13 165

41

Loir-et-Cher

13 165

45

Loiret

13 165

CHAMPAGNE-ARDENNE

8

Ardennes

27 344

10

Aube

 

51

Marne

 

52

Haute-Marne

17 610

LORRAINE

54

Meurthe-et-Moselle

11 000

55

Meuse

32 556

57

Moselle

81 390

88

Vosges

32 556

NORD-PAS-DE-CALAIS

59

Nord

37 000

62

Pas-de-Calais

375 419

AUVERGNE

3

Allier

 

15

Cantal

 

43

Haute-Loire

 

63

Puy-de-Dôme

 

ALSACE

67

Bas-Rhin

86 652

68

Haut-Rhin

108 455

RHÔNE-ALPES

1

Ain

21 831

7

Ardèche

10 000

26

Drôme

72 874

38

Isère

44 133

42

Loire

26 100

69

Rhône

215 629

73

Savoie

37 684

74

Haute-Savoie

 

ILE-DE-FRANCE

75

Paris

294 500

77

Seine-et-Marne

111 697

78

Yvelines

127 460

91

Essonne

253 724

92

Hauts-de-Seine

151 752

93

Seine-Saint-Denis

269 154

94

Val-de-Marne

208 660

95

Val-d’Oise

168 531

HAUTE NORMANDIE

27

Eure

 

76

Seine-Maritime

64 314

PICARDIE

2

Aisne

 

60

Oise

 

80

Somme

5 000

POITOU-CHARENTES

16

Charente

 

17

Charente-Maritime

 

79

Deux-Sèvres

 

86

Vienne

1 104

LIMOUSIN

19

Corrèze

32 522

23

Creuse

 

87

Haute Vienne

 

DOM - COM

971

Guadeloupe

57 105

972

Martinique

83 360

973

Guyane

18 432

974

Réunion

 

975

Saint-Pierre-et-Miquelon

24 332

976

Mayotte

15 000

TOTAL

   

4 688 505

Source : Direction générale de la cohésion sociale (DGCS).

ANNEXE 2 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE

(par ordre chronologique)

Ø Ministère de l’économie et des finances – Direction du budget – M. Jean-François Juery, sous-directeur de la 6e sous-direction, Mme Marguerite de Malliard, cheffe du bureau de la solidarité et de l’intégration de la 6e sous-direction, et M. Rayan Nazzar, adjoint à la cheffe de bureau

Ø Association nationale des maisons des adolescences (ANMDA) – M. Patrick Cottin, président, directeur de la Maison des adolescents de Nantes-Loire Atlantique, et Mme Gaelle Paupe, chargée de mission

Ø Association nationale des points accueil-écoute jeunes (ANPAEJE) – M. Marc Leray, président, et Mme Elisabeth Monnerat, coordinatrice du réseau

Ø Secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS) – M. Pierre Ricordeau, secrétaire général, Mme Valérie Delahaye-Guillocheau, directrice des finances, des achats et des services, M. Jean-Marc Betemps, sous-directeur des affaires budgétaires à la DFAS, et Mme Hélène Junqua, directrice du projet Mise en œuvre de la réforme territoriale de l’État par les agences régionales de santé (ARS)

Ø Fédération des espaces santé jeune (FESJ) – M. Xavier Vanderplancke, président, et Mme Verena Sabatino, vice-présidente

Ø Banque de France (*) – M. Stéphane Tourte, directeur des particuliers, et Mme-Véronique Bensaid-Cohen, conseillère parlementaire auprès du Gouverneur

Ø Ministère de l’éducation nationale – Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) – Sous-direction du socle commun, de la personnalisation des parcours scolaires et de l’orientation – M. Jean-Marc Huart, chef du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique, et Mme Ghislaine Fritsch, cheffe du bureau de l’orientation et de l’insertion professionnelle

Ø Ministère des affaires sociales et de la santé – Direction générale de la cohésion sociales – M. Jean-Philippe Vinquant, directeur général de la cohésion sociale, Mme Cécile Charbaut, adjointe à la sous-directrice de l’inclusion sociale, de l’insertion et de la lutte contre la pauvreté, Mme Aurore Collet, cheffe du bureau « budgets et performance », Mme Catherine Lesterpt, adjointe à la sous-directrice de l’enfance et famille, et Mme Mathilde Mandonnet, cheffe de projet "jeunesse vulnérable"

Ø Union nationale pour l’habitat des jeunes (UNHAJ) – Mme Nadine Dussert, directrice générale et M. Salim Didane, directeur de la prospective

Ø M. Jean-Louis Brison, inspecteur d’académie, et M. Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales

Ø Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) (*) – M. Daniel Lenoir, directeur général, Mme Pauline Domingo, experte chargée des prestations familiales et sociales, et Mme Patricia Chantin, chargée des relations avec le Parlement

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale

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